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Les applications du Big Data sont nombreuses et concrètes. Chacun peut, grâce à la
géolocalisation, se déplacer tout en ayant accès aux services utiles (cartes et guidage,
administrations, hôtels et restaurants, loisirs...). Les entreprises se réorganisent pour capter en
temps réel la demande et adapter à chaque consommateur leurs produits et leurs conseils,
leurs prix, leur publicité. Les politiques de prévention ou de sécurité publique sont redessinées
tant par la possibilité de cibler certaines actions en fonction des profils individuels (par
exemple pour la lutte contre la récidive, la fraude fiscale ou l'échec scolaire) que par la
capacité à mobiliser rapidement une population, comme ce fut le cas après l'attentat de Boston
aux États-Unis. Le succès sans appel de Barack Obama lors de la présidentielle de 2012 doit
de même beaucoup au ciblage numérique personnalisé des électeurs américains.
Le traitement de masse des données individuelles est surtout à l'origine de la plus importante
avancée scientifique des dernières décennies, avec la numérisation et le séquençage du
génome humain. La médecine s'en trouve bouleversée. La détection et le suivi des épidémies
deviennent plus précoces et précis. La connaissance en amont de certains risques individuels
permet une médecine personnalisée et prédictive. La prévention devient aussi importante que
le soin. Et le soin est redéfini en fonction du malade autant que de la maladie. Ainsi, les
traitements ciblés et individualisés du cancer ou les trithérapies contre le sida peuvent être
élaborés sur mesure.
Pour autant, il faut se garder de toute illusion technologique. La révolution du Big Data n'est
pas en elle-même miraculeuse ou diabolique. Et les fabuleux progrès qu'elle recèle vont de
pair avec des risques tout aussi majeurs : manipulation des données, intrusions et atteintes à la
vie privée, prise de contrôle par des monopoles ou oligopoles privés, pour l'heure américains
(Apple, Google, Facebook, Twitter, Amazon...), perte de la dimension critique de l'esprit
scientifique, perversion totalitaire par certains États. D'où l'urgence de réfléchir sur une base
mondiale associant acteurs publics et privés à des valeurs et une éthique, des institutions et
des normes, des droits fondamentaux : accès aux données et à leurs sources, consentement
explicite et a priori à la transmission et au partage, droit à l'oubli... D'où la nécessité de
rappeler que la démocratie est d'abord l'éducation des citoyens à l'exercice responsable de la
liberté, dont ils sont plus que jamais, dans ces temps de crise et de révolution technologique,
l'ultime rempart.