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© J. N.

Éditions & CO

601 rue Principale


Batiscan (Québec)
G0X 1A0, Canada

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives


nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Courriel : julienormandin.ca
Site Web : manuscrits@julienormandin.ca

Graphisme : Renée Champagne


Couvertures : Kalinka Bassaraba

Titre: Née pour briller / Mélissa Normandin-Roberge.


Noms: Normandin-Roberge, Mélissa, 1984- auteur.
Identifiants: Canadiana 20190029269 | ISBN 9782924853269
(couverture souple)
Vedettes-matière: RVM: Réalisation de soi. | RVM: Acceptation de
soi. | RVM: Bonheur.
Classification: LCC BF637.S4 N67 2019 | CDD 158.1—dc23
Prologue

Il est 8 h 30, le 3 août 2018.

Mon chat Paillette (oui, mon chat s’appelait Paillette) s’est sau-
vé la veille et je suis en panique à l’idée de devoir annoncer à mes
enfants qu’elle n’est pas de retour. Je dois partir le matin même pour
mes premières vacances à Boston - les dernières remontent à trop
longtemps -, et tout ce que je fais depuis mon réveil, c’est courir, cou-
rir, courir avec un mélange de panique et d’anxiété.

Je consulte mon téléphone, comme je le fais trop souvent pour


voir mes nombreuses notifications, et je vois que des filles se crêpent
le chignon dans mon groupe Facebook « Faites briller votre potentiel ».
Une histoire de cour d’école de filles qui ne respectent pas les règle-
ments, qui en dénigrent d’autres pour leur activité professionnelle et
qui oublient surtout que je ne tolère en aucun cas ce genre de com-
portement. Automatiquement, je me mets en posture de maîtresse
d’école. Je monte un peu sur mes grands chevaux et je me « crinque »
toute seule en maudissant la planète Terre que tout le monde semble
s’être donné le mot, ce matin-là, pour me pourrir la vie.

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Dans ma salle de bain, je pose le téléphone sur le bord de la
fenêtre, comme j’ai pourtant l’habitude de faire habituellement pour
commencer à me préparer, et spontanément, j’ouvre la caméra pour
démarrer une vidéo en direct. J’entre dans un grand discours de ma-
man protectrice qui demande à ses filles d’être gentilles l’une envers
l’autre. Que lorsque nous sommes plusieurs à briller, nous en inspi-
rons d’autres à le faire également. Je leur mentionne aussi que leurs
différences font en sorte qu’elles se complètent merveilleusement
bien. Je suis enflammée dans mon discours teinté d’un mélange d’une
Miss Univers et de Mère Teresa en mettant de l’avant des valeurs fé-
ministes et engagées. Les femmes sont au rendez-vous, m’envoient
des cœurs et des pouces bleus comme elles le font en d’autres temps.
Je vois que mes mots ont de l’impact et que, tout comme moi, elles
veulent retourner dans un «  mood  » positif, sans chichi de filles ja-
louses. Je sens que je suis en train de les recadrer jusqu’à ce que mon
adjointe et amie Gabrielle apparaisse et écrive ceci en commentaire :

– « Ça va, tes bobettes? »

Le cœur m’arrête… Je baisse les yeux entre deux phrases et


me rends compte du cauchemar. Le pire qu’on puisse imaginer. Ce-
lui qui est sans aucun doute notre hantise d’adolescente et qui nous
poursuit aussi après.

JE SUIS EN SOUS-VÊTEMENTS… DEVANT 15 000 PERSONNES!

Soudainement, je vois des bonhommes qui rient apparaître


dans mon écran. Je vois ma mère et mon père qui commentent proba-
blement bien assis dans le confort de leur maison tout en étant proba-
blement scandalisés : « Mélissa… franchement! »

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Je peste intérieurement contre mon foutu TDA et ma légen-
daire impulsivité qui font en sorte que j’agis sans réfléchir et que oui,
j’ai encore fait une gaffe. UNE MÉGA GAFFE!

Les commentaires fusent de toutes parts… Mais vraiment, DE


TOUTES PARTS parce que les gens comprennent à cet instant précis
qu’ils voient bien ce qu’ils sont en train de voir : JE SUIS RÉELLEMENT
EN SOUS-VÊTEMENTS ET JE NE M’EN ÉTAIS PAS RENDU COMPTE.

J’essaie de cacher mon malaise en répétant et répétant : «  Mais


non.. ce sont des shorts bobettes… c’est comme un bas de pyjama ».

Aujourd’hui, je peux vous confirmer que c’était bel et bien des


petites culottes. Aucun short là-dedans. Et ce n’était pas mes plus
belles, en plus… Davantage le style « grand-mère », un peu « lousses »
et d'un rose très délavé.

Ce jour-là, j’ai continué de faire mon « live » en essayant de


garder la tête froide et je me suis observée en me disant en même
temps à quel point j’avais grandi et que le jugement des autres ne me
touchait effectivement presque plus. J’ai réalisé, une fois de plus, que
le ridicule ne tue pas et que c’est lorsqu’on accepte d’être qui on est,
avec toutes nos imperfections et nos moments moins glorieux, qu’on
arrive à briller pleinement. Que trop souvent, on s’arrête à notre peur
de ce que les gens pourraient penser de nous et que ça met des limites
à ce qu’on pourrait accomplir.

Le beau dans cette histoire, c'est que les jours après cette er-
reur MONUMENTALE, qui aurait pu sans aucun doute me coûter ma
carrière dans un domaine plus « traditionnel », plus de 500 femmes
ont déposé des photos d’elles en sous-vêtements pour qu’on puisse

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parler davantage d’acceptation de soi. Elles ont réalisé que cet épisode
avait enclenché une réflexion qu’on a trop souvent sur notre manque
d’estime, mais aussi sur le fait qu’on se prend trop au sérieux.

J’ai énormément pleuré en lisant les témoignages. Un mélange


de peine, parfois, de voir qu’on est toutes dans le même bateau avec
notre image corporelle, mais aussi de grande fierté de voir ce mouve-
ment qui est parti d’une idée que j’avais eue en tête quelques années
auparavant et qui me permettrait de prendre mon envol. J’ai souvent
affirmé qu’au tout début, je me disais que si cinquante femmes rejoi-
gnaient ma philosophie de paillettes, j’en serais très heureuse. Jamais
je n’aurais pu imaginer que ça deviendrait ce que c’est maintenant.
Qu’autant de personnes vibreraient à l’unisson avec ma folie.

J’ai répondu à un professeur du HEC, qui m’a contactée à la


suite du « défi bobettes », que je n’avais aucune idée de comment tout
ça s’orchestrait. Il essayait de creuser ma stratégie et je n’avais rien
d’autre à lui dire que : « J’ai vraiment fait un live alors que sans m’en
rendre compte, j'étais en sous-vêtements, et ça a donné quelques jours
plus tard l'élan à des centaines de belles femmes de partout dans la
francophonie mondiale de se dévêtir consciemment sur les réseaux
sociaux. »

C’est exactement la même chose que je répète depuis les tout


débuts  : C’EST JUSTE SURRÉALISTE! Rien de tout ça n’était planifié,
autre que mon propre besoin de m’émanciper sans savoir par où j’al-
lais commencer.

Ça fait environ vingt-cinq fois que je recommence l’écriture


de ce livre. Que j’écris et que je me critique. Que j’ai le syndrome de
l’imposteur dans le tapis en me disant que je ne suis pas une auteure

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et en me questionnant sur le droit que j’ai d’écrire UN LIVRE… Pas un
statut Facebook, UN LIVRE! Comme ceux que j’aime tant lire. Comme
les grands noms que je dévore depuis que je suis toute petite. Comme
écrire des mots que des gens liront.

Puis, j’ai compris pourquoi j’avais autant de difficulté.

Parce que ce que je dois écrire n’est pas à propos de Mélissa


Normandin Roberge, mais bien à propos de ce mouvement qui est plus
grand que nature. Il y a eu l’épisode des 500 femmes en sous-vête-
ments, mais c'est depuis les tout débuts, en fait, qu’on grandit et qu’on
évolue ensemble. Il y a eu des naissances, des décès, de magnifiques
victoires, des moments difficiles, des gens qui dansent ensemble sur
Despacito de Saint-Justin Bieber, des moments de folie, des jours où
l'on a envie de tout abandonner et d’autres où l'on pourrait tout sim-
plement conquérir le monde.

Je n’ai pas décidé un jour de créer ce mouvement; je n’avais


alors aucune idée qu'il entraînerait ce résultat. Paillettes Inc. était une
façon pour moi de m’exprimer et de reprendre confiance en mes capa-
cités. De reprendre le pouvoir sur ma vie et de me libérer.

C’est donc devenu hyper-clair : le livre que vous tenez entre


vos mains, c’est à propos de toutes ces belles femmes (et quelques
courageux hommes) qui ont décidé d’aimer ce que représente mon
message, qui en est un d’acceptation, de bienveillance et de libération.

C’est à propos de cette force qui nous unit toutes et qui fait en
sorte qu’on devient simplement celles qu’on a envie d’être.

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C’est évidemment à propos de cette idée qui suggère que plus
rien ni personne ne pourra désormais nous empêcher de briller.

Ce n'est pas un livre de recettes toutes faites pour accéder au


bonheur en suivant le plan de A à Z, parce que je ne suis pas très
bonne pour suivre les instructions. J’ajoute toujours ou modifie ce que
je vois pour l’adapter à ma vie, et je pense que vous devriez en faire de
même. Vous seule savez ce qui est bon pour vous. Même si le gâteau
devrait supposément se faire d’une telle façon, vous avez toujours le
droit d’ajouter des ingrédients ou de les modifier pour respecter tota-
lement ce qui a du sens.

Ce n'est pas non plus un livre qui vous dira de faire tout
comme moi. Seigneur Dieu, que je suis loin d’être parfaite! Que mon
parcours a été jalonné de nombreux essais-erreurs et que je n’ai en-
core aucune idée, à l’instant où j’écris ces lignes, si je peux apporter
une quelconque valeur aux autres en partageant mon expérience!

Bien sûr, je partagerai avec vous des conseils et des trucs pour
être une Paillette, mais aussi pour vivre pleinement une vie qui a du
sens, une existence riche, libératrice et non-conformiste, mais j’ai
aussi sincèrement envie de mettre en lumière cet univers parallèle
qui m’a donné un second souffle et qui m’a tellement fait grandir.

Humblement et avec beaucoup d’humilité. Sans prétendre


avoir la science infuse. Juste en écoutant mon cœur et en me bran-
chant sur ma mission.

Je sais maintenant pourquoi je suis sur cette planète et que


si j’ai eu des moments très sombres dans ma propre vie, c’était
aussi pour aider éventuellement des Annie, Nadine, Joëlle, Rachel,

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Katee, Johanne, Véronique, Sabine, Manolita, Marie-Belle, Kim, Adèle,
Stéphanie, Audrey, Geneviève, Émilie, Alexine et des milliers d’autres.

Parce que mon histoire est aussi la vôtre. Parce qu’au bout du
compte, c’est ensemble qu’on pourra s’élever de plus en plus.

Ce matin-là, qui aurait pu être mon pire cauchemar, est


devenu une prise de conscience fulgurante  : C’EST GROS ET BEAU,
C’T’HISTOIRE LÀ! Et oui, tout a pris son sens…

Pour votre information, Paillette la chatte n’est jamais reve-


nue. J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. J’ai passé un séjour
à Boston à essayer de relaxer, mais en gérant mon angoisse d’avoir
abandonné mon chat je ne sais trop où et en essayant d’expliquer
vingt-cinq fois à ma mère que je n’avais VRAIMENT pas fait exprès
d’être en sous-vêtements devant 15 000 personnes. Sachez que votre
lecture sera ponctuée de moments tout à fait divertissants parce que
ma vie est aussi une sitcom…que je le veuille ou non.

Je vous souhaite une très belle lecture et que vous puissiez


trouver à travers celle-ci VOTRE paillette!

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Chapitre 1 

Le pouvoir de la paillette

Nous sommes tous des étoiles, suffit


d’apprendre à briller - Marilyn Monroe

Ma vie vient de changer. Complètement. Sans le savoir ou en


prendre conscience réellement, les choses ne seront plus jamais les
mêmes. C’est comme si ce simple moment venait de s’ancrer à tout
jamais dans ma tête pour forger ce qu’allaient être les prochaines an-
nées, voire décennies de mon existence. Avec du recul, je pense que
beaucoup de croyances ont été enregistrées dans mon subconscient à
partir de cet instant précis.

C’est en 1988. J’ai quatre ans. Je suis assise à côté de mon père.
Je viens de terminer d’écouter Dirty Dancing. Je n’ai pas tout com-
pris de l’histoire. Je n’ai pas encore mesuré l’impact de ces sept mots
cultes : « On ne laisse pas Bébé dans un coin ». Je ne sais pas encore
que, finalement, c’était un film un peu osé à faire écouter à une fillette
de quatre ans (Papa, franchement…!), mais je vous jure que ma vie n’a
plus jamais été la même par la suite.

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Elle est devenue un genre de comédie musicale permanente.
Toutes les fois où je changeais de pièce, j’entendais The Time of My
Life démarrer et je prenais la posture fière qui allait avec  : la tête
haute et les épaules relevées. J’ai rêvé longtemps de quête d’amour
impossible (ce qui explique sans aucun doute quelques patterns que
j’ai. Je suis tombée secrètement amoureuse de Patrick Swayze (ce qui
explique aussi d’autres patterns que j’ai), mais j’ai surtout voulu goû-
ter à cette espèce de monde parallèle qu’est la musique et la danse.
Quelques semaines après, je suppliais mes parents de m’inscrire à
des cours de piano, à des cours de danse, et je répétais sans arrêt des
chorégraphies dans mon salon en m’imaginant être sur scène devant
une foule.

Je sais que c’est un peu jeune, quatre ans, pour comprendre


que notre vie sera à tout jamais transformée et, en fait, on ne le sait
pas sur le coup mais suivez-moi. Vous saisirez tout, je vous le promets.

Avec les cours de danse sont également venus les spectacles.


Avec des costumes à paillettes. Or, c’est là que tout est devenu clair :
LA PAILLETTE.

C’est alors devenu une quête. J’en mettais partout sur mes
vêtements et sur mes bricolages faits à l’école. J’étais captivée, lors de
la période des fêtes de Noël, d’en voir autant. Évidemment, je suis une
enfant issue de la génération Walt Disney, donc, inutile de vous dire
que je possédais tous les films de la collection, que je repassais sans
arrêt. Je suppliais mon père d’en mettre dans mon décor de chambre.
Une vraie lubie sympathique qu’on trouve mignonne quand on re-
garde une petite fille en disant haut et fort  : «  C’est réellement une
VRAIE petite fille. »

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Mais c’est resté. D’aussi loin que je me souvienne, j’en ai tou-
jours porté. Même adolescente. Mais c’était rendu moins mignon.
On se moquait davantage de tout ça en analysant mes tenues et en
trouvant que j’en faisais beaucoup trop. J’ai commencé peu à peu à la
cacher. À en avoir honte. Je montais quand même sur scène chaque
fin d’année pour chanter parce que c’était mon moyen de connecter
même avec ceux qui se moquaient de moi. C’était ma façon de me
sentir en contrôle, aussi étrange que ça puisse paraître, d’être presque
invincible. Je continuais sans doute de reproduire le film Danse las-
cive PARTOUT en chantant, en jouant du piano, en dansant, en étant
dans MA comédie musicale, où je me réfugiais parfois quand le monde
extérieur me paraissait trop loin de ma réalité. Il n’y a aucun doute sur
le fait que j’étais une artiste dans ma tête, dans mes actions, dans mes
projets.

C’est la suite qui commence à être intéressante... de voir


jusqu’où une obsession peut aller.

D’ailleurs, vous qui lisez ces lignes, peut-être est-ce la pre-


mière fois que vous entendez parler de moi. On vous a peut-être
conseillé de lire ce livre ou on vous a encouragé à découvrir ce que je
fais et, depuis le début, vous vous dites : « MAIS DE QUOI TU PARLES?
C’EST QUOI L’AFFAIRE AVEC LA PAILLETTE ET LE POUVOIR, ET DANSE
LASCIVE? JE SUIS VRAIMENT EN TRAIN DE LIRE UN LIVRE D’UNE
FILLE QUI DIT QUE SA VIE A CHANGÉ EN REGARDANT UN FILM DE
PATRICK SWAYZE… À QUATRE ANS? »

Et je vous comprends…

Laissez-moi donc, avant d’aller plus loin, faire les présenta-


tions d’usage : Mélissa Normandin Roberge. Je n’écrirai pas mon âge,

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parce que je n’ai aucune idée du moment où vous lirez tout ça et que
je ne veux pas fausser les données. Je suis native d’une ville au Qué-
bec qui s’appelle Shawinigan. Je suis mère de trois beaux enfants,
Georges-Édouard, Emma-Rose et Victor, et mère de cœur d’un beau
grand jeune homme appelé Jérémy. J'ai vécu une enfance ordinaire,
mais en même temps exceptionnelle parce que remplie d’amour, une
adolescence un peu plus chaotique parce que j’étais très entêtée, un
parcours d’adulte qui a démarré beaucoup trop tôt pour la même rai-
son que le parcours d’adolescente chaotique. J'ai été entrepreneure
toute ma vie. Danse lascive aura très certainement contribué à ce be-
soin parce que très tôt, j’ai commencé à vouloir monétiser mes idées
pour pouvoir ensuite les concrétiser en projets du genre me faire fa-
briquer des costumes à paillettes que ma mère refusait de financer
et que, donc, je devais moi-même trouver des solutions. C’était aussi
pour acheter beaucoup d’accessoires pour faire de la magie blanche.
Mais ça, c’est une tout autre histoire.

Donc, de l’organisation de marchés aux puces en passant par


une pâtisserie mobile ou encore la classique entreprise de défrichage
de mauvaises herbes, ce n’était pas rare aussi que ma mère, les mer-
credis d’été, voyait une trentaine de personnes âgées débarquer dans
notre cour arrière parce que c’était soir de spectacle dont j’étais la
metteure en scène.

Tout le monde avait payé 2 $, devait amener sa chaise et était


surtout obligé de regarder L’INTERMINABLE représentation où s'en-
chaînait tout mon répertoire, évidemment constitué de beaucoup de
chansons de Danse lascive. Tout ça avant l’âge de douze ans.

J’étais une enfant très reposante. Mais vraiment TRÈS, TRÈS


reposante!

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Je vous raconte tout ça pour que vous puissiez comprendre
à quel point lorsqu’une idée nous habite, elle peut nous suivre long-
temps. Que ce qui germe en nous durant l’enfance n’est souvent pas
très loin de ce qui pourrait donner vie à nos rêves lorsqu’on est adulte.
À condition d’écouter les signes, nos passions et notre intuition.

Je remarque dans mon historique que beaucoup de choses re-


viennent encore et encore : l’enseignement, les spectacles, la création,
les rassemblements.

Mes pauvres petits frères (je suis l’aînée et la seule fille d’une
famille de trois enfants) devaient parfois être les élèves de Mélissa la
professeure, en s’assoyant devant l’immense tableau que mes parents
nous avaient donné, pour suivre mes cours de français et de mathé-
matiques. Je gardais alors TOUS mes cahiers à la fin de CHAQUE année
scolaire et je leur faisais la classe jusqu’à ce qu’ils aillent se plaindre à
mes parents pour aller jouer dehors. C’est donc à ce moment que j’en
profitais pour les costumer et leur apprendre la nouvelle chorégraphie
du spectacle qui allait avoir lieu le soir-même. À eux, je greffais mes
petites voisines et mes meilleures amies Amélie et Josie. Je ne leur
laissais pas le choix… VOUS SEREZ DU SPECTACLE!

C’était comme ça également au secondaire. Sauf que j’avais


maintenant l’expérience et que j’avais affiné mon pouvoir de persua-
sion. J’avais surtout compris comment me faire aimer des gens de mon
niveau et des plus vieilles de l’école en négociant avec la direction des
périodes libres pour aller répéter dans le gymnase nos numéros pour
le gala de fin d’année. J’avais donc des gens TRÈS motivés à participer
à mes idées parce que cela leur faisait manquer de l’école. Je m’occu-
pais de faire fabriquer les costumes, d’obtenir des commanditaires
pour m’assurer que ça entre dans le budget, j’écoutais les vidéoclips

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de mes artistes préférés pour reproduire les mouvements et pouvoir
les enseigner ensuite, et j’étais TELLEMENT fière de pouvoir faire ré-
péter un grand groupe qui attendait avec impatience nos rencontres.
Pendant ce temps-là, j’étais à l’abri des moqueries. C’était aussi « nor-
mal » que les habillements un peu excentriques soient de mise : dans
le cadre d’un spectacle, tout était permis! Je voyais aussi à quel point
la danse et la musique pouvaient réunir tellement de gens différents
qui, sur papier, n’avaient rien en commun mais qui ensemble, réus-
sissaient à accomplir de grandes choses qui étaient saluées par une
école au complet. C’était une immense fierté.

On m’a d’ailleurs souvent reconnue comme ça. J’ai pu être élue


présidente d’école parce que j’avais cette facilité à rallier les gens.
Comme c’était une petite école secondaire avec à peine 200 élèves, j’ai
fini par me se sentir en sécurité et acceptée. Complètement même. Il
faut dire que j’avais aussi trouvé le truc infaillible pour non seulement
obtenir de nombreux votes, mais aussi une appréciation totale de mes
concitoyens  : une activité spéciale chaque vendredi, et donc, annu-
lation des cours. Les professeurs me trouvaient vraiment reposante.
Très reposante.

Puis à seize ans, comme ça, sans avertissement, j’ai quitté la


maison familiale. Pour vivre mon histoire d’amour impossible avec
un homme beaucoup plus âgé que moi. C’est là que je vois le rap-
prochement avec Danse lascive. La jeune adolescente qui, envers et
contre tous, brave le monde entier pour vivre son histoire passionnée
avec son enseignant. LA MÊME AFFAIRE. PRESQUE.

J’ai fait beaucoup de chagrin à mes parents, qui n’ont rien


vu venir. Qui ne comprenaient pas que dans ma tête, j’étais «  une
grande  », mais qui savaient que lorsque j’avais une idée, je faisais

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TOUT pour l’accomplir. Ils m’ont vue, à leur grand désespoir, m’en
aller avec cet homme dans un appartement miteux dans un quar-
tier pas très recommandé, m’ont ensuite vue acheter, le lendemain
de mon bal de finissants, ma première maison à l’âge de dix-sept ans
et ont décidé ensemble de lâcher prise parce qu’ils savaient très bien
qu’ils allaient me perdre s’ils me confrontaient. Parce qu’une histoire
d’amour impossible comme dans les films, on n’enlève pas ça de la
tête d’une adolescente têtue, qui voit grand et qui n’a jamais aban-
donné quoi que ce soit jusqu’à maintenant. On sait que ce sera peine
perdue de lui répéter que c’est une très mauvaise idée, qu’elle finira
par le regretter et que c’est loin d’être sain, parce que tout ce qu’elle
a en tête, c’est une histoire à la Johny et bébé Johnny et Bébé. Beau,
romantique et spectaculaire. Quand on est les parents de cette ado-
lescente, on se pile forcément sur le cœur, et par-dessus tous, on taie
nos principes de vie, en se disant probablement qu’on aime mieux la
garder près de nous.

Ils ont voulu me donner une leçon en m’enseignant à la dure


que chaque décision vient avec des conséquences. En arrêtant de
payer les frais de mon école privée, en refusant aussi d’assumer les
frais de mes cours de piano et de chant, moi qui ne vivais que pour
ça, et en me laissant me débrouiller par moi-même. C’est là que la
première entreprise est née, l’école de musique Les Maëstros, fon-
dée en 2002, de toute ma naïveté, mais réunissant mes plus grandes
forces : l'enseignement, la musique et mes capacités à rassembler les
gens autour de moi. Ce qui devait être au départ une façon de payer
mes études et de faire mon chemin dans ma vie d’adulte est rapide-
ment devenu un projet de vie et mes premières vraies incursions dans
le monde entrepreneurial. C’est complètement fou de voir que c’est
souvent dans des moments de difficulté que naissent les meilleures

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idées. Cette école m’a autorisé et m’a redonné envie aussi de redécou-
vrir la paillette, puisque « École de musique » rime avec spectacles.

Spectacles rime avec costumes.

Costumes rime avec paillettes.

Paillettes rime aussi avec décors.

Avec comédies musicales.

Avec scène finale de Danse lascive.

Bref, tout était cohérent et me remplissait de fierté. C’était fa-


cile. Je ne pouvais pas croire que je gagnais de l’argent à faire ce que
j’aimais tous les jours. Avec autant de plaisir, de liberté et surtout avec
une volonté de prouver à la planète entière que j’allais réussir.

Dans les prochains chapitres, je parlerai évidemment de cette


école magique. Parce qu’elle seule mérite SON chapitre. Mais elle m’a
réellement reconnectée à quelque chose qui était là en moi.

Une amie me disait dernièrement qu’une existence qui a du


sens, c’est justement lorsqu’on se permet de faire les choses qui nous
semblent trop faciles, trop belles pour être vraies. Qu’on met juste-
ment tout ça de côté en se disant  : «  C’est impossible que ça fonc-
tionne… c’est trop évident. C’est souvent là qu’on commence à se
chercher de vraies études ou un vrai travail et qu’on passe à côté de
tout ce qui nous tient réellement à cœur. Pensez aux moments où

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vous étiez enfant. À ce qui vous faisait vibrer. À ce qui vous paraissait
magique et ce à quoi vous pouviez consacrer des heures et des heures.

Peut-être que c’était d’habiller vos Barbies en imaginant des


looks et en combinant tout ce que vous trouviez.

Peut-être que c’était de leur fabriquer des vêtements sur


mesure.

Peut-être que c’était de soigner des animaux.

De prendre soin de vos grands-parents.

D’additionner des chiffres sur votre calculatrice toute la


journée.

D’écrire des livres ou d’en lire à n'en plus finir.

Puis on s’en éloigne étant adulte, parce qu’on nous demande


de mettre nos « lubies » de côté et qu'on nous dit que notre existence
ne doit pas être faite de ça. Que ce devra être plus sérieux. La VRAIE
affaire.

Moi, c’était la musique. La danse. Le chant. L’organisation. Eh


oui, ça m’apparaissait tellement facile que je ne pouvais m’imaginer
que mon quotidien pourrait être fait de ça. Je ne comprenais pas en-
core non plus qu’on est la somme de TOUTES nos actions. Que mon
chemin jusqu’à maintenant me menait exactement là où je devais
être. Que chaque élément qui s’était imprimé dans ma tête était en
train de constituer exactement la personne que je devais devenir.

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Je pense sincèrement que pour vivre une existence Paillette, il
faut justement se rapprocher le plus possible de l’enfant ou de l’adoles-
cent qu’on a été, et ce, peu importe le passé qu’on a eu. Se rapprocher
de l'être qui n’a pas encore été trop contaminé par les « non-possibili-
tés » qu’on nous évoque avec les années et qui ne s’est pas encore éloi-
gné de sa véritable nature. Celui qui ne se pose pas trop de questions
à savoir ce qui est vrai ou non, ce qui est mal ou bien. L'être qui puise
sa force dans ses talents sans savoir encore qu’il a des faiblesses et qui
n’a surtout pas encore trop peur de ce que les gens diront ou atten-
dront de lui. Certains parmi nous ont eu une existence relativement
facile, avec des parents aimants et encourageants, tandis que d’autres
ont connu une toute autre réalité, mais nous avons tous un jour eu des
passions ou des envies qu’on a réprimées en devenant adulte.

Quel est le rapport avec la paillette, outre le fait que c’est


beeeeeeeeen beau sur des costumes?

Avec les années, j’ai réussi à trouver une explication logique


quant à mon obsession pour elle. Une façon presque rationnelle de
diffuser mon message. J’ai envie de vous faire un bref cours d’histoire
sur son origine. C’est mon livre et j’ai le droit d’en faire ce que je veux.
On pense que la paillette est futile et superficielle, mais elle existe
depuis des milliers d’années. Il y a 30 000 ans, nos ancêtres utilisaient
déjà le mica qui, mélangé avec d’autres éléments donnaient un effet
pailleté sur les peintures rupestres. Les Mayas utilisaient également
ce matériau pour faire briller les murs de leur temple.

Ce n’est donc pas d’hier que l’être humain a cette fascination


pour la paillette et que nous sommes attirés vers elle.

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La paillette, telle qu’on la connait aujourd’hui, a cependant été
créée par accident en 1934 au New Jersey par un américain. Henry
Rushman voulait se débarrasser du vieux plastique en le broyant. Il
s’est rapidement aperçu que les «  déchets  » captaient la lumière et
s’illuminaient comme par magie.

J’ai trouvé toutes ces informations sur internet, je les ai vali-


dées. Je suis donc presque une scientifique et vous pouvez poursuivre
votre lecture en étant maintenant convaincue que ce livre sera fort
intéressant.

Je ferme cette grande parenthèse éducative.

Il faut vraiment comprendre que malgré le fait que je m’en sois


éloignée pendant quelque temps (ça aussi, ce sera l’objet d’un chapitre
au complet), à la base, il n’y a rien d’autre à savoir que j’aime tout sim-
plement la paillette. Si bien que j’en ai partout : sur les comptoirs de la
cuisine, sur les poignées d’armoires, sur des coussins décoratifs, sur
les murs de mon bureau, sur mes vêtements. Bref, partout!

J’ai toujours été captivée par la lumière qu’elle dégage, par le


simple fait que lorsqu'il y en a dans une pièce, nos yeux sont automa-
tiquement attirés vers elle. La paillette n’a pas de forme, pas de cou-
leur précise. Tout ce qu’elle fait, c’est qu’elle capte la lumière.

Elle ne se pose pas de question. Elle brille, point! Elle ne


cherche pas à éclipser les autres. Elle est, tout simplement.

On l’associe beaucoup aux événements festifs. Les célébra-


tions de Noël, les mariages, les bals de graduation, les galas d’Hol-
lywood. On la retrouve TOUJOURS dans ces événements et, pour moi,

23
c’était donc très logique qu’on l’arbore tous les jours puisqu’à mon
avis, la vie en soi doit être une célébration. Chaque journée est un réel
privilège.

On la voit partout dans la nature. Remarquez bien lorsqu’une


fine couche de neige tombe. Pas celle toute mouillée, la légère, celle
qui fait du bien à l’âme. Il y a de la paillette PARTOUT. Le soir, c’est
juste MAGNIFIQUE!

Lorsqu’on regarde l’océan ou un lac calme quand le soleil


plombe : SHITLOAD DE PAILLETTES PARTOUT!

Quand on a une belle nouvelle, un événement heureux dans


notre vie, une idée géniale, nos yeux brillent instantanément.

Elle est unique et en même temps, une paillette qui brille, c’est
beau, mais lorsqu’on en met plein côte à côte, c’est juste MAGIQUE.
C’est IMPOSSIBLE de les ignorer.

À ce moment-là, j'ai fait un mégaparallèle avec les femmes.


Avec notre capacité à s’élever ensemble. Parce que trop souvent, on
s’isole dans notre réalité, on se jalouse, on s’envie, alors que je pense
qu’il faut apprendre à briller ensemble. C’est de cette façon qu’on
pourra changer les choses et prendre notre place. En captant la lu-
mière, NOTRE lumière. En inspirant celles qui nous côtoient à le faire.
En vivant selon nos règles, nos valeurs, notre façon de faire et en as-
sumant qu’on mérite cette place au soleil. En arrêtant de se cacher, en
ne se taisant plus sur ce qu’on veut et ce qu’on souhaite, et en sachant
que peu importe qui on est, notre seul et unique travail, c’est de bril-
ler. Point.

24
Même si on est une mère.

Même si on est une amoureuse.

Même si on est une sœur/amie/entrepreneure/employée, etc.

C’est là que Paillettes INC. ou du moins l’idée est née. De créer


un univers parallèle qui pourrait me ressembler à 100 % parce que
je n’en pouvais plus du cadre. Du moule. De me mettre une pression
d’être quelqu’un d’autre parce que c’était ce qu’on attendait de moi.
Surtout, je trouvais que trop souvent, les femmes avaient tendance
à entrer en compétition au lieu de s’accomplir ensemble (la rassem-
bleuse revenait au grand galop).

En observant autour de moi, je me suis mise justement à voir


émerger des « Paillettes emblématiques » qui l’étaient sans le savoir.
Des entreprises qui faisaient les choses différemment tant par leurs
produits que par leur façon d’être avec leurs employés. Des « Google »
qui étaient les spécialistes en ressources humaines qui choisissaient
justement de miser sur les besoins humains de leurs employés en
leur offrant un environnement de travail qui ne ressemble à aucun
autre. Des « Apple », qui ont toujours mis de l’avant une vision unique,
futuriste et grandiose en racontant des histoires auxquelles les gens
allaient s’identifier. Avec des valeurs qui allaient rejoindre des mil-
lions de personnes partout sur la planète.

Les réseaux sociaux me montraient à tous les jours des per-


sonnalités publiques affichant leur unicité et recevant parfois des
commentaires à faire pleurer même le plus dur à cuire mais qui,
pourtant, restaient debout. Fidèles à qui elles étaient. Des Marie-Mai,
Véronique Cloutier, Oprah Winfrey qui inspiraient les femmes à être

25
elles-mêmes en étant à la fois ambitieuses, carriéristes et en demeu-
rant des femmes intègres et près de leurs valeurs.

Je me suis réellement mise à voir de la «  paillette  » partout


autour de moi en comprenant que cette idée-là n’allait pas s’en aller.
Que je devrais la réaliser parce qu’elle était en train de devenir vis-
cérale. Un besoin d’accomplissement qui ne pouvait plus être étouffé,
qui allait sans aucun doute être présent chaque jour si je n’allais pas
au bout de l’idée et qui ne demandait qu’à émerger sans trop savoir
encore quelle direction il allait prendre. Il allait avoir de gros impacts
sur ma vie personnelle et professionnelle parce que de grandes déci-
sions devraient être prises.

Comme une paillette, j’ai choisi d’arrêter de me poser des


questions. Je suis revenue à mes bases, à l’adolescente que j’étais en
misant sur mes forces, mes talents, mes idées de grandeur, et j’ai re-
trouvé mon pouvoir. Celui de la paillette. Celui qui peut nous faire
briller. Celui qui fait en sorte qu’on arrête de s’excuser de qui on est.
Celui qui a le potentiel d’amener les autres dans notre lumière. Celui
qui peut soulever des montagnes.

Je pensais honnêtement que cette idée complètement folle, qui


était au départ de devenir simplement conférencière, allait rejoindre
au maximum cinquante personnes. Que j’en serais d’ailleurs très
heureuse si c’était le cas, parce que mon discours pouvait peut-être
inspirer. Or, elle est devenue ce projet qu’est Paillettes INC., qui allait
toucher des milliers de femmes pour qui le message a résonné. Plus
rien ni personne ne devait nous empêcher de briller. Il fallait qu’on
puisse se tenir les coudes ensemble et reprendre ce pouvoir qui est à
l’intérieur de nous toutes.

26
Alors qu’on me disait que c’était impossible, que ça ne mar-
cherait jamais, que j’étais une impostrice, une fille pas sérieuse, par-
fois superficielle, pas intelligente ou pas crédible, mes mots et mes
actions ont visiblement trouvé un chemin vers les oreilles et le cœur
de femmes et d’hommes qui étaient prêts à les recevoir. La suite m’a
prouvé que j’avais eu raison d’écouter ce que la vie me demandait.

En résumé, le pouvoir de la Paillette, c’est :

– Vivre une existence qui a du sens en revenant aux idées


et aux lubies qui nous habitent depuis notre enfance et notre ado-
lescence. Comprendre que ces passions, ces intérêts qu’on avait à
l’époque sont encore en nous et qu'ils méritent qu’on leur accorde
notre attention car ils ont forgé qui nous sommes et nous permettront
très certainement de revenir à notre lumière.

– Se laisser bercer par le flow, car c’est justement quand c’est


trop facile ou trop évident que le chemin s’y trouve sans aucun doute.
Ce n’est pas obligé d’être nécessairement difficile, compliqué; la pail-
lette a simplement besoin de lumière pour exister pleinement. Sim-
plement.

– Redécouvrir et miser complètement sur son unicité. Même si


elle dérange, même si elle nous fait peur. Vouloir célébrer la vie à tout
moment parce que c’est un privilège en soi et que c’est magnifique
une paillette qui brille, mais encore plus lorsqu’elles sont nombreuses.
C’est ensemble qu’on peut arriver à grandir et non individuellement,
chacun pour soi en contemplant la lumière de l’autre tout en espérant
avoir les mêmes résultats.

27
© Photo : Maryline Tremblay
28
« On ne laisse
pas Bébé dans
un coin.»

29
30
Chapitre 2

Pas une fille de line-up

La chance est bien souvent un hasard qui


se provoque – Confucius

Avril 2017. Ça fait maintenant un peu plus d’un an que ma


compagnie Paillettes INC. est lancée. Je viens de terminer ma plus
grosse conférence à vie devant une salle de 900 personnes à l’Acadé-
mie Zéro limite de Martin Latulippe. L’année dernière, j’étais au même
endroit, assise dans la salle à rêver d’être sur cette scène et là, c’est
mon tour. Mon moment à moi.

Avant la conférence, je suis particulièrement émotive. Ça


brasse beaucoup dans ma vie personnelle. Je suis à quelques jours
de quitter pour le Vietnam, décision coup de tête que j’ai prise dans
la même semaine. Je suis accompagnée de Samuel, mon ancien élève
que j’ai vu grandir et qui sera sur scène avec moi comme guitariste.
Je me rends compte du chemin parcouru sans en mesurer complète-
ment l’impact.

31
Mes enfants sont là. Mes parents, mes frères, ma grande amie
Karen, quelques tantes et oncles également. Je suis un peu comme
dans un rêve. Je ne me rappelle plus trop ce que j’ai fait sur scène et
pourtant, j’ai l’impression d’avoir profité de chaque minute, mais c’est
énorme à gérer pour moi.

Mes élèves sont apparus à la toute fin pour interpréter avec


moi Fix You, de Coldplay. Personne dans la salle ne sait qu’ils sont pré-
sents. C’est de la pure magie. Ils me voient réaliser un de mes rêves,
alors que je leur répète depuis des années l’importance d’être en ac-
tion pour y arriver. J’ai l’impression d’être enfin en cohérence avec ce
que je leur répète depuis très longtemps. Mais cette fois-ci, les rôles
sont inversés.

J’ai une ovation debout. Littéralement. Je m’écroule en pleu-


rant sur scène. Ce qui suit après est juste surréel.

IL Y A UNE FILE DE GENS QUI ATTENDENT POUR SE FAIRE


PRENDRE EN PHOTO.

JE RÉPÈTE : UNE FILE!

Pas de vingt personnes; elles sont des centaines à attendre


pour venir me parler, me saluer.

Vous dire l’expression de mes parents à cet instant précis! Celle


de mon amie précieuse. De mes élèves. Plus personne ne comprend
ce qui se passe. L’organisation de l’événement doit m’envoyer du ren-
fort pour diriger les gens qui veulent me parler. Ils doivent contrôler
l’affaire parce qu'elle prend des proportions énormes. J’ai l’air d’une

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biche apeurée sur le bord d’une autoroute qui voit les phares d’une
automobile qui approche.

Vous dire tout ce qui me traversait la tête à ce moment précis!


Ça allait de la stupéfaction (oui, j’utilise le mot stupéfaction pour vous
dire à quel point c’était gros, toute l’émotion qui m’envahissait) à la
fierté, mais avec un mélange de consternation et surtout d’incompré-
hension. Je n’avais aucune idée de ce qui se passait et je me disais :
« Forcément, il y a une équipe télé cachée. Ils vont tous sortir en même
temps pour me dire que j’ai été piégée à une quelconque émission où
l'on joue des tours à des gens. »

C’est aussi à cet instant précis que j’ai éclaté de rire. Littérale-
ment. Parce que depuis des années, je répétais à mes amies que « je
ne suis pas une fille de line-up ». Pour vous, chers Européens qui lisez
ces lignes, cette expression pourrait être traduite par : « Je ne suis pas
une fille qui fait la queue » ou « Je ne suis pas une fille de queue », mais
ce serait un peu (beaucoup) loufoque si je répétais ça au Québec!

Depuis des années, je dis à qui veut bien l’entendre que je dé-
teste être en attente en ligne quelque part alors que rien ne bouge.
Que je suis LOOOIIIN d’être un line-up parce que je ne comprends
vraiment pas pourquoi les choses ne vont pas plus vite. Que c’est une
perte de temps. Que pendant ce temps-là, je pourrais réinventer le
monde ou me rendre plus utile. C’est devenu une blague qu’on utilise
sans arrêt et que je fais même répéter à ma fille de six ans, qui dit
elle-même sans arrêt : « Heuuuuu maman, c’est parce qu’on n’est pas
des filles de line-up! »

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Là, ce sont des centaines de personnes qui attendent patiem-
ment et sagement dans une VRAIE ligne d’attente, avec des corderons
rouges et tout ce qui vient avec pour me rencontrer MOI.

VOYONS! ÇA N'A PAS RAPPORT! ÇA N'A AUCUN SENS!

Je suis là, pendant des heures, à sourire pour les cellulaires, à


entendre les confidences des gens qui pleurent en me disant qu’ils ne
se cacheront plus pour briller. Que mes mots ont eu de l’impact pour
eux...

… ET JE CONTINUE DE PENSER QUE ÇA N’A AUCUN SENS.

Il y aura eu un avant et un après cette conférence. J’ai passé


toute la soirée suivante à revoir le fil des événements et à essayer de
comprendre ce qui venait d'arriver sans être capable d'en trouver la
réponse.

Une de mes élèves, Lysandre, à qui j’enseigne depuis plus de


dix ans, m’a envoyé ce message le lendemain de ce moment magique.
Elle faisait partie de la chorale qui m’accompagnait.

« Coucou Mel! Je sais que tu es sur le point de partir pour le


Vietnam mais avant que tu partes, je voulais te dire ce que j'avais à te
dire hier et que je n'ai pas été capable de te dire à cause des émotions.

Mis à part que j'étais vraiment fière de toi, FIÈRE de te voir


réussir tes grands projets, de te voir être si épanouie et heureuse dans
ce que tu fais, hier, j'étais l'élève la plus heureuse d'être là pour toi,
pour te voir accomplir ce que tu désirais le plus puisque tu l’as tou-
jours fait pour moi depuis l'âge de cinq ans. Vu mes grandes difficul-

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tés scolaires, tu m'as toujours poussée et encouragée à ne pas aban-
donner. C’est en partie grâce à toi que je suis rendue où je suis en ce
moment .

Hier, tu disais qu'on devait trouver notre paillette, bien moi,


je l'ai trouvée, ma paillette : c'est toi et les Maëstros qui me donnent
ma brillance.

Maintenant, c’est à mon tour de te dire : Fonce, Mel. Va au bout


de tes rêves et peu importe les obstacles que tu auras à traverser, tu y
arriveras à ton but, lâche pas!

Xxxx je t'aime et je pense à toi fort fort! Bon voyage! ❤️❤️❤️❤️

P. S.: merci de m'enseigner tout ce qui te tient à cœur! »

Entre deux sanglots, c’est aussi là que j’ai compris la puis-


sance du message, qui se voulait à la base tellement humoristique :
« Crée-le, ton line-up. Invente-la, ta file d’attente. Arrête effectivement
d’attendre sagement que ton tour arrive. Arrête de faire comme tout
le monde et contourne ce qui te paraît absurde pour être à l’endroit où
tu veux. » Trop souvent, on attend que tout se fasse comme par magie.
On ne se questionne pas à savoir ce qu’on fait là, en rang, à avancer
pas par pas, sans même savoir ce qui est au bout. On se dit que ça doit
être O.K. puisque TOUT LE MONDE est là à faire la même chose.

Je sais que cette expression pourrait aussi être interprétée de


façon très négative, parce que créer son line-up pourrait aussi signi-
fier vouloir dépasser tout le monde en se croyant supérieur et mériter
le traitement VIP. Comme si l'on voulait être meilleur que ceux qui
attendent leur tour en leur faisant un pied de nez et en passant à côté

35
d'eux comme des effrontés qui font semblant d’aller rejoindre leurs
amis dans un show de musique, quand on sait très bien que ce qu’ils
font, c’est simplement DE NOUS DÉPASSER AVEC TOUTE LEUR IMPO-
LITESSE.

Pour moi, c’est une tout autre image. C’est réellement de


prendre sa vie en main, d’évaluer ses options et de ne pas attendre
le bon moment pour foncer parce qu’on sait très bien que cet instant
parfait n’existera jamais tant et aussi longtemps qu’on ne se fait pas
un devoir de se l’approprier. J’aime beaucoup l’image qu’on donne à
plusieurs entrepreneurs, celle de ne pas attendre que tous les feux de
circulation soient verts avant de passer à l’action. Oui, il faut parfois
provoquer les choses, sans rien enlever aux autres. Ça revient aussi à
une autre image que j’aime bien, qui est de sauter dans le vide et de
se fabriquer un parachute dans la descente pour le déployer ensuite.

Ma vieille amie Josiane est maman de quatre beaux enfants.


Enseignante au secondaire sans nécessairement entrevoir de possi-
bilité d’avancement pour sa carrière, elle a mis sa vie professionnelle
sur pause pour se concentrer sur ses petits en bas âge. Un choix com-
mun avec son amoureux, en sachant tous les avantages et les incon-
vénients qui viennent avec. Une autre façon de créer son line-up qui
avait du sens pour elle. Après quelque temps à la maison, un poste
s’est libéré dans une école près de chez eux, mais en orthopédago-
gie. Comme il y avait un manque à combler, bien qu’elle n’ait pas eu
ce diplôme spécifique, elle a été engagée pour remplacer la personne
absente. Elle a donc quitté ce qu’elle pensait être le plan initial pour
faire un retour dans ce nouvel emploi.

36
Elle s’est rapidement découvert une autre vocation. Une pas-
sion qui l’habitait mais qui demandait aussi un retour aux études
pour qu'elle puisse continuer dans cette voie.

Mais pas n’importe quel retour aux études.

À la maîtrise.

À une heure de chez elle.

À trente-quatre ans...

… ET SURTOUT AVEC QUATRE ENFANTS DONT UN BÉBÉ


D'UN AN.

Imaginez-vous le courage que ça peut prendre? Voyez-vous


l’organisation qui vient avec ce choix et le fait de devoir remettre
le nez dans ses livres pour assimiler la matière, faire ses examens,
remettre ses travaux à temps et les compétences de haut niveau en
cirque extrême pour jongler avec les horaires de tout le monde afin
que « le retour aux études de maman » se passe bien?

C’est ça, créer sa file d’attente. C’est de ne pas attendre que


les enfants grandissent. C’est de ne pas attendre nécessairement que
le budget le permette. C’est de comprendre qu’on n’aura jamais le
temps ni l’argent, ni les ressources pour le faire, mais que plutôt que
d’attendre que les choses se passent, on doit les provoquer pour voir
ensuite ce qui arrivera.

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Je pense qu’il y a beaucoup trop de gens qui attendent que le
vendredi arrive pour vivre pleinement leur vie. Ils attendent ensuite
leurs vacances d’été pour être heureux ou mieux, leur retraite pour
réaliser leurs souhaits les plus chers.

Ils attendent patiemment en rang d’oignons parce qu’on nous


l’a tellement enseigné que c’est comme ça que ça doit se passer et que
les choses se passent. Qu’un miracle arrive. Que la solution magique
leur soit donnée rapidement. Que leur vie se transforme pour qu’elle
puisse leur ressembler davantage, en n’ayant pas saisi la subtilité ni
l’importance de sortir du rang, du cadre.

Je regarde des personnalités québécoises comme la ma-


gnifique Marie-Pier Morin, maintenant animatrice, comédienne,
blogueuse, influenceuse et entrepreneure qui a souvent dit en entre-
vue qu’elle rêvait secrètement de ce métier. Elle a provoqué son par-
cours professionnel en s’inscrivant d’abord à Occupation Double, une
téléréalité que tout le monde suivait avec attention à l’époque. Pour
ceux qui s’en souviennent, elle avait eu le rôle de « la méchante ». Les
gens la détestaient. Viscéralement.

Elle en est sortie démolie, affaiblie par autant de méchancetés


et aucunement outillée pour savoir comment se défendre et garder la
tête haute. Je ne pense pas que c’était la mauvaise ligne d’attente à
prendre, que c’était un chemin à envisager.

On connaît la suite. Elle s’est refait une santé loin des camé-
ras, a cogné aux portes de l’émission Le Banquier et la populaire ani-
matrice Julie Snyder a cru bon lui donner sa chance comme « Beau-
té  ». Elle s’est rapidement démarquée en tenant la valise numéro 6,
en poussant quelques bonnes blagues ici et là, en faisant valoir sa

38
personnalité et la suite est éloquente. Qui aurait cru qu’elle devien-
drait même une actrice acclamée dans un film d’auteur tel que celui
de Denys Arcand?

C’est là qu’on comprend la puissance de s’enlever de la maudite


file d’attente. De penser autrement. De sortir de sa zone de confort, de
faire des choses qu’on n’aurait jamais osé accomplir avant et, oui, de
foncer vers cette vie Paillette qui nous attend, mais surtout qui nous
ressemble beaucoup plus.

Je pense que de ne plus être une fille de line-up est vérita-


blement un accélérateur vers le bonheur. Pas un raccourci, ni même
un détour, mais un accélérateur. Si l'on tient compte que la vie passe
tellement vite, le nouveau chemin qu’on empruntera n’est pas néces-
sairement un gage de succès vers la réussite absolue. On est cepen-
dant assuré d’une chose : ce ne sera pas plate, ni ennuyeux. Créer sa
destinée de toutes pièces impliquera sans doute beaucoup d’obstacles
et d’embûches qui n'y seraient pas nécessairement si l'on continuait
d’attendre à la queue-leu-leu. Sauf que l’excitation sera là. La volon-
té de se dépasser aussi. La destination finale ne sera qu’un prétexte,
alors que les étapes à parcourir seront tout aussi extraordinaires que
le but qu’on s’est fixé. Ce sera de l’inconnu, mais quand on y goûte, on
comprend tellement que c’est exaltant, que ça devient une nécessité.

C’est vrai que de ne plus être une fille de line-up aurait aussi
pu être expliqué par les termes «  sortie de zone de confort  », mais
imaginons qu’on pousse le concept plus loin. Et au contraire, qu’au-
riez-vous besoin de faire plus souvent pour tracer votre voie? Qu’au-
riez-vous besoin de faire moins souvent pour construire votre route?
Qu’est-ce qui vous donnerait envie d’être à la tête de vos rêves, de vos
aspirations, de votre destinée?

39
Parce que c’est aussi tout ça à la fois.

C’est ne plus attendre gentiment qu’on vous donne la permis-


sion de réaliser vos rêves.

C’est savoir qu’on n'a qu’une seule vie à vivre et qu’on ne peut
gaspiller une seule seconde à ne pas se bouger pour avoir ce qu’on
veut.

C’est foncer malgré toutes les excuses qu’on se donne trop


souvent.

C’est ne plus se contenter de se faire passer en deuxième plan,


mais de comprendre qu’on est le plan A. Le seul et l’unique.

C'est accepter de prendre tous les risques qui viennent avec


le fait de ne plus être en rang d’oignons, à l’intérieur d’un périmètre
de sécurité bien établi, en ne sachant même pas si ce qu’il y a au bout
valait toute cette attente.

C’est ne pas manquer le bateau.

Ne pas rater la parade.

Ne pas regarder le train passer.

C’est surtout ne pas attendre son tour. Parce que ce ne sera


pas comme dans un jeu de société, forcément (j’imagine que je peux
arrêter ici les nombreuses images qui expliquent mon point initial du
line-up).

40
Tout est toujours une question de choix. Josiane, mon amie,
aurait pu continuer de faire ce qu’elle faisait en oubliant sa passion de
l’enseignement et en ne découvrant jamais le bonheur de devenir or-
thopédagogue. Elle aurait pu attendre « son tour » sans savoir quand il
viendrait. Elle n’aurait jamais connu la fierté d’effectuer un retour à la
maîtrise universitaire avec quatre jeunes enfants. Elle n’aurait jamais
pu être une inspiration pour les gens qui l’entourent.

Parce que ça aussi, ça vient avec. L’inspiration et l’admiration.


Lorsqu’une femme reprend les rênes de son destin et qu’elle redé-
couvre son pouvoir, elle incite les autres, mêmes les plus discrètes,
à le faire. C’est l’effet papillon. On a parfois besoin d’un seul modèle
autour de nous pour éveiller quelque chose d’insoupçonné qu’on avait
de bien caché depuis trop longtemps à l’intérieur.

Vous n’avez pas à attendre l’approbation ou la permission pour


briller. C’est souvent ça qu’on oublie. Comme si on avait été condition-
né à avoir le « GO », alors que la seule et unique personne qui peut nous
le donner, c’est nous! Vous n’avez pas non plus à attendre que les gens
ou les situations extérieures vous autorisent à entreprendre votre vie.
C’est justement l’inverse. Imaginez si vous pouviez le créer, ce fameux
line-up. Est-ce que les gens qui attendraient avec vous seraient les
mêmes qui y sont habituellement? Est-ce que le but à atteindre ou les
opportunités à rencontrer resteraient aussi semblables à ce pour quoi
vous attendez présentement? Comment vous sentiriez-vous de voir
les étapes à franchir, de savoir que vous n’êtes plus en train d’attendre
après le bonheur, que vous êtes aux commandes de celui-ci? Fébrile?
Excitée? Apeurée? Toutes ces réponses?

Ce que je remarque dans mon travail depuis plusieurs années,


c’est qu’au-delà de la peur se cache la magie. Ou pour vous donner

41
une autre image, le traitement VIP. Parce qu’au fond, on sait tous que
les gens qui n’attendent pas sagement comme les autres ont droit à
ça. Regardez dans les aéroports, les bars, spectacles. Observez bien
les gens qui passent par la section qu’on envie tous et qui n’ont pas à
perdre de temps interminable pour profiter plus rapidement de l’occa-
sion.

Ils ont droit à la formule VIP. Celle qui offre des bonis. Celle qui
est souvent mystérieuse. Celle qui pique la curiosité. Celle qu’on ne
sait pas vraiment si elle en vaut véritablement le coup, mais que tout
le monde espère un peu secrètement vivre au moins une fois dans sa
vie. Pour moi, cette zone-là, spécialement dans la vraie vie, c’est aussi
celle de la magie que nous seul pouvons créer. Celle que vivent ceux
qui osent faire les choses différemment, qui osent déranger, qui osent
bousculer les normes sans empêcher les autres de faire. Et si vous
pouviez, vous aussi, vous l’offrir le traitement VIP en choisissant de
VOUS mettre en priorité? En faisant les bons choix et en prenant des
décisions audacieuses?

Comme Maripier Morin

Comme Céline Dion

Comme Danièle Henkel

Comme Marion Cotillard

Comme bien des femmes qui ont décidé que c’était assez d’at-
tendre. Que c’était maintenant. No matter what.

42
À ce sujet, j’ai d’ailleurs une anecdote savoureuse qui prouve
hors de tout doute à quel point j’ai compris le principe de ne plus
jamais être une fille de line-up. Ma meilleure amie Amélie habite à la
Barbade. Donc, techniquement, j’ai une villa dans ce beau pays (elle
est loin d’être à moi, mais nous vivrons tous collectivement qu’en ce
moment, je fais de la visualisation, d’accord?). J’essaie d’aller la visiter
une ou deux fois par année, soit seule ou avec mes enfants.

On va être honnête, la Barbade c’est assez tranquille. Ce n’est


pas tellement une destination pour faire la fête. Un soir, on est allés
à la découverte de l’île et il y avait énormément d’animation dans un
quartier précis. De la musique, de la danse, un mini-carnaval. Bref,
une soirée comme je les aime sous la chaleur des Caraïbes.

Un Immmmmeeeense line-up a attiré mon attention. Beau-


coup de gens semblaient être là depuis un moment pour entrer dans
une bâtisse qui n’avait pas d’enseigne autre que le mot «  Bar  ». Ça
semblait réellement être THE place to be. Rapidement, mon instinct
et surtout ma curiosité de fille qui ne veut PAS DU TOUT attendre des
heures m'ont dirigée vers le portier qui assurait en même temps la
sécurité. Je lui ai demandé :

« Qu’est-ce qu’il faut faire pour entrer ici rapidement? Est-ce


que je peux payer un surplus? Est-ce possible de nous texter quand de
la place se libérera? »

Lui de me répondre d’un ton un peu évasif (lire ici semi-bête) :


« À moins que tu ne saches danser, tu devras te mettre en ligne et il y
a des frais de cinquante dollars U.S. pour entrer ici! »

« C’est parfait, monsieur. Je sais danser. Je suis même excel-


lente », ai-je ajouté avec toute ma grande naïveté.

43
«  Très bien, mademoiselle. La scène est à vous dans dix
minutes. »

Immensément fière de mon coup, je regarde mon amie qui est


en train de mourir de rire, qui m’encourage et me dit à quel point elle
est teeellement contente qu’on puisse entrer à l’intérieur, et ce, SANS
payer NI attendre. Je n’arrête pas de me répéter à quel point c’était si
facile, qu’il suffisait seulement de le demander, qu’on n’a rien à perdre
à oser.

C’est là que j’ai compris.

1- Pourquoi mon amie continuait de s’étouffer de rire.

2- Pourquoi le portier était lui aussi en train de mourir de rire.

3- Pourquoi tout le line-up, étrangement constitué à 95 %


d’hommes, était aussi près de l’article de la mort à force de rire

C’était un bar de danseuses NUES. Comme dans « elles n’ont


rien sur le dos ». Comme dans « elles ne peuvent pas être plus nues
que ce qu’elles étaient à ce moment-là. »

C’est là que l’animateur a appelé mon nom, que j’ai entendu


les cris du public et que j’ai vu les filles, pour qui c’était le quotidien
soir après soir, me fusiller du regard.

Donc, en oubliant mon orgueil et ma fierté, et en remerciant


mes années de pratique de Pôle Fitness (quelles étaient les chances
que je sache en faire!?!), j’ai fait mes trois meilleures passes sur l’air
de Sexy Back, de Justin Timberlake, et j’ai gagné cent cinquante dol-

44
lars américains, donc le triple de ce que ça coûtait initialement pour
entrer dans un endroit qui ne laissait pas DU TOUT présager ce que
j’allais vivre. Peut-être que je n’aurais JAMAIS vécu autant de magie si
j’avais attendu patiemment mon tour.

Si ça ce n’est pas un moment fort dans une vie, je me demande


bien ce que c’est…

Mais comme ma vie est une perpétuelle anecdote, attendez de


voir les suivantes!

En résumé, ne pas être une fille de line-up, c’est :

– Réinventer le concept de file d’attente en créant son propre


line-up. Sortir du cadre en arrêtant d’attendre les conditions, les occa-
sions, les moments parfaits et les fabriquer soi-même du début à la
fin.

– Se prendre en main, foncer et choisir consciemment de se


mettre un peu en danger en faisant des actions différentes, et exiger
rien de moins que le traitement VIP.

– Utiliser cette voie de contournement, pas pour faire du déni


volontaire, mais bien comme accélérateur de bonheur. Comprendre
qu’on n’a qu’une seule vie à vivre et qu’on ne peut se permettre de
perdre une seule seconde pour se réaliser pleinement.

En passant, non, je n’étais pas nue pendant mon numéro de


danse.

45
© Photo : Maryline Tremblay
46
Créer son line-up,
c ’ est de comprendre
qu ’ on n ’ aura jamais
le temps/l ’ argent/
les ressources pour
le faire, mais bien de
provoquer les choses et
voir ce qui se passera
par la suite.

47
48
Chapitre 3

La maîtrise du NO ou l’ art de
développer sa persévérance

Un gagnant est juste un perdant qui a tenté


une fois de plus
– George M. Moore

« C’est un projet super intéressant, madame Normandin Ro-


berge, mais malheureusement, on va devoir dire non. »

« Merci beaucoup de nous avoir contactés, mais comme l’ho-


raire de monsieur X est très chargé, nous n’avons pas d’autres choix
que de décliner l’invitation. »

« Pour l’instant, c’est non, mais relancez-nous l’an prochain.


Peut-être que ce sera plus facile à ce moment-là. »

Si vous saviez le nombre de fois que j’ai eu des refus de toutes


parts dans ma carrière professionnelle. Si vous saviez le nombre de

49
fois qu’on m’a dit que je rêvais en couleurs, que ce que j’avais en tête
était impossible. Que je voyais trop grand, trop hors norme, etc.

J’ai fondé ma première entreprise à l’âge de dix-huit ans. De


toute ma naïveté et ma « non-expérience », j’ai voulu tout d’abord me
créer un travail qui me permettrait de payer mes études collégiales
sans avoir à subir les horaires de mes employeurs (disons que j’étais
déjà une très mauvaise employée qui arrivait continuellement en re-
tard). Je ne me suis jamais vraiment posé la question lorsque j’ai sauté
dans le vide à savoir si mon idée allait fonctionner parce que pour
moi, ça m’apparaissait tellement évident : je devais donner des cours
de piano et de chant, une passion qui me suivait depuis ma tendre
enfance.

Je ne connaissais rien au marketing ni à la comptabilité, ni à la


gestion, mais je sentais que c’était ce que je devais faire. J’avais aussi
rapidement fait le calcul qu’à demander 15 $ pour une heure, c’était
beaucoup plus payant que le 7,30 $ de l’heure, montant du salaire mi-
nimum de l’époque. J’allais en plus faire ce que j’aimais par-dessous
tout dans la vie : de la musique tous les jours.

Je dis naïvement parce que c’était réellement le cas. On es-


sayait de me décourager dans mon entourage en me disant que j’étais
trop jeune, que je ne savais pas comment me lancer en affaires, que
cette lubie de post-adolescence allait très certainement me passer et
que je devrais faire comme tous les autres jeunes de mon âge, c’est-
à-dire travailler dans des boutiques ou des bars laitiers (ce que j’ai
d’ailleurs fait). Mais j’avais cette petite voix à l’intérieur de moi, celle
qui ne me trahit jamais, qui me disait de foncer. Que c’était exacte-
ment la direction que je devais prendre. J’ai donc fondé ce qui allait
devenir la première succursale de mon premier «  bébé  », l’école de

50
musique les Maëstros. Sans trop comprendre pourquoi, et toujours en
continuant de ne pas me poser de questions, cette école a rapidement
grandi. Dans les premières semaines (on est en 2002), alors que les
réseaux sociaux n’existent pas, qu’on « chatte » encore sur MSN, que
le marketing pour une petite ville comme Shawinigan se résume pas
mal à mettre des annonces dans notre seule épicerie de quartier et à
la caisse populaire, il fallait user de créativité pour se faire connaître.
Surtout, je le répète, mais il fallait, oui, un brin de naïveté de penser
que ça pourrait marcher.

Pourtant, ça fonctionne. Je commence mon année avec


quinze élèves (je sais qu’on est loin de l’empire de Bill Gates et de
son chiffre d’affaires) et je termine avec trente Maëstros. Je recom-
mence l’année suivante avec mes trente de l’année précédente, pour
finir avec soixante et une employée. Puis, d’année en année s’ajoutent
des membres à mon équipe de professeurs, mais également des suc-
cursales dans d’autres villes et partout dans les écoles primaires de
la région. Quelques années après la fondation de ce beau projet, j’ai
vingt-trois ans, un petit garçon de deux ans, j’ai quitté l’université
pour me consacrer totalement à ce projet qui me met des étoiles dans
les yeux et je vois grand. TRÈS GRAND!

On enseigne le piano, le chant, la guitare, le violon, mais je


constate rapidement que tout n’est qu’un prétexte à la véritable mis-
sion de mon école : je souhaite plus que tout au monde que mes élèves
comprennent que rien n’est impossible et que lorsqu’on croit en nous,
on peut accomplir de la magie. Rien de moins.

Une idée qui me trotte régulièrement dans la tête depuis long-


temps est de baigner dans le monde du show-biz. Enfant, c’était d’être
pianiste. Adolescente, c’était d’être chanteuse. Cette pensée ne m’a

51
jamais vraiment quittée. J’étais fascinée par cet univers qui m’appa-
raissait comme ultra-glamour, mystérieux mais en même temps ac-
cessible, et tellement tentant. Armée de mes cinq dernières années
comme fondatrice et directrice de l’école, je commence à dire tout
haut ce qui est enfoui en moi et qui commence à vouloir émerger : « Je
veux travailler avec des artistes connus. »

Je le répète à tout le monde. À mes élèves comme à leurs pa-


rents, comme à mon entourage, comme à mes amis, comme à tout le
monde qui me regarde avec un air de scepticisme parfois teinté de
condescendance : « D’ici six mois, il y aura un artiste sur la scène du
spectacle de fin d’année des Maëstros. »

Chaque fois que j’ai parlé de ce rêve, et j’insiste bien, CHAQUE


FOIS, on m’a dit : « C’est impossible… tu ne réussiras jamais à le faire.
On est à Shawinigan. Tu travailles avec des enfants et des adoles-
cents. Aucun artiste n’acceptera de participer à un petit spectacle
comme celui-là. »

C’est là que prend toute l’importance de bien comprendre l'en-


tière signification du pouvoir du NO. Dans la vie, on vous dira NON
plus souvent qu’autrement. Ce mot peut avoir deux effets sur vous :

1- Vous détruire

2- Vous motiver à prouver hors de tout doute que vous aviez


raison

Le NO est évidemment la traduction libre anglaise du mot


NON (ne me remerciez pas, je sais à quel point je vous enseigne du
contenu pertinent en ce moment!), mais NO veut aussi dire Nouvelle

52
Opportunité. C’est de comprendre qu’à tout moment, le résultat final
VOUS appartient, qu’un non, un obstacle, un doute, un bâton dans les
roues, une montagne, un océan de problèmes peuvent survenir, mais
que vous pouvez décider aussi qu’il en sera autrement.

Je n’ai jamais voulu écouter tous ceux qui ont essayé de me


décourager. Même les gens que j’aimais et que j’aime encore profondé-
ment, je décidais volontairement de ne pas entendre ce qu’ils avaient
à me dire, même avec tous les meilleurs arguments du monde, parce
que je savais ce que je devais faire. Parce que c’était tellement fort en-
dedans de moi que je devais me fier à mon instinct, à mon intuition
et à ma vision

Or, c’est là qu’il sera important de faire un choix capital : faire


preuve de persévérance.

On pense souvent à tort qu’on vient au monde en étant persé-


vérant. Que c’est une qualité innée à l’intérieur de nous qui est déjà
développée alors que ma croyance est que c’est réellement un choix à
faire en tout temps.

On peut toujours abandonner, se laisser convaincre que nos


idées et nos projets ne valent pas la peine d’être menés à terme, qu’on
ne réussira jamais, qu’on ne pourra pas y arriver. Donc, qu’on devrait
tout laisser tomber.

OU

On peut choisir consciemment qu’on fera tout ce qui est hu-


mainement possible pour relever le défi. Pour aller au bout du projet.
Pour voir le résultat de ce qu’on a imaginé. Pour SE donner raison et SE

53
prouver que la seule et unique personne à savoir véritablement ce qui
est bien pour soi, c’est NOUS.

Travailler avec des artistes a été pour moi une façon de me-
ner ma croisade auprès des enfants et des adolescents, mais aussi
bénéfique pour mon équipe afin de prouver à tous que oui, on peut
tout accomplir. Que ce n’est pas parce qu’on vient d’une petite ville
comme Shawinigan, qu’on est jeune et inexpérimentée, qu’on n’a pas
les connaissances, les compétences ni les ressources qu’on ne peut y
arriver.

Je vous rappelle que je viens d’un milieu qui n’est ni artis-


tique, ni entrepreneurial. Tout ce que j’ai, c’est ma vision en tête, une
volonté de fer, mais aussi une IMMENSE tête de cochon. Envers et
contre tous, je m’accroche à mes rêves non seulement pour moi, mais
aussi pour mes soixante-quinze élèves de l’époque qui méritent que je
mette mes peurs et mes appréhensions de côté afin de leur offrir une
expérience hors du commun.

Le premier artiste que j’ai approché était Patrick Bourgeois,


du groupe les BB. On est en 2007. Les BB ne sont plus ce qu’ils ont déjà
été, on les voit beaucoup moins dans les médias. Ils n'ont pas offert
de nouveau matériel depuis longtemps, mais pour moi, ce chanteur
représente tellement : il est ma jeunesse, mes souvenirs et tout ce qui
vient avec. Je réussis à obtenir le contact pour lui parler directement
et là, LA CHIENNE ME POGNE! SOLIDE!

« Qu’est-ce que je vais lui dire?

C’est clair qu’il va voir que je suis une impostrice.

54
Il n’acceptera jamais. »

Je tremble, une spirale infernale s’active dans ma tête pour


essayer de me décourager d'accomplir ma mission et finalement, je
finis par me dire « À GO, j’appelle! »

Je fais le décompte.

1 (en espérant qu’il ne réponde pas)

2 (en souhaitant tomber sur le répondeur)

3 (en ayant juste envie de lancer le téléphone par la fenêtre)

GO!

… et il répond. J’AI PATRICK BOURGEOIS, L’IDOLE DE MON EN-


FANCE AU BOUT DU FIL!

Honnêtement, je n’ai aucun souvenir du début de cette conver-


sation qui devait aller dans tous les sens, sans cohérence et ponctuée
sans aucun doute de beaucoup de bégaiements, mais je finis par re-
prendre le dessus, à respirer et à lui expliquer mon projet.

Puis, je l’entends me répondre au bout du fil : « O.K.! Je vais y


aller. Je demande un cachet de trois mille dollars. »

Je suis estomaquée. J’ai réussi! Le chanteur préféré de mes neuf


ans, celui qui m’a fait mettre sur repeat des milliers de fois Donne-

55
moi ma chance, a accepté mon invitation. Je me souviens d’avoir rac-
croché le téléphone le sourire aux lèvres...

… et de comprendre ensuite l’ampleur dramatique de la situa-


tion : trois mille dollars... que je n’ai pas du tout. Je n’ai aucune idée de
la façon dont j'arriverai à les trouver compte tenu que le spectacle me
coûte déjà environ douze mille dollars à produire.

C’est là que j’ai compris, une fois de plus, l’importance de la


persévérance, de se mettre en action, d’exécuter un plan qui nous
amènera à la réalisation de sa vision et d’y croire envers et contre
tous.

Parce qu’il faut aussi comprendre que mes élèves n’ont AU-
CUNE idée de qui est Patrick Bourgeois. Ils ne sont donc pas tant moti-
vés à faire des efforts pour remplir la salle de 950 personnes que j’ai
réservée pour ce premier grand spectacle d’envergure. Ils ne savent
pas qu’en ce moment même, j’ai un peu la tête sur le bûcher parce que
je viens de prendre un grand risque financier (parce que oui, quand tu
as vingt-trois ans, des dettes à payer et des responsabilités de maman,
quinze mille dollars pour un seul soir, c’est réellement un risque).

Je pense que c’est aussi dans cette situation précise que j’ai
su que j’avais vraiment des compétences entrepreneuriales. J’ai usé
de tout mon pouvoir persuasif pour entraîner tous les intervenants,
autant les parents, les élèves que des commanditaires et des parte-
naires à y croire autant que moi et à faire en sorte que non seulement
on fasse nos frais, qu’on affiche complet, mais qu’on puisse en plus
faire un peu de profits qu’on a finalement remis à une fondation. J’ai
saisi à quel point un rêve qui paraît fou aux yeux de tous peut vérita-
blement se concrétiser en mettant son point de mire et son énergie au

56
même endroit, en fonçant tête baissée sur l’objectif et en n’acceptant
rien de moins que le résultat attendu initialement. J'ai compris qu’en
cours de processus, malgré les obstacles susceptibles de survenir, un
entrepreneur doit rester en tout temps focalisé sur les solutions. Elle
est là, la clé du succès.

Je n’oublierai jamais ce spectacle, qui est devenu un de mes


meilleurs moments à vie! Non seulement le public était hystérique
de revoir Patrick sur les planches, mais lui aussi était enchanté de
recevoir un tel accueil. Il était emballé de voir que des enfants et des
adolescents qui n’avaient jamais entendu ses chansons quelques se-
maines auparavant s’époumonaient à grands Pourquoi t’es dans la
lune et Fais attention. La magie s’est poursuivie à plusieurs reprises
avec notre premier artiste, parce que quelques semaines plus tard, il
nous invitait à faire le populaire festival de musique Les FrancoFo-
lies de Montréal, où nous avons pu nous produire devant 100 000 per-
sonnes. Un autre moment gravé dans ma mémoire. Une preuve plus
que concrète pour mes élèves que tout est vraiment possible, qu’en
travaillant fort et en faisant des efforts, on peut arriver à de grandes
choses.

Ce fût un moment mythique aussi pour les organisateurs du


populaire festival de la Métropole. Tous les éléments pour un succès
étaient réunis ce soir-là : température chaude sans une once de pluie,
alors qu’il avait plu tout l’été, les retrouvailles du groupe qui ne comp-
taient que des classiques dans leur répertoire et la chorale d’enfants
extraordinaires pour les accompagner. J’ai pleuré à chaudes larmes
ce soir-là, sur scène de voir toute cette fabuleuse magie s’orchestrer
devant mes yeux. Les parents des enfants étaient survoltés de voir
une aussi grande foule applaudir leur progéniture. Ils arboraient tous
fièrement leur t-shirt : J’aime les BB. Ces parents même qui, quelques

57
semaines auparavant, me disaient que je rêvais en couleur. À ce mo-
ment même, ils réalisaient à travers leurs petits, l’immensité du pro-
jet qui se concrétisait devant nous.

Quelques années plus tard, nous avons enregistré, avec le réa-


lisateur Fred St-Gelais et le leader des BB, Sept fleurs, qui se trouve
sur le cinquième et dernier album des BB. Encore une fois, n’importe
quelle chorale d’enfants auraient pu avoir ce privilège, mais c’est mon
école, de Shawinigan, très loin des studios de Montréal, qu’on peut en-
tendre. Imaginez si j’avais laissé ma peur prendre le dessus. Si j’avais
laissé les gens me convaincre qu'effectivement, je rêvais trop grand.
Imaginez si je n’avais jamais fait le décompte 1-2-3 GO pour composer
le numéro de téléphone de Patrick pour tenter ma chance et voir où
ça me mène.

Il a ouvert la voie à ce rêve farfelu, mais en acceptant, il a


aussi contribué à ce que d’autres artistes puissent avoir aussi cette
ouverture.

J’aimerais vous dire que de convaincre les autres artistes les


années suivantes a été une partie de plaisir et qu’en un claquement de
doigts, tout était réglé. Mais non. Jamais.

Chacun d’eux, et vraiment c-h-a-c-u-n, m’a dit non. Tous.


Sans exception. Avec d’excellentes raisons.

Comment se fait-il alors que je peux me vanter d’avoir travail-


lé avec Marie Carmen, France D’amour, Marc Dupré, Marie-Mai, Les 3
accords, Vincent Vallières, Kevin Parent, Kaïn, Philippe Bond, Sugar
Sammy, Maxim Martin et Étienne Boulay?

58
Parce que je n’ai jamais pris leur «  non  » pour une réponse
finale. Ça devenait alors la façon idéale de créer de nouvelles occa-
sions qui allaient peut-être se transformer en opportunités. De ren-
forcer mon état d'esprit pour trouver une idée créative afin de leur
apporter de nouveaux arguments et de les convaincre de changer leur
perception à l'endroit de ce projet qui sortait de l’ordinaire. C’était
aussi le moyen par excellence de démontrer aux équipes qui géraient
les artistes que je n’allais pas lâcher le morceau, que j’étais tellement
convaincue du bien-fondé de ma démarche que j’allais continuer
jusqu’à ce que j’obtienne un « oui ».

La chanteuse Marie-Mai en est un excellent exemple. Nous


sommes en 2011. J’essaie désespérément de parler à sa gérante pour
convaincre LA chanteuse préférée de mes élèves, qui est au sommet
de la gloire à cette époque, d’être notre artiste invitée pour juin. Il n’y
a rien à faire. Rien comme dans rien.

Rien que je puisse dire de plus.

Rien que je puisse faire de plus.

À court d’arguments parce que j’ai tout essayé.

La réponse demeure « NON ». C’est impossible. Son horaire est


ultra-booké et on me dit de me résigner.

NO… Nouvelle Opportunité. C’est sans doute ma programma-


tion de cerveau qui est mal faite, mais je ne supporte pas d’entendre
ce mot. En moins de vingt-quatre heures, j’organise un tournage dans
lequel nous reprenons une chanson de Marie-Mai en modifiant les
paroles de celle-ci pour lui lancer l’invitation officielle. J’invite tous

59
les élèves et leurs parents, mais aussi des gens de notre secteur à y
participer.

En moins de vingt-quatre heures, on apprend les nouvelles


paroles, une chorégraphie, on appelle la Ville pour faire fermer une
rue et accueillir les trois cents personnes qui acceptent de venir nous
donner un coup de main, on réserve une équipe de tournage et on
filme le tout.

Je suis convaincue que ça fonctionnera. Qui peut honnête-


ment résister à cette mise en scène de fous?

Dès le lendemain, le montage est terminé et je mets en ligne


la vidéo. La magie est instantanée. Notre projet devient viral. Les jour-
nalistes s’emparent de notre idée. Tout le monde partage dans ses
réseaux sociaux le fruit de nos efforts.

Encore une fois, je demeure convaincue : Marie-Mai accepte-


ra. C’est d’une évidence. C’est trop beau!

En fin de journée, je reçois un appel de la deuxième tête chez


Productions J. Quelqu’un d’extrêmement influente dans le milieu et
qu’on a intérêt à avoir de notre côté. Par contre, la suite est loin d’être
ce que je m’imaginais :

« Bonjour, madame Normandin Roberge. Je suis madame X, de


Productions J. Avez-vous une idée de ce que vous avez fait? Vous nous
placez dans une position extrêmement délicate. C’est irresponsable
de votre part. Vous utilisez des enfants pour parvenir à vos fins. Vous
allez faire passer Marie-Mai pour une sans-cœur parce qu’on va devoir
quand même refuser votre invitation. Vous ne vous ferez jamais un

60
nom dans le domaine de la production à agir de cette façon. En vingt
ans de carrière, j’ai rarement vu quelqu’un d’aussi effronté que vous! »

J'en reste bouche bée. Sans mots… Ce qui est plutôt rare
dans mon cas. Tous les scénarios d’horreur me traversent l’esprit  :
« Je vais avoir une poursuite sur le dos. Mon école va fermer. Je n’au-
rai plus jamais aucune crédibilité dans le show-biz québécois, etc. »

Puis je me ressaisis, je respire et je dis à la dame :

« Madame… avec tout mon respect, je dois vous mentionner


que vous avez tort. Sur toute la ligne. Votre patronne, Julie Snyder,
n’a jamais osé sortir du cadre pour développer l’empire qu’elle a bâti?
Vous allez me dire que c’est odieux d’utiliser les journalistes pour
faire connaître sa cause, alors que vous passez toutes vos journées
avec vos relationnistes à mousser la carrière de vos protégés? Au
contraire, je pense que je sais TRÈS bien dans quelle position déli-
cate je vous mets : je viens de vous faire un magnifique vingt-quatre
heures de publicité GRATUITE. On parle de Marie-Mai et de ce pro-
jet partout en ce moment en voulant savoir quelle en sera l’issue. On
parle de la beauté de l’idée et du fait que des jeunes ont décidé d’utili-
ser les réseaux sociaux de façon positive pour arriver à leur résultat,
et surtout, madame X, encore une fois, avec tout le respect que je
vous dois, ne venez jamais me dire que vous n’avez jamais insisté à
plusieurs reprises pour convaincre des producteurs de faire tourner
vos artistes en lesquels vous croyez si fort qu’il serait ridicule de ne
pas faire preuve d’autant de persévérance afin de faire valoir votre
point! »

…………….. Silence radio …………………

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Dans ma tête, ça va vite... Très vite! Je me dis que je viens vrai-
ment de tuer ma carrière professionnelle en étant un peu arrogante
avec une des personnes les plus importantes du milieu.

Elle me dit calmement, en appuyant sur chacun de ses mots :


« Très bien. On vous rappelle. »

Je ne sais plus si c’est positif ou non. Je fonds en larmes en


me maudissant pour avoir été aussi impulsive. Je sombre dans une
anxiété comme j’ai rarement connue. C’est cependant de courte durée
parce que la sonnerie du téléphone retentit cinq minutes après, top
chrono.

Au bout du fil, c’est la gérante de Marie-Mai qui me dit que


tous les membres de l’équipe se sont consultés (est parlé) et qu’ils ont
quelque chose à me proposer. L’horaire de la populaire chanteuse ne
lui permet vraiment pas d’être présente avec nous sur scène en juin,
(tel que) comme demandé, mais elle me propose de venir faire une
visite surprise aux jeunes en avril prochain (on est alors en février).
Elle sera là pour répondre aux questions et signer des photos-auto-
graphes.

Je raccroche en acceptant la proposition mais en étant un peu


déçue de ne pas avoir obtenu ce que je souhaitais réellement. Ce qui
suit est cependant de la pure magie.

L’équipe de Marc Dupré, qui travaille conjointement avec celle


de Marie-Mai, a entendu cette histoire. (Ils) Elle=réf. équipe accepte
donc que l’artiste prenne part à notre spectacle. Entre-temps, je pré-
pare la visite surprise en ne mentionnant strictement rien aux élèves.
Le 14 avril 2011, je les regroupe dans un gymnase d’école en inventant

62
une conférence de presse comme prétexte. Il y a beaucoup de jour-
nalistes, qui eux, savent que Marie-Mai est cachée dans sa voiture en
attendant le signal.

Si vous aviez vu l’expression des jeunes quand ils l’ont vue


apparaître! Si vous aviez pu ressentir tout l’amour qu’il y avait à cet
instant précis! Si vous aviez pu vivre l’émotion des parents de mes
élèves, qui pleuraient tout comme moi!

C’est aussi dans le top 5 de mes moments professionnels mar-


quants. Cette rencontre magique a fait la une de tous les journaux,
ici, en Mauricie, mais également dans la grande région montréalaise.
On en a parlé partout! On a salué l’audace des élèves, mais aussi celle
de leur directrice (en l’occurrence, moi). J’ai pu bâtir des partenariats
avec des entreprises de la région, qui voulaient absolument s’impli-
quer dans nos futurs projets, et j’ai compris plus que jamais l’impor-
tance de choisir la persévérance en tout temps.

C’est facile, abandonner. C’est facile de dire que de toute fa-


çon, on ne pourra y arriver. C’est facile de ne pas se battre pour nos
convictions.

Parce que ça ne demande aucun effort. Aucune remise en


question. Aucune sortie de zone de confort.

Il m’arrive encore aujourd’hui de me demander à quel point


ma vie serait différente si je n’avais pas emprunté le boiteux chemin
de la persévérance. Si je n’avais pas autant pleuré fois qu’on me disait
non, réponse qui devenait ensuite mon propulseur pour m’obliger à
me relever.

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Combien de fois avez-vous arrêté des projets qui, pourtant,
vous tenaient tant à cœur? Combien de fois avez-vous cessé de croire
en vous simplement parce qu’une personne vous a remis en doute?
Combien de fois avez-vous regardé filer des minutes, des heures, des
jours, des semaines ou même des années sans réaliser ce que vous
aviez à l’intérieur de vous?

Non, vous ne venez pas au monde en étant persévérant. C’est


un mythe. Une fausse croyance. Sachez que dès aujourd’hui, c’est un
choix. Comme celui d’être heureux. Comme celui de voir le positif au
lieu du négatif. Comme celui de savoir s'entourer.

Coca-Cola a vendu vingt-cinq bouteilles la première année de


son existence. On parle maintenant de plus de 1,9 milliards vendus à
travers le monde PAR JOUR!

Pensez à la célèbre histoire du non moins célèbre Walt Disney,


qui a été congédié du journal où il travaillait parce qu’il manquait
d’imagination et de bonnes idées.

Songez à Bill Gates, qui a connu un échec lamentable en créant


sa première entreprise, mais qui lui a donné l’idée ensuite pour Micro-
soft.

L’inventeur Thomas Edison a essuyé mille échecs avant de


connaître la réussite de l’ampoule électrique.

Plus près de chez nous, mon amie et cliente Katee Boucher,


fondatrice de Kassiopeia par la Bohème, s'est vu refuser à deux re-
prises une apparition à Dans l’œil du dragon, émission destinée à faire
connaître des entrepreneurs. Après avoir relevé ses manches, elle a

64
lancé une troisième tentative, qui s'est avérée la bonne, et après son
passage, elle a généré son chiffre d’affaires annuel en une semaine.

Pensez à Ricardo, Lise Watier, Pierre Lavoie, Mitsou et plu-


sieurs autres qui n’ont jamais abandonné.

Je crois fermement que lorsque quelque chose nous tient à cœur, on


n’a pas le droit de simplement baisser les bras, et ce, peu importe
la raison. Une existence Paillette n'a de sens que si l'on choisit
consciemment la voie de la persévérance. Pour réaliser des rêves, ça
prend du courage, de la force, de la constance et une capacité à se
relever parce que je vous jure qu’il y aura des embûches. Ça fait par-
tie naturellement du processus. Il s’agit justement de tests destinés à
vérifier à quel point vous le voulez vraiment. Gardez toujours en tête
que chaque personne a la capacité de se relever après être tombée.
Rappelez-vous qu'aujourd'hui, vous êtes toujours debout après avoir
fait au moins cent mille chutes lorsque vous avez appris à marcher!

Par ailleurs, vous devrez savoir développer une compétence


extrêmement importante : celle de toujours transformer le négatif en
positif. C’est en regardant Tout le monde en parle et en entendant
mon nom durant l’émission que j’ai retenu la leçon. À suivre…

65
En résumé, la maîtrise du NO, c’est :

– Comprendre que la persévérance est un choix et non une


qualité avec laquelle on vient au monde. À tout moment, on peut mus-
cler notre résilience en choisissant consciemment de se relever les
manches et de continuer.

– Concevoir qu'un «  NON  » est seulement une nouvelle op-


portunité (NO) de trouver une façon créative de changer la situation
qu'on vit actuellement pour se rapprocher de celle qu'on souhaite
concrètement. Il faut pouvoir mettre l'accent sur les solutions le plus
rapidement possible et croire en ce qu’on fait même quand tout est
contre nous.

– Savoir que les «  NON  » ne sont pas une réponse finale. Ils
sont le test ultime pour mesurer à quel point on souhaite réellement
atteindre notre but.

66
© Photo : Maryline Tremblay
67
À tout moment, le
résultat final vous
appartient.

68
Chapitre 4

Change ton histoire,


change ta trajectoire

Mais tout peut changer. Aujourd’hui peut


être le premier jour de ta vie
– Etienne Daho

Comme lors de bien des dimanches, je m’apprête à m’instal-


ler confortablement pour regarder l’émission Tout le monde en parle,
animée par Guy A. Lepage. L’humoriste Sugar Sammy, que j’aime
beaucoup, y sera et depuis quelques jours, quelque chose de beau se
trame avec lui et son équipe. Il est le premier invité. Il descend donc
l'escalier du plateau de télévision et après quelques questions, il men-
tionne ceci :

– « Bla, bla, bla… Mélissa Normandin Roberge… Bla, bla, bla…


Les Maëstros

69
JE HURLE. IL VIENT DE DIRE MON NOM! À L’ÉMISSION LA PLUS
REGARDÉE DE TOUT LE QUÉBEC!

Pour bien comprendre, faisons un petit retour en arrière…

Plus précisément au début novembre 2014. Depuis quelques


semaines, j’ai dans ma mire le populaire humoriste que je trouve si
inspirant par son désir avoué et nommé à haute voix de conquérir la
planète. J’aime son air irrévérencieux, j’apprécie son style et malgré
le « personnage », je pense qu’il serait un excellent modèle pour mes
élèves. J’essaie donc de convaincre son équipe de l'inciter à rencontrer
en surprise mes jeunes Maëstros et comme à l’habitude, j’obtiens un
« non ». En fait, je devrais dire plusieurs « non », parce que j’ai fait plus
d’une tentative.

Comme si l’Univers m’avait entendue, je ne sais encore à ce


jour si c’était un hasard, une coïncidence ou juste un timing de fous,
Sugar Sammy est l’invité de la défunte émission En mode Salvail, le 14
novembre 2014. Il y va de blagues assassines qui visent directement
Shawinigan… ma ville.

« Honnêtement, qui appelle son agent de voyages pour booker


des vacances à Shawinigan? La seule fois que j’y suis allé, il y avait des
vieux et du foin. C’est tellement vieux à Shawinigan que l’équipe de
hockey s’appelle les Cataractes. Shawinigan, c’est la ville où les rêves
vont pour mourir. »

Assise sur mon divan, je meurs de rire. Je trouve ça réellement


très drôle; cinglant, mais hilarant. Les jours qui suivent deviennent
cependant un peu pénibles pour nous, citoyens de la Ville de l’énergie.
Les gens sont outrés  : le maire, le directeur de la chambre de com-

70
merce, la directrice de l’Office du tourisme. Les critiques fusent de
toutes parts. La page Facebook de l’humoriste se remplit rapidement
de commentaires haineux et racistes. Les médias en font une saga
interminable et soudainement, le Québec en entier se retourne contre
nous, traitant les Shawiniganais de frustrés, de «  petit peuple  », les
accusant de manque d’ouverture d’esprit... et je dois malheureuse-
ment avouer qu’ils ont raison.

Je suis estomaquée que de simples blagues tournent au vi-


naigre et je ne comprends pas comment on peut prendre tout ça au
pied de la lettre sans comprendre qu’il n’y a absolument rien de mé-
chant. J’ai toujours eu comme adage « Parlez-en en bien, parlez-en en
mal, mais parlez-en! »

Je n’en peux plus de voir les commentaires arriver de toutes


parts et que ça fasse encore plus mauvaise presse à ma ville. Déjà
qu’économiquement, les dernières années ont été particulièrement
difficiles, nous n’avons pas besoin de ce négatif qu’on est nous-mêmes
en train de créer. Surtout, je suis dégoûtée de lire, provenant de gens
de chez nous, des commentaires épouvantables, mesquins et d’une
méchanceté comme j’ai rarement vue. Je ne peux concevoir que de
simples blagues qui étaient oui, un peu incisives, aient pu provoquer
autant de haine.

Or, c’est là que la magie opère. Je pense que dans toutes cir-
constances, on n’a pas nécessairement le contrôle sur les événements
qui nous arrivent (quoiqu’on puisse très certainement les attirer
inconsciemment), mais on peut déterminer la finalité, ou du moins
comment on gérera le tout!

71
Rapidement, je demande à mes élèves d’écrire de beaux mots
ou d’envoyer des vidéos de messages d’amour sur la page Facebook de
Sugar Sammy. Je sollicite ensuite tous leurs parents afin qu'ils fassent
la même chose. En moins de deux heures, l’humoriste reçoit plus de
cent cinquante témoignages positifs d’enfants et d’adolescents qui lui
disent qu’ils le trouvent drôle, qui l’invitent à venir les voir ici, dans
notre ville, qui lui disent de ne pas écouter ceux qui lui veulent du mal,
etc. On sent déjà que l’énergie se transforme à ce moment-là et que le
négatif fait tranquillement place au positif dans les médias sociaux.
Au cours des jours qui suivent, les jeunes y prennent plaisir en conti-
nuant d’envoyer de l’amour sans rien attendre en retour. C’est beau
et particulièrement émouvant de voir que lorsqu’un groupe décide de
s’unir, ça amène de magnifiques résultats.

Une semaine après les événements, je reçois un coup de télé-


phone que je n’attendais plus  : celui de l’adjointe de Sugar Sammy,
qui se dit extrêmement touchée de ce qui se passe et qui m’annonce
qu’ils ont décidé non seulement de venir rencontrer mes élèves, mais
de faire un spectacle-bénéfice dans la salle de notre choix, duquel ils
nous remettront tous les profits.

Je vous rappelle que lors des semaines précédentes, ce sont


quatre essais non fructueux que j'ai tentés pour avoir une simple pe-
tite rencontre avec l'artiste. Or, la situation venait de prendre un tout
autre tournant.

C’est là qu’on comprend à quel point on peut se laisser abattre


par ce qui arrive dans notre vie. On a le droit de s’insurger, de plier les
genoux, de crier que c’est injuste, d’agir en victime et de rejeter toute
la faute sur les éléments extérieurs, ou encore de choisir consciem-
ment et volontairement que les choses se passeront d'une autre façon.

72
Qu’on changera non seulement notre perception, mais aussi notre at-
titude pour en adopter une nouvelle.

La vague s’est poursuivie des mois et des mois après ce coup


de fil, qui a très certainement eu un impact incroyable sur ma vie pro-
fessionnelle. Cette histoire a été reprise partout. L'humoriste était de
tous les plateaux de télé, de Salut Bonjour à Ça finit bien la semaine,
des Enfants de la télé aux nouvelles de TVA. De retour à En mode
Salvail, il a annoncé sur les ondes qu’il débarquerait à Shawinigan
pour le spectacle-bénéfice pour son « crew », les Maëstros. Toutes les
radios parlaient de cette belle relation qui existait entre mes écoles et
l’artiste de renommée, je vous le rappelle, internationale. Même les
médias anglophones du Canada parlaient de cette histoire.

Assise sur le bout de mon divan à écouter la populaire émis-


sion Tout le monde en parle, j’entends l’animateur, son co-animateur
et le populaire humoriste raconté cette histoire digne de conte de fées.
On montre des extraits vidéo sortis tout droit de notre page Facebook.
Les invités sur le plateau ont des mots incroyables à notre égard et
au travail qu’on réalise auprès de nos jeunes élèves. Je n’en reviens
juste pas. Nos médias sociaux sont inondés par la suite de gens de
partout au Québec qui s’intéressent à notre mission, et oui, vraisem-
blablement, le négatif de la situation initiale semble avoir complète-
ment disparu. Comme s’il n’avait jamais existé, pour laisser la place
au beau qui est en train de se produire.

Ce sont vingt-cinq mille dollars qui ont été amassés le soir du


spectacle. J’étais dans la salle, les yeux brillants de fierté à entendre
notre nouveau meilleur ami raconter combien c’était beau ce que nous
avions vécu ensemble. Je regarde encore parfois cet extrait accessible

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sur YouTube en réalisant l’importance de ne jamais se laisser abattre
par qui que ce soit ou par quoi que ce soit.

Bon nombre de personnes se victimisent rapidement au


moindre pépin. On prend un malin plaisir à s’apitoyer sur son sort
parce que c’est beaucoup moins forçant que de trouver des solutions
et de changer ce qui est en train de se produire dans notre vie. Je pense
que c’est un réflexe et une habitude que de se conditionner à chan-
ger son mode «victimite » pour adopter une toute nouvelle attitude.
Si je me fie à ma belle histoire d’inspiration indienne (je cherchais
un synonyme pour ne pas répéter Sugar Sammy) et que je regarde
tous les gens qui se sont sentis attaqués pour aucune raison valable,
qui ont préféré se plaindre et qui ont choisi le chemin sombre de la
méchanceté, le constat était assez facile à faire : ça ne les rendrait pas
particulièrement heureux de rester dans cette énergie.

La vie ne se déroulera peut-être jamais comme vous le pré-


voyez. On a beau faire des plans, imaginer la suite des choses, mais ça
ne veut pas dire nécessairement que vous devez la subir si elle ne fait
pas votre affaire. Martin, mon mentor, m’a déjà dit une phrase hyper-
percutante : « Change ton histoire, change ta trajectoire. »

T’es pas heureux de la tournure des événements? Change-les.

T’es pas heureux de la façon dont se déroulent les choses?


Change-les.

T’es pas heureux du chemin que ta vie emprunte? Change-la.

En vous entraînant à changer votre façon de penser, parce


que oui, c’est un réel entraînement, vous changerez votre façon de

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vous comporter et graduellement, les agissements de victime dispa-
raîtront aussi. Ça ne veut pas dire nécessairement de toujours mettre
ses lunettes roses, de faire du déni et d'abuser de la pensée positive
parce qu’on n’est pas capable d’affronter ce qui se présente à nous,
mais c’est de comprendre que ce n’est jamais tout noir et qu’on peut
y apporter notre lumière. En somme, on peut modifier notre énergie
juste pour vivre la situation différemment.

En résumé, il faut savoir mettre à « off » la


discographie d’Isabelle Boulay.

MAIS QU’EST-CE QUE LA BELLE ISABELLE VIENT FAIRE DANS


L’HISTOIRE?

Suivez-moi. Ce sera très simple.

Vous savez, la chanson Je suis un saule inconsolable...

« Je suis un saule inconsolable

Le plus désemparé des arbres

Mais qu’est-ce que ça peut m’faire l’amour, la guerre?

Je t’aime… je t’aaaaiiiiiiimmmmeeeeeeeeee... »

Ça devient encore plus dramatique et lourd de sens quand on


la chante avec le trémolo dans la voix.

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Mon point est (parce que oui, il y aura une explication logique)
que certes, les chansons d’Isabelle sont magnifiques, bien écrites
et surtout bien chantées, mais ELLES NOUS GARDERONT DANS UN
ÉTAT DE VICTIME JUSQU’À LA FIN DES TEMPS.

Si ça ne va pas bien dans ta vie, écoute-la, Le saule inconso-


lable… une fois, peut-être deux.

Mais pas l’album au complet.

Surtout pas toute la discographie.

Parce que tu vas rester dans cette énergie de désespoir-là. En


réalité, ce que ça te prend quand tu tombes dans ce « mood », c’est
Despacito, de Justin Bieber.

Mon point est que (parce que oui, je poursuis cette explication
logique avec le même exemple) tu as toujours le choix : CONTINUER
DE PLEURER SUR LE FUCKING SAULE INCONSOLABLE

OU...

Changer de disque. D’histoire. De chanson, au pire! Tu dois


transformer ce que tu es en train de vivre pour expérimenter ce que
tu veux réellement dans ta vie.

Ce qui ne veut pas dire de renier ses émotions. Bien au


contraire. On doit les ressentir pour ensuite choisir de les transfor-
mer. Changer l’histoire en cours, c’est également la même chose. C’est
comprendre que tout ce qu’on a vécu a réellement existé. C’était sans

76
doute plate, même peut-être douloureux, et on n’oublie pas ce qui est
arrivé, mais au bout du compte, on peut aussi choisir de mettre tout
ça de côté pour créer ou recréer du positif dans notre vie.

T'sé, belle paillette qui lit ces lignes (rendue au chapitre 4, ça


me donne un peu le droit de te donner un nouveau surnom et de com-
mencer à te tutoyer; sache cependant que je reviens assez facilement
au vous!), personne ne te doit iren. Je sais que c’est bête à dire et à
lire comme ça, mais si je reprends mon histoire indienne humoris-
tique, Sugar Sammy ne devait absolument rien aux gens de Shawi-
nigan lorsqu’il a fait ses blagues. Mes compatriotes ont ressenti de la
colère et de l’amertume probablement parce qu’ils jugeaient qu’il nous
devait respect. La réalité, aussi cruelle soit-elle, c’est qu’il n’avait pas
fait le serment un jour dans sa vie de ne pas faire de blague sur « Pail-
lettesville » (alias Shawinigan). Nous avons décidé collectivement, par
un beau soir de novembre, qu’on était outrés et que ça faisait de nous
des victimes du sympathique mais baveux comique. On s’est sentis
diminués, traités injustement, et notre manque de confiance a sans
aucun doute pris le dessus sur cette situation qui était une tempête
dans un verre d’eau.

Quelqu’un qui refuse le statut de victime et qui décide de


transformer les éléments négatifs en quelque chose de merveilleux a
assez confiance en lui pour décider qu’il en sera autrement, que rien
ni personne n'aura de pouvoir sur lui et ne le fera se sentir inférieur.
Rien ne sera juste ou injuste à moins que vous ne le décidiez.

Est-ce que la situation que vous vivez actuellement est réel-


lement injuste? Ou avez-vous plutôt décidé que votre perception la
verrait ainsi?

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Est-ce que la personne qui veut supposément vous faire du
mal le fait intentionnellement et vous lui accordez beaucoup trop
d’importance ou vous pourriez continuer votre chemin tout simple-
ment en sachant que lorsque quelqu’un agit de cette façon, c’est que
ça cache beaucoup de tristesse et de manque d’amour?

Changer son histoire pour une nouvelle trajectoire, c’est


aussi transformer le négatif en positif en assumant non seulement
ses émotions, mais également ses actions. Si vous avez lu le cha-
pitre précédent (il est très important de ne pas sauter de chapitres de
ce livre; déjà qu’il n’y a rien de linéaire, il faut pouvoir suivre et lire
CHAQUE PAGE), vous comprendrez qu’il faut en tout temps créer son
line-up, c’est-à-dire ne jamais être le spectateur de sa vie, mais bien
en être l’acteur. Vous aurez beau chialer, râler, pleurer, maudire tous
les dieux, si ce que vous vivez en ce moment est pénible pour vous,
vous pouvez toujours vous mettre à trouver des solutions et à intégrer
l’importance d’être proactif.

Chaque situation difficile a été pour moi l’occasion de me réin-


venter et de définir les nouveaux termes de l’histoire.

La faible estime que j’ai eue pendant trop longtemps m’aura


permis de développer mon sens de l’humour et ma repartie. J’ai sou-
vent regardé des spectacles d’humoristes pour observer leur sens du
punch et l’adapter à ma réalité. Longtemps, ça a été un de mes méca-
nismes de défense.

Les nombreux refus professionnels que j’ai essuyés dans ma


carrière de productrice ont été des tremplins pour quintupler ma
créativité dans le but de changer l’issue des réponses négatives.

78
Ma crise de la trentaine a été le moment idéal pour me redéfi-
nir et découvrir la nouvelle direction que je souhaitais prendre dans
ma vie.

Notre séparation, le père de mes enfants et moi, a été un point


tournant à plusieurs chapitres  : fonder Paillettes INC., voyager par-
tout dans le monde, être épanouie à faire ce que j’aime, rencontrer
des gens de partout dans le monde et je pourrais continuer comme ça
pendant des heures.

Changer votre histoire implique que vous devrez arrêter de


toujours vous raconter les mêmes conneries. Celles qui vous donnent
mille et une excuses qui expliquent techniquement pourquoi vous ne
réussissez jamais à vous sortir de vos impasses. Ça veut aussi dire
que vous devrez fermer certains chapitres de votre vie pour en écrire
de nouveaux qui correspondront davantage à vos attentes. Ça signifie
très certainement aussi d’arrêter de donner du pouvoir à des éléments
banals, qui surgissent sans crier gare mais auxquels vous accordez
BEAUCOUP trop d’importance en gaspillant toute votre énergie et
votre focalisation sur eux et en ne vous concentrant pas là où c’est
réellement nécessaire : votre progression.

Imaginez si le maire de Shawinigan avait lui-même repris la


balle au bond en faisant de l’humour avec les propos initiaux de Sugar
Sammy. Peut-être qu’il aurait été l’invité de Tout le monde en parle,
assis aux côtés de l’humoriste à rire et à boire du vin rouge sur le
plateau.

Imaginez si la directrice de l’Office du tourisme avait rebondi


positivement à la suite des blagues entendues à l’émission de fin de
soirée en novembre 2014. Peut-être aurait-elle pu créer une entente de

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partenariat afin que l’humoriste devienne le porte-parole de la pro-
chaine campagne de visibilité pour qu’on vienne de partout visiter
Shawinigan.

On ne peut pas savoir. Je n’insinue pas que ces gens que je


connais bien ont agi en victime, mais je continue de penser que le
négatif engendre le négatif et que le contraire est aussi vrai. Je préfère,
et de loin, essayer de trouver le beau dans ce qui se passe et le tourner
à mon avantage parce qu’au bout du compte, la façon dont je me sen-
tirai et que je vivrai le moment m’appartient complètement.

Ça ne veut pas dire que je ne pleure jamais le temps d’une


chanson d’Isabelle Boulay, mais je sais que je ne peux rester éternel-
lement dans cet état-là, que je suis responsable à 100 % de ma playlist,
pour continuer à illustrer mon point avec une analogie musicale. J’ai
juste à syntoniser le canal « Justin Bieber » pour commencer à danser,
à être dans l’action et à faire les choses autrement.

Lorsqu’on se rappelle qu’on est né pour briller, on se rappelle


du même coup que ce n’est pas en agissant en victime et en subissant
sa vie qu’on réalise son plein potentiel. Il faut s’occuper de soi, s’assu-
rer de faire ce qui nous fait du bien, transformer ce qui ne nous plaît
pas en quelque chose qui a du sens pour nous et se rappeler que tout
comme la persévérance, le bonheur est un choix. Écrire une nouvelle
histoire aussi.

Le 11 février 2016, c’était mon anniversaire. Mais c’était aussi


le spectacle, qui affichait complet devant mille personnes, de l’hu-
moriste qui m’avait dit non quatre fois auparavant. Toute la journée,
j’avais donné des entrevues à tous les médias du Québec pour expli-
quer que tout ce qu’on avait fait, c’était simplement d’écrire des mes-

80
sages bienveillants à notre humoriste préféré pour contrer tous les
messages haineux qu’il avait reçus dans les dernières heures. Je re-
gardais les gens rire autour de moi. J'observais mes élèves, avec leurs
regards remplis de fierté de voir que le grand comique était là spé-
cialement pour eux. Puis j’ai souri en voyant le dénouement de cette
magnifique histoire que nous avions tous écrite ensemble.

D'ailleurs, j’ai eu besoin de me souvenir, dans une situation


précise, de ne pas oublier de me raconter la même histoire en boucle…
Cours au prochain chapitre, mais juste avant :

Donc, changer son histoire pour changer


sa trajectoire, c’est :

– Refuser le statut de victime peu importe les circonstances


et les situations. Comprendre qu’on n’a pas de pouvoir sur les événe-
ments qui nous arrivent, mais qu’on peut choisir comment on va les
gérer.

– Être responsable en tout temps de son état d’esprit, de sa fa-


çon de réagir, de sa capacité à interpréter les faits différemment pour
en avoir une tout autre perception.

– Transformer en tout temps le négatif en positif, car malgré


tout, on apprend, et il est possible de le tourner à notre avantage en-
vers et contre tous.

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© Photo: Nathalie Godin
82
Écouter le saule
inconsolable
d ’ Isabelle Boulay
c ’ est bien, mais
parfois, il faut
changer pour
Justin Bieber.

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84
Chapitre 5

Chu toute sauf fonctionnelle

Le beige n’est pas une couleur, encore


moins une façon de vivre sa vie
– Mélissa Normandin Roberge

« Je ne suis pas vraiment pâmé à 100 % sur toi. Non, attends.
Mais ce n’est pas vraiment ça que je veux dire non plus, je ne sais pas
comment l’exprimer. En fait, je ne suis pas heureux ni malheureux,
et je me rends compte que je pense que le fonctionnel, c’est ce que ça
me prend, sinon j’ai peur de me faire mal. Je ne suis pas capable de
sortir de ça ».

C’est à ce moment que je me suis écroulée. En fait, je devrais


plutôt dire liquéfiée. Sur place. En larmes. Beaucoup de larmes. Parce
que ces mots-là, ils sont sortis de la bouche de l’homme pour qui je
vendrais ma mère. Celui pour qui j’ai commencé à croire que les coups
de foudre existent réellement, parce que dès l’instant où je l’ai vu, j’ai
été frappée comme je n’aurais jamais osé l’imaginer. Il était tout ce
que je voulais, tout ce que j’attendais, mais surtout, quelque chose

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d’inexplicable dès les premiers instants. Le genre de chose qui se
passe une seule fois dans une vie.

Dès le début, c’était une parfaite connexion. À s’écrire mille


fois par jour. À rire, à s’envoyer des vidéos où l'on se raconte des anec-
dotes de notre vie. À me perdre dans ses magnifiques yeux bleus pen-
dant nos appels vidéo. À espérer, à imaginer notre futur, à me dire que
c’était sans aucun doute mes anges qui me l’envoyaient.

Aussi à déceler, au fil du temps, l’immense peur qui l’habite,


celle d’être heureux et de se laisser aller dans ce qui pourrait être,
d'avancer trois pas pour en reculer mille, de m’avouer son amour pour
ensuite me dire que son cœur refuse d’aller dans une direction où il
est déjà allé afin de se protéger.

Aussi à le garder près de moi malgré tout, parce que ça fait


beaucoup moins mal de ne l’avoir qu’à moitié plutôt que de le laisser
partir à tout jamais. Enfin, à constater que cet homme que j’aime pro-
fondément, ce grand brun réservé préfère réellement le statu quo. Le
pilote automatique.

L’entendre prononcer ces mots qui ne font pas de sens : « ce


qui marche le plus pour moi, c’est le fonctionnel ».

Parce que c’est exactement ça, être fonctionnel. C’est, pour


reprendre exactement ses mots, ne pas être heureux mais pas mal-
heureux non plus. C’est être correct. Sans plus, sans moins. C’est être
beige, sans couleur ni artifice. C’est faire et refaire les mêmes actions
tous les jours sans nécessairement y trouver beaucoup de sens. C’est
courir à gauche et à droite sans avoir pris le temps d’exister. C’est

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s’entourer, ou pire, partager notre vie avec des gens qui ne nous font
plus briller juste parce que c’est ainsi que ça doit être.

C’est ne plus prendre le temps de respirer profondément pour


mieux remercier de vivre cette magnifique journée. C’est voir défiler
les secondes, les minutes, les heures, les jours, les semaines, les mois
et parfois les années complètes sans bouger, sans changer quoi que
ce soit même si l'on sait que c’est justement tout le contraire qu’on
devrait faire.

C’est regarder, soir après soir, les mêmes émissions de télé.


C’est ressasser les vieux souvenirs qui nous ont tellement fait mal
qu’on est convaincu qu’on en sera prisonnier toute notre vie. C’est
aussi refuser à son cœur et à sa tête d’aller dans une direction plus
ensoleillée de peur de subir la pluie ou une tempête, parce que comme
c’est déjà arrivé, forcément, ça se répétera.

Quand vous êtes sur le pilote automatique, vous êtes beige et


fonctionnel.

Votre vie ne goûte rien, vous ne profitez même plus du pay-


sage et vous faites du temps. Vous êtes dans l’avenir, qui ne suscite
pas vraiment une grande excitation en vous parce que ça ne semble
pas très glorieux, et vous êtes encore dans le passé à vous convaincre :
« À quoi bon? Tout le restant de ma vie sera insipide de toute façon! »

Or, pendant ce temps-là, il y a l’instant présent. Le moment


où vous pourriez avoir totalement le contrôle et décider de faire tout
ce qui vous plaît en étant dénué de l’angoisse et de l’anxiété. Où vous
pourriez vous sortir de ce cadre qui vous empêche d’être pleinement
conscient de ce qui se passe.

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Cette journée-là, j’aurais eu envie de hurler au visage de cet
homme que j’aimais profondément en lui disant que ça n’avait pas de
sens de souhaiter ça pour le reste de ses jours. Qu’il était carrément en
train de passer à côté de sa vie. Que son confort, ses obligations, ses
responsabilités et ses blocages allaient finir par l’éteindre à tout ja-
mais. Moi qui voyais en lui tout le potentiel qu’il ne s’était sans doute
même pas autorisé à voir, ne serait-ce que le dixième des capacités
en question. Je pense bien humblement que j’ai ce réel don de voir
chez les gens leur lumière, leur véritable nature. Je savais qu’il n’était
pas ce que qu’il voulait bien laisser croire. Je sentais tout ce qui bouil-
lait en lui, mais qu’il avait pris soin d’étouffer sous de nombreuses
couches « rationnelles » avec les années.

J’aurais voulu lui crier toute ma rage, parce que lorsqu’on voit
quelqu’un qu’on aime aussi fort, ce qu’on veut pour cette personne,
c’est tout le bien du monde. On désire son bonheur, sa liberté, sa plé-
nitude, mais ce que j’avais devant moi, c'était un homme brisé qui
croyait sincèrement qu’on doit rester où l'on est par peur de ce qui se
trouve à l’extérieur de ce « confort ».

J’ai donc juste pleuré en ruminant ce rejet dans ma tête. En


essayant de verbaliser l’immense chagrin et injustice que je vivais. En
ne trouvant jamais les bons mots.

J’ai aussi eu un peu l’impression d’avoir mon miroir. De per-


cevoir un peu mon histoire à travers la sienne, parce que quelques
années auparavant, j’étais dans cette situation de vie fonctionnelle. Je
me contentais de peu en sachant que je pouvais plus. Je n’osais plus
sortir des balises que je m'étais moi-même créées de peur de tomber
de l’autre côté. J’aimais la sécurité que j’avais parce que c’était tout ce
que je connaissais, mais je ne pouvais m’empêcher de pleurer chaque

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soir en me couchant, réalisant à quel point j’étais en train de gâcher
ma vie.

Puis un jour, j’ai eu trente ans et je n’ai pas vu la crise majeure


arriver. Je la redoutais, mais je ne pensais jamais qu’elle serait aussi
percutante. Je sais que vous jugez peut-être cette dernière ligne en
vous disant : « Trente ans, ce n’est pas la mer à boire… calme-toi! »

Mais pour moi, c’était une catastrophe. Sur papier, j’avais pour-
tant tout pour être heureuse : des enfants, un conjoint, une belle mai-
son et une entreprise qui roulait très bien, mais dans mon cœur, un
vide immense. C’est là que l’urgence de vivre est apparue. La journée
de mon trentième anniversaire, j’étais très émotive. J’ai pleuré toute
la journée et j’envoyais promener tous ceux qui osaient me souhaiter
«  Joyeux anniversaire  ». Je ne pouvais pas croire que les trente der-
nières années avaient passé aussi rapidement ni que les prochaines
allaient sans aucun doute avoir aussi cette cadence. Quelque chose
à l’intérieur de moi voulait émerger, mais je le rhabillais sans arrêt.
J’étais terrorisée de faire les actions nécessaires parce que je n’avais
aucune idée de ce qui pouvait m’attendre. En même temps, j’aimais
mon confort. J’aimais être une maman, j’aimais ma sécurité finan-
cière, mais la tempête a été plus forte.

Je me rappelle avoir eu très souvent la réflexion : « Je vais par-


tir en Chine… très longtemps… »

Encore à ce jour, je n’ai aucune idée pourquoi cette pensée


précise revenait. Je voulais fuir, m’éloigner, sans doute pour essayer
de me retrouver. Parce que c’est ce qui arrive lorsqu’on traverse ce
genre de crise : cette vie fonctionnelle ne nous satisfait plus, mais en
même temps, on a perdu tous nos repères. On n’a plus aucune idée de

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qui nous sommes, de ce que l’on veut ou ne veut plus. Notre focus est
sur le manque à combler. On voudrait pouvoir être ailleurs mais on
est paralysé par la peur. Le bonheur fait peur majoritairement parce
qu’on sait qu’on devra faire des actions et des choix déchirants.

C’est aussi ce qui m’a le plus frappée avec mon projet Pail-
lettes. De voir autant de femmes qui subissent des relations, des em-
plois qui leur enlèvent de plus en plus leur joie de vivre, des situations
qu’elles tolèrent parce qu’elles sont perdues. Elles ne savent plus où
elles en sont. Elles ne comprennent surtout pas encore qu’elles ont
laissé la fonctionnalité et le beige envahir leur vie. Parce que c’est ce
qu’on nous a appris toute notre vie.

On juge les gens qui voient trop grand.

On juge les gens qui font des changements majeurs dans leur
vie.

On juge les gens qui sortent des sentiers battus pour reprendre
leur vie en main.

On juge les gens qui semblent pourtant tout avoir relative-


ment à ce que la société dicte comme « conditions gagnantes » pour
être apte au bonheur.

C’est là qu’on fait fausse route. Parce qu’on ignore deux choses :
l’importance de se connecter à ses valeurs profondes et celle de sortir
toujours un peu plus de sa zone de confort.

Belle fille, parce que oui, je décide, pour appuyer mes mots,
que je passerai au « tu » à l’instant, « C’est quand, la dernière fois que

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tu t’es demandé qui tu étais réellement, ce qui était important pour
toi et je devrais même dire NON-NÉGOCIABLE? As-tu pensé que, par-
fois, la peine et le manque d’accomplissement que tu peux ressentir
viennent justement du fait que tu n’es pas connectée à ce qui pourrait
te faire vibrer, soit tes valeurs? As-tu déjà pensé que de ne pas te sentir
100 % à ta place était justement dû au fait que tu étais complètement
à côté de ton X? As-tu déjà réalisé que oui, la fonctionnalité t’avait
enlevé une partie de ton être juste parce que c’est supposément ainsi
que ça devrait être? »

C’est ce dont je me suis rendu compte avec du recul. J’avais


ignoré ce qui faisait partie de moi. J’avais mis tout ça à l’écart sous
prétexte que selon la société, j’avais tout en main pour continuer mon
chemin sans trop de chi-chi : les fondements de mon être. Les fonda-
tions de ma maison n’étaient plus stables, entre autres, à cause de ce
« petit détail ».

En cheminant avec le temps, je me suis vite aperçue à quel


point la liberté est essentielle pour moi. J’avais besoin de respirer, de
voir autre chose, d’explorer cette planète et surtout de ne plus faire du
surplace en regardant semaine après semaine les mêmes émissions
de télé. Je n’en pouvais plus de devoir rendre des comptes à la per-
sonne qui partageait ma vie comme si j’avais quatorze ans alors que
ma vision de couple était beaucoup plus une équipe qu’un rapport de
force entre deux personnes.

J’avais aussi besoin de liberté d’être. Je ne riais plus. Je n’osais


plus faire de blagues, moi qui aime tant l’humour et faire rire les gens
autour de moi. Je pense que pour « être grande », comme j’ai été une
maman très jeune, j’avais mis un masque de femme plus mature qui
avait besoin de prouver à l’univers entier que j’étais non seulement

91
une bonne femme d’affaires, mais également une excellente maman,
conjointe, fille impliquée dans tout, etc. Exactement le contraire de la
liberté même.

J’avais aussi réprimé mon ambition et pour être sûre qu’elle


ne réapparaisse pas trop souvent, j’ai fréquemment fait exprès d’auto-
saboter - ou de laisser les autres le faire -, plusieurs projets. À vingt-
quatre ans, par exemple, une agence de mannequins de Montréal
m’avait approchée pour travailler avec moi. C’était à la suite d'une
première séance photos destinée à célébrer une importante opération
que j’avais eue à la mâchoire quelques mois auparavant. Le photo-
graphe de l’époque avait transmis le résultat de notre photoshoot à
cette agence. J’ai toujours eu un peu au fond de moi le désir de goûter
à cette vie qui m’apparaissait glamour et je m’étais dit « O.K., c’est le
temps de tenter ma chance ».

J’ai été engagée. On m’a offert un premier contrat dans un im-


portant défilé de Montréal pour un jeune designer bien connu. Que
j’ai accepté. J’étais si fière et heureuse de goûter à cette nouvelle expé-
rience qui allumait l’adolescente que j’avais été. Je commençais alors
un travail pour rebâtir ma confiance en moi et cette bénédiction du
ciel arrivait à un excellent moment pour moi. J’étais dans la grande
ville à faire les essayages, entourée de mannequins plus jeunes que
moi et malgré l’insécurité qui m’habitait, je voulais absolument aller
jusqu’au bout. J’avais enfin l’impression qui se passait quelque chose
de totalement excitant dans ma vie. Et de surcroît, quelque chose qui
me ressemblait tellement, même si je n’avais jamais osé avouer à qui
que ce soit que c’était un rêve sur la liste à accomplir.

Mais je ne l’ai jamais fait. Après les essayages, et quelques


jours avant le défilé au marché Bonsecours, endroit emblématique de

92
la mode de la grande métropole, je me suis désistée parce que la per-
sonne qui était dans ma vie avait réussi à me convaincre qu’une bonne
maman (j’avais mon fils de quatre ans) ne fait pas ça, des contrats
de mannequinat. Qu’une mère digne de ce nom mise sur sa famille
et que c’était mon ego et mon besoin de valorisation qui m’avaient
poussée dans cette direction. Il avait même presque réussi à me
convaincre que ce n’était pas vraiment ce que je souhaitais. J’ai réussi
à me convaincre que comme toute bonne maman, mon highlight de la
journée, était d’aller faire des courses au supermarché, et me réjouir
d’avoir de belles fleurs sans mauvaises herbes. Finalement, pour être
sûre que le projet ne fonctionne jamais, je suis tombée enceinte de
mon second bébé quelques semaines après.

On dit souvent que ce à quoi on résiste persiste. Or, c’est reve-


nu. Parce que ça revient toujours. Plus vous essaierez d’ignorer vos va-
leurs importantes, plus la vie mettra sur votre chemin des personnes
ou des situations qui vous défieront et qui essaieront inconsciemment
d’élargir vos œillères.

Comment peut-on être réellement heureuse lorsqu’on ignore


volontairement l’entièreté de notre personne et qu'on laisse le pilote
automatique guider nos choix alors que c’est probablement à des an-
nées-lumière de ce qu’on souhaite réellement? Ça finit toujours par
nous rattraper.

Cette crise du mitan m’en aura fait voir de toutes les couleurs.
J’ai expérimenté, trébuché, pleuré, angoissé, eu des doutes, tourné en
rond pendant au moins trois ans. J’aurais aimé vous dire qu’en une
semaine, tout était réglé, mais ce serait vous mentir effrontément.
J’en arrive d’ailleurs à mon deuxième point : pour vivre une existence

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Paillette et arrêter de subir le trop-plein de beige dans votre vie, vous
devrez absolument sortir de votre zone de confort.

Pour expliquer mon point, je reprends les mots de mon bel


homme aux yeux bleus : « Je ne suis pas malheureux, mais je ne suis
pas heureux non plus. »

C’est exactement ce qui arrive lorsqu’on reste dans notre zone


de confort. En fait, beaucoup de gens n’oseront pas l’avouer, mais ils
sont en ce moment même tétanisés par la peur. Il faut que je sois
honnête : vivre selon ses valeurs amènera immanquablement de fré-
quentes « sorties de zone de confort ». Je sais très bien que ce terme
à la mode est employé à outrance, qu’on l’utilise à toutes les sauces,
qu’on le lit dans tous les livres de développement et de croissance
personnelle et qu’on l’entend de la bouche de tous les conférenciers
de motivation. Pourtant, il n’y a rien de plus vrai.

Quand plus rien ne nous surprend, que c’est familier et sécu-


ritaire, on y est… en plein dedans… cette fameuse zone de confort.
Pour certains d’entre vous, ce sera parfait. Vous y serez bien. On le voit
parfois avec des membres de la génération de nos parents qui ont tou-
jours eu le même travail. Ils ont toujours pris leurs vacances au même
endroit, au même moment et ils ne sont pas plus malheureux pour
autant. Si vous ne vous posez pas de questions, que tout va bien, que
tout ça vous convient, refermez ce livre et oubliez tout ce que je vous
ai raconté jusqu’à présent. Mais si, belle fille (oui, le « tu » revient), en
ce moment tu sais que tu peux et vaux plus, que tu as l’impression
d’étouffer un peu plus chaque jour, que tu as remarqué dernièrement
que tes yeux brillent une fois sur trois, je t’annonce que tu devras être
confrontée à repousser les limites qui t’entourent, et bientôt… avant
que les dégâts ne soient trop grands.

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L’idée de sortir de là nous apparaît dangereuse. On a peur de
se blesser, d’échouer, c’est totalement contre nature et extrêmement
confrontant. Il y aura une zone de malaise où de nombreux doutes
apparaîtront et ce sera un peu à l’image d’un bernard-l’ermite. Il sait
très bien que s’il reste dans sa carapace trop petite, il s’éteindra tôt
ou tard, mais il n’est parfois pas prêt à la quitter complètement. Il
fait quelques petits pas à l’extérieur et revient rapidement se cacher.
Il retourne dehors et rentre aussitôt. Il ne sait pas réellement ce qu’il
doit faire, et surtout, si c’est la bonne chose à faire, mais il continue
d’asphyxier. Et ça continue… encore et encore…

Puis vient la phase d’adaptation. On s’aperçoit que, malgré la


peur, on commence à ressentir un bien-être. On voit peu à peu les
résultats. On commence à comprendre tout ce qui vient de nous arri-
ver, pourquoi le négatif était nécessaire pour grandir et pourquoi telle
épreuve a été mise sur notre route.

Arrive finalement la phase de la constatation. On s’aperçoit


qu’on vient de franchir une nouvelle étape. On peut même rire de voir
à quel point c’était totalement ridicule d’avoir aussi peur. Qu’il n’y
avait rien du tout pour s’en faire autant.

Comme un saut en parachute. Même chose.

On décide qu’on veut réaliser ce rêve de se lancer dans les


airs. On jongle avec l’idée pendant peut-être quelques jours, voire des
semaines et des mois. On prend les informations mais on ne réserve
pas. On se trouve des amis pour venir avec nous, mais on recule. On
décide finalement d’une date, mais la peur nous prend tout au long
des explications du moniteur. Le cœur veut nous sortir de la poitrine
pendant la montée en avion. On se demande pourquoi on voulait

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vivre cette aventure qui n’a aucun sens. On songe même à changer
d’idée lorsque la porte s’ouvre. Puis, le plus lentement possible, en
tremblant, en bégayant, on compte avec un trémolo dans la voix : 1, 2,
3, ……………………………… et on saute.

On s’aperçoit alors de l’état de bien-être dans lequel on est


durant la descente. Il y a un mélange d’excitation et de joie, mais éga-
lement d’invincibilité. Tout cela apparaît en même temps. On se sur-
prend à avoir le sourire aux lèvres et à regarder autour de nous pour
voir comme c’est beau. Le moniteur nous aide à ouvrir le parachute
parce que tout comme la zone de confort, on s’aperçoit qu’il y a de
nombreuses personnes qui se portent volontaires pour nous accom-
pagner dans notre processus. La descente, mais surtout l’atterrissage,
se fait en douceur. On arrive en bas confiant, heureux et tellement fier
de nous! La première chose qu’on aimerait faire à cet instant précis,
c’est de retourner tout de suite à dix mille pieds dans les airs et se
relancer dans le vide.

Je vous raconte tout ça, mais je n’ai jamais sauté en parachute.


Je parle donc à travers mon chapeau dans les deux derniers para-
graphes, MAIS s’il y a une chose que je sais, c’est à quel point c’est
salutaire de repousser ses limites.

C’est justement en allant là où je ne pensais pas que j’ai non


seulement développé mon courage et ma résilience, mais aussi que
j’ai réellement découvert qui je suis. J’ai aussi appris comment je réa-
gis dans des situations précises et j’ai pu développer mes propres ou-
tils pour m’aider à cheminer encore plus.

Sauf que tout ça arrive lorsqu’on arrête d’être ou de vouloir


du fonctionnel dans notre vie. J’aime beaucoup cette phrase et me la

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répète tellement souvent : « La différence entre ce que tu es et ce que
tu veux devenir réside dans ce que tu fais. » C’est à travers cet écart
qu’on peut se mettre en action et construire notre nouvelle réalité.

ON VA SE LE DIRE (j’écris en lettres majuscules pour démon-


trer toute l’importance de mon discours)

« J’AI TU L’AIR, MOI, D’UNE FILLE FONCTIONNELLE? »

Je porte des tutus devant la tour Eiffel; tutu que j’ai porté dans
le métro qui m’a amenée à cette dite tour Eiffel.

Je chante devant les douaniers juste pour essayer de les faire


rire parce que je ne supporte pas leur air bête.

Je demande des pina colada au service à l’auto du Tim


Hortons.

Je danse sur Despacito à répétition parce que c’est la seule


chanson qui peut instantanément guérir tous les maux de la terre.

Je vais voir des shows de Paul McCartney avec une robe en


drapeau britannique comme Geri Halliwell des Spice Girls.

Je capote toujours autant sur les Backstreet Boys.

Je fais des centaines de stories par semaine dans lesquelles je


n’ai plus aucune inhibition et je parle, entre autres, de mes lèvres qui
ne ferment pas de façon étanche.

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Enfin, n’oublions jamais que je fais des live en sous-
vêtements…

C’est peine perdue. Je ne pourrai jamais être fonctionnelle. En


fait, je refuse totalement de l’être. Je refuse d’essayer de résister au
changement pour avoir une vie qui a du sens, d’être en attente trop
longtemps avant de pouvoir avancer… d’accepter que le statu quo di-
rige ma vie. C’est non. Juste non.

J’espère sincèrement que cet homme qui a un jour fait cha-


virer mon cœur par un soir de novembre dans un resto de Québec
pourra lire ces lignes et comprendre que le beige n’est pas une vraie
couleur, et encore moins une façon de vivre sa vie. Que d’ignorer la
passion, l’amour véritable, les tourbillons, et même les tempêtes ne
sont pas une façon d’échapper à la conformité et au statu quo. Que
ce qui nous fait perdre de vue l’essentiel sont justement les automa-
tismes. Ce sont eux justement qui nous éloignent de ce qui compte le
plus pour nous.

La vie ne doit pas être juste de base ou de surface. C’est telle-


ment plus que ça. C’est justement tout le contraire : de la fantaisie, de
la créativité, de la légèreté, du plaisir, et de réels sentiments intenses,
vibrants et vrais. En tout temps nous avons droit au bonheur, même si
cela fait peur parce qu’on peut se faire mal. On peut exclure le pilote
automatique de notre quotidien pour justement éviter de perdre tout
le beau qui se déroule juste là devant nos yeux.

Et on ne doit surtout jamais perdre de vue qu’on ne peut pas


répondre « correct » à la question : « Es-tu heureux? »

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En résumé, Chu toute sauf fonctionnelle, c’est :

– Réaliser que notre existence est sur le pilote automatique.


Qu’on n’apprécie plus ou pas assez ce qui se déroule devant nos yeux.
Que ça va… sans plus, ni moins.

– Comprendre que cet état nous éloigne de notre potentiel


mais également de nos valeurs, auxquelles on doit absolument recon-
necter. Définir ou redéfinir ce qui est non-négociable pour nous. On
pourra ensuite sélectionner nos choix et nos actions en fonction de ce
qu’on aura déterminé.

– Sortir le plus souvent possible de sa zone de confort en sa-


chant que c’est la seule et unique façon de repousser ses limites. Oser
malgré la peur et l’insécurité, en sachant qu’on passera par plusieurs
phases mais que les résultats y seront.

– Refuser en tout temps le statu quo. Point.

99
© Photo : Maryline Tremblay
100
Être fonctionnel,
c ’ est le pilote
automatique. C ’ est ne
pas être heureux, ni
malheureux.
Juste correct. Sans
plus ni moins.

101
102
Chapitre 6

#fucklaroutine

Si vous pensez que l’aventure est dange-


reuse, essayez la routine, elle est mortelle
– Paulo Coellho

Je me souviens parfaitement d’un moment de grande illumi-


nation à quinze ans, lors d’une journée d’hiver. J’ai été somme toute
une adolescente assez modèle, qui réussissait très bien à l’école, qui
pratiquait son piano tous les jours pendant une heure et qui faisait ses
devoirs de façon constante et continue. Je me rappelle parfaitement
m’être levée un matin avec un sentiment d’inconfort assez intense et
m’être dit à haute voix : « C’est ça, la vie? C’est tout? »

Pour moi, ça n'avait déjà pas de sens, cette cadence qu’on s’im-
pose. Je ne comprenais pas que, jour après jour, on pouvait répéter les
mêmes journées qui ressemblaient étrangement à celles d’hier. J’ai
commencé à angoisser sur le fait que j’étais seulement au secondaire,
que viendraient ensuite les études collégiales avec sensiblement la
même routine. Puis s'ensuivraient l’université et, ô horreur, la « vraie
vie » avec le travail et les obligations.

103
Je voyais mes parents, qui faisaient tout pour qu’on ne manque
de rien, se rendre au boulot, revenir pour défaire leur lunch, préparer
le souper et recommencer le lendemain. Je les voyais attendre patiem-
ment leurs vacances d’été et ne pas être tant heureux de retourner
au travail après. J’ai réellement vécu des réflexions assez sombres à
l’idée de ce futur qui ne m’apparaissait pas vraiment extraordinaire.
Je pense que c’est à ce moment que j’ai commencé à détester pro-
fondément la routine. Je ne savais pas encore à quel point celle-ci ne
pouvait pas coller avec ce que j'étais, ce que suis.

Pourtant, je m’y suis conformée. Parce que c’est ça, le modèle


de la vie traditionnelle.

J’ai, oui, poursuivi mes études collégiales.

J’ai, oui, continué mon parcours scolaire à l’université.

J’ai même essayé d’être professeure dans une école primaire


avec un horaire stable pis toute pis toute.

Et j’ai été une maman PARFAITE.

OUI, P-A-R-F-A-I-T-E!

Le genre de maman qui suit religieusement le guide des nou-


veaux parents qu’on nous remet à l’hôpital.

Le genre de maman qui en aucun temps ne dérange l’horaire


des boires de ses enfants. Pire même, celle qui écrit tout pour essayer
de modéliser la même chose pour ses bébés qui suivront. Le genre

104
de maman qui s’assure que tout se fait dans le bon ordre et au bon
moment.

POURTANT, J’AVAIS OUBLIÉ UN DÉTAIL IMPORTANT : J’HAÏS


ÇA, LA ROUTINE!

PROFONDÉMENT.

ÇA ME TUE.

LITTÉRALEMENT.

J’ai redécouvert le bonheur de dire «  fuck  » à ma routine au


même moment où j'ai entamé ma crise du mitan. J’ai commencé à me
faire un devoir de célébrer les lundis en allant prendre un café aller-
retour avec mes deux maris gays de Montréal (il faut comprendre que
j’habite à deux heures de la « grande ville »).

J’embarquais dans ma voiture le cœur léger en sachant que


c’était complètement fou de déroger de ma vie habituelle pour le
simple et unique plaisir de parler de tout et de rien avec mes grands
amis, en sirotant un café straight sans Baileys. Je roulais en chan-
tant des chansons POP et en réalisant l’immense chance que j’avais
de pouvoir mettre mon horaire sur pause, pour le simple bonheur de
commencer une semaine de cette façon un peu absurde.

J’ai recommencé à m’arrêter le soir pour aller voir le coucher


de soleil sur le lac devant ma maison. Même si j’avais du lavage à
faire. Même si j’avais un million de choses à terminer. Je devais avoir
l’air étrange aux yeux de ma petite famille, prenant une pause de la
routine du soir pour sortir, beau temps mauvais temps, et contempler

105
le paysage. Ce même paysage depuis des années. Je le découvrais à
nouveau d’un tout autre regard, en savourant l’instant présent.

Je me suis permis plusieurs fois, dans la routine du dodo de


mes enfants, de rallumer les lumières de leur chambre pour danser,
chanter et, ô scandale, leur faire faire la même chose même si je ve-
nais de passer les vingt dernières minutes à essayer de les calmer.
Encore une fois, pour profiter pleinement du moment. Pour les voir
rire, des étoiles dans les yeux, mais aussi pour soulager mon âme, qui,
à ce moment avait besoin de toute cette petite magie pour continuer
et commencer à croire qu’on n’était pas sur cette planète uniquement
pour « faire du temps », en attendant je ne sais pas trop quoi de la vie.

J’ai même parfois proposé de manger de la crème glacée ou


des céréales pleines de sucre en guise de souper, quelquefois les deux.
Et c’est arrivé plus d’une fois. Parce que je n’avais pas tant envie de
faire à manger, mais surtout parce que je trouvais complètement libé-
rateur de ne pas agir selon « les normes » et faire en sorte que mes
enfants puissent trouver l’extraordinaire dans les petites choses aussi
simples que de déguster des Lucky charms pour le dernier repas de
la journée.

Ça peut sembler tellement futile, mais c’est devenu pour


moi nécessaire. Dans cette vie beige et fonctionnelle dans laquelle
j’étouffais et mourais à petit feu, mes #fucklaroutine sont devenus en
quelque sorte des bouées de sauvetage. Des rappels fréquents qui me
prouvaient à quel point la vie était belle malgré tout. Et qu’elle pouvait
le devenir, parce que je prenais la décision que ce soit ainsi.

Parce que c’est exactement ce qui arrive quand on se permet


d’intégrer ces moments « hors norme ». On revit. On se rappelle en fait

106
à quel point on est vivant. On est davantage dans l’instant présent. On
fait du déni volontairement, le temps de quelques heures, de toutes
les obligations qu’on s’est nous-mêmes imposées pour s’apercevoir
que la liberté d’être et d’agir n’est jamais bien loin.

J’ai déjà lu dans un livre dont j’oublie le titre, que pour com-
mencer à changer notre réalité, il suffit de stopper notre réticence au
changement. Quand on s’autorise de nouvelles possibilités à nos rela-
tions, à nos actions et à nos rêves, on découvre de nouveaux modèles
pour vivre une existence qui nous ressemble davantage. Le chan-
gement fait peur parce qu’il nous fait perdre le contrôle. Là où nous
étions confortables, il n’y a aucune mauvaise surprise qui peut nous
y arriver.

Le problème est qu’il n’y a aucune belle surprise possible non


plus.

C’est mathématique. Et un ne va pas sans l’autre.

La folie a toujours fait partie de ma vie. Les idées folles aus-


si évidemment. Dans cette routine qui ne me ressemblait plus, je la
fuyais sous prétexte que « ça ne se fait pas ». Ce n’était pas ce qu’on
attendait de moi. Je refusais donc, en quelque sorte, d’ignorer volon-
tairement les moments où je me sentais le plus vivante parce que
techniquement, ce n’est pas supposé être une façon de vivre quand
on devient un adulte. C’est tout sauf paillette comme façon de penser.

La phrase suivante est rapidement devenue ma préférée  :


« Pourquoi pas? »

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Penses-y, fille (oui, je recommence à te tutoyer pour appuyer
mon propos), au lien de te dire et de te répéter à haute voix : « Ça n’a
pas d’allure! Je ne peux pas faire ça, ça n’a pas de sens! », tu devrais
tellement penser à ces deux mots si importants : « Pourquoi pas? ».

Aller manger au restaurant un mardi soir avec les enfants


MÊME s’ils ont de l’école le lendemain matin : « Pourquoi pas? »

Assister au spectacle de musique d’un artiste inconnu juste


parce qu’on a aimé une chanson entendue sur Spotify  : «  Pourquoi
pas? »

Prendre congé un jeudi après-midi pour le simple et unique


bonheur de tremper dans un bon bain chaud pendant que les enfants
et le conjoint sont absents : « Pourquoi pas? »

Si c’était justement ça, la vie? Si c’était justement LA bonne


façon d’en profiter pleinement?

Je vous entends déjà me dire « Ouin, mais Mélissa…. C’est si


facile à dire. Pendant ce temps-là, j’ai des comptes à payer, j’ai un
patron sur le dos qui attend que je lui remette ses dossiers, j’ai des
professeurs d’enfants qui n’ont pas du tout cette philosophie… »

D'accord, mais j’ai juste envie de vous répondre «  Pourquoi


pas? »

Qui décide réellement de VOTRE vie? Vos comptes? Votre


patron? La prof de votre enfant? Votre conjoint? Votre voisine? Vos
croyances qui existent depuis trop longtemps qui sont entrées insi-

108
dieusement dans votre tête pour vous faire croire que vous deviez
oublier que la vie c’est ici et maintenant?

Un jour, j’ai eu le bonheur d’interviewer Annie St-Louis. Une


femme habitant la même région que moi et qui avait été invité à une
émission populaire québécoise. Je ne la connaissais pas du tout. Je
l’avais découverte en même temps que des centaines de milliers de
personnes qui avaient vu la même entrevue. En tout début de qua-
rantaine, elle venait d’apprendre qu’il ne lui restait tout au plus que
quelques mois à vivre. Elle documentait tout le processus, aussi bien
ses virées à l’hôpital que le désir de réaliser ses derniers rêves. On
pouvait lire ses états d’âmes, ses façons de réagir face à telle ou telle
situation. Sa conception de la vie, mais également de la mort à venir.
Elle avait une attitude extraordinaire malgré les circonstances. On
sentait qu’elle acceptait malgré tout sa situation, mais elle est deve-
nue très émotive en mentionnant à quel point elle avait mille regrets.

Mille regrets de ne pas en avoir profité pleinement tous les


jours, de s’être laissée emporter par ce tourbillon qu’est le quotidien
en oubliant trop souvent de savourer son café au lieu d’être prise
dans une course matinale. Mille regrets de s’être privée trop de fois
en n’achetant pas la sacoche qu’elle souhaitant tant, de ne pas avoir
assez ri avec les gens qu’elle aime et d’être partie de la maison pour
aller travailler en ne disant pas « je t’aime » à son amoureux parce que
trop pressée.

Ça me déchirait de l’entendre, parce que malgré une vie qui


semblait lui avoir souri, elle était quand même passée trop souvent
à côté de l’essentiel sous prétexte que « ça ne faisait pas ». Que la vie
ce n’était pas ça. Elle était maintenant confrontée à un départ immi-
nent, le sien. Tout ce qu’elle aurait souhaité était d’avoir plus de temps

109
pour appuyer sur pause et vivre avec un grand V. Pas seulement vivre
pour ces moments extraordinaires, mais aussi des instants simples
comme prendre plus de temps le matin pour déguster un bon fruit.

Beaucoup d’intervenants qui travaillent avec des personnes


en fin de vie le confirment : le plus grand regret des gens qui vont bien-
tôt mourir, c'est justement d’avoir un trop grand nombre de regrets.

On s’étourdit, on se projette dans l’avenir, on entre dans une


routine réconfortante pour s’échapper. Et on oublie ce qu’on veut. Ce
à quoi on aspire. Ce qui nous fait vibrer et tout ce qu’on pourrait faire
concrètement pour dire #fuck à notre routine mortelle. Je vous écris
ces mots en pensant à la belle Annie sur ma terrasse à Paillettesville.
Le ciel est un peu nuageux, et il n’y a qu’un petit rayon de soleil bien
camouflé entre deux nuages qui me caresse présentement le visage.
Pour laisser l’inspiration monter, je suis allée voir mes fleurs plantées
en début d’été. J’ai pris le temps de les regarder, les observer, remer-
cier la vie de me donner la chance de les voir pousser. Ce n’est pas très
compliqué vous allez me dire, mais il n’y a rien de plus vrai. De plus
vivant. De plus vibrant. D’honorer chacun de ces instants qui, pour
moi, sont aussi magiques et de merveilleuses façons de rejeter cette
routine qui nous amène à faire du surplace et à stagner.

Je pense que c’est ce qui m’a frappée à quinze ans. De me dire


que c’était improbable de refaire chaque jour la même chose en sa-
chant qu’il y avait tant à explorer, à expérimenter. De me répéter que
l’école suivie du travail n’était certainement pas la seule et unique
façon de vivre sa vie. J’éprouvais d'intenses vertiges juste à y penser.

Quand je me suis séparée du père de mes enfants, j’ai voulu


reconnecter à ces #fucklaroutine le plus souvent possible. Je m’en fai-

110
sais une obligation. En fait, c’était viscéral. Peut-être qu’avec une ana-
lyse et un peu de recul, c’était aussi une façon de faire du déni et de
m’aider à traverser ce moment. Je sentais vraiment que c’était ce que
je devais faire pour renouer avec quelque chose qui faisait du sens
pour moi.

Un jour, mes amis de Montréal, avec qui j’allais parfois siroter


ce café dans la «  grande ville  », m’ont téléphoné alors qu’ils étaient
chez ma meilleure amie à la Barbade. Un peu à la blague, ils m’ont
lancé : « Tu devrais tellement venir… juste quelques jours! »

La Mélissa d’avant aurait été terrorisée. Je me serais posé des


centaines de questions. J’aurais sans aucun doute trouvé autant d’ex-
cuses, toutes aussi valables les unes que les autres, pour ne pas faire
cette folie, mais j’ai raccroché et me suis surprise moi-même à taper
dans Google  : «  Vol Montréal-Barbade  ». Cinq minutes plus tard, je
réservais mon départ, prévu pour le lendemain… pour quatre jours
seulement. Le temps d’un week-end.

Je pense n’avoir jamais autant vibré de toute ma vie. À vivre


une excitation et une adrénaline comme jamais auparavant. À me
dire aussi sans arrêt : « ÇA N'A PAS DE SENS », mais à me le répéter
avec un sourire dans la voix.

On ne sait jamais de quoi sera fait demain. On ne peut jamais


prévoir tout ce qui se passera et le seul contrôle qu’on peut avoir, c'est
celui de l’action et de l’instant présent. Ce moment restera à jamais
gravé dans ma mémoire. J’avais réellement l’impression que c’était
LA chose à faire. J’ai ri à en avoir mal à la machoire durant ces quatre
jours. J’ai marché longuement, parfois seule, parfois accompagnée de
mes amis pour le simple plaisir de me perdre dans mes pensées et

111
admirer l’incroyable paysage des Caraïbes que j’aime tant. J’ai respiré
l’air salin encore plus qu’à l’habitude. Je me suis levée tôt et je me suis
couchée tard pour ne perdre aucune minute. J’ai eu un sentiment de
gratitude indescriptible. Et j’ai grandi… encore…

Les #fucklaroutine ont aussi ce pouvoir-là sur nous : nous faire


grandir. Nous faire apprécier la vie. Nous faire comprendre l’impor-
tance de l’honorer et nous rappeler ce qu’on oublie trop souvent : ON
EST PRIVILÉGIÉS!

Évidemment, non, nous ne sommes pas obligés d’aller passer


quatre jours à la Barbade. Ce n’est pas du tout le point. Tant mieux si
vous pouvez le faire, car il y a sans contredit quelque chose d’extrê-
mement magique, mais on peut aussi commencer à petites doses.

Votre routine, vous la connaissez par cœur et elle vous paraît


sans aucun doute utile dans certaines circonstances. Elle est proba-
blement la même depuis des années et ne vous méprenez pas : elle
est ABSOLUMENT nécessaire pour accomplir des buts que vous avez
en tête.

C’est cette même routine qui m’a permis de devenir une excel-
lente pianiste parce que j’avais une heure de piano à mon horaire quo-
tidien dès l’âge de cinq ans. C’est aussi elle qui me permet de garder
ma motivation toutes les semaines pour prendre soin de mon corps
en allant au gym. C’est également celle-ci qui me permet de faire le
travail que j’aime, parce que cette constance est nécessaire pour s’ac-
complir. Tous les plus grands de ce monde ont développé au cours des
années leur routine d’excellence, celle qui les aide à générer de l’éner-
gie, à garder leur puissance de focalisation et à s’épanouir pleinement.
L’absence de bonnes habitudes donne souvent très peu de résultats.

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La magie de faire des #fucklaroutine est justement d'accom-
plir des actions quotidiennes répétées pour ensuite mieux savou-
rer nos « écarts de conduite ». Je crois profondément que ça devient
cependant nécessaire pour ne pas tomber dans le cercle vicieux de
la redondance et de la platitude. C’est aussi ce qui nous permet de
nous émanciper et d’agrandir continuellement notre fameuse zone
de confort qui nous rend beige et fonctionnelle. C’est ABSOLUMENT
nécessaire pour célébrer cette vie.

Au début, ces actions vous demanderont sans aucun doute de


l'entraînement et un énorme lâcher-prise. C’est difficile de défaire des
habitudes ou des façons de faire adoptées depuis des années. Je pense
qu’on doit commencer par de petits gestes qu’on ne ferait pas norma-
lement et qui nous rendent, oui, inconfortable, mais qui suscitent en
nous un minimum d’adrénaline.

Bien sûr que non, vous n’êtes pas obligé de réserver le pro-
chain vol Montréal-Beijing ou Paris-Hawaï.

Vous n’êtes pas obligé non plus d’hypothéquer votre maison


pour réaliser votre prochain déni à votre réalité.

Ça peut être très simple, en vous posant une seule et unique


question : « Comment vais-je célébrer la vie aujourd’hui? »

Point. À. La. Ligne.

Est-ce qu’on est dans le devoir d’en faire tous les jours? Non
plus… J’en recommande personnellement au moins une fois par mois
et si possible, une fois par semaine. Oui. J’y vais de ma posologie.
Parce que je me considère désormais comme une experte en la ma-

113
tière. Vous pouvez dès maintenant refermer ce livre en vous disant :
« Non, mais elle se prend pour qui, nous dicter ainsi de vivre nos vies
de façon tout à fait farfelue? »

Et je vous comprendrais.

Mais vous pouvez aussi prendre conscience que malgré tout


ce qui peut nous arriver dans une journée, une semaine ou même
une année, nous sommes vivants, et c’est magnifiquement beau. Pour
cette raison, on a l’obligation, selon moi, de s’arrêter quelques ins-
tants pour célébrer pleinement.

Chaque semaine, je vois des femmes qui tiennent les rênes de


la maison à bout de bras et qui ne se rappellent même plus la dernière
fois qu’elles ont eu du vrai plaisir parce qu’elles sont submergées sous
les responsabilités. Elles veulent tellement donner le meilleur à leurs
enfants qu’elles s’obligent à tenir un horaire de militaire en ne s’aper-
cevant pas tout de suite qu’elles privent non seulement leurs enfants
de cette magie, mais qu’elles s’empêchent aussi de goûter au bonheur
plus souvent.

C’est ça que ça goûte, les #fucklaroutine : LE GROS BONHEUR!

N’imaginez-vous pas le bonheur de vos petits qui, ce soir,


mangeraient de la crème glacée au lieu de leurs brocolis?

Ne pensez-vous pas au bonheur de votre amie, qui habite trop


loin de chez vous, en vous voyant débarquer pour le café, et à sa sur-
prise de vous voir repartir aussitôt qu’il est terminé?

114
Ne doutez-vous pas des conséquences négatives, à long terme,
de ne pas savourer pleinement cette vie qui passe trop vite?

Ne réalisez-vous pas que ce ne sont pas seulement les se-


condes qui s’écoulent rapidement… mais aussi les années?

Je vous répète que le plus grand regret des gens en fin de vie,
c'est justement d’avoir trop de regrets.

« Et pourquoi pas? »

Pourquoi ne pas aller danser sous la pluie ce soir avec les en-
fants? Pas une danse de dix secondes, les cheveux cachés sous un
capuchon de peur de les mouiller…

Je parle d’une VRAIE danse, avec une chorégraphie, pour ren-


trer à la maison détrempée au point de pouvoir tordre votre chandail
et de constater par la suite que vous venez tout juste de créer des sou-
venirs qui dureront longtemps.

Pourquoi ne pas étirer votre matin, au lieu de vous lever à


la même heure qu’à l’habitude, juste pour savourer le luxe de lire
quelques chapitres de votre livre préféré avant de vous rendre au tra-
vail le cœur plus léger?

Pourquoi ne pas faire une folie? Une vraie. Celle que vous ima-
ginez depuis trop longtemps mais que vous repoussez toujours pré-
textant mille et une excuses qui, entre vous et moi, sont carrément
stupides.

115
Lorsque je vous dis que je suis maintenant devenue experte en
la matière, je blague à peine. Dans la même année de ma séparation
(ce fut effectivement une grosse année), je suis aussi allée en Asie. J’ai
pris ma décision le mercredi et je quittais le pays le dimanche sui-
vant. Donc, cinq jours tout juste après… pour une semaine… Avec un
gars rencontré quelques semaines auparavant que je ne connaissais
pas du tout.

On va être honnête : partir avec un presque inconnu à l’autre


bout du monde, c’est une TRÈS TRÈS mauvaise idée! Je n’ai pas tant
tenu compte du danger, ni même des conséquences possibles et ce
n’est pas le genre de chose que je ne recommanderais pas du tout à
personne, d’autant plus qu’il n’était pas vraiment d’agréable compa-
gnie, MAIS j’ai vu des paysages époustouflants. J’ai visité un pays qui
me paraissait tellement inaccessible et qui était loin d’être sur mon
vision board. J’ai appris sur moi, sur ma façon de gérer l’inconnu. J’ai
aussi tellement savouré chaque minute, même celles qui étaient désa-
gréables ou inconfortables, parce qu’elles font aussi partie de l’aven-
ture. J’ai goûté à ce que je n’aurais jamais osé. J’ai échangé avec des
gens ayant une réalité tellement différente de la mienne. J’ai profité
de l’histoire si riche d’un pays qui en avait long à raconter. J’ai vécu à
un rythme parfois effervescent, parfois d’une lenteur magique. J’ai dû
me pincer à plusieurs reprises tellement c’était surréaliste de penser
qu’il y a quelques jours à peine, j’étais dans mon salon à ne même pas
soupçonner que je m’apprêtais à découvrir ce fabuleux endroit com-
plètement à l’autre bout du monde.

J’ai grandi. Encore une fois. Comme lors de chaque sortie de


zone de confort, mais aussi chaque moment où l'on est totalement en
pleine conscience.

116
Les gens autour de moi qui ont aussi instauré cette nouvelle
façon de vivre n’ont jamais été déçus par la suite. Tout comme moi
et comme vous, ils ont eu des peurs sur le moment, ont cherché à se
convaincre que ce n’était pas nécessaire, mais ils ont finalement réus-
si par écouter leur cœur et foncer. J’ai des exemples à n'en plus finir de
clientes Paillettes qui se sont levées un matin en décidant finalement
de quitter leur emploi. Sur le coup, elles ont été terrorisées à la simple
idée de mettre le plan en action, mais elles ont finalement goûté de
façon si intense au bonheur qu’elles se sont vite rendu compte que
c’était la clé.

J’ai toujours une immense fierté de voir dans mes médias so-
ciaux que les filles s’identifient dans des publications où elles sont
en plein #fucklaroutine, un mardi soir, et qu’elles prennent du temps
pour elles ainsi que pour célébrer leur existence.

Dans un monde et une vie Paillette, il faut se poser les bonnes


questions pour certaines situations, mais il faut aussi parfois juste
agir, sans trop réfléchir ni trop planifier. Se laisser bercer par notre
instinct, nos envies et ce que la vie cherche à nous proposer. Par
exemple, si j’ai rencontré ce gars à ce moment, c’était sans aucun
doute pour que je vive mon épisode #fucklaroutine vietnamien. Si
j’avais pris plusieurs jours et semaines à réfléchir, à me demander
si je devais le faire ou non, à essayer de calmer mes envies d’être
dépaysée, je n’aurais jamais accepté cette invitation. Mon côté ration-
nel aurait pris le dessus et j’aurais peut-être vécu un regret. Malgré
quelques éléments négatifs de ce périple, je peux affirmer à 100 % que
je suis extrêmement reconnaissante d’avoir eu la chance de voir ce
que j’ai vu, de ressentir des émotions que je n’avais jamais ressenties
auparavant et d’avoir la tête remplie d’instants que je n’oublierai sans
aucun doute jamais.

117
Au risque de me répéter, ce n’est pas nécessaire de partir dans
des contrées lointaines avec ou sans un inconnu pour bien intégrer
les #fucklaroutine… C’est un peu intense comme début, mais donnez-
vous la chance de sortir de cette vie parfois beige pour qu’elle ait du
sens.

Vous aurez probablement besoin d’une dose de courage, d’une


nouvelle façon de penser pour lâcher prise et de l’élément EXTRÊME-
MENT important que vous retrouverez dans le prochain chapitre. Ici,
j’irai d’un conseil sportif  : ce sera comme l’entraînement. On com-
mence à petites doses et on constate immédiatement les bienfaits.

En résumé, les #fucklaroutine c’est :

– Comprendre que la constance et les bonnes habitudes vous


aideront grandement à atteindre vos objectifs et que les #fucklarou-
tine vous permettront d’apprécier totalement le moment présent et la
vie en général.

– Commencer par de petites doses environ une fois par se-


maine ou une fois par mois. On se donne le droit d’éviter toute culpa-
bilité à déroger de ce qu’on fait habituellement pour le simple constat
et bonheur de voir à quel point on vibre réellement lorsqu’on est dans
ce moment présent.

– Se rappeler que le plus grand regret des gens en fin de vie,


c'est justement d’avoir trop de regrets. On doit donc se laisser bercer
le plus souvent possible par ce qui est en nous, ce qu'on souhaite se-

118
crètement. Se permettre d’écouter ses intuitions et ses instincts pour
aller un peu à contre-courant de ce qui se fait normalement.

– S’interroger aussi avec LA question qui pourra nous aider à


choisir consciemment le #fucklaroutine : « Et pourquoi pas? » Dans le
cas de doute ou d’hésitation, cette simple interrogation vous permet-
tra peut-être de rationaliser l’irrationalité.

– Dresser ici, maintenant, la liste d’idées pour vos prochains


#fucklaroutine.

119
© Photo : Maryline Tremblay
120
#fucklaroutine :
La vraie réussite
dans la vie, c ’ est
lorsqu ’ on ne fait plus
de différence entre
un lundi et un
vendredi.

121
122
Chapitre 7 

#Menkalysse

Tu as le droit d’être différente, de déranger,


de ne pas faire l’unanimité, de sortir du
cadre et de faire les choses à ta façon.

« Sérieux, tes lèvres ont l’air botchées… Tu as l’air d’un siphon


de toilette. Tu devais être une très belle femme avant, maintenant tu
as l’air d’une poupée gonflable. »

– Sara… commentaire sur Facebook

C’est ce que j’ai pu lire, à l’automne 2015, sous une vidéo pour
Paillettes INC. que j’avais publiée la veille. Des mots d’une violence
assez évidente, mais aussi sans fondement… venant de la part d’une
parfaite inconnue. Un jugement gratuit qui n’avait pas lieu d’être,
mais malheureusement, sur les réseaux sociaux, les gens sont parfois
un peu cons.

123
Or, je me suis surprise à vouloir répondre à cette Sara. À vou-
loir lui expliquer que ce sont mes vraies lèvres parce que clairement,
elle supposait que j’avais eu des injections. Je voulais absolument lui
dire que c’était l’héritage de ma maman. Je voulais aussi lui dire que
ce n’était pas très gentil de sa part, qu’elle aurait mieux fait de passer
ces cinq minutes de vie à faire quelque chose de constructif au lieu de
m’insulter au vu et au su de tous.

J’ai eu ensuite la honte, qui a décidé de s’en mêler pour proté-


ger mon ego et qui faisait en sorte que j’étais particulièrement vulné-
rable, que TOUT LE MONDE puisse voir ce commentaire-là et que ces
gens puissent à leur tour peut-être penser la même chose que Sara.

J’ai jonglé avec l’idée d’effacer non seulement le commentaire,


mais la vidéo au complet pour m’assurer de ne plus jamais vivre ce
genre de malaise.

LÀ, JE ME SUIS RENDU COMPTE DE L’ABSURDITÉ DE LA PA-


TENTE.

MAIS QU’EST-CE QU’ON S’EN FOUT DE SARA!

Je ne la connais même pas et me voilà à avoir un argumen-


taire avec moi-même qui ne finit plus de finir pour justifier le fait que
oui, ce sont mes vraies lèvres et que non, je n’ai pas l’air d’un siphon
de toilette. Du moins, je ne pense pas.

Combien de fois on accorde de l’importance à des gens qui ne


méritent pas une once de notre attention? Combien de fois on évite de
faire valoir notre point dans une réunion d’équipe par peur de ce que
nos collègues diront? Combien de fois on évite de porter notre petite

124
robe, trop mignonne mais un peu décolletée, pour une sortie entre
amies afin d'éviter leur jugement, leurs moqueries et leurs remarques.

On dit qu’en termes de peurs, celle du jugement vient immé-


diatement après la crainte de mourir pour la majorité des gens. On
s’empêche d’être pleinement qui on est, on se freine dans la majorité
de nos projets parce qu’on est effrayé de ce que les autres pourraient
en penser.

IMAGINES-TU À QUEL POINT C’EST N’IMPORTE QUOI?

VOYOOOOOOOOOOOOONS!

Elle commence tôt, d’ailleurs, cette fameuse peur du juge-


ment. Je le vois avec ma belle Emma-Rose qui, du haut de ses neuf
ans, porte une attention particulière à son habillement. Elle ne veut
pas être trop différente ou à part des autres malgré le fait que je lui
mentionne sans arrêt qu’elle a le droit d’être qui elle souhaite et qu’à
mes yeux, elle est merveilleuse. Je vois déjà que son innocence est
disparue et qu’elle existe trop souvent à mon goût dans le regard des
autres. Les études démontrent qu’il est parfaitement normal de vou-
loir rapidement plaire à ceux qui nous entourent, à commencer par
nos parents. Même si on le voulait, cette quête est presque impossible
à éviter. On essaie donc, et très souvent à un âge précoce, de tout faire
pour obtenir leur approbation et leur amour. C’est donc dire que c’est
pratiquement inné chez la majorité des humains.

En grandissant vient ensuite l’aspect social et le désir d’appar-


tenir à un groupe. C’est assez primitif quand on y pense, mais on veut
être de la tribu. On se conforme donc à des valeurs qui ne sont pas
vraiment les nôtres. On endosse une idéologie qui ne nous ressemble

125
pas forcément. Comme bien souvent on n’assume pas du tout qui nous
sommes, on essaie plutôt de modéliser quelqu’un ou des personnes de
notre entourage. Vivre une vie Paillette et se rappeler qu’on est née
pour briller voudra très certainement dire qu’on attirera, même si on
ne le souhaite pas, le regard des autres.

Parce que notre unicité dérangera.

Parce que notre lumière éclipsera.

Parce que lorsqu’on souhaite vivre selon ses propres règles, ça


intimide.

J’ai longtemps eu peur de ce que les gens allaient penser de


moi. C’était si fort que je pouvais parfois en public en avoir mal au
ventre. J’étais craintive, nerveuse, voire anxieuse. Pendant des an-
nées, lorsque les regards se tournaient vers moi, automatiquement je
voyais la conspiration probable de tous les gens qui voulaient sans au-
cun doute se moquer de moi. J’ai été aussi celle qui se sentait rapide-
ment attaquée ou blessée profondément si j’entendais quelque chose
de vrai, partiellement vrai ou complètement faux à mon sujet et je
montais sur mes grands chevaux à vouloir me défendre ou me pro-
téger. Je ne me souviens plus du nombre de fois où je me suis même
empêchée de sortir parce que je ne savais pas qui serait dans tel resto
ou chez telle personne.

Je voulais tant me conformer, mais en même temps, on se rap-


pelle que j’aime profondément la paillette. Je n’étais donc jamais bien
discrète, entre autres dans mes tenues vestimentaires. Donc, au lieu
de porter ce que voulais, je laissais tout ça dans le fond de la garde-
robe toujours avec les étiquettes. Comme je suis grande, j’ai résisté

126
longtemps avant de m’acheter des talons trop hauts parce que ça ne
faisait qu’accentuer le regard des autres et que je ne pouvais pas le
subir.

Mon déclic ne s’est pas fait avec Sara, la pas fine de Facebook.
Je n’étais pas encore préparée comme il se doit à recevoir des com-
mentaires aussi méchants. Je me rappelle la douleur que ça m’a fait :
un mélange de tristesse, de honte et de remise en question. J’ai même
réellement pensé que j’arrêterais de faire des vidéos. À quoi bon?
TOUT LE MONDE RIT DE MOI!

Voyez-vous la généralisation? TOUT LE MONDE...

C’est qui, en fait, ce TOUT LE MONDE-LÀ?

TOUS LES GENS DU QUARTIER?

TOUS LES COLLÈGUES?

TOUS VOS PATRONS?

TOUS LES MEMBRES DE VOTRE FAMILLE?

Vraiment? C’est ce TOUT LE MONDE-LÀ qui vous empêche de


vivre pleinement votre vie? Qui a un impact et un pouvoir que vous
ne pouvez contrôler parce que VOUS avez décidé qu’il méritait un peu
de votre attention?

J’ai, pour ma part, décidé que ma vie serait autrement à la


suite d’une soirée marquante quelques mois après le fameux épisode

127
de Sara. On est donc en 2016. J’avais reçu une invitation pour aller à
l’inauguration d’une nouvelle salle de spectacle, dans ma région, où
l'on nous demandait de jouer le jeu et d’arborer une tenue vestimen-
taire glamour.

Moi, lorsqu’on me demande de m’habiller glamour, JE M’HA-


BILLE GLAMOUR!

La totale : la robe longue à paillettes, les cheveux remontés, le


maquillage, les bijoux à paillettes. Bref, ALL THE KIT!

Heureusement, les gens se sont laissés prendre au jeu et je ne


détonnais pas trop malgré l’ampleur de mon style. Je ressortais du lot,
mais je me souviens de ne pas avoir eu un mal de ventre aussi impor-
tant qu’à l’habitude en sortant de la maison.

Le problème est venu après.

Parce qu’on devait changer d’emplacement pour souper.

Dans un endroit où, visiblement, les gens n’avaient pas eu le


même mémo qu’à l’autre endroit concernant les vêtements.

Je suis donc entrée dans le fameux resto habillée comme l’im-


pératrice de la Galaxie (et j’exagère à peine), avec ma robe possédant
une traîne, une FUCKING LONGUE traîne, parmi tous les gens vêtus
d’un simple jean, qui me regardaient avec beaucoup d’étonnement.

JE VOULAIS M’ÉCROULER SUR LE PLANCHER TELLEMENT


J’ÉTAIS GÊNÉE.

128
Assise au bar avec mon amie, parce qu’évidemment, il n’y a
pas de place dans les recoins plus discrets, il était maintenant hors de
question que je me lève pour le reste de la soirée. En fait, j’avais statué
dans ma tête que j’attendrais qu’il n’y ait plus un client pour partir. De
cette façon, j’étais assurée de ne plus subir aucun regard suspicieux à
mon endroit. Oui. J’ai utilisé le mot « suspicieux ».

Pour passer le temps (et ma honte), j’ai enfilé une première


bière (c’est d’ailleurs connu que c’est la boisson favorite de toutes les
impératrices de la Galaxie). Puis une deuxième et la moitié d’une troi-
sième. Évidemment, il arriva ce qu’il devait arriver :

J’ai eu envie de pipi.

Parce que c’est ce qui se passe dans la vie des mamans qui ont
beaucoup trop enfanté : notre vessie diminue sa capacité de rétention
de 92 % pour nous faire constamment courir vers la salle de bain (je
n’ai aucune idée si cette statistique est véridique et je ne l’ai surtout
pas vérifiée scientifiquement, mais je sais qu’elle est vraie. C’est tout!).

Donc, me voilà toujours assise au bar, en robe de princesse,


maquillée comme s’il n’y avait pas de lendemain, à dire ceci à voix
haute devant l’air ahuri de mon amie :

– Je n’irai pas aux toilettes. Il n’est pas question que


je me lève. Je pense que je vais le faire comme ça ici, dans ma robe…
de toute façon, personne ne va s’en rendre compte; elle est longue et
noire. C’est sûr que je n’y vais pas!

C'est là que le déclic s’est fait. Avec un...

129
– HÈYE! ARRÊTE DE NIAISER ET VA AUX TOILETTES! ON S’EN
FOUT QUE LES GENS TE REGARDENT! dit tendrement mon amie.

Je me suis donc levée de mon tabouret. J’ai pris soin de repla-


cer ma traîne, j’ai salué la foule, j’ai fait ce qui devait être fait et j’ai
constaté avec bonheur quelque chose de bien spécial : JE NE SUIS PAS
MORTE!

Est-ce que tous les gens se sont retournés sur mon passage?
Bien sûr que oui!

Est-ce que j’ai vu des regards amusés? Absolument!

Est-ce que j’ai même entendu des chuchotements qui m’étaient


visiblement adressés? Très certainement!

Sauf que je n’en suis pas décédée. Parce qu’on n’en meurt pas,
de ce que les gens pensent de nous. J’ai repris mon trône en revenant,
en prenant conscience de la nouvelle légèreté qui m’accompagnait.
Je pense sincèrement qu’une grande partie de ma peur s’est envolée
à partir de ce moment précis. J’ai voulu ensuite répéter le plus sou-
vent possible cette expérience en me mettant volontairement dans
des situations où je me sentais particulièrement ridicule. Simplement
pour me mettre au défi. Pour donner une leçon à mon ego et à mon
orgueil afin que plus jamais, ils ne dictent ma vie. J’ai vu d’importants
changements s’opérer assez rapidement; soudain, je me posais beau-
coup moins de questions sur comment agir ou quoi faire. J’étais, tout
simplement!

J’ai commencé à me mettre beaucoup moins de pression au


quotidien dans plusieurs sphères de ma vie, pour écouter davantage

130
la petite voix à l’intérieur de moi qui cherchait à s’exprimer depuis
longtemps.

J’ai surtout remarqué à quel point je riais plus… et toujours


un peu plus fort. Aussi fou que ça puisse paraître. Je pense que j’avais
oublié à quel point, avant que je m’en fasse autant avec ce que les
gens pensent, j’aimais rire profondément. Oui, j’étais moi-même as-
sez drôle, mais par j’imagine des « conventions », je me retenais pour
qu’on me prenne au sérieux.

Si vous lisez ces lignes en ce moment et que vous me suivez


depuis longtemps, vous voyez sans doute mes stories sur Instagram,
dans lesquelles je dis vraiment tout ce qui me passe par la tête. Vous
regardez mes vidéos, dans lesquelles j’enseigne ce que je sais, mais à
ma façon et avec beaucoup d’humour. Je pose devant la tour Eiffel en
tutu avec de la crème glacée. Je porte ma plus belle robe de soirée uni-
quement pour aller chercher une pizza au restaurant du coin. Je me
dessine dans le front pour vivre à fond mon voyage au Maroc et je me
promène ainsi publiquement. Je suis parfois en pyjama, parfois habil-
lée ultraprincesse, maquillée de façon extravagante mais aussi natu-
relle à 100 %. Je parle de mes lèvres qui sont vraies, mais en même
temps, je laisse toujours un peu planer le doute simplement parce que
ça me fait rire. Je parle de mes enfants en évoquant mes moments
moins glorieux de maman. Je vous présente mes parents et surtout
ma mère, qui peut être extrêmement embarrassante lorsqu’elle se
décide. Je n’ai plus de filtre… totalement libérée.

Peut-être pensez-vous aussi que j’ai réellement toujours été


comme ça, aussi libre… À me sacrer totalement de ce que les gens
diront de moi…

131
Et pourtant...

Je me suis aussi dénaturée, tout comme vous. J’ai aussi cher-


ché à me fondre dans le décor ou la masse. J’ai changé des trucs de
ma personnalité pour m’assurer qu’on m’accepte et j’ai été si malheu-
reuse dans cette foutue peur de ce que les gens pourraient dire.

Le Vietnam m’aura ouvert les yeux sur un adage extrêmement


révélateur. Pendant mon séjour rapide d’à peine une semaine sur le
continent asiatique, j’ai lu un proverbe et son explication qui ont lit-
téralement changé ma vie. Presque au même titre que Dirty Dancing.

Son auteur inconnu expliquait que la vraie liberté, c'est d’être.


Simplement. De ne plus se poser de questions sur ses agissements,
mais plutôt d’incarner ce que l’on souhaite sans cacher sa véritable
nature. Selon lui, lorsqu’on bascule dans cet état d’esprit, on peut en-
fin exploiter son plein potentiel sans se soucier de ce que les gens
en pensent. Cela se résumait en un seul mot. Percutant. Émouvant.
Transformateur et rempli d’amour.

#Menkalysse

Tu penses que je ne suis forcément pas intelligente de par


mon look et que la seule chose que je sais faire, c'est des stories non-
pertinentes sur Instagram?

#Menkalysse

Tu penses que je suis une mauvaise mère parce que j’ai des
ambitions internationales?

132
#Menkalysse

Tu penses que ma séparation est entièrement de ma faute


parce que je suis sans doute une folle avide de contrôle profiteuse et
égocentrique?

#Menkalysse

Tu penses que je dois ma réussite au fait que j’ai sans aucun


doute couché avec tous les hommes influents de la planète Terre et
que je n’ai donc aucun mérite?

#Menkalysse

Maintenant, je ne me pose plus la question à savoir ce que j’ai


envie de porter. Je le porte. Point.

Je ne me demande plus ce que je dois dire si je suis en compa-


gnie de gens que je ne connais pas. J’écoute et discute ensuite de ce
dont j’ai envie. Point.

Je ne m’interroge plus sur ce que je dois être. Je suis. Point.

Vous n’avez aucune idée du bien-être que je ressens. De plus


en plus. Si j’ai envie de lâcher mon fou et de danser en plein milieu de
la rue, je le fais.

Si j’ai envie de rire pendant des heures parmi des gens d’af-
faires très importants durant un réseautage, je le fais et tant pis si on
questionne mon professionnalisme.

133
Si j’ai envie de teinter mes conférences de musique en jouant
du piano et en chantant parce qu’en même temps je réalise mon rêve
d’adolescence de devenir chanteuse, je le fais. Point.

Pour moi. Parce que je suis la seule et unique personne res-


ponsable de mon bonheur et parce qu’en aucun cas, je ne peux laisser
quelqu’un ou une situation m’empêcher d’être moi.

On parle beaucoup d’authenticité. C’est souvent un terme un


peu récurrent parce qu’on la recherche activement sans toutefois
réellement ce qu’elle implique. En ce qui me concerne, je me répète
souvent que je suis la seule à pouvoir déterminer ma valeur et surtout
la seule à connaître la vérité.

Par exemple, même si Sara, la pas fine de Facebook, est cer-


taine et réussit à convaincre la planète entière que mes lèvres sont re-
faites, je suis la seule à savoir que c’est totalement faux et que même
si c’était vrai, je suis maître et libre de mes choix en tout temps.

Même chose pour les gens qui étaient présents dans le res-
taurant lors de mon entrée d’impératrice de l’Univers. Ils n’avaient
aucune idée que j’assistais à une soirée précédemment et que non, je
ne suis pas habillée de cette façon tous les jours. Même si c’était le cas,
ce n’est strictement pas de leurs affaires.

Si j’essaie de convaincre des gens qui me croisent à l’épicerie


et qui me lancent sur un ton presque dédaigneux : « Aaaah ouiiiiii?
Tu pars encore à l’étranger? Mais qui s’occupe de tes enfants? Ça ne
te fait pas quelque chose de les laisser seuls pour te concentrer sur ta
carrière? (pour votre information, c’est une phrase réelle sortie de la
bouche d’une vague connaissance!)

134
Ils ne savent pas que je suis à la maison plus souvent qu’une
maman qui travaille à l’extérieur. Ils ne savent pas que mes enfants ne
fréquentent jamais le service de garde le midi ou après l’école. Ils ne
savent pas non plus que je suis là toutes les vacances de Noël, lors de
la relâche et aux vacances d’été. Ils ne comprennent pas non plus que
je dois m’assurer de subvenir à leurs besoins sans aide, que ma moti-
vation la plus importante est de pouvoir voyager à travers le monde
avec eux, mais que pour ça, ça prend des sous. Ils ne connaissent pas
non plus mes aspirations les plus profondes.

On devrait s’empêcher d’avancer à cause d’eux?

Outre le magnifique proverbe #Menkalysse, j’aime aussi beau-


coup la phrase suivante : « Nous sommes ici pour vivre notre vie, pas
pour l’expliquer. » Et vous n’avez pas à le faire non plus. Ni à vos pa-
rents, qui voulaient un autre chemin pour vous, ni à votre conjoint,
qui trouve que vous avez tellement changé depuis quelque temps, ni
à vos enfants, qui vous reprochent de ne pas être comme les autres,
ni à vos amis, qui ne comprennent pas vos choix et encore moins à de
illustres inconnus qui se permettent de vous regarder étrangement.

Vivez. De la façon que vous le souhaitez.

Oui, ça vous prendra un méga détachement pour y arriver,


mais ce qu’il faut absolument retenir, c'est que seul vous pouvez
connaître et déterminer votre valeur. Vous aurez aussi besoin de vous
affirmer et d’assumer. De A à Z.

J’assume que je suis ambitieuse.

J’assume que ma carrière est importante.

135
J’assume que ma séparation était plus que nécessaire et que
j’ai pris la bonne décision.

J’assume que je suis intense, drôle, absurde, parfois corrosive


et sarcastique.

J’assume que J’ADOOOOORE porter des robes de princesse.

Le reste, #Menkalysse. Profondément.

Donner au monde extérieur plus de pouvoir qu’à votre monde


intérieur vous empêchera de briller complètement, parce que c’est de
remettre dans les mains des autres votre essence. Non seulement,
cela portera atteinte à qui vous êtes profondément, mais cela vous
empêchera également d’être heureuse comme vous le souhaitez. Ça
aussi c’est un calcul mathématique : Pour être plus heureuse et goûter
encore plus au bonheur, il faut être libre.

Libre d’être qui vous êtes.

Libre de vos actions.

Libre de vos choix.

Libre du regard des autres.

Je passe ma vie à lire vos messages privés ou vos publications


dans lesquelles vous demandez l’avis à la communauté Paillette. Vous
vous questionnez parce que vous avez peur de déplaire à votre mère
ou à votre père en prenant un autre chemin que celui qu'ils avaient

136
prévu pour vous initialement. Je lis aussi que vous avez souvent l’im-
pression de décevoir vos amis en osant être différent. Je sais qu’au
fond, ce que la voisine pense de vous, ça ne vous indiffère pas tant que
ça. Je vois tous les efforts que vous faites pour qu’on ne vous distingue
pas ou qu’on décide que vous êtes trop étrange pour nous.

Ça me fascine de savoir que chaque fois qu'il y a un événement


Paillette, soit pour mes clientes ou pour la population en général, la
première question que je vois apparaître dans mes groupes Facebook
est « Comment vous vous habillez? »

Je suis triste de voir que certaines manquent ces mêmes évé-


nements par crainte d’être seule, de ne pas dire les bonnes choses ou
d'avoir l’air bizarre.

Ça me brise aussi le cœur de vous voir vous empêcher de réus-


sir à la hauteur de ce que vous aimeriez de peur de trop briller... et
qu’on vous remarque ENFIN.

Vous devrez vous appliquer à ne jamais perdre le contact avec


votre vie intérieure  : vos valeurs, vos sentiments, émotions et pen-
sées. Vous ne pouvez pas vous tromper en appliquant ce principe, et
même si #lesgens veulent le juger, vous serez beaucoup plus ancrées
et détachées parce que vous serez conscientes de qui vous êtes.

En même temps, vous serez encore plus portées à prendre


l’entière responsabilité de votre réalité, et en l’assumant toujours un
peu plus, vous pourrez en même temps arrêter d’exister dans le re-
gard des autres. Vous porterez ainsi aussi un nouveau regard sur votre
propre pouvoir qui vous aidera à transformer ce qui vous entoure. Par
exemple, si je suis consciente de qui je suis, même si le voisin a envie

137
de dire quoi que ce soit sur moi, cela n’aura plus d’impact négatif. Je
pourrai donc agir avec encore plus de liberté. Vous me suivez?

C’est un fait, pour vivre une vie Paillette, vous devrez absolu-
ment appliquer le fameux proverbe vietnamien chaque jour de votre
vie. Il vous faudra prendre des décisions pour vous, et vous seule.
Vous allez devoir solidifier votre perception de qui vous êtes et vous
concentrer sur votre petite personne, peu importe ce qui se dira ou se
passera.

Je n’ai jamais autant attiré de gens de façon positive, que ce


soit pour mes partenaires d’affaires, mes clientes, mes amies et les
personnes qui ne me côtoient que depuis que j’applique à chaque ins-
tant le #Menkalysse, parce que les gens m’aiment pour qui je suis réel-
lement. Ça ne veut pas dire que TOUT LE MONDE m’aime, et c’est par-
fait comme ça. Parce que plus que jamais, je sais que je n’ai plus envie
de me transformer pour m’adapter aux autres. J'en suis consciente, je
dois taper sur les nerfs de beaucoup de gens, et ça aussi, c’est parfai-
tement correct. Ils en ont le droit et je me dois de respecter ça. Tout
comme je me respecte moi.

Le proverbe vietnamien ne veut pas dire non plus qu’on doive


se foutre absolument de tout le monde et d’agir en n'ayant aucune
considération pour les gens qui nous entourent. Ce n’est pas non plus
d’adopter une attitude passive-agressive avec les gens qui nous jugent
trop rapidement en continuant de faire rouler une sphère négative
que seul nous pourrons arrêter, si l'on décide de le faire, en choisis-
sant d’avoir une tout autre attitude. C’est simplement de savoir la
direction que l’on souhaite prendre et de faire son chemin en étant
soi-même. Que ça plaise ou non. On peut y mettre beaucoup d’amour
et en envoyer tout en réalisant en fait que c’est surtout une question

138
d’estime et de reconnexion à soi. Il ne s'agit pas d’utiliser la même
méthode que celle instaurée par la personne en face de nous et de lui
renvoyer de la méchanceté. En adoptant la bonne façon d’être, je vous
promets que vous ressentirez énormément de légèreté.

Maintenant, j’ai aussi une tout autre vision des gens qui mé-
disent à notre endroit ou qui le font en parlant des autres  : ils sont
profondément malheureux. Peut-être que vous leur renvoyez quelque
chose qu’ils aimeraient profondément être et/ou avoir. Lorsqu’on est
centré sur soi et son propre bonheur, médire et observer ce que les
gens font autour de nous pour ensuite les critiquer n’est pas sup-
posé faire partie du programme. La vie est trop courte pour perdre
son temps avec des futilités comme ça. Si l'on choisissait plus sou-
vent l’amour, et ce, en toute circonstance, la vie serait tellement plus
simple. Maintenant, lorsque je reçois des messages de haine, je les
accueille.

Oui, vous avez bien lu… A-C-C-U-E-I-L-L-E.

Parfois, je ne réponds pas du tout et d’autres fois, je souhaite


tout simplement à la personne une magnifique journée remplie de
paillettes, et je le pense vraiment. Il n’y a aucun sarcasme ni arrière-
pensée de ma part. Ces gens en ont réellement besoin. Vous n’avez
pas de temps à perdre ni aucune énergie autre que de leur envoyer de
l’amour. Je vous mentirais si je vous disais que ça ne me fait plus rien
du tout. Il y a parfois encore des commentaires qui m’atteignent, qui
me blessent ou me remettent en question, mais j’essaie autant que
possible de me brancher à une énergie de bienveillance et de conti-
nuer mon chemin. Je sais que ce sera la seule et unique façon de faire
en sorte que les choses changent un peu.

139
P.S. : Sachez, chers amis d’Europe, qu’il existe une traduction
géniale au proverbe vietnamien. Elle nous vient d’un pays dont l’ori-
gine n’est pas clairement statuée. L’explication est la même et les ré-
sultats aussi. Lisez-le à haute voix : #jmembalékouyes

En résumé, #Menkalysse, c’est :

– Comprendre qu’on est ici pour vivre pleinement notre vie et


non pour l’expliquer. Concevoir que ce que nos proches ou de parfaits
inconnus en pensent ne les concernent absolument pas.

– Savoir que ce puissant mantra vietnamien pourra être uti-


lisé à sa pleine valeur si et seulement si vous apprenez à reconnaître
votre vraie valeur tout en réalisant que vous seule connaissez la véri-
té, même si l'on essaie trop souvent de vous en faire douter.

– Devoir assumer complètement qui vous êtes pour arriver à


vous détacher de l’opinion de TOUT LE MONDE. Qu'il s'agisse de vos
bons ou de vos mauvais côtés, ils sont qui vous êtes et forgent aussi
votre unicité. C'est exactement pour ça que le #menkalysse doit s’ap-
pliquer. En aucun temps vous n’avez à vous excuser d’être qui vous
êtes!

140
© Photo : Maryline Tremblay
141
#Menkalysse :
Tu n ’ as pas à
t ’ excuser d’ être
qui tu es.

142
Chapitre 8 

J’ ai une face de vendredi

Il n’est jamais trop tard pour devenir


ce que tu aurais pu être
– George Eliott

Si vous êtes dans la trentaine, vous vous souviendrez à quel


point décembre 1997 a été un moment marquant pour un bon nombre
d’entre nous : la sortie du film Titanic. My Heart Will Go On, Leonardo
Dicaprio, l’histoire d’amour improbable (qui a très certainement nour-
ri mon pattern en matière de relations amoureuses). Pour la huitième
fois de suite, j’étais présente pour voir ce film avec mes amies. J’ai
quatorze ans. Je suis fébrile juste à l’idée de revoir Jack une autre fois.
Je sais…. Pas intense du tout…

À ce moment, j’entends cinq mots qui auront un immense im-


pact et qui me suivront pendant longtemps. Devant dans la file, une
fille un peu plus âgée que moi me regarde de la tête aux pieds et me
lance très fort : « T’es laite en tabarnak! »

143
Cinq petits mots qui auront une influence sur mes faits et
gestes pendant longtemps.

Cinq petits mots qui m’ont détruite en un claquement de


doigts.

Cinq petits mots qui ont crée des ravages dans ma tête et mon
cœur.

J’ai été une adolescente et jeune adulte extrêmement com-


plexée. Grande, maigre, des lunettes très épaisses, compte tenu de ma
myopie, et des dents très croches en plus d’être avancées. Je n’étais
pas celle que les garçons invitaient à danser dans les partys. Je n’étais
pas la belle fille de l’école. J’avais tellement peur de sortir en public, et
cette frayeur m’a suivie plusieurs années plus tard, parce que tout ce
que j’avais en tête, c’était que les gens se retournaient sur mon pas-
sage pour sans aucun doute se dire entre eux à quel point j’étais laide.

Maintenant, je sais que ce n’était forcément pas aussi dra-


matique que ce que je m’imaginais. J’ai une tout autre perception de
la jeune fille que j’étais, probablement parce que je la regarde d'un
œil différent. J’en ai pleuré, des soirées seule dans ma chambre à me
flageller en me disant que j’étais un monstre. J’ai tant souhaité que
mes dents soient normales, que mes seins poussent, que mes che-
veux soient moins rêches, que mes lèvres soient moins grosses, que
les garçons me trouvent de leur goût, que je me trouve belle.

Or, ce jour-là n’arrivait jamais. Paradoxalement, j’étais popu-


laire à mon école. On appréciait mes initiatives, je montais quand
même sur scène, j’étais présidente de mon établissement scolaire en
cinquième secondaire. Je ne savais pas encore que cette faible estime

144
de moi me permettait de développer d’autres forces comme mon cha-
risme, mon sens de l’humour, ma capacité à rassembler les gens et
ma créativité.

Dans ma tête, je restais cependant la fille laide, sans grand


intérêt mais très drôle.

À vingt-trois ans, après deux ans de traitement orthodontique,


j’ai subi une importante chirurgie maxillo-faciale qui a réglé l’allure
de mes dents trop avancées. Pour la première fois, je découvrais une
toute nouvelle facette de moi. Pourtant, même après je continuais
de sourire et de rire avec une main devant la bouche. Je continuais
d’entretenir des aberrations à propos de mon apparence, et surtout, je
continuais de ne pas m’aimer. Au point de presque me détester.

À ce jour, je n’ai encore aucune idée de qui était cette fille pré-
sente pour voir, elle aussi, Jack coulant avec son immense paquebot,
et qui a eu des mots tellement durs à mon égard, comme bien des ado-
lescents s'échangent entre eux. Elle ne savait sans doute pas que cela
me hanterait pendant une grande partie de mon existence. En fait,
elle ne réalisait pas qu’en m’adressant ce discours cruel, je la laisse-
rais entrer dans ma tête et lui donnerais le pouvoir de me faire autant
de mal.

Je ne suis pas capable, encore à ce jour, de me souvenir du mo-


ment exact où j’ai réalisé que je pouvais être jolie… comme je l’avais
tant souhaité. Je pense que c’est lorsque j’ai travaillé avec un artiste
bien en vue au Québec un peu avant mes trente ans. Un très beau
bonhomme, convoité, gentil, qui, sans le savoir, m’a fait réaliser bien
des choses en me regardant droit dans les yeux et en me disant cette
phrase bien simple :

145
– T’es réellement lumineuse… et tellement belle!

QUI, ÇA? MOI? Et ça vient d’un homme que tout le Québec


trouve magnifique?

IL ME TROUVE BELLE… MOI?

Je n’ai jamais pu lui dire merci. J’ai juste arrêté de parler pen-
dant de longues minutes. Bouche bée. Incapable de prononcer un mot
parce que dans ma tête, ça ne se pouvait juste pas que quelqu’un
pense ça. J’avais encore l’image de la petite fille aux dents remar-
quables, mais pas dans le bon sens du terme. Je pense qu’il a été aussi
surpris que moi de ma réaction et de voir que ce qu’il venait de dire ne
s’intégrait tout simplement pas dans ma tête.

Encore à ce jour, je vous jure qu’à ce moment-là, je ne croyais


pas du tout ce qu’il venait de me dire. C'est pour vous dire à quel point
une croyance négative peut s’incruster de façon très insidieuse dans
notre tête.

Évidemment, l’estime de soi ne doit pas dépendre ou exister


dans le regard des autres. Que cet artiste m’ait trouvée jolie n’a au-
cune espèce d’importance. Pas plus que l’ampleur que j’ai accordée
aux cinq mots de la fille du cinéma. C’est cependant de découvrir sa
face de vendredi... en tout temps.

Selon moi l’estime de soi c’est découvrir sa face de vendredi


en tout temps.

Je m’explique. On ne veut pas avoir une face de lundi ni l’atti-


tude qui vient avec. Cette journée précise de la semaine n’est sans

146
doute pas la plus glorieuse dans notre culture populaire. Elle est un
peu morose et on ne l’attend pas vraiment avec impatience. Il y a
quelque chose de forcément pas trop festif et de pas si beau que ça. Le
lundi a presque une connotation négative, tandis que lors de la der-
nière journée de la semaine, on a une petite impression de renaître.
On va peut-être prendre un peu plus de temps à se préparer pour une
sortie. Notre état d'esprit sera différent et sans doute plus agréable,
comme par magie, juste parce que c’est vendredi. On est soudaine-
ment plus joyeuse, plus optimiste et on entreprend cette journée avec
plus de légèreté.

Avoir une face de vendredi, c’est d’abord reprendre confiance


en soi. Avoir un regard bienveillant sur soi. Il faut, oui, tout d’abord
appliquer le #menkalysse pour trouver ce qui nous rend unique, mais
aussi découvrir ses forces.

Avoir une face de vendredi, c’est trouver ce qui nous rend belle
et l’ancrer profondément en nous.

Avoir une face de vendredi, c’est porter une attention particu-


lière à prendre soin de nous.

Ça sonnera peut-être extrêmement superficiel ce que je vous


avouerai dans les prochaines minutes, mais depuis l’âge de vingt et
un ans, je mets de la crème antiride sur mon visage.

Oui. Vingt et un ans.

J’avais une peur maladive de vieillir. À ce qu’il paraît, je tiens


ça de ma grand-mère maternelle, qui entretenait un peu la même
phobie.

147
Au fil des années, ce rituel s’est un peu transformé. C’est de-
venu mon moment égoïste. Une routine qui dure plus de vingt-cinq
minutes chaque matin et tous les soirs, et de laquelle je ne déroge
jamais.

Beau temps, mauvais temps, hiver comme été, je m’installe


devant le miroir avec mes masques hydratants, gommages, sérums et
crème, puis je prends le temps de me répéter que je suis belle, extraor-
dinaire et (intelligente. Je remercie la vie pour mon corps, mes beaux
yeux verts, mes longues jambes, mes cheveux et pour tout ce que je
trouve magnifique chez moi. Ce n’est donc même plus pour prévenir
les rides; c’est seulement mon moment pour renouer avec la femme.

Une étude menée par la compagnie Dove mentionne que 92 %


des femmes ne sont pas satisfaites de leur apparence.

LES FILLES : 92 %

C’EST ÉNORME! C’EST TROP! ÇA N'A PAS DE SENS!

On tombe dans le piège de la comparaison. On regarde les


standards supposément réalistes que les médias nous envoient
comme message. On se concentre sur notre cellulite, nos poignées
d’amour, nos rides et notre surplus de poids en oubliant complète-
ment nos bons côtés.

J’ai fait énormément de travail sur moi au cours des dernières


années pour m’accepter et changer le regard que je portais trop sou-
vent sur moi. Parce que ça n'avait pas de sens que je me mette autant
de pression. Pour plaire à qui? À quoi? Je n'en ai, encore à ce jour,
aucune idée.

148
Au-delà de la beauté, c’est surtout une question d’attitude.
Parce que la confiance en soi commence dans la reconnaissance de
nos bons coups et se poursuit aussi dans le non-verbal. Je vous vois
très souvent marcher les épaules basses, les yeux fuyants. Je remarque
à quel point vous longez les murs, vous refusez de vous exposer dans
les médias sociaux. Vous minimisez ou pire encore, dénigrez ce que
vous faites.

Je vous entends répéter à longueur de journée : « Je suis trop


grosse! »

Je sais que vous abandonnez l’idée de vous prendre en main


parce que, cachée sous le prétexte du manque de temps, c’est trop
souvent que vous pensez ne pas le mériter.

Je sais aussi que vous disparaissez parfois sous de vêtements


trop amples ou des tenues très beiges, ou que vous dissimulez une
partie de qui vous êtes parce que c’est beaucoup plus facile de faire
les choses comme ça plutôt que de vous tenir debout en étant fière de
qui vous êtes.

J’en ai eu les larmes aux yeux de lire tous les témoignages de


femmes qui ont osé se mettre en sous-vêtements dans mon groupe
Facebook. Vous étiez trop nombreuses à critiquer vos seins tombants,
vos supposés gros derrières, vos cicatrices qui sont aussi la preuve
que vous vous êtes sacrifiées un jour pour donner la vie.

Vous vous êtes perdues en cours de route.

Vous avez mis la femme de côté.

149
Vous avez oublié que vivre une vie Paillette commence d’abord
et avant tout par l’amour de soi.

Comme je l’ai mentionné plus haut, c’est un état tellement fra-


gile! Je retombe trop souvent dans l’autocritique. Je dois souvent me
parler pour me recadrer et remettre du positif dans l’image que je me
renvoie. Je jongle encore parfois avec l’idée de passer sous le bistouri
pour ENFIN pouvoir avoir les seins que j’ai toujours espérés. Compre-
nez-moi bien : il n’y a aucun mal à faire des modifications physiques;
je ne juge absolument pas cela à condition que ce soit fait pour soi.

Tout comme pour la remise en forme et la perte de poids. Je


pense qu’il est sain de vouloir s’améliorer également sur le plan phy-
sique. Je continue de croire qu’il n’y a rien de mieux qu’une visite chez
la coiffeuse pour se sentir renaître, mais le point ici est de savoir que
tout est toujours une question d’attitude.

De prendre soin de soi. De sa santé. De sa personne.

De relever les épaules et de constater avec joie à quel point on


est extraordinaire.

D’être fière de qui l'on est.

Dernièrement la jeune chanteuse québécoise Safia Nolin a fait


paraitre un vidéoclip de sa chanson Lesbian Break-up song où elle
et d’autres femmes apparaissent complètement nues. Beaucoup l’ont
critiqué, alors que d’autres ont applaudi qu’on puisse enfin présenter
une véritable diversité corporelle à travers nos écrans, que l’on fasse
un pas de plus pour l’acceptation de soi. Une autre façon aussi de se

150
réapproprier nos corps. Ceux à qui on fait la vie dure, qu’on se plaît à
détester, et qu’on essaie de « standardiser ».

Je trouve vraiment formidable que la génération qui me suit


osent de plus en plus démystifier ce grand tabou qu’on essaie de
taire parce qu’il nous fait souvent très mal. Spécialement à nous les
femmes. Rares sont celles qui se regardent devant le miroir, encore
moins nues, et se dire à haute voix qu’elles se trouvent belles. On est
trop souvent mal dans notre peau. Mal dans cette enveloppe qui est
pourtant la nôtre, alors qu’on devrait la glorifier. Alors qu’on devrait
être tellement plus clémentes.

On chiale sur le fait que beaucoup d’artiste osent se dévê-


tir pour que les choses changent alors que je pense que tout ça est
extrêmement sain, mais surtout nécessaire. Que c’est peut-être par
l’affichage de cette nudité, qu’on en viendra à faire changer les per-
ceptions.

Un jour, je suis allée à Hawaï avec mon amie Karen (ma post-
crise du mitan m’a vraiment fait beaucoup voyager. On a fait quelques
petites randonnées. Pas de trop hauts sommets ni de longues marches,
mais juste assez pour vivre ce paradis terrestre à fond. Alors qu’on
était sur une plage, on voyait que plein de gens se dirigeaient dans la
même direction. Il semblait y avoir un événement près de l’endroit où
on était. Ça fatiguait énormément mon amie de ne pas savoir ce qui
se passait et elle a tout de suite voulu qu’on quitte le confort du lieu où
l'on était installées pour aller y jeter un coup d’œil.

Après une petite montée pédestre, nous avons atterri au mi-


lieu d’une grande fête musicale avec...

151
DES CENTAINES DE PERSONNES NUES.

Nues comme dans elles n’ont rien sur le dos.

Nues comme dans tout est exposé au grand jour.

Nues comme dans N-U-E-S

J’aurais tant souhaité que quelqu’un puisse prendre notre


réaction en photo. On n’a rien dit pendant plusieurs longues minutes.
On ne savait plus où regarder pour éviter de vivre des malaises. Nous
nous sommes assises au bord de la mer au beau milieu des centaines
de personnes dévêtues qui dansaient frénétiquement.

Ici, je me sens obligée d’ajouter un détail extrêmement impor-


tant : la grande majorité des tout-nus étaient âgés de 65 ans et plus.

Si je vous raconte tout ça, c’est que malgré la surprise de


la chose, c’était presque émouvant de voir à quel point ces gens-là
avaient une réelle attitude de face de vendredi. Ils se foutaient éper-
dument de leurs bourrelets, de leurs seins et autres parties du corps
tombantes (et je vous jure que ça tombait). Ils semblaient très fiers
de leur personne, souriaient sans complexe et se trouvaient sur une
plage d’Hawaï, pas un vêtement sur le corps, à se trémousser au
rythme endiablé de tam-tams.

152
Une expression populaire que je déteste profondément re-
vient souvent dans le discours des femmes : « Je suis à dix livres du
bonheur.

Comme si un poids pouvait avoir un réel effet sur votre vie.


La réalité est que même si vous ne travaillez pas votre attitude de
vendredi, vous aurez beau perdre du poids pour atteindre votre idéal,
vous trouverez toujours une autre chose qui ne vous satisfait pas. La
confiance en soi est un tout. C’est pouvoir gagner en authenticité et
être fidèle à qui vous êtes. C’est délaisser l’idéal souvent impossible
qu’on aimerait atteindre, pour être moins rigide dans nos attentes,
de ne pas miser uniquement sur l’image, mais plutôt l’entièreté que
nous sommes. C’est aussi de pouvoir effacer les idées préconçues
qu’on entretient depuis toujours à notre sujet, pour se voir avec un
tout nouveau regard.

Quand on commence à vouloir montrer encore plus sa face de


vendredi, et donc, s’aimer toujours un peu plus, c’est qu’on accepte
consciemment de laisser partir le jugement que l’on se porte soi-
même en acceptant premièrement qu’on n’est pas parfaite.

ÉCOUTE-MOI BIEN BELLE FILLE : NON, TU N’ES PAS PARFAITE.

ET C’EST PARFAIT COMME ÇA .

N’oublie jamais que la perfection c’est d’un ennui extrême.


Personne ne veut ça.

J’écris ce chapitre alors que je reviens de donner une confé-


rence devant trois cents femmes. Après, comme à l’habitude, j’ai pris
le temps de rencontrer et de parler avec un bon nombre d’entre elles.

153
Vous êtes toutes pareilles. TOUT LE TEMPS. Vous me dites que mes
propos vous ont ébranlée parce que vous savez que vous ne vous ai-
mez pas et que vous ne savez plus quoi faire pour sortir de ce cercle
vicieux. Vous me confiez trop souvent que vous n’aimez pas l’image
que le miroir vous renvoie. Vous exprimez haut et fort que vous avez
un grand syndrome de l’impostrice et que c’est principalement ça qui
vous empêche de progresser.

Puis, vous me dites ce qui me fait le plus de peine : « J’ai arrêté


de prendre soin de moi. »

Je vous mets au défi, et ce dans les prochaines minutes, de


refermer ce livre, d’aller sur YouTube et de sélectionner la chanson
Crazy In Love, de Beyoncé. Ensuite, je veux que vous défiliez sur une
passerelle imaginaire comme si vous étiez un mannequin de Victo-
ria’s Secret.

ARRÊTEZ DE JUGER IMMÉDIATEMENT ET FAITES-MOI


CONFIANCE.

Je vous répète que tout est une question d’attitude. Toujours.


Vous devez croire en vous d’abord pour ensuite laisser votre lumière
faire son travail. Déhanchez-vous, trémoussez-vous, créez-vous un
personnage confiante et sûre d’elle. Faites une Beyoncé de vous-même.

«  Ouin, mais Mélissa, je n’ai pas le corps, pas la beauté, pas


les cheveux, pas rien de toutes ces filles extraordinairement belles... »

JE PENSE QUE VOUS N’AVEZ PAS COMPRIS LE BUT DE L’EXER-


CICE : ON S’EN FOUT ÉPERDUMENT! Si vous ne l’avez pas encore inté-

154
gré, je vous suggère de relire le chapitre #Menkalysse pour vous rap-
peler très exactement les fondements et l’importance du concept.

Est-ce qu’on peut trop s’aimer? Est-ce que ça deviendra mal-


sain ou égocentrique? Est-ce que c’est un comportement narcissique?
Prétentieux? Honnêtement, je ne pense pas. C’est un long et dur che-
min que d’apprendre à le faire, et on est toujours mis à rude épreuve.
Quand on comprend par contre l’importance de le faire quotidienne-
ment, on arrive à se déculpabiliser de bien des situations qui peuvent
nous arriver et qui sont inconfortables, parce qu’on arrive à se tenir
debout, droite et fière. Cela nous aide également à redéfinir notre vi-
sion de nous-même, et d’en faire une meilleure version améliorée. Un
peu comme un jardin dont on prend soin, où l’on prend le temps d’ar-
racher les mauvaises herbes, d’entretenir les fleurs qui y poussent, de
mélanger les couleurs pour en faire un espace encore plus magnifique
et le regarder fleurir.

S’aimer permettra aussi bien des guérisons. Autant physiques,


spirituelles et psychologiques.

Ma bonne amie, aka sœur cosmique Marie Make-up, enseigne


la psychomorphologie et, chaque fois où je l’ai entendue, j’ai tellement
trouvé l’idée intéressante. C’est de savoir que nos traits physiono-
miques existants sont souvent l’extension de plusieurs traits de notre
personnalité. C’est une science prouvée et développée depuis la nuit
des temps qui stipule que la forme de notre visage et ses composants
permettent de pressentir nos forces vitales et notre tempérament.
Donc, concrètement, une personne avec un front large et haut serait
plus spirituelle et intellectuelle et quelqu’un avec des pommettes
hautes aurait notamment une vie affective et émotionnelle plus riche.

155
Si votre « supposé gros nez » était en fait votre atout le plus
important?

Si vos yeux, trop rapprochés à votre goût, exprimaient un as-


pect précis de votre individualité?

Si tous vos défauts physiques, qui selon votre propre percep-


tion en sont, étaient en fait vos plus grandes puissances?

Tout part de vous, de votre posture, de votre capacité à vous


aimer, à vous détacher du résultat et à vous apprivoiser pour vous
accepter comme vous êtes, avec une attitude positive.

Tout s’enchaîne à partir du moment où vous arrêtez de vous


comparer aux autres pour vous concentrer uniquement sur l’extra-
ordinaire Paillette que vous êtes. En même temps, ça vous aidera
fortement à vous éloigner de la foutue validation extérieure que l’on
recherche constamment. La seule et unique personne à qui vous de-
vez plaire, c’est vous. De toute façon, sachez que cette quête est sans
issue. Parce que rationnellement, si vous suivez bien jusqu’à mainte-
nant, personne autre vous n’a ce pouvoir de changer votre vie. Per-
sonne.

Ensuite, vous pourrez honorer votre temple comme il se doit.


D’ailleurs, tout de suite après, vous aurez le chapitre complet sur le
sujet.

P.S.  : L’endroit pour se retrouver parmi les tout-nus à Hawaï


est à Maui et s’appelle Little Beach. À la question « Toi, Mélissa, as-tu
enlevé tes vêtements? », je répondrai ceci : « Ce qui se passe à Hawaï
reste à Hawaï!

156
En résumé, cultiver sa face et son attitude
de vendredi, c’est :

– Inclure une routine beauté tous les jours. M’en fous que vous
disiez que c’est superficiel. Faites-le et constatez-en les bienfaits.

– Comprendre que vous êtes réellement le reflet extérieur de


ce qu’il y a à l’intérieur. Vous avez à prendre soin de l’entièreté de
votre être et à développer votre pouvoir attractif en misant aussi sur
vos émotions et sur vos qualités, qui renverront ensuite du positif sur
votre enveloppe « visible ».

– Accepter vos faiblesses, mais encore une fois miser sur ses
forces, autant physiquement que mentalement et spirituellement.

– Répéter le plus souvent possible que vous êtes belle, intel-


ligente, drôle, attachante, extraordinaire et qu'une loooooongueeeee
liste de qualités vous définit complètement.

157
© Photo : Maryline Tremblay
158
J’ ai une face de
vendredi :
Je suis belle, fine,
intelligente et
extraordinaire.

159
160
Chapitre 9 

Le temple

Dévoile ton corps nu, seulement à ceux qui


sont amoureux de ton âme nue 
– Charlie Chaplin

J’ai longtemps hésité à écrire ce chapitre, sachant qu’entre


autres mes parents allaient le lire. Papa, maman, vous pouvez sauter
celui-ci et aller directement au prochain. On continuera de tous vivre
avec l’idée que je suis une sainte.

Ce sera sans doute une des choses les plus vulnérables et qui
me sortent de ma zone de confort que j’aurai écrites... et avouées,
même. Parce que oui, je peux en dire beaucoup dans une seule et
même journée, mais j’aborde rarement cet aspect-là de ma vie. C’est
le plus sensible. Celui qui me confronte avec toutes mes blessures,
mes peurs, mes angoisses et qui me tiraille souvent entre mes valeurs
profondes mais aussi les idées que je m’en fais.

161
Ne sachant pas trop comment amener tout ça, j’ai senti le be-
soin d’écrire ce chapitre pour sans doute me libérer de quelque chose,
mais aussi pour me réconforter avec l’image que je me fais de l’amour
et des relations amoureuses en général. Je fonctionne beaucoup par
action-réaction, c’est-à-dire que j’ai besoin de vivre les choses, et sou-
vent à répétition pour être sûre que ça fasse bien mal jusque dans
mon âme, pour ensuite en retirer la leçon importante de la douleur.
Mon trouble de l’opposition m’amène aussi souvent à me défier moi-
même juste pour voir à quel point j’ai raison ou non. On se rappelle
aussi que si je veux véritablement incarner et assumer le #menka-
lysse, ce chapitre devenait donc une nécessité, voire une obligation.

J’ai donc eu besoin de vous rappeler, tout en l'expérimentant


de mon côté, que nous sommes un temple.

OUI MADAME : UN FUCKING TEMPLE!

Par définition, un temple est un édifice érigé pour rendre hom-


mage à une divinité. C’est le lieu de protection ultime de celle-ci. Oui,
j’ai tapé « temple » dans Google pour vous écrire tout ça.

Pour y avoir accès, on doit se prosterner, s’incliner, respecter


le culte, les coutumes et les traditions qui y sont rattachés.

Un temple, c'est noble : on ne doit pas donner les clés servant


à l'ouvrir à n’importe qui! C’est comme une espèce de privilège sacré
et ce n’est malheureusement pas tout le monde qui peut y entrer. Il
est hors de question aussi de donner le privilège à quiconque de juste
penser pouvoir toucher à ces fameuses clés, comme par exemple
un parfait inconnu avec qui l'on est parti à l’étranger ou un acteur
connu qui vous manque de respect en vous exprimant ses besoins de

162
base d’homme des cavernes sans même vous inviter préalablement à
prendre un verre. Vous voyez le genre?

Cependant, comme on manque trop souvent de confiance en


nous, comme on recherche aussi parfois l’approbation dans les yeux
des autres, la solution facile est souvent d’abaisser nos critères ou
d’oublier des prérequis pourtant essentiels.

Il y a quelque chose que je n’ai pas compris avec les hommes.


En fait, jusqu’à tout récemment, je n’avais pas vraiment de grande
expérience en la matière. Ma première et seule vraie relation a débuté
alors que j’avais quinze ans et lorsqu'elle s’est terminée, j'en avais
trente-deux. Avec un homme plus vieux que moi qui avait pris les
initiatives, bien avant l’ère des réseaux sociaux et des rencontres en
ligne. Je pense que j’ai toujours eu un peu peur de la gent masculine et
que j’ai eu la trouille de devoir me dénaturer pour plaire à ses repré-
sentants. Inconsciemment, j’ai quand même souvent voulu prouver
ma valeur à travers leurs regards. Je traîne plusieurs blessures de mon
adolescence et j’ai eu parfois l’impression de ne pas avoir évolué dans
cette sphère en ne sachant pas toujours comment m’y prendre.

Gardons toujours en tête que mon objectif de vie, enfoui


depuis mes quatre ans, est l’histoire d’amour impossible de Johnny et
Bébé de Dirty Dancing.

Lorsqu’on redevient célibataire, monoparentale de surcroît,


on bascule rapidement dans une insécurité difficile à expliquer. On a
soudainement l’étrange sensation qu’il est possible qu’on reste seule
pour tout le reste de notre vie. On attire parfois des gens avec une
énergie du désespoir, ce qui fait que les candidats ne sont clairement

163
pas les bons, mais on est parfois tentée de s’en contenter sous pré-
texte que ce serait bien plus simple comme ça.

Je ne suis pas très fière d'avouer ça, mais durant mes dernières
années de célibat, j’ai eu à ma liste des hommes en couple, d’autres
libres comme l’air qui se souciaient peu de moi en ne daignant même
pas répondre à mes textos, et j’ai accepté d’en voir quelques-uns qui
ne correspondaient pas du tout à ce que j’attendais dans la vie. J’ai
parfois eu des rendez-vous à contrecœur, mais que j’acceptais par
peur d’être seule un samedi soir. J’ai eu des histoires sans lendemain
juste pour me convaincre que je pouvais ramener qui je voulais.
Croyez-moi, j’ai rattrapé mes années de presque sœur chrétienne en
recréant littéralement plusieurs scènes de Sex and the City. J’ai par-
fois été Samantha, la chasseuse d’hommes qui leur rit pratiquement
en plein visage et qui a juste hâte de raconter l’historique du rendez-
vous dans ses moindres détails pour faire rire ses amies. D'autres fois
j’étais Carrie, à la recherche du grand amour et qui se fait ignorer
par son fameux Big. J’ai à mon actif quelques anecdotes savoureuses,
dont un gars enfermé dans ma garde-robe, un psychopathe, un qui
était trop fier de dire que je serais sa « pitoune » qui accompagnerait
sa belle voiture de luxe l’été suivant, un autre qui a choisi la soirée où
l'on était ensemble pour m’annoncer qu’il est gay… mais je les garde-
rai pour mon second livre.

J’ai cependant toujours eu l’amertume qui vent avec cette


nouvelle vie plus délurée et ce sentiment malsain d’être tout de même
vide. Ces rencontres sont tellement loin de l’idéal que je me fais de la
vie en couple et de l’amour.

J’ai eu comme modèle des parents qui se sont rencontrés res-


pectivement à quinze et dix-sept ans, qui ont pris en tout et partout

164
une pause de deux ans, au début de la vingtaine, pour revenir l’un à
l’autre éperdument amoureux et encore à ce jour aussi admiratifs et
complices ensemble. J’ai grandi avec l’idée que les histoires de Walt
Disney existent pour vrai. Avec Bébé et Johnny qui s’aiment malgré
la différence de leurs univers, les déchirements et le clash de l’amour
impossible mais qui triomphent en exécutant le grand porté sur l’air
de The Time of My Life.

J’ai conceptualisé le bonheur conjugal à l’antipode des rela-


tions jetables en considérant qu’on pouvait travailler sur notre couple
autant qu’on le fait sur nous. Que lorsqu’il y a du respect, de l’admira-
tion et beaucoup d’amour, il n’y a aucune montagne qu’on ne puisse
pas escalader, ensemble, main dans la main.

J’ai longtemps refusé de croire que c’est utopique, tout ça, et


plutôt prétendu que ça se peut. Pour vrai. Avec des ajustements, oui,
de la lucidité aussi, mais que la fidélité et l’authenticité ne sont pas
juste des concepts loufoques développés par des scénaristes d’Hol-
lywood sur l’acide qui imaginent tout ça juste pour pouvoir faire ex-
ploser le box-office.

Je le sais parce que j’ai Josée et Sylvain (mes adorables pa-


rents), qui me rappellent chaque jour, avec leur « cutitude », de rire
ensemble, de se trouver beaux passés soixante ans et de se le dire que
c’est vrai. Comme dans toutes les belles histoires d’amour.

Ça devient facile, un soir, lors d'un souper entre copines, d’ou-


vrir un compte Tinder parce que tes amies en couple veulent aussi
jouer à « swiper à gauche droite ». Au fond, ce n’est pas vraiment nous
qui désirons garder l’application sur notre cellulaire pour nous désen-
nuyer les soirs où les copines ne sont plus là pour choisir le ou les gars

165
avec qui tu auras une conversation futile et bien souvent inintéres-
sante. En m'observant, c’était réellement lorsque la panique arrivait
de façon sournoise que soudainement, j'avais envie de m’inscrire au
dernier site de rencontres que des proches me conseillaient. Je refai-
sais tout le processus de la publication des photos de moi en robe de
princesse, soigneusement choisies, pour être sûre que le gars juge au
maximum mon concept et j'ajoutais une description personnelle la
plus bête possible pour m’assurer qu’il y ait une partie d’auto-sabo-
tage efficace afin de ne jamais me rendre aux rencontres proposées
par les ultimes courageux qui disaient trouver mon profil intéressant.

Parce que Bébé, elle, n’a pas eu besoin d’un stupide site de
rencontres pour tomber sur Johnny.

Parce que la princesse Belle n’est pas tombée amoureuse


d’une simple photo de profil sans découvrir l’être magnifique qui se
cachait derrière la Bête.

Parce que Pocahontas avait la vie à faire découvrir à John, l’ex-


plorateur qui est arrivé complètement par hasard dans son existence.

J'étais toujours coincée entre mon univers parallèle et la façon


moderne de rencontrer qui me donnait beaucoup plus l’impression
de survoler un catalogue insipide avec des gens qui n’ont également
qu’une seule envie : ne pas être seuls. Point.

J’ai parfois réussi à me convaincre que j’étais parfaitement à


l’aise avec l’idée de Tinder, qui est assez drôle, on va se l’avouer, ou
avec d'autres applications de ce genre ou des échanges coquins par
textos parce que ça m’a fait sentir femme lorsque j’en avais besoin,
mais je m’éloignais complètement de mes valeurs profondes, entre
autres la fidélité, qui est si importante pour moi.

166
Évidemment, comme dans tout, ce n’était pas complètement
négatif. De bons gars ont passé dans cette vie de célibataire. J’ai été
bien et me suis sentie en sécurité dans leurs bras, à me faire croire
que ça pourrait peut-être durer le lendemain, même si je ne vibrais
pas complètement à leurs côtés. Quelquefois, ça m’a changé les idées
alors que je déprimais à prétendre que je finirais vieille fille. J’ai par-
fois réussi à oublier qu’une femme les attendait à la maison et qu’ils
pourraient peut-être me choisir au lieu de rentrer chez eux. Ça m’a
même ramenée à ma féminité de me faire courtiser et désirer.

Aussi, comprenez-moi bien : je ne vous juge absolument pas


si vous collectionnez les aventures d’un soir et que vous avez envie
d’expérimenter X, Y ou Z avec Pierre, Jean ou Jacques… ou les trois à
la fois. Je questionne simplement le fait qu’on donne accès trop faci-
lement à notre temple, ou du moins, qu’on ne le fait pas toujours pour
les bonnes raisons.

Or, on vaut tellement plus que ça!

On ne mérite pas d’être celle qu’on ne rappelle jamais. On ne


mérite pas d’être la deuxième qui patiente gentiment de recevoir EN-
FIN le texto du prochain rendez-vous. On ne mérite surtout pas d’être
celle peu considérée par un gars qui ne nous arrive même pas à la
cheville de toute façon. On mérite tout : T-O-U-T!

Le beurre pis l’argent du beurre. Le gars complice, qui est


notre meilleur ami en même temps, mais celui qui peut aussi nous
faire sentir comme si on était LA SEULE FEMME DE LA PLANÈTE juste
en posant ses yeux sur nous. Le gars avec qui on échange sur tous les
sujets, mais qui peut aussi saisir en un claquement de doigts nos be-
soins de silence. Le gars qui s’intéresse à nous mais qui a aussi l’intel-

167
ligence de nous laisser toute la liberté dont on a besoin. Le gars qu’on
admire, mais qu’on trouve si con à la fois parce qu’il nous fait mourir
de rire. Le gars qui nous répète mille fois par jour, mais qui est aussi
indépendant parce que la dépendance affective ne fait pas partie de
notre quotidien. On mérite qu’il soit père de nos enfants si l'on veut,
ou une aide précieuse qui comprend son rôle si l'on a eu une vie avant
lui. On mérite un gars qui n’a pas peur de s’engager avec nous parce
qu’il sait que ce sera une des plus belles aventures de sa vie.

C’EST ÇA QU’ON MÉRITE!

RIEN EN BAS DE ÇA.

J’ai toujours beaucoup aimé une chanson d'Ariane Moffat,


artiste québécoise, qui résume avec beaucoup de légèreté ma pensée :

Je veux tout,
L'image claire et la floue,
Sur les sentiments illimités.
Je travaille,
Pour l'amour sans rendez-vous,
Je veux voler sans me faire attraper.

Je veux tout,
Le silence et les promesses,
Le rigide et la souplesse.
Je veux tout,
L'anarchie et la sagesse,
Ton sourire et puis tes fesses!

168
J’ai fréquenté un bel homme qui avait un corps de dieu, un
bon emploi, ambitieux et drôle… Rencontré sur Tinder. Traitez-moi de
superficielle si vous le souhaitez, mais évidemment, ses photos ont
tout de suite attiré mon attention. Physiquement, il avait tout ce que
je voulais. Absolument tout.

On a échangé plusieurs messages pendant quelques mois.


Vif d’esprit, il affichait une culture générale excellente, un français
impeccable. Juste ce dernier détail, c’était déstabilisant parce qu’on
était loin des «  sa va?  » que je rencontrais habituellement sur cette
application.

Après quelques mois d’échange, et je trouvais cela particuliè-


rement respectueux de sa part, on a finalement décidé de se voir en
personne, mais je n’ai pas senti la petite flamme qui confirme hors de
tout doute que je pourrais éventuellement tomber amoureuse. Ni lors
des autres rendez-vous, d’ailleurs. Je poursuivais tout de même cette
relation «  amicale avec bénéfices  » sans trop savoir quelles étaient
mes réelles motivations. Le déni m’allait très bien.

Un jour, je lui ai écrit alors que je planifiais un déplacement


professionnel pour lui demander s’il avait envie de me voir. Ça fai-
sait déjà plusieurs mois qu’on s’était vus. Nous avions continué les
échanges écrits, mais sans plus. Il m’avait un peu avoué sa peur au
sujet de ma réalité de maman et d’entrepreneure, mais comme ma
crainte du rejet était plus grande, je préférais sans doute continuer
d’entretenir cette « non-relation » parce qu’au moins, un gars m’écri-
vait. Tsé. Un peu d’intérêt.

Paradoxalement, je continuais d’avoir en même temps en tête


l’homme pour qui j’éprouvais de réels sentiments, mais qui n’était

169
pas prêt à s’engager (le même qui aime la fonctionnalité). De la belle
cohérence qui m’amenait moi aussi à ne pas être branchée sur ce que
je veux vraiment, mais je me disais qu’en attendant que l’homme de
ma vie se décide, je pouvais continuer de voir l’autre Apollon que je
gardais dans la voie d’accotement au cas où. Vous comprendrez à quel
point c’est tellement loin de mes valeurs.

Donc, Dieu Grec Tinder m’a demandé de passer chez lui et


comme à l’habitude, très charmant, un verre de vin plus tard, il s'est
passé ce qui devait arriver. Le problème, c'est qu’il a prétexté devoir
partir travailler… un samedi… à seize heures trente, soit deux heures
après mon arrivée. Dix minutes, top chrono, après le résultat final
de l’objectif initial de la rencontre. Un genre de « Faudrait que tu te
rhabilles, fille, parce qu’il faudrait que tu quittes » (bon, O.K., il ne m’a
jamais dit ça mais l’a laissé sous-entendre. Comme je trouvais que ça
accentuait mon propos de victime et comme c’est mon livre, j’ai un
peu le droit de déformer la réalité… mais c’est vraiment ça qu’il vou-
lait un peu dire. Du moins, lui s’est rhabillé en me prétextant sa raison
de marde d’aller travailler à seize heures trente).

J’ai été une fille qu’on fréquente un samedi de quatorze heures


trente à seize heures trente.

– HÈYE! J’AI-TU L’AIR DU GENRE DE FILLE À QUI ON N’OFFRE


MÊME PAS UN SOUPER? NI DE SIMPLEMENT CONTINUER UNE
CONVERSATION APRÈS, METTONS? ON N’OUBLIE PAS QUE JE SUIS
LOOOOOIIIN D’ÊTRE UNE FILLE DE LINE-UP… SAUF CETTE FOIS À
BOUCHERVILLE.

J’aurais mérité la délicatesse de base malgré cette «  non-


relation ».

170
J’aurais mérité de me sentir importante pour lui le temps
d’une soirée complète.

J’aurais mérité de croire en ce beau samedi et que ma généra-


tion vaut plus que ces maudites relations jetables qui sont loin de « Ils
se marièrent et eurent beaucoup d’enfants ».

Je m’en suis tellement voulu, ce jour-là! De ne pas m’être fait


respecter, mais surtout de n’avoir même pas eu cette propre consi-
dération envers moi. Parce que si je veux être parfaitement honnête
avec vous, c’est quand même moi qui s’est volontairement retrouvée
dans cette situation en connaissant les conséquences possibles, en
sachant que la déception ne serait pas loin.

Comment peut-on espérer mériter le respect de quelqu’un


quand on s’en éloigne totalement soi-même? Cette journée, je suis
retournée dans ma voiture à seize heures trente, un samedi, seule,
frustrée, mais surtout convaincue  : C’ÉTAIT FINI… PLUS JAMAIS JE
NE DONNERAIS CE PRIVILÈGE À QUELQU’UN QUI NE ME MÉRITE PAS!
Somme toute, ç'a été un beau cadeau, cette situation absurde. De me
dire que plus jamais je ne me sentirais vide comme ça ou que je lais-
serais mes peurs de solitude prendre le dessus sur ce qui est tellement
important pour moi.

Les filles, vous êtes réellement un temple. Pendant toute notre


jeunesse, on nous fait croire, en nous répétant dans les films et les
histoires, que nous sommes des princesses, mais par manque d’égard
pour qui nous sommes, on peut faire bien des bassesses pour avoir
l’acceptation des autres. Il ne faut pas prendre ce détail à la légère.
Vous êtes réellement précieuses. Vous devez absolument prendre
conscience de l’être divin que vous êtes. Ne diminuez jamais votre

171
valeur pour quiconque. Vous avez tout à l’intérieur. Vous êtes le
pouvoir. Point.

Vous n’êtes pas des filles qu’on « date » un lundi.

Vous n’êtes pas des filles qu’on ne rappelle plus jamais juste
parce qu’on n’a pas le courage de vous dire que ça ne fonctionnera pas.

Vous n’êtes surtout pas le genre de fille qu’on garde comme


bonne deuxième juste parce que le gars s’ennuie dans sa vie beige et
fonctionnelle.

Vous êtes une médaille olympique. Pas le premier prix au


bingo : UNE MÉDAILLE OLYMPIQUE!

Il faut vous mériter. Il faut travailler fort. Il faut bûcher pour


vous gagner. Il faut vous respecter car vous avez une immense valeur.

Cet état d’esprit changera d’abord et avant tout parce que vous
commencerez à y croire réellement.

J’ai déjà lu quelque part que personne ne peut nous donner ce


qu’on n’a pas à l’intérieur de nous.

Personne ne peut nous apporter de la douceur si nous ne


sommes pas douce envers nous-même.

Personne ne peut nous apporter de la bienveillance si nous


ne pouvons nous regarder dans le miroir en étant fière de qui nous
sommes.

172
Personne ne peut nous aimer véritablement si nous ne nous
aimons pas profondément d’abord et avant tout.

Je remarque que tous les hommes que j’ai attirés à un moment


précis de ma vie étaient le parfait reflet extérieur de ce que j’étais en
dedans. Lorsque j’ai été en colère relativement à un événement très
précis, j’ai rencontré un homme qui, en apparence, semblait si gentil
et généreux pour me rendre compte qu’il était colérique, manipula-
teur et violent psychologiquement.

Lorsque j’ai eu peur de l’amour et de perdre ma liberté, j’ai


eu à gérer un homme habité par une peur de l’engagement si grande
qu’elle surpassait sans aucun doute toutes mes angoisses.

Les femmes prises dans une spirale de violence ont souvent


été préalablement brisées dans le passé. Au contraire, les filles qui
sortent d’une relation somme toute saine mais qui ont une peine im-
mense et qui ne prennent pas le temps d’apaiser leur chagrin auront
systématiquement une nouvelle relation très loin de leur idéal.

Ma psy m’a répété maintes et maintes fois que les études


démontrent qu’on devrait normalement attendre de deux à cinq ans
avant de se remettre en union avec quelqu’un à la suite d'une rupture.
Là-dessus, il faut éviter autant que possible les relations sexuelles
pour ne pas que notre cerveau confonde amour et besoin physique.

C’EST FOU! DEUX ANS!

Donc, c’est le temps nécessaire pour redéfinir qui l'on est, pour
revenir à l’essentiel et à ce qu’on veut. Pour guérir du passé, envisager

173
le moment présent et surtout pour pouvoir donner les bonnes clés.
Aux bonnes personnes.

Par ailleurs, ce n’est pas que dans les relations amoureuses.


C’est dans TOUTES vos relations. On cherche tellement l’approbation
des gens, que nos proches soient fiers de nous, que nos collègues nous
apprécient et que nos supérieurs nous valorisent qu’on oublie qui
l'on est pour tenter de devenir quelqu’un d’autre. Sur le coup, on ne
mesure pas l’impact que cela peut avoir au quotidien. La voie la plus
facile nous semble parfois de nous « modeler » à la personne qui est
en face de nous au lieu d’honorer tout notre être.

On accepte, on tolère, on sourit alors que tout ce qu’on devrait


faire, c’est nous écouter, suivre notre instinct et poursuivre notre
chemin.

Se réapproprier son temple veut aussi dire se libérer de la


recherche de l’approbation des autres.

Avec du recul, qu’est-ce que je suis allée chercher durant ce


LONG… (not!) après-midi de rencontre avec cet homme?

Uniquement l’approbation.

Qu’il me trouve belle. Attirante. D’agréable compagnie.

Juste le temps d’exister quelques instants dans ses yeux, dans


ses gestes et dans ses intentions.

Qu’il me fasse croire que je « mérite cet amour ».

174
Combien de fois on se pile sur le cœur pour cette foutue appro-
bation qui n’a pas lieu d’être?

Pire, plus on la recherche, plus on se rend compte du vide qui


vient avec parce que cette approbation ne pourra jamais vous donner
le sentiment d’être réelle ou complète. C’est uniquement votre res-
ponsabilité de créer cet état d’esprit.

Ça m’a pris beaucoup de temps avant de comprendre tout ça,


et j’imagine que ça faisait partie aussi du processus de cette nouvelle
vie aux possibilités infinies. Je me suis mise à redéfinir mes clés,
celles qui étaient absolument nécessaires pour pouvoir accéder à mon
temple. Celles qui devenaient non-négociables pour respecter mes
valeurs fondamentales. Qu’est-ce que le gars aurait besoin d’avoir
dans son trousseau (quel magnifique jeu de mots vu le contexte!) pour
même oser espérer obtenir un rendez-vous très simple avec moi?

Dans mon entreprise, je choisis soigneusement mes collabo-


rateurs. Mes clientes sont aussi triées sur le volet pour être qualifiées
afin de m’assurer d’avoir toujours du plaisir, tandis que dans ma vie
affective, c’est comme un buffet à volonté de gars qui se permettent
de m’écrire «  sa va  » en attendant le plus sérieusement du monde
d’avoir une réponse de ma part?

J’ai décidé, ce beau samedi-là à seize heures trente-trois, que


les règles allaient changer. Pour toujours.

De même, j’ai fait le constat que pour arriver à bien amorcer


ce processus, je devais aussi renouer avec ma féminité. Je sais que ça
peut paraître très étrange, surtout si vous me connaissiez avant de
lire ces lignes, parce que oui, je suis une vraie fille.

175
Mais je pense que je n’assumais pas la femme. Pas la vraie. Je
m’explique. Je suis « girlie », mais j’étais plus à l’aise en robe de prin-
cesse. Je n’ai pas toujours eu conscience de ma force. Je n’ai jamais
trop voulu mettre un côté sexy de l’avant parce que je n’ai jamais cru
non plus que je pouvais l’être. Dans ma tête, et je l’ai souvent répété
à mon amie Kim, qui me regardait chaque fois avec un air désespéré,
je suis la « girl next door ». La fille attachante et drôle qui dit tout ce
qui lui passe par la tête. Mon histoire de vie fait en sorte que j’ai sans
doute réprimé quelque chose pour ne pas déplaire. Lorsqu’on respecte
son temple, mettre de l’avant la femme est le pas à franchir, selon
moi, pour accéder à sa force divine.

L’idée n’est pas de se dénaturer ou d’enfiler sa mini-jupe, de


se percher sur ses talons hauts et de crier haut et fort à quel point
c’est bon d’être une femme. C’est plutôt de recommencer, par de petits
gestes, à se réconcilier avec notre nature profonde.

On y arrive en adoptant sa face de vendredi, très certaine-


ment, mais aussi en arrêtant de vouloir disparaître sous des couches
de vêtements qui serviront juste à cacher nos courbes.

Rapide tranche de vie : à une époque où je n’avais que mon


premier fils, j'avais enfilé un chandail semi-transparent sous lequel
on pouvait entrevoir mon soutien-gorge. Je travaillais de la maison,
je n’avais pourtant personne à qui montrer ce look vestimentaire. Ce
matin-là, je m’étais habillée pour le simple plaisir de me trouver belle.
La personne qui partageait ma vie m’avait rapidement ordonné de
l’enlever, prétextant que tout ce que je voulais, c’était montrer mes
seins. J’ai eu droit à un discours patriarcal qui ne finissait plus sur
« lorsqu’on est une mère, on ne doit pas être sexy et c’est épouvan-
table de vouloir attirer l’attention sur soi de cette façon ».

176
Ici, j'apporte un détail important  : je n’ai pas vraiment de
seins, comme dans « pas beaucoup ». Même si j’en avais…

Ce corps m’appartient et je peux en faire ce que je souhaite :


l’exposer dans une galerie d’art ou sur une photo pour mon Instagram.
S’il s’agit d’un choix conscient, qui est le mien, il n’est pas encore né
celui qui me dira de nouveau d’aller me rhabiller.

Donc, je reviens à mon point : oui, portez des vêtements qui


épouseront votre silhouette même si VOUS jugez que VOUS n’avez pas
le corps pour ça. Nous sommes courbes, volupté, et nous luttons sans
cesse pour le nier? On peut dire que c’est complètement superficiel,
mais je pense très sincèrement qu’il s’agit d’un excellent départ pour
redécouvrir sa déesse intérieure. Au moment où j'écris ces lignes, la
jeune animatrice, auteure et comédienne Rosalie Bonenfant s’est dé-
nudée complètement le temps d’un cliché sur Instagram, accompagné
d’une mention humoristique. En raison de la façon dont elle est pla-
cée, on ne voit strictement rien. C’est de bon goût et on comprend le
message féministe qu’il y a derrière l’initiative.

Rapidement, les commentaires déferlent  : «  Besoin d’atten-


tion », « Après, ce genre de filles crient au viol », « Va te rhabiller »,
« Salope » et j’en passe.

Je répète un point TRÈS IMPORTANT : ce corps est TON corps.


Que tu le dénudes, que tu en prennes soin ou non, que tu le donnes à
de parfaits inconnus ou que tu préfères le garder longtemps pour toi,
que tu l’idolâtres ou que tu le détestes, ça reste TON choix.

Je pense personnellement qu’on doit l’honorer, mais l’idée est


de le préserver avec nos principes de vie… à nous.

177
Pour pouvoir aussi retrouver cette divinité et bien profiter de
ce temple sacré, n’ayez pas peur de la fameuse solitude. N’oubliez pas
que lorsqu’on est dans un lieu de recueillement, il est normal d’avoir
ces moments de contemplation.

J’ai été confrontée plus d’une fois à ce qui était tellement in-
confortable pour moi. Entre autres, lors d’une formation au Mexique.

C’était prévu depuis longtemps et tous mes collègues québé-


cois et européens y allaient. Habituellement, nous arrivons seul à ces
séminaires, qui font office de retraite fermée pendant laquelle nous
passons des jours entiers à travailler sur notre entreprise, à connec-
ter entre nous et à développer des contacts pour le futur. J’avais par
contre sous-estimé ou volontairement fermé les yeux sur un détail
important : cette fois-ci, notre lieu de formation aurait lieu dans un
centre de villégiature, un tout-inclus, dans un endroit paradisiaque.
Ce qui impliquait que les gens, en étant accompagnés, pouvaient aus-
si en faire profiter leur partenaire de vie.

À l’aéroport, j’ai entendu la première phrase assassine : « Vous


voyagez seule? »

À mon arrivée à l’hôtel, mon calvaire s'est poursuivi avec  :


« Vous avez une chambre solo, madame? »

Le même soir, au premier restaurant, pendant que le serveur


tire gentiment ma chaise pour que je puisse m’asseoir: « Vous atten-
dez quelqu’un? »

Lors de ce fabuleux séjour d'une semaine, le mot « seule » est revenu


plus d’une fois parce que oui, dès mon arrivée, en retrouvant mes
collègues, j’ai vu qu’ils étaient bel et bien tous accompagnés.

178
À ce moment, j'ai ressenti une grande tristesse directement au cœur.
J’ai eu plus d’une fois la gorge nouée. Aussi, la même pensée me
revenait sans arrêt en tête : « Qu’est-ce que ça me donne concrète-
ment de bâtir tout ça si c’est pour ne pas pouvoir le partager avec
l’homme que j’aime? »

Dans ma chambre d’hôtel, « forever alone », j’ai constaté que


malgré la confiance que je peux avoir professionnellement, oui, sou-
vent sur le plan personnel, j’étais encore beaucoup trop fragile. J’avais
continuellement cette petite crainte, jamais bien loin, que THE MAN
ne veuille jamais m’aimer. Comme je suis. Avec tout ce qui vient avec.

Tout comme vous, j’ai souvent cherché à sauver les autres


avant moi-même, à virer le monde à l’envers pour les gens que j’aime,
à me préparer à aller à la guerre pour défendre ceux qui sont dans ma
vie, à conquérir la planète entière pour prouver mon amour en ou-
bliant complètement d’être gentille avec moi d’abord. J’ai défendu des
territoires qui n’étaient pas les miens au détriment de mes propres
limites.

Je me suis vouée à d’autres cultes avant de m’intéresser


concrètement au mien.

Penser à nous, à notre petit cœur, à notre bien-être, ce n’est


pas quelque chose qu’on nous enseigne. On nous dit d’être généreux
avec nos camarades de classe, de faire des concessions pour tout le
monde, de ne pas être égoïste, mais je pense que la base de tout est
de revenir à soi pour pouvoir encore plus être aimée des autres par
la suite.

179
Un temple a non seulement besoin d’entretien, mais il faut
parfois reconstruire ce qui était. Il y a eu des guerres, des conflits, des
chamboulements. Ce qui tient encore debout a perdu de son lustre ou
n’a plus particulièrement de vocation.

J’ai eu besoin de cette reconstruction. Elle a fait mal quand


je l’ai accomplie adéquatement en évitant la fuite. C’est l’étape qu’on
veut souvent éviter parce qu'elle n’est pas la plus attrayante. C’est
celle qui demande le plus de temps et d’énergie, mais je sentais que
je devais le faire.

Dans mon lit mexicain non partagé avec un homme de


la place (je trouvais ça très important de mentionner ce détail),
il y a eu beaucoup de larmes, dénuées cette fois-ci de la volonté
de contourner ma peine. J’ai voulu la regarder droit dans les yeux.

Chaque soir, j’ai apprivoisé cette solitude en entrant dans ma chambre


sans mes précieuses amies Marilyn et Gabrielle, qui, habituellement,
sont toujours là. Je me suis poussée à confronter ce qui me faisait mal
pour mieux comprendre, mais pour encore plus accueillir. J'ai surtout
vu la transformation dans mon « oui, je suis seule » vers la fin de la
semaine. Il n’y avait plus d'yeux embués derrière mes lunettes, plus
de sarcasmes pour me protéger avec l’humour. Un doux sentiment
de bien-être, d’acceptation, et surtout une envie de me raconter une
nouvelle histoire... qu’il va finir par se réveiller et arriver, le THE man.

C’est en se soumettant aux situations pénibles et en les étu-


diant avec attention qu’on peut enfin les supprimer de notre exis-
tence ou diminuer leur douleur. J’ai aussi compris que même dans
les moments où l'on se sent complètement isolée, on ne l’est jamais
véritablement autant que notre esprit cherche à nous le faire croire.

180
J’ai aujourd’hui la conviction que c’était LE test ultime que la vie m’a
envoyé pour voir si j’étais réellement bien avec moi et si j’étais prête
pour la suite. Et vous savez quoi? Je pense que oui ❤❤️❤ Celui qui
entrera dans ma vie sera immensément chanceux. That’s it! 

Parce que je suis une médaille olympique.

En ce qui concerne les clés, comme je suis quelqu’un qui les


perd constamment dans toutes les pièces de la maison, je sais aussi
maintenant que c’est normal d’attendre le prince qui les possédera
toutes également. Il doit simplement prendre le temps de les trouver.
Il est sûrement lui aussi TDAH.

Les filles, le jour où nous comprendrons que nous avons le


pouvoir, tout changera. Lorsque je parle de pouvoir, il ne s'agit pas du
terme masculin de la chose, qui se veut l'image de gagner quelque
chose en voulant écraser l’autre.

C’est simplement de se donner des possibilités. Nos possibilités.

Rappelez-vous toujours votre valeur et que vous n’êtes pas un


open house!

Oui. Mon chapitre finit comme ça.

181
En résumé, honorer son temple pour mieux
briller, c’est :

– Vous rendre compte à quel point vous êtes précieuse. Pour


accéder à votre temple, on doit se prosterner, s’incliner et respecter les
coutumes et les traditions qui y sont véhiculées. On doit vous mériter.

– Ne pas laisser votre peur d’être seule ou votre besoin d’ap-


probation prendre le dessus. Être libre et maître de votre vie en étant
consciente de votre valeur.

– Ne pas être une fille de line-up. Je trouvais ça très important


de le répéter.

– Renouer avec votre féminité et vous la réapproprier. Nous


avons en nous cette nature profonde qu’on cherche trop souvent à
camoufler alors qu’elle est primordiale.

– Donner le temps à quiconque fera partie de votre vie de


trouver toutes les clés nécessaires pour accéder à votre temple. Aussi,
déterminer clairement leur identité : Loyauté? Bienveillance? Plaisir?
Légèreté? Douceur? Ambition? Calme? Énergie? Que devra-t-on possé-
der pour être à vos côtés?

182
© Photo : Julie Dessureault - Rose aux joues
183
Le temple :
Je ne suis pas une
fille qu ’ on date de
14 :30 à 16 :30.

184
Chapitre 10 

Merci, Roberto

Quand tu choisis de pardonner ceux qui


t’ont fait du mal, tu supprimes le pouvoir
qu’ils ont sur toi – Auteur inconnu

Merci de m’avoir trompée

Oui, aujourd’hui je t’écris pour te remercier. Je ne le fais même


pas par vengeance de bas étage. Non, non, je te remercie pour vrai.
Sur le coup, je n’ai pas vu ton geste comme un cadeau. Ça m’a fait ex-
trêmement mal, je n’ai jamais ressenti autant d’humiliation de toute
ma vie et surtout, je pense n’avoir jamais vécu autant de colère… celle
où tu as peur de toi et que tu sens que tu n’as plus aucun contrôle.

Que ce soit clair : je n’endosserai jamais ton geste, je ne l’excu-


serai pas. Par contre, je peux le voir maintenant comme extrêmement
positif. Ça m’a permis de renaître… littéralement. De me pardonner
d’avoir pris une décision qui a probablement été l’une des pires de
toute ma vie. J’ai pu débuter un processus de guérison, mais surtout
d’introspection. Je suis allée chercher là où je ne soupçonnais même

185
pas une force, un courage et une résilience. J'ai compris à quel point je
m’étais perdue à travers ces années. J'ai véritablement pris mon envol,
et ça, c’est extrêmement précieux! J’ai pu redéfinir toutes les sphères
de ma vie et faire le vrai ménage pour pouvoir avancer et cheminer.

Probablement que je n’en serais pas où j’en suis aujourd’hui si


ce n’était pas arrivé. On dit souvent que « rien n’arrive pour rien » et
j’en demeure aujourd’hui convaincue. Sur le coup, ça a été pour moi la
fin du monde de perdre cette confiance que j’avais en toi et qui était si
précieuse, de perdre en même temps ce nouveau chemin qui était en
train de se dessiner entre nous deux et qui était le résultat de notre
amour transformé. Surtout de laisser s'installer cette agressivité et
cette amertume, qui étaient si loin de mon plan initial...

Pourtant, aujourd’hui, je réussis à sourire. Je prends conscience


qu’effectivement, la vie fait bien les choses. Elle me prouve hors de
tout doute que tout est toujours parfait. Je sais que tout n’est jamais
tout noir ou tout blanc. Que comme dans n’importe quelle histoire, il
y a deux côtés à une médaille, que j’ai eu mes torts aussi dans cette
relation et que tu avais probablement tes blessures ou tes raisons de
faire ce que tu as fait. Je ne saurai jamais si tu éprouves des regrets ou
si tu aurais aimé que ça se passe autrement, mais si jamais tu lis ces
lignes, sache que je te remercie… sincèrement. Ça a réellement fait
de moi une version améliorée. Même si, parfois, j’ai encore peur de
l’avenir et une certaine difficulté à faire confiance, je continue d’entre-
tenir cet optimisme et de ne pas généraliser. Je continue de croire aux
contes de fées, à l’amour, le vrai, celui qui est sincère et au gars qui me
choisira pour qui je suis vraiment.

J’ai écrit ce texte pour le blog de la «  Parfaite maman cin-


glante ». Je l’avais écrit à l’époque pour pouvoir me libérer et extério-

186
riser ce qui était devenu tellement sombre à l’intérieur de moi. J’avais
besoin de verbaliser cette colère pour me libérer de ses liens qui me
tiraient encore vers le bas. J’ai été une fille cocue. Trompée par son
conjoint. Une fille qui avait une confiance aveugle. Quand je l’ai ap-
pris, je suis entrée dans une colère noire. Incapable de me calmer, j’ai
hurlé, crié ma peine. J’ai été des semaines à en vouloir à la terre en-
tière. C’est fou, parce que je n’avais plus aucun sentiment amoureux
pour cet homme, mais j’ai quand même été profondément ébranlée
de n’avoir rien vu venir. Je n’ose pas imaginer la douleur des hommes
et des femmes qui aiment encore profondément leur conjoint et qui
apprennent cette nouvelle.

Cette trahison fut tout un cheminement pour moi au cours


des dernières années. Quand quelqu’un nous fait extrêmement mal,
un paquet de sentiments négatifs arrivent tous en même temps et
ça crée non seulement des résistances, mais ça nous maintient aussi
vers le bas dans une énergie destructrice.

Or, au bout du compte, c’est à nous qu’on fait mal.

C’est nous qui en subissons les conséquences.

Je n’ai pas honte de l’avouer, j’ai dû avoir recours aux bons


services d’une psychologue pour me sortir de cette hargne parce que
j’étais en train de me détruire à force de détester. Mon corps me par-
lait constamment. Encore à ce jour, je sais que tout cela a été très
néfaste pour ma santé parce qu'un nombre considérable de « bobos »
ont émergé à la suite de cet épisode.

Je me suis levée un matin avec ce que je pensais tout d’abord


être de simples piqûres de moustiques localisées au même endroit.

187
Plus les jours avançaient, plus je commençais à ressentir de la douleur
et un inconfort particulièrement désagréable. J’ai longtemps attendu
avant d’aller consulter, étant convaincue que ça allait passer, jusqu’à
ce que je ressente une vive douleur, que je fasse mille millions de
degrés de fièvre et que je fasse une foule de chutes de pression.

Le médecin a tout de suite constaté que j’étais en pleine


crise de zona… qui est habituellement une maladie qui se développe
dans la cinquantaine… sauf si l'on traverse de grosses tempêtes. Il
m’a regardée avec un sourire compatissant, sachant ce que j’étais en
train de vivre sur le plan personnel, et m’a simplement dit : « Tu sais
Mélissa, le zona, c’est comme un feu au bout des extrémités. Ça se
déclenche souvent en période de deuil, lorsqu’on vit des émotions in-
tenses, qu’on s’est senti blessé, et le corps retourne toute cette agres-
sivité contre lui-même. »

Deux heures après, j’avais un rendez-vous chez ma psy, qui


m’a répété maintes et maintes fois que le pardon est nécessaire. En
tout temps. Que pardonner, ce n’est pas de faire une faveur à la per-
sonne concernée, mais bien de se soulager, nous. Pour ne pas entrer
dans un mode autodestructif.

Encore une fois, le seul pouvoir qu’on peut exercer, c’est celui
que j’ai sur ma propre vie. Sur la façon dont on réagira face aux intem-
péries qui surviennent. Une personne ou une situation peuvent nous
blesser profondément uniquement si on leur laisse la permission de
le faire. Nous n’avons aucun contrôle sur les faits et gestes des gens
qui nous entourent, mais on peut toujours changer la façon dont on
les percevra désormais.

188
C’est à ce moment de mon existence que j’ai commencé à mé-
diter. À réfléchir et à faire énormément d’introspection. À lire tout ce
qui pouvait me tomber sous la main à propos du lâcher-prise et de la
façon de se détacher émotionnellement du négatif qui peut arriver
sans crier gare.

En même temps, j’accompagnais un groupe de clientes?? en


privé pour les aider à faire cheminer leur entreprise tout en défaisant
parallèlement les liens qui m’empêchaient de déployer mes ailes vers
le bien-être. Nous avions eu une rencontre particulièrement émotive
et je voyais que l’une d’elles bloquait inconsciemment l’abondance et
le succès. En creusant un peu plus, la colère contre son ancien beau-
père est apparue dans la discussion. Elle l’accusait d’avoir toujours
cherché à la rabaisser psychologiquement, à lui dire qu’elle ne réussi-
rait jamais rien de bon et qu’elle serait toujours une moins que rien.

J’ai pris l’initiative de lui enseigner ce que j’étais en train d’ap-


prendre moi aussi à la dure : elle devrait non seulement pardonner à
cet homme qui lui avait fait du mal, mais elle devrait aussi le remer-
cier.

OUI. LE REMERCIER.

Parce que ses agissements avaient fait d’elle ce qu’elle est au-
jourd’hui et avaient forgé son caractère, sa détermination et sa volon-
té à se dépasser. Cet homme, sans le vouloir, faisait aussi partie de son
succès et de ses réussites.

Le mouvement #MerciRoberto a fait son apparition dans mon


groupe Facebook. Cette cliente a non seulement accepté de relever

189
le défi, mais en y publiant un texte dédié à cet homme, elle à inspiré
d’autres femmes à faire la même chose.

Nous avons toutes notre Roberto. Parfois, on en a même plu-


sieurs. Certains, même en passant en un coup de vent, ont eu le temps
de faire beaucoup de dommages. D’autres ont eu un rôle très signifi-
catif sur une longue période dans notre vie. Ils ont cependant tous un
point en commun : ils avaient leur raison d’être.

Soit pour vous apprendre quelque chose et vous enseigner une


leçon primordiale.

Soit pour vous aider à découvrir votre véritable nature.

Soit pour vous offrir de nouveaux outils qui vous serviront


toute votre vie.

Combien de personnes restent dans leurs frustrations pen-


dant des années parce que quelqu'un leur a fait du mal, en 1992, en
prononçant des mots de trop? Malheureusement, elles ressassent en-
core et encore la même histoire sans progression possible.

Combien développent des maladies, des douleurs chroniques


ou entretiennent un perpétuel état d’amertume parce qu’ils n’ont pas
encore réussi à se sortir de cet état qui devient un réel cercle vicieux
que nous seul pouvons changer?

La vraie réalité, c'est que ces gens au comportement jugé indé-


sirable, peu importe la gravité de leurs gestes, auront servi à quelque
chose : vous faire grandir.

190
Lorsque j’avais mes écoles de musique, j’ai longtemps choi-
si l'Association des familles de personnes assassinées ou disparues
comme cause afin de pouvoir leur remettre de l’argent à la suite de
nos spectacles de fin d’année.

Personne dans mon entourage immédiat n'a connu une situa-


tion comme celle-ci.

Je n’ai pas non plus été touchée personnellement par ce drame


inhumain.

La seule et unique raison de ce choix est un homme : Pierre-


Hugues Boisvenu.

Sa fille a été assassinée en 2002 par un récidiviste. Le pire


cauchemar pour un parent. Sa deuxième fille est décédée trois ans et
demi plus tard dans un accident d’auto.

Malgré tout, cet homme est toujours debout. Il a su transfor-


mer sa peine et sa rage pour créer une fondation destinée aux familles
qui ont vécu et qui vivront la même injustice que lui et ses proches.
Il s’est servi de ces affreux événements pour faire changer de nom-
breux projets de loi et utilisé les tribunes publiques pour en faire un
combat de tous les jours. Cet homme m’a émue plus d’une fois avec sa
mission et en vertu de l’amour qu’il a eu pour ses filles afin d’en faire
quelque chose de constructif, de beau et de grand malgré l’horreur de
ce drame.

Nous aurions été plusieurs - et nous en aurions eu parfaite-


ment le droit! - à nous apitoyer sur notre sort en maudissant notre
existence et ceux qui nous ont enlevé ce qu’il y a de plus précieux.

191
Nous aurions été sans doute beaucoup à abandonner et à faire de notre
existence un mélange toxique de ressentiments qui n’en finissent
plus. Nous aurions été nombreux à souhaiter, à notre tour, la mort de
cette personne qui nous a enlevé un être valant aussi cher à nos yeux.

Et pourtant…

J’ai été profondément émue et touchée lors de toutes nos ren-


contres. Je voyais l’immense tristesse existant encore dans les yeux
de ce grand homme qui avait en même temps choisi de faire quelque
chose de beau et constructif avec cette sordide histoire.

Ça paraîtra très cliché ce que vous lirai au cours des pro-


chaines lignes, mais tout comme un des plus grands succès des Beat-
les : Love is all you need.

L’amour est la solution. Même si ça n'a pas de sens. Même si


ce n’est jamais la première solution qui nous vient en tête lorsqu’on a
été profondément blessé.

En toute franchise, je crois que ça ne sert absolument à rien


d’entretenir la haine durant des semaines, des mois ou encore des
années. Ce n’est d’aucune utilité, sauf pour se rendre malade, que de
continuer à haïr quelqu’un et lui souhaiter à notre tour du mal. Parce
qu’au bout du comte, c’est nous qui continuons d’en souffrir.

On pense souvent à tort que pardonner signifie oublier, qu’on


doit passer rapidement l’éponge en acceptant l’inacceptable en ne res-
pectant pas nos principes fondamentaux.

192
Pardonner, c’est reconnaître qu’on a eu mal et qu’on a été pro-
fondément blessé.

C’est aussi pour aider à délivrer le passé, qui n’a pas à être
constamment revisité, puisque le « ici » et le « maintenant » doivent
toujours être au centre de nos priorités.

C’est aussi pour annuler les effets de l’autocritique, de la ran-


cune et de la culpabilité, qui finissent toujours par nous ronger de
l’intérieur.

C’est aussi pour aller vers la paix. La seule destination qui doit
compter dans notre vie. Celle que tout le monde souhaite atteindre
sans être vraiment prêt à y mettre les efforts nécessaires, parce que
nous sommes toujours trop dans notre ego ou notre orgueil.

Pardonner ne veut pas dire non plus minimiser ou diminuer


ce qui nous a fait mal. Parfois, la douleur est tellement vive qu’elle
nous fait ressentir ses effets jusqu’à l’intérieur de nos entrailles. Je
me rappelle avoir eu mal jusque dans les tripes lorsque j’ai appris
que j’étais cocue depuis très longtemps. Cette douleur était physique,
réelle. Elle était impossible à ignorer. J’essayais de m’en détourner, de
faire comme si elle ne m’atteignait pas véritablement alors que c’était
tout le contraire. Vous avez toutes votre passé. Vos déchirements.
Vos blessures. Tout ces choses ont déjà existé pour vrai, mais la seule
façon de les diminuer est de les affronter et d’en prendre conscience
sans déni pour ensuite les regarder droit dans les yeux.

Un jour, mon mentor m’a dit : « Be the bigger person, Mel. »

193
Au fond, on s’en contrefout de qui a tort et qui a raison. Qui
a bien ou mal agi. Qui est une bonne ou une mauvaise personne.
L’important, c'est d’être la plus grande peu importe la situation. De
prendre ce qui nous revient et de continuer notre chemin en n’es-
sayant pas de trouver constamment un coupable à ce qui se passe.
C’est aussi lorsqu’on entre dans ce mode de pensées qu’on réussit à
se sortir de sa position de victime. On regagne le contrôle de la situa-
tion et on reprend du même coup le pouvoir sur ce qui est essentiel
pour nous. Il y a toujours des gens qui vivent des drames pires que les
nôtres. Certains s’en sortent et d’autres s’écroulent. Tout est toujours
une question d'état d'esprit et de responsabilisation, peu importe la
situation.

On pense aussi souvent à tort que pardonner implique d'étouf-


fer complètement toutes nos émotions négatives. Qu’il faudrait répri-
mer à tout jamais sa colère, commencer à sourire, à tendre l’autre
joue comme si de rien n’était, à se mettre à distribuer de l’amour tel
un Calinours tout de suite après avoir eu mal, alors qu’exprimer sa
colère est souvent nécessaire pour arriver à pardonner. Il faut cepen-
dant avoir la capacité de la transformer et ne pas rester de façon per-
pétuelle dans ce comportement destructeur.

Tu veux crier parce que t’es cocue? O.K.!

Tu veux frapper dans un sac de boxe jusqu’à tomber de fatigue


parce que tu as été flouée financièrement? O.K.!

Tu veux renier toutes les personnes qui t’ont fait du mal en les
accusant de tous les malheurs de ta vie? O.K.!

194
Mais ça ne peut pas rester permanent. Ça ne peut pas rester
une vie entière comme ça. Ça ne peut pas être le chemin à emprunter
jusqu’à la fin de nos jours.

Parce que pendant ce temps-là, on passe à côté de l’essentiel :


la paix, le bonheur, la quiétude d’esprit, la liberté.

Puis le compteur continue de tourner. La vie passe. Les jour-


nées défilent. Nous avons toujours le choix.

Lorsqu’on est née pour briller, on comprend aussi qu’on ne


peut s’infliger autant de douleur. Consciemment ou non, nous n’avons
pas le droit de se faire souffrir autant ou de donner ce pouvoir à
quelqu’un. Il devient primordial de confronter ce qui nous a fait du
tort et de choisir l’amour, qui est l'une des plus grandes puissances
qui existent.

C’est ce qui peut soulever des montagnes.

C’est ce qui peut arrêter des conflits interminables.

C’est ce qui peut tout changer.

Pas la haine. Pas la violence. Pas la destruction.

L’amour.

Peut-être que vous êtes en train de lire tout ça et que vous


n’êtes pas d’accord du tout avec ce principe. Ou que vous avez vécu
des atrocités qu’on ne veut même pas imaginer et que vous sentez que

195
vous ne trouverez jamais la force de pouvoir faire le choix de l’amour.
Mes drames ne sont probablement rien à côté de ceux qui ont connu le
viol, la violence ou autres choses qu’on préfère volontairement igno-
rer, mais ce que je sais, c’est que je n’ai jamais autant progressé que
depuis la journée où j’ai choisi que je ne laisserais plus bouillir toute
cette rage à l’intérieur de moi pour essayer d’autres choses. Depuis le
jour où je me suis branchée à l’amour.

Je sais que ça sonne encore une fois très « Miss Univers » qui
souhaite la paix dans le monde. Je ne dis pas non plus que ça a été
toujours facile et que je ne bascule pas, parfois, du côté sombre de la
force en imaginant des plans de vengeance machiavélique. Par contre,
je sais maintenant que lorsque mon esprit cherche à aller dans cette
direction, c’est parce que la peur parle et essaie de prédominer. Ce
sont aussi nos anciens conditionnements ou mécanismes de défense
qui sont là, ancrés. Une façon pour notre ego de nous protéger.

La légèreté vient avec le choix de l’amour.

La tranquillité vient avec le choix de l’amour.

Écouter notre cœur vient aussi avec le choix de l’amour.

Ça peut paraître compliqué, voire impossible, mais je sais que


c’est la bonne voie. C’est du moins celle qui guérit. Celle qui reflète le
véritable pouvoir et la maîtrise de notre vie.

C’est aussi ce choix qui fera disparaître les différentes résis-


tances de votre vie et qui pourra vous amener l’abondance dans plu-
sieurs sphères en vous permettant de vous connecter au vrai. À l’es-
sentiel.

196
Peu importe qui vous a fait mal, qui vous a un jour heurtée.
Peu importe que vous considériez qu'on vous a éloignée ou privée du
bonheur. Peu importe la gravité de ces gestes, du temps et de l’énergie
que vous avez dépensés à le ou la détester. Peu importe qui a eu raison
ou qui a eu tort.

Il est toujours temps d’aller de l’avant, de ne plus nier ni se dé-


filer. Il est temps de pardonner. Pour nous. Pour notre bien-être. Pour
notre propre paix.

Chaque être humain mérite cette lumière et la seule façon de


faire disparaître la noirceur est de choisir l’amour.

Mon Roberto à moi m’aura permis d’accomplir tellement de


choses que je ne peux qu’être reconnaissante de tout le beau que j’ai
vécu par la suite. Ça ne veut pas dire que je lui donne entièrement rai-
son et que je ne me respecte pas en endossant chacun de ses gestes.
Ça veut juste dire que je choisis d’être libérée de tout ce négatif.

L’amour sera toujours la réponse. Vous vous attendiez à quoi,


de toute façon, d’une fille qui parle toujours de paillettes et qui vit
dans un univers parallèle avec du rose, des licornes et de la magie?

P.S. : C’est très dommage que, parmi les critères du concours


de Miss Univers, on ne puisse pas avoir d’enfants, car j’aurais très
certainement gagné en faisant ce discours vêtue d’un maillot de bain.

197
En résumé, « Merci Roberto », c’est :

– Pardonner à la personne qui nous a fait du mal pour éviter


d’être aspirée par une énergie négative et destructrice qui, au bout du
compte, nous fera mal à nous et non nécessairement à l’autre.

– Faire la paix sincèrement pour se tourner vers la légèreté et


la libération sans nécessairement cautionner tous les gestes de l’autre.

– Comprendre que ce n’est pas toujours tout noir ou tout blanc


et qu’à tout moment, en choisissant l’amour, on met notre concen-
tration et notre énergie sur le moment présent et l’espoir des jours à
venir.

– Se rappeler que l’amour est la seule réponse.

– C’est d’intégrer au quotidien 3 habitudes essentielles pour


accéder à la libération : Remercier, Pardonner et Aimer.

198
© Photo: Nathalie Godin
199
Quand tu choisis
de pardonner ceux
qui t’ ont fait du
mal, tu supprimes
le pouvoir qu ’ ils
ont sur toi.
- Auteur inconnu

200
Chapitre 11 

Je suis une mauvaise mère

Il n’y a aucune recette pour devenir une


mère parfaite, mais il y a mille et une façon
d’être une bonne mère
– Jill Churchill

« Je pense que la maman offre un milieu instable à ses enfants


dû à ses nombreux voyages. Elle enseigne une vision irréaliste de la
vie à ses enfants. Tout le monde sait que la '' vraie vie '', c’est le métro-
boulot-dodo et c’est surtout ce dont sa fille a besoin ».

Coup de poignard.

Mais solide.

Parce que ces mots sont sortis de la bouche d’une « profession-


nelle scolaire ». Or, comme on donne beaucoup de pouvoir aux gens de
l’éducation, ça a fait son chemin insidieusement dans ma tête. Encore.

201
Parce que si l'on veut me faire mal, c’est exactement là qu’on
doit aller toucher. Qu’on critique mon intelligence, ou ma non-
intelligence, c’est selon, mon physique, mon entreprise, je m’en fous
éperdument. Mon rôle de maman, c’est une tout autre chose.

J’ai fait un changement à 180 degrés de tout ce que je faisais


avant. Autant personnellement que sur le plan professionnel. Majo-
ritairement, mon entreprise est en ligne, ce qui fait que je travaille de
la maison, en mou, avec une toque sur la tête la plupart du temps. Je
suis là pour aller reconduire mes enfants le matin à l’école et présente
aussi pour le dîner presque chaque midi.

Mais j’ai aussi une carrière internationale qui m’amène beau-


coup en Europe, notamment. C’est la vie dont j’ai toujours secrète-
ment rêvé, celle de pouvoir parcourir le monde. Je le vis en ce mo-
ment. Je dois donc, si vous faites le calcul, quitter le pays. M’absenter
de la maison de six à huit fois par année pour aller rencontrer des
clients, des partenaires ou des collaborateurs, mais aussi pour faire
des conférences. Je suis privilégiée de faire ce que j’aime et surtout
dans une grande gratitude, parce que cette vie-là, je l’ai créée de A
à Z en évaluant les pour et les contre, en me demandant si le jeu en
valait la chandelle, en me défiant sur mes convictions profondes et
mes aspirations, et oui, en me demandant si c’était le bon choix pour
ma famille.

Or, la réponse, autant dans mon cœur que dans ma tête, a tou-
jours été « oui ». Parce que ce besoin d’accomplissement était viscéral.
Il ne disparaissait jamais malgré mes tentatives de le faire taire. On
ne nous enseigne pas, jamais, dans aucun livre que la maternité et
l’ambition peuvent se faire main dans la main. On préfère nous dire
que la «  petite vie tranquille  » est celle que l’on devrait privilégier

202
parce que, c’est bien connu, le métro-boulot-dodo, c’est ce qu'il y a de
mieux lorsqu’on veut avoir une famille.

Pendant des années, j’ai été une maman parfaite. Du moins,


de l’image qu’on peut s’en faire. Dès le moment où mon Victor a fait
son entrée dans cette vie en sortant de mon bas-ventre, cette sphère
de mon existence est devenue ma priorité numéro 1. À un point tel
que j’en ai sans aucun doute oublié tout le reste. J’ai été la maman
qui ne sortait jamais de chez elle de peur de manquer un fait impor-
tant du développement de son enfant. J’ai été celle qui suivait à la
règle le guide alimentaire canadien en cochant chaque collation sur
un tableau magnétique affiché sur le frigo pour m’assurer que mon
fils avait la bonne dose quotidienne de produits laitiers. J’ai été celle
qui a refusé tous les soupers entre amies et toutes les sorties de filles,
celle qui n’était jamais partie plus de vingt-quatre heures depuis la
naissance de mon premier bébé.

Avec l’arrivée des autres, ça ne s’est pas amélioré. Je limitais au


minimum mes journées de travail pour éviter que les enfants soient
à la garderie plus de trois jours par semaine. Je faisais de l’angoisse à
calculer les heures que j’étais absente de leur quotidien. Je suivais re-
ligieusement l’horaire pour m’assurer qu’ils puissent dormir toujours
à la même heure. En apparence, j’étais souvent très calme, mais je
ressentais toujours une immense pression de ne pas être à la hauteur.

Pourtant, je trouvais que c’était réellement facile, la mater-


nité. Ça allait de soi. J’étais épanouie, bien, heureuse d’être collée-col-
lée sur mes enfants pratiquement 24/24. Mes horaires et toute ma vie
tournaient constamment autour d’eux.

Puis, j’ai explosé. Sans que je puisse le voir venir.

203
J’ai réalisé à quel point j’étais devenue réellement JUSTE une
maman, que malgré la noblesse du titre, il y avait la femme qui ne se
souvenait plus de sa vie d’avant. Comme si elle n’avait jamais réelle-
ment existé. Mes rêves et mes aspirations ne faisaient plus partie de
mes plans et l’idée de prendre soin de moi, encore moins. Le moindre
écart, comme par exemple aller courir cinq kilomètres le soir alors
qu’ils étaient couchés, me faisait sentir coupable. Aller m’entraîner
était un supplice et je ne vous parle même pas de partir une petite
heure chez la coiffeuse. J’avais toujours le sentiment d’abandonner
mes petits, qu’il est normal pour une mère de s’oublier, de ne pas être
la priorité ni le centre d’intérêt. De ne presque plus avoir d’identité.

Mon ancien entourage me faisait aussi sentir comme une égo-


ïste finie si j’osais m’éloigner quelques heures loin de ma progéniture.

Parce qu’une bonne maman, c’est celle qui voit aux besoins de
tout le monde.

Une bonne maman est heureuse de faire la cuisine et le lavage


pour les gens qu’elle aime.

Une bonne maman sacrifie son temps, sa jeunesse, son éner-


gie et sa vie parce qu’elle a donné naissance.

On a une image encore très idéalisée de la maternité. Je ne


sais pas trop encore à ce jour qui nous met cette pression ou si, en tant
que femme, on arrive à se l’imposer nous-même, mais lorsqu’on parle
d’égalité, je pense qu’on a réellement beaucoup de chemin à parcourir
dans ce domaine.

204
J’ai toujours eu peur de troubler mes enfants. Je pense que cette
peur a réellement débuté quand un humain est sorti de mon vagin.
Chaque mot, action ou geste peuvent avoir un impact sur l’enfant qui
grandit avec nous. Comme j’ai eu une maman extrêmement présente,
qui a choisi volontairement de mettre une pause à sa carrière d’infir-
mière lorsque nous sommes nés, mes frères et moi, je pense que cette
idée a aussi fait son chemin pour s’ancrer dans mes croyances.

Mais je répète que malgré tout ça, l’explosion est arrivée. Soli-
dement.

J’ai soudainement eu une tout autre conception de la mater-


nité. J’ai tout d’abord pris conscience de mon ambition ou l'ai redé-
couverte. Celle qui ne m’a jamais non plus quittée. Tout comme mon
désir d’être maman. À quinze ans, il y avait deux choses que je dési-
rais plus que tout au monde :

– Être une vedette sur toutes les scènes du monde,


comme Céline Dion.

ET

– Être une mère.

Pas un OU l’autre. Un ET l’autre. À quinze ans, je ne me de-


mandais pas si cela avait du sens. Je ne savais pas encore que les deux
n’allaient supposément pas ensemble. Je ne pensais pas que la dou-
leur de devoir choisir entre les deux allait être aussi terrible.

205
Puis, une question est apparue de plus en plus souvent. Au-
tant dans mon discours intérieur qu’à haute voix : « Comment puis-je
avoir les deux? »

À l’époque, j’avais d’ailleurs écrit un texte à ce sujet pour le


blog de la « Parfaite maman cinglante » de mon amie Maude Michaud :

La Charte des droits et libertés de la mère ambitieuse

La maternité, c’est pas toujours le Club Med. Je suis souvent


confrontée à la culpabilité d’être une maman et une fille extrêmement
ambitieuse et carriériste pis aujourd’hui, j’ai le goût de t’encourager à
être toi-même et à t’aider à développer ta confiance en toi.

Parce que j’ai pas envie que tu éteignes la flamme profession-


nelle que tu as en toi sous prétexte que tu as enfanté des rejetons.

Parce que j’ai pas envie que tu deviennes une experte en linge
mou juste parce que tu penses que c’est ça, être une bonne mère.

Parce que j’ai surtout pas envie que tu oublies que tu peux
te réaliser professionnellement même si tu es derrière le volant d’un
minivan.

Toi, oui toi, la mère ambitieuse que tu es, je m’adresse à toi


directement. Pour que tu saches que tu n’es pas toute seule. Pour que
tu prennes conscience que, même si c’est souvent un tabou, tu es nor-
male d’aimer autant ta job. Que malgré le fait que tu aies engendré
des mini-humains, tu puisses t’épanouir autrement que par le fait de
changer des couches et de chanter des berceuses.

206
Tu sais quoi? Je te comprends tellement… C’est pourquoi j’ai
décidé d’écrire la Charte des droits et libertés des mères ambitieuses
et carriéristes.

Parce qu’on mérite d’être reconnues à notre juste valeur.

Parce qu’on a le droit de le crier haut et fort.

Parce que calvaire, on est en 2016 et qu’il est temps d’éliminer


les doubles normes qui existent encore (genre : c’est correct, un père
de famille ET ambitieux, mais une mère, pas tant).

Je déclare donc cette présente charte valide à partir d’au-


jourd’hui, that’s it!

Article 1 : En premier plan, parfois, tu pourras mettre ta job

Je sais ben que tout le monde te dit de toujours faire passer tes
enfants au sommet de tes priorités, mais tu as aussi le droit de parfois
déléguer tes tâches familiales à ton entourage pour faire avancer LE
dossier qui te fait tripper.

Article 2 : Envoyer chier les mères qui te jugent, tu pourras

Oui, t’sais les mères du cours de danse du jeudi soir qui te


regardent avec de gros yeux parce que tu arrives ENCORE en retard
pour venir reconduire ta princesse? T’sais ce qui te passe par la tête à
ce moment-là : « Hé, les girls, j’avais un meeting important et j’ai pas
une job plate à mourir qui me donne envie de sacrer mon camp à dix-
sept heures!» Ben, tu pourras leur dire… dans ta tête au moins.

207
Article 3 : Ne pas tant tripper à faire le dernier bricolage Pin-
terest, tu auras le droit

Parce qu’on va se le dire, faire du DIY, c’est pas toujours


comme le Club Med. Pendant que tu essaies avec tes mousses de faire
une Martha Stewart de toi-même avec une paire de ciseaux pis de la
paillette, je sais que tu penseras aux courriels que tu as à envoyer et
au dossier qui n’est pas terminé. Je ne suis pas en train de te dire de ne
pas terminer l’œuvre d’art entamée, mais dans le fin fond de ton cœur,
sans ressentir de culpabilité, TU AS LE DROIT D’HAÏR ÇA!

Article 4 : Que l’ambition rime avec la passion, tu assimileras

Arrête de voir ton ambition comme Satan en personne. Je sais


que c’est souvent mal perçu, mais quand tu comprends que les gens
ambitieux consacrent leur vie entière à leurs passions, ça t’aide à re-
mettre les choses en perspective. Tu as le droit d’avoir une existence
à la hauteur de tes attentes, mère ou non.

Article 5 : Ta maternité tu vivras comme seule TOI, tu choisiras

Être pognée entre ta cr*ss de culpabilité, ce que la société


attend de la mère parfaite et ce que ton entourage veut que tu sois
comme maman, au fond, sache que tu es la mieux placée pour être la
mère que tu as envie d’être. Comprends que si tu es aussi heureuse et
épanouie professionnellement, ce sont tes enfants qui profiteront de
ton bonheur personnel. Te voir conquérir le monde à ta façon devien-
dra aussi, pour eux, une source d’inspiration. En agissant ainsi, tu
leur donneras le goût de se réaliser pleinement.

208
Cet article avait été TELLEMENT mal reçu! J’avais eu plein de
beaux commentaires positifs, mais des dizaines de filles étaient offus-
quées, me disaient que je ne méritais pas d’être mère, que je n’avais
pas le droit de négliger ce que j’avais de plus précieux au monde : mes
enfants.

Comprenez-moi bien : ils sont tout ce que j’ai de plus impor-


tant au monde. Toutes mes actions et mes pensées, tous mes gestes
sont influencés en grande partie parce que j’ai leurs petits visages
souriants jamais bien loin dans ma tête. Si je suis encore plus déter-
minée que jamais à conquérir le monde, c’est aussi parce que je veux
leur enseigner que non seulement on peut, mais qu’on doit réaliser
nos rêves, et qu’ils puissent être fiers de leur mère.

Mais ça revient aussi à une chose très importante  : sois la


mère que tu as envie d’être.

Ça finit là.

Vous n’êtes pas nées pour être des mères. Vous êtes nées pour
briller. Avec ou sans enfants. En couple ou non. Entrepreneure ou sa-
lariée. Jeune ou vieille.

On passe notre vie à essayer de se définir, à comprendre les


cases dans lesquelles on se met volontairement alors qu’on n'a qu’une
seule chose à faire : briller.

Même en étant maman.

Je t’avertis, je saute au pronom « tu » à l’instant pour m’assurer


que tu comprennes que mes propos s’adressent à toi :

209
On a une idée très idéalisée de ce qu’elle devrait être. On nous
montre souvent quelque chose d’un peu inaccessible avec des critères
beaucoup trop élevés. Qui a callé la shot? Qui a dit qu’on devait être
toutes des mères pareilles, habillées pareilles, qui font toutes des af-
faires pareilles? Je pense que tu as compris ce que je voulais dire parce
qu’en plus, j’ai écrit trois fois le même mot dans la même phrase.

J’ai envie de te dire « Sois donc la mère que tu as envie d’être! »


Tu n’as pas à être comme ton amie qui court tous les tournois de hoc-
key parce qu’elle trippe sa vie, ou encore celle qui est impliquée dans
tous les comités d’école imaginables, ou celle qui ne déroge pas du
guide alimentaire canadien parce-que-tous-les-spécialistes-disent-
que-c’est-comme-ça-que-ça-devrait-être. Évidemment, si tu as envie
d’être tout ça à la fois, tu as le droit aussi; c’est ça, la beauté de la
chose! Ça se peut qu'être un parent bénévole pendant la danse du
vendredi soir, ça t’écœure, comme c’est dans les possibilités que tu
donnes ton nom non seulement pour une danse, mais que tu réserves
tous tes vendredis soirs pour TOUTES les danses scolaires de l’école
primaire de ton enfant.

On met des normes, des balises partout et je persiste à croire


qu’on peut sortir du cadre rigide que la société impose aux mamans.
Nous sommes les meilleures pour savoir ce qui peut être bon ou non
pour nos mini-paillettes. Je suis de celles qui prônent l’importance
d’ajouter un peu de folie et un peu de magie dans leur courte vie
d’enfants qui grandissent trop vite. Mes enfants ont vite appris le sar-
casme et l’ironie, surtout quand je dis à haute voix que mon p’tit der-
nier est mon pref, tout ça devant les autres, évidemment. Ils savent
depuis un petit moment que ça se peut que j’entre dans leur chambre
vingt minutes après les avoir bordés et que je danse en chantant juste
pour les faire rire. Ils ont aussi intégré rapidement que leur maman

210
met des robes de princesse parfois pour travailler (quelle mère digne
de ce nom fait ça?). Ils ont compris qu’il y a un cadre que nous nous
sommes fixé, mais qu’on peut parfois y déroger parce qu’on a besoin
d’ajouter un peu de paillettes dans notre routine.

Parce que oui, je fais aussi des #fucklaroutine avec mes en-
fants. Oui, on mange parfois de la crème glacée et des céréales « Lucky
Charms » pour souper. Oui, parfois on déroge de notre mercredi pour
ne pas faire les devoirs et écouter un film en famille à la place. Oui,
je leur dis que parfois, je doute du système scolaire actuel pour qu’ils
puissent aiguiser leur jugement critique et savoir ce qui est à prendre
ou à laisser afin qu’ils se forgent un cheminement qui leur ressemble.

Non, ce n’est pas vrai que ce qu’on leur enseigne est toujours
bon. Autant à l’école que dans nos maisons. Tout est effectivement
une question de choix. Ce n’est pas parce que la maman d’à côté ne
travaille pas et fait des tartes toute la journée qu’elle est une meil-
leure mère que moi. L’inverse est tout aussi vrai. C’est peut-être moi
qui suis dans le champ complètement.

Chaque humain est différent mais on se met tous de la pres-


sion pour ne pas trop sortir de l’ordinaire comme si c’était un crime.
Beaucoup ont critiqué Céline Dion d’avoir laissé les cheveux de René-
Charles trop longs et de lui avoir fait connaître un mode de vie plutôt
nocturne lors de ses shows à Vegas.

MAIS DE QUOI ON SE MÊLE, METTONS? Si Céline avait raison


de faire découvrir un mode de vie tout sauf conventionnel à son fils
et qu’elle lui apprenait l’estime de soi en lui laissant les cheveux aux
fesses?

211
On jase, là.

Ou encore on critique Véronique Cloutier, une populaire ani-


matrice québécoise, parce qu'elle emmène ses enfants en tournée, car
supposément que ça peut avoir des répercussions sur leur capacité à
s’adapter et le cheminement scolaire. Ou on l’accuse de ne pas vouloir
montrer ses enfants dans les médias sociaux parce que, comme elle
est une personnalité publique, les gens ont le droit de les voir, pour
finalement lui dire, lorsqu’elle décide de le faire, qu’elle les expose à
de grands dangers et que ce n’est pas une vie normale pour eux.

Je répète ma question  : «  QUI A CALLÉ LA SHOT DE CE QUI


DEVRAIT ÊTRE NORMAL? ». Et si Céline et Véro avaient raison?

Ton enfant est heureux?

Ton enfant fonctionne en société?

Ton enfant comprend les règles lorsqu’on demande un cadre


et peut y revenir rapidement si on le lui demande?

Ben bravo, fille! Tu fais une bonne job. Ne cherche pas plus loin.

Imagine maintenant que tu es la maman d’un enfant «  dif-


férent ». J’en ai côtoyé beaucoup pendant ma carrière d’enseignante.
J’étais souvent remplaçante dans les classes d’enfants dysphasiques.
Ils étaient tous ensemble pour que les intervenants puissent être
dédiés complètement à eux, pour que leur cheminement soit le plus
personnalisé possible et pour qu’ils puissent aussi vivre des réussites.

212
Très tôt dans le développement de mon bébé Georges, je me
suis rendu compte que quelque chose clochait. Il ne parlait pas et ses
interactions sociales étaient plus difficiles.

Dysphasie.

En l’écrivant, j’en ai encore des frissons. Comme si la vie avait


voulu me donner un petit avant-goût en me faisant intervenir dans
des classes avec des élèves qui avaient ce retard de langage alors que
mon fils n’était même pas encore un projet.

Or, tu ne le décides pas, tu ne le prévois pas. Tu fais avec. Parce


que ça devient ta normalité. C’est aussi à ce moment que tu te ques-
tionnes véritablement sur «  Qu’est-ce qui est vraiment normal, au
fond? » Le regard qu’on porte sur la différence est en fait une peur de
l’inconnu. Pourtant, l’unicité est la plus grande des richesses.

Donc, même si ton enfant ne fonctionne supposément pas en


société ou ne respecte pas le cadre selon les normes de la majorité de
ceux qui règnent, dits les « normaux », tu fais toi aussi une bonne job
pareil.

Love is all you need. Comme pour le #MerciRoberto. Même


combat.

Parfois, il m'arrive de connaître, tout comme vous, des jour-


nées pénibles. Le genre de moment où ma maison est chaotique, ma
vaisselle d’il y a deux jours passés traîne encore dans l'évier et je ne
vous parle même pas de la salle de bain.

213
Ça se peut même que je crie de façon exagérée trois fois après
les enfants pour leur dire de ranger leurs souliers et que je coure
jusqu’à la première réunion de parents pour l’entrée à la maternelle
de mon plus jeune tout en angoissant sur le fait que je ne serais ja-
mais capable de travailler cette semaine avec la rentrée de tous mes
enfants.

Ça se peut aussi j’aie donné une tartine de beurre d'arachide


accompagnée de bananes et de fraises à tout le monde pour dîner, que
j’aie oublié de me raser les jambes et que j’aie éprouvé de la culpabilité
de ne pas avoir couru le cinq kilomètres que je voulais faire.

Tout ça arrive. Tout le temps. Parce qu’être une maman, c’est


gratifiant, beau, grand et magnifique, mais des fois, c’est pas si simple.
En fait, je pèse en ce moment mes mots : C’EST FUCKING TOUGH, PAR
BOUTTES!

Être une bonne maman, c’est d’abord et avant tout être plus
douce avec nous et ça commence en acceptant nos bons comme nos
moins bons moments parce qu’ils sont sains… et nécessaires. Ce n’est
certainement pas en pliant les bas de façon parfaite que nos enfants
seront plus heureux. Ce n’est pas non plus en ayant des planchers si
propres qu’on ne peut même pas marcher dessus qu’on atteindra cet
équilibre et ce bonheur familial. C’est en ayant une structure et une
routine, oui, mais qui conviennent à nos valeurs et aux besoins de
chaque enfant.

C’est écouter notre petite voix. Celle qui sait ce qu’on souhaite.
Celle qui sait quoi faire pour qu’on puisse avoir les yeux brillants.

214
Cette personne du monde de l’éducation, comme bien des
gens du système « conventionnel », a essayé de me convaincre qu'elle
avait raison. Je sais que vous aussi, parfois, vous vous laissez prendre
au jeu. Chaque fois que je fais une publication dans mes médias so-
ciaux sur cette pression épouvantable ou sur cette culpabilité de vou-
loir être autre chose que juste une maman, vous êtes plus que nom-
breuses à réagir. Je sais à quel point ça vient vous chercher jusque
dans les tripes parce que je pense que c’est juste impossible d’être
inébranlable dans nos convictions et dans notre façon d’être mère. Il y
a trop d’impondérables, de facteurs de risque, de gestion de stress qui
entrent en ligne de compte. Il y a notre volonté de rendre nos enfants
heureux, mais il y a aussi une émotivité difficile à bien décrire qui
est impliquée dans le processus. On peut donc être confiante sur bien
des tableaux, mais celui qui sera toujours un peu chambranlant, c’est
sans aucun doute celui de la maternité.

Les temps ont changé. On s’est adaptés à plusieurs situa-


tions. On a évolué. Notre façon d’être et de penser aussi. La place de
la femme a changé. Beaucoup. Mais il y a tellement de chemin à faire
encore parce que le double discours et l’inégalité existent encore.

Un papa qui part toute la semaine pour travailler et nourrir sa


famille, c’est O.K.

Imaginez une maman qui le fait.

Un papa dirigeant d’entreprise qui passe de nombreuses


heures à faire rouler celle-ci, c’est noble.

Imaginez une maman qui le fait.

215
Un papa qui sacrifie des heures précieuses à obtenir une pro-
motion, à vouloir être élu dans un poste gouvernemental ou à occuper
des fonctions importantes, on salue son audace, son courage.

Imaginez une maman qui le fait… Voici la question qui ac-


compagnera cette démarche : « Mais qui s’occupe de tes enfants pen-
dant ce temps-là? »

Puis il y a la réflexion qui revient aussi trop facilement à se


dire : « Mais lorsqu’on est sur notre lit de mort, est-ce qu’on regrette
d’avoir passé trop de temps à développer sa vie professionnelle plutôt
que d’avoir passé des moments précieux avec les siens? »

C’est pourquoi je vous ramène à ma question de départ  :


« Comment puis-je avoir les deux? »

Chaque fois que je fais mes valises pour me rendre en Europe


et que j'en suis si fière parce que j’ai réussi à faire une percée sur le
Vieux Continent, je me demande en même temps : « Comment puis-je
avoir les deux? »

Chaque fois que j’accepte des demandes de conférences un


peu partout au Québec, je me demande en même temps : « Comment
puis-je avoir les deux? »

Chaque fois que j’ai la possibilité, en rencontrant de nouveaux


partenaires, de faire grandir Paillettes INC., je me demande : « Com-
ment puis-je avoir les deux ? »

Je me rappelle alors que je suis présente pour aller reconduire


mes enfants chaque matin. J'y suis aussi presque chaque midi et à

216
leur retour de l’école pour leur faire un sandwich au beurre d'arachide
et à la confiture. De même, je passe pratiquement tout l’été avec eux
et j’ai le luxe de ne jamais travailler le soir pour pouvoir les border et
leur raconter une histoire.

Je me rappelle aussi que je n’ai pas le droit, particulièrement


pour ma fille, de leur montrer qu’on doit s’éteindre tranquillement
lorsqu’on devient parent. Je leur dis qu’une maman heureuse fait des
enfants heureux et que pour moi, le bonheur passe aussi par la réali-
sation de rêves.

Je me rappelle aussi que je peux déléguer, demander de l’aide


à mes proches, accepter que parfois, je suis maman à 100 % et qu’en
d’autres moments, c’est l’entrepreneure qui prend le dessus.

La vie, c’est fait pour être vécu. À fond, et je tiens MORDICUS


que mes rejetons le comprennent. Rapidement et le plus tôt possible.

Ne laissez pas la projection des peurs des autres vous empoi-


sonner l’esprit. Aujourd'hui, il m’apparaît évident que cette réflexion
stupide et absurde (je devrais dire intéressante) de la personne
œuvrant en éducation était sans aucun doute teintée de jalousie.
Elle aurait probablement voulu, elle aussi, le temps d’un après-midi,
sortir du travail qu’elle exerce depuis trop longtemps pour parcourir
le monde autre que le petit village qu’elle a vu trop souvent. On ne
peut rien faire contre les croyances des autres, si ce n’est poursuivre
notre chemin avec de la gratitude pour ce qu’on vit et d’accepter qu’on
puisse nous aussi se tromper, n'ayant pas la science infuse, et qu’on a
le droit à l’erreur tant qu’on en assume chaque morceau.

217
Une maman qui s’accomplit dérangera toujours. J’ose espé-
rer que lorsque ma belle Emma-Rose sera grande, nous aurons réussi
ensemble à changer les choses. À modifier les perceptions et les men-
talités pour laisser place à l’ouverture d’esprit, la vraie.

Vous n’êtes pas de mauvaises mamans. Sauf si vous oubliez


LA personne la plus importante de votre vie : VOUS. Ce ne sera jamais
égoïste d’être dans cet état d’esprit. C’est bel et bien altruiste. Totale-
ment.

Vivre et laisser vivre… sans jugement. C’est aussi ça, mettre


de la paillette partout où l'on passe.

De mon côté, évidemment que je suis loin d’être parfaite. Je


manque parfois d’un peu de cohésion dans ma façon d’être mère,
mais je suis fière de voir que mes enfants ne font aucune différence
quand mes amis gays viennent à la maison, qu’ils sont tout de suite
attirés vers les gens qui sont « hors norme », qu’ils éprouvent beau-
coup d’empathie envers les gens qui sont bizarrement rejetés. Sur-
tout, mes enfants savent qu’il est primordial d’ajouter de la paillette
partout dans leur vie.

Le plus merveilleux là-dedans, c’est qu’ils comprendront rapi-


dement, eux aussi, qu’ils ont le droit d’être qui ils ont envie d’être.
Ils auront une perception incroyable sur la différence. Ils n’essaieront
pas de plaire à tout prix en allant même jusqu’à se transformer pour
être acceptés et ils se respecteront. Toujours.

Salut! Je m’appelle Mélissa Normandin Roberge. Je suis une


maman ET une entrepreneure. J’ai décidé que cette vie ne serait pas

218
plate et que plus personne ne pourrait me convaincre que je ne vaux
pas grand-chose.

Mes enfants soupent parfois à la crème glacée et d’autres


jours, ils font une overdose de légumes verts.

J’ai aussi décidé que le négatif ne ferait plus partie de notre


vie, ce qui explique mon impertinence parce que ça me fait rire.

Donc, ton jugement ou ta façon d’essayer de me détruire, MEN


KALYSSE!

Pis je bois du champagne.

Pis des fois, je sacre.

Je suis une mauvaise mère.

(Je te le dis ici, comme ça tu n’auras pas besoin d’essayer de


trouver des preuves ou de tirer des conclusions qui n'ont pas de sens
juste parce que ça te réconforte avec l’idée que ton existence vaut plus
que la mienne. Je viens de te sauver beaucoup de travail. De rien. Ça
me fait plaisir!)

219
En résumé, être une mauvaise mère, c’est :

– Être la mère que tu as envie d'être. Suivre ton cœur, ton ins-
tinct et redéfinir ta normalité. Être celle qui aura toujours du sens
pour toi et tes enfants au quotidien. Tu es celle qui sait pertinemment
ce qui est le meilleur pour ta famille.

– Continuer de progresser, de cheminer, de t’accomplir, de


t’épanouir et de rêver grand en remettant LA personne la plus impor-
tante au centre de tes priorités : TOI

– Ne pas perdre de vue qui tu es, ce que tu aimes, ce à quoi tu


aspires, ce qui a du sens au moment où tu expulses un humain d'entre
tes jambes. Ce point vaut aussi si jamais on l’expulse par césarienne
ou encore en adoptant. Lorsque tu as un enfant qui t’appelle «  ma-
man », tout ça doit être prioritaire au même titre que les changements
de couches. L’un ne va pas sans l’autre.

– Revenir au #menkalysse. Très important!

– Vivre et laisser vivre : All you need is love!

220
© Photo : Maryline Tremblay
221
Je suis une mauvaise
mère : Une maman
heureuse et épanouie
fera des enfants
heureux.

222
Chapitre 12 

Girl Power

Le jour où les femmes comprendront


qu’elles ont, et qu’elles ont toujours eu le
pouvoir, ce sera un grand jour.

Elle me gosse solide depuis des semaines. Je ne la connais pas,


mais je regarde ses stories sur Instagram et elle me tape royalement
sur les nerfs avec son énergie et sa non-pertinence. En plus, elle a
plein d’abonnés… Genre des milliers. On dirait que parfois, elle me
nargue avec son sourire de fille qui a l’air de bien gérer le chaos de
ses quatre enfants et sa minuscule taille, sur laquelle semblent, EN
PLUS, greffés des abdos bien définis. Je ne comprends pas du tout ce
qu’elle fait, d’où elle sort, pourquoi elle a du succès, pourquoi les gens
adhèrent à ses affaires.

ELLE A ÉCRIT UN LIVRE.

C’est un peu le comble. Voyons, elle en a écrit un et pas moi!


Voyons, elle pose fièrement devant les tablettes bien remplies d’un

223
Wal-Mart de la rive-sud de Montréal dans le 450 avec des centaines
d'exemplaires de SON livre! Voyons!

Ça pourrait continuer comme ça sur plusieurs paragraphes, et


je n’invente ou n’exagère rien… C’était tout ça qui se bousculait dans
mon discours intérieur de fille jalouse.

OUI. JALOUSE.

Cette fille qui m’a fatiguée au plus haut point pendant trois
ou quatre mois consécutifs, c’est la populaire blogueuse québécoise
Maman Caféine.

OUI. MAMAN CAFÉINE.

Celle qui est devenue une cliente. Une partenaire d’affaires, et


maintenant une amie. Que j’aime profondément.

Parce qu’un jour, je me suis analysée et même si je ne voulais


pas me l’avouer sur le coup, je savais que cette mesquine petite voix
était celle de la fille qui, parfois, doute d’elle et se compare avec la ja-
lousie dans le tapis. Lorsqu’une autre fille ou une autre personne vient
nous chercher sans que l’on comprenne rationnellement pourquoi, il
n’y a pas mille et une raisons : NOUS SOMMES JALOUSES.

Jalouses comme de vieilles matantes qui regardent des jeunes


filles dans la vingtaine déambuler dans la rue avec leur chandail be-
daine en proclamant haut et fort que ça n’a pas d’allure de se dénuder
comme ça.

224
Jalouses comme une vieille frustrée au bureau qui commence
à répandre la rumeur que la petite nouvelle qui vient d’avoir une pro-
motion a, sans aucun doute, couché avec le boss de la boîte, au lieu
d'admettre qu’elle a toutes les compétences et les connaissances re-
quises.

Jalouses comme une vieille aigrie qui dit de la fille sur Insta-
gram : « Pfffffffffffff!, elle n’est pas si belle que ça! Elle est trop maquil-
lée! », alors que tout ce qu’elle souhaiterait, c’est pouvoir lui ressem-
bler le temps d’une soirée.

Ben, mon sentiment initial envers Maman Caféine était exac-


tement celui-là. Puis un jour, j’ai décidé que c’était assez, que je devais
guérir cette blessure pour grandir et que je ne pouvais pas donner
tout ce pouvoir à mon manque de confiance en moi qui, parfois, réap-
paraissait sans m’avertir. Je devais agir.

Je me suis donc mise à l’observer en changeant mon état d’es-


prit. En me focalisant sur ce que j’aimais d’elle au lieu de lever les yeux
en l’air aussitôt que je la voyais apparaître sur mon fil d’actualité. En
lisant ses publications et en me surprenant à sourire. En ne me com-
parant pas à elle mais plutôt en notant ses bons coups. En voyant, au
fil du temps, qu’elle me ressemblait étrangement dans sa façon d’être
et d’agir. En la trouvant drôle dans son impertinence et en constatant
que le problème, c’était loin d’être elle, mais bel et bien moi!

J’ai été témoin de plusieurs commentaires haineux qu’elle a


reçus à la suite d'une publication d’elle en maillot de bain. Ça m’a pris
au cœur. J’ai compris qu’elle vivait sans doute bien souvent ma réalité
avec les « haters ». Rapidement, j’ai demandé aux filles de mon groupe

225
Facebook d’aller lui donner de l’amour sur cette même publication
pour renverser le négatif qu’elle venait d’encaisser.

Sans la connaître. Sans même lui avoir parlé.

On a connecté.

C’est là que j’ai su son histoire. Qu’elle avait déjà fait une dé-
pression. Que son grand-père l'avait agressée sexuellement. Que sa
vie n’était pas toujours rose, mais qu’elle décidait de tout faire pour
la rendre belle, entre autres en étant une maman épanouie de quatre
belles tornades.

Elle est devenue une amie. Précieuse.

Voyez-vous tout ce que j’aurais perdu si je n’avais pas pris le


temps de guérir cette jalousie à l’intérieur de moi? Combien de fois on
juge des filles autour de nous uniquement parce qu’on ne se sent pas
à la hauteur et qu’il est beaucoup plus facile d’être une bitch avec elles
parce que ça nous réconforte avec notre sentiment d’infériorité.

Quand j’avais quatorze ans, je faisais partie d’un groupe de


chanteuses fondé avec mes meilleures amies : OUTBREAK.

Malgré ce nom qui sonne badass on reprenait tous les succès


des Spice Girls.

TOUS SANS EXCEPTION

226
J’étais sans contredit le public cible du populaire girlband bri-
tannique et son mantra Girl Power est devenu mon hymne d’adoles-
cence. Si Maminette ne m’avait pas menacée de me priver de sorties,
j’aurais probablement encore aujourd’hui le tatouage du même nom
dans le bas de mon dos. (Voyez-vous tout le contrôle qu’elle avait sur
l’adolescente que j’étais? Triste.)

Il y avait quelque chose d’extrêmement puissant dans ce dis-


cours féministe alors que ce n’était pas du tout à la mode à l’époque.
À travers leurs chansons, et une excellente équipe marketing, on va
se le dire, l’amitié entre filles, se propulser une et l’autre, revendiquer
sa féminité et sa libération sexuelle se retrouvaient dans toutes leurs
paroles. Elles ont vraiment ouvert les portes de l’industrie musicale
et du show business aux femmes. On leur doit en quelque sorte aussi
les Britney Spears, Shakira, Beyoncé, Taylor Swift de ce monde qui
ont emboîté le pas de femmes fortes par la suite, délaissant l’image de
la petite fille fragile à la guitare et au mince filet de voix qu’on voyait
trop souvent.

Je les écoutais en boucle et répétais chaque pas de danse.


J'étais littéralement une Spice Girl dans ma tête. Une vraie de vraie.

J’ai déchanté rapidement en découvrant le «  vrai monde  »,


d’abord à l’école secondaire, où ce n’était pas rare qu’on se moquait
des autres filles moins IN ou de celles qui sortaient du lot (d’ailleurs,
en étant habillée en vraie Spice Girl, je faisais souvent partie de celles
qu’on pointait du doigt). Par la suite, j’ai fait ce dur constat dans mes
emplois étudiants. Aussitôt qu’une collègue était partie, les autres se
mettaient à raconter n’importe quoi en amplifiant la réalité.

227
Dans le domaine de l’éducation, où j’ai travaillé pendant cinq
ans en côtoyant majoritairement des femmes, j’ai été témoin de coups
bas, de rumeurs et d’intimidation. Certaines suppléantes n’étaient ja-
mais rappelées parce que les professeurs de cinquième année avaient
décidé en caucus qu’elles ne les aimaient pas. Sans vraiment de raison
apparente. On disait donc à la secrétaire d’école qui était en charge de
trouver des remplaçantes : « Elle, on ne veut plus la voir! »

Je ne suis pas non plus un ange; quelquefois, je me suis laissée


entraîner dans ce tourbillon et j’en ai même parfois été l’instigatrice.

Pourquoi?

Parce qu’entre femmes, on se sent rapidement menacées par


la nouvelle. Par la belle qui vient d’arriver. La grande fashionista. Celle
qui ose être elle-même. Celle à qui tout réussit. Ou juste par celle qui
est là à côté de nous, qui respire et qui n’a rien demandé.

Or, c’est socialement accepté. Normalisé. C’est même tout à


fait habituel, les petites chicanes de cour d’école entre fillettes de neuf
ans qui en mettent une de côté une semaine et l’autre la semaine
suivante.

Ce sont des filles.

C’est normal pour des filles.

C’est comme ça que ça se passe chez les filles.

228
On entend souvent que c’est impossible pour des femmes de
ne pas s'engager dans une compétition. C’est beaucoup plus qu’un
simple mythe; c’est réellement une croyance bien ancrée dans notre
société. Les commérages, les critiques sur l’apparence physique et/
ou le jugement facile sont souvent de graves problèmes pour la ges-
tion des ressources humaines dans les entreprises. Depuis la nuit des
temps, nous sommes conditionnées à cette idéologie. On se partage
l’attention du roi ou du personnage historique important. On est sa
femme, l’une de ses nombreuses concubines ou la nouvelle à la cour
royale (je suis vraiment rendue dans les faits historiques. C’est mon
livre, j’ai le droit!).

Je reviens à mon point de début de chapitre : tout ça part du


fait que nous n’avons pas d’estime de soi lorsqu'on ressent de la jalou-
sie. On ne reconnaît pas notre propre valeur et on tombe en énergie de
manque en se laissant aller dans le piège de la comparaison.

Cette peur de l’autre, de se faire remplacer par cette fille, de ne


jamais pouvoir être comme elle et de désirer ce qu’elle a vient princi-
palement du fait que nous avons la croyance profonde qu’on ne sera
jamais à la hauteur.

Dans un livre d’une de mes auteures préférées, Gabrielle


Bernstein, j’ai lu la phrase suivante : « Le processus de guérison dé-
bute quand vous vous aimez tellement que les ténèbres du passé ne
peuvent plus coexister avec votre foi dans la lumière du moment pré-
sent ».

Cette petite phrase me suit partout spécialement quand je


tombe dans mes incertitudes. Comme à ce moment précis de ma saga
imaginaire qui n’existait que dans ma tête, avec Maman Caféine. Il y

229
avait une petite partie de moi que je pensais guérie, mais qui, pour-
tant, me criait que c’était loin d’être complètement réglé. Que non,
je ne m’aimais pas encore suffisamment pour pouvoir être toujours
dans ma lumière, celle que je souhaite incarner.

Avec ce projet de Paillette et ma compagnie, ce fut rapidement


une de mes missions premières : que les femmes puissent se soutenir
entre elles. Malgré mes airs de vraie fille avec mes robes de princesse,
j’ai toujours été un peu « One of the boys ». Je les ai souvent admirés
secrètement parce que tout semble toujours si simple entre eux. On
dirait qu’ils n’ont pas le temps pour bavasser et jacasser à propos de
l'un et de l’autre. Je me suis toujours sentie très bien parmi eux et je
pense que c’est un peu pour cette raison. Je n’arrivais pas nécessaire-
ment à retrouver ça chez les femmes.

Je me suis mise à rêver d’un monde parallèle où les femmes


seraient gentilles entre elles. Si l’une faisait quelque chose qui déplai-
sait à l’autre, celle-ci aurait assez de courage pour lui en parler d’abord
et avant tout au lieu d’aller faire sa victime auprès de toutes ses autres
copines en disant qu’une telle lui avait fait beaucoup de mal.

Je me suis mise à imaginer un univers où non seulement les


femmes se respecteraient, mais elles souhaiteraient réellement et
profondément la réussite des autres. Où elles n’auraient pas peur d’ap-
plaudir l’intelligence de celles qu’elles côtoient. Où elles pourraient
dire qu’elles se trouvent belles et où elles pourraient reconnaître que
oui, parfois, une est plus jolie ou obtient plus de succès, mais que cela
ne leur enlève rien. Au contraire, elles pourraient s’en inspirer.

Quand j’ai créé mon groupe Facebook «  Faites briller votre


potentiel », ce fut l’un des premiers règlements : en aucun temps le

230
« bitchage » ne sera toléré. Si tu n’es pas d’accord avec un point, il est
possible de le dire avec respect, bienveillance et en mettant son ego
de côté. Encore aujourd’hui, ce groupe est l'une de mes plus grandes
fiertés parce que c’est réellement ce qui est arrivé. J’ai pu voir au fil
des semaines et des mois que la mentalité entre femmes prenait un
nouveau tournant, que les femmes prenaient un réel plaisir à se com-
plimenter, à s’encourager et à se motiver. On m’a souvent dit qu’on
ne retrouvait nulle part ailleurs cette impression de sororité hors du
commun. Très fréquemment, j’ai pris pour habitude de présenter une
fille parmi mes abonnées Instagram et lui dire que je la trouve belle
tout en demandant à celles? qui me suivent de faire la même chose
de leur côté.

Pas parce que je veux vous prouver que je suis gentille, mais
bien pour que les mentalités changent, et nous devons incarner ce
changement. Parce que, comme les Spice Girls, on a vraiment quelque
chose de très important comme as dans notre jeu  : le Girl Power.
Comme une espèce de force tranquille qui peut assurément nous
aider à soulever des montagnes.

C’était quand la dernière fois que vous avez complimenté sin-


cèrement une pure inconnue ou une vague connaissance?

À quand remonte vos dernières «  sincères félicitations  » à


l'endroit d'une femme qui venait d’accomplir quelque chose de beau?

Quel est le récent examen de conscience que vous avez fait


lorsque vous avez senti votre estomac se serrer en regardant une fille
qui a quelque chose que vous n’avez pas nécessairement?

231
J’organise toujours, dans le cadre de mes formations, un grand
bal. Un vrai de vrai. Avec des robes de princesses, des couronnes. La
totale.

Parce qu’à la base, ça me faisait rire d’imaginer des centaines


de femmes arriver avec ces magnifiques tenues qu’elles n’avaient
sans doute pas enfilées depuis la fin de leur secondaire. Par la suite,
je m’apercevais que c’est un réel besoin un peu enfoui sous une tonne
d’orgueil. Il y a quelque chose de magique avec la robe de princesse.
Elle nous réconcilie automatiquement avec notre petite fille intérieure.
Elle nous permet de laisser tomber quelques barrières psychologiques
latentes et le temps d’une soirée, nous transporter dans un conte de
fées. Je vous le conseille au moins une fois dans une vie.

Le premier événement de princesses m’a cependant permis


de voir que mon utopie était devenue réalité : les femmes entre elles
avaient envie d’être gentilles.

Elles, qui habituellement se regardent de la tête aux pieds en


analysant le moindre des détails des vêtements portés par ses pairs et
en se moquant peut-être subtilement du « pas assez » ou du « trop » de
ladite tenue vestimentaire, se complimentaient rapidement en s’exta-
siant sur la beauté de la princesse qui se tenait fièrement à proximité.

Tout au long de ces soirées, j’ai le grand bonheur d’entendre


des phrases telles que : « Que tu es belle! Ta robe est magnifique! Tu
es rayonnante! J’adore tes cheveux! Tu es parfaite! »

Même si elles ne sont pas amies. Souvent, elles ne se


connaissent même pas. Il n’y a pas de jalousie. Pas d’envie. Pas de
comparaison. Elles ne doutent pas non plus de leur propre valeur et

232
ne sont pas en énergie de manque. La robe de l’une, malgré toute sa
splendeur, n’enlève pas la beauté de l’autre. Un peu comme de la ma-
gie, au fond.

Certaines femmes de mon groupe ne vivent que parce que


d’autres ont choisi de les encourager. Le réseau qu’elles ont réussi à
construire est constitué uniquement de Paillettes qui prennent toutes
un malin plaisir à se voir réussir les unes les autres. On parle de plus
en plus du bonheur de faire de l’argent, on démystifie la réussite. On
se pousse à réaliser nos rêves les plus fous. On comprend la réalité
de chacune, qui est similaire tout en étant parfois différente de notre
quotidien. On a compris le vrai concept de Paillette  : une, c’est très
beau, mais plusieurs ensemble, c’est IMPOSSIBLE à ignorer.

Surtout, on garde en tête que ce sentiment désagréable de ja-


lousie ne vient pas d’un élément extérieur mais de nous. De notre in-
capacité à s’aimer inconditionnellement. Une fille qui brille n’empêche
pas l’autre de le faire. Jamais. On doit s’en inspirer. En tout temps.

Avec les Paillettes, moi y compris, j’ai eu le sentiment de ne plus


être seule à vouloir plus, à questionner ce qui se faisait mais surtout,
j’ai toujours senti que j’étais appuyée. « No matter what », avec une im-
mense armée prête à souffler du brillant sur cette planète qui a bien be-
soin de voir les choses autrement. Plus ma communauté a grandi, plus
j’ai pu voir de parfaites inconnues bâtir de réelles relations d’amitié. Des
femmes qui écrivent rapidement en message privé quand l’une d’elles
traverse un dur moment. Sans jugement. Juste avec beaucoup d’amour.
J’ai vu des femmes se soulever pour s’indigner sur ce qui leur ap-
paraissait comme injuste avec une énergie hors du commun, mais
surtout dépourvues de toute haine. Comme si elles étaient toujours

233
prêtes à aider, à fêter, à célébrer et à encourager. Comme une grande
famille qui s’était choisie.

J’ai vu un mouvement prendre confiance et en insuffler à cha-


cune des belles paillettes qui le constitue.

J’ai surtout constaté qu’elles étaient sincèrement heureuses de


voir la réussite des autres. Même si souvent, elles étaient en compéti-
tion. Ça, c’est extrêmement rare. Elles se réjouissent et continuent de
le faire lorsqu’une réalise son rêve. Le meilleur exemple qui me vient
en tête est ma belle Nathalie Godin. Un jour, j’ai eu l’idée d’emmener
une de mes clientes à Venise en voyage d’affaires pour que je puisse
en même temps créer du contenu photo. Comme il m'était impossible
de choisir parmi toutes les excellentes créatrices d’images dans mon
groupe, j’ai demandé à une amie de le faire à ma place. Lorsque Na-
thalie a été sélectionnée, les premiers commentaires qu’elle a reçus
provenaient des autres photographes du groupe. Bien sûr, qu’elles
l’enviaient. Qui ne l’aurait pas fait? Sauf que c’était sain, beau, sincère.

Elles ont aussi été les premières à noter la qualité de son tra-
vail lorsque les photos sont apparues sur les médias sociaux. Les pre-
mières à lui dire que son talent était exceptionnel. Les premières à lui
donner énormément d’amour.

Elles auraient pu être comme les vieilles frustrées dont je fais


mention au début de ce chapitre et dire que non seulement Nathalie
n’est pas si bonne que ça, mais qu’elles auraient fait du BIEN meilleur
travail qu’elle. Ou encore, que tout ça était arrangé… Que c’était de la
triche, que ce n’était pas juste (insérez ici toutes les autres défaites de
filles jalouses qu’on sort trop souvent).

234
Non. Elles étaient contentes. Pour vrai. Parce que l’une d’elles
venait de réussir quelque chose de grand. Parce que lorsqu’une Pail-
lette brille, elle inspire les autres à le faire aussi. Elle les amène dans
sa lumière.

J’ai une autre cliente, Alexine Quinn, une artiste de l’imagi-


naire qui écrit des récits érotiques. C’est un personnage, vous l’aurez
bien compris, mais derrière ses photos très osées se cache un mes-
sage puissant de valorisation des femmes. Elle entraîne sa commu-
nauté dans une libération de tous les tabous pour que les femmes
puissent cheminer. Loin de la culpabilité. Loin de la comparaison.
Loin des normes qu’on continue de perpétrer et qui tiennent en otage
les femmes dans un état de pensée de compétition. Bien sûr qu’elle
aussi reçoit des commentaires provenant d’autres femmes qui lui
disent d’aller se rhabiller et qui ajoutent que forcément, elle n’est pas
intelligente parce qu’elle se dénude sur les réseaux sociaux, mais la
majorité du temps, elle active le « Girl Power » de ses « Quinny » en
leur montrant que cette avenue est aussi possible. Et ça marche.

C’est là toute la notion de « l’empowerment ». Un terme anglo-


phone qui, en gros, illustre le principe d’émancipation. Il donne da-
vantage de pouvoir à un groupe d’individus qui peuvent ensuite agir
sur les conditions sociales, économiques, politiques ou écologiques
auxquelles ils sont confrontés (merci Wikipédia). C’est là que le man-
tra des Spice Girls prend tout son sens. Donner plus de pouvoir ne veut
pas dire en enlever à d’autres ou minimiser celui de certains groupes.
Il s'agit simplement de comprendre que c’est ensemble qu’on pourra
changer les choses, qu’on a cette capacité et cette force à condition
qu’on se serre les coudes et qu’on ne faiblisse pas devant la tentation
d’augmenter notre confiance personnelle en rabaissant les autres.

235
J’en ai parlé dans les chapitres précédents, mais j’ai fait l'ob-
jet de plusieurs commentaires depuis mon arrivée sur le Web. Il y a
quelques mois, j’ai aussi vécu un épisode d’intimidation particuliè-
rement douloureux parce que je ne l’ai pas vu venir. Ça ne m’avait
même pas effleuré l’esprit que cela puisse arriver, probablement trop
prise dans mon monde de licornes.

Quelqu’un de très proche de moi a prétendu que je copiais


une formation existante. Celle qu’une autre femme donnait. Honnê-
tement, encore aujourd’hui, j’ai beau analyser cette accusation, je ne
sais toujours pas en quoi il y a une ressemblance. Or, ça a rapidement
fait boule de neige. Un groupe de filles a commencé à répandre cette
information dans les médias sociaux. Elles ont eu le culot de venir
raconter la même histoire dans mon propre groupe. Elles essayaient
de convaincre mes clientes actuelles qu’elles devaient quitter ma for-
mation parce que tout ce que je faisais, c'était copier le matériel des
autres. Ça a duré quelques semaines. J’encaissais les racontars et les
messages, tout sauf subtils, en me disant que ça allait passer, jusqu’au
jour où j’ai décidé de confronter les deux personnes qui avaient dé-
marré tout ça en leur demandant si j’avais fait quelque chose de mal.
Que si c’était le cas, je m’en excusais profondément mais que ce n’était
pas en essayant de salir ma réputation qu’on réussirait à y trouver
notre compte, les unes comme les autres.

Apparemment, non. Je n’avais rien fait de mal. Bégaiements.


Réponses peu claires. Peu d’arguments. Je comprenais que je n’avais
vraiment rien à me reprocher, que tout comme dans ma situation avec
Maman Caféine, ce qui les avaient amenées à agir de la sorte n’était
que de la jalousie. Pure et simple. Celle qui fait ressortir le pire de
nous et avec laquelle on est prête à faire bien des bassesses. Celle qui
ne se guérit que par notre capacité à s’aimer inconditionnellement.

236
Celle qui peut nous faire prendre conscience que lorsqu’on s'attarde à
observer ce que les autres font pour essayer de les prendre en défaut,
on perd de précieuses minutes à se concentrer sur notre propre pro-
gression. On entre dans une spirale négative qui nous éloigne d’un
objectif principal : notre propre bonheur.

Imaginez si ces filles, qui ont essayé de me détruire, avaient


travaillé à mettre de la lumière dans leur part d’ombre à ce moment.
Si elles avaient pris deux minutes de leur temps pour m’observer at-
tentivement et voir à quoi cela les confrontait réellement.

La majorité des gouvernements de la planète sont masculins


et on entend un discours récurrent qui prétend que les choses iraient
sans doute mieux si des femmes étaient à la tête pour les prises de
décision.

Non pas parce que nous sommes meilleures, mais bel et bien
parce que nous pensons différemment, agissons différemment, avons
une tout autre conception de ce que sont l’empathie et la bienveil-
lance. Je le crois profondément, pour de vrai. Nous avons un style de
gestion qui pourrait être totalement différent de nos collègues mas-
culins, et je pense que bien des décisions se prendraient avec le cœur
plutôt qu’avec la tête. Ce qui pourrait être une excellente chose.

On perçoit souvent le féminisme comme un prétexte pour


dénigrer les hommes, leur dire qu’on n’a pas besoin d’eux et prouver
notre prétendue supériorité alors que pour moi, c’est une idéologie
qu’on doit seulement se réapproprier pour transformer nos relations
entre femmes. Les hommes n’ont rien à voir là-dedans.

Et pourtant.

237
C’est une femme en éducation qui a dit que j’étais une mère
inadéquate.

C’est une femme qui m’a dit que je ressemblais à un siphon de


toilette sur les réseaux sociaux.

Ce sont deux femmes qui ont essayé d’en entraîner d’autres


avec une fausse histoire de plagiat de formation.

Pas des hommes.

Des femmes qui comprennent ma réalité.

Des femmes que d'autres femmes ont probablement insultées


par le passé.

Des femmes qui ont probablement, elles aussi, leurs blessures


reliées à des personnes de sexe féminin.

Des femmes que d'autres femmes ont regardées, à un moment


ou un autre, de façon arrogante et condescendante.

Être une Paillette, c’est aussi concevoir qu’ensemble, on sera


toujours plus fortes. Pas pour battre quelqu’un. Simplement pour
s’élever et avoir notre filet de sécurité en cas de chute. Nous avons
des qualités, qu’on ignore trop souvent, qui sont l’intuition, l’instinct,
l’empathie et la compassion. C’est, oui, typiquement féminin et il n’y
a que nous qui puissions réussir à avoir un impact sur les générations
futures.

238
Les Spice Girls ne pouvaient pas tout faire toutes seules. Ma-
donna non plus.

Qu'a-t-on envie de léguer à nos enfants, spécialement nos


filles? Pour moi, c’est très clair  : IF YOU WANNA BE MY LOVE, YOU
GOTTA GET WITH MY FRIENDS, MAKE IT LAST FOREVER, FRIEND-
SHIP NEVER ENDS.

Je sais. Tu l’as dans la tête en ce moment même. Ça s’appelle


être dans le moment présent. Go with the flow, belle fille, et ne me
remercie pas.

En résumé, « Girl Power », c’est :


– Réaliser que le sentiment désagréable qui t’habite quand
tu vois une fille qui te confronte involontairement, ça s’appelle de la
jalousie. Ce n’est pas sa faute, mais bien la tienne. Comprendre que la
seule façon de l’enrayer, c'est de t’aimer inconditionnellement et de
revisiter tes vieilles blessures qui ne sont pas encore complètement
guéries.

– Se laisser contaminer positivement par le succès, la beauté,


l’intelligence des autres femmes qu’on rencontre. Concevoir qu’elles
sont loin d’être des menaces, mais plutôt des modèles dont on doit
s’inspirer pour changer les mentalités et grandir toutes collective-
ment.

– Savoir qu’on peut véritablement changer le monde en utili-


sant notre leadership féminin et en se serrant les coudes avec bien-
veillance, empathie et respect. Ensemble, nous sommes réellement
plus fortes.

239
© Photo: Nathalie Godin
240
Girl Power :
«If you wanna be
my lover, you gotta
get with my friends,
Make it last forever,
friendship
never ends.»

241
242
Chapitre 13

Go with the flow

Accepter ce qui est, laisser aller ce qui


était et faire confiance en ce qui sera
– Bouddha

En espérant secrètement que vous ayez encore en tête l’épique


Wannabe des Spice Girls, je vous parle maintenant de ma surdité par-
tielle de l’oreille gauche. Oui. Ça part fort comme ça et ça fait un lien
de fou avec la chanson.

Il y a un an, soudainement, sans avertissement, j’ai perdu


l’ouïe de l’oreille gauche. Pas complètement, mais assez pour que
ce soit paniquant pour la musicienne que je suis. D’autant plus que ce
magnifique cadeau a été accompagné d'un bruit d’acouphène qui ne
me quitte jamais depuis ce jour.

Les médecins ne comprennent toujours pas pourquoi. Je n’ai


aucun dommage visible à l’intérieur de mon oreille et aucune raison

243
ne peut expliquer ce qui s’est passé. J’ai juste eu à l’accepter. À me
laisser bercer, à accueillir ce que la vie m’a envoyé.

C’est beau, hein? C’est immensément spirituel ce que je viens


de vous révéler.

MAIS CE N’ÉTAIT PAS DU TOUT ÇA AU MOMENT OÙ ÇA M’EST


ARRIVÉ.

J’ai pleuré des nuits et des nuits à ne plus jamais entendre le


silence et à me dire que c’était impossible que ce soit comme ça pour
le reste de mes jours. À faire des crises d’angoisse parce que l’autre
oreille, sans doute pour être sûre que mon anxiété soit réellement à
un niveau de compétition olympique, commence aussi à produire un
bruit inquiétant. J’ai même dû appeler ma mère, sans être capable de
prononcer le moindre mot, pour la supplier, par mon silence et mes
sanglots incontrôlables, de venir rapidement à la maison pour me flat-
ter les cheveux jusqu’à ce que je m’endorme.

Je me suis fait les pires scénarios. J’ai essayé de comprendre


pourquoi ça m’arrivait. J’ai tenu un registre de toutes les fois où j’étais
allée dans un show rock et où j’avais volontairement trucidé mon au-
dition. J’ai maudit le ciel d’avoir des talents musicaux parce qu'assu-
rément, à force de chanter (lire crier) My Heart Will Go On pendant
une bonne partie de ma vie, j'ai envoyé le message à mes oreilles que
c’était O.K. qu’elles puissent prendre des vacances.

Les jours suivant l’annonce du diagnostic, je suis allée me


perdre en forêt maintes et maintes fois pour prier mes grands-parents
décédés de faire en sorte que tout revienne à la normale. En larmes,
j’ai serré des arbres en pensant que renouer avec la nature allait mira-

244
culeusement changer le cours des choses. J’ai été chez la psy pour réa-
border mes blocages, qui devaient être les coupables de cette nouvelle
façon qu’avait mon audition de se sacrer totalement de mes besoins.

Traitements énergétiques.

Voyante.

Rituels de magie.

J’ai tout fait.

Rien. Nada. Le même petit bruit strident dans l’oreille gauche,


qui n’entend presque plus rien quand on lui parle.

Puis, je me suis rappelée ce sur quoi je travaillais depuis


quelques mois : Go with the Flow!

Quatre petits mots bien simples qui se traduisent difficilement


en français, si ce n’est «  aller avec le courant  », et c’est bien moins
beau, à mon avis, que l’expression anglaise.

Go with the flow est donc la façon d’accueillir sans résistance


ce qui est et de comprendre que tout ce qu’on vit est nécessaire pour
nous amener dans la direction qu’on souhaite. Admettre que tout de-
vient apprentissage, leçon, changement de perception et que ce qui
doit être sera.

C’est le « Tout est parfait » de mon ami François Lemay.

245
C’est « l’Univers veille sur vous » de ma pref Gabrielle Bernstein

C’est le « Amen » de la religion catholique.

C’est surtout le « Hakuna Matata » du Roi Lion.

Je suis sourde. Qu’est-ce que tu veux que je fasse de plus à part


accepter que je suis maintenant malentendante? Je ne peux pas résis-
ter, le combattre, en être victime, lui donner du pouvoir pour amplifier
le négatif autre que de me dire : « Ben coudonc! C’est ça qui est ça! »

En toute sincérité, c’est sans aucun doute mon pire combat. Le


foutu lâcher-prise. Pourtant, chaque fois que je me suis laissée bercer
par la vie sans tenter de résister, j’ai vu apparaître la magie. Cepen-
dant, comme je suis impatiente, parfois avide de contrôle, que je veux
tout pour hier et que lorsque je décide que ce sera ça, ce le sera exac-
tement comme je l’ai souhaité, j’ai parfois tendance à basculer du côté
obscur de la vie et j’en oublie donc un des éléments les plus impor-
tants : la confiance et la certitude.

La confiance et la certitude que tout arrive pour une raison.

La confiance et la certitude que l’Univers fera son travail si


l'on accepte de s'ôter du chemin.

La confiance et la certitude qu’en tout temps, on est réelle-


ment en sécurité et libre lorsqu’on accepte de lâcher prise.

C’est fou parce que je me remémore très souvent mes der-


nières années, qui ont été aussi éprouvantes qu’enrichissantes. Je me

246
dis souvent que si je n’avais pas fait telle ou telle action, cela ne m’au-
rait pas amenée où je suis aujourd’hui.

Je vais aussi loin que :

Si j’avais choisi l’autre école secondaire, que mes parents sou-


haitaient tant que je fréquente, je n’aurais pas connu le père de mes
enfants.

Si je n’avais pas connu celui-ci, forcément, je n’aurais pas eu le


privilège d’être la mère de mes enfants, mais je n’aurais pas, non plus,
démarré ma première école de musique pour subvenir à mes besoins
parce que mes parents m’avaient coupé les vivres.

Je n’aurais donc jamais débuté cette entreprise à l’âge de dix-


huit ans pour ensuite travailler avec les plus grands du show-biz qué-
bécois.

Je n’aurais pas eu le parcours professionnel que je pouvais re-


vendiquer en voulant commencer mon projet Paillettes INC. et ensei-
gner aux femmes d’affaires comment avoir une entreprise qui leur
ressemble et qui génère des résultats.

Je ne me serais pas séparée; je n’aurais jamais pu connecter


avec ma véritable puissance, mon courage et ma vulnérabilité.

Comme Paillettes INC. n’aurait probablement pas existé non


plus, je ne serais pas en train d'écrire ces lignes.

Vous ne seriez pas en train de me lire.

247
JE LE RÉPÈTE : C’EST FOU!

Fou de penser que tout ce qu’on a vécu jusqu’à présent était


exactement ce qu’on devait vivre pour arriver ici. Comme le courant
qui trouve toujours son chemin et qui ne se pose pas de questions à
savoir ce qui doit être.

Bien sûr, il rencontre parfois des pierres qui le font dévier de


sa trajectoire, mais on ne peut pas aller à contre-courant pendant
toute une vie. Il y a un flot naturel qui existe et qui, oui, demande du
lâcher-prise, de l’acceptation mêlée à un soupçon d’accueil, mais aussi
de la confiance en ce qui sera.

La nature trouve toujours son chemin. Nous aussi lorsqu’on


prête attention aux signes, qu’on se laisse guider par le moment pré-
sent et qu’on se laisse porter par la vie.

Je vous l’ai souvent répété au cours de ce livre, mais j’ai l’im-


mense bonheur de faire de magnifiques rencontres avec des femmes
de partout dans le monde, dont Claudia Duchesne, une de mes clientes
Paillettes. Son histoire m’a profondément touchée parce qu’elle a dû
expérimenter bien malgré elle le « Go with the flow ». Après qu'elle eut
fait une banale chute lors d’une course à obstacles, les médecins lui
ont découvert une masse cancéreuse autour de la colonne vertébrale.
Ils pouvaient l’opérer et de cette façon, lui sauver la vie, mais ce n’était
pas sans risque. Elle a évidemment accepté de passer sous le bistouri
en priant pour que tout soit O.K. et qu’on puisse lui retirer le « poison »
qui s'attaquait sournoisement à son corps.

Go with the flow. Une opération plus tard, elle s’est réveil-
lée paraplégique. Privée à tout jamais de l’usage de ses deux jambes.

248
Confinée à l’éternité dans son fauteuil roulant. Le courant est là. Il
continue son flot. Il ne s’arrête pas parce que soudainement, un genre
de barrage naturel s’est formé. Il peut être stoppé quelques instants,
mais la nature trouvera toujours son chemin… Or, on a toujours le
choix  : lutter ou accepter que ce qui est arrivé est forcément pour
le mieux, que le meilleur est à venir. Le choix de faire des moments
de résistance les plus beaux cadeaux qu’on puisse recevoir. Bien des
gens dans sa situation se seraient morfondus en criant à l’injustice,
en hurlant à la terre entière qu’ils ne méritent pas ça. Que leur vie est
complètement finie.

D’autres, moins nombreux et j’en suis certaine, auraient déci-


dé de suivre l’exemple de Claudia et d’accepter.

Parce que c’est la triste réalité : c’est ça qui est ça. Il incombe
à la personne concernée de transformer cette nouvelle façon de vivre
en positif. En accueillant. En le vivant intensément parce que de toute
façon, il n’y a que ça à faire. Aussi en ayant assez de gratitude pour
reconnaître ce qui est déjà présent dans notre vie, qui est beau malgré
tout. En reconnaissant que tout arrive toujours pour une raison, soit
nous enseigner une leçon très importante et nous faire cheminer.

On parle souvent d’avoir la foi. C’est un concept immensé-


ment abstrait trop souvent relié à la religion alors que moi, je l’asso-
cie maintenant complètement au lâcher-prise. C’est comme libérer le
monde de ce qu’on pense être pour choisir d’en voir une toute nou-
velle réalité complètement différente. C’est savoir hors de tout doute
que même les obstacles sont en fait des détours pour aller dans la
bonne direction. Ils existent uniquement pour muscler ma foi en ce
qui doit être. Ce n’est pas pour me punir, me faire vivre des injustices

249
ou pour me faire volontairement du mal : juste des tests, mais surtout
de grandes leçons à intégrer.

La vie ne peut pas nous trahir volontairement, à moins qu’on


décide que c’est ce qu’on perçoit de toutes les situations qui se pré-
sentent à nous.

Lorsqu’on accepte d’être dans le « flow », on laisse de côté le


passé sans trop envisager l’avenir et on reste dans le moment présent.
Dans le ici et maintenant. On arrête de vouloir se concentrer unique-
ment sur les résultats qu’on voudrait ou qu’on pourrait obtenir pour
s’en remettre à la foi. On se permet de réaliser qu’en cet instant, tout
va bien. Cette foi se traduit aussi lorsqu'on accepte que le courant se
trouve au-delà de notre résistance.

Peut-être qu’en ce moment, votre intuition vous suggère


d’autres pistes de réflexion. Peut-être qu’on vous a tellement répété
que ce n’était pas possible que vous luttez intérieurement tous les
jours pour ne pas vous connecter à la foi puisque ce n’est pas ration-
nel. Vous nagez donc à contre-courant au lieu de faire confiance à la
vie. Ce n’est pas la foi qui est à l’avant-plan, mais bien votre peur. Celle
qui continuera de vous éloigner toujours un peu plus de ce que vous
souhaitez. Vous allez également contre la certitude, celle-là même qui
apparaît lorsqu’on met de côté son scepticisme en sachant qu’il y a
bel et bien plus grand que nous. Celle qui nous amène une paix et une
quiétude d’esprit plutôt que l’anxiété et l’impuissance. Celle qui nous
permet de croire que cette vie est tout sauf beige et fonctionnelle.

Souvent, cette certitude m’habite.

250
Probablement que si j’avais existé au quinzième siècle, on
m’aurait accusée de sorcellerie et j’aurais fini sur le bûcher du village.
Parce que je sais souvent. Intuitivement. Sans que je ne comprenne
trop pourquoi. J’ai longtemps cherché à comprendre d’où elle vient,
jusqu’à ce que je la laisse tout simplement se manifester.

Je sais qu’un événement va se produire.

Que mon projet X va marcher.

Que telle ou telle personne sera dans ma vie pour longtemps.

C’est là… à l’intérieur de moi.

Ce flot qui ne demande qu’à rouler (ou se mouvoir)


(voguer=avancer SUR l'eau)… tout doucement. Il y a parfois des
détours, mais sans y avoir trop d’embûches.

J’ai à mon actif un nombre incalculable d’anecdotes qui


concernent les signes et l’écoute active de ce que la vie a à me
proposer.

Je me suis même rarement demandé : « Et si ça ne fonction-


nait pas? » C’est souvent pour moi d’une évidence… ça peut juste bien
aller. Ce n’est pas pour toutes les sphères de ma vie, parce que pour
quelques-unes, je laisse carrément mon insécurité prendre le dessus
au lieu de reposer mes pensées sur la confiance.

Ce sont des signes aussi banals que tomber sur l’homme de


ma vie un lundi soir dans une soirée pas rapport en plein Montréal, à

251
deux heures de route de chez moi, alors que j’ai eu l’invitation le ma-
tin même et que j'ai écouté la petite voix qui me disait d’y être parce
que je devais y être. Point.

Ou encore d’être assise aux côtés de l’ex-grand amour de ce


même homme de ma vie en plein show de Coldplay, entourée de
25 000 autres personnes, alors qu’elle n’a aucune idée de qui je suis,
pendant que moi, je sais toute son histoire car c’est avec elle qu’est
née la grande peur de l’engagement de mon ex. Là, je me dis : « Mais
c’est quoi les chances? »

De penser à une conaissance que je n’ai pas vue depuis cinq


ans en me demandant ce qu’elle est devenue, et de la croiser quinze
minutes plus tard à l’épicerie alors qu’elle n’habite plus dans la région
depuis longtemps.

De me poser mille questions sur un sujet bien précis et de


m'informer du chemin à suivre en demandant à mon ange gardien,
qui est au ciel maintenant, de faire jouer sa chanson préférée, puis
d’ouvrir ensuite la radio trois secondes pour en entendre les pre-
mières notes.

J’ai toujours su. Que je serais maman jeune. Que j’aurais une
carrière à l’internationale. Que je chanterais sur scène. Que je serais
une femme d’affaires. Sans que je sache nécessairement avec préci-
sion que ce serait avec un projet qui porte un nom aussi loufoque que
Paillettes INC.

Chaque fois que j’ai lutté en ne suivant pas le flot, ça ne don-


nait jamais de bons résultats. Ça me rendait toujours profondément

252
malheureuse et ça m’éloignait dangereusement de mon X. Celui qui
rend l’incohérence hypercohérent.

Tout est-il hasard ou coïncidence ou tout est-il planifié depuis


le début? Je n’en ai honnêtement aucune idée, mais ce dont je suis per-
suadée maintenant, c’est que tout arrive réellement pour une raison
qu’on ne comprend jamais sur le coup.

On cherche souvent à tout planifier, à prévoir et à évaluer


parce que c’est un mécanisme de défense humain, mais la réalité est
tout autre : on n’a le contrôle sur absolument rien. RIEN COMME DANS
RIEN. On se projette avec anxiété dans l’avenir, on se réfugie dans le
passé parce que ça nous réconforte et nous donne l’illusion qu’on a
un certain pouvoir, alors que le seul qu’on puisse vraiment obtenir
est surtout de suivre le courant. De s’abandonner et de se convaincre
qu’il ne peut rien nous arriver de grave sauf si on décide que ce le sera.

Je reprends ma belle Claudia, qui a vécu cette épreuve que


bien peu parmi nous auraient accueilli avec autant de sérénité. On
s’entend que le pire lui est vraiment arrivé. PERDRE SES DEUX JAMBES.

Ne plus jamais marcher.

Ne plus jamais courir.

Ne plus jamais être libre telle qu’on imagine la liberté.

Pourtant… en changeant sa perception et en cultivant la


confiance que la vie sait ce qui est bon pour nous, ça change com-
plètement la donne. Claudia s’est maintenant donné pour mission
de changer le regard que l’on porte sur les handicapés. Son slogan

253
est « Sit is the new up ». Elle en rit, participe à des émissions de télé
nationales et représente un véritable modèle pour tous les gens qui la
suivent. Elle s’est mariée à un conjoint extraordinaire qui l’a connue
avant et qui l’accepte également comme elle est.

Le plus beau, c'est qu’elle est réellement et sincèrement heu-


reuse. Elle dit souvent qu'au bout du compte, cet événement s'avère
une excellente chose. Que malgré le fait qu’elle ne puisse plus jamais
marcher, ressentir les bienfaits d’une relation sexuelle (parce qu’on
oublie souvent ce « léger » détail lorsqu’on pense à la paraplégie) l'épa-
nouit et la convainc de ce qu’elle a envie d’accomplir pour faire SA
différence.

J’ai l’ultime conviction que la vie, l’univers ou peu importe vos


croyances, met en permanence sur notre chemin tout ce dont on a
besoin pour évoluer.

Des rencontres.

Des difficultés.

De grands moments de joie.

Des peines.

Des échecs.

Des victoires.

254
Le go with the flow est aussi à l’antipode du fonctionnel parce
que non seulement il faut arrêter de toujours être à contre-courant,
mais il faut aussi éviter le surplace. Parce que sinon, on se noie.

Presque chaque jour, depuis maintenant trois ans, je me pose


les trois questions suivantes pour m’aider à accentuer le « flow » :

Qu’est-ce que mon cœur me dit en ce moment?

À quoi la vie m’appelle?

De quoi ai-je besoin pour changer ce que je vis en ce moment?

Je prends le temps ensuite de m’isoler pour entendre (JE ME


TROUVAIS TRÈS DRÔLE COMPTE TENU QUE JE SUIS UN PEU SOURDE)
les réponses. Pour les laisser monter. Pour faire taire mon discours
négatif qui existe uniquement pour me protéger et éviter que je me
fasse mal en m’épargnant toutes les roches possibles dans mon che-
minement à coutre-courant.

Pendant que vous luttez, vous oubliez l’essentiel : vous savez.


Très bien. Vous êtes parfaitement consciente de ce que vous souhaitez
intérieurement mais ne voulez pas vous l’avouer parce que cela vous
demandera ensuite de faire des choix ou de poser des actions. En fait,
c’est ça qui est paniquant.

Je suis un jour tombée sur un article de Jean-Pierre Gagné,


que je ne connais pas personnellement, mais ça m’avait tout de suite
interpellée :

255
Go with the flow, veut dire :

-        Sois présent à ce qui se présente devant toi.

-       Utilise ce qui est autour de toi.

-       Accepte ce qui se présente à toi.

-       Apprécie ce qui est là.

-       Avance en toute confiance.

-       Agis maintenant.

SUIVRE LE COURANT…C’EST ÇA, VIVRE!

J’ajouterais à ça « écoute ». La vie nous parle. Sans arrêt. Même


aux plus rationnels qui refusent de se laisser prendre au jeu. En lâ-
chant prise sur les résultats, on fait confiance au grand plan. On se
fout un peu de quelle façon on y arrivera et si l'on obtiendra réelle-
ment les résultats qu’on s’est imaginés. On essaie de voir au-delà des
limites en élargissant nos perceptions pour se laisser emporter dou-
cement par ce qui est.

Je vous écris ces lignes en ce moment alors que je me trouve


sur le bord d’un canal à Venise. Je suis toute seule avec moi-même
pendant que mes amies font d’autres choses. Hier, c’était le mariage
de ma meilleure amie dans cette magnifique ville digne d’un décor de
carte postale.

256
Si je suis assise ici, avec ma coupe de vin blanc, inspirée
comme jamais en laissant mes doigts parcourir le clavier rapidement
parce que les mots me viennent tout seuls avec facilité, c’est que je
me suis laissée bercer par le Go with the flow. Il y a encore quelques
années à peine, je me demandais comment j’allais réaliser cette envie
qui ne disparaissait pas de parcourir le monde. Je n’avais pas l’argent
et encore moins le courage de le faire. Venise était sur ma liste d'aspi-
rations. Comme l’Italie, Paris et l’Asie. J’avais la certitude que ça allait
arriver, mais sans savoir quand. Mon mindset n’était cependant pas
du tout orienté vers mes aspirations. Toujours à nager à contre-cou-
rant. À trouver plein d’excuses qui justifiaient raisonnablement que
ce serait () impossible et que je rêvais en couleurs. Quand j’ai fait des
changements de vie en remettant aussi une partie du plan entre les
mains de ce qui est plus grand que moi, étrangement, tout a trouvé
son chemin. Facilement.

Comme la fleur qui pousse malgré les roches autour.

Comme la lune qui succède au soleil, qui succède à la lune, qui


succède au soleil, etc.

Comme l’eau qui descend la rivière sans se poser de questions


et qui emprunte la trajectoire qui se dessine.

Simplement et facilement.

J’ai fait de cet adage un autre mantra extrêmement impor-


tant  : «  Tout vient à moi avec facilité et aisance.  » J’y vais aussi de
cette prière qui dit : « Merci, Univers, de m’aider à voir au-delà des mes
limites. Merci d’élargir mes perceptions afin que je me laisse porter
par la vie. »

257
Ça n’exclut pas les difficultés. Ni n’enlève les moments de
doute. Mais ça rejoint le flot. Celui qui est, de toute façon.

Je ne serai ici, dans cette extraordinaire ville d’Italie, que pour


quelques jours. En ce moment, des gens profitent de l'instant présent.
Il est seize heures trente et ils ont tous un verre à la main. Les enfants
jouent, leurs parents sont regroupés pour échanger. On dirait vrai-
ment une scène typique de film. Le temps semble s’être arrêté pour
laisser place à ce qui devrait toujours primer : vivre. Sans forcer rien,
ni pousser, ni tirer vers soi, juste en laissant aller sans trop se soucier
de ce qui arrivera, parce que peu importe, ça aura sa raison d’être.

Je ne peux m’empêcher de penser que je n’aurais sans doute


jamais vécu ce privilège si j’avais continué de vouloir tout contrôler en
ignorant ce que ma petite voix me chuchotait. Si j’avais laissé la peur
prendre le dessus au lieu d’écouter ce que la vie avait à me raconter,
ou du moins, ce qu’elle tentait de m’expliquer. Comme pour le #Mer-
ciRobero, on devrait toujours être extrêmement reconnaissante pour
chaque fois où l'on a senti un inconfort ou un mal-être, car il était
justement destiné à nous amener au bon endroit.

Comment peut-on rester en contact et en communication


avec, pour les besoins de la cause, on l’appellera Univers? Honnête-
ment, je ne suis pas toujours certaine de bien comprendre son fonc-
tionnement, mais de revenir à la certitude que tout ira bien est sans
aucun doute un des moyens à privilégier. Se permettre encore plus de
briller en profitant du Go with the flow impliquera aussi de se rappeler
à tout moment que l’espoir ne meurt jamais, qu’on n'a qu’à retourner
à l’intérieur de nous pour trouver les réponses. On a tout ce qu’il faut
pour le faire. Au fond, on doit renoncer à ce qu’on pense qui devrait
être pour faire totalement confiance à ce qui sera.

258
Et si tout ce que vous aviez traversé jusqu’à maintenant était
justement pour vous préparer à ce que vous avez réellement demandé?

Albert Einstein a dit qu’il y a deux façons de vivre sa vie :

– Croire que tout ce qui arrive ne relève pas de miracles.

OU

– Croire que tout ce qui arrive est un réel miracle.

Quant à moi, le soleil commence à se coucher docuement sur


ce magnifique décor surréaliste qu’est Venise. J’ai l’ultime conviction
que ce que je suis en train de vivre en ce moment même est un réel
miracle, qu'il est la manifestation de ce que j’ai bien voulu créer dans
mon imagination et que j’ai fait les actions nécessaires pour qu’il
puisse se concrétiser.

Ce coucher de soleil est la somme de tous mes lâcher-prises


des dernières années pour me concentrer sur le moment présent et
savourer tout ce qui s’est présenté à moi. Doucement. Avec aisance et
facilité.

C’est aussi le résultat de mes choix conscients de fixer mon


attention sur ce qui était déjà beau dans ma vie pour en retirer le
maximum et savourer encore plus tout ce qui est à venir.

Pour votre information personnelle, même si j’ai décidé d’y


aller toujours un peu plus dans un «  Go with the flow  », de l’écrire
partout à travers ma maison, de me le répéter tous les jours, ça ne

259
m’a jamais ramené mon ouïe. C’est cependant devenu un excellent
indicateur de mon degré de fatigue, qui m’oblige à ralentir la cadence
quand je retourne dans mon schéma de performance professionnelle.
C’est donc finalement une bonne chose.

Aussi, j’entends moins les enfants crier. Deuxième bonne


chose.

Mais c’est surtout un autre rappel que la vie est trop courte et
qu’on doit avoir des rêves d’une pointure trop grande.

En résumé, Go with the flow, c’est :

– Accueillir sans résistance ce qui est et comprendre que tout


ce qu’on vit est nécessairement pour nous amener dans la direction
qu’on souhaite secrètement.

– Avoir confiance que tout arrive pour une raison et que l’Uni-
vers fera son travail si l'on accepte de s'ôter du chemin. Savoir qu’on
est réellement en sécurité et libre lorsqu’on accepte de lâcher prise.

– Être attentive aux signes et demander fréquemment « À quoi


la vie m’appelle? » pour laisser monter les réponses et suivre davan-
tage son instinct.

– Ignorer le contre-courant et se laisser bercer par la vie tout


en étant dans le moment présent. En pleine conscience.

260
© Photo: Nathalie Godin
261
Go wih the flow:
Un jour tout fera
du sens. Pour
l ’ instant ris dans
la confusion, souris
à travers les larmes
et rappelle-toi que
tout arrive pour une
raison.

262
Chapitre 14 

Avoir des rêves


d’ une pointure trop grande

Vise toujours la lune, car en cas d’échec,


tu atteindras au moins les étoiles
– Oscar Wilde

On est en 2017. Je suis en coulisses de la mythique salle Ga-


veau de Paris, située dans le 8e arrondissement. Une salle de spec-
tacle majestueuse, sur trois étages, où des compositeurs et des musi-
ciens tels que Debussy, Ravel et Enesco, entre autres, se sont produits
dans les années 1900.

Si vous n’avez jamais interprété un morceau classique de ces


grands musiciens, c’est un détail dont vous vous «  fouterez  » éper-
dument, mais lorsqu’on a passé des heures et des heures de notre
adolescence à travailler chacune des notes de leurs partitions, croyez-
moi, c’est un élément extrêmement important à l’histoire.

263
Parce qu'entre les âges de cinq et seize ans, c'est pas mal ce
que j’ai fait, travailler mon piano.

Dans quelques instants, je serai sur la même scène que ces il-
lustres personnages ont foulée quelques dizaines de décennies avant
moi.

C’est plein à craquer. Plus de mille personnes. J’attends pa-


tiemment (et très impatiemment en même temps) mon tour, parce
que dans quelques minutes, ce sera à moi. Je viens présenter ma
conférence « Faites briller votre potentiel ».

J’ai une magnifique robe bleue comme la princesse Jasmine


dans Aladin, je suis accompagnée d’amies assez récentes qui sont là
pour me soutenir et m’encourager. Je sens l’énergie des gens du public,
qui semblent heureux d’être présents. Il y a de la fébrilité dans l’air.
J’ai les yeux grands ouverts pour tout capter. Je suis nerveuse, mais en
contrôle à la fois. Étonnamment, je me sens bien, détendue. Je pense
à mes parents, à quel point ils auraient adoré être ici avec moi. Je
songe surtout à mes enfants et je deviens émotive de penser que le
cheminement de mes derniers mois m’a menée ici. J’aurais eu envie,
à cet instant précis, de les serrer très fort dans mes bras. D’ailleurs,
la petite fille de mon ami conférencier François Lemay doit ressentir
mon besoin parce qu’elle propose, en ce moment particulier, que je
la serre dans mes bras pour faire comme si j'étreignais Emma-Rose.

J’ai le trémolo dans la voix, mais je sais que ce n’est que de la


belle émotion qui noue un peu ma gorge. Ma fidèle Gabrielle s’occupe
de mes cheveux et me répète toutes les deux minutes :

« Tu te rends compte d'où tu es rendue? »

264
Non. Je ne m’en rends pas vraiment compte tellement c’est
complètement surréaliste.

Puis, Martin Latulippe, « Toupet » pour les intimes, l’anima-


teur et organisateur de l’événement, m’annonce enfin : « Veuillez ac-
cueillir mon amie, Mélissa Normandin Robeeeeeeeeeeerge ».

C’est à cet instant précis, lorsque je fais les premiers pas sur
la scène, que je me rends compte de ce que je suis en train de vivre :
JE RÉALISE UN RÊVE.

Je suis en spectacle à l’international.

Moi. Mélissa. De Shawinigan.

La fille de Josée et de Sylvain.

La maman de Victor, d'Emma-Rose et de Georges-Édouard.

Celle qui faisait des spectacles, dans la cour du petit bungalow


modeste, tous les soirs d’été devant tout le voisinage avec Amélie et
Josie.

Celle qui, dans le gymnase de son école secondaire Montfort,


répétait tous les midis ses chorégraphies en s’imaginant les repro-
duire ensuite partout sur la planète.

Celle qui, un nombre incalculable de fois, s’est imaginé faire


exactement ce que je m’apprête à faire.

265
Tout ce dont j’ai toujours rêvé. Avec la robe, les paillettes sur
les yeux mais surtout dans ceux-ci, et mon cœur qui veut exploser de
bonheur.

Dans la salle, on pourrait entendre une mouche voler alors


que je me tiens debout devant le public, droite, à attendre la musique
qui démarre ma conférence. Je chante les premières notes et auto-
matiquement, j’entre dans une bulle difficile à décrire. Je me sens
grande, puissante. Un sentiment que je n’avais pas vécu depuis long-
temps. Comme si le monde m’appartenait. Comme si je n’aurais plus
jamais peur de rien.

J’aimerais vous dire que je me souviens de tous les instants


qui ont suivi après, mais ce serait complètement faux. Même si j’en ai
savouré chaque seconde, l’intensité de ce moment marquant de ma
vie était si grande que c’était beaucoup à gérer pour ma tête. Il y a ce-
pendant quelque chose qui restera à jamais gravé dans ma mémoire :
la réelle sensation d’avoir coché sur ma liste un souhait très cher que
je n’aurais jamais cru possible. J’ai terminé cette conférence avec tous
les gens en face de moi, debout pour me faire un « standing ovation »,
et en lançant très fort un « MERCIIIIIIIIIIIIII PARIIIIIIIIIS »!

Comme Céline Dion.

J’ai presque fait le même geste que la célèbre diva avec son
poing sur le cœur.

Ce jour-là, les spectateurs n’ont pas vu la femme de trente-


trois ans que je suis devenue. Ils ont eu droit à la prestation de la petite
Mélissa de quinze ans en train d’accomplir quelque chose qu’elle avait
imaginé toute sa vie. Avec une maturité et une expérience en prime.

266
Je me suis rappelé, en sortant de scène ce 10 juin 2017, l’impor-
tance d’avoir des rêves d’une pointure trop grande.

Quelques mois avant, je commençais à dire, sur le bout des


lèvres, ce à quoi j’aspirais secrètement sans m’en donner encore com-
plètement le droit. J’étais en plein bouleversement personnel, ma sé-
paration. Un des résultats de cette prise de conscience, c'était que la
réalisation de mes aspirations profondes était maintenant devenue
viscérale et impossible à éviter. J’avais renoué avec tout ce qui me fai-
sait vibrer étant ado et j’avais décidé que plus rien ni personne n’allait
m’empêcher de cocher tout ce qui se trouvait sur la bucketlist nouvel-
lement remise à jour.

Parce qu’on va se le dire, il y en avait beaucoup d’items à rayer


sur cette nouvelle liste. Je pense qu’on aurait pu en faire une auto-
route de kilomètres tellement les rêves cachés et étouffés depuis tant
d’années remontaient tranquillement à la surface.

Je pense que la réalisation des rêves et l’enfance sont très inti-


mement liées. On perd quelque chose en vieillissant, probablement
notre naïveté, mais aussi notre capacité de croire que ça se peut.
Qu’on peut effectivement se permettre d’imaginer quelque chose de
très grand. On ne s’est pas encore buté aux limites qu’on se fixe en de-
venant adulte et on ne mesure pas encore tout à fait l’impact des « bri-
seurs de magie », c'est-à-dire tous ceux qui se feront un malin plaisir
à nous répéter constamment qu’on est des «  pelleteux de nuages  ».
Avec le passage à la vie adulte viennent aussi la logique, la peur et les
limites qui nous empêchent de nous brancher aux aspirations que l’on
porte en nous, mais qu’on finit par mettre de côté à force de ne même
plus y croire nous-même.

267
Après ma crise de la trentaine, je suis beaucoup revenue
à l’adolescente que j’ai été pour activer mon mode  «  Réalisation de
rêves ». J’ai compris en fait que c’était nécessaire pour savoir ce que je
voulais réellement. Lorsqu’on a oublié nos repères et nos racines, c’est
encore plus laborieux de se remémorer ce qu’on souhaitait plus que
tout à une certaine époque de notre vie.

J’ai décidé d’enlever la poussière et surtout toutes les couches


que j'avais moi-même ajoutées pour me convaincre et finalement
arriver à croire que c’était impossible. Je pense qu’inconsciemment,
j’ai voulu rendre hommage à qui j’étais à quinze ans en m’imaginant
quelle pourrait être sa réaction si elle me rencontrait aujourd’hui. Se-
rait-elle fière? Me ferait-elle des reproches? Pire, roulerait-elle les yeux
au ciel en constatant que notre vie était finalement assez ennuyante,
merci?

Puis, j’ai fait un topo de la situation  : elle serait sans doute


contente de voir que la musique fait toujours partie de ma vie, mais
probablement qu’elle aurait critiqué le fait que je n’écoute plus ma pe-
tite voix créative qui repoussait toujours toutes les limites. Elle aurait
sans doute questionné le fait je ne fais plus de chorégraphies avec
mes amies.

Elle serait aussi sans doute déçue de voir que je n’habite pas
en Floride, comme on s’était toujours promis, et qu’on affronte encore
les hivers qu’on déteste tant (à onze ans, dans ma tête, j’avais un peu
organisé mon mariage avec Brenden, le fils de la meilleure amie de
ma mère qui habite à Fort Lauderdale, très près de Miami; mon plan
était parfait).

268
Mélissa de quinze ans aurait probablement trouvé qu’il était
tout à fait normal que je sois maman parce que j’imaginais déjà notre
future marmaille, mais elle aurait sûrement aimé que je n’oublie pas
non plus la fille que j’avais été qui voyait toujours plus grand. La ga-
mine qui, en plus de ne jamais écouter ceux qui disaient que c’était
impossible, faisait tout ce qui était en son pouvoir pour prouver le
contraire.

Elle aurait été si heureuse de voir que finalement, j’étais belle,


mais que je continuais de prétendre le contraire et de me trouver
mille défauts dont mes hanches trop larges, mon absence de seins,
mes lèvres croches qui ne ferment pas de façon étanche, mes poi-
gnets trop petits par rapport à mes bras, et qu'au bout du compte,
l’histoire que je me racontais en continuant d’accepter l’inacceptable
par manque de confiance en moi, c'était de la belle bullshit.

Si la Mélissa ado avait rencontré sa version adulte en 2015-


2016, elle aurait aussi très vite compris que cette dernière vivait mal-
heureusement avec des regrets en pensant qu’il était sans doute trop
tard pour s’accomplir. Parce que c’est ce qui arrive lorsqu’on évite de
le faire  : les «  j’aurais dont dû  » apparaissent. Pire, ils ne s’effacent
malheureusement pas. On doit vivre avec eux et l’amertume qui vient
avec le processus.

Je me rappelle donc avoir eu cette franche discussion avec


moi-même en étant complètement perdue et désorientée, mais en
prenant la décision de me faire un plan et d’enchaîner action par-des-
sus action pour me rendre jusqu’à THE DREAM IN PARIS. Ou quelque
part dans le monde.

269
J’y ai tellement cru. Je me suis tellement accrochée à cette
possibilité qui me faisait du bien et qui m’aidait à traverser les tem-
pêtes que j’étais en train de vivre.

On entend très souvent des artistes ou des sportifs de haut ni-


veau raconter en entrevue à quel point ils ont vu tel ou tel moment de
leur carrière. Que toute leur vie, dès leur enfance, ils répétaient dans
leur sous-sol, composaient des chansons, s’entraînaient huit jours sur
sept sur un terrain de football près de chez eux et entendaient déjà les
gens les applaudir alors qu’il n’y avait personne dans la même pièce.

Quelle est la différence entre eux et vous?

Pas grand-chose, au fond.

Oui, ils avaient du talent.

Oui, ils avaient sans doute des aptitudes.

Oui, ils avaient une passion sans limites pour une discipline
en particulier.

Contrairement à ceux qui ne vont pas au bout de leurs rêves,


ils ont continué de combiner espoir et action. Ils ont choisi de ne pas
se laisser contaminer par les sources extérieures susceptibles de les
empêcher d’atteindre leurs buts. Ils ont continué d’y croire, d’y croire
et d’y croire encore.

C’est assez simple quand on analyse froidement qu’est-ce qui


fait en sorte qu’on peut réussir à atteindre un objectif. Il y a la manière

270
dont vous le formulerez. Est-ce que ce sera flou? Clair comme de l’eau
de roche? Est-ce qu’il y aura une date précise du moment où ça se
réalisera?

Viendra ensuite l’investissement personnel et toute l’inten-


sité que vous déploierez pour manifester ce que vous souhaitez. Et un
plan d’action avec des étapes précises qui vous challengeront et vous
demanderont de commencer à agir.

Bien sûr que la visualisation, la certitude, la foi en la vie sont


des ingrédients essentiels. Cependant, il ne faut jamais négliger ce
qu’on devra faire et/ou sacrifier pour y arriver.

Je le répète sans arrêt, mais selon moi, la vie est nécessaire-


ment faite pour réaliser des rêves. Sinon, je ne comprends pas pour-
quoi on est sur cette planète.

Ce n’est certainement pas pour répéter jour après jour les


mêmes affaires sans aucun défi ni challenge.

Pas non plus pour s’éteindre en douceur en agonisant à petit


feu sous une routine qui nous éloigne dangereusement du bonheur
parce qu’elle est trop contraignante et zéro axée sur le moment pré-
sent.

Pas pour se faire dire que ça n’arrivera jamais.

Non. Cette même vie est là aussi pour qu’on puisse imagi-
ner tout le beau de travailler si fort et de croire que la magie existera
pour vrai.

271
Rêver grand nous amène à vibrer et c’est un besoin qu’on ne
peut ignorer. L’être humain est fait pour connaître ce sentiment. On a
été génétiquement conçu pour le vivre de l’intérieur mais également
de l’extérieur.

Rêver grand nous amènera à nous dépasser, à franchir les li-


mites qu’on croyait inatteignables et qui nous permettront de nous
élever pour ensuite recommencer.

Rêver grand nous ramènera au sentiment de ne plus passer à


côté de notre vie en nous faisant redécouvrir l’espoir que tout mérite
réellement d’être vécu et nous permettra de ne plus être un simple
spectateur des événements mais bien le joueur étoile du match.

Aborder le principe de joueur étoile du match m’amène à vous


parler de constance et de persévérance. Le lien est peut-être douteux,
mais c’est mon livre et je l’écris donc comme je veux. Parce que TOUT
LE MONDE sait que le joueur étoile n’est pas arrivé là par hasard. Il a
bûché et travaillé très fort pour être là où il trône.

Ce que je veux dire, en fait, c’est que vous devrez fournir des
efforts pour atteindre vos buts. Je ne suis pas arrivée sur cette scène
en plein centre de la Ville Lumière par hasard, juste parce que j’y ai
cru. J’ai fait chaque jour au moins une chose pour me rapprocher de
ce que je souhaitais. Évidemment, si vous n’avez pas bien intégré la
leçon, vous pourrez vous référer au chapitre trois de ce présent ou-
vrage (quel mot hypercrédible et intellectuel!) parce que je ne vous
réexpliquerai pas le concept au complet, mais je vous ferai un rap-
pel amical que cette discipline et cette application de la persévérance
vous permettront de franchir toutes les étapes pour que vous puissiez
enfin cocher ce que vous souhaitez sur votre liste de vie.

272
Reprenons mon exemple de la salle Gaveau.

J’ai commencé à jouer du piano à l'âge de cinq ans.

Dès mes huit ans, je travaillais à raison d’une heure par jour,
quatre fois par semaine, tous les morceaux qui constituaient mon
programme de piano classique.

À cela, j’ai ajouté le chant de façon assidue à l’âge de treize ans


en ajoutant une heure à ma séance existante de piano.

J’ai eu cet horaire de ministre de la Culture jusqu’à mes


seize ans.

J’ai continué à faire de la musique en enseignant cinq jours


par semaine, autant le piano que le chant, de dix-sept à trente-trois
ans.

Guess what… c’est aussi ça qui m’a amenée à faire ma confé-


rence à Paris. Certes, toutes ces répétitions m’ont quelquefois donné
envie d’abandonner ou n'avaient parfois pas de sens pour l’adoles-
cente que j’étais alors que mes amies n’avaient pas autant d’obliga-
tions, mais elles ont formé la musicienne que je suis devenue et ont eu
des résultats significatifs bien des années plus tard. J’ai pu apprendre,
pendant mon cheminement d’étudiante musicale, à faire de la scène,
à prendre confiance en moi et à développer mon talent.

Vous me suivez?

273
Même lorsque j’ai voulu enfouir très loin ce désir profond de
me produire en spectacle, il y avait quand même une petite parcelle
qui cherchait à jaillir et qui me disait de m’accrocher à ces visions que
j’avais eues pendant toute mon adolescence.

En discutant avec ma maman et mes «vieilles amies du secon-


daire », elles m’ont rappelé que j’avais toujours eu des idées de gran-
deur. Que j’avais fait grimper à deux cents dollars une facture de télé-
phone de mes parents parce que j’appelais dans des boîtes d’agents
d’artistes d’Orlando pour savoir s’ils acceptaient de me représenter.
Que je répétais sans arrêt qu’il serait hors de question, quand je serais
grande, que je fasse du ménage ou encore à manger, puisque j’aurais
du personnel pour s’en occuper. Qu’il ne se passait pas une seule jour-
née où je n’avais pas une nouvelle idée qui nous permettrait de man-
quer des cours scolaires pour qu’on puisse «  s’investir  » dans notre
vie étudiante afin de dynamiser notre milieu (c’était les termes que
j’employais pour avoir l’accord du directeur et qu’il nous laisse déco-
rer la cafétéria).

Comprenez-vous mon point?

Celui de revenir à cette adolescente qui possède toutes les clés


mais qui n’a encore aucune idée comment s’en servir.

Celui d'affirmer que c’est elle, au fond de nous, qui détient la


vérité et qui nous permettra non seulement de nous réorienter mais
de comprendre ce qu’on veut accomplir.

Même chose lorsqu’on est enfant; notre univers parallèle est si


puissant. Observez-les lorsqu’ils jouent. En un claquement de doigts
et par le biais de quelques petits personnages de plastique, ils entrent

274
dans un autre monde où tout peut arriver. Ils peuvent construire ce
qu’ils souhaitent et en viennent même parfois à croire que c’est réel.

Je prends mon beau Georges-Édouard qui, en ce moment, fait


une mégafixation sur Spiderman.

En fait, Il EST Spiderman.

Il se réveille en sautant partout. Il jette des toiles d’araignée


imaginaires. Il sauve les gentils des griffes des méchants. Il se regarde
dans le miroir en contractant ses muscles. Il ne fait pas la distinction
entre l'irréel et ce qui est vraiment. Je suis parfois la rabat-joie qui n’en
peut plus de le voir courir autour d'elle. Je lui dis : « TU N’ES PAS SPI-
DERMAN, CALMEEEEEEE-TOIIIIIIII! » Pour lui, malgré tout, c’est d’une
évidence : il est l’homme-araignée.

Au cours des semaines qui viendront, son frère, sa sœur, ses


grands-parents et moi lui répéterons sans arrêt qu’il n’est pas le po-
pulaire superhéros. Qu’il a beau agiter ses avant-bras, aucune toile
d’araignée n'en sortira. Il se blessera peut-être même en sautant en
bas du divan et il réalisera peu à peu que son rêve est inaccessible.
C’est toujours un peu triste, voir un rêve mourir.

C’est souvent ce que la majorité des adultes font : laisser mou-


rir leurs propres rêves sous prétexte que ça n’arrivera jamais. Soit que
ça demandera trop d’efforts, soit que les gens autour d’eux ne com-
prendront pas. Soit que c’est trop ambitieux à atteindre, soit que ça
leur fait peur.

Donc, dans l’optique qu’on vit juste une fois, on saisit, au cours
de notre cheminement, qu’il n’est jamais trop tard pour se lancer. Que

275
le maintenant est toujours mieux que le « j’aurais dont dû ». Lorsqu’on
décide qu’on se lance à la poursuite de nos rêves, il faut savoir que
nous sommes la seule et unique personne qui pourra y arriver. Bien
sûr qu’on rencontrera des personnes qui nous aideront à nous propul-
ser, on croisera des événements sur notre route qui nous permettront
de nous rendre à destination, mais la décision doit d’abord et avant
tout partir de nous. De notre volonté à réaliser ce qui nous apparaît
impossible. Ça deviendra même une raison de vivre qui nous donnera
la détermination de nous lever chaque matin avec le sourire au visage
en sachant que ce sera une bonne journée. On ne sait jamais quel sera
le résultat final, mais le chemin deviendra tout aussi stimulant.

Encore faut-il savoir de quoi on a envie. De quoi peut-on rêver


encore? Qu’est-ce qu’on a mis de côté en pensant que ça n’arriverait
jamais? De quoi s’est-on éloigné mais qui, pourtant, était tellement
logique quand on était tout petit? Qu’est-ce qui pourrait nous donner
encore envie d’être motivé à niveau tel que rien ne pourra nous faire
abandonner?

Je vous répète que je suis de Shawinigan. Je vous l’ai dit sou-


vent au cours votre lecture, mais c’est un point réellement important.
J’ai sans doute le même type de famille que beaucoup d’entre vous. On
m’a, moi aussi, répété que je rêvais en couleurs au moins un million
de fois et pourtant, je suis montée sur cette scène. J’ai parlé devant
ces gens. Je les ai émus, fait rire, fait cheminer par ma conférence.
Non seulement j’ai eu cet immense privilège, mais je suis retournée
sur le Vieux Continent une dizaine de fois après cette première pres-
tation, puisqu’elle m’a permis de me faire connaître auprès du public
français.

276
J’ai rêvé de la tour Eiffel pour la toute première fois à neuf
ans… je l’ai vue à l'âge de trente-trois ans. Je me suis autorisée de
nouveau à croire assez en moi pour pouvoir dire que je l’ai fait. J’ai eu
l’immense bonheur que mes parents assistent par la suite à un autre
de mes grands moments professionnels en Europe sur la scène de
la Neurobusiness, toujours à Paris, et cette fois-ci devant mille deux
cents personnes. J’ai imaginé ce qu’ils ont pu ressentir parce que j’ai
moi-même essayé de voir ce que je ressentirais si l'un de mes enfants
réalisait son rêve. Même si on ne le fait pas pour ça, il y a quand même
une part de moi qui voulait honorer tout ce qu’ils ont fait pour moi
en montant sur cette scène. Pendant toutes ces années, ils ont mis
de l’argent de côté pour payer mon cheminement musical. Je voulais
surtout leur prouver à eux aussi que les rêves peuvent devenir réalité.

Comme dans bien des événements marquants de ma vie, il


y aura aussi un «  avant-après  » Salle Gaveau. Ça a été comme une
illumination que les limites n’existent réellement pas, qu’elles sont
toutes dans notre tête et qu’on peut à tout moment les franchir pour
devenir la meilleure version de nous-même.

Évidemment, vous n’avez pas besoin de vivre ce genre d’ex-


périence pour comprendre l’importance de se mettre en action pour
réaliser ses souhaits. Tout comme il n’y a pas de petits, ni moyens ni
grands rêves, juste des idées qui méritent toutes d’être concrétisées.

Écrire ce livre est un rêve.

Être en couple en est un autre.

277
Pouvoir être libre chaque matin, de mon réveil jusqu’à dix
heures, en prenant le temps de boire un bon café et en lisant un livre
en est un autre.

Pouvoir aller au restaurant avec mes amies une fois par se-
maine fait aussi partie de la checklist.

Faire comme Audrey, une de mes belles Paillettes, qui quitte


son emploi au gouvernement pour lancer son entreprise.

Ou encore comme une autre magnifique Paillette, Véronique,


qui quitte le Québec avec sa petite famille en ne sachant pas s’ils re-
viendront un jour pour vivre autrement.

Ou ma courageuse Alexandra, qui décide d’être maman mal-


gré ce que tout le monde lui dit, en choisissant d’élever son beau Hu-
bert toute seule tout en étant heureuse et épanouie.

Mon amie Cindy, qui fait de sa passion, l’équitation, un élé-


ment extrêmement important et qui devient une spécialiste en dres-
sage reconnue dans son domaine.

Mon élève autiste Alexis, qui économise son argent pendant


des semaines pour ENFIN acheter sa table tournante afin de faire
jouer ses vinyles.

Mon grand Victor, qui, après deux ans intensifs de présence


matinale sur notre quai, réussit à pêcher ce FAMEUX maskinongé tant
espéré.

278
Ma fidèle et précieuse Gabrielle, qui, malgré ses trois diplômes,
écoute son cœur pour venir travailler avec moi (LE RÊVE DE TOUT LE
MONDE, TSÉ!).

Vous comprenez? Pas nécessairement une grande salle pari-


sienne. Juste de revenir à l’essentiel et de foncer pour obtenir ce que
vous avez trop longtemps ignoré. Avec les années, nos croyances se
transforment et on en vient à oublier ce qui avait du sens pour nous.
Il est là, le danger, parce qu’en oubliant l’importance de nos rêves, ou
oublie en même temps l’essence même de qui l'on est.

Vous aurez à transformer votre capacité à vous projeter dans


quelque chose qui vous est totalement inconnu pour pouvoir voir le
résultat réel de vos rêves. Vous aurez à réellement repenser votre ima-
gerie mentale. Ou à découvrir que vous avez ça, la faculté d’avoir de
l’imagerie mentale.

Celle-ci s’appuie sur beaucoup de choses dont la faculté d’être


attentif et concentré. Le fait de pouvoir vous construire mentalement
une image et pouvoir la conserver et la préserver dans votre esprit.
Tout en développant votre confiance qui vous permettra de savoir
lorsque vous serez prêt à faire évoluer l’idée, ou le rêve initial.

Oui réaliser des rêves demande énormément d’attention, de


focus et de concentration. Vous aurez à être parfois plongé pendant
des heures uniquement pour pouvoir faire avancer d’un tout petit pas
votre projet.

Vous devrez faire appel à votre imagination pour pouvoir vi-


sualiser tous les détails de ce qui vous aimeriez qui arrive dans votre
vie. Vous devrez penser en dehors de la boîte pour faire exploser vos

279
limites et les frontières de ce que vous pensez possible. Et vous devrez
avoir une excellente connaissance de vous-même pour challenger vos
peurs qui vous empêcheront inévitablement de passer à l’action.

En suivant ce chemin viennent les sentiments qui l’accom-


pagnent  : cette impression de joie extrême que même le négatif ne
réussira à avoir du pouvoir ou d’emprise sur elle; cette émotion qui
vous fera sentir invincible, puissant et si confiant; cette certitude que
la magie existe réellement et qu'en fait, cette vie se doit d’être vécue.
À fond.

En résumé, avoir des rêves d’une pointure trop


grande, c’est :

– Revenir à l’adolescente qu’on a été pour pouvoir redécouvrir


ce à quoi on aspirait mais qu’on a mis de côté par peur de se tromper
ou d’échouer.

– Comprendre qu'il n’y a ni petits, ni moyens, ni trop grands


rêves. Juste des idées qui attendent d’être concrétisées pour célébrer
cette magnifique vie.

– Concevoir qu'un mélange de visualisation, de certitude,


d'actions, de détermination, de constance et de persévérance vous
permettra de réaliser tout ce que vous avez imaginé.

J’ai vu un film marquant exactement comme je les aime : Un


mélange de comédie musicale, d’inspiration à se dépasser, et tout ce

280
que ça prend pour réaliser ses rêves. Une histoire vraie mais évidem-
ment romancée  : The Greateast Showman. L’histoire d’un homme
qui décide de foncer un cirque avec des personnages exclus de la so-
ciété en raison de leurs différences physiques. C’est beau. Grand. Et
Fascinant.

On a envie d’y croire.

La chanson principale du film est interprétée par Pink :


A Million dreams

Je ferme les yeux et je peux voir 


Le monde qui m'attend 
Que j'appelle moi même 
À travers le noir, à travers la porte 
Par où personne n'a été avant Ils peuvent dire, ils peuvent dire que tout cela
semble fou 
Ils peuvent dire, ils peuvent dire que j'ai perdu la tête 
Je m'en fous, je m'en fous, alors appelle-moi fou 
Nous pouvons vivre dans un monde que nous concevons 

Parce que chaque nuit je suis au lit 


Les couleurs les plus vives remplissent ma tête 
Un million de rêves me garde éveillé 
Je pense à ce que le monde pourrait être 
Une vision de celui que je vois 
Un million de rêves est tout ce qu'il va falloir 
Un million de rêves pour le monde que nous allons faire 

Il y a une maison que nous pouvons construire 


Chaque pièce à l'intérieur est remplie 

281
Avec des choses de loin 
Les choses spéciales que je compile 
Chacun là pour vous faire sourire 
Un jour pluvieux 

Ils peuvent dire, ils peuvent dire que tout cela semble fou 
Ils peuvent dire, ils peuvent dire que nous avons perdu la tête 
Je m'en fous, je m'en fiche s'ils nous appellent des fous 
La fuite à un monde que nous concevons 

Chaque nuit je suis au lit 


Les couleurs les plus vives remplissent ma tête Un million
de rêves me garde éveillé 
Je pense à ce que le monde pourrait être 
Une vision de celui que je vois 
Un million de rêves est tout ce qu'il va falloir 
Un million de rêves pour le monde que nous allons faire 

Quoi que ça soit grand, mais petit 


Laisse-moi faire partie de tout 
Partage tes rêves avec moi 
Tu as peut-être raison, tu as peut-être tort 
Mais dis que tu m'amèneras 
Au monde que tu vois 
Au monde je ferme les yeux pour voir 
Je ferme les yeux pour voir 

Tout rêve commence par le même processus : il faut d’abord


les imaginer et se laisser ensuite le droit d’y croire. Que tous sans ex-
ception amèneront des questionnements, des jugements. Qu’ils soient
petits ou grands, ils ne seront pas toujours compris, d’où l’importance

282
de s’y accrocher, et de se convaincre d’abord et avant tout que c’est
possible. Que c’est en changeant son mindset, et en décidant que ça se
réalisera peu importe les obstacles que ça deviendra possible.

C’est exactement ce qui s’est passé dans mon cas. J’ai retra-
vaillé chaque aspect de mon imaginaire pour me convaincre peu im-
porte ce qui allait arriver que c’était possible. Que ça valait la peine
que je risque grand, dans l’espoir d’obtenir grand. Que je devais me
transformer évidemment, mais surtout, retravailler de la bonne façon
mon esprit pour activer la loi de l’attraction et obtenir les résultats
souhaités.

Et si le succès venait aussi de votre esprit? Et si vous vous per-


mettiez enfin d’aller droit sur vos rêves pour vivre une vie complète-
ment Straoooordinaire?

283
© Photo : Maryline Tremblay
284
Avoir des rêves
d ’ une pointure
trop grande :
La vie est faite
pour réaliser
des rêves.

285
286
Chapitre 15

Straooooordinaire

La vie est comme un magicien : elle attire


ton attention à un endroit dans le but de
faire une diversion pour ensuite créer la
magie là où tu t’en attends le moins.
– Francis Machabée

J’étais supposée commencer ce chapitre en vous racontant


ma conférence au Maroc. Parce qu’elle illustre parfaitement le côté
straooooordinaire de la vie, mais j’irai avec une autre histoire. On y
reviendra par la suite. Promis.

J’arrive du Zoo de Granby (je sais… on est très loin du désert


du Sahara). J’y ai passé la journée avec mes enfants, mon amie Amé-
lie et sa famille et je me suis surprise à être complètement absorbée
dans mes pensées devant l’aquarium de méduses. J’étais totalement
fascinée de les voir nager dans un genre de ballet presque féerique.
J'ignore le nombre de minutes que j’y suis restée, mais selon moi, j’y
ai passé un gros quart d’heure sans bouger, juste à admirer cette belle
magie de la nature et à apprécier le spectacle.

287
Je me suis perdue dans mes pensées. À quel point j’étais privi-
légiée de voir tout ça devant moi. Quand est-ce qu’on prend le temps
d’observer des méduses flotter gracieusement et constater avec bon-
heur comment la vie est juste parfaite. JAMAIS. Comme dans bien des
choses de la vie, on ne prend pas le temps de prendre le temps. De
vivre un moment assez anodin quand on y pense bien, mais de pou-
voir le faire en pleine conscience. D’entrer dans un flow, et qu’il n’y ait
plus rien d’autre qui compte.

Je ne sais encore pas trop pourquoi, mais j’étais vraiment hyp-


notisée de les voir se déplacer avec lenteur, ça m’a tout de suite apaisé.
Comme si le temps était sur pause, et que tout ce que j’avais à faire,
c’était de les regarder. J’en suis presque venue à oublier tout ce qui se
passait autour de moi, jusqu’à ce que mon beau Georges court vers
moi pour qu’on puisse passer à un autre aquarium.

Qu’il est toujours possible de le faire. En fait, qu’on peut aussi


à tout moment nous détacher de la vie actuelle pour porter sur l’exis-
tence un tout nouveau regard.

Comme pour les méduses. Oui j’y reviens parce que je pense
vraiment que j’ai eu un déclic important. Et j’ai le droit, c’est mon
livre. J’aurais pu passer à côté comme la majorité des personnes ont
fait ce jour-là, et juste constater qu’elles étaient magnifiques, mais
sans plus. Ou s’arrêter et avoir une toute nouvelle perspective, et me
rendre compte que c’était vraiment spectaculaire.

Comme pour le chemin qui mène du Zoo à la maison. De voir


que les rayons de soleil de fin de journée qui se couchent tout dou-
cement sur les nombreux champs du paysage qui s’offrent à nous.
De sentir que mes enfants avaient passé un bon moment parce que

288
même fatigués, je pouvais lire un sourire sur leur visage pendant
qu’ils regardaient les photos de la journée dans mon cellulaire. De
ressentir toute cette fierté d’avoir cheminé comme maman monopa-
rentale et combien je suis maintenant épanouie.

Mais pour prendre conscience de tout ça, il faut pouvoir être


dans ce « Ici et maintenant ». S’arrêter mentalement pour être dans
l’instant présent. Pas hier, ni demain.

On peut donc choisir que cette vie soit straoooordinaire. Que


chaque semaine le soit tout autant. Que chaque nouvelle journée, est
LE prétexte parfait pour tout recommencer. Et que chaque minute de-
vient si précieuse.

En revenant à la maison, il y avait un magnifique coucher de


soleil. Mes enfants étaient tranquilles à l’arrière de la voiture, sans
doute fatigués de leur journée, et je suis devenue hyperémotive.
Comme ça, sans crier gare. J'avais les yeux pleins d’eau et l’envie sou-
daine de pleurer.

Émotive et émue de voir le paysage.

Émotive et émue de constater encore une fois à quel point je


suis maintenant autonome et que j’ai le luxe de pouvoir faire de belles
sorties avec mes petits. Toute seule. Comme une grande. De conduire
pendant tout le trajet la voiture que je paye toute seule. Comme une
grande.

Émotive et émue de m’apercevoir encore une fois à quel point


cette vie est straooooordinaire.

289
Je ne sais pas à quel moment dans le processus on a enlevé
le EX de « extraordinaire », mais Marie Make up et moi avons décidé
que c’était un peu négatif de garder ce préfixe. On a donc commencé
à répéter à qui veut bien l’entendre que c’est « straooooordinaire ». En
roulant nos « R » et en étirant le mot le plus possible.

On le dit souvent.

Très souvent.

En fait, tout est devenu straooooordinaire.

De plus en plus, à travers mon cheminement, je me suis mise


à découvrir la pleine conscience, le moment présent, le pouvoir de la
gratitude, la création de l’énergie, la notion de taux vibratoire, le pou-
voir de l’attraction et la capacité à se créer de la magie. J'ai découvert
qu'il est toujours possible de le faire.

En même temps, si vous êtes rendues ici, vous ne devez pas


être tant surprises compte tenu de tout ce que vous avez lu jusqu’à
maintenant. En sachant à quel point Walt Disney est impliqué et im-
prégné dans mon ADN.

Je fais à l’instant un coming out surprenant : je crois à la magie.

Littéralement.

Je sens qu’il y a quelque chose de plus grand que soi qui pro-
voque des trucs inexplicables et que lorsqu’on réussit à mettre son
cerveau à off, on arrive réellement à une conclusion magique.

290
Ne fermez pas tout de suite le livre en vous disant que je suis
une illuminée qui pleure devant des couchers de soleil. Prenez le
temps de terminer ce chapitre pour comprendre qu’il n’y a pas qu’à
Poudlard où l'on peut apprendre à fabriquer de la magie. On n’a pas
besoin de Gryffondor ou de Serpentard pour la pratiquer et Voldemort
n’a aucun pouvoir sur nous à moins qu’on lui en laisse l'occasion (j’ar-
rête immédiatement ici mes références à Harry Potter en vous préci-
sant cependant que si vous n’avez vu aucun de ces films, vous êtes un
peu mort par en-dedans).

Dans ma pire période de vie, j’ai lu un million de livres sur la


pensée positive, la loi de l’attraction et le bonheur en me disant que je
ne perdais rien d’essayer. J’ai compris rapidement que sans le vouloir
ni le savoir, j’avais appliqué quelques notions dans plusieurs aspects
de mon existence. Ma capacité à créer du positif avec du négatif était
une faculté assez innée chez moi, et ma volonté de voir le bon côté des
choses était sans aucun doute une force aussi. Elles s’expliquent par
la science. Par la psychologie, la programmation neurolinguistique et
autres études faites par des gens qui ne parlent pas nécessairement
de paillettes mais bien de faits réels. Il y a effectivement des gens plus
doués que d’autres pour ces domaines. Tout comme il y a des gens qui
ont une génétique plus musclée. C’est comme ça. Mais, dans les deux
cas, tout se travaille et peut s’améliorer.

Selon les neurosciences, la physique quantique et dans le dis-


cours de la spiritualité en général, le mental joue un rôle prédomi-
nant dans la perception de la réalité. La bonne nouvelle est qu’on peut
l’influencer, le changer ou le faire évoluer en travaillant pour créer
ce fameux bonheur qu’on recherche tous. N’oubliez jamais que c’est
vous en fait qui avez le pouvoir d’avoir cette vie straoooordinaire ou
beige et fonctionnelle.

291
C’est lorsque j’ai commencé à pratiquer la gratitude sur une
base quotidienne que tout a changé. Alors que tout était noir, sombre
et que je m’éloignais toujours un peu plus de mon bonheur, j’ai com-
mencé à écrire malgré tout ce pour quoi j’étais reconnaissante. Je me
forçais à trouver au moins un élément qui m’avait fait sourire au cours
de ma journée. Mes trente ans étaient très difficiles à encaisser, je
n’avais plus mes repères, mais cela ne m’a pas empêchée de m’im-
poser cette toute nouvelle discipline en essayant ainsi, par tous les
moyens, de guérir ma tête et mon cœur.

Georges-Édouard qui réussissait à prononcer un deuxième


mot, lui qui accusait un retard de langage.

Le trèèèèèèèèèès long spectacle de danse dans le salon


d’Emma-Rose.

La belle note de l’examen de mathématiques de Victor.

Au fil des jours, je trouvais de plus en plus de raisons pour


écrire dans mon cahier. De plus en plus de moments qui me com-
blaient de bonheur. Je réalisais aussi peu à peu que j’étais davantage
dans le « ici et maintenant », que mes moments d’angoisse se distan-
çaient un peu plus et que je réussissais à mettre le temps à pause pour
apprécier sincèrement ce que je vivais.

Puis j’ai vu la magie opérer.

Ma force mentale se quintupler.

Mon courage se déployer.

292
Des opportunités dont j’avais secrètement rêvé arriver.

J’ai voulu tester, tester et tester de nouveau ce récent pouvoir


en remerciant encore plus pour tout ce que je vivais. J’avais collé des
post-it partout : dans ma voiture, sur le miroir de ma salle de bain, en
fond d’écran sur mon téléphone, dans mon bureau. En somme, des
rappels colorés d’être reconnaissante même pour ce que je considé-
rais comme « normal » ou acquis.

Mes proches commençaient même à se demander si je n’étais


pas entrée dans une secte en m’entendant dire autant de fois en une
seule journée le mot magique : « Merci ».

J’ai continué de remercier.

Même pour ma séparation.

Même pour mes moments de grande tristesse lorsque je voyais


mes enfants quitter pour le week-end avec leurs petits sacs à dos.

Même pour ma grande peine d’amour avec le bel homme aux


yeux si bleus.

Remercier pour réajuster ma fréquence vibratoire et com-


prendre que lorsque je réussis à transformer mon énergie, immé-
diatement le beau finissait toujours par arriver, même lorsque c’était
laid. Or, je constatais aussi comment je m’apaisais rapidement au lieu
de rester dans mes démons qui me pourrissaient la vie.

293
Une pensée est une force magnétique interactive. Elle est
une fréquence, une certaine vibration. Une fois émise, elle se met en
résonance avec ce qui l’entoure. Cette vibration émanera d’abord de
vous, de vos cellules, et tout votre système bioénergétique (cerveau,
méridiens, chakras etc), et rayonnera pour influencer positivement
ou négativement tout votre être, mental, émotionnel, physique, selon
l’intention de votre pensée. Elle interagira par la suite avec toutes les
autres fréquences rencontrées (personne, environnement), créant là
aussi des conséquences positives ou pas.

Extrait du livre Créer sa chance par l’attraction, Gilles Diederichs

Je vais vous vulgariser ça très simplement :

En gros si tu vibres du négatif, c’est ça que tu vas avoir.

Si tu vibres du positif, c’est ça que vas avoir.

D’où l’importance des pensées, croyances et limitations qu’on


entretient. C’est aussi pourquoi on a de la difficulté à expliquer pour-
quoi on ne se sent pas bien auprès de quelqu’un qui ne nous a pour-
tant rien fait personnellement, mais qui, de par son énergie, amoin-
drit la nôtre. C’est aussi pourquoi plusieurs personnes réussissent, et
d’autres non.

Que vous le vouliez ou non, vous êtes un aimant libre d’attirer


ce que vous souhaitez consciemment ou non. C’est physique. Mathé-
matique. Scientifique. La source de tout, c’est vous.

Ça ne veut pas dire que tout doit être beau. Parfait. Jamais
triste. Parce que vivre des situations difficiles sera inévitable pour

294
tout le monde, mais qu’on peut les accueillir, et en faire ce que l’on
souhaite ensuite.

Je me suis aussi mise à accueillir l’abondance. À constamment


me poser les questions suivantes : « Comment ça pourrait être encore
mieux? Comment puis-je générer encore plus de beau? Comment tout
ça peut-il être encore plus straooooordinaire? »

J'ai trouvé les réponses facilement. Rapidement.

Je crois fondamentalement qu’il y a plus grand que nous. Appe-


lons-le Dieu, Bouddha, Krishna, l'Univers, peu importe nos croyances,
il y a un tourbillon d’énergie qui se crée et qui peut nous permettre
d’attirer tout ce que l’on pense ou ressent. On devient exactement des
aimants.

Il y a un proverbe qui dit :

Ce que l’on pense, on le devient.

Ce que l’on ressent, on l’attire.

Ce que l’on imagine, on le crée.

–Bouddha

Que voulez-vous devenir? Qu’avez-vous envie de ressentir?


Que pouvez-vous imaginer?

Trois questions pourtant très simples, mais qu’on ne se pose


pas assez souvent, parce que c’est difficile d’avoir les réponses exactes.
Elles font cependant partie de mes réflexions quotidiennes, parce que

295
je sais qu’elles m’aideront à créer la suite. Elles m’enracineront aussi
dans ce que je souhaite profondément, et me recadrent lorsque j’ai
des moments où je m’éloigne du Straoooordinaire, parce que trop en-
vahie dans mes peurs et mes limitations.

Depuis quelques mois, à tous les matins dans mon cahier de


réflexion je laisse courir les mots pour répondre à ces interrogations.
J’ai envie de devenir encore plus vraie, avec toujours moins de filtre,
être rayonnante, puissante, magnétique et empathique. Je veux res-
sentir toujours plus de joie, mais surtout de la plénitude. De savoir
et comprendre que tout est déjà en moi et que je n’ai qu’à puiser à
l’intérieur lorsque je pense que je manque de quelque chose. J’ai envie
d’avoir la légèreté, qu’elle soit omniprésente dans mon quotidien. Tout
comme cette fameuse liberté si essentielle à ma vie. Je veux ressentir
de l’allégresse, je souhaite expérimenter encore plus la douce folie.
Et évidemment que l’amour fasse partie de ma vie. L’amour de moi,
mais j’imagine surtout l’amour avec un grand A. Je me plais à écrire
et façonner dans mon esprit l’homme qui arrivera. Qui sera là pour
les bonnes raisons. Qui voudra me tenir la main, et qui sera l’extra-
bacon de mon bonheur. Je m’amuse à le décrire, à mettre en image
l’endroit où nous habiterons, les expériences à travers le monde que
nous ferons.

Je pense que j’ai longtemps eu peur de ma spiritualité. Parce


que lorsqu’on ne comprend pas quelque chose ou qu’on ne parvient
pas à trouver une explication logique, c’est épeurant. Aussi, ça fout la
trouille de se connecter à ce plus grand que soi parce qu’on sait qu’on
pourra accomplir de grandes choses ou s’autodétruire en un instant.

Tout ce que j’ai imaginé, je l’ai réalisé. Tout ce que j’ai souhaité
devenir, je le suis. Et tout ce que j’ai voulu ressentir, j’ai aussi com-

296
pris que je pouvais y arriver. Même ce que je ne souhaitais pas, tout
devenait réel. J’ai su alors que toutes les études ou articles que j’avais
pu lire sur le sujet étaient véridiques. Je suis bel et bien à la source de
tout.

Les émotions qu’on peut vivre dans une journée font de nous
la personne que nous sommes; on ne peut les renier et sans dire
qu’on doit avoir un contrôle sur elles, on peut simplement en prendre
conscience et choisir de les transformer selon nos besoins. Parce qu’en
restant dans un mode de pensées sombres, ce n’est pas la lumière qui
viendra à nous mais bien les ténèbres, desquelles il sera difficile de
sortir. Tout comme les visions ou les histoires qu’on se raconte. On
est responsable de celles-ci car elles peuvent se concrétiser. C’est une
cocréation perpétuelle avec la vie. C’est aussi pour cette raison qu’on
doit toujours porter une attention particulière sur notre face de ven-
dredi, donc notre estime de soi. À force de se répéter qu’on est trop ou
pas assez, forcément, on le devient.

C’est pourquoi la gratitude devient essentielle pour pouvoir


recadrer votre point de mire sur ce que vous avez. Sur ce qui est, ici et
maintenant, et d’ouvrir les yeux sur les petits miracles quotidiens qui
sont déjà là dans votre vie.

Je reprends mes méduses du Zoo de Granby. J’ai une réelle


fascination pour le monde marin et les dinosaures. C’est assez
straooooordinaire que je vous en parle et ce n’est pas tant un détail
important, au fond. Mon point révèle qu'il est sain de prendre quelques
instants pour voir que c’est juste magnifique, cette valse de créatures
gélatineuses colorées. Qu’elles nous offrent un spectacle hallucinant
et qu’on a le privilège de pouvoir les observer. Que cette vie est telle-

297
ment bien faite, que tout existe pour une raison, que chaque élément
cohabite avec les autres pour créer un tout harmonieux.

La magie est partout. Suffit d’ouvrir les yeux.

Comme ce magnifique coucher de soleil sur une campagne


entre Granby et Shawinigan, où tout est paisible. Je pourrais oublier
que c’est là. Ça deviendrait une normalité parce qu’on sait que soir
après soir, le soleil va se coucher et qu’il en sera de même demain éga-
lement. Sauf que lorsqu’on veut créer la magie et surtout y croire, on
peut aussi se mettre à pause et vivre en pleine conscience le fabuleux
moment qui, même s’il reviendra un autre jour, est devant nous pour
nous rappeler que cette vie vaut la peine d’être vécue.

On dit souvent que le bonheur, c'est aussi de s’émerveiller


devant les petites choses. Je suis d’accord avec le principe, mais je
le trouve parfois un peu réducteur. Selon moi le straoooordinaire est
dans la plénitude. Quand on a le cœur tellement rempli qu’il déborde
presque, quand on ressent ce sentiment exaltant de pleine satisfac-
tion. En ce moment précis, on ne voudrait pas être ailleurs. Parfois,
oui, c’est effectivement dans les petites choses... dans cet instant pré-
sent.

La magie ne veut cependant pas dire qu’on parle de solution


instantanée ni de recette toute faite à appliquer qui fera en sorte qu’on
aura tout du jour au lendemain. C’est très différent comme concept.
Ça veut dire faire confiance au processus et que la vie sera bonne pour
nous en sachant que tout arrive toujours pour une bonne raison. C’est
aussi de défaire les croyances qui nous amènent régulièrement dans
un état de manque. Celui-là même qui nous déconnecte instantané-
ment de notre pouvoir.

298
Je reviens encore à mes méduses (oui, c’est tellement comme
ça qu’on va le vivre).

Si je ne suis pas en gratitude à cet instant, je peux laisser mon


attention courir sur le fait que ce n’est pas si impressionnant que ça,
voir des poissons emprisonnés dans un aquarium, et passer rapide-
ment à l’autre animal sans m’attarder à tous les détails fabuleux de
cette espèce.

Ou encore, j’aurais pu maudire le fait que je suis ENCORE


TOUTE SEULE à conduire ma voiture jusqu’à l’autre bout du monde
et que mon statut de maman monoparentale est lourd et déplaisant,
plutôt que de ressentir la fierté d’offrir cette vie à mes cocos.

L’expression anglaise What you focus on, you create est extrê-
mement révélatrice et signifiante. Là où l'on décide de mettre notre
attention vivra un résultat directement proportionnel sur la suite des
choses. Trouver le positif dans tout et remercier la vie même pour
les petits détails feront en sorte que vous pourrez commencer à voir
l’aspect magique de la patente. Autant les petites, les moyennes que
les grandes choses auront parfois le même résultat que le meilleur
des sortilèges de Harry Potter.

Chaque jour, demandez-vous ce vous avez envie de créer.


Qu’avez-vous envie de voir de straooooordinaire de façon continue?
Pourquoi êtes-vous réellement reconnaissant? Attention, il faut pou-
voir le ressentir jusque dans les tripes. C’est facile de dire merci sans
réellement le penser. Comme un « je t’aime » qu’on lance parfois pour
essayer de se convaincre que c’est vraiment le cas. Il faut que ce soit
vrai, qu’on sente que c’est notre cœur qui parle. Que même des fris-
sons apparaissent sur notre bras en remerciant. Qu’on est sincère-

299
ment heureuse de vivre ce moment ou cette émotion. Qu’on sait per-
tinemment qu’au moment même où l'on est en gratitude, l’énergie de
la pièce est transformée immédiatement autour de nous. Qu’on parti-
cipe à cette transformation parce que ce pouvoir est en nous.

Évidemment, au risque de me répéter, les résultats ne se font


pas en un claquement de doigts. Les belles choses qui me sont arri-
vées dans les dernières années n’ont pas été l’œuvre d’une baguette
magique. Oui, il y a eu des efforts, du travail acharné, mais aussi un
changement complet de mon mindset qui a juste, par la suite, laissé
les choses s’enclencher.

Comme le Maroc.

Que je n’ai jamais vu venir. Un événement dont je n’avais


même pas soupçonné la possibilité.

J’ai eu l’immense privilège d’être une conférencière invitée


lors d’un séminaire qui se tenait à Marrakech. Encore une fois, je sais
que c’est de la magie. De la vraie.

On m’a contactée parce qu’on avait entendu parler de moi par


le biais des réseaux sociaux. Une amie française avait également été
demandée pour participer comme intervenante. Elle a mentionné du
même coup que je pourrais être sur scène. Quelques semaines après
l’invitation, je me suis envolée vers ce pays qui m’apparaissait non
seulement inaccessible, mais tellement mystérieux.

J’ai non seulement eu le privilège d’être sur scène devant un


tout nouveau public à partager mon message, mais aussi de découvrir

300
un pays qui ne m’avait même pas un jour effleuré l’esprit qu’il pour-
rait être possible que j’y travaille.

J’ai vécu mon Maroc intensément. . À regarder le soleil se lever.


À le voir ensuite se coucher de toute sa beauté. À marcher pendant
des heures pour découvrir des monuments importants, mais aussi
apprécier la végétation. À visiter les souks, les anciens palais royaux,
à manger avec les locaux, à me faire maquiller avec du khôl, avec le
henné sur les mains et tout ça en vingt-quatre heures. Travail oblige.
On n'a habituellement pas beaucoup de temps pour visiter les lieux,
mais nous avons pris une journée complète pour le faire.

Au fil de la visite, j’essayais d’emmagasiner le plus possible


de souvenirs, de m’imprégner de tous les bruits ambiants autour de
moi (parce que Dieu sait que du bruit au Maroc, c’est assez courant!), à
ressentir la chaleur du pays, à découvrir la gentillesse des habitants,
à voir des chameaux en pleine rue, des couleurs vives à n’en plus finir
et à connaître cette toute nouvelle culture qui semble si loin de ma
réalité et à me répéter toutes les cinq minutes à voix basse : « C’est
magique. C’est juste magique. »

Parce que ça ne peut être autre chose que ça.

C’est impossible qu’il n’y ait pas quelque chose de plus grand
que moi qui m’aide à créer tout ça.

J’étais accompagnée encore une fois de mes précieuses aco-


lytes Marie Make-up et Gabrielle. À se dire constamment à quel point
nous étions privilégiées de vivre ce moment épique ensemble et à
avoir cette amitié si fusionnelle qui nous unit. À rire à en avoir mal
au ventre parce qu’on se trouve tellement intenses de courir partout

301
à travers cette grande ville arabe. À avoir les yeux pleins d’eau devant
autant de beautés et de dépaysement. Non, ce n’est pas banal de par-
tir seulement quatre jours pour s’envoler vers le Maroc et y travailler,
mais je pense que le fait de pratiquer régulièrement la gratitude me
permet maintenant d’apprécier encore plus tout ce que je vis et ce que
je réussis à trouver de straooooordinaire chaque jour, à tout moment
et constamment.

J’ai toujours rêvé de cette carrière internationale sans trop


savoir comment j’allais m’y prendre.

J’ai toujours voulu ressentir cette immense liberté de pouvoir


faire ce que je souhaite à tout moment, sans non plus savoir comment
j’allais y parvenir. J’ai longtemps pensé qu’il y avait plus pour moi
que ma vie tranquille à Shawinigan, mais je ne savais pas comment
l’expliquer.

« Ce que l’on pense, on le devient.

Ce que l’on ressent, on l’attire.

Ce que l’on imagine, on le crée. »

Pour des gens tout est extrêmement clair depuis longtemps.


Ils ont une vision à long terme d’où ils veulent se rendre, alors que
pour d’autres, ils n’ont même jamais pris le temps de s’asseoir et de
comprendre qui ils sont et vers où ils désirent aller. Ils n’ont pas été
nécessairement en contact avec leurs sentiments et leurs pensées
profondes, pas plus qu’ils n’ont voulu s’interroger sur leurs véritables
attentes. Vous faites peut-être partie de cette catégorie de gens qui

302
n’ont pas encore pris conscience que leur pouvoir intérieur pourrait
leur permettre de transformer leur réalité.

Plus on sait qui on est, plus on peut savoir où on s’en va.


Encore faut-il être parfaitement honnête envers soi.

J’ai remarqué aussi à quel point on devient une influence pour


les autres autour de nous et combien on peut rapidement avoir un im-
pact sur l’énergie des autres également. Chaque semaine, dans mon
groupe Facebook ou avec mes clientes privées, lorsque l’une d’elles
écrit une publication dans laquelle elle parle de ses fiertés, qu’elle se
félicite ou encore qu’elle remercie la vie pour ce qui lui arrive, il y a
un effet d’entraînement. Toujours un effet domino. Même si les gens
autour de nous sont responsables de leur propre cocréation avec l’uni-
vers, le fait d’augmenter notre propre taux vibratoire aura un impact
pour notre entourage. On peut y croire ou être très sceptique, mais je
pense qu’on n'a vraiment rien à perdre en l’essayant. On peut com-
mencer à jouer avec l’Univers en choisissant consciemment d’atti-
rer ce que l’on souhaite, en remerciant d’abord et avant tout pour
ce qu’on a.

Vous pouvez commencer à petites doses, en écrivant chaque


soir trois choses pour lesquelles vous êtes reconnaissantes. En repas-
sant votre journée en revue, vous vous rendrez compte que vous avez
eu un beau moment de fou rire avec votre collègue avant l’heure du
lunch, que votre mini a, pour une fois, ranger son sac d’école et ses
souliers dans son casier à son arrivée de l’école et que vous n’avez pas
eu besoin de lui répéter une millième fois de le faire, que vous avez eu
une belle discussion avec votre conjoint avant de vous coucher. Des
éléments extrêmement banals, mais qui vous permettront d'investir
votre énergie là où ça compte : du beau.

303
Vous pouvez ensuite intégrer à votre routine matinale trois
autres éléments de votre vie pour lesquels vous éprouvez de la grati-
tude. Dès votre sortie du lit, vous pouvez dire « merci » pour chaque
pas qui vous mène à la salle de bain et vous rendre compte du miracle
que vous offre la vie de pouvoir vous servir de vos deux jambes. Pre-
nez le temps de ressentir. Vraiment. De vous connecter à ce moment.
Pas à ce qui s’en vient. Juste ici. Maintenant.

Vous pourriez aussi tenir un cahier de visualisation dans


lequel vous écrivez ce que vous avez envie de devenir. Vous pouvez
y décrire vos émotions du moment et comment elles contribuent à
vous faire grandir et surtout, en réfléchissant à ce que vous ressenti-
rez, vous allez forcément l’attirer. Vous pourriez vous projeter dans ce
que vous désirez accomplir tout en prenant conscience de ce que vous
avez réalisé jusqu’à maintenant : même si je rêvais de l’international
depuis mon adolescence, j’avais décidé d’arrêter de me plaindre sur
le fait qu'il ne se passait jamais rien dans ma vie pour mettre l’accent
sur le beau. Je n’avais pas encore atteint mon objectif, mais au moins,
je me plaçais dans un meilleur état d’esprit.

Je ne saurai jamais réellement si c’est le fait d'avoir commen-


cé, tout bonnement un matin de l’année de mes trente ans, à écrire
ce pour quoi j’étais reconnaissante qui a provoqué tout le beau de ma
vie. Ce que je sais, par contre, c’est que maintenant, j’apprécie plus
que jamais les petits bonheurs, ceux dont on vante sans cesse l’im-
portance. Ainsi, je suis outillée plus que jamais lorsque j’ai à faire face
aux tempêtes, parce que maintenant, je sais. Je sais qu’il y a quelqu’un
ou quelque chose qui est là pour me guider et cocréer cette existence
avec moi. Je sais que j’ai ce pouvoir entre les mains et surtout, je sais
que cette vie est tout simplement straooooordinaire.

304
En résumé, le straooooordinaire, c’est :

– Savoir que tout part de vous. Vous êtes l’aimant à la source


de tout ce que vous voulez créer

– Comprendre que la magie existe réellement et qu’elle réside


dans le fait de pratiquer la gratitude quotidiennement pour apprécier
pleinement tout ce qu’on a.

– On peut à tout moment nous détacher de la vie actuelle pour


porter un tout nouveau regard. On peut donc choisir que cette vie soit
straoooordinaire. Que chaque semaine le soit tout autant. Que chaque
nouvelle journée, est LE prétexte parfait pour tout recommencer. Et
que chaque minute devient si précieuse.

– Savoir que ce sur quoi notre attention est fixée grandira. Si


c’est négatif, ça le deviendra encore plus. L’opposé est tout aussi vrai.
Notre mental a une très grande force sur notre perception de la vie. La
bonne nouvelle, est qu’on peut donc l’influencer, le changer, ou le faire
évoluer en travaillant pour créer ce fameux bonheur qu’on recherche
tous.

– Concevoir qu'on peut cocréer en tout temps notre existence


en élevant notre fréquence vibratoire, en attirant ce qu'on souhaite,
en misant sur la certitude que tout arrive pour une raison et qu’il faut
choisir de croire en la magie parce qu’on a les preuves, au quotidien,
qu’elle existe réellement.

305
© Photo : Maryline Tremblay
306
Straoooordinaire :
Ce que l’on pense,
on le devient.
Ce que l’on ressent,
on l’attire.
Ce que l’on imagine,
on le crée.

307
308
Chapitre 16

Libérée, Délivrée

On ne se libère pas d’une chose en


l’évitant, mais en la traversant.

« Y a rien de nouveau ce matin

Entre les draps, je prends ta main

J’ai beau me coller contre toi.

Les mots je t’aime ne me viennent pas

Y a quelques jours, on allait bien

On aimait tout du quotidien

On riait de nos idéaux

On aimait jusqu’à nos défauts

Il me manque un peu d’air

Et beaucoup d’amour

309
Un élan de courage pour faire demi-tour

Pour le reste, je te laisse

Garde mes 20 ans

Prends ton temps, moi j’ai fait le tour

Si je me fie à mon instinct

Mon cœur ma tête, trois petits points

Si je résiste à faire une croix

Sur la famille qu’on a déjà


(les paroles originales ont été modifiées pour l’adapter à la réalité de l’auteur)

Je pourrais faire semblant de rien

Voiler la peine que je deviens

J’pourrais maquiller nos défauts

Je n’serais plus belle dans notre peau

Il me manque un peu d’air

Et beaucoup d’amour

Un élan de courage

Pour faire demi-tour

Pour le reste, je te laisse

Garde mes 20 ans

Prends ton temps

Moi j’ai fait le tour

310
Cette chanson m’a frappée de plein fouet, un soir d’hiver, alors
que ma petite élève en chant me l’a fait découvrir durant son cours.
Son interprète, la populaire chanteuse et entrepreneure québécoise
Marilou, avec une douceur sans nom dans la voix, est venue atteindre
mon cœur comme si un dix-roues m’était passé dessus.

Parce que j’ai compris ce soir-là que c’est la direction vers la-
quelle je m’en allais.

Comme si cette chanson avait été écrite pour moi.

En fait, comme si je l’avais moi-même écrite.

Mot pour mot.

C’était exactement mon sentiment à l’époque. Sans que je


comprenne trop ce qui s’était passé, j’ai senti que ma peine et ma tris-
tesse, lors de mon post-trente ans, étaient aussi directement reliées à
cette relation qui ne me ressemblait plus. Qui m’étouffait. Qui n’était
pas toujours très saine et qui m’empêchait de briller complètement.

Du moment où j’ai entendu pour la toute première fois


les paroles d’Un peu d’air, jusqu'au moment où j’ai réellement pris la
décision de quitter le père de mes enfants, il s’est écoulé trois ans.

Trois ans à pleurer.

Trois ans à résister à ce qui était.

311
Trois ans à ne pas comprendre que c’était pourtant l’unique
solution.

Une seule raison explique ce long délai : Victor

Mon beau grand Victor, pour qui la vie a toujours été un beau
parcours simple et qu’un rien rendait heureux. Quand cet enfant est
venu au monde, mon univers a découvert une toute nouvelle dimen-
sion : l’amour véritable. Dès le moment où je l’ai tenu dans mes bras,
j’ai compris que plus rien ne serait maintenant pareil. Que toute ma
vie serait tournée sans aucun doute vers lui et que j’avais enfin saisi
le concept de ce qu’est l’amour inconditionnel.

Pendant trois ans, chaque jour je me suis rappelée ce fameux


2 novembre 2005, où j’ai fait la rencontre de ce petit être aux traits
parfaits, avec d’épais cheveux bruns et un regard qui semblait dire :
« Salut, maman… j’espère que t’es prête parce que moi, je le suis! »
Cette journée-là, je lui avais fait une promesse alors que je l’allaitais
pour la toute première fois : celle que j’allais tout faire pour le rendre
heureux afin qu’il puisse avoir la plus belle existence possible. Je me
revois encore dans ce nouveau rôle qu’on venait de me donner gérer
une émotion que je ne savais même pas exister, à me demander com-
ment mon cœur allait tenir le coup de trop aimer, et surtout à être
déterminée et convaincue que ce parfait petit bébé allait avoir une vie
dépourvue de tout négatif. J’en faisais une mission personnelle.

En me battant contre moi-même et en jonglant avec l’idée que


je devais quitter ma relation, je me disais que je trahissais complète-
ment mon engagement et que je ferais subir à mon fils cette décision
qui affecterait à tout jamais sa conception de la vie, de l’amour, de la
confiance qu’il pouvait avoir envers sa maman.

312
J’ai pensé aussi à Georges-Édouard et à Emma, mais comme
ils étaient plus petits, je me consolais avec l’idée qu’ils allaient sûre-
ment encaisser moins difficilement le choc.

Mais mon Vic, par contre…

Mon grand sensible qui refoulait déjà ses émotions.

Mon précieux à qui l’anxiété joue parfois des tours.

Mon magnifique garçon qui redoutait tellement que ses pa-


rents se séparent.

J’ai donc accepté, pendant une période, d’être malheureuse


dans ce qui était en train de m’éteindre complètement. À essayer de
me faire croire que les choses allaient changer et que je pourrais re-
prendre le contrôle sur la barque qui s’en allait à la dérive. Que ce
qui s’en venait, c’était carrément le naufrage. Pire que le Titanic. Sauf
que la différence, cette fois-ci, c’était que les deux personnages prin-
cipaux avaient tout sauf une relation d’amour.

J’en ai pleuré, des nuits en silence dans le lit conjugal à essayer


de faire comme si de rien n’était. À jouer le jeu de la famille parfaite
alors que ce qui régnait à la maison était un heureux mélange de
colère, de crises et d’incompréhension. J’ai essayé de me convaincre
maintes et maintes fois que je pouvais attendre. Que j’allais élever
mes enfants et que lorsqu’ils seraient grands, je pourrais quitter. Sans
doute pour ressentir moins de culpabilité et aussi pour espérer que je
me trompe. J’ai aussi gardé tout ce qui passait pour moi. Sans jamais
en parler à qui que ce soit. À en avoir honte. Tellement. À subir de la

313
colère, de la haine et de la pression et à ne plus savoir comment m’en
sortir.

Je gardais pendant ce temps-là cette image bien ancrée de


mon poupon et moi ensemble, à l’hôpital. Je repassais à tous les jours
la promesse que je lui avais doucement soufflée à l’oreille en me di-
sant que je ne serais jamais capable d’être loin de lui, mais de son
frère et sa sœur également. Que juste d’y penser me coupait le souffle.
Que j’avais une douleur à l’intérieur de moi qui m’empêchait de trou-
ver le courage de passer à l’action.

Si cette longue réflexion de trois ans avait été une comédie


musicale, quatre chansons en auraient composé la trame de fond. Évi-
demment, Un peu d’air, de Marilou, qui a été la phase 1 du projet sépa-
ration en étant l’explication logique de ce qui se passait dans ma tête.

Serait venue ensuite Wake me up, d’Avicii, qui était mon


échappatoire et sur laquelle j’ai couru une foule de kilomètres à crier
ma peine dans ma tête. Elle traduisait mon sentiment d’être seule
au monde avec mes pensées. Certains matins, j’aurais préféré rester
coucher plutôt que d’affronter ce qui s’en venait. Pourtant, j’avais tout
pour moi. Une famille « unie », la maison, tout. Comme si je ne pou-
vais pas me contenter de ce faux bonheur.

314
(Traduction)

Ils me disent que je suis trop jeune pour comprendre

Ils disent que je suis pris dans un rêve

La vie va passer si je n’ouvre pas les yeux

C’est bien fait pour moi

Alors, réveillez-moi quand c’est fini

Quand je serai plus sage et plus âgé

Pendant tout ce temps je me cherchais

Et je ne savais pas que j’étais perdu

La phase 3 de ce long cheminement s’est exprimée avec Chan-


delier, de Sia, qui a joué en boucle encore et encore. Je faisais tellement
de déni et je n’osais jamais regarder la réalité en face parce qu’elle me
faisait trop peur. C’est là que j’ai commencé à aller danser. Dans des
bars. Chose que je n’avais jamais faite de toute ma vie. Juste pour le
plaisir de faire taire mes angoisses jusqu’aux petites heures du matin.
Je ne franchissais jamais la limite côté alcool, car je n’ai jamais vrai-
ment aimé le sentiment de m’enivrer. C’est par contre durant cette
période que le lever du soleil et le chant des oiseaux m’ont accueillie à
la maison pendant que je tournais la poignée de porte à cinq heures.
J'allais me coucher et me réveillais deux heures plus tard pour faire
manger mes enfants. Je voulais étourdir mon mal, me faire croire que
je pouvais me créer du beau plaisir artificiel et que de cette façon, la
vie serait belle.

315
(Traduction)

« Je vais me balancer, suspendue au lustre

Je vais vivre comme s’il n’y avait pas de lendemain

Je vais voler tel un oiseau à travers la nuit

Sentir mes larmes tandis qu’elles sèchent

Je vais me balancer suspendue au lustre

Et je m’y accroche de toutes mes forces

Je préfère ne pas regarder en bas, ni ouvrir les yeux

Je regarde mon verre plein, jusqu’à l’aube car je tiens bon toute la nuit

Aidez-moi, je m’y agrippe de toutes mes forces

Je préfère ne pas regarder en bas, ni ouvrir les yeux

Je garde mon verre plein jusqu’à l’aube car je tiens bon toute la nuit

Le jour s’est levé, je suis dans un sale état

Va falloir que je sorte d’ici maintenant

Va falloir que je m’enfuie vite de tout ça

La honte commence à m’envahir »

Pour finalement terminer cette presque belle comédie


musicale, pas triste du tout, avec la phase 4 : la décision.

316
J’ai décidé de me séparer d’une longue relation de dix-sept ans,
qui m’avait donné trois beaux enfants, lors d'un spectacle de Coldplay.

Mon groupe préféré.

À Boston.

Ma ville préférée.

J’ai eu une illumination, mais surtout l’élan de courage qui me


manquait et soudainement, tout est devenu clair. Alors que le popu-
laire band britannique a entamé Fix you devant cinquante mille per-
sonnes qui se sont toutes mises à chanter d’une seule voix, dans ma
tête, tout le brouillard s’est dissipé et j’ai tout de suite su que ce serait
le chemin. Mon chemin.

Mes peurs se sont presque toutes dispersées.

Mes doutes se sont effacés.

Ma peine s’est apaisée.

Comme si un ange avec la voix de Chris Martin m’avait soufflé


doucement à l’oreille : « Ça va bien aller. Tout va bien aller. »

Lorsque tu fais de ton mieux, mais que tu n’y arrives pas

Lorsque tu obtiens ce que tu veux, mais pas ce dont tu


as besoin

317
Quand tu te sens tellement fatigué sans pouvoir dormir

Ayant tout donné

Et que ces larmes sur ton visage deviennent des torrents

Lorsque tu perds quelque chose que tu ne peux remplacer

Lorsque tu aimes quelqu’un sans rien en retour

Cela pourrait-il être pire

Les lumières te ramèneront chez toi

Et réchaufferont ton cœur

Et j’essaierai de te réconforter

Ces torrents de larmes sur ton visage

Lorsque tu perds quelque chose d’irremplaçable

Ces torrents de larmes sur ton visage

Et moi je te réconforterai

Ces torrents de larmes sur ton visage

Je te promets que j’apprendrai de mes erreurs

Ces torrents de larmes sur ton visage

Et moi je te réconforterai

318
J’ai tellement pleuré cette nuit-là. Un mélange de tristesse pro-
fonde et de soulagement parce que j’avais enfin pris la décision. Le
spectacle de Coldplay étant à Boston, nous avons fait le chemin du
retour aussitôt le rappel terminé. En silence. Durant les six heures
nécessaires pour revenir à la maison, pas un mot. Pourtant, dans mon
cœur, j’étais zen. Je savais que ce qui s’en venait serait loin d’être rose,
mais j’apercevais un peu la lumière au bout du tunnel.

Briller de tous ses feux n’est pas juste une histoire de pail-
lettes, de licornes, d’arc-en ciel et de voir la vie avec ses lunettes roses.

Ce n’est pas non plus porter des tutus et prendre la pause dans
plein d’endroits au monde simplement pour le plaisir de le faire.

C’est surtout une question de devoir prendre des décisions


extrêmement difficiles parce qu’on a justement oublié qu'on était née
pour briller et qu’avec les années, on s’est conformée à ce qu’on atten-
dait de nous au lieu d’écouter la petite voix qui veut s’exprimer. C’est
aussi faire des choix déchirants qui auront des impacts sur d’autres
personnes autour de nous. C’est leur faire de la peine, leur imposer
notre nouvelle réalité ou façon de penser. C’est quitter tout ce qui est
toxique : amitiés, amours et parfois même relations familiales parce
qu’on se laisse ternir. Sans parfois même s’en rendre compte.

C’est aussi de réaliser que pour être heureuse, il faut inévita-


blement se détacher de ce qui ne nous est plus bénéfique. On laisse
parfois ces situations perdurer sans comprendre qu’elles sont bien
pires que la peur de ne pas savoir ce qui s’en vient. On reste donc
parfois en couple même si ça nous fait mal, dans le seul et unique but
de ne pas être seule. On a quelques fois recours à des comportements
néfastes afin d’anesthésier la douleur sans la guérir vraiment. On s’en

319
demande beaucoup trop en exigeant la perfection, afin de nous pro-
téger en restant dans notre confort et en détournant notre regard du
changement qu’on aimerait voir opérer.

C’est là qu’il faut écouter notre cœur. Celui qui a raison. Pas
notre tête qui tente de nous protéger, mais qui nous nuit plus que
d’autre chose.

Notre cœur. Celui qui nous aidera à revenir à la paix et au res-


pect de soi-même.

Qui nous fera peut-être du mal sur le coup, mais qui nous
aidera à retrouver le chemin vers un pouvoir important que nous
avons : avoir du courage.

Il y a eu des nuits, lorsque mes enfants ont commencé à alter-


ner de maison en maison entre chez moi et leur papa, où j’ai réelle-
ment pensé que je n’allais plus jamais me réveiller tellement j’avais
mal. Une douleur pire que tous mes accouchements. Un mal de l’âme
de ne plus avoir mes petits avec moi à temps plein. J’ai sincèrement
cru que je ne pourrais jamais le surmonter.

J’en ai passé des matins à essuyer mes larmes parce que je


n'entendais pas leurs petits pas descendre l'escalier, eux qui venaient
me rejoindre en courant dans mon lit pour me demander des toasts
au Nutella.

J’en ai vécu des combats intérieurs à me flageller d’avoir brisé


ma famille et à me dire que j’étais la pire personne au monde car je ne
savais pas quoi répondre à mon Georges-Édouard lorsqu'il me disait
en pleurant au téléphone qu’il s’ennuyait de sa maman.

320
J'ai donc appliqué le meilleur conseil que ma psychologue m’a
donné à l’époque. Une phrase importante à retenir  : «  On verra ça
rendu là. »

Cinq petits mots pour me rappeler de rester dans le moment


présent et de me concentrer à gérer ma peine.

Cinq petits mots qui m’ont aidée à passer chaque seconde de


ma douleur si vive qu’elle me brûlait par en-dedans.

Une petite phrase si simple qui m’a accompagnée dans mon


processus de guérison pour me convaincre que ça finirait par passer.

Vous traversez tous des moments extrêmement difficiles à


certains moments de votre vie. On pense à tort que ce sont ces mo-
ments qui font en sorte qu’on a la paillette ternie à tout jamais, alors
que je pense que c’est justement lorsqu’on les traverse qu’ils nous
aident à prendre de la hauteur et à revenir plus en force que jamais.

Peu importe la distance que vous avez en ce moment de votre


bonheur, il se peut que vous ayez à faire des choix qui seront extrê-
mement laborieux et qui vous demanderont toute votre énergie. Vous
aurez parfois l’impression de devoir affronter le mont Everest et que
vous manquerez d’air en cours de route, que vous ne verrez jamais le
sommet.

Et pourtant…

Le temps fait son œuvre. La paix s’installe tout doucement et


on comprend que c’était la voie. Même si l'on ne l’avait pas vue comme
ça sur le coup.

321
J’ai beaucoup évolué dans ce processus. Je me suis transfor-
mée complètement, si bien que je n’arrive même plus à me rappeler la
personne que j’ai été. Elle appartient au passé et sans la renier, je sais
que j’en ai fait une bien meilleure version.

J’ai aussi redécouvert un pouvoir. Celui de la paillette bien sûr,


mais une libération totale. De tout ce qui me traînait vers le bas et qui
m’empêchait d’être moi-même à 100 %. Pour illustrer cette transfor-
mation, je n’ai d’autres choix que de vous ramener THE classique pour
toutes les mamans de petites filles nées entre 2009 et 2011 : Libérée,
Délivrée

L’hiver s’installe doucement dans la nuit

La neige est reine à son tour

Un royaume de solitude

Ma place est là pour toujours

Le vent qui hurle en moi ne pense plus à demain

Il est bien trop fort, j’ai lutté en vain

Cache tes pouvoirs n’en parle pas

Fais attention le secret survivra

Pas d’états d’âme, pas de tourments

De sentiments

322
Libérée, Délivrée

Je ne mentirai plus jamais

Libérée, Délivrée

C’est décidé, je m’en vais

J’ai laissé mon enfance en été

Perdue dans l’hiver, le froid est pour moi le prix de la liberté

Quand on prend de la hauteur

Tout nous semble insignifiant

La tristesse, l’angoisse et la peur

M’ont quittée depuis longtemps

Je veux voir ce que je peux faire

De cette magie pleine de mystère

Le bien, le mal je dis tant pis

Tant pis

Libérée, Délivrée

Les étoiles me tendent les bras

Libérée, Délivrée

Non, je ne pleure pas

323
Je suis là, oui me voilà

Perdue dans l’hiver

Mon pouvoir vient du ciel et envahit l’espace

Mon âme s’exprime en dessinant et en sculptant dans la glace

Et mes pensées sont des fleurs de cristal gelées

Je ne reviendrai pas, le passé est le passé

Libérée, Délivrée

Désormais, plus rien ne m’arrête

Libérée, Délivrée

Plus de princesse parfaite

Je suis là, comme j’ai rêvé

Perdue dans l’hiver

Le froid est pour moi le prix de la liberté

J’ai réentendu cette chanson d’un angle complètement dif-


férent et j’ai fait le parallèle entre Elsa et ce que je traversais. Tout
comme elle, j’avais caché mon grand pouvoir, celui qui me permet
aujourd’hui d’accomplir tout ce que je souhaite : mon authenticité.

324
Tout comme Elsa, je me suis sentie seule dans mon royaume
aux allures de cage dorée qui me coupait les ailes et dans lequel je me
mentais quotidiennement.

Tout comme Elsa, j’ai eu un grand besoin de me libérer. De tout.

De me délivrer de ce poids que j’avais sur les épaules. D’arrê-


ter d’être parfaite et de devenir celle dont j’avais rêvé toute ma vie. De
voir où tout ça allait me mener, sans trop savoir le chemin à emprunter.

Nous avons à nous libérer de tous les liens qui nous retiennent
prisonnière pour réussir à faire grandir et jaillir notre lumière. On
ne peut le faire en restant dans notre tour d’ivoire, à attendre que la
tempête passe, et en espérant qu’il n’y aura pas trop de dommages. Il
faut parfois provoquer la tempête. La subir. En sortir amochée, abat-
tue presque vidée complètement pour rebâtir par la suite avec de nou-
velles bases.

J’ai souvent eu l’impression que mon monde s’écroulait pen-


dant cette séparation et que je ne serais jamais assez solide pour bra-
ver les intempéries. Je ne sais pas si, un jour, je me remettrai totale-
ment de ne pas pouvoir partager tous les moments importants de mes
enfants sachant qu’une partie de leur vie se passera loin de moi, mais
je suis persuadée d’une chose : c’était la bonne décision. Celle que je
devais prendre.

Mes enfants, comme bien d’autres dans pareille situation, ont


souffert de tout ça. Ils n’ont pas été épargnés et ont eu, eux aussi, leurs
combats et apprentissages. Contrairement à moi au même âge, ils
ont appris beaucoup plus rapidement que la vie, ce n’est pas toujours
comme des films de Walt Disney, mais que lorsqu’on se relève avec

325
dignité, l'univers nous réserve de magnifiques surprises. Je sais aussi
que je me devais de leur enseigner qu’on ne reste pas dans une situa-
tion qui ne nous convient plus et qu’on peut en tout temps choisir le
bonheur. Que personne ne peut nous obliger à demeurer dans quelque
chose qui ne respecte pas nos valeurs profondes. Qu’il est aussi pos-
sible d’être heureux autrement mais que pour ça, on doit faire des
choix et que plus ils sont difficiles, plus ils sont transformateurs.

Il n’y a pas une journée, pas une minute et même pas une
seconde où je n’ai pas repassé en boucle dans ma tête mes accou-
chements pendant ma séparation. J’ai revu tous mes moments de
bonheur collée-collée avec mes petits pour oublier la souffrance que
j’avais d’être aussi séparée d’eux. Est-ce que j’aurais souhaité que tout
se passe autrement et que je puisse continuer ma vie comme si de
rien n’était? Aujourd’hui, je peux vous dire que non.

Parce que ça m’aura permis de me dépasser et de développer


des forces dont j’ignorais complètement l’existence. Ça m’aura aussi
fait voir que je peux réellement percevoir la vie comme je le souhaite
si je change mon regard sur ce qui se passe pour en avoir un complè-
tement différent.

Est-ce que je regrette ma vie d’avant?

Pas une seule seconde. J’assume à 100 % chacun de mes mots,


gestes et décisions en me pardonnant en même temps pour tout ce
qui est arrivé.

Encore à ce jour, c’est sans doute l’une des choses les plus dif-
ficiles que j’aie eu à faire, mais je suis en paix face à tout ça parce
qu’entre autres, je me sens beaucoup plus libre.

326
Selon moi, la libération passe par les grandes douleurs. La
délivrance aussi. C’est là qu’on apprend à se connaître véritablement
et qu’on peut en tirer de grandes leçons qui pourront par la suite agir
à titre de rappels au cours de notre existence. On se redécouvre à
travers les malheurs de la vie et on apprécie encore plus les petits
bonheurs qui se présentent à nous ensuite.

Vos épreuves feront de vous qui vous serez demain.

Vous apprendrez souvent bien malgré vous à vous rebrancher


à votre instinct et à vous faire confiance de nouveau parce que vous
aurez survécu au tumulte et au chaos. Vous aurez donc beaucoup
moins peur de ce qui pourrait vous arriver.

Vous renouerez avec votre pouvoir. Celui qui pourra vous faire
briller de toute votre paillette.

J’ai survécu à ma séparation. À ma guerre interne et à celle


externe qui s’entrecroisaient parallèlement.

J’ai survécu à la peine. À la douleur. Au vide que tout cela a


engendré.

J’ai survécu à la grande culpabilité d’avoir infligé tout ça à mes


enfants et de n’avoir pu respecter ma promesse initiale, jusqu’à ce que
je réalise qu’il n’y a pas qu’un modèle de famille qui soit susceptible
de fonctionner. Comme dans tout, on peut aussi s’adapter.

J’ai survécu à l’idée de troubler mes enfants pour toute la vie


en me disant que je les outillais dès maintenant à faire face aux dé-
tours forcés de la vie.

327
J’ai surtout survécu en vivant une seconde à la fois et en fai-
sant une Elsa de moi-même en rejetant toute forme d’oppression que
je m’étais moi-même infligée.

J’ai apprivoisé ma monoparentalité en redécouvrant une autre


façon de vivre ma maternité.

Maintenant, je suis convaincue encore plus que jamais que ça


aura pris cet ouragan de vie pour que je puisse moi-même me connec-
ter à des femmes du monde entier et ainsi leur rappeler qu’elles ont un
immense pouvoir et qu’elles n’ont pas le droit de le faire taire. Qu’elles
peuvent s’affranchir de toutes les limites qu’elles ont érigées autour
d’elles pour pouvoir vivre la vie qu’elles ont toujours souhaitée.

Enfin, cet épisode particulier de mon existence m’aura aussi


ramenée à une promesse que j’avais faite il y a bien longtemps. Cette
fois-ci pas à Victor, mais à une personne très chère à mon cœur…

Libérée Délivrée, c’est :

– Devoir parfois prendre des décisions extrêmement difficiles,


mais qui nous aideront à nous réorienter par la suite vers ce que l’on
souhaite profondément.

– Savoir que cette libération et cette délivrance pourront


avoir des impacts sur les gens de notre entourage mais qu’au bout du
compte, on doit agir selon notre instinct et selon ce que notre cœur
nous dicte.

328
– Comprendre que c'est dans les souffrances qu’on apprend
encore plus à briller pour revenir en force avec plus de courage!

– Comprendre qu’on survit à tout. Que tout a sa raison


d’être. Qu’on peut aussi redécouvrir plusieurs sources de pouvoir  :
Le courage, la liberté et la paix.

329
© Photo: Julie Dessureault - Rose aux Joues
330
On ne se libère pas
d’une chose en
l’évitant, mais en la
traversant.

331
332
Chapitre 17 

Myriam

Il y a quelque chose de plus fort que la


mort : c’est la présence des absents dans
la mémoire des vivants
– Jean d’Ormesson

« Adieu. On se reverra si Dieu le veut. »

Ce sont ses derniers mots, prononcés sur le seuil de ma porte.

Ma belle Mimi.

On est en décembre 2003. J’avais eu une grosse journée riche


en émotions du haut de mes dix-neuf ans. Je devais régler un gros
dossier qui traînait depuis plusieurs mois et qui impliquait d’aller en
cour pour me battre contre d’anciens employeurs pas très honnêtes.
Il fallait que je défende mon point devant un juge à la cour des petites
créances et j’étais épuisée. J’avais annulé tous les cours de mes élèves
prévus à mon horaire, sauf celui de Myriam. Aucune idée encore à ce
jour pourquoi.

333
Elle était une véritable paillette : différente et originale, avec
ses grands cheveux bruns jusqu’aux fesses, elle arborait fièrement le
style Seigneur des anneaux mêlé à une inspiration gothique tout en
étant grano et en passant par un côté hyperféminin. Toujours sou-
riante, positive, drôle et attachante, elle avait une énergie hors du
commun et pouvait à elle seule changer celle qui était dans la pièce
pour l’emplir de bonnes ondes. C’était une fidèle élève depuis deux
ans. Elle m’avait suivie dans mon tout nouveau projet entrepreneu-
rial puisque avant, elle prenait ses cours de chant avec moi dans une
autre école et m’avait encouragée à démarrer la mienne pour créer
quelque chose qui ne s’était jamais vu ailleurs.

Elle chantait comme un ange. Elle avait la même voix que


la chanteuse du groupe Evanescence. Pareille. Pareille. C’était à s’y
méprendre. Lorsqu’on fermait les yeux, on avait vraiment l’impres-
sion qu'Amy Lee se tenait devant nous pour nous interpréter ses
plus grands succès. D’ailleurs, Myriam répétait sans relâche depuis
quelques mois My immortal en vue de la présentation de notre spec-
tacle de janvier.

Elle était arrivée ce jour-là hyper de bonne humeur et avait


hâte d’avoir des nouvelles de la cour. Elle savait que j’avais dû présen-
ter mes arguments le matin et voulait que je lui raconte tous les dé-
tails. On n’avait pas beaucoup chanté pendant ce cours-là, si bien que
je l’avais même remboursée puisqu’on avait presque juste parlé. Elle
m’avait annoncé avec fébrilité que trois de ses plus grands souhaits
s’étaient réalisés durant la semaine. Le premier étant qu’elle avait EN-
FIN sa place au populaire concours « Secondaire en spectacle », qui se
voulait une compétition entre écoles du Québec pour les chanteurs,
les comédiens et les humoristes en herbe. Depuis deux ans, elle ten-
tait sa chance sans jamais passer à (la prochaine) l'étape suivante.

334
Sauf que là, c’était différent. Elle avait réussi avec succès les auditions
et elle monterait sur les planches dans deux mois.

Elle avait aussi été au cinéma voir LE film de sa vie : Le Sei-


gneur des anneaux. Je la regardais, un peu incrédule de voir que c’était
réellement un rêve coché sur sa bucketlist. Un gros sept dollars pour
se rapprocher toujours un peu plus de son bonheur. Elle me disait,
tout en détail, qu’elle s’était costumée et avec qui elle était, que tout
ce beau monde avait appris pour l’occasion le langage des elfes créé de
toutes pièces par l’auteur du livre et qu’ils se parlaient en utilisant ce
vocabulaire pour le simple plaisir de voir que personne ne comprenait
vraiment ce qu’ils se disaient dans cette langue secrète.

Elle avait aussi été à son premier événement à Bicolline, en


Mauricie. Pour vous faire un résumé assez simple, c’est un jeu en
pleine forêt, grandeur nature, où tous les gens sont déguisés en mé-
diéval. Ils passent une nuit complète à « survivre ». Elle était une belle
princesse guerrière, et moi, tout ce que je pensais, c'est que ça devait
être vraiment froid et pas tant agréable de rester éveillée toute une
nuit dans le seul et unique but de faire semblant de ne pas mourir à
côtoyer d’autres intenses qui jouent le jeu.

Mais elle rayonnait. Elle brillait de tous ses feux exactement


comme lorsqu’on réalise ses rêves.

Je me rappelle lui avoir raconté l’étrange vision que j’avais eue


quelques jours avant. J’avais fait une fausse couche quelques mois
auparavant. J’avais beaucoup de difficulté à me relever de cette peine,
que je trouvais si injuste parce que bien que ce bébé ait été une sur-
prise pas tellement prévue, je m’étais résignée à l’idée que je serais
maman à dix-neuf ans. Jusqu’à ce que ce petit ange décide que ce

335
n’était pas le temps. Je savais que Myriam avait un petit côté ésoté-
rique/spirituel et qu’elle n’allait pas juger ce que je m’apprêtais à lui
dire. Un peu plus tôt cette semaine-là, alors que j’avais de la difficulté
à m’endormir, j’avais parlé à voix basse à ce petit ange retourné au
ciel. Je lui avais demandé de m’aider à traverser cette tempête qui
continuait de me faire mal et j’ai vu une lueur bleue fendre le ciel à
grande vitesse à travers la fenêtre de ma chambre. J’ai tout de suite
pensé que c’était le signe que j’attendais et que dorénavant, tout irait
bien. Encore aujourd’hui, je n’ai jamais réussi à trouver l’explication
scientifique de cette lueur et je continue de croire que ça ne s’explique
tout simplement pas. C’était là. Point.

Myriam était excitée de m’entendre. Elle s'est mise à me parler


de guides, de présences divines, mais m’a surtout dit ceci : « Ce n’était
peut-être pas le temps pour ton petit bébé de venir parmi nous, mais
je sens que tu auras un beau petit garçon d’ici deux ans, et là, il sera
prêt complètement. »

Je me rappelle avoir eu des frissons partout. Parce que je l’ai


crue. Elle avait l’air si sûre d’elle dans ses propos.

Après son heure de cours, elle est repartie avec son papa, qui
est descendu de la voiture ce soir-là pour venir m’offrir ses vœux de
Joyeux Noël. Les festivités du temps des Fêtes allaient débuter dans
quelques jours; c’était donc son dernier cours avant que l’on se revoie
en janvier.

Je la revois encore descendre les trois marches pour sortir de


ma maison puis se retourner, tout sourire, en me disant cette phrase
que je n’oublierai jamais : « Adieu. On se reverra si Dieu le veut. »

336
Elle est décédée quelques jours plus tard. D’un accident de la
route. Aucune chance de s’en sortir. Une violente collision sur la route
de la Tuque. À quelques jours du réveillon.

Mon monde s’est écroulé lorsque j’ai reçu le téléphone d’une


autre élève, une amie de Myriam qui m’annonçait la nouvelle. Le
temps s’est arrêté. J’ai hurlé que ce n’était pas vrai. Je me suis effon-
drée. Quelques heures plus tard, alors que je n’y croyais toujours pas,
la maman de ma belle grande elfe, Lucie, m’a aussi téléphoné pour me
demander si je savais. On a été de longues minutes au téléphone à ne
rien se dire. À juste être là. Je pouvais ressentir toute sa douleur liée à
la perte de sa grande fille. Sa seule et unique enfant.

Il n’y a pas vraiment de moment idéal pour mourir, j’imagine.


Encore moins à Noël et à l’âge de dix-sept ans. C’était la première fois
de toute mon existence que j’étais confrontée aussi brutalement à la
grande faucheuse. Il y avait un immense sentiment d’injustice à l’in-
térieur de moi et ces dernières paroles qui me revenaient sans cesse,
chaque minute dans ma tête : « Adieu. On se reverra si Dieu le veut. »

Comme si elle savait.

Pourquoi n'avais-je pas annulé son cours à elle aussi? Pour-


quoi avais-je fini par la rembourser tellement on avait parlé, parlé et
parlé? Comment se fait-il que la toute dernière chanson qu’elle ait
interprétée soit My Immortal?

Je suis si fatiguée d’être ici


Étouffée par toutes mes peurs d’enfant
Et si tu dois partir
Je souhaite juste que tu partes

337
Parce que ta présence erre toujours ici
Et elle ne me laissera jamais tranquille

Ces blessures ne semblent pas cicatriser


Cette douleur est tellement réelle
Il y en a tellement que le temps ne peut pas les effacer

Lorsque tu pleurais, j’essuyais toutes tes larmes


Lorsque tu hurlais, je combattais toutes tes peurs
Et j’ai tenu ta main durant toutes ces années
Mais tu as toujours tout de moi…

Tu avais l’habitude de me fasciner


Par ta lumière éclatante
Mais désormais je suis liée à la vie que tu as laissée
derrière toi 
Ton visage, il hante mes rêves autrefois agréables
Ta voix, elle a chassé tout le bon sens que j'avais

Ces blessures ne semblent pas cicatriser


Cette douleur est tellement réelle
Il y en a tellement que le temps ne peut pas les effacer

Lorsque tu pleurais, j’essuyais toutes tes larmes


Lorsque tu hurlais, je combattais toutes tes peurs
Et j’ai tenu ta main durant toutes ces années
Mais tu as toujours tout de moi…

J’ai ardemment essayé de me dire que tu es parti


Mais toujours pensé que tu étais avec moi
J’ai été seule depuis le début

338
Lorsque tu pleurais, j’essuyais toutes tes larmes
Lorsque tu hurlais, je combattais toutes tes peurs
Et j’ai tenu ta main durant toutes ces années 
Mais tu as toujours tout de moi…

Que des signes. Beaucoup de coïncidences… Comme si tout


était écrit d’avance.

Ses funérailles ont eu lieu le 23 décembre. Alors qu’on voyait


plein de gens, le cœur à la fête, se préparer dans la joie pour la belle
période qui s’en venait, nous étions une centaine à aller soutenir sa
famille au salon funéraire. On a pleuré, évidemment, mais je me rap-
pelle qu’on a tellement ri à se remémorer ce qu’on avait vécu avec
notre princesse elfique. Lorsque est venu le moment de partir, je me
suis approchée de son urne et de sa photo et je lui ai murmuré à voix
très basse pour que personne ne m’entende : « Je te promets que je
vais la vivre pour nous deux, cette vie-là, Mimi ».

J’ai réalisé durant les jours et les semaines qui ont suivi à quel
point la vie était fragile. À quel point elle ne tenait que par un fil. Que
je n’étais pas à l’abri que ça m’arrive aussi et qu’on ne sait jamais, au
fond, ce qui nous pend au bout du nez. On est loin d’être invincible.

J’ai compris à quel point il fallait que je profite de chacune des


journées qui m’étaient allouées. En fait, que je devais faire de chaque
minute une célébration de cette vie qui, même si, parfois, était com-
plètement déroutante, méritait d’être vécue à fond.

339
Depuis son départ, il n’y a pas une minute où je ne l’ai pas
sentie près de moi. Comme par magie. J’ai toujours réussi à tout at-
teindre en invoquant soudainement son nom lorsque ça ne tournait
pas comme je le souhaitais. Tout se mettait en place en un claque-
ment de doigts, comme si un ange orchestrait le tout avec son équipe.
J’ai souvent senti le poids de son absence sans me sentir seule complè-
tement. Elle est venue visiter mes rêves très souvent. Elle m’a envoyé
des signes régulièrement, tout comme à sa famille, et je sais que bien
des synchronicités sont forcément saupoudrées d'éléments prove-
nant d’une lointaine contrée qui relève de quelque chose de bien plus
grand que nous.

Victor est né moins de deux ans après le départ de Mimi.


Comme elle me l’avait étrangement prédit. Le 2 novembre, lui qui
était prévu le 4, à l’anniversaire de naissance de Myriam. Il est arrivé
parmi nous à 19 h 19. Elle est décédée un 19 décembre et aurait eu 19
ans cette année-là. Lorsque les infirmières lui ont fait un prélèvement
sanguin, on a réalisé avec grande surprise qu’il n’avait ni mon groupe
de sang, ni celui de son papa. C’est plutôt rare, mais il se peut que ça
saute une génération, et effectivement, il tient le sien de ma mère. En
racontant tout ça à Lucie, elle a arrêté de parler en entendant que mon
nouveau parfait bébé affichait A+. Comme Myriam.

Ma belle Emma, quant à elle, est née un 23 décembre. Même


date que les funérailles de Mimi. Elle porte d’ailleurs, sur son certifi-
cat de naissance, les prénoms d’Emma-Rose Myriam Marguerite en
l’honneur de celle-ci.

Par ailleurs, Georges-Édouard a aussi dépassé de cinq jours la


date initiale d’accouchement prévue qui était, vous devinerez bien, le
4 novembre aussi.

340
Mes trois enfants sont bizarrement liés à Myriam. On peut y
croire ou non, mais nous sommes forcés de constater que ça relève de
la simple anecdote d'une coche supplémentaire.

J’ai poursuivi mon cheminement d’adulte, de maman, d’entre-


preneure pendant toutes ces années qui ont suivi le décès de Myriam
en oubliant quelque chose de très important : Ma promesse.

Je pense que c’est ce qui m’a fait le plus mal à trente ans : mal-
gré tous les signes qu’elle m’a envoyés pour me dire qu’elle continuait
d’être là, malgré tout, j’ai failli à ma promesse en oubliant d’honorer
cette vie comme elle se devait de l’être. Je me suis laissée emporter
par un tourbillon de beige et de routine au lieu de réaliser l’immense
privilège que j’avais de respirer quotidiennement. J’ai préféré regarder
la télévision soir après soir, à essayer de me convaincre que c’était
correct de le faire, plutôt que d’enclencher le processus de la réali-
sation de tous les rêves, aussi fous soient-ils, que j’avais en tête. J’ai
oublié d’aimer pour vrai. M’aimer moi tout d’abord, mais aimer aussi
chaque parcelle de ma vie. J’ai oublié qu’il fallait faire de chaque jour-
née un feu d’artifice. J’ai oublié que la vie est trop courte pour ne pas
être festive et j’ai oublié que demain matin, tout peut se terminer.

Comme pour Myriam. En un claquement de doigts, elle a


quitté cette terre pour aller je ne sais trop où.

Ça prend malheureusement des événements tragiques ou


très dramatiques pour réaliser l’essentiel et qu’on n’a pas une seule
minute à perdre. L’être humain a besoin d’être acculé au pied du mur
pour faire des changements importants ou s'adonner à des prises
de conscience qui le transformeront par la suite. On tient tout pour
acquis comme si cela nous était dû, alors que c’est à nous de faire en

341
sorte que chaque instant compte. Récemment, certaines personnes
de mon entourage se sont réveillées, par un matin anodin, avec un
cancer très agressif qui menace à tout instant leur existence. Une
belle Marie-Josée par exemple, une fille en forme qui fait attention à
sa santé mais qui doit se battre contre la leucémie. L'espoir est en ce
moment un de ses meilleurs remèdes parce qu’elle ne sait pas de quoi
demain sera fait

La différence entre elle, vous et moi? RIEN.

Comme dans strictement RIEN.

Parce que vous n’avez, vous non plus, aucune idée de quoi de-
main sera fait. Tout comme moi.

Évidemment, on préfère bien souvent faire du déni. On pré-


fère fermer les yeux sur cette option parce qu’elle est non seulement
confortable, mais elle ne nous oblige pas à nous mettre en action pour
ne pas passer à côté de notre vie.

Au cours des cinq dernières années, il n’y a pas eu un seul


moment où j’ai mis ma promesse de côté, celle faite quinze ans aupa-
ravant. Je ne veux plus jamais l’oublier non plus parce que le départ
de Myriam aura eu au moins cet effet positif sur moi : la volonté de ne
plus jamais perdre cet amour profond de la vie.

J’ai vu des couchers de soleil vietnamiens, parisiens, espa-


gnols, italiens et hawaïens. Chaque fois, je les ai regardés en ayant
pendant quelques secondes les yeux dans l’eau et en me disant qu’on
était deux à les admirer.

342
J’ai pu vivre des expériences incroyables comme on en vit
rarement dans une vie et je me suis rappelé, toutes les fois, l’immense
chance qu’on m’a donnée en étant fière d’avoir entrepris des actions
pour y arriver. Chaque fois, je me disais que c’était ma façon d’hono-
rer ma promesse.

J’ai aimé fort, même quand ça n'avait pas de sens, un bel incon-
nu aux yeux bleus dans un bar de Québec parce que dans mon rêve la
veille, une grande princesse guerrière aux cheveux longs m’était ap-
parue en me disant qu’il s’en venait. Celui que j’espérais. De surcroît,
il allait avoir tous les critères. Je me suis souvent dit que les émotions
intenses faisaient aussi partie du processus de vivre avec un grand V.
Aussi intense que Myriam, au fond. Pour toutes ces raisons, je trouve
que ça n'a pas de sens lorsque deux personnes qui s’aiment ne sont
pas ensemble parce que la vie passe trop rapidement. Il faut s’aimer.
Là. Maintenant.

J’ai aussi eu envie d’inculquer ma vision de la vie à mes en-


fants drôlement reliés à Mimi, en plus de leur raconter son histoire
autant de fois que possible pour qu’ils comprennent eux aussi qu’on a
le droit de se créer son bonheur de la façon qu'on le souhaite.

Dans le film Le Seigneur des anneaux, une phrase marquante


est devenue ma préférée. Un mantra que je me répète également sou-
vent : « Tout ce que nous avons à décider, c'est ce que nous devons
faire du temps qui nous est imparti. »

Le seul pouvoir qu'on possède n’est pas sur l’espace-temps,


mais sur ce que nous en ferons. Ce choix d’être en paix, d’être branché
sur l’amour, sur le beau, sur l’amitié, sur les rêves fait aussi partie de
cette utilisation temporelle.

343
Je sais que je peux parfois être étourdissante pour les gens
autour de moi. Que c’est même souvent difficile de me suivre, parce
qu’on dirait que je n’aurai jamais assez d’une vie pour tout faire, tout
voir, tout goûter, tout découvrir. Parce que je ne veux pas perdre une
seule seconde à gaspiller du temps si précieux.

Vous savez maintenant pourquoi. La seule et unique raison


porte son nom : Myriam.

Je me demande souvent ce qu’elle serait devenue avec les an-


nées, ce qu’elle aurait fait comme métier. Quelles chansons aurait-elle
chantées? Aurait-elle eu des bébés? Aurait-elle voyagé? Aurait-elle
continué de briller comme elle le faisait si bien?

La vie aura décidé que son parcours s’arrêtait après dix-sept


ans mais que son impact allait sans aucun doute perdurer dans le
temps. Partout dans le monde. Sur bien des gens. Dont moi. La vie
aura décidé de nous enseigner à sa famille, amis et moi à la dure à
quel point nous n’avions aucun droit de gaspiller une seule minute de
notre existence.

Tu sais, Myriam Boulay Gaudreault, cette vie, je vais la conti-


nuer et n’oublierai plus jamais de la vivre pour nous deux. Toujours.

Je vais continuer de parler de toi jusqu’à la fin des temps parce


que tu m’auras laissé le plus bel héritage qu’on puisse transmettre à
quelqu’un : Vivre. Avec un V majuscule.

Comme s’il n’y avait pas de lendemain.

Comme si c’était le dernier jour.

344
Que chaque journée doit réellement être un magnifique feu
d’artifice.

Qu’on doit rire beaucoup et plus souvent.

Qu’on ne doit pas s’empêcher d’aimer, même si ça nous fait


peur, parce que la vie c’est juste ça.

Qu’on doit quitter quand le bonheur n’y est plus, parce que ce
n’est pas supposé être compliqué.

Qu’il faut que je me respecte. Que je m’honore. Que je suis


parfaite comme je suis, et que ce n’est pas quelques petits défauts qui
peuvent m’arrêter de grandir. Qu’au contraire, ils sont là pour me faire
cheminer.

Tu m’auras aussi appris qu’on a le choix en tout temps que ce


soit beau. Complètement à ton image au fond.

Qu’il faut qu’il y ait plus de musique. Plus de magie. Plus de


poussière de fée.

Merci pour tout bel ange. Continue d’être ma lumière du haut


de ton nuage. Je t’aimerai toujours!

P.S.  : Tu te rends compte? Ton nom est écrit dans un livre.


Avec de vraies pages. Pis des chapitres. Pis toute, pis toute. Prochaine
étape, le film, O.K.?

345
Si Fragile – Luc De Larochelière

On ne choisit pas toujours la route,


Ni même le moment du départ;
On n'efface pas toujours le doute,
La vieille peur d'être en retard...

Et la vie est si fragile.

On ne choisit jamais de vieillir,


On voudrait rêver un peu plus.
La vie n'est pas faite pour mourir,
On meurt souvent bien entendu...

Car la vie est si fragile,


Est si fragile,
Est si fragile,
Est si fragile...

On n'atteint pas toujours le but


Qu'on s'était fixé autrefois.
On ne reçoit pas souvent son dû,
La justice choisit où elle va...

Et la vie est si fragile

On est seulement ce que l'on peut,


On est rarement ce que l'on croit!
Aussitôt on se pense un dieu,
Aussitôt on reçoit une croix...

346
Car la vie est si fragile,
Est si fragile,
Est si fragile,
Est si fragile...

Le temps est là,


Toujours là,
Seule justice ici-bas,
On est si fragile...

On marche sur l'or ou sur l'argile,


Dépend de ce qu'on a reçu.
On reste tout aussi fragile,
Pourquoi donc se marcher dessus?

Car la vie, car la vie...


Est si fragile,
Est si fragile,
Est si fragile...

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348
Myriam :
Tout ce que nous
avons à décider, c'est
ce que nous devons
faire du temps qui
nous est imparti.
- Gandalf

349
350
Épilogue

J'écris ces dernières lignes alors que je suis sur le bord de


l’eau dans un petit coin charmant du Québec en pleurant ma vie. Les
larmes coulent sur mes joues depuis tantôt et je les laisse rouler tout
doucement.

Parce qu’elles aussi, elles font partie de cette magnifique vie.


Elles traduisent bien des choses : autant la vulnérabilité que la fierté.

La vulnérabilité et l’humilité du chemin parcouru des der-


nières années. C’est comme si, tout à coup, en terminant mon écri-
ture, je me rendais compte de toutes les expériences que j’avais vécu.

Ces larmes sont aussi le résultat davoir été puisé là où ça


faisait mal pour vous écrire plusieurs pages.

Et la fierté de cocher un autre rêve sur la bucketlist : mon livre.


Écrit à ma façon, le plus près de ma vérité possible.

Je me suis souvent demandé en cours de processus de rédac-


tion ce qu’aurait été ma vie si j’avais fait les choses différemment.
Est-ce que j’avais à quelque part des regrets? Est-ce que je recommen-
cerais tout exactement de la même façon? Qu’est-ce qui serait réelle-
ment arrivé si j’avais laissé la peur assombrir mes rêves et espoirs les
plus fous? Je ne saurai jamais encore aujourd’hui si c’était toujours les

351
bonnes choses à faire, mais c’est du moins ce qui m’a menée jusqu’à
vous. C’est aussi ce qui fait que vous avez lu toutes ces pages, mot
après mot, phrase après phrase. C’est aussi ça qui fait que je peux
maintenant écrire ce que je ressens, ce que j’ai vécu, mais surtout ce
que j’ai appris, en espérant peut-être inspirer quelques-unes d’entre
vous à prendre le chemin de la liberté  : la vraie. Celle d’assumer et
d’être fière de qui on est. Celle qui nous permet de croire que tout
est possible. Que tout est parfait. Et celle qui nous invite à prendre la
route de l’acceptation de soi pour célébrer la personne que l’on est.

Et non, je n’ai aucun regret. Comme dans la chanson


d’Édith Piaf :

Non, rien de rien.

Non, je ne regrette rien.

Ni du bien qu’on m’a fait. Ni du mal… tout ça m’est bien égal

Non, rien de rien.

Non, je ne regrette rien

C’est payé, balayé, oublié

Je me fous du passé.

Avoir une vie Paillette c’est justement d’accepter que tout ce qu’on a
fait jusqu’à présent a eu une raison et son importance.

Je n’ai pas fait grand-chose, au fond. Je ne suis pas une astro-


naute, encore moins une chercheuse de remède contre le cancer qui
pourra faire avancer la science. Je n’ai aucun exploit sportif à mon
actif. Rien de tout ça.

352
J’ai juste compris, par un soir d’été, que j’avais le pouvoir de
changer MON parcours et faire en sorte qu’il me ressemble plus. Le
pouvoir de transformer ce qui me faisait mal pour en faire quelque
chose de beau et de grand.

Je sais maintenant pourquoi je suis née. Ça m’aura pris trente-


cinq ans pour le comprendre, mais je pense que Josée et Sylvain m’ont
fabriquée quelque part en 1983 pour que je vous rappelle fréquem-
ment que plus rien ni personne ne doit et ne peut vous empêcher de
briller. Pour qu’à travers mon cheminement, qui n’a rien d’extraordi-
naire à côté de celui de bien d’autres, je puisse vous faire comprendre
que la voie du bonheur passe d’abord et avant tout par la découverte
de qui nous sommes profondément et qu’il faut célébrer la personne
que l’on est. Peu importe ce qui se passera à tout moment, vous avez
le pouvoir de créer votre récit.

Je vous l’ai dit au tout début : ce livre n’est pas que l’histoire
de Mélissa Normandin Roberge, la petite fille de la rue De la Salle de
Grand-Mère Est. C’est aussi votre histoire. Celle de femmes qui dé-
cident un jour de se lever pour changer les choses, qui décident de
s’assumer et d’arrêter de s’occuper de ce que les gens pensent pour
se concentrer sur leur bonheur. Celles qui reprennent le contrôle de
leur féminité pour s’assumer toujours un peu plus. Surtout celles qui
décident d’aimer. Aimer les autres, oui, mais aussi s’aimer profondé-
ment.

Celles qui feront en sorte de contribuer au changement en


refaisant les choses différemment.

La somme de vos actions fera toujours partie de l’équation


pour vous rapprocher de votre X.

353
Vous n'avez qu'une seule et unique mission sur cette planète :
Vivre. Avec un V majuscule.

Sachez qu’à tout moment, vous avez le pouvoir de la paillette.

Que vous n’êtes pas des filles de line-up.

Que vous pouvez maîtriser le NO.

Qu’à changer votre histoire, vous modifierez aussi votre


trajectoire.

Que vous devez en tout temps être toute sauf fonctionnelle.

Que vous devez mettre à votre agenda plus de #fucklaroutine.

Que vous devez appliquer plus souvent le #Menkalysse ou le


#Jmembalékouyes.

Qu’il faut créer votre face de vendredi.

Que vous devez protéger votre temple.

Qu’il vous faudra pardonner à vos « Roberto ».

Que vous avez le droit d’être une mauvaise mère en étant plus
douce avec vous-même.

Que le Girl Power changera tout.

354
Que le fait d'y aller avec un Go with the flow vous aidera quo-
tidiennement.

Qu’il ne faut jamais oublier à quel point la magie est straooooor-


dinaire.

Que vous pouvez apprendre à vous libérer et à vous délivrer.

Qu’il faut honorer cette vie.

Et qu’évidemment, vous êtes Née pour briller!

Que la Paillette soit avec vous! Pour le reste, faites confiance!

Mélissa, aka Master P

Xxx

Fin

355
356
Remerciements

Écrire un livre, c’est un cheminement. Des prises de


conscience assez incroyables. Merci à mon éditrice Julie Normandin
de ta confiance, de ton soutien et de tes idées. Merci de m’avoir pous-
sée quand j’en ai eu besoin.

Un merci très sincère à Martin «  Toupet  » Latulippe. La


version 2.0 de Mélissa est en grande partie grâce à toi puisque tu y as
toujours cru. Dès le jour 1. Tu m’as permis de devenir celle que je sou-
haitais tellement devenir! Bine sur l’épaule, ailes de poulet à la Cage
aux sports pis toute!

Guillaume, pour l’ensemble de ton œuvre. Merci de faire partie


de ma garde rapprochée et de toujours faire sortir le meilleur de moi.

Toutes mes Paillettes d’ici et de partout dans le monde. Je ne


pourrai évidemment pas toutes vous nommer, mais merci d’être qui
vous êtes, d’avoir cheminé avec moi, d’être aussi inspirantes. Surtout,
merci d’avoir compris l’importance du Girl Power. Vous êtes formi-
dables!

Mon équipe qui m’encourage  : Alexandra, Marie-Pierre,


Sophie, Étienne et Robin.

357
David. Pour toutes les leçons des dernières années. Et pour
m'avoir permis de redécouvrir ce que je ne pensais plus possible :
l'amour. Je t'en souhaite tout autant!

Aux Spice Girls, qui ont si souvent fait partie de mes récentes
aventures : Marie-Photo et Marie Mïo.

À Marie Make-up, ma sœur cosmique. Celle que j’ai trouvée


pour activer l’univers et me connecter profondément au vrai. Au beau.
À cette belle et douce folie que tu as amenée dans ma vie et dont je ne
me passerais plus.

À Gabrielle, pour tout au complet. Ta fidélité, tes plans d’in-


tervention, tes techniques que je vois venir cent ans d’avance pour
calmer mon anxiété. Pour ta présence dans la vie de mes enfants et
dans la mienne.

À tous mes Maëstros de ma vie d’avant  : vous avez façonné


celle que je suis devenue et je vous en serai toujours entièrement
reconnaissante.

Mes « vieilles amies » qui sont là depuis les tout débuts. Qui
ont tout vu. Le cheminement, la transformation. Qui ont souvent eu
des points d’interrogation dans les yeux, mais qui m’ont fait confiance.
Qui ont su m’écouter même quand je ne réussissais pas à verbaliser
et qui ont fait partie des premières chorégraphies : Amélie Vallières,
Josiane Granger, Karen Trépanier, Jessica Côté, Josiane Milette et Cin-
dy Pronovost. Merci de m’aimer comme je suis.

Mes petits frères, Pier-Rick et Alexis, qui ont été mes premiers
cobayes.

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À Lucie et Marc. Merci d'avoir crée une humaine qui continue d'être
présente dans nos vies du haut de son nuage. Tout ça est en grande
partie grâce à elle.

Papi et Maminette Paillettes. On n’a pas toujours la même


vision sur tout, mais merci de m’avoir laissé la liberté d’être qui je
suis. Merci d’être toujours là dans les bons comme les mauvais mo-
ments. D’avoir compris que mon trouble d’opposition allait me mener
loin, au fond. De m’avoir inscrite à des cours de piano qui ont aidé
grandement à réaliser bien des rêves. D’être de grands-parents aussi
formidables que présents pour mes cocos et d’être une inspiration
quotidienne. Quand je serai grande, je serai comme vous. Merci, Papa,
pour ton côté « groundé » mais sans limites à la fois. Merci, Maman,
pour ton extravagance et ton exubérance, qui te rendent en même
temps si attachante.

Merci, mon beau Jérémy. Je suis si fière de l’adulte que tu


deviens. Je n’ai pas toujours été parfaite, mais sache que je t’ai tou-
jours aimé très fort. Until the end.

Finalement, merci à Georges-Édouard, à Emma-Rose et à


Victor. Peut-être lirez-vous ce livre dans quelques années. Vous dé-
couvrirez sans doute votre maman sous un nouveau jour, mais j’es-
père que vous comprendrez que tout ce que j’ai fait a toujours eu
et aura toujours une raison, celle de vouloir le meilleur pour vous.
Merci d’avoir fait de moi une meilleure humaine dès l’instant où j’ai
su que vous vous cachiez dans mon ventre. Je suis privilégiée d’être
votre mère.

359
Ne laisse rie
n,
ni personne
t'empêcher d
e
briller!

© Photo : Maryline Tremblay

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