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Numéro 152 - Mars 2007 - 16 € - ISSN 0016.

7916 - Trimestriel

Géologues n°152 (01 • mars 2007)


REVUE OFFICIELLE DE L’UNION FRANÇAISE DES GÉOLOGUES

REVUE OFFICIELLE DE L’UNION FRANÇAISE des GÉOLOGUES

Spécial géologie minière


Résultats du concours photos de l’UFG

Volcan au milieu d’un salar (cliché Christian Vallier).


1) La « Côte oubliée » est la seule partie du pourtour de la Grande Terre en Nouvelle-
Calédonie sans route ni habitations. Les mouvements tectoniques et eustatiques y favo-
risent le développement d’un platier récifal bordant les massifs péridotitiques. Des
formes tout à fait inhabituelles de coraux s’y présentent comme ceux photographiés ici.
Photo : Clément Schmitt.

Volcanisme récent sur roches du socle en Arabie Saoudite (cliché Gérard Sustrac).

2) Dépression éolienne par déflection du vent ; surface du rocher éolisé. Tagrera - Sud
algérien.
Photo : Georges Boutes.

3) Lors de la phase orogénique éocène,dans la partie nord-est de la Nouvelle-Calédonie,


les terrains turbiditiques volcanosédimentaires ont été charriés dans une zone de
subduction puis exhumés pour former les plus hautes montagnes du territoire (1 600 m
d’altitude). Cette région reste l’une des plus reculée et inexplorée, uniquement acces-
Mineurs d’or locaux utilisant le vent pour séparer l’or du stérile (cliché Noël White). sible le long des cours d’eau (creeks). Région de Poindimié - Nouvelle-Calédonie.
Photo : Clément Schmitt.

Mineur local extrayant de l’or au Burkina Faso


(cliché Noël White). 4) La ligne sismique est superposée à un bateau de survie (supply boat) de la Mer du Nord
et à une tête de puits prise sur un forage du piémont pyrénéen dans les années 1980.
Photomontage. Photo : Claude Bacchiana.

Camion 4x4 enlisé lors du passage d’une rivière à gué 5) Tunnel de lave dégagé par l’érosion. Dimmuborgir, Myvatn – Islande.
(cliché Gérard Delorme). Photo : Georges Boutes.
Éditorial
Gérard Sustrac, Vice-Président et Rédacteur en chef de Géologues

e numéro de “Géologues” consacré à la

C géologie minière et aux géologues miniers


(economic geologists diraient les anglo-saxons)
voit enfin le jour et cela réjouira notre ami Michel
Rabinovitch qui a longtemps milité pour sa paru-
tion. Dès le départ, nous avions souhaité que ce
numéro, tout en faisant état de problèmes généraux
relevant de l’économie minière,de la réglementation,
de la formation, de la métallogénie et de la question
de la substitution et du recyclage, fasse la part
belle aux témoignages de professionnels, jeunes et
moins jeunes, dans le but de souligner différentes
facettes des métiers concernés. On pourra toujours dire que le panorama des
Géologues témoignages n’est pas suffisant,mais il convient d’insister à la fois sur les constantes
et la diversité d’éclairages qu’il apporte au travers d’expériences personnelles
directeur de publication : variées. Sur ce point, nous tenons d’abord à remercier nos correspondants anglo-
Jean-Paul TISOT phones Noel White,Vanessa Lickfold, Paulo Ferraz, Nelson Pacheco, Gerry Stanley
rédacteur en chef : et Mark Holstock qui ont bien voulu apporter leur pierre à ce numéro. Nos remer-
Gérard SUSTRAC ciements vont aussi bien évidemment à nos collègues français ou francophones
comité de rédaction : qui, chacun avec leur sensibilité et leur expérience propre ont contribué à la
Moulay ATTAIAA construction de ce numéro. Tous, à leur façon, ont témoigné des métiers de
Christian BOISSAVY l’exploration et de l’exploitation minières.
Michel BORNUAT Nous souhaitions aussi dans ce numéro présenter le volet de la formation. Dans
Alain LAUMONDAIS ce domaine, on voit bien à quel point la situations de la formation et de l’emploi
Marie-Chantal MAUGENEST diffère entre un pays comme le nôtre et des pays « neufs » comme le Canada,
Daniel NORMAND
actuellement en plein boom minier. On peut ici souligner le partenariat original
Michel RABINOVITCH
entre les universités d’Orléans et du Québec à Montréal, partenariat qui fait
Véronique TOURNIS
aussi l’objet d’une présentation dans ce numéro.
Michel VILLEY
mise en page et couverture : Dernier grand volet pris en compte, la métallogénie, la connaissance des gîtes
COM’IN - 45000 ORLEANS minéraux. Des réponses sont apportées aux questions que l’on peut soulever
quant aux découvertes des dernières décennies et aux problèmes à résoudre pour
dessins humoristiques :
Vivien de FERAUDY l’avenir. Ces réponses proviennent d’articles généraux consacrés au sujet et de
points de vue plus spécialisés portant sur des types de gisements (or, platinoïdes,
Géologues est la revue officielle de
uranium). La métallogénie a évolué à la fois vers le très petit et vers le grand
l’Union Française des Géologues.
objet géologique ou le grand processus, et cela apparaît clairement dans les
Association loi de 1901, fondée en 1965
et reconnue d’utilité publique par décret présentations.
du 11 décembre 1972. Une fois de plus, la matière rassemblée pour ce numéro dépasse son volume, ce
siège social : qui nous conduit à consacrer une large part du numéro suivant (n°153) aux autres
77, rue Claude Bernard - 75005 PARIS thèmes prévus : les techniques liées à l’exploration et à l’exploitation minières, le
Téléphone : 01 47 07 91 95 traitement des minerais (traitements physiques et biotechnologies), la diffusion
Télécopie : 01 47 07 91 93 des connaissances au travers des deux grands périodiques que sont Economic
E mail : ufg@wanadoo.fr Geology et Mineralium Deposita, ainsi que les textes écrits sur la filière
http://www.ufg.asso.fr professionnelle et les fiches métiers correspondantes. Le solde du numéro 153
Imprimé en France par sera consacré à l’après-mine, un thème qui témoigne certes plus du passé que
IMPRIMERIE NOUVELLE de l’aventure de l’exploration, mais qui conduit à des expertises spécifiques et à
45800 SAINT-JEAN-DE-BRAYE de nombreux travaux, et qui combine à la fois les questions de mise en sécurité
Commission paritaire et de surveillance, de réaménagement et de respect de l’environnement, ainsi
CPPAP n°0110G82626 que de valorisation du patrimoine. 1
Tirage : 1400 exemplaires
Dépôt légal:décembre 2006 n° 421141 J Photo de couverture : vue du ciel ouvert de Sishen (cliché Kumba Iron Ore).

Géologues n°152
Membres bienfaiteurs - année 2007
annonceurs adreg
Maison de la Géologie - 77, rue Claude Bernard - 75005 Paris
Tél. : 01 64 47 19 51 • Fax : 01 64 47 19 51 • adreg@wanadoo.fr
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Insertions publicitaires, année 2007

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21x29,7 cm. Spécifications techniques:impression offset,quadri, trame 150 et épreu-
ve couleur type cromalin. Si les fichiers numériques sont fournis, les films et le Cro-
malin peuvent être réalisés par nos soins. Logiciel de mise en page: Xpress; fichiers
imports au format eps; photos: définition 300 dpi.
Pour les insertions noir et blanc, les fichiers numériques sont fournis par l’an-
nonceur, les fichiers des images incorporées étant fournis séparement.

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4ème de couverture quadrichromie 1220 € ht
2ème et 3ème de couverture quadrichromie 915 € ht
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Demi-page noir et blanc (18 x 12 ou 24 x 8 cm)305 € ht Films en quadrichromie à nous fournir
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Géologues n°152
4 repères d’économie minière 63 les géologues miniers
racontent
Économie mondiale et ressources minérales ............................................4
Véronique Tournis et Michel Rabinovitch Irlande : Activité actuelle dans la mine métallique .............................. 63
Gerry Stanley et Dr. Mark Holdstock
Matériaux du futur : l’enjeu du développement durable .................... 10
Jean-Claude Prevot Du salarié au consultant :
une évolution de carrière en exploration ................................................ 67
Noel White
18 années de recherche minière au Gabon .............................................. 76

14 réglementation
et formation
Gérard Delorme
Un exemple de parcours par étapes :
témoignage de Dennis Lahondès .............................................................. 89
Principes de législation minière .................................................................. 14 La Rédaction
Véronique Tournis et Michel Rabinovitch La géologie appliquée à l’économie .......................................................... 90
Master professionnel Exploration et Michel Champagne
Gestion des Ressources Minérales (EGERM) : Un témoignage d’exploration minière au Portugal .............................. 91
un essai de bilan après 6 ans d’existence ................................................ 25 Paulo José de Vitor Ferraz
Éric Marcoux
Une carrière de géologue minier à la SOMINCOR (Portugal) ............ 94
Option d’approfondissement « Génie et gestion des Nelson Bruno Monteiro Ferreira Pacheco
matières premières minérales » .................................................................. 27
Travailler en Afrique du Sud, l’exemple de
Alain Cheilletz
Kumba Iron Ore (KIO) .................................................................................... 96
Le Master 2 (P) « Sciences de la Terre, de l’univers et Vanessa Lickfold
de l’environnement », spécialité Géosciences : exploration,
risques, de l’université de Grenoble 1 (Joseph Fourier) ........................ 29 Géologue dans le domaine minier :
un exemple de parcours .............................................................................. 100
Fabrice Cotton
Monique Le Guen
Centre d’études supérieures des matières premières (CESMAT) ...... 30
De l’exploration minière au métier des granulats :
La Rédaction un parcours spécifique ................................................................................ 101
Centre d’enseignement supérieur en exploration La Rédaction
et valorisation des ressources minérales (CESEV) .................................. 32
Un exemple de diagnostic régional : gestion durable de l’activité
Jean-Claude Samama minière, développement touristique et préservation des
La situation de l’emploi dans le secteur de la géologie milieux naturels dans le Nord-Ouest Argentin .................................... 103
minière au Québec .......................................................................................... 33 Christian Vallier
Michel Jébrak

35 connaissance des
gîtes minéraux
106 rubriques
Notes de lecture ............................................................................................ 106
Les grands problèmes de la métallogénie :
quelles perspectives pour le futur ? ............................................................ 35
Michel Jébrak et Éric Marcoux
Nouvelles approches analytiques, expérimentales et
numériques appliquées à la compréhension de la
genèse des concentrations métalliques .................................................. 38
Michel Cathelineau
La métallogénie de l’or : évolution des modèles et
cibles prioritaires de la recherche au fil des années .............................. 40
Vincent Bouchot et Jean-Pierre Milesi
Les gisements de platinoïdes :
une situation mondiale exceptionnelle .................................................. 49
Thierry Augé
Évolution récente des recherches sur
la métallogenèse de l’uranium .................................................................... 52
Michel Cuney
3

Géologues n°152
repères d’économie minière

Économie mondiale et ressources minérales


Véronique Tournis et Michel Rabinovitch.

Introduction l’ouverture d’une nouvelle mine ; elles étaient le plus sou-


vent « écrémées », c’est-à-dire que vu les cours bas de
Il n’y a pas si longtemps, et surtout en Europe, per- l’époque, seul le minerai riche a été extrait, appauvrissant
sonne n’aurait parié un grain de sable sur l’avenir de la d’autant la teneur moyenne du minerai. Pour ne citer
mine, métallique ou énergétique. Les cours des métaux qu’un exemple, à Largentière (Ardèche), le minerai pauvre
permettaient aux exploitations de survivre, sans plus, et stratiforme a été rapidement négligé, et seul le minerai
en France le ministère de l’Industrie avait déclaré que de failles, plus riche, a été exploité. La mesure était par-
toutes les mines du pays seraient fermées avant 2003. faitement justifiée à l’époque,sinon l’exploitation aurait été
Les investisseurs français et allemands n’ont eu aucun fermée. Mais, à présent, le seul minerai pauvre subsiste.
mal à se convaincre de placer leurs capitaux dans des
La gîtologie française, tout à fait en pointe il y a une
ailleurs à deux chiffres de bénéfice annuel plutôt que
trentaine d’années, avec des hommes de vision tels que
dans une industrie qui était devenue problématique depuis
François Fogliérini, André Bernard et Pierre Routhier, ne
les années 80.
survit que grâce à des relations étroites avec le Québec.
Ainsi la France est devenue « nettoyée de mines », Aujourd’hui, en France, le déficit en compétences condui-
si l’on ose dire, et totalement impuissante à contrôler à la rait à faire appel à des géologues miniers étrangers,
fois son approvisionnement et le coût de ce dernier, à voire à des retraités.
deux exceptions près, le nickel (pour combien de temps ?)
Pendant ce temps-là les cours des métaux montent
et l’uranium, grâce à la politique de centrales nucléaires
et, c’est un réflexe universel, la prospection reprend. On
mise en œuvre par le président de Gaulle.
peut penser que les sites les plus évidents seront concé-
Et tout à coup, divine surprise ! C’est l’embellie, et dés à brève échéance, si ce n’est déjà fait. Pour le reste, il
quelle embellie, sur toutes les matières premières, et par- faudra faire preuve d’ingéniosité et de savoir-faire.
ticulièrement les métaux ! Soudain, on verra pourquoi
plus loin, la demande sur presque tous les métaux devient
pressante ; ils deviennent rares, et ce qui est rare est cher. Le déséquilibre entre l’offre et
Le tableau 1 présente l’évolution des cours des métaux la demande ; l’observation de la
les plus courants (Fortis Metals Monthly, January 2006 et croissance mondiale
London Metal Exchange, LME, pour les deux dernières
colonnes). « Quand la Chine s’éveillera », répétait-on depuis les
années 70, sans trop y croire. Lentement, la demande en
Voilà une situation idéale pour l’ouverture de nou-
ressources naturelles a grimpé depuis 1970, et tout à coup,
velles mines, dans des conditions infiniment meilleures que
vers l’année 2000, elle a pris son envol. La consommation
celles qui prévalaient avant la fermeture des mines françaises.
d’acier était de 50 millions de tonnes en 1960. Elle atteint
On pourrait penser qu’il n’y a qu’à rouvrir celles-ci progressivement 180 millions de tonnes en 2000, puis
ou en découvrir de nouvelles pour gagner le gros lot. Ce bondit en trois ans à plus de 250 millions de tonnes. La
n’est pas si simple. Les mines fermées sont à réaména- demande en produits fabriqués est plus explosive enco-
ger, ce qui est souvent au moins aussi coûteux que re : 4 millions de téléphones cellulaires en 1960, 85 millions

Métal 2001 2002 2003 2004 2005 16/11/2006 21/12/2006


Plomb 483 462 517 852 942 1469 1648
Zinc 904 797 844 1065 1390 4149 4279
Cuivre 1597 1577 1789 2795 3503 6761 6430
Etain 4521 4095 4908 8367 7350 9625 11150
Nickel 5869 6767 9615 13772 14582 29900 34695
Aluminium 1454 1364 1429 1723 1900 2230 2779
4 Tableau 1. Prix en dollars (courants) par tonne, achat au comptant, moyennes annuelles (2001 – 2005).

Géologues n°152
repères d’économie minière

en 2000 et 269 millions en 2003 ; 70 millions de télévisions s’est déjà traduite par un déstockage du métal sous contrô-
en 1985 et 374 millions en 2000 ; 1 million d’ordinateurs le du London Metal Exchange (LME)1. Les chiffres du tableau
personnels en 1990 et 36 millions en 2002 ; 5,3 millions de 3 ci-dessous sont extraits de la Fortis Metals Monthly,
voitures personnelles en 1990 et 24 millions en 2003… Jan. 2006, excepté la dernière colonne (données LME).
En réalité, tous ces chiffres sont insignifiants si l’on On voit combien les stocks du LME, qui sont censés
considère l’énorme population chinoise,environ 1,3 milliard refléter la situation des stocks métalliques mondiaux,
d’habitants. Les Chinois ambitionnent un mode de vie sont bas, particulièrement en ce qui concerne le plomb, le
comparable au nôtre. Et c’est là que le bât blesse. Un seul zinc, et surtout le nickel.
exemple : si 3 Chinois sur 4 possédaient une voiture, ce qui On se trouve pourtant dans des situations proches
est la proportion aux États-Unis, la production actuelle de l’utilisation maximale des capacités de production.
de pétrole n’arriverait plus à satisfaire aux besoins mon- L’ouverture de nouvelles mines ou la réouverture de mines
diaux et celle de l’acier et autres métaux devrait être aug- fermées ou le développement de nouvelles capacités de
mentée dans des proportions impossibles à réaliser à production (concentrateurs, fonderies) et de transport
court ou moyen terme. Et l’Inde, avec son milliard d’habi- prennent plusieurs années. Par conséquent, tout laisse
tants, n’est pas prise en compte dans cette perspective. Il à prévoir que les stocks vont encore baisser.
faut donc conclure sur un terrible dilemme : ou les Chinois
Tout ceci conduit à l’entrée en jeu d’un nouveau
et les Indiens doivent abandonner toute ambition de vivre
facteur la spéculation.
à l’occidentale, ou les Occidentaux doivent restreindre
leur mode de vie. C’est donc l’impasse à plus ou moins Un certain nombre de fonds d’investissement
long terme si une politique mondiale de « développe- spéculent sur les cours des métaux cotés au LME, place
ment durable » n’est pas instaurée, de préférence par la mondiale de référence pour la négociation des ressources
négociation, avant qu’elle ne soit imposée par les cir- minérales métalliques. Stocks du LME, production mon-
constances avec tous les dangers que l’on peut supposer. diale et variations du cours du dollar vont agir sur les
cours, dont la hausse stimule elle-même la spéculation
Les chiffres de la consommation des métaux par-
en retour, enclenchant ainsi une spirale vers le haut qui ne
lent d’eux même dans le tableau 2 ci-dessous.
s’arrêtera vraisemblablement que lorsque l’exploitation de
L’érosion des stocks, plus encore que la conséquen- nouvelles mines aura permis d’atteindre un niveau de
ce de l’augmentation de la demande, montre l’absence de surproduction. Il semble que ce ne soit pas pour demain.
reprise qui permettrait leur reconstitution ; c’est pour les
Cette situation constatée est aussi héritée d’une
financiers l’indicateur de la persistance de l’envolée des
longue période de déficit des investissements miniers.
cours.
L’irrégularité des investissements et l’instabilité
L’augmentation de la consommation des métaux
du prix semblent liées, les périodes de prix déprimés

Métal (kt) 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2005 2006
( janv.-nov.) ( janv.-nov)
a a a s s s s sp s s
Cuivre 13 389 13710 14 160 14 902,8 15 156,8 15 664,2 16 769,6 16 626,7 13 889,2 14 239,7
(raffinage)
Zinc 7 895 8 190 8 450 8 640 9 377 9 843 10 646 10 624 9 709 10 154
Plomb 6 041 6 209 6 364 6 500 6 649 6 848 7 283 7 750 7 088 7 353

Tableau 2. Exemples de l’évolution de la consommation mondiale, pour le zinc, le cuivre et le plomb. Sources : a : ABARE forecast ; s : International Lead and
Zinc Study Group et International Copper Study Group ; sp : préliminaire.

Métal Fin 2001 Fin 2002 Fin 2003 Fin 2004 Fin 2005 Fin 2006
Plomb 97 000 184 000 110 000 41 000 44 000 42 000
Zinc 433 000 651 000 740 000 629 000 394 000 89 000
Cuivre 799 000 856 000 433 000 49 000 90 000 178 000
Aluminium 819 000 1 240 000 1 420 000 695 000 645 000 693 000
Nickel 19 000 22 000 24 000 21 000 36 000 7 300
Étain 27 000 26 000 14 000 7 700 17 000 13 000

Tableau 3. Stocks du LME de fin 2001 à fin 2006 ; les chiffres sont en tonnes. 5

1. Le LME est une Bourse des métaux située à Londres qui indique au jour le jour les stocks de 6 métaux (Pb, Zn, Cu, Ni, Sn, Al) et de 2 alliages d’aluminium
et fixe leurs prix en fonction de l’offre et de la demande. Les demandes d’achat et de vente passant par le LME bénéficient de garanties de prix (sur la
journée, le mois, les 3 mois) et de livraison. Tous les contrats sont libellés en dollars.

Géologues n°152
repères d’économie minière

freinant les investissements. On assiste à des fluctuations


de grande ampleur curieusement parallèles à celles des
dépenses d’exploration, comme le montrent les tableaux
4 et 5.

Les réactions de l’industrie minérale


L’état actuel de pénurie des métaux et de cours
élevés a permis, on l’a vu, la réouverture de nombreuses
mines métalliques naguère non rentables, ainsi que
l’ouverture de mines déjà connues et évaluées mais non
exploitées.
Cela ne suffit pas. Le temps de réaction de l’in-
dustrie minière, de par sa nature même, est long. La mise
en exploitation de gisements connus et évalués deman-
de de 2 à 3 ans au minimum. La découverte de gisements
non repérés est beaucoup plus longue. Normalement, les Tableaux 4 et 5. Corrélations entre les dépenses d’exploration et le prix des
sociétés minières exploitantes possèdent en portefeuille métaux (Cu, Zn, Au). Source : Metals Economics Group.
des projets plus ou moins avancés, depuis la simple pos-
sociétés minières à investir dans l’exploration. Elles étaient
sibilité géologique sur laquelle des permis d’exploration
d’autant plus à l’aise pour le faire que leur trésorerie avait
ont été déposés, jusqu’à l’indice ayant fait l’objet de
été très améliorée par les nouvelles ressources dont elles
quelques sondages. Selon le degré d’exploration et la com-
disposaient. Le tableau 6, publié par le Metals Economics
plexité du gisement, l’ouverture d’une exploitation deman-
Group canadien, montre bien l’énorme déficit en explo-
dera de 5 à 10 ans. Il va de soi que plusieurs projets seront
ration minière entre 1998 et 2002 et l’explosion des bud-
étudiés en même temps par une société donnée pour évi-
gets à laquelle on assiste actuellement : pour 2006, 7,3
ter un échec qui la laisserait dans une position difficile.
milliards de dollars, en hausse de 47% par rapport à 2005
et de 300% par rapport à 2002, année où les investisse-
Les investissements dans l’exploration minière
ments ont été les plus bas.
Ils sont donnés dans le tableau 6 ci-dessous. L’investissement de l’année 2006 se partage de la
La montée des cours des métaux a poussé les façon suivante :

Années Estimation globale des budgets Variation par rapport à l’année Variation par rapport à l’année
(en milliards de $) précédente (en %) précédente (en millions de $)
2006 7,3 + 47 + 2200
2005 5,1 + 34 + 1300
2004 3,8 + 58 + 1400
2003 2,4 + 26 + 500
2002 1,9 - 14 - 300
2001 2,2 - 15 - 400
2000 2,6 -7 - 200
1999 2,8 - 24 - 900
1998 3,7 - 29 - 1500
1997 5,2 + 13 + 600
1996 4,6 + 31 + 1100
1995 3,5 + 21 + 600
1994 2,9 + 16 + 400
1993 2,5 + 14 + 300
1992 2,2 -4 - 100
1991 2,3
6 Tableau 6. Estimation des budgets globaux d’exploration année par année, pour les métaux non ferreux (1991 – 2006) (Source : Metals Economics Group).

Géologues n°152
repères d’économie minière

Amérique latine : 24% américaine 3ème producteur mondial de cuivre, fait une
Canada : 19% offre de rachat à Inco, mais échoue face à CRVD (Com-
panhia Vale do Rio Doce, brésilienne, 1er exportateur de fer,
Afrique : 16%
producteur de Al, Mn, etc.). C’est cette dernière société qui
Australie : 11% va l’emporter, en obtenant 86,5% des actions de Inco.
États-Unis : 8% En conclusion, à l’heure actuelle l’essentiel du
Asie et SE Pacifique : 4% nickel dans le monde est sous le contrôle de 5 sociétés
Reste du monde : 18% seulement :
À l’exploration minière grass-roots2 ont été consa- Xstrata – Falconbridge ;
crés 39% des investissements ; au développement, 43%, et CRVD – Inco ;
à la mine proprement dite, 18% (mise en exploitation, Norilsk (groupe russe) ;
amélioration, expansion de la capacité, etc.). Les dépenses
Eramet (groupe français) ;
pour le développement ont dépassé celles de l’explora-
tion d’une part parce qu’il est plus coûteux, d’autre part BHP – Billiton (groupe anglais).
parce que les explorations antérieures ont porté leurs Le même type d’opérations est en cours pour
fruits et qu’il a fallu les développer. d’autres métaux, et surtout pour les métaux de base. Mais
Par cible métallique, les investissements dans l’ex- le nombre d’exploitants reste important, et la concentra-
ploration sont réparties ainsi : tion ne pourra se faire aussi rapidement.
or, longtemps favori des sociétés minières, 47% ;
L’impact régulateur des substitutions et du
métaux de base (Pb, Zn, Cu) : 29% ;
recyclage
diamant : 13% ;
platinoïdes : 4% ; Substitution
autres métaux : 7% La hausse des prix crée dans certaines filières,
lorsque cela est techniquement possible, des phénomènes
La concentration capitalistique de substitution.
La flambée subite et apparemment durable des cours (...) L’approvisionnement en matières premières
des métaux n’a pas été sans exciter les appétits des très minérales réputé épuisable devrait atteindre ses limites
grosses sociétés minières,avec pour effet une concentration physiques, mais aussi commerciales par une baisse de la
capitalistique qui menace de placer à terme la totalité des consommation due, entre autres à des législations
ressources de la Terre sous la coupe de quelques sociétés. environnementales et sanitaires plus sévères et une part
Ce mouvement a commencé il y a déjà plusieurs accrue du recyclage. (Blamont Jacques, 2004, Introduction
années, mais il semble se précipiter à partir de 2001 avec au siècle des menaces, Odile Jacob, Paris).
la fusion BHP – Billiton, essentiellement producteurs de En manière d’exemple, on peut citer le cas de l’au-
métaux de base. En 2005, BHP – Billiton absorbe avec tomobile : en 20 ans le poids du fer dans une voiture a
WMC (Western Mining Corp.) l’essentiel du nickel aus- décru d’un facteur 3, avec l’utilisation plus ou moins impor-
tralien, et le nouveau groupe prend la troisième place tante de matières plastiques. L’utilisation de céramiques
mondiale pour ce métal. pour les moteurs, tout à fait possible, n’est pas encore
Fin 2005 commencent les grandes manœuvres pour entrée en usage.
le contrôle du nickel. Inco et Falconbridge (Ni-Cu canadien) Pour certains auteurs, c’est une forte dépendance
projettent de fusionner, ce qui les propulserait au premier aux « petits métaux » qui se dessine , à moins que n’émer-
rang pour l’exploitation du nickel dans le monde. Mais les ge un substitut valable : c’est le cas pour le platine (piles
concurrents ne l’entendent pas de cette oreille.Teck Comin- à combustible), le titane et le molybdène (aéronautique
co (canadien n°1 du zinc) ouvre les hostilités en tentant et automobile), le gallium (diodes à lumière blanche), le
d’absorber Inco, également convoité par Xstrata (société germanium (internet mobile WI-FI), le rhénium (turbines),
anglo-suisse diversifiée : charbon, Cu, Zn, Cr,V, etc.). Ni l’un l‘indium, le sélénium, le cobalt (écrans LCD), le palladium
ni l’autre n’y parviennent, et Xstrata se tourne vers (catalyse) et le tantale (portable 3G).
Falconbridge, dont il obtient, en août 2006, la presque Le développement d‘une filière de recyclage est
totalité des actions. À son tour, Phelps-Dodge, société une façon de restreindre cette menace. 7

2. Grass-roots : Littéralement, à la racine de l’herbe. Se dit d’un projet dans lequel aucun travail préalable n’a été effectué, autre qu’une reconnaissance
géologique à larges mailles.

Géologues n°152
repères d’économie minière

Recyclage publications ne sont pas d’une grande fiabilité, en


particulier lorsqu’il s’agit de la production minière
Les matières premières secondaires constituent
chinoise. À titre d’exemple, on trouvera dans le tableau 7,
l’approvisionnement de l’industrie du recyclage des
ci-dessous quelques chiffres sur l’année 2004 (sauf
métaux en Europe pour produire du métal de qualité
indication contraire).
équivalente à celui obtenu à partir de minerais. Pour
certains métaux, des taux élevés de recyclage sont déjà Bien que ne disposant pas de chiffres précis sur la
atteints. La part des ressources secondaires dans le total production minière chinoise, on voit que la Chine a un
de l’alimentation de la production métallique en Europe véritable monopole sur les terres rares et un quasi-
est de l’ordre de 80% pour le plomb, supérieure à 50% monopole sur l’antimoine et le tungstène. Par contre, son
pour l’argent et le cuivre, et de 35 % à 50 % pour le fer, déficit en ce qui concerne la production minière est
l’aluminium, et le zinc. très important pour le nickel. Des tentatives sont faites
actuellement pour exploiter des latérites nickélifères
Les grandes quantités de métaux courants immo-
pauvres (traitement par lixiviation acide sous pression). La
bilisés dans les bâtiments, les infrastructures et les
situation est presque aussi tendue en ce qui concerne le
marchandises à faible taux de remplacement, peuvent
cuivre. L’exploitation de porphyres cuprifères tibétains est
être vues comme de futures sources de métal (c’est-à-
tentée, et la Chine prend des intérêts dans les mines afri-
dire : véhicules, équipement électrique et électronique,
caines. Elle ne satisfait que 38% de ses besoins en plomb
machines). La récupération de métaux rares (utilisés
et 73% de ses besoins en zinc. Par contre, on a la surprise
par exemple dans l’électronique) ne pose pas de réels
de la trouver au 4ème rang des exploitants d’or, devant la
problèmes. Ils sont souvent récupérés sous prétexte de
Russie, avec une production qui se rapproche de celle de
lutte contre la pollution par les utilisateurs eux-mêmes.
l’Afrique du Sud.
Il faut noter l’enjeu spécifique des métaux « high
La demande chinoise en métaux de base et en
tech » qui présentent un risque de crise découlant d’une
nickel ne semble pas prête à retomber, si bien que les
demande « explosive » suite à une nouvelle application (cas
cours de ces métaux paraissent pouvoir se maintenir à
du rhodium et du palladium utilisés dans les pots cataly-
un niveau élevé.
tiques) ou à un marché en forte croissance (cas des tech-
nologies de l’information et de la communication, TIC :
forte demande de métaux comme le tantale dans les Conclusions
condensateurs, le gallium et le germanium dans les com- L’apparition, pourtant prévisible, sur la scène inter-
posants électroniques haute fréquence, ou l’indium dans nationale d’un très grand pays comme la Chine (on ne
les écrans plats LCD, dont le prix est passé de 70 à 700 parlera pas de l’Inde, qui se manifestera un jour ou l’autre),
USD/kg en un an). a suffi à déséquilibrer une économie minière vivant tant
bien que mal son petit train-train, avec des cours sur les
Le rôle de l’industrie minière métaux qui contraignaient les sociétés exploitantes à
chinoise fermer les gisements aux teneurs trop basses. À cette
époque, l’ouverture d’une mine importante, la fermeture
Comme il a été dit plus haut, la Chine, avec ses
d’une fonderie, suffisaient pour influer sur les prix de
taux de croissance parmi les plus élevés au monde, fait la
manière à mettre en péril les exploitations trop proches
pluie et le beau temps sur le marché des métaux. Son PIB
de la marge d’exploitabilité, et rares sont celles qui
augmente en effet de 8 à 10% par an, et la consommation
pouvaient réaliser des bénéfices suffisants pour investir
intérieure suit évidemment.
de manière significative dans l’exploration minière autre
La Chine elle-même est un producteur minier assez que celle de l’or et des diamants.
conséquent, avec un pays relativement riche de possibili-
Tout cela est révolu. Bien entendu, la prudence
tés insuffisamment développées, mais qui de toutes
demande de ne pas considérer les prix actuels pour défi-
manières ne réussiraient pas à satisfaire la boulimie
nitivement acquis, mais même s’ils chutaient de 50%, les
chinoise. Le métal produit, exporté ou utilisé sur place,
seuils d’exploitabilité se trouveraient considérablement
provient en partie de minerais locaux, mais la part de
relevés, permettant l’ouverture de gisements naguère
minerais ou de concentrés importés est importante. La
inexploitables et accroissant les réserves des mines en
Chine réexporte par ailleurs certains métaux élaborés
activité. On l’a dit, une augmentation sensible de la
à partir de ces importations.
8 production minière prendra du temps, mais il n’y a guère
Les chiffres que l’on peut consulter dans les diverses

Géologues n°152
repères d’économie minière

d’éléments qui pourraient permettre d’entrevoir une vrai, les aciéries américaines Martin Marietta passaient
baisse aussi soudaine et dramatique que l’a été la sous contrôle d’Eramet. Comprenne qui pourra. Et ceci au
montée des cours, sauf l’imprévisible : catastrophes moment où le cours de ces deux métaux était en pleine
naturelles, guerre civile, etc., et on ne construit pas un hausse. C’était excellent pour réaliser un bénéfice momen-
avenir sur l’imprévisible. tané, désastreux pour l’avenir. Le nickel d’Eramet l’a
On a vu que, sagement, les sociétés minières momentanément échappé belle, mais résistera-t-il à la
réactivaient l’exploration, si négligée ces dernières années. pression économique des deux énormes groupes que
L’or a encore une part trop grande dans cette exploration : sont CVRD-Inco et Xstrata-Falconbridge ? Pas de politique
il ne s’agit sans doute que des « queues » d’explorations minière en vue. On se repose sur l’Europe, oubliant que
entreprises depuis plusieurs années. L’exploration pour cette entité n’est guère plus qu’un ensemble de traités
le cuivre, le zinc et le nickel prendra le relais, avec des commerciaux. D’ailleurs, l’Europe a-t-elle une politique
possibilités accrues dans de nouvelles régions ou de minière ? Cela semble peu probable, car une telle
nouveaux types de gisements. politique aurait un parfum de dirigisme peu compatible
avec le néolibéralisme qui est sa pierre angulaire. Il est
Et en France ? En France, il ne se passe rien. Bien au
donc plus que probable que l’Europe soit encore en train
contraire. Les activités des aciéries sont passées sous
de laisser passer une occasion de montrer qu’elle existe.
contrôle non seulement étranger, mais extra-européen, et
de même pour l’aluminium. Dans le même temps, il est

Métal Production totale Production mines Consommation % Chine Chine :


métal (Mt sauf locales (en tonnes intérieure dans la rang
indication de métal contenu production mondial
contraire) sauf indication mondiale
contraire)
Al >8,8 6 Mt Al 23% 1
Cu 2,4 (2005) 3,5 Mt (24% 14% 2
consommation
mondiale)
Fe Acier brut : 340 26% (acier brut) 1
Fer brut : 300
Pb 1,58 613 000 (2003) 23% 2
Zn 2,3 1,69 Mt (2003) 2,6 Mt métal 23% 1
Sb 83 000 40 000 t ? 89% 1
Co 12 000 (2005) 9000 t
Au 224 t 170 8,9% 4
Ag 3 270 t 1 980 4
In 110 34% 1
Ni 2,36 inox et 80 000 147 000 t métal 5,8% 5
170 000 t Ni (2005)
Mg Environ 400 000 t 45% 1
Terres rares 73 000 t (2000) 97% 1
W 69 000 (2005) 83% 1
Sn 55 000 103 000 t métal 36% 1
(concentrés, 2003) (2005)
Tableau 7. Production chinoise de métaux (source Écomine).

Géologues n°152
repères d’économie minière

Matériaux du futur : l’enjeu du développement durable


Jean-Claude Prevot 1 .

Introduction : évolution de la société biaisée par la confusion entre ressources et réserves, le


rythme des découvertes de gisements a permis de soutenir
industrielle. l’idée de ressources sans limites.
La maîtrise du cycle de la matière ou des maté-
riaux par la réutilisation et le recyclage était une Les enjeux en termes de disponibilité des
caractéristique de l’ère pré-industrielle, dans la mesure ressources
où les matériaux étaient coûteux à fabriquer et le trans-
Dès son début, le XXIe siècle change considérable-
port difficile. Ce mode de civilisation était un mélange
ment la donne avec, d’une part, l’évolution du climat liée
d’autarcie et d’échanges limités aux besoins : matières
à un accroissement de l’effet de serre dû en majeure par-
non-présentes à proximité et non substituables. La notion
tie à l’activité industrielle, d’autre part une inquiétude sur
de coût relatif ou de dumping n’intervenait pas ou peu
la disponibilité des ressources fossiles non-renouvelables
dans les échanges. Le recyclage est le plus vieux métier
(énergies et substances minérales).
du monde : « on fondra les épées pour forger des socs de
charrue » (Isaïe). L’évolution critique de ces deux facteurs est sans
conteste à rapprocher du développement économique de
La société industrielle a apporté deux grandes
quatre puissances émergentes (les BRIC1), dont l’influen-
modifications :
ce se fait sentir depuis 2003 sur les cours et la disponibi-
l’intensification considérable des rythmes de fabrica- lité des matières premières et a généré le développement
tion de produits et la mondialisation des échanges ; d’un super-cycle des matières premières, notamment en
une approche consumériste des produits, rejetés en fin raison de la simultanéité des stades de développement
d’usage et faiblement réutilisés ou recyclés. économique habituellement successifs (Fig. 2).
Cette évolution a culminé et probablement atteint Ces évolutions, globalement corrélées à l’accrois-
ses limites avec la dernière mondialisation qui marque la sement de la population mondiale, sont encore aggra-
fin du 20ème siècle. Un chiffre : on estime la quantité de vées par des conflits d’usage des territoires alimentés par
déchets collectés dans le monde (hors construction et le NIMBY2 dont les conséquences sont généralement non
démolition, mines et agriculture) entre 2,5 et 4 Mds de mesurées mais qui, à terme, peut amener des blocages et
T/an, ce qui représente 2 à 3 fois la consommation annuel- des dysfonctionnements graves. Enfin, on note depuis
le mondiale de métaux. Siècle de la consommation sans peu que les États producteurs de matières premières et
limites, tout au moins dans les pays développés, le énergétiques « reprennent la main » sur ces secteurs, de
XXe siècle s’est terminé avec une vision irréaliste de la
disponibilité en matières premières de la planète : les
cours des principaux métaux ont globalement baissé
durant 50 ans en raison des gains de productivité
(Fig. 1) ; malgré l’alerte lancée par le Club de Rome en 1972,

Figure 2. Télescopage des stades de développement en Chine (C. Hocquard,


10 Figure 1. Évolution des cours des matières premières depuis 1970. 2004).

1. Directeur Agence Rhône-Alpes pour la Maîtrise des Matériaux (ARAMM).


www.agmat.asso.fr, avec la participation de Christian Hocquard, Expert Économie des matières premières - BRGM.
2 BRIC : Brésil, Russie, Inde, Chine.
3. NIMBY : Not In My BackYard : refus par les riverains d’implantation d’infrastructures.

Géologues n°152
repères d’économie minière

façon parfois brutale (Russie, Venezuela, Bolivie, etc.). d’accroître la qualité des matériaux recyclés en plus de
Ces mesures qui vont de la taxation des superprofits, de celui d’améliorer le taux de recyclage ; pour ce faire les
l’instauration ou augmentation des royalties, jusqu’aux problèmes de résiduels doivent être résolus ;
nationalisations annoncent-elles la fin de la mondialisa- la substitution et notamment l’utilisation de matériaux
tion effrénée ? issus de la biomasse animale ou végétale.
En réaction à tous ces facteurs de tensions se pro-
duit une montée en puissance : Dématérialisation
du recyclage, fondé sur l’exploitation des gisements Cette démarche consiste en particulier à favoriser
anthropiques (produits en fin de vie) ; les économies matières dans les produits ; cependant, elle
de l’utilisation de ressources renouvelables. présente le risque de disséminer des matières en très
faibles quantités dans des produits finis de plus en plus
Les tendances matériaux par marchés complexes et donc de moins en moins facilement recy-
clables, tout au moins avec les procédés traditionnels ; on
Malgré l’émergence des préoccupations environ-
constate de plus l’accroissement des problématiques de
nementales, notamment au niveau de la maîtrise des
résiduels susceptible de diminuer la qualité des matériaux
émissions de gaz à effet de serre (GES), et la recherche
recyclés. Sous ce terme,on entend les éléments ou matières
d’économies d’énergie, les marchés occidentaux matures
contenus dans des matières secondaires, non ou diffici-
restent caractérisés par quelques grandes tendances,
lement séparables, et dont la présence est une gêne pour
comme la personnalisation (« customisation ») des
les procédés de fabrication, de mise en œuvre, voire l’uti-
produits,la multi-fonctionnalité et la miniaturisation,d’une
lisation optimale de ces matières secondaires (exemple
part, la sécurité sanitaire et la traçabilité, d’autre part.
cuivre contenu dans les aciers incorporant des ferrailles
L’allègement est plus que jamais un enjeu majeur issues du broyage de véhicules hors d’usage, VHU).
pour le transport (même si les allègements réalisés
depuis 20 ans ont été largement compensés par une Recyclage
dérive massique liée à l’augmentation de taille et à l’ajout
de nouvelles fonctions sur les véhicules), de même que La première notion difficile à définir est celle de
les énergies alternatives basées sur l’hydrogène (un déchet, en particulier la limite entre le déchet et la matiè-
vecteur et non une énergie sensu stricto) ou les carbu- re secondaire ou valorisable. Le devenir des déchets varie
rants renouvelables. depuis l’abandon sauvage, l’enfouissement en centres
spécialisés (CET4) plus ou moins évolués, l’incinération
Une grande question se pose : quelle sera la part des
avec ou sans récupération d’énergie, la réutilisation,
énergies alternatives ou des matières premières de sub-
l’exportation (et ce, en dépit des accords de Bâle), et le
stitution ou issues du recyclage dans les sociétés du XXIe
recyclage matière. Les déchets proviennent de plusieurs
siècle ? L’Europe en général, la France en particulier, très
grandes sources : ils sont soit générés durant l’élabora-
dépendantes des importations minérales et énergétiques
tion des produits (déchets industriels banaux ou DIB et
pourront-elles maintenir leur niveau de vie ou devront-elles
spéciaux ou DIS), soit issus de la consommation (produits
modifier considérablement leur comportement consu-
en fin de vie).
mériste ?
La problématique du recyclage est actuellement
posée comme un problème de déchets dont il faut se
Les pistes de solutions débarrasser en les valorisant du mieux possible, tant du
Face aux perspectives dramatiques du XXIe siècle point de vue environnemental que du point de vue
pour les énergies et matières premières, et pour satisfai- économique5 (Tabl. 1).
re les besoins d’une société fondée sur la croissance de la
consommation, notamment dans lespays émergents, les Matières premières secondaires (MPS) :
développements matériaux sont appelés à suivre trois inverser le paradigme !
voies sein d’une démarche globale d’éco-conception :
Une nouvelle approche est nécessaire dans
la dématérialisation : favoriser les économies matières laquelle un parallèle doit être établi avec l’approche du
dans les produits ; mineur : les MPS sont contenues dans des gisements
le recyclage et le développement de l’utilisation de anthropiques complexes. D’abord, ils sont très dispersés
matières premières secondaires : l’enjeu est désormais géographiquement, ce qui joue d’abord sur la collecte, 11

4. CET : Centre d’enfouissement technique.


5. D’ailleurs, de grandes quantités de « déchets » collectés sont valorisées financièrement comme « scrapes » par des recycleurs qui les vendent à des
pays friands de matières pour alimenter leur industrie émergente. Certains pays interdisent d’ailleurs leur exportation (en les considérants comme une
matière première nationale). Le gain du recyclage est également énergétique dans la mesure où, par exemple pour l’aluminium, l’énergie pour le
recycler n’est que 5% de l’énergie nécessaire à son élaboration à partir d’une filière primaire (bauxite et alumine).

Géologues n°152
repères d’économie minière

Métal Recyclé (kT) Ex-minerai (kT) Production (kT/an) Taux recyclage (%) Remarques
Acier 480 000 480 000 960 000 50
Al 10 000 15 000 25 000 40 Durée de vie longue
Cu 3 000 12 000 15 000 20 Durée de vie longue
Zn 2 700 6 300 9 000 30
Pb 3 600 2 400 6 000 60 Batteries
Ni 500 500 1 000 50
Mg 60 240 300 20
Sn 25 225 250 10 Très disséminé
Ti 22,5 22,5 45 50 Scrapes neufs
Tableau 1. Estimation de la part du recyclage dans la production des principaux métaux (source : document interne ARAMM d’après compilation de diverses
sources, 2003).

tant au niveau de son coût que de l’impact environne- véhicules hors d’usage (VHU) seront elles encore utiles
mental du transport. Ensuite, ils sont hétérogènes, et dans 13 ans, compte tenu des probables perfectionne-
l’on doit leur appliquer des critères de tonnage, de teneur, ments des méthodes de séparation des matières ?
de maille de libération pour chaque substance, alliage, L’écoconception devrait donc se concentrer en
etc. De nouveaux systèmes analytiques (appareils de priorité sur :
fluorescence X, comme ceux de Nitton) permettent des tris
les produits à durée de vie courte ;
de plus en plus efficients.
l’optimisation énergétique du service rendu ;
Telle matière première secondaire (MPS), définie
par un cahier des charges correspondant à son utilisation la simplification des gammes de matériaux utilisés et
en terme de matériau, se trouve dans le gisement avec les de leur assemblage.
caractéristiques qui permettent ou non son extraction
grâce à un procédé adapté et à un coût compétitif par Substitution
rapport au coût de la matière première primaire corres- La substitution de matériaux par d’autres obéit à
pondante. En outre, si une substance est d’intérêt straté- trois raisons principales.
gique ou présente des caractéristiques particulières du D’abord, l’amélioration des propriétés : un des
point de vue environnemental, le coût économique de exemples les plus importants est l’allègement dans les
son extraction ne devrait pas être le seul critère : par moyens de transport (conjuguer maintien ou amélioration
exemple, certains petits métaux comme l’indium, le cobalt, des performances et des coûts avec diminution de poids).
ou l’étain, de récupération difficile dans les déchets d’équi- D’où une chaîne de substitution avec : fonte et acier —>
pements électriques et électroniques (D3E). aciers spéciaux —> aluminium —> magnésium —> tita-
La durée de vie des produits est un facteur impor- ne —> composites —> hybrides (composites à renforts
tant à plusieurs titres : fibres de verre ou de carbone),dans l’aéronautique d’abord,
immobilisation de matière dans les produits à durée puis dans l’automobile (Fig. 3).
de vie longue dans des domaines tels que l’aéronau- Ensuite, la réponse à des contraintes environne-
tique, l’habitat ou les infrastructures (par exemple on mentales, par exemple la directive RoHS6 : ce type de
estime qu’en 2003, 516 Mt d’aluminium soit les 3/4 du substitution, motivé par l’application du principe de
métal fabriqué depuis l’origine en 1888 étaient encore précaution, est rarement fondé sur des analyses
en usage !) ; risques-bénéfices et des analyses de cycle de vie (ACV)
évolution rapide et complexification des produits à des produits.
durée de vie courte à moyenne (comme les appareils Par exemple, le remplacement du plomb par l’étain
électroniques, les batteries ou les articles de sport), qui dans les brasures électroniques a causé une très forte élé-
pose notamment des problèmes d’adaptation des vation de la consommation d’étain (de 250 kT en 2004 à
procédés de tri à un gisement variable en teneur et en 350kT en 2006) dont les conséquences vis-à-vis de l’envi-
assemblage de matériaux ; ronnement et du social sont importantes : la régulation des
du fait de leur durée de vie moyenne de 13 ans, les pics de demande se fait en effet largement par une aug-
avancées en termes de recyclabilité des matériaux et mentation de la mine et de la métallurgie informelles
12 d’écoconception mises en place aujourd’hui pour les (notamment Indonésie, Brésil, Chine).

6. Directive RoHS : « Restriction on Hasardous Substances » - Interdiction ou limitation d’usage de substances dangereuses (métaux lourd, Hg, Pb, Cd, Cr
hexavalent ; produits bromés, etc.).

Géologues n°152
repères d’économie minière

de 5% de la production totale de polymères d’origine


pétrochimiques, pour environ 1% des 18 Millions d’hec-
tares cultivables. Coté biocarburants, environ 10% de
cette surface fournissent 11 MTep (bioester et éthanol) en
2006 à partir des filières de première génération. Le déve-
loppement de la 2ème génération à partir de cellulose
devrait doubler cette production vers 2015. (Source : Clau-
de ROY, coordonnateur interministériel pour la
valorisation de la biomasse ; Colloque IFP sur les biocar-
burants, Lyon, 8 fév. 2007).

Conclusion
3a.
Le monde entre dans une ère de restrictions même si
la conscience n’en est pas encore répandue :l’accroissement
démographique qui pourrait amener la population mondia-
le à 9 milliards d’habitants en 2050 est le moteur de pressions
inégalées sur l’eau, les sols, la biosphère, les ressources
naturelles et l’atmosphère. Ces évolutions, difficilement
maîtrisables, ne manqueront pas de poser des problèmes
croissants d’ordre alimentaire, sanitaire et énergétique.
Les innovations des prochaines décennies devront
donc prendre en compte le cycle de vie des produits et
des matériaux et pratiquer une démarche d’écoconception
3b.
systématique, fondée sur des analyses de cycle de vie
Figure 3. La compétition des matériaux pour l’allègement.
précises. L’écoconception combinera la recherche de solu-
3a. Aciers et autres matériaux. tions fondées sur la dématérialisation (nanotechnolo-
3b. Aéronautique. gies), les procédés, le recyclage, et la substitution des maté-
riaux et matières premières dans un souci d’économies
Les ACV sur les produits électroniques laissent
d’énergie et de matière systématiques.
planer des doutes sur l’innocuité environnementale des
nouveaux alliages (SnCuAg). De plus le recyclage du métal
blanc est très peu efficace (<20%), contrairement à celui Documentation
du plomb (>60%). La substitution de certains métaux
Colloque « Les Résiduels en Métallurgie » organisé le
considérés comme dangereux peut avoir des conséquences
30 mai 2006 à St-Étienne par l’Agence Rhône-Alpes pour
inattendues et doit donc être accompagnée d’ACV et d’ana-
la Maîtrise des Matériaux, le Cercle d’Etude des Métaux,
lyses risques-bénéfices. Mais, les ACV étant souvent
la Société des Ingénieurs Automobiles et le Rhône-Alpes
longues et coûteuses, on considère les études simplifiées
Automotive Cluster.
qualitatives sur le cycle de vie, ESQCV, qui sont des ACV res-
treintes et ciblées sur les goulets à problèmes identifiés de « Du rare à l’Infini – Panorama mondial des déchets
manière précoce comme plus rapides et efficaces. 2006 » par E. Lacoste et P. Chalmin, 2006 – Ed. ECONO-
MICA.
Troisième raison, le remplacement de matières
non renouvelables devenues rares et chères par des « Cycles et super-cycles dans le domaine des matières
matières renouvelables tels que les matériaux issus de la premières minérales – Analyse des risques et compor-
biomasse animale ou végétale : l’utilisation industrielle tement des acteurs » par C. Hocquard et J-C Samama –
de la biomasse devra être gérée en termes d’impacts Les techniques de l’industrie minérale, N°29, mars 2006.
environnementaux, de gestion des eaux et des espaces « Prospective – Les matériaux : l’enjeu du développe-
pour éviter l’épuisement de ressources renouvelables dans ment durable », par J.-C. Prévôt, R. Lévêque, G. Buisson,
un espace limité. C. Hocquard in « L’innovation, quelle sacré aventure ! »
L’apport de la biomasse à la substitution des Hors-série JITEC – 2006.
matériaux reste faible et devrait représenter en 2015 moins Colloque IFP sur les biocarburants, Lyon, 8 fév. 2007. 13

Géologues n°152
réglementation et formation

Principes de législation minière


Véronique Tournis et Michel Rabinovitch.

Les ressources minérales ont été mises gratuite- conférés au premier occupant du terrain ou au premier
ment par la nature à la disposition de l’homme, comme demandeur ;
toute ressource naturelle. Comment faire en sorte que le droit régalien : la mine est encore considérée com-
ces ressources soient explorées puis exploitées et qui donc me res nullius, mais c’est l’État qui, en vertu de son droit
en aura le bénéfice ? C’est le problème qui s’est posé dès régalien, détermine les conditions de recherche et d’ex-
que nos ancêtres ont appris leur usage. Après maints com- ploitation ;
bats, le droit du seigneur a prévalu, remplacé par les droits
le droit domanial : les ressources minérales sont la
de l’État lorsque le seigneur a disparu.
propriété du souverain, ou de l’État. Ce système a connu
À présent, les droits de propriété sur les ressources ses dernières applications en Amérique Latine jusqu’en
minérales sont établis par la loi et, très généralement, 1989.
le pouvoir de concéder des droits d’exploration, de pro-
En gros, on peut dire qu’actuellement l’accession
duction et de vente de ces ressources est défini par les
n’est plus guère usitée qu’aux États-Unis et au Royaume-
lois, règlements et procédures qui couvrent toutes les
Uni, les législations minières canadienne et australienne
phases de leur mise en valeur. Il reste à établir comment
ressortissant plutôt du droit de l’inventeur, alors que dans
permettre à l’État de s’assurer une part suffisante des
nos vieux pays d’Europe, la législation minière dite « de
ressources sans gêner les investissements privés dans le
droit commun » est un mélange en proportions variables
secteur. Le code minier dessine les contours de l’interac-
des conceptions de droit régalien et domanial.
tion entre l’État et la compagnie minière.
Dans l’étude de la Banque mondiale (« Enjeux des Résolutions des Nations Unies sur les
nouvelles réglementations minières en Afrique, Campbell matières minérales
B. éd. »), la notion de cadre réglementaire englobe le code
minier et l’attribution des droits et des permis d’exploita- Plusieurs résolutions des Nations Unies qui, on le
tion, et un code minier représente « la combinaison de rappelle, ne sont contraignantes que dans le cas où des
lois, de règlements et d’accords régissant l’attribution, le sanctions seraient appliquées aux contrevenants, ont été
mode de faire-valoir et l’exploitation des droits miniers ». prises au sujet de la souveraineté des États sur les matières
minérales contenues dans leurs frontières.
En 1952, la résolution 626, relayée par la CNUCED en
Généralités 1960,reconnaît le droit souverain de chaque État sur ses res-
sources naturelles,conformément à ses intérêts nationaux
Les quatre grandes conceptions du droit minier et dans le respect de son indépendance économique. La
Dérivant de l’histoire de l’exploitation des res- résolution 1803 va plus loin dans la définition de ce droit
sources minérales, quatre conceptions du droit minier ont souverain de l’État en l’accompagnant d’un devoir, celui
prévalu, dont il reste des traces dans les lois minières d’exercer cette souveraineté « dans l’intérêt du dévelop-
actuelles de tel ou tel pays. Ce sont : pement national et du bien-être de son peuple ». En 1974,
l’accession : ce système, issu de la féodalité, postule que la notion de « souveraineté permanente et intégrale »
le propriétaire du sol est propriétaire du tréfonds par apparaît lors de l’assemblée générale extraordinaire des
droit d’accession ; il est en vigueur dans le Royaume- Nations Unies concernant les matières premières.
Uni et, par dérivation, dans la plus grande partie des
États-Unis. Les droits du propriétaire du sol peuvent Les clauses générales de la législation minière
être limités par la Couronne (ou l’État) dans l’intérêt Quel que soit le droit minier retenu, les clauses
général (sécurité et conservation des ressources par générales devraient garantir les points suivants :
exemple) ; le droit de l’inventeur pour le titulaire d’un titre minier
l’occupation, ou droit de l’inventeur : la mine est consi- d’exploration ayant mis en évidence un gisement de
14 dérée comme res nullius, les droits miniers étant donc substances minérales ;

Géologues n°152
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la stabilité des conditions fiscales, juridiques, sociales, Phase d’exploitation


durant la période de la validité de la concession minière ;
la prise en charge de l’environnement par l’exploitant ; Clauses juridiques :
l’arbitrage international en cas de conflit d’intérêts (Cour En cas de cession des droits, et pour le règlement
de la Haye) ; des différents, le principe est d’appliquer la loi du pays où
l’exploitation se trouve.
l’attribution de titre minier par adjudication pour les
gisements mis en évidence sur fonds publics ; Clauses économiques, fiscales, financières et commer-
la fondation d’une banque de données géologiques et ciales ; obligation de « coopération économique » :
son libre accès ; Ces clauses, très importantes, déterminent le finan-
l’instauration d’une autorité unique d’attribution de cement des opérations, la participation de l’État, le régi-
titres miniers. me douanier et fiscal. Le plus souvent, ces clauses sont
réglées par négociation.
Ces garanties sont rarement observées dans
leur ensemble ; les pays s’en rapprochant le plus sont Durée des droits d’exploitation
l’Australie (surtout South Australia1) et le Canada. Le dossier ayant été soumis, et accepté par les auto-
Les clauses techniques, opérationnelles et adminis- rités minières, le titulaire bénéficie, après un laps de temps
tratives sont encore des clauses très générales, sans qui peut être long, des droits exclusifs d’exploitation du
lesquelles l’explorateur et l’exploitant minier courraient de gisement. En principe, dès l’autorisation délivrée, il devra
gros risques. Elles ont un contenu très différent selon la développer le gisement dans les meilleurs délais. En fait,
phase considérée : exploration ou exploitation. les cas sont nombreux où des gisements sont « gelés » sous
divers prétextes, en attendant des cours plus favorables ou
Phase d’exploration un développement technique important.
Durée Superficie de la zone d’exploitation
Le titulaire d’un permis exclusif de recherches doit La zone d’exploitation correspond à l’étendue
avoir le temps nécessaire pour réaliser ses travaux de du gisement exploitable reconnue. Son extension reste
reconnaissance directe et indirecte. Ces travaux peuvent possible si une clause le prévoit ; toutefois, elle devra
être subdivisés en plusieurs périodes renouvelables toujours correspondre à la zone d’exploitation encore
successivement, à la condition que le titulaire puisse détenue par le titulaire.
prouver qu’il a satisfait à ses obligations. À l’expiration
de la dernière période, le contrat expire pour toute la zone Respect des travaux programmés
exceptée celle où un gisement commercialement viable L’autorité compétente pour délivrer l’autorisation
aurait été découvert. En fait, de nombreux pays prati- d’exploitation l’est aussi pour contrôler les travaux
quent la protection des avantages acquis et prolongent de programmés. Chaque année, un programme détaillé
façon injustifiée la durée des permis pendant des années, concernant les travaux à venir et le budget correspon-
voire des dizaines d’années, bloquant ainsi de vastes zones dant est soumis au gouvernement. En Europe et dans
à l’exploration minière. de nombreux pays, l’exploitation devra se dérouler en
respectant l’environnement autant que possible, et dans
Superficie un esprit de « développement durable ».
Celle-ci, très variable selon les demandes et les
pays, est réduite à chaque renouvellement des périodes Fin d’exploitation
d’exploration. De manière très générale, la mise en sécurité des
travaux et la réhabilitation de la surface sont exigés à la
Dépenses d’exploration : fermeture de la mine. Une provision à ces fins est
Pour chaque période, le titulaire du permis doit fréquemment réclamée en début d’exploitation.
effectuer un volume minimum de travaux ou de dépenses
dans le domaine de l’exploration minière (géologie, géo- Droits des autochtones
physique, géochimie, sondages, etc.). De plus en plus, dans les codes miniers de la zone
anglo-saxonne, on a tendance à reconnaître les droits des
natives. C’est ainsi qu’en Australie le « Native Title Act »,
introduit en 1992, reconnaît les droits des aborigènes si 15

1. Les différentes provinces du Canada et de l’Australie n’ont pas obligatoirement les mêmes lois minières.

Géologues n°152
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l’exploitation est située sur une « reserve ». Il en est de européennes, non pas seulement dans les détails, mais
même au Canada avec le droit des Indiens ou des Esqui- dans leur conception même. Qu’y a-t-il de commun
maux,par exemple au Labrador ou en Terre de Baffin. Enfin, entre celle du Royaume-Uni, encore plongée dans les
en Afrique du Sud,le « South African Mining Charter » ajou- temps féodaux et celle de la Finlande, moderne et démo-
te des critères sociaux et de développement durable et cratique ? L’Union Européenne n’a fait aucune tentative
prévoit que,d’ici 5 ans,15% des actifs locaux des compagnies d’unification des codes, pas plus dans ce domaine que
minières seront détenus par des Noirs, ce pourcentage dans ceux de la protection sociale, des impôts, des salaires
devant passer à 26% dans 10 ans, au titre du « Black Eco- ou des retraites. Par contre, en ce qui concerne l’environ-
nomic Empowerment » (BEE), c’est-à-dire « Émancipation nement ou la sécurité dans les mines, la législation euro-
économique des Noirs ». Aux États-Unis, l’exploitation sur péenne abonde en directives. Dommage que cela n’en-
une réserve indienne ne peut se faire qu’avec l’accord et courage pas l’industrie minière sur notre continent, bien
généralement la participation des intéressés. au contraire ! On peut supposer que la Pologne, pour sa
législation minière, est en pleine mutation !
Provision de reconstitution de gisement
La France a été ajoutée au tableau 1 pour mémoire
Dans les codes miniers, c’est une obligation et une
car, comme chacun le sait, il n’y a plus d’industrie minière
clause essentiellement fiscale qui donne la possibilité de
dans ce pays, et il est même impossible de trouver, sur la
constituer une provision pour reconstitution de gisements
Toile,un site présentant clairement ses possibilités minières,
à hauteur d’un certain pourcentage du bénéfice fiscal ou
qui sont loin d’être négligeables, comme on le verra dans
du chiffre d’affaire. Une partie de cette provision est
un autre article publié dans le n°153 de “Géologues”. Si
prévue pour venir alimenter un fond social.
d’aventure une société voulait poser un permis de
Ces provisions sont soumises à trois types de recherches (PER),elle comprendrait très vite qu’elle n’est pas
conditions générales : la bienvenue, si l’on en juge par les cautions et travaux
conditions de remploi, dans certains délais pour la préalables d’impact sur l’environnement exigés avant tou-
recherche de gisements non encore reconnus, l’amé- te possibilité de savoir si la zone choisie en vaut la peine.
lioration de la récupération des substances minérales de Il faut ajouter à la législation française quelques
ces mêmes gisements ou la prise de participations dans mots sur les particularités des codes miniers de la Guya-
des sociétés ou organismes ayant pour objet l’une ou ne et de la Nouvelle-Calédonie, pays miniers importants.
l’autre de ces activités ;
La Guyane a un code assez complexe, adapté à la
conditions de montant par rapport au produit des ventes recherche et à l’exploitation de l’or (en particulier alluvial)
de produits marchands extraits, du bénéfice net impo- ainsi qu’aux particularités du pays. L’Office national des
sable de l’exercice provenant de la vente en l’état ou forêts (ONF), propriétaire du terrain, accorde les autorisa-
après transformation de ces mêmes produits ; tions de recherches minières (ARM). Il en existe 3 types :
conditions de forme : la provision doit être inscrite au l’ARM 3 km2, durée 4 mois ;
passif du bilan.
l’ARM 20 km2, durée 6 mois ;
le PER,de superficie libre,même régime qu’en métropole.
Quelques exemples de législation L’exploitation peut se faire sur les permis suivants :
minière Concession, même régime qu’en métropole ;
Il n’est pas possible de passer en revue tous les PEX (permis d’exploitation) : même régime que le PER de
types de législation minière dans le monde car, contrai- métropole ;
rement à ce que pourraient faire croire les développe-
AEX (autorisation d’exploitation) : superficie de 1 km2
ments ci-dessus sur les clauses générales de la législa-
max., durée 4 ans renouvelable une fois. On ne peut
tion minière, elle n’est rien moins qu’homogène dans le
obtenir plus de 3 AEX à la fois.
monde, même en Europe ! Les tableaus qui suivent concer-
nenr la réglementation sur les substances métalliques, la Pour l’obtention de ces titres, les capacités finan-
colonne « Exceptions » portant sur d’autres substances. cières, l’expérience, et l’impact sur l’environnement sont
pris en compte.
Europe En Nouvelle-Calédonie, le code minier est nette-
ment plus flou, ce qui est peut-être dû à un statut transi-
Même avec le peu de détails fournis par le tableau 1,
16 toire. La totalité des gîtes et gisements de nickel de la
on se rend compte de la diversité des législations minières

Géologues n°152
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Nouvelle-Calédonie sont couverts par des concessions et simple. Ce sont ces méthodes qu’ont choisies Inco et Fal-
des PER vieux de plusieurs dizaines d’années. Les titres conbridge (aujourd’hui eux-mêmes rachetés par CVRD et
miniers sont gérés par le service des Mines et de l’Énergie. Xstrata) pour obtenir un domaine, avec l’accord du gou-
Pour une société désirant s’introduire sur l’île, l’unique vernement français. Les sociétés métallurgiques et
solution véritable est une association avec l’une de la minières sont imposées à hauteur de 35% des bénéfices
vingtaine de sociétés existantes, ou son rachat pur et et bénéficient de nombreux avantages et détaxations.

Pays Système Permis Permis Exceptions Surface Rôle de l’État Choix du Royalties Documen-
exploration exploitation impliquée et autorités candidat et taxes tation
responsables
Royaume Accession Le propriétaire Substances Achat ou Subs.énerg. Accord de Oui Land Registry,
Uni du terrain ou énergétiques accord de et Au-Ag gré à gré British
ses successeurs et Au – Ag . gré à gré réservés à ou achat Geological
ont le droit nécessaire. la Couronne. du terrain. Survey
d’exploiter son
sous-sol.
Suède Régalien Durée 3 ans Durée 25 ans Aucune Concession Inspecteur Droit de Impôts 28% Service
renouv. max. max. sur limites des Mines priorité + Droits explo- géologique
15 ans gisement responsable. choix selon ration ; inté-
qualités du ressement
candidat. propriétaire sol.
Finlande Inventeur Min. 2 ans, Aucune Sur limites Ministère Droit de Droit de timbre, Service
max. 5 ans gisement Commerce et priorité. taxe sur la géologique
Industrie. surface, impôt
sociétés.
Pologne Régalien Non Non Aucune À négocier Autorité Conditions non Royalties à la Service
déterminé déterminé minière d’État. déterminées. tonne extraite géologique
et taxes au km2.
République Régalien Taxe à la Matières Ministère Priorité à Taxe/an/ha Ministère En-
Tchèque prospection superficielles Environnement l’explorateur ; Taxe/an sur vironnement ;
(sols) & Industrie. à défaut, au la production. Autorité
mieux disant. minière du
district
Espagne Accession/ Permis explo- Durée 30 ans, Distinction « Carrés » Ministère Priorité Instituto
régalien/ ration minière, prolongation entre terrains délimités par de l’Industrie.explorateur + geologico y
inventeur (2 ans) puis à 90 ans. « libres » méridiens et choix selon minero de
permis recher- et « réservés ». parallèles. disponibilités Espana
ches (3+3 ans). candidat. Trans- (Madrid)
mission droits
possible.
Irlande Régalien/ Permis de pros- Mining lease Au-Ag : Permis de pros- Département Droit de Taxe sur la Ireland
Inventeur pection libre sur minéraux appartient à pection : envi- pour les Com- priorité, mais Mining Licence ; Geological
avec clause appartenant à l’État ron 35 km2 ; munications, à discrétion Royalty Survey
d’indemnités. l’État. Mining (Mining Lease). Mining Licence : la Marine et les du Ministère. (env. 2% du
Taxes de départ, Licence : sur superficie du Ressources bénéfice) ;
puis annuelle. terrains privés. gisement ; Naturelles. taxe sociétés
Mining Lease : 12,5%.
selon achat
terrain.
France Régalien/ PER accordé Exploitation Régime Mines PER, PEM et Ministère de Mieux disant DRIRE ; BRGM,
Accession après mise en possible en (métaux, com- concession : l’Économie, des Écoles des
concurrence ou l’absence bustibles, sel, superficie à Finances et de Mines (Paris,
au propriétaire d’autorisation soufre) et régi- délimiter en l’Industrie ; St-Étienne,
surface. Durée du propriétaire me Carrières accord avec la DRIRE (Titre Nancy, Alès,
5 ans + 2x3 ans. du sol. (construction). DRIRE. minier) ; etc.) :
Concession : Préfecture archives.
durée max. (Autorisation
50 ans ; d’ouverture
PEM : des travaux,
durée 5 + surveillance,
2x5 ans sécurité, etc.).

Tableau 1. Législation minière en Europe : une vue comparative. 17

Géologues n°152
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Pays Système Permis Permis Exceptions Surface Rôle de l’État Choix du Royalties Documen-
exploration exploitation impliquée et autorités candidat et taxes tation
responsables
Turquie Régalien / Durée 3 + Durée : 5 catégories : Ministère de Droit de Royalties : Direction
inventeur 2 ans max. 1er groupe : Construction ; l’Énergie et des priorité. 1er et 5ème générale des
5 ans min. ; Pierres décora- Ressources na- groupes : 4% ; affaires
groupes 2,3,4 : tives ; Sels en turelles, direc- Groupes 2,3,4 : minières ;
10 ans min. ; solution ; Mine- tion générale 2%. Garantie et Universités
5ème groupe : rais, minéraux des affaires taxe annuelle
5 ans min. industriels et minières.Exploi- par permis.
Permis opéra- énergie ; Pré- tation des bora- Droits d’utili-
toire obligatoire cieux (pierres tes par l’état sation de la
après le permis et métaux). exclusivement. surface.
d’exploitation.
Iran Régalien Exploration fai- Après décou- 4 catégories : Ministère des Permis d’explo- Taxe annuelle National
te par l’État et verte, certificat Construction ; Mines et du ration : priorité sur valeur du Geosciences
par personnes de découverte Minerais, sels, Métal. L’état aux familles minerai, à dis- database
privées avec et demande de minéraux peut explorer de martyrs, crétion du Mi- of Iran. Service
permis d’explo- permis d’exp- industriels, pré- et exploiter. infirmes de nistère ; fond géologique de
ration. loitation dans cieux (pierres guerre, coopé- de compen- l’Iran
l’année. Durée et métaux), ratives et per- sation pour
du permis : 25 pierres décora- sonnes locales réhabilitation.
ans extensible. tives,charbons ; qualifiées.
Hydrocarbures ;
Radioactifs.
Tableau 2. La réglementation minière en Turquie et en Iran.

Pays Système Permis Permis Exceptions Surface Rôle de l’État Choix du Royalties Documen-
exploration exploitation impliquée et autorités candidat et taxes tation
responsables
Kazakhstan Régalien Contrat Contrats modu- Définie par le Ministère de Par appel Rembourse- Faculté de
d’exploration : lables de 25 ans, contrat. l’Énergie et des d’offres ou par ment des tra- Géologie de
durée 6 + 2 + extensibles à Ressources mi- négociation. vaux exécutés Semipalatinsk ;
2 ans max. 45 ans, ou nérales. Coopé- par l’État. US Geological
jusqu’à ration avec so- Impôt sur le Survey
épuisement ciété nationale revenu. (Kazakhstan)
du gisement. obligatoire.
Inde Régalien/ Permis de re- Durée : 20 ans Permis de re- Direction Mines Le candidat ou Royalty ou Geological
inventeur connaissance : min., 30 ans connaissance : et géologie des la Société doit location ; taxe Survey of India ;
3 ans ; permis + 20 ans max.. 10 000 km2 divers États. être indien. sur les permis Indian Bureau
de prospection : max ;Permis de Les divers ser- Droit de priorité d’exploration ou of Mines
3 + 2 ans. prospection : vices géologi- avec préférence d’exploitation.
25 km2 max. ques peuvent au mieux disant
prospecter et si concurrence.
prendre des
concessions.
Indonésie Régalien SIPP (Permis Contrats d’ex- 4 classes : Ra- Exploitation à Ministère de Obtention des Dépôt de sécu- DEMR
d’investigation ploitation (KP dioactif ;Métal ; ciel ouvert in- l’Énergie et des contrats et rité, dépôt de (direction de
préliminaire) et et COW) (en Non-métal ; terdite en zone ressources mi- permis par réhabilitation, l’Énergie et
permis d’explo- principe non Charbon, forestière. nérales ; Auto- négociation. royalties (3-5% des Ressources
ration. accordés depuis tourbe rités locales. du prix du Minérales) ;
1998). Sociétés et shales à métal extrait), consultation
exploitantes pétrole. loyer, taxes documents
indonésiennes ; diverses, moyennant
parts étrangè- impôts (30%). une taxe/ha
res possibles...
Chine régalien Permis d’explo- Permis d’exploi- 3 classes :Mine- Exploration : Ministry of Priorité au Droits Service
ration exclusif. tation : 4 pos- rais métalliques ; blocs de 1’x 1’. Land and possesseur d’exploration ; géologique
Durée 2 + 2 + sibilités :Achat ; Charbon, fer, Resources permis explo- Royalties et de Chine
2 ans. JV ; Exploration graphite, etc. ; (MOLAR) ; ration. En cas taxes d’exploi-
et découverte ; Matériaux Autorités lo- de concurrence, tation.
enchères sur construction. cales, environ- mieux disant.
offre. nement.
18 Tableau 3. La réglementation dans divers pays d’Asie.

Géologues n°152
réglementation et formation

Proche-Orient gement de la loi minière qui, fondée naguère sur les


contrats de gré à gré (COW), tend vers le permis d’exploi-
Seuls trois pays représentatifs du Proche-Orient
tation plus classique. Pour le moment, les deux systèmes
peuvent être retenus : Turquie, Iran et Arabie Saoudite.
coexistent, ce qui ne facilite pas les investissements
Ces trois pays ont un code minier récent, ce qui explique
miniers.
certaines ressemblances. Les autres, soit n’ont pas
suffisamment de ressources minérales autres que le pétro- Le gouvernement chinois s’efforce, en modifiant
le, soit sont dans un tel état que tout investissement y la loi minière, de sécuriser les capitaux investis dans la
est actuellement exclu. On remarquera toutefois que, en mine. Cette loi ne sera pas prête avant 2008 au moins.
théorie du moins, seule la Turquie semble garantir un En attendant, c’est le flou en ce qui concerne la taxation,
choix du candidat non biaisé, l’Iran servant de contre la libre disposition du capital et la possibilité de création
exemple (Tabl. 2). d’entreprises à majorité non chinoise. Le tableau 3 est un
récapitulatif de la situation dans divers pays d’Asie.
Asie
Océanie
En ce qui concerne le Kazakhstan, on remarquera
la curieuse conception du « contrat » de gré à gré qui rem- En ce qui concerne l’Australie, il y a autant de légis-
place les permis d’exploration et d’exploitation. Ce contrat lations que de provinces qui, si elles sont voisines dans
est d’ailleurs implicite dans de nombreux pays, mais ici il les principes, sont loin de l’être dans les détails. À titre
est tout à fait explicite et exclut totalement exploration d’exemple (Tabl. 4), on donnera un aperçu de celles du
et exploitation par des sociétés sans grands moyens. Nouvelles Galles du Sud (New South Wales, NSW) et de
D’autre part, l’État paraît vouloir intervenir non seule- l’Australie de l’Ouest (Western Australia,WA), deux grandes
ment dans le choix de l’exploitant, mais aussi dans celui provinces minières de ce pays où la prospection est
des moyens humains et matériels, en favorisant le tra- extrêmement libre sur « Crown Land ». En terrain privé, il
vailleur et le matériel kazakh. faut l’accord du propriétaire, tandis que sur les réserves
aborigènes, l’autorisation du Département des Affaires
En Indonésie, le flou le plus total règne, à cause
indigènes est nécessaire, ainsi que, sur les autres types
d’une part de la décentralisation, d’autre part du chan-
de réserves, celle des Départements concernés.

Pays Système Permis Permis Exceptions Surface Rôle de l’État Choix du Royalties Documen-
exploration exploitation impliquée et autorités candidat et taxes tation
responsables
Australie : Régalien/ Exploration li- Assesment Lease Opale, Marquage NSW Tout le monde Rembourse- Geological
NSW inventeur cence : Durée (rétention des Charbons. obligatoire des Department peut demander ment des tra- Survey of NSW
5 ans max. droits sur gîte Mineral Claims of Primary un permis vaux effectués
Mineral Claim : non immédia- sur le terrain. Industries. d’exploration. par l’État.
surface 2 ha ; tement exploi- Droit de prio- Royalty en %
durée : 5 ans té) :durée 5 ans rité. Mieux de la valeur
max. max. Mining disant en cas du minerai
lease : durée 21 de concurrence. extrait.
ans extensible.
Australie :WA Régalien/ Exploration Retention licen- Matériaux de Blocs de 1’x 1’ WA Department Tout le monde Taxe 5000 A$ + DIR, Geological
inventeur licence : Durée ce : droit de ré- construction ; selon grille lati- of Industry peut demander loyer annuel Survey of WA
5 ans max. tention d’un ter- Or (Special Pros- tude-longitude. and Resources. un Miner’s par licence sur
Mineral Claim : rain prospecté pecting Licence À marquer sur Right, néces- toute licence
surface 2 ha ; non immédia- sur 10 ha, limi- le terrain pour saire pour pros- (Exploration,
durée : 5 ans tement exploité. tation à 10 SPL). SPL et Mining pecter. Droit prospection,
max. Durée : 5 ans Lease. de priorité. exploitation).
extensible. Royalty sur
Mining lease : minerai extrait.
superficie néces-
saire à l’exploi-
tation. Nombre
de mining lease
illimité.
Durée 21 ans
extensible.

Tableau 4. Deux exemples de législation minière australienne. 19

Géologues n°152
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Amérique du Nord 21 ans, extensible.


Le Canada, tout comme l’Australie, est divisé en Les sociétés minières productrices sont redevables
provinces ayant une certaine autonomie, avec des lois de l’impôt sur le revenu fédéral (21,57%), provincial ou ter-
minières ayant des éléments communs, mais bien des ritorial (de 7,43 à 14,6% selon la province), de taxes minières
différences dans les détails. Les gouvernements provin- ou royalties, et, pour les provinces du Saskatchewan, Mani-
ciaux contrôlent la loi minière dans les 10 Provinces, toba, Ontario, Québec, Nouveau-Brunswick et Nouvelle-
le gouvernement fédéral dans les trois Territoires, en Écosse, de taxes sur le capital (de 0,25% à 0,525%), ainsi que
association avec les gouvernements territoriaux et les de taxes diverses variables selon les provinces. À titre
organisations aborigènes. d’exemple, on verra dans le tableau 5 ci-dessous des détails
sur la province du Québec.
Les rapports concernant ressources et réserves
minières utilisent le code CIM, et les codes JORC, IMMM Les États-Unis ont une législation minière très
ou SAMREC pour les étrangers (de toute manière il s’agit particulière. On y distingue d’une part les terres privées,
de codes anglo-saxons très voisins). Les minerais métal- d’autre part les Federal Lands, terres appartenant à
liques en terre appartiennent à la Province ou au l’État. Ces deux types de territoires n’ont pas la même
Territoire, sauf rares exceptions où la propriété appartient législation en ce qui concerne les droits miniers.
aux aborigènes. À l’exception de l’Ontario, une conces- En ce qui concerne le premier type, c’est très
sion de terrain n’entraîne pas la concession des minerais simple : le propriétaire du sol l’est également du sous-sol.
métalliques, sauf mention spéciale. La documentation est Il peut donc soit exploiter lui-même (dans le cadre de la
obtenue : dans les « Recorders Offices » (cartes des légalité sur les droits de l’environnement, de la sécurité,
permis, rapports et cartes géologiques, etc.), auprès du etc.), soit amodier ses droits moyennant une redevance à
gouvernement fédéral (base de données sur les mines en un tiers. Toute la partie est des États-Unis, environ les
activité). L’Ontario possède une carothèque des sondages deux-tiers de sa superficie, est formée de terrains privés,
réalisés dans la province. à l’exception des parcs nationaux et, dans le centre, de
Le Canada reconnaît le droit de priorité avec des réserves indiennes.
exceptions : réserves aborigènes, cas où la propriété du Dans les terres fédérales,au contraire,le propriétaire
terrain comprend celle du sous-sol, ainsi que les provinces du sol et du sous-sol étant l’État, il peut, selon certaines
de l’Alberta, Nouvelle-Écosse, Ile du Prince-Edouard et dans modalités, amodier les droits d’exploitation du sous-sol à
le Territoire du Nord-Ouest. Les terrains privés et ceux de des individus ou à des sociétés. Le Nevada et l’Utah sont
la Couronne peuvent être prospectés librement et des en presque totalité des Terres fédérales, tandis que l’Ore-
Claims peuvent y être jalonnés sur le terrain, sauf dans gon, l’Idaho, le Wyoming, la Californie, l’Arizona, le Nou-
les mêmes provinces que ci-dessus, où un permis spécial veau-Mexique, le Colorado et l’Alaska, ne le sont qu’en
est demandé. En cas de découverte, le possesseur des partie. La Loi minière qui s’applique aux Terres fédérales
claims a droit à un « Mining Lease » pour exploiter le est basée sur un texte de 1872 et a subi depuis quelques
gisement, mais le gouvernement a la liberté de décider amendements qui n’en ont pas altéré le principe. Le tableau
des conditions. La durée d’un « Mining Lease » est de 10 ou 6 va tenter de résumer ce texte et les conditions d’ex-

Pays Système Permis Permis Exceptions Surface Rôle de l’État Choix du Royalties Documen-
exploration exploitation impliquée et autorités candidat et taxes tation
responsables
Canada Régalien/ Claim : Bail minier Pétrole, Claim désigné : Ministère des Accès ouvert Taxe à l’inscrip- Ministère des
(Québec) inventeur permis d’explo- (concession saumure, Carrés de 1/2’ Ressources à tous. Permis tion des claims. Ressources
ration exclusif. minière) : Droit matériaux de de côté selon Naturelles et de prospection Bail minier : Naturelles et
Claim désigné : au détenteur construction. latitudes et de la Faune du 30$. Droit de loyer/an/ha. de la Faune
seulement des- de Claims. longitudes. Québec. priorité. Impôt sur le du Québec
siné sur une Durée 20 ans Claim jalonné : revenu (provin- (Service
carte (méthode renouvelable. 400 x 400 m cial) 12%. géologique).
dominante) ; Exploitation orienté NS-EW.
Claim jalonné : dans les 4 ans. Pas de limite
obligatoire sur au nombre de
certaines zones. Claims.
Durée 2 + 2 ans. Bail minier :
100 ha max..
20 Tableau 5. Exemple de la législation minière du Québec.

Géologues n°152
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Pays Système Permis Permis Exceptions Surface Rôle de l’État Choix du Royalties Documen-
exploration exploitation impliquée et autorités candidat et taxes tation
responsables
États-Unis Régalien Claims maté- Autorisation Mineral Lease Illimitée Autorité : Droit de Taxe rempla- Bureau of Land
(Federal Lands) rialisés sur le d’exploiter pour charbon, Bureau of Land priorité. çant travail Management ;
terrain (surface demandée. Si phosphates, Management. sur claim : US Geological
20 acres). Nom- non exploités, sels, soufre, Un privé peut 100$/claim/an. Survey.
bre illimité. un concurrent potasse, etc. acheter le ter- Ni royalty ni
Travail mini- peut réclamer Durée 20 ans rain de son taxe pour
mum demandé les claims. renouvelable. claim pour exploitation sur
ou taxe. Le terrain reste 5$/acre claims. Sur
à l’Etat. (placers : Mineral Lease,
2,5$/acre). royalties et loyer.
États-Unis Accession Droits miniers Location du A débattre. Actes com- Mieux disant. Royalties au US Geological
(Terrains privés) au propriétaire terrain au pro- Travaux de merciaux sous propriétaire, Survey ;
du terrain. priétaire surface à seing privé. fixées de gré archives
(Mining Lease). discuter. à gré. privées.
Durée variable
(min. 20 ans).
Partenariat
possible.

Tableau 6. La réglementation minière aux États-Unis.

Pays Système Permis Permis Exceptions Surface Rôle de l’État Choix du Royalties Documen-
exploration exploitation impliquée et autorités candidat et taxes tation
responsables
Mexique Régalien Concession Il n’y a plus de Hydrocarbures ; Droits d’expro- Ministerio de Droit de prio- Droits sur la Ministerio de
octroyée aux distinction radioactifs, priation de Economia rité ou appel concession. Economia
citoyens mexi- entre permis sels en toute surface (Direccion d’offres. (Direccion
cains et aux d’exploration solution ; nécessaire à general de General de
sociétés de sta- et d’exploita- matériaux de l’exploitation. Minas). Minas) ;
tut mexicain. tion. Durée de construction. Servicio
Marquage des la concession : Geologico
limites sur la 50 ans exten- Mexicano.
surface. sible. Début
des travaux 90
jours après
obtention de
la concession.

Tableau 7. La réglementation minière au Mexique.

ploitation sur terres privées.Toutes ces lois peuvent varier Récemment, une volonté d’intégrer les principes du
d’un État à l’autre dans le détail. développement durable dans les législations minières
Le Mexique a longtemps exigé 51% de capitaux s’affirme et conduit ces pays à se regrouper, souvent sous
mexicains dans toute société minière. Actuellement, le l’égide des bailleurs institutionnels. Ces groupes de travaux
capital étranger peut monter à 100% dans une société tentent d’introduire les aspects environnementaux,
minière à condition qu’elle soit incorporée comme entité sociaux, la question de la mine artisanale et de la petite
mexicaine (Tabl. 7). exploitation (IDRC-UNESCO), l’évaluation des mines
abandonnées et le risque environnemental au Brésil, le
Amérique du Sud leadership industriel au Pérou, etc. (Tabl. 8).

En Amérique du Sud, trois types de régimes de Afrique


droits miniers prévalent : administratif, adjudicatif et
contractuel. Les droits d’exploitation sont établis par des Depuis les années 80/90 les pays africains ont
démarches administratives auprès du ministère des mines entamé des réformes de leur code minier, souvent accom-
au Pérou et au Brésil, mais par adjudication au Chili. Les pagnées par la création d’un code des investissements et
régimes contractuels règnent en Colombie, au Honduras d’un code de la fiscalité : 35 codes miniers avaient été
et au Venezuela. Les principales modalités et les condi- révisés en Afrique en 1995 et bon nombre d’entre eux,
tions d’exploitation sont fixées dans la loi minière. ainsi que de nouveaux codes, le sont à nouveau sous 21

Géologues n°152
réglementation et formation

Pays Système Permis Permis Exceptions Rôle de l’État Choix du Royalties et taxes Documentation
exploration exploitation et autorités candidat
responsables
Chili régalien Prospection Concession, Les droits sont Sans Droits annuels acquit- Code minier Décret DL
autorisée en parallélogram- octroyés par un discrimination. tés auprès du Servicio 600 statut des investis-
accord avec le mes de 100 m juge et publiés Nacional de Geología y sements étrangers SMT
propriétaire du de côté, 10 ha par décret. Minería.Taxe fiscale men- specific mining taxe,
sol. Licence à max. Les droits Cochilco con- suelle (Unidad Tributaria plusieurs modifications
renouveler tous sont illimités trôle le fonc- Mensual), pour chaque des dispositions légales
les 2 ans, paral- dans le cadre tionnement des ha Garantie constitution- ont eu lieu en 2005 tou-
lélogrammes des obligations institutions nelle des droits miniers. tes les compagnies mi-
de 1000 m de légales. minières pour Pas de royalties mais nières dont les ventes
côté,juxtaposés l’État. Codelco ; projet de loi prévoyant dépassent 50 000 t/an
aux coordon- entreprise d’instaurer une Royalty sont taxées de 5,5 %
nées géogra- publique. (d’un montantmaximum sur leurs bénéfices. Une
phiques, 5 000 de 3%) sur les ventes de taxe analogue, progres-
ha max. cuivre réalisées par les sive, concerne les plus
entreprises étrangères petits producteurs : le
installées au Chili. barème est de 0,5 % par
tranche de 5 000 t/an
environ.
Pérou Régalien Concession de Grands projets Obligation de Premier venu Pas de royalties 30% Le décret loi
100 à 1000 ha miners. Zones publication premier servi. impôt sur les bénéfices. N° 014-92-EM du 2 juin
suivantcoordon- urbaines et 50 dans les 30 jours Exonération de l’impôt 1992 Lei General de
nées UTM. Jus- km autour,mais et paiements foncier sur les mines Minería est le seul
tifier du paie- droit du sol né- des droits de avant exploitation document de référence
ment des droits gociable avec validité. Cadas- jusqu’à la deuxième malgré de nombreux
par ha, 3 USD l’éventuelle tre (Instituto année suivant le début décrets parus puis
et taxe adminis- intervention Nacional de de la vente des abrogés.
trative de 10%. de l’État. Concesiones y produits.
Durée illimitée Catastro Mi-
dans le cadre nero, INACC).
des obligations
légales.
Brésil Licence d’explo- Concession mi- National Premier venu
ration valable nière, pour la Department premier servi,
3 ans, renouve- durée de vie du of Mineral l’exploitation
lable une fois. gisement, pour Production est confiée au
la substance (DNPM). découvreur du
concédée, déli- gisement habi-
vrée au déten- lité par les au-
teur de licence torités environ-
habilité par nementales et
l’autorité envi- en conformité
ronnementale. avec le DNPM.

Tableau 8. La réglementation minière dans quelques pays d’Amérique du Sud.

l’instance des bailleurs de fonds internationaux. Le tableau environnementales des États en « invitant » (soft law) les
9 présente la situation dans quelques pays d’Afrique. entreprises à y adhérer sur la base du volontariat. Pourtant,
L’objectif est d’accroître de façon significative les inves- en aucun cas, ces codes ne peuvent se substituer aux
tissements par l’entrée des capitaux étrangers et de les législations nationales, dans la mesure où ils n’ont
retenir, y compris pour les activités des mines. La rédaction aucune valeur légale contraignante. » (Extrait GRAMA,
de ces codes est gouvernée par les standards jugés Groupe de recherche sur les activités minières en Afrique).
prioritaires des bailleurs de fond et un nombre croissant Dans cet esprit, les modifications des codes miniers
d’initiatives de réglementation internationale, élaborées portent la plupart du temps sur l’introduction de mesures
pour venir compléter le droit national en matière d’envi- fiscales et douanières dites incitatives et abordent les
ronnement, de protection sociale, de développement questions :
durable... « Les nouveaux codes pour une éthique de
de la participation de l’État jusqu’à son désengagement,
l’investissement sont principalement destinés à complé-
l’État devenant régulateur minier ;
22 ter les législations nationales et les politiques sociales et
de la détermination de critères explicites d’octroi des

Géologues n°152
réglementation et formation

Pays Système Permis Permis Exceptions Rôle de l’État Choix du Royalties et taxes Documen-
exploration exploitation et autorités candidat tation
responsables
Mauritanie Régalien Droit exclusif Droit exclusif valide Le Ministre chargé des Droits attribués « Premier Exonération totale des droits
pour un groupe 30 ans, renouvelable Mines peut autoriser par décret venu, et taxes sur tous les produits
de substances indéfiniment, pour la reconnaissance adopté en premier pendant la recherche et
minérales attri- une période de 10 ans minière sans condition Conseil des servi ». durant les cinq premières
bué pour une à chaque fois. particulière d’octroi. Ministres. années d’exploitation,
superficie de Cadastre, stabilité du régime fiscal
1500 km2, sauf carrés de 1 km2. et faibles taux de royalties.
pour le diamant
qui est attribué
pour 10 000 km2 ;
limité à 20 per-
mis par opéra-
teur (10 pour le
diamant) valide
3 ans, renouve-
lable 2 fois pour
3 ans au maxi-
mum à chaque
fois.
Guinée Régalien Autorisation de Permis d’exploitation : Or, diamant et autres Centre de Pro- Suivant Dispositions fiscales. The Mining
reconnaissance : droit exclusif et libre substances précieuses motion et de les Le titulaire de titres miniers Code,
confère à son disposition des subs- donne droit à l’État le Développement garantiesest assujetti à des 1995.
titulaire le droit tances minières pour versement de certaines Miniers offertes.• droits fixes,
d’effectuer des lesquelles il est délivré taxes substances d’in- (C.P.D.M.). Pour • redevances superficiaires,
travaux de re- et assorti d’une con- térêt particulier – faciliter les • taxes minière entre 10 et 3%
connaissance vention minière. bauxite, minerai de fer, formalités suivant la substance et impôts.
des indices mi- Superficie : limitée par hydrocarbures solides, administratives Droits fixes et redevances su-
néraux dans les le gisement et les ins- etc… et procédures perficiaires applicables à tous
zones non cou- tallations minières tel En raison du niveau relatives aux les titres et à leur renouvelle-
vertes par des que défini par l’étude d’investissement, l’État titres miniers, ment. Mesures incitatives.
titres de recher- de faisabilité. ne prend pas de partici- les investisseurs Droits de douanes :
che ou d’exploi- Durée : participation gratuite s’adresseront • Régime admission temporaire
tation. Durée : 10 ans, renouvelable dans le capital d’une au CPDM qui pendant la recherche sur la
3 mois renouve- par périodes de 5 ans. société exploitant une sert d’interface base liste minière.
lable une fois. Concession minière : substance d’intérêt entre eux et • Pendant la construction,l’ex-
Permis de Re- octroyée en cas de dé- particulier. Au cas où l’Administration. tension et les premières pro-
cherches : droit couverte d’un gise- l’État désirerait entrer Le CPDM se ductions : exonérations sur
exclusif sur les ment dont l’exploita- dans le capital d’une charge se faire équipements, matériels, engins
substances pour tion nécessite des telle société, les moda- diligemment et gros outils mais paiement
lesquelles le per- travaux et des inves- lités en seront définies les démarches d’un droit d’enregistrement
mis est délivré. tissements d’une im- avec l’investisseur au auprès d’autres sur la valeur CAF de 0,5%.
Superficie 500 portance particulière moment de l’établisse- services de • Pendant l’exploitation :
km2 au plus. telle qu’établie par ment de la convention l’Administration exonérations totales pour les
Validité :Trois l’étude de faisabilité et minière. jusqu’à l’éta- industries de transformations,
ans au plus, re- également assortie Dans tous les cas, la blissement du et 5,6% valeur FOB pour les
nouvelable à d’une convention participation de l’État titre minier. industries extractives et leurs
deux reprises minière. au capital d’une société Le CPDM noti- matériels,équipements,engins,
de deux années Durée : sera limitée àun niveau fiera à l’inves- matières premières y compris
chacune. 25 ans, renouvelable qui ne gênera pas le tisseur, au plus les carburants et les lubrifiants
par période de 10 ans. contrôle de l’opération tard deux mois ne rentrant pas dans la trans-
Exploitation artisana- par les investisseurs. après le dépôt formation du minerai en
le :exclusive pour les de sa demande, produit fini ou semi-fini.
nationaux sur des la décision Impôts sur les bénéfives
superficies réservées d’octroi ou non industriels et commerciaux
à cet effet. du titre minier. (BIC) au taux de 35%.
Maroc Régalien Permis de Permis d’exploitation La recherche et l’exploi- L’exploitation Priorité Demande de permis de recher- Bureau du
recherche de pour 4 ans, renouve- tation des phosphates mminière est à la che : 2 000 DH ; renouvellement Service des
carrés de 4 km lable 3 fois plus 12 ans sont réservés à l’état. régie par le demande. 4 000 DH. Permis d’exploita- Mines à
de côté, (1 km pas décision. Conces- principe de la tion :7 200 DH ;renouvellement : Rabat
pour les argiles) sion 50 ans plus 25 libre entreprise 7 200 DH.Prorogation exception-
pour 3 ans, ans max. commerciale. nelle de permis d’exploitation :
renouvelable 7 200 DH. Demande de conces-
4 ans. sion : 20 000 DH.Taxe annuelle
des concessions et des permis
d’exploitation prorogés :
6 000 DH. 23
Tableau 9. La réglementation minière dans quelques pays africains.

Géologues n°152
réglementation et formation

titres miniers et par qui. En effet, comment échapper au de ces pays et favoriser les investissements, et de les
pouvoir discrétionnaire d’un ministère et appliquer la mettre en conformité avec les impératifs de protection
règle du premier arrivé premier servi, avec toutefois la des peuples indigènes, de protection de l’environnement
nuance du premier arrivé, premier pris en considéra- et de développement durable y compris dans le secteur
tion. Cette préoccupation a conduit certains pays à minier. Ces programmes sont suivis de près par les orga-
instaurer un cadastre minier pour améliorer la gestion nismes canadiens et intéressent également de nombreux
des titres miniers ; pays sud-américains.
de la propriété des ressources extraites, et du foncier, les En Afrique du Sud (voir le site www.dme.gov.za), sui-
clauses de transfert ou de vente des droits ; te à un Livre blanc rédigé en 1998, une nouvelle charte
des incidences environnementales et sociales des minière a été signée le 10 octobre 2002 entre les repré-
activités minières. sentants du gouvernement, les compagnies minières et les
syndicats pour favoriser l’émergence de l’émancipation
Une préoccupation nouvelle de la mine artisana-
économique des noirs (Black Economic Empowerment,
le, conduit à des réformes très récentes.
BEE) dans le secteur des mines. Cet accord prévoyait la
Le bilan de ces modifications ne paraît pas faire cession, dans un premier temps, de 15% du capital social
l’unanimité,en particulier sur l’implication de l’État. Quand des sociétés minières à des entreprises issues du BEE, ce
aux résultats, il semble bien qu’en termes de niveaux d’in- pourcentage passant à 26% d’ici 2014. Initialement conçu
vestissements l’Afrique ait progressé, mais est-ce bien du comme un transfert de patrimoine, le BEE a été élargi en
fait des nouveaux codes miniers ? « Broad Based BEE » pour englober l’amélioration de l’em-
Les pays africains se regroupent en de nombreuses ploi et des services aux populations défavorisées (« His-
communautés géographiques ou d’intérêts économiques. torically Disadvantaged People », HDP). Des négociations
L’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA, entre partenaires sociaux ont abouti à des « chartes »
constituée des pays suivants :Bénin,Cameroun,Côte d’Ivoi- sectorielles visant à assurer la mise en œuvre, avec objec-
re, Guinée Bissau, Mali, République Centreafricaine,Tchad, tifs quantifiés, du BEE.C’est ainsi que les grands secteurs
Burkina Faso, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Niger, de l’économie (mine, énergie, finance) ont élaboré des
Sénégal,Togo) a instauré une réglementation minière com- chartes sectorielles.
munautaire (Règlement n°18/2003/CM/UEMOA, portant La législation minière adoptée en mai 2004 a
adoption du Code minier communautaire de l’UEMOA). plutôt pour objectif de concentrer tous les droits sur les
Les États exercent leur souveraineté permanente minerais entre les mains de l’État. La participation de
sur leurs ressources minérales et appliquent le droit réga- l’État dans l’industrie minière est considérée comme un
lien. Ce code reste très général et renvoie à la législation complément et un soutien afin de fournir un environne-
nationale de chaque État membre, en particulier pour les ment légal et fiscal et des infrastructures matérielles
titres miniers, le foncier, les taxes. Il établit la participation efficaces pour cette activité. C’est le Département des
de l’État à 10% du capital social de la société d’exploitation, minéraux et de l’énergie qui administre le « Minerals Act »,
créée dans le droit du pays concerné pendant toute la qui a pour objet de régir la prospection, l’exploitation
durée de la mine. Il précise toutefois certaines garanties, optimale, la transformation ainsi que l’utilisation des
relatives à la propriété privée, au transfert des devises et minéraux aussi bien que les questions de santé, de
des bénéfices, à la stabilité du régime fiscal et douanier, sécurité et de réhabilitation des espaces exploités.
aux obligations générales, et aux avantages particuliers Le gouvernement sud-africain applique le principe du
douaniers ou fiscaux. « utilise le ou perd le ». Sur les nouveaux projets
La Communauté de développement de l’Afrique d’expansion minière en particulier, l’État souhaite encou-
australe (SADC : Angola, Botswana, the Democratic Repu- rager les compagnies minières à développer leurs réserves.
blic of Congo, Lesotho, Madagascar, Malawi, Mauritius, Dans le cas contraire, le gouvernement pourrait supprimer
Mozambique, Namibia, South Africa, Swaziland, United les droits d’exploitation et les attribuer à de nouveaux
Republic of Tanzania, Zambia and Zimbabwe) tente propriétaires.
d’harmoniser les législations pour renforcer l’attractivité

24

Géologues n°152
réglementation et formation

Master professionnel Exploration et Gestion des Ressources Minérales


(EGERM) : un essai de bilan après 6 ans d’existence
Éric Marcoux 1 .

Ce master 2 professionnel est un diplôme inter- L’enseignement à Québec comprend cinq modules
national créé en septembre 2001 (avec le statut de DESS), (15 ECTS, European Credit Transfer System) :
délivré conjointement et reconnu par les universités d’Or- 1) métallogénie et concepts d’exploration minière
léans et de Montréal (université du Québec à Montréal, abordant les grands types de gisements miniers, les
UQAM). La formation se déroule sur un an avec un ensei- provinces métallogéniques, les techniques de prospec-
gnement à l’UQAM de début septembre à mi-décembre, tion et la métallogénie régionale ;
à Orléans de début janvier à fin mars, et se termine par un
2) géotectonique minière avec notamment la défor-
stage en entreprise d’une durée habituelle de six mois.
mation des gîtes minéraux soulignant l’importance de
la structurale en domaine minier ;
La formation et ses spécificités 3) stage de terrain alliant cartographie et métallogé-
La formation est clairement axée sur les ressources nie en secteurs miniers avec visites de mines ;
minérales au sens large. Afin d’ouvrir au maximum les 4) mondialisation, un module de géoéconomie miniè-
possibilités d’emploi, elle combine un enseignement en re traitant de la place des ressources minérales dans la
ressources minières, essentiellement dispensé à Mont- mondialisation et de l’évolution de la consommation
réal, avec un enseignement en ressources des carrières et des réserves ;
(minéraux industriels et matériaux de construction) à 5) communication en sciences de la Terre, afin de fami-
Orléans, un choix qui reflète les compétences industrielles liariser les étudiants avec les différentes techniques de
respectives des deux pays. présentation des résultats.
Les étudiants diplômés visent à devenir des L’enseignement à Orléans comprend également
professionnels disposant de compétences mises au service cinq modules (15 ECTS) :
de l’exploration, de la gestion raisonnée, et de la réhabi-
1) minéralogie appliquée et caractérisation des maté-
litation des ressources du sol et du sous-sol. Ils peuvent
riaux, traitant des techniques de caractérisation (métal-
raisonnablement espérer des postes de géologue dans
lographie, microsonde…) et de matériaux comme les
des équipes de prospection minière ou de minéraux indus-
MIOMs (mâchefers d’incinération des ordures ména-
triels, de responsable de carrière, ainsi que des postes
gères), les charges minérales et les céramiques ;
dans des domaines plus environnementaux de réhabili-
tation en mine et carrière, voire dans des domaines 2) gestion environnementale des mines et carrières
d’aménagement du territoire où le maniement des outils pour une sensibilisation à leur impact environnemen-
informatiques est essentiel. tal et à leur réhabilitation ;
Après la formation généraliste de licence, leur 3) informatique appliquée aux géosciences, notamment
formation de master 2 comprend deux points forts analyse d’images, télédétection, bases de données, et
initiés dès la première année de master à Orléans : les systèmes d’information géographiques (SIG) avec
ressources minérales dans leur contexte, et la maîtrise utilisation de Mapinfo, Arcview ;
des techniques avancées en informatique appliquée aux 4) ressources minérales sensu lato abordant des aspects
géosciences. Une forte composante terrain est mainte- divers essentiels de l’exploitation (géotechnique,
nue par un module de 12 jours en Master 1 et deux modules calculs d’échantillonnage) et des matériaux (essais et
totalisant de 15 à 20 jours en Master 2. Ce chaînage est démarche qualité sur granulats, calculs d’altérabilité,
bien compris des étudiants qui arrivent de plus en plus blocométrie) ;
nombreux à Orléans dès le master 1. Le recrutement, 5) stage de terrain avec visite de sites d’extraction de res-
largement national dans les premières promotions, sources minérales.
évolue ainsi vers un recrutement plus « local » si l’on peut
dire, le « melting pot » souhaité se réalisant en master 1
et non plus en master 2. 25

1. Professeur à l’université d’Orléans, Co-Directeur du master professionnel EGERM.

Géologues n°152
réglementation et formation

Les débouchés professionnels et les informés. L’environnement, si cher aux étudiants actuels,
n’est pas individualisé car il est transverse à la plupart de
relations avec les industriels ces activités. Plusieurs anciens œuvrent pour l’environ-
Le contact professionnel commence dès le stage en nement lorsqu’ils sont en charge de réhabilitations, en
entreprise. Le panorama des entreprises ayant reçu des mines ou en carrières, ou lorsqu’il s’agit de mesurer l’im-
stagiaires est large et reflète bien l’éventail ouvert de la pact éventuel d’une pollution ou d’une exploitation.
formation : compagnies minières (AREVA Vélizy, AURIZON
de Val d’Or,SLN de Nouméa,IOS Chicoutimi…) et pétrolières Réflexions et perspectives
(TOTAL), entreprises de travaux publics et de minéraux
industriels (Lafarge Paris, DAM-IMERYS, Barytine Chaillac, Ces résultats, très encourageants, résultent d’une
EUROVIA du groupe Vinci, SACER…), bureaux d’études formation en phase avec le panorama actuel de l’emploi
(BRGM Orléans, COMIREM Châteauroux…), ou laboratoires dans le domaine des géosciences. L’émergence de la
techniques (LRPC Clermont-Ferrand…). Près de 40% des Chine et de l’Inde avec leurs énormes besoins a bien sûr
stagiaires entament leur carrière professionnelle par un ébranlé la tranquille perspective d’un monde où les
contrat dans l’entreprise qui les a accueillis en stage. matières premières étaient à profusion et faciles d’accès,
et relancé très fortement les activités minières.
Actuellement 41 étudiants français sont diplômés
du cursus EGERM et nous avons pu suivre 39 d’entre eux. La complémentarité Québec – France est un
Sur ces 39 étudiants tous ont un emploi, la répartition se atout majeur de cette excellente insertion. Le séjour au
faisant comme suit : Québec permet un premier contact et même une
immersion dans le monde minier et dans une société
42 % dans les sociétés minières et de prospection en
nord-américaine où la mine est un point fort de l’indus-
France (AREVA, sur chantiers d’expatriation), en
trie nationale. Beaucoup de contacts noués à cette
Nouvelle-Calédonie (Falconbridge, SLN) au Canada
occasion se concrétisent par un stage et/ou une embauche.
(Aurizon, IOS, Omagalpha, GéoNordique) ou au Maroc
(GéoAtlas). Ils sont de façon générale sur des chantiers Pour nos étudiants, le renouveau toujours très
de prospection ou sur des sites miniers ; puissant de la mine se traduit bien par un déplacement
de l’équilibre des embauches d’un pôle « matériaux de
24 % dans des bureaux d’étude de taille locale ou
carrière » pour les premières promotions, vers un pôle
nationale (COMIREM, Géotech, GEOTER…) où ils accom-
nettement plus minier. Les compagnies canadiennes sont
plissent des études géotechniques, environnementales
très demandeuses, mais les compagnies françaises com-
(stabilité de sols, détection de pollution…) ou autres
me AREVA et SLN ont également des diplômés EGERM.
où le maniement des logiciels informatiques est
primordial ; Un autre atout est le soutien actif de profession-
nels (BRGM, AREVA, bureaux d’étude comme GéoHyd en
22 % dans les carrières et minéraux industriels (Lafarge,
France, compagnies minières au Canada) dont bénéficie
SACER, IMERYS, Morillon-Corvol Centre et Île-de-France,
la formation. Il permet de maintenir un contact permanent
VICAT Chambéry, carrière de Voutré…). Leur rôle va de la
avec le monde du travail, et aux professionnels de mieux
prospection de nouvelles ressources, à la réhabilitation
juger les étudiants et leurs capacités. Le programme subit
de sites d’extraction en passant par la gestion de
ainsi chaque année des inflexions afin d’assurer une cohé-
l’exploitation ;
rence toujours plus en phase avec l’évolution du marché
7 % de divers, comme une création d’entreprise dans le de l’emploi. La dualité mines - carrières n’est cependant pas
domaine des géosciences, la poursuite par un PhD à remise en cause et assure une base stable pour l’avenir.
Montréal, ou l’embauche comme rédacteur dans la
Une autre constatation est une augmentation des
première revue française de minéralogie (Le Règne
retours au Québec. Actuellement douze étudiants EGERM
Minéral) ;
(soit près d’un tiers) ont été embauchés par des compa-
5 % (soit 2 étudiants) n’ont pas donné de nouvelles. gnies canadiennes (pas forcément minières), surtout dans
Il est important de noter que tous sans exception les dernières promotions. Ce rush minier au Canada
ont un emploi dans le domaine des sciences de la Terre et, explique en grande partie les effectifs plus modestes de
pour plus de 80 % d’entre eux, dans les ressources miné- Canadiens qui s’inscrivent à la formation : l’offre d’em-
rales. Ces chiffres résultent des dernières informations ploi est telle au Québec qu’on s’arrache les géologues et
dont nous disposons ; ils prennent en compte les presque tous les étudiants arrêtent leurs études avec leur
26 évolutions de carrière dans la mesure où nous en sommes BSc (équivalent de la licence). L’effet démographique

Géologues n°152
réglementation et formation

(7 millions de Québécois contre 64 millions de Français) ne ainsi une dynamique encourageante. Un site Web
vient qu’en second lieu. (http://egerm.actifforum.com), créé par les Anciens et ali-
Après six ans d’existence, EGERM est maintenant menté par eux, fonctionne, facilement accessible avec
une formation connue, demandée et appréciée des Google, et sur lequel voisinent offres d’emplois, tuyaux
employeurs. Plusieurs anciens sont à des postes de de stages, souvenirs du Québec (ou de France), anecdotes,
responsabilité et demandent des stagiaires, créant et photos d’ambiance.

Option d’approfondissement « Génie et gestion des matières premières


minérales »
Alain Cheilletz 1 .

L’enseignement Société générale, Carmeuse, Areva, Eramet, Société


Fondis Electronics, BE Credi, RHODIA, ERAMET, OMEGA
Mise en place dans les années 60, il s’agit d’une geo-consulting, Sté Minelis, IMERYS, Charbonnages de
option de 3ème année de l’École nationale de géologie France.
(ENSG, Nancy) qui conserve l’originalité de la formation
Pour la période 2002-2006, il y a eu 91 stages en
naturaliste propre à l’ENSG et s’appuie sur trois points
entreprises : 56 en France et 35 hors de France, répartis
d’ancrage fondamentaux :
entre la Nouvelle Calédonie (9), l’Europe (6 dans 5 pays),
un parcours diversifié et original pour les élèves le Canada (8), le Mexique et le Pérou (5), l’Australie (4) et
ingénieurs ; l’Afrique (3 dans 3 pays).
un lien fort avec la recherche ;
une formation qui doit devenir attractive à l’interna- La recherche
tional.
La recherche en sciences de la Terre à Nancy est
Le parcours proposé s’inscrit dans le projet Sciences,
forte de son implantation dans deux établissements, l’Ins-
Technologies et Organisation et est organisé en 10 modules
titut national polytechnique de Lorraine (INPL) et l’uni-
de 25 heures autour de trois grandes disciplines fonda-
versité Henri Poincaré (UHP). Plusieurs laboratoires pres-
mentales : Génie Géologique et Minier, Génie Minéral et
tigieux, reconnus par le CNRS, apportent directement leur
Économie et Gestion des matières premières minérales . Le
concours à la formation des élèves-ingénieurs de l’option
détail des modules est donné dans le tableau ci-après.
GGMP de l’ENSG, sous forme de stages et de bourses de
Des activités pédagogiques complémentaires doctorat. Les trois principaux sont le CRPG,le LEM et le G2R-
sont également prévues : visites techniques et forums CREGU.
d’entreprises, congrès de la Société de l’Industrie Miné-
Les élèves bénéficient en outre, pour la recherche
rale (SIM) : 4 jours et visites techniques, quatre modules
de stage et le placement, des relations industrielles fortes
au choix (dans le cadre du Master Géosciences et Génie
de ces laboratoires avec des entreprises comme AREVA,
Civil, Projet de laboratoire, Gestion et simulation d’entre-
IMERYS,ERAMET, SOCIETE LE NICKEL, BPB Placo, VICAT,
prise (PARACAS). Les cours et travaux dirigés sont prolon-
LAFARGE, TALCS DE LUZENAC, BRGM, CGG, RHODIA, HOL-
gés par un stage industriel en entreprise de 6 mois.
CIM, etc.
Une trentaine d’enseignants interviennent dans
cette formation, dont :
ENSG : 13
Conclusion
Extérieurs : 17 dont BRGM (3), CORALIS, CASPEO, Quatre points essentiels permettent de caractéri-
ser cette formation de 3ème année de l’ENSG. 27

1. Courriel. : cheille@crpg.cnrs-nancy.fr

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Sigle Intitulé Contenu


GGM Génie géologique et minier
1 Exploitation des mines Mines souterraines et en carrière, sécurité, législation, dossiers d’autorisations administra-
tives, gestion après-mine.
2 Exploration des ressources Rappels de métallogénie et gîtologie, exploration géochimique et géophysique, imagerie
minérales 3D, principes et utilisation des différents logiciels.
3 Modélisation et évaluation Géostatistiques minières, théories et méthodes de l’échantillonnage, estimation des
des gisements réserves.
GM Génie minéral
1 Métallurgie extractive Techniques et bilans matières, hydrométallurgie et pyrométallurgie.
2 Échanges de matière aux Interfaces caractérisation de l’interface liquide/gaz, adsorption à l’interface solide/gaz,
interfaces cartographie énergétique des surfaces, adsorption à l’interface solide/solution aqueuse.
3 Minéralurgie 2 Étude d’un projet pilote en usine.
4 Matériaux et minéraux Typologie, fabrication, utilisation, recyclage.
industriels
5 Conduite de procédés Méthodes de contrôle des circuits de minéralurgie, étude de cas, utilisation des logiciels de
suivi de fonctionnement .
EGMP Économie et gestion de l’industrie minérale
1 Les matières premières Classification, valeur, filières, les différents acteurs (compagnies, État, banques, organismes
minérales régulateurs).
2 Économie et prospectives Commercialisation des ressources minérales, élaboration d’un projet minier, impact des
nouvelles technologies, prospectives, impact du développement durable.

En premier lieu, le maintien d’un enseignement récents succès obtenus par NORANDA en Abitibi par
des techniques de l’exploitation minière (souterraine et en exemple, où une sélection de cibles réalisée sous Gocad a
carrière) qui permet aujourd’hui de répondre aux besoins permis la localisation de nouveaux gisements de métaux
pressants des industriels de l’industrie minérale dans de base. Les innovations pédagogiques nécessaires ont
ce domaine. En effet, comme dans tous les autres pays été mises au point grâce à l’appui du LIAD-CRPG et une
industriels (Cf. E&M J., April 2004), l’offre de formation en collaboration internationale avec la société MIRA-Geos-
ingénieurs des mines continue de baisser dans toutes les ciences au Canada. La présentation de l’outil Gocad, est
universités, avec en parallèle une demande en matières complétée par une mise en perspective avec d’autres
premières en forte croissance. logiciels comme SURPAC et CORALIS.
Deuxième point, la fidélité à l’enseignement en Enfin, l’approfondissement en cours de l’ensei-
génie minéral, unique en son genre en Europe et qui gnement de l’économie et de la gestion des matières
répond également au besoin constant des industries premières permet d’assurer aux élèves une visibilité
extractives. maximale sur l’ensemble de la chaîne industrielle. Cette
Troisième repère, le développement d’un ensei- partie du programme fait appel aux compétences d’en-
gnement lié à l’évolution technique et technologique seignants-chercheurs ENSG et d’intervenants extérieurs
de la profession, celui de la modélisation 3D sous Gocad. (BRGM, Banques, Compagnies Minières). On consultera
Ces modélisations qui utilisent, comme dans l’industrie à ce sujet la récente publication de Christian Hocquard
pétrolière, les données géologiques, géophysiques et (BRGM) et Jean Claude Samama (ENSG) parue dans la
géochimiques sont aujourd’hui largement pratiquées par revue de l’Industrie Minérale (N°29, Mars 2006).
les compagnies minières, comme en témoignent les

28

Géologues n°152
réglementation et formation

Le Master 2 (P) « Sciences de la Terre, de l’univers et


de l’environnement », spécialité Géosciences : exploration,
risques, de l’université de Grenoble 1 (Joseph Fourier)
Fabrice Cotton 1 .

Ce master a trois ans d’existence et la promotion la reconnaissance des réservoirs (pétroliers et aquifères)
2006-2007 comprend 13 étudiants dont 50% viennent du M1 par utilisation combinée des outils géophysiques et
de Grenoble. Il y avait 14 étudiants en 2004-2005 et 15 en géologiques ; cet enseignement comprend un stage de
2005-2006.Les diplômés des deux premières promotions tra- terrain encadré par les interprétateurs des compagnies
vaillent dans les secteurs professionnels suivants : pétrolières ;
compagnies pétrolières et minières ; la maîtrise des outils géologiques et géophysiques
bureaux d’études de géophysique et autres ; nécessaires à l’élaboration des études de terrain liées à
l’évaluation des risques naturels.
entreprises géotechniques et travaux publics
L’enseignement comporte 9 modules qui sont pré-
services décentralisés de l’État, établissements publics.
sentés dans le tableau ci-dessous.
Le master n’est donc pas spécialisé dans le
domaine minier mais les diplômés, qui ont une solide
formation en géophysique, en SIG et en modélisation, Pour en savoir plus
peuvent trouver un débouché dans le domaine minier. Laboratoire de géophysique interne et tectonophysique,
Le master s’adresse en priorité aux titulaires d’un Observatoire de Grenoble, Maison des Géosciences,
diplôme de master 1 en géologie ou en géophysique, ou BP 53, 38041 Grenoble Cedex 9. Responsable du master :
une maîtrise dans ces domaines. En dehors des ensei- Fabrice Cotton.
gnements généraux, un enseignement plus spécifique Courriel. fabrice.cotton@obs-uijf-grenoble.fr
est donné sur deux spécialités :
Site internet. www. ujf-grenoble.fr

Module Dénomination Durée Contenu


1 Positionnement 40 h, 3 ECTS SIG appliqués aux risques.
2 Géologie des réservoirs 80 h, 6 ECTS Géologie générale, géologie des réservoirs, modèles, diagraphies.
3 Géotechnique, géomécanique et 40 h, 3 ECTS
modélisation numérique
4 Instrumentation et acquisition 80 h, 6 ECTS Géophysique générale, traitement du signal, suivi d’une
de données campagne de forage, stage de terrain géophysique en autonomie.
5 Géophysique de site 40 h, 3 ECTS Atelier géophysique de subsurface, métier de géophysicien en
géophysique appliquée.
6 Réglementation, économie et 40 h, 3 ECTS Normes ISO, notions marchés publics, appels d’offre, anglais
communication technique, macroéconomie et économie du pétrole, démarrage –
suivi et rendu d’un projet.
7 Risques naturels 40 h, 3 ECTS Risques naturels, microzonage et mise en place des PPR.
8 Atelier de terrain 40 h, 3 ECTS Modèles structuraux pour interprétateurs : rift, marge passive,
bassin d’avant-chaîne.
9 Les carbonates 40 h, 3 ECTS

29

1. Courriel. : fabrice.cotton@obs-ujf-grenoble.fr

Géologues n°152
réglementation et formation

Centre d’études supérieures des matières premières (CESMAT)


La Rédaction 1 .

Objectifs et organisation du CESMAT lution et aux besoins de l’industrie minière. Ainsi,


les années 90 et le début des années 2000 ont vu un
Le CESMAT, association loi 1901 créée en 1975, est un accroissement progressif des stagiaires en provenance
organisme de perfectionnement de cadres supérieurs des ministères en charge des matières premières. Depuis
dans le domaine minier. Placé sous la tutelle du ministè- 3 ans maintenant, on note un très net retour des ingé-
re chargé de l’Industrie, il a pour mission la constitution nieurs et géologues travaillant dans des compagnies
d’un réseau de relations avec les pays producteurs de minières.
matières premières minérales. Dans ce but, il est organi-
se en 7 cycles de formation d’une durée de un an, chacun
relevant d’une centre spécifique : La formation
Centre d’études supérieures en exploration et valorisa- Les enseignements, qui sont dispensés par les
tion des ressources minérales (CESEV). professeurs des Écoles et par des experts du monde
Centre d’études supérieures pour le traitement des professionnel public et privé, donnent une large place aux
évolutions et mutations industrielles (CESTEMIN). visites techniques et aux études de cas pratiques. Chaque
stage se termine par un travail individuel encadré par des
Cycle de formation spécialisée en géostatistique (CFSG).
spécialistes, et appliqué au pays d’origine du stagiaire
Centre d’études supérieures pour l’exploitation des concerné. Une rencontre en tête-à-tête avec le secrétaire
carrières et des mines à ciel ouvert (CESECO). général permet de mesurer la satisfaction du stagiaire et
Centre d’études supérieures des projets miniers de recueillir des éléments d’appréciation susceptibles de
(CESPROMIN). faire évoluer le contenu des cycles de formation.
Centre d’études supérieures pour la sécurité et À l’issue de leur formation, les stagiaires reçoivent
l’environnement miniers (CESSEM). un certificat d’ancien stagiaire, éventuellement assorti
Centre d’études supérieures de l’administration publique d’un diplôme délivré par les Écoles d’accueil.
des mines (CESAM). Les caractéristiques de chaque cycle de formation
En complément de ces formations longues en Fran- sont données dans le tableau ci-contre.
ce, le CESMAT participe à l’élaboration de programmes
locaux de formation, avec des modules de une semaine à Modalités pratiques
un mois. Ces programmes sont mis en place dans le cadre
d’actions conduites par la Banque mondiale, l’Union euro- Les candidatures doivent être présentées au res-
péenne, ou autres institutions. Les géologues ne se retrou- ponsable du cycle concerné. Une candidature n’est retenue
vent pas uniquement au CESEV mais un peu dans tous les définitivement qu’après une rencontre, généralement
cycles. dans le pays du futur stagiaire, avec un représentant
du CESMAT. Les frais d’inscription et de scolarité, qui
s’élèvent à environ 15 000 euros/an, sont pris en charge
Les stagiaires par le CESMAT dès lors qu’il s’agit de candidats proposés
Le CESMAT reçoit 70 à 80 stagiaires chaque année, par les organismes miniers, publics ou privés, des pays
toutes formations confondues, soit 10 à 12 ingénieurs ou producteurs.
géologues par formation. À l’été 2006, il avait accueilli Par ailleurs, les candidats doivent disposer de
2 246 stagiaires se répartissant très équitablement dans ressources destinées à couvrir leurs frais de séjour. Pour
108 pays (Afrique, Amérique du Sud, Europe, Asie). Ces cela, des bourses de subsistance peuvent être accordées
stagiaires sont répertoriés dans un annuaire remis à par les instances officielles de France ou du pays
jour annuellement et ils reçoivent un bulletin de liaison d’origine du stagiaire, par des organismes internationaux
bisannuel (le n°69 date de septembre 2006) qui porte (Union européenne, UNESCO, Banque mondiale),ou par les
notamment sur les travaux de fin de cycle des stagiaires. entreprises d’origine des stagiaires.
30 Depuis sa création, le centre s’est adapté à l’évo- Si, à la création du CESMAT en 1975, l’essentiel des

1. Remerciements à Nicolas Cheimanoff, secrétaire général du CESMAT, pour son aide dans l’élaboration de ce document.

Géologues n°152
réglementation et formation

Centre Responsable Structure d’accueil Formation


CESEV Jean-Claude Samama ENSG Nancy (1) Deux spécialisations : exploration et valorisation.
CESTEMIN Alain Graesel ENSMN (2) Mutation des entreprises minières, restructuration, reconversion
régionale.
CFSG Gaëlle Le Loc’h ENSMP (3) Géostatistique, traitement des données, échantillonnage.
CESECO Jean-Alain Fleurisson ENSMP Cinq modules dont conception, élaboration et réalisation d’un
projet minier à ciel ouvert.
CESPROMIN Michel Duchêne ENSMP Neuf modules techniques et économiques concernant l’évalua-
tion d’un projet minier.
CESSEM Hamid Massoud EMA (4) Neuf modules concernant la sécurité, la surveillance et la protec-
tion de l’environnement.
CESAM Damien Goetz ENSMP Administration publique des mines : quatre modules concernant
la réglementation, la sécurité, l’environnement, la gestion et le
financement des entreprises minières.

(1) École nationale supérieure de géologie de Nancy.


(2) École nationale supérieure des mines de Nancy.
(3) École nationale supérieure des mines de Paris.
(4) École des mines d’Alès.

bourses était fourni par la France (coopération et Actim), particulièrement aux problèmes de formation et d’enca-
la situation a très sensiblement évolué depuis puisque drement du personnel dans la mine moderne, ainsi qu’à
désormais, la France ne fournit plus que 10 % des bourses, l’économie mondiale des matières premières (rôle des
les 90 % restant se partageant entre organismes inter- États producteurs et stratégie des entreprises minières).
nationaux et entreprises d’origine. Les comptes rendus de ces travaux sont publiés dans le
bulletin de liaison.
Groupe de réflexion du CESMAT
Le groupe de réflexion du CESMAT a été créé en
CESEV
1978 et a permis à des personnalités françaises et étran- Le CESEV, qui concerne plus spécifiquement les
gères de s’exprimer sur les questions de formation d’in- géologues, fait l’objet d’un article distinct dans le présent
génieurs et d’aide au développement dans le domaine de numéro.
la mise en valeur des richesses minérales. Deux plaquettes,
largement diffusées, sont issues des travaux du groupe :
Pour en savoir plus
« La formation des cadres des entreprises minières :
esquisse d’une théorie du développement économique CESMAT : 60 bd. Saint-Michel, 75272 Paris Cedex 06.
dans le Tiers-Monde ». Tél. : 01 46 34 76 18

« Propos nouveaux sur le sous-développement ». Courriel. : cesmat@paris.ensmp.fr

Depuis 1994, le groupe de réflexion s’appuie Site internet : www.cesmat.asso.fr


directement sur les stagiaires présents et réfléchit plus

31

Géologues n°152
réglementation et formation

Centre d’enseignement supérieur en exploration et valorisation


des ressources minérales (CESEV)
Jean-Claude Samama 1 .

Généralités connaissances de base de type académique pour


lesquelles il est présenté des rappels quand le besoin en
Le CESEV a été créé en 1975 à l’École nationale supé- est exprimé. Cela permet de concentrer la formation sur
rieure de géologie (ENSG) de Nancy (Institut national poly- une véritable culture de l’ingénieur. Par exemple, dans
technique de Lorraine) et agit en tant que branche opé- cette optique, un effort particulier est demandé dans les
rationnelle du Centre d’études supérieures des matières domaines de la recherche documentaire (procédés, pro-
premières (CESMAT) sur financement du ministère de duits…) ou dans celui de l’échantillonnage et du contrôle
l’Économie, des Finances et de l’Industrie, du ministère de qualité.
des Affaires étrangères et accessoirement du ministère
Dans cette même orientation, l’accent est mis sur
de l’Éducation nationale.
le projet de fin de cycle (minimum 11 semaines, mais pou-
Le CESEV a pour mission de perfectionner des vant atteindre 22 semaines), le plus souvent en milieu
cadres ingénieurs ou géologues des organismes et indus- industriel, sinon en laboratoire technique et scientifique.
tries du secteur des matières premières minérales. Il pro- Il s’agit pour les stagiaires – étudiants de faire leurs preuves
pose annuellement un cycle de formation professionnel- en conduisant ou en participant à un projet à caractère
le d’une durée de 9 mois (1er octobre – 30 juin) industriel et/ou économique.
principalement aux candidats venant de pays étrangers
(pays industrialisés, pays en voie d’industrialisation) tout
en réservant quelques places aux diplômés français. Le programme
En parallèle à la formation CESEV, l’ENSG de Les grandes lignes du programme actuellement
Nancy assure le fonctionnement d’un master 2 Pro (men- développé sont présentées ci-dessous. Le programme
tion « Géosciences et génie civil », spécialité « Génie du sol comporte un tronc commun, deux spécialisations entre
et du sous-sol », parcours « Valorisation des ressources lesquelles le stagiaire peut choisir, des visites industrielles
du sous-sol ») sur le même programme mais avec des et un travail de fin d’étude.
modalités de délivrance du diplôme différentes. Cette
organisation permet de mettre en commun les moyens, Tronc commun
d’assurer au master une assise plus large et de proposer Formation générale : économie et gestion des
aux stagiaires CESEV, remplissant les conditions requises, matières premières minérales (228 h).
d’obtenir un diplôme d’État.
Économie minière : macro et microéconomie des
Depuis 1975 le CESEV a accueilli 680 stagiaires. matières premières et des projets.
Le profil type des stagiaires a très fortement évolué depuis
Environnement minier.
l’origine et parallèlement, non seulement le programme
mais même les principes de base de la formation ont évo- Législation et fiscalité, appel d’offres, informatique,
lué d’année en année : ils font l’objet d’une analyse au gestion des entreprises, géostatistique.
départ de chaque promotion. Aujourd’hui,les stagiaires ont Méthodes d’exploitation, évaluation économique d’un
une formation de base correcte, avec toutefois des lacunes, projet minier.
des archaïsmes et une expérience industrielle irrégulière Étude de faisabilité, étude des réserves.
tant en nombre d’années qu’en compétence acquise. Pour
Spécialisation 1 : Bases techniques et économiques
tenir compte de cet auditoire, le programme proposé (voir
de la préparation, conduite et analyse du bilan des projets
ci-dessous) est délibérément tourné vers l’acquisition des
d’exploration (150 h).
connaissances et des méthodes nécessaires à l’élaboration
et à la réalisation des projets industriels dans les domaines Base de projets de recherche et de développement des
de l’exploration, de la géologie minière et du traitement gisements de métaux et de minéraux industriels :
des minerais et des déchets. modèles géologiques, technologiques et économiques
32 de gisements.
Délibérément, il est fait une impasse sur les

1. Courriel. : jean-claude.samama@ensg.inpl-nancy.fr

Géologues n°152
réglementation et formation

Élaboration des projets d’exploration : techniques sance, comptes-rendus et projets obtiennent le certificat
géologiques et champs d’application. CESMAT, le diplôme d’expert de l’Institut national
Géochimie appliquée, géophysique, télédétection. polytechnique de Lorraine (ou ingénieur expert pour les
titulaires d’un diplôme d’ingénieur). Ils peuvent aussi,
Spécialisation 2 : Bases techniques et économiques
s’ils ont rempli les conditions indispensables à leur
des projets de valorisation (140 h).
inscription, obtenir un diplôme de master Pro.
Techniques de l’ingénieur, échantillonnage industriel,
analyses chimiques et minéralogiques.
Élaboration des projets de valorisation.
Conclusion
Technologies des process, calcul et dimensionnement Depuis 1975, il s’est donc développé un bon outil de
de circuit, bilans matières, procédés de métallurgie coopération avec un réseau de relations privilégiées très
extractive, conduite et optimisation de processus de large. Certes, avec le temps, le contact avec un certain
production en usine pilote. nombre de stagiaires s’est estompé ou a cessé, mais il
reste un remarquable réseau de relations entretenu
Visites industrielles : 10 jours.
avec l’aide du bulletin et de l’annuaire du CESMAT. Ce
Travail de fin d’étude : Élaboration d’un projet réseau s’est construit, bien entendu, sur les relations
industriel en géologie minière, valorisation ou économie personnelles, mais il offre des possibilités de contact et de
minière (11 semaines). coopération très solides aux universitaires, organismes
Pour réaliser ce programme, il est largement fait et sociétés françaises dans leurs activités scientifiques,
appel à des ingénieurs et spécialistes d’organismes industrielles et commerciales à l’étranger. Les contacts
techniques, de sociétés industrielles et de consultants pri- avec certains membres du réseau permettent aussi
vés qui représentent 70 % des intervenants. En fin de cycle, d’éclairer soit des problèmes propres à certains pays, soit
les stagiaires qui ont satisfait aux contrôles de connais- d’en saisir l’évolution.

La situation de l’emploi dans le secteur de la géologie minière


au Québec
Michel Jébrak 1 .

Les géologues miniers constituent le fer de lance approximativement à la classe terminale et à la premiè-
de l’exploration au Québec. Près de 600 géologues sont ins- re année d’université en France. À la fin du CEGEP, on entre
crits au tableau de l’Ordre des Géologues du Québec, ordre dans l’Université pour un baccalauréat en sciences (B.Sc.),
qui régule la profession depuis 2001. Comme dans de équivalent à la licence dans le système LMD européen.
nombreuses autres professions en Amérique du Nord, Au Québec, un baccalauréat en géologie dure trois ans et
cette inscription est obligatoire pour pouvoir travailler au comporte 80% des cours dans le domaine, depuis des
Québec ; elle permet également, par reconnaissance, de cours généraux (système Terre, minéralogie…) jusqu’à
travailler dans certaines autres provinces du Canada. des cours plus spécialisés (gîtes métallifères, risques
L’objectif de l’ordre est de protéger l’intérêt du public en environnementaux…). Il faut avoir un baccalauréat en
garantissant le professionnalisme de ses membres, tant géologie pour pouvoir entrer dans l’Ordre des Géologues
sur le plan de la compétence que de l’intégrité. du Québec et pouvoir travailler. C’est d’ailleurs une règle
Pour devenir membre de l’Ordre et pouvoir tra- générale des professions au Québec que d’exiger trois
vailler, une formation de base en géologie est exigée. ans d’université pour pouvoir exercer. Les médecins, les
Le système universitaire québécois est différent tant du psychologues et les pharmaciens sont des exceptions.
système français que du système canadien. En effet, après La majorité des étudiants entrent donc dans la vie
l’équivalent de la première au secondaire, les étudiants professionnelle avec un baccalauréat.
rentrent aux Collèges d’enseignement général et profes- Un tiers environ prolongent leurs études vers la
sionnel (CEGEP), des établissements qui assurent l’orien- maîtrise, et une faible proportion continue jusqu’au doc-
tation des étudiants soit vers l’université, soit vers la vie torat. La maîtrise est l’équivalent du master français, et
professionnelle. Les deux ans de CEGEP correspondent peut être orientée vers la recherche ou vers une approche 33

1. GEO. Professeur, Vice-recteur à la recherche et à la création. Université du Québec à Montréal.

Géologues n°152
réglementation et formation

professionnelle. Elle permet aux étudiants de compléter base. Le programme de maîtrise professionnelle offert
leur formation, par exemple en exploration minière, et conjointement par l’université du Québec à Montréal et
surtout d’acquérir une grande autonomie par la rédac- l’université d’Orléans permet aux étudiants français d’ac-
tion d’un mémoire de recherche ou des stages en entre- quérir l’ensemble de la formation exigée (voir EGERM p.25).
prises. Le doctorat est clairement orienté vers la recherche. L’évolution de carrière des géologues dépend
On entre donc plus vite sur le marché du travail seulement en partie du diplôme atteint. Les géologues
au Québec qu’en Europe. Il peut arriver qu’un géologue qui s’en tiennent à un niveau de baccalauréat ont sou-
ayant fait son baccalauréat en géologie souhaite après vent des premiers emplois de techniciens. L’obtention
quelques années d’expérience revenir aux études, et suivre d’une maîtrise garantit un emploi de plus haut niveau,
un programme de maîtrise. Cet itinéraire n’est cependant permettant d’évoluer plus rapidement vers le rôle de chef
pas très courant car l’entrée dans la vie professionnelle de projet. Mais sauf dans les milieux académiques, ce ne
permet d’avoir un bon revenu, et de s’installer rapide- sont pas les diplômes initiaux qui conditionneront d’une
ment, souvent en région éloignée. Un retour dans le manière absolue la carrière d’un géologue ou de tout
monde académique est alors difficile, sauf peut-être pour autre professionnel, mais bien les talents personnels.
acquérir des savoir-faire complémentaires en gestion dans En 2007, la situation de l’emploi dans le domaine
le cadre d’une maîtrise en administration des affaires de la géologie est clairement exceptionnelle. La pénurie
(MBA) ; ce genre de programme peut en effet se suivre est complète, et il est bien difficile actuellement pour
en fin de semaine et parfois à distance. une compagnie minière de trouver du personnel adéquat.
Pour un géologue français qui souhaite travailler au Cette pénurie est reliée à la crise qu’a connue l’exploration
Québec, il est donc nécessaire de s’inscrire à l’Ordre des minière vers 2000-2001 ; elle a conduit de nombreux
Géologues. La reconnaissance des diplômes non québécois professionnels en exercice à se recycler, en particulier en
n’est pas automatique. Il faut démontrer que le pro- informatique, et a naturellement réduit l’attraction des
gramme universitaire suivi comprend bien les principales sciences de la Terre pour les étudiants. Or, l’industrie miniè-
disciplines nécessaires à l’exercice du métier de géologue : re connaît actuellement une période de surchauffe, avec
ainsi, des connaissances minimales en géologie des gîtes des capitaux disponibles considérables, et des besoins de
minéraux,en géologie de l’Amérique du Nord,et en éthique géologues rarement atteints. La fréquentation du plus
professionnelle sont exigées. Il est parfois nécessaire de important congrès mondial dans le domaine, le PDAC
suivre des cours complémentaires. Et ce n’est pas parce que (Prospectors and Developpers Association of Canada) à
l’on a un diplôme de deuxième ou de troisième cycle que Toronto, l’illustre fort bien, étant passée de 3 000 à 17 000
l’on dispose automatiquement de ces connaissances de personnes en quelques années. La figure 1 donne la
situation des offres d’emplois pour les géologues et les
géophysiciens dans l’hebdomadaire le plus lu au Canada
dans le domaine, le Northern Miner. Il est donc très facile
de trouver un emploi si on dispose des compétences. Mais
on ne doit pas s’illusionner : les cycles économiques se
succédant implacablement, on devra s’attendre à une
décroissance dans les années à venir, avec son cortège de
mise à pied et de réorientation de carrière. Les géologues
de qualité, bien formés, traverseront alors l’étiage. La plu-
part des géologues d’exploration au Québec ont connu
cette cyclicité qui impose une flexibilité dans sa carrière.
Figure 1. L’évolution des annonces dans le Northern Miner.

34

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

Les grands problèmes de la métallogénie :


quelles perspectives pour le futur ?
Michel Jébrak et Éric Marcoux.

On ne peut dire que les grandes questions que se cuprifères étaient bien d’origine magmatique. Pour reve-
posaient De Launay, dès 1913, ont fondamentalement nir aux amas sulfurés, ce type d’études a aussi montré
changé. Il s’agissait alors de comprendre les gisements que même si l’eau de mer dominait dans les fluides, c’était
et leur genèse et de fournir des guides pratiques dans le faible pourcentage de fluides magmatiques (estimé à
l’art des mines. Ces thèmes sont toujours pleinement 1%) qui apportait les métaux. Dans le cas des gisements
d’actualité. Si nous entrons plus avant dans la question épithermaux, on observe un mélange d’eau magmatique
des processus en cause dans la genèse des gisements, on et d’eau superficielle (météorique) parce que ces
pouvait distinguer trois questions majeures : la source gisements sont mis en place à faible profondeur et que
des éléments : d’où viennent les métaux ; le transport des la précipitation des métaux résulte en particulier du
éléments ; et les conditions de dépôt des éléments. mélange entre ces deux types d’eaux.
À ces questions se rajoute un débat sur l’actualisme, Les études d’inclusions fluides ont été essentielles
c’est-à-dire la référence aux processus actuels pour pour déterminer les températures de formation et elles res-
comprendre ceux qui sont intervenus dans le passé. tent aujourd’hui largement utilisées à cette fin. Parmi les
Avant d’aborder les enjeux qui se posent pour le surprises, figure sans aucun doute la grande variation des
XXIe siècle, nous présenterons les grandes avancées du flux géothermiques sur la planète, qui conduit à former
siècle précédent. des gisements de même température à des profondeurs
très différentes : ainsi, des gisements épithermaux, formés
en contexte volcanique au voisinage de la surface, peuvent
Les grandes avancées du XXe siècle se former à la même température que des gisements
Il faut d’abord noter qu’entre De Launay et la fin de mésothermaux, formés à plus de 10 km de profondeur.
la 2ème guerre mondiale les avancées sur ces sujets sont L’étude des conditions de dépôt des minéralisa-
restées modestes et que les progrès ont commencé à tions est un autre secteur qui a beaucoup progressé, en
se concrétiser à partie des années 50. Les avancées ont s’appuyant sur la géochimie et les études expérimentales
essentiellement porté sur les points suivants : la nature destinées à recréer les conditions de précipitation. Ces
des fluides, l’origine de l’eau, les températures et les travaux ont ainsi permis de faire progresser la typologie
conditions de dépôt. des gisements, sur la base d’une meilleure connaissance
Sur la nature des fluides impliqués dans la genèse des mécanismes de précipitation. Ces résultats doivent
des minéralisations, beaucoup de progrès ont été réali- être intégrés dans la connaissance sur les époques et les
sés grâce aux études d’inclusions fluides et aux études provinces métallogéniques, encore que, dans ce domaine,
isotopiques. Une stratification globale des fluides peut on a surtout progressé au niveau de la description de ces
être reconnue dans la lithosphère. Dans la partie supé- ensembles, plus que dans la connaissance ultime de
rieure, la quasi-totalité des fluides hydrothermaux est compréhension des mécanismes à l’échelle globale.
reconnue comme des fluides salés, l’exemple extrême Dans d’autres domaines, les progrès sont moins
étant celui des amas sulfurés dont les isotopes du soufre probants. C’est d’abord la question des sources, des consti-
ont confirmé que les fluides correspondaient principale- tuants majeurs notamment, et de la discrimination entre
ment à de l’eau de mer. Dans la partie profonde, à l’eau les sources superficielles et profondes. Pour certains élé-
salée s’ajoute du gaz carbonique, voire du méthane. Cet- ments (Be, B, Li) la source magmatique est claire. Pour les
te stratification a des conséquences sur la présence de composés du plomb, la géochimie isotopique s’est avé-
minéralisation en profondeur puisque les capacités de rée relativement discriminante quant à l’origine de ce
transport de l’eau salée et du CO2 sont bien différentes. métal, ce qui a pu conduire abusivement à tirer des conclu-
Sur la question de l’origine de l’eau, ce sont sions analogues pour d’autres métaux. Pour les autres
surtout les isotopes de l’oxygène et de l’hydrogène qui éléments mineurs, le problème reste entier. Cette diffi-
ont permis des avancées. Cela a notamment permis de culté pour déterminer la ou les sources des éléments vaut
confirmer que les fluides à l’origine des porphyres aussi pour les majeurs (C, Ca, Na, K) qui sont largement 35

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

distribués dans de nombreux types de roches,à des teneurs roche devient une source et comment les métaux s’en
allant du ppm à des milliers de ppm, ce qui empêche de libèrent, c’est-à-dire la physico-chimie de la dissolution.
bien cerner les sources, sauf si le contexte géologique est On est ici dans le domaine des études expérimentales.
relativement simple. Ces approches doivent maintenant être intégrées dans
Sur le thème du transport des métaux, ce sont les des mécanismes globaux de fonctionnement de la Terre,
études des systèmes hydrothermaux actuels qui ont per- intégrant les roches de la lithosphère inférieure et les res-
mis des avancées, en particulier en ce qui concerne la sources potentielles du manteau, donc une stratification
détermination des facteurs (couple pression – température, des métaux. Il faudra des progrès significatifs dans la
gradient thermique, perméabilité, pompage osmotique, géochimie des magmas, en valorisant les marqueurs
variation de densité…) qui jouent un rôle. Il reste par contre minéralogiques associés aux xénolithes remontés de la
à comprendre la pondération entre ces facteurs et les profondeur comme les grenats.
durées de fonctionnement des systèmes. L’approche globale se traduit aussi en matière de
dynamique superficielle et profonde. La taille des systèmes
hydrothermaux doit être appréhendée de façon plus glo-
Quelles pistes pour avancer au bale en intégrant l’ensemble des systèmes. Les cellules
XXIe siècle ? hydrothermales peuvent présenter des tailles considérables,
Nous reprendrons les principales entrées abordées sauf dans des contextes comme les dorsales océaniques,
au chapitre précédent. Il faut cependant souligner les comme le montrent les isotopes de l’hélium.
changements d’échelle majeurs qui se sont produits. Les Les sondages profonds comme celui de Kola en
métallogénistes sont restés très longtemps collés sur les Russie et le KTB en Allemagne ont montré l’existence de
gisements, examinant la minéralogie ou les contrôles circulations au moins jusqu’à 11 km de profondeur et peut-
structuraux de détail. Ils travaillent maintenant dans un être jusqu’à une trentaine de kilomètres. Ces résultats
contexte beaucoup plus global, à l’échelle de la Terre, et contribuent à ce que l’on prenne aujourd’hui en compte
pas seulement au niveau de circulations simplement des systèmes considérablement élargis.
crustales. La dynamique mantellique joue un rôle croissant Comment progresser sur le transport ? À l’image de
et de grands phénomènes comme les « plumes » ce que font les pétroliers pour étudier la migration des
mantelliques doivent être pris en compte dans les fluides dans les bassins, c’est de la modélisation que pour-
explications génétiques proposées, à l’image des hypo- raient venir des progrès, d’autant que plusieurs écoles
thèses avancées pour la genèse des grands gisements de sont en débat. Certains pensent qu’il faut distinguer des
Ni-Cu (Yakubchuk et Nikishin, 2004) ou celle des amas fluides qui extraient et d’autres qui transportent. D’autres
sulfurés géants (Barrie et Hannington, 2000). Condie considèrent qu’il s’agit du même fluide qui évolue au
(2001) et Pirajno (2000) évoquent même le rôle de fil des interactions eau – roche ; le changement serait
superplumes susceptibles de bouleverser les paysages, permanent. La question de la durée des phénomènes n’est
du fond des océans à la composition de l’atmosphère. pas non plus résolue. Là encore, la modélisation peut fai-
De même, dans l’échelle des temps, on prend en re progresser, encore faut-il trouver les bonnes données à
compte de plus en plus des causes spécifiques aux époques entrer. Enfin, l’évolution des outils analytiques permettra
géologiques considérées et on ne se limite plus à la trans- des déterminations de plus en plus fines. La nano-métal-
position de l’actualisme dans le passé. Enfin, le climat est logénie est à nos portes, et permettra peut être de fran-
de plus en plus en plus pris en compte, comme jouant un chir l’espace entre l’approche géochimique sur les fluides
rôle majeur dans la métallogénie générale, à l’image des et celle basée sur la minéralogie des particules solides.
formations ferrifères (« Banded Iron Formations », BIF) du Sur la question du dépôt, on a progressé dans la
Précambrien, déposées en atmosphère de gaz carbonique. détermination des mécanismes et des conditions de dépôt,
Au niveau de l’étude des sources, une première mais également dans l’évaluation de la durée des phé-
évolution est la prise en compte d’un plus grand nombre nomènes, grâce aux datations argon-argon. Sur de nom-
d’isotopes : Re-Os, isotopes du cuivre, du fer, du calcium ou breux gisements, notamment des porphyres cuprifères
du molybdène. Ces approches permettent de progresser de la ceinture pacifique, on a ainsi pu prouver que la durée
dans la comparaison entre les minéralisations et les roches pour que la concentration minérale se forme ne dépassait
potentiellement riches dans les métaux correspondants. pas un million d’années, et souvent moins de 200 000
Des progrès sont à attendre également de l’extrac- ans. Pour aller plus loin, c’est-à-dire rechercher des pas de
36 tion des métaux. La question posée est la façon dont une temps plus fins, la méthode reste à déterminer. Il est

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

probable que l’on devra s’intéresser à des gisements producteur historique du fer scandinave, Kiruna en
récents, susceptible d’une géochronologie permettant Suède, à des concentrations d’or et de cuivre dans des
des échelles de datations de quelques dizaines de mil- environnements latéritiques au Brésil (Igarape Bahia
liers d’années. par exemple). L’étude détaillée de l’environnement des
Liée à cette problématique du dépôt se pose la gisements a permis également de mettre en évidence
question du piégeage et de son efficacité. Quelle des caractéristiques particulières des magmas métallo-
quantité de métaux le piège a-t-il retenu et quelle est géniques tels les magmas adakitiques, riches en stron-
l’importance des fuites ? Dans les fumeurs noirs, les études tium et pauvres en yttrium.
ont montré que 3% des métaux étaient piégés dans le Science appliquée, la métallogénie est donc à la
fumeur en croissance et 97% partaient dans le panache. fois poussée par la recherche fondamentale, productrice
Certes, on se trouve ici en milieu océanique ouvert et la de concepts novateurs, de nouveaux outils analytiques, ou
situation est différente en contexte terrestre de circulation de liens avec d’autres disciplines, et tirée par l’exploration
dans des zones de faiblesse ; il n’en reste pas moins que minière, l’industrie des ressources. La rencontre entre ces
l’aptitude d’un piège à capter plus ou moins de métaux deux approches se fait sur le terrain. La technologie
reste posée. La question de la méthode à utiliser pour nous permet maintenant une meilleure qualité des
aborder ce problème reste ouverte : modélisation pour prélèvements et un ancrage plus fort dans la réalité. Les
quantifier les fluides et les flux, études de système actuel… géologues explorateurs et les scientifiques métallogé-
Comme nous l’avons déjà évoqué, le contexte pris nistes se retrouvent pleinement dans cette évolution. De
en compte est devenu de plus en plus global. À titre plus, la formation des explorateurs miniers s’est accrue
d’exemples, on peut citer : considérablement au cours de ces dernières années.
Ainsi, au Canada, la plupart des géologues d’exploration
l’impact des phénomènes climatiques globaux, par
étaient titulaire d’un baccalauréat il y a 20 ans (niveau
exemple le gel de la Terre (« Snowball ») qui a du se pro-
Bac+4 européen). Ils doivent maintenant disposer d’une
duire au moins une fois au Protérozoïque (2,2 à 2,3 Ga) ;
maîtrise (Bac+6 européen), et donc acquérir une bien
le lien entre ces périodes de refroidissement et la meilleure connaissance des modèles de gisement. On
géochimie océanique, à l’origine de dépôts de fer et de peut donc soutenir aujourd’hui que l’exploration minière,
manganèse ; tant par son contexte risqué, sa dynamique enthousias-
l’impact de chutes de météorites qui a entraîné de fortes te, la durée des efforts requis, et sa forte intensité intel-
ruptures dont les traces ne sont pas forcément très lectuelle présente des caractéristiques qui la rapproche
lisibles aujourd’hui ; beaucoup du monde des biotechnologies. L’image publique
la composition chimique de l’atmosphère, qui influe de cette profession devra donc s’infléchir considérable-
sur la composition chimique des formations géolo- ment au fil des futures découvertes.
giques ;
l’existence d’époques et de provinces métallogéniques Pour en savoir plus
dont il faut chercher les causes à de vastes échelles,
Barrie C.T. et Hannington M.D., éd. (2000) Volcanic-
dans des évènements majeurs.
associated massive sulfide deposits: processes and
Au cours de ces dernières années, on a multiplié exemples in modern and ancient settings. Review in
les études de cas, à la demande de l’industrie minière la Economic Geology 8, 408 p.
plupart du temps. Ces études descriptives ont permis de
Condie K.C. (2001) Mantle plumes and their record in
disposer aujourd’hui d’une base de données considérable.
Earth history. Cambridge, 320 p.
En corollaire, il est devenu de plus en plus difficile de
faire des découvertes novatrices en utilisant les méthodes Dardenne M.A. et Schobbenhaus C. (2001) Metaloge-
traditionnelles sur des gisements même récemment nese do Brasil. Brasilia : Editora Universidade de
découverts. Ces études ont néanmoins permet de préci- Brasilia, 392 p.
ser la typologie existante, voire de définir des sous-types De Launay, L. (1913) Traité de métallogénie - Gîtes
ou encore de trouver de nouveaux gisements à partir des minéraux et métallifères. Gisement, recherche, pro-
modèles proposés. C’est ainsi, à titre d’exemple, que le duction et commerce des minéraux utiles et minerais.
modèle IOGC (« Iron Oxide Gold Copper ») a pu être récem- Description des principales mines. Paris et Liège :
ment défini et que des gisements, antérieurement ratta- Librairie Polytechnique Ch. Béranger.
chés à d’autres types ont pu s’y retrouver, du Edward R. et Atkinson K. (1986) Ore deposit geology, 37

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

and its influence on mineral exploration. Chapman and Mitchell A.H.G. et Garson M.S. (1981). Mineral deposits
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Nouvelles approches analytiques, expérimentales et numériques appli-


quées à la compréhension de la genèse des concentrations métalliques
Michel Cathelineau 1 .

Quels objectifs pour les Sur le plan environnemental :


Comment exploiter « proprement » ?
métallogénistes français ?
Comment réhabiliter les sites pollués en métaux
Concernant les métaux et les géomatériaux, les toxiques, et utiliser des matériaux, autrefois considérés
questions relèvent de la métallogenèse et de l’environ- comme des « déchets », comme des ressources ?
nement. Sur le thème de la métallogenèse, trois grands
Tous ces thèmes donnent lieu à de nombreuses
domaines de recherche :
recherches à l’échelle mondiale. Nous nous limitons à
Processus de fractionnement à l’origine des hyper-accu- évoquer ici les résultats obtenus récemment dans le cas
mulations métalliques ? du GdR Transmet (BRGM-CNRS) et les perspectives qui
Caractérisation des grands systèmes métallogéniques ? ont résulté de cette activité.
38 Où sont les métaux et les géo-matériaux pour l’avenir ?

1. Courriel : michel.cathelineau@g2r.uhp-nancy.fr

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

Avancées du groupe du GdR L’étude enfin du lien entre adakites et gisements


Cu-Au à caractère porphyrique ou épithermal, en s’ap-
Transmet (2001-2006) puyant sur les analyses sur inclusions fluides vitreuses,
Ce GdR a été constitué par deux partenaires, le confirmées expérimentalement, a conduit à proposer que
CNRS et le BRGM. Les travaux ont duré de 2001 à 2006 et seules les adakites « vraies » puissent être préférentielle-
ont permis des avancées significatives dans plusieurs ment enrichies en soufre, en éléments chalcophiles et en
domaines. or. Des travaux très novateurs sur la solubilité de l’or dans
Premier domaine : l’analyse des paléofluides. Les ce type de magma montrent que le soufre augmente la
études réalisées ont permis de progresser dans l’analyse in solubilité de l’or par plus d’un ordre de grandeur.
situ de ces fluides et donc dans les conclusions génétiques Ces travaux expérimentaux et analytiques
qui peuvent en être tirées (pression, température, donc enrichissent considérablement la connaissance des
éventuellement enfouissement). La détermination préci- processus de fractionnements des métaux dans la
se des trajets P-T et la mise en évidence de l’évolution bru- lithosphère. Il sont cependant indissociables d’une connais-
tale de pression ou température permet d’évaluer les causes sance géologique, structurale et géodynamique des cas
des processus (rupture sismique des failles, réchauffement étudiés. Ils donnent in fine des guides conceptuels sur les
lié à des intrusions cachées, l’ensemble de ces processus mécanismes à l’origine des préconcentrations magma-
pouvant avoir un rôle clé sur le dépôt).Toutefois, la mise au tiques et donc leur localisation potentielle, ou sur les
point des méthodes pour l’analyse détaillée des concen- processus efficaces pour l’enrichissement des métaux
trations élementaires (métaux, éléments en traces) reste dans la phase fluide. Les conditions de pression et tempé-
difficile,et implique des intercomparaisons entre méthodes, rature les plus propices à ces fractionnements et la natu-
Laser Induced Breakdown Spectroscopy (LIBS) et Laser-Induc- re des phases fluides ou magmatiques impliquées don-
tively Coupled Plasma Mass Spectrometry (LA-ICP-MS) nent également des pistes pour la localisation des
notamment. Il faut en général compléter les résultats obte- conditions les plus favorables à la formation des gisements.
nus par les méthodes non destructrices (Raman, Synchro-
tron) puis par méthodes destructrices sur les mêmes types Perspectives
d’inclusions (LIBS pour les majeurs, LA-ICP-MS pour les
Pour l’avenir, l’amélioration des modèles métallo-
traces). C’est sur cette base intercomparative que l’on peut
géniques passe par une réponse aux questions suivantes.
espérer reconstituer les paléochimie des fluides et donc
Quels sont :
évaluer la spéciation des métaux.
les processus les plus significatifs à l’origine des
À ce jour, il n’existe que peu d’études intégrées et
concentrations en métaux : fonctionnement de la
d’application à des fluides liés aux transferts des métaux,en
source, efficacité du fractionnement initial, conditions
dehors des fluides magmatiques plus faciles pour tester les
de stabilité des porteurs de métal ;
méthodes car très salins.Parmi les questions qui pourraient
être étudiées à l’avenir : le rôle des saumures dans la mobi- les contrôles de l’efficacité du transport : rôle de la
lité de l’uranium ou de l’argent ; l’impact des mélanges de présence de ligands comme le soufre ou le chlore ;
fluides sur la spéciation et le dépôt des métaux. les facteurs contrôlant l’efficacité des processus de dépôt
Deuxième domaine de progrès, l’expérimentation (mélange, dilution, redox) ?
sur la spéciation des métaux, leur solubilité dans les Suite aux travaux réalisés par le GdR, notamment
magmas, et le partage des métaux entre phase fluide et sur les systèmes épithermaux et mésothermaux aurifères
phase vapeur. Un des résultats majeurs obtenus dans associés à l’exhumation post-orogénique et aux plans de
le cadre du GdR concerne la complexation de l’or et la sta- subduction, il apparaît que la concentration du soufre
bilité des minéraux qui lui sont le plus souvent associés régule de manière critique la solubilité des porteurs de
(porteurs de Sb et As). Les travaux réalisés ont permis d’ac- métaux, de la source jusqu’au gisement. Les études pour-
quérir des données thermodynamiques et de développer raient se poursuivre sur le rôle du soufre, par rapport à
des modèles thermodynamiques prédictifs du compor- d’autres ligands comme le chlore, sur les fractionnements
tement de l’or en solution. De même, les études menées élémentaires dans la lithosphère, et cela au moyen d’ex-
sur la spéciation des métaux dans les vapeurs et le partage périmentations, de modélisations d’interactions eau-roche
des métaux entre phases vapeur et liquide apportent des et d’analyses des paléofluides.
contraintes fortes aux modèles de liaison porphyres- Dans le domaine de l’uranium, autre secteur de
épithermaux. recherche important des équipes françaises, notamment 39

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

du G2R-CREGU, il convient de poursuivre les travaux sur le vation des concentrations primaires ou leur dispersion
fonctionnement des sources (stabilité des porteurs sont entre autres, des clés de la compréhension de la
primaires), le rôle des saumures sur la solubilisation de formation des concentrations économiques.
ces porteurs et le transport de l’uranium. Dans les zones À l’échelle française, ces recherches se poursuivent
de dépôt, l’impact des mélanges de fluides et des pro- sous l’impulsion des grands groupes d’exploration miniè-
cessus de dilution sur le comportement des métaux re (AREVA NC, en particulier pour l’uranium), et du point
(approche thermodynamique, détermination des sources de vue des programmes nationaux dans le cadre du
et évolution des fluides), la relation entre migration de programme du CNRS 3F (Failles, Fluides, Flux).
fluides et grands événements géodynamiques, la préser-

La métallogénie de l’or : évolution des modèles et cibles prioritaires de


la recherche au fil des années
Vincent Bouchot 1 et Jean-Pierre Milesi 2 .

Introduction Autre nouveauté, des passerelles ont été tendues


entre des modèles à l’origine apparemment incompatibles
L’évolution de la connaissance sur l’or et les modèles (eexemple : modèles détritiques versus épigénétiques)
métallogéniques associés n’est pas linéaire car intimement comme l’exemple remarquable du Witwatersrand qui sera
liée aux variations du prix du métal jaune.Le déclenchement largement discuté dans cet article. Plus globalement, les
d’un nouveau rush aurifère se traduit par la prospection de modèles ont permis de mieux cerner l’étagement vertical des
nouveaux terrains de jeux et l’acquisition concomitante de minéralisations dans la croûte, clé essentielle pour l’explo-
nouvelles données, tant en exploration qu’en R&D. La capi- ration : c’est notamment le cas du modèle or orogénique.
talisation de ces nouvelles informations aboutit, à moyen
Comme c’est le cas pour tout géoscientifique, le
terme, à l’émergence de nouveaux modèles de gisements,
modèle qu’il développe possède ses limites. Ainsi, à l’oc-
moyens efficaces de synthétiser la connaissance à un moment
casion d’un nouveau « saut de connaissance », le modè-
donné. L’exemple de la ruée aurifère des années 1980-90 a
le devra être amélioré, modifié, transformé, bref dépassé
été, à cet égard, très fructueuse en termes d’innovations
pour, in fine, découvrir de nouveaux gisements.
conceptuelles. Quelle sont ces innovations ?
L’objectif de cet article est de montrer, à partir des
La notion de système minéralisateur aurifère, deux grands modèles de système minéralisateur aurifè-
fondée sur une vision globale du phénomène aurifère, a re, comment la connaissance métallogénique a évolué
permis d’agréger de multiples modèles unitaires de ces 15 dernières années. On abordera ensuite les modèles
gisements différents, considérés antérieurement sans émergeant actuellement, compte tenu du foisonnement
lien entre eux. Ce fut notamment le cas du système d’or de connaissances lié au nouveau rush minier.
orogénique, qui compte tenu de la grande variété des
gisements associés – allant du classique « filon quartzeux
aux sulfures disséminés dans les BIF –, a longtemps été Le système minéralisateur
source de controverses entre métallogénistes. or orogénique
Les systèmes minéralisateurs fonctionnent à des Les gisements d’or épigénétiques mis en place en
périodes précises de l’évolution de la Terre (crises aurifères) contexte orogénique offrent une large variété d’encais-
et affectent des tronçons de lithosphère considérables (Pro- sants lithologiques, de contextes structuraux et in fine de
vinces métallifères) parce qu’ils résultent de phénomènes morphologies des corps minéralisés. Ainsi, avant les années
géodynamiques particuliers (par exemple : zone de sub- 1990, de multiples modèles descriptifs, ont pu être
duction, chaîne collisionnelle…). À cet égard, les modèles proposés (voir Bache, 1987), l’accent étant mis sur la
élaborés doivent permettre de prédire la localisation de lithologie de l’encaissant (greenstones belt hosted,
40 nouvelles provinces métallifères (gîtologie prévisionnelle). turbidite hosted, metamorphosed rocks hosted, BIF hosted,

1. Courriel. : v.bouchot@brgm.fr
2. Courriel. : jean-pierre.milesi@areva.com

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

listvenite type…), sur le contrôle structural (shear zone Kolar (Inde), Renco (Zimbabwe) ou Griffins Find (Australie)
aurifère, fold related, flat faults related, tension gashes vein en sont des exemples remarquables. Ainsi, l’ancienne
type), sur la morphologie des minéralisations (saddle reef) terminologie « or mésothermal » est remplacé par
ou encore sur leur faible quantité de sulfures associés l’appellation « or orogénique » où le gisement est quali-
(low-sulfide Au-quartz veins). À l’époque, la grande fié (Fig.1) de épi-, meso- ou hypo-zonal en fonction de sa
majorité des gisements exploités concernaient des veines profondeur de mise en place (Groves et al., 1998). De
quartzeuses à fortes teneurs, de l’ordre de 10 g/t Au. nouvelles provinces, anciennement délaissées, sont
Au début des années 1990, ces modèles spécifiques alors explorées, aboutissant à la découverte de grands
ont été agrégés pour aboutir à un modèle conceptuel glo- gisements (Southern Cross belt en Australie, Tasiast en
bal soutenant que cette diversité résultait principalement Mauritanie). De la même façon, on s’intéresse à des
de l’étagement des gisements archéens dans la croûte domaines très peu métamorphiques car susceptibles de
entre 20 km et la subsurface (Fig. 1). Le modèle de conti- contenir des gisements , marqueurs des tops de systèmes
nuum crustal des gisements d’or orogénique était né, les minéralisateurs : le gisement archéen de Wiluna en
principaux concepteurs en étant Colvine et al. (1989) au Australie occidentale (5 km) et celui du gisement du
Canada (craton du Supérieur) et Groves et al. (1993, 1998) Châtelet (1 km) ont été interprétés en ces termes. Pour
en Australie (craton du Yilgarn). En parallèle, des modèles l’exploration, un témoin remarquable de l’étagement
orogéniques émergeaient pour d’autres périodes orogé- des gisements dans la croûte concerne les altérations
niques, appuyant ainsi la notion de crises aurifères à la hydrothermales, qui, du sommet vers la base du système,
fin de l’édification des chaînes éburnéenne (Milesi et al., se traduisent par des halos à kaolinite (subsurface), à
1989), calédonienne (Bierlein et al., 1999), varisque (Boiron séricite-chlorite (épizone), à biotite (mésozone) puis à
et al., 2003, Bouchot et al., 2005), en plus de l’Archéen. diopside (hypozone).
La première idée force du modèle de continuum Une seconde idée force du modèle concerne un
réside dans le fait que les gisements peuvent se former à point peu connu, à savoir la variété du contexte structu-
des profondeurs considérables, dans le domaine ductile ral pendant le piégeage des minéralisations. Même si la
sensu stricto, jusqu’en limite granulite/amphibolite…, alors proximité des zones de cisaillement s’avère un contexte
qu’antérieurement le paradigme soutenait que les privilégié pour le contrôle des gisements orogéniques
gisements se mettaient en place quasi exclusivement (notion de réseaux de faille de premier et deuxième ordre),
à la limite ductile-cassant, les ouvertures ne pouvant il apparaît que, localement dans le bâti orogénique, des
s’effectuer en ductile franc. L’existence des gisements de blocs lithologiques soumis à des phénomènes de tension
pures (peu ou pas de cisaillement observés sinon en bor-
dure des blocs) peuvent constituer des sites remarquables
de piégeage de l’or. C’est notamment le cas des gisements
archéens de Mount-Charlotte ou de Coolgardie (Australie)
où les phénomènes de tension provoquent l’ouverture de
multiples fentes de quartz (conduits des fluides) et où
l’encaissant magmatique basique, riche en fer (microma-
gnétites disséminées), va interagir avec les fluides
aurifères pour former de multiples halos sulfurés à or
disséminé qui, connectés entre eux, forment de grands
volumes exploitables. De tels gisements peuvent aujour-
d’hui être exploités à basse teneur (3-5 g/t), en souterrain
par la méthode de block caving. Un tel modèle échappe au
modèle classique de filon quartzeux aurifère et a ouvert
de nouvelles perspectives pour l’exploration.
Une troisième idée force du modèle montre
l’importance des phénomènes de soulèvement du bâti
pendant le dépôt polyphasé de la minéralisation. Cette
remontée se traduit notamment par une paragenèse
rétromorphique de l’altération hydrothermale par
Figure 1. Modèle archéen de continuum avec étagement vertical des rapport à celle du pic du métamorphisme, du moins
gisements. quand le gisement se forme en conditions méso à 41

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

épizonales. Le modèle orogénique varisque, établi dans espagnols de El Valle ou Bruès (Gloaguen, 2006). Dans le
le Massif central français par Bouchot et al. (2005) soutient Birrimien d’Afrique de l’Ouest, ce modèle est solidement
que l’intensité du soulèvement varie d’un bloc litho- défendu pour les gisements orogéniques de Yaou, Yamfo
structural à un autre : ainsi, le bloc contenant le gisement ou Angovia.
profond de Salsigne aura été soumis à un soulèvement très En substance, après le développement du concept
intense en raison de sa position proximale par rapport au unificateur de gisement d‘or orogénique, de nouveaux
dôme granito-gneissique de la Montagne noire alors que modèles tentent de s’individualiser permettant in fine,
le bloc contenant le gisement superficiel du Châtelet de représenter au mieux la complexité des phénomènes.
n’aura peu ou pas été soulevé et donc ainsi préservé de On peut se demander jusqu’où ira ce foisonnement ? L’ave-
l’érosion (Fig.2, p.43). En complément, Boiron et al. (2003) nir de la métallogénie nous le dira !
insistent sur le mélange entre les fluides aurifères pro-
fonds et les eaux météoriques pour la précipitation de
l’or dans la croûte supérieure. Le système minéralisateur Or
Une quatrième idée force concerne le calage tem- Witwatersrand revisité
porel des gisements. En premier lieu, l’analyse structurale Quels ont été les ressorts du siècle de controverse
des minéralisations « stratoïdes » a permis de prouver leur dans l’histoire des modèles de formation des conglomé-
caractère épigénétique (exemples : BIF aurifères, minerai rats aurifères du Witwatersrand et quels en étaient les
2X de Salsigne) alors que la polémique syngénétique enjeux miniers ? Rappelons les ordres de grandeur du Wit-
versus épigénétique était encore vive dans les années 1980. watersrand :49 400 t d’or produits entre 1886 et 2003 ; près
Cependant, des concentrations aurifères précoces, bien de 38 000 t en terre, soit la moitié environ des ressources
qu’affectées par le métamorphisme orogénique, ont pu d’or sur la planète (Frimmel et Minter, 2002). Il ne sera
être identifiées ; c’est par exemple le cas des pipes pas question ici de réécrire les papiers qui, à plusieurs
tourmaliniques de Loulo (Mali,Milesi et al., 1989),des miné- époques, ont illustré et comparé les principaux modèles
ralisations épithermales de St-Georges sur Loire (Massif en présence (cf. les synthèses de Pretorius, 1974, 1975, 1991
armoricain), des paléoplacers du Witswatersrand (Afrique et Frimmel et Minter, 2002, Frimmel, 2005), mais de les
du Sud ; cf. § 2). Il s’avère que ces minéralisations précoces replacer à la fois dans leur contexte minier, économique
ont pu être remobilisées lors de l’orogène. Concernant et scientifique, depuis les années 80 à aujourd’hui.
l’âge des gisements orogéniques, les données géochrono-
logiques acquises pendant ces 15 dernières années (en Jusqu’au début des années 90, des guides
Ar/Ar, Re/Os, U/Pb) ont démontré que, à un point donné de de recherches « sédimentologiques » ne
la chaîne, l’événement aurifère s’est produit pendant un
prenant pas totalement en compte une
court laps de temps de l’ordre de 10 Ma (300-310 Ma, vers
2,6 Ga dans l’archéen, vers 2,08 Ga dans le Birrimien),mais
histoire complexe
que la crise métallifère en question peut être diachrone Le modèle de « paléoplacers » était le modèle le
d’une zone à une autre au sein d’un même craton. plus utilisé depuis les années 60 (Minter, 1976, 1991). Ce
Une cinquième et dernière idée force, pour notre modèle avait cependant évolué en modèle de « paléo-
propos, concerne le rôle des magmas. La plupart des tra- placers modifiés », pour tenir compte des événements
vaux faits dans le domaine de l’or orogénique ont montré survenus postérieurement aux dépôts des conglomérats.
que les magmas constituent une source négligeable de l’or Toutefois, la nature et l’amplitude de ces événements
des systèmes orogéniques (Groves et al., 1998, Boiron et étaient généralement considérées comme des remobili-
al., 2003, Bouchot et al., 2006), l’origine de l’or étant a sations quasi in situ, limitées à l’enveloppe des « reefs »
rechercher de préférence dans la croûte profonde voire minéralisés.
dans le manteau. Cependant des travaux récents, notam- La stratigraphie et la sédimentologie fine fournis-
ment ceux de Lang et Baker (2001),suggèrent que dans des saient des guides d’exploration précieux (Minter, 1976,
conditions orogéniques singulières bien qu’encore mal 1991). Les études minéralogiques particulièrement soi-
contraintes (accrétion à collision), les intrusions magma- gnées (Ramdhor, 1958, Minter, 1976 et Minter et al., 1988)
tiques peuvent constituer les sources principales de l’or. fournissaient des arguments pour témoigner de l’intro-
Il en résulte un modèle, non encore stabilisé, dénommé duction précoce des minéralisations dans les sédiments :
« Intrusion-related gold system » qui progresse dans les pyrite détritique, kérogène détritique, galets d’uranini-
esprits ! Dans le varisque, ce type émergent contient les te/pechblende partiellement préservés à la base de
42 gîtes de référence portugais de Jales et Salave et les gîtes certaines lentilles de conglomérats, ou reconnaissables

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

Figure 2. Modèle varisque avec soulèvement différentiel de blocs.


Légende : Mar = Marche, Bia = Les Biards, Cev = Cévennes, StY = Saint-Yrieix, Sals =Salsigne, Ech = Échassières, Cha = Le Châtelet, N-Li = Nord-Limousin.

sous forme de fantômes, pépites d’or, etc. Des processus et de leucoxène uranifère, recristallisation des pyrites et
pro parte syn-diagénétiques, liés à un environnement de l’or, et présence, dans la paragenèse accompagnatrice,
réducteur où des migrations limitées, étaient jugés de nombreux minéraux métamorphiques. À cette époque,
responsables des modifications à courte distance les sources de l’or et de l’uranium étaient peu étudiées
perceptibles notamment sous la forme de : dissolution ou discutées tandis que l’ampleur des migrations de ces
de l’uraninite suivie de la précipitation de titanates substances n’était pas quantifiée.
d’uranium (Smits, 1984, 1990), dispersion de brannérite 43

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connaissance des gîtes minéraux

L’histoire géologique complexe du Witwatersrand Rand puisque des conglomérats de la base du groupe
était reconnue (Pretorius, 1991), mais les guides utilisés, fai- néoarchéen du Transvaal (par exemple le Black Reef,
saient peu intervenir les phénomènes postérieurs aux Phillips et Myers,1989) sont également aurifères et riches
dépôts. Certes des études tectoniques et métamorphiques, en tourmaline (considérée comme typique des gise-
réalisées à la fin des années 80, apportaient un éclairage ments de type exhalatif-sédimentaire) et en minéraux
sur l’histoire complexe des dépôts (Burke et al. 1986, Sta- témoignant d’une paragenèse classique des gisements
nistreet et al. 1986, De la Rey Winter, 1987), mais les guides orogéniques (sphalérite, galène, rutile, bravoïte, etc.) ;
de recherches « sédimentologiques » fondés sur des études l’or et l’uranium (brannérite, coffinite, leucoxène
pertinentes et fines focalisées sur les conglomérats, étaient uranifère) des matrices recristallisées sont piégés dans
encore fertiles et les sociétés minières les ont utilisées des corps de minerais recoupant les strates conglomé-
avec un certain succès. ratiques ; ce point sera particulièrement développé par
Barnicoat et al. en 1997 ;
Que s’est-il passé au début des l’histoire du Witwatersrand montre plusieurs événe-
années 90 ? ou encore une industrie ments successifs : diagénétiques, métamorphiques
(350°C et 2-3 kb), thermiques, hydrothermaux et tecto-
morose, mais aussi un sursaut scien- niques, postérieurement aux dépôts sédimentaires se
tifique et l’émergence de nouvelles développant entre 2,7 Ga (Ventersdorp) et 2,02 Ga
idées favorables à une relance (Vredefort) comme le démontraient progressivement
les études de Philips et al. (1989 ), Philips et Myers (1989),
De Wit et al. (1993) rapportaient dans leur article la Robb et Meyer (1995), Frimmel et al. (1993) et Frimmel,
forte baisse des productions d’or entre 1970 et 1988, liée (2002). Ce modèle conduisait à fournir des guides
pro parte à la baisse des teneurs, suivie du chômage de structuraux et géochimiques complémentaires aux
72 000 mineurs. Le modèle de « paléoplacer modifié » ne compagnies (Photos 1 et 2).
connaissait plus les succès escomptés par les sociétés
La source de la concentration d’or du Witwaters-
minières et quelques échecs étaient évoqués dans les
rand, la plus importante à l’échelle mondiale, et celle de
milieux industriels. Quelles solutions scientifiques
l’uranium restent une question majeure dans ce débat
pouvaient être alors apportées pour remédier à cette
entre « placéristes » et « hydrothermalistes-épigénétistes ».
dramatique situation ?
Quelles étaient les sources possibles de l’or (Robb et Meyer,
De Wit et al. (1993) proposaient alors, sur des argu- 1990) ? Les terrains-sources étaient-ils suffisamment riches
ments géochronologiques et tectoniques, de développer en or et uranium pour alimenter les sédiments du Witwa-
la recherche de l’or hors du Rand, dans des bassins sédi- tersrand ? À l’inverse,l’or était-il essentiellement du à un apport
mentaires, synchrones du Witwatersrand, mais associés à neuf,lié au fonctionnement du bassin du Witwatersrand ?
des ceintures de roches vertes périphériques. En outre, le
De nombreuses sources ont été évoquées et
modèle « épigénétique » (« epigenetic replacement model »),
notamment :
développé entre 1987 et le début des années 90 (Philips et
al. 1989 ; Philips et Myers, 1989), s’inspirant des travaux sur
les gisements d’or orogéniques de Fyfe et Kerrich (1984),
faisaient notamment intervenir des processus postérieurs
à la sédimentation et à la diagenèse : circulation de
fluides métamorphiques, remplacement épigénétique et
alimentation/piégeage dans des drains structuraux, etc.
Ainsi, les auteurs à l’origine de ce modèle et les études
ultérieures de Robb et Meyer (1990, 1991) et de Barnicoat
et al. (1997), intégraient des données jusqu’alors peu
considérées et notamment que :
l’or n’est pas restreint aux seuls conglomérats, puisque
des filons de quartz aurifères avaient été exploités, et
que des dykes, quartzites et shales anomaux en or
étaient identifiés en de nombreux points du bassin ;
Photo 1. Black Reef, mine de Grootvlei, mur du Kimberley Reef, détail des
44 l’or n’est pas non plus limité aux seuls sédiments du cisaillements bancs sur bancs (cliché Jean-Pierre Milési).

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

cependant changé sensiblement leur approche explora-


toire, notamment pour les régions soumises à des intenses
déformations (N et E du Bassin du Rand). Le BRGM
(J.-P. Milesi) a visité à plusieurs reprises les gisements du
Witwatersrand entre 1993 et 1995 et peut témoigner des
changements qui s’opéraient alors au sein de compagnies
qui allaient, pour certaines, jusqu’à licencier sédimento-
logues et stratigraphes et se renforçaient en géologues
structuralistes et géophysiciens.
Finalement la réponse de ces compagnies semble
s’être orientée vers un resserrement des mailles de forages
et un développement accru des approches géophysiques
Photo 2. Black Reef, mine de Grootvlei, base du Transvaaal paléoprotéro- pour prendre en compte le plus grand nombre de phéno-
zoïque, fond de chenal très riche en pyrite ; fente plate à quartz en base
de chenal dont la mise en place est liée à un cisaillement banc sur banc.
mènes possibles.
Cette photo montre bien que le phénomène Rand est multiphasé et qu’il
ne s’est pas uniquement déroulé à l’Archéen. Où en sommes nous depuis les années 90 ?
les granites pré-Rand à 3,05 Ga, anomaux en or-ura- Du point de vue scientifique, plusieurs articles ont
nium , où les uraninites sont déjà arrondies ; tenté de concilier les observations et modèles ; citons
les minéralisations aurifères orogéniques encaissées notamment ceux de Pretorius (1991), Robb et Meyer (1991,
dans les ceintures de roches vertes ; 1995), Phillips et Law (1994), Frimmel et al., (1993), Robb et
al., 1997, Frimmel et Gartz (1997), Minter (1999), Frimmel
les granites fertiles dont la mise en place est synchro-
et Minter (2002), Poujol et al. (2002), et Frimmel (1997,
ne du Rand ;
2005). Ces articles illustrent l’histoire complexe des miné-
les exhalites synchrones de la sédimentation du Rand ralisations et des hydrothermalismes du Rand en relation
(Hutchinson et Viljoen, 1988, qui extrapolent leurs larges avec une évolution tectono-thermique polyphasée. Une
compétences sur les amas sulfurés volcanogéniques et question essentielle se posait du point de vue minier : les
les SEDEX). concentrations exploitables sont-elles mises en place lors
Pour certains auteurs comme Robb et Myers (1990), des processus postérieurs aux dépôts ou essentiellement
l’origine de cette forte concentration d’or restait énigma- dues aux processus précoces liés à la sédimentation,
tique, à savoir une insuffisance d’or dans les bassins d’ali- puis modifiées ? Dit autrement, la concentration en métal
mentation et les granitoïdes bordiers, susceptibles de résulte-t-elle d’un apport juvénile durant l’histoire
constituer les roches-sources du Rand. En revanche, les tectono-métamorphique du bassin ou de la reprise d’un
bilans de masse proposés par Loen (1992), permettaient de stock d’or-uranium ancien durant cette histoire ?
conclure que le facteur principal réside dans la durée du Une vaste panoplie d’études a été mise en œuvre –
phénomène érosion/transport/ piégeage (~126 Ma au analyses structurales, métamorphiques, minéralo-
moins), plus que dans la richesse des roches-sources (esti- giques / texturologiques, géochimiques isotopiques, géo-
mée entre ~0,43 et 6,8 ppb Au).Cette dernière étude confor- chronologiques, etc. –, permettant de faire progresser ce
tait les auteurs défendant le modèle de paléoplacer. Ceux- débat. Quelles en sont les conclusions importantes ?
ci confirmaient, par leur études minéralogiques et
L’introduction du stock métal (Kirk et al., 2002)
texturales, la présence d’or pépitique (Frimmel et al., 1993
s’effectuerait autour de 3,03 Ga, d’après les isochrones rhe-
; Minter et al., 1993, Oberthür et Frey, 1991), tout en prenant
nium-osmium obtenues sur les grains d’or et les pyrites,
en compte les modifications liées à l’histoire des dépôts.
quelles que soit leurs morphologies (précoces ou modifiées
Ces nouvelles idées, intégrant à part entière les postérieurement à leur dépôts). Ces données confirment
phénomènes postérieurs aux dépôts sédimentaires, pro- les âges obtenus antérieurement sur pyrites (Koppel et Saa-
duisirent un fort débat contradictoire dans la commu- ger, 1974) et sphalérites (Giusti et al., 1986) autour
nauté scientifique ; mais quel fut l’impact de ces idées de 3,2 - 3,3 Ga. Frimmel (2005), considérant que l’âge de
au niveau des sociétés minières ? Si certaines sociétés l’or, des pyrites et de l’uraninite est antérieur à l’âge des
minières suivaient, dans les régions où les modifications sédiments, et donc aux phénomènes hydrothermaux
étaient moins perceptibles, le modèle de « paléoplacers postérieurs,confirme le modèle de paléoplacer modifié par
modifiés » (cas du SSW du bassin du Rand), d’autres ont des événements postérieurs,qu’il contribue à mieux définir. 45

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

À l’opposé, Barnicoat et al. (1997) suggèrent que sulfures et/ou quartz et présentant des paragenèses
la mise en place de l’or est hydrothermale, oblique sur les peu différentes de celles des gisements orogéniques.
strates, postérieure à un événement thermique de haute Dans ce modèle de Jacobina, les concentrations
température,marqué par la présence de pyrophyllite (+ dis- aurifères semblent donc synchrones de l’évolution tecto-
thène) et qu’elle se fait à la faveur des drains et pièges no-métamorphique du bassin et des circulations de fluides
tectoniques. Ces auteurs mentionnent encore que tous hydrothermaux induites par cette histoire. Remarquons
les grains d’or qu’ils ont étudiés (40 000) sont épigéné- également que si les traces d’un or précoce demeurent
tiques. Robb et al., (1997) proposent une reconstitution encore à démontrer à Jacobina, des indications isotopiques
détaillée de l’histoire tectono-thermique du bassin et sur les galènes montrent que celles-ci ont connu une his-
reconnaissent au moins trois événements majeurs toire antérieure au dépôt des sédiments : remobilisation
postérieurs aux dépôts : (i) une première circulation de isotopique partielle. Il n’est donc pas impossible
fluide, à ~2,55 Ga, marquée par la cristallisation de pyrites d’imaginer une remobilisation à l’échelle du bassin de
authigènes et de rutiles (i.e. rutiles à 2.578 Ga), (ii) un minéralisations précoces archéennes (?), mais dont les
second évènement, vers 2,35 Ga, correspondant à la cir- traces sont très ténues.
culation de fluides à hydrocarbures, marqué par la for-
mation de bitumes (à ~2,33-2,38 Ga) et de sulfures de Fe, Un modèle intégré :
Cu et As et (iii) au Paléoprotérozoïque, une précipitation deux clefs complémentaires
tardive d’or et de sulfures, en relation avec la mise en pla-
ce du Bushveld (2,05 Ga) et de l’impactite de Vredefort Un stock métallifère précoce, issu de différentes
(2,02 Ga). Dès 1991, Robb et Meyer avaient montré que les sources, bénéficiant au Rand d’une grande durée des
hydrocarbures remplaçaient l’uraninite et que les veines processus d’érosion/transport/sédimentation est l’une
à hydrocarbures étaient postérieurs aux réseaux de vei- des clefs de l’or et de l’uranium du Rand. Mais ce ne sont
nules de pyrrhotite impliquant la présence de phéno- vraisemblablement pas ces minéralisations qui sont
mènes postérieurs aux dépôts sédimentaires. exploitées, car elles ont été régionalement modifiées pos-
térieurement à leur dépôt. Les concentrations exploitées
Il ressort bien des différentes études que les « modi-
dépendent des processus néoarchéens et protérozoïques,
fications » et phénomènes sont régionaux et affectent
postérieurs aux dépôts. Les clefs sont alors les processus
avec plus ou moins d’intensité toutes les minéralisations
de transport et de piégeage des fluides durant l’histoire
du bassin.
thermo-tectonique du bassin sédimentaire. Les minérali-
Quel peut être l’apport des études réalisées sations précoces d’or-uranium sont remobilisées dans des
réservoirs où les contrôles sont chimiques et physiques-
sur d’autres gisements du même type ?
rhéologiques (perméabilité de fracture, porosité, etc.). Il
Parallèlement à l’étude du Rand a été entreprise cel- s’avère, ce qui n’exclut pas la présence plus discrète de
le du bassin syn-tectonique de Jacobina au Brésil qui ren- minéralisations dans les autres roches sédimentaires et les
ferme des minéralisations à or-uranium (Ledru et al., 1997 filons de quartz, que les conglomérats, par leurs proprié-
; Milesi et al., 2002). Comme dans le Witwatersrand, outre tés physiques constituent d’excellents réservoirs, ce qui
les conglomérats, sont identifiés des anomalies réconcilie les guides suivis depuis plus de 100 ans.
aurifères dans des quartzites, des filons de quartz et
des quartzites, exploitées par des mines artisanales. Le
modèle proposé par ces auteurs prend en compte : Conclusions
une migration de la sédimentation (de l’Est vers l’Ouest) À travers ces deux exemples de modèle (or orogé-
induite par le déplacement dans le même sens des blocs nique et or du Witwatersrand), on montre comment les
paléoprotérozoïques, en lien avec le chevauchement modèles métallogéniques naissent, maturent, voire dis-
des terrains sur le bloc archéen de Gavião ; paraissent, bref comment ils formalisent notre degré de
une migration de fluides à l’échelle du bassin, marquées connaissances sur les gisements et, d’autre part, com-
notamment par des stockwerks de minéraux ment ces modèles peuvent avoir une incidence sur
alumineux (andalousite, disthène, etc.) recoupant l’exploration minière, en termes de guides d’exploration.
les stratifications entrecroisées ;
une concentration de l’or et des sulfures, postérieure
aux silicates d’alumine, dans des réservoirs conglomé-
46 ratiques alimentés par des zones de cisaillement à

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connaissance des gîtes minéraux

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Robb L.J., Charlesworth E.G., Drennan G.R., Gibson R.L.,Tongu E.L., 1997.
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history, synsedimentary processes, and gold distribution. Econ. Geol.
Mon. 6, 585-597.

48

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

Les gisements de platinoïdes : une situation mondiale exceptionnelle


Thierry Augé 1 .

Les éléments du groupe du platine,ou « platinoïdes » ultramafique parfois porteuse de gîtes de chromite. Il ne
sont au nombre de 6 (par numéro atomique croissant : se forme pas de concentration massive de sulfure, le
ruthénium (Ru), rhodium (Rh), palladium (Pd), osmium minerai de platinoïdes est assez pauvre, sur des puis-
(Os), iridium (Ir), platine (Pt), mais seuls Pt, Pd et Rh ont une sances de plusieurs mètres. Le gisement de chromite de
importance économique significative. Kemi (côte nord du golfe de Botnie, à proximité de la fron-
Contrairement aux métaux de base, pour les pla- tière suédoise), est situé dans la base ultramafique d’un
tinoïdes, la situation mondiale est exceptionnelle car leur de ces types de complexes, dont seule la partie inférieu-
production est dominée par deux grandes formations re est préservée. L’âge des complexes fennoscandiens est
géologiques : Paléoprotérozoïque (entre 2 500 et 2 400 Ma).
le Bushveld en Afrique du Sud (NE de Pretoria) qui Le type Bushveld est relativement pauvre en roches
produit 77% du platine, 30% du palladium et 82 % du ultramafiques et les concentrations de sulfures, tout com-
rhodium mondial ; me celles de chromite,plus haut dans la série,sont associées
aux pyroxénites et gabbros dans la zone critique (Critical
Norilsk en Russie (Sibérie nord) qui, à l’inverse, produit
Zone). Deux principaux horizons minéralisés sont reconnus,
55% du palladium mondial et 14% du platine.
un niveau de chromite riche en platinoïdes, « UG2 » et un
Une des principales utilisations de ces métaux est niveau relativement enrichi en sulfure,le « Merensky Reef ».
la catalyse (principalement les pots catalytiques des Le complexe de Stillwater se rattache à ce modèle.
véhicules pour lesquels le platine a pris la 1ère place devant
Sudbury (environ 400 km N-NW de Toronto,
le palladium depuis la fin des années 90 avec le
Ontario, Canada), après avoir constitué le modèle de
développement du diesel). La 2ème utilisation est dans la
l’intrusion mafique-ultramafique minéralisée en sulfure,
bijouterie ; le solde se partage entre la chimie, la
objectif d’exploration en lui-même, est devenu l’excep-
dentisterie, l’électronique et divers autres secteurs.
tion. En effet, même si ce gisement, de nickel-cuivre prin-
En 2005 (selon Johnson Matthey, Platinum 2006), cipalement, résulte d’une différenciation magmatique
le Bushveld a produit 158,9 t de platine,80,6 t de palladium par fusion du manteau, comme les complexes stratiformes
et 19,5 t de rhodium, les chiffres correspondants pour ci-dessus, le phénomène déclenchant est un impact
Norilsk étant respectivement de 27,7 t, 143, 7 t et 2,8 t. Au météoritique qui fait consensus aujourd’hui. Les métaux
total, ces deux gisements produisent donc 91% du platine ne proviendraient pas de l’astéroïde lui-même.
mondial, 85% du palladium et 95% du rhodium. Cela rela-
Dans le modèle Norilsk, un panache mantellique a
tivise la production des autres gisements (complexe de
généré un magma basaltique qui s’est mis en place
Stillwater aux États-Unis ; Sudbury et Lac des Îles, Canada ;
sous forme de grands empilements de coulée basaltiques
Grand Dyke, Zimbabwe), de même que l’exploration pour
de nouveaux gisements qui reste relativement margina-
le et, bien entendu, très tributaire de la demande et des
cours, dont l’évolution est donnée dans la figure 1.

Typologie des gisements


Le complexe du Bushveld (Photo 1), comme celui de
Stillwater (Montana,États-Unis,à proximité de Saint-Paul),
relève de la catégorie des complexes mafiques-ultrama-
fiques stratiformes, correspondant à de grandes chambres
magmatiques dans lesquelles les minéraux s’accumulent
par gravité.Tous d’âge protérozoïque (Bushveld : 2060 Ma),
ils se différencient en deux types principaux.
Le type fennoscandien est représenté par des Figure 1. Évolution des cours du platine et du palladium (source : Johnson
gabbros à sulfures disséminés surmontant une base Matthey).
49

1. Courriel. : t.auge@brgm.fr

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

(Photo 2), mais également de sills de gabbros et dolérites l’enrichissement parfois anormalement élevé en ces élé-
insérés dans l’encaissant sous les basaltes, ou parfois en ments,Antony Naldrett a proposé la notion de « R Factor »,
intrusion dans les basaltes eux-mêmes. Les dépôts de sul- rapport de masse entre le magma silicaté et le liquide
fures disséminés et massifs auxquels sont associées les sulfuré en équilibre.
minéralisations en platinoïdes se trouvent à la base des sills. Selon cette hypothèse, pour qu’il y ait enrichisse-
Le complexe est daté à 225 Ma,soit à la limite Permien-Trias. ment en métaux chalcophiles autre que Fe, il faut que la
Quelques mots sur des types de gisement de phase sulfurée liquide ait été en équilibre avec la plus
moindre importance économique. Dans les complexes grande masse possible de magma, afin que l’enrichisse-
alaskéens (Australie, Sibérie, Oural, Alaska, Colombie), ment en Cu, Ni, platinoïdes provenant du magma soit le
les platinoïdes se trouvent principalement sous forme plus efficace possible. Pour le Bushveld, on peut imagi-
d’alliages Fe-Pt, dans les chromites ou les phases silicatées, ner une situation stable avec enrichissement en métaux
sans sulfure. Le complexe de Guli, (Sibérie) présente cepen- chalcophiles, puis concentration de la phase sulfurée par
dant la particularité de n’avoir que de l’osmium. Dans les gravité. Car pour former un gisement, encore faut-il que
complexes ophiolitiques (Chypre, Nouvelle-Calédonie, les sulfures se concentrent par tout type de processus
cf. “Géologues” n° 138, 2003), le platine est aussi associé possible. Sinon, on demeure en présence de fines
à la chromite. Les gîtes associés aux komatiites (basaltes disséminations de sulfures dans une roche, donc sans
archéens de composition ultramafique) s’apparentent au concentration économique de métaux. Dans le cas de
modèle Norilsk dans la mesure où les platinoïdes sont ici Norilsk, la dynamique du phénomène aurait une
associés aux sulfures de nickel et de cuivre concentrés à importance majeure, avec un système alimenté en per-
la base des coulées. Les concentrations de platinoïdes manence par du nouveau magma qui pérennise l’équilibre,
dans des niveaux de schistes noirs, aux côtés d’autres donc l’enrichissement en métaux précieux des sulfures.
métaux, présentent un caractère anecdotique. Il en est La question du rôle d’une phase hydrothermale
de même des latérites. Enfin, il ne faut pas oublier les est également essentielle. Dans le magma, lors du refroi-
placers dans lesquels on trouve les platinoïdes associés dissement (cas du Bushveld par exemple), une phase
aux sulfures, dans le cortège des minéraux lourds. hydrothermale aqueuse apparaît. Le rôle de cette phase
hydrothermale est à la base du débat entre l’origine mag-
Aperçu génétique matique ou hydrothermale des minéralisations. Le rôle
du fluide est-il simplement de modifier par une sorte
La typologie présentée ci-dessus montre claire-
d’auto-altération une minéralisation existante ou est-il
ment que l’association platinoïdes-sulfures est le phéno-
plus majeur, avec participation dans le transport des
mène dominant. Lors de l’apparition dans le magma d’une
métaux et précipitation des sulfures ? La question n’est pas
phase sulfurée par immiscibilité (de composition
tranchée et il est vraisemblable que les deux phénomènes
fer-soufre), qui peut se produire soit après l’incorporation
interviennent, ce que le rapprochement des deux écoles
de soufre dans le magma, soit par modification de com-
de pensée tendrait à suggérer. Les fluides ont joué un
position du magma en réponse à des phénomènes de
rôle ; il reste à le préciser exactement.
mélange de magma, les éléments chalcophiles (Cu, Ni,
platinoïdes…) vont pouvoir se concentrer. Pour expliquer Dans la matte sulfurée, la présence d’éléments

50 Photo 1. Affleurements du Bushveld (cliché Thierry Augé). Photo 2. Empilement de coulées de basaltes à Norilsk (cliché Thierry Augé).

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

volatils est avérée. Cette matte sulfurée cristallise selon un rement (les éléments du groupe du platine forment des
processus de cristallisation fractionnée, ce qui conduit à minéraux du groupe du platine, on les trouve également
un liquide résiduel enrichi en cuivre, platinoïdes et en en solution solide dans les sulfures de Fe,Ni,Cu) et de nou-
éléments volatils tels que Te, Bi, Sb… qui formeront des velles espèces sont identifiées chaque année, conduisant
niveaux riches dans la masse des sulfures (cas de Norilsk au total actuel d’environ 150 minéraux, tandis que plu-
notamment). sieurs centaines de « nouvelles » espèces minérales ont été
En quoi la formation de concentrations de plati- suspectées ou décrites mais non validées. Les platinoïdes
noïdes correspond-elle à des phénomènes exceptionnels ? se retrouvent dans des familles de minéraux très variées
Par la somme des paramètres qui convergent et surtout (alliages, sulfures, antimoniures, oxydes…) et leur étude est
par la pérennité, la multiplicité et la répétitivité des susceptible de fournir des données quant à l’origine des
phénomènes. Il faut d’abord souligner que l’on n’a jamais minéralisations. Ainsi, en Inde par exemple, la remobili-
démontré la présence de magmas spécialisés, comme sation hydrothermale d’une minéralisation magmatique
c’est le cas dans d’autres types de gisements, liés aux gra- constituée de sulfure et d’alliage de platinoïdes se retrou-
nites par exemple. Pour que les sulfures précipitent, il faut ve sous la forme de minéraux complexes à Sb-Bi-Te. Néan-
soit qu’il y ait une contamination par l’encaissant (à Norilsk, moins, la contribution de la minéralogie à la connaissan-
les sédiments encaissants sont riches en sulfures), soit ce des processus de genèse des minéralisations de
qu’il y ait une variation de composition chimique du platinoïdes reste limitée.
magma, ce qui serait le cas du Bushveld avec le mélange Les acteurs impliqués sont au premier chef les
de magmas de composition chimique différente. compagnies exploitantes puisque, comme nous l’avons
L’apparition d’une phase sulfurée ne résulte pas vu, la production de platinoïdes est très largement domi-
en premier lieu de la composition des magmas, mais des née par deux gros gisements dont les réserves dépassent
processus, complexes, impliqués. Et c’est une difficulté le siècle (au rythme actuel de la consommation). Les géo-
pour l’exploration de nouvelles cibles. logues sont ici impliqués dans l’évaluation des ressources
et des réserves et dans la recherche d’extensions de
L’origine des platinoïdes dans les environnements
gisements connus. Ainsi, dans le Bushveld, alors que la
sans sulfures (cas des complexes alaskéens ou des chro-
production provient essentiellement de niveaux métriques
mites ophiolitiques) est plus difficile à expliquer. Comme
minéralisés – Merensky Reef à sulfures et platinoïdes et UG2
les minéraux de platine sont inclus dans les chromites,
à chromite et platinoïdes –, un 3ème niveau est reconnu (Pla-
on a invoqué qu’ils pouvaient constituer un germe pour
treef) dans l’extension nord du complexe, qui
la cristallisation de la chromite. Ensuite, pour qu’il y ait
pourrait être l’équivalent de l’un des deux gisements
concentration des platinoïdes, il faut concentrer la chro-
précédents, mais issu de processus génétiques différents.
mite et l’on peut proposer ici une concentration physique
par gravité (Augé, 2005). Cette hypothèse se heurte aux Au Canada, comme les platinoïdes sont des sous-
tenants de l’origine sulfurée initiale, dont la déstabilisa- produits d’une production installée, celle de nickel-cuivre,
tion aurait conduit aux platinoïdes et à la chromite. ce sont surtout des compagnies juniors qui essaient de se
placer par la promotion de prospects potentiels.
La recherche est répartie entre un petit nombre
Exploration et recherche : de pays et d’organismes : Service géologique et départe-
méthodes et acteurs ments de recherche des sociétés (Inco, Falconbridge) et
L’avancée des connaissances en matière de universités (Chicoutimi) au Canada, US Geological Survey
typologie des gisements et de genèse a permis de aux États-Unis, quelques universités européennes
confirmer les deux grandes étapes de l’exploration : (Royaume-Uni, Espagne, Italie), Allemagne (BGR), France
(BRGM). Plus que de véritables équipes de recherche, il
la localisation et la délimitation des complexes
s’agit de chercheurs individuels. Tous ces chercheurs se
mafiques-ultramafiques potentiellement porteurs :
rencontrent en particulier lors du symposium internatio-
géologie générale, aéromagnétisme, prospection
nal sur le platine qui rassemble environ 150 personnes à
géochimique et alluvionnaire, etc. ;
chaque session et qui a lieu tous les 3 ou 4 ans.
la recherche de guides à des échelles plus restreintes :
L’apport de la recherche à l’exploration dépend du
discontinuités, brèches, présence de sulfures ou de
stade d’avancement de celle-ci. À un stade relativement
chromites (notion de « pièges », etc.).
amont, elle peut aider à la définition des zones de meilleur
La minéralogie des platinoïdes progresse réguliè- potentiel. 51

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

Pour en savoir plus Cabri L. J. ed. (2002): The geology, geochemistry,


mineralogy and mineral beneficiation of platinum group
Augé T., Genna A., Legendre O., Ivanov K.S.,Volchenko Y. elements. Canadian Institute of Mining, Metallurgy and
A., 2005: Primary platinum mineralization in the Petroleum (CIM), Vol. 54, 852 p. (26 articles).
Nizhny Tagil and Kachkanar ultramafic complexes,
Coll. Symposiums sur le platine : le 9ème était à
Russia: a genetic model for PGE concentrates in
Stillwater (Montana) en 2002, et le 10ème en Finlande en
chromitite-rich zones. Econ. Geol., 100, 707-732.
2005.

Évolution récente des recherches sur la métallogenèse de l’uranium


Michel Cuney 1 .

Introduction et États-Unis renferment les ressources majeures


connues, mais des potentialités importantes existent
L’uranium est la seule ressource minérale naturel- dans plusieurs autres pays : Mongolie, sud Argentine…
le à être exploitée à partir de gisements localisés dans
D’autres productions d’uranium importantes,
tout le cycle géologique dans des environnements
passées ou actuelles, ont été tirées d’une très grande
métamorphiques (800°C, 5 à 7 kbar), plutoniques,
variété de gisements :
métasomatiques, hydrothermaux, diagénétiques,
volcaniques, sédimentaires à surperficiels (25°C, 1bar). conglomérats à galets de quartz où l’uranium a repré-
Des gisements d’uranium importants se trouvent sur senté un sous-produit de l’extraction de l’or (Witwa-
tous les continents. Ils ont été regroupés en un minimum tersrand, Afrique du Sud), avec des teneurs aussi basses
de 14 types majeurs en se basant principalement sur leur que 0,01% U,et des gisements individuels allant de 5 000
environnement géologique (OECD/NEA & IAEA). à 150 000 t. Cependant, à Elliot Lake (Canada), seul l’U
a été extrait mais les teneurs étaient plus élevées
Parmi ceux-ci, 3 types principaux représentent plus (0,13 % U) ; de nouvelles mines sont en développement
de 75% des ressources mondiales en uranium : dans le bassin du Witwatersrand ;
les gisements associés aux discordances se localisent gisements filoniens, les districts majeurs étant localisés
à proximité d’une discordance entre un socle cristallin dans l’auréole métamorphique ou à l’intérieur de
et un bassin silicoclastique protérorozoïque intraconti- leucogranites peralumineux, respectivement dans
nental. Les gisements majeurs sont situés au l’Erzgebirge (Allemagne et République Tchèque :
Canada (bassin de l’Athabasca, Saskatchewan) avec des 370 000 t U exploitées) et le Massif central français
teneurs moyennes généralement supérieures au pour- (50 000 t U exploitées), mais certains sont localisés
cent et jusqu’à des valeurs de 18% U pour des ressources dans des roches faiblement métamorphiques, loin
de 200 000 tonnes d’U à McArthur River. En Australie de granites (Shinkolobwe, Zaïre ; Schwartzwalder,
(Alligator Rivers Uranium Field, Northern Territory), les États-Unis…) ; seuls quelques gisements de ce type sont
teneurs sont généralement plus faibles (<1 % U) ; encore exploités en Chine et en République tchèque ;
les complexes brèchiques avec Olympic Dam comme gisements associés au volcanisme : le district de loin le plus
seul gisement de ce type exploité ; c’est le plus grand du important est localisé dans la caldera jurassique de Strelt-
monde mais à faible teneur (400-500 g/t U, avec des sovkoye (Russie) avec 300 000 t U déjà exploitées et en res-
réserves supérieures à 350 000 t U et des ressources sources à 0,1 – 0,3 % U ;des gisements similaires se trouvent
de 1 500 000 t U) ; principalement en Mongolie,au Kazakhstan,et en Chine ;
les gisements dans les grès déposés dans des environ- gisements intragranitiques disséminés où l’uranium est
nements continentaux fluviatiles à bordure marine. Ils associé à des roches intrusives, avec Rössing (Namibie)
ont des teneurs faibles à moyennes (0,05 – 0,4% U) avec (>150 000 t U à 0,03 – 0,04 % U), encore en exploitation
des gisements de quelques milliers à plusieurs dizaines actuellement ; de nombreuses autres occurrences de
de milliers de t U. Ils sont exploités de manière croissante ce type existent dans le monde et font l’objet d’une
52 en « in situ leaching ». Kazakhstan, Ouzbékistan, Niger exploration intensive ;

1. UMR G2R – CNRS – CREGU – Université Henri Poincaré, BP 239, 54506 Vandoeuvre-Lès-Nancy Cedex.

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

gisements métasomatiques localisés dans des roches prospecteurs soviétiques, de nombreux autres gisements
fortement déformées de manière ductile et soumises associés à des volcanites présentant des ressources
à une métasomatose régionale à Na et Ca, avec les supérieures à 10 000 t U ont été découverts au sud de
districts de Lagoa Réal (Bahia, Brésil) et de Zheltye Vody Streltsovsky en Mongolie avec les calderas de Dornot
(Ukraine). Les ressources de chacun d’eux sont supé- (33 000 t U) en Mongolie, de Xiangshan (20 000 t U) en
rieures à 100 000t U à 0,1 – 0,3 % U. Ils sont encore en Chine et plusieurs calderas dans le nord du Kazakhstan qui
exploitation. ont été exploitées. Les études scientifiques développées
ces dernières années et en cours en collaboration avec les
Évolution globale de la recherche géologues russes, chinois et américains ont pour objectif
de comprendre le rôle des différences de contexte géo-
depuis 1990 tectonique, de nature du magmatisme, de mécanismes
Probablement encore plus que dans toute autre minéralisateurs entre les ensembles volcaniques forte-
ressource, l’évolution de la recherche scientifique dans le ment et faiblement minéralisés, au-delà des différences
domaine de la métallogenèse de l’uranium suit de très dans les techniques d’exploration et des modèles concep-
près l’évolution des budgets d’exploration qui sont une tuels utilisés par les géologues soviétiques. L’enjeu est
conséquence directe des cours du métal sur le marché d’importance : devons nous reprendre complètement
spot. Après une période faste de la fin des années 70, sui- l’exploration des calderas dans le monde occidental ?
te à la crise pétrolière de 1973 et jusqu’à la fin des années De même, le début des années 90 nous a fait
80, avec un pic des cours de l’uranium à 43$/livre U3O8 découvrir que les gisements de type filoniens périgrani-
en 1983, les recherches dans le domaine de la métallogé- tiques localisés au voisinage des granites à deux micas
nie de l’uranium se sont pratiquement arrêtées dans la plu- varisques de même âge, minéralogie et géochimie que
part des pays du monde jusqu’au début des années 2000. ceux de France, d’Espagne ou du Portugal ont livré près
Elles ne faisaient plus que l’objet de travaux très isolés. de 300 000 t d’uranium à partir de la petite province de
Le phénomène le plus important qui s’est produit l’Erzgebirge (Mont Métallifères) à cheval entre la Saxe
depuis 1990 est l’ouverture des pays du bloc soviétique qui et la Bohême et connue pour ses minerais d’uranium
a permis d’accéder très progressivement à l’énorme effort de depuis la découverte de l’oxyde d’urane par Hans Martin
recherche qui avait été mené par des milliers de chercheurs Klaproth en 1789 ! Ces mêmes gisements, principalement
depuis 1945 dans ces pays,avec une très faible diffusion des localisés au sein des massifs granitiques en France,
connaissances accumulées vers le monde occidental. La n’ont livré qu’une cinquantaine de milliers de tonnes
lecture des quelques travaux qui étaient diffusés vers l’occi- d’uranium. S’il est certain que les teneurs de coupures
dent avant 1990 ne permettait souvent pas de comprendre qui ont été utilisées à l’Est étaient beaucoup plus basses
toute leur signification. Ceci, non seulement du fait d’une que celles du monde occidental et que l’exploitation a été
censure des informations,comme par exemple des cartes sans menée à plus grande profondeur, cette énorme différen-
échelle et non localisées,l’absence de données de teneur et ce de production entre ces deux districts pose un problè-
de tonnage,mais aussi et surtout par l’utilisation de concepts me métallogénique majeur qui fait l’objet de recherches
et d’une terminologie développée de manière indépendan- en cours entre chercheurs français, allemands et russes.
te dans le bloc soviétique. Cet exemple permet d’illustrer également toute
Cette ouverture à permis de découvrir que l’URSS l’importance des modèles conceptuels dominants pour le
avait extrait la moitié de l’uranium produit dans le développement de l’exploration. Dans les années 60, le
monde à partir de gisements d’une ampleur méconnue modèle dominant en France pour les gisements d’uranium
en Occident. Par exemple, la caldera jurassique de filoniens intragranitiques, repris dans certains autres pays
Streltsovsky (Transbaïkalie, Russie) qui a déjà produit plus par exemple pour les gisements de type discordance était
de 100 000 t d’uranium, représente le principal gisement le modèle per descensum, c’est-à-dire un lessivage de l’ura-
russe en production et renferme encore des ressources nium des granites en surface pendant une période d’alté-
de 200 000 t. Aucun gisement d’uranium associé au ration de type tropical et sa concentration par infiltration
volcanisme dans le monde occidental n’a dépassé des des fluides météoriques en profondeur le long de structures
ressources supérieures à quelques milliers de tonnes U, cassantes. Ces gisements se trouvaient actuellement
exceptionnellement une dizaine de milliers de tonnes presque dans leur position initiale avec des reliques de
comme à McDermitt aux États-Unis, mais à très faible l’ancienne paléosurface encore préservées et ils se
teneur. De plus, s’il représente de loin le premier gisement fermaient vers 100 à 200 m de profondeur, profondeur
de ce type, Streltsovsky n’est pas le seul découvert par les reconnue par l’exploration dans ces années. 53

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

À la même époque, les gisements de l’Erzgebirge métallogenèse de l’uranium pendant ces 15 dernières
étaient exploités jusqu’à 2 000 m de profondeur et les années du fait de leur exceptionnelle richesse pour des
études d’inclusions fluides menées en URSS montraient tonnages élevés qui en font les gisements dont l’exploi-
le caractère hydrothermal de ces gisements. Ce n’est que tation demeurait rentable malgré les cours très bas du
pendant les années 70 que les études d’inclusions fluides métal. Si le modèle hydrothermal-diagénétique dévelop-
menées à Nancy ont montré le caractère hydrothermal pé dans les années 1970 n’a pas été remis fondamentale-
de ces gisements. Le dernier d’entre eux qui a été exploi- ment en cause depuis, il a été considérablement précisé.
té en France et qui a fermé en 2001, celui du Bernardan Par exemple, la succession des évènements struc-
dans la Marche occidentale a été reconnu par sondages jus- turaux, métamorphiques et plutoniques a fait l’objet de
qu’à 800 m de profondeur et les structures demeurent travaux considérables par plusieurs équipe canadiennes
totalement ouvertes à ce niveau. Il est donc encore et en particulier par le Saskatchewan Research Council
possible de trouver beaucoup d’uranium en France ! (Annesley et al., 1997; Madore et al., 2000 ; Portella et al.,
Tout dépendra du prix sociétal et environnemental que 2000). Il a été montré que l’évolution de certaines
l’on voudra y mettre ! structures tardi-hudsoniennes avait un rôle majeur pour
Depuis les années 90 et jusqu’au début des années la localisation ultérieure des failles inverses contrôlant
2000, les recherches dans le domaine de la métallogénie la localisation des gisements. L’importance du stock
de l’uranium ont été principalement réalisées : en France, d’uranium contenu dans les pegmatoïdes et leucogra-
avec essentiellement le CREGU et l’UMR-G2R à Nancy et nites du socle sous forme de monazite anormalement
à l’UMR-HYDRASA à Poitiers ; au Canada, avec le laboratoire riche en uranium et d’uraninite comme source potentiel-
de l’Université de Queen’s à Kingston, le Saskatchewan le d’uranium pour les gisements a été quantifiée.
Research Council à Saskatoon et, très récemment, le Par ailleurs les âges du dépôt de la minéralisation
Service Géologique du Canada à Ottawa ; en Russie, déterminé vers 0,9 à 1 Ga par TIMS sur des échantillons
avec principalement l’IGEM à Moscou et en Chine avec massifs de minerai, ont été progressivement vieillis, tout
différentes institutions ; la Chine est d’ailleurs le seul pays d’abord par une meilleure sélection des générations d’oxy-
possédant actuellement une revue dédiée à l’uranium – de d’uranium les moins remobilisées par microprélèvement
Uranium Geology – qui publie des articles en chinois, avec de plus en plus fin,puis par utilisation de méthodes de data-
un résumé en anglais. Des publications plus sporadiques tion ponctuelles de type SIMS ou ablation laser ICPMS avec
ont émané de diverses autres institutions, mais qui ne lesquels des âges de 1360 à 1560 Ma ont été déterminés
peuvent être répertoriées au sein de cette courte note. (Fayek et Kyser, 1997 ; Fayek et al., 2002 ; Cuney et al., 2002 ;
La croissance des publications sur les gisements d’ura- Alexandre et al., 2003 ; 2005). Toutefois, le problème du
nium va devenir exponentielle dans les années à venir du dépôt de l’ensemble de la minéralisation à l’âge le plus
fait de l’explosion des budgets d’exploration et de ancien, les âges les plus récents ne représentant que des
recherche dans les grandes compagnies et la création de remobilisations, ou de la formation de la minéralisation
plus de 400 compagnies juniors dans le monde ces 3 der- riche par accrétion de dépôts lors de plusieurs épisodes
nières années. Cette évolution reflète la multiplication successifs n’est pas encore définitivement résolu.
par 10 des cours de l’uranium sur le marché spot, depuis Ces travaux ont montré en particulier qu’une
son étiage à 7$/livre U3O8 en 2001 à 85$ en février 2007. forte proportion du plomb radiogénique avait migré
Cette croissance des budgets d’exploration à un impact non seulement à l’extérieur de la structure des oxydes
direct sur les budgets affectés par les sociétés minières à d’uranium, mais également en dehors de l’enveloppe des
la recherche scientifique en particulier dans des pays comme gisements (Holk et al., 2003 ; Annesley et al., 2003 ; Kister
la France, le Canada, l’Australie, La Russie et la Chine. Cepen- et al., 2004). Cette perte peut atteindre plus de 50 % du
dant, si dans tous ces pays l’État accompagne l’effort de plomb radiogénique comme dans le cas du gisement
recherche dans ce domaine,ce n’est pas le cas de la France ! de Shea Creek (ouest Athabasca, Canada). L’analyse
systématique des isotopes du plomb dans le bassin de
Les principales problématiques de l’Athabasca, initialement envisagée comme méthode d’ai-
de à l’exploration potentielle, s’est vite révélée inutilisable
recherche du fait de la trop grande diffusion du plomb radiogénique
dans le bassin. Une telle mobilité du plomb après la
Gisements d’uranium associés aux discordances formation des gisements, associée à une mobilité conco-
Ce type de gisement a été et reste de très loin le mitante relativement faible de l’uranium, reste difficile à
54 principal objet des recherches dans le domaine de la expliquer et contraste totalement avec les mobilités

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

relatives de ces deux éléments lors de la formation des Cette analyse a permis de reconnaître deux types
gisements, les oxydes d’uranium ayant des compositions de fluides : une saumure diagénétique précoce à
isotopiques extrêmement pauvres en plomb commun dominante sodique correspondant à de l’eau de mer ayant
avec des rapports 206Pb/204Pb supérieurs à 10 000. dépassé le stade de saturation en halite (du fait des
Il a été montré par plusieurs équipes que les faibles valeurs de leurs rapports Cl/Br) et une saumure
minéraux accessoires des bassins protérozoïques à dominante calcique, plus tardive, trouvée dans l’envi-
auxquels étaient associés les gisements de discordance ronnement des gisements. Cette seconde saumure est
(Athabasca, Canada ; Kombolgie, Australie ; mais aussi interprétée comme résultant de l’évolution de la premiè-
celui de Franceville avec les gisements de la région re par interaction avec les minéraux calciques du socle
d’Oklo présentant toutefois des caractéristiques un peu lors de sa percolation dans celui-ci. Si les premières déter-
différentes) subissaient une altération importante lors minations des teneurs en uranium dans les fluides par
de la diagenèse dans le bassin mais également dans les ablation laser ICP-MS ont permis de trouver l’uranium
formations altérées du socle : monazite altérée en dans les saumures à dominante calcique (coopération
alumino-phosphates-sulfates (Fayek et Kyser, 1997 ; Hecht avec l’ETH, Zürich), ce résultat reste cependant à confirmer
et Cuney, 2000 ; Gaboreau et al., 2006) et zircon avec des par des mesures plus systématiques (Cuney, 2005). D’une
domaines importants substitués par Al, P, Ca, REE, et manière générale les mesures de composition in situ
enrichis en uranium aux dépends de Zr, Hf et Si (Hecht et des inclusions fluides bien qu’ayant fait d’importants
al., 2003). Il a été montré que si cette altération pouvait progrès ces dix dernières années, nécessitent encore non
libérer de l’uranium à partir de l’altération d’une phase seulement des études plus systématiques, mais égale-
aussi réfractaire que la monazite, a fortiori toute autre ment des améliorations afin de pouvoir déterminer la
source d’uranium pouvait être également lessivée. Un nature des complexants possibles (F, P, sulfates,
débat reste cependant entre les partisans d’un uranium carbonates…), les métaux à très faible concentration ain-
provenant uniquement des formations silico-clastiques du si que les compositions des isotopes stables et radiogé-
bassin et ceux faisant du socle une source largement niques. Par ailleurs, le mécanisme de la réduction de l’ura-
prédominante du fait de l’enrichissement beaucoup plus nium qui a aussi fait l’objet de nombreux travaux (rôle
élevé des formations paléoprotérozoïques de type du graphite, des sulfures, ou du méthane) reste encore
plateforme épicontinentale qui forment l’encaissant ou fortement débattu (Landais et al., 1993 ; Annesley et al.,
le sousbassement des gisements de discordance en 2001 ; Sangély et al., 2003 ; Wilson et al., 2005). Une
Australie et au Canada. recherche plus systématique des évidences de fluides
Ce débat a des conséquences directes sur les réducteurs en particulier dans les gisements localisés
modèles de circulation des saumures diagénétiques : le profondément dans le socle devrait être entreprise.
modèle de type « per descensum », implicite si la source de La signature isotopique D-O-C des fluides a été
l’uranium est considérée être le bassin lui-même, néces- déterminée principalement à partir de l’analyse des
site une infiltration profonde des saumures dans le socle, minéraux d’altération associés à ces gisements et plus
pour une source principale de l’uranium localisée dans ce rarement à partir de l’analyse directe des fluides des
dernier. Les conséquences sont également importantes cristaux de quartz par extraction globale : (Kotzer et Kyser,
pour l’exploration, une infiltration importante des sau- 1995 ; Fayek et Kyser 1997 ; Kyser et al., 2000 ; Polito et al.,
mures dans le socle avec émergence permet d’envisager 2004). Il est montré que les fluides de bassins sont
la présence de gisements plus profonds sous la discor- impliqués dans la genèse des minéralisations uranifères
dance et par voie de conséquence dans des domaines et qu’ils ont une signature homogène dans tous les gise-
périphériques au bassin, recouverts auparavant par les ments, ce qui suppose des circulations à l’échelle du bas-
formations silicoclastiques dont l’extension a été beaucoup sin sur de longues périodes de temps. Lors de l’exhuma-
plus importante que les limites cartographiées actuelle- tion du bassin, l’infiltration des fluides météoriques n’a que
ment. Les progrès majeurs réalisés dans la détermination modérément affecté les compositions isotopiques des
de la composition des fluides par analyse individuelle des argiles mais a, par contre, totalement rééquilibré la
inclusions fluides (microsonde Raman, Laser Induced signature isotopique de l’oxygène des oxydes d’uranium
Breakdown Spectroscopy, LA-ICPMS), (Derome et al., 2007) (Fayek et Kyser, 1997 ; Fayek et al., 2002), en relation avec
ont permis d’apporter des arguments importants en faveur une perte importante de plomb radiogénique. Les valeurs
d’une infiltration profonde des fluides dans le socle (Dero- δD (-57‰) mesurées sur les fluides extraits des quartz du
me, 2002 ; Derome et al., 2003 ; 2005). gisement de McArthur River (Kotzer and Kyser, 1995), plus
légères que celles de l’eau de mer ayant atteint la satura- 55

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

tion en halite, peuvent résulter d’une contamination des nucléaires de haute activité. Cuney et Mathieu (2000) et
fluides extraits globalement par des inclusions fluides Mathieu et al. (2001) ont proposé que la principale
secondaires ayant piégé ces fluides météoriques, provo- source d’uranium pour ces gisements soit représentée
quant une diminution des valeurs de δD comme cela est par l’altération de la monazite des formations gréseuses
observé dans la composition des minéraux argileux associés. basales FA. Dans cette formation, la quantité de monazi-
Les paragenèses d’altérations ont fait l’objet de te – beaucoup plus abondante que dans les grés des
nombreux travaux qui ont permis de préciser considéra- bassins de Kombolgie et de l’Athabasca – suffit à rendre
blement la nature et la succession de celles ci, leur distri- compte des tonnages beaucoup plus limités découverts
bution à l’échelle du bassin et des gisements (Beaufort dans le bassin de Franceville.
et al., 2005 ; Kister et al., 2006 ; Laverret et al., 2006) et de
proposer un modèle thermodynamique permettant de Gisements d’uranium associés aux volcanites
déterminer les paramètres intensifs contrôlant leur Bien que ce type de gisements ne représente pas
stabilité (Kister et al., 2005). des ressources aussi importantes que beaucoup d’autres
Un autre paramètre important dans la genèse des types, la découverte de la province de Streltsovsky en
gisements d’uranium de type discordance qui a été bien Transbaïkalie a été un des moteurs du développement de
quantifié ces dernières années est la dissolution du quartz nouvelles recherches dans ce domaine.
qui a permis la création d’espaces importants qui ont En dehors des contributions concernant principa-
contrôlé en grande partie le développement des minéra- lement des synthèse de travaux antérieurs (Andreeva et
lisations les plus riches, plus que les ouvertures qui ont pu al., 1996 ; Ishukova et al., 1998 ; Fan Hong-hai, 2003 ;
être créées par le jeu des failles inverses associées à la Castor et Henri, 2000) et la datation de l’épisode minéra-
plupart des gisements (Lorilleux, 2001 ; Lorilleux et al., lisateur (Chernyshev and Golubev, 1996), les études ont
2002 ; 2003). Cependant, le mécanisme permettant d’aus- principalement porté sur la caractérisation des sources, à
si importantes dissolutions du quartz dans un domaine partir de l’analyse ponctuelle à la microsonde électro-
très riche en ce minéral, aussi bien dans le bassin que dans nique et ionique de la composition des verres volcaniques
le socle, n’est pas encore cerné de manière satisfaisante. dont la composition originelle a été préservée dans les
Ainsi, un effort expérimental important doit être inclusions magmatiques des phénocristaux de quartz des
développé afin de quantifier le rôle des saumures chlo- tufs ou des laves acides (Chabiron, 1999 ; Chabiron et al.,
rurées sodiques et calciques sur la solubilité de l’uranium 2001a, b ; 2003 ; Chemillac et al., 2003 ; Chemillac, 2004).
et de la silice, sur la stabilité des minéraux accessoires Il apparaît que les districts les plus fortement minéralisés
(monazite et zircon surtout) et sur la réactivité du sont associés à du volcanisme peralcalin très fractionné,
graphite à basse température. De telles données sont fortement enrichi en U (15-20 ppm) et F (1 à 2,5 wt%). Les
indispensables pour obtenir une modélisation thermo- ressources particulièrement importantes du district de
dynamique plus satisfaisante du développement des Streltsovsky résulteraient de la présence d’une deuxième
altérations, du transport et du dépôt de l’uranium que source d’uranium majeure représentée par un sous-
celles qui ont été tentées pour les gisements d’uranium bassement constitué en grande partie de granites
associés aux discordances protérozoïques (Komninou et calcoalcalins fortement potassiques, également enrichis
Sverjensky, 1995 ; 1996 ; Raffensperger et Garven, 1995 a et en uranium, sur lesquels la caldera s’est développée. Des
b). Les données thermodynamiques de solubilité de l’ura- études plus complètes ont été menées sur la caldera de
nium actuellement disponibles dans les conditions de Xiangshan en Chine, mais la plupart d’entre elles ne sont
formation de ces gisements proviennent essentiellement de publiées qu’en chinois.
l’extrapolation de données expérimentales obtenues à bas-
se température ou avec des concentrations en complexants Les gisements d’uranium associés aux grès
très faibles telles que celles calculées par Shock et al. (1997), post-ordoviciens
et elles sont très probablement fortement sous estimées. Peu de travaux ont été réalisés ces dernières années
Les gisements de la région d’Oklo, localisés dans le dans le monde occidental sur ce type de gisement, du
bassin paléoprotérozoïque de Franceville au Gabon ont fait de la fermeture de la plupart des mines de ce type en
continué d’être l’objet de travaux à l’échelle internatio- particulier aux États-Unis qui en ont extrait l’essentiel de
nale, mais la plupart de ceux-ci ont concerné l’étude des leurs ressources. Les gisements associés aux grès connais-
réacteurs nucléaires et de leur environnement comme sent un renouveau non seulement en raison de la remon-
56 analogue naturel pour l’entreposage des déchets tée des cours de l’uranium mais aussi et surtout du fait des

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connaissance des gîtes minéraux

possibilités d’exploitation par in situ leaching. Au niveau sources : uraninites à faibles valeurs de Th dans les leu-
académique, les principales recherches sont réalisées en cogranites et à forte teneur en Th dans les granites calco-
Chine sur les gisements localisés dans des formations sili- alcalins fortement potassiques (Cuney et Friedrich, 1987).
coclastiques fluviodeltaïques tertiaires, dans le Nord du Des travaux de recherches sporadiques ont
pays, et présentant des modèles analogues à ceux déve- continué d’être réalisés sur les gisements d’uranium de
loppés pour certains gisements du Wyoming aux États- type filonien du Massif central français pour une caracté-
Unis (Lin et Shi, 2000). Il a été montré que les conditions risation plus régionale des circulations fluides (André
nécessaires à la réduction de l’ion uranyle en solution et al., 1996) et une reconstitution de l’évolution thermo-
étaient créées par des infiltrations, le long de failles, d’hy- tectonique d’un des principaux complexes leucogranitiques
drocarbures gazeux et parfois liquides depuis des réser- minéralisés, celui de St-Sylvestre (Marche occidentale), à
voirs pétroliers profonds se piégeant dans des niveaux de partir de mesures géochronologiques systématiques
grès poreux jouant le rôle de réservoir secondaire. 39
Ar/40Ar sur muscovite (Scaillet et al., 1999 a et b) et de
Des travaux ont été repris très récemment en son intégration dans l’histoire géologique de la chaîne
France sur les gisements de la région d’Arlit au Niger afin varisque (Marignac et Cuney, 1999). Le synchronisme de
de préciser leur contexte structural (Gerbault, 2006), l’évènement minéralisateur principal au Permien, pour
diagénétique (Cavellec, 2006) et sur la nature des sources les gisements d’uranium de la chaîne varisque, sur plus de
d’uranium (Wagani, 2007). L’âge de la mise en place des 2 000 km, a été confirmé par de nouvelles datations sur
minéralisations, localisées dans des grès d’âge dévonien les pechblendes de l’Erzgebirge (Golubev et al., 2000) et
à fini-jurassique est encore mal contraint du fait du carac- les caractéristiques physico-chimiques des fluides associés
tère finement disséminé de la minéralisation conduisant ont été précisées (Krylova et al., 2000). Par contre, Patrier
à la perte de certains des descendants de la chaîne de et al. (1997) proposent un âge jurassique pour l’évène-
désintégration de l’uranium, tels que le radium, par les ment minéralisateur du gisement du Bernardan. Cepen-
effets de recul alpha. Le prochain enjeu dans cette région dant, dans ce travail, seules les minéralisations présen-
est de déterminer le modèle de genèse du gisement tant les caractéristiques typiques des remobilisations
d’Imouraren, localisé dans le même contexte que les gise- jurassiques observées dans la plupart des autres
ments de la région d’Arlit, mais dont la minéralisation gisements, ont été étudiées. Les filons à pechblende
est constituée essentiellement de minéraux d’uranium également observés dans ce gisement et possédant des
hexavalent au lieu de pechblende et de coffinite. caractéristiques similaires aux autres minéralisations filo-
niennes varisques mériteraient d’être datés afin de véri-
Autres types de gisements fier l’existence ou non de minéralisations d’âge permien.
L’origine des concentrations en uraninite des Les alaskites de Rössing et les indices du même
conglomérats à galets de quartz éoarchéens du type localisés dans le même domaine ont fait l’objet de
Witwatersrand (Afrique du Sud) a fait l’objet d’une contro- quelques travaux récents principalement en matière de
verse renouvelée avec la mise en évidence d’une forte géologie structurale. Basson et Greenway (2004) ont mon-
remobilisation hydrothermale de l’or dans la partie ouest tré que la mise en place des alaskites était contrôlée par
du bassin (Barnicoat, 1997). De ce fait, une origine une tectonique extensive fini-orogénique. Des minérali-
épigénétique de ces concentrations en uranium a égale- sations du même type que celles de Rössing ont été
ment été proposée. Cependant, la corrélation très forte caractérisées à Goanikontes dans le même contexte
entre Au et les minéraux lourds, et les âges obtenus lithostructural (Nex et al., 2001).
récemment sur des particules d’or et de pyrite à 3.03 Ga, Les pyroxénites à uranothorianite de Madagascar,
antérieurs à ceux des sédiments encaissants les plus exploitées par le CEA dans les années 50, ont fait l’objet de
anciens (2.90 Ga) démontrent l’existence d’une minérali- recherches récentes pour préciser leurs conditions de
sation U-Au originellement détritique (Frimmel, 2005). genèse (Rakotondrazafy et al., 1996 ; Moine et al., 1998 ;
Enfin, le fait que les cristaux d’uraninite des conglomérats Ramambazafy, 1998 ; Boulvais et al., 1998 ; 2000). Ces tra-
soient riches en thorium atteste de leur origine magma- vaux montrent que les minéralisations uranothorifères
tique, les oxydes d’uranium déposés à basse températu- dérivent de magmas et de fluides riches en CO2 et fluor
re (< 300°C) n’incorporant que très peu de thorium du fait provenant de la fusion partielle et de la déshydratation de
de sa faible solubilité dans ces conditions. Par ailleurs la formations sous jacentes au cours d’une granulitisation
variabilité des teneurs en thorium de ces cristaux d’ura- (800°C, 5 kbar). L’injection de ces magmas et fluides
ninite atteste de la diversité des types de granitoïdes dans des marbres calcomagnésiens produit des skarns 57

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

d’amplitude régionale avec la zonalité la plus typique sui- un même minéral, permet d’accroître l’étendue des
vante : granitoïde potassique, endoskarn avec syénite à solutions solides et en particulier la quantité d’uranium.
diopside (dysogénite) puis scapolitite, ensuite exoskarn
formé de diopsidites et finalement marbre. Dans ces condi- Approches expérimentales
tions, l’uranium est mobilisé simultanément avec Th, Zr
Ainsi que pour d’autre minéraux accessoires (zircon,
et les terres rares. La minéralisation la plus riche se dépo-
apatite, monazite, columbo-tantalite), la solubilité de l’ura-
se au niveau des pyroxénites, mais les scapolitites et les
ninite a été déterminée de manière expérimentale dans
marbres peuvent être également localement minéralisés.
les liquides silicatés en fonction de leur peraluminosité et
Dans le cas du gisement d’Olympic Dam qui ren- peralcalinité et à différentes fugacités en oxygène, ainsi
ferme de loin les plus grosses ressources en uranium du que les coefficients de partage entre liquide silicaté et
monde, très peu de travaux ont été réalisés, orientés sur fluide (Peiffert et al., 1994 ; 1996) à 800°C et 2 kbar. Ces
la compréhension de la minéralisation uranifère, tout à fait expériences montrent que l’uraninite peut cristalliser à
exceptionnelle par ses teneurs en uranium relativement partir du magma pour des teneurs en uranium de l’ordre
élevées comparativement aux autres gisements de type de quelques dizaines de ppm dans le cas d’un liquide sili-
IOCG dans le monde. La compréhension de la genèse de caté fortement peralumineux. Inversement dans le cas
la minéralisation nécessiterait d’une part l’étude de la de magmas fortement peralcalins, l’uranium a un com-
distribution 3D des minéraux porteurs de l’uranium et portement parfaitement incompatible avec des solubili-
d’autre part leur datation isotopique U-Pb par SIMS. Le tés de plusieurs pourcents en poids. De telles expériences
dépôt de la principale minéralisation uranifère est-il syn- devraient être poursuivies pour tester l’effet de la tem-
chrone de celui de la minéralisation précoce à Fe-Cu-Au, pérature et de la pression.
ou est-il plus tardif ? Le dépôt de l’uranium n’est-il pas
Podor et al. (1995), Podor et Cuney (1997) ont mon-
contrôlé par les conditions réductrices créées par l’amas
tré qu’à 800°C,2 kbar il existait une solution solide complète
d’oxydes et de sulfures préalablement déposé ? Les études
entre le pôle monazite et les pôles thorifère et uranifère,avec
menées sur la région de Kwijybo au Québec (Magrina et
une substitution couplée du calcium comme compensa-
al., 2005), qui possède des indices de type IOCG riches en
teur de charge. La monazite peut donc représenter un hôte
uranium, ont démontré la présence de granites de type
majeur de l’uranium dans les roches. Un travail expéri-
calcoalcalin fortement potassiques et très fractionnés
mental important reste à faire pour quantifier plus préci-
qui ont pu servir de source à ces minéralisations et qui
sément l’étendue des solutions solides dans les différents
sont semblables à celui de Roxbydowns encaissant le
minéraux accessoires porteurs d’uranium en fonction des
gisement d’Olympic Dam.
conditions P,T, X de leur milieu de croissance.
Minéralogie de l’uranium
Un travail systématique de cristallographie des
Conclusions
minéraux d’uranium, principalement d’uranium hexava- Ainsi malgré le ralentissement considérable des
lent, avec découverte de nombreuses espèces nouvelles a activités d’exploration pour l’uranium et des recherches
été poursuivi ces quinze dernières années essentielle- académiques sur la métallogenèse de l’uranium dans la
ment par deux minéralogistes belges (Piret et Deliens) plupart des pays depuis la fin des années 80, des progrès
du Muséum des Sciences Naturelles de Bruxelles et deux importants dans la compréhension de la genèse des
minéralogistes américains (P. Burns de l’Université Notre gisements de type discordance ont été acquis. Par contre,
Dame, Indiana et R. Finch du laboratoire d’Argonne, les recherches ont été beaucoup plus limitées pour les
Illinois). Un des résultats les plus remarquables est la mise autres types de gisements.
en évidence pour la première fois d’uranium à la valence La classification des gisements d’uranium la plus
5 dans un minéral d’uranium : la wyartite (Burns et couramment utilisée est celle proposée par l’IAEA qui
Finch, 1999), démontrant la possibilité du transport de est basée sur la nature des formations lithologiques
l’uranium sous la forme pentavalente. environnant les minéralisations. Les progrès réalisés
L’étude analytique des solutions solides naturelles dans la compréhension des mécanismes de formation
entre différents pôles de minéraux accessoires uranifères des gisements devraient permettre de développer une
(monazite, xénotime, zircon, thorite, coffinite…) sur diffé- classification génétique, afin de rendre compte de la
rents types de granites (Förster, 1998 ; 2006) a montré diversité exceptionnelle des processus impliqués dans
58 que le couplage de différents types de substitution dans leur genèse et permettre la prédiction de nouveaux types

Géologues n°152
connaissance des gîtes minéraux

de gisements. Il va être nécessaire dans les prochaines Basson I.J., et Greenway G., 2004. The Rössing uranium deposit: a
années d’étudier les nouveaux gisements qui seront product of late-kinematic localization of uraniferous granites in the
découverts afin d’accompagner l’énorme effort Central Zone of the Damara Orogen, Namibia. Journal of African Ear-
d’exploration qui redémarre depuis 2003 dans le monde. th Sciences 38, 413-435.
Par exemple le gisement d’Elkon en Yakoutie Beaufort D., Patrier P., Laverret E., Bruneton P. et Mondy J., 2005. Clay
(Russie), dont les réserves seraient de plus de 344 000 t U Alteration Associated with Proterozoic Unconformity-Type Uranium
(www.russia-intelligence.fr/getdoc/ri/), n’a pas encore Deposits in the East Alligator Rivers Uranium Field, Northern
fait l’objet de recherches scientifiques significatives. Territory, Australia. Econ. Geol., 100, 515 - 536.

Enfin, l’un des besoins les plus fondamentaux dans Boulvais P.,Fourcade S.,Gruau G.,Moine B.et Cuney M.,1998.Persistance
le domaine de la métallogenèse de l’uranium est l’acqui- of premetamorphic C and O isotopic signatures in marbles subject to
sition de données expérimentales sur les solubilités de Pan-African granulite facies metamorphism and U-Th mineralization
l’uraninite et des principaux porteurs d’uranium qui sont (Tranomaro, South East Madagascar). Chem. Geol., 150, 247-262.
encore très mal connues à haute température et à haute Boulvais P., Fourcade S., Moine B., Gruau G. et Cuney M., 2000. Rare-
pression et en présence de concentrations très élevées en earth elements distribution in granulite-facies marbles: a witness of
complexants et plus particulièrement en chlorures. Cette fluid-rock interaction, Lithos, 53, 117-126.
étape est indispensable pour le développement d’une Burns P.C. et Finch R.J., 1999. Wyartite: Crystallographic evidence for
modélisation thermodynamique satisfaisante des condi- the first pentavalent-uranium mineral. Am. Mineral., 84, 1456-1460.
tions de genèse de ces gisements. De même, l’application Castor S.B. et Henry C.D., 2000. Geology, geochemistry, and origin of
accrue des méthodes d’analyse ponctuelle pour les data- volcanic rock- hosted uranium deposits in northwestern Nevada and
tions, pour la détermination des compositions isotopiques southeastern Oregon, USA. Ore Geol. Rev. 16, 1-40.
ainsi que pour les concentrations en éléments en traces
Cavellec S., 2006. Évolution diagénétique du bassin de Tim Mersoï et
dans les inclusions fluides et les phases minérales
conséquences sur la genèse des minéralisations uranifères dans les
permettra d’obtenir une liaison plus directe et plus
formations du Guézouman et du Tarat (district d’Arlit-Akokan, Niger).
quantitative entre les paramètres mesurés et ceux
Thèse Univ. Orsay, 463 pages.
contrôlant effectivement le dépôt de la minéralisation.
Chabiron A., 1999. Les gisements d’uranium de la caldeira de Strelt-
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Géologues n°152
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62

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Irlande : Activité actuelle dans la mine métallique


Gerry Stanley 1 et Dr. Mark Holdstock 2 .

Ce court article fait le point sur la mine en Irlande. privé. Elle suit un modèle nord américain, où les sociétés
Les règlements miniers sont esquissés, puis vient un importantes et juniors sont engagées dans l’exploration,
résumé de l’activité minière actuelle et une ébauche des tandis que les sociétés importantes et moyennes produi-
types de gisement et des formes de minéralisation que l’on sent et sont responsables de la phase de fermeture des
recherche en Irlande aujourd’hui. Sont passés en revue mines. L’industrie est contrôlée par le Département des
les types d’outils utilisés dans l’exploration moderne, et communications et des ressources marines et naturelles à
aussi l’aide que le secteur minier peut recevoir d’un service travers la Division Exploration et Mines (EMD).
géologique moderne.
À l’heure où nous écrivons cet article, les prix des Cadre réglementaire
métaux bénéficient de l’un de leurs plus hauts sommets
et l’industrie minière toute entière jouit d’une période de Le premier pas est d’obtenir une Licence de pros-
croissance inhabituelle dans ce secteur connu pour ses pection (Prospecting Licence). Elle peut être obtenue à
hauts et bas. Cela s’applique à tout l’éventail des métaux, l’EMD en remplissant un formulaire standard. Il y a des
depuis les métaux précieux, comme l’or, jusqu’aux métaux taxes administratives pour la demande et l’étude de can-
de base et au fer, et traduit l’extraordinaire demande en didature, et le candidat doit démontrer ses possibilités
métaux et autres produits, particulièrement dans les éco- financières et ses compétences techniques. La société
nomies émergentes telles que celles de la Chine et de l’In- d’exploration doit s’engager à un certain montant de
de. Cependant, la demande pour les métaux ne prend pas dépenses et les résultats des travaux effectués doivent
place dans les économies du monde de manière égale : une
grande partie de cette demande accrue vise l’hémisphè-
re austral (Amérique du Sud, Afrique du Sud et Austra-
lie). Bien que l’Europe ait le bénéfice d’une géologie variée,
elle est restée en arrière du sommet de cette vague pour
différentes raisons. Parmi celles-ci, le sentiment que le
potentiel minier est faible, des règlements tatillons, l’ab-
sence de soutien politique,un lobby « vert » de plus en plus
envahissant, renforcé par les héritages environnemen-
taux regrettables légués par l’histoire.

Le secteur minier irlandais Photo 1. Vue aérienne de Galmoy (Copyright Geological Survey of Ireland).

Bien que l’Europe ait une longue et fière tradition


d’exploitation des minerais métalliques, aujourd’hui seuls
quelques pays sont des producteurs significatifs de métaux.
Parmi eux, l’Espagne, le Portugal, la Suède, la Grèce, la
Finlande, la Bulgarie et l’Irlande sont les producteurs
principaux de métaux comme le zinc,le cuivre,l’étain et l’or.
Plus particulièrement, l’Irlande est un producteur majeur
de zinc et de plomb, avec l’argent comme sous-produit. Il
y a actuellement trois mines souterraines en production,
dont deux ont été ouvertes ces dix dernières années
(Galmoy en 1997 et Lisheen en 2000),cependant que Navan
est exploité depuis 1977 et que toutes fonctionnent dans
le plus grand respect de l’environnement (Photos 1 et 2).
Photo 2. Installations de surface à Navan (Remerciements à Boliden Tara
L’exploitation minière en Irlande appartient au secteur Mines Limited). 63

1. EurGeol, PGeo (Geological Survey of Ireland).


2. EurGeol, PGeo (Aurum Exploration Services).

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

être reportés à l’EMD, en principe tous les deux ans. Les sur l’impact environnemental sera demandée pour
licences de prospection sont en moyenne de 35 km2 et satisfaire aux directives de l’UE.
sont octroyées pour des minerais donnés. La licence est Les renseignements complémentaires sur toutes les
exclusive à la société d’exploration, pour les minerais procédures peuvent être obtenus sur le site Internet du
mentionnés, et est délivrée avec la garantie que, une Département : www.minex.ie
découverte exploitable étant effectuée, le détenteur de la
licence aura le droit exclusif d’exploiter les minerais après
avoir obtenu les permis nécessaires. Types de gisements
Si une découverte exploitable est faite, afin de la En dépit de sa superficie relativement restreinte
développer et d’exploiter les minerais, la société doit (70 000 km2),la République d’Irlande a une géologie remar-
obtenir les permis suivants : quablement variée, conditionnant une série de types de
un permis d’exploiter (Mining Lease ou Mining Licence, gisements (Fig. 1). Les formations carbonatées du Carbo-
délivré par l’EDM ; nifère inférieur des Midlands irlandais abritent l’une des
plus grandes provinces métallifères au monde. Depuis
une autorisation de projet (Planning Permission) délivré
1960, 14 gisements significatifs de Pb-Zn (ressource > 1 Mt)
par les autorités locales ;
ont été découverts, y compris le gisement de classe
une licence de contrôle de la prévention de la pollution mondiale de Navan (~ 100 Mt) (Photo 3). L’Irlande est la
environnementale (Environnmental Pollution Preven- première au monde pour ses découvertes de zinc au km2
tion Control Licence) délivré par l’Agence pour la pro- et la seconde en ce qui concerne le plomb. Les teneurs rela-
tection de l’environnement (Environmental Protection tivement élevées et la minéralurgie simple des amas miné-
Agency). ralisés en font une cible de choix dans le secteur minier.
La procédure d’obtention de ces permis peut être De vastes secteurs de l’Irlande sont des formations
poursuivie en même temps, bien que le permis d’exploi- métasédimentaires et métavolcaniques du Protérozoïque
ter soit normalement soumis à la condition que les deux et du Paléozoïque inférieur. Ces faciès sont favorables aux
autres permis aient été obtenus. Une déclaration générale amas sulfurés volcanogènes (VMS) (par exemple Avoca,
16 Mt à 0,6% Cu) et aux filons mésothermaux de quartz
aurifère. Ce dernier type de minéralisations a été récem-
ment l’objet d’explorations intenses à travers l’île, et un
certain nombre de gisements ont été découverts, tel que
Cavanacaw (Irlande du Nord), qui sera mis en exploita-
tion cette année.
En plus de ce potentiel pour or et métaux de base,
la géologie diversifiée de l’Irlande rend possible la décou-
verte d’autres types de gisements. Ces dernières années,
une exploration pour des minéralisations EGP (platinoïdes)
associés à des complexes intrusifs basiques a été entreprise

Figure 1. Carte géologique d’Irlande montrant les mines en activité. Photo 3. Une sondeuse au travail au fond à la mine de Navan, County
64 (Copyright Geological Survey of Ireland). Meath, Irlande (Remerciements à Boliden Tara Mines Limited).

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

au NE de l’Irlande, ainsi que pour des terres rares et des coup de travaux de documentation et d’intégration des
métaux spéciaux (Li,Ta,W, Sn) associés aux pegmatites qui données soient effectués au bureau, l’exploration miniè-
recoupent le batholite granitique calédonien de Leinster. re est un travail de terrain, à accomplir à pied ou avec des
Des possibilités pour Ni et Cr associés à des intrusions véhicules tout-terrain, ou même par transport aérien (Pho-
ultrabasiques à l’Ouest, pour diamants et autre pierres to 4). Cette dernière activité sert à recueillir des données
précieuses dans les formations précambriennes du géophysiques à partir d’un hélicoptère volant à basse alti-
Donegal, à l’extrême nord de l’Irlande, existent aussi. tude ou d’avions à ailes fixes. Les données récoltées sont
L’exploitation des minéraux industriels se fait à ensuite interprétées selon la géologie probable de la zone
petite échelle en Irlande, avec le gypse produit à King- (Fig. 3). En Irlande,où les formations géologiques sont mas-
scourt dans le comté de Cavan et le sel à Carrickfergus quées par des dépôts glaciaux quaternaires, des sondages
dans le comté d’Antrim, en Irlande du Nord. carottés fournissent les indices nécessaires au succès de l’ex-
ploration. La possibilité d’effectuer des sondages carottés
directionnels pour examiner des cibles à des profondeurs
Une exploration minérale moderne de plus d’un kilomètre est un appui pour continuer la
Malgré plus de 40 ans d’exploration minière moder- recherche de ressources supplémentaires et à maintenir
ne, bien des régions d’Irlande n’ont été examinées que de l’Irlande à la pointe de l’exploration en Europe.
façon superficielle. L’exploration minière d’aujourd’hui est Un programme d’exploration moderne demande
une opération scientifique de pointe utilisant une tech- du savoir-faire et bien des compétences. Une société d’ex-
nologie informatique sophistiquée. De façon générale,l’ex- ploration minérale pourra avoir besoin de géologues
ploration utilise la géologie, la géophysique, la géochimie, consultants, ou de sociétés contractuelles de service, four-
la télédétection, ainsi que la visualisation des terrains en nissant leur expertise en stratigraphie, tectonique ou
sub-surface à l’aide d’un logiciel 3D (Fig. 2). Bien que beau- géophysique, de sociétés de sondage et échantillonnage,
de laboratoires de toutes spécialités (analyses, paléonto-
logie, etc.). Les géologues employés dans ces sociétés dis-
posent d’un large éventail de connaissances, depuis la
géologie des gisements métallifères jusqu’au maniement
des données et de la géophysique à la chimie. Avec le
boum actuel dans le secteur minier, les géoscientifiques
deviennent rares dans diverses régions du monde, et plus
particulièrement les gens d’expérience. L’Institut des Géo-
logues d’Irlande tient le registre des postes demandés
sur son site Internet (www.igi.ie).

Photo 4. Un avion Twin-Otter équipé pour effectuer des relevés géophy-


siques. Les instruments à bord comprennent un magnétomètre, un
spectromètre radiométrique et des appareils électromagnétiques. Cet
avion est sous le contrôle du consortium du Joint Airborne-geoscience
Figure 2. Une image 3-D d’une partie de l’amas minéralisé de Navan, Capability (JAC), qui comprend le Service géologique de Finlande (GTK) et
County Meath, Irlande. (Remerciements à Boliden Tara Mines Limited). le British Geological Survey (BGS). 65

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Les auteurs
EurGeol Gerry Stanley, Pgeo, a obtenu une licence
(primary degree) en géologie du Collège de l’Université de
Dublin en 1977, un master en géologie de l’Université Aca-
dia (Nouvelle-Écosse, Canada) et un master en ingénierie
minière de l’École des Mines de Camborne en 1992. Pen-
dant sa carrière, il a occupé des postes dans l’exploration
minière, la géophysique, le développement minier, et au
Service géologique d’Irlande. Il est à présent Géologue senior
en charge du programme minéral du service, avec la res-
ponsabilité de développer des projets dans divers domaines,
tels que la carte du potentiel minéral, l’investigation de
sites miniers historiques dans une perspective environne-
mentale, et il a la responsabilité de la maintenance et du
développement des bases de données. Il a été Président de
l’Association des géologues miniers et est co-organisateur
du Symposium minéral nord-atlantique. Il est rapporteur du
comité d’organisation local pour SGA 2007,qui doit avoir lieu
au Trinity College en août de cette année
EurGeol Dr. Mark Holdstock, Pgeo, a obtenu son
diplôme de géologue à l’université de Newcastle en 1979. Il
a terminé son PhD à l’University College de Cork en 1984 en
étudiant le gîte de zinc-plomb de Harberton Bridge dans le
comté de Kildare (Irlande). Mark a travaillé comme
géologue d’exploration minière, contractant géophysicien
Figure 3. Partie d’image magnétique des Comtés Cavan et Monaghan.
et responsable de l’équipe ayant découvert la partie SWEX
Les données ont été traitées pour montrer l’image réduite au pôle (RTP). du gisement de Navan (Comté de Meath). Mark est actuel-
lement Directeur technique de Aurum Exploration Services
Le service géologique d’Irlande (GSI) (basé à Kells, dans le comté de Meath), une société offrant
des services, dans le domaine géologique entre autres, en
Le service géologique d’Irlande est l’unité natio-
Irlande et à travers l’Europe. Aurum s’est spécialisé dans
nale des géosciences et une division du Département des
la fourniture de services professionnels de grande qualité,
communications et des ressources marines et naturelles.
et de solutions géologiques innovantes dans le secteur de
Il s’agit d’une unité multifonctionnelle intervenant dans
l’exploration minière. Le site Internet de la société est :
tous les secteurs concernés par l’application de la géolo-
www.aurumexploration.com
gie à la société. L’un de ses programmes clefs est le secteur
des gîtes minéraux, pour lequel il fournit les données de
base, abrite les archives des rapports d’exploration miniè-
re, accessibles à tous, et réalise des projets destinés à sou-
tenir le secteur minier. On peut obtenir des renseigne-
ments sur le site internet du GSI (www.gsi.ie).

66

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Du salarié au consultant : une évolution de carrière en exploration


Noel White.

L’industrie minière ne constitue pas un environ- passer de ma 1ère université à Newcastle à l’université de
nement connu pour sa stabilité à long terme de l’emploi. Tasmanie à Hobart. C’est à ce moment là que je me suis
Qu’arrive-t-il aux géologues seniors quand la fin de leur finalement orienté vers la géologie économique car ma
carrière approche ? Une enquête récente, menée par recherche a porté sur les minéralisations de l’extrémité
l’Institut australien des « géoscientistes » montre ce qui méridionale des volcanites cambriennes de Mount Read,
arrive en Australie : « Quand nous prenons de l’âge, la pro- encaissant de plusieurs gîtes importants plus au nord.
babilité la plus forte est que nous passions d’un salariat Une fois la thèse terminée, j’étais désireux de quitter
à plein temps à une responsabilité de direction ou de ges- l’environnement universitaire et de travailler dans
tion ou que nous nous retrouvions dans une position de l’exploration, toujours avec BHP.
contractuel. Depuis ces dernières années, il y a également Après ces années intenses de recherche et de rédac-
plus de chances que nous travaillions à l’étranger ». tion de thèse, ce fut un grand soulagement que de passer
À l’approche de la soixantaine,mon expérience est à du milieu académique à l’exploration.J’ai d’abord été nom-
la fois inhabituelle sous certains aspects, et assez courante mé à Armidale dans le New South Wales,où j’ai été impliqué
sous d’autres. Il est inhabituel que je sois resté longtemps dans l’exploration de gîtes de sulfures massifs dans les
comme salarié d’une très grosse société, mais courant que volcanites du Permien et du Dévonien, ainsi que dans le
je termine ma carrière comme consultant de nombreuses nickel latéritique. Je me suis délecté d’un style de vie libre
compagnies, principalement des petites, travaillant dans comportant beaucoup de déplacements et de travail de ter-
différentes parties du monde. Bien que mon histoire des rain et aucune des contraintes académiques. Mon travail à
débuts soit différente de celle de jeunes géologues aujour- Armidale a cependant duré peu de temps et on m’a deman-
d’hui,mon expérience ultérieure peut servir de guide sur ce dé de me déplacer de l’autre côté du pays en étant basé à Per-
qui risque d’arriver dans les dernières années de la carrière th (Western Australia) pour travailler à l’exploration des
de nombre de géologues de l’exploration industrielle. sulfures massifs volcanogéniques (VMS : Volcanogenic
Massive Sulphides) dans le craton archéen de Yilgarn.C’était
peu après la découverte de Golden Grove, un gisement
Mon histoire à ce jour voisin de celui de Scuddles,et qui est le premier (et jusqu’ici
Je suis citoyen australien, avec un passé relative- le seul) grand gisement de VMS trouvé dans le Yilgarn.
ment courant. Dans mon enfance, ma famille s’est Au début, mon travail impliquait de vivre sur le
déplacée dans différentes petites villes, en relation avec la terrain dans une caravane, que j’ai habituellement
profession de mon père. Nous nous sommes finalement partagée avec un compagnon, mais souvent occupé seul.
établis à Newcastle,une ville industrielle au nord de Sydney J’ai commencé au milieu de l’été, par forte chaleur, et suis
dans le New South Wales. En 1964, à l’issue de mes études resté jusqu’au début de la saison d’hiver quand la pluie a
secondaires, je me suis retrouvé comme stagiaire à BHP, provoqué l’apparition miraculeuse de vastes tapis de fleurs
une compagnie industrielle et minière majeure à l’époque. sauvages. Mon compagnon était un géologue très expé-
En ce temps là, il était possible d’étudier à temps rimenté d’Afrique du Sud et outre mon apprentissage
partiel à l’université tout en travaillant pour une société. de la pratique du métier dans cet environnement, nous
Après deux ans, j’ai repris des études à temps plein. J’ai parlions géologie jusqu’à des heures avancées de la nuit.
alors changé d’orientation en passant de la métallurgie à Dans mon activité, j’étais détaché auprès d’un
un diplôme en géologie et chimie. La chimie était aussi partenaire de joint-venture, ce qui m’a permis de voir com-
une passion de jeunesse, mais cette passion a diminué en ment travaillent différentes sociétés. Cette expérience a été
même temps que celle pour la géologie se développait. À inestimable et elle a constitué un facteur essentiel qui
l’issue de mon BSc, j’ai décidé de prolonger d’un an en explique pourquoi je suis resté si longtemps à BHP. La joint-
Honors et d’être géologue plutôt que chimiste,une décision venture n’a pas été un succès, ce qui m’a conduit à
à laquelle j’ai été éternellement reconnaissant depuis. engager une reconnaissance du Yilgarn pour rechercher des
Après mon année d’Honors, j’ai décidé de conti- prospects. De temps à autre, je travaillais avec mon chef,
nuer en PhD. J’ai pu bénéficier d’une bourse de BHP pour un excellent géologue et un bon compagnon. J’ai embau- 67

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

ché un assistant de terrain qui a travaillé avec moi pendant à Londres, je me suis retrouvé au siège général de
les 8 années qui suivirent et s’est aussi avéré un bon ami l’exploration à San Francisco. Environ un an après, il y a
et un compagnon de grande qualité. Importante leçon à eu des changements majeurs dans la société, résultant
tirer de cette expérience :peu importe combien vous aimez de la nécessité de couper fortement dans toutes les
la géologie, il est vital de travailler avec des personnes dépenses. Le bureau de San Franscisco a été fermé et le
dont vous appréciez la compagnie. Si vous travaillez avec personnel réduit de 70% ; j’en faisais partie.
de bonnes personnes, aux bons endroits, avec de la bonne Au fur et à mesure que les problèmes de la socié-
géologie, votre vie est un plaisir. Sans compagnons de té se développaient, il était facile, pour quelqu’un qui avait
travail sympathiques, cela peut devenir bien triste. travaillé si longtemps avec elle, de voir ce qui allait arriver,
Durant les 9 années qui ont suivi mon déménage- et les changements ne m’ont pas surpris. Cependant,
ment à Perth, mes responsabilités et mon champ d’opéra- quitter une société avec laquelle j’avais passé 35 ans de ma
tions se sont progressivement développés. Je suis devenu vie constituait un changement majeur. Le problème n’était
responsable d’une équipe de géologues et du personnel pas tant de quitter la société, mais laisser les nombreux
d’appui,travaillant sur des projets dans différentes zones de collègues qui avaient été importants dans ma vie pen-
Western Australia, puis dans l’ensemble de l’Australie. Je dant si longtemps était une déchirure. Heureusement,
me suis ainsi investi dans l’exploration des gîtes de nickel dans cette phase tardive de ma carrière, ce changement
en contexte de komatiites. n’entraînait pas de difficultés économiques, et cela m’a
Vers 1983, j’ai réalisé que j’avais besoin d’un chan- tout d’un coup offert la possibilité d’un grand nombre de
gement complet. Il y avait beaucoup d’enjeux dans mon choix pour ma vie future.
travail, mais quand vous travaillez sur un petit nombre de Je devais au premier chef m’interroger sur mon
cibles,avec le même groupe de personnes,pendant de nom- envie de trouver un poste similaire et la réponse a été
breuses années, vous arrivez au point où vous n’avez plus clairement « non ». Je devais aussi réfléchir à l’endroit où je
d’idées neuves pour apporter votre contribution : la seule voulais vivre et j’ai décidé de déménager à Brisbane, dans
solution est de changer complètement de responsabilités le Queensland,et cela pour plusieurs raisons.L’une d’elle était
et d’environnement. J’ai fait part de mon besoin à mon qu’après avoir vécu dans cette ville froide et morne qu’est
patron et peu de temps après on m’a offert de passer au Londres, je voulais vivre dans une ville à climat chaud. Une
siège exploration de Melbourne comme Géologue de autre raison est que je connaissais beaucoup de monde
recherche principal. Il s’agissait essentiellement de faire dans cette ville. Une autre encore, et importante, est que
émerger des sujets d’or épithermal dans différentes régions je n’avais jamais vécu là antérieurement. Une des leçons de
d’Australie et, plus tard, à l’étranger. Sur le plan technique, la vie est de ne jamais essayer de revenir sur le temps
c’était un nouveau champ d’activités pour moi,qui impliquait passé ; retourner dans les lieux où vous avez vécu aupara-
également la formation technique du personnel, un rôle vant pour y retrouver les bons moments passés, n’amène
qui s’est poursuivi toute le reste de ma carrière. habituellement que du désappointement. Je voulais
Les 10 années suivantes, passées à Melbourne, ont commencer une nouvelle phase de ma vie,dans un nouveau
été passionnantes car il s’agissait d’une période de crois- lieu.J’aurais pu virtuellement choisir n’importe quel endroit
sance majeure de BHP. Une grande partie de mon travail au monde,mais l’âge venant,il est important de s’installer
a été réalisée dans différentes régions d’Asie, ce qui m’a en un lieu qui offre des facilités en matière de soins et de
apporté beaucoup de satisfaction. En 1989, j’ai été nom- transport dont j’aurais peut-être besoin plus tard,en même
mé chef géologue d’exploration avec la responsabilité de temps, qu’un environnement sûr et agréable. Si l’on prend
conseil technique du chef du département d’exploration, en compte tous ces facteurs, il n’y a pas tant de régions du
en plus de mes responsabilités d’alors de recherche monde entre lesquelles choisir.
scientifique à l’extérieur, de formation technique de Je n’étais pas à la recherche d’un travail, mais j’ai
personnel et de recrutement des jeunes diplômés. décidé de devenir consultant, en offrant un conseil
Auparavant, durant de nombreuses années, BHP technique et opérationnel aux compagnies d’exploration.
avait mis en place deux groupes d’exploration, l’un était Au moment où j’ai déménagé à Brisbane, l’industrie miniè-
son groupe d’origine, l’autre était issu de la reprise d’une re était en pleine récession et les occasions de travailler
société. Finalement, il a été décidé de fusionner les deux, étaient limitées, bien que ce ne fût pas un souci pour moi
ce qui a entraîné une réorganisation très importante. Par car j’avais de nombreux domaines d’intérêt et j’étais
voie de conséquence, j’ai été transféré à Londres avec les activement impliqué à la fois dans la Society of Economic
mêmes responsabilités, mais en travaillant pour Geologists (SEG) et dans la Society for Geology Applied to
68 Ore Deposits (SGA). Néanmoins, et bien que je ne fût pas
différentes équipes et dans différentes régions. Après 4 ans

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

en recherche de travail, des travaux de consultant m’ont En 1987, j’ai été l’un des trois géologues à explorer
été proposés, ce qui a maintenu mon intérêt éveillé et sept des îles Tonga, dans le Pacifique sud. Nous disposions
m’a gardé raisonnablement occupé. d’un chalutier pour la pêche en océan qui avait été conver-
Un travail de consultant m’a été proposé par un ti à la croisière de plongée pour naviguer entre les îles, et
ami qui avait un contrat avec la Banque mondiale, pour un hélicoptère sur le pont pour le transport local. Quels
préparer un rapport de synthèse sur les opportunités sont mes souvenirs ? D’énormes poissons attrapés lors
d’exploration en Asie. Dans le cadre de cette synthèse, un de nos déplacements à la voile entre les îles. La nage en mer
groupe important de personnes s’est retrouvé à Ottawa, près des îles tropicales. Le mal de mer. Des formes volca-
au Canada. Parmi elles, quelqu’un que je ne connaissais niques étonnantes, de création récente. La peur qui vous
pas, un chinois chercheur à l’université de Toronto mais prend lorsque vous vous penchez pour regarder dans la
qui avait le projet de démarrer une nouvelle compagnie gueule d’un volcan très actif. Des oiseaux partout,dans l’air,
d’exploration pour travailler en Chine. Nous sommes deve- en mer, et sur terre. Les baleines sautant hors de l’eau.
nus bons amis et je lui ai fait part des opportunités et des Des habitants souriant et courant après nous où que nous
problèmes que je voyais dans son projet. Nous sommes allions. Le partage de la kava avec eux (difficile). Le secours
restés en contact pendant les deux années qui suivirent, des marins perdus. L’accostage de l’hélicoptère sur la
alors qu’il était retourné en Chine pour créer sa compagnie plage juste avant qu’une vague exceptionnelle soit sur le
et finalement il m’a demandé de venir voir son travail et de point de nous balayer. Des couchers de soleil à couper le
le conseiller. Ce que je fis et j’ai été impressionné à la fois souffle et les superbes chants des habitants.
par les projets eux-mêmes,par le personnel qui y travaillait, En 1989, deux d’entre nous visitèrent le centre de
et par les opportunités d’exploration en Chine. À la fin de Kalimantan en Indonésie. Nous avons pu circuler sur la
ce séjour, il m’a demandé si je voulais continuer à travailler Mahakan grâce à une embarcation de rivière, puis loca-
avec sa nouvelle compagnie et ma réponse a été oui, avec lement avec des pirogues creusées dans un tronc. Mes
enthousiasme. Et ce fut le début d’une implication inten- souvenirs, ce sont des jours à contempler un paysage de
se et pérenne en Chine, qui s’est avérée l’une des plus villages et de jungle au fur et à mesure que nous chemi-
agréables et des plus bénéfiques périodes de ma vie. nions péniblement le long de la rivière. Des hordes de
singes sur la rive et un jeune mâle orang-outang nageant
Tout au long de ma carrière, j’ai travaillé dans 46
dans la rivière ; il ressemblait à un rocker punk à cheveux
pays. En dehors de quelques années comme géologue sur
roux. Les déplacements avec nos pirogues mugissantes à
site et responsable de programme, mon activité a aussi
travers la jungle et les clairières, de nuit et de jour, écopant
impliqué la recherche, le recrutement des diplômés, la
constamment et parfois râclant le fond de gravier. Visite
formation et le développement de carrière du personnel.
de villages avec des maisons allongées et la présence
L’essentiel de mon travail actuel se déroule dans plusieurs
de femmes âgées aux lobes d’oreille comme des pende-
pays étrangers, principalement en Chine. Je maintiens des
loques. Une salle communale remplie de milliers de sculp-
liens forts avec plusieurs universités et participe active-
tures en bois, dont une d’hélicoptère, et les piliers
ment à la recherche, ce qui implique la supervision d’étu-
supports de la maison sculptés en personnages gro-
diants du Supérieur. Je fais régulièrement des exposés sur
tesques, certains avec d’énormes pénis comme pour dire
un large éventail de domaines pour des sociétés savantes
« Faites attention, ici nous sommes des hommes forts ».
comme la SEG ou la SGA, ainsi que dans des universités,
des services géologiques, des sociétés, et lors de congrès. En 2005, une équipe de six géologues se rendit sur
des prospects de la province de Qinghai dans la partie
nord du plateau tibétain. Le voyage se faisait en 4/4 et
Quelques expériences particulières par le nouveau train qui relie Lhassa au reste de la Chine.
L’un des meilleurs aspects des déplacements liés à Je me souviens de trajets interminables sur des routes
l’exploration est que cela nous conduit dans des lieux que difficiles, souvent en construction. Du mal d’altitude puis-
les touristes ne voient jamais, où l’on découvre la « vraie » qu’on atteint 5 000 m. De nuits sous la tente avec des
campagne et où l’on rencontre les personnes « véritables ». appareils de chauffage au milieu de l’été et du cours d’eau
On me demande souvent quel est mon lieu favori, mais je voisin qui gèle au cours de la nuit. De larges vallées vertes
n’en ai aucun. Quand vous voyagez pour votre travail vous avec des cours d’eau limpide entourés de chaînes monta-
devez tirer le meilleur profit des bonnes choses et évitez gneuses escarpées. Des troupeaux de yacks et de moutons
de vous préoccuper des moins bonnes. Bien que je n’aie pas dans les vallées, surveillés par des bergers vivant sous la
de voyages favoris, il y en a trois qui sont particulièrement tente. Des troupeaux de petites antilopes sauvages fuyant
présents à ma mémoire. à notre approche,et d’animaux divers vivant dans des trous 69

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

dans le sol.D’un grand nombre de fleurs sauvages de toutes expérience. On les emploie en général sur des périodes
sortes, et de leurs parfums portés par la brise. Des courtes, pour réaliser des tâches déterminées. Dans la
sanitaires incroyablement repoussants. Des milliers de dra- plupart des cas, il est du rôle du consultant de conseiller
peaux de prière sur les flancs de collines. D’une campagne les autres sur la façon de réaliser le travail, plutôt que de
étonnamment belle et d’une géologie passionnante. faire le travail lui-même.
Non, je n’ai pas de favoris, mais j’ai des souvenirs
fabuleux sans fin, et ce sont nos souvenirs qui définis- Ce que je fais comme consultant
sent la qualité de nos vies.
J’ai travaillé comme consultant pour des compa-
gnies d’exploration depuis que j’ai été licencié après 35
Qu’est-ce qui distingue les ans passés à BHP, maintenant BHP Billiton, la plus grosse
employés, les contractants et compagnie minière mondiale. Cette longue période m’a
permis d’acquérir une expérience diversifiée dans l’ex-
les consultants ? ploration de substances variées et dans de nombreuses
J’ai commencé ma carrière comme salarié et régions du monde. Mon travail de consultant consiste à uti-
maintenant je suis consultant sur contrat. Qu’est ce qui liser cette expérience et cette connaissance pour prêter
différencie ces différentes formes d’emploi ? mon concours aux compagnies qui m’emploient. Ce que
La plupart des salariés travaillent à temps com- je fais dans la réalité varie selon l’état d’avancement de
plet dans des conditions légales définies. Leur emploi se l’exploration et l’expertise déjà disponible pour la
poursuit indéfiniment et ils sont payés un salaire fixé. Ils compagnie. À un stade précoce des projets, mon rôle est
peuvent en fin de compte décider de quitter leur emploi d’étudier l’information disponible et d’évaluer le potentiel
et dans ce cas ils donnent leur démission, ou leur emploi des secteurs d’exploration envisagés. Si ceux-ci sont jugés
peut être arrêté par l’employeur. Si cet arrêt résulte d’une comme offrant un potentiel significatif et qu’il est déci-
insuffisance d’activité, ou de finances, ou de changements dé de poursuivre l’exploration, j’imagine des approches
dans les priorités de l’employeur, alors on parle de com- d’exploration susceptibles de reconnaître la zone le plus
pression de personnel, ce qui est habituellement assorti efficacement possible sur la base de ma connaissance de ce
de conditions favorables de licenciement, comme des qui convient le mieux pour ce type de gisement et dans ce
indemnités basées sur le nombre d’années de service. Si type de terrain. Cette approche implique de se rendre sur
le salarié commet une faute, il peut être licencié sans délai le terrain, de regarder la géologie et tout gisement connu,
par l’employeur, sans indemnités. Par les temps qui cou- et d’examiner les travaux antérieurs. Pour des projets plus
rent, il est inhabituel que les géologues travaillent très avancés qui ont déjà donné lieu à des travaux significatifs,
longtemps pour une société ; ils passent par plusieurs mon rôle est d’étudier la géologie et toutes les données
employeurs, soit parce qu’ils choisissent de quitter leur issues des travaux,et de donner mon avis sur l’efficacité du
emploi et d’en prendre un autre, soit parce que l’employeur travail réalisé et sur la façon de poursuivre l’exploration de
a diminué ses activités et réduit son personnel. la meilleure façon possible. Dans tous les cas, mon travail
Dans les industries de l’exploration et de la mine, implique le transfert de connaissance de ma part vers les
il est courant d’être employé sur contrat plutôt que com- employés de mon client. Parfois cela se fait simplement au
me salarié. Un contrat est un accord légal qui fournit les hasard des conversations et discussions,mais souvent cela
caractéristiques de l’emploi, dont le salaire, les conditions implique de donner des cours formels de formation.
et la durée de l’emploi. Normalement, l’issue d’un contrat Les compagnies utilisent des consultants pour dif-
signifie la fin de l’emploi, à moins d’être remplacé par un férentes raisons, qui varient en fonction de la manière
nouveau contrat. Les conditions d’emploi peuvent être dont ils sont employés. Certaines les utilisent pour réali-
différentes de celles des employés à temps plein. Par ser des audits afin d’évaluer la qualité du travail réalisé. Si
exemple, il peut être demandé aux personnes sous contrat le consultant confirme que les projets sont bons et que leur
de fournir certains équipements pour leurs besoins ; de exploration est conduite avec efficacité, la compagnie fera
même, ils peuvent avoir la responsabilité de couvrir leurs peut-être appel au consultant une fois par an, voire moins.
propres impôts, leur assurance et leurs allocations de Certaines compagnies utilisent des consultants pour
santé et de retraite. Pour cela, ils peuvent être payés à un résoudre des problèmes spécifiques et, dans ce cas,ceux-ci
niveau plus élevé que les employés salariés. ne seront employés que tant que le problème persiste. Une
Les consultants sont normalement employés sous fois celui-ci réglé,le consultant n’est plus nécessaire.D’autres
70 contrat pour la spécificité de leur expertise ou de leur compagnies encore utilisent les consultants comme

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

conseillers seniors pour suivre régulièrement les progrès ou non de votre prestation. Ce n’est pas très satisfaisant,
réalisés et les conseiller sur la meilleure façon de continuer ni professionnellement, ni à titre personnel.
les travaux.Ces compagnies veulent une régularité dans les Pour un consultant, la plus grande satisfaction
visites et les conseils du consultant et ceci peut permettre dans son travail résulte d’une implication continue avec
de développer une relation sur le long terme. un client, nécessitant des visites régulières. Dans ce cas,
Il y a plusieurs aspects essentiels dans le travail du vous pouvoir mesurer l’impact que vous avez, et voir clai-
consultant.Vous devez avoir acquis la connaissance et l’ex- rement si le client est satisfait ou non de votre travail.
périence spécifiques que les clients sont d’accord pour Vous avez aussi l’occasion de développer des relations
rémunérer,ce qui signifie habituellement que vous avez tra- avec le personnel de votre client et de faire partie d’une
vaillé sur le terrain pendant de nombreuses années avant équipe ; cela est très gratifiant.
de devenir consultant. Vous devez avoir de très bonnes
aptitudes à communiquer incluant tous les aspects de la En résumé, et cela s’applique
communication :rédaction d’excellents rapports,formation
de grands groupes de personnes et communication de à tous les géologues
personne à personne avec les personnels non techniciens. Travailler dans l’exploration peut être extrême-
Vous devez développer confiance envers vous et crédibili- ment gratifiant pour les personnes impliquées, mais cela
té, ainsi qu’un bon réseau de contacts personnels car votre requiert un engagement et des sacrifices. J’ai pris la
emploi relève principalement des personnes que vous décision en 1969 de devenir géologue et cela a eu comme
connaissez ou qui entendent parler de vous par des contacts résultat d’avoir une vie passionnante de défis, alors que,
personnels. Toutes ces exigences se développent au fil de par comparaison, la vie de beaucoup de gens peut paraître
vos années d’expérience ; si vous percevez leur importan- terne. Une nécessité fondamentale pour faire carrière
ce quand vous êtes jeune, alors vous pouvez les entretenir dans l’exploration est une vision positive et optimiste et
et elles vous aideront ultérieurement dans votre vie. une soif de succès. Mais cette soif ne doit pas être exces-
sive : il est nécessaire de prendre du plaisir à ce que vous
Le bon et le mauvais dans l’activité faites même en cas d’insuccès, sinon vous ne pourriez
supporter votre implication sur de longues périodes à
d’un consultant ? chercher sans trouver.
Un des meilleurs et des pires aspects de la vie du Une des grandes satisfactions de ma vie a été de
consultant est l’ampleur des déplacements nécessaires. n’avoir jamais, même pour un instant, regretté ma décision
Cela signifie que vous êtes amené à voir des lieux très de devenir un géologue et un explorateur. Les opportuni-
différents et une géologie très variée. Mais, de nombreux tés pour les jeunes qui démarrent dans l’exploration
voyages signifient aussi une vie très instable. Ce qui est un aujourd’hui sont tout aussi grandes, peut-être même plus,
plaisir quand vous le faites occasionnellement devient que lorsque j’ai débuté. Ceux qui saisissent ces opportu-
une routine pénible lorsque vous le faites trop souvent. nités verront peut-être encore davantage d’endroits mer-
Beaucoup de déplacements répétés dans des endroits veilleux et feront plus de choses fascinantes que je ne l’ai
exotiques signifie que vous ne pouvez pas avoir d’enga- fait. Je les envie.
gements réguliers chez vous et que seules vos relations
les plus stables survivront. Il s’avère très difficile de faire
du sport d’équipe ou d’avoir des activités culturelles
régulières comme jouer dans un orchestre ou chanter
dans un chœur. Vous avez besoin d’un partenaire qui
entretient vos relations sociales, ou sinon vous
résigner à en perdre beaucoup.
Résoudre des problèmes est très gratifiant quand
votre action est couronnée de succès, mais très frustrant
dans le cas contraire. Souvent, quand vous êtes sollicité
pour traiter une question spécifique et unique (one-time
issue), votre client considère que votre implication s’achè-
ve quand vous soumettez votre rapport. Il est possible
Photo 1. Exploration au Beloutchistan, Pakistan occidental. Le pays est
qu’on ne vous dise jamais si ce que vous avez proposé a essentiellement désertique avec des collines rocheuses volcaniques
résolu le problème, ni même si votre client était content (cliché Noël White). 71

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Photo 2. La région des Pilbaras en Australie de l’Ouest est curieusement


dénommée « Pôle Nord ». Les roches ont 3,5 milliards d’années et sont
cependant magnifiquement conservées, et elles renferment les plus vieux
fossiles au monde (cliché Noël White).

Photo 5. Mineurs d’or locaux utilisant le vent pour séparer l’or du stérile
(cliché Noël White).

Photo 3. Prospection électromagnétique au sol au Beloutchistan pour


l’exploration de porphyres cuprifères (cliché Noël White).

Photo 6. Examen des cartes géologiques d’un projet d’exploration pour or


en Iran (cliché Noël White).

Photo 7. Ce groupe se tient autour du sondage de découverte d’un nouveau


gisement majeur d’argent – plomb - zinc à Cannington, Queensland,
Australie. Cette mine est aujourd’hui le plus important producteur d’ar-
72 Photo 4. Mineur local extrayant de l’or au Burkina Faso (cliché Noël White). gent du monde (cliché Noël White).

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Photo 8. Noël White se fraie son chemin à travers une végétation dense Photo 9. La direction de la société et des sondeurs chinois sur un projet en
en Chine du sud (cliché Noël White). Chine du sud (cliché Noël White).

Quelques conseils
Ces différents points ne sont pas repris dans un ordre bien précis, juste dans l’ordre dans lequel
ils me sont venus à l’esprit. Je pense qu’ils valent la peine d’être pris en considération par les
nouveaux-venus de l’Exploration. Prenez les simplement comme des conseils amicaux.

Compétition et succès Performance


Tout le monde dans l’Exploration est chargé de Nous sommes tous jugés d’après nos perfor-
la même responsabilité : contribuer au maximum de mances dans le travail, mais c’est rarement notre vraie
ses possibilités à la découverte de nouveaux gisements. motivation.En fait,notre performance est profondément
Ainsi,nous sommes en compétition avec les autres com- déterminée par nos motivations internes : notre volon-
pagnies ; nous ne sommes pas en compétition avec les té de gagner, notre intérêt dans ce que nous faisons,
autres membres du Département Exploration. Au foot- notre propre échelle de valeur. Il est parfois fort confor-
ball, vous n’avez pas besoin de marquer les buts pour table d’ajuster ses standards sur ce que les autres font :
faire partie de l’équipe gagnante. De même dans l’Ex- “Je travaille aussi bien que mes collègues,donc ça suffit”.
ploration,chacun a sa part dans le succès collectif.Il faut Bien sûr, à moins que nos collègues ne réalisent eux-
donc faire le mieux possible son travail,mais également mêmes des performances excellentes, cela peut ne pas
contribuer autant que l’on peut au succès des autres. suffire.Il est important de maintenir ses propres standards
Souvenez-vous que nous sommes tous du même côté. internes et de les réaliser, et non pas de les abaisser au
niveau plus facile de quelqu’un d’autre.Ne vous conten-
Influences positives et négatives tez que de votre meilleure performance possible, non
pas de la médiocrité du niveau de quelqu’un d’autre.
L’Exploration est soutenue par les caractéristiques
positives de son personnel :énergie,enthousiasme,pos-
sibilité d’innovation.Les gens qui possèdent ces qualités
Possibilités de promotion
sont perçus comme constructifs, ceux qui les freinent Souvent, les jeunes géologues perçoivent le
comme destructeurs. Ces derniers, par leur influence grand nombre de géologues plus agés et plus expéri-
négative systématique, nuisent à la réalisation de nos mentés (et donc plus avancés) dans le Département
objectifs. Tout le monde connaît des phases négatives d’exploration comme une limite à leur propre possi-
de temps en temps, mais c’est quelque chose que nous bilité de promotion. Ceci est tout simplement faux.
ne pouvons pas tolérer longtemps. Nous pouvons promouvoir et récompenser n’importe
73

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

quel nombre d’employés ; il n’existe aucune limite au plus de défis,et de plus grandes responsabilités,ont plus
nombre d’employés qui peuvent être rétribués à un de chances d’être promus que les gens qui se contentent
quelconque niveau. Si vous le méritez, vous pouvez d’être là où ils sont. Les possibilités de promotion sont
être promu,quelles que soient les situations respectives rarement limitées. Il est d’autant plus improbable que
des autres géologues plus avancés. Il y a de nombreux cela persiste si vous effectuez un très bon travail et que
exemples de jeunes géologues vraiment bons qui ont vous vous montrez motivé et prêt à assumer de nou-
dépassé des gens plus âgés au-dessus d’eux. Si vous veaux défis.Si vous avez l’impression d’être tenu à l’écart
êtes performant, vous serez récompensé. Si vous vous des possibilités de promotion,parlez à votre manager et
sentez frustré parce que vous considérez que vos efforts expliquez lui ce que vous voulez.
ne sont pas récompensés, n’hésitez pas à en parler à
votre superviseur ou à son supérieur. Peut-être avez- Les promotions généralement suivent et
vous besoin d’un écho honnête pour améliorer vos non pas précèdent les performances
performances dans certains domaines.
On considère souvent que la promotion amène
Agissez à un rôle plus important, mais les gens sont souvent
promus en reconnaissance du rôle qu’ils ont déjà rem-
L’exploration n’est pas de la science, c’est de la pli.Vous êtes plus susceptible d’être chargé d’un travail
science appliquée et de la technologie. Nous nous déve- si vous agissez comme si vous pouviez et deviez déjà
loppons grâce aux bonnes idées, mais en définitive ce vous en occuper.Vous devez être motivé par les défis de
sont les actions qui comptent.Les gens “qui font que les votre tâche, non pas par le statut hiérarchique. Relevez
choses arrivent” sont précieux. Les meilleurs prospec- les défis, et laissez le statut évoluer de lui-même.
teurs sont de bons penseurs avec de bonnes idées,mais
qui agissent en fonction de ces idées. Les gens “actifs”
obtiennent plus de résultats et créent un environnement
La crédibilité est essentielle
actif qui stimule les autres. Ils sont donc doublement On entend souvent des gens se plaindre de ce
bénéfiques au Département d’exploration et ont par que les budgets sont accordés à des individus plutôt
conséquent plus de chance d’être reconnus comme tels. qu’à des projets. Ceci est particulièrement le cas des
gens qui croient qu’ils ont un projet plus valable qu’un
Ne cachez pas votre talent autre mais qui n’a pas obtenu le budget escompté. Si
vous étiez manager, à qui donneriez-vous de l’argent ?
Ayez une bonne appréciation de vos propres
Naturellement à la personne que vous pensez sus-
capacités. La modestie est une qualité,mais l’honnêteté
ceptible de rapporter des résultats. Ce n’est pas toujours
aussi : si vous devez choisir, optez pour l’honnêteté. La
cette même personne qui a le meilleur projet d’un
direction tend à respecter les gens qui disent “Je sais
point de vue technique. Pour obtenir l’appui que vous
faire cela, je peux le faire...”Soyez prêt à faire un pas en
pensez mériter, il est important de présenter votre
avant et dire que vous avez certaines ambitions,certains
projet le mieux possible et aussi de vous montrer com-
désirs de carrière. La direction recherche des gens avec
me quelqu’un qui peut mener un projet à bien. Donc,
des talents et des motivations, alors à vous de ne pas
si vous ne recevez pas l’appui que vous espériez, ne
vous faire oublier...
blâmez pas votre manager, blâmez vous et réagissez.
Le projet est-il vraiment bon ? Peut-être devriez-vous
Conditions de promotion
le laisser de côté et vous concentrer sur quelque cho-
Pour être promu, il faut en général réunir trois se de mieux ? S’il est vraiment bon, pourquoi la direc-
conditions : compétence, ambition, et possibilité. Les tion ne l’a-t-elle pas perçu comme tel ? Peut-être devez-
gens de faible compétence ont peu de chance d’être pro- vous améliorer votre présentation ? S’il est vraiment
mus et, à coup sûr, de continuer à être promus : tout bon et bien présenté, peut-être la direction n’a sim-
directeur veut des subordonnés compétents,c’est pour- plement pas foi en vous, alors que faire ? Un premier
quoi il recherche constamment de nouveaux talents. pas est sans doute d’en parler à votre manager, et
Les gens qui montrent de l’ambition et de la motivation d’écouter ce qu’il vous dit, surtout si vous n’aimez pas
pour s’occuper de travaux de plus grande ampleur,avec ce que vous entendez.
74

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Cultivez vos dons de présentation nir manager général.S’ils avaient une vision claire d’eux-
mêmes, ils découvriraient qu’il y a incohérence entre
Nous sommes jugés sur la présentation de nos
leurs ambitions et leurs compétences et intérêts, ou
résultats et de nos idées. Une bonne présentation peut
alors que leurs ambitions sont simplement irréalistes.
rendre un travail médiocre attirant, une mauvaise pré-
Ayez des ambitions réalistes, et puis organisez-vous
sentation peut ruiner l’image d’un bon travail.Quoi que
pour les réaliser. Si vous avez besoin d’autres compé-
vous présentiez,vous devez le faire le mieux possible.Les
tences essentielles, arrangez-vous pour les obtenir.
présentations peuvent être plus ou moins formelles,
En même-temps, si vos ambitions sont irréalistes ou
écrites ou orales. Quelle que soit la forme de commu-
incohérentes avec vos compétences, réajustez-les de
nication, vous êtes toujours jugés sur votre capacité de
façon à éviter la frustration qu’engendrent des buts
la mener à bien,et ceci a un impact majeur sur votre cré-
impossibles.Si vous doutez de la cohérence et du réalisme
dibilité. L’éducation moderne tend à minimiser l’aspect
de vos objectifs, discutez en avec votre manager ; vous
technique de la rédaction et le Français correct ; elle
aider à atteindre le potentiel ultime de votre carrière est
appuie surtout le côté “exprimez-vous”. Si vos premiers
une grande partie de son travail.
mots conduisent votre audience ou lecteur à penser
que vous êtes un ignorant,peu importe votre expression
car votre message est perdu. Par conséquent, ne négli- Soyez polyvalent
gez aucune occasion de parfaire vos talents de com- Nous appartenons par la force des choses à
munication, ils seront cruciaux tout au long de votre une industrie cyclique. A intervalles réguliers s’opè-
carrière. On ne le répétera jamais assez. rent des compressions de budget et par conséquent de
personnel. BHP a été pratiquement (mais pas com-
Connaissez-vous plètement) épargné par ce phénomène.Vous avez une
Quels sont vos talents et vos compétences ? Que sécurité d’emploi tant que vous êtes vu comme un
faites-vous le mieux ? Que préférez-vous faire ? Que ne collaborateur important. Mais réaliser un bon travail
faites-vous pas bien ? Que n’aimez-vous pas faire ? Vous n’est pas toujours suffisant. Certains se spécialisent
devez avoir réponse à ces questions. Quelles sont vos à un tel point que, bien qu’ils effectuent un bon travail,
ambitions ? Sont-elles en accord avec vos compétences leurs compétences ne sont requises qu’épisodique-
et vos goûts ? On découvre souvent une incohérence à ment. Ils sont en danger. Le meilleur moyen d’obtenir
ce niveau. Par exemple, des employés mal organisés et une certaine sécurité est d’être connu comme quel-
peu enclins à prendre les choses en main nous disent qu’un qui réalise un excellent travail, quoi qu’il fasse ou
qu’ils souhaitent devenir managers. Ou d’autres, qui quoi qu’on lui demande de faire. Pour cela, il faut avoir
sont dans des positions junior malgré un âge relative- des compétences multiples dans divers domaines.
ment avancé proclament qu’ils ambitionnent de deve- Soyez donc polyvalent.

75

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

18 années de recherche minière au Gabon


Gérard Delorme.

Le Service des prospections cative du territoire gabonais, se sont déroulées soit avec
les moyens propres de l’entreprise, soit en association
extérieures à la COMILOG avec d’autres partenaires pour des projets au Gabon et
Depuis 1962, la Compagnie Minière de l’Ogooué même en Guyane française ; dans le cas de ce pays, c’est
(COMILOG) exploite au Gabon l’un des plus importants le BRGM qui a été l’opérateur sur le terrain (Photo 1).
gisements mondiaux de manganèse. Quelques années Durant les premières années, le service de prospection de
après son démarrage, elle décida de réinvestir une partie COMILOG bénéficia de l’assistance technique de géo-
de ses bénéfices dans l’exploration minière. Son intention logues américains du groupe US Steel1, bien au fait des der-
n’était pas de trouver de nouvelles réserves de manganèse, nières connaissances dans les environnements géolo-
celles des gisements de Moanda étant jugées suffisantes à giques comparables à ceux du Gabon (Brésil, Canada,
l’époque, mais plutôt de s’ouvrir à d’autres substances Australie,etc.). Cela permit à l’équipe de prospection de pro-
minérales (Fig. 1). gresser rapidement dans l’interprétation des phénomènes
Pour répondre à cet objectif, un service dit des et d’avoir rapidement une vision relativement claire des
« Prospections extérieures » fut créé en 1968. Il poursui- structures géologiques, surtout dans les terrains d’âge
vit ses activités jusqu’en 1986, soit pendant 18 années archéen. Celles-ci sont cependant bien complexes à démê-
consécutives pendant lesquelles j’en ai été le responsable. ler, surtout dans le contexte ingrat des observations en
Les moyens mis à disposition furent importants et les zone équatoriale où les affleurements sont peu nombreux
effectifs ont varié, selon les époques entre 40 et 80 per- et la pénétration très difficile.
sonnes dont une dizaine de géologues et prospecteurs Dès 1970, je pus malgré tout mettre en évidence
auxquels il faut ajouter tout le personnel habituel pour la l’existence de structures de type « greenstone belt » au
recherche en milieu équatorial (agents administratifs, sud-est de Moanda ce qui apporta un éclairage nouveau
laborantins, dessinateurs, chauffeurs, mécaniciens, sur la compréhension des terrains anciens du Gabon et sur
manœuvres). leurs perspectives minières. Dans un premier temps, l’ac-
Les recherches, qui ont couvert une partie signifi- cueil de cette vision des choses par les autres organismes
de recherches travaillant au Gabon fut pourtant pour le
moins sceptique, si ce n’est ironique… Mais, au fil des
ans, il fallut se rendre à l’évidence. Les temps sont loin,
maintenant, où le Massif du Chaillu était considéré com-
me un immense batholite de granite où ne subsistaient

Photo 1. Réunion du syndicat de recherches BRGM-COMILOG sur l’indice


de talc de Doussala le 14 octobre 1979. De gauche à droite : MM. Aguillau-
me (BRGM), Diouly-Osso (Direction des Mines du Gabon),Sylvoz (Directeur
général de COMILOG), Delorme (COMILOG), Papon (BRGM), Hottin (BRGM),
76 Figure 1. Carte géographique du Gabon. Ralay (BRGM), Bertucat (BRGM) (cliché Gérard Delorme).

1. L’un des actionnaires de COMILOG à l’époque.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

que quelques « enclaves » métamorphiques ; on a uniquement accessibles à pied, en pirogue ou en hélico-


réalisé depuis que l’histoire géologique de ces régions ptère. D’autre part, compte tenu d’une pluviométrie et
était bien différente et autrement plus complexe. d’une température moyenne élevées, les roches se décom-
Même s’ils rédigèrent de très nombreux rapports posent en surface et un manteau d’altération épais
internes dont le service des mines gabonais fut amplia- masque complètement et souvent profondément le
taire, les géologues de COMILOG n’ont jamais publié, du sous-sol, handicapant ainsi lourdement la compréhen-
fait de leur appartenance à un organisme privé soucieux sion géologique.Tout cela ne facilite évidemment pas les
de la confidentialité de ses informations. Ils n’avaient pas choses et l’on ne s’étonnera guère que, chez certains gros
l’obsession, tant s’en faut, de revendiquer la paternité de opérateurs de recherche minière comme le BRGM, les
leurs découvertes. Cela a peut-être été leur seul défaut volontaires ne se bousculaient pas pour partir en mission
car ce n’est pas sans un certain sentiment de frustration au Gabon3. Cela n’a pas empêché plusieurs générations
que j’ai pu constater, par la suite, que d’autres ont parfois de géologues français ou d’autres pays d’user leurs
cru re-découvrir ce qui avait déjà été mis en évidence Pataugas dans les marigots du pays et d’y faire un travail
avant eux et s’en attribuer le mérite. Une satisfaction appréciable avant que les jeunes géologues gabonais,
morale a été malgré tout de constater qu’à la fin des nouvellement formés, commencent à prendre le relais à
années 90 des géologues canadiens, grands spécialistes partir de la fin des années 70.
chez eux en matière d’Archéen, établirent un parallèle Avant l’indépendance, ce sont les géologues des
entre leur célèbre modèle canadien de l’Abitibi belt et les structures successives dépendant de l’administration
structures gabonaises de la région de Magnima où j’avais coloniale (Bureau des Mines,Service des Mines,Direction des
échafaudé mes premières hypothèses sur l’existence des Mines et de la Géologie de l’A.E.F.) basées à Brazzaville qui
greenstones-belts gabonaises… ont effectué,à une maille très large,les premiers itinéraires
Cet article est donc pour moi l’opportunité de de reconnaissance permettant les premières esquisses géo-
réhabiliter a posteriori le travail de toute mon équipe en éta- logiques et la découverte d’indices de substances minières.
blissant une sorte de bilan de l’action menée et de notre On retiendra, entre autres,les noms de Babet, de Chochine
apport à la connaissance géologique du Gabon. C’est donc et de Choubert parmi les précurseurs qui ont progressive-
avec une pensée forte pour tous mes anciens équipiers,gabo- ment levé les cartes géologiques à 1/500.000 ainsi que de
nais et français, qui ont partagé les peines mais aussi les Raymond Furon qui fut un des premiers à signaler les indices
bons moments de la vie de brousse,que je rédige ces lignes. de pétrole et qui, par la suite, fut un de mes professeurs
Je pense particulièrement,pour que le temps qui passe n’ef- de géologie. Je n’oublierai pas, non plus les géologues et
face pas leur souvenir,à ceux qui,géologues et prospecteurs, prospecteurs des sociétés privées qui, à partir de la fin
ont disparu parfois prématurément :Jacques Boutin,Jacques des années 30, s’activèrent pour la recherche de l’or et du
Landais,Jacques Leclerc,Théophile Nzikoué.Un mot particulier diamant ni ceux du BUMIFOM qui étudièrent, de façon
pour Georges Azzibrouck, brillant géologue gabonais qui a plus approfondie, les indices déjà signalés.
fait ses « classes » dans mon service, devenu par la suite
doyen de la Faculté de Masuku au Gabon et qui,récemment, L’or au Gabon
nous a quitté de façon brutale.Nous formions tous une gran-
L’histoire de l’or au Gabon mérite que l’on s’y attar-
de famille et, au-delà de sa contribution à la science, il faut
de un peu : par on ne sait trop quel mystère (lacunes de
garder à l’esprit que la géologie est avant tout une aventu-
l’expérience française à l’époque sur la connaissance des
re humaine. C’est pour cela que ce texte sera également
terrains précambriens, absence de tradition locale sur l’or,
pour moi l’occasion de brosser quelques aspects de la vie du
idées préconçues, administration pesante ?), l’existence
géologue de terrain en forêt équatoriale.
de l’or n’a été prouvée que tardivement dans l’ancienne
Afrique Équatoriale Française. C’est pourtant un métal
Panorama sommaire de l’histoire facile à mettre en évidence. Il a fallu l’acharnement de
minière du Gabon quelques pionniers (Romano au Congo, Rainal au Gabon)
Lorsque l’on se penche sur l’histoire minière2 du pour que l’administration de l’époque en admette enfin la
Gabon, pays auquel colle, à tort ou a raison, la réputation réalité, vers la fin des années 30.
d’être favorisé au niveau des richesses du sous-sol, il faut Des entreprises de tailles diverses se sont alors
d’abord souligner que les conditions de pénétration et mises à prospecter de façon effrénée et à exploiter l’or
d’observation y sont extrêmement difficiles : le réseau alluvionnaire dans les régions du Gabon les plus accessibles
routier est clairsemé, délimitant des zones immenses à l’époque. Avec 440 kg, le Gabon devenait dès 1938 le 77

2. Je précise que j’exclus de cette note tous les problèmes, bien particuliers, relatifs aux hydrocarbures et que je ne connais absolument pas. Je ne
traiterai pas, non plus, ceux bien spécifiques concernant les substances de l’énergie atomique (uranium) qui étaient un petit peu la « chasse gardée » du
CEA. Cet organisme, avec sa filiale COGEMA, a longtemps mené des recherches très dynamiques se soldant par des découvertes notables mais toujours
cantonnées dans la région de Mounana.
3. Cela m’a été confirmé par maints géologues du BRGM.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

premier producteur de métal jaune de l’AEF (qui, elle- Les autres substances minérales
même, était le principal fournisseur d’or de la métropole).
Pour en revenir aux autres substances minérales,les
La production gabonaise atteignit son apogée vers 1942
débuts de l’indépendance du pays virent la mise en exploi-
avec 1 414 kg. Puis elle décrut lentement mais régulière-
tation par des sociétés, créées pour la circonstance, des
ment du fait, d’une part,de l’épuisement progressif des pla-
gisements découverts auparavant : la Compagnie des
cers mais aussi en raison de l’érosion monétaire qui, peu
Mines d’Uranium de Franceville (COMUF) pour l’uranium
à peu, a rendu l’or peu intéressant avec un cours immua-
de Mounana et la Compagnie Minière de l’Ogooué
blement bloqué à 35 $ l’once.
(COMILOG) pour le manganèse de Moanda. La COMUF, le
Ce dernier facteur, à mon avis le plus important, a CEA et la COGEMA continuèrent les prospections pour
bloqué toutes velléités de recherches à moyen et long l’uranium jusqu’au moment où l’épuisement des réserves
terme pour trouver les enracinements des gisements et et la récession du marché de ce métal conduisirent à l’ar-
pouvoir exploiter l’or primaire qui n’avait pratiquement rêt de leurs activités dans le courant des années 905. La
pas été abordé auparavant du fait du manque de moyens COMILOG, quant à elle, se cantonna dans l’étude de ses
occasionné par la guerre. Cette « mini ruée vers l’or » de gros gisements de Moanda mais ne chercha pas à étendre
l’époque coloniale n’aura donc duré qu’à peine une les recherches manganèse ailleurs au Gabon.Ses immenses
vingtaine d’années. De ce fait, à l’indépendance du pays, réserves lui suffisaient. Par contre, comme nous l’avons
l’or n’a plus vraiment intéressé que les orpailleurs locaux dit, elle s’investit dans la recherche minière générale avec
(Photo 2), courageux mais inorganisés. Leur découverte du son service de prospections extérieures,entre 1968 et 1986.
beau gisement de Ndangui en 1962 a permis à la produc-
Au niveau national, le ministère des mines se dota
tion annuelle nationale de remonter provisoirement
d’un service géologique qui, malgré de timides incursions
au-dessus de la tonne. Mais il est notoire que le gisement
sur le terrain, n’avait pas vocation à prospecter systémati-
de surface a été exploité en dépit du bon sens et que la
quement le pays mais plutôt à avoir un œil sur les travaux
partie la plus importante de la production est partie de
des différents opérateurs miniers. Si l’on excepte le domai-
façon clandestine. De plus, on n’a jamais vraiment compris
ne bien particulier de l’uranium, le principal d’entre eux a
quelles étaient les structures ou faciès géologiques qui
été, de loin, le BRGM qui avait établi une bonne partie de
étaient à l’origine du gisement. La libération soudaine des
son fonds de commerce sur l’Afrique francophone où il avait
cours de l’or dans les années 70 n’a pas provoqué du fait,
en charge, de façon quasi-systématique, le lever de la car-
entre autres, du monopole de la SOGAREM4, un regain
te géologique et la plupart des projets de prospection des
d’intérêt immédiat pour le métal jaune.Il a fallu attendre les
pays africains francophones devenus indépendants. Cette
années 80 pour que des recherches soient initiées mais avec
situation de force découlant de la taille et des capacités de
une certaine frilosité.À l’heure actuelle,en dépit des efforts
cette entreprise mais aussi de la position prédominante
d’une « junior company » canadienne, l’or ne semble pas
de l’État français dans la coopération avec ces pays, lui a
intéresser grand monde au Gabon ; c’est bien dommage,
assuré une rente régulière durant de longues années.
car mon expérience me permet d’affirmer que le potentiel
existe et que de belles découvertes restent à faire. Mais, malgré l’intensification des recherches géo-
logiques et minières à partir des années 70, il est curieux
de constater que l’essentiel des découvertes ayant abou-
ti à la mise en exploitation de gros gisements date de
l’époque coloniale. Avait-on déjà tout découvert à ce
moment-là ? Évidemment, non. L’État gabonais avait pour-
tant dégagé des moyens importants pour stimuler cette
recherche. À l’instar de la France, qui avait lancé l’inven-
taire de ses ressources en métropole et dans ses terri-
toires d’outre-mer, le Gabon a démarré, dans les années 80,
un vaste programme d’inventaire minier dont le BRGM a
été le principal opérateur sur le terrain. D’importants tra-
vaux de prospection sur le terrain ont accompagné le sur-
vol presque total du pays par une magnétométrie et une
scintillométrie aéroportées doublées d’une couverture en
radar latéral. Ces méthodes, classiques pour le dégrossis-
Photo 2. Orpailleur concentrant son or à Ndangui en 1975 (cliché Gérard
78 Delorme). sage des structures géologiques dans le cadre de la recon-

4. Société d’état ayant l’exclusivité, dans ces années là, de l’achat de l’or aux producteurs.
5. Cet arrêt de l’activité de la COMUF ne signifie pas qu’il n’y a plus d’uranium au Gabon. C’est le marché qui, à l’époque, n’était plus demandeur et
n’incitait pas à faire de nouvelles recherches pour cet élément.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

naissance, étaient bien adaptées à un pays difficile d’ac- À l’exception de quelques régions de savanes, la
cès comme le Gabon. Au niveau de la connaissance géo- plus grande partie de ce pays, vaste comme la moitié de
logique du pays, ce travail a permis de faire avancer consi- la France, est couverte par la grande forêt pluviale. C’est
dérablement les choses. Il permettra également, dans le domaine d’arbres gigantesques qui filent droit vers le
l’avenir, de mieux orienter les recherches et de faciliter ciel à la recherche de la lumière jusqu’à une hauteur de
les corrélations de terrain. Sur le plan minier, le bilan à parfois soixante mètres. Là, ils développent leur ramure
court terme est moins enthousiasmant : en dehors de avec un feuillage compact qui ne laisse passer qu’une très
quelques indices dont nous n’avons pas eu la connais- faible lumière vers le sol. Dans le cas de forêts primaires
sance complète, la principale découverte minière fut non dégradées, les « sous-bois » sont relativement clairs
celle de l’important gisement de phosphates et de terres et l’on y marche facilement. Mais, bien souvent, ils sont
rares de Mabounié qui, malheureusement, n’a toujours encombrés d’une végétation secondaire difficilement
pas été mis en exploitation, pour des raisons financières pénétrable. Il y règne une chaleur moite et un clair-obscur
semble-t-il. Au bout du compte, ce gros travail n’aura pas qui se transforme vite en obscurité totale en fin d’après-
encore concrétisé les espoirs fondés en lui. midi, le soleil se couchant inexorablement, tous les jours
Pour terminer ce rapide panorama, je ferai remar- vers 18 heures. Quand on évolue en son sein, cette forêt est
quer que, en excluant le domaine du pétrole, peu de impressionnante, étouffante : la vue y est limitée à un
sociétés non-françaises se sont manifestées autrefois, du très faible périmètre et le paysage y est, à de rares
moins directement, dans la recherche minière au Gabon. exceptions près, toujours le même d’un bout à l’autre du
En dehors de US Steel qui était, au démarrage, l’actionnaire pays (Photo 3). Elle l’est encore beaucoup plus, vue d’avion
majoritaire de COMILOG, je ne citerai que Union Carbide quand le regard arrive à prendre la mesure de son immen-
qui a concentré son activité, sans grand succès semble- sité. Je garderai toujours à l’esprit mon premier survol
t-il, sur la recherche de l’uranium, et Diamond Distributors. du Gabon en 1968, lorsque parti en DC3 de Libreville
pour rejoindre Moanda à l’autre bout du pays, je voyais se
Dès l’époque coloniale, ce groupe s’était déjà
dérouler interminablement le même tapis de verdure
intéressé à la recherche du diamant et de l’or au Gabon par
compacte. De temps à autre, les méandres d’une rivière
le biais de ses filiales telles que la Compagnie Minière de
transparaissaient au travers de la végétation et j’ai cru
l’Oubangui Oriental (CMOO), la SOREDIA et le Groupe-
apercevoir une fois ou deux,en l’espace de trois heures, une
ment gabonais. L’activité de prospection avait été
vague piste… Le décor était planté et je réalisais avec
considérable à cette époque. Plus tard dans les années
quelque inquiétude que j’allais bientôt y évoluer, perdu
80, Diamond Distributors était encore derrière COGEMAT6
dans cette immensité. L’expérience des années suivantes
dans le cadre d’un vaste permis de recherches axé essen-
me permet maintenant d’affirmer qu’on s’y fait très
tiellement sur le diamant et l’or. Mais là, peu de résultats
bien et que ce n’est guère plus difficile que la forêt de
concrets ont finalement été révélés et ce permis, à la
Fontainebleau… J’avoue qu’il m’est quand même arrivé
surface démesurée, a surtout eu l’inconvénient de gêner
de regretter de ne pas prospecter dans le désert !
la concurrence et, notamment, COMILOG. Ayant bien
connu certains des intervenants, je reste convaincu que les
Difficultés de pénétration dans la forêt dense
compétences techniques et les moyens mis à disposition
n’étaient pas à la hauteur des ambitions avancées… Depuis L’une des principales difficultés est la pénétration
ces dix dernières années, le Gabon semble s’être ouvert à
de nouveaux partenaires étrangers qui pourraient, il
faudrait l’espérer, injecter un peu de sang nouveau dans
une recherche minière qui semble piétiner.

Être géologue en forêt équatoriale


Ceux qui ne connaissent pas l’environnement des
régions équatoriales pourront peut-être s’interroger sur
la relative minceur du bilan dont nous faisons état dans
cet article, aussi bien pour les travaux de COMILOG que
pour tous ceux des organismes qui se sont investis dans
la recherche minière au Gabon. C’est pourquoi je vais Photo 3. La tente du géologue en forêt. Région sud de Koulamoutou en 1971
essayer d’en décrire les conditions de travail. (cliché Gérard Delorme). 79

6. Société gabonaise exploitant essentiellement des carrières d’agrégats.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

de cet univers végétal dense.Le réseau routier du Gabon est, de kilomètres. Car on comprendra aisément que les
comme on peut facilement l’imaginer, des plus réduits : porteurs engagés pour une certaine durée de temps doi-
quelques pistes latéritées,exceptionnellement bitumées en vent aussi manger et avoir un minimum d’équipement. Il
de très rares endroits, quadrillent le territoire en délimi- faut donc d’autres porteurs pour transporter les rations des
tant des blocs de forêt quasiment inhabités d’une largeur premiers porteurs, et cætera… On n’en finit plus et, pour
dépassant fréquemment cent ou deux cents kilomètres. peu que ce personnel y mette de la mauvaise volonté,
Il faut donc, la plupart du temps, marcher à pied que des disputes apparaissent, c’est la galère. Nous avions,
pour atteindre les objectifs qu’on s’est fixés. Dans l’inté- pendant un certain temps, recruté des femmes pour ce
rieur du pays, les rivières au cours étroit, entrecoupées travail auquel elles sont, traditionnellement, habituées.
de rapides et encombrées d’arbres morts, sont rarement Courageuses, acceptant des charges bien plus lourdes sans
navigables en pirogue, du moins sur de longues distances. broncher et faisant la joie de la gent masculine des équipes
Dans la région côtière, elles le sont plus facilement mais de prospection pour les longues soirées équatoriales, nous
le relief très plat y engendre de vastes marécages qui avions ainsi résolu une bonne partie de ces problèmes…
rendent toutes observations géologiques de surface
difficiles sinon impossibles. Le recours à l’hélicoptère
Si la marche à pied est réputée pour être un excel- Mais, bien souvent, pour les objectifs les plus
lent exercice physique, en région forestière elle génère éloignés, il est bien difficile de se passer de l’hélicoptère.
rapidement de lourdes contraintes quand il s’agit de mettre C’est un instrument fantastique mais coûteux, grevé de
en place une mission de prospection avec son personnel certaines contraintes et pouvant se révéler dangereux
et son équipement à des distances notables des axes rou- dans les conditions d’utilisation qui étaient les nôtres.
tiers : il faut en effet porter le matériel et le ravitaille- Pour notre part, nous avons utilisé essentiellement des
ment. C’est l’obstacle auquel se sont heurtés, à la fin du « Alouette II » dont la capacité de charge était assez
XIXe, tous les explorateurs qui voulaient pénétrer ces modeste. Il fallait utiliser la place disponible au mieux.
contrées où la population est peu nombreuse et où les Cet hélicoptère possédant, en plus de celui du pilote, 4
animaux de bât ne peuvent survivre à cause de la mouche sièges très étroits, on arrivait à y entasser 4 passagers
tsé-tsé. Pour porter, il faut donc des hommes (Photo 4). Il avec sur les genoux, sous les jambes ou dans les bras une
faut d’abord les trouver. Il faut ensuite qu’ils veuillent bien foule de colis hétéroclites allant des cartons de boîtes de
porter.Il faut reconnaître que c’est une tâche pénible et que, sardines, aux régimes de bananes, aux jerrycans de pétro-
selon leur coutume, les hommes gabonais ne trouvaient le ou d’huile de palme, etc. Le matériel encombrant était
pas digne de leur condition. C’est pourquoi elle était (et est suspendu au moyen d’élingue sous l’appareil (Photo 5).
toujours) réservée aux femmes.Quand on a réussi,avec bien Tout était pesé soigneusement au départ pour ne pas
du mal, à réunir une équipe de porteurs, il faut s’entendre dépasser la charge limite admise en fonction du plein de
sur la distance, sur le poids des charges ; c’est évidemment kérosène. Le prix élevé des heures de vol nous obligeait de
matière à des palabres interminables. Là où tout se tenir un planning très précis pour gérer les rotations de
complique, c’est quand la distance dépasse une trentaine mise en place des équipes et de leur ravitaillement.

Photo 5. Héliportage de matériel de sondage au nord de Bélinga en 1980


80 Photo 4. Portage en forêt en 1970 (cliché Gérard Delorme). (cliché Gérard Delorme).

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

D’autre part, poser un hélicoptère au sein de la trouver brusquement nez à nez avec un cabri, animal qui,
forêt n’est pas une opération immédiate :il faut lui préparer au Gabon, a toujours la fâcheuse habitude de traverser les
un héliport (Photos 6 et 7), nom pompeux pour désigner pistes n’importe quand. De plus, celle-ci était bosselée et
une surface vaguement plane, nettoyée de toute végé- l’avion faisait des bonds énormes à l’atterrissage avant
tation et offrant un couloir au travers des arbres dans de pouvoir s’immobiliser.
lequel l’appareil peut faire son approche et son décollage Et cet autre terrain dans le nord du Gabon : la pis-
à pleine charge. Ce travail implique donc une équipe te était théoriquement assez longue pour notre Cessna
spécialisée qui a pour mission d’atteindre à pied et à l’avan- 402 (avion de 10 places, pas très adapté à la brousse…) et
ce les emplacements choisis et de les aménager. Une fois parfaitement horizontale. Le seul inconvénient était qu’el-
cette tâche terminée, en général au bout d’une semaine, le était couverte de grosses touffes d’herbe espacées de
l’équipe est ravitaillée et effectue un nouveau bond pour telle façon que l’avion en prenant son élan se mettait en
préparer l’héliport suivant. En général, la nécessité d’être résonance, vibrait énormément et n’arrivait pas à prendre
ravitaillé encourageait l’ardeur au travail… sa vitesse de décollage. Une fois, avec un pilote pourtant
Je dois reconnaître que mes équipes ont toujours fait, confirmé mais qui ne connaissait pas la piste, cela a failli
dans des conditions difficiles, un travail remarquable en tourner au drame : à mi-piste, paniqué en voyant que le
se positionnant de façon parfaite malgré des documents badin ne montait pas, il coupa brutalement les gaz pour
cartographiques des plus sommaires ; et, à cette époque, tout arrêter. Puis, se ravisant immédiatement, il les
nous n’avions pas de GPS ! Pour des reconnaissances ou remit ! Le fait d’avoir coupé pendant quelques secondes
certaines liaisons,nous avons aussi utilisé fréquemment de n’avait pas arrangé la vitesse de l’avion, on s’en doute… À
petits avions monomoteurs. Lorsque nos missions étaient l’extrémité de la piste, des collègues assistaient tran-
très éloignées de notre base arrière de Moanda et lorsque quillement au décollage. Découvrant le Cessna qui, plaqué
nous pouvions disposer de pistes d’atterrissage suffisantes au sol, fonçait sur eux, je les ai vus (assis en place droite
à proximité de nos zones d’investigation, nous avons du pilote j’étais, pour ma part, tétanisé) se jeter au sol.
beaucoup utilisé des bimoteurs appartenant à COMILOG Bien leur en a pris car l’avion n’a pu lever les roues qu’aux
pour le transport de personnel, de vivres et de courrier. derniers centimètres de la piste. Ouf !
Toutes ces opérations aériennes, réalisées dans un Une autre fois, nous allions rejoindre une équipe du
environnement difficile, soumises à des aléas de météo BRGM travaillant du côté de Mandji dans le sud-ouest du
imprévisibles, ne se sont pas toujours déroulées sans de pays. Le responsable de la mission nous avait confirmé
grosses frayeurs, on s’en doute. La qualité des pistes de que nous pouvions poser notre 402 sur une piste toute
brousses était déjà un facteur aggravant. Je me souviens proche récemment ouverte par des forestiers. Nous avions
toujours de cette piste établie sommairement sur un bien fait préciser à l’avance si elle faisait au moins 1 000
dôme et courbée aussi bien horizontalement que verti- mètres, longueur minimum requise par cet avion pour
calement. Le pilote lorsqu’il s’élançait pour décoller ou décoller ; apparemment, pas de problèmes. Notre avion
lorsqu’il rasait le sol pour atterrir, ne découvrait la piste devait me déposer sur cette piste et continuer ensuite
qu’au fur et à mesure. Le danger, entre autres, était de se sur Libreville avec un collègue et un père de la mission de

Photo 6. Héliport perdu dans l’immensité de la forêt dans la région de


Minkébé en 1980. Se détachant à l’horizon de cette pénéplaine, on
aperçoit les inselbergs riches en formations ferrugineuses de Kokoméguel Photo 7. Arrivée d’un hélicoptère sur un héliport au nord de Bélinga en 1980
(cliché Gérard Delorme). (cliché Gérard Delorme). 81

Géologues n°152
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Moanda qui faisait de « l’avion-stop » ; cela se faisait compagnie, nous nous rendîmes sur place pour voir s’il y
souvent sur les avions privés. Arrivés sur la zone, nous avait une quelconque possibilité de se poser. Mais rien
survolâmes le terrain en comptant le nombre de balises n’était prêt :la Drop Zone (DZ) était là sous nos yeux,minus-
pour avoir une indication de sa longueur. « OK » nous cule au fond d’un véritable puits de verdure de plus de 40
confirma le pilote et nous nous posâmes. Les roues ayant mètres. Le pilote tenta malgré tout de descendre lente-
touché le sol, heureusement en tout début de piste, le ment à la verticale. C’était extrêmement dangereux car
pilote freina violemment et, inquiet, s’exclama en trouvant l’hélico n’avait que tout juste la place de se faufiler entre les
que c’était « vachement court ». branches mais,surtout,il était chargé et avait beaucoup de
Et, de fait, l’avion s’immobilisa au dernier mètre difficultés à maintenir le vol stationnaire. Là encore les
de la piste. Une fois descendus, nous vérifiâmes l’inter- visages étaient crispés. Tout doucement, l’appareil s’en-
valle entre les balises : 12 mètres au lieu des 50 mètres fonça vers le sol. Il vibrait terriblement et l’on sentait bien
traditionnels ! C’est-à-dire que la piste devait faire dans les qu’il pouvait décrocher à tout moment.Nous nous trouvions
400 mètres… Grosse sueur, surtout pour le pilote qui maintenant à environ trente mètres du sol et une autoro-
extrapolait les conséquences de l’erreur. Il ne serait tation n’aurait été d’aucun effet pour amortir une éven-
certainement pas très fier d’expliquer qu’il était obligé tuelle chute. Le pilote était tendu car on sentait qu’il avait
de laisser l’avion en pleine brousse. Sinon, devait-il essayer du mal à tenir sa machine et qu’il était très attentif à ne pas
de décoller à tout prix avec un fort risque de se crasher ? toucher les arbres. Il regardait devant lui, sur les côtés et il
La situation n’était pas très évidente. Nous tirions tous avait les yeux également fixés dans ses rétroviseurs. Com-
une tronche pas possible, surtout ceux, évidemment, qui me ce n’était pas suffisant, il me demanda de le guider
devaient continuer le voyage… Finalement, le pilote prit le pour que le rotor de queue se faufile entre les branches.
parti de faire une tentative de décollage. Personne ne Ce n’était vraiment pas évident ! Et puis,à un moment don-
disait rien mais chacun savait qu’elle serait unique et que né, considérant que cela devenait de plus en plus risqué, il
les chances de lever l’avion avant le bout de piste étaient décida d’abandonner. Avec d’infinies précautions, nous
bien minces. Nous sortîmes des machettes de l’avion et, remontâmes. Nous revînmes piteusement sur Moanda en
à une extrémité du terrain, nous commençâmes à cou- nous demandant ce qu’il allait advenir du malade. En fait,
per les hautes herbes de savane pour gagner quelques nous apprendrons que le diagnostic était erroné et que
mètres ; c’était dérisoire… Les visages étaient sombres et celui qui nous avait fait prendre tant de risques ne souffrait
le curé, dans son coin, devait faire la prière des morts. Il en réalité que de coliques…
devait surtout s’en vouloir énormément d’avoir insisté Si nous en avons été quittes pour quelques frayeurs
pour prendre cet avion ! Pour ma part, j’étais moins de ce genre lors de nos opérations héliportées, malheu-
concerné car je restais sur place mais j’étais quand même reusement tout ne s’est pas toujours terminé de façon
terriblement anxieux pour mes amis. Ma responsabilité aussi heureuse pour d’autres organismes… Sur une mission
était également engagée dans la mesure où j’avais proposé du CEA, un hélicoptère mal posé entra en résonance, bas-
ce terrain. Terriblement stressé (je n’ose imaginer l’état cula sous l’effet de violentes secousses et le rotor entra en
d’esprit de ceux qui étaient dans l’avion…), j’observais le contact avec le sol. Un fragment de pale fut projeté et
décollage, persuadé que l’avion accrocherait les arbres provoqua la mort d’un géologue qui assistait de loin à la
en bout de piste. Dieu merci, le pilote connaissait son manœuvre. Un autre accident m’a profondément mar-
affaire : freins serrés, il lança ses moteurs à fond, lâcha qué car il a mis en cause des personnes que je connaissais
tout en laissant l’avion prendre le maximum de vitesse au bien. Au début du mois de novembre 1976, un jeune
sol en le soulageant légèrement puis tira sur le manche aux géologue appartenant à un organisme en charge de
tout derniers mètres du terrain. Tout se passa bien… Je l’étude géotechnique du chemin de fer Transgabonais
pourrais multiplier à l’infini ce genre d’anecdotes qui prit contact avec moi. Je le reçus longuement dans mon
constituaient notre quotidien. bureau car, sachant que nous étions bien rôdés dans
En hélicoptère également, nous avons vécu des l’organisation des missions héliportées, il souhaitait que
moments parfois difficiles. La fois, notamment, où une je lui fasse part de notre expérience. À la fin de notre
équipe héliport m’annonça par radio qu’un gars souffrait entretien, je me souviens, comme si c’était hier, d’avoir
brusquement d’une hernie étranglée. Malheureusement, conclu en lui disant : « Vous savez, je ne vous souhaite pas
l’héliport en pleine forêt était loin d’être achevé et le cou- malheur, l’hélico est un instrument magnifique mais
loir de descente n’était pas ouvert ; seule la plateforme était si l’on ne fait pas très attention, il peut se révéler très
dégagée. Devant l’urgence du cas, je décidai de faire une dangereux ! ». Quelques jours plus tard, le 18 novembre,
82 tentative. Embarquant avec le pilote et le médecin de la l’hélicoptère qu’il avait affrété se crashait en pleine

Géologues n°152
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brousse et mon ami périssait carbonisé ainsi que les trois hélicoptère avec le même état d’esprit que le Poilu de la
autres personnes présentes à bord… On n’a jamais bien su Guerre de 14-18 sortant de ses tranchées sous le feu des
ce qui s’était passé. Le pilote était pourtant très expéri- mitrailleuses… Il montre toutefois qu’il fallait être
menté et bien connu dans le monde aéronautique du vigilant et que les risques n’étaient pas exclus. En fait, les
Gabon. Des témoins auraient vu l’appareil tomber comme soucis les plus fréquents étaient constitués par les petites
une masse avec déjà le feu à bord ; on a également parlé pistes de brousse en mauvais état que les pluies conti-
d’un blocage du rotor mais le mystère reste entier. nuelles rendaient glissantes comme du verglas et où l’on
se « plantait » fréquemment (Photo 8). À la fin des années
Les pistes routières soixante-dix sur la route de la forêt des abeilles, on a par-
lé de bourbiers où des voitures avaient été entièrement
Dieu merci, nos liaisons aériennes, tant en avion
englouties au point que les autres véhicules passaient
qu’en hélicoptère n’avaient pas toutes des conséquences
ensuite sur leur toit !7
aussi tragiques. Les plus grands risques étaient pris sur les
pistes routières où, plus que leur mauvais état, l’inconsé-
quence de certains conducteurs, aggravée par une imbi-
La marche à pied
bition d’alcool fréquente, était génératrice de nombreux C’est évidemment la marche à pied qui, dans le
accidents. Cela a toujours été ma hantise. Le danger était cadre de la prospection sur le terrain, présentait le moins
aggravé par le fait que la plupart des pistes de forêt étaient de risques. La forêt équatoriale n’est pas bourrée, tant
étroites et que la circulation y était très faible. Quand s’en faut de serpents et de bêtes féroces, du moins de
vous ne rencontrez qu’une voiture par heure et que vous grande taille. Les grands mammifères sont même plutôt
êtes pressé, votre attention s’affaiblit et, sur les parcours rares en raison, notamment, du faible potentiel nutritif
sinueux mais malgré tout roulants, les croisements de de la forêt. Certes, les serpents existent ; certains, telle la
véhicules peuvent se révéler douloureux. C’est ainsi que vipère du Gabon, sont même très venimeux mais leur
sur une route déserte, à des dizaines de kilomètres de abondance ne m’a jamais paru supérieure à ce que j’ai pu
toute agglomération, je me suis trouvé nez à nez avec observer en France. En 18 années de prospection, je n’ai eu
une niveleuse sortant de je ne sais où et qui arrivait sur moi à déplorer que deux cas de morsures parmi toutes mes
à toute allure. Cette fois là, cela s’est heureusement bien équipes circulant en brousse, aucun n’ayant occasionné de
terminé mais, une autre fois, un de mes meilleurs chauf- graves séquelles.
feurs a perdu la vie dans un choc frontal avec un camion Tout le monde sait que ce sont les petites bêtes
dont le chauffeur était ivre. Une autre fois, un camion qui sont les plus gênantes : fourmis, guêpes, fourous,
chargé du personnel qui venait de passer les fêtes et qui mouches tsé-tsé ou mouches filaires, etc. Parmi les four-
retournait sur le camp de prospection a fait plusieurs ton- mis, les magnans étaient les plus redoutées par leurs
neaux. Bilan : 6 morts et 14 blessés ! Ce tableau brossant attaques nocturnes des campements. Vous dormez bien
les difficultés des liaisons en brousse peut paraître assez tranquillement sous votre tente quand, soudain, vous êtes
sombre mais il faut garder à l’esprit qu’il est le condensé réveillés par une sensation de morsure. Un coup de lam-
de nombreuses années sur le terrain. Il est évident que pe torche et vous découvrez avec horreur le tapis mouvant
nous ne montions pas dans une Land-Rover ou un de ces fourmis carnassières en train de monter à l’assaut
de votre lit. Fuite éperdue au dehors où le faisceau
de votre lampe révèle le même désolant spectacle
d’invasion. Par centaines de milliers,les magnans grouillent
à la recherche de nourriture. Vous sautillez sur place et
arrachez de façon désordonnée ceux qui ont déjà planté
leurs mandibules hypertrophiées dans votre chair. Si vous
posséder suffisamment de bombes insecticides ou de
pétrole pour répandre sur le sol, vous arriverez peut-être
à les décourager et à reprendre, au bout d’une heure, votre
nuit interrompue. Dans le cas contraire, vous n’avez que
la possibilité de fuir et de retrouver votre campement
qu’au petit matin, une fois la meute partie et rassasiée.
Les fourous sont également très redoutés. Minus-
Photo 8. Camion 4x4 enlisé lors du passage d’une rivière à gué (cliché
Gérard Delorme). cules insectes volants,à peine visibles comme des particules 83

7. Authentique.

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de poussières dans le contre-jour d’un rayon de soleil, il


vous procurent des démangeaisons interminables sur
toutes les parties exposées du corps, surtout le matin et au
coucher du soleil. On ne les trouve pas partout, heureuse-
ment, mais dans certains secteurs ils sont virulents toute
la journée et la vie au campement devient intenable.
La liste de ces joyeusetés est loin d’être limitative
et tous ceux qui ont prospecté au Gabon peuvent en
témoigner : essaims de guêpes que l’on heurte par
mégarde, petites abeilles noires qui ne piquent pas mais
qui s’insinuent partout : dans la bouche, les yeux, les
oreilles en vous rendant fou. Une fois, nous avons été
obligés d’abandonner le travail sur un secteur, tant ces
petites bestioles nous rendaient dingues.
Les abeilles,très nombreuses en forêt et d’habitude
plutôt débonnaires, peuvent parfois devenir agressives :
nous avons un jour été appelés pour porter secours à un
prospecteur d’une autre société qui avait été assailli par
des abeilles en furie. Ses coéquipiers l’avaient perdu de
vue alors qu’il fuyait en courant, attaqué par des cen-
taines d’abeilles. Son équipe n’avait rien pu faire pour le
secourir car ces insectes avaient dressé une véritable bar-
rière infranchissable.Tous ceux qui essayaient de pénétrer
dans la zone interdite étaient cruellement agressés à leur
tour. Il y avait véritablement une limite comme tracée au
couteau qu’on ne pouvait dépasser. Débarquant en héli-
coptère deux ou trois heures plus tard avec un médecin, Photo 9. Construction d’un pont sur la rivière Lébombi en 1969 (cliché
Gérard Delorme).
il nous fût impossible de tenter quoi que ce soit d’autant
que nous ne voyions même pas où était la victime. La nuit en entrepreneur de travaux publics. Si, lors de nos dépla-
tombait et nous croyions cette personne perdue. cements, nous utilisions les structures existantes (pistes
Et puis,nous eûmes la stupéfaction de la voir arriver routières ou d’aviation ouvertes par l’État gabonais ou
par ses propres moyens,marchant comme un zombi,mécon- par des exploitations forestières), il nous fallait ouvrir nos
naissable : ses bras et son visage étaient blonds d’un tapis propres accès lors de travaux de recherches assez lourds
compact de dards ! Médecin et infirmiers de l’hôpital de (sondages, par exemple). Dans ce cas, le géologue s’im-
Moanda passèrent une bonne partie de la nuit à lui retirer provise ingénieur des Ponts et Chaussées en mettant en
les aiguillons venimeux, au bas mot un millier selon leurs oeuvre une bonne dose de système débrouille. C’est ain-
dires. Un mois plus tard, je rencontrais ce prospecteur à si que mes équipes ont ouvert au moyen de bulls, ou tout
Libreville, de retour d’Europe où il avait été évacué pour simplement de pelles et de machettes, des dizaines de
subir des examens. Il était en excellente santé m’avoua-t-il kilomètres de pistes, plusieurs ponts (Photo 9) et pistes
mais des dards ressortaient encore de la peau à certains d’aviation. En brousse, le géologue doit savoir tout faire…
endroits… Comme on le voit,le panel des plaisirs de la brous- Pour terminer, je signalerai le principal inconvé-
se est assez varié mais on ne les subit pas toutes en même nient de la profession dans ces régions : comme nous
temps et en continu.Tout est question d’adaptation ! l’avons dit plus haut, en zone équatoriale les terrains sont
Pour compléter ce tableau de l’univers dans lequel altérés sur une grande épaisseur et l’on n’arrive à obser-
est plongé le géologue « équatorial », il faut insister sur sa ver des affleurements de roches à peu près saines que
capacité à devoir faire face à toutes les situations. Pas- dans le cours des marigots8. Il faut donc avoir les pieds
sant déjà une grande partie de son temps à régler toutes dans l’eau toute la journée (Photo 10). Compte tenu de la
les petites tracasseries inévitables au sein de ses équipes, chaleur ambiante, ce n’est pas forcément désagréable ;
à y faire la police, à jouer à l’infirmier pour soigner les mais ce n’est pas toujours très sain, non plus : des cham-
84 bobos des uns et des autres, il doit parfois se transformer pignons finissent par vous pousser entre les orteils ! Mais,

8. Contrairement à d’autres régions d’Afrique où le terme « marigot » désigne une étendue d’eau stagnante, au Gabon il a exactement le même sens que
« ruisseau ».

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plus que toutes ces difficultés en face desquelles on peut


toujours s’aguerrir,ce qui est peut-être le plus démoralisant
dans ce type de prospection, c’est le fait de n’avoir bien
souvent que très peu de points d’observation,tant les affleu-
rements peuvent être rares dans certains secteurs. Quand
on connaît la complexité structurale du Précambrien infé-
rieur,on comprend aisément la difficulté de l’interprétation
des maigres observations effectuées. Le géologue se sent
alors bien souvent frustré dans l’exercice de son métier par
l’impuissance à pouvoir mettre en application son savoir-
faire. Il a donc fallu composer avec toutes ces difficultés et
cela ne nous a pas empêché de faire un travail important
dont nous dégageons ci-dessous les grandes lignes. Photo 11 : Chantier de sondage au nord de Bélinga en 1980 (cliché Gérard
Delorme).

Les recherches de COMILOG Tout en pratiquant les méthodes classiques de la


prospection de reconnaissance (géochimie, minéralogie
En dehors de l’étude détaillée des gisements de
alluvionnaire, géophysique élémentaire, sondages)
Moanda (travail réalisé par une autre équipe de l’entre-
(Photo 11), les équipes de COMILOG ont, en permanence,
prise), ces recherches n’ont absolument pas concerné le
fait du lever de carte géologique, très souvent au stade
manganèse. COMILOG s’est tournée vers les substances
exploratoire dans des régions parfois totalement incon-
dont la recherche était matériellement à sa portée et qui
nues. Elles l’étaient à un tel point que COMILOG a fait
ne faisaient pas l’objet de monopoles. Comme nous l’avons
œuvre de pionnier en la matière en faisant réaliser, en
mentionné plus haut, c’est la raison pour laquelle les
1971, la couverture aéroportée en magnétométrie et en
hydrocarbures, les substances de l’énergie atomique ont
radiométrie de son premier permis de recherche (sur un
été exclues, de même que les substances précieuses (or et
degré carré et demie) par la SAPA-Hunting.Tout cela pour
diamant) l’ont été durant de longues années. Le service de
rappeler que les recherches minières engagées par
prospection a donc porté ses efforts sur le « reste » ce qui
COMILOG ont été un travail très « amont » qui ne pouvait
faisait, malgré tout, pas mal de choses et qui comprenait,
raisonnablement porter ses fruits qu’à long terme.
entre autres, la plupart des métaux dont ceux appelés
« métaux de base », à savoir le cuivre, le plomb et le zinc. Commencées dans les environs de Moanda, les
recherches se sont assez vite étendues à la bonne moitié
Il faut préciser qu’à l’époque où ces recherches ont
est du pays en recherchant plus particulièrement les zones
démarré (fin 1968), la connaissance géologique du pays
d’anciens chantiers aurifères. Nous ne nous intéressions
était très rudimentaire. La carte de synthèse à 1/1 000 000
pourtant pas à l’or à ce moment là pour une bonne raison
n’était pas encore parue et l’on n’avait à notre disposition
qu’il ne valait pas grand chose et qu’il était considéré
que quelques cartes de reconnaissance à 1/500 000, utiles
comme un monopole de l’État gabonais. Mais ces placers
mais bien imprécises et incomplètes ; elles étaient parfois
paraissaient le plus souvent associés à des roches
complètement erronées.
volcaniques basiques ainsi qu’à des roches ferrugineuses,
et ce contexte géologique nous semblait plus alléchant
que le monotone craton granito-gneissique qui couvre
une grande partie du pays.

La compréhension géologique du socle


À cette époque,nos prédécesseurs n’avaient qu’une
vision assez floue de cet environnement géologique que
l’on tentait péniblement d’expliquer à la lumière des
concepts établis jadis dans le Massif central français ! Dans
ce que l’on cataloguait comme Précambrien inférieur, on
décrivait notamment de gigantesques batholites de gra-
nites, parfois orientés, ayant laissé subsister par endroits
Photo 10. Le géologue dans les marigots. Ici Antoine Beaujour (BRGM) en
1968 dans la région de Makokou (cliché Gérard Delorme). quelques lambeaux de roches métamorphiques épargnées 85

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par la granitisation. Dès 1970, j’ai pu montrer que l’on avait géologiques totalement distinctes aux caractéristiques
en fait affaire à un contexte tout à fait comparable à celui bien différentes : l’Archéen d’une part, et le Protérozoïque
que l’on trouve dans les autres boucliers précambriens du inférieur de l’autre, ce dernier ensemble pouvant ou non
monde (Canada, Amérique du sud, Australie, Afrique du être métamorphisé.
sud, etc.) avec de vastes zones métamorphisées et Les résultats de nos recherches vont plus loin : la
granitisées dans lesquelles s’organisaient des structures de corrélation de nombreuses observations de terrain nous a
type « greenstone belt » de taille parfois importante. Le permis d’avancer que les importantes formations ferri-
cortège de minéralisations habituellement liées à ce fères (itabirites) du Nord-Gabon (Bélinga, Minkébé, etc.),
type de structure laissait espérer des perspectives de font partie du Protérozoïque inférieur et non de l’Archéen.
découvertes minières plus alléchantes. En fait, avant le recalage du Francevillien dans le Protéro-
Dans les temps qui suivirent, les travaux réalisés par zoïque inférieur,on pensait logiquement que les formations
d’autres opérateurs miniers (CEA,COMUF,université de Stras- ferrifères de Bélinga faisaient partie du socle indifférencié
bourg,BRGM) permettaient d’affiner la connaissance du Fran- du Précambrien inférieur du fait de leur métamorphisme
cevillien, série sédimentaire non métamorphisée, réputée et de leur étroite imbrication dans cet ensemble. Quand on
d’âge Précambrien moyen et transgressive sur ce socle cata- a eu la certitude qu’il existait à la fois des terrains méta-
logué de Précambrien inférieur. Des datations radiochrono- morphisés dans de l’Archéen et dans du Protérozoïque
logiques plus nombreuses et plus précises eurent pour consé- inférieur,personne ne s’est posé la question de s’assurer du
quence de « vieillir » le Francevillien et de le positionner de bien-fondé de leur attribution « stratigraphique ». Nous
façon définitive aux alentours de 2 milliards d’années.Le socle sommes arrivés à la conclusion que les séries à itabirites
sous-jacent se trouvait,en conséquence,vieilli également et du Nord-Gabon étaient d’âge francevillien et donc l’équi-
les datations ultérieures confirmèrent son appartenance à valent du Système de l’Ogooué car nous avons étudié ces
l’Archéen comme je l’avais supposé auparavant par l’obser- régions à très peu de temps d’intervalle et nous avons été
vation de ses structures et faciès bien particuliers. surpris de trouver dans la région de Bélinga des forma-
L’ancienneté de la cratonisation de ces terrains tions métamorphiques qui n’avaient strictement rien à
explique, au moins en partie, l’exceptionnelle « fraîcheur » voir avec celles de l’Archéen auxquelles nous nous atten-
des séries sédimentaires francevilliennes qui le recou- dions et que nous connaissions bien. Les faciès observés
vrent sur de vastes zones de l’est du Gabon : les grès, les dans l’environnement des montagnes de fer étaient très
pélites, les jaspes et autres dolomies ne présentent stric- similaires à ceux que nous avions cartographiés à l’ouest
tement aucune trace de métamorphisme. Cette fraîcheur des Portes de l’Okanda et reposaient sur des roches qui,
disparaît plus ou moins brutalement en se dirigeant vers elles, correspondaient bien à l’Archéen classique.
l’Ouest en relation avec la progression du phénomène
de cratonisation. Dans le centre du Gabon, les séries Les formations ferrifères
pélitiques francevilliennes voient d’abord l’apparition Au-delà de l’aspect purement académique de la
progressive de minéraux phylliteux. Puis, brutalement, à question, la mise en évidence de la contemporanéité des
partir des failles de la zone de l’Okanda, les séries d’âge formations ferrifères du Nord-Gabon avec le Francevillien
francevillien deviennent franchement métamorphisées devrait ouvrir de larges perspectives à la compréhension
dans un vaste ensemble que l’on baptisait « Système géologique du Gabon. En premier lieu, cela montre qu’il y
de l’Ogooué » et qu’auparavant on ne savait pas trop a eu, au Protérozoïque inférieur, un formidable phénomè-
comment classer. Bien que les faciès soient nettement ne minéralisateur à Fe-Mn, encore plus étendu qu’on ne le
différents, cet ensemble était considéré comme un soupçonnait, vraisemblablement lié à un volcanisme
équivalent du socle anté-francevillien. de grande ampleur et ayant donné, selon les bassins
Dès les années 70 pourtant des doutes furent émis sédimentaires, des accumulations tantôt à prédominance
par certains géologues du BRGM mais aussi (et surtout) par manganèse, tantôt à prédominance fer. Cette différencia-
les travaux du CEA. Les levés géologiques que nous réali- tion trouve son explication dans le comportement
sâmes en 1980 et 1981 dans le Nord et dans le centre du chimique voisin de ces deux éléments qui, selon les para-
Gabon levèrent toute ambiguïté et nous permirent d’ob- mètres environnementaux des bassins de sédimentation,
server,de façon irréfutable,le passage latéral des formations ne précipitent jamais simultanément,le manganèse étant
du Francevillien sédimentaire à leur équivalent métamor- plus soluble que le fer. Certainement en fonction de ces
phisé de la zone mobile du Système de l’Ogooué.Il devenait conditions, on constate que la précipitation du fer s’est
clair à nos yeux que,parmi les terrains anciens couvrant une essentiellement cantonnée dans la partie nord du pays
86 grande partie du territoire gabonais, existait deux entités tandis que la précipitation du manganèse s’effectuait plu-

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

tôt dans sa partie orientale et centrale. En effet,les concen- ses activités. Le premier sujet sur lequel nous nous sommes
trations de manganèse au sein des formations francevil- penchés (l’ancien chantier d’orpaillage de Bakoudou), s’il
liennes n’existent pas seulement dans la région actuelle- n’a pas débouché, du moins pour l’instant, sur l’ouvertu-
ment exploitée de Moanda. Au cours de nos re d’une nouvelle mine, a cependant donné, et cela rapi-
prospections, nous en avions trouvé dans la région de dement, des résultats substantiels. La conjoncture de
Lastoursville ainsi que sous forme de gondites, en pleine l’époque a fait que nous avons abandonné ce sujet qui a été
zone métamorphisée du Système de l’Ogooué, à plus de repris, dans le courant des années 90, par une société cana-
250 kilomètres de Moanda. Ces dernières années, les dienne.Cette affaire de Bakoudou ne me laisse évidemment
découvertes d’indices importants se sont multipliées pas indifférent avec, à la fois la satisfaction de voir mon
aussi bien à l’est du Gabon (région d’Okondja) que vers « bébé » intéresser des chercheurs venus d’un autre continent,
l’ouest (région de Ndjolé) confirmant ainsi l’importance du mais, d’autre part, le goût amer d’avoir laissé passer l’occa-
phénomène minéralisateur. sion de conclure en beauté les 18 années d’existence du
Malgré cet apport non négligeable à la connais- service des Prospections Extérieures. Ce gîte aurifère a, en
sance géologique du Gabon, les travaux du service des effet,été découvert à une époque où une nouvelle direction
prospections extérieures de COMILOG avaient pour but locale prenait place à COMILOG et décidait de dissoudre le
essentiel de trouver de nouveaux indices minéraux. Sur ce service de prospection. Cela explique pourquoi, dès que les
plan, le bilan est plus mitigé car il faut bien reconnaître que droits miniers de COMILOG furent éteints, les Canadiens
les résultats n’ont pas été à la hauteur des espérances. d’une « junior company » (Searchgold) purent s’emparer du
Nous avions fondé beaucoup d’espoir dans la découverte sujet sans aucune difficulté, en bénéficiant gratuitement
de possibles minéralisations sulfurées liées aux greens- des acquis de longues années de travaux coûteux !
tones-belts que nous avions mises en évidence (Magnima,
Boumango, Ndangui, etc.). Malgré des travaux assez Bilan des recherches et perspectives
détaillés, nous avons dû abandonner ces hypothèses. Le bilan de ces dix-huit années de recherches peut
De même, nos travaux sur le Francevillien n’ont donc paraître plutôt maigre au niveau des découvertes
pas permis d’accrocher d’indices substantiels en cuivre minières. Même si c’est une piètre consolation, il faut sou-
dans le bassin de Franceville ou bien en plomb-zinc ligner qu’il n’a pas été plus substantiel pour la plupart
dans celui de Booué-Lastoursville, malgré la présence des projets lancés à cette époque par le BRGM, projets
constante d’anomalies géochimiques à certains niveaux dans lesquels nous étions souvent associés financière-
stratigraphiques. Elles accompagnent ce « phénomène ment. En fait, les travaux de COMILOG ont surtout contri-
minéralisateur » fer-manganèse dont je parlais plus haut bué à confirmer que les terrains du Précambrien ancien du
et se marquent également par la présence de l’or, surtout Gabon constituaient une vaste province métallogénique
dans le domaine métamorphisé. Cette manifestation à fer-manganèse-uranium-or. Si, à cette époque, les trois
minéralisatrice, qui n’a pas nettement révélé de gisement premiers de quatre éléments n’intéressaient pas cette
à ce jour (autres que le fer et le manganèse), ne devrait société ou ne constituaient pas une priorité, l’or, par contre,
pourtant pas être perdue de vue. présentait un intérêt de tout premier ordre.
Nous avons également cartographié d’importantes En partant de ses caractéristiques que nous venons
masses d’itabirites au sein de l’Archéen (région de Ndan- d’énoncer, quel potentiel minier renferme le Précambrien
gui, Boumango au sud de Franceville). Toutefois, les phé- ancien du Gabon (Archéen et Protérozoïque inférieur) ? Quels
nomènes d’altération superficielle n’ont apparemment espoirs de découvertes peut-il réserver dans l’avenir ? La ques-
pas conduit, sur les sites en question, à la concentration tion est vraiment d’actualité dans la mesure où le très fort
du fer et à l’élaboration de minerais à forte teneur. Comp- développement de la croissance économique de la Chine
te tenu de la conjoncture économique de l’époque, cela engendre une forte demande de ce pays en acier et bouleverse
n’en faisait pas des gisements de fer attractifs. notablement le marché des matières minérales liées à ce pro-
duit.Cette situation aura obligatoirement des répercussions
L’or importantes sur le développement minier du Gabon.
Par contre, nos recherches dans le domaine de l’or Pour le fer,les importants gisements de la région de
ont donné des résultats très encourageants. Il est cepen- Bélinga, au Nord-Gabon, sont connus depuis longtemps
dant regrettable que le service que j’ai dirigé n’ait pu, pour mais leur éloignement de la côte a longtemps constitué un
des raisons diverses, s’y intéresser qu’à partir de 1983, obstacle à leur mise en exploitation. Les besoins de la Chi-
c’est-à-dire relativement peu de temps avant qu’il ne cesse ne changent la donne et ce pays est en train de conclure 87

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

des accords pour leur développement. Du côté des réserves, types allant des granites aux carbonatites. Un gisement
il est probable que la plupart des grands gisements à for- lié à ce dernier type d’intrusion a déjà été découvert à
te teneur de la zone ont déjà été bien circonscrits. Ce sont Mabounié près de Lambaréné. Un autre est soupçonné
des gisements superficiels,de grande taille,aisément déce- depuis longtemps dans le secteur dit de Ngoutou,dans une
lables. La couverture aéromagnétique effectuée dans les région difficile d’accès.
années 80 sur l’ensemble du territoire gabonais a certai- Nous dirons aussi quelques mots du diamant car ce
nement permis de localiser toutes les cibles potentielles. minéral noble a été mis sous les feux de l’actualité ces der-
Ont-elles toutes fait l’objet de vérifications sur le terrain ? nières années par le démarrage de recherches dans le nord
Ce n’est pas sûr. Des minerais à basse teneur (de type ita- du Gabon par le groupe De Beers. Ce minéral est connu au
birites) sont connus dans divers points du Gabon et il est Gabon depuis longtemps. D’intenses recherches avaient été
probable que d’autres gisements pourraient être découverts menées à l’époque coloniale par la SOREDIA, notamment
Leur localisation et leur évaluation précise restent à faire. dans la région de Makongonio où des pierres de très bel-
Ils pourront constituer un appoint à prendre en compte le qualité avaient été trouvées. Le problème c’est que l’on
en raison de l’importance des investissements nécessaires rencontre du diamant un peu partout et que, jusqu’à une
pour la mise en production de Bélinga. époque récente avec les travaux ultérieurs du BRGM,on n’a
En ce qui concerne le manganèse, COMILOG, qui a jamais pu découvrir les gisements primaires,c’est-à-dire les
détenu durant de longues années un monopole de fait sur kimberlites. Il semblerait que, depuis sa mise en place ori-
cet élément, s’est un peu endormie sur ses lauriers et a, ginelle, le diamant ait subi une histoire compliquée faite
depuis la mise en exploitation de son gisement de Moanda, d’une succession d’épisodes d’érosion des roches porteuses,
abandonné toute politique de recherche pour augmenter de transport et de dépôt dans des placers repris par la sui-
ses réserves.À sa décharge,il faut reconnaître que les réserves te dans de nouveaux cycles sédimentaires. Cela complique
de ses gisements étaient gigantesques et que,jusqu’en 2003, donc considérablement l’enquête pour retrouver les intru-
l’offre était bien supérieure à la demande sur le marché mon- sions kimberlitiques d’origine qui peuvent être de dimen-
dial. Mais, là aussi, les nouveaux besoins de la Chine en sions très restreintes.Espérons que les moyens de recherche
matières premières ont, brutalement changé la donne et plus sophistiqués et l’expérience des nouveaux opérateurs
incité d’autres organismes à prospecter au Gabon.De récentes feront avancer les choses.
et belles découvertes, de nouvelles observations et une
Pour terminer, nous insisterons sur le fait que la
meilleure compréhension de la géologie à l’échelle régiona-
recherche minière est extrêmement difficile et onéreuse
le, semblent montrer que le potentiel en manganèse de ce
dans un pays comme le Gabon. La connaissance géolo-
pays d’Afrique centrale est très important et que d’autres
gique de l’ensemble du territoire est encore hétérogène
découvertes restent à faire.
et très imparfaite. De ce constat, on peut en déduire que
Pour l’uranium, le groupe CEA-COGEMA a déjà de belles découvertes restent à faire. Les conditions d’al-
fait un travail de prospection considérable mais il est tération sont telles, dans ce pays, que même les plus gros
vraisemblable qu’il reste des gisements à découvrir si la gisements peuvent passer inaperçus. Les exemples sont
conjoncture politico-économique redevient favorable. nombreux, à commencer par le gisement de manganèse
Mais c’est sur l’or que je voudrais surtout insister. de Moanda qui est véritablement monstrueux9 : si les
Comme je l’ai signalé plus haut, après la mini-ruée vers ce indices de minerai avaient bien été observés, il a fallu plu-
métal qui a marqué la fin de l’époque coloniale et la remon- sieurs années pour démontrer que l’on avait affaire à un
tée de ses cours dans les années 70,l’or n’a pratiquement plus gisement exploitable. Malgré sa taille, la mine d’uranium
jamais été au centre des préoccupations des organismes d’Oklo a failli passer inaperçue, à une maille de sondage
de recherches au Gabon. Pourtant l’exemple de Bakoudou déjà serrée. Les gigantesques gisements de talc du Sud-
montre que des gîtes primaires de plus ou moins grande Gabon qui s’étalent sur une bande de plusieurs centaines
taille existent pratiquement toujours dans l’environnement de kilomètres de long, sous un recouvrement terreux de
des gisements alluvionnaires.Sans vouloir préjuger de l’exis- quelques mètres seulement, n’ont été décelés que lorsque
tence de gisements très importants, il y aurait en tous cas l’on a refait le réseau routier avec des tranchées profondes.
matière à relancer l’exploitation artisanale ou industrielle, Tous les espoirs sont donc permis pour peu que l’on pren-
à échelle modeste,des parties superficielles et altérées des ne en compte soigneusement le travail déjà accompli et
structures minéralisées qui ont alimenté les placers. que l’on fasse preuve d’obstination. Le service des pros-
On peut aussi espérer trouver d’autres types de pections extérieures de COMILOG a, quant à lui, œuvré
minéralisations dans le Protérozoïque inférieur qui, à la dif- dans ce sens et apporté une contribution non négligeable
88 férence de l’Archéen, présente des corps intrusifs de divers à la connaissance du sous-sol gabonais.

9. Couche massive de bioxyde de manganèse presque pur, de 6 mètres de puissance sur une vingtaine de km2 de surface et sous seulement 6 mètres de
stérile.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Un exemple de parcours par étapes : témoignage de Dennis Lahondès


La Rédaction.

Premiers pas les ordres d’un chef géologue allemand, Stefen Schmidt.
L’objectif n’ayant pas été atteint, le contrat de Dennis n’a
Le parcours de Dennis Lahondès,qui reste toutefois pas été reconduit et Bou Grine a fermé en septembre 2005.
un cas particulier comme tout parcours personnel,témoigne À la suite du contrat tunisien, Breakwater Resources avait
notamment de la difficulté de trouver une insertion pro- proposé à Dennis un poste d’expatrié au Chili, pour un an
fessionnelle pérenne avec une formation de maîtrise à Bac (sans retour), proposition à laquelle Dennis n’avait pas
+ 4.Le premier contact avec le milieu professionnel s’est fait donné suite, considérant qu’il n’était pas suffisamment
par le canal d’un stage effectué pour l’obtention du diplô- formé pour prendre un poste de ce type et que la forma-
me université/entreprise proposé aux maîtrises scienti- tion « sur le tas » que lui proposait Breakwater Resources
fiques de l’université Joseph Fourier de Grenoble. Ce stage ne suffisait pas. Il était, en outre, peu désireux alors de
a été réalisé au sein de Morillon-Corvol (groupe CEMEX s’engager dans une expatriation d’aussi longue durée.
aujourd’hui), exploitant de granulats. L’absence de service
géologique au sein de cette société,comme d’ailleurs dans
beaucoup de sociétés analogues, puisque les géologues
La période d’incertitude
opèrent en général au sein d’un service foncier et environ- Il s’agissait maintenant de rebondir suite à l’aven-
nement,n’a pas incité Dennis à poursuivre dans cette voie. ture tunisienne et ce fût une période de galère. D’abord une
Néanmoins,son responsable de l’époque, Emmanuel Gau- candidature non retenue à AREVA. Apparemment, des
tier, l’a fortement incité à regarder du coté de l’industrie candidats, titulaires d’un diplôme à Bac + 5 se plaçaient
minière. Dennis s’est ensuite retrouvé à l’Agence nationa- mieux qu’un Bac + 4, malgré l’expérience acquise, et la
le pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) pour un demande portait alors plus sur des géologues seniors.
CDD de 18 mois, chargé, notamment, de la carothèque au Début 2005, Dennis décide de tenter une recherche
laboratoire de Bure. de travail en Guyane où il passe une douzaine de jours
sans succès. Il y retourne ultérieurement pendant un mois
L’aventure tunisienne (juin 2006) pour apporter son aide à un ami qui travaillait
sur une thèse. À l’époque, l’idée de poser sa candidature
C’est de là que date l’entrée de Dennis dans le
au Canada, marché très porteur, n’est pas à l’ordre du
métier de l’exploration minière. Après un contact avec
jour pour lui. Et progressivement s’est fait jour l’idée
l’UFG, plus spécifiquement avec Luc Jaillard, responsable
d’acquérir une année supplémentaire de formation et
du groupement Alsace, Dennis a pu être embauché par la
ainsi d’acquérir le niveau Bac + 5.
filiale tunisienne de Breakwater Resources, une société
canadienne qui exploitait le gisement de Bou Grine, Il postule alors au master « Exploration et gestion
racheté à Metalgesellschaft en 1998. des ressources minérales » (EGERM), master mis en place
en partenariat entre l’Université d’Orléans et l’Université
Breakwater s’est d’abord surtout développée par
du Québec à Montréal, et sa candidature est acceptée.
acquisitions de propriétés minières,puis s’est engagée dans
l’exploration minière. La société possède trois mines Ce cursus lui donne l’occasion de passer trois mois
productrices de zinc : Myra Falls en Colombie britannique, au Québec, une opportunité de rencontre avec le secteur
El Mochito au Honduras et El Toqui au Chili. En outre, elle minier,notamment lors d’Expo Québec 2005,et de renouer
développe la mine de Langlois dans l’ouest du Québec,dont avec Breakwater Resources pour son stage pratique qu’il
la production est prévue démarrer mi 2007. La production réalise en Tunisie dans la région de Tabarka, nouveau sec-
2006 de la société a dépassé 100 000 t de zinc, 8 000 t teur d’exploration de la société. La gestion du travail est
de cuivre, 9 000 t de plomb, 53 t d’argent et 16 t d’or. un peu compliquée du fait du partage de la responsabili-
té de l’exploration entre la tutelle canadienne et le sous-
À l’époque, le gisement de Bou Grine était en fin de
traitant local, également partenaire du projet.
vie et l’objectif était de trouver de nouvelles réserves afin
de poursuivre l’exploitation. Le contrat a duré de mai à
décembre 2004, période durant laquelle 2000 m de fora- Conclusion
ge sur 4 prospects ont été réalisés. Dennis se trouvait sous La formation du master est venue conforter les 89

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

connaissances pratiques acquises par Dennis au fil des nombreuses opportunités d’emploi. Il s’en est suivi une
années et lui donner une base de formation qu’il n’avait embauche à IOS Services géoscientifiques INC, une
pas acquise auparavant. En outre, le passage par le société canadienne de services à l’exploration. Cette
Canada lui a permis de découvrir une autre perspective de embauche a pris effet en janvier 2007.
travail avec un système d’embauche peu procédurier et de

La géologie appliquée à l’économie


Michel Champagne 1 .

Un géologue qui dirige un diversification de l’exploration minière.


SIDEX est un fonds d’investissement créé en 2001
fonds d’investissement : comment
à l’initiative d’un fonds de pension de travailleurs, le Fonds
en arrive-t-on à faire ce métier ? de Solidarité de la Fédération des travailleurs du Québec,
Après avoir obtenu un diplôme de Bachelier en et du gouvernement de la province de Québec. Le fonds
sciences – géologie – de l’Université de Montréal, j’ai pour- a été capitalisé à hauteur de 50 millions de dollars. La
suivi l’apprentissage de la profession de géologue avec la mission de SIDEX est de favoriser l’exploration de sub-
SOQUEM (Société québécoise d’exploration minière), au stances dont le Québec n’est pas déjà producteur, ainsi
niveau de l’exploration de substances diverses,or – métaux que l’exploration de nouveaux territoires. L’objectif ultime
de base – uranium, sur le territoire de la province. Ayant est la diversification de la production minière, l’ouvertu-
obtenu une bourse d’études de la SOQUEM pour complé- re de nouveaux territoires à l’exploration et la création
ter une maîtrise en géologie en 1982, je suis retourné à l’ex- de richesse collective.
ploration avec la SOQUEM et par la suite, à l’exploration Nous avons alors recruté un conseil d’administra-
souterraine dans une mine d’or en Abitibi,avec la LOUVEM. tion, établi une stratégie d’investissements, élaboré des
Ayant toujours été attiré par l’économie en géné- procédures pour réaliser des investissements, des procé-
ral, j’ai sauté sur l’opportunité d’intégrer ce domaine en dures de désinvestissement, de gestion des placements,
devenant le géologue résident de la Bourse de Montréal etc. et nous avons pu réaliser nos quatre premiers
en 1986. En plus de rendre des opinions géologiques, j’ai investissements après seulement trois mois d’existence.
alors eu la possibilité de me familiariser avec certaines À ce jour, plus de 115 financements de projets d’exploration
facettes de l’économie et du domaine financier. Au cours ont été effectués auprès de plus de 50 sociétés minières,
des 9 années passées à la Bourse, j’ai occupé, outre le pour des investissements totaux de près de 36 millions de
poste de chef géologue, celui d’analyste financier, dollars. SIDEX a établi sa stratégie autour de l’exploration
d’analyste senior et de chef de section.
Je suis retourné à l’exploration minière en 1996,pour
diriger une société d’exploration minière basée au Pérou,
filiale d’une société canadienne. J’ai alors intégré l’aspect
administratif à ma formation, en plus de travailler sur des
projets d’exploration extraordinaires et qui présentaient
des défis techniques que je croyais impossible à surmonter
quand je suis arrivé dans le pays. En 2000, Barrick Corpora-
tion a acheté notre société.Deux des projets originaux que
nous avons travaillés sont actuellement à l’étape de l’étude
de faisabilité, par des sociétés nationales et étrangères.
En 2001, j’avais acquis les éléments de formation
essentiels pour affronter le défi de construire et de faire
90 fonctionner SIDEX, la société d’investissements dans la

1. M.Sc., géo. Directeur général SIDEX.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

du diamant, du nickel et de l’uranium, des substances


pour lesquelles la province recèle un potentiel important
et, dans une moindre mesure, l’exploration des métaux
de base, les infrastructures de transformation étant
présentes dans la province.
Les projets sélectionnés sont de type « grassroots » et
doivent présenter un excellent potentiel de découverte, la
direction de la société doit être à la hauteur de la situa-
tion,un critère d’évaluation très important pour nous,et la
structure corporative doit être adéquate. Parmi les projets
financés par SIDEX, plusieurs sont maintenant au stade de
la faisabilité et nous pouvons anticiper éventuellement
que certains iront vers l’exploitation, notamment pour le
nickel, le cuivre, le diamant, l’uranium, la saumure, etc.
pendant,complémentaire et très compétent.En terminant,
SIDEX est dirigée par une petite équipe,un directeur
les anglais disent que « the proof of the pudding is in the
général, géologue, une analyste financière, géologue avec
eating », mentionnons que SIDEX a obtenu un rendement
une expérience diversifiée dans le domaine de l’exploration,
positif au cours de chacune des années de son existence.
et compte sur le support d’un conseil d’administration indé-

Un témoignage d’exploration minière au Portugal


Paulo José de Vitor Ferraz 1 .

Pour situer mon parcours


Pour un géologue sortant de l’université, le travail
de géologue d’exploration est avant tout un grand défi.
Pour ce qui me concerne, après avoir quitté l’université et
réalisé un stage dans une entreprise portugaise (EDM),
je suis d’abord resté dans cette entreprise, travaillant pour
des joint-ventures d’exploration pour or conduites par le
BRGM (Valongo près de Porto 1990-93 et Três Minas dans
le nord du Portugal 1994), la COGEMA (Jales-Gralheira,
1995-1997) et Connary Minerals – CM (Valongo, 1998-
2000) (Fig. 1).
En 2000, j’ai quitté EDM pour CM comme respon-
sable des opérations de terrain jusqu’à ce que CM décide
de quitter le Portugal. Depuis, je travaille comme consul-
tant pour Kernow Mining Portugal (KMP) dans des projets
d’exploration pour or dans le nord du Portugal, comme
Jales/Gralheira et Limarinho-Boticas. Je travaille aussi par-
tiellement pour Beralt Tin & Wolfram Portugal (BTWP)
comme géologue minier à la mine de Panasqueira et
aussi comme responsable technique sur des projets
d’exploration pour or, étain et lithium. Durant toutes
ces années, j’ai aussi abordé l’exploration du feldspath,
des roches ornementales et de la barytine. Figure 1. Localisation des lieux cités dans le texte. 91

1. Courriel. : p.ferraz@tvtel.pt

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Retour d’expérience sur le travail


d’exploration
Le travail d’exploration minière est très intéres-
sant pour ceux qui aiment la géologie. Toutefois, pour
progresser dans une carrière, il faut savoir et accepter que
l’on peut se retrouver dans des situations difficiles, au
détriment du confort familial.
Dans ce type d’activité, on est amené à assumer des
tâches très diverses que l’on n’apprend pas à l’université.
On doit aussi agir comme formateur et apprendre la géo-
logie à diverses personnes, en général à chaque fois que
l’on change de projet et qu’on doit faire comprendre au per-
sonnel local ce qu’ils doivent faire et pourquoi (Photos 1 à 3).
Parfois, le démarrage d’un projet ne s’apparente pas à un
travail géologique, mais il est très important que le géo-
logue le suive pour connaître le contexte et mettre en
place les conditions qui lui permettront ultérieurement de
réaliser son travail géologique.

Photo 3. Chantier d’exploration en souterrain (cliché Paulo Ferraz).

Comme les gîtes minéraux peuvent être localisés


un peu partout (ce ne sont pas eux qui choisissent),on doit
être préparé à travailler dans des conditions difficiles. La
sécurité est un autre aspect auquel il faut porter beaucoup
d’attention,que l’on travaille en mine (en activité ou ancien-
ne) ou en surface avec des risques liés à une méconnais-
sance de la faune et de la flore, la présence d’anciens puits
miniers,des dénivelées fortes,par exemple.Cette attention
portée à la sécurité concerne non seulement nous mêmes
Photo 1. Le matériel du géologue prospecteur (cliché Paulo Ferraz).
mais aussi les personnes qui nous aident sur le terrain.
L’exploration minière est coûteuse et habituelle-
ment faite par des entreprises privées. Depuis une
quinzaine d’années, le personnel employé à ces tâches a
tendance à diminuer et comme les projets sont lancés
ou s’arrêtent, il n’y a pas de continuité dans le travail
d’exploration. La connaissance acquise est ainsi perdue
et, dans bien des cas, ne sera jamais récupérée (Photo 4).

L’exploration à KMP et BTWP


KMP est une filiale de l’entreprise canadienne KRD
et, à la suite de la COGEMA et de RTZ, elle a entrepris
des travaux d’exploration sur Gralheira. Elle a aussi initié
un programme sur Boticas. BTWP exploite la mine de
92 Photo 2. Chantier d’exploration en surface (cliché Paulo Ferraz). tungstène de Panasqueira, de près de 100 ans d’âge,

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

emploie environ 300 personnes et produit un concentré de Comme les géologues issus des universités ont un
haut titre qui est exporté. La société conduit également des bon niveau théorique de connaissance des caractéris-
programmes d’exploration pour étain, lithium et or. tiques des gisements, je ne consacre pas de temps à leur
Les projets d’exploration peuvent varier beaucoup, donner des explications sur ce sujet. D’ailleurs, alors qu’il
non seulement selon la géologie et la substance est habituel de voir les géologues s’efforcer de ranger tous
recherchée, mais également en fonction des étapes de les gisements dans quelques catégories types définies à
développement. Ainsi les projets de KMP sont à des étapes partir de mines bien étudiées, il est important de ne jamais
d’avancement très différentes. Gralheira est proche du sta- oublier que malgré les similitudes entre gisements, il n’y
de de l’exploitation expérimentale destinée à fournir des en a pas deux pareils.
bases plus solides pour l’étude économique et qui permet- Nous devons garder l’esprit ouvert à toutes les
tra de réaliser des tests en conditions réelles.Le potentiel de données nouvelles qui nous parviennent jour après jour
Limarinho-Boticas est élevé mais l’exploration en est à et ne jamais oublier que nous devons établir un modèle
la phase de l’évaluation par sondage des volumes et des à partir de nos observations et non pas trouver le modè-
teneurs, avant de passer à la faisabilité économique. le existant que nous pouvons calquer sur nos données.
En dehors de son exploitation de tungstène, BTWP
opère aussi dans deux zones d’exploration : à Argemela Perspectives de l’exploration au
(Portugal centre), pour étain et lithium, et à Quinta-Ban-
jas (près de Porto, Valongo), pour or. Ces deux projets ont
Portugal
donné lieu à cartographie géologique et analyse des sols Le Portugal a un potentiel important dans le domai-
et des roches, ce qui a permis de déterminer les meilleures ne du marbre et du granite, du kaolin et du feldspath, du
cibles à sonder. cuivre et du wolfram. Mais le potentiel pour d’autres res-
Tous les travaux d’exploration, qu’il s’agisse de sources minérales est également élevé et totalement
cartographie géologique, d’échantillonnage de sols, ouvert. On observe également un déficit dans les études
sédiments de ruisseaux ou roches, de géophysique (gra- d’exploration qui permettraient de faire passer des occur-
vimétrie, magnétisme, électromagnétisme, électrique), rences minérales à fort potentiel au stade de gisements.
sondages au marteau ou carottés, de galeries ou de tests Actuellement, il y a des projets d’exploration pour
d’exploitation, impliquent obligatoirement d’obtenir substances métalliques et, parmi celles-ci, pour l’or, métal
l’autorisation de l’État et des propriétaires fonciers. pour lequel il existe des projets dans tout le pays. Dans le
Souvent, ce sont les géologues qui vont coordonner domaine de l’uranium qui,selon la loi,relève de l’État,certaines
l’équipe de travaux géologiques chargée d’inventorier et occurrences ont été exploitées et d’autres pas encore. Avec
de quantifier les minerais dans la zone d’étude. les prix actuels des métaux et des matériaux sur le marché,
l’activité d’exploration se développe, ce qui conduit à
améliorer les perspectives d’emploi pour les géologues.
Ces perspectives, dans l’exploration et dans l’ex-
ploitation des gisements, sont certes liées à la découver-
te de gisements exploitables, mais également aux
contraintes liées à la protection de l’environnement et
aux études archéologiques. Sur ce point, il importe de lut-
ter contre une vision, parfois fondamentaliste, qui tend à
considérer toutes les mines comme des ennemies. Le mon-
de avance et de nombreuses exploitations minières se
sont développées en respectant le patrimoine archéolo-
gique et l’environnement. Au Portugal, pays avec huit
siècles d’histoire, il est important que le secteur minier se
développe de façon équilibrée comme cela doit être le cas
Photo 4. Local de stockage de carottes de sondage (cliché Paulo Ferraz). dans tous les pays ayant un fort potentiel minier.

93

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Une carrière de géologue minier à la SOMINCOR (Portugal)


Nelson Bruno Monteiro Ferreira Pacheco 1 .

Repères historiques de carrière


Après avoir obtenu mon diplôme de géologue à
l’université de Porto puis satisfait à mes obligations
militaires, j’ai eu une courte période d’enseignant avant
d’être embauché à la SOMINCOR (Sociedade Mineira de
Neves-Corvo, SAZ) comme géologue junior, d’abord en
surface et en souterrain ( janvier-décembre 1989), puis
comme géologue d’exploration (janvier 1990-juin 1995).
Je suis ensuite devenu géologue de projet et d’exploration
en surface et en souterrain (juillet 1995-février 2004) et,
depuis cette date, chef géologue minier.

Le gisement de Neves-Corvo Figure 2. Coupe Neves - Lombador montrant la succession géologique de


Neves-Corvo (document SOMINCOR, département Géologie, 2000).
Comme le montre la figure 1 qui présente la
Ceinture pyriteuse ibérique, le gisement de Neves-Corvo secteur de Lundin Mining Corporation. Neves-Corvo se
est localisé dans le sud du Portugal (province de Baixo- subdivise en fait en cinq gisements polymétalliques :
Alentejo) et la SOMINCOR y emploie environ 1 100 Neves, Corvo, Graça, Zambujal et Lombador (Fig. 3), qui se
personnes, en incluant les contractants. présentent sous une forme massive lenticulaire et inter-
La séquence stratigraphique comporte un stratifiée dans l’encaissant, avec un stockwork dans les
ensemble autochtone et une série allochtone (Fig. 2). Les formations du mur (Photos 1 et 2).
sulfures massifs sont localisés au sommet de l’autochto- La minéralisation stannifère a été la première mise
ne. Plusieurs évènements tectoniques affectent l’ensemble en place, suivie par la minéralisation sulfurée. D’une façon
de la série, y compris le niveau minéralisé. générale, les sulfures riches en cuivre sont localisés à la
Le gisement de Neves-Corvo est un des plus base des gisements (Photo 1). Ils sont surmontés par les sul-
importants d’Europe et il représente un ensemble de gîtes fures riches en zinc, puis par les sulfures de fer au sommet.
de sulfures massifs volcanogéniques de niveau mondial, L’étain se trouve dans les stockworks et dans les parties
avec plus de 300 Mt de sulfures à fortes teneurs en cuivre, les plus riches de la minéralisation cuprifère massive. Le
zinc et étain. L’exploitant, la SOMINCOR, exploite aussi le minerai rubané, au toit du gisement de Corvo, correspond

Figure 1. Neves-Corvo dans le contexte de la Ceinture pyriteuse ibérique Photo 1. Contact entre le minerai de cuivre massif et les schistes noirs du
94 (document SOMINCOR). mur à Graça (cliché SOMINCOR).

1. Chef géologue Mine de SOMINCOR.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Un important programme d’exploration est en cours :


à l’intérieur de la concession de Neves-Corvo pour suivre
les extensions des gisements par sondages carottés en
surface et en souterrain ;
sur cinq autres concessions (environ 2 600 km2) dans la
partie portugaise de la Ceinture pyriteuse ibérique.
Les minerais de cuivre et de zinc sont enrichis dans
deux usines de flottation qui, en 2006, ont traité environ
2 Mt de minerai de cuivre donnant un concentré à 24-25%
Cu avec une récupération de 88% et 150 000 t de mine-
rai de zinc donnant un concentré à 49-50% avec une récu-
pération de 80%. L’usine de traitement du minerai de zinc,
Photo 2. Stockwork cuprifère dans les hyaloclastites rhyolitiques à Corvo
(cliché SOMINCOR).
traite également le minerai d’étain qui est aujourd’hui
pratiquement épuisé. Les concentrés de cuivre et de zinc
à un stockwork minéralisé, mis en place tectoniquement. sont principalement vendus en Europe et au Brésil.
La paragenèse comprend principalement : pyrite, chalco-
pyrite, sphalérite, cassitérite, tetrahédrite/tennantite,
galène, bornite, stannite et arsénopyrite.
L’exploitation
Au 31 décembre 2005, les ressources étaient esti- La mine fonctionne sur 3 postes, 6 jours par semai-
mées à 26 Mt à 5,4% Cu, 0,2 Mt à 2,49% Cu et 2,67% Sn, ne. Actuellement, quatre gisements sont en production
et 50 Mt à 6% Zn. (Corvo, Neves, Graça et Zambujal), l’exploitation étant
menée selon un découpage en quartiers primaires et secon-
L’actualisation des données géologiques est
daires. Les méthodes d’exploitation englobent : tranches
effectuée en utilisant le logiciel de modélisation géolo-
remblayées juxtaposées, gradins remblayés, minigradins
gique 3D VULCAN® (Fig. 4).
remblayés, et chambres remblayées (sable, pulpe ou
stérile). Le matériel utilisé comprend : jumbo de foration
et foreuses long trou, jumbo de boulonnage (boulons et
câbles), chargeuses à godet, purgeuses et camions.
Deux stations de concassage sont installées aux
niveaux 550 et 700, ainsi que des ateliers aux niveaux
590, 700 et 810. Le minerai est extrait par un puits de
600 m de profondeur, dont la base se situe juste sous le
niveau de roulage 700.

Expérience de géologue
Dans une conjoncture de cours des métaux éle-
vés, l’industrie minière est en bonne santé et active, ce
qui lui permet de développer l’emploi des professionnels
expérimentés mais également des géologues et ingé-
nieurs des mines junior.
Mon expérience en 18 ans de carrière m’a enseigné
que pour devenir un géologue de mine et d’exploration,
au-delà de la formation géologique classique, il est de
plus en plus important de maîtriser les connaissances
de base sur les technologies 3D.
Dans un nouveau projet, il est fondamental de
rester ouvert et d’appréhender l’ensemble d’une mission,
ce qui implique de ne pas travailler que sur la géologie.
Figure 3. Présentation des gisements de Neves-Corvo montrant la zonation
minérale (document SOMINCOR, département Géologie, 1999). Dans mon cas personnel, cette ouverture m’a permis d’en- 95

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Figure 4. Image 3D du gisement de Zambujal montrant les secteurs d’exploitation et les panneaux minéralisés (SOMINCOR, département Géologie, 2006).

richir mon expérience, de diversifier mes connaissances et tence effective dans tous les opérations impliquées dans les
d’acquérir une vision complète d’un grand projet minier. mines, mais le plus exigeant est sans doute la gestion des
Il est,en effet,essentiel de bénéficier des compétences équipements et des collaborateurs, dans les limites du
des techniciens des autres domaines professionnels : budget approuvé,dans les délais fixés et avec tous les impré-
mécanique des roches, topographie, production, planifica- vus géologiques ; et cela ne s’apprend pas à l’université.
tion minière, traitement des minerais, laboratoire, environ- En résumé,je peux dire qu’il est fondamental d’avoir
nement et sécurité industrielle,etc.Un grand projet industriel un bon esprit d’équipe et de comprendre l’importance de
est toujours pluridisciplinaire et la confrontation des idées la pluridisciplinarité afin d’optimiser la productivité et
relève d’un processus normal,et il est toujours important de l’efficacité dans l’organisation. Une attitude individualiste
savoir négocier.Toute ceci m’a permis d’acquérir une compé- ne peut fonctionner.

Travailler en Afrique du Sud, l’exemple de Kumba Iron Ore (KIO)


Vanessa Lickfold 1 .
suis familiarisée avec le logging géophysique et les avan-
Évolution de carrière tages de ce type de technique.
Après avoir terminé mon BSc (Honors) à l’universi- De là je me suis déplacée dans l’ouest de l’Afrique
té du Witwatersrand à Johannesburg, j’ai commencé ma du Sud pour commencer une carrière de géologue
carrière comme géologue de contrôle de qualité en ciel d’exploration.Toujours avec la même compagnie, Isen Ltd,
ouvert dans la plus grande mine de charbon d’Afrique du je me suis ensuite retrouvée sur le terrain pour une activi-
Sud, Grootegeluk, propriété d’Exxaro Resources, société té d’exploration pour zinc et plomb (gîtes de type Missis-
96 enregistrée en Bourse en 2006. Durant cette année, je me sipi Valley) dans les dolomies du Ghaap Group, pendant 3

1. KIO HQP Mineral Asset Management.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

ans, avant de me consacrer à l’exploration des minéraux à la bourse de Johannesburg sont soumises au code sud-
lourds pendant 4 ans, période durant laquelle j’ai suivi, à africain de reporting des ressources et réserves minérales
temps partiel, un MSc en géologie d’exploration avant de SAMREC (2000), qui s’appuie sur trois principes : trans-
prendre congé de l’industrie pour me consacrer à un PhD parence, matérialité et compétence. La transparence
de géologie économique en Australie. implique que le lecteur d’un rapport public dispose d’une
J’ai ainsi passé quatre ans à Codes, à l’université information suffisante, claire et sans ambiguïté et qu’il ne
de Tasmanie (Hobart), me focalisant sur l’étude de quatre soit pas induit sur une voie erronée. La matérialité veut
porphyres cuprifères près de Parkes (Nouvelles-Galles du qu’un rapport public contienne toute l’information qu’un
Sud). Après avoir terminé ma thèse, je suis retourné en investisseur et ses conseillers professionnels sont raison-
Afrique du Sud travailler avec la même société qui, entre nablement en droit de disposer, afin de pouvoir porter un
temps avait individualisé sa composante fer et acier pour jugement raisonnable et équilibré concernant la minéra-
constituer Kumba Resources. Durant quatre ans, j’ai trou- lisation dont il est question. La compétence impose que
vé un grand intérêt à m’impliquer dans l’évaluation et la le rapport s’appuie sur le travail d’une personne qualifiée,
valorisation de projets potentiels importants, et dans le responsable et expérimentée, soumise à un code d’éthique
développement d’un système pour faire face aux obliga- professionnel obligatoire.
tions de reporting de ressources et réserves pour la socié-
té. En novembre 2006, avec la division de Kumba Resources Kumba Iron Ore
en Kumba Iron Ore et Exxaro, j’ai pris la responsabilité des
géosciences et c’est une source de satisfaction que d’avoir La société, qui n’exploite que du minerai de fer, est
à faire face aux nouveaux défis qui sont devant moi. enregistrée à la bourse de Johannesburg. Elle est le 4ème
fournisseur mondial de minerai de fer transporté par voie
maritime et exporte 73% de sa production annuelle de
Environnement professionnel 32 Mt. La société exploite actuellement deux mines,
Suite à l’adoption de la nouvelle loi sur les res- Sishen et Thabazimbi, dont les productions respectives
sources minérales et pétrolières (Mineral Resources and en 2005 ont été de 28,5 et 2,5 Mt.
Petroleum Development Act), les sociétés travaillant en Sishen se trouve dans la province de Cap-Nord, à
Afrique du Sud sont tenues de respecter la contrainte de environ 280 km de Kimberley (Fig. 1). L’exploration, le déve-
« pouvoir économique pour les noirs » (« Black Economic loppement et la production remontent au début du XIXe
Empowerment », BEE) pour les années qui viennent. Ceci siècle, mais l’exploitation à large échelle n’a commencé que
signifie que le capital des sociétés doit être détenu pour dans les années 40. À la suite d’un programme de sondages
26% au minimum par des Sud Africains, antérieurement carottés réalisé en 1947, les opérations minières ont débu-
désavantagés. En outre, la direction de ces sociétés doit té en 1953, fournissant du minerai essentiellement aux
aussi refléter la démographie du pays et il est de leur aciéries du pays (Photos 1 et 2).
responsabilité d’être en accord avec ces contraintes, le
Dans les années 60, un nouveau programme
processus étant d’ailleurs largement contrôlé par l’octroi
d’exploration a permis d’accroître les ressources de façon
des licences d’exploration ou d’exploitation minière qui ne
significative, tandis que l’achèvement de la voie ferrée
sont attribuées que si ces critères sont satisfaits.
Les sociétés minières et les universités encoura-
gent les géologues à poursuivre leurs études au moins
jusqu’au niveau BSc Honours, bien que ceci ne soit pas
obligatoire selon la loi. Pour travailler comme profession-
nels en Afrique du Sud, les géologues doivent être enre-
gistrés au Conseil national sud-africain pour les professions
scientifiques de la nature (South African National Council
for Natural Scientific Professions, SACNASP) qui exerce une
action de contrôle sur la profession et peut contraindre ses
membres à se plier à la discipline collective, au cas où ils
ne respecteraient pas le code d’éthique du Conseil.
Au-delà des réglementations concernant la santé
et la sécurité auxquelles toutes les compagnies en Afrique Figure 1. Localisation des mines et projets miniers de Kumba Iron Ore
du Sud doivent se plier, les sociétés qui sont enregistrées (document Kumba Iron Ore). 97

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

deux phases. La faisabilité de la phase 1, qui vise une pro-


duction de 13 Mt/an a été terminée en janvier 2005.La pha-
se II prévoit une production supplémentaire de 10-20 Mt,
mais elle dépend d’une capacité de la voie ferrée supérieu-
re à celle qui est prévue dans le contrat actuel avec Transnet.
La mine de Thabazimbi se situe dans la province
du Nord (Limpopo), à environ 200 km au nord de Johan-
nesburg (Fig. 1). L’exploration, le développement et la
production remontent à 1919, mais l’exploration à large
échelle n’a commencé que dans les années 30 quand
ISCOR a acquis les droits miniers. L’exploitation à une
échelle significative a commencé en 1932, principalement
pour approvisionner les aciéries domestiques. Depuis
cette date, Thabazimbi a produit environ 154 Mt de mine-
rais,fournissant 118 Mt de produits commercialisables.Tou-
te la production de Thabazimbi est destinée à Mittal Steel.
Kumba Iron Ore dispose d’un large potentiel de
territoires déjà exploités ou vierges qui lui permettraient
de faire passer sa production de 32 à 42 Mt/an en 2009 et
70 Mt/an en 2015. Cette perspective englobe le SEP pré-
senté ci-dessus, les projets de Sishen Sud et Zandriviers-
poort en Afrique du Sud et le projet Falémé au Sénégal,
comme le montre le tableau 1.
Le projet de Sishen Sud se situe dans la province de
Cap Nord, à environ 85 km au sud de Sishen. Plusieurs
gisements d’hématite à haute teneur se trouvent dans
Photos 1 et 2. Vues du ciel ouvert de Sishen (clichés Kumba Iron Ore). la zone du projet, dont l’objectif de production, une fois le
projet finalisé, est de 9 Mt/an.
Sishen-Saldanha, en 1976, permettait de développer la Le projet de Zandrivierspoort se trouve dans la
production par une exportation accrue de minerai. Depuis province du Limpopo à environ 10 km de Polokwane. Les
1953, la mine a produit environ 812 Mt de minerai tout ressources indiquées s’élèvent à 447 Mt en minerai
venant fournissant environ 665 Mt de minerai commer- hématitique et magnétitique à basse teneur dans des
cialisable. formations ferrifères rubanées (banded iron formations).
La mine de Sishen est un ciel ouvert classique dont Un programme d’exploration approfondi et une étude de
le minerai est traité dans une usine unique de 32,5 Mt/an préfaisabilité doivent débuter dans un futur proche.
de capacité de minerai tout-venant. L’usine principale Le projet Falémé se situe dans le sud-est du
traite du minerai hématitique de haut titre et fournit des Sénégal à environ 740 km de Dakar. Des réserves
produits à 66% Fe : grossier, réduction directe, réduction
directe pour four vertical, fines et aggloméré grossier. Projet Avancement Tonnages
Ces produits sont fournis aux aciéries domestiques, la prévisionnels
majorité (22 Mt/an) étant exportée par Saldanha, sur la (Mt/an)
côte ouest d’Afrique du Sud. En outre, Kumba Iron Ore SEP I En construction 13
fournit à Mittal Steel, en Afrique du Sud, 6,25 Mt/an de SEP II Préfaisabilité 10-20
produit commercialisable. Sishen Sud Faisabilité 3-9
Le projet de développement de Sishen (Sishen Sishen Sud Phase II Étude de potentiel 3-6
expansion project, SEP) a récemment été mis en place à la Zandrivierspoort Préfaisabilité 3
mine. Il s’appuie sur l’introduction d’une nouvelle tech- Falémé Préfaisabilité 12
nologie de traitement par jigging pour enrichir le minerai TOTAL 44-63
de plus bas titre (>50% Fe) afin d’obtenir un produit Tableau 1. Potentiel de développement de Kumba Iron Ore (source
98 d’exportation à 64%Fe. Ce projet doit se développer en Kumba Iron Ore).

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

indiquées importantes de minerai hématitique à haute desquels ces difficultés ont du être surmontées, montre
teneur et magnétitique à basse teneur existent dans la à l’employeur potentiel que vous êtes en mesure d’ap-
zone du projet. L’exploration se poursuit dans le cadre porter des solutions et une valeur ajoutée à la compagnie.
d’un projet de prédéveloppement. Dans le contexte sud-africain, l’industrie locale soutient et
encourage ce niveau de diplôme et, parmi les compagnies
les plus importantes, elles sont nombreuses à soutenir
Philosophie de l’exploration cette perspective dans le cadre de la formation profes-
L’objectif de la Division technique et des projets, sionnelle continue individuelle.
dont les geosciences sont une composante,est de viser l’ex-
Dans une carrière de géologue, un des aspects les
cellence opérationnelle dans l’application de la techno-
plus importants, si l’on compare les responsabilités des
logie. Il s’agit ici d’une démarche de conseil intégré, capable
géologues dans les compagnies d’exploration et dans les
de gérer des équipes de projet pluridisciplinaires, et qui
sociétés minières, est la différence d’objectif donc de
offre un large éventail de compétences et d’expertise. La
responsabilités entre un environnement de production
Division doit proposer une gestion de qualité, des ser-
comparé à un environnement d’exploration. En production,
vices à coûts optimisés, dans le respect des spécifications
la priorité est souvent à des décisions rapides qui ont des
agréées.
conséquences immédiates et significatives sur les revenus
de la société, tandis que l’exploration met l’accent sur une
La mission du Département vision à beaucoup plus long terme.
des géosciences Il y a des opportunités pour acquérir de l’expé-
rience dans les deux domaines et il est fréquent que les
La mission de ce département, au sein de la Divi-
plus grandes sociétés aient des divisions d’exploration et
sion technique et des projets, est de promouvoir des ini-
d’exploitation, ce qui peut offrir des synergies au cours
tiatives et des opérations de développement minier de
de n’importe quel déroulement de carrière. Avoir de
façon durable, en s’appuyant sur une expertise en sciences
l’expérience à la fois en exploration et en exploitation
de la Terre qui englobe des connaissances et une straté-
sera considéré comme un avantage sur le long terme.
gie de développement avancées en matière d’exploration
de minerai de fer, d’ingénierie géotechnique et d’hydro- Pour beaucoup de sociétés qui interviennent glo-
géologie, de gestion des données spatiales et de connais- balement, qu’elles soient grandes ou petites, la capacité
sance géologique spécialisée dans les gisements de fer. à parler une langue d’usage courant comme le français en
Afrique occidentale ou à Madagascar, l’espagnol au Chili
Un des objectifs majeurs est de s’assurer que les
ou le portugais au Brésil, voire le chinois mandarin ou le
meilleures données possibles sont rassemblées au démar-
malais, présente beaucoup d’avantages mais n’est pas
rage d’un projet car tous les travaux futurs dépendent
essentielle. Il est tout aussi important de prendre le temps
de l’exhaustivité des données. Des mesures d’assurance et
d’apprendre les coutumes, les traditions et la culture de la
de contrôle qualité sont mises en place sur tous les aspects
communauté locale, que d’apprendre les bases de la
du processus, depuis la collecte initiale des données géo-
langue, de telle sorte que la vie professionnelle de tous les
logiques jusqu’à l’estimation des tonnages de ressources
jours devienne une expérience enrichissante pour toutes
et des teneurs. Pour le succès de notre géologie, la bonne
les personnes impliquées.
qualité des données est fondamentale.
Avec le boom du marché des matières premières,
il y a de nombreuses opportunités d’emploi pour les
Retour d’expérience sur l’emploi géologues et les spécialistes de géosciences dans un
des géologues large éventail de domaines. Ceci vaut pour les grandes et
Dans la recherche d’un emploi dans le domaine les petites sociétés, les compagnies junior qui semblent
actuel des ressources minérales, les avantages de l’édu- prendre des options dans le monde entier, de même que
cation supérieure post BSc ou Honors sont très impor- dans les institutions gouvernementales ou dans l’ensei-
tants, même pour les petites compagnies d’exploration. Un gnement, qui paraissent aussi avoir bénéficié du boom.
des principaux avantages de ce niveau de formation Profitez pleinement de ce boom sur les ressources
est que quelle que soit la difficulté de l’emploi ou du pro- minérales et appréciez d’être géologue dans une telle
blème posé, le fait d’avoir un MSc ou un PhD au cours conjoncture excitante.

99

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Géologue dans le domaine minier : un exemple de parcours


Monique Le Guen 1 .

J’ai abordé la mine lors de la préparation d’une J’ai ensuite exercé un poste de géologue projet
thèse de doctorat sur des minerais de Pb-Zn de la mine des dans lequel j’ai participé au projet d’ouverture d’un
Malines. Les travaux de terrain m’ont permis de connaître nouveau centre minier. Ce travail a consisté évidemment
et d’apprécier cet univers à une époque où les cours des à estimer les ressources du gisement, mais aussi à mettre
métaux, très bas, ne laissaient que peu d’espoir de débou- en œuvre et à suivre les campagnes de sondages et de
chés dans ce domaine. Après la soutenance de ma thèse puits de gros diamètre pour prélever des échantillons
et une expérience d’une année comme ingénieur de destinés aux pilotes minéralurgiques et métallurgiques.
recherche en géochimie isotopique, j’ai rejoint en 1990 la La réalisation de tests sur différentes techniques de
société Eramet pour travailler dans sa filiale Le Nickel (SLN) sondages de préexploitation et l’exploitation de blocs ont
en Nouvelle Calédonie. permis d’apporter des réponses aux problèmes de sélec-
Mon premier poste dans cette société a été celui de tivité et de production soulevés par les mineurs.
géologue chef de mission. C’est un poste où la prospection C’est un poste complet et équilibré dans lequel la
et l’étude de gisements tiennent une place importante,que part des travaux sur le terrain est équivalente à celle des
ce soit en zone vierge ou à proximité des centres miniers. études au bureau. Participer au projet d’ouverture d’une
Il consiste principalement dans la mise en œuvre de mine est tout simplement passionnant, c’est un travail
campagnes de prospection avec échantillonnage manuel d’équipe où chacun a un rôle bien spécifique à jouer dans
et cartographie des affleurements, reconnaissance par le choix des méthodes et des outils qui valoriseront la mine.
sondages carottés, sur pistes ou héliportés. Toute pros-
En 1998, j’ai été muté en métropole à Tec Ingénie-
pection entraîne évidemment la rédaction d’un rapport
rie, société d’ingénierie du groupe Eramet. J’y ai occupé un
dans lequel sont compilés l’interprétation des résultats, la
poste de Spécialiste Géologie puis d’Expert Géologie. Dans
caractérisation géologique et géochimique du gisement
ce poste j’ai continué à travailler sur les gisements appar-
prospecté et une première estimation des ressources
tenant au groupe, gisements de nickel mais aussi de man-
minérales et des coûts d’exploitation.
ganèse, sur des sujets aussi variés que la mise au point de
Cette approche permet au débutant d’apprendre à méthodes d’estimation des ressources et réserves cor-
reconnaître sur le terrain les différents faciès des minerais, respondant au standard international, l’optimisation de
mais aussi d’acquérir et de développer des qualités fosses, le dessin de projets d’exploitation, la planification
d’observation, d’organisation, de rigueur et de synthèse, de l’exploitation, la conception et la mise en place d’une
d’apprendre à encadrer les équipes de prospection et à négo-
chaîne de traitement des données de préexploitation…
cier avec les tribus riveraines. C’est aussi une excellente façon
de visiter un pays et d’avoir accès à des endroits superbes. Parallèlement, j’ai pu réaliser, dans ce poste, de
nombreuses prestations géologiques pour des sociétés
Par la suite, je me suis orientée vers un poste de
extérieures au groupe et des expertises et audits pour la
géologue d’études sur des sujets portant, entre autres,
Banque mondiale et pour l’Union européenne. Ces
sur la valorisation des minerais. Ces travaux ont porté
travaux ont permis d’élargir mon expérience en étudiant
principalement sur la caractérisation géologique, géo-
des minerais différents, des minéraux industriels, des
chimique et minéralurgique des minerais. Les outils uti-
calcaires et des granulats.
lisés sont ceux de la statistique et de la géostatistique, qui
permettent d’étudier la distribution des données, la struc- Enfin,Tec Ingénierie étant partenaire de la société
turation d’un amas (étude variographique) et de compa- Surpac Minex Group, j’ai fortement participé à la forma-
rer différentes populations (analyses multivariables). tion et à l’assistance des utilisateurs du logiciel minier
Surpac. Ce volet, très particulier, a entraîné de nombreux
C’est une étape indispensable pour maîtriser ces outils,
échanges toujours très fructueux avec des géologues et
très utilisés pour interpréter des données. Il faut toutefois
mineurs de tous horizons et de tous pays.
avoir,à la base,une bonne connaissance naturaliste des mine-
rais pour garder un œil critique et logique sur les résultats.C’est Le travail dans une société d’ingénierie est riche
un volet probablement moins excitant que l’aventure du ter- d’enseignements. Il permet en particulier d’acquérir une
100 rain mais on a l’avantage d’être à l’abri des intempéries. solide expérience en travaillant sur des sujets extrêmement

1. Eramet.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

variés dans des délais toujours suffisamment courts pour vent de déceler les erreurs et les incohérences, d’en identifier
rester rentables. Le spécialiste doit donc apprendre à les causes et de proposer des solutions, d’apprécier la qualité
bien planifier son travail, à estimer correctement la durée et la fiabilité des données, dans un délai souvent très court.
effective de l’étude et à respecter les délais. En conclusion,le métier de géologue dans le domai-
Enfin, depuis 2005, j’occupe à Eramet le poste de ne minier peut être très varié et c’est sans doute ce qui le
Responsable Géologie, Ressources et Réserves. Il s’agit, rend si passionnant, pour peu que l’environnement soit
pour partie, de transmettre et vérifier la procédure d’es- favorable au bon déroulement de son activité.La carrière du
timation des ressources et réserves au sein du groupe, et géologue dépend autant de la saisie des opportunités que
de compiler et publier les chiffres estimés dans les filiales de ses qualités et aptitudes personnelles.Initialement très
minières. Parallèlement, j’apporte ma contribution au porté sur les travaux de terrain, le poste de géologue peut
développement des nouveaux projets en assistant les ensuite évoluer vers des postes de production, qui néces-
équipes ou en réalisant la modélisation et l’estimation sitent des qualités de manager,ou vers des postes d’études,
des ressources minérales, et je participe au recensement qui demandent plutôt des aptitudes à la recherche. Il n’est
des projets dans le monde qui pourraient présenter pas rare en outre que les géologues les plus offensifs
un intérêt. Il peut en résulter une expertise géologique accèdent en cours de carrière à des postes de direction.
qui porte principalement sur la phase d’acquisition des Il est certain, enfin, qu’avec les cours très élevés
données et sur le calcul des ressources et des réserves. des métaux, la conjoncture actuelle et les moyens qui en
De par son approche plus stratégique sans doute, ce résultent sont très favorables à l’épanouissement
poste requiert une forte expérience technique.Il s’agit bien sou- professionnel du géologue dans le domaine minier.

De l’exploration minière au métier des granulats :


un parcours spécifique
La Rédaction 1 .

Repères de parcours personnel Retour d’expérience minière


Après une formation de géologue généraliste à Le fait de ne pas avoir un master orienté explora-
Grenoble, Emmanuel Gautier (EG) a obtenu un diplôme de tion minière n’a jamais été considéré comme un handicap
master en géologie et géochimie à l’université Laval à par les employeurs anglo-saxons. Ce ne sont pas les
Québec, en 1992. Ce diplôme n’était nullement orienté compétences premières recherchées pour une activité
vers l’exploration minière. Vient ensuite une année et d’exploration à l’international, alors que la langue (anglais),
demie de coopération avec l’ORSTOM (IRD aujourd’hui) la mobilité et la disponibilité sont considérées comme
en Équateur, une occasion de se familiariser avec essentielles. Il faut néanmoins être géologue, mais le BSc
l’exploration des gisements d’or. suffit. L’exploration minière fonctionne surtout par crises
La période professionnelle débute par trois ans de successives d’embauche et de désembauche.
géologue junior en Guyane, en Équateur et au Pérou avec La coopération avec l’ORSTOM, même si l’on peut
la société Golden Star (Guyanor Resources en Guyane) et discuter de l’approche d’exploration minière retenue, a
se poursuit comme géologue senior en Guyane pour constitué une bonne introduction au métier d’explorateur.
Guyanor et en Guinée pour Aldridge Resources. L’embauche comme débutant se fait comme junior,
La suite, en France, se passe d’abord dans les Gra- mais la progression peut être rapide vers un poste de
nulats, chez Morillon Corvol, pendant 10 mois. Viennent responsabilité selon l’efficacité que l’on montre dans son
ensuite six mois en Nouvelle Calédonie comme directeur métier.Au départ,le géologue suit une formation de quelques
d’exploitation, avec la Société minière de la Tontouta semaines pour se familiariser avec les méthodes d’exploration
(nickel), puis le retour en métropole et dans les granulats, et notamment l’échantillonnage.En exploration,le géologue
d’abord avec Morillon Corvol, puis avec Guintoli (TP) à junior ne manage pas le projet d’exploration ; il va conduire
partir de 2005. des campagnes de prélèvement de sols, de sédiments de 101

1. Remerciements à Emmanuel Gautier pour son témoignage et son aide pour l’élaboration de cet article.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

ruisseaux,de roches,effectuer des levers géologiques,suivre ploitant de granulats, non pas tant par les connaissances
des sondages… Ses connaissances en microstructurale et en géologiques acquises, mais par l’expérience issue de la
minéralogie lui seront précieuses pour réaliser des logs de gestion de projets et d’équipes dans des conditions
sondage. Il peut diriger une petite équipe d’ouvriers ou d’autonomie et d’environnement difficile.
de prospecteurs, jusqu’à une dizaine environ. À son retour chez Morillon Corvol, en 2001, EG a
Le géologue senior définit le projet, propose le tenu le poste de Responsable ressources minérales, ce qui
budget et suit le projet une fois celui-ci accepté. Il est consistait à superviser la prospection, contrôler les modèles
responsable du personnel (de 10 à plusieurs centaines de géologiques, suivre les audits des réserves et les méthodes
personnes) et plus largement de la gestion de l’ensemble d’exploitation. Il s’agit donc d’un poste spécifique qui ne
du projet et il est organise le travail des équipes au jour s’assimile pas au classique géologue Environnement et
le jour. En général, il est assisté d’un chef de camp qui foncier. Dans la société Lafarge Granulats, ce poste est
s’occupe de l’intendance et de l’administration. tenu par une petite équipe.
Selon les normes anglo-saxonnes, un projet se sub- Le métier de base du géologue Environnement et
divise en trois étapes principales : 1) Prospection généra- foncier (prospecteur foncier) est de chercher des cibles en
le, 2) Préfaisabilité, 3) Faisabilité, et c’est le géologue senior combinant différentes approches : géologie, contraintes
qui les conduit toutes les trois. La première phase com- environnementales, urbaines, administratives, accessibi-
prend une étape stratégique destinée à définir des cibles lité, marché. Une fois les cibles isolées, on passe à la
de prospection et un premier modèle géologique, et une négociation foncière. Le poste suivant dans la carrière est
étape tactique durant laquelle les premières hypothèses celui d’ingénieur Développement chargé du montage des
formulées sont testées par sondage. dossiers de demande d’autorisation pour les ICPE et du
La préfaisabilité a pour objectif de définir un modè- respect de la réglementation. Le haut de la pyramide
le métallogénique et de dégager une ressource ; il n’y a pas est occupé par le Responsable Environnement et foncier qui
de volet financier à ce stade. La faisabilité a pour objet contrôle l’ensemble des opérations et s’implique
d’estimer la réserve c’est-à-dire la part de la ressource directement dans les négociations difficiles. Il faut en
exploitable économiquement, et de définir le type d’ex- moyenne 4-5 ans pour ouvrir une carrière, parfois moins,
ploitation et le rapport stérile-minerai dans le gisement ; parfois beaucoup plus. Les opérations de reconnaissance
elle comporte un volet financier. Pour ces opérations géologique de gisement sont en général sous-traitées.
de calcul de ressources-réserves, le géologue senior est L’expérience montre que la géologie, qui certes ne
assisté par un spécialiste, interne ou externe à la société. représente que 10% des tâches, est souvent sous-estimée
La procédure de l’audit intervient durant la phase ulté- car considérée comme facile, ce qui peut entraîner des
rieure de bancabilité, pour le montage du projet finan- erreurs, donc des retards ou des coûts non prévus. Un
cier. Lorsque la société est cotée en bourse, chaque fois qu’il autre choix, pas toujours pertinent, est de confier des
y a déclaration de ressources ou de réserves, un contrôle négociations foncières aux débutants, alors qu’il s’agit
par un géologue agréé peut être imposé. d’une démarche commerciale qui nécessite de la pratique
Dans l’exploitation, le géologue junior est chargé et de l’expérience. D’une façon générale, la négociation
du suivi détaillé du gisement avec l’avancement de l’ex- foncière commence très précocement, sur la base d’un
traction, ce qui implique un échantillonnage rigoureux échantillonnage très restreint et en s’efforçant de mini-
et un contrôle analytique précis : suivi au poste ou au miser les contraintes négociées car, in fine, la décision
demi-poste. Le géologue senior organise le travail des incombe au préfet et moins les contraintes seront grandes,
juniors et il tient constamment à jour la situation des plus l’exploitant disposera de souplesse dans la mise en
réserves et l’évolution du modèle géologique. Dans les place de l’exploitation. Les types de contrats sont très
compagnies anglo-saxonnes, le directeur d’exploitation divers : achat en propriété, fortage rémunéré à la super-
est très fréquemment un géologue, alors que dans les ficie ou à la tonne extraite, etc.
compagnies françaises, ce poste est le plus souvent Dans les travaux publics, le poste de Responsable
occupé par un ingénieur des mines. Carrières concerne plus souvent l’ensemble du dévelop-
pement des exploitations, ce qui recouvre la géologie, la
Retour d’expérience d’exploitant prospection, l’évaluation des ressources et des réserves, le
suivi des exploitations, les actions de partenariat et de
de granulats lobbying, etc. C’est donc une logique de responsabilité
L’expérience acquise dans le domaine minier est globale qui prévaut ; chaque responsable doit assurer
102 clairement un avantage pour rentrer dans le métier d’ex- toutes les tâches dans son domaine de responsabilité.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

Un exemple de diagnostic régional : gestion durable de l’activité


minière, développement touristique et préservation des milieux
naturels dans le Nord-Ouest Argentin
Christian Vallier 1 .

Généralités Travail effectué et propositions


Dans le cadre d’un accord de Coopération avec les Afin de mieux cerner les enjeux, les attentes et la
quatre provinces du Nord-Ouest argentin (Noroeste Argen- situation actuelle, beaucoup de contacts ont été pris et de
tino, NOA), l’ambassade de France a décidé de mettre en nombreuses visites de sites réalisées : sites d’intérêt géo-
place une mission d’expertise destinée à proposer les logique spectaculaires, anciennes mines métalliques, car-
bases d’une gestion durable de l’activité minière en rela- rières d’onyx, salars, volcans, sites archéologiques, sources
tion avec le développement touristique (raisonné ou thermales, villages de mineurs abandonnés et très rares
durable) de la région et la préservation de ses milieux villages existants (Photos 1 et 2).
naturels (patrimoine naturel, paysager, culturel et humain). Les rencontres et contacts ont eu lieu avec des élus
Cette mission s’est déroulée en deux temps (2002 et 2003). locaux, des compagnies minières, le syndicat minier, des
Elle avait pour objectif de proposer des solutions concrètes acteurs du tourisme, des défenseurs de la nature, des
issues notamment de la réglementation française ou euro- administrations, des experts de l’UNESCO, la Chambre
péenne, de l’expérience française et internationale de ce des Députés, etc. (Photo 3).
type de coordination d’intérêts a priori contradictoires. La
mission s’est faite avec le soutien du BRGM, sous forme de
mise à disposition d’outils et d’exemples de référence.
La Puna est un vaste territoire d’environ 450 km de
long par 200 km de large. Des chaînes volcaniques le
subdivisent en sous-ensembles différents et indépendants
du point de vue des paysages qui sont très variés et
imposants. La faune sauvage est relativement présente
(nombreuses vigognes, quelques « suris » (autruches), plus
rares renards, canards, flamants roses, oies, rapaces …) et
plutôt facile à observer en l’absence d’obstacles dans ces
paysages très ouverts. La Puna, très peu peuplée dans ses
parties catamarquena et saltena, un peu plus dans sa
partie jujena, connaît une très faible pluviométrie (jusqu’à
5 à 10 mm/an dans les secteurs les plus arides). Son altitude
varie entre 3 000 m pour les parties les plus basses et
6 500 m pour les sommets ; les plateaux se situent en
général entre 3 500 et 4 000 m.
Photo 1. Volcan au milieu d’un salar (cliché Christian Vallier).
Ce territoire est parsemé d’anciennes exploitations
minières (mines métalliques, roches ornementales et
évaporites essentiellement), de très petite taille en
général. Certains secteurs montrent de nombreuses traces
de prospection récente (depuis 1990) et quelques mines
en activité.
Au total,il s’agit d’un territoire d’altiplano très vaste,
compartimenté et varié, constitué de nombreux sous-
ensembles de caractéristiques très distinctes des points de
vue paysage, faune, occupation humaine et intérêt minier. Photo 2. Mine Julia de soufre à 5 500 m (cliché Christian Vallier). 103

1. GéoPlusEnvironnement. Le Château 31290 Gardouch. Tél. 05 34 66 43 42. Expert environnementaliste de l’industrie minérale.

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

peuvent être menés en prospection, sans la menace de se


voir interdire par la suite l’ouverture d’une mine pour cau-
se environnementale. Les schémas départementaux des
carrières, en France, ont exactement la même finalité.

Commission interprovinciale des mines


Une commission,regroupant les différentes parties,
pourrait jouer le rôle de caution morale, scientifique et
économique à l’élaboration du SIG ci-dessus, ainsi qu’à
son application et au respect de ses conclusions. Elle aurait
à se prononcer sur :
le cahier des charges de réalisation du SIG de gestion
durable des mines ;

Photo 3. « Discussion acharnée » entre le Sénateur et le Responsable argen-


les acteurs en charge de cette réalisation ;
tin du projet (cliché Christian Vallier). la recherche des budgets nécessaires ;
Suite à ces démarches et visites, des propositions la validité du SIG de gestion durable des mines ;
ont été formulées afin de concilier : chaque nouvelle demande de permis de recherche ou
un développement minier très prometteur ; d’exploitation minière.
la préservation d’un environnement particulièrement Intégration du SIG de gestion durable des mines
remarquable ; dans le projet de classement de la Puna au
la naissance d’un tourisme « raisonné ». Patrimoine Mondial de l’Humanité
Le dossier de demande de classement UNESCO
Propositions d’ordre réglementaire inclut un chapitre « Gestion du Territoire », qui pourrait
tout à fait inclure le système de management durable de
Schéma Interprovincial de gestion durable des l’activité minière.
Mines dans la Puna
Par ailleurs, ceci pourrait faciliter la recherche
Il s’agirait de mettre en place un SIG compilant la d’un financement international pour la réalisation de ce
totalité des paramètres à prendre en compte : potentiel projet.
minier, investissements miniers déjà réalisés, potentiel
aquifère, archéologie, milieux naturels, paysages, socio- Mise en place d’un système de garanties
économie, projets touristiques, zones protégées actuelles financières pour les mines en activité
et à venir, etc., sous forme de cartes thématiques géoré- Un système de garanties financières pourrait
férencées. définitivement résoudre le risque d’abandon en l’état de
La compilation de ces cartes de ressources et de sites miniers.
contraintes aboutirait à une carte de synthèse montrant
les différents types de zones géographiques suivants : Propositions d’ordre technique
zones sans aucun intérêt minier : zone « blanche » ;
Modélisation en 3D de la Puna
zones à intérêt minier et sans contrainte forte : zone
ouverte à la mine, « verte » ; Il pourrait être judicieux et utile de procéder, à
partir des photos satellites et des cartes topographiques
zones avec au moins une contrainte majeure : zone
de la Puna, à la réalisation d’une maquette virtuelle de la
interdite à la mine, « rouge » ;
Puna en 3D. Ainsi, des blocs diagrammes réalistes en 3D
zones à intérêt minier et avec des contraintes (non pourraient être produits à partir de points de vue choisis
majeures) : zone éventuellement ouverte à la mine après judicieusement.Cette maquette virtuelle en 3D pourrait ser-
étude d’impact approfondie et ciblée, voire des mesures vir de base à l’analyse des paysages de la Puna et à l’étude
compensatoires : zone « orange ». d’impact paysagère d’un projet minier dans ce territoire.
L’objectif, pour les opérateurs miniers, est de pou- En effet, on peut très facilement intégrer un
104 voir connaître à l’avance les zones où des investissements projet d’exploitation minière dans un paysage virtuel en

Géologues n°152
les géologues miniers racontent

3D, et en déduire plus facilement les impacts que ce pourrait y présenter des sites abandonnés en l’état par les
projet aura sur le paysage de la Puna. opérateurs miniers du passé afin de montrer du doigt les
Ce type d’analyse en 3D pourrait être exigée pour erreurs commises. Ceci permettrait de transformer un
les projets en « zone orange » du SIG. éventuel passif environnemental en un avantage péda-
gogique et, fort probablement, d’inciter les opérateurs
Étude du potentiel d’alimentation en eau de la Puna miniers actuels à ne pas reproduire ce type d’erreur pour
Une telle étude répondrait à une inconnue actuel- ne pas être, eux aussi, montrés du doigt. Ces sites aban-
le, à l’inquiétude générale des administrations, des élus donnés pourraient être progressivement réhabilités, sous
et des populations, ainsi qu’à un besoin technique des le regard des touristes, dans un esprit de transparence, de
compagnies minières. pédagogie et de motivation des opérateurs miniers. Le sui-
vi ou l’observation de ces réhabilitations deviendraient un
Étude de l’impact socioéconomique des mines vrai enjeu touristique, un thème, un but de visite.
actuelles
Circuit touristique géologique
Il s’agirait d’établir un état des lieux objectif
des retombées socio-économiques (positives et néga- Un circuit incluant la Puna et les Vallées Calchaquis
tives) de l’activité minière du passé et actuelle sur les réunirait un nombre très important de points d’intérêt
populations locales. pour des visiteurs amateurs de géologie, de minéralogie,
d’exploitations anciennes, ou plus simplement passionnés
Trop d’avis, divergents et non fondés, circulent à
par la Terre qui nous supporte. Il s’agit d’un thème majeur
ce sujet.
de tourisme raisonné.
Évaluation simplifiée des risques environnementaux
sur les mines abandonnées (« ESR ») Propositions d’ordre « incitatif »
Il serait pertinent de pouvoir disposer de diagnostics
Appel volontariste à investisseurs miniers
environnementaux sur les mines abandonnées – par
exemple, selon le Guide français « Gestion des Sites (poten- À partir de la carte de synthèse du SIG, il pourrait
tiellement) pollués » –, afin de déterminer les risques de être procédé à un appel d’offres international à projets
contamination du milieu et les utilisations possibles de ces miniers sur les « zones vertes », s’appuyant sur une
sites à l’avenir (circuits touristiques, visites ponctuelles, somme d’informations de base disponibles sous forme
hébergement…). de descriptifs ou de fiches par projet, et une sécurité
d’investissement. Cela permettrait de sélectionner les
Proposition de désarsénification du Rio San Antonio opérateurs miniers, par exemple en fonction de leur
On ne peut qu’encourager la réflexion sur la politique environnementale et sociale et relancerait
potabilisation du Rio San Antonio, qui draine la mine la prise en compte de l’environnement dans toutes les
de Concordia et ses parcs à résidus avant d’alimenter opérations minières de la Puna.
le bourg de San Antonio de los Cobres, le seul bourg
important de la Puna. Charte des mineurs
Les Chambres des mines (Camaras de Mineria)
Thèse universitaire avec le CESMAT ou le CESEV pourraient être incitées à élaborer une charte de bonne
Un établissement français pourrait proposer conduite de la mine dans la Puna afin de dynamiser la
d’accueillir un étudiant argentin (ou français) dans le cadre prise en compte volontaire de l’environnement et du social
d’une thèse en liaison avec le CESMAT ou le CESEV. dans la profession minière.
La poursuite de l’activité minière et son dévelop-
Propositions d’activités « mixtes » pement, en Argentine comme partout dans le monde
aujourd’hui, passe par la prise en compte, en amont et
Création d’un circuit touristique pédagogique de la façon la plus exhaustive et volontariste possible, de
L’idée est de proposer un circuit touristique l’environnement des nouveaux projets miniers.
pédagogique sur le thème de l’environnement minier. On

105

Géologues n°152
rubriques

Notes de lecture

« Terroirs et Maisons de France ». maison et matériaux utilisés. Une mention tionnées ci-dessus. On peut regretter que
Collectif, 2006. spéciale doit être faite pour certains des- les chapitres consacrés à la technologie
sins, les aquarelles et des photos de détails d’extraction et de traitement, ainsi qu’aux
Éditions Créer (Nonette, Puy-de-Dôme),
qui illustrent très bien le texte situé en face. enjeux environnementaux et de planifica-
446 p., 40 euros.
Quelques imperfections à noter néan- tion ne soit pas plus développés.
C’est le 4ème volume de la collection
moins. Les fautes de frappe sont toujours L’ouvrage comporte également un
sur les terroirs et la géologie, une collec-
difficiles à éliminer totalement (nous en glossaire,une bibliographie,des planches de
tion développée au BRGM sous la direction
savons quelque chose pour “Géologues”) roches sélectionnées et un tableau des
de Charles Pomerol. Toutefois, le BRGM
mais du phosphate à la place de feldspath caractéristiques de roches sélectionnées.
n’ayant pas retenu de publier cet ouvrage,
dans le granite (encart page 268) cela heur- Enfin, deux études de cas portent respecti-
il a été repris par les Éditions Créer, le BRGM
te le géologue ! Par ailleurs, dans les renvois vement sur l’accessibilité des ressources en
assurant toutefois la fourniture d’extraits
du texte aux figures, la numérotation est grès pour la protection du patrimoine bâti
de cartes géologiques.
souvent un peu décalée. On s’y habitue d’Édimbourg, et le futur de l’extraction
C’est un beau livre, très bien illustré néanmoins assez vite car la figure concer- ardoisière.
par de nombreuses photos couleur, des née est souvent proche du texte. Bien que régional, cet ouvrage apporte
croquis, des aquarelles et les cartes géolo-
Malgré ces petites imperfections, une des éclairages transposables ailleurs sur l’em-
giques des provinces. Il traite, bien sûr, des
lecture facile – des encarts sur fond jaune ploi des roches ornementales dans la construc-
vieilles demeures, de leur architecture, des
définissent souvent roches et minéraux –, tion et la protection du patrimoine bâti
pierres utilisées et de leurs lieux d’extrac-
intéressante et enrichissante qui complète La Rédaction
tion. Comme le montre la carte de la 3ème
très bien celle de « Terroirs et monuments ».
de couverture, c’est un parcours à travers
Les géologues évidemment,les enseignants
la France qui, partant des Alpes, traite suc-
et un large public pourront y trouver du Les eaux continentales.
cessivement des régions de l’Est, du Nord
plaisir et chacun y apprendre à regarder les
au sens large, du Sud-Ouest, du Massif Sous la direction de Ghislain de Marsily.
vieilles demeures d’un autre œil
central et enfin du Sud-Est et de la Corse. Institut de France.
Un large panorama donc dans lequel cha- Michel Bornuat Académie des sciences. EDP Sciences, 2006,
cun pourra retrouver le style des maisons 328 pages.
de sa région ou de ses lieux de vacances.
Stone in Scotland. Se dire qu’il s’agit encore d’un ouvra-
Les 17 chapitres ou étapes de ce tour de ge de plus sur le sujet pourrait conduire à
Awan Hyslop, Andrew McMillan, Ingval
France correspondent soit à des provinces délaisser ce livre. On aurait tort car sa pre-
Maxwell.
bien précises, soit à des régions ou des mière vertu est sans doute de rassembler
ensembles géologiques plus larges et sont Earth Sciences series, UNESCI Publishing,
sous un relativement petit volume une
plus ou moins développés.Certains,comme 2006, 72 p.
masse importante d’informations, couvrant
le Massif central et l’Île-de-France sont lar- La polyvalence de cet ouvrage l’ouvre l’ensemble du thème des eaux continen-
gement subdivisés et l’Aquitaine, par vers un lectorat diversifié puisqu’il aborde tales terrestres. On peut en juger d’après le
exemple, comporte huit articles : Poitou- aussi bien l’histoire de la pierre de construc- premier chapitre (« Eau, aménagement et
Aunis, Saintonge, Bordelais, Périgord, Quer- tion, les catégories de pierre et le cadre usages »), pris à titre d’exemple, qui pré-
cy, Landes, Agenais-Lomagne, Gascogne. géologique qui organise leur distribution, sente un grand nombre d’encadrés sur
On pourrait craindre a priori une cer- les techniques de sélection, d’extraction et divers pays ou divers problèmes : Évolu-
taine monotonie, au moins au niveau du de traitement, que les enjeux environne- tions de la connaissance des ressources en
texte. Il n’en est rien car une grande liberté mentaux et de planification. eau en Tunisie, Le PAGER au Maroc : un
a été laissée à la quarantaine d’auteurs, Le chapitre historique est un raccourci exemple de programme rural d’accès à
pour la plupart spécialistes de la géologie qui va de la Préhistoire au XXe siècle et l’eau, Enjeux de l’eau en Libye, Les aquifères
régionale. L’approche et la présentation du présente une chronologie intéressante du SASS (système aquifère du Sahara sep-
sujet sont donc très variés : description de sur l’usage des matériaux au cours des dif- tentrional), Le fleuve Sénégal, Hyrdomet,
quelques maisons, typiques des usages férentes périodes. C’est le chapitre sur la le Whycos et l’appui technique de l’IRD aux
et des matériaux utilisés ;parcours de décou- répartition des ressources qui est le plus autorités de bassin, Chronique d’une mobi-
verte touristique ; approche plus systéma- conséquent puisqu’il présente la distribu- lisation régionale en Afrique, Le bassin du
tique à partir de la géologie et des pierres à tion des carrières par type de roche : grès, Mékong, Les institutions du bassin du
bâtir,y compris les argiles (briques,torchis...), flagstone (roche fissurable en dalles), Mékong, Les eaux continentales dans les
le gypse (plâtre), le pisé, etc. L’aspect histo- calcaire et marbres, roches ignées (dont îles d’outre-mer, etc., sans oublier plusieurs
rique est parfois un peu plus développé mais granite, roches métamorphiques (dont encadrés relatifs à la France ou à l’Europe.
tous les auteurs ont eu le souci de mettre en ardoise). Des cartes donnent la distribution Dans un tel panorama, on peut regretter, et
évidence les relations entre architecture, des formations géologiques et des carrières les auteurs en font état, que certains
106 conditions climatiques, destination de la selon les diverses catégories de roche men- thèmes chauds ne soient pas évoqués :

Géologues n°152
rubriques

amont du Tigre et de l’Euphrate en Turquie, gestion, les problèmes des pays en voie de se traduit notamment par une croûte
problème du partage des eaux du Jour- développement. Au-delà de ces considéra- hautement affinée (comme disent les métal-
dain, etc. tions générales, c’est bien aux échelles lurgistes),faite de matériaux très rares dans
La 2ème vertu de l’ouvrage est d’asso- régionales et locales que les solutions le système solaire, très bien classés aujour-
cier de nombreuses compétences dans un devront être trouvées. Dans cette perspec- d’hui dans la diversité des types de roches.
cadre d’approche pluridisciplinaire. Sous tive, cet ouvrage, matière à information et Après avoir échappé à une collision fatale
l’égide de G. de Marsily, animateur, le grou- à réflexion, est le bienvenu avec une autre planète qui aurait conduit
pe de travail comprenait 10 personnes La Rédaction à la naissance de la Lune, on aboutit à l’or-
issues de divers milieux allant de la ganisation actuelle en noyau métallique,
recherche jusqu’à l’industrie. En outre, plus manteau rocheux et croûte primitive.
de 15 personnes ont participé à la rédac- Autobiographie de la Terre. Avec le grand et le petit, c’est le domai-
tion des chapitres 3 et 4, une quarantaine Marcia Bjornerud. ne de la mesure qui est abordé, à toutes
ont assumé les encadrés et près d’une ving- Dunod, Coll. Quai des sciences, 2006, 252 p. les échelles, depuis celle de la géométrie
taine ont été auditionnées. de la Terre (« Toiser la Terre ») jusqu’à l’échel-
Il n’est pas courant qu’un enseignant du
Le découpage de l’ouvrage est simple, le microscopique (bulles et isotopes), en
supérieur se penche « amoureusement » sur
organisé en quatre chapitres. Outre le passant par le jeu des fractales et les
notre planète Terre et nous fasse partager
chapitre 1 déjà évoqué, le chapitre 2 est mesures rétroactives pour comprendre le
cette passion avec un grand souci de se
consacré aux écosystèmes aquatiques, le passé. Les mélanges et tris ont continuel-
mettre à la portée du plus grand nombre,en
lement opéré sur Terre, dans ces matériaux
chapitre 3 à eau et santé et le chapitre 4 à abordant le sujet d’une façon originale et
qui sont une rareté à l’échelle de l’univers.
eau et climat. Ces intitulés traduisent une pratique au travers de six angles de vue qui
La Terre est une anomalie, issue d’un bras-
volonté d’aborder les eaux continentales sont autant de chapitres : Le Tao de la Terre, sage efficace et d’un tri, suivi d’un rassem-
au travers de grands enjeux de société et Lire les roches,Le grand et le petit,Mélanges blement et d’un compactage des maté-
pas selon le découpage fréquent entre eaux et tris, Innovation et conservation, Force et riaux triés, puis de processus de fusion pour
de surface et eaux souterraines. faiblesse. Comme le rappelle l’auteur « La aboutir à l’organisation actuelle. Dans cet-
Ces grands enjeux sont largement Terre et sa myriade de sous-systèmes ont te évolution, la présence d’eau est un fac-
conditionnés par des indicateurs majeurs à appris à contrôler l’énergie et à équilibrer teur essentiel et une des plus remarquables
commencer par la progression de la démo- les opposés : mélange et séparation, grand caractéristiques de la Terre est l’équilibre
graphie mondiale, qui risque de passer de et petit,coopération et compétition,conser- approximatif entre les processus internes
6 milliards d’individus actuellement à 9 mil- vation et innovation ». Toute cela aboutit (tectoniques) et externes (climatiques). Une
liards en 2050.Si les volumes d’eau terrestre à un étonnant système de contrôle et d’équi- chaîne de montagnes s’érode presque aus-
globaux semblent en mesure de faire face à libre qui implique les océans, l’atmosphère, si rapidement qu’elle grandit.
cette évolution, il paraît clair que la situa- la biosphère et la Terre solide.
Les forces de la conservation et de l’in-
tion est tout autre régionalement,d’autant On pourrait arrêter là cette note de novation ont été constamment à l’œuvre
que les fortes croissances de population lecture : un livre foisonnant, à lire tran- dans le passé de la Terre. En ce qui concer-
risquent d’intervenir précisément dans les quillement et pas à feuilleter comme on le ne la biosphère, les premières ont plutôt
régions qui sont déjà sous tension. Et ce fait avec tant d’autres,en se laissant condui- conduit à des périodes de stabilité, les
diagnostic ne tient pas compte du milliard re par ce regard original. Et pourtant, il faut secondes à des phases de stress qui sont à
d’individus qui d’ores et déjà n’ont pas accès bien dire quelques mots des contenus. la source même de l’innovation. L’histoire de
à l’eau et des 2,5 milliards qui ne disposent D’abord l’avantage de la Terre par rapport à la vie est jalonnée de ces phases succes-
pas d’un assainissement satisfaisant. d’autre planètes, sous l’angle thermique : sives, à commencer par le passage d’une
Autres indicateurs forts : une surface relativement petite qui limite atmosphère dominée par le gaz carbonique
les effets du changement climatique et de les pertes de chaleur et sa chaleur interne au Précambrien,à une atmosphère dominée
la poursuite des émissions anthropiques radioactive. La taille et la productivité de la par l’oxygène. Ce changement est à l’origi-
de gaz à effet de serre, avec l’incertitude biosphère, gage de pérennité. À la diffé- ne des dépôts considérables de fer rubané
sur les effets à l’échelle régionale et sur la rence de la froide et poussiéreuse planète à l’échelle mondiale, un fer initialement
fréquence des catastrophes ; Mars où l’équilibre terrestre n’a pu s’ins- dissous en grande quantité dans l’océan et
taller. Et pourtant la Terre a frôlé par deux qui s’est trouvé progressivement insoluble.
la question de l’agriculture et de l’ali- fois la catastrophe : au Précambien supé- La modification de l’atmosphère a aussi été
mentation humaine avec aujourd’hui un rieur (750-600 Ma) avec l’épisode d’engla- à l’origine de la couche stratosphérique
petit milliard d’individus sous-alimentés, cement généralisé (« Snowball Earth ») qui d’ozone, si essentielle pour la vie.
les solutions étant à rechercher dans a peut-être gelé l’ensemble des océans et
l’accroissement des surfaces cultivées et Le dernier chapitre, Force et faiblesse,
lors de la crise de l’oxygène au Permo-Trias est plus une réflexion historique et philo-
l’augmentation des rendements (OGM) ; responsable de la grande extinction de sophique sur la nature bienveillante, mal-
la qualité des eaux, notamment la conta- masse qu’a connu la Terre à cette époque. veillante ou neutre. On est passé d’une Ter-
mination microbienne et le traitement Lire les roches,c’est aller à leur rencontre re chaotique à une Terre mesurable (XIXe
des eaux. comme en témoignent les grands anciens siècle) et de nouveau aujourd’hui à une
Les recommandations, dont il existe James C.Hutton et Charles Lyell,pour abou- Terre infinie dans sa complexité et indomp-
également une version anglaise, concer- tir à leur classement, leur formation, leur table. Maintenant que nous savons que la
nent la recherche, l’administration de la âge. La très grande organisation de la Terre Terre est tout sauf simple, prévisible et 107

Géologues n°152
rubriques

contrôlable, notre responsabilité devant naturels sont grandement dus à l’homme idée originale pour familiariser le grand public
les générations futures est grande. C’est et à son aveuglement. Ses arguments sont avec cette notion de développement durable
sur cet épilogue « Terre d’autrefois, Terre développés tout au long du livre et en appliquée notamment aux domaines des
du futur » que ce conclut ce livre qui se lit particulier dans une partie du chapitre 1 sciences de la Terre et de l’environnement.
comme un roman et dont la lecture est intitulée « les causes anthropiques de Les exemples et points de vue sont d’autant
vivement recommandée l’augmentation apparente des catastrophes plus variés qu’il a été fait appel, pour
La Rédaction naturelles » : explosion démographique, collaborer à cet ouvrage à 95 auteurs dont
urbanisation galopante, sous-développe- un certain nombre de personnalités. D’une
ment et dégradation de l’environnement. façon générale, les présentations tiennent
Curiosités géologiques de Mayotte. Tout ceci, sans parler des catastrophes sur deux pages (deux jours),certaines sur un
Pierrick Graviou et Jean-Philippe Rançon, technologiques : marées noires, explosions, plus grand nombre.
avec la collaboration de Nicolas Hubert. Tchernobyl, ruptures de barrages, pollu- Mais cet almanach, publié par le
Éditions du Baobab et BRGM Éditions, 2006, tions diffuses dont les conséquences BURGÉAP pour son 60ème anniversaire, est
95 p. désastreuses diverses, notamment aussi un ouvrage de promotion de cette
écologiques, sont soulignées. société spécialisée en ingénierie de l’envi-
Après avoir lu ce guide, c’est certain
que l’on a envie d’aller à Mayotte… si le Le cœur du livre constitue une revue ronnement et dans l’aide publique au déve-
territoire n’était pas si éloigné de la métro- très complète de ces « désastres naturels » : loppement. Un tiers des articles environ
pole. Qu’importe, ce guide est pour tous, les catastrophes géophysiques (séismes, sont donc signés par des membres du
habitants, les touristes, tous ceux qui sont volcanisme, raz-de-marée) dans le chapitre groupe BURGÉAP et,parmi ceux-ci,quelques-
soucieux de nature et de découverte. 2, catastrophes météorologiques (cyclones uns d’un dizaine de pages (couvrant autant
et ouragans, inondations) dans le chapitre de jours de l’almanach),sortes de références
Quelques chapitres généraux pour 3, et sécheresse et désertification dans le techniques. Cette remarque n’enlève rien à
rentrer dans le sujet : l’histoire géologique chapitre 4. Au cours de cette revue, le rôle l’intérêt de cet almanach, ni à la diversité
de Mayotte, le volcanisme et les roches (des de l’homme dans les causes et les consé- des auteurs provenant de divers organismes
clefs pour comprendre), les roches et les quences de ces catastrophes : aménage- (ADEME, IFREMER, CSTB, IRD, CNRS,
minéraux et un aperçu de la diversité de ments, déforestation, surpaturage, dégra- CREDES…), des universités ou des mondes
Mayotte, faune et flore. dation des sols, glissements de terrain et de l’agriculture, du pétrole, de la politique
Le plat de résistance, ce sont les 22 avalanches devient apparemment de plus (Brice Lalonde, Corinne Lepage) ou des arts
sites géologiques remarquables sélection- en plus important. (Yann Artus-Bertrand).
nés, dont 16 sur Grande-Terre,5 sur Petite- Le dernier et volumineux chapitre inti- Les sujets abordés sont évidemment
Terre et 2 dans le Lagon.Tous les sites sont tulé « Changements globaux et désastreux très divers par leurs thèmes (ressources
présentés sur deux pages avec un intro- naturels » parle en fait du réchauffement énergétiques et minières, énergies renou-
ductif, un descriptif plus détaillé du site, climatique à travers les catastrophes du velables, eau, pollutions diverses…), leur
une rubrique « A voir également » et plu- passé, l’effet de serre, les perturbations situation géographique (Cap Vert, Mada-
sieurs photos et figures. Presque tous les anthropogéniques et leurs conséquences. gascar, Ghana, France, Italie, Mexique,
sites sont des sites naturels dans lesquels Une importante bibliographie (14 p.) et un Bénin, Moyen-Orient, etc.), sans omettre
les formes volcaniques (coulée, dôme, dyke, index terminent le volume. des sujets plus généraux (temps, espace,
neck, chaos rocheux, cratère, maar…) domi-
L’ouvrage est agréable à lire et large- démographie, biodiversité, transports,
nent. Mais il y a aussi les matériaux de
ment illustré (photos, cartes, croquis, microcrédit…) et des actions concrètes
construction, sables et grès de plage, la
courbes, tableaux) et sa lecture est très réalisées ou à entreprendre.
mangrove (milieu naturel conditionné par
la géologie), des zones d’altération et des recommandée à un large public. Le Une lecture très intéressante donc et
terres, une retenue d’eau, sans oublier une géologue naturaliste que je suis regrette susceptible de sensibiliser l’opinion aux
passe et un îlot dans le lagon. cependant son orientation un peu trop nombreux domaines abordés. La présen-
anthropocentrique (à mon goût). La cou- tation, très soignée, s’accompagne de
Allez, en route pour la découverte, leur verte de sa couverture indique nombreuses photos et de notules de bas de
mais n’oubliez pas quelques règles de d’ailleurs clairement que Dunod le situe page qui élargissent la réflexion. Par
bonne conduite car ces milieux sont dans les sciences de la Vie et non dans les
fragiles ailleurs, le récit des voyages de Charles
sciences de la Terre (couverture marron) Darwin, sous forme de petits encarts toutes
La Rédaction les deux pages, constitue une sorte de fil
Michel Bornuat
rouge. Il s’intéressait à tout, entre autres
Des catastrophes naturelles ? aux problèmes environnementaux qui ne
Almanach BURGÉAP du développement datent pas d’hier !
François Ramade.
durable. Sciences et pratiques. En conclusion,un achat à recommander
Éd. Dunod, 2006, 258 p.
Sous la direction de Jean-Claude Andréini. à tout le monde, sorte de livre de chevet
Le point d’interrogation dans le titre de pour une prise de conscience commune de
ce précis n’est pas anodin. L’auteur y défend Éd. BURGÉAP, 2006, 383 p. l’importance et de l’urgence du débat
en effet assez largement la thèse selon Trois cent quatre vingt trois pages, soit planétaire sur le développement durable
laquelle les dommages humains, écono- une page par jour de l’année, plus un avant-
108 miques et environnementaux des désastres propos et une table des matières. Voilà une Michel Bornuat

Géologues n°152
rubriques

se en état, ainsi que les grandes phases et roches associées, les granites et roches
Sites et sols pollués. Outils juridiques, d’investigation : visite préliminaire et étu- associées et les roches métamorphiques ;
techniques et financiers de la remise en de historique, diagnostic initial, classement les roches sédimentaires sont renvoyées
état des sites pollués. des sites et hiérarchisation des actions de à la 4ème partie consacrée au processus
gestion, diagnostic approfondi, évaluation sédimentaire.
Jean-Pierre Boivin et Jacques Ricour.
détaillée des risques et définition des La 3ème partie est celle de la géody-
Ed. Le Moniteur. Coll. Guides juridiques, 2005, objectifs de mise en sécurité, définition des namique et les phénomènes sont abor-
315 pages. mesures conservatoires et de gestion à dés à différents niveaux : constitution et
Face à la dégradation des sols et des mettre en oeuvre. Viennent ensuite une origine du globe terrestre, continents et
eaux du territoire sous la pression des acti- présentation des différentes catégories océans, tectonique aux différentes
vités industrielles,de l’agriculture intensive, de débiteurs de la remise en état, échelles, tectonique des plaques et convec-
de l’urbanisation, des transports, du tou- des commentaires sur prescriptions et tion mantellique. Le processus sédimen-
risme, sans oublier les infrastructures de sanctions, un aperçu des moyens financiers taire, 4ème partie, est abordé par l’érosion
défense et le désengagement foncier du auxquels il peut être fait appel (provisions (dégradation des continents), avec ses
ministère correspondant, le législateur a et garanties financières au niveau privé, mécanismes et le rôle de l’eau. Les pro-
choisi de mettre en place une politique financements européens ou nationaux), duits de cette dégradation se sédimen-
concernant les sites et sols pollués et de les modalités techniques de la remise en tent en particulier dans le milieu marin
promulguer une réglementation adaptée. état, et les instruments de la pérennisa- actuel et on en vient naturellement à
Trois pays étrangers (États-Unis, Pays-Bas tion de la remise en état (outils de droit aborder l’évolution des sédiments aux
et Royaume-Uni) sont sommairement privé ou de droit public). roches sédimentaires avec la présentation
présentés, ce qui permet de situer leur Cet ouvrage constitue un excellent d’une classification sommaire, puis les
contexte réglementaire et leurs pratiques manuel de référence auquel tous les environnements de dépôt (faciès et
par comparaison avec la France. acteurs impliqués sur le thème des sites bassins sédimentaires).
En France, la base est la loi (76-663 du et sols pollués peuvent faire appel, et ils La 5ème partie est pleinement d’actuali-
19/7/1976) sur les installations classées pour très nombreux té puisqu’elle est consacrée à l’atmosphère,
la protection de l’environnement (ICPE) et aux climats (actuels et anciens présentés
son décret d’application (77-1133 du 21/9/197. La Rédaction
par grande période géologique) et à
Viennent ensuite les circulaires des l’Homme.Sont également abordés les cycles
3/12/1993, 3/4/1996 et 10/12/1999 concer- Objets,méthodes et modèles. 12ème édition. biogéochimiques de l’eau, du carbone et
nant la politique nationale de traitement et Jean Dercourt, Jacques Paquet, Pierre du soufre essentiellement. L’ouvrage se
de réhabilitation des sites pollués, puis la loi Thomas, Cyril Langlois. termine par une 6ème partie consacrée à la
du 30/7/2003 sur la remise en état des sites géologie appliquée (hydrocarbures, mine,
industriels, en distinguant les installations Dunod, 2006, 534 pages.
eau, géothermie, génie civil).
nouvelles et les installations anciennes. La Cette 12ème édition du manuel associe
stratégie retenue repose sur la prévention quatre auteurs au lieu de deux (J. Dercourt De ce traité, qui a vocation à couvrir
des pollutions futures, un traitement et J. Paquet) antérieurement, l’objectif étant l’ensemble du champ des sciences de la
fondé sur une démarche d’évaluation des d’intégrer la Terre dans son contexte pla- Terre, on retiendra d’abord que l’on a privi-
risques, et un inventaire des sites pollués nétaire et solaire et de développer les légié la présentation d’une géologie active,
(BASOL) complété par une base de don- modèles issus de l’étude des dynamiques mettant l’accent sur les processus et la
nées des sites (BASIAS). internes et externes de toutes les enve- dynamique des phénomènes, beaucoup
loppes terrestres. C’est ainsi que, tout natu- plus que les classements d’objets géolo-
Les objectifs de la remise en état giques dans leur diversité. Rappelons que
traduisent la nécessité d’un arbitrage entre rellement, la Terre est d’abord présentée
dans l’univers et que sont abordées les c’est ainsi que la classification des roches
deux types d’approche : 1) la restauration de sédimentaires, par exemple, se retrouve
l’état initial, 2) la prise en compte de question de temps géologique (et de sa
mesure), d’univers – étoiles et planètes et intégrée au processus sédimentaire. On
l’affectation future des terrains. Comme la retiendra aussi le souci de donner une
première approche est peu réaliste, c’est de système solaire.
vision moderne des connaissances, sans
la seconde qui est privilégiée, de façon La seconde partie de l’ouvrage traite
s’appesantir sur l’évolution des idées ou les
pragmatique et sous deux aspects : la de minéralogie et de pétrologie. On y
héritages du passé. Enfin, on doit remer-
prévention des risques et nuisances au retrouve non seulement des bases de
cier les auteurs d’avoir consacré une partie
sens des intérêts mentionnés dans le Code classification des minéraux et des roches,
à la géologie appliquée. Bien sûr, le lecteur
de l’environnement, et la prise en compte mais également les conditions de genèse
pourra toujours trouver ici ou là des
des usages futurs du site. et la géodynamique associée. Mais tous
manques. Pour notre part, nous regrettons
La trame de l’ouvrage est à la fois juri- les thèmes ne sont pas couverts. Si la
qu’il ne soit pas plus fait état du travail que
dique et technique, sans toutefois rentrer minéralogie débute classiquement par une
représente la collecte des données sur le
dans le détail des différentes techniques présentation des systèmes cristallins, elle
terrain et en laboratoire, leur interpréta-
de dépollution. Ainsi, après les chapitres n’aborde ensuite que les silicates et les
tion et leur mise en forme ; faire état des
consacrés à la politique et à la réglemen- carbonates, pas les autres familles. En ce
difficultés et de la patience requise, mais
tation, et aux circonstances de la remise qui concerne les roches, après une intro-
aussi de la passion de la découverte et du
en état, les auteurs abordent les outils tech- duction sur les magmas et les roches
cheminement patient vers une meilleure 109
niques pour définir les objectifs de la remi- magmatiques, sont abordés les basaltes

Géologues n°152
rubriques

compréhension des phénomènes. les apports terrigènes, pollution des eaux, qui pourra y trouver des explications plus
Quoiqu’il en soit,un manuel de grande impact de l’extraction du corail et du bois à sa mesure que dans des répertoires plus
qualité, avec une iconographie abondante de mangrove, surpêche côtière. Elle conduit spécialisés, donc moins accessibles. Un
(surtout des figures), en deux couleurs aussi à des conflits d’usage que les auteurs ouvrage à recommander comme source
seulement, coûts d’impression obligent rapportent à trois types : conflit de proxi- d’informations et d’explications à tous ceux
mité entre une station touristique et une qui s’intéressent à la géographie
La Rédaction zone urbaine ou industrielle, impact de la
La Rédaction
pression touristique sur l’environnement
Les littoraux antillais : des enjeux de l’amé- et la pêche, confrontation de tous les sec-
nagement à la gestion durable. teurs de développement :urbain,agricole et Travaux pratiques de géologie pour géo-
industrielle, englobant la pêche. Face à graphes.
Michel Deche et Pascal Saffache.
cette situation, une politique de gestion Pascal Saffache.
Ibis Rouge Éditions, 2005, 116 p. intégrée des littoraux s’avère indispensable
Documents pédagogiques – Géographie.
Parlant des Antilles,nous avons tous en afin de gérer les ressources et de lutter
Ibis Rouge Editions, Presses universitaires
tête des plages de rêve, une température contre la dégradation de l’environnement.
créoles – GEREC/F, 2004, 62 pages.
idyllique et une mer d’un bleu sans fin.La réa- Cette politique s’exprime par la délimita-
lité des littoraux antillais est plus contrastée, tion d’aires où les activités sont réglemen- Ce manuel se consacre essentiellement
comme le montre cet ouvrage que l’on peut tées, notamment des réserves terrestres et au travail sur la carte géologique à laquelle
considérer comme un manuel à la fois d’in- marines. Sur ce point, l’ouvrage comporte les trois premiers chapitres sont consacrés :
troduction et de sensibilisation au sujet.Il ne une comparaison instructive de la régle- présentation de la carte (stratigraphie et
s’agit pas seulement de décrire les milieux, mentation en vigueur dans divers pays (Haï- chronologie absolue), renseignements
mais également de présenter l’aménagement ti,Antilles anglophones,Antilles françaises). apportés par la carte (il s’agit principale-
du littoral, avant d’aborder les questions ment d’une explication de la légende :
Cet ouvrage, écrit de façon simple et
de gestion durable de cet environnement notation des terrains, faciès, structure),
didactique devrait atteindre son but, à
fragile,ce qui conduit à considérer le littoral à reconnaissance des structures géologiques
savoir sensibiliser un large public à la fra-
la fois comme milieu naturel,environnement (structures horizontales,plissées ou faillées).
gilité du milieu littoral antillais. Pour une
aménagé et espace juridique. L’établissement des coupes (chapitre 4)
prochaine édition, on pourrait souhaiter
dérive directement de la carte. Le dernier
La présentation des milieux littoraux une présentation détaillée de quelques
chapitre (5) porte sur le rôle de la géologie
inclut une typologie des paysages insulaires études de cas significatives qui pourraient
(structurale) dans l’analyse morphologique.
(plages et anses sablonneuses, récifs coral- renforcer un propos qui peut être perçu
liens,mangroves et anses vaseuses,falaises) comme trop général Il s’agit d’un ouvrage didactique
et une présentation du milieu dynamique simple, destiné à fournir aux géographes
La Rédaction des connaissances de base en géologie. Le
qu’est la mer caraïbe. L’examen des diffé-
rents types d’aménagement montre que public peut être élargi à tous ceux qui
les littoraux sont devenus des territoires de Dictionnaire de géographie de l’environ- veulent acquérir quelques notions de base
production, de tourisme et de loisirs, nement. sur ces sujets
comme le montre l’exemple du littoral de Pascal Saffache. La Rédaction
la Martinique avec ses 34,4 km d’agglomé-
CRDP Martinique, 2004, 203p.
ration, 9,6 km de routes littorales souvent
bordées d’enrochements, 5 km de zones L’auteur est un habitué de la pédagogie Les eaux minérales et les eaux de source de
industrielles littorales et 5 km d’infrastruc- par les dictionnaires puisqu’il a publié trois France.
tures portuaires. dictionnaires simplifiés entre 2001 et 2002, BRGM, 2005.
respectivement consacrés à la géographie
Ce sont les villes qui concentrent les Il s’agit d’une carte à 1.1 000 000 qui
physique, la géographie humaine et l’amé-
aménagements littoraux et qui permet- donne la localisation des sites sur un fonds
nagement. Le présent ouvrage, deux fois
tent de parler de suraménagement, même géologique simplifié (volcanisme, socle,
plus épais que les autres, a vocation à cou-
si un effort est fait pour embellir les fronts Carbonifère, Trias, Jurassique, Crétacé,
vrir largement le champ de la géographie
de mer et tendre vers une meilleure Tertiaire, Quaternaire, Alluvions). Ces sites
de l’environnement, ce qui le conduit à
intégration urbanistique, tout cela dans un sont distingués par nature (établissement
faire des incursions dans la géologie, la
cadre législatif qui s’est renforcé au fil thermal, unité d’embouteillage d’eau
chimie de l’environnement, la biologie, etc.
des années. C’est le cas dans les Antilles minérale, ou d’eau de source) et selon la
françaises, alors que le retard législatif est Mais le souci pédagogique ne s’arrête physico-chimie de l’eau (anions et cations
net dans les autres îles de la Caraïbe. Les pas là, puisque la présentation intègre des majeurs, températures, minéralisation
aménagements touristiques sont plus loca- indicateurs classiques d’un dictionnaire, totale, dégagement gazeux). Un cartouche
lisés, qu’il s’agisse de coquilles hôtelières tels que le genre des noms ou des locu- renvoie à une documentation de base et
ou de stations. La pêche reste le parent tions. Globalement, plus de 4 000 mots et une série de photos représentent quelques
pauvre des aménagements littoraux. locutions sont expliqués, en des termes sites types. Une carte qui peut certes être
accessibles à tous. Certes, il est précisé que affichée au mur, mais également donner
Toute cette pression anthropique se
le public visé est celui des étudiants et des lieu à des analyses régionales ou ponc-
traduit par une dégradation des milieux
enseignants géographes, mais cet ouvrage tuelles plus fines
110 littoraux : asphyxie des écosystèmes par
s’adresse aussi au grand public curieux

Géologues n°152
UNION FRANÇAISE DES GÉOLOGUES
Maison de la Géologie - 77 rue Claude Bernard - 75005 Paris

☎ 01 47 07 91 95 Fax 01 47 07 91 93 Courriel : ufg@ufg.asso.fr Internet : www.ufg.asso.fr

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Membre ❑ actif* ❑ associé** ❑ Junior*** de l'Union Française des Géologues
dans une section ❑ Aménagement, Génie civil ❑ Eau ❑ Enseignement et recherche
❑ Environnement ❑ Géophysique ❑ Hydrocarbures ❑ Mines et carrières

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Adhésion 2007 : Actif : 52 € - Retraité : 35 € - Demandeur d'emploi : 35 € - Étudiant : 22 €
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Parrain Parrain
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échéant, de la carte d'étudiant de l'année ou du dernier
Nom, date, signature Nom, date, signature justificatif ASSEDIC.

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la géologie ou d'une autre science de la Terre.
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EXTRAITS DU CODE DE DÉONTOLOGIE PROFESSIONNELLE

TITRE 1 - DÉFINITIONS ET DOMAINES D'EXERCICE DE LA GÉOLOGIE ET DU GÉOLOGUE


La géologie est définie comme suit : science qui traite de la composition, de la structure, de l'histoire et de l'évolution de la Terre. Elle inclut les applications qui ont
pour but de concourir à la découvrir, à tirer des composants solides et fluides de la croûte terrestre et son énergie géothermique, d'améliorer l'environnement humain et sa
sécurité. Elle s'intéresse à l'étude du sol et du sous-sol, des planètes, astéroïdes, satellites naturels et météorites. Les investigations géologiques sont conduites grâce à des
techniques et méthodes propres à la géologie ou qui relèvent d'autres disciplines telles que la biologie, la géophysique, la mécanique des sols et des roches, …
Est géologue toute personne possédant des diplômes et/ou l'expérience professionnelle indispensable à la pratique du métier. Est géologue professionnel
tout géologue tirant normalement l'essentiel de ses ressources de la pratique de ce métier. Les diplômes, titres ou qualification requis au minimum pour être considéré
comme géologue professionnel sont les suivants : Bac + 5 ou diplôme équivalent en géologie ou en une discipline étroitement liée à elle ; diplôme d'une école d'ingénieurs
en géologie ou, exceptionnellement, qualification résultant d'une pratique de la géologie pendant au moins huit années.

TITRE 2 - APPLICATION
Le respect du présent code est obligatoire pour les membres de l'Union Française des Géologues, ci-après dénommés "Géologue".

TITRE 3 - RÈGLES MORALES DU GÉOLOGUE


Le géologue doit être conscient et faire prendre conscience du degré de certitude inhérent à la nature complexe des phénomènes naturels qui peut affecter sa
conclusion. Il doit utiliser les moyens d'observation nécessaires et disponibles pour résoudre le problème posé, et agir conformément aux règles de l'art.
Le géologue est responsable de sa tâche, de sa fonction et de ses décisions, professionnellement et du point de vue des conséquences qui en découlent. Il est
responsable de l'image de marque qu’il donne de la profession, des conseils qu'il donne et de ses écrits qui l'engagent personnellement et peuvent mettre en cause la col-
lectivité géologique. Les géologues doivent faire preuve d'esprit de corps sans chercher à masquer les incertitudes ou divergences d'interprétation qui pourraient apparaître
devant un problème. Ils sont responsables de leur prise de position ou de l'absence de prise de position sur les questions qui sont du ressort de la profession.
Le géologue enseignant est responsable de la qualité de son enseignement et de son adaptation aux débouchés prévisibles, de ses recherches et de leurs applica-
tions, de la probité rigoureuse en matière de propriété scientifique, du sérieux dans l'examen des dossiers et de la probité de ses rapports écrits ou oraux. Le géologue
praticien doit avoir le souci de la qualité de ses travaux et est responsable de sa propre formation permanente et de celle de ses collaborateurs, stagiaires et étudiants.

TITRE 4 - DEVOIRS DU GÉOLOGUE


Le géologue se refuse à effectuer ou à faire effectuer des travaux dont les conséquences nuiraient à la sécurité des personnes et des biens. Il ne doit jamais don-
ner sciemment une information fausse. Il évite et déconseille les déclarations à sensation exagérées ou injustifiées. Il ne diffuse pas d'informations volontairement partielles.
Il n'autorise pas la diffusion de ses travaux s'il présume qu'ils seront utilisés à des fins hasardeuses ou malhonnêtes. Il signale les gisements minéralogiques, fossilifères ou
archéologiques remarquables qu'il rencontre de façon à en assurer la sauvegarde. Hors de France, il adhère aux règles de déontologie du pays d'accueil, tout en restant
soumis au présent Code.
La conscience professionnelle est la règle primordiale de tout géologue. Il refuse toute mission incompatible avec les règles de l'éthique. Il évite toute situation incom-
patible avec ses obligations. Il ne donne des conseils ou avis que s'il estime avoir disposé de tous les moyens nécessaires. Il est tenu au secret professionnel. Il fait appel ou
conseille de faire appel à des spécialistes chaque fois que les intérêts en jeu s'en trouvent mieux servis. Il n'accepte pas une commission occulte en relation avec un travail,
ni d'avantages dissimulés pour adresser un client à un spécialiste. Si, après avoir rendu ses conclusions, il a connaissance du fait qu'elles ne semblent pas entièrement
suivies, il doit informer la personne passant outre des risques prévisibles. S'il participe à l'acte de construction, il doit respecter les prescriptions légales relatives à la responsabilité
et à l'assurance dans ce domaine. S'il est amené à pratiquer plusieurs activités de nature différente, elles doivent être parfaitement distinctes et connues. Le géologue se doit
de prêter son concours aux actions d'intérêt général en faveur de la géologie et d'encourager les géologues non membres de l'UFG à respecter ce code. Il ne ternit la répu-
tation ou ne discrédite les travaux d'un confrère sans justification. Il accorde à ses confrères son assistance morale et intellectuelle. Il s'interdit toute signature de
complaisance. Il s'assure que le mérite d'un travail est attribué à son véritable auteur. Toute concurrence déloyale et publicité mensongère sont interdites.
Les géologues doivent entretenir de bons rapports avec les membres des professions voisines.
Le géologue, membre de l'UFG parrainant une adhésion, s'assure que le candidat entend respecter ce code. Il ne peut couvrir par son silence des violations flagrantes
de ce code.
Le géologue veille à ce que ses collaborateurs, stagiaires et élèves acquièrent par eux-mêmes les connaissances nécessaires pour améliorer leur valeur technique ; il
met à leur disposition les documents utiles et leur accorde un temps suffisant. Toute attestation de complaisance donnée à un stagiaire ou étudiant est considérée
comme une atteinte à ce Code.

TITRE 5 - RÈGLES PARTICULIÈRES AUX DIFFÉRENTS MOTIFS D'EXERCICE DE LA GÉOLOGIE


Agissant comme expert, arbitre ou conciliateur au titre extrajudiciaire, le géologue doit refuser les situations où il est "juge et partie". Il se prononce en toute
indépendance. Il recherche les solutions de conciliation chaque fois que c'est possible.

TITRE 6 - NON RESPECT DU PRÉSENT CODE


Le non respect des prescriptions du présent code entraînera une sanction.
En cas d'infraction reconnue, le conseil d'administration est saisi et peut décider un non-lieu, un avertissement, une suspension pour une durée déterminée ou
l'exclusion définitive.

TITRE 7 - ADHÉSION AU PRÉSENT CODE


Tout membre de l'UFG doit adhérer au présent code.

Je certifie avoir pris connaissance de l’ensemble du code de déontologie tel qu’il figure sur le site internet de l’UFG
et en accepter les termes.

Le Signature
Résultats du concours photos de l’UFG

Volcan au milieu d’un salar (cliché Christian Vallier).


1) La « Côte oubliée » est la seule partie du pourtour de la Grande Terre en Nouvelle-
Calédonie sans route ni habitations. Les mouvements tectoniques et eustatiques y favo-
risent le développement d’un platier récifal bordant les massifs péridotitiques. Des
formes tout à fait inhabituelles de coraux s’y présentent comme ceux photographiés ici.
Photo : Clément Schmitt.

Volcanisme récent sur roches du socle en Arabie Saoudite (cliché Gérard Sustrac).

2) Dépression éolienne par déflection du vent ; surface du rocher éolisé. Tagrera - Sud
algérien.
Photo : Georges Boutes.

3) Lors de la phase orogénique éocène,dans la partie nord-est de la Nouvelle-Calédonie,


les terrains turbiditiques volcanosédimentaires ont été charriés dans une zone de
subduction puis exhumés pour former les plus hautes montagnes du territoire (1 600 m
d’altitude). Cette région reste l’une des plus reculée et inexplorée, uniquement acces-
Mineurs d’or locaux utilisant le vent pour séparer l’or du stérile (cliché Noël White). sible le long des cours d’eau (creeks). Région de Poindimié - Nouvelle-Calédonie.
Photo : Clément Schmitt.

Mineur local extrayant de l’or au Burkina Faso


(cliché Noël White). 4) La ligne sismique est superposée à un bateau de survie (supply boat) de la Mer du Nord
et à une tête de puits prise sur un forage du piémont pyrénéen dans les années 1980.
Photomontage. Photo : Claude Bacchiana.

Camion 4x4 enlisé lors du passage d’une rivière à gué 5) Tunnel de lave dégagé par l’érosion. Dimmuborgir, Myvatn – Islande.
(cliché Gérard Delorme). Photo : Georges Boutes.
Numéro 152 - Mars 2007 - 16 € - ISSN 0016.7916 - Trimestriel

Géologues n°152 (01 • mars 2007)


REVUE OFFICIELLE DE L’UNION FRANÇAISE DES GÉOLOGUES

REVUE OFFICIELLE DE L’UNION FRANÇAISE des GÉOLOGUES

Spécial géologie minière

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