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Tassa Riscossa - Taxe Perçue.

ASTI CPO

N° 72

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2

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Direttore Responsabile don Francesco Ricossa
Autorizz. Tribunale di Ivrea n. 116 del 24-2-84 En couverture : la messe de saint Grégoire le Grand
Stampa: - Alma tipografica Villanova M.vì.
Le présent numéro a été achevé
(Jacopo Zucchi, 1575 Rome, SS. Trinità dei Pelle-
d’être rédigé le 3/01/2023 grini).

Sommaire

Éditorial p. 2
Comment cet homme peut-il être “saint”… p. 4
Le pape Adrien VI : cinquième centenaire 1522-2022 p. 51
“Avec Vous je m’offre aussi” p. 55
Les Frères de l’Institut p. 67
RECENSIONS
“L’histoire des Traditionalistes” d’Yves Chiron p. 70
Une clarification qui s’impose p. 75
Saint Joseph Benoît Cottolengo p. 75
VIE DE L’INSTITUT p. 79

Éditorial En 2023 aura lieu un autre anni-


versaire qui concerne de plus
près notre revue : c’était à Noël

C
hers lecteurs, nous nous achemi-
nons désormais vers la nouvelle 1983 que parut son premier nu-
année, et j’aurais espéré que ce- méro, nous nous approchons
nouveau numéro de Sodalitium serait donc du quarantième anniver-
arrivé chez vous avant la sainte fête de
Noël, mais... il en sera autrement. Nous
saire de notre bulletin.
avons pensé dédier notre calendrier bi-
lingue pour l’année 2023 au pape Léon
XIII, qui mourut en 1903, et à qui saint ments de grâce qui n’ont peut-être pas
Pie X succéda sur le trône de Pierre. fait de bruit, mais qui ont certainement
En 2023 aura lieu un autre anniver- une grande valeur au regard du mal
saire, qui concerne de plus près notre qui nous entoure. Certains parmi vous
revue : c’était à Noël 1983 que parut m’ont confié que la première rubrique
son premier numéro, nous nous appro- qu’ils lisent dans le bulletin est la “vie
chons donc du quarantième anniver- de l’Institut”, et au fond cela ne me dé-
saire de notre bulletin. Au cours de plaît pas, puisque, au-delà de l’énumé-
toutes ces années, nous avons constaté, ration (qui peut sembler froide) des
hélas, la continuelle aggravation de la noms, dates et événements, se trouve
situation dans l’Église et dans la so- en réalité la trace de nombreuses
ciété : la révolution avance, notamment grâces et de l’action surnaturelle de
grâce au modernisme, le traître de Dieu dans les âmes. Ce numéro est un
l’Église. Cependant, nous avons aussi peu particulier. J’avais promis la publi-
vécu et partagé avec vous plusieurs mo- cation d’une réponse à la série de 15 ar-
3

Adrien VI, son compatriote, qui fut élu


en 1522 et mourut en 1523, dernier
pape (légitime) non italien, qui siégea
sur le siège de Pierre dans une période
agitée et terrible pour l’Église comme
celle que nous vivons actuellement.
L’abbé Carandino dans ses recensions
continue à présenter la vie de plusieurs
saints piémontais, et dans ce numéro il
nous présente aussi la vie religieuse
telle qu’elle est vécue par les frères de
notre Institut. Par ailleurs, Sodalitium
comptera un nouveau collaborateur en
la personne de l’abbé Coradello, qui re-
cevra - si Dieu veut - l’ordination sacer-
dotale au cours de l’année 2023, rappe-
lant le grand trésor du Sacrifice de la
Messe et la manière d’y assister. J’es-
père que ce numéro pourra également
être une aide pour vos âmes et un sou-
tien pour votre foi, menacée par tant
de dangers.
La préparation à Noël, la belle et
chère fête de la naissance du Seigneur,
les fêtes qui suivront jusqu’à l’Épipha-
Le calendrier de Sodalitium 2023 nie, nous rappellent le cœur de notre
foi chrétienne : le mystère de l’Incarna-
ticles d’un confrère contre Mgr Benigni tion, mystère auquel est inséparable-
et les catholiques intégraux, et j’avais ment unie la très Sainte Vierge, à la-
même donné le sommaire (provisoire) quelle je recommande chacun de vous
de cette étude. Au-delà du motif ponc- ainsi que vos familles.
tuel de l’article, j’avais saisi l’occasion En la fête du Christ-Roi,
pour tracer un panorama des trente abbé Francesco Ricossa
premières années du XXe siècle dans
l’histoire de l’Église, quand se posèrent
les fondements éloignés de la crise
conciliaire qui mine l’Église de l’inté-
rieur, conduisant tant d’âmes à la
ruine. Le travail, alors déjà consistant,
est devenu encore plus important ;
c’est pourquoi il était vraiment impos-
sible de le publier dans ce numéro de
Sodalitium. Je me réserve donc de le
publier à part, ou dans un livre, ou
dans un numéro spécial du bulletin en-
tièrement dédié à la “défense de Mgr
Benigni”.
Mais dans le présent numéro de So-
dalitium les articles sur l’histoire de
l’Église ne manquent pas non plus : un
particulièrement lié à la crise actuelle,
sous la signature de l’abbé Giugni, est
dédié à la figure de Paul VI ; un autre,
de l’abbé Steenbergen, a pour but de
commémorer l’anniversaire du pape
4

Histoire Giovanni Battista Montini, de-


venu “pape” sous le nom de
Paul VI de 1963 à 1978 est le res-
ponsable de la destruction de la
Comment cet homme liturgie catholique et de sa doc-
peut-il être “saint”… trine suite au concile Vatican II.
Abbé Ugolino Giugni Dans cette article vous trouvez
comme une sorte d’“anti-fio-
“C et homme” dont je parlerai dans
cet article est Giovanni Battista
Montini, devenu “pape” sous le nom de
retti” des épisodes significatifs
de la vie de Montini qui en révè-
Paul VI de 1963 à 1978, responsable de lent l’esprit moderniste, nova-
la destruction de la liturgie catholique
et de sa doctrine suite au concile Vati- teur et révolutionnaire.
can II, avec toutes les réformes qu’il a
approuvées. Au cours des mois du
confinement plus ou moins forcé, parmi Moi-même je suis né, hélas, sous le
mes lectures j’ai eu l’occasion de lire le “pontificat” de Paul VI et n’ai donc au-
livre d’Yves Chiron Paul VI le Pape écar- cun souvenir de ce que devrait être un
telé, et j’ai recueilli jour après jour, vrai Pape ; depuis tout petit (j’avais 12
comme une sorte d’“anti-fioretti” des ans quand Montini mourut en 1978), je
épisodes significatifs de la vie de Mon- me souviens que Montini ne m’avait ja-
tini qui en révèlent l’esprit moderniste, mais inspiré de sympathie. Avant
novateur, révolutionnaire et contraire même que ma famille eût compris à
à la doctrine de l’Église. fond le problème posé par le concile et
Tout le monde sait tristement que eût embrassé en conséquence les posi-
G.B. Montini a été proclamé bienheu- tions “traditionalistes”, avant Mgr Le-
reux en 2014 et ensuite saint par Bergo- febvre et ensuite l’Institut M.B.C. - au-
glio le 14/10/2018 ; cette “canonisation” près desquels naquit par la suite ma vo-
a été l’un des actes les plus scandaleux cation sacerdotale - je sentais exprimer
de ces dernières années du “pontificat” autour de moi beaucoup de perplexités
bergoglien ; avec elle on a voulu claire- et de désarroi relativement à l’œuvre
ment canoniser - si tant est que cela fût gauchisante et novatrice de Montini (je
possible - le concile Vatican II par l’élé- me souviens, en particulier, que mon
vation sur les autels de ses principaux père trouvait scandaleux le discours de
artisans, d’abord Jean XXIII et ensuite Paul VI à l’occasion de l’enlèvement
Paul VI. Comment peuvent être des d’Aldo Moro par les Brigades Rouges).
“Saints” des “papes” qui ont favorisé
l’hérésie, pratiqué l’œcuménisme La position de l’Institut Mater Boni
condamné précédemment par l’Église, Consilii
détruit la liturgie catholique ; comment
peuvent-ils être des exemples de la Comme chacun sait, notre Institut
vertu de foi qu’ils auraient dû prati- embrasse la Thèse de Cassiciacum élabo-
quer de manière héroïque ? Pour qui rée par Mgr Guérard des Lauriers qui
veut approfondir la question, je rap- considère que les occupants du Siège
pelle qu’en 2018 le Centro Studi Da- Apostolique depuis 1965 à aujourd’hui
vide Albertario dédia son congrès an- n’ont pas formellement l’autorité dans
nuel précisément à cet événement (1) ; l’Église mais occupent seulement maté-
vous pouvez voir les vidéos (en italien) riellement le trône de Pierre. Cela veut
sur le canal GloriaTV de Sodalitium dire que les actes posés par ces “papes”
(https://www.gloria.tv/post/egC48iTR9S materialiter n’ont pas de valeur, et que,
f34VQyw7GnL6WsJ). par conséquent, les canonisations ac-
5

il suivait les cours à Brescia comme


élève externe en habits civils. “Il n’a
pas reçu l’enseignement scolastique
qui formait alors la base de l’enseigne-
ment ecclésiastique. Il n’a pas connu
non plus la vie en communauté qui in-
culque pour toujours certaines règles,
certaines disciplines, certaines habi-
tudes, il n’a pas vécu non plus cette sé-
paration du monde qui fait des années
de séminaire une coupure dans l’exis-
tence. Battista se forgera lui-même sa
discipline de vie. Intellectuellement il
restera l’autodidacte qu’il était avant
d’entrer au séminaire, et, se préparant
au sacerdoce il continuera à mêler des
La famille Montini : le père Giorgio, Giovanni Battista, lectures personnelles, profanes, aux
la mère Giuditta, Lodovico et Francesco lectures proprement religieuses” ( 2).
complies par eux doivent être considé- En note, l’auteur fait remarquer que
rées comme nulles et devront éventuel- malgré l’opinion opposée de Mgr Mac-
lement un jour être confirmées (ou chi, son hagiographe, qui a précisément
condamnées…) par un pape légitime. une vision hagiographique de Paul VI,
Cette position sur l’autorité dans et qui donc affirme à propos de la
l’Église explique comment il est possi- Somme Théologique que “peu d’évêques
ble que les modernistes qui occupent l’ont lue et annotée comme lui”, le té-
l’Église aient pu ou aient essayé de “ca- moignage de Jean Guitton (toujours
noniser” des personnages comme Paul cité en note), ami de Montini, qui disait
VI, Jean-Paul II, Teresa de Calcutta et que “Paul VI n’avait pas lu saint Tho-
Escrivá de Balaguer et tant d’autres qui mas (entretien avec l’auteur, le
ne sont pas des saints, et cette position 11/05/1991)” est plus crédible.
explique aussi comment Paul VI a pu • Études fragmentaires entre Ros-
faire ce qu’il a fait n’étant pas lui-même mini et Semeria. «Une partie de son
formellement pape. Un vrai pape devra temps était consacrée à sa formation
un jour - quand Dieu voudra - mettre en sacerdotale. Une formation forcément
ordre tout cela et enlever des autels les dispersée. Le père Caresana veilla à ce
faux saints “canonisés” par les moder- que les études solitaires de son protégé
nistes ; on remarque - en passant - que couvrent toutes les matières ensei-
beaucoup de ces “Saints” modernistes gnées au séminaire mais ce fut évidem-
ont bénéficié de la dispense des mira- ment parcellaire et discontinu. D’au-
cles (nécessaires pour la canonisation)
et pour tous aussi de la dispense de la Giovanni Battista Montini en 1916 avec des compa-
sainteté… entendue comme l’entendait gnons d’armes. Le dernier à droite est le père Caresana
l’Église dans le passé, et en particulier,
comme vous verrez en lisant ces lignes,
ce qui s’est produit pour Paul VI, qui
tout au plus peut être considéré comme
“Le Saint” moderniste à la manière de
Fogazzaro.

La première formation du jeune G.B.


Montini

• Aucune formation thomiste. Gio-


vanni Battista Montini n’a jamais vrai-
ment fréquenté un séminaire ; en effet,
6

laire Italien] était fondé. Don Sturzo


lançait un “Appel à tous les hommes li-
bres et forts” en présentant le pro-
gramme que le nouveau parti allait
soutenir en vue des élections législa-
tives qui devaient se dérouler neuf
mois plus tard : liberté de l’enseigne-
ment, défense de la famille, encourage-
ment à la constitution de coopératives
agricoles, décentralisation administra-
tive, adoption d’un scrutin à la propor-
tionnelle, etc. Il est à noter que le parti
ne réclamait pas le rétablissement du
pouvoir temporel de l’Église. N’appa-
raissait pas non plus dans son nom le
qualificatif de “catholique” ou “chré-
tien”. Le PPI ne se voulait pas un parti
En 1926, au congrès de la FUCI
confessionnel et s’affirmait indépen-
tres prêtres voulurent bien lui donner dant de la hiérarchie ecclésiastique.
des leçons de théologie, de philosophie, Giorgio Montini [le père de Giovanni
de liturgie. Mais son travail fut surtout Battista, n.d.a.] sera élu député de ce
solitaire, quand son état de santé le lui parti à trois reprises. Battista, lui,
permettait. Les compendiums, célèbres comme naturellement, se sentit en ac-
alors, de théologie morale et de théolo- cord avec ce programme. Le 3 septem-
gie dogmatique de Tanquerey lui servi- bre, dans un article de la Fionda, sous
rent de livres de base. Une étude pré- forme d’une lettre ouverte à Trebeschi,
cise des ouvrages, contenus dans sa bi- il prenait clairement parti pour le PPI :
bliothèque, qu’il a dû lire à cette “nous voulons le programme du PPI en
époque et dans les années suivantes, entier, cela va sans dire, sans conces-
permet de définir sa culture, religieuse sions. Nous voulons par ce programme
et profane à la fois, comme très éclec- toute la justice, tout le christianisme
tique et sans point d’ancrage : “des lec- vivant, tout l’Évangile social, toutes les
tures variées et hétérogènes, vastes et élévations réelles du peuple» (4).
désordonnées”. Un ami de son père, en- • Ordres sacrés accélérés… par re-
gagé dans la politique, l’avocat Luigi commandation ? Nous sommes en 1919
Bazoli, lui fit connaître l’œuvre de Ros- «Il revêtait enfin l’habit ecclésiastique.
mini (dont certains livres étaient à l’In- C’était le 21 novembre 1919. Six mois
dex). Un autre ami de la famille, le plus tard il était ordonné prêtre. Dans
père Semeria, revint à Brescia après la l’intervalle, la réception des ordres mi-
Première Guerre mondiale ayant été neurs et majeurs allait s’accélérer.
“exilé” à Bruxelles sous Pie X [pour Cette précipitation était peut-être une
suspicion de modernisme…, n.d.a.] lui faveur faite par l’évêque de Brescia à
procura des ouvrages d’histoire de la li-
turgie. À son contact, Battista acquit L’abbé Luigi Sturzo, fondateur du PPI
une conception historique de la liturgie
qui complétait ce que, dans ce do-
maine, il avait déjà reçu du père Bevi-
lacqua» (3). On peut donc constater ici
les mauvaises influences doctrinales
dans la formation du jeune Montini…
qui porteront plus tard à la conception
de la nouvelle messe.
• Adhésion au PPI : un démocrate-
chrétien jusqu’à la moelle. «Le 18 jan-
vier 1919, à Rome le PPI [Parti Popu-
7

un fils de notable qui ne pouvait suivre entre autres conférenciers, son frère
la formation traditionnelle au sémi- Lodovico, alors enseignant en sciences
naire. Mais on peut considérer aussi économiques et sociales à l’université
que les ordres sacrés lui furent confé- catholique de Milan. Le quotidien du
rés rapidement parce que sa santé sus- PPI, rendant compte de cette confé-
citait de plus en plus de vives inquié- rence, salua “les Montini”, associant
tudes» (5). leur père à l’éloge. Certains milieux ec-
• Tout pour le PPI et la DC [Démo- clésiastiques accusèrent le Cercle de
cratie Chrétienne]. «Au printemps “se livrer à des jeux politiques”, de
1921 le gouvernement choisit de dis- placer l’Action Catholique sous la dé-
soudre le Parlement et de procéder à pendance du PPI. Le cardinal Pompilj,
de nouvelles élections en mai. Don vicaire de Rome, adressa des remon-
Montini suivit de près la campagne trances à Mgr Pizzardo, supérieur de
électorale que les PPI menèrent à nou- don Montini dans ses deux charges. Ce-
veau. On lui prête la rédaction de lui-ci dut se justifier par une lettre, en
quelques-uns des discours électoraux date du 11 mai. Dans cette lettre l’au-
de son père. La chose n’est pas impossi- mônier du Cercle romain se désolidari-
ble mais aucun document d’archives, à sait des agitations politiques de ses
ce jour, ne l’atteste. À ces élections, le jeunes gens : “Les jeunes, écrit-il, je
Parti Populaire réalisa un score à peine veux dire les plus actifs du Cercle, ont
supérieur à celui obtenu deux ans au- jusqu’à la passion le désir de s’occuper
paravant. … Pour la première fois, et de se mêler politique ; tout mon ef-
trente-cinq fascistes, dont Mussolini, fort tend à atténuer cette passion [...], à
étaient élus. Don Battista fut très déçu les maintenir étrangers, parce que affi-
et compara ces résultats au désastre de liés à l’Action catholique, aux agita-
Caporetto. Les vainqueurs, écrit-il aux tions politiques, et à les éduquer et ins-
siens, professent un “scepticisme intel- truire du mieux possible”.
lectuel et religieux” dangereux pour le S’il est vrai qu’il n’incitait pas les
pays ; seule la Démocratie Chrétienne jeunes gens du Cercle à l’action poli-
serait capable de tirer l’Italie du “ma- tique immédiate, il n’en est pas moins
térialisme économique générateur de certain que le simple fait d’avoir un
haine et de corruption”» (6). père engagé très activement dans le
PPI, de rencontrer fréquemment à
À la secrétairerie d’État Rome d’autres personnages du parti,
d’en partager les convictions, devait lui
• De Baudelaire à Huysmans. Mon- donner souvent l’occasion de parler poli-
tini se rendit à Paris en 1924 et «Il sui- tique avec ses étudiants. Dans les an-
vit aussi les cours de l’Alliance Fran- nées suivantes, on l’accusera à plusieurs
çaise… Il eut pour professeur René reprises de politiser son apostolat (…).
Doumic… Il dira une quarantaine d’an- En septembre la FUCI tint son
nées plus tard à Jean Guitton “Je me congrès national à Bologne ; don Montini
souviendrai toujours des cours qu’il n’y participait pas. Le président national
nous fit sur Baudelaire et sur Flaubert, du mouvement, Pietro Lizier, et l’aumô-
sur Maupassant”. Pendant ce séjour pa-
risien il lut de nombreux auteurs fran- Alcide De Gasperi
çais (Barbey d’Aurevilly, Huysmans,
Bourget, etc.). Avant de quitter Paris, il
reçut un diplôme…» (7).
• À la FUCI [Fédération universi-
taire catholique italienne] beaucoup de
politique. «Au printemps 1925 inter-
vint le premier incident sérieux entre
don Montini et ses supérieurs. Pour ses
étudiants, il avait organisé une se-
maine d’études sociales. Il avait invité,
8

but de l’année 1926, Mgr Montini vou-


lut rouvrir au culte l’église Saint-Yves,
qui jouxtait l’université la Sapienza et
servait d’entrepôt, la presse fasciste
s’engagea dans une polémique. Les étu-
diants du GUF (Groupe Universitaire
Fasciste) prirent cette initiative comme
une provocation. Le gouvernement de
Mussolini autorisa néanmoins que
l’église soit rendue au culte catholique.
Mgr Montini y célébra la première
messe le 21 mars. Le chapelain en titre
en était Mgr Amleto Cicognani, profes-
seur à l’Apollinaire. Saint-Yves devint
la paroisse des étudiants catholiques.
Le 1 er mai un bulletin parut, la Sa-
pienza, se présentant comme la “feuille
de pensée des universitaires catho-
Montini votant aux élections en 1963 liques romains”. Montini y collabora
dès le premier numéro. Ce même nu-
nier général, Mgr Piastrelli, télégraphiè- méro contenait un article anonyme qui
rent au roi Victor-Emmanuel III l’hom- rappelait comment, en 1898, par l’ency-
mage du congrès. Au Vatican on consi- clique Spesse volte, Léon XIII prit la dé-
déra cette adresse comme une grave er- fense des associations catholiques en
reur politique : la “question romaine” butte aux attaques du gouvernement
n’était pas encore résolue et le Saint- anticlérical d’alors. L’allusion à la si-
Siège montrait toujours la plus grande tuation présente était évidente et por-
réserve face aux institutions italiennes ; tait une accusation voilée contre le
par ailleurs cet hommage au roi pouvait pape qui, cette fois, n’intervenait pas.
être interprété comme un geste polé- L’article, par ses allusions, scandalisa.
mique contre le gouvernement de Mus- L’affaire remonta jusqu’à Pie XI qui
solini qui était souvent en froid avec le convoqua Mgr Montini. Le pape lui de-
souverain. Quand, quelques jours plus manda de révéler l’identité de l’auteur
tard, le président Lizier et Mgr Piastrelli de l’article anonyme. Il s’agissait d’Al-
vinrent à Rome, avec une délégation de cide De Gasperi, un des chefs du PPI.
la FUCI, pour être reçus en audience, le Mgr Montini, sans livrer le nom de Gas-
Pape refusa de les recevoir. Il chargea peri, dégagea sa responsabilité. La re-
don Montini d’aller leur signifier son re- vue changea de direction pour disparaî-
fus» (8). Suite à ce fait Montini, par or- tre l’année suivante» (9).
dre de Pie XI, fut nommé aumônier gé- • Idées erronées sur la liturgie entre
néral de la FUCI à la place de Mgr Ri- Zundel et Maritain et la critique du tho-
ghetti ; “cette nomination, qu’on avait misme. «Est significatif à cet égard l’in-
présentée comme provisoire mais qui fut térêt qu’il commence à porter dans ces
en fait définitive, déplut à don Montini. années-là à deux auteurs : l’abbé Mau-
Parce qu’il remplaçait, par ordre supé- L’abbé Maurice Zundel
rieur, un prêtre qui, à ses yeux, n’avait
pas démérité et aussi parce que les
consignes qu’il reçut du Vatican al-
laient, parfois, à l’encontre de ses
convictions et de ses engagements. On
souhaitait notamment que la FUCI et
l’Action catholique en général n’appa-
raissent plus comme liées au PPI” (8).
• Un article d’Alcide De Gasperi cri-
tique l’action du Pape. «Quand, au dé-
9

rice Zundel et Jacques Maritain. Il avait


rencontré le premier lors de son séjour
à Paris en 1924. Quand Zundel publia,
deux ans plus tard, son Poème de la
sainte liturgie, Mgr Montini non seule-
ment en fit le compte rendu dans Stu-
dium mais il veilla à ce que l’ouvrage
soit traduit en italien. Zundel y dévelop-
pait une vision poétique et mystique de
la liturgie : la liturgie considérée comme
La signature des Accords du Latran le 11 février 1929
une symphonie plus que comme un or- entre Mussolini et le cardinal Gasparri
donnancement de rites. Mgr Montini pu-
blia aussi dans la revue un texte de Zun- • La recherche d’une liturgie “sim-
del intitulé Caro verbum facta est, inver- plifiée” prélude à la réforme litur-
sion de la célèbre parole évangélique : gique. «Ce goût pour la liturgie, avec
“Le verbe s’est fait chair.” Des théolo- l’idée qu’elle devait être rénovée dans
giens s’inquiétèrent de ce retournement le sens d’une simplification, d’une puri-
de la parole sacrée. fication presque, et d’une plus grande
L’intérêt pour Maritain date égale- participation des fidèles ne faisait que
ment de ces années-là. En 1925 parais- se renforcer chez Mgr Montini. Trois
sait en France Trois Réformateurs. Mgr mois avant d’emménager sur l’Aventin,
Montini en eut sans doute connaissance il avait effectué un de ces voyages d’ab-
lors de son séjour strasbourgeois de baye en abbaye qu’il affectionnait tant.
1926 ; en décembre de cette année il Son compagnon de voyage était Mgr
écrivait à Maritain, lui demandant de Grazioli, aumônier du cercle de la
traduire l’ouvrage en italien. Maritain FUCI de Vérone, mais surtout le pre-
accepta. La traduction fut publiée en mier à avoir fait connaître en Italie,
1928 aux éditions Morcelliana. Elle est quelques années plus tôt, le mouve-
précédée d’une longue préface, signée ment liturgique né à l’abbaye de Maria-
simplement “g.b.m.”. Dans cette pré- Laach autour des travaux de dom Ca-
face, Mgr Montini loue Maritain d’avoir sel. Après un passage d’une journée à
retracé “les origines du subjectivisme Paris puis à Reims, ce furent, en juillet
contemporain” tel qu’on le trouve ex- et en août, des séjours dans plusieurs
primé à travers l’œuvre des “trois ré- abbayes belges et allemandes : Mared-
formateurs” que sont Luther (dans le sous, Saint-André-de-Lophem, le Mont-
domaine religieux), Descartes (dans le César, Maria-Laach, Beuron. À Mared-
domaine philosophique) et Rousseau sous, où ils passèrent cinq jours, ils eu-
(dans le domaine social et politique). rent plusieurs conversations avec le
Tous trois ont en commun de s’être jeune directeur de la Revue liturgique
faits les promoteurs, chacun dans son et monastique. Tous les monastères de
domaine, du “relativisme individua- ce circuit estival avaient en commun
liste”. Pour autant ce n’est point à une d’avoir adhéré ou d’adhérer, avec des
défense de la tradition que se livre le personnalités réputées comme dom
préfacier. Il lance aussi une pointe po- Lambert Beauduin ou dom Gaspar Le-
lémique contre les néo-scolastiques (à febvre, au “Mouvement Liturgique”
ses yeux Maritain n’en est pas un). qui visait à faire participer davantage
“L’antique thomisme a besoin de révi- les fidèles à la messe, à éditer des tra-
sion”, écrit-il, et il stigmatise certains ductions du Missel, à pratiquer cer-
philosophes catholiques d’alors (sans taines “expériences”. La réforme litur-
les nommer) “qui écrasent leurs adver- gique que Montini devenu pape enga-
saires sous le poids des manuels tho- gea tire une grande partie de son inspi-
mistes sans s’être même avisés que les ration de ces expériences des années
manuels ont été conçus non pas pour vingt» (11).
écraser le prochain mais pour être lus • Contre le concordat pour des mo-
et médités”» (10). tifs erronés… En février 1929 furent si-
10

gnés les Accords du Latran entre l’État


Italien et le Vatican ; «L’Osservatore Ro-
mano titra en pleine page : “L’Italie a
été rendue à Dieu et Dieu à l’Italie” ; Le théologien Karl Adam ;
les cloches des églises de Rome ca- quand son livre fut mis à l’In-
rillonnèrent et les rues furent pavoi- dex, Montini cacha les exem-
plaires restants chez lui
sées. Mgr Montini et ses amis démo-
crates-chrétiens n’éprouvèrent pas la
même satisfaction. Le soir même des
Accords, De Gasperi (libéré des prisons
fascistes quelques mois auparavant), “non tant de prêcher que de converser :
Dalla Torre et d’autres, se réunirent dialogue fraternel, profondément
autour du père Bevilacqua et de Mgr convaincu, non académique ou rhéto-
Montini pour discuter de l’événement. rique, qui prête le flanc à l’ironie des
Un étudiant de la FUCI, qui assistait à jeunes. Que l’on exclue les thèmes
la réunion, a témoigné que la discus- vagues ; les thèmes de seule morale na-
sion fut vive. Certains étaient farouche- turelle ; les thèmes trop spécialisés.
ment hostiles à la “conciliation” inter- Que l’on évite les allusions générales
venue, d’autres, tel Mgr Montini, fai- aux sciences, de même que les faciles
saient part de la plus “extrême ré- condamnations globales ou les flatteries
serve”. Que l’Église ait renoncé offi- serviles”. Mais aussi il stigmatisait les
ciellement à exercer un pouvoir tempo- “pèlerinages de dévots devant les sta-
rel en Italie [ce qui était vraiment la tues de carton-pâte” et demandait d’en-
chose dont il fallait vraiment se dé - lever de l’autel “l’inutile et malséante
soler… n.d.a.] lui semblait une chose multiplicité de candélabres, palmes,
bénéfique, en revanche il craignait fleurs, etc.”» (13). En 1933 Montini fut
qu’on ne pardonne jamais à l’Église démis du rôle d’aumônier national de la
d’avoir obtenu des mains d’un régime FUCI “à cause du caractère de la for-
autoritaire une situation avantageuse mation qu’il dispensait aux jeunes, et
(concordat, indemnité financière)» (12). surtout de sa conception liturgique ‘in-
• Une lettre à la FUCI pour une li- novante’, et sa tendance marquée à la
turgie dépouillée et simplifiée l’oblige à ‘politisation’ des jeunes” (14).
renoncer à sa charge. «Le 1er mars 1931, • Les écrits religieux de Montini
en vue de la préparation de la fête de (quasi) censurés à Brescia. «À la même
Pâques, Mgr Montini avait adressé une époque un autre fait envenima sans
circulaire à tous les aumôniers des cer- doute la situation. Mgr Montini voulut
cles de la FUCI, leur faisant quelques publier en volume les leçons de reli-
recommandations. Il leur conseillait gion qu’il avait données aux étudiants
de la FUCI dans les années précé-
dentes et qui étaient déjà parues dans
la revue Studium. Le volume, La Via di
Cristo (La Voie du Christ), pour paraî-
tre, devait passer par la censure du dio-
cèse de Brescia où Mgr Montini était
toujours officiellement incardiné. Le
censeur ecclésiastique de Brescia, don
Ernestus Pisani, chargé d’examiner si
la doctrine exposée était orthodoxe,
éleva, semble-t-il, plusieurs objections.
Sans doute Mgr Montini dut-il se justi-
fier par écrit ou oralement. Le nihil
obstat ne fut accordé qu’avec beaucoup
de réticence en avril 1931. Le 9 août,
alors que l’ouvrage venait enfin de pa-
Mgr Montini avec Mgr Tardini
raître, Mgr Montini écrivait aux siens
11

qu’il lui avait coûté “plus de contro- faut travailler pour l’Église en s’oppo-
verse pour le faire publier que d’étude sant à l’Église” et expliquera claire-
pour l’écrire”. Les réticences manifes- ment son attitude, jugée attentiste par
tées à Brescia à l’encontre de la morale certains : “Je pense, je prie pour que
exposée par Mgr Montini durent être l’éternelle rénovation dont l’Église a
connues à Rome» (15). besoin, germe de l’intérieur…”» (16).
• Il cache dans son appartement au • Il n’est pas d’accord avec la
Vatican les livres proscrits par l’Index, condamnation du communisme (1949).
et prépare la “rénovation” de l’Église. «Par ses fonctions, Mgr Montini était, à
«Les éditions Morcelliana que Montini cette époque, surtout en prise avec les
avait contribué à fonder en 1925 avec affaires intérieures italiennes ; Pie XII
les pères Bevilacqua, Manziana, Cotti- se réservant davantage les dossiers ex-
nelli, publièrent dans ces années trente térieurs. Dossiers qui étaient drama-
un nombre important de traductions tiques : soviétisation des pays de l’Est,
d’auteurs catholiques européens. Des expansion du communisme dans le
ouvrages qui inspirèrent certains cou- reste du monde, persécutions de la hié-
rants du “mouvement liturgique”, tels rarchie et des fidèles dans tous ces
les Signes saints et l’Esprit de la liturgie pays. Pie XII multiplia les encycliques
de Romano Guardini, Liturgie et person- et les discours sur le sujet. Il ne semble
nalité de Dietrich von Hildebrand ; pas que Mgr Montini ait pris une part
mais aussi des ouvrages de ce que l’on quelconque à la rédaction de ces inter-
commençait à appeler alors la “nou- ventions solennelles. La secrétairerie
velle théologie allemande”, notamment d’État ne fut pas consultée non plus
ceux de Karl Adam. Mario Bendiscioli, lorsque le Saint-Office élabora son fa-
un des amis de jeunesse de Mgr Mon- meux décret du 1er juillet 1949 concer-
tini, en était le traducteur : parurent nant le communisme. Interdiction était
successivement les traductions de l’Es- faite, sous peine d’excommunication, de
sence du christianisme [sic, le titre de s’inscrire à un parti communiste “ou de
l’ouvrage étant : L’Essence du catholi- le favoriser de quelque manière”, de
cisme, n.d.a.], Christ notre frère, Jésus le lire la presse communiste ou d’y écrire.
Christ, le Christ de la foi. Mgr Montini a À la question : “Les fidèles qui profes-
lu attentivement au moins les trois pre- sent la doctrine matérialiste et antich-
miers ouvrages, les exemplaires conser- rétienne des communistes et surtout
vés dans sa bibliothèque en portent la ceux qui la défendent ou la propagent
trace et il les a cités à plusieurs re- encourent-ils de plein droit, comme
prises dans ses cours de religion. Le apostats de la foi catholique, l’excom-
Saint-Office s’inquiéta de la doctrine munication spécialement réservée au
qui y était exposée. L’œuvre de Karl Saint-Siège ?”, la réponse était donnée
Adam fut soumise à l’examen : la ru- sans fioritures : “Affirmativement”.
meur courait que certains de ses livres Si Mgr Montini n’avait pas pris part
allaient être mis à l’Index des livres in- à l’élaboration de ce décret, en tant
terdits. Mgr Montini, quand il l’apprit, que consulteur il avait assisté à la
écrivit à Bendiscioli, le 6 mai 1934, séance plénière de la Congrégation qui
pour exprimer “stupeur et regret”.
Quand finalement l’Essence du catholi-
cisme, sera interdit à la vente, Mgr
Montini cachera les exemplaires res-
tants dans son appartement, au
Vatican ! L’ouvrage put ainsi poursui-
vre sa carrière, diffusé sous le man-
teau. Il est à noter que Mgr Montini ne Le père Henri-Marie de
souhaitait pas une opposition ouverte. Lubac
Dans une autre lettre à Bendiscioli, il
réfutera la formule qui commence à
avoir cours dans certains milieux : “Il
12

en avait approuvé le texte. Au regard être toujours en progrès sans se fixer


des documents qu’il publiera plus tard jamais. Si l’on devait embrasser une
sur le sujet, en tant que pape, on peut telle opinion, qu’adviendrait-il des
légitimement penser qu’en 1949 déjà il dogmes immuables de l’Église catho-
n’était pas en accord avec ce genre de lique ? Qu’adviendrait-il de l’unité et
condamnation, qu’il aurait préféré un de la stabilité de la foi ?”
rejet du communisme formulé en Le père de Lubac qui participait à
termes moins abrupts» (17). cette Congrégation générale se sentit,
• Amitiés œcuméniques : il protège avec d’autres théologiens, visé par cette
les œcuménistes Boyer et Lubac. «À admonestation. Il venait de publier un
l’époque, la doctrine de l’Église concer- ouvrage audacieux, Surnaturel, où il cri-
nant les rapports avec les non-catho- tiquait la notion de “nature pure” et fai-
liques était la suivante : l’Église catho- sait valoir que l’homme, par sa nature
lique est la seule Église voulue par le même, avait un désir inné de la vision
Christ, ceux qui s’en sont séparés dans béatifique, un désir surnaturel. À l’am-
les siècles passés (orthodoxes, protes- bassade de France, Jacques Maritain et
tants, etc.) doivent se convertir et faire son conseiller canonique, le père Delos,
retour à l’Église catholique. Avant la conseillèrent au père de Lubac d’aller
Deuxième Guerre mondiale, et particu- voir Mgr Montini. Celui-ci lui prodigua,
lièrement en France, un courant avait semble-t-il, certains apaisements.
commencé à apparaître qui ne parlait Quelque temps après à la demande de
plus de conversions individuelles mais ses supérieurs (et sur le conseil de Mgr
d’“unité des Églises”, par le rapproche- Montini), le père de Lubac rédigeait un
ment et le dialogue entre les diffé- Examen de conscience théologique, pour
rentes confessions chrétiennes. Le père se prémunir d’une éventuelle condam-
Couturier, initiateur de la Semaine de nation de son livre. (…) En juin (1948),
prière pour l’unité, et le père Congar, Mgr de Solages, recteur de l’Institut ca-
avec l’ouvrage cité, en étaient les prin- tholique de Toulouse, vint à Rome. Il
cipaux représentants. Mgr Montini, en était suspect auprès de certains théolo-
1945, encouragea une initiative de ce giens à cause du soutien qu’il apportait
genre, due à un professeur français de aux idées du père Teilhard de Chardin.
théologie à l’Université grégorienne, le Pie XII refusa de le recevoir en au-
père Charles Boyer ( 18). Celui-ci créa dience. Bourdeillette [ambassadeur de
une Association internationale pour France près le Saint-Siège qui venait de
l’Unité des chrétiens (dite Unitas). Mgr remplacer Jacques Maritain] se rendit
Montini aida à la mettre sur pied et à alors chez le substitut, il fit valoir la
obtenir l’approbation du pape. Il suivra mauvaise impression que ne manquerait
toujours de près les initiatives du père de provoquer une telle rebuffade quand
Boyer et fera appel à lui par la suite. elle serait connue en France. Mgr Mon-
Autre rencontre et soutien apporté tini promit d’intervenir. Effectivement,
par Mgr Montini, celui accordé au père il réussit à faire revenir Pie XII sur sa
Henri-Marie de Lubac. Ce qu’on appe- décision» (19).
lait alors la “nouvelle théologie ” susci- • Avec la communauté de Taizé il
tait des critiques de la part de théolo- jette les bases de son futur œcumé-
giens thomistes. Le pape lui-même, re- nisme. «En mars 1949, Mgr Montini re-
cevant le 17 septembre 1946 les partici-
pants de la Congrégation générale des
jésuites qui venait de se terminer à
Rome, avait lancé une sévère mise en
garde : “Que personne ne trouble et ne
bouleverse ce qui ne doit pas être Frère Roger, fonda-
teur de la commu-
changé. On a dit trop de choses, et nauté de Taizé
d’une manière insuffisamment fouillée,
au sujet de la ‘nouvelle théologie’, qui
doit évoluer comme toute chose évolue,
13

gramme de ce qui pourrait être un véri-


table dialogue œcuménique : “La
grosse difficulté restera celle du Credo,
du dogme sur lequel l’Église ne peut
pas revenir. Mais il y a toute une zone
où l’Église peut montrer plus d’ouver-
ture. Elle doit d’abord reconnaître les
torts de ses membres dans l’Histoire et
aujourd’hui”. Il est intéressant de voir
apparaître dès cette date ce qui sera
une des clés de l’œcuménisme tel que
le pratiquera Paul VI : demander par-
don aux protestants et aux orthodoxes
pour le mal que leur a fait l’Église dans
le passé. Roger Schütz et Max Thurian
resteront en liens étroits avec Mgr
Montini dans les années suivantes, du-
rant son épiscopat milanais et lorsqu’il
sera devenu pape» (20).
• Il minimise la portée de l’ency-
Montini, prosecrétaire d’État du pape Pie XII
clique Humani Generis de Pie XII.
çut pour la première fois Roger Schütz «L’année 1950 vit aussi plusieurs théo-
et Max Thurian, les deux responsables logiens français sanctionnés ou mena-
d’une communauté protestante semi- cés de l’être. C’est la “nouvelle théolo-
monastique fondée en 1940 à Taizé. gie”, déjà fustigée par Pie XII en 1946,
C’est le cardinal Gerlier, archevêque qui, à nouveau, était visée : essentielle-
de Lyon, qui les envoyait auprès du ment certains jésuites de Fourvière et
substitut ; il leur avait préparé aussi certains dominicains du Saulchoir.
des entrevues auprès de Mgr Ottaviani Quelques-uns d’entre eux, les pères de
du Saint-Office, du père Boyer et une Lubac, Congar, Chenu, associés à Mgr
audience avec Pie XII. Auprès de Mgr de Solages, avaient en projet un grand
Montini ils trouvèrent le meilleur ac- traité de théologie en six volumes,
cueil. Ils se plaignirent de la publica- “conçu dans un autre esprit et sur un
tion d’un monitum du Saint-Office, nouveau plan que les manuels encore
paru l’année précédente à l’occasion de en usage”. Les sanctions et les condam-
la création du Conseil Œcuménique des nations ne visèrent pas expressément
Églises et interdisant aux catholiques ce projet mais elles empêchèrent qu’il
d’y participer. Mgr Montini laissa envi- vît le jour. En juin, à cause d’“erreurs
sager qu’une participation serait possi- pernicieuses sur des points essentiels
ble à l’avenir et il expliqua que le docu- du dogme”, cinq jésuites professeurs à
ment visait des “groupes œcuméniques Lyon étaient écartés de l’enseigne-
peu solides où une charité mal éclairée ment, parmi lesquels le père de Lubac.
risquait de compromettre la vérité ca- Le 12 août était publiée l’encyclique
tholique et un témoignage clair et auto- Humani Generis consacrée à “quelques
risé”. Il donna aussi des conseils à ses opinions fausses qui menacent de rui-
deux visiteurs à propos de la rencontre ner les fondements de la doctrine ca-
qu’ils devaient avoir avec le pape le tholique” : le relativisme dans l’exposi-
lendemain, il conseilla “de ne pas es- tion des dogmes, l’immanentisme,
sayer d’approcher le pape à un niveau l’idéalisme et l’existentialisme en phi-
doctrinal et théologique parce que Pie losophie, l’irénisme dans les rapports
XII était théologien, et qu’à ce niveau avec les non-catholiques, le polygé-
il avait un point de vue très précis. nisme en anthropologie et d’autres er-
Mais il était aussi pasteur et, comme reurs encore. Cette encyclique, néan-
tel, il pourrait écouter”. Enfin devant moins, ne méconnaissait point les
ses interlocuteurs il traça le pro- droits d’une saine recherche intellec-
14

pour le père de Lubac. Mgr Veuillot


était chargé de dire au théologien sanc-
tionné l’estime du substitut “non seule-
ment pour votre personne mais pour
votre œuvre”. Trois ans plus tard,
quand le père de Lubac publiera Médi-
tation sur l’Église, Mgr Montini le lira
aussitôt et en commandera plusieurs
exemplaires pour les distribuer à ses
amis» (21).
• De Maria satis… Il évite ensuite la
condamnation d’un livre de son ami
Jean Guitton. «La proclamation du
dogme de l’Assomption fut un des au-
tres grands faits de l’année [1950]. Les
évêques du monde entier avaient été
Paul VI en compagnie de son ami, le philosophe consultés par le pape sur l’opportunité
français Jean Guitton
de cette promulgation solennelle d’une
tuelle et la légitimité de plusieurs croyance fort ancienne et répandue.
“écoles” théologiques. L’encyclique Les réponses avaient été quasiment
frappa comme un coup de tonnerre. toutes favorables. Les protestants en re-
Plusieurs théologiens se sentirent visés vanche critiquèrent le fait. Quelques
au détour de tel ou tel passage de l’en- mois avant la proclamation, Roger
cyclique, même si le pape n’avait cité Schütz et Max Thurian demandèrent à
aucun nom ni aucun titre d’ouvrages. être reçus par Mgr Montini. Ils espé-
Mgr Montini, dans ses conversations de raient sans doute qu’elle pouvait encore
cette époque avec diplomates et visi- être évitée. Ils exposèrent au substitut
teurs, s’efforça de minimiser la portée que ce dogme nouveau était double-
de l’encyclique. Ainsi en recevant ment inacceptable aux yeux des protes-
quelques semaines plus tard le philo- tants : parce qu’il attribuait un privi-
sophe Jean Guitton : “Jamais l’ency- lège supplémentaire à la Vierge Marie
clique ne parle d’erreurs (errores), expli- qu’historiquement rien n’attestait et
qua-t-il. Elle parle seulement d’opinions parce que le pape allait engager son in-
(opiniones). Ceci indique que le Saint- faillibilité, autre dogme rejeté par les
Siège vise à condamner non des erreurs non-catholiques. En ce qui concerne la
proprement dites, mais des modes de piété mariale, Mgr Montini souhaite
pensée qui pourraient amener des er- “une plus grande discipline et un texte
reurs, mais qui en eux-mêmes demeu- qui précise la pureté de la doctrine”. Il
rent respectables. [...]. Les Français ont conseilla aussi à ses interlocuteurs de
tort de prendre pour des condamna- préparer un texte sur ces questions
tions ce qui n’est qu’un avertissement, d’infaillibilité et de dogme marial, et
appel à la prudence, à la lenteur, à la d’aller le porter au pape. Pie XII reçut
maturation”. les deux visiteurs mais ne changea pas
On a écrit que Pie XII eut vent des d’avis. La proclamation de l’Assomption
propos apaisants tenus par le substitut eut lieu le 1er novembre, en présence de
aux uns et aux autres et qu’il s’en ir- 622 évêques et d’une grande foule.
rita. (…) Quelque temps après l’ency- Que Mgr Montini croyait personnel-
clique, plusieurs ouvrages du père de lement à ce dogme nouveau, on ne
Lubac (Surnaturel, Corps mystique, peut, bien sûr, en douter. En revanche,
Connaissance de Dieu), et les livres d’au- il est aussi certain que tout au long de
tres auteurs visés, furent retirés du sa vie il a craint que l’on ne donne trop
commerce et des bibliothèques. Mgr de place au culte marial, que celui-ci
Montini, à l’occasion du passage à Paris ne dégénère en “mariolâtrie”.
d’un de ses collaborateurs français, L’accueil qu’il a réservé à Jean
Mgr Veuillot, le chargea d’un message Guitton, durant cette même année
15

son livre. Quand, le 8 septembre 1950,


il rencontra le substitut, il apprit que
beaucoup avait déjà été fait pour lui.
Pour autant, et cela montre que Mgr
Montini n’était pas omnipotent, l’ou-
vrage n’était pas hors d’atteinte.
Quelques mois plus tard, un deuxième
article très critique paraissait en
France. L’année suivante, Mgr Pizzardo
critiquait sévèrement la Vierge Marie
dans L’Osservatore Romano et le Saint-
Paul VI avec l’évêque progressiste brésilien Hélder Office obligeait Jean Guitton à appor-
Câmara. Il paraît qu’ils se saluaient ainsi : “Voilà notre ter des corrections à son livre dans les
archevêque rouge” - “En humble présence du pape prochaines éditions. Si l’ouvrage avait
communiste” tant plu à Mgr Montini, c’est qu’il insis-
1950, est, à cet égard, significatif. Jean tait fortement sur la distinction entre
Guitton avait publié l’année précé- “foi” et “dévotion” et qu’il avait été
dente un ouvrage consacré à la Vierge écrit dans un esprit œcuménique (il est
Marie. Avant de faire la connaissance dédié “à nos frères protestants, angli-
de l’écrivain, Mgr Montini avait déjà lu cans et orthodoxes”)» (22).
plusieurs de ses livres, notamment son • Déjà en 1947 il pensait à la messe
célèbre Portrait de monsieur Pouget. Il en langue vernaculaire… «Au prin-
avait lu aussi la Vierge Marie et l’avait temps 1947, il reçut le père Roguet et
fort apprécié. Il dira à Guitton : “De- l’abbé Martimort, les deux responsa-
puis les pages de Newman dans sa fa- bles du Centre de pastorale liturgique
meuse lettre du Dr Pusey, je crois créé à Paris quelques années plus tôt.
n’avoir pas lu sur la Vierge de pages Ce centre jouera un rôle moteur dans
qui m’aient autant satisfait”. Or, un ar- la réforme liturgique. Dès cette date
ticle d’une revue française, alors fort ses dirigeants surent qu’ils pourraient
répandue dans les milieux romains, trouver un appui auprès de Mgr Mon-
avait émis les réserves “les plus for- tini. L’un d’eux a témoigné : “Dans la
melles” à propos de certaines pages du conversation vint la question de la langue
livre et avait voulu “mettre en garde” liturgique : Mgr Montini émit l’opinion
ses lecteurs. Le Saint-Office s’était saisi que l’on devrait arriver un jour à la célé-
de l’affaire et procédait à un examen bration dans la langue du peuple de toute
scrupuleux de l’ouvrage suspect. Un la ‘partie didactique’ (selon son expres-
passage surtout était en contradiction sion) de la messe. Je fis remarquer qu’il
avec la doctrine de l’Église, celui où faudrait bien cent ans pour cette évolu-
Guitton expliquait qu’au moment de la tion. ‘Non, reprit-il, une évolution qui ja-
Visitation, la Vierge ne savait pas dis aurait en effet exigé un siècle peut à
qu’elle allait enfanter le Fils de Dieu. notre époque se réaliser en vingt ans’”.
L’ouvrage risquait d’être condamné par De fait, vingt ans plus tard, le substitut
le Saint-Office. Mgr Montini, de son devenu pape aura fait se répandre dans
propre chef, avant même d’avoir ren- les églises du monde entier la messe en
contré Jean Guitton, fit des démarches langue vulgaire» (23). Comme on peut le
pour qu’il ne le soit pas, il rédigea voir, l’idée de détruire la liturgie tri-
même une lettre faisant l’éloge du livre dentine de l’Église était une pensée
et la fit signer par Pie XII. Cette lettre, constante et récurrente dans la vie de
montrée sans doute aux théologiens du G.B. Montini.
Saint-Office qui étaient chargés de • Le modèle brésilien comme précur-
l’examen de l’ouvrage, empêcha qu’il seur des Conférences épiscopales natio-
ne soit inscrit à l’Index. nales. «Autre visiteur : dom Hélder Câ-
C’est le nonce à Paris, Mgr Roncalli, mara, évêque depuis 1952. De passage à
qui avait conseillé à Jean Guitton de Rome, il explique à Mgr Montini : “Vous
s’adresser à Mgr Montini pour sauver savez, nous avons la possibilité au Brésil
16

vre. Vraie et fausse réforme était en


passe d’être traduit en différentes
langues et une réédition française était
prévue, tout cela fut interdit et le père
Congar devait soumettre tous ses écrits
futurs au maître général de son ordre,
le père Suarez. Ces mesures ne furent
pas rendues publiques mais furent vite
connues des milieux intéressés.
L’attitude du substitut est, dans
Yves Congar o.p.
cette affaire, double. Devant ses visi-
de créer un modèle presque idéal de re- teurs, il s’efforça selon les cas de défen-
lations entre l’Église et l’État. Le catho- dre la mesure, de la minimiser ou de la
licisme chez nous n’a pas statut de reli- regretter. À Mgr Blanchet, recteur de
gion officielle. Mais il y a un grand res- l’Institut catholique de Paris, il ex-
pect mutuel entre l’Église et le gouver- plique : “Ce qui est hypothèse à Paris
nement, et nous travaillons en loyale est théorie à Madrid, et doctrine à Bue-
collaboration”. Une telle position ne nos Aires. Or nous avons aussi la
pouvait que séduire celui qui avait été charge de Buenos Aires” (25). Quelques
hostile au concordat italien. L’évêque temps plus tard, en avril, à Mgr Ri-
brésilien suggéra aussi la création d’une chaud, archevêque de Bordeaux, qui
conférence épiscopale au Brésil. Même vient auprès de lui plaider la cause du
si le pouvoir de la créer n’appartenait livre, il expose que les sanctions prises
pas à Mgr Montini, l’idée sera retenue, ne sont point à interpréter comme une
appuyée à l’occasion par le substitut, et condamnation mais simplement comme
bientôt sera créée la CNEB (Conférence une “mesure d’opportunité”. Et à l’am-
Nationale des Évêques du Brésil) dont bassadeur de France, Wladimir d’Or-
Mgr Hélder Câmara sera le secrétaire messon, il se dit “ennuyé et gêné” et
pendant douze ans et qui servira de mo- souhaite “qu’on revienne sur l’erreur
dèle à la création de conférences épisco- commise”. À cette date pourtant, il n’a
pales dans d’autres pays» (24). Une des pas encore lu le livre. Il se le procurera
pires réformes sorties du concile sera
précisément la démocratisation de Le cardinal Roncalli (futur Jean XXIII) en compagnie
de Mgr Montini (futur Paul VI)
l’Église avec les conférences épiscopales
et les conseils pastoraux qui comman-
dent et se substituent aux pasteurs légi-
times à tout niveau ecclésial.
• Il est “ ennuyé et gêné” par la
condamnation d’un livre du père
Congar. «Il est incontestable que Mgr
Montini était en décalage, de plus en
plus visible, avec la ligne qui prévalait
au Vatican. Deux autres faits le mon-
trent. Quelques mois après Humani Ge-
neris, le père Congar avait publié un
ouvrage, Vraie et fausse réforme de
l’Église, où il indiquait l’obligation pour
l’Église, “société hiérarchique par-
faite”, de se montrer plus “pastorale”,
moins séparée du monde. Pour ce faire,
une “réforme” de son esprit, de son ac-
tion et de certaines de ses institutions
était nécessaire. En février 1952 la
Congrégation du Saint-Office prit cer-
taines mesures contre l’auteur et son li-
17

deux mois plus tard auprès du père


Congar lui-même, en le faisant com-
mander par un de ses subordonnés à la
secrétairerie d’État, Mgr Veuillot. Il
lira le livre attentivement, l’exemplaire
conservé dans sa bibliothèque l’atteste.
Qu’il ait trouvé dans cette lecture des
idées qui confortaient les siennes, la
suite de son action l’a montré» (26).
• Le “Réarmement moral”. «L’af-
faire du “Réarmement moral” montra
une autre différence d’appréciation en-
tre Mgr Montini et certains responsa- À Caux, en 1960, le chancelier de la République fédé-
bles du Vatican. Le Réarmement mo- rale allemande, Konrad Adenauer (à gauche) rencontre
ral, fondé par un pasteur protestant, Franck Buchman, fondateur du Réarmement moral
Franck Buchman, avait son centre en
Suisse, à Caux-sur-Montreaux. Son but et envoyé à Milan comme archevêque
était de “réarmer” la société grâce à mais sans le titre cardinalice qui norma-
certaines valeurs morales : l’honnêteté, lement appartenait à ce siège épiscopal.
la pureté, le désintéressement. Il s’ap- Il n’y a pas de certitude sur les motifs
puyait aussi sur la prière, ouverte à pour lesquels il ne fut pas fait cardinal,
tous sans distinction. Chaque été de et il peut y avoir plusieurs hypothèses.
grandes réunions étaient organisées à Le 12 janvier 1953 eut lieu le dernier
Caux, qui attiraient un public très di- consistoire de Pie XII par lequel il créa
vers : financiers, diplomates, politi- 24 nouveaux cardinaux, parmi lesquels
ciens, ouvriers, venus de tous les conti- Roncalli (futur Jean XXIII qui fera car-
nents. Plusieurs évêques, depuis 1946, dinal Montini…) mais non Montini et
avaient publié des mises en garde Tardini, les deux très fidèles pro-secré-
contre ce mouvement, qui pratiquait taires d’État, qui normalement aurait
l’indifférentisme religieux et qui atti- dû l’être. Pie XII offrit la barrette cardi-
rait certains prêtres catholiques. Alors nalice aux deux, mais tous deux la refu-
qu’il était délégué apostolique pour sèrent (28), comme il est attesté par les
l’Afrique francophone, Mgr Lefebvre, documents du magistère eux-mêmes.
de passage à Rome, demanda à ce Pourquoi ? Quel fut le motif d’un tel re-
qu’une condamnation officielle soit fus ? La chose n’a jamais été complète-
portée par le Saint-Office contre le ment élucidée. On dit que Tardini re-
mouvement. Des responsables africains fusa pour obliger aussi Montini à faire
s’étaient rendus à Caux et il s’en in- de même… “Tardini en écartant Mon-
quiétait. Parmi les prélats avec les- tini du cardinalat l’écartait en même
quels il aborda la question, il y eut Mgr temps du prochain conclave et lui fer-
Montini. Celui-ci se montra hostile à mait la porte du pontificat” (29) ; si vrai-
une condamnation du mouvement : “Il ment la chose se passa ainsi… on pour-
ne faut pas toujours condamner, expli- rait dire : trop beau pour être vrai ! Le
qua-t-il. L’Église va apparaître comme vaticaniste Benny Lai rapporte dans son
une marâtre”. Le Saint-Office néan- journal l’entretien avec son collègue
moins publiera, en 1955, une mise en français Max Bergerre, qui révèle avoir
garde contre le Réarmement moral, qui rencontré Montini après le consistoire
présente “un danger de syncrétisme et et après l’annonce faite par le pape que
d’indifférence religieuse”» (27). lui et Tardini avaient renoncé à la pour-
pre : «Je le rencontrai à une réception à
Loin de Rome. La mutation comme ar- l’ambassade de France. Il y avait avec
chevêque de Milan moi le directeur tout juste arrivé de Pa-
ris. Nous remarquâmes Montini dans un
• Pourquoi il ne devint pas cardinal. coin de la salle et nous allâmes près de
En 1954, Montini fut éloigné de Rome lui, je présentai le directeur et le félici-
18

(32). On dit que c’est suite à cet événe-


ment de 1953 que Pie XII ne créa plus
de nouveaux cardinaux, il le fit pour ne
pas devoir désigner Mgr Montini.
• L’éloignement de Rome. En 1954,
Montini fut éloigné de Rome et envoyé
à Milan comme archevêque mais sans le
titre cardinalice. Jean Guitton, grand
ami de Montini, dans une interview pré-
tendit que “À un certain moment, Pie
XII a conçu pour Montini de la dé-
fiance. Il a compris que c’était son de-
Le cardinal Domenico Tardini avec Jean XXIII voir d’empêcher Montini de devenir
pape” (33). L’hypothèse la plus plausible
tai pour sa nomination comme pro-se- semble celle de l’affrontement qu’il y
crétaire d’État. Il me regarda en face et eut au Vatican, en ces années-là, entre
répondit : “J’ai raté l’autobus”. Je me le “Parti romain” plus conservateur
souviens que le directeur n’avait rien proche de Pie XII qui voulait réunir les
compris, parce qu’il eut été plus correct forces politiques anticommunistes à
de dire : “J’ai raté le coche”» (30). Il ne se Rome aux Comités civiques de Luigi
serait donc pas agi d’un refus ; en effet Gedda, et qui ne voyait justement pas
«La circonstance du “refus” sera tacite- d’un bon œil, la Démocratie Chrétienne
ment démentie par le frère de Montini, de De Gasperi, parti aconfessionnel, au-
Francesco, qui la fera éliminer de la quel Montini était, comme nous avons
version italienne d’un livre de Guitton. vu, très lié et qui voulait au contraire
D’après d’autres témoignages, Tardini l’unité des catholiques dans la Démo-
lui-même aurait aussi dit que la circons- cratie Chrétienne. “Mgr Montini - pour
tance n’était pas vraie» (31). citer le nom du plus influent adversaire
Chiron, à propos du fait que Tardini de Gedda - est opposé à l’actuel prési-
et Montini auraient décliné la pourpre, dent de l’ACI surtout parce qu’il le
écrit : «Cette version des faits n’est considère comme un élément de dés-
guère satisfaisante. Pour quels motifs union dans le camp catholique. Il pour-
les deux prélats de la secrétairerie
d’État auraient-ils refusé la dignité car-
dinalice ? Par humilité ? Non,
puisqu’ils accepteront d’être créés car-
dinaux dès la mort de Pie XII, sous
Jean XXIII. Pour ne pas être séparés
du pape ? Non plus, puisque Pie XII,
d’après Mgr Tardini, leur aurait promis
d’être maintenus à leur poste. Faut-il y
voir alors quelque manœuvre ecclésias-
tique ? Certains l’ont suggéré. Mgr Tar-
dini aurait décliné la barrette rouge
pour obliger son alter ego, de neuf ans
son cadet, à la refuser aussi. Ou encore,
Mgr Tardini en refusant le titre de car-
dinal permettait à Pie XII de ne pas
l’attribuer à Mgr Montini qu’il ne vou-
lait pas voir entrer dans le Sacré Col-
lège. (…) Mgr Montini n’avait-il point
sa place parmi ces éminences ? Pie XII
a jugé que non. Par compensation, pour
ne pas lui infliger d’affront public, il Pie XII saluant Mgr Montini qu’il avait nommé arche-
l’avait nommé pro-secrétaire d’État» vêque de Milan en novembre 1954
19

suit l’idée de faire réaliser l’unité adressée à Pie XII et bloquée par Mon-
concrète et opérante entre le Vatican, tini. Le pape eut la lettre par d’autres
l’ACI et la Démocratie Chrétienne, en voies. Un jour, quand Montini se rendit
éliminant des personnes qui comme en audience, le pape lui dit : ‘Avez-vous
Gedda, par orientation et par caractère, connaissance de cette lettre ?’. Montini
représentent un obstacle à cette unité” commença à s’embrouiller. ‘La connais-
(34). Andrea Riccardi écrit que “la muta- sez-vous, oui ou non ? Si vous l’avez, sor-
tion de Montini à Milan s’avère un fait tez-la’, ordonna le pape. Et c’est ainsi
pour le moins peu clair, fruit de la déci- que fut instituée la commission, qui
sion personnelle et certaine de l’ancien n’était pas cardinalice, mais dont faisait
pontife qui, probablement, réglait ainsi partie le cardinal Giuseppe Pizzardo, si
les pressions du parti romain dans le bien qu’on appela l’affaire ‘opération
sens antimontinien et son estime pour Giuseppe’. Je sus tout cela par la suite.
l’ecclésiastique brescian” ( 35). Nous La décision d’éloigner Montini fut prise
trouvons quelques détails supplémen- l’été, quand je n’allais pas à Rome. Au-
taires sur cette “affaire” dans un livre trement, je suis certain que le pape
de Tornielli : «Qu’arriva-t-il donc dans m’en aurait parlé. Auquel cas je lui au-
les premiers mois de 1954 ? Pourquoi rais dit : ‘Sainteté, c’est une erreur.
Montini part-il pour Milan quittant son D’abord il n’a pas le profil pour être
poste de principal collaborateur du pon- évêque. Mettez-le à la tête d’un dicas-
tife ? Quelque chose se rompt dans le tère et faites-le cardinal. Si vous l’en-
rapport de confiance et de collabora- voyez à Milan vous lui donnez la der-
tion entre le fidèle pro-secrétaire d’État nière carte pour devenir pape, parce
et le pape, qui décide de l’éloigner tout que c’est ce que regardent les cardi-
en le désignant à la tête du diocèse le naux étrangers en conclave’” (36). Mario
plus grand et le plus prestigieux d’Eu- Rossi avait remplacé en 1952 Carlo Car-
rope et du monde, le diocèse ambro- retto à la tête de la Jeunesse italienne
sien. Le cardinal Siri a révélé : “Mon- d’Action catholique. Par sa nomination,
tini fut envoyé à Milan suite au juge- il avait essayé d’assainir les tensions
ment négatif d’une commission secrète qui s’étaient créées entre Carretto et
qui avait examiné son comportement. Luigi Gedda. Suite à la publication, en
Pie XII l’avait instituée, ayant perdu la janvier 1954, d’un reportage sur l’heb-
grande confiance qu’il avait en Montini. domadaire L’Europeo dédié aux ouver-
Ce qui détermina le pape, ce fut une tures dans le sens progressiste des re-
lettre de démission du fameux Rossi présentants de la GIAC [Jeunesse ita-
lienne d’Action catholique], Rossi fut
Mgr Montini s’incline le 4/01/1955 à Melegnano pour appelé devant la commission épiscopale
baiser la terre à la frontière du territoire de son nou-
veau diocèse pour l’Action catholique : il se défend
en excluant toute responsabilité concer-
nant cet article, mais confirme ses
convictions qui ne sont certainement
pas en accord avec la ligne de Gedda.
En avril 1954, un communiqué annonce
sa démission présentée ‘depuis janvier
dernier’. D’après cette reconstitution,
Montini aurait retenu la lettre avant de
la présenter au pontife, dans la tenta-
tive de faire revenir sur ses pas le diri-
geant démissionnaire de la GIAC. Mais
en ces mois s’était vérifié un autre épi-
sode qui pourrait mieux expliquer les
motivations de l’éloignement de Rome
du futur Paul VI. Dans un livre de sou-
venirs, le même Rossi rappelle en effet
que Montini avait participé à une réu-
20

nion privée entre les dirigeants d’Ac-


tion catholique opposés aux Comités ci-
viques de Gedda» (37). Dans la corres-
pondance de Montini avec don Giu-
seppe De Luca, on peut voir que Mon-
tini entretenait des rapports avec les
catholiques communistes et certains su-
jets du PCI (38). Pour d’autres, Montini
aurait été impliqué dans la trahison de
Alighiero Tondi, prêtre jésuite qui dé-
froqua et milita au Parti Communiste
( 39 ). «Andrea Riccardi rappelle au L’abbé Primo Mazzolari, prêtre communisant, avait
l’interdiction de prêcher hors de sa paroisse, mais Mgr
contraire que certaines nominations Montini l’appela à Milan pour prêcher
d’évêques en Lituanie, intervenues de
manière si ce n’est mystérieuse, du moins cisions romaines. Ainsi quand le père
fumeuse, avaient fait courir des bruits de Lubac voulut faire traduire son ou-
sur une infidélité de Montini dans les vrage Mystère de l’Église et que le vica-
questions soviétiques. Ces voix remon- riat de Rome eût refusé l’Imprimatur
tent à un “rapport secret” du colonel parce que l’auteur était alors suspect,
français Claude Arnould, catholique et c’est Mgr Montini qui le lui accorda et
anticommuniste, qui avait été chargé permit à la traduction d’être imprimée
d’enquêter sur le passage d’informa- à Milan. Il citera le livre à plusieurs re-
tions confidentielles en provenance de prises dans ses discours et, à l’occasion,
la Secrétairerie d’État à destination des en distribuera des exemplaires à des
gouvernements communistes de l’Est. prêtres de son diocèse.
Arnould avait découvert que la respon- Il reçut aussi, plusieurs fois, Roger
sabilité de la fuite d’informations reve- Schütz et Max Thurian, de la commu-
nait à Mgr Montini et à son entourage, nauté de Taizé. Autres visiteurs, des ec-
ce qui avait alarmé le Vatican» (40). clésiastiques anglicans qui voulaient vi-
• Il fréquente et protège les moder- siter un diocèse catholique. Ils furent
nistes Congar, Bouyer et les protes- les hôtes du diocèse pendant une se-
tants Schütz et Thurian pour contrecar- maine. Mgr Montini appela le père
rer certaines décisions romaines. «Mgr Boyer, de l’Unitas à Rome, pour les cor-
Montini n’était pourtant point pleine- naquer. Certains des évêques qui al-
ment heureux de sa charge. “À Milan, laient jouer un rôle important au
il souffrait le martyre” se souvient concile entrèrent en relations avec lui
Jean Guitton. Il était comme en exil, durant ces années. Les termes d’adap-
loin de Rome, centre de décision pour tation, de réforme, de modernisation
toutes les affaires ecclésiastiques. Il vont devenir, dans les années sui-
avait perdu aussi le contact avec les di- vantes, les mots d’ordre d’un grand
plomates qu’il avait reçus pendant tant nombre d’évêques» (42).
d’années. Aussi il invita à Milan des • À la Mission de Milan il fait prê-
théologiens, les évêques d’autres cher don Primo Mazzolari à qui le
grandes métropoles pour rester in- Saint-Office avait interdit de prêcher.
formé de ce qui se disait, se faisait, Montini «avait demandé aux prédica-
s’écrivait ailleurs. Le père Congar sera teurs de préférer la bonté à la polé-
invité deux fois à Milan, échangera mique. Que cette prédication n’offense
quelques lettres aussi avec Mgr Mon- personne, n’ironise sur personne, n’at-
tini. Il recevra le père Bouyer ( 41 ), taque personne ; mais que tous soient
converti du protestantisme, professeur invités, avertis, presque appelés et at-
à l’Institut catholique de Paris, pour tendus. Parmi les prédicateurs figu-
une conférence sur Parole, Église et sa- raient les amis personnels de Mgr Mon-
crements dans le protestantisme et le ca- tini, tel le théologien suisse Charles
tholicisme. Quand il le pouvait encore, Journet ou le père Bevilacqua ; mais
il essayait de contrecarrer certaines dé- aussi un prêtre, don Primo Mazzolari,
21

qui venait d’être condamné par le montrer que Jean XXIII voyait en Mon-
Saint-Office. Don Mazzolari, curé de tini son successeur. Le 17 novembre,
Bozzolo, dans le diocèse de Milan, était eut lieu l’annonce officielle de la créa-
le fondateur d’Adesso, qui prônait une tion de vingt-trois cardinaux. Outre
“révolution chrétienne”. Pour avoir Montini et Tardini, placés en tête de la
prêché la collaboration entre les catho- liste des nouveaux promus, figuraient
liques et les communistes, il lui avait notamment, Cicognani, délégué aposto-
été défendu, en 1954, de prêcher hors lique aux États-Unis, ami de Montini,
de sa paroisse, et le Saint-Office, en Döpfner, archevêque de Berlin, Koenig,
janvier 1956, lui avait interdit de conti- de Vienne, Cushing, de Boston. Autant
nuer à écrire dans la revue. Malgré ces d’hommes qui allaient jouer un rôle im-
condamnations, Mgr Montini voulut portant au prochain concile» (44).
l’associer à la grande prédication de • La préparation du concile. Montini
Milan. Il connaissait don Mazzolari de- référence pour les modernistes. Après
puis avant la guerre, il l’avait rencon- l’annonce faite par Jean XXIII de convo-
tré lors des Semaines de Camaldoli. Il quer un concile, commença le travail
ne voulut point l’exclure du grand évé- préparatoire avec les différentes com-
nement ecclésial» (43). missions et les propositions présentées
• Jean XXIII le crée cardinal. Pie par des théologiens, en particulier fran-
XII mourut le 9 octobre 1958 et au çais et de langue allemande (les plus
conclave qui suivit le 28 octobre fut élu modernistes et novateurs…). «Ainsi, en
Angelo Roncalli, ami de Montini, qui mai 1959, un des premiers, le théologien
prit le nom de Jean XXIII. «Le 4 no- allemand Otto Karrer, rédige un mé-
vembre eut lieu le couronnement dans moire sur l’œcuménisme dans le pro-
la basilique Saint-Pierre. Avant de s’y chain concile. Il y demande notamment
rendre, Jean XXIII tint à écrire une let- qu’on renonce à proclamer des dogmes
tre à Mgr Montini pour lui annoncer nouveaux, qu’on affirme la collégialité
qu’il tiendrait prochainement un épiscopale et qu’on introduise la langue
consistoire et que lui et Tardini se- vulgaire dans la liturgie. Significative-
raient les premiers cardinaux nommés. ment il adresse ce mémoire aux évêques
Le pape demandait à l’archevêque de de son pays, l’Allemagne, à Mgr Char-
Milan de garder la chose secrète rière, chargé de l’œcuménisme au sein
jusqu’à l’annonce officielle. Par cette de l’épiscopat suisse, et au cardinal
délicate attention, le nouveau pape Montini. Ce dernier allait apparaître, de
montrait sa volonté de réparer le plus plus en plus, comme un des hommes
vite possible ce qui apparaissait à cer- clés du futur concile».
tains comme une injustice de son pré- Les différents évêques envoyèrent
décesseur. C’était aussi la marque leurs réponses avec les demandes à la
d’une estime particulière et la pre- commission antépréparatoire (au total
mière d’une série de faveurs qui allait 2019). «La réponse de Montini détonne
par rapport à celles de ses collègues de
Jean XXIII crée cardinal G. B. Montini l’épiscopat italien. Concernant la pré-
le 4 novembre 1959
paration du concile, il suggère que des
“réunions contradictoires” soient orga-
nisées entre catholiques et orthodoxes,
anglicans et protestants pour confron-
ter les opinions des uns et des autres (il
propose Milan comme lieu des rencon-
tres catholico-protestantes). Il ne ré-
clame aucune condamnation de doc-
trines dangereuses mais des définitions
de “la fin surnaturelle du genre hu-
main et de chaque homme” et de “la
grâce et de ses moyens pour le salut”
pour mieux lutter “contre les concep-
22

Moro, ne va pas se désolidariser de


l’ensemble de l’épiscopat. Le 21 mai
1960, à son tour, il adresse, par la
poste, une lettre à chacun des prêtres
de son diocèse sur l’“ouverture à
gauche”. Le texte complet sera publié
aussi par deux quotidiens catholiques
milanais. L’alliance politique des dé-
mocrates-chrétiens avec les socialistes
y est déclarée impossible parce que ces
derniers sont “encore incapables de se
libérer du vieux marxisme toujours
Les cardinaux Frings, Suenens et Liénart plein de prévention et d’hostilité
appartenaient à l’aile progressiste contre la religion, toujours imprégné
de matérialisme et d’anticléricalisme”.
tions de l’humanisme naturaliste, domi- Cette lettre néanmoins est d’un ton
nant facilement les esprits terrestres”. beaucoup plus modéré que celle pu-
Il ne souhaite point de nouvelles défini- bliée par d’autres évêques et il est à
tions dogmatiques dans la théologie noter que l’archevêque de Milan n’ex-
mariale mais, sans viser spécifique- clut pas, “si nous jugeons que les cir-
ment la piété envers la Vierge Marie, il constances ont changé, de [vous don-
écrit : “Il faut rendre à la piété chré- ner] d’autres instructions”. L’ouverture
tienne ses bases théologiques et bi- à gauche n’est exclue que “dans le mo-
bliques, modérer les formes d’une piété ment présent et dans la forme envisa-
qui n’est pas saine, tournée vers des dé- gée actuellement”. C’est effectivement
votions diverses, souvent arbitraires, ce qui se passera en 1963 : devenu
qui vont au détriment de la piété litur- pape, l’ancien archevêque de Milan
gique et du sens religieux authen- laissera Aldo Moro composer un gou-
tique”. Il se déclare partisan aussi d’in- vernement avec le soutien des socia-
troduire “audacieusement” la langue listes» (46).
vulgaire dans la liturgie. Enfin, pour • Une gaffe avec le général Franco.
assurer l’efficacité du concile œcumé- «Alors que le concile allait s’ouvrir, le
nique il suggère de lancer ensuite “une cardinal Montini commit une erreur
série de conciles particuliers se suivant qui fit quelque bruit. Elle est caracté-
l’un après l’autre dans les nations et les ristique de son penchant, en certaines
régions”» (45). circonstances, à se laisser porter par
• Aldo Moro, Montini et l’ouverture l’émotion et à agir de manière inconsi-
à gauche de la Démocratie Chrétienne. dérée. Un jeune étudiant espagnol
«Dans le domaine politique aussi, l’ar- avait été traduit devant un tribunal mi-
chevêque était perplexe. Dans l’ensem- litaire pour avoir lancé une bombe arti-
ble de l’Italie d’ailleurs, l’épiscopat sanale contre une statue du général et
était inquiet. En mars 1959 Aldo Moro distribué des tracts appelant les autres
avait été élu secrétaire de la Démocra- étudiants à manifester en faveur de mi-
tie Chrétienne. Il s’était déclaré parti- neurs en grève. Des étudiants milanais
san de l’ouverture à gauche, c’est-à-dire répandirent la nouvelle que l’étudiant
de l’entrée des socialistes dans la majo- et plusieurs mineurs avaient été
rité gouvernementale. Il entendait condamnés à mort. Ils allèrent trouver
aussi réaffirmer la “laïcité” du parti et leur archevêque et leur demanda d’in-
le rendre plus indépendant des autori- tervenir. Celui-ci, sans vérifier les faits,
tés ecclésiastiques. De nombreux adressa un télégramme à Franco de-
évêques, à titre individuel, puis la mandant la grâce des condamnés et le
Conférence Épiscopale Italienne (diri- fit paraître dans la presse italienne
gée par le cardinal Siri), vont publier alors qu’il n’était pas encore parvenu
des mises en garde. Le cardinal Mon- au destinataire. Le général Franco en
tini, malgré toute l’amitié qu’il a pour fut très mécontent, d’autant que le tri-
23

bunal n’avait prononcé aucune Blitzkrieg avait été soigneusement


condamnation à mort. Les journaux es- concoctée dans la nuit du 12 au 13 octo-
pagnols publièrent des articles de pro- bre» (48).
testation, le 9 octobre, et le général • Jean XXIII donne des privilèges et
Franco adressa une lettre très sévère des conseils à son successeur. «Le car-
(dont nous ignorons le texte exact) au dinal Montini, quoique impliqué dans
cardinal Montini. Mais bien vite le faux le “complot” Liénart, se montra fort
pas de l’archevêque de Milan fut ou- discret pendant la durée de cette pre-
blié. Deux jours plus tard s’ouvrait le mière session, aussi nous n’insisterons
concile» (47). pas longuement sur le déroulement de
celle-ci. Jean XXIII avait fait mettre à
Montini et le concile Vatican II la disposition de l’archevêque de Milan
une petite maison attenante à la basi-
Le concile à peine commencé, eut lique Saint-Pierre. Cette faveur unique
lieu le 13 octobre 1962, le “complot du pape permettait au cardinal Montini
Liénart” (du nom du cardinal, évêque de voir le pape discrètement et aussi
de Lille) destiné à empêcher que la Cu- de recevoir à l’intérieur du Vatican,
rie Romaine orientât les travaux. Lié- tout aussi discrètement, évêques, ex-
nart édicta une motion pour interdire perts et théologiens. Jean XXIII, pres-
que les évêques qui avaient déjà été sentant que sa maladie l’emporterait
membres des commissions prépara- bientôt et que l’archevêque de Milan
toires fussent insérés de manière auto- lui succèderait, lui aurait conseillé de
matique dans les commissions conci- ne pas s’engager dans les débats pour
liaires. La motion fut tout de suite ap- ne pas apparaître comme l’homme
puyée par un autre moderniste, le car- d’une tendance» (49).
dinal Frings, membre du conseil de • Une lettre de Montini sur les
présidence, mais avait été préparée orientations du concile conduit à un
précédemment par une rencontre de bouleversement. «Le cardinal Montini,
six cardinaux dont Montini faisait aussi très vite, avait porté un regard sévère
partie (comme il le révéla lui-même à sur le déroulement du concile. Le 18
Jean Guitton). «Le cardinal Suenens octobre, moins d’une semaine après le
souligne dans ses souvenirs la portée commencement des travaux, il avait
révolutionnaire de cet épisode. “Heu- écrit une lettre au cardinal Cicognani,
reux coup de théâtre et audacieuse viola- secrétaire d’État, pour ne pas paraître
tion du règlement ! (...) Le sort du Concile interpeller le Pape en s’adressant di-
s’est en grande partie décidé à ce moment- rectement à lui. “Poussé par d’autres
là. Jean XXIII en a été content”. Cette évêques”, écrivait-il, il se plaignait que
Une séance du Concile Vatican II le concile n’ait pas de “plan organique,
idéal et logique”. Et il en proposait un :
c’est autour du thème de l’Église que
doit se “polariser” le concile. Dès cette
date, il estimait que pour mener à bien
sa tâche, le concile aurait besoin de
trois sessions. La première devrait se
conclure sur une définition de “Ce
qu’est l’Église”, la deuxième session de-
vrait aborder la question de “Ce que
fait l’Église” (en différents domaines :
la liturgie, la morale, les missions, etc.),
la troisième session devrait être consa-
crée à l’étude des relations de l’Église
avec le monde (avec les “frères sépa-
rés”, les États, le monde de la culture,
les autres religions, les “ennemis de
l’Église”). Le concile pourrait alors se
24

conclure par quelque canonisation so-


lennelle - pour exprimer la communion
des saints - et par quelque geste de cha-
rité (don aux pauvres, pardon solen-
nel). Cette lettre, qui ne fut connue
pendant longtemps que d’un nombre
très restreint de personnes, préfigurait,
en bien des points, la ligne que suivra
le concile lorsqu’il sera devenu pape.
Ce discours-programme reprenait
nombre d’idées d’un autre plan que le
cardinal Suenens, en avril 1962, avait
adressé à Jean XXIII après concerta-
tion avec les cardinaux Lercaro, Döpf-
ner et Montini. Ces deux plans étaient Montini en présence des cardinaux qui l’ont élu pape
aussi une condamnation implicite des
schémas élaborés par les commissions missions et suivre leurs travaux (elle
préparatoires. Aussi ce n’est que pro- sera composée des cardinaux Suenens,
gressivement qu’ils furent dévoilés à la Léger, Lercaro, Montini et Döpfner) et
fin de la première session. Le 2 décem- surtout les quelque soixante-dix sché-
bre d’abord, par un article du cardinal mas à étudier étaient réduits à dix-
Montini dans l’Italia. Depuis l’ouver- sept. Cela impliquait une refonte totale
ture du concile l’archevêque de Milan de tous les schémas existants, sauf ceux
avait publié régulièrement des “Let- sur la liturgie et les moyens de commu-
tres du concile” dans le journal catho- nications déjà bien engagés. En outre,
lique de sa ville pour rendre compte un nouveau schéma devrait être pré-
des travaux conciliaires. Dans une nou- paré, “Des principes et de l’action de
velle lettre il émit plusieurs critiques l’Église pour promouvoir le bien de la
sur la session qui allait se terminer, société”, qui deviendra la fameuse
qualifiant les quelque soixante-dix constitution Gaudium et Spes.
schémas préparatoires de “matériel im- Le long travail des commissions pré-
mense, excellent, mais hétérogène et paratoires était ainsi quasiment balayé.
inégal, qui aurait réclamé une rédac- Faisant un bilan de cette première ses-
tion et un classement courageux”. Il re- sion, Hans Küng pouvait déclarer : “Au-
grettait aussi l’abondance des interven- cun de ceux qui sont venus ici pour le
tions orales des pères conciliaires et la concile ne rentrera chez lui tel qu’il
“diversité collective de tendances et de était auparavant. Personnellement, ja-
courants” qui était apparue. Deux mais je ne me serais attendu à ce que
jours plus tard, en congrégation géné- des évêques parlent de façon si osée et
rale, le cardinal Suenens prenait la pa- si explicite dans l’aula conciliaire”» (50).
role pour demander que la prochaine
session soit placée “autour d’un thème Montini devient Pape sous le nom de
central qui en oriente efficacement le Paul VI
développement : l’Église”. Le 5 décem-
bre, le cardinal Montini intervenait à Jean XXIII mourut le 3 juin 1963.
son tour, pour la deuxième fois seule- Immédiatement commencèrent les pré-
ment au cours de la session du concile, paratifs pour le nouveau conclave.
et il fut donc écouté attentivement. Il D’après son secrétaire Capovilla, sur
appuyait fermement l’intervention son lit de mort Roncalli aurait indiqué
faite, la veille, par le cardinal Suenens. que son successeur devait être Gio-
Jean XXIII, après ces deux discours vanni Battista Montini.
fort remarqués, pouvait, le 5 et le 6, an- • En faisant le panégyrique du pon-
noncer un bouleversement du concile : tife défunt Montini annonce son futur
une commission de coordination serait programme œcuménique. «Dans l’orai-
créée pour faire le lien entre les com- son funèbre qu’il prononça à sa mé-
25

moire au Duomo, le cardinal Montini Jean Guitton, dès l’âge de quinze, vingt
dressa un bilan du pontificat achevé ans, Montini avait le pressentiment
qui parut à beaucoup comme un pro- qu’un jour il serait pape ; au fur et à
gramme de celui qui allait s’ouvrir : mesure que la possibilité en devenait
“Ce n’est plus en arrière, ce n’est plus plus proche, il était partagé entre deux
lui que nous regardons maintenant, sentiments : l’humilité, qui lui en fai-
mais l’horizon qu’il a ouvert à la sait repousser l’idée, et l’ambition, qui
marche de l’Église et de l’Histoire. Sa au contraire lui faisait souhaiter une
tombe ne peut renfermer son héritage, telle charge. On ne peut donc dire qu’il
ni la mort étouffer son esprit”. Cet hé- fit tout pour refuser le pontificat. Au
ritage, c’est “l’œcuménisme intérieur” contraire, sans que l’on puisse réelle-
par la collégialité qui devra se mettre ment parler de campagne électorale, il
en place (“collaboration convenable du apparaît que plusieurs rencontres dis-
corps épiscopal non pas à l’exercice, crètes eurent lieu avant l’ouverture du
qui restera certainement personnel et conclave pour conclure certains ac-
unitaire, mais à la responsabilité du cords» (52).
gouvernement de l’Église entière”), et • Les grandes manœuvres des moder-
un “double œcuménisme extérieur” : nistes pour élire Montini. «Giulio An-
réunir les “si nombreuses fractions dreotti rappelle que dans les jours qui
chrétiennes séparées” dans l’Église et précédèrent immédiatement le
diffusion “de la paix entre les peuples conclave, se déroula dans une villa de
et entre les classes sociales, de la paix Grottaferrata, sur l’invitation du cardi-
civile sur toute la terre”. Cet héritage, nal Frings, une réunion à laquelle parti-
tout le monde comprenait que le cardi- cipèrent de nombreux cardinaux. La
nal Montini était prêt à le faire fructi- villa appartenait à l’avocat Umberto Or-
fier et son nom apparaissait toujours tolani [connu pour appartenir à la franc-
en bonne place dans les listes des papa- maçonnerie, n.d.a.], un proche collabo-
bili qui commençaient à être publiées rateur du cardinal Giacomo Lercaro, im-
en Italie et à l’étranger» (51). pliqué successivement dans les affaires
• Depuis l’âge de quinze ans il avait de la loge maçonnique P2 et dans la fail-
le “pressentiment” et l’ambition de de- lite du Banco Ambrosiano. Le même Or-
venir pape. «Le 16 juin, à la veille de tolani, dans une interview à Andrea Tor-
partir pour le conclave, le cardinal nielli, confirma la rencontre, qui inter-
Montini écrivait à son vieux maître Be- vint le 18 juin, entre des cardinaux nom-
vilacqua : à l’Église il faut maintenant breux et illustres, parmi lesquels se
un pape “efficace et sage”, et il ajou- trouvaient : Frings, Suenens, König, Al-
tait aussitôt : “Non certes moi, comme frink, Léger et Liénart. Aux dires d’Or-
l’habitude de désigner des papes préfa- tolani même, il n’existait aucun doute
briqués peut l’insinuer”. Ces déclara- quant au candidat émergent : “L’arche-
tions, et d’autres que l’on pourrait ci- vêque de Milan, Giovanni Battista Mon-
ter, ne doivent pas faire illusion. Selon tini, même si certains auraient préféré que
Paul VI et le cardinal Lercaro soit élu l’organisateur de la rencontre, à
savoir le cardinal Lercaro (...)”. La réu-
nion de Grottaferrata avait été organi-
sée par le cardinal Lercaro, qui faisait
figure d’héritier de l’esprit “johan-
nesque” (de Jean XXIII). En réalité, la
rencontre permit à Montini de s’assurer
du soutien du bloc d’Europe centrale et
de Lercaro lui-même, qu’il rencontra en
privé au monastère Sainte-Priscille, éta-
blissant avec lui une convergence d’in-
tentions. Le 19 juin, jour de l’ouverture
du conclave, le Corriere della Sera pu-
bliait d’Indro Montanelli un article bros-
26

Paul VI le 30/06/1963 lors de la cérémonie de son cou-


ronnement. On remarque encore l’usage du cérémonial
de la Cour Pontificale que Montini démantela et
liquida quelques années plus tard

D’après une reconstruction du Corriere


della Sera, il semblerait que ce soit le
cardinal vicaire de Rome, Clemente
Micara, qui tranquillisa certains des
électeurs du bord conservateur, en pre-
nant la tête des “montiniens”. Au
sixième scrutin, le matin du 21 juin, les
cardinaux saluèrent par un applaudis-
Nécrologie à l’occasion de la mort de Paul VI publiée sement prolongé la lecture du nom de
par la fédération romaine du PCI
Giovanni Battista Montini sur la cin-
sant le portrait du cardinal de Milan au quante-quatrième fiche du scrutin. Il
titre significatif : “Montini figure centrale semble que l’élection soit intervenue
du conclave”» (53). de justesse, avec 57 voix et 22 oppo-
• L’élection. «D’après les dires du sants tenaces. C’est au cardinal proto-
cardinal Testa, l’affrontement au diacre Alfredo Ottaviani qu’il revint de
conclave fut intense. Le cardinal Otta- proclamer de la loge extérieure de
viani se battit jusqu’à la fin contre Saint-Pierre le nom du nouvel élu» (54).
Montini, pariant sur le cardinal Ilde- C’est ainsi que Giovanni Battista Mon-
brando Antoniutti, un Frioulan de tini devint pape le 21 juin 1963, pre-
soixante-quatre ans pourvu d’une nant le nom de Paul VI.
grande expérience diplomatique, qui • Les communistes approuvent
aurait représenté une interruption de l’élection de Montini. «Si le chancelier
la ligne “de Jean XXIII”. Des témoi- Adenauer, lors d’un entretien avec un
gnages recueillis ayant échappé au se- diplomate français, avait craint l’élec-
cret parlent également d’un refus de tion de Montini comme “un véritable
Siri de se rendre disponible, laissant danger pour l’Europe”, son ascension
ainsi les votes pour sa personne aller au pontificat fut saluée avec satisfac-
vers l’archevêque de Milan : “Je n’ai tion par les communistes italiens et eu-
pas voulu m’opposer à Montini pour le ropéens, qui l’interprétaient comme le
bien de l’Église”, voilà ce que l’arche- signe de la volonté des cardinaux de
vêque de Gênes confia à Benny Lai. De continuer l’action du Pape Jean. Le se-
leur côté, les cardinaux progressistes crétaire du PCI, Togliatti, fit une inter-
s’efforcèrent de concentrer leurs suf- vention dans l’hebdomadaire Rinascita
frages sur un candidat unique, et pour montrer les éléments de conti-
lorsque les voix de Lercaro commencè- nuité entre Paul VI et Jean XXIII.
rent à confluer sur Montini, ce sont les D’après l’historien russe, Victor Gai-
conservateurs eux-mêmes qui cédèrent, duk, qui a travaillé sur les documents
espérant conditionner le nouveau pape. d’archives soviétiques, le Kremlin aussi
27

attendait avec anxiété le choix du suc- dinaux Siri et Ottaviani sont reçus et
cesseur de Jean XXIII et souhaitait confirmés dans leurs fonctions, Paul VI
l’élection d’un “homme de dialogue” fait demander au père Congar ses im-
comme Montini. pressions sur l’évolution des travaux
Dans cette élection de Paul VI, un conciliaires, il le fait par l’intermé-
rôle décisif a été joué par le substitut, diaire de son théologien privé, Carlo
Mgr Angelo Dell’Acqua. Mgr Loris Ca- Colombo. Le lendemain il reçoit lon-
povilla, qui en a souvent parlé, l’a guement le cardinal Suenens, l’homme
confirmé à Andrea Tornielli. “Le substi- du “plan” qui a bouleversé le concile.
tut se trouvait dans une position privilé- Paul VI fait part au cardinal belge de
giée, il pouvait approcher tous les cardi- son intention de donner une “direction
naux. Il a convaincu les Espagnols, en sûre” au concile et de rompre avec
leur disant que le cardinal Montini était l’immobilisme et le désordre de la pre-
un ami de l’Espagne, contrairement à ce mière session. Il souhaiterait le nom-
que l’on avait dit de lui. Il a tranquillisé mer son représentant personnel (avec
ceux qui considéraient que l’archevêque le titre de légat) au sein du concile.
de Milan était un “Français”, imprégné Sont évoquées aussi d’autres réformes,
exclusivement de la culture de ce grand notamment celle qui obligerait les
pays. Il a contribué à abattre certains évêques et les cardinaux à quitter leurs
préjugés qui s’étaient constitués concer- charges à soixante-quinze ans. Paul VI
nant Montini, qui pendant ses années mi- fit remarquer que cela lui serait fort
lanaises a été constamment et durement utile pour le renouvellement de la Cu-
attaqué par une certaine presse qui le pré- rie qu’il envisageait. La réforme sera
sentait comme un prélat de gauche”» (55). bientôt annoncée» (56).
• Il nomme le cardinal Suenens son • L’histoire de l’horrible tiare de
légat au concile et décide de “mettre à Paul VI fabriquée par FIAT. Comme
la retraite” les évêques et les cardi- chacun sait, Montini aimait l’art mo-
naux à soixante-quinze ans. «Les gages derne, et avait le goût du laid (comme
donnés au camp conservateur, les dé- en témoignent nombre de monuments
clarations rassurantes pour les uns et et d’églises de cette période… toutes
les autres, s’accompagnaient de consul- plus laides les unes que les autres) et
tations qui indiquent mieux quelle al- son horrible tiare était du même style
lait être l’orientation de ce début de que le personnage, mais de fait il l’uti-
pontificat. Ce même 22 juin où les car- lisa très peu. Le 30 juin eut lieu la céré-
Paul VI dépose définitivement la tiare (fabriquée par
monie du couronnement : furent utili-
Fiat) symbole du pouvoir papal… À gauche, on recon- sées peut-être pour la dernière fois la
naît le cardinal Ottaviani sedia gestatoria et la tiare, symboles
importants de la papauté. «Puis vint le
couronnement proprement dit. Le car-
dinal Ottaviani posa sur la tête du sou-
verain pontife une tiare qui avait été
dessinée selon ses indications : fuselée
et non pas lourdement ornée comme
celle de ses prédécesseurs. Dans Témoi-
gnage chrétien, l’abbé Sainsaulieu la dé-
crira en en tirant toutes les significa-
tions : “Tiare antique, tiare monas-
tique, tiare des papes réformateurs bé-
nédictins. Une tiare d’avant les trois
couronnes, une tiare légère, en forme
de fusée, une tiare de métal blanc, usi-
née chez Fiat et presque lisse. Enfin
une tiare du XXe siècle, qui rive son
clou au Syllabus”. Cette tiare, un peu
plus riche que ne le disait ce commen-
28

• L’Église doit demander pardon


pour ses fautes du passé. Nous sommes
tellement habitués à entendre ces pa-
roles depuis le concile, et nous les
avons vues mettre en pratique tant et
tant de fois dans les cérémonies œcu-
méniques de Jean-Paul II, Benoît XVI,
etc., que désormais nous ne nous éton-
nons plus, mais celui qui les prononça
le premier et introduisit cette pratique
œcuménique fut Paul VI. «Dans son
discours d’ouverture de la deuxième
session, Paul VI mit surtout en valeur
l’orientation œcuménique que devait
prendre le concile. Comme souvent, il
procéda par une double affirmation : il
est nécessaire d’affirmer intégralement
la foi catholique mais dans le même
temps il faut reconnaître les richesses
Montini le jour de son couronnement spirituelles qu’ont gardées les “frères
séparés”. Une déclaration du pape fit
tateur, ornée de fleurs de lys à sa base, également plaisir aux observateurs :
sertie de pierres, Paul VI allait bientôt l’Église, avait dit le pape, doit deman-
l’abandonner définitivement, en un de der pardon des offenses qu’elle a com-
ces “gestes” spectaculaires qui ponc- mises dans le passé et elle est prête à
tueront son pontificat». L’abandon de pardonner celles qu’elle a subies. Ce
la tiare advint le 13 novembre 1964. thème du pardon réciproque sera un
«Le pape assista à nouveau à la messe des leitmotivs de la démarche œcumé-
devant le concile, concélébrée ce jour- nique de Paul VI» (59). Le 17 octobre
là par les patriarches catholiques orien- 1963, Paul VI, recevant dans la biblio-
taux. Après la cérémonie il descendit thèque privée les observateurs protes-
de son trône et déposa sa tiare sur l’au- tants délégués au concile, «démontra
tel en annonçant qu’il en faisait don que ce “pardon réciproque était le meil-
aux pauvres du monde. C’était un geste leur moyen” de se tourner “vers une
symbolique en faveur des pays du tiers nouveauté à faire naître, un rêve à réali-
monde (il devait se rendre quelques se- ser”. C’était là probablement le pre-
maines plus tard en Inde), mais c’était mier d’une série déconcertante d’actes
aussi, dans l’esprit de beaucoup, la re- de “repentir” et de pardon inhabituels
nonciation au signe du pouvoir tempo- dans l’histoire de l’Église. Le Corps
rel que représentait cette triple cou- mystique du Christ est, en effet, indé-
ronne. La tiare, en fait, ne fut pas ven- fectible en soi, selon la divine pro-
due : elle fut remise au cardinal Spel- messe de son fondateur. Ses membres
lman qui l’exposa dans sa cathédrale à peuvent certes commettre des erreurs
New York puis au pavillon du Vatican et des fautes, mais leur responsabilité
de l’Exposition internationale qui se
tint dans la même ville et enfin au
sanctuaire de l’Immaculée Conception
de l’Université catholique d’Amérique Le théologien luthérien
à Washington» (57). Dans ce choix aussi Oscar Cullman, que Paul VI
mit à la tête du Centre
se manifestait l’esprit moderniste de d’études œcuméniques en
Montini, imprégné de cette “malsaine Terre Sainte
passion des choses anciennes” que Pie
XII avait condamnée dans Mediator Dei
précisément quelques années aupara-
vant (58).
29

est personnelle et ne retombe jamais


sur l’Église, qui ne peut “se repentir”
rétroactivement en leur nom. Qui plus
est, la distinction entre l’Église et ses Mgr Luigi Carli,
membres n’était pas claire dans le évêque de Segni, un
des représentants les
“Nous” utilisé par Paul VI lorsqu’il par- plus actifs du Cœtus
lait d’admettre avoir accompli des au Concile, organisa-
fautes et de demander pardon» (60). tion qui s’opposait à
• L’admiration et la sujétion envers l’aile progressiste
le monde moderne. Dans l’allocution
inaugurale de la deuxième session du
concile, Paul VI prononça ces paroles voyage en Terre Sainte. Là «il eut en-
qui firent du bruit parce qu’en contra- core de brèves rencontres avec l’arche-
diction avec toute la tradition de vêque anglican de Jérusalem, l’évêque
l’Église : “Que le monde sache avec cer- anglican de Jordanie, Liban et Syrie et
titude que l’Église le regarde avec avec le Grand Muphti de Jérusalem
amour, nourrit pour lui une sincère ad- venu lui apporter le salut de la commu-
miration et qu’Elle est nettement ani- nauté musulmane de la ville. C’est
mée du projet non pas de le dominer, aussi au cours de ce voyage que Paul
mais de le servir, non pas de l’humilier, VI eut l’idée (comme une “illumina-
mais d’en faire grandir la dignité, non tion”, dira-t-il) d’un centre d’études
pas de le condamner, mais de lui offrir œcuméniques qui aurait son siège en
réconfort et salut ” (61). Le thème de la Terre sainte. Catholiques, protestants
sujétion et de l’admiration envers le et orthodoxes pourraient y étudier en-
monde sera l’un des leitmotivs domi- semble les grandes questions théolo-
nants de la pensée montinienne. giques. De retour à Rome, il fit réaliser
• Contre la “mariolâtrie” et contre ce projet. Le Saint-Siège achètera un
la médiation universelle de Marie pour terrain à Tantur, entre Jérusalem et
plaire aux protestants… «Autre débat, Bethléem, et Paul VI demandera au
où le pape fut indirectement impliqué, théologien protestant Cullmann de pré-
celui sur la Vierge Marie. Un schéma parer un programme d’études. Le pape
avait été préparé sur le sujet. Quand il suivra de près les travaux de construc-
fut présenté en séance, plusieurs voix tion de ce centre, discutera à plusieurs
s’élevèrent (parfois au nom d’un épi- reprises avec Cullmann des activités à
scopat tout entier, l’Allemagne notam- envisager et, en 1972, l’Institut œcumé-
ment) pour demander que la Vierge nique de recherches théologiques ou-
Marie ne fasse pas l’objet d’un texte vrira ses portes à Tantur. Avant de
conciliaire isolé mais figure dans un quitter la Terre sainte, Paul VI fit en-
schéma plus vaste, celui sur l’Église. Il voyer un message de paix aux respon-
s’agissait, selon le père Congar, d’“évi- sables de toutes les communautés non
ter les majorations d’une mariologie sé- catholiques ayant des observateurs au
parée” ; en d’autres termes on ne vou- concile, aux chefs d’État du monde en-
lait pas, à l’occasion d’un schéma isolé, tier et aux dirigeants des grandes orga-
ajouter d’autres titres à la Vierge Ma- nisations internationales. Au total
rie, notamment ceux de “Médiatrice de quelque deux cent quarante télé-
toutes grâces” ou de “Co-Rédemp- grammes ! Cette initiative montre bien
trice”. Par ailleurs, les protestants au- dans quel climat euphorique se déroula
raient considéré un tel texte séparé ce premier voyage d’un pape hors de
comme une preuve supplémentaire de Rome» (63).
la “mariolâtrie” des catholiques. Paul • Il reçoit en audience les deux
VI abonda dans ce sens» (62). évêques conservateurs Proança Sigaud
• Après le voyage en Terre Sainte il et Carli mais ne tient pas compte de
fonde le centre d’études œcuméniques leurs observations. Montini voulait être
et y met à la tête un protestant. En jan- «le pape du “dialogue”, un mot qu’il
vier 1964 Paul VI fit son premier chérissait entre tous. Le dialogue impli-
30

quait de se faire accueillant à tous,


d’écouter l’adversaire, d’aller à sa ren-
contre s’il le fallait. C’était autant un
comportement qui se voulait charitable
qu’une attitude intellectuelle. Souvent,
point toujours cependant, tout en res-
tant ferme sur les positions qui étaient
siennes, il paraîtra avoir fait une
concession. Ainsi lorsque, quelque
temps après son retour de Terre sainte,
il reçut successivement en audience
deux évêques qui s’étaient montrés, Discours de Paul VI à l’ONU le 4/10/1965
lors de la deuxième session du concile,
parmi les défenseurs les plus vigoureux Une vénérable relique, celle du chef de
des doctrines traditionnelles. Le 3 fé- saint André, fut amenée. Elle avait été
vrier Mgr de Proança Sigaud remettait confiée à Rome au XV ème siècle pour
au pape un document signé par cinq qu’elle échappe aux destructions des
cent dix archevêques et évêques de Ottomans qui avaient envahi la Grèce.
soixante-dix-huit pays, l’implorant d’ac- Paul VI annonça que la relique serait
céder à une demande faite par la rendue aux orthodoxes, en gage d’ami-
Vierge lors des apparitions de Fatima : tié» (65).
que le pape en union avec les évêques • Il retire Mgr Lefebvre de la com-
de tous les pays consacre le monde au mission pour la révision du schéma sur
Cœur Immaculé de Marie, avec men- la liberté religieuse. Durant la 3ème ses-
tion explicite de la Russie pour qu’elle sion du concile le débat sur la liberté
se convertisse. Paul VI se refusa à une religieuse fut très rude ; on arrivera en-
telle consécration solennelle, mais, suite à la déclaration Dignitatis Hu-
pour ne point sembler laisser cette de- manæ qui est en contradiction d’opposi-
mande sans réponse, le 21 novembre tion avec le magistère de l’Église. La
suivant, pendant la troisième session non orthodoxie de ce document conci-
du concile, il voudra “confier le genre liaire constitue un des principaux argu-
humain” à la Vierge Marie et lui don- ments du manque d’autorité chez Paul
ner le titre de “Mère de l’Église”. Au- VI comme le démontre la Thèse de Cassi-
tre audience accordée à un “minori- ciacum élaborée par le père Guérard
taire”, le 7 février. Mgr Carli, évêque des Lauriers. Le 9/10/1964, après les
de Segni, un des grands adversaires de protestations du front conservateur (le
la collégialité, se plaignit des abus Cœtus internationalis patrum), le texte
d’autorité commis par les modérateurs devait être révisé : «Paul VI, qui exi-
lors de la deuxième session. Il remit un geait l’approbation du texte, ne pouvait
mémoire au pape relevant toutes les in- pourtant pas ignorer les critiques expri-
terventions personnelles des modéra- mées à son endroit. Le 9 octobre, le car-
teurs qui avaient, selon lui, manifeste- dinal Bea reçut une lettre de Mgr Fe-
ment favorisé la tendance progressiste lici, qui lui communiquait le souhait du
du concile. Paul VI lut sans doute at- pape que le texte sur la liberté reli-
tentivement le rapport mais n’intervint gieuse soit réécrit, et l’informait que
pas directement auprès des modéra- dans ce but on allait instituer une com-
teurs, il transmit simplement le mé- mission mixte, formée des membres du
moire de Mgr Carli au secrétaire géné- secrétariat pour l’Unité et de la com-
ral du concile» (64). mission théologique, parmi lesquels
• Il donne une relique insigne de avaient également été insérés : le cardi-
saint André aux schismatiques orien- nal Michael Browne, le maître général
taux. En 1964 «le 23 septembre, jour des dominicains, Aniceto Fernández,
où l’Église fêtait la Saint-André [sic], l’archevêque Marcel Lefebvre, ainsi
Paul VI assista à la messe célébrée de- que Mgr Carlo Colombo. À part ce der-
vant le concile par le cardinal Marella. nier, un homme de confiance du pape,
31

les trois autres étaient de fermes oppo- (…) L’exclamation “Jamais plus la
sants à la déclaration sur la liberté reli- guerre, jamais plus la guerre !” résumait
gieuse. Les progressistes se mobilisè- le sens du voyage du Pape» (67).
rent immédiatement, alarmés surtout • La non-condamnation du commu-
par le nom de Mgr Lefebvre» (66). Il y nisme. «La condamnation du commu-
eut une réunion à la résidence du cardi- nisme avait été demandée par de nom-
nal Frings où fut rédigée une lettre au breux évêques lors de la consultation
ton dramatique destinée au pape parce faite par la commission antéprépara-
que cette révision avait été “remise à toire. (…) Le 29 septembre 1965, trois
une certaine commission mixte, dont on cent trente-deux pères conciliaires, ou
dit que quatre membres ont déjà été dési- quatre cent cinquante selon d’autres
gnés, et trois d’entre eux semblent être en sources, signèrent un texte demandant
contradiction avec l’orientation du condamnation du communisme ; Mgr
Concile à ce sujet”. L’épiscopat français Lefebvre et Mgr de Proança Sigaud le
protesta également relativement à la déposèrent au Conseil de présidence
nomination de Mgr Lefebvre parce que pour qu’il soit transmis à la sous-com-
considérée comme “une sorte de mé- mission chargée de rédiger le passage
fiance à l’égard de l’épiscopat”. Montini sur l’athéisme. Le 18 octobre un groupe
revint sur sa position : le 16 octobre les d’évêques expulsés de pays marxistes
noms de Mgr Lefebvre et du père Fer- adressa, directement au pape cette fois,
nandez avaient disparu de la liste des une pétition formulant la même de-
réviseurs du texte. Montini n’aimait pas mande. En vain, puisque l’Église, lors de
Mgr Marcel Lefebvre… mais c’était ré- la rencontre de Metz, s’était engagée à
ciproque. ne pas condamner le communisme au
• Chaque intervention de Paul VI et concile. Jean XXIII puis Paul VI se sen-
chaque document du concile appelle- taient liés par cet engagement. Quand
rait un commentaire mais cela nous fut abordé le texte sur “L’Église dans le
emmènerait hors du champ que nous monde de ce temps”, Mgr Garrone, son
nous sommes fixé dans cet article ; rapporteur, expliqua qu’il ne comportait
nous nous limiterons donc aux aspects pas de jugement sur le communisme
les plus significatifs. parce que “cette façon de procéder est
• Le discours à l’ONU d’un “expert conforme au but pastoral du concile et à
en humanité”. Il se tint le 4 octobre la volonté expresse de Jean XXIII et de
1965 à New York ; «le Pape fit son dis- Paul VI”» (68). Le texte des pétitions fut
cours du podium de marbre vert de la en pratique “oublié et enterré” parmi
grande salle du “ palais de verre”. Paul les autres documents… et ne fut pas
VI, qui s’exprimait en français, s’inti- examiné dans les temps. Le document
tula “expert en humanité” et fit l’éloge qui fut présenté se contentait de rappe-
du service rendu à l’humanité par ler les références aux condamnations
l’ONU, un organisme à qui revenait la précédentes. Une réunion avait eu lieu
tâche de la “construction de la Paix”. le 26 novembre au cours de laquelle
Paul VI s’était rangé du côté du cardinal
Tisserant qui, fidèle à la promesse de
Metz, ne considérait pas opportune la
condamnation du communisme. Dans la
constitution Gaudium et Spes qui sera
promulguée le 7 décembre 1965, il man-
quait donc «une quelconque forme de
condamnation du communisme. Le fait
était d’une importance telle “qu’il ac-
créditait les bruits d’un accord explicite
entre le Patriarcat de Moscou et le
Saint-Siège”. Le silence du concile sur
Paul VI avec les observateurs non le communisme constituait une omission
catholiques au concile impressionnante de ce concile histo-
32

rique. À propos de ce silence, Mgr Hél-


der Câmara [évêque brésilien progres-
siste, n.d.a.] écrivait en novembre 1965 :
“Le Concile œcuménique Vatican II a dit
beaucoup de choses, par ses paroles, et par
ses silences”» (69).
• L’adieu aux observateurs protes-
tants : “un tournant à 180° en direction
de l’œcuménisme”. «Le 4 décembre eut
lieu, à la basilique Saint-Paul-hors-les-
Murs, une cérémonie d’adieu pour les ob-
servateurs non catholiques. Pour ceux-ci Paul VI pendant une séance du concile
autant que pour l’Église catholique, le
concile Vatican II avait été un événe- • Il supprime le Saint-Office et l’In-
ment historique. En effet le concile a dex des livres interdits. «Le 7 décem-
constitué, pour l’Église, “un tournant à bre était rendu public le motu proprio
180° en direction de l’œcuménisme”, les qui réformait la Congrégation du Saint-
communautés non catholiques se récla- Office, réforme demandée à plusieurs
mant du Christ ont été reconnues comme reprises pendant le concile, parfois
des “Églises” à part entière et dans tous avec une certaine virulence. Un Saint-
les textes du concile on a été attentif à ne Office accusé d’agir avec “obscuran-
pas négliger leurs positions. La cérémo- tisme”, de procéder, dans l’examen des
nie de Saint-Paul-hors-les-Murs était doctrines et des écrits suspects, avec
donc comme une séparation d’avec des des méthodes “rappelant celles de l’In-
“Églises” dont, en quatre ans, on s’était quisition”. Le Saint-Office s’appellerait
fort rapproché. Paul VI, à Jérusalem, désormais Congrégation pour la Doc-
avait déjà prié avec un orthodoxe, le pa- trine de la Foi, mais le cardinal Otta-
triarche Athénagoras. Cette fois, il pria viani restait à sa tête. Elle aurait pour
avec des orthodoxes, des anglicans, des tâche de “faire bien voir la raison
protestants et autres représentants de di- d’être des définitions et des lois, tout
verses communautés. Les prières alternè- en “corrigeant les erreurs et en rame-
rent avec les chants, prières en français, nant dans la bonne voie ceux qui s’en
en anglais, en grec et en latin... “ Votre sont écartés”. Les sanctions éven-
départ, dit Paul VI, va “créer un vide” ; il tuelles seraient prises après consulta-
avoua qu’il ressentirait cette séparation tion des évêques des régions concer-
“douloureusement”. Il dressait un bilan nées et après que les intéressés auront
positif : “Si aucun pas décisif n’a été ac- pu se défendre oralement ou par écrit.
compli en matière œcuménique, il Quelque temps plus tard, l’Index des li-
convient de ne pas sous-estimer ce qui a vres interdits sera supprimé» (71). Il est
été fait pendant le concile” et il espérait bon de rappeler que le Saint-Office
beaucoup de l’avenir. Il termina en ra- était la première des sacrées congréga-
contant un apologue de Soloviev sur tions romaines, fondée par Paul III
l’unité de l’Église : un homme cherchait (1542) pour combattre l’hérésie, et plu-
toute la nuit, dans le couloir d’un cou- sieurs fois réformée ; historiquement il
vent, quelle était la porte de sa chambre ; était issu du tribunal de l’Inquisition et
ce n’est qu’au matin qu’il se rendit avait parfaitement servi l’Église de la
compte qu’elle était ouverte. Ainsi pour Contre-Réforme jusqu’au concile Vati-
les “frères séparés” : ils n’ont qu’à pous- can II. Nous avons déjà vu comment
ser la porte de l’Église pour être chez Montini, quand il travaillait à la Curie,
eux. Le lendemain Paul VI invita à sa ta- avait plusieurs fois caché des livres
ble un de ces observateurs, Oscar Cull- condamnés ou protégé des modernistes
mann, un auditeur laïc, Jean Guitton, et en cherchant à éviter ou à dissimuler
un expert, le père de Lubac : trois leurs condamnations.
hommes avec lesquels il avait une • La question de la liberté religieuse
grande affinité» (70). dans le document conciliaire Dignitatis
33

Humanæ. La définition de la liberté reli- Paul VI manifesta sa satisfaction sur le


gieuse a été l’une des choses les plus texte, en ajoutant : “Ce document est ca-
graves survenues au concile, puisque pital. Il fixe le comportement de l’Église
telle qu’elle a été formulée dans Dignita- pour plusieurs siècles. Le monde l’at-
tis Humanæ elle est en contradiction ou- tend”» (73). Chiron précise que «Paul VI
verte avec le magistère précédent en par- n’accéda pas à la demande [de faire
ticulier celui de Pie IX dans Quanta Cura. continuer le débat] et fit procéder, dès le
Cette opposition entre le Magistère sécu- lendemain, à un “vote d’orientation”,
laire de l’Église et le concile est en effet c’est-à-dire l’approbation générale du
un des arguments sur lesquels se fonde la texte, sous réserve de “mise au point ul-
Thèse de Cassiciacum élaborée par Mgr térieure”. Ce vote préalable s’explique
Guérard des Lauriers pour soutenir avec par le fait que le pape devait se rendre
l’évidence des faits que Paul VI à partir quelques jours plus tard au siège de
du 7 décembre 1965 (date de promulga- l’ONU, à New York. Une première appro-
tion de Dignitatis Humanæ) n’était plus bation générale sur la liberté religieuse
formellement pape et n’avait plus la di- lui était nécessaire pour se présenter de-
vine autorité sur l’Église, c’est-à-dire vant les représentants du monde avec
“l’être avec” (comme le définissait Mgr une doctrine nouvelle qu’avait résumée
Guérard des Lauriers) le Saint-Esprit, le cardinal Journet : “le régime de la
puisqu’il ne voulait pas assurer le bien chrétienté” est terminé, l’Église et la “so-
de l’Église. Je ne veux pas entrer ici dans ciété civile” sont deux ordres bien dis-
la question de l’autorité pour laquelle je tincts, dans l’ordre temporel la liberté de
renvoie à ce que nous avons déjà écrit professer la religion doit être reconnue à
(72), mais seulement montrer comment tous, “sauf si elle détruit véritablement
Montini sur cette question fut partisan l’ordre public”» ( 74). De Mattei com-
des idées progressistes, qui triomphèrent mente ainsi : «L’Église a toujours ensei-
au concile surtout à cause de lui, et par gné la liberté religieuse au for intérieur,
conséquent sa grande et certaine respon- car nul ne peut être contraint à croire.
sabilité dans ce changement radical par Mais cette liberté intérieure que, en tant
rapport à l’enseignement traditionnel de que telle, aucune force extérieure ne
l’Église. «Le soir du 20 septembre [1965], peut contraindre, n’implique pas la li-
les organes directeurs du concile (modé- berté religieuse au for extérieur, c’est-à-
rateurs, conseil de Présidence, commis- dire le droit de pratiquer n’importe quel
sion de Coordination), réunis en séance culte et de professer n’importe quelle er-
plénière, décidèrent, à l’issue d’une dis- reur. La liberté religieuse fut invoquée,
cussion animée, qu’attendu les critiques après Dignitatis Humanæ, pour suppri-
violentes autant qu’éminentes envers le mer toute forme de “protection” par les
document, il valait mieux mettre de côté États de l’Église catholique ; mais le re-
le thème de la liberté religieuse. Mais la noncement de la part de l’autorité civile
réaction fut violente, surtout de la part à reconnaître la mission et le rôle de
des organes de presse les plus connus. Le l’Église, ainsi que l’existence d’une loi
21 septembre, il se passa donc ce à quoi naturelle, objective à protéger, a ouvert
personne ne s’attendait : Paul VI décida en même temps la voie à la diffusion du
d’intervenir dans cette affaire agitée, relativisme et à celle d’autres religions, à
donnant l’ordre péremptoire que les commencer par l’islam. Le relativisme
Pères soient conviés le matin même à se s’affirmait en refusant aux États toute
prononcer sur le texte. On alla voter, et forme de censure religieuse et morale à
par ce mystérieux mécanisme psycholo- l’égard de la déchristianisation défer-
gique qui liquéfiait les oppositions, les lante. L’islamisme, au nom de la même li-
placet, sur 2 220 présents, furent 1 997, berté religieuse, a prétendu la construc-
contre 224 non placet et un bulletin nul. tion de mosquées et de minarets, desti-
Le résultat de ce premier vote annonçait nés à dépasser en nombre les construc-
déjà l’issue du débat lors de la congréga- tions des églises, abandonnées ou trans-
tion générale qui devait suivre. Au cours formées en hôtels et en supermarchés»
d’une audience accordée à De Smedt, (75).
34

• Le culte de l’homme plutôt que le


culte de Dieu. Dans le fameux discours
de clôture du concile, Montini déclara
que l’Église avait le culte de l’homme :
«L’Église, en ces quatre années, s’est
beaucoup occupée de l’homme, “de
l’homme tel qu’en réalité il se présente
à notre époque, l’homme vivant,
l’homme tout entier occupé de soi,
l’homme qui se fait non seulement le
centre de tout ce qui l’intéresse, mais
qui ose se prétendre le principe et la
raison dernière de toute réalité [...], Le 7/03/1965, en la paroisse “Ognissanti” à Rome, Paul
VI célèbre pour la première fois la messe
l’homme tragique, victime de ses pro- en langue vernaculaire
pres drames [...], l’homme pécheur et
saint”. Et le pape de poursuivre : “La chât de s’en rendre compte…
vieille histoire du Samaritain a été le • Exit le latin des séminaires. «Le 25
modèle de la spiritualité du concile. janvier 1966 la Congrégation des sémi-
Une sympathie sans bornes l’a envahi naires et des universités publiait une
tout entier. [...] Nous aussi, Nous plus instruction pour que le latin soit main-
que quiconque nous avons le culte de tenu, dans les séminaires, lors de la cé-
l’homme”» (76). L’expression suscita stu- lébration de la messe et de la récitation
peur et scandale et fut un des princi- du bréviaire. Le cardinal Lercaro,
paux arguments utilisés par l’abbé de chargé de la réforme liturgique en
Nantes dans son Liber accusationis cours, s’en plaignit au pape ainsi que
contre Paul VI “pour hérésie schisme et plusieurs évêques français. Parmi eux,
scandale”. Il est à remarquer que la pre- le cardinal Villot, alors archevêque de
mière “condamnation” de la nouvelle Lyon. Quand il rencontra le pape, le 22
congrégation pour la doctrine de la Foi février suivant, il lui fit part de ses réti-
concerna justement l’abbé de Nantes, cences. Il obtint une réponse rassurante,
alors que les théologiens progressistes ainsi qu’en témoigne son confident :
ne furent pas objet de sanctions. “Paul VI ne pouvait désavouer la
Congrégation des séminaires et univer-
Le Post-concile sités. Il dit seulement que l’instruction
n’était pas impérative mais seulement
• La crise de l’Église n’existe pas ! indicative”. Dans les séminaires fran-
«Paul VI, au terme de cette année 1965 çais, le latin peut disparaître très rapi-
où il avait manifesté tant d’inquiétude, dement des offices liturgiques. Cette
restait confiant. Dans son interview au congrégation, d’ailleurs, changeait de ti-
Corriere della Sera, en octobre, il avait tulaire et était confiée à un Français.
affirmé : “À côté d’une crise de la foi Pour la diriger, Paul VI appelait, en ce
dans le monde, il n’y a pas, heureuse- mois de février, Mgr Garrone, qui était
ment, une crise de l’Église”. À cette intervenu pendant le concile pour de-
date, il estimait donc encore que mander la réforme des séminaires. Il
l’Église, régénérée par le concile, allait était nommé “pour que les choses bou-
pouvoir répondre à cette “crise de la gent”» (78).
foi”. La crise de l’Église avait pourtant
déjà commencé et allait s’amplifier. La nouvelle messe
Quelques années après le concile, il
dira à l’archevêque de Milan : “Nous en • Le véritable artisan de la réforme
espérions un printemps, et il est venu liturgique. «La réforme liturgique de-
une tempête”» (77). Dommage que Mon- mandée par le concile Vatican II et
tini fut un des principaux responsables mise en œuvre sous le pontificat de
de cette tempête et de cette crise et Paul VI, constitue sans doute le chan-
que l’optimisme moderniste lui empê- gement le plus profond dans la vie de
35

l’Église catholique. (…) Cette réforme


liturgique a été suivie pas à pas par
Paul VI avec une attention scrupu-
leuse, parce qu’il aspirait à cette ré-
forme depuis des décennies. Un des ar-
tisans de cette réforme a témoigné : Paul VI reçoit le
“[…] rien ne fut jamais décidé - à plus pasteur Max
forte raison promulgué - sans que Paul Thurian
VI ne fût tenu au courant, en reçût les
projets, qu’il notait de sa main, ne ma-
nifestât ses préférences et parfois ses critiques ouvertes ou filtrées d’émi-
exigences ou ses refus, au point que nents membres de la hiérarchie catho-
cela créa à certains moments de vérita- lique. Quelques semaines après la pu-
bles crises”. Encore cardinal, à la com- blication du nouvel Ordo Missæ, Max
mission centrale préparatoire puis lors Thurian, de la communauté protestante
de la première session du concile, il de Taizé, écrivit qu’il était “un exemple
était intervenu en faveur d’une telle ré- de cette préoccupation féconde d’unité
forme, se prononçant clairement pour ouverte et de fidélité dynamique, de
une introduction limitée de la langue vraie catholicité : un des fruits sera
vulgaire dans le rituel de la messe. De- peut-être que les communautés non ca-
venu pape, il put promulguer, en dé- tholiques pourront célébrer la sainte
cembre 1963, la constitution sur la li- Cène avec les mêmes prières que celles
turgie que le concile venait de voter. utilisées par l’Église catholique. Théo-
Celle-ci prévoyait une révision du rite logiquement c’est possible”. L’histoire
de la messe et des autres rites, l’intro- de la “nouvelle messe” de Paul VI et de
duction limitée de la langue vernacu- la critique contre elle est suffisamment
laire et de la concélébration, avec fa- connue de tous les “catholiques tradi-
culté donnée aux autorités ecclésias- tionalistes” et je ne m’y étendrai donc
tiques locales d’en étendre l’usage» (79). pas dans cet article, renvoyant à ce qui
Il est donc évident que Montini est le a déjà été écrit en d’autres occasions
principal responsable de la destruction sur notre revue ; je conseille à qui n’en
du culte et de la liturgie opérée par la aurait pas eu connaissance la lecture
réforme conciliaire, puisque sans lui et du Bref examen critique du père Gué-
son approbation ses collaborateurs mo- rard des Lauriers qui parut précisé-
dernistes n’auraient rien pu faire et ment en cette année 1969 avec la signa-
surtout n’auraient pas pu l’imposer à ture des cardinaux Ottaviani et Bacci,
l’Église entière. et du livre de l’abbé Cekada sur la nou-
• Une “messe” qui plaît aux protes- velle messe (80).
tants mais non aux catholiques. La • Un témoignage au-dessus de tout
conception de la messe était également soupçon sur la nouvelle messe : les in-
changée. En particulier, la messe était tentions de Paul VI. Jean Guitton, ami
définie : “La synaxe sacrée ou le ras- intime de Montini, «le 19 décembre
semblement du peuple de Dieu se réu- 1993, participant à un débat de Lu-
nissant sous la présidence du prêtre mière 101, la radio dominicale de Radio-
pour célébrer le mémorial du Sei- Courtoisie, a soutenu que : “l’intention
gneur”. Cette définition n’avait plus de Paul VI concernant la liturgie, concer-
rien de commun avec la définition tra- nant la soi-disant vulgarisation de la
ditionnelle de la messe comme renou- messe, était de réformer la liturgie catho-
vellement du sacrifice de la Croix et lique de manière à la faire coïncider à
laissait croire à une présence unique- peu près avec la liturgie protestante...
ment spirituelle du Christ, en s’appro- avec la Cène protestante”. “Je répète que
chant de la doctrine sur l’Eucharistie Paul VI a fait tout ce qui était en son
d’orientation protestante. Le nouvel pouvoir pour rapprocher la Messe catho-
Ordo Missæ susciterait les éloges de plu- lique de la Cène protestante. Aidé particu-
sieurs personnalités protestantes et les lièrement par Mgr Bugnini, qui n’a pas
36

toujours joui de sa confiance sur ce point. tôt une certaine indolence spirituelle
(…) Alors je crois ne pas me tromper en qui se refuse à faire l’effort personnel
disant que l’intention de Paul VI et de la d’intelligence et de participation” (17
nouvelle liturgie, qui porte son nom, est mars 1965)» (82).
de demander aux fidèles une plus grande • Une “messe protestante”. Mgr Le-
participation à la Messe, et de donner une febvre, non à tort, définit la messe de
plus grande place à l’Écriture et une Paul VI “la messe de Luther”. «Pour
place moins grande à tout ce qu’il y a en nous en tenir au seul rôle de Paul VI, on
elle, certains disent “de magique”, d’au- remarque que son principal souci a été
tres “de consécration consubstantielle”, de faire aboutir, dans tous ses aspects,
[en se corrigeant] transubstantielle, et la réforme liturgique ; le terme en était
qui est la foi catholique. Autrement dit, la révision complète, textes et gestes,
il y a en Paul VI une intention œcumé- du rite de la messe et de tous les autres
nique de changer - ou au moins de corri- rituels. En octobre 1966, il faisait entrer
ger ou atténuer - ce qu’il y a de trop au Consilium six “observateurs” non ca-
[sic !] “catholique”, au sens traditionnel, tholiques, dont le pasteur Max Thurian.
dans la Messe, et de rapprocher la Messe Ces observateurs luthériens, anglicans
catholique - je le répète - de la Messe cal- et autres ont-ils contribué à la révision
viniste”» (81). des rites, notamment celui de la
• Contre le latin dans la liturgie. messe ? L’un d’eux s’en est défendu :
Quand commença à se répandre avec la “Notre rôle était de suivre les travaux
“messe normative” l’usage de la langue et d’en faire bénéficier nos communau-
vulgaire apparurent en plusieurs pays tés, non pas d’influencer en quoi que ce
différentes associations pour la défense fût les travaux ou les décisions du
de la liturgie en latin auxquelles adhé- Consilium”. On ne peut croire néan-
rèrent un certain nombre d’intellec- moins qu’ils aient été des spectateurs
tuels et de personnes des milieux cultu- muets. Quand ce Consilium aura mis
rels (Una Voce fut fondée à Paris en dé- sur pied, en 1969, une “nouvelle
cembre 1964). «Quand se répandit au messe”, des critiques considéreront
cours de l’année 1965 l’usage de la qu’elle s’est protestantisée» (83).
langue parlée dans d’importantes par- • La “messe normative”. En 1967
ties de la messe, cela n’alla point sans eut lieu «l’expérimentation, devant les
critiques. Dix jours après l’entrée en vi- membres d’un synode, d’une “nouvelle
gueur de la messe en langue vulgaire, messe”. Les réformes liturgiques déjà
Paul VI répondait sévèrement, lors entrées en vigueur n’avaient concerné
d’une audience publique, à ceux qui se jusque-là que l’aspect extérieur de la
plaignaient : ces critiques, disait-il, “ne messe : l’abandon du latin, de certains
dénotent pas une vraie dévotion ou un gestes, de certaines prières. Le cœur de
sens authentique de la signification et la messe, le canon, qui contient les
de la valeur de la messe, mais bien plu- prières eucharistiques, pouvait depuis
le mois de mai 1967 être recité à voix
haute et en langue vulgaire mais il
Le père Guérard des n’avait pas été modifié. La “nouvelle
Lauriers, auteur du messe” allait changer cela. Le célébrant
Bref examen allait désormais pouvoir choisir entre
critique, fut un des
premiers à critiquer
quatre canons. À partir du 21 octobre le
la “nouvelle messe” synode étudia ces projets de réforme li-
de Paul VI turgique. On procéda à des votes sur
certaines propositions faites par le pré-
sident du Consilium, le cardinal Ler-
caro. Et surtout, le 24 octobre, les mem-
bres du synode assistèrent, dans la cha-
pelle Sixtine, à une messe expérimen-
tale ou “messe normative”. Messe en-
tièrement en italien, célébrée par le
37

que provoquaient parmi les fidèles les


multiples changements liturgiques.
Aussi la “messe normative” ne fut-elle
pas approuvée massivement : soixante
et onze membres du synode s’y montrè-
rent favorables, quarante-trois opposés
et soixante-douze souhaitèrent que des
modifications y soient apportées. Le
Consilium devait modifier sa “nouvelle
messe”» (84). Dans le Bref examen cri-
tique, le père Guérard des Lauriers fait
remarquer que le N.O.M. est en effet la
même chose que la messe normative :
«Dans le nouvel “ordo”, promulgué par
la Constitution apostolique Missale ro-
manum, on retrouve malheureusement,
identique dans sa substance, la “messe
normative”. Il ne semble pas que, dans
Paul VI avec le schismatique
l’intervalle, les Conférences épisco-
“orthodoxe” Athénagoras pales, en tant que telles aient été
consultées à ce sujet. (...) Le Synode
père Bugnini, avec l’utilisation d’une épiscopal avait refusé cette “messe nor-
nouvelle prière eucharistique à la place mative” qui est aujourd’hui reprise en
de l’antique canon romain, une réduc- substance et imposée par le nouvel
tion importante des prières person- “ordo”. Celui-ci n’a jamais été soumis
nelles dites par le prêtre, un allonge- au jugement collégial des Conférences
ment de la “liturgie de la parole”, la épiscopales. Jamais le peuple chrétien
suppression de certains gestes et génu- (et surtout pas dans les missions) n’a
flexions. Les réactions du synode à voulu une quelconque réforme de la
cette messe expérimentale furent très Sainte Messe. On ne parvient donc pas
mitigées. D’autant plus que la presse à discerner les motifs de la nouvelle lé-
italienne, en ces jours, se faisait l’écho gislation qui subvertit une tradition in-
d’appels lancés par différents groupes changée depuis le IVe ou le Ve siècle,
hostiles à la réforme liturgique en comme la Constitution elle-même le re-
cours. Ainsi, quelques jours avant cette connaît. Par conséquent, les motifs
messe expérimentale, Éric M. de Saven- d’une telle réforme n’existant pas, la ré-
them, président de la Fédération Inter- forme elle-même apparaît dépourvue
nationale Una Voce, regroupant une di- du fondement raisonnable qui, en la
zaine de pays, avait adressé un appel au justifiant, la rendrait acceptable au
synode pour “faire cesser, sans le moin- peuple catholique. (…) L’examen point
dre délai et sans aucune équivoque, par point du nouvel “ordo” révèle des
toutes les expérimentations sur les rites changements d’une telle portée qu’ils
de la messe. Dans le climat actuel des justifient, le concernant, le jugement
crises de la foi, ces expérimentations ne même qui fut émis sur la “messe norma-
peuvent que masquer et même provo- tive”. Le nouvel “ordo”, tout comme la
quer une perte rapide du sens du sacré “messe normative”, est fait pour
et donc compromettre la foi totale et contenter sur bien des points les plus
absolue en la présence réelle dans l’Eu- modernistes des protestants» (85).
charistie”. La messe normative fut criti-
quée par certains évêques du synode. Œcuménisme et politique étrangère
Le cardinal Heenan, archevêque de (ostpolitik)
Westminster, accusa le Consilium de
“technicisme, d’intellectualisme et de • Tête à droite, cœur à gauche… Il
manquer de sens pastoral”. D’autres fi- est certain que Montini fut un esprit
rent part de la lassitude et du trouble tourmenté et contradictoire «ce qui
38

montre combien coexistaient en lui


deux pensées, deux personnages diront
certains : une pensée religieuse, tradi-
tionnelle, de défense des grandes véri-
tés du dogme et de la discipline de
l’Église, et une pensée humaniste, socio-
politique, novatrice. Jusqu’à la fin du
pontificat, on peut dire qu’aucune n’est
parvenue à dominer l’autre. Un cardinal
qui l’a bien connu, en particulier
lorsqu’il servit d’intermédiaire entre le Le 24/03/1966 Montini donne au primat anglican
Ramsey son anneau épiscopal
pape et le concile, disait de Paul VI:
“C’est un pape qui souffre de dichoto- claration commune, Paul VI demanda
mie, la tête à droite et le cœur à au Dr Ramsey de bénir avec lui l’as-
gauche”» (86). semblée. […] Mais le plus spectaculaire
• Contre Apostolicæ Curæ de Léon restait à venir. Paul VI voulait marquer
XIII, en faveur de l’œcuménisme avec cette première visite officielle d’un pri-
les anglicans. Le Pape Léon XIII en mat anglican d’un “geste” qui marque
1896 par la bulle Apostolicæ Curæ avait l’opinion publique et montre les
défini de manière infaillible que les or- bonnes dispositions de l’Église catho-
dinations anglicanes devaient être lique envers les anglicans. Avant de
considérées invalides, mais Montini partir il ôta de son doigt l’anneau épi-
voulut rouvrir le dossier. «Le 23 mars scopal que les Milanais lui avaient of-
1966 Paul VI recevait le Dr Ramsey, ar- fert quand il était devenu leur arche-
chevêque anglican de Canterbury et vêque et il le donna au Dr Ramsey, qui
primat de l’église anglicane. Le Dr Fis- le passa à son doigt» (87). En somme,
cher, son prédécesseur, avait été reçu Montini voulut revoir une décision in-
par Jean XXIII mais à titre privé. Cette faillible de son prédécesseur, il fit bé-
fois il s’agissait d’une visite officielle, nir la foule par un laïc à qui il donna
d’un chef d’Église à un autre. Cette son anneau épiscopal… le tout au nom
rencontre illustre parfaitement dans d’un faux œcuménisme condamné par
quel esprit Paul VI entendait poursui- Pie XI dans Mortalium Animos.
vre son action œcuménique dans • Contre Salazar parce que non dé-
l’après-concile. (…) Le Dr Ramsey pro- mocrate-chrétien. «Quand les évêques
posa qu’une commission de théologiens portugais lui demandèrent de venir au
anglicans et catholiques soit créée pour Portugal à l’occasion du cinquantième
étudier les questions doctrinales qui sé- anniversaire des apparitions, il accepta
parent encore les autres Églises ; Paul mais en faisant effort sur lui-même. À
VI accepta. Le Dr Ramsey évoqua aussi son retour, il dira à Jean Guitton que
le problème des ordinations anglicanes ce fut un “pèlerinage de pénitence” et
que l’Église catholique considère un “acte d’humilité”. Par ailleurs le
comme invalides, le pape convint qu’il Portugal était alors dirigé par Salazar.
était temps de rouvrir le dossier. Enfin Depuis l’avant-guerre il avait mis en
le primat anglican se plaignit des pra- place un régime autoritaire et corpora-
tiques de la hiérarchie catholique en tif. Paul VI en se rendant à Fatima ne
Angleterre : les anglicans convertis au voulait pas paraître cautionner un tel
catholicisme étaient rebaptisés et les régime si contraire à l’idéal de démo-
mariages étaient très difficilement ac- cratie qu’il chérissait» (88).
ceptés. Paul VI répondit qu’il allait • Il restitue aux Turcs l’étendard de
écrire au cardinal Heenan, archevêque Lépante. En juillet 1967 Montini ac-
de Westminster, pour lui demander de complit un nouveau voyage en Turquie,
ne pas minimiser les baptêmes angli- pays à majorité musulmane dans lequel
cans. Le lendemain, 24 mars, eut lieu les catholiques ne sont que quelques
une autre rencontre, à la basilique milliers, et avant de partir il restitua
Saint-Paul-hors-les-Murs. Après une dé- au gouvernement turc l’étendard
39

conservé à Rome après la victoire de dier les passages contestables du “caté-


Lépante. Il s’agissait en réalité de “la chisme hollandais”. Une liste de correc-
bannière qu’Ali Pacha Moezzin hissa tions nécessaires fut finalement établie
sur son vaisseau galion, la Sultana. Un dans les premiers mois de 1968. Le 27
drapeau de soie lourde verte sur lequel juin enfin, le pape reçut le cardinal Al-
28 900 Constantinopolitains avaient frink, archevêque d’Utrecht, et lui de-
brodé, en fil d’or pur, 28 900 fois le manda d’user de son autorité pour im-
nom d’Allah. Ce furent les Vénitiens poser la publication des corrections de-
qui abordèrent la Sultana (Ali Pacha, mandées dans les éditions futures de
blessé par un arquebusier perdit alors l’ouvrage. À cette date le “catéchisme
la vie), s’emparant de l’étendard hollandais”, déjà vendu à des centaines
qu’après la victoire Sebastiano Venier de milliers d’exemplaires aux Pays-Bas,
transporta, fixé à la poupe de sa Capi- avait été traduit en Angleterre, aux
tana di Venezia, dans les eaux du bassin États-Unis, en Allemagne et allait l’être
de Saint-Marc pour ensuite en faire en France et en Italie. Le cardinal Al-
hommage à Pie V” (89). Mais l’étendard frink argua de difficultés diverses. Fi-
chrétien qui était hissé sur le vaisseau nalement Paul VI céda. Recevant le
galion chrétien se trouve encore à cardinal Villot en audience il lui dira :
Gaëte comme il est expliqué dans l’arti- “Le cardinal Alfrink est très peiné ;
cle cité. Montini au nom de l’œcumé- nous ne devons pas créer aux évêques
nisme avait oublié le sacrifice des huit hollandais des situations intolérables ;
mille héros de la Sainte Ligue qui péri- par conséquent nous nous contenterons
rent dans cette héroïque bataille si im- de publier les mises au point de la com-
portante pour le sort de la chrétienté. mission cardinalice, sans exiger l’inser-
• Deux sièges égaux pour le “pape” tion des corrections dans le caté-
et le “patriarche orthodoxe”. En 1967 chisme : les gens de bonne foi verront
au cours du synode, eut lieu la visite du où est la vérité et quel est le désir du
patriarche orthodoxe à Rome. «Athéna- Saint-Siège”. De fait, aucune édition
goras fut d’abord accueilli dans la basi- “corrigée” du Nouveau Catéchisme ne
lique Saint-Pierre. Paul VI avait voulu paraîtra en Hollande et les modifica-
que le patriarche orthodoxe et lui pren- tions demandées par le Saint-Siège se-
nent place sur deux sièges exactement ront publiées à part et présentées
identiques comme pour marquer leur comme des “recommandations”» ( 91).
égalité, en référence à la fameuse Paul VI n’aimait pas “condamner”, sur-
thèse des “Églises sœurs” affirmée tout les progressistes ; il réservait au
quelques mois plus tôt à Istanbul. La contraire ses condamnations et ses fou-
célébration d’une messe aurait même dres aux traditionalistes comme Mgr
été envisagée, qui aurait scellé l’union Lefebvre…
des deux Églises, puis l’idée aurait été
abandonnée suite aux refus exprimés
des patriarches orthodoxes d’Athènes
et de Rome» (90).
• Le catéchisme hollandais : une cor-
rection inexistante. «Un Nouveau Caté-
chisme, à l’usage des adultes, avait été
publié ; il contenait, en plusieurs
points, des affirmations contraires à la Paul VI en vi-
foi catholique. Dès 1966 des catholiques site dans les
hollandais avaient adressé une sup- îles Samoa
plique au pape lui demandant d’inter-
venir. Paul VI avait choisi d’agir avec
douceur, et en 1968 l’affaire n’était tou-
jours pas réglée. Plusieurs commissions
de théologiens et de cardinaux avaient
été successivement réunies pour étu-
40

• Le culte de l’homme : Janus à


deux visages. «Certains avaient pu in-
terpréter son discours de 1965 sur le
“nouvel humanisme”, sur le “culte de
l’homme”, et d’autres discours de ce
genre, comme l’avènement d’une reli-
gion désormais centrée sur l’homme.
Paul VI les détrompe et dénonce “un
phénomène que l’on observe dans les
milieux qui se disent religieux et chré-
tiens : celui de la religion anthropocen-
trique, c’est-à-dire d’une religion orien-
tée vers l’homme comme principal cen-
tre d’intérêt, alors que la religion doit Montini reçoit le dictateur communiste yougoslave Tito
être, par sa nature même, théocen-
trique, orientée d’abord vers Dieu, aller de pair avec une “libération” des
comme vers son principe et sa fin ul- structures économiques et politiques
time, et secondairement vers l’homme qui oppriment le peuple» (93).
considéré, recherché et aimé en fonc- • En Afrique, il reprend les évêques
tion des rapports et des devoirs qui en conservateurs qui voulaient maintenir
découlent”» ( 92). Mais à qui était la le latin et il s’exprime en faveur de l’in-
faute ? Qui avait tenu de tels propos culturation. Du 31 juillet au 2 août
dans ses discours publics ? Montini 1969, il se rendit en Ouganda pour la
avait jeté la pierre dans l’étang et en- clôture du symposium des évêques afri-
suite essayait de cacher sa main… cains et malgaches. «Au cours de ce
• Voyage en Colombie sous le signe symposium, [les évêques africains]
de l’œcuménisme et de la théologie de s’étaient souvent montrés sévères pour
la libération. En août 1968, Paul VI se l’évolution de l’Église en Occident : re-
rendit en Colombie et invita Roger grettant que l’élan missionnaire occi-
Schütz, protestant de la communauté dental se soit ralenti au profit des
de Taizé, à l’accompagner “parce qu’il grandes actions humanitaires des orga-
voulait aussi placer ce voyage sous le nisations catholiques internationales ;
signe de l’œcuménisme. Des ‘observa- se montrant favorables au nouveau rite
teurs’ anglicans, orthodoxes et protes- de la messe mais souhaitant conserver
tants participaient au Congrès Eucha- le latin dans la liturgie, signe d’unité
ristique International” (comme cela dans des pays ethniquement et linguis-
s’était déjà produit au concile…). Dans tiquement divisés. Aussi est-ce en latin
un discours qu’il tint, il déclare : «Je que le pape célébra la messe. Mais dans
parle à nouveau de “préférence” en- son allocution aux évêques, Paul VI
vers les pauvres : “Vous, fils très chers, sembla aller, sur certains points, à
vous êtes les préférés du Seigneur ! Et contre-courant de l’esprit général du
donc aussi les préférés du pape, qui est symposium. À ces évêques qui récla-
bien heureux d’être au milieu de vous, maient des missionnaires occidentaux,
de vous connaître, de vous consoler, de il dit : “Vous êtes désormais vos propres
vous bénir”. Ces propos, cette insis- missionnaires”. Contre le conserva-
tance sur une “option préférentielle en tisme de certains en matière liturgique,
faveur des pauvres”, furent souvent in- il affirma : “Un pluralisme est légitime,
terprétés politiquement et semblèrent même souhaitable, sous l’aspect de la
un encouragement à la “théologie de la langue, du génie, de la culture”. Une
libération” qui commençait à se répan- adaptation de la vie chrétienne dans le
dre en Amérique Latine. Cette théolo- domaine pastoral, rituel, didactique et
gie, prônée notamment par des pères spirituel, non seulement est possible
jésuites (Gustavo Gutierrez, Fernando mais est favorisé par l’Église. La ré-
Cardenal…), affirmera au cours des an- forme liturgique, par exemple, le dit”.
nées que l’annonce de l’Évangile doit Et il lança comme un mot d’ordre :
41

“Vous pouvez, vous devez avoir un • “Le pape a trahi le cardinal Minds-
christianisme africain”. L’expression, zenty”. L’histoire du cardinal Minds-
devenue célèbre, légitimait ce qu’on zenty est très connue : nommé par Pie
commençait à appeler alors l’“africani- XII en 1945 archevêque d’Esztergom et
sation” du christianisme, le terme d’“in- primat de Hongrie, pays satellite de
culturation”, aujourd’hui répandu, l’Union Soviétique, le 26 décembre 1948
n’étant pas employé à l’époque» (94). il fut appréhendé à l’évêché par la po-
• Paul VI et la Chine communiste. lice et arrêté. Soumis à des tortures et
«L’attitude de Paul VI envers la Chine des humiliations, il fut frappé pendant
communiste a toujours été empreinte des jours, drogué et contraint à écouter
d’une bienveillance que l’on peut esti- des obscénités pour le pousser à recon-
mer, aujourd’hui, exagérée. Dans les naître d’avoir commis des exactions
années 1960, l’Église catholique en contre le régime. Après un simulacre de
Chine était dirigée par six évêques ap- procès, l’année suivante il fut condamné
partenant à l’“Église Patriotique Chi- à la prison à vie. Épuisé physiquement,
noise”, créée dans les années cin- il signa l’accusation de conspiration vi-
quante, soumise au gouvernement com- sant à renverser le gouvernement, mais
muniste et condamnée sous Pie XII. Les eut la lucidité de placer au bas l’abré-
évêques (et les milliers de prêtres) qui viation C.F. (coactus feci, c’est-à-dire “si-
avaient refusé cette Église patriotique gné sous la contrainte”). L’arrestation
avaient été soit exécutés, soit emprison- du cardinal eut une grande résonnance
nés soit condamnés à l’exil. Il semble dans les journaux et fut considérée
que Paul VI n’a jamais considéré cette comme une preuve de la nature antireli-
Église comme schismatique. Pendant le gieuse et oppressive du communisme.
concile, apprenant que le père Wenger En 1956, année de l’insurrection popu-
devait se rendre en Chine, il l’avait laire, le cardinal fut libéré et quand les
chargé d’un message oral pour l’arche- troupes soviétiques réprimèrent la ré-
vêque de Pékin, membre de l’Église Pa- volte dans le sang, il se réfugia à l’am-
triotique : “Que le pape se sentait en bassade des États-Unis à Budapest où il
communion de foi et de charité avec resta jusqu’en 1971. L’épilogue de son
l’Église de Chine et que son grand désir affaire est très triste quant au compor-
était qu’elle puisse être présente à la tement de Paul VI à son égard : il fut sa-
dernière session du concile”. Le mes- crifié de manière indigne en faveur de
sage ne put être transmis, mais Paul VI l’ostpolitik vaticane. «Pour le gouverne-
continua à se montrer bienveillant non ment communiste qui l’avait condamné
seulement à l’égard des catholiques chi- à la prison avant 1956, sa présence sur
nois mais du gouvernement lui-même. Il le sol national était un ferment perma-
lui semblait qu’un pays d’un milliard nent de révolte contre le régime. Dans
d’habitants ne pouvait être mis au ban leurs négociations avec le Saint-Siège
des nations» (95). sur le sort des catholiques hongrois, les
autorités de Budapest exigèrent le dé-
Paul VI recevant le cardinal Mindszenty part de Hongrie du cardinal Minds-
zenty, assorti de conditions draco-
niennes. En juin 1971 Paul VI envoya
un représentant personnel, Mgr Zagon,
auprès du cardinal Mindszenty pour ob-
tenir son départ. Les discussions furent
difficiles. En quittant la Hongrie, le car-
dinal avait le sentiment de trahir les ca-
tholiques du pays déjà soumis à tant de
persécutions. D’autant plus que des
conditions très sévères étaient imposées
à ce départ : le cardinal devait quitter
le pays discrètement sans pouvoir sa-
luer une dernière fois les fidèles, à
42

l’étranger il devait s’abstenir de toute celle-ci : “Le pape a trahi le cardinal


déclaration publique qui pourrait Mindszenty”. Le 6 février, le primat de
“contrarier les relations entre le Saint- Hongrie rendait publique une déclara-
Siège et le gouvernement hongrois ou tion par laquelle il faisait savoir qu’il
être offensante pour la République po- n’avait pas démissionné, que la décision
pulaire”, il ne devait pas publier ses Mé- avait été prise “unilatéralement par le
moires qui contenaient le récit de son Saint-Siège” et que “la direction des
procès et de son emprisonnement. Le diocèses hongrois est entre les mains
cardinal Mindszenty n’accepta qu’avec d’une administration ecclésiastique
beaucoup de réticences les conditions mise en place et contrôlée par le régime
qu’on lui imposait et quittait pour tou- communiste”. La salle de presse du
jours Budapest en septembre, avec l’es- Saint-Siège publia une déclaration ex-
poir que son départ servirait à une amé- pliquant que la décision avait été prise
lioration de la situation des catholiques pour permettre à l’Église d’assurer sa
hongrois. À Rome, Paul VI lui réserva le mission en Hongrie. Un an plus tard,
meilleur accueil, le logeant au Vatican Paul VI nommait cinq nouveaux
dans un somptueux appartement de la évêques en Hongrie et après la mort du
tour Saint-Jean, multipliant les cadeaux cardinal Mindszenty, Mgr Lekai sera
et les messages d’estime. Il l’assura que, nommé archevêque d’Esztergom et pri-
bien qu’exilé, il restait archevêque mat de Hongrie» (96).
d’Esztergom et primat de Hongrie. Mais • Encore l’Ostpolitik : “vir casaro-
le Saint-Siège et le cardinal Mindszenty liensis non sum”. «L’ostpolitik vaticane
entrèrent rapidement en désaccord. sera très critiquée. Pour réussir à main-
Quand le primat demanda de pouvoir tenir en vie la hiérarchie catholique
nommer des évêques suffragants pour dans les pays totalitaires, le Saint-Siège
s’occuper des diverses communautés devra consentir à la nomination
hongroises en exil, cela lui fut refusé. d’évêques approuvés par les régimes
En juillet 1973 était créé en Hongrie le communistes, et du côté de plusieurs
“Secrétariat du Comité Catholique pour communautés chrétiennes de l’autre
la Paix”, organisme destiné à regrouper côté du Rideau de fer, on accusera
les prêtres favorables au régime et à Rome d’avoir capitulé face au commu-
contrôler l’Église. Le Saint-Siège ne pro- nisme. Demeurera célèbre la définition
testa pas. En revanche, Paul VI, qui que donnera de lui-même le cardinal
avait reçu le manuscrit des Mémoires du polonais Stefan Wyszynski, quand, in-
cardinal Mindszenty et l’avait lu, le dis- tervenant lors d’un synode, il dira “vir
suada de les publier et, le 1er novembre casaroliensis non sum”, pour marquer
1973, lui demanda de renoncer à son son désaccord à l’égard de l’ostpolitik
siège archiépiscopal. Le cardinal Minds- menée à bien par l’archevêque Casaroli
zenty refusa. Le pape lui-même ne lui pour le compte du pontife. Alors que le
avait-il pas promis qu’il conserverait ses cardinal ukrainien Slipyi, au synode
charges ? Après une nouvelle demande sur l’évangélisation de 1974, dé-
de Paul VI et un nouveau refus du pri- clare :“Nous avons entendu dans les
mat, le 5 février fut rendue publique la discours précédents uniquement des
décision du pape de déclarer vacant références à ces pays où existe la li-
l’archidiocèse d’Esztergom et de nom- berté de religion et dans lesquels on
mer un administrateur apostolique, Mgr peut prêcher l’Évangile ; rien n’a été
Lekai, pour remplacer l’archevêque des- dit sur ces pays où il n’y a pas la liberté
titué. La nouvelle suscita des commen- de religion et dans lesquels l’Église est
taires indignés dans la presse. L’écri- persécutée. Je pense à l’Ukraine et aux
vain Giuseppe Prezzolini, pourtant lié Ukrainiens, qui sont persécutés par les
au pape, déclarait qu’il y avait “quelque bolchéviques, tandis que les États ca-
chose de machiavélique dans la déposi- tholiques du monde cherchent liens et
tion du cardinal : la raison d’État”. Sur contacts avec les communistes sans-
les murs de Rome, près du Vatican, on Dieu soviétiques et chinois et ne font
pouvait lire des inscriptions telles que que les soutenir” (97).
43

Paul VI et les traditionalistes

• Un peu d’histoire. En 1970 Mgr


Lefebvre fonda en Suisse le séminaire
d’Écône où il accueillait des sémina-
ristes du monde entier pour leur don-
ner une formation traditionnelle. La
Fraternité Sacerdotale Saint-Pie-X fut L’abbé Georges de
approuvée ad experimentum, d’abord Nantes à Rome en
par Mgr Charrière, évêque de Lau- 1973, place Saint-
sanne et en 1971 par le cardinal Pierre, pour présenter
son Liber accusationis
Wright, préfet de la Congrégation pour contre Paul VI
le clergé. Le refus de Mgr Lefebvre
d’accepter la nouvelle messe provoqua
rapidement sentiments hostiles et cen-
sures. Une instruction de la Congréga- canonique soit intenté au pape en vue
tion pour le Culte Divin avait fixé au 28 de sa déposition. La salle de presse du
novembre 1971 la date “à partir de la- Saint-Siège diffusa un communiqué
quelle on devra obligatoirement utili- pour déplorer ce “geste arrogant et fa-
ser le nouvel Ordo Missæ”, à la seule natique [...] dépourvu de sérieux et de
exception des prêtres âgés ou malades, fondement canonique”. Il fut interdit à
n’en déplaise à ceux qui plus récem- l’abbé de Nantes, et à la délégation qui
ment ont soutenu que la messe triden- l’accompagnait, de remettre directe-
tine n’avait jamais été interdite… Mon- ment le libelle au pape, néanmoins, le
tini au contraire, comme on peut le 11 avril, au cours d’une audience pu-
voir, l’interdit et la combattit de toutes blique, un diplomate ami put déposer le
les manières possibles. Des pétitions et Liber entre les mains de Paul VI. Une
des initiatives en faveur de la messe telle accusation ne pouvait paraître
tridentine dans le monde entier re- qu’aberrante aux yeux du pape, le li-
cueillirent la signature d’une centaine belle d’accusation ne fut même pas exa-
d’écrivains et d’artistes non seulement miné par la Congrégation pour la Doc-
catholiques «mais aussi protestants, or- trine de la Foi qui, depuis 1969, estimait
thodoxes, juifs ou agnostiques, parmi son auteur “disqualifié”. Mais ce Liber
lesquels Agatha Christie, Graham fut diffusé à plus de dix mille exem-
Greene, Yehudi Menuhin, Jorge Luis plaires» (99). Une façon un peu trop hâ-
Borges, Roger Caillois, Henry de Mon- tive pour liquider une accusation qui au-
therlant, Victoria Ocampo ou Augusto rait mérité d’être prise en considération
Del Noce. Cet appel, publié dans le de manière plus approfondie…
Times de Londres puis dans d’autres • Les condamnations de Mgr Lefeb-
journaux du monde, impressionna, dit- vre. Nombreuses furent les condamna-
on, le pape. Néanmoins, comme à son tions et les censures infligées à Mgr Le-
habitude, il ne voulut point contredire febvre en ces années par Paul VI ; il ne
la décision qu’avait prise une congréga- fit certainement pas preuve d’autant
tion et s’en remit aux conférences épi- de sévérité et de rigueur à l’égard des
scopales de chaque pays pour décider progressistes… devinez pourquoi ? À la
de l’opportunité de concessions» (98). fin de 1974 eut lieu la visite aposto-
• L’abbé de Nantes. «Mettant en lique avec l’envoi de deux visiteurs à
cause cette fois le pape lui-même, le li- Écône ; suite à cette visite s’ensuivit la
belle d’accusation que l’abbé de Nantes, déclaration du supérieur de la FSSPX
fondateur de la Ligue de la Contre-Ré- qui disait : “Nous refusons par contre et
forme catholique, vint déposer à Rome, avons toujours refusé de suivre la Rome
en avril 1973. En une centaine de pages de tendance néo-moderniste et néo-protes-
son Liber accusationis in Paulum sextum tante qui s’est manifestée clairement
accusait Paul VI d’«hérésie, schisme et dans le concile Vatican Il et après le
scandale» et demandait qu’un procès concile dans toutes les réformes qui en
44

la plaie de mon pontificat”» (100). Mon-


tini n’aimait pas, comme nous l’avons
déjà fait remarquer, Mgr Lefebvre et il
en fit une question personnelle, en ou-
tre il était un fervent partisan de sa ré-
forme liturgique et ne voulait absolu-
ment pas accorder la liberté de célébra-
tion de la Messe tridentine qu’il avait
voulu supprimer… (à l’inverse de ce que
feront ses successeurs Wojtyla avec l’in-
Mgr Lefebvre avec Pie XII dans les années 50 dult et Ratzinger avec Summorum Ponti-
ficum). Mgr Lefebvre, de son côté, tout
sont issues” ; puis Mgr Lefebvre fut en reconnaissant l’autorité de Paul VI
convoqué à Rome pour être interrogé comme pape [et là résidait son erreur]
par une commission cardinalice préci- lui désobéissait et ceci constituait - et
sément sur cette déclaration et non sur constitue - le péché originel du lefeb-
le maintien de la Messe de saint Pie V vrisme qui se manifestera toujours da-
qui fut jugée “en tout point inaccepta- vantage au cours des années suivantes.
ble”. L’évêque de Lausanne, Fribourg «Paul VI adressa une longue lettre
et Genève, Mgr Mamie, retira l’appro- au prélat où il posait les conditions
bation canonique de son prédécesseur d’une levée des sanctions, notamment :
à la Fraternité Saint-Pie-X, le sémi- adhérer “franchement au concile œcu-
naire d’Écône perdait le “droit à l’exis- ménique Vatican II et à tous ses
tence”. La sanction venait très proba- textes», «reconnaître explicitement la
blement, même si on n’en a pas la certi- légitimité de la liturgie rénovée, no-
tude, de Paul VI lui-même. En 1976, tamment de l’Ordo Missæ, et Notre
après les ordinations du 29 juin, le 22 droit de requérir son adoption par l’en-
juillet arriva aussi la suspense a divinis. semble du peuple chrétien”, “cesser et
«Paul VI était outré des accusations rétracter les graves accusations ou insi-
portées contre lui et le concile. Il dé- nuations que vous avez portées publi-
clara : “S’il y a plus tard un schisme, ce quement contre Nous, contre l’ortho-
n’est pas moi qui en serais responsable, doxie de Notre foi et Notre fidélité à la
mais l’obstination insensée et devenue charge du Successeur de Pierre, et
morbide de Mgr Lefebvre, qui déchire contre Notre entourage immédiat”.
l’Église et qui la scandalise par sa dés- Mgr Lefebvre n’accepta pas ces condi-
obéissance”. Quand Jean Guitton lui tions et le pontificat de Paul VI se ter-
suggéra d’autoriser que la messe de mina sans qu’une solution intervînt»
saint Pie V soit à nouveau autorisée en (101).
France, pour apaiser les esprits, au • Au contraire, pour Hans Küng, pas
moins “pendant une période probatoire de condamnation. «Un théologien
et provisoire”, Paul VI s’écria : “Cela ja- comme Hans Küng, opposé en tous
mais !”. Paul VI était prêt à pardonner points à Mgr Lefebvre, regrettait l’atti-
si Mgr Lefebvre se soumettait mais il tude inflexible du pape. Au lendemain
ajouta : “La condition est que Mgr Le- de sa mort, il écrira : “J’ai toujours sa-
febvre soit sincère dans son repentir. lué le fait que le pape Paul VI n’ait ex-
Or, j’ai tout lieu de croire qu’il n’est pas communié ni l’archevêque Lefebvre, ni
sincère, que je serai dupe d’une soumis- les traditionalistes. Tout était resté en
sion”. Enfin quand Jean Guitton se pro- suspens. C’était une porte ouverte à la
posa comme médiateur, Paul VI en re- réconciliation. Je regrette toutefois que
fusa le principe sauf si le philosophe se le pape ne leur ait pas permis de célé-
rendait à Écône sans dire qu’il était en- brer la messe traditionnelle”. Dans le
voyé par le pape. Paul VI eut d’autres même article, Hans Küng écrivait : “Je
termes très sévères envers Mgr Lefeb- suis personnellement reconnaissant au
vre : “C’est un soldat perdu [...]. Il re- pape de m’avoir protégé tout au long de
lève de l’hôpital psychiatrique [...]. C’est ces années”. Effectivement, ce n’est que
45

sous le pontificat suivant que le théolo-


gien rebelle sera sanctionné. Deux de
ses livres, L’Église et Infaillible ? Une in-
terpellation, qui contenaient des opi-
nions contraires à la doctrine catho-
lique, firent pendant plusieurs années
l’objet d’un examen de la part de la
Congrégation pour la Doctrine de la Foi.
Ce n’est que le 15 février 1975 que celle-
ci publia une “Déclaration” où elle rele-
vait les erreurs contenues dans les deux
livres et demandait au théologien de ne
pas “continuer à enseigner ces opi-
Hans Küng
nions”. Mais aucun de ses écrits n’était
interdit, lui-même conservait sa charge avait averti don Macchi. Dans le mes-
de professeur de théologie à l’Univer- sage destiné au patriarche de Constan-
sité de Tübingen. Dans des ouvrages ul- tinople, Paul VI déclarait : “L’Église
térieurs, Hans Küng prendra à nouveau catholique et l’Église orthodoxe sont
des positions contraires à la doctrine de unies par une communion tellement
l’Église. Pourquoi Paul VI s’est-il mon- profonde qu’il lui manque bien peu
tré, dans ce cas, si plein de mansué- pour qu’elle atteigne la plénitude com-
tude ? Sans doute parce qu’il connais- mune de l’Eucharistie”» (103).
sait l’auteur depuis de nombreuses an- • Prélats francs-maçons et réforme
nées, depuis la fin des années cin- des règles sur l’appartenance à la
quante. Il avait lu tous ses livres avec at- franc-maçonnerie. «Une autre polé-
tention, des notes manuscrites conser- mique fut celle portant sur l’apparte-
vées dans les ouvrages de sa biblio- nance à la franc-maçonnerie de cer-
thèque l’attestent. […] et, témoigne tains prélats. Des listes, diffusées par
aussi Hans Küng : “En ce qui me un certain “Comité international de dé-
concerne, il s’est toujours gardé de me- fense de la tradition catholique” com-
sures disciplinaires et les a empê- mencèrent à circuler au début de l’an-
chées”» (102). née 1976 et furent reprises par diffé-
rents organes de presse en Italie et
Vers la fin : les dernières années dans de nombreux pays. Des listes pré-
cisant, pour chacun des noms, la date
• Il s’agenouille devant le métropo- d’affiliation à la franc-maçonnerie.
lite schismatique. «Le 14 décembre Parmi les noms cités, on relevait ceux
1975, pour le dixième anniversaire de de plusieurs cardinaux (Baggio, Lié-
la levée des excommunications, le pape nart, Pellegrino, Poletti, Suenens,
reçut une délégation orthodoxe, Villot) et de proches du pape (don Mac-
conduite par le métropolite Meliton de chi, Virgilio Levi, Mario Brini qui fut
Chalcédoine, représentant du pa- un de ses secrétaires dans les années
triarche de Constantinople. Celui-ci
avait adressé au pape une lettre où il le
saluait comme “premier évêque du
Corps du Christ par rang et en hon-
neur”. Le jour de la rencontre, après
une messe célébrée à la chapelle Six- Le 14/12/1965,
Paul VI s’age-
tine, Paul VI s’agenouilla devant le mé- nouille devant
tropolite et lui baisa les pieds. Geste le patriarche
extrême d’humilité, imitant celui de Jé- schismatique
sus envers ses apôtres le soir du Jeudi Meliton de
saint. Geste spectaculaire encore une Chalcédoine
fois, mais non spontané : le métropolite
n’en avait pas été prévenu mais le pape
46

quarante) et surtout celui de Mgr Bu- avaient reproduit une des listes accusa-
gnini, l’homme de la réforme litur- trices» (104). Donc, grâce à Paul VI, la
gique. Ces “révélations” n’auraient double appartenance à l’Église et à la
guère fait l’objet de discussions que franc-maçonnerie sera désormais possi-
l’espace de quelques semaines, comme ble sans encourir nécessairement l’ex-
d’autres plus ou moins authentiques, si communication.
quelques faits n’étaient venus ampli- • Il se défend publiquement de l’ac-
fier la rumeur. Tout d’abord, dans les cusation d’homosexualité. En 1976 ce
années précédentes, des démarches fut l’écrivain et diplomate français Ro-
discrètes avaient été faites auprès de ger Peyrefitte (1907-2000), qui accusa
Paul VI, entre autres par le cardinal Montini d’être homosexuel en donnant
Heenan et par Ernst van Hecke, Grand le nom et le prénom de celui qui en au-
Maître de la Grande Loge nationale de rait été l’amant quand il était arche-
France, pour que l’Église assouplisse sa vêque de Milan, et peut-être aussi
position à l’égard de la franc-maçonne- après : l’acteur Paolo Carlini, disparu
rie : que l’appartenance à la franc-ma- par la suite à seulement 57 ans en 1979.
çonnerie “régulière” soit distinguée de Tornielli écrit à ce propos : «Affaire
la franc-maçonnerie laïque et anticléri- vraiment invraisemblable, tant du fait
cale, et que ses membres ne soient plus de la rigueur morale de Montini que du
excommuniés. Le Grand Maître de la fait de sa prudence proverbiale. Qu’on
Grande Loge d’Autriche a témoigné n’oublie pas que précisément dans les
que Paul VI “avait donné l’ordre qu’en années milanaises, le désormais ex pro-
révisant le CIC [code de droit canon] secrétaire d’État se sentait plutôt
l’on ne retienne plus les canons qui se contrôlé par cette curie romaine qu’il
réfèrent à l’excommunication des avait dû quitter indépendamment de sa
francs-maçons, en particulier le canon volonté. Et jamais ses adversaires,
2335”. Cette révision du droit canon même les plus ardents qui avaient
n’aboutit que sous le pontificat de contribué à son éloignement, n’agiteront
Jean-Paul II, mais sous Paul VI, en les questions liées à sa supposée
1974, une lettre de la Congrégation conduite immorale, se référant toujours,
pour la Doctrine de la Foi précisa que, en revanche, aux idées politiques du
selon le canon 2335, étaient excommu- prélat brescian» (105). La nouvelle évi-
niés “seulement les catholiques qui demment fit le tour du monde et Paul
font partie d’associations agissant VI au cours de l’Angelus du dimanche
contre l’Église”. Ceci ne signifiait-il pas des Rameaux, le 4 avril 1976, déclara :
que certaines obédiences maçonniques “Nous savons que notre Cardinal Vi-
“spiritualistes” n’étaient plus inter- caire et ensuite la Conférence Épisco-
dites aux catholiques ? Les listes ma- pale Italienne vous ont invités à prier
çonniques apparues en 1976 semblè- pour notre humble personne, objet de
rent confirmer, pour certains, que risée et d’horribles et calomnieuses insi-
l’Église catholique et une branche de la nuations d’une certaine presse, irrespec-
franc-maçonnerie se rapprochaient. tueuse de l’honnêteté et de la vérité.
L’autre fait propre à alimenter la ru- Nous vous remercions de ces démonstra-
meur fut, en janvier 1976, l’éviction de tions de piété filiale et de sensibilité
Mgr Bugnini : il fut nommé nonce en morale. Ainsi nous sommes reconnais-
Iran. Cet exil du promoteur de la ré- sant à tous ceux qui ont correspondu à
forme liturgique, dans un poste diplo- ces exhortations de solidarité spiri-
matique de second ordre, apparut tuelle. Merci, merci de tout cœur.
comme une sanction. Paul VI se sépa- Puisque ce fait et d’autres épisodes dé-
rait de Mgr Bugnini parce qu’il aurait plorables ont eu pour fallacieuse origine
appris qu’il était franc-maçon. Aucun une récente déclaration de notre
autre prélat accusé d’être franc-maçon Congrégation pour la doctrine de la Foi
ne fut sanctionné. Certains, tel le cardi- concernant des questions d’éthique
nal Villot, firent publier des démentis sexuelle, nous vous exhortons à donner
formels dans les publications qui à ce document et à l’ensemble des ensei-
47

pérer qu’il y a encore en vous un senti-


ment d’humanité qui aura le dessus. J’en
attends la preuve dans la prière et en vous
aimant bien”. Sans réponse de leur part,
il tenta une ultime démarche : leur of-
frir une importante somme d’argent en
échange d’Aldo Moro. Il chargea don
Macchi d’entrer en contact avec les ter-
roristes, ce qu’il réussit à faire, semble-t-
il, mais sans réussir à les convaincre.
Aldo Moro fut exécuté et son corps fut
découvert le 9 mai, non loin du siège de
la Démocratie Chrétienne» (107). «An-
Paul VI avec Aldo Moro dreotti confirmera que le pape était
gnements, dont il fait partie, une atten- prêt à payer 10 milliards pour sauver la
tive considération et une vertueuse ob- vie de Moro : “Parmi les initiatives du
servance, de manière à raffermir en Vatican pour obtenir la libération du
vous un esprit de pureté et d’amour, qui président de la DC il y eut l’offre d’une
fasse barrage au licencieux hédonisme très forte rançon. L’intermédiaire par
répandu dans les mœurs du monde d’au- lequel ils essayaient d’arriver aux briga-
jourd’hui, et qui alimente dans vos âmes distes était un aumônier de prison.
la maîtrise complète des passions hu- C’était Paul VI qui s’impliquait, moi je
maines en augmentant le sens fort et n’y opposais aucune difficulté. J’ai es-
joyeux de la dignité et de la beauté de péré de toutes mes forces que cette ten-
la vie chrétienne” (106). tative aboutirait à la libération de
• L’affaire Moro : à genoux devant Moro”» (108). Il faut rappeler que le gou-
les Brigades Rouges. «En mars (1978), vernement d’alors avec à sa tête An-
le chef de la Démocratie Chrétienne, dreotti choisit la ligne de la fermeté,
Aldo Moro, fut enlevé par les Brigades c’est-à-dire de ne pas négocier avec les
Rouges. Le pape le connaissait depuis brigadistes : «à la question si Andreotti
l’époque de la FUCI et était resté avait fait tout son possible pour Moro,
constamment en rapport avec lui, y com- Cossiga [qui à l’époque était Ministre de
pris quand il avait dirigé le gouverne- l’Intérieur] a répondu : “Oui, sauf négo-
ment. Les terroristes d’extrême gauche cier. Mais il fut favorable pour ouvrir un
qui avaient enlevé Moro exigeaient la li- canal à travers la Croix Rouge et Am-
bération de prisonniers politiques. Le 19 nesty. Ce furent les communistes qui y
mars Paul VI lança un premier appel mirent fin. ... Berlinguer et Pecchioli
pour la libération “de celui qui nous est vinrent chez moi au Viminal, ils étaient
cher”. Le 20 avril Aldo Moro, sous la plus en confiance avec moi qu’avec An-
menace de ses ravisseurs, écrivit au dreotti, pour me dire : ‘Maintenant, ça
pape, lui demandant d’intervenir auprès suffit’» (109).
du gouvernement italien pour que les • Il voulut vendre la Pietà de Mi-
exigences de ses ravisseurs soient intro- chel-Ange à un marchand d’art juif. En
duites. Paul VI était prêt à le faire mais juillet 1978, donc un mois avant de
le cardinal Villot et Mgr Casaroli l’en mourir, Paul VI essaya de vendre la
dissuadèrent. Paul VI décida alors de Pietà de Michel-Ange qui se trouve à
tenter une démarche personnelle au- l’intérieur de Saint-Pierre à Rome. «Un
près des Brigades Rouges cette fois. Le célèbre marchand d’art fut convoqué
22 avril, quelques heures avant l’ultima- dans la cité léonine par Mgr Jean Rod-
tum fixé par les ravisseurs, après y avoir hain, président de Caritas Internationa-
travaillé une partie de la nuit, il fit dif- lis. Le marchand qui s’appelle Daniel
fuser son célèbre appel “aux hommes des Wildenstein est un juif ashkénaze ap-
Brigades Rouges” : “Je vous en prie à ge- partenant à une des dynasties de col-
noux : libérez monsieur Aldo Moro, simple- lectionneurs les plus importants du
ment, sans conditions [..] ; laissez-moi es- monde. Wildenstein fut invité par Rod-
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hain pour qu’il puisse voir et estimer propre du pape, la décision, l’énergie
des toiles conservées à la Banque vati- de la décision” (111). Sa cause de béatifi-
cane, tableaux que le Saint-Siège vou- cation a été introduite en 1993 ; il a été
drait vendre pour en destiner la recette “béatifié” le 19 octobre 2014 et “cano-
à des œuvres de bienfaisance. À sa sur- nisé” le 14 octobre 2018 par Bergoglio.
prise Daniel Wildenstein apprend que
Paul VI veut le rencontrer. Et la ren- Conclusion
contre est vraiment des plus singu-
lières. Paul VI en effet, c’est ce qu’écrit Il ne nous revient pas de juger ni
Daniel Wildenstein dans ses mémoires, son âme ni sa conscience, puisque ce
communique au marchand d’art son in- jugement n’appartient qu’à Dieu et
quiétude, son angoisse pour la pau- G.B. Montini a déjà été jugé par le Sei-
vreté du Tiers monde, tandis que nous, gneur, et nous ne pouvons savoir où il
dit le Saint-Père, “nous reflétons se trouve (nous devons d’ailleurs tous
l’image d’un Vatican assis sur un trône craindre le juste jugement de Dieu à
d’or”. Et voilà qu’au marchand juif stu- notre mort), nous pouvons seulement
péfait est confiée l’affaire la plus in- prier pour lui. Ce que j’ai essayé de
croyable de sa vie. Le pontife lui de- faire dans cet article est une analyse
mande en effet de s’occuper de la historique et factuelle de son œuvre ;
vente de la Pietà de Michel-Ange...» certes, mon analyse est critique et a un
( 110). Ce fut ensuite le marchand lui- “préjugé” traditionnel qui ne sera pas
même qui convainquit Montini que partagé par ceux qui, contrairement à
cette opération n’était pas opportune moi, ont une vision progressiste et mo-
et qu’elle ne pouvait se faire… En derniste de la foi et qui approuveront
2002, Wildenstein aurait démenti cet donc et exalteront les choses qui,
épisode en le faisant supprimer de ses d’après la manière de voir tradition-
mémoires, mais confirma avoir rencon- nelle de l’Église, doivent être considé-
tré Montini pour sonder la possibilité rées négativement.
d’acheter le chef-d’œuvre. Il est certain que si Montini était un
• La mort. Paul VI mourut le 6 août Saint que l’Église a réellement cano-
1978 à Castel Gandolfo ; la célébration nisé, nous devrions imiter sa foi, ses au-
de ses funérailles fut extrêmement so- tres vertus et ses œuvres et c’est bien
bre. Jean Guitton, qui le connaissait là le problème de conscience pour un
bien, dit de lui : “Paul VI n’était pas catholique… Comme nous avons vu,
fait pour être pape. Il était fait pour tout cela se heurte avec la foi et l’ensei-
être le secrétaire, le collaborateur d’un gnement bimillénaire de notre sainte
grand pape. Il n’avait pas ce qui fait le mère l’Église ; on revient donc à la
question initiale : “Comment cet
Paul VI sur son lit de mort alors que lui rend hommage homme peut-il être ‘saint’…”. Nous
le président socialiste Sandro Pertini avons vu que Montini a protégé et non
condamné des théologiens comme
Congar, Lubac ; Chenu et Küng que Pie
XII avait condamnés dans Humani Ge-
neris ; il a accompli la réforme litur-
gique, détruisant la liturgie catholique
en appliquant les idées et les principes
que le même Pape Pie XII avait
condamnés dans Mediator Dei ; il a pra-
tiqué l’œcuménisme condamné par Pie
XI dans Mortalium Animos… Il a prati-
qué de manière scandaleuse l’ostpolitik
à l’égard des régimes communistes,
j’en passe et des meilleures…
Il faut aussi considérer que Paul VI
a été celui qui a commencé la révolu-
49

tion dans l’Église (Jean XXIII a donné 20) Y. CHIRON, op. cit., pp. 133-134.
le la en ouvrant le concile, mais n’a pas 21) Y. CHIRON, op. cit., pp. 136-138.
22 ) Y. CHIRON, op. cit., pp. 138-140.
eu le temps de la réaliser et a confié 23) Y. CHIRON, op. cit., pp. 140-141.
l’ouvrage à son successeur désigné), il a 24) Y. CHIRON, op. cit., p. 141.
été celui qui a ouvert la voie, indiqué 25) Ici, Montini sans le savoir prophétisa
la route à suivre. Ceux qui sont venus comme l’ânesse de Balaam en faisant référence à
Buenos Aires, d’où, hélas, plusieurs années après
après lui : Wojtyla, Ratzinger et Bergo- arrivera à Rome Jorge Mario Bergoglio…
glio n’ont fait que poursuivre l’œuvre 26) Y. CHIRON, op. cit., pp. 144-145.
de destruction de l’Église déjà com- 27) Y. CHIRON, op. cit., pp. 145-146.
mencée par Montini, ils en ont suivi la 28) À cette adresse https://www.
voie ; sans Paul VI nous n’aurions donc vatican.va/content/pius-xii/la/speeches/1953/docu-
ments/hf_p-xii_spe_19530112_concistoro-se-
pas eu Jean-Paul II, Benoît XVI, Fran- greto.html on peut lire le discours (en latin) du
çois… voilà pourquoi la responsabilité Pape dans lequel il dit que les deux ont décliné
de G.B. Montini est très grande, et l’invitation à entrer dans le Sacré Collège. Ici
comme catholiques nous pensons qu’il une traduction française du passage en question :
«Notre intention avait été de faire entrer dans le
NE peut PAS être un Saint ! Sacré Collège les deux prélats distingués prépo-
Dans la canonisation de Paul VI est sés à chacune des sections de la secrétairerie
en outre évidente - ainsi que nous d’État, et leurs noms étaient les deux premiers
l’avons déjà fait observer au début - inscrits sur la liste des cardinaux à désigner que
l’intention des modernistes de vouloir Nous avions preparée. Mais ces deux prélats, par
un insigne témoignage de vertu, Nous suppliè-
canoniser le concile Vatican II par l’in- rent si instamment de leur permettre de décliner
termédiaire de ses tenants. Dieu a déjà cette très haute charge, que Nous crûmes devoir
jugé ! Un jour l’Église et l’histoire ju- accéder à leurs prières et à leurs vœux répétés.
geront … ! Parce Domine, parce sepultis. Ce faisant, Nous avons voulu cependant récom-
penser en quelque manière leur vertu et Nous les
avons promus, comme vous le savez, à un poste
Notes d’honneur plus élevé qui répondît mieux et de fa-
çon plus adéquate au domaine de leur laborieuse
1) 17° Convegno Albertariano : Tutti Santi… activité». Y. CHIRON, op. cit., p. 147.
Da “san” Giovanni XXIII a “san” Paolo VI, ov- 29) J EAN C HÉLINI , L’Église sous Pie XII, éd.
vero la canonizzazione del Concilio Vaticano II : Fayard 1989, vol. II p. 519 et note 4, cité in Soda-
https://www.gloria.tv/sodalitium - https://www.da- litium n° 33, p. 36.
videalbertario.it 30) B. LAI, Il “mio” Vaticano. Diario tra Pontefici
2) YVES CHIRON, Paul VI le Pape écartelé, Per- e cardinali, p. 48, cité par ANDREA TORNIELLI Paolo
rin Paris 1993, p. 28. VI, L’audacia di un papa. Mondadori 2009, p. 169.
3) Y. CHIRON, op. cit., pp. 32-33. 31) ANDREA TORNIELLI, op. cit., p. 168.
4) Y. CHIRON, op. cit., p. 34. 32) Y. CHIRON, op. cit., pp. 147-148.
5) Y. CHIRON, op. cit., p. 35. 33) Entretien de J. Guitton avec l’auteur, le
6) Y. CHIRON, op. cit., p. 38. 11/05/1991, in Y. CHIRON, op. cit., p. 142.
7) Y. CHIRON, op. cit., pp. 47-48. 34) ANDREA RICCARDI, Il partito Romano, Mor-
8) Y. CHIRON, op. cit., pp. 51-53. celliana 1983, p. 197.
9) Y. CHIRON, op. cit., pp. 54-55. 35) A. RICCARDI, op cit., p. 213 note 33.
10) Y. CHIRON, op. cit., pp. 57-59. 36) BENNY LAI, Il papa non eletto, p. 100 note
11) Y. CHIRON, op. cit., pp. 59-60. 18, cité in TORNIELLI, op. cit., p. 171.
12) Y. CHIRON, op. cit., p. 62. 37) ANDREA TORNIELLI, Paolo VI, pp. 170-171.
13) Y. CHIRON, op. cit., p. 72. 38) Giuseppe De Luca-GB. Montini, Carteggio
14) ROBERTO DE MATTEI, Vatican II, une his- (1930-1962) sous la direction de Paolo Vian, Ediz.
toire à écrire, Muller Éditions 2013, p. 181. On Storia e letteratura, Roma 1992, pp. 183-184. De
peut lire la lettre que Montini écrivit à l’évêque Luca était un prêtre qui joua un rôle de média-
de Brescia le 19/03/1933 pour se justifier des ac- teur entre la Curie et les représentants du monde
cusations qu’on lui avait adressées, in FAPPANI- politique italien.
MOLINARI, GiovanniBattista Montini giovane, Ma- 39) Sur Alighiero Tondi cf. Sodalitium n° 72
rietti 1979, pp. 285-291. p. 33 (éd. italienne).
15) Y. CHIRON, op. cit., p. 73. 40) ANDREA TORNIELLI, op. cit., p. 172. “Andrea
16) Y. CHIRON, op. cit., pp. 79-80. Tornielli a mis en lumière certains documents qui
17) Y. CHIRON, op. cit., p. 126. semblent prouver la fiabilité d’Arnould, qui jouis-
18) Boyer sera en effet un des principaux ins- sait d’une totale confiance amicale de la part du
pirateurs de la réforme liturgique voulue par cardinal Tisserant et qui en France était introduit
Montini suite au Concile. Voir à ce propos le li- dans les plus hautes sphères de l’État et de
vre de l’abbé Cekada La messe de Paul VI en ques- l’Église”. Ces passages sont cités dans le livre de
tion, Via Romana 2021. DE MATTEI, Vatican II… op. cit., p. 182 ; dans la
19) Y. CHIRON, op. cit., pp. 130-132. note 50 (p. 442), De Mattei écrit : «La crédibilité
50

d’Arnould a été niée, entre autres, par le père Ro-


bert Graham (G.B. Montini substitute secretary of
State, cit., pp. 81-82), mais Tornielli cite des pas-
sages d’une correspondance entre le cardinal Tis-
serant et le colonel, contenue dans les archives de
l’Association Amis du cardinal Tisserant, d’où “il
apparaît de toute évidence qu’Arnould était intro-
duit aux niveaux les plus hauts de l’État français
(il accompagne Tisserant à un déjeuner à l’Élysée
chez le président Auriol) et de l’Église”» (A. TOR-
NIELLI, op. cit., pp. 174-177).
41) Pour comprendre qui fut le père Bouyer et
son œuvre néfaste dans la liturgie qui influença
tant Paul VI et la nouvelle messe, on peut lire le li-
vre d’ANTHONY CEKADA, La messe de Paul VI en ques-
tion, Via Romana 2021, qui en parle amplement.
42 ) Y. CHIRON, op. cit., pp. 161-162.
43) Y. CHIRON, op. cit., p. 167.
44) Y. CHIRON, op. cit., pp. 170-171.
45) Y. CHIRON, op. cit., p. 173.
46) Y. CHIRON, op. cit., pp. 174-175.
47) Y. CHIRON, op. cit., p. 184.
48) ROBERTO DE MATTEI, Vatican II…, op. cit.,
p. 122. De Mattei cite le livre du cardinal Sue-
nens, Souvenirs et espérances.
49) Y. CHIRON, op. cit., p. 189.
50) Y. CHIRON, op. cit., pp. 190-192. L’inquiétante statue de Paul VI érigée au
51) Y. CHIRON, op. cit., pp. 196-197. Sacro Monte à Varèse
52) Y. CHIRON, op. cit., p. 197. Pie XII (et dans les écrits du père Guérard des Lau-
53) R. DE MATTEI, op. cit., p. 179. riers)” sur https://www.gloria.tv/post/WufpB-
54) R. DE MATTEI, op. cit., p. 180. CEzvZx34uRnQQJ3WzTmB cf. aussi Sodalitium n°
55) R. DE MATTEI, op. cit., pp. 180-181. 67 pp. 28-48. Je conseille aussi de lire tout le cha-
56) Y. CHIRON, op. cit., pp. 202-203. pitre sur la question mariale dans le livre de De
57) Y. CHIRON, op. cit., pp. 203-204 ; 223-224. Mattei sur le Concile (op. cit., pp. 192-198) où est
58) Voici le passage de l’encyclique de Pie très bien expliquée la lutte entre “maximalistes et
XII : «quand il s’agit de liturgie sacrée, quiconque minimalistes” et la profonde déception des bons
voudrait revenir aux antiques rites et coutumes, catholiques comme les pères Roschini et Balić qui
en rejetant les normes introduites sous l’action de avaient travaillé pour arriver à la définition de la
la Providence, à raison du changement des cir- Médiation universelle de Marie.
constances, celui-là évidemment, ne serait point 63) Y. CHIRON, op. cit., p. 217.
mû par une sollicitude sage et juste. Une telle fa- 64) Y. CHIRON, op. cit., pp. 218-219.
çon de penser et d’agir ferait revivre cette exces- 65) Y. CHIRON, op. cit., p. 223.
sive et malsaine passion des choses anciennes 66) R. DE MATTEI, op. cit., p. 244.
qu’excitait le concile illégitime de Pistoie, et ré- 67) R. DE MATTEI, op. cit., pp. 301-302.
veillerait les multiples erreurs qui furent à l’ori- 68) Y. CHIRON, op. cit., p. 246. Sur cette ques-
gine de ce faux concile et qui en résultèrent, pour tion, on peut consulter le livre de De Mattei (op.
le grand dommage des âmes, erreurs que l’Église, cit., pp. 308-318), tout le paragraphe sur la non
gardienne toujours vigilante du “dépôt de la foi” à condamnation du communisme où est donnée
elle confié par son divin Fondateur, a réprouvées une description très détaillée de la manière dont
à bon droit. Car des desseins et des initiatives de allèrent les choses.
ce genre tendent à ôter toute force et toute effica- 69) R. DE MATTEI, op. cit., p. 323.
cité à l’action sanctificatrice, par laquelle la litur- 70) Y. CHIRON, op. cit., pp. 247-248.
gie sacrée oriente, pour leur salut, vers le Père cé- 71) Y. CHIRON, op. cit., p. 249.
leste les fils de l’adoption». Consultable sur le site 72) Pour approfondir la Thèse de Cassiciacum
du Vatican : https://www.vatican.va/content/pius- je renvoie à plusieurs articles publiés sur Sodali-
xii/it/encyclicals/documents/hf_p- tium dans le passé. Voir les nn° 13, 44, 54, 55, 61
xii_enc_20111947_mediator-dei.html et bien d’autres. Voir aussi les deux livres de nos
59) Y. CHIRON, op. cit., p. 207. éditions : Le problème de l’Autorité et de l’épiscopat
60) R. DE MATTEI, op. cit., p. 189. dans l’Église, La papauté matérielle, C.L.S.
61) AS. II/1, p. 197 (Acta Synodalia sacrosanti 73) R. DE MATTEI, op. cit., pp. 293-294.
Concilii Œcumenici Vaticani II, Typis Vaticani, 74) Y. CHIRON, op. cit., pp. 241-242.
Città del Vaticano1970-1999). Cité in De Mattei. 75) R. DE MATTEI, op. cit., p. 295. Sur la question
62) Y. CHIRON, op. cit., p. 209. Sur cette ques- de la liberté religieuse au concile et le débat qui
tion on peut voir les vidéos du Convegno Alberta- s’ensuivit, je conseille de lire le livre de De Mattei
riano de 2015 (Ipsa conteret) avec les conférences qui y dédie un long paragraphe (pp. 288-295).
de l’abbé Ricossa : “Marie antithèse de Satan: le dé- 76) Y. CHIRON, op. cit., p. 249.
veloppement homogène du dogme marial au temps de 77) Y. CHIRON, op. cit., p. 251.
51

78) Y. CHIRON, op. cit., pp. 253-254.


79) Y. CHIRON, op. cit., pp. 254-255. Adrien VI fut le seul pape hol-
80) Bref examen critique du Novus Ordo Missæ,
ed. C.L.S. Verrua Savoia ; A. CEKADA Frutto del la- landais et dernier pape non ita-
voro dell’uomo. Una critica teologica alla messa di lien de l’histoire jusqu’à mainte-
Paolo VI, ed. C.L.S. Verrua Savoia.
81) Un témoignage au dessus de tout soupçon : nant. Le 31 août 1522 il fut cou-
Jean Guitton et la messe protestantisée, in Sodali-
tium n° 38, février-mars 1995, p. 77. ronné pape à Rome.
82) Y. CHIRON, op. cit., p. 257.
83) Y. CHIRON, op. cit., pp. 258-259.
84) Y. CHIRON, op. cit., pp. 274-275.
85) Bref examen critique du nouvel “ordo Le pape Adrien VI : cinquième
Missæ”, Centro Librario Sodalitium Verrua Sa-
voia 2011, pp. 9-11.
centenaire 1522-2022
86) Y. CHIRON, op. cit., p. 264.
87) Y. CHIRON, op. cit., pp. 259-260. Abbé Nathanael Steenbergen
88) Y. CHIRON, op. cit., p. 267.
89) Cf. Lo stendardo di Lepanto non ce l’hanno
i turchi Si trova ancora a Gaeta di Paolo Granzotto
su www.ilgiornale.it/news/stendardo-lepanto-non-
ce-l-hanno-i-turchi-si-trova-ancora.html Cf. Y. CHI-
L e 31 août 2022 nous avons célébré
le 5e centenaire du couronnement
du pape Adrien VI, unique pape hollan-
RON, op. cit., p. 269. dais et dernier pape non italien de
90) Y. CHIRON, op. cit., pp. 273-274.
91) Y. CHIRON, op. cit., pp. 279-280.
l’histoire jusqu’à nos jours. Le 31 août
92) Y. CHIRON, op. cit., p. 281. 1522 il fut couronné pape à Rome.
93) Y. CHIRON, op. cit., p. 285. Adriaan Floriszoon Boeyens naquit
94) Y. CHIRON, op. cit., pp. 295-296. le 2 mars 1459 à Utrecht aux Pays-Bas
95) Y. CHIRON, op. cit., pp. 305-306. (Brandstraat). Il était le fils du maître
96) Y. CHIRON, op. cit., pp. 309-311.
97) A. TORNIELLI, op. cit., p. 583. menuisier Floris - lui-même fils de Bou-
98) Y. CHIRON, op. cit., p. 317. dewijn ou Boeyen Dedel - et de Geer-
99) Y. CHIRON, op. cit., pp. 318-319. truid. Adriaan avait deux frères aînés,
100) Y. CHIRON, op. cit., pp. 330-331. Klaas et Jan. Son père mourut quand il
101) Y. CHIRON, op. cit., pp. 331-332.
102) Y. CHIRON, op. cit., pp. 332-333.
avait dix ans. Ayant des facilités pour
103) Y. CHIRON, op. cit., p. 338. étudier, il fréquenta l’école latine de
104) Y. CHIRON, op. cit., pp. 336-337. Zwolle, où il fut instruit par les Frères
105) A. TORNIELLI, op. cit., p. 590. de la Vie Commune et c’est ainsi qu’il
106) Roger Peyrefitte, qui était notoirement connut la Devotio moderna (1). À partir
homosexuel, répandait délibérement des informa-
tions scandaleuses sur les papes. On peut trouver de 1476 Adriaan étudia à l’Université
cette accusation sur Montini sur plusieurs sites de de Louvain où il obtint un doctorat en
la mouvance gay et pas seulement ; voir par exem- théologie.
ple : https://www.laregione.ch/estero/estero Le 30 juin 1490 il fut ordonné prê-
/1329614/quando-paolo-vi-smenti-di-essere-gay
107) Y. CHIRON, op. cit., pp. 340-341.
tre. Il fut à plusieurs reprises recteur
108) A. TORNIELLI, op. cit., p. 599 dans lequel de cette Université, chanoine de
il cite son article sur Il Giornale du 17/03/1998 l’église de Notre-Seigneur à Anvers, à
Paolo VI voleva pagare 10 miliardi per Moro. Anderlecht ainsi qu’à Utrecht, et en
109) A. CAZZULLO, Imbattibile a Poker e ai ca- 1497 doyen de l’église Saint-Pierre à
valli, interview de Francesco Cossiga, Corriere
della Sera 11/09/2009, cité in A. TORNIELLI, op. cit., Louvain.
p. 606. Pour un récit plus détaillé sur l’affaire et L’empereur Maximilien Ier le nomma
les négociations, on peut consulter le livre cité de en 1507 précepteur de son neveu âgé
Tornielli qui fournit de nombreux détails sur le de 7 ans, le prince Charles, né à Gand,
tourment de Montini pour son ami Aldo Moro
(pp. 596-609).
le futur empereur Charles Quint.
110) Quando il Papa disse “Vendiamo la Pietà” Adrien instruisit Charles au château
sur La Repubblica 1/02/2002 : https://www.repub- ducal de Keizersberg à Louvain et dans
blica.it/online/societa/michelangelo/michelan- la résidence de sa tante Marguerite
gelo/michelangelo.html. Concernant le dé- d’Autriche à Malines. En 1515, Adrien
menti : https://fr.zenit.org/2002/02/01/decision-de-
paul-vi-la-pieta-de-michel-ange-ne-quitte-plus-le- partit pour l’Espagne pour une mission
vatican/ diplomatique avec le roi Ferdinand II
111) Entretien de Jean Guitton avec l’auteur, d’Aragon en vue des intérêts de son
le 11/05/1991 cité in Y. CHIRON, op. cit., p. 342. élève Charles V. Grâce au succès de
52

Adrien réagit avec tristesse à la nou-


velle de son élection à la papauté : il
aurait voulu se retirer pour se préparer
à l’éternité dans l’étude et la prière, au
lieu d’assumer la responsabilité su-
prême sur la terre. Il accepta seule-
ment pour se conformer à la sainte Vo-
lonté de Dieu, et était déterminé à se
donner de toutes ses forces à cette res-
ponsabilité pour le bien de l’Église de
Dieu.
Alors qu’à Rome régnait le désordre
et, qu’en plus, éclatait une épidémie de
Adrien VI, le 216e successeur de saint Pierre peste, qui fit naître l’espérance - même
parmi les cardinaux mondains - que le
cette mission, et avec la mort de sa nouveau pape finalement ne viendrait
grand-mère Isabelle la Catholique de pas, Adrien VI dut faire face aux très
Castille, Charles V, déjà Prince des grandes difficultés concernant les pré-
Pays-Bas, devint aussi héritier des pos- paratifs de son voyage à Rome
sessions espagnoles, Sicile et Amé- puisqu’il devait traverser la Méditerra-
rique. née remplie de pirates turcs. Adrien
En 1516 Adrien devint évêque de s’embarqua enfin le soir du 5 août
Tortosa et le 1 er juillet 1517 le pape 1522 ; au cours du voyage de trois se-
Léon X le créa cardinal. Après que maines, il célébra la Messe tous les
Charles devînt empereur du Saint-Em- jours. Le 28 août le pape Adrien VI dé-
pire romain germanique en 1519, son barqua à Ostie. Il avait laissé derrière
empire où le soleil ne se couchait jamais, lui la flotte de cinquante navires et
Adrien gouverna les terres espagnoles, était arrivé sur un bateau à rames avec
mission qu’il accepta comme une seulement six assistants. Le pape des-
lourde charge uniquement pour le bien cendit le premier de l’embarcation et
de l’empereur. se rendit promptement dans une église
À la fin de l’année 1521, après la pour prier, comme il avait coutume de
mort soudaine du pape Léon X, de la le faire quand il arrivait quelque part.
famille des Médicis, après plusieurs Il refusa le banquet trop somptueux
tours de scrutin les électeurs ne réussi- qui lui avait été préparé et voulut par-
rent pas à trouver un accord sur plu- tir immédiatement pour Rome. Au mi-
sieurs candidats entre les philo-impé- lieu de l’incrédulité des cardinaux qui
riaux Jules de Médicis et Farnese, ou ne pouvaient croire que le pape arri-
un cardinal davantage philo-français. vait à Rome en pleine épidémie de
Puis finalement Adrien, le cardinal hol- peste - et qui n’avaient donc pas fait de
landais qui n’était même pas présent préparatifs - Adrien, contre tout
au conclave, fut présenté comme un conseil, partit pour Rome sur un âne, et
homme très saint et digne de la fonc-
La “Maison du Pape” à Utrecht, qu’Adrien, alors qu’il
tion. Une proposition qui fut soutenue résidait encore en Espagne, fit construire et où il sou-
par le cardinal Cajetan et accueillie haitait se retirer, mais qu’il n’a jamais vue
par beaucoup. C’est ainsi qu’Adrien fut
élu - en son absence - nouveau succes-
seur de saint Pierre, le 9 janvier 1522.
Un choix qui inquiéta le peuple ro-
main, mais qui bien vite préoccupa
aussi nombre de cardinaux habitués à
la vie luxueuse, dans la crainte que
cette vie prenne fin avec de sévères ré-
formes de la part du pieux et saint hol-
landais.
53

Nonobstant la forte opposition de la


part des plus mondains parmi les clercs
et malgré la très brève durée de son
pontificat, Adrien VI réussit à laisser
son empreinte dans la Réforme catho-
lique, en employant toutes ses forces
pour mettre fin aux nombreux abus.
Que ce pontife ait jeté les graines et
soit à la racine de la future Réforme ca-
tholique, cela est évident, comme le dé-
montre le fait qu’il ait appelé à Rome
Gian Pietro Carafa, le futur Paul IV,
grand pape de la Réforme, qui à son
Armoiries du pape Adrien VI
tour fit cardinal Michele Ghislieri, le
futur saint Pie V, tous deux grands
entra ainsi dans la Ville Éternelle où papes du Concile de Trente.
son couronnement eut finalement lieu Les tentatives d’Adrien VI pour sau-
le dimanche 31 août 1522. ver les terres allemandes du protestan-
En tant que pape, Adrien VI voyait tisme échouèrent principalement à
comme tâches principales la réforme cause de l’attitude orgueilleuse, égoïste
de l’Église, la lutte contre le protestan- et infidèle de plusieurs princes alle-
tisme (Luther s’était rebellé quelques mands, qui plutôt que d’écouter le Vi-
années auparavant) et l’unification des caire du Christ pour le bien de l’Église
puissances chrétiennes contre les at- et de la patrie, préférèrent chercher
taques des Turcs. leurs intérêts personnels et suivre les
Adrien avait vivement à cœur la res- furies de l’hérésiarque de Wittenberg.
tauration des mœurs et de la discipline Fidèle à son habituel style vulgaire et
dans le clergé et dans le peuple fidèle ; brutal, Luther écrivit dans un de ses
il commença la réforme catholique deux opuscules sur Adrien VI : “Le
d’abord par la cour de Rome, en bannis- pape est un magister noster de Louvain,
sant de nombreuses habitudes mon- une école où de tels ânes peuvent obte-
daines, licencieuses ou dissolues. Il ne nir leurs diplômes ; Satan parle par sa
tolérait pas de semblables habitudes bouche”. Le pape vertueux des Pays-
chez les cardinaux, mais dans son mode Bas fut appelé par le moine apostat : un
de vie personnel également, Adrien Antichrist, un hypocrite, un tyran aveu-
était très différent de son prédécesseur gle et un serviteur de Satan.
Léon X. Il était silencieux, conscien- Adrien vécut aussi une grande dé-
cieux et prudent (il était surnommé vide- ception avec Érasme : aux insistances
bimus, ce qui signifie “nous verrons…”) répétées du pape pour employer ses
et il recherchait souvent la solitude. Il compétences littéraires pour la cause
renvoya presque toute sa cour et ne dé- de la vraie Foi, pour l’Église du Christ
pensa pratiquement rien pour ses be- et contre les erreurs protestantes,
soins personnels ; une seule cuisinière Érasme répondit d’abord de manière
hollandaise lui préparait ses repas. Tout évasive et finalement refusa froide-
cela au grand déplaisir de l’exubérant ment.
peuple romain, désireux de festoyer et En France également, le pape subit
habitué à l’extravagance. Tandis que de grandes difficultés du fait de l’atti-
Léon X - même sans en avoir les moyens tude insolente et traîtresse du roi Fran-
- selon l’esprit de son temps s’était com- çois Ier, en grande partie responsable de
porté comme un mécène, Adrien ne par- l’échec de la croisade contre les Turcs,
tagea pas l’excessive admiration fana- qui conspira même avec le cardinal So-
tique des humanistes de la Renaissance derini pour envahir l’Italie et organiser
pour l’antiquité païenne. Pour tout cela un coup d’état contre Adrien. Les plans
il s’attira toujours plus la haine des nom- furent découverts à temps et Soderini
breux oisifs mondains à Rome. fut arrêté, mais la paix entre la France
54

et l’Empire tant voulue par Adrien de- Pie II et Pie III. L’épitaphe était de sa
vint totalement impossible. Le roi fran- propre main : “Ci-gît Adrien VI, qui eut
çais menaça d’ailleurs le pape du le pire des malheurs, celui de régner”.
même sort que celui qu’avait subi le Mais même après sa mort les expres-
pape Boniface VIII, et Adrien VI ne put sions de haine continuèrent et sa
que ratifier la Ligue impériale. tombe fut souillée par l’inscription :
Il convient de rappeler le courage et “hic iacet impius inter Pios”.
l’implication du pape pendant les Le cardinal Willem van Enckevoirt,
grandes épidémies de peste. Durant le qui avait été le grand ami et conseiller
pontificat d’Adrien VI, qui dura un peu d’Adrien VI, fit ériger un impression-
plus d’une année, la peste sévit deux nant mausolée à Santa Maria
fois à Rome, provoquant plusieurs mil- dell’Anima, où fut transférée la dé-
liers de morts. En dépit des sollicita- pouille d’Adrien, et où désormais il re-
tions répétées des cardinaux et des pose. Sur la tombe nous lisons les
membres de la curie épouvantés qui se mots : “Proh dolor, quantum refert in
sont presque tous enfuis, Adrien resta quæ tempora vel optimi cuiusque virtus
dans la cité déserte où régnait la mort, y incidat : Quelle douleur de voir la vertu
compris quand il tomba malade et, dès des meilleurs s’exercer en de telles
qu’il put, il reprit diligemment son tra- conjonctures !”.
vail quotidien pour le bien de l’Église.
Le mois d’août 1523 fut exception- Bibliographie :
nellement chaud à Rome et, déjà affai- • LUDWIG PASTOR, Geschichte der Päpste,
bli, Adrien tomba malade à plusieurs Band IV Im Zeitalter der Renais-
reprises, mais à chaque fois il se réta- sance und der Glaubensspaltung,
blit. Le 8 septembre son état s’aggrava Zweites Buch: Adrian VI 1522-1523.
soudainement : il reçut l’extrême-onc- • ELSE HOCKS, Paus Adriaan VI, een
tion et le 14 septembre 1523 il mourut Utrechtse timmermanszoon op den hei-
pieusement et dans la plus grande paix, ligen Stoel van St. Petrus, Amsterdam.
comme il avait vécu. • ROHRBACHER, Storia Universale della
Immédiatement après la mort Chiesa Cattolica, Volume 12, Libro 84.
d’Adrien des rumeurs d’empoisonne- • MULLER, Het oudste cartularium van
ment circulèrent comme cause de sa het sticht Utrecht, ‘s Gravenhage
mort ; tant et si bien que les historiens 1892, 182ff.
ne sont pas d’accord sur ce sujet ; tou-
jours est-il que le médecin personnel Note
du pape, à sa mort fut honoré par le 1) L’expression “Devotio Moderna” se réfère
à un mouvement de réforme catholique, né sur-
peuple romain comme “le libérateur de tout au quinzième siècle aux Pays-Bas, qui prô-
la patrie, du sénat et du peuple romain”. nait une restauration de la sainteté et des bonnes
Adrien fut inhumé provisoirement dans mœurs. L’initiateur en fut Geert Groote, fonda-
l’antique basilique Saint-Pierre entre teur des “Frères de la Vie Commune”. Thomas a
Kempis (originaire de la même région de Hol-
lande) est le représentant le plus connu de ce
Tombeau d’Adrien VI à mouvement.
Santa Maria dell’Anima à Rome

Gian Pietro Carafa,


futur pape Paul IV,
fut appelé à Rome
par Adrien VI
55

Vie spirituelle
Avec cet article nous tenterons
d’expliquer pourquoi l’assis-
tance à la Messe est si impor-
tante : en effet, elle risque
“Avec Vous je m’offre aussi” d’être réduite à une œuvre com-
Abbé Piergiorgio Coradello mandée par l’Église les jours de
fête.
D ans l’antiquité, avant que le mot
“Messe” devînt commun, l’ensem-
ble de ses rites était appelé “mystères” ; “FAITES, en mémoire de moi”, qui in-
et à raison, parce que la Messe contient dique l’ordre de rendre de nouveau
plusieurs mystères : transsubstantiation, présent ce qui a été fait par Jésus.
sacrifice, présence de Jésus, commu- “Faites CECI en mémoire de moi”, qui
nion, etc. : mystères surnaturels, par signifie l’objet du “faire”, déterminé
conséquent au-dessus de notre compré- par ce que Jésus vient de faire. Et vous
hension, et mystères tous harmonisés en ne pouvez pas “faire” si vous n’êtes pas
elle. Il n’est donc pas étonnant qu’il soit tournés VERS MA MÉMOIRE, en ayant
difficile de comprendre et de vivre les l’intention qui est mienne, en prenant
“mystères” - autrement dit de savoir comme norme de votre agir le CECI que je
comment “assister” à la sainte Messe ! viens d’accomplir (1).
Avec cet article nous tenterons d’expli- Demandons-nous alors, quelle chose
quer pourquoi l’assistance à la Messe a faite Jésus ?
est si importante - alors qu’à cause Ceci est mon corps, livré pour vous …
d’une ignorance religieuse répandue Cette coupe est la nouvelle alliance en
elle risque d’être réduite à une œuvre mon sang, versé pour vous (Lc 22, 19-20).
commandée par l’Église les jours de fête, Dans les paroles mêmes de l’institution
ou bien (même si recevoir la commu- du sacrement de l’Eucharistie, Jésus
nion est une chose très louable) à une enseigne que son Corps et son Sang
simple occasion de recevoir la commu- sont là présents sous les espèces du
nion : alors que c’est quelque chose de pain et du vin et qu’ils sont offerts en ré-
capital pour notre vie spirituelle. Pour
savoir comment y assister au mieux
nous parlerons d’abord de ce qu’est la
Messe - au-delà des fruits que nous pou-
vons en recevoir, et au-delà de la sainte
communion (sujets qui méritent d’être
traités séparément).

Nature de la Messe

À cause d’un spiritualisme dévoyé


(par le rationalisme, par le libéralisme,
et/ou par la lutte contre l’Église), de-
puis le Moyen Âge différents héré-
tiques ont contredit l’enseignement “Quand la sainte Messe est finie, nous descendons du
mont Calvaire, là où Jésus accomplit notre Rédemp-
permanent de l’Église, selon lequel la tion devant son Père, quasi insouciants... comme si
Messe est un véritable rite sacrificiel, nous avions assisté à un spectacle quelconque...
le sacrifice de la Nouvelle Alliance de Non ! Imitons les saintes femmes, comme il est écrit
Dieu avec l’humanité. De nombreux ar- dans l’Évangile, qui après la mort de Jésus, descen-
guments le prouvent ; nous nous limite- daient du mont en se frappant la poitrine avec une
vraie componction d’esprit, avec de la douleur pour
rons à en examiner certains. nos péchés, mais en même temps avec de la confiance
• Ouvrons la Sainte Écriture. Faites en la Divine Justice satisfaite par son Fils”.
ceci en mémoire de moi (I Cor. 11, 24) : Padre Pio, sur l’assistance à la Sainte Messe.
56

mission des péchés (Matth. 26, 28). Il est


clair, donc, que ce rite n’est pas une
simple commémoration, mais a un réel
effet direct (la rémission des péchés) ;
le Corps et le Sang sont donnés pour
quelqu’un, et non seulement à
quelqu’un : une offrande pour satis-
faire à des dettes - précisément à la
dette du péché contracté par l’huma-
nité à l’égard de Dieu. Ainsi que le
Christ satisfît sur la croix, il le fait de
la même manière à la Messe (2).
• Enseignement de l’Église. Luther
soutenait que la Messe serait une créa-
tion des chrétiens des premiers temps,
et non un rite institué par Jésus-
Christ : les “réformateurs” ne vou-
laient absolument pas accepter
quelque chose de divin dans l’Église
[comme font leurs tristes émules : les
modernistes (3)]. Contre eux le Concile
de Trente rappela l’enseignement tra-
ditionnel : «Parce que la perfection
n’avait pas été réalisée sous la pre-
mière Alliance, au témoignage de l’apô- Pie XII célébrant la sainte Messe dans
tre Paul, en raison de la faiblesse du sa- sa chapelle privée
cerdoce lévitique, il a fallu, Dieu le
père des miséricordes l’ordonnant selon l’ordre de Melchisédech, il offrit
ainsi, que se lève un autre prêtre “se- à Dieu le Père son Corps et son Sang
lon l’ordre de Melchisédech” [Ps. 110, sous les espèces du pain et du vin ; sous
4 ; Heb. 5, 6-10 ; 7, 11-17 ; Gen. 14, 18], le symbole de celles-ci, il les donna aux
notre Seigneur Jésus-Christ, qui pour- apôtres (qu’il constitua alors prêtres de
rait amener à la plénitude et conduire la Nouvelle Alliance) pour qu’ils les
à la perfection tous ceux qui devaient prennent ; et à ceux-ci ainsi qu’à leurs
être sanctifiés [Heb. 10, 14]. Sans successeurs dans le sacerdoce, il or-
doute, lui, notre Dieu et Seigneur, al- donna de les offrir en prononçant ces
lait-il s’offrir lui-même une fois pour paroles : “Faites ceci en mémoire de
toutes à Dieu le Père sur l’autel de la moi” [Lc 22, 19 ; I Cor. 11, 24], etc.,
croix par sa mort, afin de réaliser pour comme l’a toujours compris et enseigné
eux une rédemption éternelle [Heb. 7, l’Église catholique. En effet, ayant cé-
27]. Cependant, parce qu’il ne fallait lébré la Pâque ancienne, que la multi-
pas que son sacerdoce fût éteint par la tude des enfants d’Israël immolait en
mort [Heb. 7, 24], lors de la dernière souvenir de la sortie d’Égypte [Ex. 12],
Cène, “la nuit où il fut livré” [I Cor. 11, il institua la Pâque nouvelle où lui-
23], il voulut laisser à l’Église, son même doit être immolé par l’Église,
épouse bien-aimée, un sacrifice qui soit par le ministère des prêtres, sous des
visible (comme l’exige la nature hu- signes visibles en mémoire de son pas-
maine). Par là serait représenté le sa- sage de ce monde à son Père, lorsque,
crifice sanglant qui devait s’accomplir par l’effusion de son sang, il nous ra-
une fois pour toutes sur la croix, le sou- cheta et nous “arracha à la puissance
venir en demeurerait jusqu’à la fin du des ténèbres et nous fit passer dans son
monde, et sa vertu salutaire serait ap- Royaume” [Col. 1, 13]» (4).
pliquée à la rémission de ces péchés «La manière dont le Christ est of-
que nous commettons chaque jour : Se fert est cependant différente. Sur la
déclarant établi prêtre pour toujours croix, en effet, il offrit à Dieu tout lui-
57

même et ses douleurs, et l’immolation


de la victime fut réalisée par une mort
sanglante subie librement. Sur l’autel,
au contraire, à cause de l’état glorieux
de sa nature humaine, “la mort n’a plus
d’empire sur lui” [Rom. 6, 9] et, par
conséquent, l’effusion du sang n’est
plus possible ; mais la divine sagesse a
trouvé un moyen admirable de rendre
manifeste le sacrifice de notre Ré-
dempteur par des signes extérieurs,
symboles de mort. En effet, par le
moyen de la “transsubstantiation” du
pain au corps et du vin au sang du
Christ, son corps se trouve réellement «Plus j’entends de Messes, plus j’en entendrai !»
présent, de même que son sang, et les abbé Clemente Marchisio
espèces eucharistiques, sous lesquelles
il se trouve, symbolisent la séparation qu’il éprouve en lui-même et qui le met-
violente du corps et du sang. Ainsi l’ac- tent dans la nécessité de recevoir aide
tualisation de sa mort réelle sur le Cal- et direction d’en haut” (7) ; “cette juste
vaire est renouvelée dans tout sacrifice attitude de l’âme envers Dieu requiert
de l’autel, car la séparation des sym- de l’homme qu’il reconnaisse tenir de
boles indique clairement que Jésus- Dieu tout ce qu’il possède, comme du
Christ est en état de victime» (5) (6). principe premier, et qu’il le rapporte à
La Messe est un véritable sacrifice : Dieu comme à sa fin ultime” (8). “La ma-
en elle Jésus se sacrifie ! - et cela nous nière humaine c’est d’avoir recours pour
fait déjà réfléchir combien il est réduc- s’exprimer aux signes sensibles, toute
teur, par exemple, de considérer la connaissance nous venant du sensible
Messe dominicale comme une simple [c’est-à-dire parce que l’homme est com-
“étape forcée” pour obéir à l’Église, ou posé d’âme (spirituelle) et de corps (sen-
une “routine” ! Jésus renouvelle à la sible, matériel)]. La raison porte donc
Messe l’acte le plus important de l’his- naturellement l’homme à faire usage de
toire de l’humanité et l’acte le plus certaines choses sensibles, qu’il offre à
agréable à Dieu, et nous sommes appe- Dieu, en signe de la sujétion et de l’hon-
lés et tenus d’y assister. neur qu’il lui doit. C’est l’analogue de ce
que font les vassaux qui reconnaissent
Nature du sacrifice par des offrandes le domaine de leur
seigneur” (7).
Nous nous demandons comment le Le sacrifice est donc une soumission,
chrétien doit assister à la Messe : étant une oblation (offrande) de soi, symbolisée
donné que la Messe est un sacrifice, extérieurement : la chose offerte est
avant d’arriver au point qui nous inté- soustraite à l’usage de celui qui offre,
resse directement, voyons quelles rela- est consacrée à Dieu, et même l’of-
tions a l’homme avec le sacrifice en gé- frande symbolise celui qui offre, qui se
néral. sert de la chose sacrifiée au Seigneur
Il sera profitable de rappeler la dé- pour professer sa propre (de lui-même)
finition de sacrifice : offrande d’une soumission et sa propre orientation vers
chose sensible, avec sa consécration et le Seigneur.
sa transformation, faite par le légitime Il faut noter que cette soumission
ministre à Dieu pour professer Sa do- intérieure est la partie centrale du sa-
mination et notre soumission. Analy- crifice : seul un acte spirituel peut ra-
sons-la avec saint Thomas. mener à Dieu une âme, qui est créature
“La raison naturelle dit à l’homme spirituelle (9) ; cependant, sans l’acte ex-
qu’il se doit soumettre à un être supé- térieur, il n’y a pas la perfection propre
rieur, pour remédier aux déficiences du sacrifice, qui étant composé d’une
58

ministre délégué à cela ne comporte


Prière pas que les fidèles ne sont pas tenus
ère Éternel, je vous offre le sacrifice que vous
P avez fait de vous-même sur la Croix et que main-
tenant renouvelle sur cet autel votre bien aimé Fils
d’offrir ces sacrifices publics : ils sont
tenus de les offrir, mais les accomplir
est réservé au prêtre (12). Ceci se pro-
Jésus, pour vous adorer et vous rendre l’honneur duisait déjà dans l’Ancien Testament,
que vous méritez, reconnaissant en vous la domina- dans lequel l’offrande de la part du fi-
tion suprême sur toute chose, leur absolue dépen- dèle était évidente : pour manifester
dance envers vous et en vous reconnaissant comme son union intérieure au sacrifice, la vic-
notre premier principe et notre ultime fin : pour vous time sacrificielle était portée par lui, et
remercier des innombrables bienfaits reçus, pour immolée par le prêtre ; de la même fa-
apaiser votre justice irritée par tant de péchés et en çon dans les premiers siècles les fidèles
donner digne satisfaction et pour implorer grâce et offraient le pain et le vin et c’était le
miséricorde pour moi, pour les affligés et les éprou- prêtre qui immolait - tandis qu’avec le
vés, pour les pauvres pécheurs, pour le monde entier temps se répandit l’usage que les fi-
et pour les âmes bénies du purgatoire. dèles donnaient de l’argent, ce qui
Indulgence de trois ans pour qui assiste avec dévotion au sa-
crifice de la Messe, et accomplit au début cet acte d’offrande.
reste cependant une offrande indi-
Indulgence plénière, si pendant un mois à chaque fête de recte, laissant aux prêtres la tâche de
précepte on accomplit le même pieux exercice (même s’il s’agit fournir le pain et le vin.
d’une Messe de précepte), avec confession, communion et prière Mais voyons comment le fidèle peut
aux intentions du souverain Pontife. effectuer cette offrande intérieure.
(Saint Pie X, à l’audience du 5 juillet 1904, publ. 8 juillet
1904 ; Sacrée Pénitencerie 24 novembre 1936).
Union à la Messe : le fidèle offre

partie spirituelle et d’une partie maté- Le sacrifice de la part du prêtre se


rielle, touche la complétude de l’être produit aussi dans l’Église, par disposi-
humain, fait d’une âme et d’un corps, tion de son Fondateur comme nous
d’esprit et de matière. avons vu au début en citant les Saintes
Enfin, mais non moins important : Écritures et le Concile de Trente : le
étant considéré que l’homme est un ani- prêtre principal est uniquement le
mal fait pour vivre en société avec ses Christ, qui seul peut S’offrir lui-même,
semblables, il convient que dans une so- et accomplir la transsubstantiation ; la
ciété bien organisée la soumission à personne investie du sacerdoce vicaire
Dieu soit publique et soit faite par une du Christ, c’est le prêtre, et lui seul
personne publique. “Ainsi, avant que peut accomplir le sacrifice ( 13). Mais
fussent constitués villes et royaumes et que reste-t-il à faire au simple fidèle ?
qu’il n’y avait que des familles et des Le chrétien non-prêtre peut certaine-
tribus, le père de famille ou l’aîné ment “participer” au sacrifice en coopé-
étaient préposés à offrir le sacrifice ; en- rant matériellement : en servant à l’autel
suite, parfois les rois le firent aussi, comme enfant de chœur ; en procurant
comme Melchisédech, mais générale- du matériel liturgique comme les hos-
ment des ministres distincts furent dési- ties, les cierges ou les fleurs ; en entrete-
gnés. Le Christ étant constitué chef de nant la chapelle ou l’oratoire (ménage,
tous les hommes, il est par nature prêtre offrandes) (14). Ou encore, on peut certai-
de toute l’humanité. Et quand tout l’or- nement s’unir au sacrifice en participant
dre du surnaturel est disposé par Dieu, de la victime, c’est-à-dire en faisant la
on ne peut instituer d’autre sacrifice ou sainte communion, moyen le plus parfait
d’autre sacerdoce” (10). de s’unir au sacrifice de la Messe, mais
Cela ne veut pas dire que les fidèles qui n’est pas le seul, et qui même re-
ne sont pas tenus à des sacrifices privés quiert à son tour la troisième manière
et personnels, qui “se réalisent quand suivante qui est celle qui nous intéresse.
on se sert des actes extérieurs des au- Ce troisième moyen nous est décrit par
tres vertus, pour en faire hommage à Pie XII dans son encyclique sur la litur-
Dieu” (11) ; tandis que pour les sacri- gie Mediator Dei (20/11/1947). [N. B. : les
fices fixés par Dieu, la présence d’un caractères gras sont de l’auteur].
59
15
«La sainte liturgie est donc le culte pour eux ( ) ; quand il s’approche de
public que notre Rédempteur rend au l’autel, c’est donc en tant que ministre
Père comme Chef de l’Église ; c’est du Christ, inférieur au Christ, mais su-
aussi le culte rendu par la société des fi- périeur au peuple. Le peuple, au
dèles à son chef et, par lui, au Père contraire, ne jouant nullement le rôle
Éternel : c’est, en un mot, le culte inté- du divin Rédempteur, et n’étant pas
gral du Corps mystique de Jésus-Christ, conciliateur entre lui-même et Dieu, ne
c’est-à-dire du Chef et de ses membres. peut en aucune manière jouir du droit
[…] Il est donc nécessaire, Vénérables sacerdotal. Ces vérités sont de foi cer-
Frères, que tous les chrétiens considè- taine ; les fidèles cependant offrent, eux
rent comme un devoir principal et un aussi la divine Victime, mais d’une ma-
honneur suprême de participer au sacri- nière différente. Ceci a déjà été très
fice eucharistique, et cela, non d’une clairement affirmé par certains de Nos
manière passive et négligente et en pen- prédécesseurs et par les docteurs de
sant à autre chose, mais avec une atten- l’Église. “Non seulement - ainsi parle In-
tion et une ferveur qui les unissent nocent III, d’immortelle mémoire - les
étroitement au Souverain Prêtre, selon prêtres offrent, mais aussi tous les fi-
la parole de l’Apôtre : “Ayez en vous les dèles, car ce qui s’accomplit d’une ma-
sentiments qui étaient dans le Christ Jé- nière spéciale par le ministère des prê-
sus, offrant avec Lui et par Lui, se sanc- tres, se fait d’une manière universelle
tifiant en Lui”. […] Il y a en effet, Véné- par le vœu des fidèles” (De Sacro Altaris
rables Frères, des gens qui, se rappro- Mysterio III, 6). […] Pour ne pas faire
chant d’erreurs jadis condamnées, en- naître en cette matière très importante
seignent aujourd’hui que dans le Nou- d’erreurs pernicieuses, il faut préciser
veau Testament, le mot “sacerdoce” dé- avec exactitude le sens du mot “offrir”.
signe uniquement les prérogatives de L’immolation non sanglante par le
quiconque a été purifié dans le bain sa- moyen de laquelle, après les paroles de
cré du baptême ; de même, disent-ils, le la consécration, le Christ est rendu pré-
précepte de faire ce qu’il avait fait, sent sur l’autel en l’état de victime, est
donné par Jésus-Christ à ses apôtres du- accomplie par le seul prêtre en tant
rant la dernière Cène, vise directement qu’il représente la personne du Christ,
l’Église des chrétiens, et c’est par consé- non en tant qu’il représente la personne
quent plus tard seulement qu’on en est des fidèles. Mais par le fait que le prê-
arrivé au sacerdoce hiérarchique. C’est tre pose la victime divine sur l’autel, il
pourquoi ils prétendent que le peuple la présente à Dieu le Père en tant qu’of-
jouit d’un véritable pouvoir sacerdotal, frande, pour la gloire de la très sainte
et que le prêtre agit seulement comme Trinité et le bien de toute l’Église. Or,
un fonctionnaire délégué par la commu- cette oblation au sens restreint, les
nauté. À cause de cela, ils estiment que chrétiens y prennent part à leur ma-
le sacrifice eucharistique est au sens nière et d’une double façon, non seule-
propre une “concélébration”, et que les ment parce qu’ils offrent le sacrifice par
prêtres devraient “concélébrer” avec le les mains du prêtre, mais aussi parce
peuple présent, plutôt que d’offrir le sa- qu’ils l’offrent avec lui en quelque
crifice en particulier. Combien des er- sorte, et cette participation fait que l’of-
reurs captieuses de ce genre contredi- frande du peuple se rattache au culte li-
sent aux vérités démontrées que Nous turgique lui-même. Que les fidèles, par
avons affirmées plus haut, en traitant les mains du prêtre, offrent le sacrifice
de la place que tient le prêtre dans le ressort avec évidence du fait que le mi-
Corps mystique du Christ, il est super- nistre de l’autel représente le Christ en
flu de l’expliquer. Nous estimons cepen- tant que chef offrant au nom de tous ses
dant devoir rappeler que le prêtre rem- membres ; c’est pourquoi l’Église uni-
place le peuple uniquement parce qu’il verselle est dite, à bon droit, présenter
représente la personne de Notre-Sei- par le Christ l’offrande de la victime. Si
gneur Jésus-Christ en tant que Chef de le peuple offre en même temps que le
tous les membres s’offrant lui-même prêtre, ce n’est pas que les membres de
60

l’Église accomplissent le rite liturgique Et ainsi, puisque nous sommes mem-


visible de la même manière que le prê- bres du Corps mystique du Christ, tous
tre lui-même, ce qui revient au seul mi- nos saints désirs, supplications, repen-
nistre délégué par Dieu pour cela, mais tirs, soucis, confidences, mais surtout
parce qu’il unit ses vœux de louange, les actions de grâce et la louange, sont
d’impétration, d’expiation et d’action de dans le Cœur de Jésus parce que c’est
grâces aux vœux ou intentions mentales Lui qui les inspire, les commence et les
du prêtre, et même du Souverain Prê- accompagne en nous : dans la Messe,
tre, afin de les présenter à Dieu le Père nous sommes invités à les exprimer, à
dans le rite extérieur même du prêtre les placer dans le Sacré-Cœur et dans
offrant la victime». le calice de l’autel, pour que le Christ,
Voilà l’enseignement du Pape qui notre Rédempteur, les vivifie et les rec-
doit être suivi par les fidèles ; et il en tifie ; et pour que notre Médiateur pré-
donne lui-même le motif avec le rai- sente tout au Père.
sonnement qui dans le texte de l’ency-
clique suit immédiatement : « (a) Le Union à la Messe : le fidèle s’offre
rite extérieur du sacrifice, en effet, (b)
doit nécessairement, par sa nature, C’est ce qu’exprime de manière très
manifester (c) le culte intérieur : or, belle une des prières de l’Offertoire : In
(a) le sacrifice de la loi nouvelle (b) si- spiritu humilitatis et in animo contrito
gnifie (c) l’hommage suprême par le- suscipiamur a te, Domine; et sic fiat sa-
quel le principal offrant, qui est le crificium nostrum in conspectu tuo hodie,
Christ, et avec Lui et par Lui tous ses ut placeat tibi, Domine Deus – Dans l’hu-
membres mystiques, rendent à Dieu milité et le repentir, puissions-nous être
l’honneur et le respect qui lui sont accueillis par vous, Seigneur, et qu’ainsi
dus». L’Église a confirmé cette vérité notre sacrifice s’accomplisse aujourd’hui
aussi en approuvant et en indulgen- devant vous de telle sorte qu’il vous
ciant des prières comme celle-ci : plaise, ô Seigneur notre Dieu. “SUSCIPIA-
«Père Éternel, je vous offre le Sang MUR”, que nous soyons accueillis. Cette
très précieux de Jésus-Christ, en répa- seule parole montre clairement que le
ration de mes péchés, à l’intention des prêtre [qui représente le Christ en tant
saintes âmes du Purgatoire et pour les
besoins de la Sainte Église» (500 jours
chaque fois).
Dans la Messe, Jésus manifeste et
met en pratique Sa dévotion à la vo-
lonté de Dieu ; il l’honore extérieure-
ment et publiquement ; et grâce au
baptême qui nous a incorporés à Lui,
il nous donne la possibilité d’unir spi-
rituellement et réellement notre dévo-
tion à Son acte immense : ce n’est pas
par hasard que le prêtre prie Orate fra-
tres ut meum ac vestrum sacrificium ac-
ceptabile fiat apud Deum Patrem omni-
potentem – Priez, mes frères, pour que
mon sacrifice, qui est aussi le vôtre,
puisse être agréable à Dieu, le Père tout
puissant. Les baptisés doivent se sou-
venir que le peuple fidèle, représenté
par l’eau, est uni à Jésus-Christ et of-
fert avec Lui dans le calice durant
l’Offertoire : c’est ce qu’enseignent les
Pères de l’Église et d’innombrables “Jésus est mort pour nous donner la Messe”
évêques depuis l’antiquité (16). Saint Alphonse
61

que Chef] et les assistants [membres Lui : il est la pierre vivante que les
du Christ] s’offrent ensemble. L’Église hommes ont rejetée, mais qui, devant
leur fait adopter pour cet acte les pa- Dieu, est une pierre de choix et de grand
roles des trois jeunes prisonniers de prix. Et vous-mêmes, comme des pierres
Babylone qui, en voyant la fournaise vivantes, entrez dans la construction
ardente où ils devaient être jetés pour d’une maison spirituelle, pour y être des
ne pas avoir voulu adorer l’idole, s’of- prêtres saints, chargés d’offrir des sacri-
fraient avec beaucoup de courage en fices spirituels agréables à Dieu par Jésus-
holocauste pour la gloire du vrai Dieu Christ. Car on lit dans l’Écriture : “Voici
qu’ils adoraient : Puissions-nous être re- que je place dans Sion une pierre d’angle,
çus, le cœur contrit et l’esprit humilié, pierre de choix, et de grand prix : qui met
comme apportant des holocaustes de bé- sa confiance en elle ne sera pas déçu” (I
liers et de taureaux, ou des myriades Pierre 2, 4-9).
d’agneaux engraissés, que tel soit notre «Pour que l’oblation, par laquelle
sacrifice que nous vous offrons au- dans ce sacrifice les fidèles offrent au
jourd’hui, et qu’il vous plaise, parce qu’il Père céleste la victime divine, obtienne
n’est point de confusion pour ceux qui se son plein effet, il faut encore que les
confient en vous. Et maintenant, nous chrétiens ajoutent quelque chose : ils
vous suivons de tout notre cœur, et nous doivent s’immoler eux-mêmes en vic-
vous craignons, et nous cherchons votre time. Cette immolation ne se réduit pas
face (Dan. 3, 39-41). Cet esprit humilié, seulement au sacrifice liturgique. Parce
ce cœur contrit, avec lequel les trois que nous sommes édifiés sur le Christ
jeunes prièrent Dieu d’accepter le sa- comme des pierres vivantes, le prince
crifice de leur vie qu’ils offraient dans des apôtres veut, en effet, que nous
le feu de la fournaise, nous avertit de puissions, comme “un sacerdoce saint,
nous offrir avec les mêmes sentiments, offrir des victimes spirituelles agréa-
qui sont le véritable sacrifice que Dieu bles à Dieu par Jésus-Christ” ; et l’apô-
demande, comme dit le roi prophète : tre Paul, parlant pour tous les temps,
Le sacrifice digne de Dieu, c’est un esprit exhorte les fidèles en ces termes : “Je
brisé ; vous ne mépriserez pas, ô Dieu, un vous conjure, donc, mes frères, d’offrir
cœur contrit et humilié (Ps. 50, 19). Le vos corps en hostie vivante, sainte,
pécheur est humilié quand il rougit de agréable à Dieu : c’est là le culte spiri-
ses fautes, et se considère la plus in- tuel que vous lui devez”. Mais lorsque
digne des créatures à cause de ses pro- les fidèles participent à l’action litur-
pres péchés ; et son cœur est contrit, gique avec tant de piété et d’attention
quand il est frappé par la douleur qu’on peut dire d’eux : “Dont la foi et la
d’avoir offensé Dieu, qui devrait être dévotion te sont connues” (du Missel
l’unique objet de son amour” (17). Romain), alors il est impossible que
Trêve alors de distraction ! Il existe leur foi à chacun n’agisse avec plus
de nombreuses méthodes pour suivre la d’ardeur par la charité, que leur piété
Messe (18) : mais soit que nous suivions ne se fortifie et ne s’enflamme, qu’ils ne
les textes dans le missel, soit que nous se consacrent, tous et chacun, à procu-
récitions le chapelet, soit que nous sui- rer la gloire de Dieu et, dans leur ar-
vions d’autres pratiques comme la mé- dent désir de se rendre étroitement
ditation de la Passion, il est fondamen- semblables à Jésus-Christ qui a souffert
tal que vous ayez en vous les sentiments de très cruelles douleurs, il est impossi-
mêmes qui étaient ceux du Christ Jésus ble qu’ils ne s’offrent avec et par le sou-
(Philip. 2, 5). Renoncez donc à tout ce verain Prêtre comme une hostie spiri-
qui est malice, à tout ce qui est fausseté, tuelle. […] Lorsque nous sommes à l’au-
à l’hypocrisie, à l’envie, à tout ce qui est tel, nous devons donc transformer notre
médisance. Comme des enfants nouveau- âme, tout ce qui est péché en elle doit
nés, désirez ardemment un lait spirituel être complètement étouffé, tout ce qui,
et pur, afin qu’il vous fasse grandir pour par le Christ, engendre la vie surnatu-
le salut, dès lors que vous avez goûté que relle doit être vigoureusement restauré
le Seigneur est bon. Approchez-vous de et fortifié, si bien que nous devenions,
62

avec l’Hostie immaculée, une seule vic- par le Christ, engendre la vie surnatu-
time agréable au Père éternel. […] relle doit être vigoureusement restauré
C’est donc vers cet idéal que les chré- et fortifié, si bien que nous devenions,
tiens doivent orienter et élever leur avec l’Hostie immaculée, une seule vic-
âme quand ils offrent la divine victime time agréable au Père éternel» (Pie
dans le sacrifice eucharistique. Si, en XII). «Renoncez donc à tout ce qui est
effet, comme l’écrit saint Augustin, sur malice, à tout ce qui est fausseté, à
la table du Seigneur lui-même, en tant l’hypocrisie, à l’envie, à tout ce qui est
qu’il est Chef et symbole de cette union médisance» (I Pierre 2, 4).
par laquelle nous sommes le Corps du En résumé. «Que les fidèles consi-
Christ et les membres de son Corps ; si dèrent donc à quelle dignité le bain sa-
saint Robert Bellarmin enseigne, selon cré du baptême les a élevés, et qu’ils
l’esprit du docteur d’Hippone, que dans ne se contentent pas de participer au
le sacrifice de l’autel est exprimé le sa- sacrifice eucharistique avec l’intention
crifice général par lequel tout le Corps générale qui convient aux membres du
mystique du Christ, c’est-à-dire toute la Christ et aux fils de l’Église, mais que,
cité rachetée, s’offre à Dieu par le selon l’esprit de la sainte liturgie, libre-
Christ, Grand Prêtre (De Missa II, cap. ment et intimement unis au souverain
8), on ne peut rien imaginer de plus Prêtre et à son ministre sur la terre, ils
convenable et de plus juste que de nous s’unissent à lui d’une manière particu-
immoler tous au Père Éternel avec no- lière au moment de la consécration de
tre Chef qui a souffert pour nous. Dans la divine Hostie, et qu’ils l’offrent avec
le sacrement de l’autel, en effet, selon lui quand sont prononcées les solen-
le même Augustin, il est démontré à nelles paroles : “Par Lui, avec Lui, en
l’Église que dans le sacrifice qu’elle of- Lui, est à Toi, Dieu Père tout-puissant,
fre, elle est offerte, elle aussi (La Cité de dans l’unité du Saint-Esprit, tout hon-
Dieu X, ch. 6)» (Pie XII, Mediator Dei). neur et toute gloire pour les siècles des
Le péché consiste dans le refus siècles”, paroles auxquelles le peuple
d’être de Dieu ; mais nous sommes ap- répond : “Amen”. Et que les chrétiens
pelés à renouveler notre soumission à n’oublient pas, avec le divin Chef cruci-
Dieu et en conséquence notre offrande fié de s’offrir eux-mêmes et leurs
à Lui, entée sur celle salvifique et vivi- préoccupations, leurs douleurs, leurs
fiante opérée par Notre-Seigneur. angoisses et leurs besoins» (Pie XII).

Résumé des deux points précédents Dans la pratique


Primo. Durant la Messe, le baptisé Des paroles que nous avons citées,
est appelé à offrir spirituellement le sa- nous avons vu que ce sont les prières
crifice «en unissant ses vœux de même de la Messe qui nous suggèrent
louange, d’impétration, d’expiation et la manière d’y assister : nous ne pou-
d’action de grâce, aux vœux et inten- vons pas rester devant l’autel distraits
tions mentales du prêtre, et même du ou inertes ! Le Kyrie ne nous suggère-t-
Souverain Prêtre, afin de les présenter il pas peut-être des sentiments de
à Dieu le Père dans le rite extérieur confiante pénitence ? Le Gloria in excel-
même du prêtre offrant la victime» sis des sentiments de louange ? Et les
(Pie XII). prières de l’Offertoire ? Pour ne pas
Secundo. «Pour que l’oblation, par parler du Canon, quand s’accomplit le
laquelle dans ce sacrifice les fidèles of- sacrifice : «le saint canon est pur de
frent au Père céleste la divine victime, toute erreur, et en lui il n’est rien qui
obtienne son plein effet, il faut encore ne respire grandement la sainteté et la
que les chrétiens ajoutent quelque piété et n’élève vers Dieu l’esprit de
chose : ils doivent s’immoler eux-mêmes ceux qui offrent» (19).
en victimes […], transformer notre Tirons donc profit : de l’enseigne-
âme, tout ce qui est péché en elle doit ment de l’Église ; de ce que nous sug-
être complètement étouffé, tout ce qui, gère Dieu dans la prière ; et des senti-
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ments exprimés par les textes pour sui-


vre la Messe. Prière simple pour s’unir spirituellement à la
Dieu nous a créés et donné tout ce Messe (peut se réciter pendant la Messe et au cours
de la journée)
que nous avons : louons-le. Il est le Sei-
gneur et le Souverain de tout : adorons-
ère Saint, je dépose dans le calice, qu’en ce jour
le. Il nous a rachetés et prend soin de
nous : remercions-le. P chaque prêtre élève sur l’autel, les pensées, le
travail, les tristesses, le présent, le passé, le futur,
Nous avons besoin de Lui pour mille
nécessités et préoccupations, spéciale- tous mes péchés, les personnes qui me sont chères,
ment pour le salut de l’âme, pour corri- les âmes qui me sont confiées, celles qui prient pour
ger nos défauts, pour extirper nos moi, celles qui se sont recommandées à mes
vices, pour accomplir de bonnes œu- prières, celles pour lesquelles j’ai promis de prier, les
vres : prions-le pour avoir son aide qui âmes du purgatoire et ma mort elle-même.
peut tout. Nous avons des péchés dont Je vous offre chaque battement de mon cœur,
il faut demander pardon et pour les- chaque respiration, chaque pas, chaque moment,
quels il faut promettre réparation : re- chaque lettre que je prononce ou que j’écris ; je veux
pentons-nous et exprimons notre désir que chacune de ces actions se transforme en autant
de satisfaire. d’actes d’amour, de réparation et d’action de grâce.
Nous sommes à Lui et faits pour Que ma journée soit une Messe continuelle, un Of-
Lui : offrons-nous, parce qu’en nous of- fertoire éternel, une Communion perpétuelle.
frant nous exprimerons ce que nous
sommes et nous mériterons Son aide Offrande de toutes les Messes
e m’unis à toutes les Messes qui sont célébrées à
pour être à Lui et obtenir la vie éter-
nelle. J chaque moment dans le monde et je les remets en-
tre les mains de Marie, médiatrice de toutes grâces,
Et tout cela faisons-le durant la
Messe, en unissant notre adoration, nos afin qu’Elle obtienne, par l’offrande du Sang de Jésus
louanges, notre action de grâce, notre à la très Sainte Trinité, la libération des âmes du pur-
prière, notre réparation, notre offrande, gatoire, le réconfort des mourants, la conversion des
aux sentiments que Jésus met en acte pécheurs et la persévérance des justes. Comme les
dans la Messe et qui sont semblables gouttes d’eau versées dans le calice se dispersent
aux nôtres ; et c’est ainsi, dans la faible dans le vin qui, consacré, devient Votre Sang, qu’ainsi
mesure de nos moyens, que nous aurons mon action participe à Votre Sacrifice.
offert et que nous nous serons offerts -
et que nous serons réellement la petite entendant dire que la Messe doit être un
goutte d’eau infuse dans le calice. de nos plus grands points de référence
«Toutes les fois qu’une personne as- quotidiens. Il lui fut répondu en expli-
siste à la Messe avec dévotion, s’unis- quant une prière présente dans le petit
sant à Jésus-Christ qui s’immole Lui- livre Con Gesù all’altare (20), écrit pour les
même pour le rachat du monde, Dieu le enfants mais valable aussi pour les
Père la regarde avec la même complai- adultes : “O Jésus, je vous offre au Père
sance que l’Hostie sainte. Cette âme de- Éternel pour que vous l’adoriez, le re-
vient alors resplendissante et lumi- merciiez, lui demandiez pardon et des
neuse, comme une personne qui, au sor- grâces pour moi et pour tous les
tir des ténèbres, se trouve éclairée subi- hommes. Avec Vous je m’offre aussi.
tement par les rayons du soleil» (sainte Faites que chaque moment de ma vie
Gertrude, Révélations, liv. 3 ch. 18). soit un acte d’amour pour Vous” : peut-
être ne pouvons-nous pas prier et nous
Dans la vie quotidienne offrir… partout ? À la maison dans les
prières du matin ou du soir, ou durant la
Qu’on me permette un dernier para- journée, pendant que peut-être en un
graphe. «Mais quand je suis chez moi je endroit éloigné du monde un ministre de
n’ai pas la Messe tous les jours...», telle Dieu est en train d’offrir Jésus, Qui n’at-
est la préoccupation qu’exprimait un en- tend que moi... pour que j’unisse mon of-
fant, présent à une des retraites pour les frande à la Sienne pour la prendre avec
jeunes organisées par l’Institut MBC, en Lui ! Prie ton Père en secret : et ton Père,
64

GARRIGOU-LAGRANGE o.p., De Eucha-


Offrande de soi-même (St Ignace) ristia, pp. 264-273.
D O M I N I K P R Ü M M E R o.p., Manuale
renez, Seigneur, et recevez ma liberté entière, ma
P mémoire, mon intelligence et toute ma volonté.
Tout ce que j’ai, tout ce que je possède, Vous me
theologiæ moralis, tome 3 nn° 229-230.

Notes
l’avez donné ; je vous rends tout, disposez-en selon
votre bon plaisir. Donnez-moi seulement votre amour 1) L’exégèse de ce paragraphe est celle don-
née par le p. Guérard des Lauriers o.p. in Ré-
avec votre grâce, et je suis dès lors assez riche ; je flexion sur le Novus Ordo Missæ au point 2321 (ou-
ne vous demande rien de plus. vrage de 1977, publié en français par le CLS).
2) Il est intéressant de noter comment dans
Indulgence de trois ans. Plénière si récitée pendant un mois, les originaux (en langue grecque) de l’Évangile
aux conditions habituelles (Pie XI, 4 décembre 1932). de saint Luc et de la lettre de saint Paul aux Co-
rinthiens, le corps livré du Christ et l’effusion de
son sang ne sont pas écrits au futur, mais au par-
qui voit dans le secret, te le rendra (Matth. ticipe présent : de sorte que l’expression de Jésus
6, 6). D’ailleurs, durant la Messe le prê- devienne de manière conceptuelle “il appartient
à mon corps et à mon sang d’être offerts pour
tre offre le sacrifice en union spirituelle vous (livré et répandu), c’est leur propriété”, “ils
avec chaque fidèle “tourné vers la mé- sont une offrande durable pour vous”.
moire de Jésus”, à ce qu’Il a fait Lui- 3) «La cène chrétienne prit peu à peu le ca-
même en se sacrifiant, à l’intention qu’Il ractère d’une action liturgique» - proposition
a eue en se sacrifiant : Unde et memores, condamnée par saint Pie X par le décret Lamen-
tabili du 3 juillet 1907 (Denz.-B 2049, Denz.-S
Domine, nos servi tui, sed et plebs tua 3449). Cette affirmation des modernistes vient de
sancta… offerimus. – C’est pourquoi, Sei- leurs préjugés dogmatiques et non pas d’argu-
gneur… nous (prêtres) vos serviteurs, et ments raisonnables ; en effet en analysant l’Écri-
avec nous votre peuple saint, nous présen- ture il s’avère que la célébration de la Messe ap-
paraît comme quelque chose de stable et tradi-
tons à votre souveraine majesté […]. tionnel. Ceci est témoigné par exemple pour Jé-
S’unir spirituellement à la Messe est rusalem (Actes 2, 42-46), Troas (20, 7-11) et Co-
donc possible même si nous ne pouvons rinthe (I Cor. 10-11) déjà aux temps apostoliques.
y assister ; nous le faisons par exemple Et déjà les Pères les plus anciens parlent dans ce
avec la prière Père saint, je dépose dans le sens (ex. on peut voir la Didachè ch. 14, 1-3 ; ou
saint Ignace d’Antioche mort en 107).
calice, reproduite à la p. 63. 4) Concile de Trente, session 22 chapitre 1, 17
«Il serait plus facile que la terre septembre 1562. Denz.-B 938-939, Denz.-S 1739-
existât sans le soleil que sans la sainte 1740.
Messe» (Padre Pio) (21). 5) Pie XII, lettre encyclique Mediator Dei (20
novembre 1947), sur la liturgie (Denz.-S 3847-
3848). Toutes les citations de Pie XII que nous fe-
Bibliographie rons dans cet article sont tirées de ce document.
6) Paroles très claires, comme l’étaient déjà
En plus des documents magistériels celles de Pie IX et de saint Pie X ; mais pour ar-
ici rapportés, les différentes doctrines rêter les modernistes il aurait fallu bien autre
chose, saint Pie X le voyait déjà ; après la
exposées sont bien expliquées in : condamnation du modernisme par l’encyclique
ANTONIO PIOLANTI, I Sacramenti, pp. Pascendi, le marquis Crispolti fut reçu en au-
601-628. De Sacramentis, pp. 2973-312. dience par saint Pie X et il se réjouit avec lui «de
L’Eucarestia, pp. 329-357. l’effet salutaire que l’encyclique aurait et sem-
blait déjà avoir. Il me demanda tristement :
HENRY MERKELBACH o.p., Summa theo- “Vous le croyez ?”» (FILIPPO CRISPOLTI, Pio IX,
logiæ moralis, tome 3 nn° 301-304, 334. Leone XIII, Pio X, Benedetto XV. (Ricordi personali)
MICHEL-LOUIS GUÉRARD DES LAURIERS Treves-Treccani-Tumminelli, Milano-Roma, 1932,
o.p., Réflexion sur le N.O.M., pp. 231- p. 130). Et en effet comme la condamnation de
232. Marie est co-Rédemptrice in La Pen- saint Pie X ne fut pas pleinement efficace, ainsi
le fut encore moins (entre autres) l’enseignement
sée catholique n° 152 pp. 17-57 sept.-oct. cité de Pie XII sur la liturgie ; ce n’est que vingt
1974. ans après, dans l’«introduction» officielle du
Deux frères anonymes du couvent «Novus Ordo Missæ» de 1969, au second chapitre
du Saulchoir (pour la première partie), du “nouveau missel”, que la Messe fut définie
«la synaxe sacrée ou le rassemblement du peuple
et P. GUÉRARD (pour la seconde), Le sa- de Dieu se réunissant sous la présidence du prê-
crifice: Exposés bibliques et principes de tre pour célébrer le mémorial du Seigneur»
la théologie du sacrifice. (n. 7). «La définition de la Messe est donc ré-
65

duite à celle de “cène” : et cela réapparaît conti- tants, les modernistes et les néo-modernistes
nuellement (n. 8, 48, 55d, 56). Cette “cène” est condamnés, sur ce point aussi, respectivement
en outre caractérisée comme étant celle de l’as- par le Concile de Trente, saint Pie X et Pie XII.
semblée présidée par le prêtre et réunie afin de «La participation des fidèles au Sacrifice Eu-
réaliser le mémorial du Seigneur, en rappelant charistique n’implique pas qu’ils jouissent du
ce qu’il fit le Jeudi-Saint. Tout cela n’implique ni pouvoir sacerdotal» (Pie XII, encyclique Media-
la Présence Réelle, ni la réalité du Sacrifice, ni le ca- tor Dei du 20 novembre 1947). «On ne doit pas
ractère sacramentel du prêtre qui consacre, ni la nier ni mettre en doute que les fidèles aussi ont
valeur intrinsèque du Sacrifice eucharistique in- un certain “sacerdoce” ; et il n’est permis ni de le
dépendamment de la présence de l’assemblée. mépriser ni de l’amoindrir. Le Prince des Apô-
En un mot, cette nouvelle définition ne contient tres dans la première lettre, parlant aux fidèles,
aucune des données dogmatiques qui sont essen- emploie ces paroles : “Mais vous êtes, vous, une
tielles à la Messe et qui en constituent par consé- race choisie, un sacerdoce royal, une nation
quent la véritable définition. L’omission, en un sainte, un peuple conquis” (I Pierre 2, 9) ; et un
tel endroit, de ces données dogmatiques, ne peut peu avant dans la même lettre il dit que revient
être que volontaire. Une telle omission volon- aux fidèles “un sacerdoce saint, pour offrir des
taire équivaut à leur “dépassement”, c’est-à-dire, hosties spirituelles, agréables à Dieu par Jésus-
au moins en pratique, à leur négation» - c’est ce Christ” (2, 5). Mais quel que soit le vrai sens plé-
qu’observaient les cardinaux Ottaviani et Bacci nier de ce titre honorifique et de la chose elle-
au point II du Bref examen critique du N.O.M. du 5 même, il faut cependant considérer fermement
juin 1969 ; il est vrai qu’à cause des protesta- que ce sacerdoce commun de tous les fidèles,
tions, dans la rubrique citée plus haut du “nou- bien qu’élevé et mystérieux, diffère non seule-
veau missel” fut ajoutée l’expression “sacrifice ment dans le degré, mais aussi essentiellement
eucharistique” ; mais la position primitive de du vrai sacerdoce, qui consiste dans le pouvoir
cette erreur subsiste tout comme subsiste le reste d’opérer le sacrifice du Christ Lui-même, en re-
du texte, pour le commentaire duquel je renvoie présentant précisément le Christ Souverain Prê-
au Bref examen critique. tre» (Pie XII, Discorso ai convenuti per la procla-
7) Saint Thomas, Somme théologique IIa-IIæ q. mazione della festa della Regalità della Madonna, 3
85 art. 1. “La raison naturelle”… Saint Thomas mars 1954). La représentation dont parle le Pape
soutient que c’est notre devoir, et c’est naturel, ne doit pas être entendue comme une représenta-
d’offrir des sacrifices à Dieu ; combien est éloi- tion symbolique (comme au théâtre) pour la-
gnée de cette réalité, la société dans laquelle on quelle tout fidèle serait capable de “réciter la
voudrait faire exister seulement des droits et partie”, mais doit plutôt être entendue du point
plus aucun devoir ! de vue des sacrements, qui effectuent en celui qui
8) Saint Thomas, Somme théologique Ia-IIæ q. les reçoit ce que le sacrement symbolise : et le sacre-
102 art. 3. ment de l’Ordre symbolise, et par conséquent im-
9) P. Guérard des Lauriers, Principes de la prime dans le prêtre, le caractère du Christ-sanc-
théologie du sacrifice in Le sacrifice. Cf. Saint Tho- tificateur, et donc la capacité d’être vicaire du
mas, Somme théologique IIIa q. 48 art. 3 ad 1. Christ (de Sa personne) dans la Messe et dans les
Étant assis en face du tronc, Jésus regardait de sacrements : voilà la représentation. Le baptême
quelle manière le peuple y jetait de l’argent ; or imprime au contraire en tout chrétien le carac-
nombre de riches y en jetaient beaucoup. Et une tère du Christ puisqu’il vit de vie divine, prédis-
pauvre veuve étant venue, elle y mit deux petites posant le fidèle à recevoir l’abondance de la
pièces valant le quart d’un as. Appelant alors ses grâce et en lui donnant la capacité d’opérer le
disciples, il leur dit : En vérité, je vous le dis, cette bien surnaturel - choses propres au Christ mais
pauvre veuve a déposé plus que tous ceux qui ont transmises au chrétien dans le baptême, qui jus-
mis dans le tronc. Car tous ont mis de ce qu’ils tement symbolise / signifie ces choses.
avaient de superflu ; mais celle-ci a mis de son indi- 14) Alors qu’il n’en est pas ainsi pour la quête
gence, même tout ce qu’elle avait, tout son vivre et l’aumône de la Messe ; à ce propos on peut
(Mc 12, 41-44). voir l’article L’offrande de Messes, in Sodalitium n°
10) BENOÎT-HENRY MERKELBACH o.p. (Belgique 59 pp. 38-39.
1871 † 1942), Summa theologiæ moralis, tome 3 n° 15) En vertu du sacrement de l’Ordre, qui lui
303. en imprime le caractère. Voir la note 13.
11) Saint Thomas, Somme théologique IIª-IIæ q. 16) On peut consulter : LEBRUN, Explication
85 a. 4. des prières et cérémonies de la Messe, 3e partie art.
12) Comme toujours, saint Thomas est très VI § III.
clair : “il y a deux types de sacrifices : le premier, 17) LEBRUN, Explication des prières et cérémo-
le principal est le sacrifice intérieur, auquel tous nies de la Messe, 3e partie art. VI § VI.
sont tenus : car tout le monde est tenu d’offrir à 18) On peut en trouver deux dans Il mio libro
Dieu une âme dévote. L’autre est le sacrifice ex- di preghiere (pp. 152 et 158), éd. CLS Verrua Sa-
térieur, dont l’obligation est diverse pour ceux voia (uniquement en italien, mais on en trouve
qui sont sous la loi, ancienne ou nouvelle, et pour dans les livres de prières ou dans les missels).
ceux qui n’ont pas vécu sous la loi” (Somme théo- 19) Concile de Trente, session 22 chapitre 4,
logique IIa-IIæ q. 85 a. 4). 17 septembre 1562. Denz.-B 942, Denz.-S 1745.
13) C’est une vérité de foi définie et très im- 20) Vivement conseillé pour les enfants tant
portante, opposée à toutes les tendances anticlé- pour leurs prières que pour suivre la Messe (uni-
ricales et démocratisantes comme les protes- quement en italien ; en langue française l’équiva-
66

lent est Le chemin du Ciel, éd. CLS Verrua Sa- du rite de la célébration, au-delà de la question
voia). de la validité du ministre…
21) Arrivés au terme de cet article, je ne À propos du rite et de l’una cum, nous ren-
peux me dispenser d’appliquer ce qui est exposé voyons à : Interview de Mgr Guérard des Lauriers
à la confusion actuelle concernant les rites et les o.p. sur la Thèse de Cassiciacum aux questions 5 et
célébrations : dans la Messe Jésus-Christ s’offre, 6, in Sodalitium n° 13 (pp. 23-25) ; à Note litur-
et avec Lui nous devons nous offrir nous aussi. gique sur l’una cum… in Sodalitium n° 35 (pp. 52-
Mais une offrande entachée, selon les cas, de sa- 53) ; et à Le problème de l’“una cum”: un cas de
crilège et de schisme (pour les Messes de saint conscience in Sodalitium n° 41 (pp. 56-58).
Pie V mais una cum ; et pour le Novus Ordo À propos de la validité du prêtre : Da Cran-
Missæ de 1969), et en tout cas de péché contre la mer a Montini. Un confronto rivelatore di Padre
confession de la foi (pour les Messes de saint Pie Morerod in Sodalitium n° 48, édition italienne
V non una cum seulement en secret ou dans un (pp. 62-64). A. CEKADA, Del tutto invalido e assolu-
institut officiellement una cum) peut-elle être tamente nullo. Il rito di consacrazione episcopale del
agréable à Dieu ? Et cela pour parler seulement 1968 (publié en italien par le C.L.S.).

Indulgences que l’on peut gagner en assistant à la Messe :

• Aux fidèles, chaque fois qu’ils récitent une quelconque prière en entendant sonner la
cloche qui indique l’élévation du Saint Sacrement de l’Eucharistie, sont accordés 300 jours d’in-
dulgence (Grégoire XIII, Constit. Apost. Ad excitandum 10 avril 1586 ; S. Pénit. Ap. 25 fé-
vrier 1933).

• Indulgence de 500 jours pour chacune de ces jaculatoires, même séparées, si elles sont réci-
tées à l’élévation de l’Hostie ou du Calice durant la Messe :
a) Salut, Victime du Salut, offerte sur le gibet de la Croix pour moi et pour tout le
genre humain.
b) Salut, Sang précieux, qui coulez des blessures de Notre-Seigneur Jésus-Christ Cruci-
fié, qui lavez les péchés du monde entier.
c) Souvenez-vous, Seigneur, de votre créature, que vous avez rachetée par votre pré-
cieux Sang.
(S. Congr. des Indulgences 30 juin 1893 ; S. Pénit. Ap. 25 février 1933).

• Mon Seigneur et mon Dieu !


Aux fidèles qui récitent avec foi, piété et amour cette jaculatoire durant l’élévation de l’Hos-
tie durant la Messe, ou durant son exposition solennelle, son concédés 7 ans d’indulgence.
Indulgence plénière une fois par semaine, si cette pieuse pratique est accomplie chaque jour,
avec l’ajout (une fois) de la confession sacramentelle, de la sainte Communion et d’une prière
aux intentions du souverain Pontife (saint Pie X rescrit du 18 mai 1907 publ. 12 juin ; S.
Pén. Ap. 21 juin 1927 et 26 janvier 1937).

• Béni soit Celui qui vient au nom du Seigneur : Hosanna au plus haut des cieux.
Aux fidèles qui récitent cette petite prière après la consécration au sacrifice de la Messe on
accorde l’indulgence de 500 jours. Indulgence plénière aux conditions habituelles si récitée pen-
dant un mois entier (S. Pén. Ap. 22 novembre 1934).

• Aux fidèles, qui servent avec dévotion la Messe au prêtre, est accordée l’indulgence de trois
ans (S. Pén. Ap. 13 mai 1937).

• Exercice de réparation :
a) Aux fidèles qui décident de réparer pendant neuf jours de suite les injures des hommes
contre le très Saint Sacrement de l’Eucharistie par des méditations ou des prières journalières,
on concède pour chacun de ces jours : indulgence de sept ans.
b) Chaque fois que, durant ces neuf jours, ils assisteront au sacrifice de la Messe, on
concède : dix ans d’indulgence.
c) Une fois l’exercice des neuf jours terminé, on concède : indulgence plénière aux conditions
habituelles.
(S. Pie X, rescrit du 15 novembre 1907 publ. 19 nov. 1907 ; Benoît XV resc. 15 nov.
1916 publ. 30 déc. 1916 ; S. Pén. Ap. 21 mai 1933).
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Les Frères de l’Institut La Congrégation des Frères


Abbé Ugo Carandino permet aux jeunes qui se sen-
tent appelés à la vie religieuse
A u mois de juin 2022 le premier
frère de l’Institut Mater Boni Consi-
lii a prononcé ses vœux perpétuels
de réaliser leur vocation spéci-
fique de frères laïcs, sans le
d’obéissance, chasteté et pauvreté, au parcours d’études préparant
terme d’un parcours prévoyant six mois
de postulat, deux années de noviciat et aux Ordres sacrés.
les vœux de trois ans renouvelables
deux fois.
Les statuts des Frères de notre Insti- Rodriguez, saint Jacques d’Alcalà,
tut précisent la nature et le but de la saint Félix de Cantalice, saint Gérard
congrégation elle-même : “Tenant Majella, saint Ignace de Laconi, saint
compte de la finalité de l’Institut Mater Séraphin de Montegranaro, saint Salva-
Boni Consilii, les Frères rechercheront leur dor d’Horta, saint Pascal Baylon…
propre perfection et aideront au salut de Un livre particulièrement important
leur prochain, spécialement par l’aide au pour connaître la vie religieuse a été
ministère des prêtres de l’Institut Mater écrit par le père dominicain Antonio
Boni Consilii. C’est pourquoi les Frères de Royo Marin (1913-2005), La vida reli-
l’Institut Mater Boni Consilii avant toute giosa, publié en 1955 en espagnol (par
chose s’efforceront à l’exercice des vertus les éditions B.A.C.) et dix ans après tra-
chrétiennes, pour œuvrer ensuite pour le duit en italien par les Edizioni Paoline,
bien de leur prochain. Ils auront pour La vita religiosa. Le texte est le déve-
préoccupation particulière de propager la loppement, pour la vie religieuse, du
dévotion à Notre-Dame du Bon Conseil, de chef-d’œuvre du père Royo Marin, Teo-
coopérer à la bonne marche des écoles, des logia della perfezione cristiana (1954) et
camps pour la jeunesse, des jardins d’en- est utilisé à Verrua Savoia pour la for-
fants et des patronages, d’assurer le caté- mation des novices.
chisme et, en général, l’exercice des œuvres En presque mille pages, l’auteur dé-
de miséricorde spirituelle et corporelle, se- crit chaque aspect de la vie religieuse :
lon les finalités de l’Institut. Ils se prête- l’aspect canonique, l’aspect théolo-
ront à l’aide au ministère sacerdotal des gique, l’aspect ascético-mystique. Par-
prêtres de l’Institut (diffusion de la bonne courons-les brièvement pour mieux
doctrine et de la bonne presse, secrétariat, comprendre ce qu’est la vie religieuse.
entretien de la maison, aide à l’occasion
des retraites spirituelles)”. Saint Félix de Cantalice
La Congrégation des Frères permet
donc aux jeunes qui se sentent appelés
à la vie religieuse de réaliser leur voca-
tion spécifique de frères laïcs, sans le
parcours d’études préparant aux Or-
dres sacrés. Je précise qu’il ne s’agit
pas d’un “pis-aller” (comme d’aucuns
pourraient le penser) au cas où ils ne
pourraient s’engager dans la vie sacer-
dotale, mais bien d’une véritable voca-
tion pour qui désire servir Dieu au
moyen des trois vœux religieux.
L’Église a élevé à la gloire des au-
tels nombre de frères lais qui ont at-
teint les sommets de la sainteté grâce à
leur consécration religieuse, comme :
saint Alexis Falconieri, saint Alphonse
68

Aspect canonique

Le code de droit canonique donne


une définition descriptive de la vie reli-
gieuse : “On doit tenir en grande estime
l’état religieux, c’est-à-dire un mode de vie
en commun stable, par lequel les fidèles,
en plus des préceptes communs, s’impo-
sent l’obligation de pratiquer les conseils
évangéliques au moyen des trois vœux
d’obéissance, de chasteté et de pauvreté”
(can. 487). Évidemment une famille re-
ligieuse est nécessaire pour permettre
Profession perpétuelle du premier frère de l’Institut
aux jeunes de réaliser ce programme :
c’est la raison pour laquelle notre Insti- père Royo Marin - est la manière stable
tut, composé de prêtres et de laïcs, de vivre en commun par laquelle les
après la branche religieuse féminine, a consacrés, en plus des préceptes com-
instauré aussi, il y a dix ans, une muns (comme les Commandements de
branche religieuse masculine. Dieu et de l’Église), s’imposent aussi
Le père Royo Marin illustre les dis- l’obligation de pratiquer les conseils
positions pour être admis (être catho- évangéliques au moyen des trois vœux
lique, absence d’empêchements légi- d’obéissance, chasteté et pauvreté.
times, intention droite et aptitude à la Les vœux représentent le moyen
vie religieuse), en précisant que toute pour atteindre la véritable fin de tout
personne qui présente ces quatre condi- état de perfection, qui est l’union à
tions peut être admise mais n’a pas le Dieu avec la perfection de la charité.
droit de l’être : cela dépend de la libre En effet “ils suppriment les trois obsta-
acceptation des supérieurs. La vocation cles majeurs qui empêchent à la charité
religieuse, de la part de Dieu, consiste à et aux vertus de régner dans nos cœurs,
choisir une personne pour cet état dé- qui, comme chacun sait, sont constitués
terminé et à lui accorder les grâces né- par l’amour désordonné des biens maté-
cessaires pour l’embrasser. De la part riels, des plaisirs sensibles et de la volonté
de l’homme, l’appel divin se manifeste propre … Avec les vœux de pauvreté, de
au moyen d’un ensemble de qualités na- chasteté et d’obéissance, le religieux
turelles et surnaturelles. Un acte juri- dresse volontairement une muraille entre
dique est indispensable pour réaliser la lui et la triple concupiscence, en renon-
vocation, qui consiste dans l’accepta- çant totalement à l’usage des biens maté-
tion de la part d’une famille religieuse riels, des plaisirs sensibles et de sa volonté
d’un candidat présentant les disposi- propre” … En particulier, ils sont un ho-
tions et pour lui assurer un encadre- locauste très précieux offert à Dieu … Ce
ment pour éviter tout genre de “sponta- sacrifice, fait par amour de Dieu, consti-
néité”, source d’illusions et sujette aux tue un des plus héroïques actes de charité
caprices de la nature humaine. que l’homme puisse accomplir librement”
(pp. 290-291).
Aspect théologique
Aspect ascético-mystique
La vie religieuse est un état de perfec-
tion. Par état on entend toute condition Le père Royo Marin, après avoir
ou forme de vie constante et stable ; les renvoyé à son œuvre précédente, Teolo-
états de perfection dans la vie chrétienne gia della perfezione cristiana, traite dans
sont ceux dans lesquels les membres presque 700 pages les aspects de l’as-
s’engagent de manière permanente et cèse chrétienne, qui doivent vivifier la
stable à acquérir et à exercer la perfec- vie du religieux. L’explication des dif-
tion chrétienne. L’état religieux, à la lu- férents chapitres au cours du noviciat
mière de ces définitions - explique le et la relecture dans les années sui-
69

certains cas avait déjà pénétré dans le


cloître. C’est pourquoi l’auteur consa-
cre de nombreuses pages pour répon-
dre aux objections qui se répandaient
avec toujours plus de virulence parmi
les jeunes religieux les plus fragiles et
les plus exposés à l’influence progres-
siste et mondaine.
La fragilité des caractères, qui a
conduit à l’écroulement des vocations,
doit certainement être recherchée dans
l’absence, à partir des années 60, au sein
Les frères au travail à Verrua de la famille et de l’école, de l’éducation
à l’esprit de sacrifice, à la soumission, à
vantes, permettent au religieux de son- la docilité justement, qui détermine la
der la richesse de la vie religieuse, de force vertueuse du jeune garçon. L’ab-
l’excellence des vertus qui correspon- sence de cette orientation pédagogique
dent aux trois vœux et des avantages favorise l’esprit capricieux, égoïste, re-
qu’ils procurent à leurs âmes, ainsi que belle, et par conséquent la faiblesse mo-
de faire croître le désir d’éliminer les rale, un terrain absolument défavorable
obstacles inhérents à la nature hu- pour faire grandir l’éventuelle vocation
maine réfractaire à la grâce. donnée par Dieu au jeune homme. Cela
Il faut souligner que la partie la plus détermine la désertion de la voie du sé-
développée est celle relative à l’obéis- minaire ou du noviciat (et aussi du sacre-
sance, entendue comme vertu et ment de mariage) pour au contraire em-
comme vœu. Celui qui vit dans le prunter la voie tracée par les passions et
monde pourrait penser que ce sont la les affections désordonnées.
pratique de la pauvreté et de la chas- La Congrégation des Frères de l’Ins-
teté qui requièrent les plus importants titut s’adresse donc aux jeunes géné-
sacrifices pour être observés fidèle- reux qui ne se contentent pas d’une vie
ment. On minimise ainsi la difficulté de chrétienne médiocre et qui, au cas où ils
pratiquer l’obéissance religieuse non ne se sentent pas appelés au Sacerdoce
seulement extérieurement, mais sur- ou à la vie conjugale, désirent servir No-
tout intérieurement. “L’obéissance reli- tre-Seigneur dans la vie religieuse. Les
gieuse constitue, donc, un très grand sa- frères, comme les sœurs, sont une béné-
crifice, agréable à Dieu au plus haut de- diction pour l’Institut et pour de nom-
gré, puisque c’est un don suprême de breuses familles : il suffit de penser au
l’amour d’offrir à l’aimé non seulement bien accompli par les catéchismes, les
ce qu’on possède - qui est toujours peu - colonies et les camps. Prions donc afin
mais ce qu’on est” (p. 510). Cela suppose que la vocation divine soit connue par
la docilité de celui qui aspire à la vie un nombre toujours plus important
religieuse, docilité indispensable pour d’âmes susceptibles d’y correspondre.
aimer et pratiquer de manière ver-
tueuse la sainte obéissance due aux Les frères de l’Institut avec l’abbé Carandino
constitutions, aux statuts et aux supé-
rieurs, pour pouvoir obéir à Dieu.

Conclusion

Le monde déteste et ridiculise la


bonté des belles âmes et dans les an-
nées où le père Royo Marin écrivit le li-
vre (entre la fin des années 50 et le dé-
but des années 60) l’esprit du monde
frappait à la porte des couvents et dans
70

Le fait est que le livre d’Yves Chi-


Recensions ron a une qualité et un défaut. La qua-
lité est que c’est la première et pour le
moment l’unique histoire, bien docu-
mentée et complétée par un diction-
“L’histoire des Traditiona- naire biographique, des catholiques
listes” d’Yves Chiron traditionalistes ; le défaut consiste
dans sa qualité : étant la première et la

“Y ves Chiron ment, Yves Chiron se


ment, Yves Chiron nous ment. Aux
fous !” Louis-Hubert Remy n’est certes
seule histoire des traditionalistes et du
traditionalisme, elle sera le point de ré-
férence de ceux qui s’intéresseront
pas notre ami (loin de là !), mais la ru- dans le futur au sujet, et voudront en
brique de sa recension de “L’histoire des traiter. La quatrième de couverture, en
Traditionalistes” d’Yves Chiron est non effet, conclut la présentation du livre,
seulement agréable mais aussi, même en écrivant : “un livre de référence qui
avec ce qu’elle a d’exagéré, non dénuée fera date sur le sujet” ; sans doute, aussi
de fondement. Louis-Hubert Remy re- (mais pas seulement) à cause de la pa-
grette que l’école de pensée à laquelle resse ou de la précipitation de celui qui
lui-même s’identifie (et dont il énumère s’intéressera au sujet.
les auteurs - laïcs et ecclésiastiques - et Avec ses omissions. Avec ses er-
les revues - version papier et électro- reurs. Avec ses préférences cachées
nique) ne soit pas non plus citée (il y a - sous les savantes citations.
il est vrai - une allusion à “L’Église Et alors, commençons par les er-
éclipsée”, théorie qui lui est chère). Je reurs (petites ou grandes), au moins
dois lui donner raison. On ne peut par- celles que j’ai relevées lors d’une pre-
ler de tout et de tout le monde, mais mière lecture. Elisabeth Gerstner, citée
dans une histoire du traditionalisme il à la p. 183, n’était pas une “animatrice
n’est pas correct d’omettre complète- d’un mouvement traditionaliste en Au-
ment tels auteurs, telles revues, telle triche” mais plutôt en Allemagne. Elle
école de pensée. Que notre ennemi se est rappelée (et ici je me réfère à une
console (sa santé est vacillante et nous omission) dans les peu nombreuses et
prions pour lui) : notre Institut n’est pas courtes allusions aux pèlerinages à
mieux traité, réduit qu’il est à Mgr Mu- Rome de 1970, 1971 et 1973 : en ces an-
nari “qui a quitté l’état sacerdotal” (il y a nées, elle vivait à Rome, et travaillait
32 ans ! et je le dis avec beaucoup de pour le Vatican.
tristesse. Et aussi avec reconnaissance À la p. 185, il est dit que la constitu-
pour tout ce qu’il fit de bien initiale- tion conciliaire sur la liturgie “Sacro-
ment) : après lui, un développement santum Concilium” fut “bien accueillie”
“modeste” et rien de plus ; comme bi- par les futurs traditionalistes. Par cer-
bliographie, pas non plus la revue Soda- tains, peut-être, par tous non : Jean Va-
litium, mais les “Collusions des ‘gué- quié écrivit un livre précisément
rardo-thucistes’ avec des sectes” de Vin- contre “Sacrosantum Concilium”.
cent Zins (un sédévacantiste qui À propos de la Fraternité Saint-Pie-
convient seulement pour enterrer ses X, l’auteur écrit (p. 316) que suite à la
“collègues”), et un numéro de Cor déclaration de Mgr Lefebvre “sur le
Unum, le bulletin interne de la Frater- Pape et sur la Messe” de 1979 (Paul VI
nité. Une sorte de petite secte, à citer Pape légitime, nouveau missel valide)
avec les vieux catholiques et les “petites “plusieurs professeurs du séminaire
églises” (p. 328). Tout compte fait, la d’Écône” durent quitter la Fraternité.
damnatio memoriæ qui frappe l’école de Comme à cette époque j’étais sémina-
L.-H. Remy (et pas seulement : pas une riste de la Fraternité, je devais être
allusion à la revue Didasco, rien sur la distrait parce que je n’ai vu aucun pro-
congrégation de Mgr Morello, etc.) est fesseur d’Écône (ou d’Albano) quitter
préférable à la présentation diffama- pour ce motif la Fraternité ou le sémi-
toire qui nous a été réservée. naire à cette date. À la p. 317, Yves
71

Chiron parle (enfin !) de la “Déclara- pas l’omission de cette clausule ; et


tion de fidélité à la Fraternité Sacerdotale comme la position de la Fraternité sur
Saint-Pie-X” que Mgr Lefebvre aurait le nouveau code est indéchiffrable, ne
imposée, à cette occasion, aux candi- m’étonne pas non plus l’omission totale
dats au sacerdoce pour recevoir l’ordi- de la question. Pour la petite histoire,
nation (la fausse accusation de Paul VI racontons à Yves Chiron qu’un sémina-
adressée à Mgr Lefebvre de faire faire riste (qui par la suite a fait une grande
à ses séminaristes un serment contre le carrière dans la Fraternité), très per-
“Pape” devenait ainsi réalité !). De la plexe sur le serment à faire, se rendit
manière dont il présente les choses, on chez le directeur du séminaire pour de-
dirait que la “Déclaration de fidélité” re- mander quelle serait, en conscience, la
monte à 1979, et qu’elle aurait été une valeur d’une telle déclaration. Il lui fut
initiative de Mgr Lefebvre. Pour ce que répondu : aucune. Et il signa, avec la
j’en sache, l’initiative naquit plutôt des conscience tranquille, une déclaration
professeurs d’Écône (qui certainement dénuée de toute valeur.
auront eu le placet de l’évêque) et re- Plus près de nous, concernant ce
monte à 1982 environ. Chiron en publie que Chiron écrit sur la Thèse théolo-
intégralement le texte, reçu de Mgr gique du père Guérard des Lauriers. Si
Tissier (qui en effet en 1981-82 était l’historien cherche dans le livre “His-
encore directeur du séminaire) et le toire des traditionalistes” la date fati-
présente comme une “version inté- dique de l’origine de la Thèse, il en sor-
grale”. En réalité, il n’en est pas ainsi. tira déconcerté : à la p. 307 on parle
Le texte original (je ne sais sur quoi ju- d’avril-mai 1976, aux pp. 285-286 on an-
rent aujourd’hui les séminaristes de la ticipe à avril 1975, alors qu’à la p. 314
Fraternité) prévoyait aussi un appen- on diffère à avril-mai 1977… Cela,
dice sur le nouveau droit canonique, à quant aux dates ; quant au contenu, à
propos duquel le séminariste s’enga- la p. 307, Chiron explique que pour la
geait à adopter la position que pren- Thèse Paul VI “était légitimement
drait ensuite la Fraternité. La chose est pape”, à la p. 315 on s’approche un peu
tellement invraisemblable (exiger un de la réalité (bien qu’encore de ma-
serment “de futuro”) que ne m’étonne nière inexacte) en disant qu’il était “lé-
gitimement élu”. Notre Institut qui à la
p. 497 a été fondé en 1986 (faux) et à la
p. 328 en 1985 (exact), serait né parce
que ses fondateurs suivaient, depuis le
début, la Thèse du père Guérard. Si
c’était vrai ! Hélas nous ne l’avons
adoptée qu’en septembre 1986 (mais
depuis nous ne l’avons jamais abandon-
née). Pour rester au père Guérard, l’ar-
ticle sur le NOM publié par La Pensée
Catholique signé “un groupe choisi de
théologiens” (p. 206) est l’œuvre exclu-
sivement du père Guérard des Lau-
riers, comme il a été rappelé par Sodali-
tium. De même concernant le Bref exa-
men critique (p. 207) qui, quant à la
forme littéraire en italien est dû à Cris-
tina Campo, et qui, quant aux contenus
est dû presque exclusivement au père
Guérard des Lauriers, comme il l’a dé-
claré lui-même, très clairement, sur Iti-
néraires et ensuite dans la préface à la
réédition du Bref examen critique par
les Editions Sainte Jeanne d’Arc. Les in-
72

formations historiques sur le Bref exa- qu’il l’aurait fait avant même que le
men critique et sur la collaboration en- Novus Ordo fût promulgué. La vérité
tre le père Guérard et Cristina Campo, sur cette question est bien expliquée
que j’ai racontée dans l’introduction à sur notre site français (www.sodali-
la réimpression de la réponse du père tium.eu) et facilement consultable y
Guérard à Simone Weil, basée sur les compris par Yves Chiron : La rupture
archives du père Guérard, est totale- entre Mgr Lefebvre et le Père Guérard
ment ignorée de l’auteur. Toujours à des Lauriers après la lettre à Jean-Paul
propos de Cristina Campo, l’auteur II (Noël 1978) - Sodalitium
omet de parler de son rôle (préémi- Je ne voudrais pas que cette liste
nent) dans la pétition sur la Messe dont d’erreurs ou d’omissions puisse cepen-
il est question aux pp. 216-217 : la dant donner l’impression d’une critique
chose est connue, et on peut voir à ce défavorable : je me rends compte com-
propos mon livre sur Cristina Campo. bien il est difficile, pour un seul au-
Toujours à propos de la Thèse, je ne teur, de traiter d’un sujet aussi vaste
sais où Yves Chiron a découvert que le et, surtout, de contenter tout le monde.
petit livre du père Barbara avec lequel Les ‘dominicains’ d’Avrillé, par exem-
il abandonnait publiquement le sédéva- ple, n’ont pas non plus été satisfaits de
cantisme simpliciter (dont il avait été le ce que Yves Chiron écrit à propos de la
porte-drapeau) et acceptait la Thèse de fondation de leur Fraternité (Le Sel de
Cassiciacum (Pourquoi le pape materiali- la terre, n. 120, pp. 201-202) : il leur en
ter plutôt que le sédévacantisme?, 1996) cuit que soit rappelé le rôle joué par le
aurait été écrit pour répondre au père père Guérard des Lauriers et ils nient
Vinson qui soutenait la thèse sédévacan- avoir jamais été vraiment sédévacan-
tiste” (p. 450). Voilà qui est nouveau, tistes (Mgr Lefebvre, Yves Chiron, le sé-
tant parce qu’à cette époque l’Institut dévacantisme et Avrillé). Et même, Chi-
collaborait à la fois avec le père Bar- ron parlerait trop à leur goût du sédé-
bara et avec le père Vinson, que parce vacantisme (alors qu’il en parle trop
que Yves Chiron lui-même rappelle peu : par exemple, il évoque B. Dumont
que longtemps avant le père Vinson et l’abbé Barthe sans parler de leur
était dans le groupe des prêtres qui sui- aversion au “guérardisme” et de leur
vait la Thèse (il s’éloigna du père Gué- passage ultérieur au “ratzingerisme” ;
rard à cause de sa consécration épisco- et il n’y a pas de trace non plus, sauf er-
pale ; ensuite, comme le père Barbara, reur de ma part, de la Lettre à quelques
il accepta la validité et la licéité de ce Évêques, signée également par Mgr de
sacre, même si ce fut après la mort de Castro Mayer pour sa valeur doctri-
Mgr Guérard). Un petit chapitre inti- nale). Je crains justement qu’avec son
tulé “Le guérardisme” (pp. 313 ss) livre l’auteur se soit fait un bon nom-
parle de la lettre du père Guérard des bre d’ennemis !
Lauriers intitulée :“Monseigneur, nous Feuilletons donc ensemble le gros
ne voulons pas de cette paix” (12 avril volume pour signaler au lecteur
1979) en réponse à la lettre de Mgr Le- quelques traits et aussi, parfois,
febvre à Jean-Paul II dans laquelle quelques curiosités.
l’évêque français proposait une solu- L’auteur trace l’histoire du “Tradi-
tion pour la reconnaissance de la Fra- tionalisme” non seulement à partir de
ternité beaucoup plus généreuse (pour la Réforme liturgique, spécialement de
les modernistes) que celle que deman- l’Ordo Missæ (on y arrive seulement au
dèrent par la suite l’abbé Schmidber- chapitre 6) ou de Mgr Lefebvre (ch. 7),
ger et Mgr Fellay. Yves Chiron, à la et même pas du Concile Vatican II (ch.
suite de Jean Madiran, démolit le père 3) mais de bien avant, en abordant les
Guérard des Lauriers en l’accusant “crises du catholicisme français” sous
d’être un “calomniateur délirant” (p. Pie XII (ch. 2) et avant encore en trai-
314). Calomniateur, puisqu’il a fausse- tant, bien qu’en un seul chapitre, de
ment accusé Mgr Lefebvre d’avoir célé- l’“intégrisme” (de saint Pie X à Pie XI)
bré avec le Novus Ordo, délirant parce (ch. 1). Il est paradoxal que les néo-mo-
73

dernistes, au moins en France, appel- ce ne sera pas moi…”) était le problème


lent (de manière péjorative) “inté- central et décisif à résoudre : ses choix
gristes” les catholiques qui s’opposent erronés sur la Messe, sa théologie toute
aux erreurs de Vatican II, et que ces personnelle et anti-thomiste, son anti-
derniers au contraire ignorent ou refu- intégralisme, ses choix politiques, les
sent cette appellation (ou mieux, celle affaires privées à la fin de sa vie, n’ef-
correcte de catholiques intégraux). facent pas le souvenir de son rôle en
L’hérésie de notre époque est en effet ces années. Trop peu de place, à mon
le modernisme, condamné par saint Pie jugement, est donné au “traditiona-
X, et l’affrontement n’est pas, en réa- lisme” avant Mgr Lefebvre, autrement
lité, entre traditionalistes et progres- dit avant que Mgr Lefebvre prenne pu-
sistes, mais entre catholiques intégraux bliquement position (1974). Et en parti-
et modernistes (et ce n’est pas seule- culier aux “marches sur Rome” pour la
ment une question d’étiquettes ou de Pentecôte, organisées par l’abbé
noms, mais de substance). Traitant du Coache, le père Barbara, le père Saenz
Concile, on est frappé du fait que, alors y Arriaga, Elisabeth Gerstner, Franco
que les modernistes savaient parfaite- Antico : rassembler à Rome, sous les fe-
ment qui ils étaient et ce qu’ils vou- nêtres de Paul VI, une foule de “tradi-
laient, les “traditionalistes”, même les tionalistes” du monde entier (1970,
meilleurs et les plus conscients, organi- 1971, 1973) sans l’apport de la Frater-
sés dans le Cœtus internationalis Pa- nité, n’était certainement pas rien. Ce
trum, ne l’étaient pas, à l’exception mouvement, plus international, plus ra-
peut-être des évêques brésiliens liés à dical que celui de la Fraternité, fut
l’association “Tradition, Famille et Pro- brisé habilement à l’occasion de l’An-
priété” qui, bien qu’ayant les graves dé- née Sainte de 1975, quand la Fraternité
fauts que nous connaissons, avait au décida de participer au jubilé, en
moins une conscience contre-révolu- confiant le pèlerinage à un mondain li-
tionnaire. J’attribue cette conscience béral, l’écrivain Michel de Saint Pierre,
diminuée du “problème de l’heure pré- et en obligeant les organisateurs de la
sente” précisément à la défaite des ca- marche sur Rome à se démobiliser non
tholiques intégraux après le pontificat seulement pour cette année, mais pour
de saint Pie X, car les “bons” s’ap- toujours. L’abbé Coache, satellite vo-
puyaient, à raison, sur la romanité, lontaire de Mgr Lefebvre, se replia sur
mais n’avaient plus, ou avaient seule- Lourdes (Chiron écrit : “s’effaça”), et
ment en partie, une vision complète du Rome, après 1975, fut laissée en paix
processus révolutionnaire. Ce sera jus- (sauf quelques brèves incursions de
tement l’avancée du modernisme qui l’abbé de Nantes et du père Barbara)
rendra toujours plus conscients (mais au point que la Fraternité pendant de
encore en bonne partie imparfaite- longues années ne voulut jamais une
ment) les “traditionalistes” des causes Maison (la maison généralice est en
et donc des remèdes de la “crise”. Tou- Suisse !) et un centre de messe à Rome,
jours à propos du Concile, n’est pas et au prieuré d’Albano on ne célébrait
donné le juste espace, à mon avis, à ni confirmations ni mariages, et on ne
l’abbé Georges de Nantes. Ne parta- faisait pas d’apostolat pour les Italiens,
geant pas ses opinions (de même que, pour ne pas déranger le Pilote. Le “tra-
comme dit avant, celles de la T.F.P. et ditionalisme” de phénomène interna-
de Corrêa de Oliveira), je peux me per- tional, c’est-à-dire catholique, devint
mettre de rappeler le rôle très impor- donc comme un phénomène français ou
tant qui fut le sien dans la critique du suisse, et l’Italie devint un désert spiri-
Concile, quand beaucoup d’autres ne tuel. Dans la même optique, l’occupa-
savaient pas ou n’osaient pas le faire, tion de Saint-Nicolas-du-Chardonnet
et d’avoir compris que le problème de (pp. 304-306) fut une initiative étran-
Paul VI (le Liber Accusationis, le gère à la Fraternité et à Mgr Lefebvre,
“frappe à la tête”, la réponse de Mgr Le- et boycottée par Écône : c’était l’occa-
febvre : “si un Évêque rompt avec Rome sion de le dire plus clairement.
74

Le gallocentrisme d’Yves Chiron est Mgr Lefebvre dans l’ouvrage de Chiron


loué par la recension critique de L.-H. me semble seulement préparatoire aux
Remy ; ce qui pour les uns est une qua- mouvements appelés autrefois “Eccle-
lité, pour nous est un défaut. Chiron sia Dei” et ensuite “Summorum Pontifi-
tente de donner une fresque universelle cum”, selon que le tentateur a été Woj-
au phénomène du traditionalisme avec tyla ou Ratzinger, engagés maintenant
des allusions à l’Espagne (pp. 224-225), dans les funérailles bergogliennes,
aux U.S.A. (père de Pauw, le C.T.M., pp. même pas de première classe, de “Tra-
192 ss), au Brésil, au Mexique, etc., mais ditionis custodes” (p. 434) qui ne semble
certainement de manière très insuffi- pas telles à l’auteur, qui ne rappelle
sante ; il aurait été préférable d’intitu- pas comment ce document impose la
ler le livre “histoire des traditionalistes “messe montinienne” comme unique
français”. Mais on pardonne facilement rite romain (revenant ainsi à Paul VI,
ce petit défaut à un auteur français, d’ailleurs). Parmi les premiers “ral-
conscient par ailleurs de l’importance liés”, le monastère de Flavigny de dom
incontestable de la France dans la réac- Augustin. Il ne dit pas que ce fut une
tion “traditionaliste”. trahison ! (pp. 350-351). Comme si un
Si nous parlons ensuite de la ques- monastère qui se présentait comme in-
tion judéo-maçonnique (pour employer transigeant et “antilibéral” et dénon-
les termes du bon vieux Mgr Jouin) on çait le “ralliement” de l’Office, n’ait
constate le peu de place donné à la pas trompé les meilleures familles fran-
question (pp. 299-301) ; pratiquement çaises en portant leurs fils à la nouvelle
rien sur la partie “judéo” (l’opuscule messe et à la liberté religieuse… (ma-
de Poncins est relégué à une petite nœuvre analogue fut accomplie avec
note à la p. 600), un peu plus sur la par- les “traditionalistes” italiens des frères
tie “maçonnique” : pas un mot sur Pe- Cantoni - Giovanni et don Piero, le pre-
corelli, Ortolani, Calvi, Sindona, etc. et, mier, directeur d’Alleanza Cattolica, le
malheureusement, un seul mot, dés- second professeur à Écône), mais l’au-
agréable, pour Sì sì no no de don Putti, teur français ne parle pas d’eux. Ce se-
désigné comme “modeste bulletin ita- rait plutôt l’occasion de mettre en re-
lien” (p. 300). Quiconque connaît le lief les responsabilités écrasantes de la
rôle important de don Putti tant dans Fraternité dans toutes les trahisons qui
les milieux du Vatican qu’auprès de se sont succédé dans l’histoire du “tra-
Mgr Lefebvre (parmi tant de mauvais ditionalisme”. La visite Gagnon-Perl
conseils, il en eut un de bon) ne peut ouvrit les portes à la trahison de dom
que s’étonner de cette omission. Nous Gérard (pp. 354-355). Mais qui les a ap-
savons combien, en cette matière, il est pelés ? Idem pour Campos, à la suite
difficile et nécessaire de séparer le vrai des pourparlers avec Castrillon Hoyos
du faux, mais le thème méritait plus de (p. 393) : qui les a engagés ? Si la Fra-
place, alors que le scepticisme de l’au- ternité a souvent joué le rôle de tenta-
teur filtre par ses lignes. teur pour ses propres compagnons de
La part du lion revient-elle à… Mgr voyage, comme les communautés sus-
Lefebvre ? Impossible de ne pas don- mentionnées, dans certains cas des reli-
ner à sa personne la plus grande place, gieux pseudo-traditionalistes ont joué
mais au fond, dans l’ouvrage de Chiron, un mauvais rôle parmi nous (voir par
Mgr Lefebvre ne donne pas une si exemple le cas de dom Roy, pp. 209-210
bonne image : sont rapportés sans com- et celui de dom Lafond pp. 212 s). Par
mentaire les jugements inqualifiables ailleurs, chez les “traditionalistes”
sur la santé mentale de Mgr Lefebvre d’Una Voce se trouvent aussi de “cu-
(pp. 288-289 : la psychologie de Mgr Le- rieux” personnages, comme Stanislas
febvre) et de Mgr de Castro Mayer (p. Fumet et Alec Mellor (p. 191).
606 note 42) donnés par les habituels L’auteur n’évite pas non plus les su-
“libéraux” (l’arroseur arrosé : dans la jets tristes et scabreux que, peut-être,
Fraternité la même chose a été faite il ferait mieux d’omettre, dans la me-
avec Mgr Ngo-Dinh-Thuc). Le rôle de sure où ils n’ont rien à voir avec la doc-
75

trine et la bataille “traditionaliste”. NOUS AVONS REÇU


Mais si l’on décide de parler (pp. 429-
432) des abus sexuels, ou même seule- Une clarification qui s’impose
ment des tristes abandons de sacerdoce
ou des chutes de tel ou tel prêtre dans
les fiches biographiques, au moins que
l’on dise toute la vérité, et pas seule-
L es éditions Saint Agobard, fidèles à
l’exemple de ce saint Patron, ne né-
gligent pas de traiter la question juive,
ment une partie, c’est pourquoi cer- qui ne peut être ignorée par un catho-
tains sont mis au pilori, d’autres à lique : nous en avons signalé deux titres
l’abri. D’autres sujets embarrassants - dans le dernier numéro de Sodalitium.
comme l’attentat contre Jean-Paul II Nous recevons maintenant un autre
par un prêtre ordonné par Mgr Lefeb- ouvrage de l’abbé Olivier Rioult. Il nous
vre qui résidait encore dans une mai- semble qu’en transcrire le long sous-ti-
son de la Fraternité - ont été au tre est déjà suffisant pour éclairer le
contraire complètement passés sous si- lecteur sur le thème traité. “La Clef des
lence. Un choix compréhensible, mais Écritures” est en effet “un traité contre
qui alors doit être uniforme : ou l’on ne les juifs et les gentils qui rejettent, pour
parle pas du tout de ces choses, ou l’on des motifs opposés mais en raison d’une
dit tout. même lecture charnelle, l’admirable har-
Je me rends compte qu’un volume monie de l’Ancien et du Nouveau Testa-
de 637 pages ne peut pas ne pas conte- ment, de la lettre et de l’esprit, l’Ancien
nir des points faibles, des erreurs ou étant la prophétie du Nouveau et le Nou-
des omissions, ou même seulement des veau la réalisation de l’Ancien, et ce, par
points discutables : cette courte et hâ- une méconnaissance du Christ, l’unique
tive recension en contient aussi certai- clef des Saintes Écritures, qui seule donne
nement. L’ouvrage se termine par un la parfaite intelligence de l’histoire du sa-
petit chapitre intitulé : “quel avenir lut de l’humanité”. La quatrième de cou-
pour les catholiques de tradition ?” où verture dit qui sont ces (plus ou moins)
sont absents l’esprit de foi et la rigueur Gentils qui rejettent les Saintes Écri-
doctrinale. Pour conclure : les nou- tures : “dans l’antiquité ils s’appelaient
velles générations, même les “traditio- Marcion, Celse, Manès, Fauste… De nos
nalistes”, ignorent presque tout de leur jours, ils se nomment Soral, Timmerman,
(propre) passé, je l’ai constaté person- Guyénot, Hindi, Soler, Römer, Finkel-
nellement mille et mille fois. Le vo- stein…”. Il était nécessaire de dire la
lume d’Yves Chiron - un grand travail, vérité aussi à propos des faux amis, qui
au prix certainement de beaucoup ne peuvent être des compagnons de
d’énergie, avec le risque d’en mécon- combat s’ils rejettent le Christ et/ou
tenter plusieurs - remédie en partie à l’Ancien Testament : les exemples ne
ce défaut. Quiconque veut connaître manquent pas non plus en Italie.
l’“histoire des traditionalistes” a main-
tenant un volume pour le faire, avec le • Abbé Olivier Rioult
risque toutefois d’ignorer ce qui n’y est La Clef des Écritures
pas dit, et de prendre pour argent Saint Agobard, 2022
comptant tout ce qui y est dit.
Abbé Francesco Ricossa
Saint Joseph
• Yves Chiron Benoît Cottolengo
Histoire des Traditionalistes
Tallandier, Paris 2022 € 26,90
J e signale aux lecteurs le livre de
l’abbé Lino Piano : “San Giuseppe Be-
nedetto Cottolengo. Fondatore della Piccola
Casa della Divina Provvidenza sotto gli aus-
pici di San Vincenzo de’ Paoli (1786-1842)”.
Il ne s’agit pas d’une simple biographie
76

recevoir Jésus dans le Saint-Sacrement”.


Évidemment le saint n’avait pas oublié
les dispositions contenues dans la bulle
“Supra gregem dominicum” de 1566, par
Portrait de saint lesquelles saint Pie V ordonnait aux mé-
Joseph Benoît decins d’interrompre l’assistance aux pa-
Cottolengo exé- tients qui trois jours après leur hospitali-
cuté par son frère, sation auraient refusé de s’approcher de
le peintre Agos-
la confession.
tino Cottolengo
J’ai tout de suite parlé de l’esprit de la
Contre-Réforme, décrit à la moitié du li-
vre, car il démontre comment Cottolengo
voulut assurer à l’Église et à la société
du saint, mais plutôt d’une étude détail- une œuvre sérieuse, par conséquent ca-
lée et dense (848 pages) sur la figure et tholique, dans le sillon de la plus rigou-
sur l’œuvre de Cottolengo, capable de reuse orthodoxie, exempte de l’irréligio-
faire comprendre les aspects les plus dé- sité révolutionnaire et du sentimenta-
terminants de sa vocation. L’auteur est lisme moderne.
un historien qui n’appartient pas à nos Dans les premiers chapitres, à la lu-
milieux : en qualité d’ancien supérieur de mière des documents conservés dans les
la “Piccola Casa della Divina Provvi- archives de Cottolengo, l’abbé Piano
denza”, il a pu (et su) étudier à fond le parle de la naissance de Giuseppe Agos-
sujet et présenter de manière globale tino Benedetto Cottolengo, à Bra le 13
l’énorme masse de documents conservés mai 1786, et de la première partie de sa
dans les archives de Cottolengo. Je re- vie (en bon généalogiste il n’omet pas de
mercie l’abbé Piano de m’avoir fait ca- rechercher les origines de la famille, les
deau de son livre (publié en 1996), quand Couttolenc, présents depuis le XIVe siècle
il y a deux ans nos recherches généalo- à Barcelonnette, ville dépendant de la dy-
giques familiales respectives se sont en- nastie des Savoie jusqu’en 1713 ; en 1733,
trecroisées entre trisaïeuls et quadri- le grand-père Antonio déménagea à Bra,
saïeules, nous découvrant cousins. dans l’actuelle province de Cuneo).
Le livre peut être apprécié en particu- En 1802, Giuseppe Benedetto (le
lier par quiconque aime les ouvrages his- deuxième prénom Agostino s’était perdu
toriques et sait en recueillir l’importance en route, peut-être pour ne pas le confon-
de la rigoureuse recherche d’archives. dre avec Agostino, un de ses plus jeunes
Cela dit, le sujet traité est la vie d’un frères et futur peintre) devient clerc à
saint et de son œuvre, fruit de la sainteté Bra et ensuite séminariste à Asti (au sémi-
- qui dans le cas de l’œuvre de Cottolengo naire on conserve encore la petite cham-
a atteint des dimensions impression- bre utilisée par Cottolengo), au cours des
nantes - c’est pourquoi tout bon catho- années dans lesquelles le Piémont est an-
lique peut tirer du fruit de la lecture du nexé à la France napoléonienne et les
livre. jeunes sont appelés au service militaire.
Un des aspects les plus importants de Cottolengo réussit à éviter l’appel aux
la fondation de la “Piccola Casa” (qui ne armes et poursuit ses études jusqu’à l’or-
fut petite que de nom) survenue en 1828 - dination sacerdotale reçue en l’église du
une époque troublée par les idées révolu- séminaire de Turin le 8 juin 1811.
tionnaires, freinées, mais non vaincues Avec le chapitre IV on arrive au cano-
par la dite “restauration” - réside dans le nicat, reçu après le diplôme en théologie
fait qu’il se référait à la plus authentique obtenu à l’Université Royale de Turin.
spiritualité et mentalité de la Contre-Ré- En 1818 Cottolengo est donc agrégé aux
forme. L’auteur, en effet, en décrivant “Preti teologi del Corpus Domini” (p.
l’assistance spirituelle et sacramentelle à 119), une prestigieuse congrégation com-
la “Piccola Casa” (p. 404), note que Cot- posée de six prêtres séculiers, voulue par
tolengo “avait pour devise que les malades la Ville de Turin pour la célébration dans
hospitalisés à la Piccola Casa après le troi- l’église érigée en souvenir du miracle eu-
sième jour de leur admission à la Piccola charistique de 1453. La mosette rouge
Casa se confesseraient et se disposeraient à que le chanoine Cottolengo commença
77

d’endosser caractérisera une bonne par- rôles de l’Église et de l’État, apparaissent


tie de la future iconographie du saint. les “Congrégations de charité” de l’État.
Le canonicat, que l’on n’associe pas Dans plusieurs pays les œuvres ecclésias-
souvent à la sainteté, sera pour Cotto- tiques étaient considérées comme complé-
lengo la voie privilégiée de la grâce. Le mentaires à celles de l’État dans un climat
chanoine de Bra accomplit dans l’église général où les principes de l’utopie (et de
du Corpus Domini avec fidélité et joie in- la prétention) révolutionnaire condition-
térieure tout ce qui est lié au culte divin nent les choix des gouvernements.
et à la charité envers le prochain : la célé- Cottolengo sous le règne de Charles-
bration de la Messe, l’office au chœur, les Albert travailla pour l’indépendance et le
rapports avec les autres chanoines, le développement de son œuvre. En plu-
zèle apostolique pour tous ceux qui fré- sieurs occasions le fondateur de la “Pic-
quentent les offices à l’église. L’âme est cola Casa” fit aussi appel à la générosité
prête pour ce que l’auteur définit la du souverain, qui ne le déçut jamais et
“crise intérieure” de 1827 (p. 147) quand, lui manifestera toujours de l’admiration.
après 16 années de sacerdoce, l’action de Dans le gouvernement, saint Cottolengo
la grâce dans l’âme de Cottolengo déter- pouvait compter sur l’amitié du comte
mine un désir de perfection toujours plus Clemente Solaro della Margarita, minis-
grand, à la veille de la manifestation de tre des affaires étrangères, et de son
la volonté divine pour la réalisation des épouse, tandis qu’à la municipalité de Tu-
œuvres futures. Je considère que Cotto- rin il bénéficiait de la bienveillance du
lengo n’est pas devenu saint pour avoir marquis Michele Benso di Cavour (père
fondé la “Piccola Casa” (et les œuvres de Camillo), chef de la police municipale.
qui l’ont précédée), mais qu’il a fondé ces Sur les principes et sur les méthodes
œuvres précisément parce qu’il était pé- enseignées et pratiquées à la “Piccola
nétré d’une sainteté hors du commun. À Casa” de Cottolengo, une longue citation
partir de là apparaît dans la vie du saint du diplomate suisse Pictet de Rochemont,
la figure qui sera le point de référence rapportée par l’auteur à la page 368 est
constante dans toutes les œuvres de cha- particulièrement significative : “Sans
rité qui accompagneront les quinze der- doute un pareil établissement ne peut se jus-
nières années de la vie de Cottolengo : tifier en économie politique… un gouverne-
saint Vincent de Paul. ment ne peut l’encourager ouvertement et
Le lecteur trouvera en effet à partir du l’on n’oserait pas en conseiller l’imitation
chapitre V de continuelles références à ailleurs. Quant à nous, nous n’admettons
“Monsieur Vincent”, dès la première œu- pas la possibilité de succès sans des commis-
vre, le “Deposito de’ poveri infermi del sions, des comités, des règlements stricts, des
Corpus Domini sotto la protezione di s. souscriptions régulières, un fond capital, une
Vincenzo de’ Paoli” (les chambrettes de réserve et une comptabilité en partie double,
la célèbre Volta Rossa) fondé le 2 septem- etc., et nous avons raison, sans doute, de pro-
bre 1827 (p. 177), embryon de la “Piccola céder ainsi. Mais il faut avouer néanmoins
Casa della Divina Provvidenza sotto gli qu’il y a quelque chose de bien touchant et
auspici di s. Vincenzo de’ Paoli” qui sera de bien profondément religieux dans cette
fondée le 27 avril 1833 (p. 229). Une anec- foi sans bornes, qui calcule peu les moyens
dote : le roi Charles-Albert par Décret humains, qui compte avant tout sur le se-
Royal en août de la même année recon- cours d’en-haut, qui va droit au but de la
naît l’existence légale de l’œuvre, mais charité, le soulagement de ses semblables,
dans le document officiel n’apparaît pas sans trop calculer d’avance les moyens et
le mot “Divina”. Cottolengo n’accepte pas qui en définitive atteint ce but à travers des
la reconnaissance et renvoie le document, difficultés qui paraissent au premier coup
en demandant et en obtenant la correc- d’œil devoir être insurmontables. N’est-ce
tion (p. 257). pas là véritablement le type de cette foi qui
C’est l’époque à laquelle la voracité ré- soulève les montagnes ? La plupart de nos
volutionnaire avait fait main basse sur les établissements de charité légale n’offrent-ils
patrimoines des innombrables œuvres pas quelque chose d’un peu froid, d’un peu
pies qui dans les siècles précédents compassé, voire même d’un peu sec ?”
s’étaient occupées des pauvres et des ma- (CHARLES PICTET DE ROCHEMONT, “Sur les
lades et, qu’avec le renversement des établissement de charité de Turin”, 1840).
78

En somme, l’œuvre hospitalière fonc- particulièrement développé (“L’attività


tionnait et l’État ne pouvait s’en désinté- caritativa durante la vita del Fondatore”),
resser, puisqu’elle offrait un lit aux ma- qui permet au lecteur une sorte de
lades et une hospitalisation à tant d’au- “voyage dans le temps” pour connaître la
tres malheureux, contribuant à soulager première phase de l’œuvre de Cotto-
les structures étatiques. Au contraire, les lengo, en voir la croissance et en suivre le
autorités étaient préoccupées par le dé- développement immobilier dans le quar-
veloppement croissant de l’œuvre, qui tier et dans d’autres localités, comme à
concentrait dans les bâtiments de la “Pic- Cavoretto et à Gassino.
cola Casa” un nombre toujours plus élevé De notable importance furent ensuite
de personnes, potentiellement incontrôla- les différentes familles de religieuses,
ble en cas d’épidémie. frères et prêtres nées à l’intérieur de la
Saint Cottolengo avait un objectif “Piccola Casa”, voulues avec ténacité par
principal : secourir cette partie de la po- saint Cottolengo, même si toutes ne survé-
pulation caractérisée par la pauvreté et curent pas à sa mort. Évidemment la
par la maladie à la lumière de l’Évangile place d’honneur revient à celles qui sont
et non de la caste révolutionnaire. Et communément appelées les “Sœurs de
toutes ses œuvres tournent autour des Cottolengo”, inspirées des Filles de la
pauvres infirmes pour leur double santé, Charité de saint Vincent (ch. IX), qui eu-
celle du corps et celle de l’âme. Le pre- rent en Madame Marianna Nasi (1791-
mier successeur de Cottolengo, le père 1832) leur “mère” dès les premiers pas du
Anglesio, concernant les attentions du “Deposito de’ poveri infermi del Corpus
saint à l’égard des assistés, écrivait : “Si Domini”. Importante aussi fut l’institu-
avec autant de travail il en facilitait les tion des Tommasini (p. 529), candidats au
bienfaits corporels, son but principal était sacerdoce formés dans un séminaire au
de les amener par la suite à reconnaître et à sein de la “Piccola Casa” pour subvenir
bénir la Divine Providence, les guérir dans aux besoins sacramentaux des toujours
leurs âmes, les rapprocher de Dieu et faire plus nombreux “pauvres infirmes”. Cotto-
que, riches de mérites, s’ouvrent pour eux lengo fonda aussi la famille des Sœurs
les portes du ciel” (p. 373). sourdes et muettes du Sacré Cœur de Ma-
La “Piccola Casa” devint progressive- rie : je me souviens que quand j’étais sé-
ment une ville dans la ville, voisine de minariste (il y a 40 ans !), je m’adressais
l’autre poumon de vertus que fut l’œuvre aux religieuses de la congrégation, tou-
salésienne de Don Bosco au Valdocco. jours disponibles, pour obtenir les re-
Une citadelle de la santé du corps et de liques des saints du calendrier liturgique
l’âme, composée de services hospitaliers, turinois. Avec certaines de ces “familles”,
infirmeries, pharmacies et une série im- Cottolengo entendait offrir un cadre à
pressionnante de familles religieuses. une partie des âmes malheureuses qui
Pour ce faire, il obtint de la Providence étaient hospitalisées et faire d’elles une
d’innombrables aides en tout genre, prin- aide efficace pour s’occuper des autres
cipalement par l’autorité hiérarchique de malheureux hôtes de la “Piccola Casa”.
l’Église. En effet, Mgr Luigi Fransoni, ar- En conclusion de l’ouvrage (ch. XVI, à
chevêque de Turin, qui sera d’abord incar- partir de la page 663), l’auteur expose le
céré au fort de Fenestrelle et ensuite exilé matériel d’archives susceptible d’esquis-
à Lyon par le gouvernement anticlérical, ser la sainteté de Cottolengo dans les dif-
accorda l’exemption de la juridiction pa- férents aspects de sa vie sacerdotale. Le
roissiale pour la petite église construite à paragraphe sur la sainte Messe (p. 723),
la “Piccola Casa” dédiée aux saints An- sur la manière de la préparer, de la célé-
toine abbé et Vincent de Paul (p. 378). brer et sur la pratique introduite à la
Cela permit au chanoine Cottolengo, “Piccola Casa” d’“en entendre une seconde
nommé recteur, d’accomplir avec moins comme Messe d’action de grâce pour la pre-
de restrictions le ministère sacramentel, mière déjà célébrée”, est d’une particulière
assisté au cours des premières années par édification. Du reste le secret de la sain-
quelques prêtres amis, parmi lesquels son teté des “saints prêtres turinois” (comme
frère Luigi, chanoine et ses confrères du le bienheureux Sebastiano Valfrè, Ca-
Corpus Domini. fasso, Don Bosco) tourne autour du Saint
J’attire l’attention sur le chapitre VII, Sacrifice de la Messe et de la fidèle cor-
79

respondance à la grâce selon les desseins


que Dieu a eus sur chacun d’eux. Cotto- Vie de l’Institut
lengo n’échappe pas à cette règle : le
jeune prêtre, puis chanoine, deviendra
un géant de la charité pour les pauvres et
les malades en puisant chaque jour dans Du 1er novembre 2021 au 15 novembre
le Missel “de saint Pie V”, source inépui- 2022
sable de vérité et de charité pour les
âmes et pour toute la société (nous avons
sous les yeux le terrible malheur qui a
C hers amis, bienfaiteurs et lecteurs,
plusieurs d’entre vous nous ont dit
que la première rubrique de Sodalitium
frappé les premières et la seconde à par-
qu’ils lisent (bien qu’étant la dernière
tir de 1969).
Bien sûr l’âme de Cottolengo fut ali- de la revue) est précisément la “Vie de
mentée par une profonde dévotion ma- l’Institut” : et à raison, parce que ces
riale (p. 728) : d’abord à Notre-Dame des lignes vous permettent de toucher du
Fleurs de Bra, puis à Notre-Dame des doigt tout le bien que la grâce divine
Grâces dans l’église du Corpus Domini, opère dans les âmes, jour après jour,
jusqu’à Notre-Dame d’Oropa, qu’il voulut au moyen de notre et votre Institut.
honorer d’une manière particulière à l’in- La Maison de Verrua et l’Institut.
térieur de la “Piccola Casa”. Au cours de La maison mère se prépare à d’impor-
sa vie et de la vie de la “Piccola Casa”, tants travaux, afin de pouvoir accueillir
s’est répété pour un nombre impression- un plus grand nombre d’hôtes (sémi-
nant d’âmes, le miracle opéré aux noces naire, Exercices, camps, hôtellerie).
de Cana par l’intercession de Marie : Comme toujours en septembre, sont ar-
“Faites ce qu’il vous dira” (Jn 2, 5). rivés les nouveaux séminaristes : un
L’ouvrage de l’abbé Lino Piano permet lombard, un irlandais (d’origine polo-
de goûter ce “bon vin”, que la sainteté de naise), un hongrois, un franco-belge.
saint Joseph Benoît Cottolengo, bon sama- Par ailleurs, l’Institut compte un nou-
ritain enflammé de la charité divine au veau membre : Agnès Langlet, mainte-
siècle de la stérile philanthropie, a su uti- nant religieuse novice, entrée dans
liser jusqu’à sa mort survenue chez son l’Institut le 8 avril 2022 en la fête de
frère, le chanoine Luigi Cottolengo, à
Notre-Dame des Sept Douleurs du
Chieri, aux portes de Turin, le 30 avril
temps de la Passion.
1842 (p. 765). Les papes Benoît XV (avec
la béatification en 1917) et Pie XI (canoni- La maison de Raveau aussi, dans la
sation en 1934) reconnaîtront l’héroïcité Nièvre en France, fait l’objet de tra-
de ses vertus. vaux importants : après avoir réorga-
Abbé Ugo Carandino nisé la chapelle, c’est le tour des “dé-

• LINO PIANO
San Giuseppe Benedetto Cottolengo. Fon-
datore della Pic-
cola Casa della
Divina Provvi-
denza sotto gli
auspici di San
Vincenzo de’
Paoli (1786- Ordination au
1842). sous-diaconat
de l’abbé
Piccola Casa Piergiorgio
della Divina Coradello le
15/11/2022
Provvidenza,
Torino 1996.
80

Ordination aux ordres mineurs et tonsures le 20 mai 2022 à Verrua Savoia

pendances” où sont en train d’être reprend scandée par la cloche, qui ap-
aménagées d’autres chambres qui per- pelle à servir le Seigneur soit à l’église
mettront d’augmenter la capacité d’ac- pour les exercices de piété, soit pour
cueil de la maison pour les différentes l’apostolat extérieur, soit pour les
activités de l’été. cours, pour l’étude personnelle, ou les
Ordres Sacrés. Le 20 mai 2022, à services quotidiens. Tous les jours les
Verrua Savoia, Mgr Stuyver a conféré Sœurs prient pour leurs bienfaiteurs et
la première tonsure à frère Benoît De- leurs familles ; que le Seigneur accorde
zitter, de la communauté Stella Maris, à tous l’abondance de Sa sainte grâce
l’ostiariat et le lectorat à Louis-Marie et l’amour de Sa volonté.
Chuilon, l’exorcistat et l’acolytat à Vin-
cent Gastin. Le lendemain, le sémina- • Apostolat dans les différents pays
riste Roberto Agnelli a revêtu la sou- Italie. Casa San Pio X. L’abbé Ca-
tane. Le 16 novembre 2022, l’abbé Pier- randino signale quelques célébrations
giorgio Coradello a reçu des mains de qui ne rentrent pas dans le calendrier
Mgr Stuyver l’ordre sacré du sous-dia- habituel des Messes : le 12/06/2022 à
conat, s’approchant ainsi de l’autel et l’église-ossuaire de Paderno (FC), à
de l’ordination sacerdotale, prévue - si l’invitation de l’Ass. Naz. Famiglie Ca-
Dieu veut - en 2023. duti e Dispersi della RSI ; le 22/11/2021
Vœux religieux de nos Frères. Tou- et le 21/03/2022 dans une chapelle pri-
jours le 21 mai 2022, frère Felice Anto- vée à Calitri (AV) ; le 01/10/2022 dans
nio a prononcé ses vœux perpétuels, l’église d’une ancienne abbaye sur
devenant le premier religieux profès l’Apennin des Marches. Il signale en
de l’Institut. outre qu’à la chapelle de Rome à la fin
Sœurs de l’Institut. Grande fête de 2021 les instructions religieuses
pour les Sœurs de l’Institut le 26 avril mensuelles sur l’année liturgique ont
2022, avec la Profession Perpétuelle de repris, tandis que depuis octobre 2022
sœur Cécile-Marie, qui s’est consacrée a débuté un cycle de rencontres sur
à Dieu in æternum, devenant ainsi la l’Évangile à partir des commentaires
troisième religieuse professe de l’Insti- du bibliste Salvatore Garofalo.
tut, les premiers vœux de sœur Marie En Toscane, Émilie et Ombrie. En
du Sacré-Cœur et la prise d’habit de Toscane, la célébration de la sainte
sœur Françoise du Sacré-Cœur et de Messe continue de manière régulière
sœur Consolata de la Sainte Famille. deux dimanches par mois ; signalons
Après les activités estivales (camps plutôt les visites plus occasionnelles en
pour les fillettes, aide matérielle pen- Ombrie. L’abbé Fraschetti a célébré la
dant les quatre sessions des Exercices sainte Messe plusieurs dimanches à
spirituels de l’été…), la vie régulière San Terenziano, dans la commune de
81

Gualdo Cattaneo (PG), à Gualdo Ta- croissante de l’apostolat. Un second


dino (PG) ; également à Pecorone, dans prêtre est présent à Paris un dimanche
la commune de Castel Giorgio (TR) à la par mois pour les confessions. C’est
Tenuta Valverde, la Messe a eu lieu le pour cela aussi que la souscription pour
25 et le 26 juillet (abbé Ricossa) et le une chapelle en Île-de-France continue
dimanche 4 septembre. À Modène et plus que jamais. Le principal obstacle à
Ferrare continuent les trois Messes do- ce projet que nous poursuivons depuis
minicales ; depuis septembre l’aposto- 2007 est le coût extrêmement élevé de
lat est devenu un peu plus compliqué, l’immobilier dans cette région (la pre-
du fait des problèmes de santé de mière étape a été l’Oratoire dans le 15e
l’abbé Ricossa, qui a cependant été ef- arrondissement qui est fondamental
ficacement aidé et remplacé par des pour l’apostolat, et que nous avons ac-
confrères : l’utilité d’un Institut sacer- quis en 2011, mais qui est bien trop pe-
dotal se constate justement aussi en de tit pour les dimanches). Nous souhai-
tels moments. À Bologne a repris la tons réfléchir en 2023 à l’acquisition
pratique de la Via Crucis à l’Osservanza d’un local suffisamment grand pour ac-
(2 avril 2022). En Lombardie et Pié- cueillir notre chapelle à la place de la
mont, l’abbé Pizzocchi aide régulière- salle que nous louons chaque dimanche
ment l’Institut, en célébrant fréquem- matin. Vous pouvez participer à cet ef-
ment la Messe dominicale dans les cha- fort pour établir un lieu stable pour of-
pelles de Milan et de Turin, ainsi qu’à frir l’Oblatio munda en Île-de-France,
Gravellona Lomellina. De Rimini et de lieu stratégique pour la foi en France.
Verrua nos prêtres se rendent aussi en Ajoutez votre pierre à l’édifice !
Italie du Sud : Pouilles, Basilicate et Si- La chapelle du Mans accueille la
cile ; dans cette dernière région, l’abbé Messe presque chaque dimanche. Un
Fraschetti a séjourné plus longtemps. nouvel autel est venu l’embellir avec
France. Partout les nombreuses d’autres améliorations pour la piété et la
conversions ne cessent pas, signe du joie des fidèles. Le pèlerinage à Notre-
travail de la grâce, a fortiori dans notre Dame de Pontmain le 3 septembre a été
chapelle de Paris étant donné le grand le point d’orgue de cette année 2022
nombre d’âmes en Île-de-France. Les pour les fidèles du Mans. Nous confions
prêtres s’évertuent à suivre toutes ces cet apostolat à sainte Scholastique et à
nouvelles âmes pour les éduquer et saint Julien, les patrons de la ville et du
leur dispenser les sacrements (les diocèse. Dans le reste de la France, la
confessions générales sont nom- présence de trois prêtres assez stables (à
breuses) en s’adaptant à la charge Raveau, Nîmes et Serre-Nerpol) facilite
grandement l’apostolat. À Cannes, nous
avons finalement pu acquérir le local qui
permettra une plus digne célébration de
la Messe, pour continuer l’apostolat de
l’abbé Gustave Delmasure.
• Renforcement de l’apostolat en
Hongrie. Au printemps 2022, l’Institut

Prise d’habit de
deux religieuses
de l’Institut le
26 avril 2022,
fête de Notre-
Dame du Bon
Conseil
82

a acheté une propriété non loin de la chrétiens d’une époque révolue. Un au-
capitale hongroise, à Felcsút, qui ser- tre rendez-vous fixe du camp a été la
vira de maison pour les retraites spiri- “grande randonnée”, parcours avec une
tuelles et les camps pour les garçons, chasse au trésor par équipe d’environ 8
en plus du logement pour le prêtre ou km dans la proche forêt des Bertranges
mieux - nous l’espérons - pour les prê- qui dure toute la journée (et avec le
tres. En même temps, les fidèles ont pique-nique à base de saucisses gril-
cédé à l’Institut la propriété de la cha- lées). Le camp, comme toujours, s’est
pelle de Budakeszi, aménagée en 2017. terminé par la veillée finale animée par
Ainsi, l’apostolat en Hongrie et dans des chants et du théâtre.
les pays limitrophes pourra se consoli- Les séminaristes et les frères de
der et se développer. Les visites pasto- l’Institut ont continué avec une plus
rales continuent en Croatie où sont pré- grande fréquence à organiser les ren-
sents une vingtaine de personnes ; en contres pour enfants et garçons à Ver-
Roumanie où il y a aussi un développe- rua Savoia (au cours de l’année scolaire
ment prometteur ; et de manière plus 2021-2022 il y en a eu six, d’octobre à
occasionnelle, en Bulgarie, Norvège et juin !). Le nombre des jeunes partici-
Suède. pants est en continuelle augmentation,
et ainsi les fruits spirituels pour ces
• Activités estivales (et pas seulement) : jeunes âmes sont également accrus.
camps et Croisade Eucharistique Durant les vacances d’été, des prome-
Du 11 au 25 juillet s’est déroulé à Ra- nades en montagne avec des groupes
veau pour la 32e fois, le camp de la Croi- de garçons de plusieurs régions d’Italie
sade Eucharistique, organisé par l’Insti- ont été effectuées. En plus de ces acti-
tut M.B.C. Une cinquantaine de garçons vités, le catéchisme continue, soit en
étaient présents (dont 14 Italiens), qui présentiel à Turin et à Verrua, soit on-
ont passé les quinze jours du camp sous line pour tout le reste de l’Italie, de la
l’œil vigilant des prêtres, séminaristes, France, de la Belgique, de la Suisse et
frères et moniteurs pour jouer, prier, et de la Hongrie fait par les séminaristes,
apprendre la doctrine chrétienne avec frères, prêtres et religieuses.
les cours de catéchisme dans l’agréable Camps des Sœurs IMBC : au cours
parc du château. Chaque jour commen- de l’année ont été organisés plusieurs
çait avec l’assistance à la sainte Messe camps à Verrua pour petites filles et
pour continuer avec les autres activités adolescentes dans le but non seulement
et finir le soir avec le récit d’une belle de se divertir ensemble, mais surtout
histoire à épisodes qui se dénoue durant de renforcer la foi et l’amour de Dieu
tout le camp. Nous avons visité le châ- dans les cœurs de la jeunesse afin de la
teau médiéval d’Ainay-le-Vieil avec ses faire persévérer dans la vie chrétienne,
hautes murailles et le fossé rempli d’eau malgré les difficultés qui se rencon-
qui nous a rappelé les gestes des croisés trent dans la société déchristianisée

Colonie d’été à Raveau : les enfants déjeunant en forêt au cours d’une promenade.
Visite du château d’Ainay-le-Vieil
Activités de la Croisade Eucharistique

Les fillettes de la Croisade à Verrua Savoia – à


la fin de la pièce de théâtre (photo ci-dessous)
Enfants peignant leurs boucliers à l’occasion
des rencontres de la Croisade à Verrua Savoia

Camp des gar-


çons plus grands
dans le Val de
Suse : excursion
au Rochemelon,
Les petites filles jetant des fleurs devant le sanctuaire le
Saint-Sacrement pendant la procession plus haut
de la Fête-Dieu d’Europe
(3 538 m)
84

au camp bienheureuse Imelda, une cin-


quantaine de participantes italiennes
et françaises qui, malgré la chaleur tor-
ride, ont fait trésor des enseignements
reçus, entre un divertissement et un
autre : un tobogan gonflable unique-
ment pour elles, la fabrication de figu-
rines en plâtre, la journée à 2 000 mè-
tres au frais dans la Vallée d’Aoste…
Le camp s’est terminé avec la cérémo-
nie d’entrée des nouveaux Croisés et la
Récollection à Raveau le 1er novembre 2022
solennelle Consécration à Marie de cer-
taines des plus grandes.
dans laquelle nous vivons. Début octo- Cette année (du 1er au 10 août), le
bre 2021, première rencontre de l’an- camp saint Jean Bosco pour garçons de
née scolaire avec promenade à l’ab- 14 à 20 ans a planté ses tentes au Mont
baye Santa Fede, près de Verrua ; s’en Cenis, près de la frontière franco-ita-
est suivie une semaine pour les fillettes lienne, à 1 500 mètres d’altitude. Nous
suisses et françaises d’Annecy qui ont avions loué une partie d’une ancienne
beaucoup apprécié leur séjour en caserne militaire afin d’y installer no-
Italie ; début novembre, quelques tre chapelle de fortune et de bénéficier
Sœurs sont parties pour la maison de des principales commodités, mais les
Raveau et après l’habituelle journée de jeunes ont tous dormi sous la tente !
récollection pour les adultes, s’est dé- Pendant ces dix jours, notre groupe de
roulé un camp pour les fillettes fran- plus de vingt-cinq jeunes, sans compter
çaises des alentours et de Paris. En dé- les prêtres, les frères et les moniteurs,
cembre, à l’occasion de la fête de l’Im- a pu gravir un bon nombre des hauts
maculée Conception, un autre camp à sommets italiens des alentours. La ce-
Verrua a réuni une trentaine de filles, rise sur le gâteau a été la montée du
parmi lesquelles plusieurs animatrices Rochemelon (cf. photo), le sanctuaire
qui, avec générosité et oubli de soi, ont le plus haut d’Europe (3 538 m.), où
secondé les Sœurs dans l’organisation nous nous sommes promis de célébrer
matérielle du camp et dans la prépara- la sainte Messe - si Dieu veut - une pro-
tion du buffet en l’honneur de l’Imma- chaine fois. Le camp s’est déroulé dans
culée Conception pour plus de cent un bon esprit de fraternité et d’effort
personnes ! En janvier 2022, un court chrétien qui a permis d’élever non seu-
camp dédié à sainte Agnès, proposée lement les corps, mais aussi les âmes
comme modèle de pureté et de force ; avec l’aide de la Messe quotidienne cé-
au mois de février, autres journées pas- lébrée à l’aube, ou parfois après la ran-
sées ensemble, égayées par une jour- donnée, ainsi qu’avec la fréquentation
née en centre équestre. En mai, les des sacrements, les instructions du soir
Sœurs et les fillettes avec la bannière et de bons exemples chrétiens. Une
de la Croisade Eucharistique déployée belle veillée a clôturé ce camp qui lais-
au vent, sont parties pour Lorette, à sera des souvenirs inoubliables aux
l’occasion du pèlerinage à la Santa jeunes. Notre gratitude après Dieu va à
Casa. Et avec l’arrivée de l’été les tant tous ceux qui généreusement nous ont
attendus camps de l’été : en juin, le aidés, en particulier au cuisinier, M.
camp pour les plus petites avec une Lombardi pour sa patience à toute
trentaine de fillettes qui, après la visite épreuve et à M. Jean-Pierre Cassa, no-
à la basilique de Superga, munies de tre accompagnateur chevronné et di-
harnais et de mousquetons se sont es- plômé en montagne ! Rendez-vous l’été
sayées à des parcours acrobatiques du prochain pour de nouvelles aventures
haut d’un arbre à l’autre au Parco Av- pour les anciens, et bienvenue aux nou-
ventura… beaucoup d’enthousiasme, veaux désirant découvrir avec d’autres
mais aussi un peu de peur ! En juillet, amis catholiques la joie de l’escalade
85

des hauts sommets alpins ! Enfin, du 4 n’avait pas pu organiser de conférences


au 23 juillet, les Sœurs du Christ-Roi au cours des deux dernières années, est
(avec la collaboration de l’abbé Murro) encore présent pour combattre le com-
ont organisé un camp dans les Alpes, bat pour l’Église notre mère, comme fit
dans le Val de Suse, favorisé par le notre inspirateur, don Davide. Nous
beau temps. Les fillettes ont pu égayer voulons être vraiment des “catholiques
les habitants qui les ont accueillies, par intégraux” et par conséquent intégrale-
un petit concert de chants religieux et ment catholiques comme l’était le
folkloriques. grand pape saint Pie X.
• Centri Studi Federici et Alberta-
rio. La journée pour la Royauté sociale • L’Institut et la presse
du Christ à Vignola en octobre, le Nous signalons que le bulletin
congrès albertarien de Milan en no- “Scuola e lavoro” (N. 10-11 novembre di-
vembre et la conférence de Paris, déjà cembre 2021) de la www.federazionei-
programmés, ont été ajournés à cause talianascuola.it a repris le communiqué
des problèmes de santé de l’abbé Ri- de Sodalitium sur le motu proprio Tra-
cossa ; l’empêchement ne devrait être ditionis custodes.
que provisoire, c’est pourquoi tout est Les journaux locaux du Trentin et
renvoyé à 2023. En attendant, tous les plusieurs blogs nationaux ont parlé de
nouveaux arrivés peuvent (ré)écouter l’affaire de l’église refusée par la curie
avec profit les enregistrements vidéo de Trente à l’occasion des funérailles
des éditions passées et suivre la revue de Davide Fattor : il y a eu un commu-
de presse du CS Federici qui arrive ré- niqué de la curie Vescovile de Trente
gulièrement via mail aux personnes en (https://www.giornaletrentino.it/cro-
faisant la demande (on peut les consul- naca/non-e-sole/rev%C3%B2-vescovo-e-
ter sur le site du Centro Studi). parroco-dicono-no-al-funerale-con-
Vingt ans du Centro Studi Davide messa-in-latino-1.3283501) qui a été re-
Albertario fondé le 28 janvier 2002 à pris et commenté sur des sites traditio-
Milan. Cette année se célèbrent aussi nalistes (https://www. aldomariavalli.it
les cent-vingt ans de la mort de l’abbé /2022/08/08/vedova-chiede-per-il-marito-
Albertario (il mourut à Caronno, près il-funerale-in-rito-antico-ma-il-vescovo-
de Lecco, le 12 septembre 1902) à qui dice-no/amp/). Notre Institut a diffusé
est dédié le Centro Studi. La première un communiqué en réponse à celui de
conférence eut lieu le 11/04/2002, inti- l’évêque que l’on peut trouver à cette
tulée “Foibe. Scomparsi dalla storia” adresse : https://www.sodalitium.biz/co-
avec pour conférencier notre ami municato-dell-istituto-in-risposta-alla-
Marco Pirina, décédé en 2011 ; nous curia-arcivescovile-di-trento/ .
rappelons son souvenir avec affection Duc in altum : le site d’Aldo Maria
et nous ne l’oublions pas dans nos Valli. Le célèbre journaliste et vatica-
prières. En octobre 2002 parut aussi le niste Aldo Maria Valli, depuis quelques
premier numéro de “L’Albertario”, l’or- temps proche des positions de l’arche-
gane d’informations du Centro Studi. vêque Carlo Maria Viganò, a publié le 5
Aujourd’hui comme hier, le CSDA, qui janvier 2022 une intervention de l’abbé
en dépit de différentes vicissitudes Francesco Ricossa (A quali condizioni
Les enfants lors de la Fête-Dieu à Paris Pietro è veramente la roccia? Titre de la
rédaction) en réponse à un débat sou-
levé sur le même site par The Wanderer
(La confessione di Pietro e un ‘dubium’
teologico, 4 janvier 2022). Suite à la
réaction négative de certains lecteurs,
l’abbé Ricossa a publié sur le même site
sa réponse, suite à celle de Valli (du 7
janvier : Un lettore scrive. Duc in altum
risponde), le 8 janvier suivant (Il princi-
pio di autorità, la botte piena e la moglie
86

ubriaca. Una risposta di don Ricossa). Les soit politiques) de l’actuelle Corrispon-
deux interventions ont été reprises par denza Romana.
le Centro Studi Federici et par Agere Vidéo-interviews avec Elia Menta.
Contra (Il principio di autorità: davvero Le 27 décembre 2021 a été publiée sur
chi non è in comunione con Bergoglio è le canal “E si accordino nell’animo e
fuori dalla Chiesa?). Le site Traditio, le nell’opera”, la vidéo-interview de l’abbé
11 janvier, est ensuite intervenu par un Ricossa sur les thèmes suivants : L’In-
article d’Aurelio Porfiri (Il tradiziona- carnazione di Cristo, i Catari, le inizia-
lismo dopo il Vaticano II? Una risposta a tive dell’IMBC, reprise par le canal de
don Francesco Ricossa). Au mois de mars Sodalitium le 30 décembre suivant ;
a été ensuite publié le petit livre “Non nouvelle vidéo-interview, sur les sujets
ponti, ma scale” (le titre a été choisi par suivants : Santa Caterina da Siena, la li-
l’éditeur), contenant une interview d’A. bertà, l’educazione dei giovani, publiée
M. Valli à l’abbé Ricossa. Le livre a été au mois de février et reprise elle aussi
présenté en visio-conférence sur le ca- par notre canal YouTube. En avril : San
nal “Ritorno a Itaca” le 24 février 2022, Paolo, il Concordato del 1929 e i pellegri-
avec la participation des auteurs, de naggi dell’Istituto. La vidéo de juin : il
l’éditeur (Aurelio Porfiri) et de John Medio Evo e San Tommaso; la Compa-
Rao. La vidéo a été aussi reprise par no- gnia di Gesù; la rivista Sodalitium. Notre
tre canal de Sodalitium. Le 16 novem- canal Sodalitium (sur YouTube) a pu-
bre 2022, le site a publié “I due che blié une vidéo-interview de l’abbé Giu-
erano tre: don Ricossa scrive a Aldo Maria gni à l’abbé Ricossa (du 29 juin, pu-
Valli (Con don Alberto e don Stefano c’era bliée le 1er juillet) sur les “gay pride” et
anche don Marco, che ora collabora con les manifestations prévues contre les
l’Istituto Mater Boni Consilii)” ; la lettre “gay pride”. Comme en 2017 et 2019,
fait référence à la menace de fermeture l’abbé Ricossa a expliqué pourquoi
de deux célébrations selon le motu pro- l’Institut n’apporte pas son soutien à la
prio ratzingerien Summorum Pontificum “processione di riparazione” organisée
dans le diocèse de Novare, après le nou- par Radio Spada et par Cronache di
veau motu proprio bergoglien Traditio- Terra e di Cielo (une des étiquettes du
nis custodes ; pour information, don Ste- groupe de personnes qui dit se référer
fano, don Alberto et Mgr Brambilla, ont à Mgr Viganò). Notre vidéo-interview a
fini par se mettre d’accord. Le même été signalée également par le Circolo
site a ensuite repris des communiqués Christus Rex de Vérone.
du C.S. Federici. Duc in altum publie des • Centro librario Sodalitium. Le site
interventions de plusieurs personnali- de e-commerce a été entièrement ré-
tés du traditionalisme catholique avec nové avec un nouveau graphisme. Il a
des positions doctrinales très diverses ; publié un livre de Mgr Giuseppe Angri-
parmi les défenseurs de la Thèse de Cas- sani sur la neuvaine de Noël, intitulé
siciacum, signalons les articles publiés Regem venturum Dominum. Est en pré-
sous la signature d’Antonio Polazzo (un paration, pour l’année prochaine, la ré-
laïc de bonne doctrine). édition d’un beau livre d’un insigne
Corrispondenza Romana. Le site de exégète sur la théorie de l’évolution.
Roberto De Mattei a publié un intéres- En 2022, nous avons réimprimé deux
sant article d’Emanuele Barbieri (Chi è best-sellers de nos éditions : il Libro di
il dott. Massimo Citro Della Riva?) qui preghiere pour la troisième fois et le
intègre et cite celui publié sur le nu- catéchisme de Carlo Dragone pour la
méro 72 de Sodalitium (Marxisti, Esote- quatrième fois.
risti e Massoni contro il Nuovo Ordine • Exercices spirituels. La prédication
Mondiale?). L’article de Sodalitium des Exercices a repris plus ou moins ré-
avait été repris par le Circolo Cattolico gulièrement au cours de l’année 2022 :
Christus Rex, Agere contra le 10 janvier, nous en donnons la liste. Serre-Nerpol
et par le C.S. G. Federici. Inutile de ré- du 26 au 31 décembre (17 personnes). À
péter que nous ne partageons pas de Verrua Savoia 1 er-6 janvier (17 per-
nombreuses positions (soit religieuses, sonnes). Trois retraites à Serre-Nerpol :
87

renoncé au rendez-vous traditionnel à


la basilique de saint Joseph de Coperti-
no à Osimo et à la Santa Casa de Loret-
te qui avait réuni tant en 2020 qu’en
2021 cent participants. Les 14 et 15 mai
2022, nous avons pu reprendre l’habi-
tuel pèlerinage. Plus de deux cents per-
sonnes y ont participé, en bonne partie
des familles avec une cinquantaine
d’enfants et d’adolescents. Après la
nuit passée à Lorette, nous avons pu
vénérer les saints murs de la Santa Ca-
sa ; le pèlerinage s’est conclu l’après-
Les prêtres présents lors du pèlerinage à Lourdes midi devant le corps de saint Joseph de
Copertino. Les deux journées ont été
en février (7 personnes), en avril (17 sous le signe de la ferveur (récitation
personnes) et en juillet (16 personnes). du Rosaire complet, chants, nombreu-
À Raveau : du 1 er au 6 août pour les ses confessions et bien sûr la Messe) et
dames ; du 8 au 15 août pour les de la bonne humeur (en particulier au
hommes (36 personnes). Encore à cours du dîner du samedi, où se remar-
Serre-Nerpol du 16 au 21 août (12 per- quaient les longues tablées des sémina-
sonnes). À Verrua Savoia : deux ses- ristes et des frères avec les garçons et
sions du 22 au 27 août et du 29 au 3 sep- celles des sœurs avec les filles). Le sou-
tembre (32 personnes). Pour la commu- hait est que le pèlerinage puisse aider
nauté de Nîmes : du 5 au 10 septembre. à la persévérance de la vie chrétienne
À Serre-Nerpol : du 5 au 10 septembre, des participants.
Exercices pour les religieuses des Samedi 20/08/22 s’est déroulé
Sœurs du Christ-Roi, les Sœurs de notre comme chaque année le pèlerinage au
Institut et sœur Marie-Letizia. Malheu- sanctuaire de la Madonna delle Grazie
reusement l’abbé Ricossa a dû inter- de Boccadirio (BO), auquel ont parti-
rompre les Exercices à cause d’un pro- cipé un nombre conséquent de fidèles
blème de santé. À Verrua Savoia, du 19 provenant de plusieurs régions, en par-
au 24 septembre : session pour les prê- ticulier de la Toscane et de l’Émilie-Ro-
tres, les séminaristes, les religieux de magne.
notre Institut, et quelques prêtres amis Du 14 au 16 octobre 2022 s’est dé-
(MM. les abbés Pizzocchi, Di Lello, roulé le pèlerinage à Lourdes organisé
Sauer, de la Chanonie). Le bulletin de par l’Institut ; plus de 230 fidèles
Mgr Sanborn a publié la photo souvenir étaient présents en provenance de
des Exercices sacerdotaux. France, d’Italie, de Belgique, de Suisse
Aux Exercices proprement dits, on et d’Autriche. Quatre prêtres de l’Insti-
doit ajouter les journées de récollection tut, aidés par l’abbé Pizzocchi qui s’est
pour la persévérance : le 11 décembre occupé des pèlerins italiens, enca-
2021 à la chapelle de Milan s’est tenue draient le pèlerinage.
une récollection de préparation à Noël. Le 29/10, après 2 années, nous avons
À Serre-Nerpol, le 13/03/2022. À Ra- repris le pèlerinage régional pour le
veau, le 1er novembre de chaque année, mois du Rosaire au S. Monte de Varese
comme il est désormais de tradition. qui a réuni aux pieds de la très sainte
Cette année (2022) la participation y a Vierge, en une chaude journée d’au-
été particulièrement importante. tomne, une quarantaine de personnes
de Lombardie et du Piémont.
• Pèlerinages La chapelle de Pescara a organisé
Lorette. Les deux dernières deux pèlerinages pour les fidèles des
années les circonstances d’ordre public Abruzzes : le 26/03/2022 à la Scala
avaient empêché le pèlerinage à pied à Santa de Campli (TE), imitation de la
Lorette ; cependant nous n’avons pas Scala Santa de Jérusalem près du La-
88

Nous avons également prié à la Basi-


lique de la Visitation où reposent les
corps des deux Saints. À Annecy se
trouve également la Maison de Claude
de Charmoisy : son épouse, Louise de
Châtel, avait comme directeur de
conscience saint François de Sales. Leur
correspondance est à l’origine de l’ou-
vrage Introduction à la vie dévote, publié
en 1608. Dans cette œuvre, Madame de
Charmoisy apparaît sous le nom de Phi-
lothée (aimée de Dieu). Le pèlerinage
s’est terminé à la grotte où vivait saint
Germain, dont saint François remit les
reliques à l’honneur.
Pèlerinage à Lourdes À Paris, la traditionnelle procession
pour la fête de l’Immaculée Conception
tran à Rome et le 22/10/2022 au sanc- à Montmartre a repris en décembre
tuaire du Volto Santo de Manoppello 2021 après l’interruption pour raisons
(PE), où est conservée et vénérée l’im- sanitaires. Depuis longtemps nous
portante relique. avions le projet d’un pèlerinage à Mont-
Le 28 décembre 2022 a marqué le ligeon, également empêché par les res-
400e anniversaire de la mort de saint trictions sanitaires ; finalement, nous
François de Sales. Pour cette raison, le avons pu l’organiser le 26 février 2022 :
17/09/22 plusieurs fidèles d’Annecy et soixante-dix fidèles, surtout de la cha-
de Suisse se sont retrouvés pour visiter pelle de Paris et du Mans, ont prié Ma-
les lieux qui gardent la mémoire du rie pour les âmes du Purgatoire. Le 3
Saint, comme la cathédrale et l’église septembre 2022, quatre-vingt fidèles du
qui lui est dédiée sur le bord du lac ; et Mans, mais aussi de Paris, Nantes et
particulièrement la “Galerie”, petite d’autres chapelles se sont rassemblés à
maison achetée par le Saint, où sainte Laval et ensuite à Pontmain dans la
Jeanne de Chantal avec ses premières Mayenne, à l’initiative d’un fidèle dévot
compagnes fondèrent l’Ordre de la Visi- à ce sanctuaire de Notre-Dame, aidé
tation. Par la suite, en raison de l’af- par deux de nos prêtres : à Laval les pè-
fluence des vocations, elles s’installè- lerins purent prier en se souvenant du
rent près du lac, avec une église qui fut miracle que fit Notre-Dame de Pont-
agrandie au XVIIe siècle et où furent main pour arrêter l’avancée des Prus-
placés les premiers tombeaux des deux siens en janvier 1871, et vénérer aussi
fondateurs. En 1793 la communauté fut les “martyrs de Laval” (plusieurs prê-
dissoute par la Révolution et l’église fut tres réfractaires et religieuses tués pen-
livrée à des usages profanes, jusqu’à la dant la Révolution française). À cette
fin du XIXe siècle, lorsqu’elle fut rache- occasion, les époux Loïc Gosse, fidèles
tée et restaurée par le chanoine de occasionnels de la chapelle du Mans,
Quincy : c’est l’“église Saint François de ont généreusement ouvert leurs portes
Sales”, devenue ensuite l’église de la aux nombreux pèlerins pour la célébra-
Mission Catholique Italienne. Quant à la tion de la Messe du pèlerinage et pour
maison de la “Galerie”, expropriée pen- un pique-nique très convivial, même si
dant la Révolution pour en faire des ha- notre hôte était encore hospitalisé.
bitations civiles, elle fut rachetée en Nous profitons de l’occasion pour les re-
1855 par les Sœurs de Saint Joseph. mercier et les assurer des ferventes
Quelle déception pour nos pèlerins de prières de l’IMBC et de nos fidèles pour
découvrir que depuis quelques années la longue et douloureuse épreuve de
les bâtiments formant le couvent Saint l’hospitalisation de M. Loïc Gosse à
Joseph et jouxtant la “Galerie”, ont été Brest depuis le mois d’août. Le 6 juin
vendus pour devenir des habitations ! 2022, des pèlerins de Paris et du nord
89

19/02/22, Lucia Consonni à Bergame.


19/02/22, Mathilde Aumage à Serre-Ner-
pol (F).
19/02/22, Thomas Grzes à Raveau (avec le
rite des adultes).
26/02/22, David Corjon à Serre-Nerpol (F)
(avec le rite des adultes).
05/03/22, Michele Quagliarella à Pescan-
tina (VR).
13/03/22, Giorgia Maria et Lucia Ferrero
à Verrua Savoia.
Pèlerinage à Montligeon 16/03/22, Nathan Lercier à Dendermonde
(B).
de la France se sont réunis pour visiter 16/03/22, Sam Duhayon à Dendermonde
la cathédrale d’Amiens, chef-d’œuvre (B).
de nos cathédrales gothiques, qui 17/03/22, Martial Lesueur à Arc-Ainières
conserve le chef de saint Jean-Baptiste. (B).
Chez les Sœurs du Christ-Roi, à Serre- 19/03/22, Gregorio Massimo Giuseppe
Nerpol, après deux années de pause for- Prandi à Rovereto (TN).
cée, le pèlerinage à Notre-Dame de 19/03/22, Lucie, Thérèse, Marie Gastin à
l’Osier, dans le Dauphiné, a également Lyon.
repris et s’est déroulé le 7 mai. La dévo- 19/03/22, Pietro Molinari à Rome.
tion à Notre-Dame a animé la ferveur 20/03/22, Maria Luisa Belmonte à Po-
des pèlerins ; comme à l’accoutumée, tenza.
les intentions de prière ont été dépo- 04/04/22, Floriane Moreau à Blaasveld
(B).
sées aux pieds de la très sainte Vierge.
06/04/22, Richárd Nándor (Richard Ferdi-
ADMINISTRATION DES SACREMENTS nand) Balog à Mány (H).
• Baptêmes 23/04/22, Francesco Carli, à Adria (Ro-
21/12/19, Ève, Marie, Chloé Degusseau à vigo) (sous condition).
Lyon. 02/05/22, Lucie Vezin, à Meymans
07/11/21, Odilon Kalmar à Estaimpuis (B). (Drôme) (F).
13/11/21, Jean-Marie, Clément Bolliger à 11/05/22, Delia Caterina Benedetta Cec-
Buchillon (CH). canti à Gualdo Tadino (PG).
15/11/21, Tommaso Michelotti à Borgo à 23/05/22, France Bonnand à Serre-Nerpol
Buggiano (PT). (F).
20/11/21, Luka Jakubiak à Paris. 26/05/22 Patrick Cretton à Servion (CH).
21/11/21, Benedetta Maria Elena Paola 28/05/22, Raphaël Loyer à Paris.
Bogge à Sanfrè (CN). 08/06/22, Veronika Simó à Zsámbék (H).
21/11/21, Dominik Franz Krzan à Lassee (A). 12/06/22, Erwin Nicolas Ploch au Mans
04/12/21, Louis Jutard et Marius Cheval- (F).
lier à Paris (avec le rite des adultes). 17/06/22, Elvina Marie Mootoosamy à Pa-
18/12/21, Marie Ballot à Paris. ris (avec le rite des adultes).
27/12/21, Matthieu Ramis à Serre-Nerpol 23/06/22, Martina Pipoli à Foggia.
(F). 24/06/22, Manon Cochois à Annecy (avec
En 2022, compléments du baptême à Pa- le rite des adultes).
ris pour 13 fidèles. 25/06/22, Beatrice Ambrosi à Verrua Sa-
22/01/22, Raphaël Bilouet à Condé-sur- voia.
l’Escaut (F). 02/07/22, Louis Le Palud à Lyon (avec le
29/01/22, Alexandre, Arthur Georges à rite des adultes).
Lyon. 02/07/22, Fanny et Hugo Lindholm à Den-
29/01/22, Nathanaël, Joseph, Pierre De- dermonde (B).
gusseau à Lyon. 02/07/22, Jaden Munoz Velasquez à Den-
05/02/22, Aymeric Poireau à Serre-Nerpol dermonde (B).
(F). 02/07/22, Reine Douchez à Tourcoing (F).
17/02/22, Licia Maria Veridiana D’Arco à 03/07/22, Gabriel, Daniel, Michel Gleizal
Santarcangelo (RN). à Lyon.
90

08/07/22, Morgane T. à Paris (avec le rite 04/08/22, Luka Michaletti et Maria Vitto-
des adultes). ria Coppi à Rimini.
16/07/22, Johan Becot à Paris (avec le rite 17/08/22, Kevin Gandolfi et Mélanie Flan-
des adultes). drin à Estaimpuis (B).
23/07/22, Jean Herrouin à Combleux près 20/08/22, Priscilla Lafolie et Anthony
d’Orléans (F). Traullé à Lyon.
31/07/22, Benedetta Viviana Di Giovanni 20/08/22, Jean-Michel Girard et Élise Ci-
à Potenza. rion à Chérisy, près de Dreux (F).
14/08/22, Jean-Michel Girard à Paris 15/09/22, Ralph Bilouet et Constance
(avec le rite des adultes). Dhénin à Péruwelz (B).
15/08/22, Ignace Gillis à Estaimpuis (B). 13/10/22, Yann Bourguet et Hélène Gar-
27/08/22, Benjamin Roussel à Serre-Ner- nier, veuve Fuin, à Notre-Dame de Sa-
pol (F) (avec le rite des adultes). lérans (F).
08/09/22, Cécile Niakate à Paris. 15/10/22, Mattia Piras et Zinaida Stingu à
10/09/22, Bibiana Iatalin (Katharina) à Modène.
Nagykovácsi (H). 22/10/22, Vito Aleccia et Marta Amato à
02/10/22, Martial Laiguedé à Raveau. Verrua Savoia.
10/10/22, Amalia et Agata Aleccia à Ver- 29/10/22 Matthieu Talbot et Camille Boil-
rua Savoia. let à l’abbaye de Fontaine-Chaalis,
15/10/22, Amelia Vittoria Luchi à Rove- près de Compiègne (F).
reto (TN). 29/10/22, Thierry Georges et Isabelle Du-
22/10/22, Solenn Autret à Raveau. zan à Lyon.
05/11/22, Clémence Marc à Serre-Nerpol
(F). • Premières Communions
21/11/21, Jeanne Bétend à Épagny (F).
• Confirmations 08/12/21, Ferdinando Fabbretti à Rimini.
17/10/21, à Paris (23 confirmés). 13/03/22, Giorgia Maria Ferrero à Verrua
21/05/22, à Verrua Savoia (48 confirmés). Savoia.
11/09/22, à Lyon (13 confirmés). 26/05/22, Davide Toscano à Pescara.
À Dendermonde et à Estaimpuis, à des 05/06/22, Tiziano Kamguia et Filippo Si-
dates différentes, (20 confirmés). gnoretto à Rovereto (TN).
09/10/22, à Paris (26 confirmés). 16/06/22, Stefano et Benedetta Lorenzi à
19/10/22, à Charritte-de-Bas (18 confir- Verrua Savoia.
més). 25/06/22, Ines Bertaglia, près de Modène.
17/07/22, Caterina Bocchetti à Verrua Sa-
• Mariages voia.
02/10/21, Vincent et Marie Laiguedé à 17/07/22, Joseph Théry à Paris.
Serre-Nerpol (F). 26/07/22, Jeanne Buliard et Louise Vi-
29/01/22, Jérémy Redon et Pauline Su- gand à Paris.
teau à Paris. 05/09/22, Agostino Mazzasette à Castel
26/02/22, Giovanni Guarente et Silvana Giorgio (TR).
Bettineschi à Verrua Savoia. 02/10/22, Maria Camilla Lorenzi à Turin.
26/02/22, David Corjon et Marie Genevay, 29/10/22, Antonio et Maurizio Romano à
à Serre-Nerpol (F). Verrua Savoia.
30/04/22, Olivier Gastin et Angèle Brunet,
à l’Œuvre de l’Étoile à Nîmes (F).
10/05/22, Jérôme Przybylski et Clémence • Anniversaires
Remacle à Paris. Le 13 mai 2022, Angelo Bichiri et Te-
02/06/22, Damiano Luchi et Aurora Pom- resa Camposeo ont fêté leurs 50 ans de
permaier à Pastrengo (VR). mariage (ils s’étaient mariés très
18/06/22, Jérôme Venutolo et Elvina Moo- jeunes). Dimanche 15 mai, à Turin, à la
toosamy à Paris. fin de la sainte Messe, l’abbé Sergio Di
25/06/22, Manon Cochois et Steven Can- Lello leur a donné la bénédiction pré-
tinha à Épagny (F). vue par le Rituel Romain. Le 2 juin
30/07/22, Guillaume Connier et Diana 2022, Giuseppe et Valentina Rubechi
Matchutadze à Etoutteville en Nor- ont fêté leurs dix ans de mariage ; le di-
mandie (F). manche suivant, ils ont remercié le Sei-
91

gneur en assistant à la sainte Messe à Conception, Marian Ostrowski a rendu


Loro Ciuffenna. son âme à Dieu à l’âge de 77 ans. Fi-
Vingt ans après sa mort, survenue le dèle à la Messe au Mans, il dut quitter
9 juin 2002 à Florence, l’Institut Mater la Pologne avec son épouse et ses deux
Boni Consilii se souvient et recommande enfants, après avoir été incarcéré pen-
à vos prières la professeur Liliana Ba- dant plus de quatre mois par le régime
lotta. Dès le début, elle fut en première communiste en 1981. Après de nom-
ligne dans la défense de la Messe ro- breuses vicissitudes en France, il
maine, en participant aux pèlerinages de frappa à la porte de notre chapelle
Pentecôte à Rome. Quand naquit l’Insti- pour y retrouver la foi de toujours. Il a
tut, et que nous nous séparâmes de la pu recevoir les derniers sacrements à
Fraternité Saint-Pie-X, Mlle Balotta fut l’hôpital et nous avons célébré ses fu-
parmi les tout premiers fidèles à nous nérailles au Mans.
soutenir en nous ouvrant sa maison ac- Le 17 décembre aux Açores (Portu-
cueillante pour la célébration de la gal), où il s’était établi depuis quelques
Messe et l’hébergement du prêtre. années pour passer sa retraite, est dé-
Le Prieuré N.-D. de Bethléem de Fa- cédé le docteur Mario Dal Buono, qui
verney a fêté le 15 août son quaran- pendant plusieurs années avait fré-
tième anniversaire. Un de nos prêtres quenté la chapelle S. Ambrogio à Milan
et un séminariste étaient présents aux et les activités de notre Institut. Le 5
côtés du prieur, le père Joseph Mer- janvier 2022 est décédé Gilbert Dubou-
cier, pour représenter l’Institut. Nous chet, muni des sacrements. Le 16 jan-
avons fêté à Paris les 25 ans de mariage vier, est morte Évelyne Vignon, munie
des époux Benoît Lourdelet. des sacrements de l’Église. Elle était
Nous avons prié pour le repos de revenue, avec son défunt mari, à la pra-
l’âme du père Barbara à l’occasion du tique religieuse grâce à sa fille et à son
20e anniversaire de sa mort, le 10 octo- petit-fils de Paris. Ses funérailles ont
bre 2022, comme nous l’avons déjà rap- été célébrées dans la belle église du
pelé dans le numéro précédent de So- XIIIe siècle de son village dans le Vexin
dalitium. en France, sous ces mots gravés en let-
• Un nouvel évêque catholique tres d’or au-dessus du retable du maî-
adhérant à la Thèse de Cassiciacum, sera tre autel : “mort, jugement, paradis ou
consacré le 30 novembre 2022 par Mgr enfer”. Le 19 janvier 2022, à Nîmes, est
Donald Sanborn, en Floride (USA). Il décédé pieusement à l’âge de 85 ans,
s’agit de M. l’abbé Germàn Fliess de Claude Linsolas résidant à l’Œuvre de
l’Institut Catholique Romain, profes- l’Étoile depuis dix ans, ancien artisan
seur au séminaire de la très Sainte Tri- menuisier ; il fut un exemple de piété,
nité. Nous regrettons de ne pouvoir as- fidèle à la Messe quotidienne, grand
sister à la cérémonie avec nos dévot à la sainte Vierge et à saint Jo-
confrères américains, mais nous adres- seph. L’abbé Cazalas a célébré ses fu-
sons nos vœux les plus sincères au nou- nérailles à l’Œuvre de l’Étoile.
vel évêque : ad multos annos. Le 21 janvier 2022, est morte Rose
Bally, 94 ans, réconfortée par les sacre-
• Défunts ments de l’Église ; ses funérailles ont
Le 9 octobre 2021 est décédée Maria été célébrées à Tournan-en-Brie. Le 21
D’Amico épouse De Lorenzo à Torre de janvier, à La Mure, décès d’André
Passeri (PE). Le 20 novembre 2021, à Contard, ami de notre Institut. Le 23
Bicske (Hongrie) a eu lieu la sépulture janvier est décédée, âgée de 87 ans,
d’Ignác Ujszászi, père d’un de nos fi- Mme Vittoria Schettino veuve Schia-
dèles, qui était revenu à la pratique re- vone, de Fasano (BR) ; elle avait reçu
ligieuse peu avant de mourir. Le 26 no- les sacrements de l’abbé Carandino.
vembre 2021, à Saint Pölten (Autriche) Le 26 janvier, à l’Œuvre de l’Étoile,
ont eu lieu les funérailles de Walter sœur Marie Rosaria, âgée de 94 ans, a
Wenninger, père d’une fidèle. Le 8 dé- rendu son âme à Dieu après une longue
cembre 2021, en la fête de l’Immaculée maladie. Née en juillet 1927, elle avait
92

épousé en 1953 Conrad Wehrey, an-


glais et protestant. Son mari a honoré
ses engagements de manière très hon- Mme Gabrielle Richard
nête et elle a donc pu élever ses trois († 12/02/2022)
enfants dans la foi catholique. À
l’époque des réformes conciliaires, M.
Wehrey - qui accompagnait sa famille à
la Messe tous les dimanches sans y par-
ticiper - avertit son épouse que la “nou- rappelé avec émotion sur le numéro
velle messe” était identique aux céré- précédent de Sodalitium, à l’occasion
monies protestantes qu’il avait connues de la mort de son cher époux en juin
en Angleterre. C’est ainsi que la fa- 2021, combien ils ont été de fidèles sou-
mille décida de participer aux Messes tiens de la chapelle IMBC à Paris dès la
traditionnelles. Madame pria beaucoup première Messe en 2006, et le rôle pro-
pour la conversion de son époux en par- videntiel qu’ils avaient déjà eu pour le
ticulier au cours d’une retraite prêchée premier local de notre Messe à Paris,
par le père Guérard des Lauriers, qui rue Bleue. Que tous les fidèles de Paris
lui dit de ne pas s’inquiéter car son les conservent dans leur souvenir et
mari se convertirait : de retour à la dans leurs ferventes prières.
maison, son mari lui annonça vouloir Le 27 février à Turin est décédée
devenir catholique. La nuit de Pâques Maria Rosa Rocca veuve Fontan à qui
1977, il renonça au protestantisme, re- l’abbé Fraschetti avait administré tous
çut le baptême sous condition et fit sa les réconforts religieux. Le même jour
première communion. Après la mort de est décédée à Vigevano, Mirella Mar-
son époux (1984) et le mariage de sa tello veuve Lazzari, sœur de notre ami
fille, elle a vécu de longues années de Nadir Martello. Nos prêtres lui ont ap-
solitude et de prière. Ayant connu le porté plusieurs fois la communion chez
père Raffalli et fréquentant de temps à elle. Le 30 mars, Mme Amparo Cots a
autre l’Œuvre de l’Étoile, en 2005 elle été rappelée à Dieu, munie des sacre-
quitta le monde et se fit religieuse pour ments de l’Église. Née en 1938 pendant
dédier les dernières années de sa vie la guerre civile espagnole de parents
au service de Dieu, ce qu’elle a fait républicains fuyant en France, elle
pendant 16 ans. avait retrouvé la foi de toujours. Très
Le 27 janvier est décédée en Po- pieuse, elle aimait parler de l’Espagne
logne où elle avait déménagé pour se catholique d’autrefois. Les fidèles de
rapprocher de son fils Federico, Luisa Paris ne l’oublieront pas. Le 2 avril,
Piovesana veuve Colombera ; dans le après une longue maladie, à soixante-
passé, elle fréquentait régulièrement dix ans, est décédé Michel Pol, grand
les Messes de l’Institut dans la pro- ami et bienfaiteur de l’Institut, ainsi
vince de Padoue. Le 31 janvier est mort que d’autres Institutions religieuses.
Luis Vives Surià, ami et bienfaiteur de Converti grâce à l’intervention de sa
l’Institut à Barcelone. Le 2 février est sœur religieuse et aux Exercices spiri-
décédée Giuseppina Rossi épouse Rai- tuels suivis avec le père Vinson, il
mondi, munie des sacrements ; elle changea complètement son mode de
était la maman de notre fidèle turinois, vie. Étant donné que son travail dans le
Walter. Le 4 février à Teramo est décé- monde de la restauration impliquait
dée Mme Sofia Conti veuve Barraccini : des activités surtout le dimanche, il dé-
depuis des années elle recevait les sa- cida de vendre son importante entre-
crements de notre Institut, d’abord à la prise : “si je ne vais pas à la Messe le
chapelle de Pescara, puis durant sa ma- dimanche, disait-il, je me connais et je
ladie, chez elle. L’abbé Carandino a cé- sais que je ne pourrai pas persévérer
lébré ses funérailles le 7 février à Mon- dans la grâce de Dieu”. C’est ainsi qu’il
toro al Vomano. Le 12 février, Mme Ga- abandonna toutes les choses vaines ou
brielle Richard est décédée dans son nocives pour l’âme qu’il avait recher-
sommeil à l’âge de 83 ans. Nous avons chées pendant de nombreuses années,
93

administré le 26 février tous les récon-


forts de la religion. Toujours à Pachin,
le 31 juillet est décédé M. Mauro Russo,
père de notre cher Giuseppe. Le 17 juin
est mort Battista Vioglio, à Serralunga
d’Alba, après avoir reçu les derniers sa-
Michel Pol crements. Sa famille est assidue à la
(† 2/04/2022) Messe dominicale célébrée à Verrua.
Le 7 juillet, après une brève mala-
die, à Gravellona Lomellina (PV), est
décédée Adriana Tardani veuve Pizzoc-
et décida de suivre ce Dieu qu’il avait chi, mère de notre très cher don
jusqu’alors laissé de côté. Il a voulu ai- Marco ; don Ugolino a célébré ses funé-
der par son travail et avec ses biens railles le 9 juillet à Gravellona Lomel-
tant les religieuses du Christ-Roi que lina et l’inhumation à Vigevano.
notre Institut. Après s’être occupé de Comme son époux, elle était artisane
ses parents âgés et malades, une grave dans le domaine de la chaussure. Elle a
maladie l’a éprouvé pendant plus de sacrifié sa vie pour ses fils, guidée par
dix ans. Après de nombreuses souf- un grand amour pour la sainte Vierge,
frances et alors qu’il était entouré des et a partagé pleinement avec ses en-
personnes qui lui avaient conservé leur fants la préoccupation pour la situation
affection et leur reconnaissance, sa actuelle de l’Église, l’adhésion à la
belle âme a quitté cette terre. Ses funé- sainte Messe de toujours et le souci du
railles se sont déroulées à la Maison salut des âmes. Elle a ainsi pu recevoir
Saint-Joseph le 7 avril, en présence de les sacrements de l’Église catholique
ses proches et d’un grand nombre de qui l’ont préparée au jugement de
personnes qui l’avaient aimé et qui Dieu. Le 18 juillet à Bergame est décé-
avaient reçu de lui des bienfaits spiri- dée Tiziana Comino épouse Consonni,
tuels et matériels : qui grâce à lui était mère de notre fidèle Davide.
revenu à Dieu, qui en avait reçu de Le 3 août est décédé à Revò (TN)
bons conseils ou un bon exemple ; tous d’une maladie incurable, Davide Fattor,
avaient été édifiés par sa vie. Prions jeune père de famille de 46 ans qui a
pour lui et pour toutes les personnes laissé veuve son épouse Agnese avec
pour lesquelles il priait. leurs quatre enfants en bas-âge. Il avait
Le 15 mars est décédé Luigi Berselli, reçu les sacrements le 4 juillet à l’hôpi-
déjà notre fidèle quand la Messe était tal de Bolzano. Ses funérailles ont été
célébrée à Bologne. Le 6 avril est mort célébrées par l’abbé Ugolino Giugni le
chez lui près d’Annecy Fréderic Stoya- 5 août au cimetière de Revò en pré-
noff, qui avait reçu les sacrements le 26 sence de plus de trois cents personnes
mars précédent. Le 12 avril, décès de sous un soleil brûlant puisque l’‘évêque’
Gisèle Dumas, épouse de Berchmans de Trente avait refusé l’église du pays
Rodrigue : ils vivaient à Saint-Georges (qui avait été demandée par la famille)
de Beauce au Canada. Une Messe de Re- pour la Messe parce que le rite de saint
quiem a été célébrée à Verrua. Le 19 oc- Pie V d’après les nouvelles dispositions
tobre est décédée à Champlain-de-l’As- est interdit… Les modernistes qui par-
somption au Canada sa sœur jumelle, lent tant d’œcuménisme n’ont fait
Hélène Dumas, épouse de Jean Paquet, preuve d’aucune charité et de pitié à
qui vivait avec son mari à Saint-Côme- l’égard d’une jeune veuve et de quatre
Linière. Les deux sœurs avaient plus de jeunes enfants. L’affaire a eu un certain
90 ans. Les deux familles suivaient So- écho dans la presse locale avec un com-
dalitium et en partageaient les posi- muniqué de la Curie épiscopale de
tions. Le 14 avril (Jeudi Saint) est décé- Trente (voir la rubrique l’Institut et la
dée à Pachino (SR) Mme Corradina Ba- presse). Davide Fattor, ingénieur et ap-
rone veuve Russo, mère de notre chère précié producteur de pommes au Val di
Santina, à qui l’abbé Fraschetti avait Non, était profondément catholique et
94

suivait l’Institut depuis plusieurs an-


nées. Il s’était bien préparé à la mort et
avait aussi admirablement préparé ses
enfants à ce moment difficile : Beati
mortui qui in Domino moriuntur. Le 15
août est décédé Christian Revol, qui
fréquentait la Messe à Serre-Nerpol. Le
23 août, est mort à l’âge de 62 ans, à
Montpellier, M. Charles Canadas, après Mgr Andres
une longue maladie. Il s’était converti Morello
(† 6/03/2022)
en 2019 à l’Œuvre de l’Étoile, avec ses
deux fils, Vincent et frère Guillaume,
religieux stellamarin. Depuis sa conver-
sion, il a été un exemple de fidélité et prêtres qui mènent le combat pour la
de piété, surtout dans la régularité dans foi. Ses funérailles ont été célébrées à
la réception des sacrements. Ses funé- Molenschoot. Le 10 octobre est décé-
railles ont été célébrées à l’Œuvre de dée à Baasrode Christina Verhoeven,
l’Étoile et l’inhumation a eu lieu à Bour- née à Westdorpe (Pays-Bas) en 1918,
goin-Jallieu. Fin août, Mme Pascale Ba- munie des derniers sacrements. À deux
foil, fidèle de la chapelle de Paris, a dû reprises elle déménagea pour se rap-
être hospitalisée à Amiens et a rendu procher d’une chapelle non una cum.
son âme à Dieu quelques jours après, le Ses funérailles ont été célébrées dans
31 août, à l’âge de 59 ans, après avoir la chapelle de Dendermonde. Le 30 oc-
reçu les derniers sacrements de notre tobre, à l’âge de 103 ans, est décédée
confrère belge. Nous nous souviendrons Maria Alejos : l’Institut a souvent célé-
de sa joie et de sa générosité pour aider bré la sainte Messe en Espagne chez
les personnes âgées (elle nous a fait ve- elle et sa sœur Pilar. Donato Cerretta
nir au chevet de plusieurs pour leur di Calitri (AV), de noble naissance, né
donner les sacrements). Ses funérailles en 1928, est décédé le 1er novembre ; au
ont été célébrées solennellement dans cours de ces dernières années il assis-
une magnifique église de l’Oise, en pré- tait à la Messe célébrée par l’abbé Ca-
sence de nombreux fidèles et du chœur randino dans la chapelle aménagée
de la chapelle de Paris. Nous adressons chez lui et recevait les sacrements. Le
à son fils nos plus sincères condo- même prêtre a célébré ses funérailles à
léances (nous n’oublions pas que c’est Calitri le 3 novembre. Le 4 novembre à
la conversion de son fils qui a ramené Pontelagoscuro (Ferrare) est décédée
Mme Bafoil à la foi). Beatrice Piacenti veuve Fabbri, qui
Le 30 septembre, Mlle Anne-Marie avait reçu les sacrements durant sa ma-
Leberquier a été rappelée à Dieu à ladie. Le 23 novembre est décédé Jean
l’âge de 96 ans à Fécamp en Norman- Dubouchet, frère de Charles (†) et de
die, où auparavant nous avions pu lui Pierre ; il avait reçu les sacrements à
apporter le secours des derniers sacre- l’hôpital deux jours avant.
ments (nous n’oublierons jamais son re- Nous prions pour le repos de l’âme de
gard et son visage illuminés de joie en tous nos fidèles et amis défunts et nous
nous voyant lui apporter le viatique). adressons à leurs familles nos plus sin-
Elle avait fréquenté la chapelle de Pa- cères condoléances. Requiescant in pace.
ris autant que sa santé et la distance le • Deuils dans l’épiscopat. Au cours
lui permettaient. Elle a vécu une vie de de l’année 2022 l’Église a perdu deux
foi profonde, dans la pauvreté qu’elle évêques fidèles à la Tradition : Mgr An-
chérissait par détachement des créa- dres Morello, décédé le 6 mars en Ar-
tures. Le 8 octobre est décédé à Rijen gentine, et Mgr Daniel Dolan, décédé
Johannes Antonius Josef Hauptmeijer, le 26 avril aux États-Unis. Nous les
né à Raalte (Pays-Bas) en 1932, muni avons bien connus tous les deux. Mgr
des derniers sacrements. Fidèle fer- Morello, dès le séminaire, ce qui a faci-
vent, il rendit différents services aux lité les relations entre nous, après qu’il
95

runas en 1993. Un séminaire dirigé par


Mgr Daniel l’abbé Sanborn (lui aussi par la suite sa-
Dolan († cré évêque, mais par Mgr McKenna) fut
26/04/2022, ouvert, d’abord dans le Michigan et en-
avec l’abbé
Anthony Ce-
suite en Floride, pour accueillir les vo-
kada décédé cations qui s’adressaient aux deux
en 2020 évêques, qui étaient d’accord sur la va-
cance du Siège Apostolique, mais non
sur la Thèse de Cassiciacum, embrassée
eût quitté la Fraternité Saint-Pie-X et par Mgr Sanborn et non par Mgr Dolan.
fondé la Compagnie de Jésus et Marie. La collaboration entre les deux évêques
Plusieurs fois Mgr Morello a sollicité et a duré jusqu’à l’année dernière, quand
accueilli les conseils de ses confrères Mgr Dolan, changeant d’attitude, n’a
italiens, dans un profitable échange plus accepté la collaboration avec les
d’opinions. Mgr Morello avait collaboré tenants de la Thèse de Mgr Guérard des
avec Mgr McKenna et reçu la consécra- Lauriers. Au moment de la mort de Mgr
tion épiscopale de Mgr Neville. Nous Dolan, la polémique théologique sur la
présentons nos condoléances à ses Thèse était encore de vive actualité.
confrères, en particulier à son succes- Avant le sacre de Mgr Stuyver par Mgr
seur, le père Alfredo Contreras. McKenna (16 janvier 2002), l’Institut
En la fête de Notre-Dame du Bon s’adressait, pour les ordres sacrés, à
Conseil est décédé subitement chez lui Mgr McKenna jusqu’en 1991. Mais à
à Cincinnati (Ohio) Mgr Daniel L. Do- cause de l’éloignement et de l’âge du
lan. Né en 1951 à Detroit, Michigan, il prélat dominicain, pour les ordres infé-
fut ordonné prêtre par Mgr Lefebvre rieurs au sacerdoce, nous nous sommes
pour la Fraternité Saint-Pie-X en 1976, adressés à Mgr Dolan de 1994 à 1997 ;
durant le célèbre “été chaud”, appelé c’est également Mgr Dolan qui consacra
ainsi du fait de la ‘suspens a divinis’ or- l’autel de Verrua Savoia (27 mai 1994)
donnée par Paul VI à l’évêque français. et celui de Turin (11 juin 1995) et qui
En 1983, il fut un des neuf prêtres amé- inaugura l’Oratoire San Gregorio VII de
ricains qui quittèrent la Fraternité Rome (21 avril 1996). La seule ordina-
Saint-Pie-X (les trois principaux motifs tion sacerdotale qu’il a conférée à Ver-
de la séparation furent : le refus des ru- rua - exception à la règle - fut celle de
briques de Jean XXIII, que la Frater- l’abbé Ercoli le 12 octobre 1997 ; ce fut
nité voulait imposer également aux aussi la dernière fois que l’Institut eut
États-Unis ; le refus des nullités de ma- recours à l’évêque américain. La ques-
riage décrétées par les modernistes, et tion de la Thèse de Cassiciacum nous a
le refus de collaborer avec des prêtres toujours divisés, même si l’amitié avec
ordonnés douteusement avec le nou- l’abbé Cekada a favorisé le maintien de
veau rite sans qu’ils soient ordonnés à bonnes relations. Après la mort de
nouveau sous condition). Après la sortie l’abbé Cekada et la polémique sur la
des quatre prêtres italiens de la Frater- Thèse qui s’est enflammée aux États-
nité et la fondation de notre Institut, Unis, nos voies s’étaient séparées. Mal-
notre rencontre avec l’abbé Sanborn oc- gré tout, nous nous souvenons de l’âme
casionna un débat entre les prêtres de Mgr Dolan dans la prière, et la re-
américains à propos de la vacance du commandons aussi aux suffrages de nos
Siège Apostolique (à considérer non lecteurs ; toujours particulièrement dé-
plus seulement comme une opinion) et vot à Notre-Dame du Bon Conseil, il est
de la licéité des sacres de Mgr Ngo- mort précisément le jour de sa fête,
Dinh-Thuc, refusées par exemple par après lui avoir rendu hommage dans
l’abbé Kelly et acceptées par les abbés son dernier écrit. L’Institut adresse
Sanborn, Dolan et Cekada. Après des aussi ses chrétiennes condoléances aux
Exercices spirituels prêchés à Verrua confrères prêtres de Mgr Dolan, et à
par le père Barbara, l’abbé Dolan reçut son successeur dans l’épiscopat, Mgr
la consécration épiscopale de Mgr Piva- McGuire. Qu’il repose en paix.
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bignano, 36. Ste Messe: en semaine à 7h30, le proximité tramway. Messe tous les di-
dimanche à 18h. Tél.: +39.0161.83.93.35 - E- manches à 17h00, sauf exception. Se rensei-
mail : info@sodalitium.it gner au +39.0161.839.335 ou par mail.
San Martino dei Mulini (RN). Casa San Pio X. Paris: Programme diffusé tous les mois par
Abbé Ugo Carandino - Via Sarzana 86. e-mail. Deux lieux:
Pour toute information, Tél (et Fax) +39. • 18 passage Dubail, 75010 pour tous les di-
0541.75.89.61. E-mail : info@casasanpiox.it. manches et fêtes d’obligation (8h30 confes-
BELGIQUE: Dendermonde. Mgr Geert Stuy- sions, 10h Messe, sauf Toussaint et Noël).
ver: Kapel O.L.V. van Goede Raad, (chapelle • Certains jours de semaine : Oratoire N.-D. du
N.-D. du Bon Conseil) Koning Albertstraat Bon Conseil, 19 rue Théodore Deck, 75015
146 - 9200 Sint-Gillis Dender monde: Ste Paris.
Messe le dimanche à 10h. Tél.: (+32) (0)
52.38.07.78. E-mail: mgr.stuyver@skynet.be ALLEMAGNE
FRANCE: 350 route de Mouchy - 58400 Ra- Lierfeld: (50 km au nord de Trier/Trèves):
veau. Ste Messe tous les dimanches sauf ex- Herz-Jesu-Kapelle, Hauptstraße 7.
ception. Pour toute information, téléphoner Se renseigner au +32(0)52380778.
au 03.86.70.11.14. E-mail : info@sodalitium.eu
HONGRIE: Budakeszi 2092, Kossuth Lajos u.
14. Messes: dimanche à 9:30; en semaine, se BELGIQUE
renseigner: orapronob.is/en Tél. (+43) 660 Dendermonde: voir ci-dessus.
4970874 ou (+36) 20 262 7174 ou E-mail: Mouscron: Oratoire Marie-Reine. Programme
1fkatholisch@gmail.com diffusé par e-mail. Se renseigner au
+32(0)52380778 ou mgr.stuyver@skynet.be.
AUTRES CENTRES DE MESSES
FRANCE HOLLANDE
Aix-en-Provence: 3 Impasse des Arbousiers, Bergen op Zoom et Zwartemeer: se renseigner
13080 Luynes. Ste Messe 2 dimanches par au +32(0) 52380778.
mois (10h30 ou 18h.). Se renseigner au
06.77.08.60.35 ou bien au 04.42.60.80.29. SUISSE
Annecy: 198 chemin de la Pouterne - Epagny. (Canton de Vaud): à 15 minutes de Lausanne:
Messe tous les dimanches. Programme dif- Oratoire Saint Nicolas de Flüe. Programme
fusé tous les mois par e-mail. Se renseigner diffusé tous les mois par e-mail. Se renseigner
au 04.50.52.81.20. au : +39.0161.839.335.
Cannes: 16 bis rue Ginette Giuge - 06220 Val-
lauris. Ste Messe 2 dimanches par mois. Se Confessions une demi-heure avant les messes.
renseigner au 06.77.08.60.35 ou bien au
04.93.60.22.68.
Lyon: Chapelle N.-D. du Bon Conseil. 11 rue
Pareille, 69001. Messe tous les dimanches.

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