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LA PROTHÈSE TOTALE DE HANCHE

DANS TOUS SES ÉTATS


BUREAU DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE CHIRURGIE ORTHOPÉDIQUE
ET TRAUMATOLOGIQUE (SOFCOT 2017)

Président . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Christian DELAUNAY


Premier vice-président . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Jean-François KEMPF
Deuxième vice-président . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Didier MAINARD
Ancien président . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Philippe HERNIGOU
Secrétaire général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Franck FITOUSSI
Secrétaire général adjoint et secrétaire de l'AOT . . . . . . . . . Alexandre POIGNARD
Trésorier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Olivier COURAGE
Président de l'AOT (Académie d'orthopédie
et de traumatologie) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paul BONNEVIALLE
Président du CFCOT (Collège français
des chirurgiens orthopédistes et traumatologues) . . . . . . . . Hervé THOMAZEAU
Président du SNCO (Syndicat national
des chirurgiens orthopédistes) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bernard LLAGONE
Président d'Orthorisq . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Henry COUDANE

CAHIERS ET CONFÉRENCES D'ENSEIGNEMENT DE LA SOFCOT

Conseil scientifique des Conférences d'enseignement et d'OTSR (Orthopædics and Traumatology Surgery and Research)
Président de l'APCORT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bernard AUGEREAU-VACHER
Président de l'AOT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Paul BONNEVIALLE
Secrétaire général de la SOFCOT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Franck FITOUSSI
Secrétaire de l'AOT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Alexandre POIGNARD
Président du Collège . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Hervé THOMAZEAU
Président du Conseil scientifique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Didier MAINARD
Rédacteur en chef OTSR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Philippe BEAUFILS
Président du CNU . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Stéphane BOISGARD
Comité de rédaction des Cahiers d'enseignement
Rédacteur en chef . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Denis HUTEN
Rédacteur adjoint . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Patricia THOREUX
Rédacteur adjoint (pédiatrie) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Rémi KOHLER
Membres pédiatres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Raphaël SERINGE et Jérôme COTTALORDA

Représentants des sociétés associées et partenaires Invités


SFA Geoffrey NOURISSAT Trésorier adjoint Roger BADET
AFCP Jean-Yves COILLARD Président ODPC-COT Gérard BOLLINI
SFCM / GEM Pierre MOUTON Coordonnateur du Conseil scientifique Didier MAINARD
SFCR Henry-François PARENT 1er vice-président AOT Philippe ROSSET
SFHG Philippe MASSIN 2e vice-président AOT Philippe VALENTI
SOFEC Philippe VALENTI Ancien président SoFCOT Philippe HERNIGOU
SOFOP Stéphanie PANNIER Président FICOT Arnaud BLAMOUTIER
GETRAUM Thierry BÉGUÉ Président du CJO Marc-Olivier GAUCI
GETO-GSF Valérie DUMAINE Correspondant Lettre du CNP Rémi KOHLER
SOFROT Philippe ROSSET
SOO Tewfik BENKALFATE

Retrouvez la collection des Cahiers d'enseignement de la SOFCOT sur le site


http://www em-consulte com/produits/livres
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Cahiers d'enseignement de la SOFCOT
Collection dirigée par Denis Huten, Rémi Kohler, Patricia Thoreux

LA PROTHÈSE TOTALE DE HANCHE


DANS TOUS SES ÉTATS
Sous la direction de P Mertl et D Huten

Avec la collaboration de :

T AIT-SI-SELMI, A d'AMBROSIO, J -N ARGENSON, J -M AUBANIAC, F BASSELOT, C BATAILLER,


K BENAD, B BENAZECH, S BOISGARD, N BONIN, M BONNIN, F BONNOMET, Y BULAÏD,
J -C CHATELET, M CHELLI, J CHOUTEAU, H COMMON, J CZEKAJ, M DEHL, C DELAUNAY,
R DESMARCHELIER, T DESSIEUX, A DUBORY, F H DUJARDIN, M EHLINGER, J -A EPINETTE,
A FERREIRA, M -H FESSY, X FLECHER, C -H FLOUZAT-LACHANIETTE, F GAUCHER,
E GIBON, T GICQUEL, J GIRARD, I GUISSOU, M HAMADOUCHE, D HANNOUCHE, P HENKY,
P HERNIGOU, D HUTEN, L JACQUOT, L KERBOULL, M KUNTZ, J LANGLOIS, F LAUDE,
J -Y LAZENNEC, C LEFÈVRE, L -R LE NAIL, A LE VIGUELLOUX, A LÜBBEKE, S LUSTIG,
D MAINARD, P MASSIN, B MASSON, P MERTL, H MIGAUD, R NIZARD, M OLLIVIER,
S PARRATTE, G PASQUIER, P PIRIOU, D POTAGE, S PUTMAN, J -C ROLLIER, P ROSSET,
F ROUBINEAU, M SAFFARINI, H SARI ALI, A SION, E STINDEL, E de THOMASSON,
A VISTE, M ZINGG
Cahiers d'enseignement de la Sofcot
Collection dirigée par Denis Huten, Rémi Kohler, Patricia Thoreux
Éditrice d'acquisition : Peggy Lemaire
Éditrice de développement : Nathalie Morellato
Conception graphique et maquette de couverture : Véronique Lentaigne

Ce logo a pour objet d'alerter le lecteur sur la menace que représente pour l'avenir de l'écrit, tout particu-
DANGER lièrement dans le domaine universitaire, le développement massif du « photo-copillage ». Cette pratique
qui s'est généralisée, notamment dans les établissements d'enseignement, provoque une baisse brutale
des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et
de les faire éditer correctement est aujourd'hui menacée.
Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans autorisation, ainsi que le recel, sont pas-
LE sibles de poursuites. Les demandes d'autorisation de photocopier doivent être adressées à l'éditeur
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TUE LE LIVRE Tél. 01 44 07 47 70.
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Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans le pré-
sent ouvrage, faite sans l'autorisation de l'éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées, d'une part,
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L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle).

© 2017, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés


ISBN : 978-2-294-75116-5
e-ISBN : 978-2-294-75818-8
Dépôt légal : novembre 2017. Composé chez SPI. Imprimé en Italie par Printer Trento.
Elsevier Masson SAS, 65 rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex
www.elsevier-masson.fr
Liste des auteurs

Tarik AIT-SI-SELMI Stéphane BOISGARD


Centre orthopédique Santy, 24 avenue Paul-Santy, Université Clermont Auvergne,
69008 Lyon CHU Clermont-Ferrand, CNRS, SIGMA Clermont,
ICCF, 63000 Clermont-Ferrand
Adrien d'AMBROSIO
Service d'orthopédie et de traumatologie, Nicolas BONIN
hôpital de Hautepierre, Hôpitaux universitaires Lyon Ortho Clinic, clinique de la Sauvegarde,
de Strasbourg, 67098 Strasbourg cedex 29B avenue des Sources, 69009 Lyon

Michel BONNIN
Jean-Noël ARGENSON
Centre orthopédique Santy, 24 avenue Paul-Santy,
Service d'orthopédie et traumatologie,
69008 Lyon
Institut du mouvement et de l'appareil locomoteur,
CHU Sud, hôpital Sainte-Marguerite, 270 boulevard
François BONNOMET
Sainte-Marguerite, 13009 Marseille
Service d'orthopédie et de traumatologie,
hôpital de Hautepierre, Hôpitaux universitaires
Jean-Michel AUBANIAC de Strasbourg, 67098 Strasbourg cedex
Service d'orthopédie et traumatologie, Institut
du mouvement et de l'appareil locomoteur, hôpital Yassine BULAÏD
Sainte-Marguerite, 270 boulevard Sainte-Marguerite, Service de chirurgie orthopédique et traumatologique,
13009 Marseille CHU Amiens-Picardie, Site Sud, 80054 Amiens cedex 1
Centre Albert Trillat, Groupement hospitalier Nord,
université Lyon 1, 103 grande rue de la Jean-Christophe CHATELET
Croix-Rousse, 69004 Lyon Centre de chirurgie orthopédique du Beaujolais,
120 ancienne route de Beaujeu, 69400 Arnas
Frédéric BASSELOT
Service de chirurgie orthopédique, Hôpital Sud, CHU Mickael CHELLI
de Rennes, 2 rue Henri-Le-Guilloux, 35000 Rennes Service d'orthopédie, CHU de Nice, hôpital Pasteur,
30 voie Romaine, 06001 Nice
Cécile BATAILLER
Centre Albert Trillat, Groupement hospitalier Nord, Julien CHOUTEAU
université Lyon 1, 103 grande rue de la Croix- Service de chirurgie orthopédique,
Rousse, 69004 Lyon Clinique d'Argonay, 685 route des Menthonnex,
74370 Argonay
Kevin BENAD
Service d'orthopédie, hôpital Roger-Salengro, Harold COMMON
place de Verdun, CHRU, 59037 Lille Service de chirurgie orthopédique, Hôpital Sud, CHU
de Rennes, 2 rue Henri-Le-Guilloux, 35000 Rennes
Baptiste BENAZECH
Service de chirurgie orthopédique et traumatologique, Jaroslaw CZEKAJ
CHU Amiens-Picardie, Site Sud, 80054 Amiens Service d'orthopédie et traumatologie,
cedex 1 Institut du mouvement et de l'appareil locomoteur,

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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VI Liste des auteurs

CHU Sud, hôpital Sainte-Marguerite, 270 boulevard Charles-Henri FLOUZAT-LACHANIETTE


Sainte-Marguerite, 13009 Marseille Service de chirurgie orthopédique,
hôpital Henri-Mondor, 51 avenue du
Massinissa DEHL Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil
Service de chirurgie orthopédique et traumatologique,
CHU Amiens-Picardie, Site Sud, 80054 Amiens cedex 1 François GAUCHER
Service de chirurgie orthopédique, centre hospitalier
Hôtel-Dieu, groupe HSTV, rue Roger Signor, 29120
Christian DELAUNAY Pont-l'Abbé
Clinique de l'Yvette, 67-71 route de Corbeil,
91160 Longjumeau Emmanuel GIBON
Hôpital Cochin – Université Paris-Descartes,
Renaud DESMARCHELIER 24 rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris
Hospices civils de Lyon, centre hospitalier Lyon-Sud,
service de chirurgie orthopédique et traumatologique, Thomas GICQUEL
69495 Pierre-Bénite cedex Service de chirurgie orthopédique, Hôpital Sud, CHU
de Rennes, 2 rue Henri-Le-Guilloux, 35000 Rennes
Thierry DESSIEUX
Pôle d'anesthésie-réanimation du CHU de Rennes, Julien GIRARD
2 rue Henri-Le-Guilloux, 35000 Rennes Hospitalier régional universitaire de Lille,
2 avenue Oscar-Lambret, faculté de médecine
Arnaud DUBORY de Lille 2, 59037 Lille cedex
Service de chirurgie orthopédique,
hôpital Henri-Mondor, 51 avenue du Isaac GUISSOU
Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil Service de chirurgie orthopédique,
hôpital Henri-Mondor, 51 avenue du
Franck H. DUJARDIN Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil
Service de chirurgie orthopédique, CHU de Rouen,
1 rue de Germont, 76000 Rouen Moussa HAMADOUCHE
Hôpital Cochin – Université Paris-Descartes,
Matthieu EHLINGER 24 rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris
Service d'orthopédie et de traumatologie,
hôpital de Hautepierre, Hôpitaux universitaires Didier HANNOUCHE
de Strasbourg, 67098 Strasbourg cedex Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG),
Université de Genève, Rue Gabrielle-Perret-Gentil 4,
Jean-Alain EPINETTE 1205 Genève, Suisse
Chirurgie orthopédique, clinique médico-légale,
Groupe GHPA, 200 rue d'Auvergne, Pierre HENKY
62700 Bruay-Labuissière Clinique Rhena, 10, rue François-Épailly,

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67000 Strasbourg
André FERREIRA
Clinique du Parc, 155ter boulevard Stalingrad, Philippe HERNIGOU
69006, Lyon Service de chirurgie orthopédique,
hôpital Henri-Mondor, 51 avenue du
Michel-Henri FESSY Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil
Hospices civils de Lyon, centre hospitalier Lyon-Sud,
service de chirurgie orthopédique et traumatologique, Denis HUTEN
69495 Pierre-Bénite cedex Service de chirurgie orthopédique, Hôpital Sud, CHU
de Rennes, 2 rue Henri-Le-Guilloux, 35000 Rennes
Xavier FLECHER
Service d'orthopédie et traumatologie, Laurent JACQUOT
Institut du mouvement et de l'appareil locomoteur, Service de chirurgie orthopédique,
CHU Sud, hôpital Sainte-Marguerite, 270 boulevard Clinique d'Argonay, 685 route des Menthonnex,
Sainte-Marguerite, 13009 Marseille 74370 Argonay
Liste des auteurs VII

Luc KERBOULL Bernard MASSON


Institut Marcel Kerboull, 2 avenue de Ségur, 75007 Paris BioConnect, 18 rue des Potiers,
31320 Vieille-Toulouse
Meinhard KUNTZ
CeramTec, Platz 1–9, Plochingen 73207, Allemagne Patrice MERTL
Service de chirurgie orthopédique et traumatologique,
Jean LANGLOIS CHU Amiens-Picardie, Site Sud, 80054 Amiens
Centre orthopédique Santy, 24 avenue Paul-Santy, cedex 1
69008 Lyon
Henri MIGAUD
Frédéric LAUDE Service d'orthopédie, hôpital Roger-Salengro,
Clinique du sport, 36, boulevard Saint-Marcel, place de Verdun, CHRU, 59037 Lille
75005 Paris
Rémy NIZARD
Jean-Yyves LAZENNEC Hôpital Lariboisière, AP-HP ; Université Paris Denis
Service de chirurgie orthopédique, groupe hospitalier Diderot, Paris
universitaire Pitié-Salpêtrière, 47-83 boulevard
de l'hôpital, 75013 Paris Matthieu OLLIVIER
Service d'orthopédie et traumatologie, Institut
Christian LEFÈVRE du mouvement et de l'appareil locomoteur, CHU Sud,
Service d'orthopédie et traumatologie, CHU de Brest, hôpital Sainte-Marguerite, 270 boulevard Sainte-
2 avenue Foch, 29200 Brest Marguerite, 13009 Marseille

Sébastien PARRATTE
Louis-Romée LE NAIL
Service d'orthopédie et traumatologie, Institut
Service de chirurgie orthopédique 2, CHU de Tours,
du mouvement et de l'appareil locomoteur, CHU Sud,
37000 Tours
hôpital Sainte-Marguerite, 270 boulevard Sainte-
Marguerite, 13009 Marseille
Augustin LE VIGUELLOUX
Service d'orthopédie et de traumatologie, Gilles PASQUIER
CHU François-Mitterrand, 1 boulevard Jeanne-d'Arc, Service d'orthopédie, hôpital Roger-Salengro,
21000 Dijon place de Verdun, CHRU, 59037 Lille

Anne LÜBBEKE Philippe PIRIOU


Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), Clinique du Parc, 6 avenue du Morvan, 71400 Autun
Université de Genève, Rue Gabrielle-Perret-Gentil 4,
1205 Genève, Suisse Damien POTAGE
Service de chirurgie orthopédique, hôpital
Sébastien LUSTIG
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Henri-Mondor, 51 avenue du Maréchal-de-Lattre-de-


Centre Albert Trillat, Groupement hospitalier Nord, Tassigny, 94010 Créteil
université Lyon 1, 103 grande rue de la Croix-Rousse,
69004 Lyon Sophie PUTMAN
Service d'orthopédie, hôpital Roger-Salengro,
Didier MAINARD place de Verdun, CHRU, 59037 Lille
Service de chirurgie orthopédique, traumatologique
et arthroscopique, hôpital Central, CHRU de Nancy, Jean-Charles ROLLIER
54000 Nancy Service de chirurgie orthopédique, Clinique d'Argonay,
685 route des Menthonnex, 74370 Argonay
Philippe MASSIN
Philippe ROSSET
Clinique Hartmann, 26 boulevard Victor-Hugo,
Service de chirurgie orthopédique 2, CHU de Tours,
92200 Neuilly-sur-Seine
37000 Tours
VIII Liste des auteurs

François ROUBINEAU Emmanuel de THOMASSON


Service de chirurgie orthopédique, hôpital Clinque Arago, 187A rue Raymond-Losserand,
Henri-Mondor, 51 avenue du Maréchal-de-Lattre-de- 75014 Paris
Tassigny, 94010 Créteil
Antoine VISTE
Mo SAFFARINI Hospices civils de Lyon, centre hospitalier Lyon-Sud,
ReSurg, chemin de la Vuarpillière 35, 1260 Nyon, Suisse service de chirurgie orthopédique et traumatologique,
69495 Pierre-Bénite cedex
Heddi SARI ALI
Service de chirurgie orthopédique, groupe hospitalier Matthieu ZINGG
universitaire Pitié-Salpêtrière, 47-83 boulevard Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG),
de l'hôpital, 75013 Paris Université de Genève, Rue Gabrielle-Perret-Gentil 4,
1205 Genève, Suisse
Audrey SION
Pôle d'anesthésie-réanimation du CHU de Rennes,
2 rue Henri-Le-Guilloux, 35000 Rennes

Éric STINDEL
Service d'orthopédie et traumatologie, CHU de Brest,
2 avenue Foch, 29200 Brest

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Abréviations

AAOS American Academy of Orthopaedic HPM highly porous metal


Surgeons HXLPE highly cross-linked polyethylene
AG anesthésie générale IC indice de confiance
AINS anti-inflammatoire non stéroïdien ILMI inégalité de longueur des membres
AJRR American Joint Replacement Registry inférieurs
Al-Al alumine-alumine IMC indice de masse corporelle
ALTR adverse local tissue reaction IRM imagerie par résonance magnétique
ALVAL aseptic lymphocytic vasculitiis associa- LHA low friction arthroplasty
ted lesions LIP luxation intraprothétique
ANSM Agence nationale de sécurité du médi- MARS metal artifact reduction sequence
cament et des produits de santé MCA matrice composite d'alumine
ARMD adverse reaction to metal debris MI membre inférieur
ARS Agence régionale de santé MLH maladie luxante de hanche
ATIH Agence technique de l'information sur MM métal-métal
l'hospitalisation Mo molybdène
CAO chirurgie assistée par ordinateur MoM metal-on-metal
CC céramique-céramique MPE métal-polyéthylène
CCD angle céphalo-cervico-diaphysaire NARA Nordic Arthroplasty Register Association
CEPP Commission d'évaluation des produits NICE National Institute for Health and Care
et prestations Excellence
CoC ceramic-on-ceramic ODEP Orthopaedic Data Evaluation Panel
COR center of rotation (centre de rotation) OHS Oxford Hip Score
CPE conventional polyethylene (polyéthy- PE polyéthylène
lène conventionnel) PEC polyéthylène conventionnel
CPR contact patch rim PEHR polyéthylène hautement réticulé
CrCo chrome-cobalt PHDD posterior horizontal dislocation distance
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CTF centre de la tête fémorale PIFR prosthetic impingement free range-


DA déplacement acétabulaire of-motion
DCPD dicalcium phosphate dihydraté PPA plan pelvien antérieur
DI déplacement initial PS pente sacrée
DM double mobilité PTH prothèse totale de hanche
DMO densité minérale osseuse RAAC réhabilitation améliorée après chirurgie
EIAS épine iliaque antérosupérieure RIPO Registro dell'implantologia Protesica
EPO érythropoïétine Ortopedica
FDA Food and Drug Administration RPTG reprise de prothèse totale du genou
FJS Forgotten Joint Score RPTH reprise de prothèse totale de hanche
GM gluteus medius (moyen fessier) RRAC récupération rapide après chirurgie
GSA global sagittal angle RSA radiostereometric analysis
HA hydroxyapatite RTH resurfaçage total de hanche
HAS Haute autorité de santé SF-12 Short-Form 12 score
XII Abréviations

SFHG Société française de la hanche et du TPA T1 pelvic angle


genou UHMW ultra high molecular weight polyethy-
SOFCOT Société française de chirurgie ortho lene (polyéthylène de masse molaire
pédique et traumatologique très élevée)
SVA sagittal vertical axis VA voie antérieure
TCP tricalcium-phosphate VP version pelvienne/voie postérieure
TDM tomodensitométrie VPM mini-voie d'abord postérieure
TFL tenseur du fascia lata VPS voie d'abord postérieure standard
TO trou obturateur ZTA zirconia toughened alumina

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3

Prothèse de hanche par voie antérieure


Intérêt de la table d'extension spécifique
F. LAUDE

Introduction Technique opératoire standard


La voie dite de « Hueter » pour l'implantation d'une Table orthopédique
prothèse de hanche sur table orthopédique été utilisée
en France par Robert Judet [1] en 1947 pour la pre- La table orthopédique qu'avait développé dans les
mière fois. Sous l'influence de Smith-Petersen, elle était années 1940 Henri Judet, le père de Robert et de
devenue la voie d'abord à tout faire. Il est surprenant, Jean Judet, a toujours été associée en France à la voie
en replongeant dans les archives de la revue Journal of antérieure telle que nous l'avons toujours apprise et
Bone and Joint Surgery, d'y trouver Alexander Gibson, pratiquée. Certains chirurgiens pensent que l'on peut
bien connu pour son travail dans les voies postérieures s'en passer, qu'elle est dangereuse et complexe à mani-
à l'époque, se plaindre de la méconnaissance de la voie puler. C'est pourtant pour nous la pierre angulaire
postérieure de hanche aux États-Unis [2]. de cette voie antérieure et s'en passer, c'est se priver
Dans les années 1960, les travaux de John Charnley d'un auxiliaire simplifiant la procédure et de manière
et la facilité de mise en œuvre des voies postérieures notoire la libération des parties molles pour la prépa-
ont eu raison de la voie d'abord antérieure sur table ration fémorale. Elle permet ainsi de faire une chirur-
orthopédique, à tel point que dans les années 1990 la gie très peu traumatisante avec une équipe limitée à un
voie d'abord antérieure pour implantation d'arthro- chirurgien et un seul aide habillé. Le lecteur trouvera à
plastie de hanche avait presque disparu et n'était plus la fin de cet article tous les détails techniques concer-
pratiquée que par quelques chirurgiens, plutôt pari- nant son utilisation (annexe 1).
siens. La fabrication de l'indispensable table ortho- L'intervention peut être effectuée sans cette table,
pédique de Judet n'était plus assurée et les ancillaires mais, dans ce cas, il faut utiliser des écarteurs, les-
dédiés à la voie antérieure difficiles à obtenir. L'arrivée quels sont beaucoup plus agressifs vis-à-vis de la peau
de la chirurgie « mini-invasive » de la hanche au début et des muscles et l'assistance d'une ou de deux autres
des années 2000 a relancé l'intérêt pour cette voie personnes est nécessaire [5]. La libération des parties
d'abord. molles autour du grand trochanter doit être beaucoup
Aux États-Unis, après des débuts assez timides sous plus agressive, source de saignement potentiel.
l'impulsion de Richard Berger [3], qui implantait La table orthopédique doit permettre de mobiliser
la cupule de cette manière dans la description de sa l'articulation de la hanche selon les plans de flexion-
double voie, la voie de Hueter a regagné ses lettres de extension, d'abduction-adduction et selon l'axe de
noblesse grâce à Joel Matta [4] qui l'a redécouverte en rotation. Ne pouvant nous procurer la classique table
1997 après l'avoir vu pratiquer par Émile Letournel de Judet, nous avions fabriqué au milieu des années
en 1980 à Paris. Il est regrettable que les chirurgiens 1990 une petite extension qui se fixait sur notre table
français qui l'utilisaient depuis longtemps n'aient pas d'opération pour nos besoins personnels. En 2004,
publié plus souvent dans la presse internationale, car avec l'aide de la société Medacta, nous avons déve-
cette très belle technique est véritablement française loppé une version plus performante, encore moins
et illustre de manière indiscutable le génie tricolore encombrante, qui donne au chirurgien toutes les pos-
en matière de chirurgie de la hanche. De la première sibilités d'une table de Judet classique. Cette extension
implantation en 1947 par Robert Judet, à la cupule à est équipée d'une sécurité et annule automatiquement
double mobilité de Bousquet, en passant par les pro- la traction si la jambe est au sol. En outre, le système de
thèses sans ciment, l'utilisation de la céramique, les mise en rotation externe est très pratique ; il se fait par
têtes modulaires, la prothèse totale de hanche moderne un système à cliquet, plus précis et plus stable. Ce petit
doit beaucoup à l'obstination de chirurgiens français. détail a son importance, car la mise en rotation externe

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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4 F. Laude

est pour nous un progrès important dans la gestion de


la préparation fémorale. Un releveur de fémur externe
et amovible permet de maintenir le fémur en position
haute durant la préparation fémorale. Joel Matta [6] a
développé sur sa table un crochet motorisé qui se place
au contact du fémur, passant par la voie d'abord, et
qui permet d'élever le fémur assez puissamment. C'est
certainement le désir d'utiliser un porte-râpe surtout
destiné à la voie postérieure qui a justifié ce choix. Le
dessin du porte-râpe, nous le verrons, est un élément
essentiel de la technique.

Installation du patient
L'équipe chirurgicale comporte au minimum le chirur-
Figure 1.1. Mise en place de l'écarteur de Beckmann sur le tenseur
gien, un aide-instrumentiste et un manipulateur de du fascia lata (hanche droite).
table qui n'est pas habillé stérilement (généralement © F. Laude
l'infirmière circulante). L'anesthésie est de préférence
rachidienne, le patient restant conscient ou non selon
les préférences personnelles.
Le patient est installé en décubitus dorsal, ce qui sensitif cutané latéral de la cuisse. Elle est oblique en
simplifie la gestion anesthésique et l'installation. Le bas et légèrement en dehors.
patient porte des chaussettes de contention des deux L'incision peut aussi être horizontale et l'on parlera
côtés pour limiter le risque thrombo-embolique. alors d'incision «bikini». Elle doit être centrée sur le
L'appui périnéal doit avoir un diamètre d'environ sommet du grand trochanter et se dirige vers la face
10 à 12 cm et doit être, dans la mesure du possible, antérieure de cuisse en suivant les plis cutanés. Cette
recouvert de gel afin de protéger le périnée. Le pied procédure permet d'éviter, chez les obèses par exemple,
du côté opéré est fixé dans un bottillon orthopédique, des replis cutanés fréquents dans cette région. Elle a
puis une légère tension est appliquée sur le membre aussi l'avantage d'être très esthétique, presque invi-
inférieur. sible, ce qui ravit les femmes.
Après préparation du site opératoire selon les pro- La progression se fait au travers de la couche grais-
tocoles recommandés, des champs collés transparents seuse sous-cutanée qui n'est en général pas aussi
sont mis en place, limitant une zone opératoire incluant épaisse qu'au niveau de la fesse, même chez les obèses.
l'épine iliaque antérosupérieure, la moitié antérieure Il faut éviter soigneusement les décollements du tissu
de la crête iliaque, la face antéro-externe de la cuisse et sous-cutané et ouvrir l'aponévrose superficielle du
s'arrêtant au-dessus de la rotule. Ces champs transpa- muscle tenseur du fascia lata. On décolle alors l'apo-
rents permettront au chirurgien de vérifier la mobili- névrose du tenseur pour accéder à sa face médiale puis
sation et éventuellement les manipulations du membre on met en place un écarteur de Beckmann de 5 cm sur

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inférieur. Ils sont classiquement utilisés pour faire des 5 cm qui permet de s'exposer parfaitement sans aide
ostéosynthèses de fracture pertrochantérienne. Ils ont (figure 1.1).
le grand avantage d'être peu onéreux et très bien adap- Le clivage de cet espace fait apparaître l'aponé-
tés à cette chirurgie. vrose superficielle du muscle droit de la cuisse (rectus
femoris). Celle-ci est incisée longitudinalement
(figure 1.2). Après l'hémostase d'une petite artériole
Incision cutanée et gestion issue du pédicule circonflexe antérieur, le corps charnu
des muscles périarticulaires du muscle est récliné en dedans et l'on met au jour le
plan aponévrotique profond.
L'incision peut être classique et verticale, d'environ Cette aponévrose nacrée est ouverte en son milieu
6 à 10 cm, et débute au milieu d'une ligne allant de (figure 1.3) et l'on découvre assez facilement dans
l'épine iliaque antérosupérieure au sommet du grand la graisse précapsulaire le paquet circonflexe qui est
trochanter. Elle est latéralisée de 1 à 2 travers de doigt en général lié avec un fil non résorbable de couleur
par rapport au bord externe de l'épine iliaque antéro- (figure 1.4). Si un jour une reprise est nécessaire, ce
supérieure pour diminuer le risque de lésion du nerf petit marqueur de couleur sera précieux.
Prothèse de hanche par voie antérieure 5

Figure 1.2. Ouverture de l'aponévrose superficielle du droit


antérieur à la jonction « rouge-jaune ». Figure 1.5. On peut exciser ou refouler la graisse précapsulaire
© F. Laude pour bien mettre en évidence la capsule articulaire sans cher-
cher à soulever le muscle iliocapsularis.
© F. Laude

Dans tous les cas, nous pensons qu'il est préférable


de laisser le muscle psoas-iliaque adhérent à la cap-
sule (figure 1.5). Les patients n'ont plus de difficulté
à monter les escaliers comme on pouvait le voir aupa-
ravant quand on exposait largement la capsule avant
de l'exciser.
L'insertion supérieure du muscle vaste latéral est
essentielle, car elle est le bord inférieur d'un triangle
capsulaire sur lequel aucun muscle n'est attaché. Le
psoas est le côté médial et le petit fessier ou petit glu-
téal (gluteus minimus) le côté latéral de ce triangle. En
Figure 1.3. Mise en évidence du paquet circonflexe dans la graisse général, pour améliorer la vision, on place un écarteur
précapsulaire après ouverture de l'aponévrose innominée. à bec juste au niveau de la capsule inférieure. Il n'est
© F. Laude pas utile de placer un écarteur au-dessus de la capsule,
car le petit fessier se trouve juste à cet endroit et il
serait dommage de l'endommager. On s'exposerait au
risque d'ossifications hétérotopiques.
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bord articulaire et section du col


La section du tendon réfléchi du droit de la cuisse n'est
pas utile dans la très grande majorité des cas ; cepen-
dant, il ne faut vraiment pas hésiter à libérer cette
expansion sus-cotyloïdienne du muscle si l'exposition
de l'acétabulum n'est pas satisfaisante.
Il est possible et sans doute préférable de conser-
ver toute la capsule en réalisant une capsulotomie
a minima que l'on peut fermer en fin d'intervention
(figure 1.6). La meilleure façon est de l'ouvrir le long
Figure 1.4. Ligature du paquet circonflexe. du bord latéral du muscle ilio-psoas, puis d'effectuer
© F. Laude une désinsertion de la capsule inférieure en suivant la
6 F. Laude

Figure 1.6. Préparation d'un lambeau capsulaire qui va permettre Figure 1.7. La zone de section du col fémoral ainsi que le tuber-
de placer, après l'extraction de la tête fémorale, d'un écarteur cule prétrochantérien sont mis en évidence en plaçant deux
autostatique mettant en tension la capsule pour s'exposer. écarteurs à bec.
© F. Laude © F. Laude

ligne intertrochantérienne antérieure, juste au-dessus


de l'insertion supérieure du vaste externe. On obtient
un volet capsulaire sur lequel on place un fil tracteur,
puis on appuie un écarteur autostatique. On évite ainsi
d'appuyer les écarteurs sur le muscle tenseur du fas-
cia lata. Conserver la capsule, la mettre sous tension
et l'utiliser comme un écarteur est une idée logique et
efficace.
Une fois le col fémoral exposé aussi bien à sa par-
tie supérieure qu'inférieure grâce à deux écarteurs à
bec appliqués contre l'os, on procède à la section du
col puis à l'ablation de la tête fémorale (figure 1.7).
L'équipe Judet avait l'habitude de luxer la hanche, de
mettre la jambe au sol et de sectionner le col ensuite Figure 1.8. La zone de coupe débute au niveau la partie supé-
en partant de sa face médiale. Ces manœuvres sont rieure du tubercule prétrochantérien et se dirige vers l'écarteur
chronophages et peuvent être remplacées avantageuse à bec qui est placé sur le col fémoral.
ment par la section du col en place. La section du col On tracte légèrement la jambe dans l'axe et la section se fait en ne

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peut être hémorragique si on lèse les vaisseaux circon- coupant que la corticale antérieure et le calcar. Sous l'influence de la
flexes postérieurs qui sont difficiles à coaguler par voie traction, la corticale postérieure se casse et on évite ainsi d'endom-
antérieure. mager avec la lame de scie les vaisseaux circonflexes postérieures.
L'artère circonflexe postérieure atteint le col fémoral © F. Laude
après être passée à la face inférieure puis postérieure
du tendon obturateur externe, puis elle se divise en
quatre ou cinq petites branches qui pénètrent la face prétrochantérien et de viser l'écarteur de Hohmann
postérolatérale du col fémoral. Ces artérioles sont situé au contact du col fémoral en dedans. Que le col
généralement supportées par une petite lame conjonc- fémoral soit en varus ou valgus, cet écarteur se place
tive que l'on discerne lorsque la partie supérieure toujours au bon endroit ! La scie doit être perpendicu-
du col fémoral est exposée. On peut les coaguler de laire au col fémoral et ne doit attaquer que la corticale
manière préventive. antérieure du col. La lame de scie est ensuite déplacée
Choisir la hauteur de coupe est en fait très simple et vers le calcar qui doit être sectionné progressivement
extrêmement reproductible. Il suffit de poser la lame (figure 1.8). Si l'on a pris soin d'exercer au préa-
de la scie oscillante en avant et au contact du tubercule lable une traction modérée sur le membre inférieur,
Prothèse de hanche par voie antérieure 7

la corticale postérieure se casse sans que l'on ait besoin On peut exciser une synoviale hypertrophique ou
de la couper, épargnant les vaisseaux circonflexes et des ostéophytes gênants pour mieux s'exposer. Il est
diminuant ainsi de manière efficace le saignement. En totalement inutile d'exciser la capsule articulaire,
plaçant ensuite la jambe à 45° de rotation externe, on surtout au niveau de la «zona orbicularis». Cela
facilite l'exposition de la tranche osseuse du col fémo- augmente le saignement et la préservation intégrale
ral. Cette manière de couper le col fémoral est rapide, de la capsule articulaire rend la luxation postérieure
moins hémorragique et très reproductible. impossible.
L'extraction de la tête se fait simplement en intro- Le fraisage peut être initié. Le porte-fraise motorisé
duisant un tire-fond dans l'axe du col. On mobilise la est de préférence en baïonnette afin d'éviter d'une part
tête en libérant ensuite progressivement la capsule pos- tout conflit avec l'extrémité distale de l'incision, qui
térieure au bistouri électrique. Si l'incision est de très aurait pour effet d'abîmer les téguments, et d'autre
petite taille, il est préférable de retirer alors l'écarteur part un effet levier qui viendrait fraiser de façon exces-
de Beckmann pour ne pas stupidement endommager sive la paroi antérieure du cotyle. Il est possible de pla-
le tenseur du fascia lata en faisant des manœuvres de cer à l'intérieur du cotyle les fraises successives libres
force. et d'encliqueter ensuite le porte-fraise sur les fraises
Il faut ensuite placer de manière précise l'écarteur in situ. De la même manière, on peut retirer les deux
capsulaire. L'ouverture de la capsule a détaché un éléments séparément : d'abord le porte-fraise après
volet antérieur à charnière externe. La capsule de la l'avoir déclipsé, puis la fraise circulaire.
hanche est une structure épaisse et solide et la mettre Comme habituellement, le fraisage doit respecter
en tension grâce à un écarteur autostatique adapté est l'os sous-chondral et, si certaines zones apparaissent
judicieux. On évite ainsi l'utilisation d'écarteurs à bec peu avivées, il est préférable de les faire saigner à l'aide
qui peuvent endommager les structures musculaires, d'une curette agressive plutôt que de trop fraiser. Une
et on libère des mains devenues inutiles. On utilise fois le cotyle préparé, les cornes respectées et avivées
un écarteur de Charnley modifié dont les valves sont jusqu'à la proximité de l'arrière-fond acétabulaire, une
recouvertes à leur extrémité de spicules de 2 mm qui se cupule d'essai est mise en place, tout en sachant que,
plantent très facilement dans la capsule et s'agrippent par cette voie d'abord, il faut veiller à ni verticaliser
sur sa face profonde sans l'endommager. Il existe trois ni trop antéverser l'implant. L'implant doit être plutôt
valves : une valve très longue que ne sera utile que horizontal sous le sourcil acétabulaire afin de ne pas
chez les patients à l'indice de masse corporelle (IMC) entraîner de conflit avec le psoas. La cupule définitive
supérieur à 40, une valve moyenne que l'on place sous est impactée et soumise à une manœuvre d'arrache-
la capsule antérieure au ras de l'os et une valve plus ment. L'insert acétabulaire céramique ou polyéthylène
courte qui vient tendre le volet capsulaire en dehors. définitif est mis en place.
Avec un peu d'entraînement, si cet écarteur autosta-
tique est bien placé, il le sera pour le temps cotyloïdien
et fémoral sans que l'on ait besoin de modifier son Préparation fémorale
positionnement.
On ne touche pas à l'écarteur fixé à la capsule, mais
l'extension de table doit être réglée. Dans un premier
Préparation du cotyle temps, il faut mettre de la traction pour faire passer
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le bord postérieur du grand trochanter dans le cotyle.


Tout d'abord, l'extension de table est réglée afin que En effet, dans certains cas, le grand trochanter est
le membre inférieur soit légèrement ascendant. Le très saillant en arrière et, lors de la mise en rotation
membre inférieur est déjà en rotation externe de 45° externe, il peut se bloquer en arrière du cotyle, ren-
depuis l'extraction de la tête fémorale. Cette position dant l'extériorisation du fémur difficile. On peut alors
détend le psoas iliaque. appliquer prudemment une rotation externe de l'ordre
Si les valves de l'écarteur sont bien positionnées, le de 90° à 100° en aidant la manœuvre au niveau du
sourcil acétabulaire est visible ou palpé sur toute sa genou. On vérifie que le pousseur fémoral est placé en
circonférence. S'il est encore difficile de visualiser la position haute. La jambe est mise au sol et l'on vérifie
paroi antérieure du cotyle, il est possible de mettre un bien que la traction a été lâchée. En général, jambe
écarteur de Hohmann coudé au pied de l'épine iliaque au sol, il faut ajouter un «clic» de rotation externe.
antéro-inférieure. L'ensemble du croissant articulaire Le pied est souvent à 180° voire au-delà, mais cela ne
doit être visible. Le labrum et le ligament rond sont pose pas de problème particulier.
excisés, l'arrière-fond repéré et le ligament trans- Pour mieux voir la tranche de section cervicale, on
verse de l'acétabulum n'est en général pas sectionné. place en général un écarteur à bec sur le bord osseux
8 F. Laude

postérieur du col fémoral. Beaucoup de chirurgiens à 45°. Le porte-râpe travaille maintenant dans l'axe
essayent aussi de placer un écarteur appuyé sur le du futur col fémoral. La crête iliaque n'est plus un obs-
sommet du grand trochanter. Cela n'est utile que pour tacle au passage du porte-râpe et extérioriser le fémur
les tiges très longues que nous n'utilisons plus beau- pour éviter cet obstacle n'est donc plus utile.
coup aujourd'hui et son rôle principal est de protéger 3. L'augmentation de la rotation externe et l'absence
la peau et certainement pas de faire sortir le fémur. d'adduction jambe au sol simplifient les manipula-
En aucun cas nous ne pensons que le rôle d'un écar- tions. La table que nous avons dessinée avec son sys-
teur soit d'aider à extérioriser le fémur. C'est le rôle tème de mise en rotation externe à cliquet très pratique
de la table d'extension que de présenter le fémur et permet d'obtenir plus facilement une excellente rota-
de permettre sa préparation. C'est une des grandes tion externe. L'aide qui manipule une table de Judet
différences avec la technique sans table où l'écarteur classique (en fait la plupart des tables du marché) doit
sus-trochantérien participe agressivement à la «sortie» débloquer d'une main la poignée qui verrouillait la
du fémur ! rotation, puis augmenter la rotation au niveau du pied,
La libération de la capsule articulaire postérieure est puis verrouiller de nouveau la rotation. Cette manière
dans plus de 90 % des cas totalement inutile, car la de procéder ne permet pas d'obtenir une très bonne
préparation du fémur se fait dans presque tous les cas rotation externe et la seule solution pour s'exposer
sans chercher à propulser le fémur vers le haut. Ce que sans danger passe alors par la libération agressive des
certains appellent «release» capsulaire ne doit être fait parties molles. Certains auteurs [5, 7, 8] proposent la
que dans des cas très particuliers où la râpe ne peut libération systématique de toute la capsule postérieure
pas pénétrer facilement dans le canal médullaire. Il est et des tendons pelvitrochantériens. Avec une bonne
préférable de ne pas chercher à faire sortir vers le haut rotation externe, il devient inutile une fois la jambe au
le fémur. À partir du moment où les râpes passent – et sol de porter la hanche en adduction.
elles passent presque toujours –, la préparation habi- La quasi-disparition de la «release» postérieure, grâce
tuelle peut être faite. à une bonne table d'extension, permet donc de dimi-
Ce dernier paragraphe peut sembler choquant, mais, nuer les pertes sanguines, simplifie les manœuvres et
avec l'expérience, on s'aperçoit que la libération posté- rend la chirurgie plus rapide et efficace. Il est cependant
rieure qui était un moment important voire fondamen- indispensable de la connaître pour les cas rebelles et
tal de la préparation fémorale n'est donc que rarement difficiles. On peut ainsi proposer une libération séquen-
justifiée et elle nous semble inutile dans près de 90 % tielle qui va permettre de s'exposer (figures 1.9A,B) :
des cas (tableau 1.1). Les raisons qui expliquent cette • il faut avoir bien compris l'anatomie du fémur en
évolution sont au nombre de trois. rotation externe. Certains muscles ou structures cap-
1. La plupart des chirurgiens n'utilisent plus les très sulaires ne gênent jamais et il est inutile de les sacrifier.
longues tiges avec appui trochantérien imposant et les Ainsi, l'obturateur externe (OE) ne doit jamais être
résultats très encourageants de tiges plus courtes sont détaché du grand trochanter. Son insertion est malheu-
prometteurs. Leur utilisation se répand donc. reusement assez proche de celle de l'obturateur interne
2. Le porte-râpe doit été adapté à la voie antérieure (OI) que certains auteurs proposent de sectionner de
et se fixe à la râpe non pas dans l'axe de celle-ci, mais manière systématique ;

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Tableau 1.1
Fréquence de la libération de la capsule sur table orthopédique. 100 patients consécutifs de chirurgie
primaire indépendante de l'étiologie
Aucune libération capsulaire 83 cas

Section ligament pubofémoral 7 cas 90 cas

Section partielle ligament ischiofémoral 4 cas 94 cas

Section complète de la capsule postérieure 3 cas 97 cas

Libération de l'obturateur interne 3 cas 100 cas

Section du pyramidal 0 cas 100 cas


Prothèse de hanche par voie antérieure 9

Figure 1.9. Fémur en grande rotation externe et extension lors de la préparation fémorale.
On met en évidence les trois muscles rotateurs externes : obturateur externe (OE) ; obturateur interne (OI) ; muscle piriforme (Pi). A. Le ligament
pubofémoral est en bleu et le ligament ischiofémoral est en vert. Les 5 zones de libération séquentielle sont matérialisées par les flèches de 1 à
4. 1 : section du ligament pubofémoral qui facilite la mise en rotation externe et permet de latéraliser le fémur. 2 : section partielle minime du
ligament ischiofémoral qui améliore la vision de la tranche de section fémorale vers le grand trochanter sur une capsule de petite taille. 2,5 :
section complète de la capsule postérieure juste dans l'axe du col postérieur. Elle permet de faire monter partiellement le fémur. B. 3 : libération
partielle ou complète du tendon de l'obturateur interne qui permet de faire monter le fémur en avant (rarement utile sauf dans les révisions ou
certains cas complexe). 4 : section du tendon du muscle piriforme, jamais utile ou presque. La section de l'obturateur externe est totalement
inutile voire dangereuse et expose aux luxations postérieures !
© F. Laude

• le faisceau pubofémoral (1) de la capsule peut limi-


ter la rotation externe. Sa section au niveau du calcar
Choix de l'implant,
est assez logique ; calcul des longueurs
• la capsule postérieure (2 et 2,5) doit si possible être Le calcul des longueurs du membre inférieur peut
préservée ainsi que son expansion, la zona orbicularis. être un vrai souci pour les débutants. Ceux qui n'ont
De nombreux vaisseaux parcourent sa face postérieure jamais utilisé de table critiquent souvent le manque
et leur hémostase est difficile. On peut néanmoins faire de repère palpable et plus particulièrement la mesure
une petite section partielle de la capsule supérieure au niveau des malléoles. C'est un repère qui est mal-
plutôt en arrière en cas de col fémoral court pour bien heureusement très dépendant de la position du bassin
dégager cette zone et éviter de placer la tige en varus ; et il oublie totalement la version et l'offset frontal de
• dans certains cas complexes, il faut dégager l'inser-
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l'implant définitif. C'est ce qui a incité Joel Matta [6]


tion fémorale de l'obturateur interne (3) ; à utiliser de manière intensive l'amplificateur de bril-
• une libération excessive de la capsule en avant peut lance. La table radiotransparente qu'il utilise permet
endommager le muscle petit glutéal qui adhère de d'avoir une vision complète de la hanche sans arté-
manière intime à la partie supérieure de la capsule. Les fact et sur les appareils récents ; la grande taille des
lésions du petit glutéal sont à l'origine des ossifications récepteurs permet de voir toute la prothèse. En fai-
hétérotopiques ; sant un cliché avant l'intervention et un cliché avec les
• la section du tendon du pyramidal (4) ne se justifie implants d'essai en place, on peut obtenir un calcul de
jamais dans les cas habituels. la longueur et de l'offset très satisfaisant. La position
Avec un porte-râpe adapté qui fait un angle de stable en décubitus dorsal le permet facilement. La
45° avec la tige, il est en fait presque totalement inutile version de la tige fémorale est plus difficile à appré-
d'essayer de sortir le fémur, sauf à vouloir passer une cier. Néanmoins, cela demande une méthodologie
tige droite longue. stricte pour que les mesures soient reproductibles.
10 F. Laude

Les anciennes tables de Judet n'étaient pas radiotrans- Tombée dans un oubli relatif, cette voie d'abord
parentes et ne permettaient pas à nos maîtres d'utiliser n'était presque plus enseignée et l'école française a
cette astuce. oublié d'en parler. Ce sont finalement des chirur-
En utilisant la tête fémorale excisée comme outil de giens étrangers qui ont repris le flambeau et l'ont
mesure de la reconstruction prothétique, on obtient sortie de terre au début des années 2000. La plupart
presque le même niveau de précision. On peut aussi de ces chirurgiens n'ont pas eu accès aux travaux de
s'intéresser à l'antéversion naturelle du fémur et tenter l'école parisienne par manque de publications et ont
de la reproduire avec l'implant définitif. Les chirur- souvent tout réinventé, au travers de leur expérience
giens qui viennent de la voie postérieure ont l'habi- personnelle accumulée dans la pratique d'autres voies
tude de dire que l'implant définitif doit être parallèle d'abord. Pour celui qui pratique et a toujours pratiqué
au bord postérieur de col fémoral. Si l'on utilise le col cette voie d'abord depuis 25 ans, le résultat paraît sou-
et la tête du fémur comme modèle pour calculer offset vent curieux :
et version, il faut plutôt rechercher à être parallèle au • en premier lieu, l'accès à une bonne table ortho­
col antérieur. pédique était souvent impossible et beaucoup de
L'erreur avec cette technique réside principalement chirurgiens ont débuté sans l'aide de ce précieux ins-
dans la position de la cupule. On peut presque s'en trument. La solution passe par une installation plus
affranchir en creusant toujours le cotyle de la même complexe et une libération beaucoup plus agressive
manière jusqu'à l'arrière-fond. Le planning préopéra- des parties molles pour sortir et présenter le fémur à
toire permet alors de savoir où se place la tête pro- des portes-râpes venant des voies latérales ou posté-
thétique par rapport au centre de la tête fémorale rieures. La notion de libération agressive des parties
naturelle. molles vient de là ;
Depuis quelques années, il est aussi possible de faire • Joel Matta, qui avait compris l'intérêt de la table
un planning préopératoire en 3D en s'aidant d'un orthopédique, a eu la mauvaise idée de débuter son
scanner [9]. C'est probablement une solution d'avenir, expérience avec la prothèse de Zweymuller qui, il le
mais qui reste à valider. faut le reconnaître, n'est pas vraiment la tige la plus
adaptée à la voie antérieure. Il est ainsi tombé dans les
mêmes travers et a dû installer sur sa table un crochet
Fermeture élévateur de fémur ;
• dans ces conditions, il n'est pas vraiment surpre-
La fermeture est précédée d'une hémostase soi-
nant qu'entre éducation approximative [10], implant
gneuse. Après lavage, un drain de Redon est éven-
inadapté, technique en devenir, les résultats de la
tuellement mis en place pendant 24 heures. Cette
voie antérieure ne sont pas toujours à la hauteur et
fermeture s'effectue en quatre plans comportant un
les publications rapportant complications et difficul-
ou deux points sur la capsule, une suture de l'aponé-
tés opératoires sont nombreuses [11, 12]. La plupart
vrose du tenseur du fascia lata, un plan sous-cutané
des auteurs considèrent qu'une courbe d'apprentissage
et un plan cutané.
d'au moins 50 patients est nécessaire [13–15].
La rééducation comporte un premier lever le jour
Sauf à vouloir faire des voies d'abord vraiment
même de l'intervention. Les patients décident eux-
microscopiques, l'exposition et la préparation du
mêmes s'ils veulent utiliser des cannes anglaises pour
cotyle ne posent pas beaucoup de problèmes. Il est

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équilibrer leurs premiers pas. La plupart ne les utilise-
tout à fait possible de s'étendre vers le haut et d'aller
ront plus après quelques jours. Une bonne stimulation
chercher la crête iliaque. La vision du cotyle est très
de l'ensemble des fessiers qui n'ont pas été touchés par
différente de celle que l'on peut avoir par voie posté-
la voie d'abord est possible immédiatement.
rieure ; on distingue très bien la paroi postérieure du
cotyle et un peu moins bien la paroi antérieure. Il ne
Discussion faut pas hésiter à libérer le tendon réfléchi du droit
antérieur si l'exposition n'est pas satisfaisante. Dans la
La voie d'abord antérieure, après avoir été presque littérature, la gestion du cotyle par voie antérieure
totalement oubliée, revient sur le devant de la scène. ne suscite d'ailleurs pas vraiment d'afflux massif de
On peut lui trouver de nombreux avantages, mais on publications ; tout au plus discute-t-on de l'importance
peut aussi comprendre pourquoi finalement elle était de la précision qu'apporte la fluoroscopie [16, 17]
un peu tombée en désuétude. dans le positionnement du composant cotyloïdien.
Prothèse de hanche par voie antérieure 11

Les comparaisons entre voies d'abord sur ce point La diminution du taux de luxation prothétique est
mettent toutes en avant la précision qu'apporte l'uti- aussi un des points forts de la VA et on le retrouve
lisation de l'amplificateur de brillance [18]. Hélas, dans presque toutes les études [4, 20, 21].
cette aide précieuse n'est vraiment efficace que sur une L'utilisation de l'amplificateur de brillance pour
table d'extension radiotransparente, ce qui exclut les contrôler la position des implants semble être aussi
anciens modèles de table. un atout indéniable de la VA sur table orthopédique.
Les vrais soucis débutent donc lors de l'exposition C'est un argument que Joel Matta [6] a toujours mis
du fémur. Avec une bonne table et un bon porte-râpe, en avant et qui a remporté les suffrages aux États-Unis,
c'est finalement assez simple et dans 9 cas sur 10 l'inégalité de longueur postopératoire étant la pre-
on peut préserver en totalité la capsule postérieure mière raison de mise en cause judiciaire des chirur-
en ne cherchant surtout pas à faire monter le fémur. giens américains.
Les deux problèmes rapportés le plus souvent sont La diminution des lésions musculaires a été bien
une augmentation du saignement et des fractures du mise en avant par Bergin [27] en s'appuyant sur des
fémur et du grand trochanter [11, 19]. Ces complica- dosages comparatifs de la créatine kinase. Bremer [28],
tions sont en général le fait de la courbe d'apprentis- à l'aide d'IRM postopératoires comparatives, a conclu
sage de cette voie d'abord et semblent plus souvent que la VA est celle qui entraîne le moins de lésions
rapportées par ceux qui font cette chirurgie sans musculaires.
table d'extension. Matsuura [8] a très bien expliqué
dans un excellent article les structures anatomiques Conclusion
qui s'opposent à la libération du fémur. L'analyse
de la littérature montre que les meilleurs résultats On l'a donc compris : la vraie difficulté de la voie
rapportés sont ceux d'équipes pratiquant depuis antérieure, ce sont sa relative difficulté et surtout son
longtemps cette voie sur une table orthopédique et apprentissage. C'est une voie d'abord qui paradoxa-
connaissant bien les subtilités de l'exposition fémo- lement est la plus ancienne, mais n'a pas d'histoire.
rale [20, 21]. La plupart des chirurgiens qui la pratiquent ne l'ont
Nombreux sont les articles qui comparent la voie pas appris lors de leur cursus universitaire et se sont
antérieure (VA) à une autre voie [22–26]. Ces articles formés soit tout seuls, soit par le biais d'un compa-
ne sont pas toujours très clairs sur l'utilisation ou gnonnage expéditif [10]. Beaucoup de chirurgiens ont
non d'une table spécifique. On sent par ailleurs que découvert les limites de cette voie au travers de leur
les mauvais résultats que l'on retrouve dans certains taux de complications.
articles sont aussi le fait de chirurgiens débutants dans Depuis 10 ans, les tables spécifiques sont de nou-
cette approche : veau assez facilement disponibles ; toutes ne se valent
• par rapport à une voie latérale, en général, les pas, mais elles existent.
auteurs sont séduits par la VA. Les voies trans- Le vrai problème c'est surtout le manque d'experts
glutéales nécessitent une chirurgie soigneuse et les formateurs. Les centres universitaires en France qui
chirurgiens qui embrassent la VA sont en général très ont une expérience large et longue de cet abord se
satisfaits de la rapidité des suites et de l'absence de comptent sur les doigts d'une main et ils n'ont pas fait
boiterie postopératoire ; beaucoup de prosélytisme pour l'imposer.
• ceux qui viennent de la voie postérieure en général C'est cependant une excellente voie d'abord très élé-
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trouvent la chirurgie par VA plus longue et s'agacent gante qui permet une chirurgie anatomique, des suites
de la difficulté à gérer les longueurs. Ils reconnaissent rapides et un taux de luxation très bas.
cependant que les patients restent moins longtemps En la pratiquant régulièrement, le chirurgien va élar-
hospitalisés, lâchent les béquilles rapidement et gir ses indications et sera à même de traiter des cas
retrouvent une autonomie plus rapidement [23]. difficiles [29, 30].
12 F. Laude

nnexe 1 
Manipulation de la table orthopédique
Installation
– Pied fixé dans un bottillon uniquement du côté opéré. Bas de contention des deux côtés. Épilation minimale chez
les hommes, inutile chez les femmes.
– Mise en tension légère du membre inférieur opéré.
– L'autre jambe repose sur la table sans chercher à la tracter.
– n contre-appui sur le thorax du côté de la hanche opéré est utile pour éviter que la traction ne fasse basculer
le bassin.
Voie d'abord
– Pied et rotule au zénith.
– Très légère flexion utile au moment où l'on place les écarteurs. lle détend les structures musculaires antérieures.
L'aide met simplement la main sous le genou et le fléchit à 10°.
Section du col
– Traction : en général trois tours de manivelle.
– ès que la corticale antérieure et le calcar sont sectionnés : mise en rotation externe à 45°, soit 3 clics de rotation
externe. Il est possible de mettre un clic de rotation externe avant la coupe pour mieux dégager la face profonde et
inférieure du col, mais il faudra en tenir compte lors de la coupe.
Préparation cotyloïdienne
– 45° de rotation externe. On ne change rien à la traction.
Préparation fémorale
– Légère traction supplémentaire (entre 1 ou 3 tours de plus).
– On vérifie que le releveur de fémur est en place, ni trop haut ni trop bas. Il doit simplement être au contact de la
peau sans créer de pression.
– Mise en rotation externe maximale. Le chirurgien manipule le genou et l'aide non habillé suit le mouvement
au niveau du mécanisme de la table. n secouant le genou, on obtient un peu plus facilement une excellente
rotation externe.
– n mettant la jambe au sol, le système de traction se déverrouille tout seul et la panseuse met la jambe au sol.
Si la table est très haute (chirurgien de grande taille), il n'est pas nécessaire d'aller jusqu'au sol.
– Pas de mise en adduction.
– n général, il faut ajouter un clic de rotation externe jambe au sol. C'est souvent ce petit ajout de rotation
externe qui change tout et permet une exposition satisfaisante du fémur. Le système à cliquet est alors
un atout majeur.
Réduction

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– lle peut se faire aussi bien jambe au sol qu'après avoir remonté la jambe. La panseuse enlève la rotation externe.
Le chirurgien pousse la tête dans la cavité articulaire.
– Il peut être utile d'enlever le releveur de fémur, surtout en cas de pose d'une tige latéralisée.
Testing
– Jambe relevée ou en très légère extension, on demande 90° de rotation externe et la hanche ne doit pas se luxer
en avant, le col fémoral ne doit pas entrer en conflit avec le bord postérieur du cotyle.
Prothèse de hanche par voie antérieure 13

Réfé ences
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15

Voie antérieure : les difficultés


sans table orthopédique
C. BATAILLER, S. LUSTIG

Introduction La VA a un intérêt certain pour les suites postopéra-


toires comparativement aux approches classiques de
La voie directe antérieure (VA) de « Hueter-Gaine », prothèse totale de hanche (PTH). Cependant, avec le
décrite par Hueter puis Judet en 1985, connaît un développement de la voie postérieure (VP) mini-inva-
regain d'intérêt ces dernières années avec le développe- sive, les récentes études ne retrouvent que peu ou pas
ment de la chirurgie fast track. La popularité de cette de différence sur la rapidité et la qualité de récupéra-
voie d'abord a incité un certain nombre de chirurgiens tion postopératoire [4, 5].
de la hanche à changer leur approche chirurgicale. Actuellement, les résultats fonctionnels précoces des
Néanmoins, bien que la VA soit réputée pour avoir des patients opérés par VA sont comparables à ceux d'une
suites postopératoires plus simples pour le patient, elle VP mini-invasive, qui a l'avantage de la préservation
est également connue comme étant une voie d'abord de certains pelvitrochantériens et de la fermeture cap-
difficile, notamment sans table orthopédique. Est-il sulaire, technique chirurgicale présentant un niveau de
judicieux d'abandonner une approche chirurgicale difficulté et une exigence élevés également.
acquise au cours de nombreuses années de formation
pour une technique difficile et ayant un bénéfice à Réduction du risque de luxation
court terme modéré ? Certains arguments peuvent inci-
ter à ce changement d'approche. Quelles que soient les La préservation musculaire et le type de mouvements
raisons de l'apprentissage de cette voie d'abord, une luxants rendent la VA à très faible risque de luxation
technique chirurgicale rigoureuse et précise est néces- prothétique. Sari Ali a rapporté les taux de luxations
saire pour la réaliser sans augmenter le risque de com- publiés, cumulés, avec des cupules conventionnelles :
plications. De nombreuses astuces et notions doivent 4 % par VP sur 10 187 PTH ; 1,6 % par une approche
être connues pour rendre cette voie d'abord aussi pra- transtrochantérienne sur 1052 PTH ; et 2 % par une
tique que les autres, même sans table orthopédique. Ce approche antéro-externe sur 7473 PTH. Le taux de
chapitre présentera l'intérêt de la VA sans table ortho- luxation par VA était, lui, de 1,5 % sur 1764 PTH,
pédique et les différentes étapes importantes de cette avec un taux de révision pour instabilité de 0,11 % [6].
technique chirurgicale. Bien que des études récentes sur la VP mini-invasive
retrouvent des taux très faibles de luxations postopé-
Quels sont les avantages de la ratoires, cela ne concerne que les abords mini-invasifs
avec réparation capsulaire, conservation de certains
voie antérieure « Hueter-Gaine » ? pelvitrochantériens, et utilisation de têtes prothétiques
de diamètre élevé [7]. La VA reste l'approche avec le
Préservation musculaire plus faible risque de luxation prothétique.
et récupération rapide du patient
Cette voie d'abord est la seule qui permette une pré- Pourquoi réaliser une voie
servation de toute la musculature périarticulaire.
Cette caractéristique séduisante intervient sur la récu-
antérieure sans extension de table ?
pération rapide du patient et la stabilité de l'articu- La table d'extension avec traction est une aide pré-
lation. Plusieurs études ont été publiées, démontrant cieuse pour réaliser cette voie d'abord. Elle permet de
ses avantages : réduction du risque de luxation pro- faciliter l'exposition fémorale et de réduire le nombre
thétique, diminution des douleurs postopératoires, d'aides opératoires. Cependant, elle est loin d'être
diminution de la durée d'hospitalisation, récupéra- indispensable et présente certains inconvénients, non
tion rapide avec retour précoce à la vie active [1–3]. retrouvés avec l'utilisation d'une table standard.

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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16 C. Bataille , S. u tig

Contrôle de la longueur gie est un atout majeur. En début d'apprentissage, son


utilité est indiscutable, avec une excellente restitution
des membres inférieurs de l'égalité de longueur des membres inférieurs.
durant la chirurgie
C'est, à notre sens, l'un des arguments principaux Contrôler la stabilité de l'implant
pour la réalisation d'une PTH sans table à traction et
en décubitus dorsal. Le patient est en décubitus dorsal L'installation du patient en décubitus dorsal avec
avec les deux membres inférieurs libres et accessibles. les membres inférieurs mobilisables permet de tester
Le chirurgien peut donc facilement vérifier la longueur facilement, avec les implants d'essai et définitif, la sta-
des membres inférieurs au niveau des malléoles, tout bilité antérieure et postérieure, les amplitudes articu-
au long de l'intervention (figure 2.1). L'objectif de la laires et d'éventuels conflits entre le grand trochanter
PTH étant un retour à une vie active, une inégalité de et l'acétabulum ou l'ischion (figure 2.1).
longueur des membres inférieurs (ILMI) invalidante est
considérée par le patient et par le chirurgien comme un Réduction du risque
échec. Les différentes études avec table orthopédique
retrouvent une ILMI moyenne entre 1 mm et 7 mm,
de fracture fémorale
avec parfois jusqu'à 11 % d'ILMI supérieures à 10 mm Les forces de rotation exercées sur le fémur par une table
[8–11]. Certaines ILMI majeures peuvent même néces- à traction sont majeures et peuvent être à l'origine de frac-
siter une révision prothétique [8, 11]. Les études sans tures fémorales lors de sa préparation et de l'implantation
table orthopédique retrouvent au maximum une ILMI de la tige. Ce risque de fracture fémorale diaphysaire est
moyenne de 2 mm [12]. bien moindre sans table à traction. Cette complication
Quelle que soit la voie d'abord, une planification pouvant nécessiter une, voire plusieurs reprises chirurgi-
précise et une technique bien maîtrisée permettent cales et aboutir à un handicap majeur à terme, elle doit
de restaurer l'égalité de longueur des membres infé- être prise en compte lors du choix thérapeutique.
rieurs, dans la majorité des cas. Cependant, dans les
cas complexes avec des déformations importantes des
membres inférieurs, une planification difficilement
Complexité
réalisable, ou une intervention se déroulant différem- La table d'extension nécessite, comme pour tout maté-
ment de la planification, la possibilité de pouvoir tester riel chirurgical, un certain temps d'apprentissage pour
la longueur des membres inférieurs en cours de chirur- une utilisation correcte. Pour des chirurgiens et leurs

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A

B C
Figure 2.1. Installation en décubitus dorsal sur une table standard, avec les deux membres inférieurs mobiles, afin de pouvoir
contrôler la longueur des membres inférieurs (A) et tester les implants (B, C).
Voie antérieure : les difficultés sans table orthopédique 17

équipes habitués à une installation sur table standard, rieur prend appui sur la corne postérieure et permet de
l'ajout d'une table à traction augmente la difficulté maintenir le fémur en arrière. Il y a peu de risque de
de l'intervention, avec des risques de mauvais usage lésion, notamment de fracture, avec cet écarteur.
pouvant engendrer des complications graves pour le Médialement, l'écarteur prend appui sur la corne
patient, notamment des fractures fémorales. La courbe antérieure du cotyle. Il est parfois nécessaire de com-
d'apprentissage concerne alors non seulement la tech- mencer avec un petit contre-coudé pour libérer la
nique chirurgicale, mais également l'utilisation de capsule et le labrum antérieur avant de pouvoir glis-
cette table spécifique. ser l'écarteur adéquat. Il faut éviter de tirer trop fort
sur cet écarteur au risque de fracturer la corne anté-
Quelles astuces pour l'exposition rieure du cotyle. Pour éviter ces fractures, le contre-
et l'implantation acétabulaires ? coudé ne doit pas être agressif et avoir un appui
suffisamment profond. Le tendon du psoas passe à
L'exposition acétabulaire présente habituellement peu proximité de cet écarteur qui ne doit pas être trauma-
de difficultés par VA, puisque l'acétabulum est dans tisant pour lui lors de sa mise en place ou en raison
l'axe de la cicatrice. Néanmoins, certains patients d'une traction trop zélée. Il peut être remplacé par
sont plus difficiles à exposer, du fait d'une absence un écarteur autostatique qui s'appuie sur la capsule
de relaxation musculaire ou d'une morphologie par- antérieure et le grand trochanter en arrière, mais qui
ticulière (coxa vara et col court par exemple). Comme procure une moins bonne vision que l'écarteur anté-
pour toute voie d'abord, une exposition suffisante est rieur (figure 2.2B).
indispensable pour travailler l'acétabulum de façon Le dernier contre-coudé est positionné sous le liga-
optimale et s'assurer un bon positionnement ainsi ment transverse, à la jonction corne postérieure-bord
qu'une tenue satisfaisante de l'implant définitif. supérieur du trou obturateur (TO). Pour sa mise en
place, la jambe doit être tractée dans l'axe, afin de
n jeu d'écarteurs dégager le fémur de l'emplacement de l'écarteur. Ce
dernier repousse le fémur et le col restant vers l'ar-
En début d'apprentissage, l'exposition acétabulaire rière et le bas. Parfois, sa mise en place est difficile et
doit être optimale. Nous conseillons de réaliser une l'exposition insuffisante. Une libération de la capsule
capsulectomie plutôt qu'une capsulotomie. Certains inférieure, en commençant à la pointe de la corne pos-
chirurgiens se servent de la capsule pour appuyer leurs térieure, peut être nécessaire pour détendre les tissus
écarteurs. Les voies d'abord antérieures mini-invasives mous et pouvoir glisser l'écarteur sous le bord supé-
avec très peu d'écarteurs doivent être réservées aux rieur du TO et abaisser ainsi le fémur.
chirurgiens aguerris. Ces différents écarteurs permettent de contrôler
Trois écarteurs contre-coudés de forme adaptée aisément les contours osseux du cotyle et donc le
sont conseillés (figure 2.2A). Le contre-coudé posté- positionnement de la cupule.
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A B
Figure 2.2. Acétabulum en cours de préparation, exposé par trois écarteurs contre-coudés, sur les cornes antérieure et postérieure
et sous le ligament transverse (A) ou avec un contre-coudé et un écarteur autostatique (B).
18 C. Bataille , S. u tig

Préparation de l'acétabulum Quelles astuces pour l'exposition


Habituellement, l'incision est dans l'axe du porte- et l'implantation fémorales ?
fraise ; il y a donc peu de difficultés pour orienter
son fraisage et positionner la cupule. Cependant, le Choisir ses patients en début
col fémoral restant peut parfois gêner le fraisage en d'apprentissage ; exclure quelques
poussant vers le haut le porte-fraise. C'est surtout
dans ces situations qu'un porte-fraise décalé, que cer-
patients ensuite
tains utilisent systématiquement, permet de fraiser En début d'expérience, il est préférable de choisir les
dans le bon axe, sans être contraint par le fémur et hanches qui se prêtent bien à une VA [13]. La princi-
les tissus mous. pale difficulté de la VA est d'obtenir une exposition
Le passage des fraises de diamètres élevés peut fémorale satisfaisante, et le fémur est plus ou moins
s'avérer difficile en cas d'espace de travail réduit. Une difficile à exposer. Le choix de la voie d'abord dépend
traction sur la jambe lors du passage des fraises peut de l'expérience du chirurgien. Le cas idéal est une
effacer un peu plus le col fémoral et permettre leur patiente de 60 ans, peu musclée avec une hanche en
entrée sans forcer. Pour les fraises de diamètre impor- coxa valga et un col plutôt long, ce qui facilite à la
tant, il est possible de les rentrer à la main ou avec fois la préparation du cotyle et l'exposition du fémur.
une pince Kocher, et de les fixer secondairement sur le Les hanches en coxa vara avec col court sont les plus
porte-fraise. Une manœuvre identique peut être effec- difficiles à exposer car l'espace de travail est réduit.
tuée également pour les sortir. Cette astuce évite de Certains patients semblent également mal se prêter
léser les tissus mous, voire le col fémoral, en essayant à une VA, en particulier les patients présentant une
de rentrer en force. obésité gynoïde ou une anatomie très altérée en rai-
son d'une malformation de hanche ou d'antécédents
chirurgicaux.
Positionnement de la cupule
Si un chirurgien a l'habitude des PTH en décubitus Position de l'incision
latéral, le changement de position du patient et de voie
d'abord peut perturber fortement les repères visuels. Une incision mal positionnée peut être un handi-
Les repères corporels extérieurs (orientation du porte- cap majeur pour l'implantation de la tige. Elle crée
cotyle par rapport à l'axe de la jambe et du bassin) un trajet en chicane supplémentaire pour la tige. Un
ont une fiabilité limitée. Les contours osseux du cotyle soin tout particulier doit donc être pris pour la réa-
doivent être bien visualisés grâce au jeu des écarteurs, liser. Une incision suffisamment latérale permet de
afin de pouvoir restituer l'antéversion naturelle du protéger le nerf fémorocutané, de faciliter le travail
patient. En début d'apprentissage, un contrôle sco- du cotyle et peut faciliter l'exposition fémorale sans
pique est recommandé [13]. table à traction en s'aidant d'une adduction de hanche
La principale complication de l'implantation de la qui déporte le fémur légèrement latéralement. Nous
cupule est un excès ou une insuffisance d'antéversion, réalisons l'incision à mi-distance entre l'épine iliaque
exposant au risque d'instabilité antérieure (en cas antérosupérieure et le grand trochanter, centrée sur le

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d'excès) ou d'instabilité postérieure et/ou de conflit relief du tenseur du fascia lata.
cupule-psoas (en cas d'insuffisance). L'acétabulum
étant situé dans l'axe de l'incision, un excès d'anté- xposition fémorale
version est une erreur rapidement commise. Mais par
crainte de la luxation antérieure, on peut être enclin La difficulté est d'extérioriser suffisamment le canal
à ne pas antéverser suffisamment la cupule et avoir cervical pour préparer la diaphyse dans son axe et évi-
un débord antérieur. Aucune étude n'a démontré un ter de prendre un appui excessif sur le trochanter ou les
taux plus important de conflit du psoas après PTH par corticales, ce qui expose aux fractures peropératoires.
VA que par une autre voie d'abord. Néanmoins, c'est Connaître la position optimale du membre inférieur
une complication connue de la VA et que nous avons pour cette exposition et les éléments anatomiques qui
constatée chez nos patients [12]. Il est donc primordial vont s'y opposer est donc primordial.
de se fier aux contours osseux du cotyle natif pour Le fémur doit être en rotation externe maximale,
l'orientation de la cupule définitive (sauf dysplasie acé- vertical (axe transversal vertical) et en adduction.
tabulaire marquée). On dispose également du ligament La mise en rotation externe de la hanche est freinée
transverse pour déterminer l'antéversion. par la mise en tension de la capsule antéromédiale,
Voie antérieure : les difficultés sans table orthopédique 19

un contact entre le grand trochanter et l'ischion, puis un repositionnement des écarteurs à plusieurs reprises,
par la capsule antérolatérale. Le fémur verticalisé, la en particulier de l'élévateur fémoral.
capsule antérolatérale et les pelvitrochantériens s'op- Tout au long de l'opération, le chirurgien doit rester
posent alors à l'extériorisation du fémur. attentif à la tension appliquée sur l'élévateur fémoral.
La première étape est de dégager le grand trochanter Un excès de force exercée sur le sommet du grand tro-
de l'ischion et de la paroi postérieure du cotyle. Une chanter peut entraîner une fracture du grand trochan-
traction latérale et antérieure de la métaphyse grâce ter, principale complication de la VA. L'avantage de
à un crochet introduit dans le col fémoral permet ce l'absence de table à traction à ce moment-là est que la
dégagement. Par la suite, le MI peut être porté pro- position et la force exercée sur la jambe peuvent être
gressivement en rotation externe, ce qui expose la face facilement contrôlées et adaptées. Dans la majorité
médiale du col fémoral et du grand trochanter. La des cas, ces fractures sont des avulsions du sommet du
capsule antéromédiale peut brider la rotation externe grand trochanter ne nécessitant pas d'ostéosynthèse.
et doit être libérée. La libération essentielle est alors Pour éviter des fractures plus étendues, quelques pré-
celle de la capsule antérolatérale sur la face médiale cautions sont nécessaires : avoir un élévateur fémoral
du grand trochanter, jusqu'à visualiser l'insertion ten- adapté, pas trop agressif ; avoir un appui suffisamment
dineuse du petit fessier (figure 2.3). Progressivement, profond en arrière du grand trochanter pour répartir
le fémur est sorti à l'aide du crochet inséré dans le les contraintes ; ne pas forcer pour élever le fémur ;
canal médullaire. Si une tension importante persiste évaluer régulièrement la tension exercée sur le grand
lors de ce mouvement, la libération est insuffisante et trochanter par l'aide. Une mauvaise exposition doit
doit être optimisée. Dans de rares cas où la tension est pouvoir être améliorée sans nécessité de forcer ; il faut
trop importante pour extérioriser le fémur, il est par- dans ce cas reprendre les étapes de l'extériorisation
fois nécessaire de désinsérer les tendons des muscles fémorale, améliorer la libération des parties molles et
obturateurs interne (surtout), voire externe (en règle modifier la position de la jambe.
non). Le membre inférieur est alors positionné sous
le membre inférieur controlatéral «  en quatre de Position du patient
chiffre », c'est-à-dire en rotation externe et adduction
(figure 2.4). Un élévateur fémoral est inséré sur le bord En cas d'exposition non satisfaisante, certaines adap-
latéral du grand trochanter pour finir de l'élever. Cette tations de la position du patient peuvent être réalisées
exposition fémorale doit être progressive, avec parfois et doivent être connues :
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A B
Figure 2.3. Exposition du canal cervical avant le travail du fût fémoral sur une hanche gauche.
. n crochet est utile pour faire passer le fémur en avant de la corne postérieure du cotyle. B. a libération a été réalisée au niveau de la
capsule médiale (flèches noires), de la capsule antérolatérale dans la fossette trochantérienne (étoile blanche). 'élévateur fémoral (étoile
noire) permet alors une exposition fémorale correcte. ors des expositions difficiles, si l'élévation n'est pas permise, une désinsertion de
l'obturateur interne voire externe peut être réalisée (flèche blanche).
20 C. Bataille , S. u tig

A B
Figure 2.4. A, B. La position en « figure 4 » avec adduction et rotation externe de la jambe opérée permet d'accéder à la tranche
de section du col et d'effectuer la préparation fémorale dans de bonnes conditions.

• l'hyperextension de hanche permet d'accentuer


l'élévation fémorale ; elle est particulièrement utile
lorsque la cicatrice est assez médiale, proche de
l'épine iliaque antérosupérieure. Ses inconvénients
sont : une contrainte supplémentaire dans l'installa-
tion du patient avec nécessité de pouvoir « casser » la
table d'opération, un risque de tension excessive sur
le grand trochanter et donc de fracture, une tension
excessive sur le tenseur du fascia lata et sur les tissus
mous à l'origine d'une réduction de l'espace de travail,
voire de lésions musculaires ;
• une augmentation de l'adduction de la hanche peut
latéraliser le canal cervical et le positionner dans l'axe
de la cicatrice, en particulier en cas d'incision assez
Figure 2.5. Préparation du fût fémoral grâce à un porte-râpe à
latérale, à distance de l'épine iliaque antérosupérieure. double offset, permettant d'être dans l'axe du fût et de diminuer
ainsi les contraintes sur le grand trochanter et les corticales.

nstrumentation adaptée
Positionnement de la tige
Le passage des râpes d'essai (la dernière servant sou-
vent de tige d'essai) puis de la tige définitive nécessite de L'antéversion de la tige peut sembler difficile à régler

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leur faire passer une chicane à l'entrée du fût fémoral, devant la position inhabituelle de la jambe. Pour un
ce qui fait toute la difficulté de cette voie d'abord sans fémur dit « normal », non dysplasique notamment,
table orthopédique. En effet, spontanément, le fémur nous nous fions volontiers à l'antéversion native du
est médial et en profondeur. Les écarteurs et la posi- col, en alignant la tige sur la corticale postérieure du
tion de la jambe permettent de le rapprocher de l'axe col fémoral. Pour les patients avec antéversion anor-
de la cicatrice. L'utilisation de porte-râpes décalés avec male du col, l'antéversion de la tige doit être contrôlée
un double offset (antéropostérieur et médiolatéral) par la position du genou et notamment de la patella.
facilite fortement le passage des râpes et nous semble
indispensable pour travailler le fémur dans l'axe, sans Contrôle radioscopique avec la râpe
léser les tissus mous à proximité (figure 2.5).
Les premiers passages dans le canal médullaire
d'essai puis avec l'implant définitif
doivent être faits avec des instruments courbes et En début d'apprentissage, il est conseillé de réaliser un
mousses, sans utilisation du marteau, afin d'éviter les contrôle radioscopique peropératoire après implanta-
fausses routes. tion de la râpe d'essai (figure 2.6) [13].
Voie antérieure : les difficultés sans table orthopédique 21

réaliser une ostéosynthèse diaphysaire adaptée et éten-


due. La VA est réputée ne pas offrir cette possibilité. À
la partie distale de l'incision, les muscles vaste latéral
et droit de la cuisse se rejoignent au niveau du petit
trochanter, et les branches nerveuses du nerf fémoral
traversent cette zone de médial en latéral. Une exten-
sion de la voie d'abord pourrait léser ces branches et
entraîner une dégénérescence du muscle vaste latéral
[14]. Néanmoins, de récents travaux décrivent une
possible extension de l'incision de « Hueter-Gaine »,
qui pourrait permettre de prendre en charge des com-
plications fémorales per- ou postopératoires [15].
Différents types de fractures peuvent survenir et ne
relèvent pas de la même prise en charge. Les fractures
fémorales peropératoires les plus fréquentes sont les
fractures du grand trochanter (jusqu'à 2,9 % [10,
12, 16–18]), les fractures métaphysaires au niveau du
calcar (jusqu'à 1 % [3, 10, 17]) et les fausses routes
(jusqu'à 1,4 % [12, 18]) découvertes durant l'inter-
vention. Le traitement de ces différentes fractures sont
habituellement assez simples et ne nécessitent pas de
Figure 2.6. Contrôle scopique peropératoire avec l'implant acé- changer de voie d'abord.
tabulaire définitif et la râpe d'essai fémoral, permettant de
Les fractures du grand trochanter sont surtout des
contrôler la hauteur de coupe fémorale et le bon positionne-
ment des implants. avulsions du sommet du grand trochanter et ne néces-
Ce contrôle est recommandé en début d'expérience. sitent pas d'ostéosynthèse (figure 2.7) [19]. Un suivi
clinique et radiologique sera nécessaire pour s'assurer
Les points à vérifier sont : de l'absence de déplacement secondaire nécessitant
• la hauteur de la coupe fémorale car on se heurte à une reprise chirurgicale. Les fractures plus étendues du
des difficultés en cas de coupe osseuse du col fémo- grand trochanter peuvent nécessiter une ostéosynthèse
ral trop proximale (exposition acétabulaire difficile en par cerclages, tout à fait réalisable par la même voie
arrière, difficultés de réduction avec allongement) car d'abord. Si les cerclages s'avéraient insuffisants, une
mal estimée lors de son contrôle peropératoire ; ostéosynthèse nécessiterait un second abord latéral,
• la taille adaptée de l'implant. L'implantation de la mais jusqu'à présent un seul cas a été rapporté dans
tige peut être difficile et on peut la sous-estimer en rai- la littérature à notre connaissance et était survenu en
son d'un travail non optimal du fût fémoral ; début d'apprentissage [20].
• la position de la tige en varus/valgus. Un moignon Les fractures métaphysaires au niveau du calcar
de col persistant latéralement pousse la tige en varus. seront traitées de la même manière que par toutes les
autres voies d'abord, c'est-à-dire une ostéosynthèse
par cerclage sans modification du type d'implant. Ce
La voie antérieure permet-elle
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geste ne pose aucune difficulté par une VA.


de faire face à une fracture Les fausses routes sont décelées rapidement au cours
fémorale ? de l'intervention et ne nécessitent pas d'ostéosyn-
thèse. Dans la littérature et dans notre expérience, ces
La crainte d'une fracture fémorale peropératoire fausses routes n'ont nécessité aucune prise en charge
s'explique par les forces importantes exercées sur le particulière ni changement du type d'implant, à condi-
fémur lors de son exposition et de son travail, mais tion d'être dépistées en peropératoire et d'utiliser des
également par les difficultés de prise en charge de ces implants sans ciment.
éventuelles fractures. Cependant, dans la majorité des Les fractures diaphysaires par VA sans table ortho-
études comparant VA et VP, les taux de fractures pero- pédique sont finalement rares [3, 13]. Dans la littéra-
pératoires sont faibles et comparables pour ces deux ture, elles peuvent atteindre jusqu'à 1,3 % [16]. Deux
approches [2, 12]. cas doivent être distingués :
Les voies d'abord latérales et postérieures peuvent • dans le premier cas, la fracture est simple, proxi-
être prolongées distalement sans difficulté, pour male, oblique, permettant une ostéosynthèse par
22 C. Bataille , S. u tig

du muscle vaste latéral, ce qui permettrait de réaliser


une ostéosynthèse. Cette voie d'abord a été testée sur
des sujets cadavériques. Une telle extension pourra
peut-être dans le futur être utilisée chez des patients
présentant des fractures fémorales sur PTH par VA.
Néanmoins, cette approche ne permet pas d'améliorer
suffisamment l'exposition du canal cervical pour pou-
voir implanter une éventuelle tige de révision.

Conclusion
La VA de « Hueter-Gaine » sans table orthopédique
présente plusieurs avantages intéressants, notamment
pour tester la stabilité prothétique et pour le contrôle
de la longueur des membres inférieurs. Comme toute
technique exigeante, elle nécessite de bien connaître les
étapes et les astuces qui facilitent sa réalisation. Il est
primordial pour débuter cette approche de connaître
ses difficultés potentielles afin de les anticiper.
Figure 2.7. Radiographie de face d'une PTH gauche, avec avul- L'exposition fémorale reste l'étape la plus exigeante,
sion du sommet du grand trochanter, qui n'a pas nécessité exposant à un risque de fracture fémorale si elle est
d'ostéosynthèse. mal réalisée. La prise en charge des fractures fémo-
u cours du suivi, aucun déplacement de cette fracture n'a été rales les plus fréquentes ne pose pas de difficultés par
constaté et le patient n'a eu aucune séquelle. Cette complication VA. Les fractures diaphysaires nécessitent en revanche
est classique en début d'expérience au moment de l'exposition
la réalisation d'une seconde voie d'abord latérale ou
fémorale et doit être évitée par une libération capsulaire adaptée.
postérieure.

cerclages uniquement, sans nécessiter de tige de révi- Réfé ences


sion (on gardera une tige de première intention en
[1] Barrett WP, Turner SE, Leopold JP. Prospective randomized
press-fit ou cimentée). Une seconde voie d'abord laté-
study of direct anterior vs postero-lateral approach for total
rale courte permettra de réduire la fracture sur une hip arthroplasty. J Arthroplasty 2013 ; 28 : 1634–8.
râpe d'essai et de réaliser l'ostéosynthèse par cerclage. [2] Higgins BT, Barlow DR, Heagerty NE, et al. Anterior vs. pos-
La voie d'abord antérieure peut alors être conservée terior approach for total hip arthroplasty, a systematic review
pour implanter la tige définitive. Des contrôles radios- and meta-analysis. J Arthroplasty 2015 ; 30 : 419–34.
[3] Nakata K, Nishikawa M, Yamamoto K, et al. A clinical
copiques sont évidemment nécessaires ;
comparative study of the direct anterior with mini-posterior
• dans le second cas, la fracture est étendue et com- approach : two consecutive series. J Arthroplasty 2009 ; 24 :
plexe, nécessitant une ostéosynthèse étendue par 698–704.
plaque et/ou une tige de révision. Il n'est alors pas [4] Poehling-Monaghan KL, Kamath AF, Taunton MJ, et al. Direct

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raisonnable de réaliser une seconde approche latérale anterior versus miniposterior THA with the same advanced
perioperative protocols : surprising early clinical results. Clin
uniquement pour l'ostéosynthèse. L'approche anté-
Orthop Relat Res 2015 ; 473 : 623–31.
rieure doit être refermée. Le patient est positionné [5] Rodriguez JA, Deshmukh AJ, Rathod PA, et al. Does the direct
en décubitus latéral et une voie d'abord postérieure anterior approach in THA offer faster rehabilitation and com-
étendue sera réalisée. L'intervention se déroulera alors parable safety to the posterior approach ? Clin Orthop Relat
comme pour une fracture périprothétique standard. Res 2014 ; 472 : 455–63.
[6] Sariali E, Leonard P, Mamoudy P. Dislocation after total hip
Des fractures fémorales postopératoires lors du
arthroplasty using Hueter anterior approach. J Arthroplasty
séjour à l'hôpital ou dans les trois premiers mois ont 2008 ; 23 : 266–72.
pu être rapportées, possiblement secondaires à une [7] Maratt JD, Gagnier JJ, Butler PD, et al. No difference in dislo-
fissure peropératoire passée inaperçue. Elles néces- cation seen in anterior vs posterior approach total hip arthro-
sitent habituellement une reprise chirurgicale, réalisée plasty. J Arthroplasty 2016 ; 31(9 Suppl) : 127–30.
[8] Anterior Total Hip Arthroplasty Collaborative I,
de la même manière que lors des fractures fémorales
Bhandari M, Matta JM, et al. Outcomes following the
diaphysaires peropératoires. single-incision anterior approach to total hip arthroplasty :
Nogler et Thaler [15] ont récemment décrit une pos- a multicenter observational study. Orthop Clin North Am
sible extension de cette incision en passant en dehors 2009 ; 40 : 329–42.
Voie antérieure : les difficultés sans table orthopédique 23

[9] Matta JM, Shahrdar C, Ferguson T. Single-incision anterior [15] Nogler MM, Thaler MR. The direct anterior approach for hip
approach for total hip arthroplasty on an orthopaedic table. revision : accessing the entire femoral diaphysis without endan-
Clin Orthop Relat Res 2005 ; 441 : 115–24. gering the nerve supply. J Arthroplasty 2017 ; 32 : 510–4.
[10] Muller DA, Zingg PO, Dora C. Anterior minimally invasive [16] den Hartog YM, Mathijssen NM, Peters SJ, et al. The ante-
approach for total hip replacement : five-year survivorship rior supine intermuscular approach for total hip arthroplasty :
and learning curve. Hip Int 2014 ; 24 : 277–83. reducing the complication rate by improving the procedure.
[11] Woolson ST, Pouliot MA, Huddleston JI. Primary total hip Hip Int 2015 ; 25 : 28–33.
arthroplasty using an anterior approach and a fracture table : [17] Rudiger HA, Betz M, Zingg PO, et al. Outcome after proximal
short-term results from a community hospital. J Arthroplasty femoral fractures during primary total hip replacement by the
2009 ; 24 : 999–1005. direct anterior approach. Arch Orthop Trauma Surg 2013 ;
[12] Batailler C, Fary C, Batailler P, et al. Total hip arthroplasty 133 : 569–73.
using direct anterior approach and dual mobility cup : safe [18] Tsukada S, Wakui M. Lower dislocation rate following total
and efficient strategy against post-operative dislocation. Int hip arthroplasty via direct anterior approach than via pos-
Orthop 2017 ; 41(3) : 499–506. terior approach : five-year-average follow-up results. Open
[13] Homma Y, Baba T, Kobayashi H, et al. Safety in early expe- Orthop J 2015 ; 9 : 157–62.
rience with a direct anterior approach using fluoroscopic [19] Homma Y, Baba T, Ochi H, et al. Greater trochanter chip frac-
guidance with manual leg control for primary total hip arthro- tures in the direct anterior approach for total hip arthroplasty.
plasty : a consecutive one hundred and twenty case series. Int Eur J Orthop Surg Traumatol 2016 ; 26 : 605–11.
Orthop 2016 ; 40 : 2487–94. [20] Spaans AJ, van den Hout JA, Bolder SB. High complication
[14] Grob K, Monahan R, Gilbey H, et al. Distal extension of the rate in the early experience of minimally invasive total hip
direct anterior approach to the hip poses risk to neurovascular arthroplasty by the direct anterior approach. Acta Orthop
structures : an anatomical study. J Bone Joint Surg Am 2015 ; 2012 ; 83 : 342–6.
97 : 126–32.
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25

La voie antérolatérale en décubitus


dorsal : quelles astuces ?
P. HENKY

La voie d'abord antérolatérale de la hanche a été


décrite par Sir Reginald Watson Jones dès 1936 [1].
Elle utilise l'intervalle anatomique entre le moyen fes-
sier ou gluteus medius (GM) et tenseur du fascia lata
(TFL), mis en évidence pour la première fois par Sayre
en 1894.
Il s'agit donc d'une voie d'abord très ancienne utili-
sée bien avant la voie transglutéale de type Hardinge
(notamment à Strasbourg depuis 1967) pour l'im-
plantation de prothèses totales de hanche (PTH).
L'objectif de ce texte est d'en présenter les possibilités
et limites.
Cette voie est anatomiquement non invasive puisqu'il
n'y a aucune section tendineuse ou musculaire. Elle Figure 3.1. Installation et champage (hanche gauche).
a retrouvé la faveur des chirurgiens dans les années
2000 [2–5], notamment dans une variante (Röttinger) Il faut éventuellement bloquer le bassin du côté
en décubitus latéral [3] que nous n'aborderons pas ici. controlatéral afin d'éviter la translation du côté
La voie antérolatérale se fait classiquement en opposé de patients particulièrement légers lors de la
décubitus dorsal sur table normale, qui doit idéale- préparation de l'acétabulum.
ment comporter la possibilité d'abaisser les membres Chez les patients très obèses, il faut parfois récliner
inférieurs. le tablier abdominal afin de bien dégager la zone de la
voie d'abord.
Quels sont les détails
et les astuces techniques Mise en place des champs
de la voie antérolatérale Cette mise en place doit dégager l'épine iliaque anté-
en décubitus dorsal ? rosupérieure (EIAS) qui constitue un excellent repère
de longueur, couvrir la région génitale et permettre une
Installation et mise en place extension vers le fémur le cas échéant.
des champs (figure 3.1) Outre l'instrumentiste, il faut idéalement un aide
placé en face du chirurgien, qui prendra en charge les
Une planification rigoureuse doit toujours précéder écarteurs antérieurs et assurera le positionnement du
l'intervention. Très importante pour ce type de voie, membre inférieur lors du temps fémoral.
elle permet, en particulier, de déterminer exactement
la hauteur de l'ostéotomie du col fémoral
Incision
L'incision est classiquement arciforme ouverte en
Installation avant, démarrant sous l'EIAS, passant en arrière du
Le patient est installé en décubitus dorsal, au bord de trochanter et longeant le bord externe du fût fémoral
la table du côté à opérer, la fesse débordant légèrement selon les besoins [1].
en dehors de la table ; ce point est particulièrement Nous utilisons actuellement une voie modifiée laté-
important lors de la préparation du fémur. rale inspirée de celle décrite par Burwell et Dan [4–6],

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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26 P. Henky

qui est légèrement oblique d'arrière en avant et qui


débute à 3 à 4 cm au-dessus et en arrière du grand
trochanter (figure 3.2). Elle permet de mieux « faire
sortir » le fémur et facilite sa préparation, mais réduit
un peu le jour sur l'acétabulum. Elle permet aussi de
trouver plus facilement l'interstice entre GM et TFL,
l'incision croisant le GM. Enfin, elle évite de se perdre
en avant du TFL, essentiellement chez les cas avec
rotation externe fixée. Cette incision peut bien sûr être
prolongée vers le bas autant que nécessaire, permet-
tant ainsi de faire face à toute complication fémorale.
En cas d'abord plus extensif de l'acétabulum, il peut
être nécessaire de détacher un peu le faisceau antérieur
du GM du grand trochanter. Figure 3.2. Incision et interstice GM-TFL (gluteus medius-
tenseur du fascia lata).
Abord articulaire
L'aponévrose est ouverte dans l'axe de l'incision, puis
un doigt (voir figure 3.2) est introduit dans l'inters-
tice entre le GM et TFL, et l'intervalle entre les deux
muscles peut alors être disséqué en faisant l'hémostase
d'une petite branche de l'artère circonflexe latérale
(rameau ascendant). Cette dissection peut se faire à
l'aide d'un écarteur de Hohman étroit qui est glissé en
avant et au ras de la capsule jusqu'au bord antérieur
de l'acétabulum.
Il faut alors sectionner le fascia innominé.
Deux écarteurs de Hohman sont placés de part et
d'autre du col fémoral pour protéger les parties molles
adjacentes. Figure 3.3. Exposition de la tête fémorale et positionnement
La capsule antérieure peut être incisée en H ou le des écarteurs (hanche gauche).
plus souvent excisée, sans répercussion ultérieure sur
la stabilité prothétique (figure 3.3).
Cela donne une excellente vision sur la tête fémorale pératoire en protégeant toujours les parties molles
permettant une ostéotomie première du col fémoral adjacentes à l'aide de l'écarteur de Hohman médial
assez haute pour ne pas être gêné par la capsule arti- qui a été déplacé au bord antéromédial de l'acéta-
culaire lors de l'extraction de la tête fémorale à l'aide bulum. Il peut être nécessaire de visualiser le petit
d'un tire-bouchon. Nous ne faisons jamais de luxation trochanter afin de parfaitement évaluer la hauteur
première de la tête fémorale pour prévenir une lésion de cette coupe.

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du nerf glutéal supérieur [6, 7] par étirement. Il faut alors écarter le vaste latéral à l'aide d'un
En cas de difficulté, il ne faut pas hésiter à inciser la écarteur de Langenbeck et bien mettre en évidence la
capsule plus largement au ras de l'acétabulum. En cas capsule médiale et le ligament iliofémoral. Pour y par-
de rétraction sévère des parties molles ou de protru- venir, il faut idéalement placer le membre en discrète
sion, une double ostéotomie du col, avec extraction adduction et flexion, ce qui relâche la capsule médiale
préalable de la tranche osseuse à l'aide d'un ciseau et permet de la sectionner plus facilement. Le calcar
courbe de Muller, peut faciliter l'extraction de la tête est alors palpable et l'ostéotomie définitive peut être
fémorale. Il ne faut faire aucune manœuvre de force réalisée avec une grande précision en fonction de la
lors de ce temps afin de préserver le nerf glutéal supé- planification préopératoire. Avec l'expérience, ce geste
rieur, qui peut être étiré, et nous n'hésitons pas à mor- devient inutile.
celer la tête fémorale si la force nécessaire à l'extraction
est trop importante, notamment chez les patients très
musclés ou dans les coxarthroses protrusives [7–9].
Temps cotyloïdien
Une fois la tête fémorale extraite, la coupe défi- La vue sur l'acétabulum est directe et son exposition
nitive peut être réalisée selon la planification préo- se fait à l'aide de trois écarteurs de Hohman étroits
La voie antérolatérale en décubitus dorsal : quelles astuces ? 27

(antérieur, antéromédial et postérieur). L'écarteur pos- opératoire qui doit être parfaitement horizontale à ce
térieur doit idéalement avoir une double courbure per- stade, à 40° d'inclinaison et 15 à 20° d'antéversion.
mettant d'effacer le fémur qui est porté en adduction Il faut toujours pousser la fraise vers l'arrière, la ten-
et flexion légère (figure 3.4). Afin de positionner cet dance naturelle étant de fraiser la paroi antérieure de
écarteur, une traction douce sur le membre inférieur, l'acétabulum du fait d'un effet de levier des fraises sur
effectuée par l'instrumentiste, est parfois nécessaire. le fémur. L'avantage du décubitus dorsal est l'extrême
Cette voie donne accès en l'agrandissant à l'ensemble fiabilité des repères et la stabilité du patient sur la table
de l'acétabulum ainsi qu'à la racine de la branche d'opération.
ischiopubienne. Il est également possible de ruginer Il faut toujours procéder à l'ablation première des
la face externe de l'aile iliaque pour poser sans diffi- ostéophytes antérieurs à l'aide d'un ciseau courbe,
culté un anneau de Burch-Schneider ou de Kerboull, faute de quoi l'introduction de la fraise peut être
en sachant que cette extension est limitée à 3 à 4 cm difficile et, lors du positionnement de chaque fraise,
en direction proximale. De grandes reconstructions l'aide situé au pied de la table doit exercer une traction
de l'acétabulum ne sont donc pas réalisables par cet douce, pour faciliter le passage de la fraise.
abord. Afin de faciliter l'exposition, il peut être utile La cupule, qui peut être cimentée ou impactée, est
de détacher un peu le faisceau antérieur du GM de son alors mise en place, idéalement à l'aide d'un porte-
insertion trochantérienne ainsi que nous l'avons déjà cupule ayant un manche à double courbure de type
décrit plus haut. Müller, afin de ne pas être gêné par le quadriceps et
Le fraisage (figure 3.5) peut se faire classiquement, le fémur. En cas de cupule avec insert prémonté et de
avec des fraises droites non décalées dont l'orientation coupe haute du col, ce temps peut être difficile.
est aisée ; elle prend pour repère le bord de la table Après impaction, il faut toujours contrôler la cou-
verture antérieure de la cupule afin de minimiser le
risque de conflit antérieur avec le psoas ou le droit
antérieur, la capsule ayant été excisée.
Une autre option pour faciliter le passage des fraises
consiste à glisser un rouleau de champs sous le genou en
portant le fémur en adduction-flexion, ce qui détend les
structures antérieures. Lors de changements de cupule
cotyloïdienne avec prothèse fémorale en place, cette
astuce est particulièrement utile car elle permet d'effa-
cer le col de la prothèse qui peut être placé en arrière
et en dehors de l'acétabulum, l'écarteur postérieur à
double courbure repoussant l'implant fémoral en place.

Temps fémoral
Figure 3.4. Exposition de l'acétabulum (hanche gauche). L'exposition du fémur constitue la principale difficulté
dans cette voie d'abord [3, 4, 10]. Elle est particuliè-
rement problématique chez les patients obèses et très
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musclés ainsi que dans les hanches en coxa vara. Le


relâchement anesthésique doit être maximal lors de ce
temps opératoire.
La coupe définitive du col peut encore être vérifiée à
ce moment-là en se fondant sur le petit trochanter qui
peut être dégagé si nécessaire, ce qui donne accès en
même temps au tendon du muscle psoas. Avec l'expé-
rience, nous restons le plus souvent en intracapsulaire.
La position du malade doit être contrôlée et la fesse
doit toujours déborder légèrement en dehors de la
table ; sinon, le patient doit impérativement être repo-
sitionné. Ce temps nécessite un aide supplémentaire
afin de positionner le membre inférieur en adduc-
Figure 3.5. Fraisage de l'acétabulum (hanche gauche). tion, flexion, genou fléchi à 90°, la jambe croisant
Le gluteus medius ou moyen fessier est en avant-plan. le membre controlatéral à l'horizontale (figure 3.6).
28 P. Henky

Figure 3.7. Moyen fessier et coupe de col après pose des écarteurs.
oter la position latérale de l'écarteur inférieur.

Figure 3.6. Position de la jambe.


oter l'abaissement du membre inférieur opposé et la position
de l'aide.

Cette position déterminera l'antéversion donnée à la


tige fémorale. Cela permet de détendre les structures
vasculonerveuses antérieures et de les éloigner, contrai-
rement aux techniques qui étendent la cuisse [3, 4].
Au même moment, la table doit être « cassée » à
hauteur du bassin et le membre inférieur controlatéral
abaissé de 30° [4, 10]. Cela permet d'élever le sommet
Figure 3.8. Les râpes.
du grand trochanter et facilite l'exposition de la coupe
fémorale (voir figure 3.6). Il faut souvent compléter Lorsque cette exposition est parfaitement acquise,
l'incision de l'aponévrose en haut car elle bride l'expo- la préparation du fût fémoral à l'aide des râpes peut
sition du grand trochanter. débuter. Pour notre part, nous utilisons des râpes en
Un écarteur de Hohman est alors placé en arrière deux parties, proximale et distale (figure 3.8) qui faci-
du col fémoral, et un autre au sommet du col en litent considérablement cette préparation pour les tiges
avant du GM dans la fossette digitale. Ce dernier cimentées [10]. Les râpes proximales sont introduites en
écarteur doit rester latéral pour ne pas sectionner le vara, puis amenées dans la bonne position afin d'éviter
faisceau antérieur du GM, mais simplement le récli- d'endommager le GM. Lorsque la portion proximale

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ner (figure 3.7). est préparée, il devient aisé de passer les râpes distales.
Si nécessaire, la capsule supérieure et postérieure Pour les tiges droites non cimentées, en revanche,
peut alors être sectionnée, facilitant l'exposition et il est très difficile de ne pas endommager le faisceau
évitant la rupture de la pointe du trochanter chez les antérieur du GM, surtout chez les patients musclés.
patients très ostéoporotiques ou en cas de coxa vara. La technique de Röttinger [3] en décubitus latéral
Dans les cas extrêmes, il faut parfois sectionner les facilite l'exposition de la coupe fémorale par l'hype-
pelvitrochantériens et le tendon du psoas pour faire rextension du fémur et autorise plus facilement l'utili-
« monter » le fémur en cas de rétraction majeure, ce sation de tiges droites à fort encombrement. Le recours
qui n'a pas de répercussion sur la stabilité ultérieure de aux tiges courtes permet de rester parfaitement intra-
la hanche ; ce geste est très rarement utile. capsulaire sans lésion du GM et c'est la solution que
La difficulté d'exposition de la coupe fémorale est nous avons retenue (figure 3.9).
essentiellement liée au volume, à l'orientation et au Après réduction de la tige d'essai, une radioscopie
caractère plus ou moins fibreux du muscle GM qui, peut aisément être réalisée si nécessaire afin de vérifier
rappelons-le, est un muscle penné devenant de plus en la taille de la prothèse, son positionnement et la hau-
plus fibreux avec l'âge. teur de coupe [4].
La voie antérolatérale en décubitus dorsal : quelles astuces ? 29

intervenir rapidement en cas de problème, intuber et


ventiler un patient sous rachianesthésie par exemple,
poser un cathéter central en peropératoire sans pro-
blème et contrôler sa position à l'aide de la radioscopie
s'il le faut.
Cela autorise la réalisation de PTH bilatérales en un
temps en préparant d'emblée les deux champs opératoires.
Le risque de compression neurologique posturale
est très faible du fait de la facilité et de la stabilité de
l'installation.
Enfin, le confort du patient est maximal lors d'inter-
ventions réalisées sous rachianesthésie.

Figure 3.9. Préparation du fémur.


Faible risque vasculonerveux
Le caractère naturellement non invasif de cette voie
ne met en jeu aucune section musculaire et reste à dis-
tance de tous les éléments vasculonerveux.
Le seul risque est antérieur lors du positionnement
de l'écarteur de Hohman antéromédial du fait de la
proximité de l'artère fémorale et du nerf fémoral.
Nous ne déplorons qu'une parésie transitoire du nerf
fémoral dans notre expérience, et ce après un allonge-
ment de 4 cm dans une luxation congénitale ancienne.
Le nerf sciatique est quant à lui très éloigné de la zone
opératoire ; l'aide qui tient la jambe lors du temps fémo-
ral doit en revanche faire attention à ne pas comprimer
le nerf fibulaire commun sur le membre controlatéral.
Figure 3.10. Prothèse en place, discrètes lésions du GM.
Stabilité prothétique
La réduction fémorale peut être difficile en cas d'uti- Le risque de luxation est extrêmement faible. Il est
lisation de têtes de grand diamètre, et doit toujours dans notre expérience de 0,15 % avec des têtes de
être accompagnée par le chirurgien à l'aide d'un réduc- 28 mm et moins de 0,1 % avec des têtes fémorales
teur afin d'éviter d'accrocher la tête sur le rebord supé- de 32 mm, permettant d'éviter la surenchère dans la
rolatéral de l'acétabulum, ce qui peut provoquer une taille des têtes, et ce d'autant plus que des têtes de plus
fracture du fémur par effet came (figure 3.10). de 32 mm sont très difficiles à réduire.
La mesure de la longueur des membres inférieurs est Ce taux est très inférieur à ceux retrouvés classique-
particulièrement aisée en décubitus dorsal et peut se
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ment dans la littérature, qui vont de 0,2 à 5 % selon


faire en utilisant le bord supérieur des rotules, voire la voie d'abord. Dennis [11] et Siguier [12] confir-
en mesurant comparativement la distance EIAS-talon. ment la moindre incidence des luxations dans les voies
Enfin, il faut toujours tester la stabilité et l'ab- antérieures et seules les mini-voies postérieures avec
sence d'effet came postérieur en extension en fin réparation peuvent approcher ces taux au prix de l'uti-
d'intervention, un conflit col/cupule pouvant avoir des lisation de têtes de grand diamètre.
conséquences désastreuses pour les couples dur/dur. Cette bonne stabilité s'explique probablement par la
préservation du GM et de son innervation, par l'ab-
Pourquoi utiliser sence d'atteinte des pelvitrochantériens et la fiabilité
cette voie d'abord ? de l'orientation des implants du fait du positionne-
ment en décubitus dorsal.
Installation Nous avons pratiquement cessé de donner des
consignes de prévention des luxations depuis l'intro-
Le décubitus dorsal facilite l'accès au patient par tous duction d'un programme fast-track sans conséquences
les intervenants, notamment l'anesthésiste qui peut significatives sur le taux de luxation [13, 14].
30 P. Henky

Possibilités d'extension ceptibles de rester douloureuses et d'entraîner une boi-


terie persistante.
sur le versant fémoral Elles surviennent pratiquement toujours chez des
Ces possibilités sont très importantes, autorisant la patients très âgés ostéoporotiques avec hanche en coxa
synthèse d'éventuelles fractures périprothétiques par vara.
cerclages, vis ou plaques en étendant simplement L'utilisation de tiges courtes, ainsi que la libération
l'incision vers le bas et en réclinant le vaste latéral en plus importante de la capsule postérieure ont pratique-
avant. ment fait disparaître cette complication.
Lors de reprises de prothèse, la réalisation d'un volet
fémoral extensif est possible ; l'extraction du ciment Ossifications périprothétiques
par voie endomédullaire est en revanche difficile du
fait de la position ascendante du fût fémoral et du fait Il s'agit d'une complication classique des voies anté-
de la présence du GM. La voie de Röttinger semble rieures [16] que nous n'avons que très peu rencontrée,
préférable dans ce cas. probablement du fait de l'utilisation systématique
d'anti-inflammatoires non stéroïdiens pendant 7 jours,
ce qui semble être la durée minimale pour prévenir
Rapidité de récupération cette complication [17].
La marche est souvent possible sans cannes dès le deu- Nous n'avons noté dans notre expérience qu'une
xième ou troisième jour postopératoire sur de courtes seule ossification de stade 4 de Brooker qui a nécessité
distances, comme en attestent de nombreuses séries [14]. une reprise chirurgicale.

Risque d'atteinte Fausses routes


du nerf glutéal supérieur et fractures fémorales
Le risque est très faible, ce qui explique que les boite- Nous ne déplorons aucune fausse route ou fracture du
ries que l'on observait parfois au troisième mois posto- fémur très certainement du fait de l'utilisation de tiges
pératoire avec les voies transmusculaires ont disparu. courtes et de la recherche première systématique du fût
fémoral à l'aide d'une curette mousse.
La tendance naturelle dans cette voie d'abord, du
Inconvénients fait de l'obstacle que représente le moyen fessier, est de
variser et d'antéverser la tige fémorale.
Difficulté Dans une étude portant sur 130 cas tirés au hasard,
nous avons retrouvé 3,9 % de tiges de type Kerboull
Cette voie est difficile chez les patients obèses, tra-
implantées en varus de plus de 3°, ce qui correspond
pus et musclés, avec un risque dans ces cas de lésions
aux données de la littérature pour ce type d'implant
importantes du faisceau antérieur du moyen fessier.
[5, 17]. Au niveau du cotyle, l'inclinaison moyenne
Il ne faut pas hésiter dans de tels cas à transformer
était de 41,7° (32–50°).
l'abord en voie de Bauer ou de Thomine [14,15], sur-

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tout lorsque l'exposition du fémur est incertaine, avec
un risque de fausse route. Utilisation de tiges droites
Il faut impérativement un excellent relâchement
musculaire nécessitant une curarisation poussée sous
de longueur standard
anesthésie générale. La systématisation des rachianes- L'utilisation de tiges droites type Corail ou Zweymüller
thésies dans le cadre du fast-track nous a permis de peut être à l'origine de lésions importantes du GM en
contourner ce problème. cas de préparation insuffisante de l'exposition.
Il faut impérativement un aide supplémentaire L'exposition de la coupe du col doit être parfaite
parfaitement formé et musclé, chargé de prendre en avant de commencer la préparation fémorale.
charge le membre inférieur pendant le temps fémoral.
Conclusion
Fractures du grand trochanter Nous utilisons cette voie d'abord dans toutes nos pro-
Nous déplorons 0,5 % (4/700) de fractures du grand thèses totales de hanche de première intention sans
trochanter qui doivent être réparées, car elles sont sus- limite d'indication, mais avec quelques difficultés :
La voie antérolatérale en décubitus dorsal : quelles astuces ? 31

• chez les patient très obèses et musclés et dans cer- La principale complication que nous avons rencon-
taines hanches en coxa vara. L'utilisation de tiges trée est la fracture du sommet du grand trochanter,
courtes a permis de lever cette contre-indication rela- dont la conséquence est souvent une boiterie persis-
tive ; ces cas doivent cependant être évités en début tante et une consolidation très difficile à obtenir si la
d'expérience ; fracture est négligée lors de sa survenue.
• les luxations congénitales de hanches sont elles aussi Cette voie est naturellement non agressive pour les
un challenge et impliquent une longue expérience de structures musculaires et vasculonerveuses, autorisant
cette voie ; une récupération rapide postopératoire comparable à
• l'utilisation de tiges droites non cimentées peut être celle d'une voie antérieure directe.
à l'origine de lésions importantes du GM ; Le décubitus dorsal est une position stable, rapide à
• nous l'utilisons aussi dans les reprises simples mettre en œuvre, facilement reproductible, autorisant
de cupule et dans les reprises fémorales complexes un accès aisé au patient pour tous les intervenants,
car elle permet la réalisation d'un volet fémoral quelles que soient les circonstances. Il permet la réa-
complémentaire ; lisation de prothèses bilatérales en un temps et des
• elle atteint en revanche ses limites dans les grandes contrôles radioscopiques en cas de problèmes.
reconstructions acétabulaires au vu de ses faibles pos-
sibilités d'extension en zone proximale.

Réfé ences
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33

Voies directes antérolatérales


F.H. DUJARDIN

Introduction directes antérolatérales étaient les mieux adaptées à


ces objectifs : prothèse de petit diamètre, full PE et
Le choix d'une prothèse totale de hanche (PTH) n'est meilleur compromis face aux complications évitables.
pas univoque. Des écoles différentes ont fait des choix
différents, appuyés sur des raisons diverses. C'est ce Quelle est la technique des voies
choix arthroplastique qui doit – en premier lieu – être
considéré et conditionner la technique chirurgicale
directes antérolatérales ?
adaptée, apportant le meilleur compromis entre les Cette famille de voies antérolatérales, maintenant
avantages et inconvénients des différentes stratégies et qualifiée de voies directes latérales (DL), comporte
en particulier des différentes voies d'abord possibles. de nombreuses variantes. Elles traversent le gluteus
Nous restons fidèles aux prothèses type métal/plas- medius ou moyen fessier et sont alors qualifiées de
tique de petit diamètre, 22 ou 28 mm, avec un implant transglutéales (Hardinge et dérivés) ou contournent
dépourvu de métal back, en d'autres termes une pro- son bord antérieur (Watson-Jones et dérivés). On peut
thèse type Charnley ou plus récemment une prothèse les regrouper en quatre grands types.
RM. Ce choix provient de quatre arguments : 1. La voie de Hardinge est la plus connue [1]. Cette
• qualité des résultats de court terme observée de fort voie populaire dans les pays anglo-saxons tente de
longue date ; préserver une continuité entre le bord antérieur du
• qualité des résultats de long terme qui – à condition moyen fessier qui est soulevé et le vaste latéral en
de respecter les principes fondamentaux – est large- conservant un surtout fibreux au bord antérieur du
ment reconnue, probablement grâce aux qualités de grand trochanter (figure 4.1). La réalité anatomique
déformation et d'amortissement de l'implantation acé- de cette « continuité » est très incertaine. En effet, le
tabulaire « full PE » ; vaste latéral se termine en haut plus en profondeur
• tolérance de l'implantation : les observations que le moyen fessier, s'insérant sous le gluteus mini-
publiées par l'équipe lilloise ont montré qu'une part mus ou petit fessier et sur la capsule. La continuité
importante des prothèses explantées, même pour com- musculofibreuse entre vaste latéral et moyen fessier
plications septiques, présentait des traces d'un conflit est donc extrêmement fragile. Cela explique à nos
antérieur. Ce type de conflit est extrêmement délétère yeux que cette voie entraîne parfois des séquelles dou-
pour les arthroplasties comportant un couple dur/dur loureuses localisées ou une déficience de force muscu-
ou pour les arthroplasties pour lesquelles l'acétabulum laire de l'abduction, d'autant que, dans la description
comporte un métal back. Le tout polyéthylène, sous princeps de Hardinge lui-même, la discision muscu-
réserve de ne pas induire d'effet came, tolère ce type laire est proche de la verticale, se rapprochant ainsi
d'impingement antérieur ; dangereusement des rameaux d'innervation du moyen
• le dernier avantage de ce choix arthroplastique s'ap- fessier [2].
puie sur la facilité de la révision souvent limitée au 2. Une variante technique tente de pallier la faiblesse
versant acétabulaire, sans difficulté technique majeure de la continuité entre vaste latéral et moyen fessier en
si les patients ont été surveillés régulièrement et que les soulevant un petit fragment osseux préservant de part
lésions osseuses sévères ont pu être prévenues. et d'autre les insertions de ces deux muscles à la façon
Une fois ce choix arthroplastique fait, il faut déter- d'une minitrochantérotomie digastrique. Cette voie
miner la meilleure voie d'abord permettant de mini- semble avoir été peu évaluée. À titre personnel, j'ai
miser les complications évitables : luxation, fracture repris un grand nombre de patients ayant été opérés
peropératoire, malposition, douleurs et séquelles fonc- par cette technique. J'ai souvent constaté une pseu-
tionnelles diverses, neuropathiques ou musculaires. darthrose de ce petit fragment osseux antérieur, mais,
Cette analyse bibliographique avait pour but de très généralement, sans aucune conséquence clinique
réunir les arguments récents montrant que les voies et notamment pas de douleur locale.

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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34 F.H. Dujar in

Quels sont les détails techniques


de la voie de Thomine ? [3]
Bases anatomiques
Les fondements anatomiques de cette voie d'abord ont
été recensés et contrôlés [2] ; ils concernent l'architec-
ture du moyen fessier et son innervation, conjointe de
celle du tenseur du fascia lata. Les points essentiels
sont les suivants.
La branche caudale du nerf glutéal supérieur che-
mine à la face profonde du moyen fessier qu'elle
innerve, à une distance du grand trochanter qui n'a
jamais été mesurée à moins de 40 mm et qui va en
augmentant depuis son origine au bord postérieur du
muscle jusqu'à sa terminaison antérieure vers le ten-
seur du fascia lata [2]. Sa distribution secondaire se
fait par trois à quatre branches longues dont seules les
plus postérieures ont pu être concernées (une fois sur
20 dissections) par la discision du faisceau antérieur
du moyen fessier dans l'axe de ses fibres, en avant du
tendon faisceau postérieur, sur 4 cm à partir du bord
supérieur du grand trochanter. La distribution de l'ap-
port artériel est analogue à celle de l'innervation.
Figure 4.1. Voie de Hardinge [1]. Le faisceau antérieur du moyen fessier comporte
© Cyrille Martinet. dans son épaisseur une lame tendineuse intramus-
culaire renforcée par des fibres arciformes au voisi-
3. Une autre solution a été proposée par Thomine, nage de l'insertion trochantérienne. Cette lame est en
avec une hémimyotomie antérieure du moyen fes- arrière en continuité avec le bord antérieur du tendon
sier – c'est cette voie que nous décrirons plus en détail du faisceau postérieur qui s'insère sur le sommet tro-
ci-après [3]. C'est celle que nous utilisons en routine chantérien ; elle s'étend dans le muscle sur une hau-
depuis plus de 20 ans et dont les grandes lignes sont les teur moyenne de 55 mm à partir du grand trochanter
suivantes : [2]. Ainsi, le faisceau antérieur du moyen fessier offre
• le bord antérieur du moyen fessier est désinséré, les conditions d'une réparation musculaire résistante ;
sans chercher à conserver de continuité avec le vaste le tendon du petit fessier dans le plan sous-jacent est
latéral, à la différence de la voie de Hardinge ; également accessible à la suture.
• la discision du moyen fessier est beaucoup plus anté-
rieure, dans l'axe des fibres de ce muscle, approxima- Technique [3]
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tivement à l'union tiers antérieur-tiers moyen, au bord
antérieur d'une lame tendineuse que contient l'inser- L'intervention telle qu'elle est décrite ici a toujours été
tion du moyen fessier. Cette discision oblique en haut réalisée en décubitus latéral.
et en avant permet de l'éloigner des trajets nerveux et, L'incision cutanée longitudinale externe est centrée
de plus, facilite l'exposition antérolatérale ; sur le grand trochanter, sa partie distale suit le relief du
• il faut éviter les décollements entre plan profond du fût fémoral sous-jacent ; sa partie proximale s'incurve
gluteus maximus ou grand fessier et moyen fessier, et pour devenir postérolatérale ; sa longueur est propor-
en dessous entre moyen fessier et petit fessier, en par- tionnelle à l'adiposité du patient.
ticulier à la partie haute de la discision où ces muscles L'éventail fessier avec le fascia lata, identifié sans
sont très adhérents l'un à l'autre. Ce respect des plans décollement, est incisé longitudinalement sur le relief
facilite et solidifie la fermeture finale. de la face externe du trochanter et de la face externe
4. Le quatrième groupe de voie directe latérale est issu de sous-jacente de la diaphyse fémorale en distal, de
la technique décrite par Watson-Jones, en particulier sous façon à exposer la partie haute du vaste latéral ; en
sa forme réduite moderne de Rottinger – cette technique proximal, l'incision se poursuit par une discision des
est étudiée dans un autre chapitre de ce livre. fibres charnues du grand fessier (figure 4.2).
Voies directes antérolatérales 35

Figure 4.2. Voie de Thomine, d'après l'article princeps [3].


En décubitus latéral, incision externe et postérolatérale, ouverture du fascia lata et discision du deltoïde fessier.

Les deux valves du plan superficiel écartées par un Cette première valve musculaire est réclinée vers
écarteur autostatique, l'éventail charnu du moyen fes- l'avant et vers le dedans, ce qui expose en arrière le
sier est exposé. Sur celui-ci sont identifiés en arrière paquet adipeux déjà décrit ; il est refoulé pour expo-
le tendon au sommet du grand trochanter et en avant ser la face supérieure du moyen fessier dans sa partie
le bord antérieur horizontal qui est dégagé dans sa postérieure et le muscle piriforme qui lui fait suite en
partie juxtatrochantérienne. Les fibres charnues du arrière ; en avant, la coalescence normale entre moyen
moyen fessier sont exposées dans sa partie postérieure et grand fessiers est respectée.
par une incision du mince feuillet qui représente sur ce Le moyen fessier est mobilisé selon une incision qui a
site l'aponévrose fessière profonde ; en avant, les adhé- la même forme générale en L que l'incision précédente
rences entre celle-ci, le fascia lata et les fibres les plus avec une branche postérieure transversale le séparant
antérieures du moyen fessier sont respectées. du piriforme et une antérieure à direction antéropos-
Environ 1,5 cm en avant du sommet du grand tro- térieure le détachant de son insertion trochantérienne
chanter repéré par le tendon du faisceau postérieur du (figure 4.4). La section des fibres tendineuses les plus
moyen fessier qui s'y insère, les fibres charnues du fais- antérieures du moyen fessier ouvre un espace décol-
ceau antérieur sont discisées près du bord supérieur du lable précapsulaire dont le fond est occupé par la cap-
trochanter, ce qui permet d'identifier la présence de la sule, nue en dedans. Cet espace décollable peut être
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lame fibreuse intramusculaire qui arme en profondeur ouvert avec une spatule qui fait apparaître les adhé-
ce faisceau antérieur. Cette discision localisée est com- rences entre la capsule à sa face supérieure et la face
plétée par une incision au bistouri puis au-delà du distal profonde du moyen fessier. Ces adhérences sont levées
vers le proximal par un clivage mousse entre les fibres du progressivement au bistouri, ce qui permet de récliner
moyen fessier en direction céphalique sur environ 4 cm à vers le haut et vers l'avant le petit fessier de la même
partir du bord supérieur du trochanter (figure 4.3A). La manière qu'a été récliné le moyen fessier.
traversée musculaire est confirmée par l'irruption dans En arrière, il existe un espace décollable aisément
l'incision d'un paquet adipeux qui occupe constamment identifiable entre les muscles pelvitrochantériens et
l'espace séparant en arrière moyen fessier et grand fessier. la face postérieure de la capsule. Celle-ci est ainsi
La section du moyen fessier est complétée ensuite exposée jusqu'à ce que soit reconnu en dedans le ten-
d'arrière en avant en recourbant l'incision le long du don réfléchi du droit de la cuisse s'il existe encore et
bord supérieur puis antérieur du grand trochanter à surtout que soit reconnaissable au toucher le relief
environ 0,5 cm de l'insertion osseuse et jusqu'au bord du sourcil cotyloïdien. Pour cette exposition capsu-
antérieur et inférieur du moyen fessier préalablement laire, les valves musculaires peuvent être maintenues
identifié (figure 4.3A). écartées provisoirement par deux clous de Steinman
36 F.H. Dujar in

A B
Figure 4.3. D'après [3].
. Les fibres charnues du faisceau antérieur du moyen fessier sont discisées sur 4 cm en direction caudocraniale et postéro-antérieure.
ecourbée en avant, l'incision du faisceau antérieur du moyen fessier se prolonge à 0,5 cm du grand trochanter jusqu'au bord antérieur
du muscle. B. La branche postérieure de l'incision siège dans l'aire de la lame aponévrotique intramusculaire (figurée en pointillé) et évite
la branche caudale du nerf glutéal supérieur.

plantés dans l'aile iliaque au-dessus du rebord coty-


loïdien. Cet écartement expose la face supérieure de la
capsule et sa face antérieure depuis le cotyle jusqu'au
grand trochanter.
Une capsulotomie frontale est réalisée au zénith de
la saillie céphalique et cervicale du rebord cotyloïdien
jusqu'à à la fossette digitale. Près du rebord cotyloïdien, se
branche une incision sagittale juxtacotyloïdienne s'éten-
dant sur 1 cm vers l'arrière et sur quelques centimètres
vers l'avant. À son extrémité latérale, est branchée une
section antérieure le long de l'insertion capsulaire sur la

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ligne intertrochantérienne antérieure et prolongée jusqu'à
obtenir une liberté suffisante en rotation externe pour la
luxation antérieure de la tête fémorale (figure 4.5).
Une spatule ou un ciseau courbe glissé dans l'inter-
ligne permet d'abaisser celle-ci avant la mise en rota-
tion externe qui permet la luxation antérieure. Durant
ce temps, les premiers clous de Steinman utilisés sont
enlevés définitivement pour éviter une tension excessive
sur le muscle moyen fessier et la déchirure qui pourrait
s'ensuivre dans le prolongement de la discision. Dans
le même but, la flexion de hanche, qui doit être évitée
Figure 4.4. L'écartement vers l'arrière du faisceau postérieur du durant la luxation, doit être limitée après l'exposition du
moyen fessier respecté et l'écartement vers l'avant du faisceau
antérieur mobilisé exposent le piriforme et le petit fessier [3].
cotyle puisqu'elle augmente la tension entre le faisceau
Sur ce dernier est réalisée une incision en L identique à celle du postérieur resté inséré et le faisceau antérieur maintenu
moyen fessier. récliné par les clous de Steinman (voir ci-après).
Voies directes antérolatérales 37

ment de la tête prothétique pour la réduction. Celle-ci


ne doit pas être obtenue par traction sur le membre,
mais par un effet de levier qui est assuré par une spa-
tule prenant appui dans l'échancrure cotyloïdienne
d'une part et à la face supérieure du col prothétique
d'autre part ; cet effet d'abaissement combiné avec
la mise en rotation interne permet la réduction. La
hanche ainsi réduite est habituellement stable tant
en rotation externe-adduction qu'en flexion-rotation
interne car la capsulotomie antérosupérieure respecte
la capsule postérieure et antéro-inférieure.

Réparation
Les deux lambeaux capsulaires antérieur et postérieur
déterminés par la capsulotomie sont rapprochés au-
dessus de la prothèse pour la séparer des plans muscu-
laires par quelques points de fil non résorbable. Puis le
Figure 4.5. Sur la capsule exposée est réalisée une incision membre est placé en légère abduction-rotation interne
mobilisant un lambeau capsulaire antérieur qui reste amarré
pour faciliter la réinsertion trochantérienne des deux
au bord antérieur du cotyle mais découvre largement la face
antérieure du col fémoral [3]. muscles sectionnés. Le petit fessier est suturé à son moi-
gnon périphérique ou à la face profonde du moignon
du tendon du muscle moyen fessier par des points en U
La capsulotomie expose la face supérieure du col et
au fil résorbable ; il est commode d'avoir passé ceux-ci
permet le choix du site de section de celui-ci pour la
avant la mise en abduction qui tend à masquer le petit
préparation fémorale réalisée en fonction des calques ;
fessier et de les serrer après pour bénéficier de l'effet de
celle-ci doit absolument éviter un raccourcissement
détente. La valve antérieure du moyen fessier est à son
du bras de levier cervicocéphalique, qui exposerait
tour suturée à son moignon musculotendineux sur le
à l'instabilité par détente des muscles coapteurs. En
trochanter, puis le fascia lata est refermé également au
revanche, la compliance musculaire s'est avérée com-
fil résorbable et la fermeture sur un drainage aspiratif
patible avec l'allongement de celui-ci ou un allonge-
complétée par la suture des plans superficiels.
ment du membre.
L'ablation de la tête dégage le cotyle. Des clous de
Steinman plantés à l'extérieur du rebord cotyloïdien Suites opératoires
en haut et en arrière maintiennent réclinées vers le
haut la valve musculaire et capsulaire antérieure et la La déambulation est débutée le lendemain sans restric-
valve capsulaire postérieure. Il est commode d'utiliser tion d'appui. L'utilisation de béquilles pour tous les
un de ces clous dans la partie basse de la paroi posté- déplacements est recommandée pendant 6 semaines de
rieure en l'implantant entre l'insertion capsulaire et le manière à éliminer tout travail des muscles moyen et
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bourrelet. Un écarteur muni d'un bec mousse, appuyé petit fessiers pendant la période de cicatrisation.
sur la face exocotyloïdienne de la paroi antérieure à sa
partie basse, dégage le contour antérieur du cotyle du
lambeau capsulaire antérieur. Le cotyle ainsi exposé Discussion
peut être préparé et le cas échéant, si un appui sus- Cette voie d'abord diffère de celles qui cherchent
cotyloïdien au pôle supérieur du cotyle est nécessaire, à exploiter une continuité fibreuse juxtatrochanté-
il est facilement exposé par la même incision. rienne entre petit fessier, moyen fessier et vaste latéral,
telle qu'elle est décrite par Hardinge [1], Nazarian et
Müller [4], Bauer [5], Moskal [6] et qui visent à créer
Réduction et stabilité une valve musculaire antérieure continue et apte à une
En règle avec une longueur de col correctement choisie suture résistante. L'abductor split décrit par Frndak
grâce aux calques préopératoires, la conservation de [7] conserve ce même principe en dissociant le moyen
l'effet de coaptation assuré par les muscles adducteurs, fessier selon un trajet plus antérieur que proposé
psoas, et la portion postérieure respectée du moyen par Hardinge. La variante proposée par Learmonth
fessier nécessite habituellement un effort d'abaisse- [8], ou voie en oméga, recherche la même continuité
38 F.H. Dujar in

musculaire mais désinsère complètement le moyen fes- la cuisse ou du nerf fémoral, n'est devenue une pré-
sier, l'articulation étant exposée entre son bord pos- occupation qu'avec l'émergence des voies antérieures
térieur et le piriforme. Cette continuité ne nous est réduites. La méta-analyse de Lee et Marconi a ainsi
pas apparue constante et est susceptible de nécessiter retrouvé sur 11 810 patients opérés par ces techniques
une décortication ou le tracé d'une barrette trochan- 2,3 % de fractures peropératoires et 2,8 % de lésions
térienne antérieure ; des réinterventions après de tels neurologiques [12]. Ces complications sont rarissimes
abords nous ont confronté à des désunions de répara- avec les voies latérales directes [11], ce qui explique
tion difficile du fait de la rétraction musculaire. qu'il n'y ait pas d'étude de niveau I comparant les taux
La voie d'abord décrite par Soni [9] est aussi une myo- de ces deux types de complication avec ceux des autres
tomie antérieure, mais ne comporte pas de discision du voies.
moyen fessier. Après libération du bord antérieur hori- Les deux complications évitables qui ont fait l'ob-
zontal du moyen fessier, son insertion sur le bord anté- jet d'études comparatives sont les luxations post
rieur du trochanter est sectionnée en même temps que opératoires et les lésions de l'appareil abducteur de
celle du petit fessier ; le lambeau ainsi créé est récliné en la hanche, causes de douleurs trochantériennes et de
haut et en avant pour exposer la face antérieure de la signe de Trendelenburg.
capsule.
La voie que nous avons décrite s'apparente plus à Luxations postopératoires
l'abord décrit par Stephenson [10] qui comporte aussi la
mobilisation partielle (un tiers) du faisceau antérieur du Les luxations postopératoires ont été largement étu-
moyen fessier. Mais cet abord comporte préalablement diées. Le registre suédois a rapporté en 2012 les résul-
une incision antérieure puis supérieure transversale sus- tats de 78 098 PTH pratiquées entre 2005 et 2010
trochantérienne du fascia lata sans doute nécessitée [13]. Le risque de révision pour luxations (figure 4.6)
par le choix du décubitus dorsal. Cette même position était significativement plus élevé pour les voies mini-
conduit par ailleurs l'auteur à pratiquer une capsuloto- invasives (risque relatif [RR] = 4,2 ; indice de confiance
mie circonférentielle qui permet de refouler le fémur en [IC] : 2,3–7,7) et les voies postérieures (RR = 1,3 ;
bas et en arrière pour pouvoir exposer le cotyle. IC : 1,1–1,7) que pour la voie directe latérale.
Dans l'abord que nous décrivons, la section du col et
la rotation externe seules dégagent automatiquement la
cavité cotyloïdienne sans perdre par conséquent l'élément
de stabilisation que constitue la continuité capsulaire. 6
Voies d’abord
Postérolaterale
Quels sont les résultats 5
Antérolaterale

de ces voies d'abord ?


Nous avons largement évalué les résultats de la voie de 4
Thomine avec des prothèses type Charnley [11]. Ces
études ont montré de très bons résultats cliniques, une
absence de séquelles à moyen terme et un taux de luxa- 3

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tion très faible, inférieur à 0,5 %, malgré à l'époque
l'usage de prothèse monobloc de diamètre 22 mm.
Dans la littérature internationale, les voies directes 2
latérales sont essentiellement des voies de Hardinge
sur lesquelles se reposera donc cette analyse bibliogra-
phique, même si nous avons la conviction que cette
1
voie est un peu plus délétère que la voie de Thomine.

Quelles sont les complications 0


de ces voies d'abord par rapport
aux autres ? 0 30 60 90
Jours post opératoires
La survenue de fractures peropératoires ou de lésions Figure 4.6. Courbes actuarielles de survie (%) (révisions pour
neurologiques, aux dépens du nerf cutané latéral de luxation) du registre suédois 78 098 PTH [13].
Voies directes antérolatérales 39

Il est intéressant de noter que les résultats du registre • en matière de prothèse totale pour indication
norvégien, rapportés par Fevang et al. en 2010 pour la d'ordre orthopédique, les avis paraissent plus partagés
période 1987–2007 [14], montraient une augmentation et en fait dépendent du type d'arthroplastie choisi. Si
avec le temps de la fréquence des révisions dues à des l'on reste fidèle à des arthroplasties de petit diamètre,
luxations pendant la période 1993–2007 par rapport 22 ou 28 mm, les voies directes latérales présentent à
à la période 1987–1992. Cette augmentation para- l'évidence une plus grande sécurité.
doxale illustre à nouveau que l'innovation ne signifie
pas nécessairement progrès. Les auteurs évoquaient les Douleurs trochantériennes
changements intervenus pendant ces mêmes années en
termes de technique chirurgicale et de voies d'abord. et lésions de l'appareil d'abduction
Ces luxations ne sont pas une complication mineure. Les voies directes latérales sont des voies transglutéales.
Elles ont un effet considérable non seulement sur la Elles sont ainsi accusées de douleurs trochantériennes
réputation du chirurgien, mais aussi sur la qualité de et de lésions irréversibles de l'appareil abducteur et
vie après l'arthroplastie [15]. Il est aussi clairement donc de boiterie de type Trendelenburg.
établi que, lorsqu'elles surviennent après une arthro- Il est indéniable que, durant les premières semaines
plastie réalisée pour fracture de l'extrémité supérieure postopératoires, les patients présentent une boiterie. Il
du fémur chez un sujet âgé, leurs conséquences sont est même recommandé, si l'appui est autorisé, de le
catastrophiques, y compris en termes de pronostic protéger par deux cannes anglaises durant 6 semaines
vital qui s'effondre. Ces éléments, à savoir la fréquence afin d'éviter les tensions dans les réparations muscu-
des luxations, la dégradation de qualité de vie et le laires. À ce prix, nous avons montré, avec l'hémimyo-
risque vital, ont conduit l'équipe de Sköldengerg et al. tomie antérieure de Thomine, qu'il n'y avait pas de
[16] à abandonner les voies postérieures pour revenir à séquelles de force musculaire d'abduction notable à
des voies directes latérales pour les hémiarthroplasties l'issue de la convalescence [11].
pour fracture du col fémoral (figure 4.7). La méta-analyse de Berstock et al, en 2015 [17],
Ainsi, il est clairement établi que, tous types de pro- comparant deux tiers de voies postérolatérales et un
thèse confondus, les voies directes latérales réduisent tiers de voies directes latérales, n'a pas retrouvé de
significativement le risque de luxation : différence fonctionnelle à terme entre ces deux voies
• chez les sujets âgés chez qui les facteurs de luxation d'abord.
sont multiples, l'utilisation d'hémiarthroplasties, donc L'étude de Kiyama et al. [18] a permis de mesurer
par essence de têtes de grand diamètre, ne met pas à la force musculaire du côté sain et du côté opéré selon
l'abri de ce risque très délétère, et des auteurs scan- la voie d'abord, directe latérale dans 38 cas et posté-
dinaves ont, dans cette indication, abandonné la voie rieure dans 40 cas. Deux ans après l'intervention, ces
postérieure pour revenir à des voies directes latérales ; auteurs ne retrouvaient aucune différence concernant
la force musculaire, à 86,1 % de celle du côté sain
100.0 pour la voie directe latérales et à 87,3 % pour la voie
postérieure (p = 0,67). De la même manière, la boiterie
de Trendelenburg n'était pas différemment représen-
99.5 tée dans les deux groupes, constatée chez 10 patients
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sur 38 dans le groupe des voies latérales, et 11 sur


40 dans celui des voies postérieures. La conclusion des
99.0 auteurs était que la voie d'abord n'avait pas, à terme,
d'influence et que c'était la restauration de l'offset
fémoral qui était déterminante pour la récupération
98.5 Voies d’abord musculaire.
Latérale
Postérieure

98.0
MIS Conclusion
0 1 2 3 4 5 Les voies directes latérales transglutéales présentent
Années l'avantage d'un très faible taux de complications et
apparaissent ainsi comme les plus sûres.
Figure 4.7. Courbes actuarielles de survie (%) rapportées par
Sköldengerg et al. [16], les ayant conduit à abandonner les Les études systématiques et objectives démentent
voies postérieures pour revenir à des voies directes et latérales l'opinion parfois exprimée de séquelles musculaires et
en matière d'hémiarthroplastie pour fracture du col du fémur. de boiteries définitives.
40 F.H. Dujar in

Les voies directes latérales transglutéales comportent et/ou la suspension des activités sportives dépendent
cependant deux inconvénients : des conditions particulières, variant de quelques jours
• l'abord transglutéal nécessite une période de conva- à quelques mois ;
lescence durant la cicatrisation et la récupération • la difficulté opératoire est grande, à l'évidence supé-
musculaire. Nous autorisons un appui complet en pos- rieure à celle de la voie postérieure. Le respect absolu
topératoire immédiat, mais demandons aux patients des impératifs techniques et une courbe d'apprentis-
de conserver deux cannes anglaises durant 6 semaines sage d'une centaine de cas sont indispensables.
afin de protéger la suture musculaire. L'arrêt de travail

Réfé ences
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41

Mini-voie d'abord postérieure


de hanche
P. MERTL, M. DEHL, Y. BULAÏD

Introduction
La voie d'abord postérolatérale de hanche, dite voie de
Moore (voie d'abord postérieure standard [VPS]) est
la voie d'abord la plus ancienne et la plus utilisée dans
la mise en place de la prothèse totale de hanche (PTH).
De nos jours, les patients non seulement attendent
d'une PTH de retrouver une hanche indolore, mais
réclament aussi une récupération fonctionnelle rapide
ainsi qu'une cicatrice courte et discrète. Dans ce but, la
mini-voie d'abord postérieure de hanche a été décrite
à la fin des années 1990 [1] et surtout au début des
années 2000, où beaucoup d'auteurs ont utilisé des Figure 5.1. Écarteur antérieur et inférieur (de type Cobra).
termes différents, comme petite-incision, mini-voie ou
encore voie mini-invasive [2–4].
La mini-voie d'abord postérieure (VPM), comme
nous l'appellerons dans ce chapitre, dérive de la VPS.
Elle permet la réalisation d'une arthroplastie totale de
hanche, sans changer radicalement d'approche, pour
les chirurgiens utilisant la VPS, tout en bénéficiant des
avantages de la mini-voie.

Technique chirurgicale
Nous pratiquons la VPM lors de toutes les arthroplas-
ties de hanche de première intention, quels que soient
l'âge, le sexe et l'indice de masse corporelle (IMC) du Figure 5.2. Releveur de fémur.
patient. La taille de l'incision est de 7 à 8 cm chez les
patients avec un IMC proche de 25 ; elle est plutôt de
10 à 11 cm chez les patients avec un IMC > 30 kg/m2.
La VPS est réservée à la chirurgie de reprise, ainsi Installation du patient
qu'aux dysplasies majeures de hanche.
Cette voie d'abord nécessite une instrumentation Le patient est installé en décubitus latéral strict, main-
adéquate : un écarteur antérieur, type Cobra, afin tenu dans cette position perpendiculaire à la table
de bien exposer la paroi antérieure de l'acétabulum opératoire par deux appuis, laissant libre la flexion de
et un écarteur inférieur, placé sous le ligament trans- la hanche : un appui postérieur sur le sacrum et un
verse (figure 5.1), un releveur de fémur, pour mieux appui antérieur avec un double contact sur les deux
s'exposer et protéger l'extrémité supérieure de l'inci- épines iliaques antérosupérieures droite et gauche
sion (figure 5.2). Un porte-fraise décalé de 45° afin de (figure 5.3). Ce double appui antérieur est très impor-
mieux accéder à l'acétabulum et protéger l'extrémité tant pour éviter une bascule antérieure du bassin en
inférieure de l'incision et un impacteur à cotyle décalé cours d'intervention, qui pourrait être source d'erreurs
de 45° sont également préférables. de positionnement de la cupule acétabulaire.

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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42 P. Mertl, M. Dehl, Y. Bulaï

Figure 5.3. Décubitus latéral : appui antérieur sur les deux épines iliaques antéro-supérieures droite et gauche et appui postérieur sacré.
. Schéma du positionneur. B. Patient installé.
© Orthoriginal

Incision et exposition
L'incision, d'environ 7 à 8 cm, débute à la jonction du
tiers postérieur et des deux tiers antérieurs du fémur,
à 3 cm sous le sommet du grand trochanter. Elle est
oblique vers le haut et l'arrière, suivant l'orientation du
muscle gluteus maximus ou grand fessier (figure 5.4).
Après hémostase du tissu graisseux sous-cutané,
l'incision du fascia lata est réalisée au bistouri froid
sur 1 cm à l'union du tiers postérieur et des deux tiers
antérieurs du grand trochanter, et prolongée oblique-
ment vers l'arrière aux ciseaux sur l'aponévrose du
grand fessier. Les fibres de ce muscle sont alors dis-
cisées, en prenant soin de pénétrer d'emblée dans la
bourse synoviale rétrotrochantérienne, qui constitue
un plan de clivage aisé et peu vascularisé (figure 5.5).
Un écarteur autostatique de Decoulx est alors mis Figure 5.4. Dessin d'une incision de 8 cm, débutant à la jonc-
en place. La hanche est positionnée en légère rota- tion tiers postérieur-tiers moyen du fémur à 3 cm du bord
supérieur du grand trochanter.
tion interne, et un écarteur de contre-coudé est glissé
'incision est oblique vers le haut et en arrière (vers la crête
sous le carré fémoral. Ses fibres supérieures sont iliaque postérosupérieure).
incisées, permettant de découvrir le pédicule circon-
flexe médial qui est ligaturé et sectionné (figure 5.6).
L'exposition des muscles pelvitrochantériens peut
être améliorée en refoulant la graisse qui les recouvre
à l'aide d'une compresse glissée vers l'arrière. Un

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second écarteur contre-coudé est alors glissé sous le
gluteus medius ou moyen fessier, exposant le piri-
forme. Si on le conserve intact [5, 6], il faut inciser au
bistouri électrique l'espace qui le sépare du jumeau
supérieur avec la capsule sous-jacente. Si on le sec-
tionne, il faut alors le séparer du gluteus minimus
ou petit fessier qui reste adhérent à la capsule. Les
pelvitrochantériens (avec ou sans le piriforme) sont
alors surfilés à l'aide d'un fil tressé non résorbable de
type Ethibond® 5, avec la capsule postérieure, en pre-
nant soin de bien emporter le tendon de l'obturateur
externe très résistant (figure 5.7).
Les muscles pelvitrochantériens sont alors section-
nés avec le lambeau capsulaire postérieur à l'aide Figure 5.5. Ouverture de la bourse synoviale et discision du
d'un bistouri froid au ras du grand trochanter, puis grand fessier.
Mini-voie d'abord postérieure de hanche 43

Figure 5.8. Excision du labrum et luxation.


Figure 5.6. Ligature de l'artère circonflexe médiale.

Figure 5.7. Surfilage et section des tendons des muscles pelvi- Figure 5.9. Coupe du col.
trochantériens.
emps acétabulaire
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en longeant le bord inférieur du piriforme (ou du petit


fessier) en les tendant par le fil de surfilage. Ils sont Un écarteur antérieur (type Cobra) est mis en place
ensuite réclinés en arrière, protégeant le nerf sciatique, en prenant appui sur la paroi antérieure de l'acé-
avec une fixation de l'Ethibond® dans l'écarteur de tabulum (figure 5.10) et le membre inférieur est
Decoulx à l'aide d'une pince de Kocher. replacé en extension. Il faut prendre garde que
La luxation de la hanche s'effectue par rotation l'écarteur s'appuie sur le grand trochanter et non
interne forcée, le genou en flexion, et est aidée par une pas sur le moyen fessier, source de douleurs pos-
cuillère de Lambotte glissée dans l'articulation et faisant topératoires. Deux clous de Steinmann peuvent
levier (figure 5.8). Le col, exposé par un écarteur contre- être utilisés pour améliorer l'exposition acétabu-
coudé qui refoule le carré fémoral en bas, est coupé à laire, un postérieur sur la tubérosité ischiatique et
la scie au niveau déterminé sur la planification préopé- un supérieur au niveau du toit de l'acétabulum.
ratoire par rapport au tubercule mineur (figure 5.9). La L'exposition complète de l'acétabulum est finalisée
tête et le col sont alors extraits à l'aide d'un davier. Le par la mise en place d'un écarteur inférieur sous le
col peut aussi être sectionné avant luxation, réduisant ligament transverse (figure 5.11). Il est utile lors de
ainsi l'impact de la douleur sur l'anesthésie. ce temps acétabulaire de basculer la table opératoire
44 P. Mertl, M. Dehl, Y. Bulaï

Figure 5.10. Mise en place des écarteurs. Figure 5.12. Porte-fraise décalé.

Figure 5.11. Exposition acétabulaire.


Figure 5.13. Impacteur décalé.

vers l'arrière de 20° de façon à améliorer la vision la préparation ; elle se fait progressivement de 2

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sur la paroi postérieure. Le labrum acétabulaire est en 2 mm à partir d'une petite fraise. Il faut veiller
excisé à l'aide d'un bistouri froid, en faisant le tour lors de ce temps à appuyer sur le porte-fraise vers le
de l'acétabulum et d'éventuels ostéophytes périphé- bas et vers l'arrière afin de ne pas risquer d'ascen-
riques sont émondés. sionner ni de verticaliser la cavité créée et de ne pas
L'effondrement des ostéophytes de l'arrière- trop mordre sur la corne antérieure. Le réglage de
fond avec des ciseaux courbes (ciseaux de Honton) l'antéversion selon les repères géométriques habi-
demeure pour nous essentiel de façon à exposer la tuels est amélioré par la bascule postérieure de la
lame quadrilatère qui constitue un repère de pro- table opératoire en évitant toute sous-estimation de
fondeur de fraisage. Cette préparation permet aussi celle-ci. Elle doit être contrôlée en tenant compte de
de parfaitement visualiser l'incisure ischiopubienne l'orientation du ligament transverse [7, 8]. En fonc-
qui constitue le repère de hauteur pour le position- tion du choix préopératoire, une cupule en press-fit
nement de la future cupule. Le fraisage de l'acéta- peut alors être impactée, au mieux avec un impac-
bulum utilise un porte-fraise décalé (figure 5.12), teur décalé pour éviter le risque de verticalisation ou
nécessaire pour ne pas léser la partie inférieure de une cupule en polyéthylène (PE) peut être cimentée
l'incision, et éviter une verticalisation excessive de (figure 5.13).
Mini-voie d'abord postérieure de hanche 45

Figure 5.14. Exposition du fémur avec le releveur.

emps fémoral
L'exposition du col fémoral nécessite la mise en rotation
interne au zénith, la hanche et le genou fléchis à 90°. Le
genou doit être placé en avant de la cuisse controlaté-
rale, ce qui permet de projeter l'axe du canal diaphysaire
directement dans l'axe de la partie postérieure de la voie
d'abord. Un releveur fémoral est placé sous la partie anté-
rieure du col fémoral pour mieux l'exposer et protéger la
partie supérieure et postérieure de l'incision. Un écarteur
de contre-coudé (figure 5.14) est placé au bord inférieur
du col pour exposer l'éperon de Merckel, et contrôler
l'absence de fissure. Le fémur peut alors être préparé
avec des râpes de tailles croissantes. L'antéversion doit
être évaluée par rapport à l'axe vertical que constitue
la jambe, genou fléchi, et il faut éviter la varisation du Figure 5.15. Réinsertion des pelvitrochantériens.
pivot fémoral en poussant fermement le porte-râpe vers
le grand trochanter. Des essais de stabilité et de mobi-
lité sont réalisés après réduction avec les pièces modu-
laires prévues à cet effet. La longueur est contrôlée par
rapport au genou controlatéral et la stabilité est testée
en flexion-rotation interne-adduction d'une part, et en
extension-rotation externe d'autre part. La réalisation
de mouvements de circumduction de la hanche permet
de dépister aisément par cette voie d'abord d'éventuels
conflits qu'il faudra corriger. Après impaction de la tige
définitive, la capsule articulaire et les muscles périarticu-
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laires sont infiltrés avec un mélange de 200 ml de ropiva-


caïne à une concentration de 2 mg/ml, une demi-ampoule
d'adrénaline de 1 ml, de concentration 1 mg/ml, et une
ampoule de kétoprofène de 100 mg/4 ml. Cette infiltra-
tion sans réinjection permet d'assurer une relative indo-
lence pendant les 24 premières heures. Après nettoyage Figure 5.16. Fermeture.
et protection du cône morse par une compresse, la tête
définitive est impactée et la hanche réduite. et du grand fessier est fermé par un surjet de Vicryl 2.
Trois grammes d'acide tranexamique (Exacyl®) dilués
Fermeture dans 100 ml sont alors injectés en intra-articulaire, en
complément de l'injection par voie générale pré- et pos-
La fermeture débute par la réinsertion systématique topératoire pour limiter le saignement postopératoire
des muscles pelvitrochantériens au travers du grand [9, 10]. Le plan sous-cutané est fermé par des points
trochanter, hanche en rotation externe en utilisant un séparés de Vicryl 0, et un surjet de Monocril est réalisé
passe-fil de Nélaton (figure 5.15). Le plan du fascia lata sur la peau. Aucun drainage n'est effectué (figure 5.16).
46 P. Mertl, M. Dehl, Y. Bulaï

Consignes postopératoires concerne la durée opératoire, l'utilisation des antal-


giques et la nécessité d'utiliser des cannes à la marche
Les patients sont levés le jour même après le retour de [21]. Woolson et al. ont retrouvé les mêmes résultats
salle de surveillance post-interventionnelle (SSPI). Ils en termes de récupération fonctionnelle rapide, de
reprennent la marche dans le couloir et font l'appren- pertes sanguines postopératoires et de durée d'hos-
tissage des escaliers le lendemain. La sortie a lieu à J2 pitalisation [4]. Ogonda et al, sur un suivi prospectif
en règle. de 219 arthroplasties, n'ont pas retrouvé de diffé-
rence significative en ce qui concerne la marche en
Discussion postopératoire immédiat et la durée d'hospitalisa-
tion. Lawlor et al. [22] n'ont mis en évidence aucune
a mini-voie d'abord accélère-t-elle différence significative sur la récupération fonction-
nelle (transfert au fauteuil, position debout, vitesse
la récupération fonctionnelle ? de marche, durée d'hospitalisation) entre les deux
Les principaux objectifs de la mini-incision, en plus du voies d'abord.
côté esthétique de l'incision, sont la diminution de la Aucune étude n'a rapporté de différence significative
morbidité et l'accélération de la récupération fonction- en ce qui concerne les scores fonctionnels de hanche au-
nelle précoce. delà de 1 an [12]. Peu d'articles ont rapporté les résultats
Plusieurs auteurs ont rapporté une amélioration du radiocliniques de la mini-voie à long terme. Flören et al.
score de Harris de manière significative dans les 6 à ont rapporté de bons résultats cliniques (score de Harris,
12 semaines postopératoires [3, 5, 11, 12]. Les pertes mobilité, douleurs, activités de loisirs et sportives), com-
sanguines sont significativement moins importantes parables à ceux de la voie standard à 10 à 13 ans de
en comparaison à la voie d'abord standard [5, 11, recul [23]. Cependant, cette étude ne rapporte aucune
13]. Le saignement peropératoire est diminué en liga- donnée concernant les luxations et les résultats radio-
turant l'artère circonflexe médiale. Chiron et al. [14] logiques. Dans une étude récente, Yukizawa et al. ont
ont retrouvé une diminution statistiquement significa- rapporté une série rétrospective de 76 PTH par VPM
tive du saignement postopératoire entre un groupe de à 10 ans de recul. Les résultats radiocliniques étaient
patients avec ligature de l'artère circonflexe médiale et comparables à ceux de la littérature, en termes de satis-
un groupe contrôle avec coagulation de l'artère circon- faction des patients, de résultat fonctionnel et de com-
flexe médiale. La durée d'hospitalisation est réduite plications [24].
avec la mini-voie d'abord [5, 15], grâce d'une part à la
réduction de la douleur, favorisée par les infiltrations a mini-voie d'abord accroît-elle
périarticulaires [16], et d'autre part à la diminution du les complications postopératoires ?
besoin de transfusion, conséquence des faibles pertes
sanguines [5, 10, 17, 18]. La réduction de la durée Nombre de chirurgiens réticents à la mini-voie pos-
d'hospitalisation est aussi liée à l'âge de plus en plus térieure redoutent les complications telles que les
jeune des patients et au taux élevé d'hémoglobine pré- luxations, les fractures du fémur, la malposition des
opératoire dans certaines publications [19]. implants, en raison d'un accès et d'une visualisation
Une méta-analyse réalisée en 2014 a comparé les deux réduits de l'acétabulum et du fémur [2]. Hartzband a

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voies d'abord (mini et standard), incluant 12 essais ran- rapporté une tendance à la verticalisation de la cupule
domisés et contrôlés et 4 non randomisés. Au total, acétabulaire [15]. Woolson et al. ont rapporté 3 fois
1498 PTH ont été incluses. Une différence significative plus de tiges fémorales en varus et une cupule acéta-
(p < 0,05) était rapportée en ce qui concerne les pertes bulaire plus verticale dans le groupe avec VPM que
sanguines (moins de pertes avec la mini-voie d'abord) et dans le groupe VPS, sans retentissement clinique pour
la récupération fonctionnelle (meilleur score de Harris autant. Ces malpositions des implants pourraient
avec les mini-voies d'abord). Le temps opératoire et la s'expliquer par un accès réduit à l'acétabulum et au
durée d'hospitalisation étaient aussi significativement fémur [4], ce qui souligne l'intérêt de l'utilisation d'un
moins importants avec la mini-voie d'abord [20]. porte-fraise et d'un impacteur de cupule décalés ainsi
Cependant, les avantages de la mini-voie d'abord que d'un releveur de fémur. Ainsi, Aït Si Selmi et al.
doivent être relativisés. Ainsi, Chimento et al. n'ont n'ont pas retrouvé d'augmentation des complications
pas pu mettre en évidence de différence significative per- et postopératoires. Toutefois, ils précisaient que
entre la VPM (8 cm) et la VPS (15 cm) en ce qui le procédé est exigeant et nécessite l'utilisation d'une
Mini-voie d'abord postérieure de hanche 47

instrumentation coudée spécifique, afin d'avoir un


positionnement satisfaisant des différents implants
a mini-voie d'abord
[17]. L'antéversion de la cupule acétabulaire peut être réduit-elle le taux de luxation des
améliorée en utilisant comme repère le ligament trans- arthroplasties totales de hanche ?
verse. Archbold et al., sur 1000 PTH à 8 mois de recul,
ont rapporté 0,6 % de luxations seulement en utilisant Plusieurs auteurs ont fait état d'un taux de luxation
le ligament transverse comme référence pour l'antéver- plus faible chez les patients opérés par la VPM.
sion de la cupule acétabulaire [25]. Ainsi, Khan et al. ont rapporté, dans une étude
Dans une étude anatomique, Viste et al. ont mon- rétrospective comparant 100 patients avec une VPS
tré que, si l'antéversion du ligament transverse est en versus 100 patients avec une VPM, une différence
dehors de celle de la zone de sécurité de Lewinnek, significative (p = 0,045) concernant les luxations à
celui-ci reste un repère intéressant, traduisant une 2 ans de recul [5].
antéversion dynamique spécifique de chaque indi- La même équipe, dans un essai randomisé publié en
vidu [7]. Miyoshi et al., dans une étude radiologique 2012, retrouvait des résultats similaires avec 3 % de
publiée en 2012, ont également confirmé que le liga- luxations dans la VPS versus 0 % dans la VPM [6].
ment transverse est un bon repère pour l'antéversion Kwon et al, dans une méta-analyse de 2006, ont
de la cupule acétabulaire [8]. retrouvé un risque relatif de luxation 8 fois plus
La conservation du muscle piriforme nous paraît important chez les patients avec une VPS par rapport
importante, car elle contribue à une récupéra- à ceux opérés par une mini-voie avec réparation des
tion fonctionnelle rapide. Khan et al. ont mené un tissus mous (capsule articulaire, obturateur interne,
essai randomisé, contrôlé avec deux groupes. Dans piriforme) [28]. Sculco, dans une série personnelle de
cette étude, 48 patients ont été opérés avec la VPM 1500 PTH implantées par VPM, ne déplorait que 1 %
avec conservation du piriforme et 52 par la VPS. de luxation [12].
Les patients opérés avec conservation du piriforme D'autres études, à l'inverse, ne retrouvent pas cet
étaient plus satisfaits, moins douloureux et mar- avantage.
chaient mieux à 15 jours postopératoires. Dans cet Ainsi, Ogonda et al., sur un suivi prospectif de
article, la cupule acétabulaire était cependant signi- 110 arthroplasties implantées par VPM versus
ficativement (p = 0,002) moins antéversée dans le 100 arthroplasties implantées par VPS, n'ont pas mis
groupe VPM versus VPS [6]. en évidence de différence significative concernant
Dans une série de 1000 PTH par VPM avec un suivi les luxations : 1 dans le groupe VPS versus 0 dans le
moyen de 3 ans, Swanson a rapporté un taux de com- groupe VPM [19].
plications per- et postopératoires significativement Plusieurs autres auteurs ont retrouvé des résultats
moins important pour les 500 dernières que pour les similaires sans différence significative concernant les
500 premières PTH (passage du taux de luxation de luxations [11, 29].
3 % à 1 %) [2]. Malgré une relative facilité, la VPM
nécessite une expérience, une instrumentation spéci- Conclusion
fique, une standardisation de la technique, ainsi qu'une
courbe d'apprentissage. D'autres auteurs confirment De nos jours, l'exigence des patients est plus impor-
cette hypothèse, en portant à 50 PTH posées par an tante, notamment sur le plan cosmétique, et la mini-
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la limite inférieure pour maîtriser cette voie d'abord voie d'abord permet d'avoir une petite cicatrice
[12, 26]. qui peut être cachée par le maillot de bain et passer
Dans la méta-analyse publiée en 2014, aucune com- inaperçue.
plication (luxation, déficits sensitivomoteurs, compli- Son apprentissage est facile, tout en apportant les
cations thrombo-emboliques, infection, ossifications avantages d'une voie MIS (minimally invasive surgery)
hétérotopiques, malpositions des implants prothé- et les risques de complications ne sont pas supérieurs à
tiques) n'était significativement plus fréquente dans le ceux d'une voie postérieure standard.
groupe VPM que dans le groupe VPS [20]. Edwards À l'inverse, à n'importe quel moment de l'interven-
et al., dans une série rétrospective publiée en 2015, tion, en cas de difficultés ou de complication, cette voie
ont retrouvé un taux d'ossification hétérotopique de peut être étendue au fémur ou élargie sans aucune dif-
10 %, mais sans que celui-ci soit significativement ficulté. Cette extension de voie pourra également être
inférieur à celui retrouvé pour la VPS [27]. utilisée ultérieurement en cas de révision des implants.
48 P. Mertl, M. Dehl, Y. Bulaï

Réfé ences
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49

Synthèse raisonnée des voies


d'abord de hanche : faut-il vraiment
succomber à la mode
de la voie antérieure ?
P. MASSIN

Introduction En fonction des réponses à ces questions, nous dis-


cuterons si un chirurgien de la hanche peut se limi-
Instaurer une discussion raisonnée dans un débat pas- ter à l'apprentissage et à la maîtrise d'une seule voie
sionnel est une tâche difficile. Des controverses existent d'abord pour accomplir l'ensemble des interventions
depuis la description des différentes voies d'abord de de chirurgie prothétique de la hanche, notamment s'il
hanche, c'est-à-dire depuis l'année 1882 où a été décrite est adepte de la voie antérieure directe. À l'inverse,
la voie de Carl Hueter, lui-même assistant de Bernhard s'il est un adepte de la voie postérieure, doit-il chan-
Von Langenbeck qui avait contribué à décrire l'abord ger sa pratique quotidienne en apprenant l'abord
postérieur. Elles ont récemment repris de l'ampleur avec antérieur ?
le développement de la récupération rapide, la voie anté- La voie antérieure directe sera censée représenter
rieure étant présentée comme partie intégrante du proto- ici l'ensemble des voies antérieures (antéro-externe,
cole, en raison d'un caractère décrit comme mini-invasif, Rottinger) ayant en commun une certaine difficulté
c'est-à-dire ne sectionnant pas de structures anatomiques d'exposition du fût fémoral ; et la voie postérieure, les
musculaires ou nerveuses [1]. Le débat a longtemps gardé autres voies passant derrière le moyen fessier, néces-
une certaine tenue scientifique, notamment à l'occasion sitant une section plus ou moins étendue des muscles
de l'exportation de cette technique vers les pays anglo- pelvitrochantériens. Nous ne discuterons pas ici la
saxons. Puis une véritable polémique s'est instaurée voie transtrochantérienne qui n'est pratiquement plus
quand l'industrie s'est investie dans la promotion d'une utilisée en chirurgie de première intention, ni l'excel-
technique chirurgicale sur des supports certes inspirés lente voie de Hardinge en raison des inconvénients
par des professionnels, à type de plaquettes diffusées potentiels bien décrits du passage transfessier. Cela ne
sur internet ou d'émissions ou d'articles de vulgarisation signifie évidemment pas qu'elles soient proscrites, mais
dans la presse régionale [2]. Cette agitation médiatique elles apparaissent moins compatibles avec un objectif
vise directement le consommateur, c'est-à-dire le patient, de récupération rapide en raison du temps de consoli-
abusé par des descriptions trop idéales pour être vraies, dation du médaillon trochantérien pour la première et
et a été également dénoncée dans d'autres pays [3]. du temps de cicatrisation des muscles fessiers pour la
Lorsque l'on revient à la réalité chirurgicale quoti- seconde, lorsqu'elle est comparée à la voie antérieure
dienne, la question qui se pose est celle de la véracité directe [4, 5].
de ces affirmations, notamment de savoir : 1) si la
ou les voies d'abord antérieures représentent un réel Complications
avantage vis-à-vis des voies postérieures, et 2) si elles
peuvent détrôner les autres voies dans la chirurgie de Caractérisation des complications
première intention. Ces hypothèses peuvent se décliner
en plusieurs questions. La ou les voies d'abord anté- La survenue de complications dans les suites d'une
rieures peuvent-elles : prothèse totale de hanche est rare mais non exception-
• minimiser le taux de complications ? nelle. Le chirurgien doit être prêt à y faire face. Parmi
• améliorer la récupération immédiate ? ces complications, certaines n'ont aucun rapport avec
• optimiser la survie à long terme des implants de la voie d'abord, certaines sont spécifiques de la voie
hanche ? d'abord, d'autres sont en rapport sans être spécifiques.

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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50 P. Massin

On peut considérer par exemple que la survenue d'une une reprise. Le taux de luxation n'était pas signifi-
paralysie sciatique est pratiquement spécifique des cativement différent dans le groupe voie antérieure
voies d'abord postérieures, de même que la lésion (30 patients, 1 luxation) et dans le groupe voie posté-
du nerf fémorocutané pour les voies d'abord anté- rieure (100 patients, 7 luxations).
rieures directes (alors qu'elles sont exceptionnelles par Dans une série plus large comparant 265 voies anté-
voie de Rottinger). D'autres complications sont non rieures et 183 voies postérieures chez des patients
spécifiques mais plus fréquentes avec certaines voies soumis à un protocole de récupération rapide, Malek
d'abord telles que les fractures fémorales ou la fausse et al. [9] ne trouvaient pas de différence significative
route après voie d'abord antérieure et les luxations entre les taux de luxations postopératoires à 18 mois.
après la voie d'abord postérieure. En revanche, la sur- Poehling-Monaghan et al. [10] n'ont pas relevé de
venue d'une infection n'est pas spécifique et semble luxation par voie antérieure ou postérieure dans l'an-
indépendante de l'abord chirurgical. née postopératoire.
La fréquence de chacune de ces complications peut Barrett et al. [11] ne signalaient pas de différence
aussi être influencée par le type d'implant : la fracture entre les deux voies.
fémorale est plus fréquente avec des tiges sans ciment Les publications les plus favorables à la voie anté-
impactées en force et la luxation plus fréquente avec rieure ne font pas état d'un taux de luxation plus élevé
des billes fémorales de petit diamètre en raison d'une par voie postérieure. Zawadsky et al. [12] n'ont rap-
« jumping distance » plus faible. Enfin, ne parlons pas porté qu'une luxation précoce dans le groupe des voies
de l'expérience du chirurgien qui est probablement le postérieures. Rodriguez et al. [13] ont fait la même
paramètre déterminant, avec la qualité de l'exposition constatation avec deux groupes de 60 patients.
et la précision de la pose des implants. À cet égard, les Le taux de luxation par voie postérieure n'apparaît
études randomisées avec un chirurgien unique ne sont donc plus comme un problème majeur. Depuis les tech-
peut-être pas les plus significatives, car il est probable niques de réparation de la capsule postérieure et de
que le chirurgien impliqué a plus l'habitude d'une des réinsertion du muscle piriforme, les taux de luxation
deux voies d'abord. Tout cela pour dire qu'il est diffi- apparaissent faibles et ne peuvent pas être détectés de
cile d'analyser la fréquence des complications en fonc- façon significative dans des petites séries comparatives
tion de la voie d'abord. qui manquent de puissance.
À plus grande échelle, Colwell et al. [14] rapportaient
Luxations postopératoires un taux de 1,1 % dans une série de 1635 arthroplas-
ties à couple céramique/céramique dont 78 % avaient
La survenue de luxation est un des principaux incon- été pratiquées par voie postérieure (1288), avec une
vénients mis en avant par les détracteurs de la voie majorité de têtes fémorales de diamètre 32 ou 36. Les
postérieure. 18 luxations de la série s'étaient produites après un
Paradoxalement, si l'on considère les taux de luxa- abord postérieur, soit un taux de 1,4 %. Dans leur
tions dans les études comparatives, la différence entre série initiale de 1307 mini-voies d'abord antérieures,
la voie postérieure et la voie antérieure directe n'appa- Siguier et al. [1] faisaient état d'un taux de 0,96 %
raît pratiquement jamais significative. de luxations. Avec la double mobilité, Philippot et al.
Martin et al. [6] comparaient deux groupes de voies [15] ne rapportaient aucune luxation à 20 ans de
d'abord à court terme (6 mois) effectuées par le même recul chez 137 patients de moins de 50 ans opérés par

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chirurgien senior et ne signalaient pas de luxation pré- voie postérieure. Ils faisaient la même constatation
coce, notamment après une voie postérieure. Il faut avec 25 ans de recul chez des patients non sélection-
noter que les patients les plus obèses avaient été préfé- nés [16].
rentiellement opérés par voie postérieure.
Spaans et al. [7], visiblement peu à leur aise dans leur Fractures postopératoires
exploration de la voie antérieure, signalaient 1 luxa-
tion dans le groupe voie antérieure en comparant deux La plupart des articles s'accordent pour souligner la
groupes de 46 patients. Mais il s'agissait d'un échec de fréquence des complications pendant la courbe d'ap-
voie antérieure ayant nécessité une conversion en voie prentissage de la voie antérieure directe, et plus parti-
postérieure. culièrement les fractures fémorales.
Eto et al. [8] ont examiné les causes de reprise des Jewett et al. [17], sur une série de 800 cas incluant
voies antérieures et postérieures chez les patients qui leur courbe d'apprentissage, rapportaient 19 frac-
leur étaient transférés d'autres établissements pour tures trochantériennes, 3 fausses routes fémorales,
ynthèse raisonnée des voies d'abord de hanche : faut-il vraiment succomber à la mode de la voie antérieure ? 51

une fracture du fémur peropératoire avec en outre Pour Martin et al. [6], sur un nombre limité de cas,
2 complications hémorragiques. En postopératoire, la voie antérieure directe semble susceptible de pro-
une fracture fémorale s'était révélée ou produite curer un bénéfice d'une journée d'hospitalisation en
secondairement et 7 luxations étaient survenues. moyenne (3 au lieu de 4 jours).
Même si la plupart de ces complications étaient sur- Taunton et al. [20], dans une étude randomisée,
venues dans la première moitié de la série, on com- ont constaté que les patients opérés par voie anté-
prend les difficultés d'une conversion chirurgicale rieure lâchaient leur cannes quelques jours plus tôt
tardive à la voie antérieure. que les patients opérés par voie postérieure, alors
Yi et al. [18] confirmaient un taux de 8 % de frac- que ces derniers avaient des scores de qualité de vie
tures fémorales lors de la courbe d'apprentissage. Le supérieurs à 3 semaines (SF12, Womac). Les suites
traitement de ces complications n'était pas détaillé. Un de la voie antérieure apparaissaient également plus
certain nombre de fractures trochantériennes avaient douloureuses.
guéri spontanément. En revanche, l'extension diaphy- Zawadski et al. [12] confirmaient une récupération
saire de la voie antérieure nécessaire au traitement de plus rapide avec un temps d'hospitalisation plus court
ces complications reste mal décrite. par voie antérieure par rapport à la voie postérieure
(3 versus 4 jours).
négalités de longueur Dans une autre étude randomisée, Barrett et al. [11]
trouvaient plus de patients qui montaient les escaliers
En ce qui concerne les inégalités de longueur, aucun et marchaient de façon illimitée à 6 semaines par voie
article ne signale de différence entre les voies d'abord. antérieure que par voie postérieure.
C'est en fait un paramètre rarement analysé. Dans l'ar- Pour Rodriguez et al. [13], l'amélioration de la
ticle de Martin et al. [6], 1 patient dans chaque groupe récupération procurée par l'abord antérieur direct
a dû porter une talonnette compensant une inégalité de par rapport à la voie postérieure disparaît au bout de
1 cm. Le réglage de la longueur est fortement influencé 2 semaines.
par l'examen clinique préopératoire chiffrant et analy- Au contraire, Poehling-Monaghan et al. [10] rap-
sant l'inégalité de longueur, son type (réelle ou relative portaient une reprise d'activité plus rapide, sans diffé-
liée à un bassin oblique) et la précision de la planifi- rence sur le temps d'hospitalisation avec la mini-voie
cation préopératoire. Ensuite, les repères anatomiques d'abord postérieure.
mesurés lors de l'implantation peuvent être discutés
(hauteur de coupe du col, index trochantérien) ainsi
que l'impression de piston et leur appréciation néces- Fonction à long terme
site une expérience importante. Mais ce n'est que dans
les voies effectuées en décubitus dorsal sans table À long terme, aucune étude n'a pu montrer une diffé-
orthopédique avec le deuxième membre drapé stéri- rence de survie entre voie antérieure et voie postérieure.
lement qu'on peut obtenir une impression visuelle et Dans les études précitées, l'avantage fonctionnel de la
directe de la différence de longueur résiduelle prothèse voie antérieure directe, s'il existe, ne dépasse pas 2 à
en place. C'est le cas de la voie antérieure sans table 6 semaines.
orthopédique. La précision de la restitution de lon- Seuls Eto et al. [8] signalaient la fréquence des
gueur avec cette technique n'est pas documentée pour reprises liées au composant fémoral dans les voies
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le moment. d'abord antérieures. L'écart entre l'opération initiale


et la reprise était en moyenne de 3 ans pour la voie
Récupération fonctionnelle antérieure directe contre 12 ans pour la voie posté-
rieure. Cependant, il s'agissait d'une série de patients
Récupération fonctionnelle reçus dans un centre de référence mais qui avaient été
postopératoire opérés ailleurs.
La qualité du résultat à long terme est indépendante de
L'argument pour promouvoir la voie d'abord anté- la voie d'abord. Elle est liée à la précision du positionne-
rieure est la rapidité de la récupération fonctionnelle, ment des implants et au choix judicieux des matériaux
en raison de son caractère anatomique. Là encore, les du couple de frottement. Aucun compromis n'est pos-
constatations sont diverses et contradictoires. sible avec ces éléments du cahier des charges ; en parti-
La méta-analyse récente de Higgins et al. [19] montre culier, aucun ne peut être justifié par le choix d'une voie
l'absence de conclusion définitive. d'abord qui sacrifierait le court terme au long terme.
52 P. Massin

Discussion ment avec les années d'expérience. Il doit être adapté


au patient et à son poids. Il n'y a pas de parallé-
Un chirurgien adepte de la voie lisme entre la longueur de l'incision et la qualité de
la récupération fonctionnelle. La perte sanguine et
postérieure a-t-il un intérêt l'anémie postopératoire qui s'ensuivent sont proba-
à changer d'abord pour adopter blement des paramètres beaucoup plus importants.
un abord antérieur direct ? Lorsqu'une voie d'abord est pratiquée correctement
avec une hémostase maîtrisée, un respect des parties
Le taux de complications pendant la courbe d'ap- molles et un bon positionnement des implants, la
prentissage de la voie antérieure est élevé et affecte rapidité de la récupération sera liée plus probable-
notamment le versant fémoral, posant le problème ment à d'autres paramètres, en particulier la prise
de l'extension diaphysaire mal commode de cette en charge de la douleur, la prévention de l'anémie et
voie, nécessaire pour traiter des complications l'information du patient. Il faut bien reconnaître que
imprévues. Les avantages fonctionnels sont dis- la polémique actuelle générée par les publicités de
cutables, en tout cas minimes et très transitoires. voie d'abord résulte d'une mauvaise compréhension
Les résultats à moyen terme peuvent être affectés de facteurs de récupération rapide, beaucoup plus
par un taux de reprise fémorale probablement lié à liés à la coordination des équipes infirmière, chirur-
des malpositions des tiges fémorales. Des luxations gicale et anesthésique qu'à la technique opératoire
sont rares mais possibles, même si leur taux est elle-même [10].
probablement légèrement inférieur à ceux des voies
postérieures même avec les implants contempo-
rains. À ce jour, il n'existe donc aucune raison pour Y a-t-il des indications respectives
un chirurgien habitué à la voie postérieure de chan- pour chaque voie d'abord ?
ger ses habitudes en apprenant la voie antérieure.
Il semble au contraire qu'il est beaucoup plus pro- Voie postérieure
ductif d'améliorer et d'optimiser tous les gestes de Le chirurgien ayant appris l'abord postérieur se voit
sa technique habituelle pour parfaire et accélérer la muni d'une technique universelle. La courbe d'ap-
récupération fonctionnelle de ses patients, tout en prentissage existe aussi et la tolérance en termes de
minimisant le taux de complications. positionnement des implants est limitée. La hanche
peut être mobilisée en cours d'intervention avec les
tratégies pédagogiques implants d'essai pour dépister et corriger les conflits
et techniques de récupération rapide soit entre le col de la tige et le rebord de la cupule,
soit entre les structures anatomiques avoisinantes.
Après ces considérations, on peut comprendre l'effet En revanche, tous les gestes doivent être contrôlés
pervers des publicités comparatives vantant les mérites précisément pour éviter la blessure du nerf sciatique
des voies antérieures auprès des patients. Elles ne qui peut se produire à plusieurs étapes de l'inter-
sont pas déontologiques, ni exactes lorsqu'elles sont vention, que ce soit par les écarteurs, l'échappée
le fait de chirurgiens [21]. Elles sont condamnables d'une fraise, ou lors de la réparation du plan cap-

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lorsqu'elles proviennent des fabricants, non habilités sulomusculaire postérieur. Il existe quelques varia-
à expérimenter et évaluer des techniques chirurgicales. tions anatomiques (division haute) qu'il faut repérer
Il faut donc rendre sa place à chaque technique dès le début de l'intervention. Toute chirurgie ulté-
chirurgicale avec ses avantages et ses inconvénients. rieure d'extension immédiate ou de reprise peut être
Il est préférable de rester fidèle à la technique que faite par la même voie, ce qui permet de préserver
l'on a appris lors de sa formation initiale. Toute le capital musculaire de l'articulation. L'extension
formation doit revenir à des conseils de bon sens. diaphysaire se fait naturellement par la voie subvas-
On ne peut pas commencer les premiers cas par une tus en face latérale de cuisse et permet l'utilisation
voie limitée avec une incision courte. La présentation d'implant de toutes les longueurs, notamment si un
d'une voie d'abord comme mini-invasive doit être appui diaphysaire doit être recherché. L'extension
considérée avec beaucoup de prudence, car incitant par ostéotomie trochantérienne se pratique aussi
celui qui l'apprend à la pratiquer d'emblée comme naturellement par cette voie, lorsque c'est nécessaire
telle. Quel que soit l'abord, il est nécessairement plus (hanche raide, allongement important, trochanter
large au début et se raccourcira ensuite progressive- surplombant).
ynthèse raisonnée des voies d'abord de hanche : faut-il vraiment succomber à la mode de la voie antérieure ? 53

Voies antérieures hanche avec une voie qu'il ne pratique pas souvent
s'expose à des complications qu'il doit anticiper.
Il n'en est pas de même des voies antérieures directes. La meilleure voie d'abord est donc probablement
L'apprentissage de la voie devrait s'accompagner de celle que l'on pratique le plus souvent et que l'on
l'enseignement des possibilités d'extension en cas de connaît le mieux. Il a pu ainsi être constaté que les
problème. Comment par exemple introduire une tige cupules posées par voie antérieure seraient moins anté-
longue et éventuellement la verrouiller par cet abord versées que celles posées par voie postérieure, parce
en cas de fracture fémorale peropératoire ? Le décro- que la vision et l'exposition de l'acétabulum sont dif-
chage du tenseur du fascia lata de la crête iliaque avec férentes [22].
une extension en voie de Smith-Petersen permet une En fait, l'expérience prouve que le chirurgien prati-
large exposition de l'acétabulum. Du côté fémoral, quant avec prédilection la voie antérieure directe ou
c'est plus difficile et une voie d'abord latérale subvas- la voie de Rottinger fera presque toutes ses interven-
tus associée peut être envisagée. C'est plus difficile en tions par en avant, en facilitant éventuellement l'ex-
cas de voie de Rottinger en raison du croisement des position fémorale par un débridement des muscles
voies d'abord. Il faut prolonger alors l'incision vers pelvitrochantériens. Siguier et al. [1], que l'on peut
l'arrière et longer ensuite le vaste latéral. Mais l'ac- considérer comme promoteurs de l'abord antérieur,
cessibilité au grand trochanter en cas de fracture reste ont, sur une série de 1037 prothèses consécutives de
mal aisée. Certains points techniques sont délicats et première intention, finalement effectué la voie anté-
d'ailleurs passés sous silence, alors qu'ils devraient être rieure dans sa forme dite mini-invasive (sans sec-
enseignés en premier lieu : comment manipuler le frag- tion des muscles pelvitrochantériens) dans 903 cas
ment proximal du fémur lorsqu'il est déconnecté de la (87 %), en excluant de plus les hanches dysplasiques
partie distale et donc de la table orthopédique par une déjà opérées par ostéotomie ou butée, les luxations
fracture diaphysaire peropératoire accidentelle ? congénitales, les fractures du col fémoral et les
Il semble donc nécessaire que les chirurgiens adeptes arthroses post-traumatiques. En revanche, toutes
de la voie antérieure directe apprennent aussi la voie ces interventions sont possibles par voie postérieure,
d'abord postérieure pour effectuer les reprises avec avec maintenant l'avantage des cupules à double
reconstruction ou ostéosynthèse fémorale. La maîtrise mobilité chez les patients à haut risque d'instabilité
de deux voies d'abord n'est pas inenvisageable pour les ou de têtes en céramique de grand diamètre chez les
chirurgiens spécialisés dans ce type de chirurgie. À plus patients plus jeunes.
long terme, une voie postérieure utilisée en reprise d'une
prothèse posée par voie antérieure peut être probléma-
tique : la voie antérieure initiale génère une fibrose anté- Conclusion
rieure importante qu'il est mal commode de réséquer
par l'abord postérieur. Laissée en place, cette fibrose La pédagogie chirurgicale accuse un retard certain
s'interpose dans les mouvements de rotation interne et par rapport à d'autres disciplines impliquant un pilo-
augmente le risque de luxation par la voie postérieure. tage, comme l'aéronautique. L'apprentissage d'une
technique de routine doit s'accompagner obligatoi-
rement d'une préparation à affronter des situations
Apprentissage de plusieurs voies d'abord imprévues, même si elles sont rares. En chirurgie, la
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Si l'on arrive à pratiquer et à maîtriser plusieurs types survenue d'une complication reste ressentie comme
de voie d'abord, il est vrai que l'on peut s'adapter plus un événement tabou, honteux, inavouable. Le chirur-
facilement aux caractéristiques du patient. Un patient gien apprenant une voie d'abord devrait dans le même
psychiatrique ou incontrôlable sera plus surement temps apprendre à traiter les complications qui lui
opéré par voie antérieure. Chez un patient obèse, l'ex- sont inhérentes. Le meilleur enseignement ne peut
position postérieure est plus facile avec peut-être un être réalisé que dans le cénacle des salles d'opération,
risque plus élevé de luxation. Chez une femme âgée par compagnonnage au contact de la réalité, et non
ostéoporotique, la nécessité de diminuer les contraintes pas sur des supports publicitaires ne présentant qu'un
sur le fémur peut faire préférer une voie postérieure aspect bien virtuel, idyllique, de la réalité chirurgicale,
avec une cupule à double mobilité. Si l'on craint vrai- ce qui revient à masquer le reste. D'ailleurs, la proli-
ment la luxation, une voie transfessière de Hardinge fération de ce genre de publicités risque à terme de
peut être un bon compromis. Mais le chirurgien ayant plutôt desservir les techniques qu'elles sont censées
un débit opératoire limité qui s'aventure dans une promouvoir.
54 P. Massin

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57

La planification préopératoire
en deux dimensions conserve-t-elle
une place en pratique courante ?
E. DE THOMASSON

Introduction à des gammes d'implants élargies par les fabricants,


dans leur forme, leurs dimensions, leur modularité ou
L'objectif d'une prothèse totale de hanche est de leur mode de fixation.
rendre au patient une articulation indolore autorisant
le retour à une activité normale, ce qui, pour les plus Planification 2D : principe,
jeunes, est synonyme de reprise du sport ou de métiers
de force. Ces nouvelles exigences sollicitent fortement technique et résultats
l'articulation dont les performances doivent être opti-
misées [1–3]. Principe
La planification préopératoire doit anticiper les dif- La planification a pour objectif de prévoir l'architec-
ficultés chirurgicales en rapport avec l'anatomie du ture de la future articulation prothétique et, si possible
patient et l'origine de l'arthrose et permettre de pré- (et si c'est souhaitable), de reproduire l'anatomie de la
voir les tailles des implants acétabulaires et fémoraux hanche native. Pour cela elle doit :
qui rétabliront l'offset fémoral, le centre de rotation de • définir le centre de l'articulation de la hanche ;
l'articulation et la longueur du membre inférieur, ce qui • définir la position et la taille de la cupule ;
réduit les risques de complications [4–7] et augmente • permettre de choisir la taille de l'implant fémoral ;
la durée de vie des implants [8]. Dès lors, elle devient • définir le niveau de la coupe fémorale en fonction de la
indispensable et fait partie intégrante de l'intervention. taille de la pièce fémorale et de la longueur du col choisies.
Dès 1975, John Charnley et Maurice E. Müller
ont décrit la planification en deux dimensions (2D)
faite sur des radiographies standardisées à l'aide de
Technique 2D
calques [9, 10]. À partir des années 1990, la digi- C'est encore la technique la plus répandue. Elle dérive
talisation des radiographies a donné accès à une de la méthode décrite par Müller et Eggli [4, 10]. Elle
imagerie de meilleure qualité et dont l'agrandis- utilise des abaques d'implants fémoraux et acétabu-
sement était mieux contrôlé. La planification a laires qui sont superposés à la radiographie préopéra-
directement profité de cette technologie [11, 12] et toire du patient, réalisée selon un protocole strict.
les renseignements qu'elle a fourni se sont affinés. La planification s'effectue sur une radiographie
Simultanément, l'amélioration des performances des standard du bassin de face couché, centrée sur la sym-
scanners (réduction des doses d'irradiation et aug- physe pubienne et incluant le tiers proximal du fémur.
mentation du nombre de coupes) a rendu possible Dans la mesure du possible, les hanches sont en rota-
le développement de véritables prothèses sur mesure tion neutre, les rotules au zénith. La distance entre
[13] grâce à des logiciels qui analysent l'articulation la source de rayons X et la plaque est de 1,50 mètre
en 3 dimensions (3D). pour permettre un agrandissement arbitrairement fixé
Après avoir décrit le principe et la technique de la à 115 %, identique à celui des abaques des prothèses
planification 2D, nous présenterons ses résultats. Nous utilisées par le chirurgien.
discuterons ensuite de ses limites et conclurons sur la Sur le bassin de face centré, une droite tangente au
place qu'elle peut garder en pratique quotidienne, face bord inférieur des deux « U » radiologiques est tracée.
au développement de logiciels de planification en 3D Elle matérialise l'horizontale et sert de référence. Le
qui permettent d'assurer, au moins en théorie, le réta- centre de la tête fémorale, repéré à l'aide de calques
blissement de l'anatomie des hanches opérées grâce concentriques, est considéré comme le centre de

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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58 E. Thomasson

l'articulation (figure 7.1). Les abaques acétabulaires de façon que le centre de la tête prothétique se projette
permettent de déterminer la taille de cupule la mieux sur la droite passant par le centre de l'articulation et soit
adaptée au cotyle osseux. Une fois celle-ci choisie, le plus près possible du centre de l'implant acétabulaire
l'abaque de la cupule d'essai est présenté en respec- choisi. Selon le type de prothèse, l'offset et la longueur
tant une inclinaison de 45° dans le plan frontal. Son sont déterminés en faisant varier l'angle cervicodiaphy-
centre est positionné le plus symétriquement possible saire, la longueur du col (modulaire ou non) ou la pro-
de celui de la hanche controlatérale et doit se trou- fondeur de la tête fémorale, en tenant compte d'une
ver sur la ligne passant par le centre de l'articulation éventuelle inégalité de longueur (figure 7.4). Une fois
(figure 7.2). Les contours et le centre de la cupule ces caractéristiques précisées, le niveau de coupe du col
choisie sont dessinés sur la radiographie. Une deu- fémoral est dessiné sur la radiographie et repéré par
xième ligne parallèle à la première et passant par le rapport au sommet du grand ou au petit trochanter et
centre de l'articulation est tracée (figure 7.3). en fonction de la longueur de col réséquée (figures 7.5
Le choix de l'implant fémoral se fait en fonction de et 7.6). En cas de destruction importante de l'articula-
sa forme (droit ou anatomique), de son mode de fixa- tion, la planification sera réalisée sur la hanche saine,
tion (cimenté ou sans ciment) et de ses caractéristiques controlatérale.
propres (appui métaphysaire ou diaphysaire, existence Depuis la disparition des clichés argentiques, la pla-
ou non d'une collerette). L'implant cherche à épouser le nification s'effectue à partir d'images numérisées dont
plus parfaitement possible la partie proximale du fémur l'agrandissement est plus facile à contrôler mais qui
et à restituer un offset approprié, adapté à l'anatomie doit toujours être identique à celui des calques uti-
du patient. Une fois la taille choisie, l'implant est placé lisés par le chirurgien. Par ailleurs, la digitalisation

Figure 7.1. Repérage de l'horizontale en traçant une droite tan- Figure 7.3. À partir du centre de la pièce acétabulaire, une
gente au bord inférieur des « U3 » radiologiques et du centre de droite parallèle à la ligne des « U » est tracée, sur laquelle se
l'articulation à l'aide de calques concentriques. projettera le centre de la bille prothétique fémorale.

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Figure 7.2. Positionnement du calque du cotyle pour que son Figure 7.4. Choix de la prothèse fémorale la plus adaptée au
centre superpose le plus possible le centre de l'articulation. fémur et dont l'offset reproduit celui de la hanche native.
La planification préopératoire en deux dimensions conserve-t-elle une place en pratique courante ? 59

acétabulaire, mais dans 74 % des cas seulement pour


les tiges fémorales [15]. Ce chiffre peut atteindre
94 %, à la condition qu'une marge d'erreur d'une
taille soit acceptée [12]. Cette imprécision, parfai-
tement tolérable en cas d'utilisation de prothèses
cimentées, peut devenir particulièrement délétère en
cas d'utilisation d'implants sans ciment dont la sta-
bilité primaire est conditionnée par leur ajustement.

Paramètres extramédullaires
Longueur des membres inférieurs
L'inégalité de longueur postopératoire est souvent
Figure 7.5. Planification définitive avec détermination du niveau mal vécue par le patient, même si elle ne retentit sur
de coupe fémoral.
la statique vertébrale que quand elle est supérieure à
1 cm, ce que la planification permet d'éviter dans plus
de 95 % des cas [16]. Une erreur de 5 mm semble être
un meilleur objectif [17]. Dans environ 80 % des cas,
la planification 2D permet d'atteindre cet objectif, à
condition qu'elle soit réalisée avec rigueur [4, 8, 12,
17–20].

Offset de la hanche
C'est sur la restitution de ce paramètre que cette tech-
nique est la moins performante puisqu'elle n'atteint
son objectif que dans 60 à 80 % des cas [4, 8, 12, 17,
18, 20] Une partie de ces résultats médiocres provient
de l'impossibilité d'apprécier la longueur de l'offset
Figure 7.6. Résultat final.
fémoral sur une radiographie de face en cas d'attitude
vicieuse de la hanche (on ne peut en effet pas porter
des images a encouragé plusieurs sociétés spécialisées la hanche en rotation interne d'une valeur correspon-
dans l'imagerie médicale (Agfa Health Care, Medicad, dant à l'antéversion fémorale pour dérouler le col dans
Brainlab Orthoview, Merge Healh Care, Biomet, Care le plan frontal). Une autre provient de la difficulté à
Stream, Philips, Cerner, etc.) à développer des logiciels restituer le centre de rotation natif de l'articulation.
de traitement d'images appliqués à la planification L'utilisation de calques concentriques permet aisément
des prothèses de hanche. Une fois l'image étalonnée, de planifier sa position idéale, mais en pratique, c'est
le logiciel choisit la taille des implants acétabulaires un objectif souvent utopique, à moins de remettre en
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et fémoraux, et compense automatiquement les éven- cause la stabilité primaire et l'orientation de l'implant
tuelles inégalités de longueur et d'offset de la hanche à acétabulaire. Bonnin et al. [21] ont observé une média-
opérer [11, 14]. lisation pouvant atteindre jusqu'à 13 mm que l'offset
fémoral ne pourra pas toujours compenser. La plani-
Résultats fication 2D permet néanmoins d'éviter un positionne-
ment supérieur ou latéralisé dont le caractère délétère
La planification évite les erreurs grossières mais ses est connu [17].
résultats sont inégaux selon que l'on considère la pla-
nification des paramètres intra- ou extramédullaires
de l'articulation de la hanche.
Limites de la planification 2D
Les résultats de la planification 2D, même s'ils ont été
améliorés par l'emploi de logiciels dédiés et d'images
Paramètres intramédullaires digitalisées [19, 22–26], montrent leurs limites pour
La planification 2D prévoit la taille des implants déterminer avec précision la taille des implants à uti-
définitifs dans plus de 90 % des cas pour l'implant liser ainsi que leur offset. Cela provient à la fois de la
60 E. Thomasson

difficulté à déterminer précisément l'agrandissement mais aussi sur le choix de la taille de l'implant si l'on
de la radiographie du bassin de face [8] et à dérouler utilise une prothèse fémorale cimentée, ce qui était le
le col fémoral de la hanche à opérer en cas d'attitude cas dans la série princeps (96 %) [4].
vicieuse liée à l'arthrose.

grandissement radiologique Numérisation


Développée pour améliorer la qualité des images et faci-
Une erreur d'agrandissement a surtout des consé- liter leur stockage et leur transmission, la digitalisation
quences sur l'appréciation de l'encombrement intra- des images radiologiques n'a pas résolu le problème de
médullaire des implants et donc sur le choix de leur leur agrandissement [23]. En revanche, la numérisa-
taille. Les conséquences sont moindres sur l'évaluation tion permet d'utiliser des logiciels qui calibrent auto-
de la longueur et de l'offset. matiquement les images radiographiques grâce à des
marqueurs de taille connue (disques ou sphère) placés
Principes généraux dans le même plan coronal que la hanche à opérer et le
plus près possible de celle-ci.
L'agrandissement radiologique dépend de la distance Par ailleurs, un portefeuille d'abaques des princi-
entre la source des rayons et la plaque, ce qui peut paux implants disponibles dans le commerce est inté-
être facilement calculé, mais aussi de la distance entre gré à ces logiciels qui peuvent l'utiliser pour planifier
l'objet à radiographier et la plaque, ce qui est beau- l'intervention. Le logiciel choisit automatiquement
coup plus difficile à évaluer (figure 7.7). la taille des implants acétabulaires et fémoraux en
L'agrandissement (b) d'un objet (a) dépend de la dis- fonction de l'image radiographique, en compensant
tance entre cet objet et la source (d), ainsi que de la les éventuelles inégalités de longueur et d'offset de la
distance entre cet objet et la plaque (c) (a/b = d/c + d). hanche à opérer [11, 14], ce qui facilite et accélère la
Plus la distance entre la source et la plaque est grande, planification (figure 7.8).
plus les variations d'agrandissement en fonction de la Ce dispositif à un seul repère a été critiqué car la bille
distance entre l'objet à radiographier et la source sont ou la pièce utilisées se trouvent parfois à une distance
faibles. Eggli et Muller [4, 10] ont choisi de positionner telle de l'articulation que des erreurs d'agrandissement
la source à 1,50 mètre de la plaque pour obtenir un jusqu'à 11 % [27] ont été observées. Même en accep-
agrandissement de 1,18 ± 0,02 (tableau 7.1). Dans ces tant une marge d'erreur de ± 2 tailles, les implants
conditions, une variation de 10 cm de la distance de la posés ne correspondaient à ceux planifiés que dans un
hanche à planifier par rapport à la plaque entraîne une peu moins de 90 % des cas [10].
modification d'un peu plus de 6 % de l'agrandissement, Pour augmenter la précision du calcul de l'agran-
erreur acceptable pour calculer l'offset et la longueur, dissement, King et al. [28] ont développé un système
associant des marqueurs antérieurs et postérieurs. Par
rapport aux résultats obtenus avec une planification
à un seul repère, l'erreur moyenne avec un système à
double repère était significativement inférieure (1,1 %
versus 4,8 % [p < 0,001]), les valeurs extrêmes pou-

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vant être divisées par 4 (5,6 % versus 24,7 %).

d a/b = d/c+d
Images EOS®
Leur utilisation est en cours d'évaluation pour la pla-
a nification (HipEOS®). Le système EOS® permet l'ac-
quisition de deux images simultanément en limitant
c
la dose de rayons X absorbée grâce à des détecteurs
gazeux inventés par Georges Charpak.
Le faisceau de rayons X, très fortement diaphragmé
b sous forme d'une fine lame horizontale, atteint un
récepteur dont l'ouverture se réduit à une fente de
Figure 7.7. Schéma illustrant les conséquences de la distance
entre l'objet à radiographier, la source de rayons X et la plaque 0,5 mm d'épaisseur. Cette extrême collimatation, en
sur l'agrandissement. limitant le rayonnement diffusé, augmente le rap-
D'après Eggli et Müller [4]. port signal/bruit et permet de diminuer la quantité
La planification préopératoire en deux dimensions conserve-t-elle une place en pratique courante ? 61

Tableau 7.1
Coefficient d'agrandissement en fonction de la distance entre l'objet à radiographier et la source d'une part et la plaque
d'autre part
Distance de la source à l'objet à radiographier (cm)

Distance de l'objet % 100 150 200 250


à radiographier du
film (cm) 10 1,10 1,07 1,05 1,04

20 1,20 1,13 1,10 1,08

30 1,30 1,20 1,15 1,12

40 1,40 1,27 1,20 1,16

50 1,50 1,33 1,25 1,20

Associée à une modification du centre de rotation de


l'articulation, l'erreur de l'offset de hanche peut être
supérieure à 15 mm [17, 18].

De la planification
à la réalisation de l'arthroplastie
Dans des séries, certes anciennes [33, 34], il apparaît
que la médialisation du centre de rotation, associée à
une diminution de l'offset fémoral, serait la garante
d'une augmentation de la survie des prothèses de
hanche.
La tendance actuelle est plus de restituer l'anatomie
de la hanche à opérer [1, 3, 35]. Le rétablissement
de l'offset fémoral augmenterait l'amplitude articu-
laire [36] et réduirait le risque de luxation et d'usure
[2, 35, 37, 38]. Elle permettrait aussi l'amélioration de
Figure 7.8. Planification sur image digitalisée ave calibration.
la vitesse du déroulé du pas [1].
Le scanner et la planification 3D montrent claire-
de rayons X. Elle supprime la distorsion verticale des ment leur supériorité pour planifier l'offset fémoral et
images et autorise des mesures linéaires précises dans assurer un ajustement métaphysaire optimal de l'im-
le plan vertical [29], ce qui laisse espérer des résultats plant fémoral, condition indispensable à son intégra-
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se rapprochant des méthodes 3D, mais avec des doses tion [30–32].
d'irradiation beaucoup plus faibles. La planification 3D ne peut toutefois pas être consi-
dérée isolément et n'est qu'un outil permettant de
ppréciation de l'offset fémoral participer à la bonne réalisation d'une prothèse totale
de hanche. Il faut en effet disposer d'implants fémo-
Contrairement à la tomodensitométrie [25, 30–32], la raux, dont la variété et les caractéristiques permettent
radiographie de hanche de face ne permet pas l'évalua- d'atteindre les objectifs fixés par la planification [17,
tion de l'offset fémoral quand l'arthrose limite la rotation. 18]. Ce sont les prothèses sur mesure qui sont les plus
Une variation d'antéversion modifie la latéralisation appropriées pour atteindre ce but [13]. À défaut, les
fémorale proportionnellement au cosinus de l'angle prothèses « anatomiques » et les prothèses à col modu-
d'antéversion. Ainsi, une variation de 20° augmente laire apparaissent les mieux à même d'exploiter les
ou diminue la latéralisation fémorale de 15 % [18]. informations données par les scanners et la planifica-
C'est la raison pour laquelle, si la hanche controlaté- tion 3D [31, 32].
rale est saine, il est recommandé d'effectuer la planifi- La voie d'abord dont on a l'habitude doit aussi être
cation sur celle-ci. réfléchie et éventuellement adaptée. Elle peut, si elle est mal
62 E. Thomasson

maîtrisée, contrarier les prévisions de la planification. Ainsi, la hanche, ce qui évite les complications mécaniques
l'utilisation d'une voie d'abord antérieure expose à plus immédiates et assure un résultat fonctionnel conforme
d'erreurs d'alignement fémoral, en particulier quand on uti- aux souhaits de la majorité des patients.
lise des tiges fémorales droites en double coin [39]. Rivera La planification 3D apparaît plus séduisante car
et al. [40] ont également constaté que, par voie d'abord elle permet une meilleure analyse de l'anatomie de
antérieure, les implants fémoraux définitifs sont souvent la hanche, en particulier en cas d'arthrose évoluée.
plus petits que ceux planifiés, même en cas d'utilisation de Toutefois, l'exploitation de la précision des renseigne-
tiges courtes ou raccourcies. Enfin, et malgré la planifica- ments qu'elle fournit impose une technique opératoire
tion, les voies d'abord antérieures augmentent le risque de parfaitement maîtrisée et l'utilisation d'un implant
fracture fémorale par rapport à la voie postérieure [41]. Ces permettant de répondre à toutes les anatomies rencon-
risques peuvent être majorés par l'environnement local et trées. Cela peut conduire à dépasser les limites méca-
en particulier par un indice de masse corporelle élevé [42]. niques des implants, ce qui expose à leur rupture [44]
Ces résultats soulignent que, quel que soit le type ou à des descellements précoces [45].
de planification utilisé, l'expérience de l'opérateur et Enfin, si la restitution de l'offset et de la longueur
la connaissance de l'implant qu'il utilise sont des élé- du membre inférieur améliorent les performances de
ments essentiels pour améliorer les résultats [43]. l'articulation sur tapis de marche [1, 3], aucun des
scores utilisés en pratique courante ne peut l'objecti-
Conclusion ver [46].
De la même façon, si les résultats des études en labo-
La planification 2D est une étape essentielle pour le ratoire sont prometteurs pour l'usure des implants
succès d'une arthroplastie totale de hanche et doit être [35–37], le recul clinique est actuellement trop faible
recommandée en pratique courante. Sa précision a été pour pouvoir apprécier le bénéfice à long terme de
améliorée grâce à l'apparition de logiciels de planifica- la restitution de l'anatomie de la hanche native, que
tion sur images digitalisées. permet la planification 3D, alors qu'elle entraîne un
Elle permet, le plus souvent, de prévoir la taille surcoût et une irradiation supplémentaire, peu impor-
des implants à utiliser et de restituer l'anatomie de tants mais réels [47].

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65

Apport de la planification 3D
dans l'arthroplastie totale de hanche
H. SARI-ALI

Introduction
L'objectif de l'arthroplastie totale de hanche est de
supprimer les douleurs et de restaurer la fonction de
cette articulation. Cependant, les demandes fonction-
nelles des patients ne cessent d'augmenter avec désir
de hanche oubliée et possibilité de pratiques sportives.
Dans ce but, il faut restaurer une biomécanique de la
hanche aussi proche que possible de la normale. Pour
respecter ce cahier des charges, il est indispensable de
procéder à une planification précise de l'arthroplas-
tie afin d'analyser l'anatomie tridimensionnelle de la
hanche, d'anticiper les difficultés techniques, d'optimi-
ser le choix des implants ainsi que leur mode de fixa-
tion et de déterminer la voie d'abord la mieux adaptée. Figure 8.1. Détermination des centres natifs de l'acétabulum
Les paramètres anatomiques majeurs qui influencent (COR) et du centre de la tête fémorale (CTF).
La planification 3D permet de calculer les altérations vectorielles
la biomécanique de la hanche sont : 1) le centre de
induites pour le Centre cupule (Ccup) et le Centre bille (Cbille).
rotation (ou center of rotation [COR]) correspondant
au centre de l'acétabulum natif, 2) les coordonnées du
centre de la tête fémorale (CTF) qui incluent sa posi- 20 à 70 % pour la prédiction des tailles des implants
tion sur la ligne craniocaudale et l'offset fémoral, et définitifs [1–3]. Certaines planifications 3D (P3D)
enfin 3) les antéversions fémorale et acétabulaire. La incluant l'analyse de la densité osseuse ont montré
destruction articulaire crée un décalage entre le COR des précisions de 94 % à 100 % et une précision de
et le CTF correspondant à un déplacement initial (DI). planification deux fois plus élevée que les P2D pour
L'implantation des composants prothétiques créera de les longueurs de membres, les offsets et les centres de
plus une perturbation de ces deux centres : un dépla- rotations [4, 5] ;
cement acétabulaire (DA) du COR et un déplace- • l'analyse 2D sous-estime l'offset fémoral de l'ordre
ment fémoral (DF) du CTF. L'objectif théorique de la de 3,5 ± 2,6 mm avec des erreurs maximales de 13 mm
reconstruction est de compenser les déplacements vec- [6]. Cette erreur est due à la combinaison de l'anté-
toriels ainsi engendrés afin d'obtenir un déplacement version fémorale et d'un fréquent enraidissement en
global nul (figure 8.1). rotation externe de la hanche qui empêche de dérouler
le col afin de mesurer l'offset réel. Une P2D peut ainsi
Limites des planifications aboutir à une diminution finale de l'offset fémoral
bidimensionnelles classiques avec un risque de luxation, de boiterie ou d'asymétrie
de la marche ;
Les planifications (P) recommandées actuellement sont • le P2D n'intègre pas l'analyse de la densité osseuse
bidimensionnelles (2D), se fondant sur une radiogra- qui, en cas de très faible valeur, est corrélée à un risque
phie antéropostérieure calibrée du bassin et utilisant plus élevé de fracture et de non-fixation ;
des calques (digitaux ou non) à l'échelle. Cette tech- • les antéversions acétabulaires et fémorales ne
nique 2D présente de nombreuses limites : peuvent pas être analysées dans le P2D. Or, Sariali
• elle est peu précise, comme l'attestent les données et al. [6] ont bien montré que les antéversions varient
de la littérature qui montrent une précision variant de de 0 à 50° dans la coxarthrose primitive, même en

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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66 H. Sari- i

l'absence de dysplasie majeure. Ainsi, si on choisissait milieux des segments joignant le sommet des deux
arbitrairement une antéversion systématique de 20°, épines tibiales et le milieu des deux mortaises tibio-
cette valeur serait trop élevée pour certains patients tarsiennes (figure 8.3). L'analyse 3D des longueurs
générant ainsi un risque de luxation antérieure, et à évite les erreurs dues à des attitudes vicieuses fixées
l'inverse elle serait trop faible pour d'autres patients (adduction) ou secondaires à un flessum de hanche ou
pouvant induire un risque de luxation postérieure. de genou qui induisent de faux raccourcissements de
Enfin, plusieurs auteurs ont montré que les dimensions membre.
antéropostérieures et les dimensions médiolatérales du
canal fémoral n'étaient pas corrélées [7]. La taille de la nalyse de la densité osseuse :
tige fémorale peut donc être imposée par la dimension
sagittale du fémur, situation qui fausse la planification détermination du morphotype
2D de face. fémoral 3D
Nous allons décrire la méthode de planifica-
tion 3D fondée sur le scanner faible dose [8] que La densité osseuse calculée en métaphysaire en cen-
nous utilisons en pratique courante pour toutes les tromédullaire et en juxtacortical permet d'évaluer la
arthroplasties totales de hanche de première inten- difficulté du râpage fémoral ainsi que le risque de frac-
tion. Ces planifications utilisent le logiciel Hip- ture. Cette densité est exprimée en unités Hounsfield
Plan® (Symbios, SA). (UH). En moyenne, la densité centromédullaire est de
92 ± 68 UH [9]. Dans notre expérience, le passage des
râpes devient difficile au-delà de 150 UH et un alésage
Technique de planification 3D motorisé sur guide souple est nécessaire au-delà de
250 UH.
nalyse 3D des longueurs : Les densités faibles correspondent souvent à des
détermination des objectifs fémurs vieillis de type tuyau de poêle (de face et
d'allongement de profil) qui, dans notre expérience, sont plus à
risque de fracture en cas d'utilisation d'implants
L'inégalité de longueur des membres inférieurs (ILMI) sans ciment (figure 8.4A). Les densités élevées sont
se compose d'une partie intra-articulaire corres- corrélés à des fortes courbures fémorales avec des
pondant à l'usure ou à une dysplasie et d'une partie morphotypes de type flûte de champagne (face et
extra-articulaire segmentaire souvent séquellaire de profil) (figure 8.4B). Cela nous pousse à proposer
troubles de la croissance ou de fractures de l'enfance. des implants fémoraux cimentés en cas de densité
Dans notre expérience clinique, 34 % des patients nulle ou négative et une fixation sans ciment dans
sont plus longs en extra-articulaire du côté à opérer. les densités normales.
Le patient doit en être informé car l'ILMI persistera en
postopératoire.
Des plans et points caractéristiques sont repérés en
3D : le plan axial passant par la partie distale des échan-
crures cotyloïdiennes, le milieu des petits trochanters
(figure 8.2), les sommets des grands trochanters, les

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Figure 8.2. Le calcul des inégalités de longueur des membres


inférieurs (ILMI) intra-articulaires nécessite la détermination Figure 8.3. Techniques de calcul 3D des ILMI extra-articulaires.
1) du plan axial passant par la partie distale des échancrures epérage des sommets des grands trochanters, des milieux des
cotyloïdiennes et 2) le milieu des petits trochanters. genoux et des chevilles.
pport de la planification 3D dans l'arthroplastie totale de hanche 67

Détermination du plan pelvien nalyse de l'acétabulum et


antérieur détermination des objectifs
Le calcul des antéversions acétabulaires doit se faire d'antéversion
dans un plan anatomique indépendant de la position La taille de la cupule à implanter correspond au dia-
fonctionnelle. Très souvent, la position du bassin n'est mètre antéropostérieur mesuré dans le plan axial à
pas contrôlée dans le scanner, ce qui génère des incli- hauteur du centre de rotation. Nous préconisons géné-
naisons coronales, axiales et sagittales susceptibles ralement de poser la cupule sur l'arrière-fond sans
d'induire des erreurs allant jusqu'à 15° ou 20° pour le l'effondrer et de restaurer l'antéversion anatomique
calcul des antéversions acétabulaires [10]. Ce plan ana- native afin de diminuer le risque d'impingement [11].
tomique est le plan pelvien antérieur (PPA) qui passe par En cas de bassin rétroversé et fixé avec absence
le sommet des deux épines iliaques antérosupérieures et complète de mobilité adaptative du bassin, le patient
qui est tangent aux épines pubiennes. En moyenne, le aura en permanence une antéversion acétabulaire éle-
PPA est oblique en bas et en avant de 5°± 6°. vée correspondant à celle obtenue normalement en
position assise. Il est recommandé de diminuer l'anté-
Détermination des centres version acétabulaire afin de limiter le risque de luxa-
acétabulaire (CO ) et de tête tion antérieure ou de contact de bord antérieur (edge
loading antérieur) [12]. Dans ce cas, se pose également
fémorale (CTF) avant destruction : un problème technique lors du fraisage qui peut être
définition du déplacement initial difficile avec un risque de fraisage antérieur excessif
(D ) (figure 8.5).
En cas de luxation congénitale de la hanche, nous
La détermination du centre de rotation natif de la préconisons soit de symétriser par rapport à la hanche
hanche (COR) peut se faire à l'aide d'une hémisphère controlatérale si celle-ci est saine, soit d'utiliser une
acétabulaire qui est posée tangentiellement à l'os sous- valeur moyenne de 15° comme proposé par certains
chondral. Une sphère superposée sur la tête fémorale auteurs [13].
permet de déterminer le centre natif de la tête fémorale Afin de s'assurer de la stabilité primaire de la cupule,
(CTF). Dans une hanche normale, le COR et CTF sont il est possible d'analyser la densité de l'os sous-chon-
confondus. Le vecteur joignant ces deux points cor- dral au contact de l'implant. Par expérience, la stabi-
respond à l'usure et donne les corrections à réaliser en lité est obtenue si la cupule repose sur de l'os de densité
termes d'allongement et de médialisation ou latéralisa- > 200 UH, au moins en trois points : les deux parois et
tion (voir figure 8.1). le toit (figure 8.6).
Une attention particulière doit être prêtée à la vallée
du psoas qui, en cas d'exagération, doit faire choisir
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Figure 8.5. Le plan pelvien antérieur (PPA) est indiqué par une
ligne rose.
. Bassin mobile. B. Bassin rétroversé fixé. En cas de bassin rétro-
Figure 8.4. A. Densité osseuse nulle correspondant à un fémur versé fixé, l'antéversion de la cupule peut être diminuée afin
vieilli de type tuyau de poêle. B. Densité osseuse élevée corres- d'éviter une instabilité antérieure due à un défaut de mobilité
pondant à un fémur de type flûte de champagne. adaptative du bassin en position couchée.
68 H. Sari- i

Figure 8.7. En cas de conflit potentiel avec le psoas (B), on


Figure 8.6. La projection de la densité de l'os en contact avec peut être amené à diminuer le diamètre de la cupule (A) ou
la cupule permet d'anticiper la stabilité primaire de celle-ci. à modifier la technique de fraisage.
Pour que la cupule soit stable, il faut qu'elle soit au contact avec
de l'os de densité > 200 UH au moins au niveau de trois points :
les deux parois et le toit.

une taille de cupule plus petite pour éviter tout conflit


avec le psoas (figure 8.7).
À ce stade, trois éléments peuvent également être
analysés : 1) les ostéophytes à réséquer (arrière-fond,
parois), 2) les géodes à greffer ainsi que 3) la distance
entre l'arrière-fond et la lame quadrilatère. Si cette
distance est faible voire nulle, le fraisage doit être
doux et progressif car toute effraction de l'arrière-
fond peut générer une fracture de la lame quadrila-
tère avec un risque d'instabilité primaire de l'implant Figure 8.8. A. Situation à risque d'instabilité primaire de la
(figure 8.8). cupule en cas d'effraction de l'arrière-fond qui, dans ce cas, est
confondu avec la lame quadrilatère. B. Localisation des géodes
à évider et à greffer impérativement.
Simulation de l'implantation
de la cupule : détermination
du déplacement acétabulaire induit
Une fois la simulation du fraisage et de l'implanta-
tion faite, des mesures 3D entre le bord de la cupule
et le rebord osseux acétabulaire peuvent être réalisées
afin d'aider à la reproduction de la position planifiée
lors de la chirurgie (figure 8.9). Le fraisage induit
une perturbation du COR notée déplacement acéta-

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bulaire. Généralement, il se produit une translation
postéro-cranio-médiale générant un risque de laxité
antéropostérieure.

Détermination du plan d'élection


fémorale et analyse du morphotype
fémoral
L'analyse du fémur débute par la détermination du
plan d'élection fémoral passant par l'axe de la diaphyse
fémorale et orienté dans l'axe de la métaphyse fémo-
rale supérieure (figure 8.10). À cette étape, le morpho- Figure 8.9. Des mesures 3D entre le bord de la cupule et le
type fémoral peut être déterminé en calculant les index rebord osseux acétabulaire peuvent être faites afin d'aider à la
d'évasement dans le plan coronal et sagittal [7]. reproduction de la position planifiée lors de la chirurgie.
pport de la planification 3D dans l'arthroplastie totale de hanche 69

Figure 8.10. Détermination du plan d'élection fémoral : passant


par l'axe du fémur et parallèle à l'axe métaphysaire fémoral
supérieure.

Choix du type d'implant


et simulation de l'implantation
de la tige : détermination
du déplacement fémoral induit Figure 8.11. En cas de fraisage acétabulaire postérieur excessif
nécessaire, l'antéversion fémorale doit être diminuée (B) par
La simulation de l'implantation de la tige se fait
rapport à l'antéversion fémorale native (A) afin de stabiliser
simultanément sur les trois vues coronale, sagittale la hanche.
et axiale (figure 8.10). La taille idéale de l'implant
est jugée sur le taux de remplissage et de congruence
fémorale. Afin d'avoir une vision 3D intégrée, une L'autre situation ou une diminution de l'antéversion
visualisation en temps réel des densités de l'os en s'avère nécessaire est le trouble de torsion métaphy-
contact avec la totalité de l'implant permet de posi- saire avec une bascule postérieure de la calotte cépha-
tionner celui-ci dans le canal fémoral et d'antici- lique par rapport au col fémoral.
per la position définitive de la tige (figure 8.10).
L'implantation de la tige peut induire une perturba-
tion du centre de la tête fémorale impliquant : la lon- églage fin avec têtes modulaires
gueur du membre, l'offset fémoral et l'antéversion L'objectif de reconstruction est d'obtenir un déplace-
fémorale native. La perturbation du CTF est notée : ment vectoriel global nul : les déplacements induits par
déplacement de tête fémorale (DF). l'arthroplastie sur le versant fémoral et acétabulaire
doivent se compenser. Ainsi, en cas de médialisation
nalyse des antéversions nécessaire du COR (dysplasie acétabulaire), la dimi-
combinées : validation nution de l'offset acétabulaire peut être compensée par
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une augmentation de l'offset fémoral afin de maintenir


de l'antéversion fémorale l'offset global constant (figure 8.12).
Concernant l'antéversion fémorale, nous conseil-
lons de reproduire si possible l'antéversion native Techniques disponibles pour
afin de garder des tensions musculaires inchangées.
Cependant, il est des cas où il faut modifier l'antéver-
reproduire la planification 3D
sion planifiée afin d'éviter le risque de luxation. Par Des mesures 3D peuvent être faites afin de reproduire
exemple, en cas de nécessaire fraisage postérieur indui- la planification 3D (figures 8.9 et 8.13) :
sant une translation postérieure de plus de 6 mm, le • la hauteur de la coupe d'ostéotomie : par rapport au
risque de luxation antérieure devient important [14]. sommet du petit trochanter, de la fossette digitale et du
Dans ce cas, la diminution de l'antéversion fémorale sommet du grand trochanter ;
permet de postérioriser le centre de la tête fémorale • la mesure 3D de la résection fémorale ;
et de compenser le déplacement acétabulaire par un • la distance entre le sommet du petit trochanter et le
déplacement fémoral (figure 8.11). sommet du col de la tige définitive ;
70 H. Sari- i

• concernant l'antéversion fémorale : l'orientation de 93 à 100 % pour la tige fémorale. La précision de


relative de la tige par rapport à la section osseuse dans la planification est de l'ordre de 0,5 ± 3° mm pour les
le plan de l'ostéotomie ; centres de rotation, 1,3 ± 3,5 mm pour les longueurs et
• concernant l'antéversion acétabulaire : les mesures 0,7 ± 2,5° mm pour les offset fémoraux. La précision
entre le rebord de la cupule et le rebord osseux de de planification des antéversions est de 2° ± 4,6° pour
l'acétabulum. le fémur et de 2,7° ± 5° pour la cupule. L'utilisation
des mesures 3D entre le rebord de la cupule et le rebord
Précision de la planification 3D osseux acétabulaire permet d'améliorer significative-
ment la précision de pose de la cupule ainsi que de dimi-
Plusieurs études ont montré une grande précision de nuer par deux le nombre des valeurs aberrantes selon
cette planification 3D en moyenne deux fois supérieure à les critères de Lewinnec ainsi que ceux de Callannan
la précision des planifications bidimensionnelles [4]. En décrits pour les couples de frottement dur-dur [15].
effet, pour la technique de P3D décrite, les tailles défini-
tives des implants sont les mêmes que celles implantées Planifications des troubles
dans 86 à 100 % des cas pour la cupule acétabulaire et
de torsion fémorale
La technique de planification 3D présentée anticipe
avec une grande précision la position définitive de la
tige fémorale et permet d'analyser finement les altéra-
tions induites sur le centre de rotation. L'analyse tor-
sionnelle du membre inférieur inclut cinq paramètres
intriqués (figure 8.14) :
• le centre de rotation définitif, en particulier dans le
plan antéropostérieur ;
• l'antéversion acétabulaire ;
• la version de la métaphyse fémorale supérieure ;
• l'antéversion fémorale avec la position définitive du
centre de la bille fémorale ;
• et l'angle du pas définitif.
Les troubles torsionnels peuvent être soit en rapport
avec une altération du centre de rotation induite par
Figure 8.12. En cas de médialisation nécessaire du centre le fraisage, soit secondaires à une dysplasie fémorale.
de rotation (A) due au fraisage (B), la diminution de l'offset En cas de translation postérieure trop importante
acétabulaire peut être compensée par une augmentation de du COR, peut apparaître une instabilité antérieure ;
l'offset fémoral afin de maintenir l'offset global constant (C). inversement, une translation antérieure du COR peut

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Figure 8.13. A. Afin de reproduire le P3D, les mesures suivantes


peuvent être utilisées : la hauteur du plan de l'ostéotomie par Figure 8.14. Le P3D de ce cas montre un trouble de torsion
rapport au sommet du petit trochanter (PT), la fossette digitale sévère avec une version fémorale proximale de 63° augmentée
(FD) et le sommet du grand trochanter (GT). Pour l'antéversion de 40° par rapport à l'antéversion fémorale native.
fémorale, la position relative de la tige par rapport à l'os dans Une rétroversion de 40° du col est nécessaire pour stabiliser la
le plan de l'ostéotomie est visualisée (B). hanche.
pport de la planification 3D dans l'arthroplastie totale de hanche 71

Figure 8.16. En cas de fémur à forte courbure sagittale, l'utili-


sation d'une tige droite peut engendrer une antéversion fémo-
rale définitive plus faible (9°) (A) que l'antéversion fémorale
native (19°) (B) avec risque d'instabilité postérieure.
Figure 8.15. Exemple de tige sur mesure permettant de corriger L'utilisation d'une tige anatomique courbe permet de résoudre
un trouble torsionnel sévère montré dans la figure 8.14. ce problème.

générer une instabilité postérieure. L'anticipation de posent le problème des fractures ainsi que les risques
la position définitive du COR aide à choisir une éven- de fretting et de pseudotumeurs [17].
tuelle adaptation de l'antéversion fémorale définitive Le cas inverse peut également se produire avec une
en fonction de ce paramètre (figure 8.11). antéversion définitive inférieure à l'antéversion fémo-
En cas d'augmentation excessive de l'antéversion rale native. Cette situation est à risque d'instabilité pos-
fémorale due à une dysplasie fémorale, il existe un térieure et d'excès d'angle du pas (marche en rotation
risque soit de luxation antérieur ou de contact de bord externe). Dans notre expérience, cela peut survenir en
antérieur (« micro-subluxation »), soit une diminution cas d'utilisation d'une tige droite dans un fémur à forte
de l'angle du pas qui peut générer des troubles sévères courbure antérieure (figure 8.16). L'utilisation d'une
de la marche (marche en rotation interne). tige anatomique incluant une courbure antérieure et
Dans ces cas, trois solutions peuvent être envisagées : une torsion métaphysaire permet généralement de
• utilisation d'une tige sous-dimensionnée cimentée reproduire l'antéversion fémorale et d'éviter cet écueil.
qui peut être tournée dans le canal jusqu'à obten- Ainsi, il apparaît que le P3D permet d'optimiser le
tion de l'antéversion désirée. Il existe dans certaines choix de la forme de l'implant (droit, anatomique par-
gammes de prothèse des tiges dites dysplasiques (ou fois sur-mesure) en fonction du morphotype fémoral.
tiges « droites »). Ce choix simple pose le problème
de la résistance en fatigue de ces tiges dysplasiques de Conclusion
faible diamètre avec un risque de fracture de tige ;
• utilisation d'une tige sans ciment standard avec La planification 3D préopératoire permet d'analyser
ostéotomie fémorale associée. Cette solution techni- finement l'anatomie 3D des patients afin de détecter
quement plus difficile est associée à des suites chirur- les données aberrantes et de déterminer les objectifs de
gicales plus complexes avec une période de mise en reconstruction à atteindre.
décharge postopératoire de l'ordre de 45 jours. ; Cette technique permet une anticipation des difficul-
• utilisation d'une tige monobloc sur mesure permet- tés chirurgicales de reconstruction et si nécessaire une
tant une rétroversion personnalisée du col par rapport adaptation de la voie d'abord et du choix des implants.
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au corps de la prothèse [16] (figure 8.15). Les tiges sur Elle permet également d'optimiser le choix de
mesure sont associées à un surcoût à mettre en balance l'implant fémoral, en particulier pour résoudre des
avec la simplification de la procédure chirurgicale. troubles de torsion qui peuvent générer des risques
Nous les réservons aux dysplasies sévères. d'instabilité ou de micro-instabilité (edge loading)
Nous pouvons citer également la possibilité d'utili- ainsi que des troubles de la marche par modification
sation de cols modulaires rétroversés. Nous n'avons de l'angle du pas.
pas retenu cette solution, car ces cols ne permettent Des mesures extraites du 3D permettent une exécu-
que des rectifications limitées (inférieures à 10°) et tion précise de la planification 3D.

Réfé ences
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73

Apport de l'EOS® : une nouvelle


approche de la planification
des prothèses totales de hanche
J.-Y. LAZENNEC

Introduction La planification fondée sur les mesures scanner reven-


dique une meilleure précision d'analyse, reproductible
La planification constitue une étape importante dans et fiable, optimisant en particulier le choix des tailles
la réalisation d'une prothèse totale de hanche (PTH). fémorales grâce à l'analyse endodiaphysaire [6, 7].
Il s'agit avant tout d'anticiper les difficultés liées à la La réalisation d'un scout view complet, « comme un
restitution de l'anatomie locale de la hanche (offset fémo- pangonogramme », permet d'apprécier une inégalité de
ral et offset global intégrant la position du cotyle, loca- longueur anatomique qui ne serait pas liée à l'articula-
lisation du centre de rotation, antéversions cumulées du tion coxofémorale, sans toutefois permettre une évalua-
cotyle et du fémur). Le réglage de la longueur du membre tion de l'impact d'un flessum ou d'un recurvatum de
est un sujet sensible, d'autant que, de plus en plus sou- genou en position debout ou l'influence d'une déviation
vent, les patients sont porteurs d'autres arthroplasties des frontale des membres liée aux genoux ou à l'arrière-pied.
membres inférieurs ou présentent un rachis enraidi soit Mais la planification d'une PTH de première inten-
par le vieillissement, soit par une chirurgie préalable. tion se résume-t-elle à recréer une hanche « idéale »
Pendant longtemps, les planifications ont été prati- morphologiquement et à la symétrisation des deux arti-
quées sur des films standard sur lesquels étaient appo- culations coxofémorales ? L'évaluation figée du patient
sés les calques transparents correspondant à la prothèse allongé lors de la tomodensitométrie (TDM) est-elle la
implantée avec un agrandissement standard de 115 ou seule option raisonnable ? Le développement de l'image-
120 %. Il s'agissait avant tout de prévoir la longueur rie faible dose EOS® permet de reconsidérer totalement
du col prothétique, la taille et le type d'implant à utili- nos objectifs en termes de planification des PTH. Les
ser ainsi que le niveau de coupe cervicale à réaliser. Des acquisitions en position fonctionnelle assis et debout
études prospectives utilisant cette technique et compa- permettent en effet d'aller au-delà de la simple prévi-
rant la taille du calque choisi à la taille de l'implant sion de la taille des implants et du niveau de coupe du
définitif ont montré des résultats acceptables [1]. col fémoral pour régler la longueur du membre opéré.
L'émergence de la numérisation des clichés et le déve-
loppement de logiciels dédiés ont permis de gagner en
précision, mais sont apparus de nouveaux problèmes liés Quel est l'apport de l'EOS®
à la calibration des clichés nécessaire à l'obtention d'une à la planification de la chirurgie
cohérence avec les calques utilisés en termes d'échelle.
La planification radiographique classique est fon-
prothétique de la hanche
dée sur une radiographie de bassin de face, avec des de première intention ?
critères de qualité strict : distance faisceau, plaque
fixe, en position debout, les genoux en extension et les L'imagerie EOS® donne des
pieds en rotation interne maximale. Mais les images informations utiles pour la
obtenues ne sont que la projection bidimensionnelle
(2D) de structures tridimensionnelles (3D), ce qui
planification en 2D et en
explique que, dans d'autres séries, les résultats en 3D – « planification anatomique
termes de choix des implants soient nettement moins et fonctionnelle locale » et
satisfaisants, en particulier en cas de flessum de genou
et de hanche ou de limitation de la rotation interne de
« planification intégrée »
la hanche, et ce d'autant que la planification n'intègre L'imagerie EOS® est fondée sur l'acquisition simul-
pas la vue de profil [2–5]. tanée de deux images radiographiques orthogonales
La prothèse totale de hanche dans tous ses états
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74 J.-Y. Laz nn c

grâce à un balayage linéaire, tout en maintenant une


dose d'irradiation très faible, jusqu'à 10 fois inférieure
Paramètres spinopelviens mesurés
à celle d'une radiographie standard [8, 9]. en EOS®
Cette imagerie permet d'obtenir une image radiogra- • La pente sacrée (PS) correspond à l'angle formé
phique sans agrandissement et sans distorsion, à la dif- par l'horizontale et la tangente au plateau supérieur
férence du pangonogramme classique ou d'un cliché du sacrum. Chez un sujet asymptomatique de 30 à
full spine. 40 ans, elle est de 40° en moyenne et passe à 35° chez
Un balayage corps entier est réalisé en 20 secondes un sujet de 60 à 70 ans qui représente la « population
et permet d'obtenir une vision globale du patient pré- cible » de beaucoup de PTH.
cieuse pour une « planification intégrée » de la pro- • La version pelvienne (VP) correspond à l'angle
thèse à réaliser. formé par la verticale et la ligne joignant l'axe
La planification comporte donc deux étapes : bi-coxofémoral au centre du plateau sacré sur une
• la vision « 2D » de débrouillage de face et de profil vue de profil. Chez un sujet asymptomatique de 30 à
du patient dans sa totalité. Il s'agit de rechercher un 40 ans, elle est de 11° en moyenne et passe à 17° sur
déséquilibre frontal ou sagittal et/ou une inégalité de un sujet de 60 à 70 ans. L'angle d'incidence est formé
longueur des membres qui peut être générée par les par la droite perpendiculaire au plateau sacré en son
secteurs osseux, mais aussi par les secteurs articulaires milieu et la ligne joignant ce milieu au centre de l'axe
du genou et/ou de l'arrière-pied ; bi-coxofémoral. Il s'agit d'un paramètre anatomique
• la réalisation d'une modélisation 3D par le logiciel propre à chaque individu. L'angle d'incidence stan-
sterEOS® à partir d'une base de données contenant des dard est proche de 50° mais peut être franchement
modèles statistiques anatomiques et des algorithmes atypique, témoignant de variations anatomiques dont
de détection des contours osseux. il faut tenir compte :
Le chirurgien obtient, grâce au logiciel HipEOS®, – une faible incidence induit de faibles valeurs abso-
une information « en temps réel » sur les conséquences lues de VP et de PS, donc une plus faible adaptabi-
locales de ses choix en termes de longueur, d'offset, lité en cas de déséquilibre sagittal. La VP souvent
d'antéversions relatives et cumulées. Il s'agit d'une associée entraîne une « ouverture acétabulaire » plus
« planification anatomique et fonctionnelle locale » marquée qu'il faut pouvoir anticiper ;
centrée sur l'articulation coxofémorale. – à l'inverse, une forte incidence pelvienne associée
Mais les images corps entier apportent une nou- à une VP plus forte est plutôt associée à une faible
velle dimension à la planification d'une PTH. Pour un antéversion acétabulaire fonctionnelle, et donc à un
nombre significatif de patients, l'atteinte articulaire de risque de conflit antérieur après implantation si cet
la coxofémorale s'intègre dans un déséquilibre global élément n'est pas pris en compte.
ou segmentaire, ce qui impose une vision critique à la • Le paramètre SVA (sagittal vertical axis) mesure le
recherche de patients « hors normes ». décalage en millimètres entre le coin postérosupérieur
Cette vision impose l'acquisition d'une «  culture de S1 et la verticale issue du centre de C7 [10]. Chez
nouvelle » pour le chirurgien de la hanche qui sera de un sujet asymptomatique de 30 à 40 ans, il est de –
plus en plus confronté à une problématique « hanche- 16 mm en moyenne et passe à 5 mm chez un sujet de
rachis ». Des paramètres simples et facilement obte- 60 à 70 ans (figure 9.1).
nus à partir du logiciel SterEOS® d'exploitation des

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• L'angle TPA (T1 pelvic angle) est l'angle entre d'une
images corps entier permettent de dépister ces cas et de part la ligne issue du milieu de T1 et le milieu de l'axe
réaliser une « planification intégrée » grâce à la vision bi-coxofémoral et d'autre part la ligne issue de ce der-
d'ensemble du patient. nier point et rejoignant le milieu du plateau supérieur
La planification intégrée nécessite la reconnaissance : du sacrum [11]. Chez un sujet asymptomatique de
• des paramètres lombopelviens ; 30 à 40 ans, il est de 6° en moyenne et passe à 12°
• des mécanismes de compensation, en cas de défor- chez un sujet de 60 à 70 ans.
mation ou de raideur rachidienne, et des conséquences • Le paramètre GSA (global sagittal angle) corres-
de la posture du patient sur le positionnement fonc- pond à l'angle entre les lignes joignant le milieu des
tionnel de la cupule ; condyles fémoraux au milieu du plateau sacré d'une
• des compensations ou des déséquilibres frontaux part et au milieu de C7 d'autre part [12]. Sa valeur
(bassin oblique, inégalité de longueur). habituelle est de 0,7° ± 5,9° (figure 9.2).
pport de l'EOS® : une nouvelle approche de la planification des prothèses totales de hanche 75

B
Figure 9.1. A, B. La vision globale du patient est disponible de face et de profil.
HipEOS® délivre automatiquement une première proposition pour la taille et la position des implants en fonction de l'anatomie
du patient et des modèles de PTH disponibles dans la bibliothèque du chirurgien.

A
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B C
Figure 9.2. A. Le chirurgien optimise la position et de la taille des implants en travaillant sur les données de face et de profil (ici en
mode 2D). B. L'assemblage des implants (ici en mode 3D) permet de matérialiser le centre de rotation de la hanche prothétique.
C. Le rendu 3D global permet de visualiser la reconstruction sous tous les angles de la vue de face au profil.
76 J.-Y. Laz nn c

nalyse des données EOS® de profil : moins d'antéversion acétabulaire si le bassin est
« rétroversé » avec une version pelvienne majorée et
les mécanismes de compensations plus d'antéversion acétabulaire si le bassin est trop
dans le plan sagittal basculé en avant (faible version pelvienne).

Ces mécanismes intègrent :


• l'augmentation de la VP (caractérisant la « rétrover-
nalyse des données EOS® de face :
sion pelvienne ») qui est plus fréquente que la diminu- bassins obliques et inégalités
tion de la VP (« antéversion pelvienne ») ; La recherche d'une inégalité osseuse ou fonctionnelle
• le flessum des hanches et des genoux. est une donnée essentielle apportée par la planification
Lorsque la bascule antérieure du tronc augmente EOS®.
(augmentation de la VP, du GSA et du SVA et réduction Devant un bassin oblique, la comparaison simple
de la PS), les membres inférieurs sont recrutés en fles- des clichés debout et assis de face permet d'identifier
sum pour favoriser la bascule postérieure et la trans- un bassin oblique fixé ou réductible, ce qui est essentiel
lation postérieure du bassin. Il s'agit d'un mécanisme pour la décision d'une correction de longueur éven-
physiologique dont l'amplitude est connue en fonc- tuelle au niveau prothétique. Face à une inégalité, des
tion des tranches d'âge. Il convient d'en tenir compte épreuves de calage peuvent être réalisées afin d'opti-
pour le réglage acétabulaire et ne pas s'imaginer que miser les choix de compensation pour horizontaliser le
toutes les hanches prothétiques fonctionneront avec bassin et équilibrer les centres de rotation des hanches.
un cône de mobilité « idéal » et une réserve d'extension Il est également important d'évaluer la rotation du
normale. Le risque est un réglage acétabulaire mécon- bassin en position fonctionnelle debout, notamment
naissant ces adaptations avec une antéversion excessive chez les patients présentant une scoliose lombaire :
source de conflit postérieur en position debout et à la • une rotation en « iliaque antérieur » mise en évi-
marche [13]. dence par l'imagerie EOS® mais facilement négli-
• Chez un sujet dont le rachis est souple, le passage de la gée ou sous-estimée par le scanner allongé entraîne
position debout à la position assise est associé à une aug- une ouverture supplémentaire du cotyle en avant. Il
mentation de la VP (V > P postérieure ou « rétroversion » s'agit d'une source d'instabilité antérieure en position
du bassin) et à une réduction de la PS. Cette adaptation est debout à moins qu'elle ne soit corrigée par une réduc-
unique pour chaque patient, ce qui justifie la planification tion planifiée d'antéversion de la cupule prothétique.
pour le sujet debout et une anticipation pour la position Il s'y associe souvent une impression de rallongement
assise, ce que ne permettent ni la planification classique ni fonctionnel dont il faut tenir compte dans les choix
l'usage du scanner. Ces changements entraînent une aug- ultimes de longueurs de tête ;
mentation de l'antéversion fonctionnelle mesurée dans le • le phénomène inverse peut être observé pour une
plan horizontal, ce qui limite les risques de conflit anté- posture en « iliaque postérieur » et ici le risque est une
rieur et « protège » contre la luxation postérieure. Il faut instabilité postérieure en position assise si la rotation
compter environ 0,8° d'augmentation d'antéversion pour persiste dans cette situation (figure 9.3A,B).
1° de variation de VP ou de PS [14].
• Chez un sujet dont le rachis est raide, les variations
de la VP sont faibles entre les acquisitions debout et Comment planifier la position de
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assis en EOS®. On peut se retrouver avec un sujet la cupule et de l'implant fémoral ?
« debout comme en position assise ».
– Si le bassin est trop basculé en arrière (VP posté- La procédure de planification est optimisée par l'ob-
rieure), l'antéversion acétabulaire est figée et parfois tention d'informations en temps réel sur les consé-
avec une valeur excessive, ce qui a un rôle protecteur quences des choix du chirurgien.
en position assise, mais peut générer un conflit pos- Une première étape concerne la reconstruction ana-
térieur à la marche. tomique virtuelle de l'articulation coxofémorale et du
– Si le bassin est trop basculé en avant (VP anté- membre inférieur (logiciel HipEOS®) (figures 9.4 et 9.5).
rieure), l'antéversion acétabulaire est trop faible, ce Pour le cotyle, le chirurgien peut apprécier sur son
qui expose à un risque de conflit cinématique pour écran les conséquences immédiates d'une modifica-
la position assise avec une potentielle instabilité tion de l'inclinaison frontale ou sagittale de la cupule
postérieure. choisie en fonction de l'enveloppe osseuse du bas-
– Le choix de l'orientation acétabulaire sera alors sin reconstituée. La taille d'implant proposée auto
ajusté par rapport au réglage classique qui ne tien- matiquement par HipEOS® peut être modifiée à tout
drait compte que du référentiel osseux pelvien : moment en fonction des variations d'encombrement
pport de l'EOS® : une nouvelle approche de la planification des prothèses totales de hanche 77

B C

Figure 9.3. A–C. Les acquisitions de profil debout et assis réalisées en préopératoire permettent d'anticiper les amplitudes articu-
laires en fonction de la position des implants.
En cas de limitation anormale ou de déséquilibre des amplitudes, il est possible de corriger la position des implants.
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Figure 9.4. Une simulation chiffrée des amplitudes est possible : ici simulation de la position debout.
78 J.-Y. Laz nn c

Figure 9.5.
. Planification d'une PTH. Le patient présente un déséquilibre frontal et sagittal debout (bassin oblique et SV anormal). B. La com-
paraison avec l'acquisition en position assise montre la réductibilité de l'obliquité du bassin. Le bassin oblique debout est bien lié au
flessum de la hanche gauche.

liées aux changements d'orientation. L'antéversion est La fonction automatisée d'assemblage de la tête
exprimée par rapport au plan pelvien antérieur (PPA), fémorale et de la cupule permet, enfin, d'apprécier la
ce qui peut faire le lien avec l'utilisation éventuelle de localisation du centre de rotation de la hanche pro-
la navigation peropératoire. L'antéversion est aussi et thétique et surtout la modification de longueur du

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surtout exprimée par rapport au plan horizontal du membre en charge par rapport à sa longueur initiale et
patient debout, notion pratique plus facile à concevoir par rapport au membre opposé.
qu'une référence au PPA, dont nous savons qu'il est Une deuxième étape permet d'analyser la reconstitu-
loin d'être vertical dans la totalité des cas. tion fonctionnelle de l'articulation coxofémorale à par-
Pour le fémur, le chirurgien peut modifier à tout tir des données acquises en position debout et assise :
moment, rapidement et très simplement, le niveau de • la planification par rapport aux images debout est
sa coupe du col et l'antéversion fémorale. À partir un apport essentiel pour réfléchir à la fois à la recons-
de sa bibliothèque d'implants, il peut voir en 3D et titution anatomique et à la restauration fonctionnelle
en temps réel les conséquences d'une modification de la hanche ;
de l'angle cervicodiaphysaire ou de la profondeur de • une nouvelle dimension est apportée par l'intégra-
tête fémorale modifiant la longueur du col. Le travail tion de la position assise dans la planification : l'acqui-
simultané sur les images 2D de face et de profil et sur sition d'images du sujet assis en préopératoire permet,
les reconstructions 3D permet de mieux intégrer les grâce à des systèmes de recalage automatisés, d'anti-
contraintes liées à la courbure fémorale de face et de ciper l'impact des choix d'orientation sur d'éventuels
profil. conflits cinématiques (figures 9.6 et 9.7).
pport de l'EOS® : une nouvelle approche de la planification des prothèses totales de hanche 79

Figure 9.6.
. oxarthrose bilatérale avec indication de 2 PTH en un temps opératoire chez une patiente déjà opérée d'une arthrodèse lombaire. On
observe un déséquilibre antérieur : GS (en jaune) et TP (en rouge) sont anormaux. B. Le test de redressement maximal montre une
amélioration significative du GS qui traduit l'impact du secteur sous-pelvien grâce à la mise en œuvre de la réserve d'extension des
hanches arthrosiques. On observe également une réduction significative du TP grâce à la mise en hyperlordose au-dessus de l'arthro-
dèse postérieure. Le test permet d'anticiper une amélioration posturale significative après les PTH, sans que la fusion lombaire ne soit un
obstacle à la rééquilibration sagittale. . onfirmation postopératoire. mélioration significative du SV (en vert).

L'EOS® permet-il d'évaluer Il est possible d'analyser les modifications d'orienta-


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tion pelvienne survenant dans le temps après une PTH,


la qualité de l'implantation et les adaptations concernant la perception et les com-
prothétique ? pensations des asymétries de longueur fonctionnelle
des membres inférieurs peuvent être documentées.
La très faible irradiation de cette imagerie et la faci- Pour la première fois, il est possible d'accéder à la
lité de mise en œuvre des outils de planification per- notion d'antéversion fonctionnelle cumulée intégrant
mettent d'envisager, comme nous le faisons déjà, le dans le même plan horizontal du sujet debout les posi-
suivi des patients avec en particulier le « contrôle tions respectives de la cupule et du fémur prothétique.
qualité » des implantations et la surveillance des Par opposition aux notions classiques d'antéver-
modifications posturales qui concernent à la fois sion anatomique cumulée combinant des mesures
le complexe bassin-rachis et le secteur sous-pelvien fémorales et acétabulaires réalisées dans des plans
(figures 9.8 et 9.9). différents, l'évaluation des antéversions fonction-
Plusieurs publications rapportent aujourd'hui la nelles offre des perspectives inédites pour l'analyse
précision et la répétabilité des mesures, en particulier des usures, des subluxations ou des phénomènes de
pour le positionnement acétabulaire [15–19]. squeaking.
80 J.-Y. Laz nn c

Figure 9.7.
. oxarthrose droite chez
une patiente présentant déjà
une arthrodèse lombaire et
une PTH gauche. On observe
une forte rotation du bassin
en iliaque antérieur gauche
(la tête fémorale prothétique
se projette en avant de profil)

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et la ligne joignant les centres
de rotation des hanches n'est
pas horizontale. Il n'y a pas de
flessum de hanche, mais au
contraire une mise en œuvre
de la réserve d'extension pour
obtenir un équilibre sagittal
satisfaisant. L'obliquité du
basin est réductible, comme
le montre l'acquisition assise.
B. Résultat postopératoire :
la planification prenant en
compte la complexité des
paramètres anatomiques et
fonctionnels a conduit à res-
pecter l'inégalité de longueur
fémorale pour ne pas pertur-
ber l'équilibre de la patiente.
pport de l'EOS® : une nouvelle approche de la planification des prothèses totales de hanche 81

Figure 9.8. Exemple d'analyse pré- (A) et postopératoire (B).


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Figure 9.9.
. nalyse préopératoire : le patient présente une inégalité anatomique sur les fémurs et les tibias. La vue globale montre le position-
nement anormal du pied sur l'acquisition de face et le flessum adaptatif du genou droit. B. La planification a conduit à réaliser un
rallongement du fémur gauche pour compenser fonctionnellement l'ensemble des inégalités anatomiques.

L'EOS® fait-il mieux que le molles, qualité osseuse difficile à prévoir) peuvent faire
dévier d'un réglage idéalement programmé.
scanner pour la planification ? Les données EOS® vont au-delà de ce que peut
Comme nous l'avons vu, l'EOS® donne une autre apporter le scanner pour des informations collectées en
dimension à la planification. L'objectif n'est pas de décubitus dorsal. Certes, l'EOS® ne restitue que l'enve-
prévoir au millimètre ou au degré près une implan- loppe extérieure des segments osseux et ne permet pas
tation sur un référentiel anatomique alors que nous une planification « endodiaphysaire » du fémur ; mais
savons qu'en pratique des paramètres anatomiques il permet d'intégrer la posture globale du sujet et de
peropératoires (tension ou rétractions des parties détecter les patients « hors normes », pour lesquels la
82 J.-Y. Laz nn c

planification strictement liée au référentiel osseux du bas- inférieurs complique la planification, qui ne doit plus
sin ou du fémur pourra être optimisée en fonction des se focaliser sur la taille des implants et des réglages
anomalies détectées en position debout ou assise. La déter- locaux.
mination par EOS® d'un « couloir de sécurité » et de limites La très faible irradiation permet une surveillance pos-
de tolérance est certainement une voie d'avenir [20]. turale des patients ayant une PTH comme cela est réa-
lisé pour les pathologies rachidiennes évolutives. Chaque
Conclusion patient a en effet son « histoire orthopédique » et l'avenir
d'une PTH ne peut pas être réduit à la seule évolution
La planification EOS ouvre de nouvelles voies pour isolée de l'implant : une fracture des membres inférieurs,
l'optimisation de l'implantation des PTH. La vision la survenue d'un effondrement de voûte plantaire, la pose
globale du patient debout et assis permet d'intégrer la d'une prothèse de genou ou d'une PTH controlatérale,
dimension fonctionnelle qui n'est pas donnée par les mais aussi une détérioration voire une arthrodèse rachi-
acquisitions du scanner en position allongée. dienne peuvent significativement affecter le « réglage »
L'augmentation du nombre de patients présentant initial réfléchi à partir d'un bilan radiologique initial qui
des pathologies associées du rachis ou des membres ne représente qu'un instantané de la vie du patient.

Réfé ences
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83

Planification préopératoire 3D
à partir de l'imagerie biplane
à basse dose
D. MAINARD

Introduction L'imagerie EOS® procure une approche biomécanique


et morphologique originale car réalisée en position de
Le bon positionnement et une taille adéquate des fonction et ce, avec l'avantage d'une très faible dose de
implants prothétiques sont des objectifs prioritaires radiation contrairement au scanner qui s'effectue en
lors de l'implantation d'une prothèse totale de hanche position couchée avec une plus forte exposition [1].
(PTH) de première intention. Le respect de ces objec- En effet, le système d'imagerie EOS® basse dose per-
tifs évite des complications per- et postopératoires et met d'obtenir des images radiographiques du corps
permet d'espérer un excellent taux de survie à long entier en position debout [2, 3].
terme. Pour obtenir cette imagerie biplane, le patient est
La planification préopératoire est indispensable, positionné dans une cabine spécifique en position
comme l'a recommandé Maurice Muller qui l'a intro- debout en appui complet, équilibré sur ses deux pieds,
duite dès les années 1970. Celle-ci fait appel à un coudes fléchis les mains sur les pommettes ou sur les
calque des implants prothétiques qui est superposé clavicules.
avec un cliché standardisé de bassin de face et en Si le patient n'est pas en mesure de rester en équilibre
charge du patient. Le calque est supposé tenir compte sans appui. Il peut prendre appui sur une barre anté-
de l'agrandissement du cliché radiologique qui est de rieure positionnée à hauteur du thorax. Les radiogra-
1,15. La digitalisation des clichés radiographiques a phies de face et de profil sont acquises simultanément.
amélioré la précision des informations apportées par Deux fins faisceaux orthogonaux de rayons X de
la planification. Cependant, elle connaît des limites 0,5 mm d'épaisseur balaient le patient de haut en bas.
puisqu'elle n'intègre pas la longueur des membres L'acquisition peut s'étendre des crêtes iliaques aux
inférieurs, les particularités anatomiques du bas- pieds, produisant ainsi une télémétrie des membres
sin et des fémurs, notamment la torsion ou rotation inférieurs en une dizaine de secondes (selon la taille
fémorale. du patient). Une exploration de l'ensemble du corps
Les logiciels de planification 3D qui sont apparus à par un balayage de la tête aux pieds peut aussi être
partir des années 2010 reposent soit sur l'utilisation effectuée en une vingtaine de secondes, donnant ainsi
du scanner, soit sur celle de l'imagerie biplane à basse des informations sur l'équilibre sagittal global et sur
dose. C'est le cas du logiciel de planification hipEOS® les signes de dégénérescence arthrosique rachidienne
(EOS Imaging, Paris, France) fondé sur des radiogra- qui influent sur la position du bassin et sa réserve
phies obtenues par le système d'imagerie EOS®. d'extension.
On obtient alors deux images corps entier, de face et
de profil, sans déformation et sans agrandissement. Le
Principes du système balayage du corps entier ou des membres inférieurs en
d'imagerie EOS® un temps permet de s'affranchir des effets de collage,
d'agrandissement et de distorsion d'échelle d'une télé-
Le système d'imagerie est issu des travaux de Georges radiographie conventionnelle ou digitalisée. La préci-
Charpak sur les détecteurs de particules et la chambre sion de l'imagerie EOS® par rapport aux radiographies
proportionnelle multi-fils qui lui ont valu le prix Nobel conventionnelles et au scanner a été démontrée dans la
de physique en 1992. littérature par Guenoun et Escott [4, 5].

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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84 D. Mainar

Logiciel sterEOS®
Sur les images de face et de profil, un certain nombre
de points anatomiques sont identifiés comme, par
exemple, les épines iliaques, les têtes fémorales, les
condyles fémoraux… Cette identification, toutefois,
peut être faite par le chirurgien, le radiologue ou un
manipulateur radio formé à cette technique.
À partir de ces points et en référence à une base de
données statistiques, le logiciel sterEOS® effectue un
ajustement des contours qui va produire un modèle
3D personnalisé en charge. Il s'agit donc bien ici d'une
modélisation 3D et non d'une reconstitution anato- Figure 10.1. Capture d'écran montrant la projection antéropos-
mique. Cette modélisation fournit automatiquement térieure des implants sur les structures osseuses, ainsi que les
de nombreuses informations : longueur des fémurs et différentes informations disponibles et possibilités de modifi-
tibias, offset fémoral, angle CC'D, longueur du col, cations.
antéversion du col, diamètre de l'acétabulum et para-
mètres pelviens. À l'heure actuelle, cette modélisation par le logiciel, le chirurgien peut reprendre la main
n'est pas possible lorsque le patient est déjà porteur sur chacun des implants, et en modifier le position-
d'un implant. Les paramètres rachidiens et de posture nement dans tous les plans, de face comme de profil.
globale peuvent aussi être obtenus. Pour la cupule, il est possible de modifier l'antéver-
Une fois l'acquisition réalisée, les images de face et sion/rétroversion, l'inclinaison, le positionnement
de profil sont envoyées via une connexion Internet proximo-distal, la médialisation/latéralisation. Pour
sécurisée, autorisée par la CNIL (Commission natio- l'implant fémoral, il est possible de modifier l'anté-
nale de l'informatique et des libertés), à la société One version/rétroversion, la varisation/valgisation, le
Fit qui réalise la modélisation et la transmet directe- positionnement proximo-distal et l'offset. La taille
ment au chirurgien équipé du logiciel hipEOS®. de la cupule et de l'implant fémoral s'adapte à l'ana-
tomie et au positionnement des implants souhaité en
Logiciel hipEOS® fonction des informations fournies par le logiciel. En
effet, au fur et à mesure des changements effectués
La modélisation 3D de la tige fémorale comme de la sur les implants, positionnement ou taille, le chirur-
cupule prothétique est injectée dans la modélisation gien dispose sur l'écran des données lui précisant
3D de l'extrémité supérieure du fémur et du cotyle l'antéversion et l'inclinaison de la cupule en pre-
grâce au logiciel hipEOS®. nant pour référence le plan pelvien antérieur ou les
Le logiciel permet un prépositionnement auto- repères du patient. Le nouveau centre articulaire est
matique de la tige fémorale et de la cupule prothé- visualisé en permanence, de même que le centre arti-
tique, et détermine une taille a priori, en fonction des culaire anatomique. Le chirurgien dispose également
mesures des structures anatomiques et de la gamme des informations indiquant l'inégalité de longueur
des implants. Le logiciel hipEOS® s'adapte à tous les fémorale, la variation de l'offset fémoral et l'anté-

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modèles de prothèses. version de la tige. Il est aussi possible de faire varier
Le chirurgien dispose sur son écran de la projection le diamètre de la tête et la profondeur du cône morse
des implants aussi bien dans le plan frontal que dans de la tête (« longueur du col »), ce qui influe sur la
le plan sagittal. Il peut modifier le positionnement des longueur du membre et l'offset. Ces modifications
implants de façon indépendante et, à chaque modifica- sont prises en compte par le logiciel.
tion, toutes les valeurs sont modifiées instantanément L'ensemble de ces paramètres permet de position-
(figure 10.1). ner au mieux les implants en fonction des objectifs et
Compte tenu de l'absence d'agrandissement, dif- choix du chirurgien et en fonction de l'anatomie du
férentes données et différents paramètres préopé- patient. Au terme de la planification indépendante
ratoires sur l'anatomie du cotyle et du fémur sont des deux implants, leur assemblage virtuel permet de
indiqués sur l'écran : diamètre du cotyle, angle CC'D, connaître les valeurs finales de la longueur et de l'off-
antéversion du col, offset fémoral, diamètre de la tête. set fémoraux.
À partir du prépositionnement des implants proposé Cette planification prend moins de 5 minutes.
Planification préopératoire 3D à partir de l'imagerie biplane à basse dose 85

Intérêt de la planification Ils ont comparé la planification 2D conventionnelle


et la planification 3D à partir de l'imagerie biplane
par le logiciel hipEOS® basse dose pour déterminer en préopératoire la taille
La planification préopératoire est essentielle pour la des implants. Dans une série de 30 PTH, la planifica-
qualité des résultats d'une PTH. Elle permet d'éviter tion 3D prédisait la taille des implants fémoraux de
les complications per- et postopératoires et de détermi- façon plus fiable que la planification 2D ; 26 implants
ner la taille des implants, le positionnement du centre sur 31 (84 %) correspondaient à la taille réellement
de rotation, l'offset et la modification de longueur posée à plus ou moins une taille, contre 21 (68 %) en
éventuelle du membre inférieur. 2D. Pour les cupules, la différence n'était pas signifi-
La planification 2D, qui a fait la preuve de son inté- cative : 28 cupules sur 30 (92 %) en 3D, contre 26 sur
rêt, souffre de certains biais et inconvénients. En par- 30 (87 %) en 2D.
ticulier, l'offset est une projection 2D et non un offset Knafo [10] a rapporté dans sa thèse une étude
réel. L'agrandissement est source d'incertitude sur prospective monocentrique et mono-opérateur d'une
les valeurs obtenues. Cette planification n'inclut pas cohorte de 21 patients opérés pour une coxarthrose
les deux membres inférieurs et sa reproductibilité est primitive sur une période de 12 mois, excluant les
variable. L'irradiation est moins importante que celle hanches dysplasiques ou avec un antécédent de chirur-
d'un scanner, mais plus importante que celle d'une gie cotyloïdienne, les patients sans bilan EOS® pré- ou
imagerie biplane basse dose. postopératoire et ceux ayant déjà eu une PTH ou une
La planification préopératoire faisant appel au scan- prothèse totale du genou. Chacun des patients inclus
ner, comme la planification 2D, n'inclut pas les deux avait bénéficié d'une imagerie biplane basse dose pré-
membres inférieurs. De plus, elle est réalisée sur une et postopératoire. La planification avait été réalisée
imagerie acquise en décharge. Elle est source d'une irra- grâce au logiciel hipEOS® pour évaluer la taille des
diation supérieure à celle de la radiographie conven- implants, la variation de longueur du membre infé-
tionnelle, mais surtout à celle de l'imagerie basse dose. rieur et la variation de l'offset fémoral. Il n'y avait pas
L'acquisition nécessite une vingtaine de minutes et le de différence significative pour les tailles d'implant
prix de l'examen est élevé par rapport à celui de l'ima- fémoral (p = 0,16) ou cotyloïdien (p = 0,01), entre la
gerie basse dose. En revanche, elle permet une recons- taille planifiée et celle réellement posée, confirmant
truction multiplanaire sans effet d'agrandissement. Les l'étude de Mainard et al. [9]. Les planifications de la
mesures sont indépendantes de l'opérateur et elle per- longueur du membre inférieur et de l'offset fémoral
met la simulation de la taille des implants, de la lon- ne différaient pas significativement des mesures EOS®
gueur et de l'offset. Elle offre une bonne fiabilité dans postopératoires (p = 0,38 et p = 0,85 respectivement).
la détermination préopératoire de la taille des implants
et de l'offset [6, 7, 8].
La planification pré-opératoire 3D à partir d'une
Conclusion
imagerie biplane basse dose repose sur l'utilisation L'intérêt et la nécessité d'une planification avant toute
des logiciels sterEOS® et hipEOS®. L'acquisition des prothèse totale de hanche de première intention ne sont
images radiologiques dans le plan frontal et sagittal se contestés par personne. La planification préopératoire
fait en charge, intégrant les contraintes biomécaniques 2D reste la plus utilisée. Si elle a fait la preuve de son
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de la hanche. Elle inclut les deux membres inférieurs. utilité, elle a néanmoins des limites et ne permet pas
Le prix de l'examen est inférieur à celui d'un scanner et d'intégrer la réalité anatomique en 3D. Le scanner, en
l'irradiation est nettement moins importante que celle revanche, a l'avantage de prendre en compte l'anatomie
d'un scanner. L'examen ne nécessite qu'une vingtaine réelle des structures osseuses, mais l'examen n'intègre
de secondes. La planification se fait à partir d'une pas les contraintes biomécaniques car celui-ci se fait en
modélisation 3D des structures osseuses sans agran- décharge et il est source d'irradiation pour le patient.
dissement. Elle peut intégrer les données anatomiques L'imagerie biplane basse dose et le logiciel hipEOS®
du rachis. L'examen est indépendant de l'opérateur. constituent un nouvel outil pour la planification 3D
Elle permet la simulation de la taille des implants, du des arthroplasties totales de hanche. Cette imagerie a
centre de rotation, du positionnement des implants, de l'avantage d'être peu irradiante et d'intégrer les parti-
l'offset et de la longueur du membre. cularités anatomiques et biomécaniques du squelette
Mainard et al. [9] ont montré dans une étude pilote car elle s'effectue sur un patient en charge. Ce type de
l'intérêt du logiciel hipEOS® dans la mesure préopé- planification participera au contrôle qualité du geste
ratoire de la taille des cupules et des tiges fémorales. et sera certainement à terme un élément de traçabilité.
86 D. Mainar

Réfé ences
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91

La réticulation du polyéthylène :
Graal de la prothèse totale
de hanche ?
J. LANGLOIS, E. GIBON, M. HAMADOUCHE

Le polyéthylène (PE) hautement du PE à l'usure. La réticulation a lieu dans la phase


amorphe du PE.
réticulé a-t-il significativement On parle de PE hautement réticulé si la dose délivrée
réduit l'usure et avec quel recul ? est d'au moins 5 Mrad (= 50 kGy). McKellop et al. [1]
ont montré qu'une dose supérieure à 100 kGy n'ap-
Une prise de conscience de la communauté orthopé- porte pas de bénéfice en termes de résistance à l'usure,
dique a eu lieu au cours des années 1990 concernant ce qui explique que les PE commercialisés sont rare-
le taux croissant d'ostéolyse périprothétique et de des- ment réticulés à plus de 100 kGy. En outre, plus la réti-
cellement. Ainsi ont débuté de nombreux travaux de culation augmente, plus la résistance à la propagation
recherche concernant la fabrication et la stérilisation des fissures diminue, en raison de la diminution de la
du PE. Ces travaux avaient pour but de limiter l'usure mobilité des chaînes moléculaires.
et l'oxydation du PE et ainsi d'augmenter sa longévité. On peut donner quelques exemples de HXLPE de
La pertinence de la réticulation du PE a en fait 1re génération :
débuté lors de l'abandon de la stérilisation par irra- • Durasul®, Longevity® (Zimmer Inc) ;
diation gamma en air ambiant en faveur des méthodes • Crossfire® (Stryker Inc) ;
non irradiantes. En effet, malgré l'oxydation résultant • Marathon® (DePuy Inc) ;
de l'irradiation en air ambiant, les PE plus anciens • Aeonian® (Japan Medical Materials Corp).
avaient un certain de degré de réticulation leur pro- Différentes études ont montré une réduction signifi-
curant une résistance à l'usure. Les études ont mon- cative de l'usure des HXLPE de 1re génération, compa-
tré que les inserts plus récents non réticulés stérilisés rée aux PE conventionnels (conventional polyethylene
par gaz plasma s'usaient plus que les inserts gamma- [CPE]) (tableau 11.1). La réponse est donc oui, le PE
irradiés en air ambiant. hautement réticulé a significativement réduit l'usure
Ainsi, les premiers PE hautement réticulés (highly du PE.
cross-linked polyethylene [HXLPE]) ont vu le jour
à la fin des années 1990 et sont connus sous le nom
de PE hautement réticulés de première génération. La
réticulation du PE peut être réalisée de deux façons :
Le PE hautement réticulé
chimique ou par irradiation. a-t-il diminué le taux de reprise
• La réticulation chimique utilise des peroxydes orga- et augmenté la longévité
niques ou des silanes et est la méthode la plus utili-
sée pour la réticulation d'implants en PE à usage non
des implants ?
médical, car la Food and Drug Administration (FDA) Les taux d'usure des HXLPE de 1re génération sont
n'a pas donné son autorisation pour l'utilisation d'im- désormais très faibles et laissent espérer une longévité
plant à usage médical avec cette méthode. augmentée des implants par diminution de l'ostéolyse
• La réticulation par irradiation est obtenue soit par périprothétique associée aux particules d'usure.
irradiation gamma (60Co), soit par irradiation par fais- L'ostéolyse périprothétique par descellement asep-
ceau d'électrons (e-beam). L'irradiation du PE entraîne tique est la première cause de reprise des prothèses
la rupture des chaînes de PE, lesquelles deviennent totales de hanche (RPTH) et de genou (RPTG) à long
libres de se reconnecter avec les chaînes voisines aug- terme. Il s'agit d'une résorption osseuse périprothétique.
mentant ainsi le poids moléculaire et donc la résistance Sundfeldt et al. [19] ont montré que si le descellement

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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92 J. Lang ois, E. ibon, M. Ha adouc

Tableau 11.1
Études comparant les taux d'usure des HXLPE de première génération aux CPE

Étude Recul Usure moyenne Usure moyenne CPE p


HXLPE (mm/an) (mm/an)
Martell et al. [2] 2 ans 0,12 0,20 0,001

Manning et al. [3] 2,6 0,007 0,174 0,003

Hopper et al. [4] 2,9 ans 0,08 0,18 0,02

Glyn-Jones et al. [5] 3 ans 0,03 0,07 0,012

Krushell et al. [6] 3,9 ans 0,05 0,12 < 0,001

D'Antonio et al. [7] 4,9 ans 0,055 0,138 0,003

Triclot et al. [8] 4,9 ans 0,025 0,106 0,0027

Dorr et al. [9] 5 ans 0,029 0,065 0,005

Leung et al. [10] 5 ans 0,01 0,18 < 0,001

Olyslaegers et al. [11] 5,1 ans 0,050 0,101 < 0,0001

Beksac et al. [12] 5,3 ans 0,002 0,12 1,07 × 10−10

Engh et al. [13] 5,7 ans 0,01 0,19 < 0,001

Bitsch et al. [14] 5,8 ans 0,031 0,104 0,003

Rajadhyaksha et al. [15] 6 ans 0,054 0,127 < 0,05

Mall et al. [16] 7,2 ans 0,03 0,15 < 0,0001

Engh et al. [17] 10 ans 0,04 0,22 < 0,001

Hanna et al. [18] 13,1 ans 0,035 0,11 0,006


CPE : conventional polyethylene (polyéthylène conventionnel) ; HXLPE : highly cross-linked polyethylene (polyéthylène hautement
réticulé).

aseptique est responsable de plus des deux tiers des de 1re génération diminuait le taux de reprise et aug-
RPTH et de la moitié des RPTG, ses causes sont nom- mentait la survie des implants.
breuses, multifactorielles et souvent imbriquées.

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Nous allons nous intéresser au descellement asep-
tique par ostéolyse périprothétique liée aux particules Peut-on encore utiliser
d'usure de PE. Dumbleton et al. [20] ont suggéré un aujourd'hui du polyéthylène
seuil pratique de 0,05 mm/an au-dessous duquel l'os- conventionnel ?
téolyse serait éliminée.
La plupart des études ont montré une réduction Plus de 50 ans après l'introduction de ce matériau par
significative de l'ostéolyse périprothétique avec l'uti- le chirurgien britannique Sir John Charnley, il ne nous
lisation des HXLPE de 1re génération (tableau 11.2). paraît plus raisonnable d'utiliser aujourd'hui le poly-
Concernant le taux de reprise et la longévité des éthylène conventionnel (CPE) pour des cupules dites
implants, il n'existe que très peu d'études à méthodologie « conventionnelles » de PTH, compte tenu principa-
satisfaisante pour répondre pertinemment (tableau 11.3). lement du risque d'usure, avec création de particules
Parmi ces études, seule celle de Engh et al. [17] avait à l'origine d'une ostéolyse aux interfaces péripro-
une puissance suffisante pour détecter une différence thétiques, puis d'une perte de fixation douloureuse
significative de survie des HXLPE de 1re génération conduisant à la reprise chirurgicale à plus ou moins
comparée à celle du CPE. Dans cette étude, le HXLPE long terme.
La réticulation du polyéthylène : raal de la prothèse totale de hanche ? 93

La confirmation pragmatique de ces hypothèses Mais les reculs moyens se sont allongés, avec désor-
biologiques expérimentales est aujourd'hui supportée mais un suivi à long terme, comme dans l'étude de
par de nombreuses études cliniques démontrant com- Hanna et al. (13,1 ans de recul moyen) [18], qui a per-
parativement le bénéfice de polyéthylènes hautement mis la comparaison de n = 89 CPE contre n = 88 HXLPE
réticulés (HXLPE). Un temps limité par la taille des (face à une tête de 28 mm en chrome-cobalt), montrant des
cohortes nécessaires (fréquence assez rare de l'évé- taux d'usure à régime constant pour le CPE de 0,11 mm/an
nement « reprise pour descellement sur usure »), les et pour le HXLPE de 0,035 mm/an, avec presque 20 % de
temps d'investigation longs (au-delà de 5 ans au mini- patients présentant une ostéolyse radiographique acétabu-
mum), les multiples facteurs confondants, liés aux laire ou fémorale pour le groupe CPE contre 0 % pour le
patients ou à la variété des implants expliquent que les HXLPE, et enfin des taux de survie (critère : reprise liée à
travaux aient tardé à apporter la preuve irréfutable de l'usure) de 86 % (indice de confiance [IC] 95 % 78–94 %)
la nécessité d'abandonner le CPE. pour le CPE contre 100 % pour le HXLPE.
Parmi les publications les plus pertinentes, on retiendra
volontiers celle de Broomfield et al. [27], randomisant
54 hanches (CPE contre HXLPE), avec 12 ans de recul
et évaluant non seulement l'usure comparative des deux
types de PE in vivo (à l'aide d'une analyse radiostéréo-
Tableau 11.2
Odds ratios pour l'ostéolyse dans des études comparant métrique), mais aussi l'ostéolyse comparative par scan-
HXLPE de première génération et CPE* ner, deux outils d'investigation parmi les plus fiables. Le
taux d'ostéolyse était moindre dans le groupe HXLPE,
Étude Odds ratio p sans rapport entre l'importance de l'usure et le volume
d'ostéolyse, mais l'usure des cas avec ostéolyse était dans
Bitsch et al. [14] 0,002 0,000
les deux groupes plus importante que l'usure moyenne.
D'Antonio et al. [7] 0,103 0,004 Les meilleures études de cohortes sont désormais
groupées en méta-analyses ou revues systématiques
Engh et al. [13] 0,230 0,000 pour accroître les effectifs. Une autre méthode pour
Fukui et al. [21] 0,081 0,111 réunir de larges effectifs (mais aussi nombre de fac-
teurs confondants) réside dans l'étude des registres.
Leung et al. [10] 0,240 0,041 Un travail rétrospectif publié en 2015 [28] incluant
Mall et al. [16] 0,067 0,011 presque 27 000 prothèses pratiquées aux États-Unis
(78 % de billes ≤ 28 mm) a mis en évidence une dif-
Olyslaegers et al. [11] 0,310 0,214 férence à 7 ans de recul entre les taux cumulés de
Rajadhyaksha et al. [15] 0,050 0,044 reprise, de 5,4 % (IC 95 % 4,4–6,7 %) pour le CPE
contre 2,8 % (IC 95 % 2,6-3,2 %) pour le HXLPE,
Rohrl et al. [22] 0,167 0,119 soit un risque accru de 1,91 (IC 95 % 1,46–2,50,
* Un odds ratio < 1 signifie un risque inférieur d'ostéolyse pour les p < 0,001) de reprise pour descellement aseptique avec
HXLPE de première génération. le CPE (contre le HXLPE). Ces résultats ont été bien
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Tableau 11.3
Survie des HXLPE de première génération à long terme

Étude Méthodologie Suivi moyen Survie


Engh et al. [17] ERP 10 ans 100 %

Johanson et al. [23] ERP 10 ans 93,5 %

Babovic et Trousdale [24] CR 10,4 ans 98,1 %

Garcia-Rey et al. [25] ERP 10 ans 97,6 %

Bedard et al. [26] CR 10,3 ans 99,2 %

Glyn-Jones et al. [5] ERP 10 ans 100 %


CR : cohorte rétrospective ; ERP : essai randomisé prospectif.
94 J. Lang ois, E. ibon, M. Ha adouc

confirmés dans une autre population par le registre En conclusion, s'il est essentiel de poursuivre la sur-
australien [29] (figure 11.1), et cela quel que soit le veillance attentive des résultats à très long terme des
matériau de la tête fémorale en regard (figure 11.2). différents HXLPE (rappelons que de multiples pré-
Il persiste cependant avec le HXLPE la question parations différentes se côtoient sur le marché), on
du recul à très long terme (> 15 ans), inconnu sur de peut affirmer qu'il ne paraît plus éthique de proposer
grandes cohortes. Certains auteurs ont en effet sou- aujourd'hui une étude prospective randomisée avec
levé l'hypothèse d'une hyperréactivité inflammatoire un groupe de patients non sélectionné qui recevrait du
aux particules issues de la dégradation du HXLPE, ou CPE (discutable à la limite pour une population très
encore la possibilité d'un mode d'usure différent (accé- âgée, à faible demande fonctionnelle et dont l'espé-
léré) passé 10 ans d'implantation, devenant alors défa- rance de vie serait inférieure à 15 ans).
vorable au HXLPE [30]. L'hypothèse de l'oxydation
in vivo de ces HXLPE de 1re génération est ici soulevée.
Enfin, pour conclure l'argumentaire, le dernier avan- L'apport de la vitamine E
tage du CPE pourrait être ses excellentes propriétés au polyéthylène hautement
mécaniques, fondamentales dans les configurations méca- réticulé est-il bien démontré ?
niques « extrêmes ». Les implants dont le dessin inclut
une épaisseur de PE < 6 mm en zone portante (anneau Comme tout matériau d'ingénierie, le PE est vulnérable
de rétentivité des cupules à double mobilité ou rétentives, à travers un équilibre entre ses différentes propriétés, en
inserts de très petites tailles) seraient de bons candidats à particulier entre résistance à l'usure, résistance à l'oxy-
de telles études. Mais une fois de plus, la solution pourrait dation et solidité mécanique. La stérilisation gamma à
être apportée par l'introduction d'antioxydants dans les l'air des CPE était pratique courante jusqu'à la fin des
HXLPE (dits de 2e génération) (voir ci-dessous). années 1990, mais était responsable d'une oxydation

HR - adjusted for age and gender


24 %
Non XLPE Non XLPE vs XLPE
22 %
XLPE 0 - 3Mth : HR = 0.83 (0.74, 0.94), p = 0.002
20 % 3Mth - 6Mth : HR = 1.05 (0.83, 1.32), p = 0.704
Cumulative Percent Revision

18 % 6Mth - 1.5Yr : HR = 1.49 (1.30, 1.70), p < 0.001


1.5Yr - 2.5Yr : HR = 1.30 (1.09, 1.54), p = 0.002
16 %
2.5Yr - 6.5Yr : HR = 1.73 (1.56, 1.91), p < 0.001
14 % 6.5Yr - 9Yr : HR = 2.29 (1.96, 2.68), p < 0.001
12 % 9Yr + : HR = 3.14 (2.61, 3.78), p < 0.001
10 %
8%
6%
4%
2%
0%
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Years Since Primary Procedure

Figure 11.1. Pourcentages cumulés de reprise de PTH (pour coxarthrose primaire) par type de polyéthylène.

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D'après Registre national australien [29].

24 % 24 % 24 %
Ceramic/Non XLPE Ceramicised Metal/Non XLPE
22 % 22 % Metal/Non XLPE 22 %
Cumulative Percent Revision
Cumulative Percent Revision

Cumulative Percent Revision

20 % Ceramic/XLPE 20 % Metal/XLPE 20 % Ceramicised Metal/XLPE


18 % 18 % 18 %
16 % 16 % 16 %
14 % 14 % 14 %
12 % 12 % 12 %
10 % 10 % 10 %
8% 8% 8%
6% 6% 6%
4% 4% 4%
2% 2% 2%
0% 0% 0%
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Years Since Primary Procedure Years Since Primary Procedure Years Since Primary Procedure

Figure 11.2. Pourcentages cumulés de reprise de PTH (pour coxarthrose primaire) par type de polyéthylène et surface de tête fémorale.
D'après Registre national australien [29].
La réticulation du polyéthylène : raal de la prothèse totale de hanche ? 95

secondaire majeure in vivo, ce qui diminuait à la fois sa en conservant une certaine solidité mécanique) [33], les
solidité mécanique et sa résistance à l'usure. propriétés biologiques de ces PE associés aux antioxy-
La réticulation induite par l'irradiation des HXLPE dants font l'objet de multiples controverses, avec un
de 1re génération a permis de réduire certes l'usure, rôle tantôt protecteur vis-à-vis des phénomènes inflam-
mais en créant des radicaux libres (risque d'oxyda- matoires et de l'ostéolyse [34], tantôt protecteur vis-à-
tion secondaire), ce qui a nécessité l'accompagnement vis de l'adhésion bactérienne [35].
de l'irradiation par un traitement thermique post- Le recul clinique de l'utilisation des PE associés à la
irradiation. Ce traitement thermique, quel que soit le vitamine E est encore faible. On dispose cependant déjà
type, n'éliminait pas complètement les radicaux libres, de quelques informations intéressantes sur leur comporte
mais surtout entraînait une réduction de la résistance ment in vivo grâce à quelques explants. Rowell et al.
en fatigue, qui était déjà réduite par la réticulation. ont montré en analysant 15 explants de PE associés à la
Une alternative, pour éviter le traitement thermique, vitamine E, implantés depuis + 3 jours à + 3 ans, que le
tout en stabilisant les radicaux libres induits par la contenu en radicaux libres diminuait avec le temps et que,
réticulation, consiste en l'utilisation d'un antioxydant, sur cette courte période, les phénomènes oxydatifs sem-
comme la vitamine E, ou alpha-tocophérol [31]. Son blaient bien inhibés [36]. Un cas de fracture d'insert en
rôle physiologique est de réagir avec les radicaux libres PE associé à la vitamine E, moins de 12 mois après son
des membranes cellulaires et de protéger les acides gras implantation, a également été publié [37], confirmant la
polyinsaturés d'une dégradation oxydative. Les réac- nécessité d'une surveillance étroite car le produit n'est pas
tions d'oxydation au sein du PE, qui contient de très mécaniquement infaillible.
longues chaînes saturées aliphatiques, sont supposées En ce qui concerne leur usure, les performances cli-
suivre le même mécanisme. En pratique, les industriels niques de ces nouveaux PE semblent équivalentes à celles
peuvent incorporer la vitamine E de deux façons : la des HXLPE de 1re génération, à des délais d'évaluation
vitamine E peut être introduite au stade de poudre encore très courts (2 à 3 ans), correspondant plus proba-
de PE avant consolidation (mais interfère alors avec blement aux phénomènes de rodage et fluage que d'usure
la réticulation par irradiation) ; ou bien la vitamine E vraie [38–40]. À ces délais courts, on ne constate pas de
peut être diffusée dans le PE après irradiation (persiste différence de pénétration des têtes fémorales entre les
alors un risque d'oxydation dans l'intervalle entre les XLPE de 1ere génération et les PE associés à la vitamine E.
deux manipulations). D'autres antioxydants couplés Rappelons de nouveau qu'il faut rester prudent et évi-
au PE font également l'objet de recherches sans appli- ter toute généralisation excessive (« effet mode ») vis-à-vis
cation clinique à ce jour [32]. d'un matériau (ou plutôt de multiples matériaux, compo-
Sur le plan expérimental préclinique, outre les bonnes sitions variables de : résine de PE, type d'antioxydant et
performances « attendues » (parfaite biocompatibilité, sa concentration, modalités d'incorporation dans le PE,
prévention de l'oxydation et résistance à l'usure tout modalités de réticulation et de stérilisation ; tableau 11.4)

Tableau 11.4
Principaux polyéthylènes associés à la vitamine disponibles pour les prothèses de hanche et de genou

Marque Matière première Méthode Niveau Type Méthode


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d'incorporation de réticulation de radiation de stérilisation


E1™ (Biomet) GUR 1020/1050 Infusion HXLPE (100 kGy) Gamma-Beam Gamma-Beam

Vitamys® (Mathis) GUR 1020 Mélange HXLPE (100 kGy) Gamma-Beam Gas plasma

Vivacit-E® (Zimmer) GUR 1020 Mélange HXLPE (100 kGy) E-Beam Eto

Vitelene® (Aesculap) GUR 1020 Mélange HXLPE (80 kGy) E-Beam Eto

Vital-XE® (Permedica) GUR 1020 Mélange XLPE (60 kGy) E-Beam Eto
UHMWPE

ECiMa™ (Corin) GUR 1020 Mélange HXLPE (120 kGy) Cold Gamma- Eto
Beam

E-MAX™ (Renovis) GUR 1020 Mélange HXLPE (100 kGy) Gamma-Beam Eto
Source : Gigante et al. [33].
96 J. Lang ois, E. ibon, M. Ha adouc

qui est loin de disposer d'un recul clinique à long terme, excluant les difficultés de distinction entre l'usure vraie
d'autant plus qu'il existe des alternatives fiables. et le fluage, confirment que si la majorité de la mobilité
se développe dans la petite articulation [43], la résul-
Le polyéthylène hautement tante d'usure volumétrique pourrait cependant au final
être équivalente entre les grande et petite articulations
réticulé a-t-il un intérêt [44]. Cette dernière étude rapportait d'ailleurs 40 %
pour les cupules à double mobilité ? de cupules mobiles présentant une usure du listel de
rétentivité après 8 ans d'implantation. Une évaluation
Les cupules à double mobilité correspondent à des qualitative a aussi mis en évidence des types d'usure dif-
cupules en chrome-cobalt présentant une surface férents sur des cupules à double mobilité en HXLPE
interne polie brillante s'articulant avec un composant [44] : essentiellement rayures (scratching) et creux (pit-
mobile en PE capturant par encliquetage la tête fémo- ting) dans la grande articulation, mais aussi inclusions
rale. La rétentivité du composant en PE est assurée par de débris de titane dans la petite articulation. Il est rare-
un diamètre d'ouverture inférieur au diamètre de la ment fait état d'usure de la rétentivité sur ces explants
tête fémorale. Trois articulations peuvent être ainsi après seulement une courte exposition in vivo (délai
distinguées : la « petite » entre la tête fémorale et le d'implantation moyen 15,7 mois) [44]. Concernant
composant mobile en PE (concept de basse friction d'ailleurs l'usure de cette troisième articulation, deux
introduit par Charnley) ; la « grande » entre le com- situations peuvent être à risque potentiellement : l'en-
posant mobile en PE et la cupule métallique (concept cliquetage [45] et le conflit avec le col de la prothèse
de la stabilité accrue liée au grand diamètre de tête, [44, 46], à l'origine de recommandations strictes à ce
introduit par McKee-Farrar) ; et la « troisième » entre jour (col étroit, polibrillant, sans irrégularité). Malatray
le chanfrein (surface externe de la partie rétentive) de et al. [45] ont notamment montré que le XLPE refondu
la cupule mobile et le col de la tige fémorale, permet- était plus à risque de déformation non réversible au
tant par ses contacts la mobilisation normale du com- niveau du listel de rétentivité lors de l'encliquetage.
posant en PE selon un minimum de résistance. Les preuves de l'intérêt du XLPE dans la double mobi-
Si les excellents résultats cliniques notamment sur lité reposent à ce jour sur deux types d'étude. Il existe tout
la prévention de l'instabilité ne sont plus à prouver d'abord des études précliniques sur simulateur [46–48],
(avec des taux de survie au-delà de 90 % à presque qui sont encourageantes pour ces HXLPE (GUR1020,
20 ans), plusieurs auteurs ont émis des réserves vis-à- irradiation et cuisson séquentielle, dose totale de 90 kGy),
vis de l'usure potentielle du composant en PE mobile quelle que soit la rigueur des conditions d'usure ou l'incli-
[41], du fait de l'utilisation de larges diamètres de col naison de la cupule. Viennent ensuite les études cliniques
(sources d'usure de la troisième articulation) et de la in vivo des cupules à double mobilité avec HXLPE,
multiplication des surfaces de frottement, d'où la pro- qui sont à ce jour très peu nombreuses [49, 50], et ne
position d'utilisation du XLPE, fondée sur son succès concernent qu'un seul type d'implant (le même que celui
vis-à-vis de l'usure des cupules standard de PTH [28]. des études sur simulateur), avec des reculs encore limités
L'usure plus particulière du listel de rétentivité, même (de 2 ans au minimum pour l'une [49], et 5 ans pour
si elle a été nettement diminuée grâce aux améliora- l'autre [50]). Il serait donc bien imprudent de transposer
tions du dessin des composants mobiles (chanfrein) et largement ces résultats encourageants à toute cupule à
à la restriction aux cols prothétiques fins et polibril- double mobilité intégrant du XLPE.

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lants, est l'objet de beaucoup d'attention puisqu'elle
explique une partie des « luxations » intraprothétiques Conclusion
[42] (incidence de 1,9 à 5,2 % pour les anciennes géné-
rations et 0 à 2,4 % pour les nouvelles). L'ensemble de ces analyses suggèrent que la deuxième
Par ailleurs, la réticulation du PE n'est pas sans génération de HXLPE, par cuissons séquentielles ou
contrepartie (diminution de la résistance en traction, bientôt peut-être en association avec la vitamine E,
à la fissuration en fatigue et de la ductilité), entraî- pourrait représenter un ensemble de biomatériaux
nant des risques de fracture d'implants lors de pics de plus adapté aux cupules à double mobilité que les
contrainte ; d'où la pertinence de ces deux questions : HXLPE de première génération, à haut risque tant sur
• comment s'usent les cupules à double mobilité ? le plan de l'oxydation secondaire que des propriétés
• les composants en HXLPE sont-ils tous la solution mécaniques détériorées.
appropriée ? Une fois de plus, un recul clinique insuffisant de
Concernant l'usure in vivo des cupules à double mobi- ces nouveaux HXLPE ne nous permet cependant pas
lité, la majorité des études fondées sur des explants, en actuellement d'en conseiller la généralisation (comme
La réticulation du polyéthylène : raal de la prothèse totale de hanche ? 97

pour une prothèse de première intention pour un de dessin (cols larges ou absence de chanfrein) plus
patient jeune et actif par exemple) sans une surveil- que de matériaux, de nombreuses évolutions d'im-
lance extrêmement rapprochée. plants ont été réalisées, et très peu d'études cliniques
Rappelons enfin que, si la plupart des échecs initiaux disposent donc de reculs à long terme concernant les
par usure étaient essentiellement liés à des problèmes dessins les plus modernes.

Réfé ences
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99

Le mariage du polyéthylène :
métal ou céramique ?
D. HUTEN, H. COMMON, T. GICQUEL, F. BASSELOT

Introduction diamètre plus important (de 32 ou 28 mm) permettait


par ailleurs de réduire le risque de luxation et aussi de
L'usure du polyéthylène (PE) est la principale cause de fracture de la céramique ;
descellement des prothèses totales de hanche (PTH) • une autre céramique, de zircone, aux propriétés
comportant une surface de frottement acétabulaire en mécaniques apparemment plus attractives, a été essayée
PE conventionnel (PEC), par le biais d'une ostéolyse à son tour (1985), mais rapidement abandonnée en rai-
périprothétique réactionnelle aux particules de PEC son de ses complications (usure secondaire accrue du
libérées. L'ostéolyse est rare pour une usure linéaire PEC, ruptures liées à un défaut de fabrication) ;
de 0,1 mm/an (soit 80 mm3/an pour une tête de • la céramique Delta®, plus récente, est moins exposée
32 mm, 62 mm3 pour une tête de 28 mm) et pratique- au risque de fracture que la céramique d'alumine et
ment nulle pour une usure linéaire de 0,05 mm/an [1]. elle représente actuellement l'essentiel du marché des
Toute augmentation de l'usure linéaire de 0,1 mm/an têtes en céramique ;
multiplie le risque d'ostéolyse par quatre, et toute • des têtes en Oxinium® ont encore été proposées,
augmentation de l'usure volumétrique de 40 mm3/an alliant en principe la solidité d'une tête métallique et
le multiplie par trois [2]. les qualités de surface des céramiques.
De nombreux facteurs ont une influence sur cette Le PE a lui aussi été modifié, avec des proposi-
usure : facteurs liés au patient (âge, sexe et niveau d'ac- tions souvent malheureuses (Hylamer®, polyéthylène
tivité), à la prothèse (matériau et diamètre de la tête ; « Poly II » renforcé par des fibres de carbone, etc.)
épaisseur, procédé de fabrication, technique de stérili- jusqu'à l'avènement du polyéthylène hautement réticulé
sation et méthode de fixation de la cupule). D'autres (HXLPE) qui a fait la preuve de sa grande efficacité sur
particules (de ciment, de métal) peuvent également la réduction de l'usure. Il en existe divers types selon le
engendrer une ostéolyse. procédé de fabrication et de stérilisation. Il représente
Les recherches visant à réduire la fréquence de l'os- la quasi-totalité du marché du PE actuellement.
téolyse ont cherché à réduire l'usure du PE ; elles ont Les deux couples « dur-mou » actuellement utilisés
intéressé les deux versants de l'articulation : tête pro- sont le couple chrome-cobalt (CrCo)-HXLPE et le
thétique et surface de frottement acétabulaire. couple céramique Delta®-HXLPE, et la tendance est
Divers types de tête sont encore utilisés : à l'utilisation de têtes fémorales plus volumineuses
• les premières têtes prothétiques étaient en métal (32, 36 mm, voire plus) visant à réduire le risque de
(acier, chrome-cobalt) et c'est la réduction de leur luxation.
diamètre (jusqu'à 22,2 mm) qui est apparue pendant Mais aujourd'hui, les têtes en céramique sont plus
longtemps comme le meilleur moyen de réduire l'usure utilisées pour réduire la libération de particules métal-
(low friction arthroplasty de Charnley, gold standard liques à partir du cône morse que pour réduire l'usure
de la PTH). Il a néanmoins été reproché à la « tête de très faible du HXLPE, que ce dernier s'articule avec
22,2 » d'exposer à un risque de luxation trop élevé, une tête métallique ou en céramique, et ce quel que
réduit par certaines voies (antérieure et antérolatérale, soit son diamètre ou presque.
trochantérotomie, de moins en moins pratiquée) ; Nous nous efforcerons de répondre aux quatre ques-
• des têtes en céramique d'alumine ont été proposées tions suivantes :
en raison d'un coefficient de friction de l'alumine avec • Quels sont les avantages et les inconvénients des
le polyéthylène inférieur à celui des têtes métalliques, têtes en céramique par rapport aux têtes métalliques ?
ce qui permettait d'envisager l'utilisation de têtes de • Quelle est l'influence du diamètre de la tête à cet
plus grand diamètre sans risque d'usure excessive. Ce égard ?

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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100 D. Huten, H. COMMO , . GICQ L, F. BASS LO

• Ces différences sont-elles toujours réelles face au PE physiologique, l'usure du PEC face à une tête métal-
réticulé ? lique était 1,55 fois celle face à une tête en céramique.
• Une tête en céramique réduit-elle le risque de corro- Saikko et al. [6], en 1993, ont comparé l'usure du
sion du cône morse ? Quel que soit son diamètre ? PEC à 3 millions de cycles face à différentes têtes
métalliques ou en alumine. L'usure moyenne face aux
Quels sont les avantages têtes en alumine était de 0 à 5,7 mg/million de cycles,
correspondant à 0 à 0,008 mm/an, et face aux têtes
et les inconvénients des têtes métalliques de 3,9 à 178 mg/million de cycles, cor-
en céramique par rapport respondant à 0,005 à 0,24 mm/an. Les têtes en acier
aux têtes métalliques ? inox engendraient la plus grande usure. Les auteurs
signalaient une corrosion au niveau de la jonction
Les céramiques bio-inertes utilisées en orthopédie tête-col à laquelle il n'a été porté attention que beau-
sont obtenues par frittage (agglutination par chauf- coup plus tard.
fage d'une poudre préalablement comprimée). Elles Dans une autre étude de Saikko et al. [7] de 2001,
sont très denses et très résistantes à l'usure. Elles com- l'usure du PE (irradié sous argon) était mesurée à
portent l'alumine, la zircone et les composites alumine- 1 million de cycles dans du sérum bovin dilué. L'usure
zircone. On peut en rapprocher l'Oxynium® qui est un moyenne des cupules était de 56 et 48 mg/million de
alliage métallique céramisé (zirconium-niobium avec cycles, face à des têtes de 28 mm en CrCo ou alumine
de l'oxyde de zirconium en surface). La céramique respectivement.
d'alumine et la céramique Delta® font l'objet de deux
textes de ce livre.
Les avantages des têtes en céramique sur les têtes Études cliniques
métalliques sont nombreux [3, 4] :
Les études cliniques comparant l'usure du PEC face
• très faible rugosité qui leur procure un coefficient de
aux têtes métalliques ou en céramique d'aluine sont
friction très bas avec le PE ;
peu nombreuses et leurs résultats difficiles à interpré-
• meilleure mouillabilité, ce qui réduit l'usure adhé-
ter car les prothèses étudiées diffèrent par les prothèses
sive du PE ;
étudiées (type de PEC, têtes, cônes), les techniques de
• très faible libération de particules d'usure bien tolé-
mesure de l'usure du PE sont très diverses (Livermore,
rées sur le plan biologique ;
Polyware, Dorr et Wan, Hip32, etc.). En outre, cer-
• grande dureté avec une très grande résistance aux
taines études sont fondées sur l'usure linéaire (mm/an)
forces de compression et à la rayure très supérieure à
et d'autres sur l'usure volumétrique (mm3/an), ce qui
celle des alliages métalliques, ce qui leur confère une
rend leur comparaison difficile.
plus grande résistance à l'usure à trois composants.
En 2000, Clarke et Gustafson [8] ont regroupé les
7 études cliniques comparatives référencées à l'époque ;
êtes en céramique d'alumine dans toutes les études, l'usure face aux têtes métal-
liques était toujours supérieure à l'usure face aux têtes
Avantages en céramique, avec un rapport entre les deux de 2,7 en
L'alumine [3] a été la première utilisée et elle reste la moyenne (1,5 à 4). Ces variations s'expliquaient par

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référence. Elle est obtenue par frittage d'une poudre la diversité des cupules (fabrication, stérilisation), des
d'oxyde d'aluminium. Le frittage par compression têtes (acier, CrCo) et des cônes des prothèses utilisées
isostatique à chaud (HIP) et la diminution de la taille dans ces études. En retirant deux études méthodologi-
des grains ont permis d'en augmenter sa densité et sa quement imparfaites, ce rapport était de 2. En considé-
résistance. Elle est d'une grande stabilité thermodyna- rant l'ensemble des données des études en laboratoire
mique qui n'autorise aucune transformation de phase. et des études cliniques, les auteurs estimaient que le
couple céramique-PEC réduit l'usure du PEC de 50 %
par rapport au couple métal-PEC.
Études sur simulateurs Il existe d'autres études comparatives que celles col-
Clarke et al. [5] ont rappelé les grandes différences ligées par Clarke et Gustafson.
entre les résultats des études d'usure sur simulateur • Hernigou et Bahramy [9], dans une étude surtout
selon le lubrifiant utilisé. Dans l'eau, les taux d'usure destinée à montrer l'augmentation avec le temps de
du PE et de l'alumine sont 20 à 80 fois inférieurs à l'usure du PEC face aux têtes en alumine de zircone,
ceux du CrCo. En milieu protéiné, ils dépendent de la ont comparé l'usure du PEC à 12 ans, face à des têtes
concentration en protéines et, pour une concentration de 32 mm en céramique d'alumine ou en acier inox.
Le mariage du polyéthylène : métal ou céramique ? 101

Elle était de 755 mm3 dans le groupe alumine et de qui a conclu à l'absence de supériorité des têtes en
1314 mm3 dans le groupe acier inox. céramique d'alumine en dépit de leurs avantages théo-
• L'étude de Dahl et al. [10], plus récente, regroupait riques. L'usure radiographique annuelle du PEC de
deux essais randomisés, avec un total de 87 hanches 81 PTH à tête en céramique d'alumine y était com-
opérées dans un seul centre par le même chirurgien. parée à celle d'un groupe apparié de 43 PTH à tête en
Toutes les cupules étaient en PEC et le diamètre des CrCo. À 7 ans de recul, l'usure vraie était légèrement
têtes était de 28 mm. L'usure était mesurée par RSA plus élevée dans le groupe céramique (0,09 mm/an)
(radiostereometric analysis). À 10 ans, l'usure linéaire que dans le groupe CrCo (0,07 mm/an).
était en moyenne de 0,96 mm pour les têtes en chrome-
cobalt et de 0,42 mm pour les têtes en alumine, soit
une différence moyenne de 0,54 mm (p = 0,001). Registres
L'usure linéaire annuelle des têtes en céramique était Des études de registre ont montré de meilleures survies
de 0,048 mm inférieure (p = 0,003) à celle des têtes en des prothèses à tête en céramique que celles des pro-
CrCo, soit une réduction de l'usure de 50 % à 10 ans. thèses à tête métallique (acier et CrCo). Ainsi, dans la
• Dahl et al. [11], reprenant une partie de l'effec- série du registre norvégien de 9113 PTH avec cupule
tif précédent, ont étudié l'usure du PEC de 43 PTH metal-back et PEC [16], le risque relatif de révision
pour arthrose. L'usure à 10 ans était en moyenne de acétabulaire des PTH à tête métallique était à 12 ans
0,62 mm dans le groupe céramique et de 1,40 mm de 1,9 (1,6 à 2,2) versus 1,8 (1,4 à 2,3) pour celles à
dans le groupe CrCo. L'ostéolyse était comparable tête en céramique. Cette étude concluait à une légère
dans les deux groupes. supériorité des têtes en céramique (et par ailleurs à
• Dans l'étude de Meftah et al. [12], 31 paires de PTH une dégradation de la survie des cupules metal-backed
appariées selon le sexe, l'âge, le poids, l'étiologie et modulaires avec insert en PEC au-delà de 7 ans, expli-
le niveau d'activité avaient été pratiquées par un seul quée avant tout par l'usure du PEC, source d'ostéolyse
opérateur avec une tête de 28 mm en céramique d'alu- et/ou de descellement).
mine ou en CrCo. L'âge moyen était de 55 ans. Le Les données du registre australien de 2016 ne vont
recul était de 17 ans. L'usure (mesurée à l'aide du logi- pas dans le même sens avec des taux de révision cumu-
ciel Romand®) était de 0,086 mm/an pour les têtes en lée à 10 ans des prothèses C-PEC (7,0 % ; 6,3–7,8)
céramique et de 0,137 mm/an pour les têtes en CrCo supérieurs à ceux des prothèses métal-PEC (6,3 % ;
(p = 0,0015). 6,1–6,6) dans les prothèses pour coxarthrose [17].
• Dans l'étude rétrospective de Wang et al. [13], des Néanmoins, il s'agit d'une étude globale de la survie et
PTH bilatérales de première intention avaient été pra- pas d'une étude spécifique du risque de révision acéta-
tiquées chez 22 patients, avec d'un côté un couple bulaire pour descellement/ostéolyse).
métal-PEC et de l'autre un couple alumine-PEC. À Au total :
10 ans de recul, l'usure linéaire du PEC était mesurée • l'usure du PEC est significativement réduite par
selon la méthode de Dorr. Elle était de 0,133 mm/an l'utilisation de têtes en céramique de même diamètre
dans le groupe métal-PEC et de 0,056 mm/an dans le dans les études sur simulateur et les études cliniques
groupe alumine-PEC (p < 0,001). comparatives ;
Dans une étude non comparative, Urban et al. [14] • la réduction de l'usure par les têtes en céramique,
ont rapporté à très long terme une très faible usure du de 32 ou 28 mm dans la grande majorité des études,
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PEC face à des têtes en alumine de 32 mm (64 PTH dépend de nombreux facteurs et notamment du PEC
cimentées pratiquées par un seul chirurgien chez des utilisé, ce qui explique les variations entre les études.
patients âgés en moyenne de 69 ans, associant une Elle est de l'ordre de 50 % ;
tige de Charnley-Müller à tête modulaire de 32 mm • ces données ont fait recommander l'utilisation de
en céramique d'alumine et une cupule en PEC cimen- têtes en alumine dans les PTH du sujet jeune et/ou actif
tée). La survie était de 95 % à 5 ans, 95 % à 10 ans, par certains [18, 19].
89 % à 15 ans et 79 % à 20 ans. Les usures linéaire
et volumétrique moyenne étaient de 0,034 mm/an et Inconvénients
28 mm3/an respectivement, ce qui est très inférieur à
l'usure moyenne du PEC face aux têtes de CrCo de La céramique d'alumine est très rigide avec un module
même diamètre. Aucune fracture de tête en céramique d'élasticité (380 GPa) très supérieur à celui des alliages
n'était survenue. métalliques (200 pour le CrCo et l'acier 316L) mais a
Une seule étude a conclu à l'infériorité des têtes en une faible ténacité, c'est-à-dire une capacité limitée à
céramique. Il s'agit de l'étude de Sychertz et al. [15], résister à la propagation d'une fissure [3]. Les contraintes
102 D. Huten, H. COMMO , . GICQ L, F. BASS LO

à la rupture de l'alumine sont comparables à celle des Transfert de particules métalliques


métaux en compression, mais leur sont inférieures en
flexion et en traction. La propagation d'une fissure peut L'alumine résiste mieux que le CrCo à l'usure à
aboutir à une rupture brutale de la céramique. La céra- trois composants du fait de sa plus grande dureté.
mique d'alumine est la plus exposée à la rupture car elle Néanmoins, certaines têtes en alumine retirées lors de
a la plus faible ténacité. révision présentent des zones de transfert de particules
métalliques. De tels transferts de métal témoignent d'un
contact de la céramique avec le métal de la cupule, lors
Fractures de tête d'une manœuvre de réduction peropératoire ou d'une
Il est difficile de préciser leur fréquence, très diverse- luxation ou de la libération de particules de métal dans
ment appréciée, ce qui s'explique par des différences l'articulation, à partir de la jonction cône-tête fémo-
de qualité des têtes en céramique et des dessins des rale par exemple. Ils augmentent la rugosité des têtes
cônes morses. Elle est vraisemblablement sous-estimée et l'usure du PEC [25] qui était doublée (0,19 mm/an
du fait d'une sous-déclaration, mais elle est devenue versus 0,10 mm/an selon que la zone de transfert de
très faible grâce aux progrès de la technologie de la métal était supérieure ou inférieure à 6 % de la surface
céramique d'alumine. de la tête dans l'étude de Kim et al. [25].
Fritsch et al. [20] ont rapporté le devenir de 4341 têtes Néanmoins, ces transferts de métal très apparents
en alumine implantées entre 1974 et 1994, s'articulant sur les têtes en céramique concernent tout autant les
avec 2693 inserts en alumine et 1464 cupules en PEC. têtes en CrCo. Ils relèvent des mêmes causes et ont les
À 6 ans de recul moyen, une seule fracture de tête, mêmes conséquences [26].
d'origine traumatique, était survenue dans le groupe Au total :
C-PEC (0,07 %). • le taux de rupture des têtes en alumine est très faible
Willmann [21] a insisté à juste titre sur la grande et dépend de la qualité de l'alumine et des conditions
diversité des taux de fractures des têtes en céramique dans lesquelles on la fait travailler (dessin du cône
dont il existe pour lui trois générations : de 0 % pour morse, étendue de la surface de contact tête-cône) ;
les têtes fabriquées après 1990 à 13,4 % pour celles • la technique chirurgicale joue aussi un rôle :
fabriquées avant 1990. Il avançait des taux de frac- – pour prévenir une rupture de tête, le cône doit
ture de la céramique Biolox® de 0,026 % pour la pre- être parfaitement propre et asséché lors de la mise
mière génération de têtes en céramique d'alumine, de en place de la tête et celle-ci doit être tournée sur le
0,014 % pour la deuxième et de 0,004 % pour les cône puis impactée ;
têtes fabriquées au-delà de 1994. – pour éviter les transferts de métal, il faut éviter
Hannouche et al. [22] ont relevé 8 fractures de en peropératoire tout contact tête-cupule lors de la
tête (Ceraver®) sur 5 500 PTH (1 200 alumine-PEC réduction et prévenir les luxations.
et 3 300 alumine-alumine) implantées entre 1997 et
2001, soit 0,014 % chez des patients relativement Zircone
jeunes (59 ans en moyenne) sans surcharge pondérale
(71 kg en moyenne). Deux étaient d'origine trauma- La zircone est obtenue par frittage d'une poudre
tique, et deux dues à une utilisation inadaptée de l'alu- d'oxyde de zirconium. Elle est plus dense que la céra-
mine (une tête de 22 mm et un col extralong). mique d'alumine, faite de grains beaucoup plus petits.

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Dans la série de Beckmann et al. [23], de 348 PTH Elle est en principe plus résistante que la céramique
sans ciment consécutives, avec tête en céramique d'alumine, notamment en flexion et traction et sa téna-
d'alumine Biolox® implantées entre 1985 et 1989 chez cité est plus élevée. Cependant, elle existe sous trois
des patients âgés de 57 ans en moyenne, les patients phases, cubique, quadratique (ou tétragonale) métas-
avaient été suivis au moins 20 ans. À la révision, table et monoclinique stable en fonction de la tem-
111 étaient décédés et 5 perdus de vue. L'incidence pérature, décroissante de la phase cubique à la phase
cumulée des fractures de tête fémorale était de 0,29 % monoclinique. Pour maintenir la zircone sous sa forme
à 22 ans (0,03-1,5 %). Il n'existait pas de signe radio- quadratique, mécaniquement intéressante, à tempéra-
graphique d'ostéolyse. ture ambiante, il faut la stabiliser par de l'oxyde d'Yt-
Ces taux de rupture, bien que très faibles, ne sont trium le plus souvent (zircone dite yttriée).
pas nuls. Ce risque est contrebalancé par un taux d'os- Néanmoins, la zircone vieillit mal sous l'effet des
téolyse très faible. Néanmoins, les reprises pour frac- contraintes en milieu aqueux, avec une transformation
tures de tête fémorale posent de difficiles problèmes de des grains quadratiques en grains monocliniques qui
choix d'implants [24]. se traduit par une augmentation de sa rugosité (donc
Le mariage du polyéthylène : métal ou céramique ? 103

de l'usure du PE) et une diminution de sa résistance CrCo dans 33 coxarthroses primitives (1996–1997) et
mécanique. L'augmentation de la température aug- ensuite des PTH à tête en zircone de 28 dans 36 coxar-
mente ce phénomène. Or la céramique de zircone a une throses primitives (1998–1999). L'âge moyen de toute
faible conductivité thermique, source d'une augmenta- la cohorte était de 52,5 ans. Les inserts de PEC avaient
tion de température néfaste au niveau de la superfi- été stérilisés dans l'argon. Le recul moyen était de
cie des têtes. Ces inconvénients ont fait abandonner 65 mois (56–77). La pénétration moyenne de la tête était
la céramique de zircone. En France, « l'affaire » des la même dans les deux groupes (CoCr : 0,25 mm/an ;
ruptures de têtes Zircone Prozyr™ (Saint-Gobain- zircone : 0,23 mm/an), de même que l'usure linéaire
Desmarquest) a précipité cet abandon en 2001–2002, (CoCr : 1,22 mm ; zircone : 1,11 mm).
alors que ces ruptures étaient le fait d'un défaut de Hernigou et Bahramy [9] ont bien montré la dégra-
fabrication. dation secondaire des têtes en zircone, source d'usure
Les méfaits de la transformation de la phase qua- secondairement accrue du PEC. L'usure du PEC face à
dratique en phase monoclinique ne sont apparents des têtes en alumine de 32 mm et des têtes de 28 mm
qu'à partir de 6 ou 7 ans, ce qui explique les résul- en zircone était comparée à l'usure face à des têtes en
tats apparemment favorables des séries ayant un recul acier inox de 32 et 28 mm respectivement. L'usure
limité, telles que celles de Kim [27]. Dans sa série, linéaire augmentait entre 5 et 12 ans face aux têtes en
54 patients âgés en moyenne de 44,2 ans avaient eu zircone et en acier inox. Elle était plus marquée dans
deux PTH consécutivement avec d'un côté une tête en le groupe zircone-PEC (0,4 mm/an versus 0,13 mm/
zirconium et de l'autre une tête en CrCo. À 7,1 ans de an dans le groupe acier-PEC). Durant la même
recul moyen, l'usure linéaire moyenne du PEC était de période, l'usure du groupe alumine-PEC était inchan-
0,08 mm/an dans le groupe zirconium et 0,17 mm/an gée (0,07 mm/an). Au dernier recul, l'usure moyenne
dans le groupe CrCo (p = 0,004) et l'usure volumé- était de 1360 mm3 dans le groupe zircone 28 mm,
trique de 350,8 mm3 dans le groupe zirconium et 683 mm3 dans le groupe acier-PE 28 mm, 755 mm3
744,7 mm3 dans le groupe CrCo (p = 0,004). La rugo- dans le groupe alumine 32 mm-PEC et 1 314 mm3
sité de deux têtes en zirconium explantées (pour des- dans le groupe acier 32 mm-PEC. Cette usure accrue
cellement fémoral) était très supérieure à celles de deux du groupe zircone-PEC ne devenait apparente qu'à
têtes en zirconium non implantées et de 4 têtes en CrCo partir de 8 ans ; elle était en rapport avec une aug-
non implantées). Les deux têtes en zirconium explan- mentation du taux de phase monoclinique à la super-
tées présentaient une légère transformation de phase. ficie des têtes (augmentant leur rugosité) et avec une
Kim et Kim [28] ont encore comparé 30 têtes en alu- perte de la sphéricité des têtes en zircone (constatée
mine et 24 en zircone retirées lors de révisions, à la sur 3 têtes retirées lors de révisions).
recherche d'une transformation de phase de la zircone Au total :
et ont étudié la pénétration des têtes dans des inserts • la supériorité théorique de la zircone sur l'alumine
en PEC. Le recul moyen était de 11,3 ans pour le n'a pas été confirmée par l'expérience ;
groupe alumine et 9,8 ans pour le groupe zircone. La • aujourd'hui, les têtes en zircone ne sont plus utili-
rugosité moyenne des têtes en alumine était identique sées, au moins en France ;
à celle des têtes en zircone. Le taux moyen de zircone • certains, néanmoins, cherchent encore à améliorer
monoclinique de 2 têtes en zircone témoin était de 1 % la zircone [30] et d'autres ont rapporté récemment
et 1,2 %. Le taux moyen de zircone monoclinique des encore des résultats satisfaisants à 10 ans des têtes en
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24 têtes explantées était de 7,3 % (1–26 %). Dans zircone, face, il est vrai, à du HXLPE [31], et des études
le groupe alumine, la pénétration linéaire moyenne d'explants satisfaisantes ne montrant pas d'augmen-
dans le PEC était de 0,10 mm/an lorsque la rugosité tation de la rugosité malgré une augmentation de la
était faible et de 0,13 mm/an lorsqu'elle était élevée phase monoclinique en superficie [32].
(p = 0,0041). Dans le groupe zircone, la pénétration
linéaire moyenne dans le PEC était de 0,09 mm/an Céramique Delta®
lorsque la rugosité était faible et de 0,12 mm/an
lorsqu'elle était élevée (p = 0,039). Les têtes de zircone Il s'agit d'un composite associant une matrice d'alu-
qui présentaient une transformation de phase minime mine (82 %), un renfort de zircone sous forme tétra-
avaient la même rugosité et la même pénétration gonale stabilisée à l'Yttirum (17 %) et d'oxyde de
linéaire dans le PEC que les têtes en alumine. strontium en très faible quantité. La dilatation (5 %)
Avec un recul comparable, Stilling et al. [29] ont des grains de zircone lors du passage de la phase tétra-
montré l'absence de supériorité des têtes en zircone. gonale à la phase monoclinique et l'effet barrière des
Un chirurgien avait utilisé des PTH à tête de 28 en plaquettes de strontium s'opposent à la propagation
104 D. Huten, H. COMMO , . GICQ L, F. BASS LO

des fissures, ce qui confère à la céramique Delta®


une plus grande résistance mécanique. Les grains de
êtes métalliques traitées
zircone doivent être répartis de manière homogène. De nombreux procédés ont été proposés pour amélio-
Bien qu'il s'agisse d'un matériau très prometteur, il rer les propriétés tribologiques des têtes métalliques.
existe peu de résultats cliniques à long terme et les Les résultats prometteurs des études in vitro n'ont pas
études d'explants montrent qu'avec le temps le pour- toujours été confirmés par les études cliniques, ce qui
centage de zircone en phase monoclinique augmente en fait abandonner beaucoup.
à la superficie des têtes, sans conséquences néfastes Le traitement de surface des têtes en CrCo par implan-
évidentes toutefois. tation d'ions azote, qui augmente la dureté des têtes en
La céramique Delta® a permis de réduire le taux de superficie, a paru favorable à Marumaya et al. [38] :
rupture des têtes fémorales de 0,021 % pour la céra- l'usure moyenne du PEC face à de telles têtes de 26 ou
mique d'alumine à 0,003 % et le taux de rupture dimi- 28 mm (55 cas) était réduite par rapport à celle du PE
nue avec l'augmentation du diamètre des têtes [33]. face aux mêmes têtes en CrCo, mais non traitées (55 cas
Une tête de 36 mm est donc moins exposée au risque appariés) à 3 ans de recul (0,116 mm versus 0,161 mm
de rupture qu'une tête de 28 mm et, par ailleurs, elle par an et 57,8 mm3 versus 74,5 mm3 par an). Néanmoins,
évite les contacts col-cupule et ainsi les phénomènes de cet effet bénéfique semble s'épuiser au fil du temps [39].
microséparation tête-cupule. Les auteurs rappelaient Récemment, les têtes en oxyde de zirconium
que d'autres facteurs interviennent : propreté du cône, (Oxinium®) ont fait naître de nouveaux espoirs.
direction de la force d'impaction par rapport à l'axe L'Oxinium® est un alliage métallique (zirconium :
du col et orientation de la cupule pour réduire les phé- 97,5 % ; niobium : 2,5 %) ayant subi une oxydation
nomènes d'edge-loading plus délétères pour le coupe à haute température qui induit la formation en sur-
C-C que le couple C-PE. face d'une fine couche de céramique (cinq microns).
Sur 3,2 millions de têtes en céramique d'alumine Cet Oxinium®, fabriqué exclusivement par la société
et 2,78 millions en céramique Delta®, les nombres Smith & Nephew, combine en principe les avantages
de fractures de têtes recensées par la société de la résistance mécanique du métal avec ceux de la
CeramTec étaient en 2017 de 672 et 28 respecti- surface d'une tête céramique (réduction de la friction
vement, soit des taux de 0,0201 % et 0,0010 %, et de l'usure).
respectivement (p < 0,0001) [34]. La majorité des De nombreuses études in vitro [40] ont démontré
fractures (80 %) étaient survenues au cours des son intérêt pour réduire l'usure du PE et augmenter la
48 premiers mois postopératoires (p < 0,01). Les résistance aux rayures. Certaines études ont rapporté
fractures étaient fréquemment corrélées à un trau- des usures du PE très basses avec ces têtes [41, 42].
matisme, un défaut d'appariement des pièces et des Néanmoins, les résultats des essais prospectifs ran-
luxations. Le taux de rupture des têtes de grand domisés mesurant l'usure du PE face à de telles têtes
diamètre était plus faible que celui des têtes de petit sont nettement moins favorables. Trois n'ont montré
diamètre (0,0316 % pour les têtes de 28 mm ver- aucune supériorité des têtes en OxZi :
sus 0,0080 % pour les têtes de 32 mm et plus • Zachary et al. [43] ont comparé 4 couples (CrCo-PE,
[p < 0,01]). Il existait la même tendance pour les CrCo-HXLPE, Oxinium®-PE et Oxinium®-HXLPE),
têtes en céramique d'alumine. La longueur du col avec un total de 91 hanches au recul moyen de 6,8 ans.
intervenait également : un « col court » était facteur Les usures du PE étaient respectivement de 0,241mm/an,

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de rupture pour les têtes de 28 mm (p < 0,01). 0,076 mm/an, 0,238 mm/an et 0,061 mm/an. L'usure
Il faut néanmoins tempérer cet optimisme par l'ab- était significativement réduite pour les couples uti-
sence de résultats cliniques à long terme de la céra- lisant le HXLPE plutôt que le PE, mais les têtes en
mique Delta® et les études d'explants (1 cas [35], 5 cas Oxinium® ne démontraient pas de supériorité par rap-
[36], 26 cas [37]) qui montrent une augmentation de port aux têtes en CrCo ;
la zircone en phase monoclinique sur la surface des • dans l'étude de Jassim et al. [44], les patients de
têtes explantées avec le temps. La plus importante 3 centres ont été randomisés en 3 groupes (CoCr-
est celle de Parkes et al. [37] avec 26 têtes (de pro- HXLPE, OxZi-XLPE, OxZi-PEC, avec un total de
thèses à couple C-C) retirées à 1,5 an en moyenne 368 patients à 5 ans de recul. La pénétration linéaire de
(1 mois-7 ans). Le taux de zircone monoclinique était la tête dans l'insert était de 0,028 mm/an, 0,023 mm/an
de 23 % ± 9 % (avec un maximum de 42 %) et au et 0,09 mm/an respectivement, donc plus impor-
niveau des zones sans usure et de 13 à 51 % au niveau tante dans le groupe PEC que dans les deux autres
des zones d'usure (versus 5 ± 2 % pour les têtes neuves (p < 0,001), et ce que la tête soit en CrCo ou en OxZi
non implantées). (tendance à une usure moindre mais non significative) ;
Le mariage du polyéthylène : métal ou céramique ? 105

• dans l'étude de Jonsson et al. [45], 120 patients L'étude historique de Livermore et al. [49], fondée
avaient été randomisés en 4 groupes : 28 mm CrCo- sur une méthode basique de mesure 2D de l'usure du
PEC, 28 mm CrCO-HXLPE, 28 mm OxZI-PEC et PE sur les radiographies standard, a été l'une des pre-
28 mm OxZi-HXLPE, et l'usure était mesurée à 5 ans mières à montrer que l'usure du PEC était plus impor-
de recul avec la RSA. À 5 ans, l'usure était moins tante, les liserés acétabulaires et l'ostéolyse fémorale
importante dans les deux groupes avec HXLPE, que la proximale plus fréquents avec les têtes de 32 mm
tête soit en CrCo ou en OxZi (p < 0,001). qu'avec celles de 28 mm.
Une seule étude comparative [46] est favorable aux L'épaisseur de PEC joue également un rôle impor-
têtes en OxZi. Dans cette étude, la randomisation a dû tant, démontré, entre autres, par les études d'explants
être interrompue et les patients ont ensuite été alter- d'Oonishi et al. [50].
nativement répartis dans les 4 groupes suivants : A, Dans une première étude, ils ont montré l'impor-
28 mm C-PEC ; B, 28 mm C-XLPE ; C, 28 mm OxZi- tance de l'épaisseur de la cupule :
XLPE ; et D, 32 mm OxZi-XLPE ; 188 patients ont pu • quand l'épaisseur des cupules était inférieure à
être étudiés à 9 ans de recul moyen : 9 mm, l'usure linéaire du PEC augmentait avec le dia-
• à 5 ans, les deux couples OxZi-XLPE C et D procu- mètre de la tête fémorale (22, 28 et 32 mm). Cet effet
raient moins d'usure (p < 0,01) volumétrique annuelle disparaissait au-delà de 9 mm ;
(310 mm3/an ; 320 mm3/an respectivement) que les • quand l'épaisseur de la cupule était inférieure à
couples A (C-PEC : 791 mm3/an) et B (C-XLPE : 11 mm, l'usure volumétrique du PEC augmentait avec
1420 mm3/an) ; le diamètre de la tête. Cet effet disparaissait au-delà de
• à 10 ans, les deux couples OxZi-HXLPE C et D 11 mm ;
procuraient moins d'usure (p < 0,01) volumétrique • l'usure des cupules en HXLPE était indépendante du
annuelle (356 mm3/an et 354 mm3/an respective- diamètre de la tête.
ment) que les groupes A (C-PEC : 895 mm3/an) et B Dans une deuxième étude d'explants de prothèses
(C-HXLPE : 1625 mm3/an) ; sans complication [51], ou avec descellement modéré
• il n'y avait aucune différence entre les usures volu- ou infection tardive) s'articulant avec des têtes de
métriques des deux groupes OxZi ; 28 mm en céramique, ils ont montré que :
• deux hanches (une du groupe A et une du groupe B) • l'usure réelle était de 50 % plus importante que celle
étaient programmées pour une révision nécessitée par mesurée sur les radiographies ;
une usure avec ostéolyse ; • plus la cupule était épaisse, moins l'usure était
• c'est la combinaison OxZi-HXLPE qui procurait le importante. L'usure des cupules de 7 et 8 mm d'épais-
moins d'usure à 9 ans de recul (7–12). seur était le double de celle des cupules de 10 et 11 mm.
Enfin, il existe des observations d'explants endom- La prothèse de Charnley à tête de 22 mm avec une
magés à la suite de luxations. L'une d'elles [47] com- cupule cimentée alliait ainsi la plus petite tête métal-
porte une revue de la littérature sur cette complication lique possible à la cupule « tout PE » la plus épaisse
et recommande de prendre garde lors des manœuvres possible. Il est logique qu'elle soit devenue le gold
de réduction peropératoire à éviter tout contact entre standard, avec une usure linéaire annuelle moyenne de
la tête en Oxinium® et la cupule métallique. l'ordre de 0,1 mm/an, au prix d'un risque de luxation
Dans la dernière étude de Garvin et al. [48], les têtes justifiant une voie d'abord autre que postérieure (tro-
en Oxinium® de 28 mm n'entraînaient pas à 9 à 14 ans chantérotomie, voie antérieure ou antérolatérale). La
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de recul moins d'usure du HXLPE que les têtes en fixation acétabulaire sans ciment, par le biais d'une
CrCo ou céramique de même diamètre. cupule métallique rigidifiant le PEC et réduisant son
Au total, il n'existe actuellement pas de preuve de épaisseur, a peut-être amélioré la fixation acétabulaire,
la supériorité des têtes en Oxinium® et l'utilisation du mais a majoré l'usure du PEC, surtout lorsqu'elle était
HXLPE est de loin la plus performante que celle de combinée avec des têtes de 28 ou 32 mm.
l'Oxinium®. Compte tenu de la moindre usure du PEC face à
des têtes en céramique, des têtes en céramique de petit
diamètre pourraient être la solution idéale vis-à-vis de
Quelle est l'influence du diamètre l'usure du PEC. Bien qu'elles exposent à des risques
de la tête sur l'usure du PEC ? accrus de rupture et d'instabilité, certains, peu nom-
breux, ont suivi cette voie :
L'usure du PEC face à des têtes de différents diamètres • Tanaka et al. [52] ont étudié l'usure du PEC face
a fait l'objet de nombreuses études déjà anciennes sur à des têtes en céramique d'alumine de 22, 26 et
lesquelles nous ne reviendrons pas. 28 mm de 156 PTH cimentées à un recul minimal de
106 D. Huten, H. COMMO , . GICQ L, F. BASS LO

8 ans. Elle était plus élevée pour les têtes de 28 mm obtenues par extrusion) [56, 57], mais c'est le HXLPE
(0,156 mm/an), alors qu'elle était relativement faible qui semble être un des plus grands tournants de l'his-
pour les têtes de 22 et 26 mm (0,090 et 0,098 mm/an, toire de la PTH.
respectivement). L'étude des têtes montrait que leur
état de surface était inchangé et d'excellente qualité ;
• Wroblewski et al. [53] ont utilisé des têtes en céra- P hautement réticulé
mique d'alumine de 22,225 mm dans une série conti- Le HXLPE fait l'objet d'un autre article de ce livre
nue de 11 PTH de Charnley cimentées. Après une dans lequel le lecteur trouvera tous les renseignements
pénétration de la tête de 0,41 mm au cours des deux nécessaires. Ses auteurs recommandent très fortement
premières années (rodage), la pénétration annuelle son utilisation pour les cupules conventionnelles en
moyenne des têtes était de 0,022 mm/an (0 à 0,026), HXLPE.
inférieure à l'usure des cupules de Charnley en PEC, Ce matériau a en effet fait la preuve de sa grande
de 0,07 mm/an pour les auteurs. Il n'y avait ni descel- efficience non seulement dans les études sur simulateur,
lement ni ostéolyse à 17 ans de recul (15-18,1). Il faut qui ont démontré sa plus grande résistance à l'usure
souligner que, dans cette série très limitée, le PE était (y compris en présence d'un troisième corps), mais
chimiquement réticulé. aussi dans les études cliniques à moyen et long termes.
Au total : Il y a en fait divers HXLPE, selon le matériau, les
• une tête métallique de 22 mm et une tête en céra- doses d'irradiation et leur technique de fabrication
mique de 22 ou 26 mm sont celles qui génèrent la et de stérilisation, et ils continuent à faire l'objet de
moindre usure du PEC ; modifications visant à améliorer leurs propriétés
• l'épaisseur d'une cupule en PEC doit si possible mécaniques. Une des plus intéressantes semble être
dépasser 10 mm. L'épaisseur de la cupule est limitée l'adjonction de vitamine E [58] qui améliore la résis-
par le diamètre de la cavité acétabulaire et le choix tance mécanique du HXLPE, mais dont les résultats
par le chirurgien d'une tête de grand diamètre et d'une cliniques ne sont pas encore connus, même à moyen
cupule metal-back. terme.
Ces conclusions rejoignent celle de la méta-analyse Il existe aujourd'hui de nombreuses preuves de la
d'Oparaugo et al. [54], regroupant 8 séries sélection- supériorité du HXLPE sur le PEC en termes de réduc-
nées sur un total de 57. Elle concluait à une corrélation tion de l'usure, mais aussi des taux d'ostéolyse et de
entre le volume d'usure du PEC et les taux d'ostéo- reprises pour ostéolyse.
lyse et de révision. Les meilleurs résultats étaient ceux • En 2011, Kuzyk et al. [59], dans une méta-analyse
des cupules cimentées avec tête de 22 et 28 mm. Une de 12 séries sélectionnées (sur un total de 194), avaient
cupule metal-back et une tête de 32 mm étaient des déjà observé une réduction significative de l'usure
facteurs pronostiques défavorables. Au total, les meil- et du risque d'ostéolyse (risque relatif [RR] : 0,40 ;
leurs résultats étaient ceux des cupules tout PE cimen- 0,27–0,58) par rapport au PEC.
tées associées à une tête de 22 mm. • Shen et al. [60], dans une méta-analyse de 8 séries
regroupant 735 PTH à tête de 28 mm et cupule en
Les différences sont-elles toujours HXLPE ou en PEC revues à 5 ans de recul minimal,
réelles face au PE hautement ont également conclu à une diminution significative de

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réticulé (HXLPE) ? l'usure des cupules en HXLPE, sachant qu'elles prove-
naient de différents fabricants et qu'elles regroupaient
Améliorations du P C différents HXLPE. En revanche, il n'y avait pas de
réduction de l'ostéolyse radiologique et des révisions
Depuis de nombreuses années, les efforts ont porté sur pour ostéolyse. Le faible recul des études colligées
l'amélioration du PEC, maillon faible des prothèses explique probablement ce constat.
à couple de frottement « dur-mou ». De nombreux • En 2012, l'étude prospective randomisée d'Engh
« nouveaux polyéthylènes » ont été proposés avec des et al. [61] à 10,0 ans de recul a montré non seulement
résultats souvent décevants (PE Poly II, Hylamer, etc.). une réduction significative de l'usure (0,04 mm/an ver-
La stérilisation du PE par irradiation gamma en milieu sus 0,22 mm/an ; p < 0,001), mais aussi de l'ostéolyse
non oxygéné [55] et la conservation des cupules dans de plus de 1,5 cm2 (0 % versus 22 % pour le PEC ;
des emballages imperméables à l'air ont été un grand p < 0,001). En prenant la révision pour complications
progrès. Certains ont également attiré l'attention sur liées à l'usure du PE pour événement, la survie à 10 ans
la supériorité du PE comprimé-moulé (préparé à partir était de 100 % pour le HXLPE et de 94,7 % pour le
de la poudre) sur le PE usiné (à partir de barres de PEC PEC.
Le mariage du polyéthylène : métal ou céramique ? 107

• En 2016, Hanna et al. [62], dans une série mono- de cycles, respectivement (p < 0,016). Ces chiffres
centrique de 160 prothèses du même type (tête de montrent que, même pour les cupules les plus minces
28 mm et cupule en PE ou HXLPE), pratiquées chez (1,9 mm), l'usure linéaire annuelle était inférieure à
des patients âgés de 45 à 65 ans et revues à plus de l'usure linéaire annuelle moyenne du PEC face à une
13 ans, ont eux aussi rapporté : non seulement une tête de 22 mm (à 0,015 mm/an versus 0,10 mm/an).
usure linéaire de 0,035 mm/an dans le groupe HXLPE
versus 0,11 mm/an dans le groupe PEC (p = 0,006),
mais aussi l'absence d'ostéolyse dans le groupe HXLPE Études cliniques
versus 17 % d'ostéolyse acétabulaire et 18 % d'ostéo- L'usure du HXLPE face à des têtes de dimensions stan-
lyse fémorale dans le groupe PEC, et une survie (en dard (28, 32 mm) ne semble pas être préoccupante, même
prenant pour événement la révision pour usure du PE) si elle est un peu plus importante face aux têtes de 32 mm.
de 100 % dans le groupe HXLPE versus 86 % dans le Bragdon et al. [66] ont étudié les résultats à 7 à
groupe PEC. 10 ans de 768 PTH avec insert en HXLPE et tête de
• Les registres concluent aussi à la supériorité du diamètre variable (26–36 mm) provenant de 8 centres.
HXLPE, tel le registre australien de 2016 [17]. Il n'existait pas d'ostéolyse. L'usure linéaire ne dépen-
À 10 ans, le taux de révision cumulée du couple métal- dait pas du délai d'implantation chez les patients ayant
HXLPE était de 4,3 % (4,1–4,5) (versus 6,3 % ; 6,1–6,6 une tête de diamètre standard (26, 28, 32 mm). Il exis-
pour le couple métal-PEC) et de 4,4 % (4,0, 4,8) pour tait une tendance à une usure plus importante face aux
le couple C-HXLPE (versus 7,0 % ; 6,3-7,8 pour le têtes de 36 mm, mais elle restait en dessous du seuil
couple C-PEC). d'usure exposant à l'ostéolyse.
Stambough et al. [67] ont mesuré de manière pros-
Que reste-t-il de l'influence pective l'usure du HXLPE de 220 PTH consécutives
pratiquées chez des patients de moins de 50 ans face
du diamètre de la tête à une tête en céramique de 28 ou 32 mm, au recul
sur l'usure avec le HXLP ? moyen de 5,5 ans ; 101 patients (46 %) avaient une
PTH à tête de 28 mm et 119 patients (54 %) à tête
Études in vitro de 32- mm. L'usure moyenne était de 0,020 mm/an
Les études sur simulateur ont montré l'absence d'in- et 18,775 mm3/an pour les têtes de 28 mm versus
fluence du diamètre céphalique sur l'usure du HXLPE. 0,032 mm/an et 29,847 mm3/an pour les têtes de
Dans l'étude d'Hermida et al. [63] de 2003, l'usure 32 mm. L'usure face aux têtes de 32 mm était majorée
du HXLPE était de 1,51 et 2,57 mg par million de chez les femmes. Il n'y avait pas d'ostéolyse.
cycles pour les têtes de 28 et 32 mm respectivement C'est l'usure face aux têtes de 36 mm ou plus qui
(p < 0,001), ce qui faisait envisager une utilisation pourrait s'avérer délétère à long terme.
plus fréquente de têtes de 32 mm par les auteurs. Mais • Nebergall et al. [68] ont comparé l'usure du HXLPE
le souhait de nombreux chirurgiens en Amérique du à 13 ans mesurée en RSA, face à des têtes de 28 mm
Nord était d'utiliser des têtes de plus grand diamètre (6 cas) ou 36 mm (6 cas). L'usure moyenne était de
encore pour réduire le taux de luxations. C'est ce qui 0,05 ± 0,02 mm sans différence significative entre les
explique que de nombreuses études se soient intéres- deux groupes.
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sées aux têtes de 36 mm et plus : • L'étude prospective randomisée de Howie et al. [69]
• Zietz et al. [64] ont ainsi étudié l'usure du HXLPE a comparé l'usure du HXLPE face à une tête métal-
et du PEC face à des têtes de 28, 36 et 40 mm. Il exis- lique de 36 ou 28 mm entre 1 et 3 ans de recul chez
tait une usure significativement plus importante face 56 patients âgés. L'usure, mesurée par RSA, était de
aux têtes de plus grand diamètre, mais elle était très 0,00 et 0,01 mm/an respectivement. Aucun patient ne
inférieure à celle du PEC ; présentait une usure linéaire de plus de 0,1 mm/an.
• l'étude de Johnson et al. [65], en 2014, a com- L'usure moyenne était très faible dans toutes les direc-
paré l'usure après 2,4 millions de cycles d'inserts en tions et l'usure face aux têtes de 36 mm n'était pas
HXLPE de 1,9, 3,9, 5,9 ou 7,9 mm d'épaisseur face significativement plus importante que face aux têtes
à une tête de 36 mm. L'usure volumétrique dimi- de 28 mm, que l'usure soit mesurée en 2 ou 3D. Les
nuait avec l'épaisseur de PE. L'usure moyenne pour auteurs rappelaient la nécessité de rester prudent chez
les cupules de 1,9, 3,9, 5,9, et 7,9 mm était de 5,0 les patients jeunes et actifs, et d'étudier l'usure et l'os-
± 0,5, 3,2 ± 0,3, 2,5 ± 1,1, et 2,2 ± 1,3 mm3/million téolyse à long terme face aux têtes de 36 mm.
de cycles, respectivement (p < 0,016), soit une péné- • Lachiewicz et al. [70] ont revu 102 PTH au recul
tration de 0,015, 0,012, 0,011 et 0,010 mm/million minimal de 5 ans. La taille de la tête était sélectionnée
108 D. Huten, H. COMMO , . GICQ L, F. BASS LO

selon le diamètre de la cupule et le risque de luxation. moyenne selon Dorr de 0,02 ± 0,03 mm/an). Il n'y
L'usure du HXLPE était mesurée selon la méthode de avait pas de corrélation entre l'usure et la taille de la
Martell et al. Il n'y avait pas d'ostéolyse. L'usure linéaire cupule ou l'épaisseur de l'insert. Néanmoins, l'usure
médiane était de 0,028 mm/an (moyenne : 0,04 mm/an) augmentait avec le temps.
et l'usure volumétrique médiane de 25,6 mm3/an Au total :
(moyenne : 80,5 mm3/an). L'usure volumétrique totale • l'augmentation du diamètre des têtes face au HXLPE
médiane était de 41,0 mm3 (moyenne : 98,5 mm3). Il augmente significativement l'usure in vitro et in vivo à
n'y avait pas de corrélation entre le diamètre de la tête partir de 36 mm surtout, ce qui doit inciter à la pru-
fémorale et le taux d'usure linéaire, mais une corré- dence chez les sujets jeunes et actifs ;
lation entre un grand diamètre de tête (36 et 40 mm) • l'ostéolyse est très modérée, quels que soient l'usure
et l'usure volumétrique totale (156,6 mm3/an pour ces (toujours très réduite et très inférieure à celle du PEC)
deux diamètres). Les auteurs recommandaient néan- et le diamètre de la tête, et elle n'apparaît qu'au-delà
moins la prudence pour utiliser les grands diamètres de 10 ans ;
de têtes chez les sujets jeunes et ceux à faible risque de • on peut espérer que le HXLPE de « deuxième géné-
luxation. ration » et/ou enrichi par de la vitamine E permettra
• Avec un recul de 10 à 14 ans, les mêmes auteurs [71] d'améliorer ces résultats, mais rien n'est garanti à ce
ont étudié l'usure du HXLPE de la même cohorte (sur jour ;
84 PTH) en fonction du diamètre de la tête. Le diamètre • l'épaisseur minimale acceptable de HXLPE n'est pas
des têtes était de 26 mm dans 10 cas (12 %), 28 mm à ce jour clairement précisée. Il existe sur le marché des
dans 31 (37 %), 32 mm dans 31 (37 %), 36 mm dans cupules de 52 mm « acceptant des têtes de 36 mm », ce
8 (10 %), et 40 mm dans 4 cas (5 %). L'usure linéaire qui laisse 4 mm de HXLPE pour une cupule de 4 mm
médiane était de 0,024 mm/an et l'usure volumétrique d'épaisseur. On peut s'interroger sur la survie de telles
médiane de 12,19 mm3/an. Il n'y avait toujours pas prothèses, surtout chez des patients jeunes et actifs. En
de corrélation entre le diamètre de la tête et l'usure, cas de cotyle de petit diamètre et/ou quand on sou-
mais il en existait une entre les plus grosses têtes (36 et haite utiliser une tête de grand diamètre, l'utilisation
40 mm) et l'usure volumétrique médiane (26,1 mm3/an) de cupules « tout HXLPE » mérite d'être envisagée.
versus 3,1 pour les têtes de 26 mm, 12,3 pour celles de Les plus grosses têtes pourraient être la cause non
28 mm, et 12,9 pour celles de 32 mm. Il existait des seulement d'une usure accrue mais aussi de douleurs
petites lésions ostéolytiques dans 12 cas (14 %), mais de l'aine et de conflits avec le tendon de l'iliopsoas
sans corrélation avec le taux d'usure ou le diamètre de [74, 75].
la tête. Aucun insert ne s'était rompu.
• Dans la méta-analyse de 6 registres nationaux Quelles sont les conséquences
d'Allepuz et al. [72], seuls des patients de 45 à 64 ans
opérés d'une coxarthrose par PTH sans ciment à tête du choix d'une tête (matériau,
métallique étaient inclus, avec un total de 14 372 PTH. diamètre) sur la jonction
Le taux de révision à 5 ans variait de 1,9 % à 3,2 %
selon les registres. Le risque de révision ne variait pas
tête-cône morse ?
significativement entre les têtes de moins de 32 mm et Cooper et al. [76] ont eu le mérite d'attirer l'atten-
celles de plus de 32 mm. Une tête de grand diamètre tion les premiers sur la possibilité d'une corrosion de

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ne semblait pas compromettre la survie d'une PTH à la jonction tête-cône morse pouvant, au pire, entraî-
cupule en HXLPE. ner une réaction tissulaire locale adverse (adverse
• Il en était de même dans le registre australien de local tissue reaction [ALTR]) en rapportant les obser-
2016 [17]. vations de 10 prothèses M-PE commercialisées par
La dimension limitante est celle du cotyle. Lorsque trois fabricants différents et révisées pour corrosion
ses dimensions sont réduites, l'épaisseur de HXLPE au niveau de cette jonction. Tous les patients présen-
dépend du diamètre de la tête et de celle de la cupule taient des douleurs et/ou un gonflement local et deux
métallique. On dispose de peu d'études précisant des luxations récidivantes. Avant la révision, leurs
l'épaisseur minimale acceptable de HXLPE. Chua taux sériques de Co préopératoires étaient élevés, plus
et al. [73] ont étudié à moyen terme (7,5 ans ; 5–11,9) que ceux de Cr typiquement. On constatait lors de la
l'usure de cupules en HXLPE chez 80 patients asia- révision de grosses masses tissulaires et des lésions des
tiques de petite taille. Il n'y avait pas de différence parties molles avoisinantes avec une corrosion visible
entre l'usure des cupules de plus et de moins de 7 mm de la jonction tête-cône. Deux patients révisés en rai-
d'épaisseur (usure maximale de 0,09 mm/an ; usure son d'accidents d'instabilité présentaient des lésions
Le mariage du polyéthylène : métal ou céramique ? 109

sévères de l'appareil d'abduction. L'étude histologique de grand diamètre et de cônes de petites dimensions
retrouvait des zones de tissus nécrotiques. Après révi- était retrouvée dans la majorité des cas de corro-
sion (excision des tissus nécrotiques, changement d'in- sion publiés. Les revêtements par précipitation, les
sert et de tête avec une tête en céramique sur une gaine mélanges d'alliages métalliques (corrosion galvanique)
en titane interposée) dans 8 cas, les patients avaient et les incongruences tête-col augmentaient aussi ce
amélioré leur taux de Co sérique (dosé à 8 mois en risque de corrosion.
moyenne), retombé à 1,61 ng/Ml, tandis que leur taux Un grand diamètre de tête pourrait donc être un
de Cr était inchangé. Un cas d'instabilité chronique facteur de corrosion de la jonction tête-cône, ce qui
avait nécessité une re-révision. Une ALTR peut donc se conçoit compte tenu de son plus grand couple de
être la conséquence d'une corrosion de la jonction torsion et de son plus grand moment de flexion par
tête-cône morse d'une PTH M-PE identique à celles rapport au cône. L'étude de Lavernia et al. [82] va
compliquant l'évolution des prothèses M-M à grosse dans ce sens. Il s'agit d'une étude expérimentale simu-
tête. Des taux sériques de métal élevés, en particulier lant l'influence de l'appui monopode sur la jonction
une élévation des taux sériques de Co sans élévation entre une tête en chrome-cobalt ou alumine et un cône
des taux de Cr, aident à faire le diagnostic. (12/14) en alliage de titane. Il existait une corrélation
Toutes les prothèses du marché possèdent une entre le diamètre de la tête, quel qu'en soit le matériau,
modularité céphalique et par conséquent une jonc- et les contraintes exercées sur la jonction tête-cône ;
tion tête-cône morse. Le HLXPE a réduit l'usure, et elles doublaient entre 28 et 40 mm.
le choix d'une tête (matériau et diamètre) n'a plus Tous ne s'accordent pas sur ce fait. Triantafyllopoulos
sur ce paramètre qu'une influence relative au moins à et al. [83] ont ainsi évalué sur une échelle de 1 à 4 la
moyen terme. En revanche, il a une grande influence gravité de l'usure de contact/corrosion de la jonc-
sur la jonction tête-cône morse au niveau de laquelle tion tête-cône de 154 prothèses M-PE, provenant de
de nombreux facteurs interviennent [77, 78] : 3 282 révisions. L'usure de contact et la corrosion, très
• nature des matériaux en présence (titane, CrCo, fréquentes, n'étaient pas influencées par le diamètre
acier pour le cône ; CrCo, acier, céramiques d'alumine de la tête, mais elles l'étaient par le dessin du cône,
ou Delta®, Oxinium® pour la tête) ; les combinaisons d'alliages métalliques et la durée
• dessin du cône (diamètre, pente, longueur, état de d'implantation.
surface lisse ou avec un filetage) ; Quoi qu'il en soit, une tête en céramique ne sup-
• diamètre et la profondeur de la tête (« col long, prime pas ce phénomène mais en réduit l'importance :
moyen, court ») ; • Kurtz et al. [84] ont comparé la corrosion de la
• direction et intensité des forces d'impaction de la jonction céramique-cône morse de 50 prothèses à
tête sur le cône. celle de la jonction CrCo-cône morse de 50 autres
Le « mariage de la tête et du cône morse » pourrait prothèses appariées (durée d'implantation, offset
ainsi être aussi important, voire plus que celui de la fémoral, dessin et rigidité de la tige en flexion). Les
tête et du PE. scores d'usure de contact et de corrosion étaient
Pour Wassef et al. [79], les facteurs de risque d'une moins élevés dans le groupe céramique (p = 0,03). La
libération excessive de particules métalliques à par- nature de l'alliage (p = 0,004) et une moindre rigidité
tir des cônes étaient : une tête de grand diamètre en flexion (p = 0,02) étaient des facteurs prédictifs
(36 mm), un col et un cône de petits diamètres, d'usure de contact et de corrosion dans le groupe
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d'importantes variations d'impaction par des inci- céramique, pas dans le groupe métal. Le mécanisme
sions réduites, et enfin des sollicitations mécaniques de la corrosion était le même dans les deux groupes.
importantes chez les sujets de poids excessif et/ou • Le même groupe [85] a montré que la perte de maté-
physiquement très actifs. riel au niveau de la jonction tête-cône était significati-
Dyrkaz et al. [80] ont confirmé ce rôle délétère d'une vement plus importante dans le groupe tête en CrCo
tête de plus grand diamètre : l'étude de 74 explants (0,1 mm3/an ; 0,0-0,4 mm3/an) que dans le groupe tête
de prothèses CrCo-PE (cône 12/14) a montré que les en céramique (0,0 mm3/an ; 0,0-8,8 mm3/an) et que la
altérations de la tête et du cône significativement plus plus grande partie de la perte de matériel provenait de
importantes avec des têtes de 36 mm que de 28 mm la tête en CrCo.
(p = 0,022), leur fréquence étant la même dans les • Dans l'étude de Tan et al. [86], 52 têtes en céra-
deux groupes. Elles dépendaient aussi des fabricants. mique explantées ont été comparées à des explants
Dans la revue systématique de Carli et al. [81], de têtes en CrCo ayant le même cône, le même dia-
24 articles représentant 776 cas de corrosion tête-col mètre, la même longueur de col et la même durée
ont été regroupés. L'association de têtes fémorales d'implantation. Huit têtes en Oxinium® ont également
110 D. Huten, H. COMMO , . GICQ L, F. BASS LO

été comparées à 8 têtes en CrCo appariées selon les • l'emboîtement de la céramique sur le cône est plus
mêmes critères. Les cônes des têtes en céramique pré- stable [87].
sentaient moins d'usure de contact et de corrosion que Au total :
les têtes en CrCo. Il n'y avait pas de différence entre • la jonction tête-cône libère des particules métal-
les têtes en CrCo et celles en Oxinium®. Le dessin du liques dont le volume augmente avec le temps ;
cône et la durée d'implantation avaient également une • de nombreux facteurs ont une influence sur l'impor-
influence sur l'importance de la tribocorrosion. tance de la tribocorrosion de cette jonction. Le rôle du
Les raisons de ce meilleur comportement des jonc- diamètre de la tête n'est pas parfaitement élucidé ;
tions têtes en céramique-cône métallique sont les • les têtes en céramique minimisent ce phénomène
suivantes : dont l'influence sur la survie des prothèses n'est pas
• seulement une des deux surfaces (le cône morse démontrée par les registres, même si des observations
métallique) est intéressée par le processus de dépassi- d'ALTR assez rares peuvent lui être attribuées avec
vation-repassivation [78] ; certitude.

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113

Pourquoi rester fidèle


à la céramique d'alumine ?
M. ZINGG, A. LÜBBEKE, R. NIZARD, D. HANNOUCHE

Introduction cellements précoces ; enfin, l'introduction en 1995


du thermopressage isostatique (hot isostatic pressing)
L'augmentation du nombre de prothèses de hanche dans le procédé de fabrication a conduit à l'obtention
implantées dans le monde tient aux progrès enregis- d'implants dits de 3e génération, caractérisés par une céra-
trés ces 20 dernières années dans le domaine techno- mique dense (3,98 g/cm3) composée de très petits grains
logique et dans la prise en charge péri-opératoire des repartis de façon homogène, et ayant des propriétés
patients. Une étude récente montre que c'est dans la mécaniques très supérieures [11, 12].
tranche d'âge des patients de moins de 50 ans qu'est
enregistrée la plus forte progression, reflétant bien la Qu'est-ce que la céramique
confiance croissante qu'ont les chirurgiens dans cette
intervention, et la demande accrue de patients jeunes, d'alumine de 3e génération
soucieux de continuer leur activité professionnelle ou et comment se différencie-t-elle
de reprendre une activité sportive interrompue [1]. de la matrice composite d'alumine
L'usure prématurée observée chez les patients de
moins de 50 ans avec le polyéthylène de haut poids (MCA) ?
moléculaire dans les séries historiques a conduit à Introduite en 1995, la céramique d'alumine de
explorer dès les années 1970 le couple de frottement 3e génération résulte d'une amélioration constante
alumine-alumine (Al-Al), dont le coefficient de fric- du procédé de fabrication. Elle est composée d'oxyde
tion est extrêmement faible in vitro (avec une usure d'alumine très pure (Al2O3), qui n'existe que sous
4000 fois inférieure au couple métal-polyéthylène), et une seule forme cristallographique, ce qui la rend émi-
dont les particules d'usure sont bien tolérées in vivo nemment stable quelles que soient les conditions de
[2]. Les premières implantations de prothèses de température, de pression ou d'humidité. L'alumine est
hanche à couple de frottement Al-Al en Europe ont inerte sur le plan chimique, si bien qu'elle a une excel-
cependant été marquées par un taux de complications lente résistance à la corrosion, et elle présente une très
très élevé, en particulier de fractures d'implants, et de bonne biocompatibilité, avérée par une grande expé-
descellements aseptiques du composant cotyloïdien, rience clinique rapportée dans la littérature [13]. Les
qui était à l'époque en alumine massive cimentée ou implants en alumine utilisés en chirurgie orthopédique
impactée sans métalback [3–9]. À partir de 1974, les sont soumis à des normes de qualité dont les exigences
innovations incrémentales réalisées en France et en sont détaillées dans le tableau 13.1 (norme ISO/DIS
Allemagne ont permis d'améliorer de façon consi- 6474-1, revue en 2016). Ils sont obtenus par frittage.
dérable la qualité des matériaux utilisés, le dessin Ce procédé consiste à obtenir la solidification d'une
des prothèses, et surtout la fixation des implants en poudre par diffusion en phase solide en la chauffant
céramique (figure 13.1). L'adaptation de la techno- à une température inférieure à son point de fusion
logie du cône morse à la chirurgie orthopédique en (2050 °C). Dans le cas de l'alumine, le solide obtenu
1974 a ainsi permis de régler l'accrochage de la tête est monophasique et polycristallin (système cristallin
en céramique sur la pièce fémorale, alors qu'elle était hexagonal). Cette structure est stable dans les condi-
initialement collée ou vissée sur le cône [10] ; plus tions d'utilisation intracorporelle. Sa microstructure
tard, l'apparition de la modularité du cotyle, avec et donc ses propriétés mécaniques sont très fortement
emmanchement conique de l'insert en alumine dans influencées par les caractéristiques de la poudre utili-
un métalback a remplacé les implants massifs, trop sée, notamment par la pureté de l'alumine et la taille
rigides, sources de contraintes en cisaillement éle- de grain. Au fil du temps, et avec l'introduction du
vées à l'interface avec l'os, et responsables de des- thermopressage isostatique, l'augmentation de la

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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114 M. Zingg, A. Lübbeke, R. i d, . H nnouc e

teneur en alumine, l'augmentation de la densité et la


diminution de la taille des grains ont permis d'aboutir
à des implants plus résistants [14]. Les processus de
contrôle qualité des différents éléments ont également
joué un grand rôle dans l'amélioration des produits.
Les propriétés mécaniques de l'alumine de 3e géné-
ration dépassent aujourd'hui les propriétés requises
par les organismes de certification pour son homo-
logation. Ce matériau présente une remarquable
résistance en compression (environ 4500 MPa),
bien que sa résistance en flexion (environ 580 MPa)
soit plus faible. C'est cependant un matériau très
rigide, ayant un module d'élasticité élevé (400 GPa),
supérieur à celui de l'os cortical (300 GPa), et de
faibles capacités de déformation. L'alumine exhibe
un comportement fragile sur le plan mécanique, ce
qui constitue son principal point faible. La fragilité
caractérise un matériau pour lequel il existe une
faible différence entre la limite de déformation élas-
tique et la résistance au point de rupture. L'alumine
est en revanche parfaitement adaptée à une utilisa-
tion en friction en raison de son faible coefficient de
Figure 13.1. A, B. Prothèse à couple de frottement alumine- frottement [15].
alumine de 3e génération. À partir de 2003, dans le but d'augmenter la téna-
Les deux pièces cotyloïdienne et fémorale sont implantées sans cité des implants en alumine, sont apparues des
ciment ; la tête fémorale et l'insert cotyloïdien sont fixés aux
matrices composites d'alumine (MCA), implants
pièces métalliques par un cône morse.
composés à 81,6 % d'alumine, et contenant 17 %
d'oxyde de zirconium [16]. Un changement de struc-
ture, avec passage d'un système cristallin tétragonal
à un système monoclinique, intervient lorsqu'une
Tableau 13.1 fissure vient au contact d'un grain d'oxyde de zir-
Limites des propriétés des implants chirurgicaux à base conium. Ce phénomène s'accompagne d'une aug-
d'alumine de haute pureté mentation de densité locale et introduit des forces
Propriétés Norme ISO/DIS Alumine de compression à même de stopper la progression
6474-1 (2016) 3e génération de la fissure. La résistance en flexion s'en trouve
améliorée, ce qui réduit le risque de fracture et per-
Masse ≥ 3,94 kg/m3 × 103 3,98 kg/m3 × 103
met également une plus grande liberté de dessin des
volumique
implants. Le point faible de ce type de céramique
Teneur Al2O3 ≥ 99,7 % > 99,8 % vient du fait que le système cristallin tétragonal est

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instable aux conditions d'utilisation intracorpo-
Taille des ≤ 2,5 μm ± 25 % < 1,8 μm
relles, en particulier en surface. Lorsqu'un change-
grains
ment de phase y intervient, il s'accompagne d'une
Résistance ≥ 500 MPa 580 MPa augmentation de rugosité qui risque de faire varier
en flexion le coefficient de frottement de l'interface et de modi-
fier les paramètres d'usure du couple de frottement.
Module ≥ 380 GPa 407 GPa
de Young Il est possible de limiter ce phénomène par le biais
d'additifs (yttrium), sans toutefois le stopper com-
Dureté ≥ 18 GPa 20 GPa plètement. Les MCA présentent une ténacité envi-
Vickers (HV1) ron deux fois supérieure à la céramique d'alumine,
Ténacité (KIC) ≥ 2,5 MPa m1/2 3,2 MPa m1/2 mais leurs performances à long terme ne sont pas
encore connues.
Pourquoi rester fidèle à la céramique d'alumine ? 115

Quelles sont les propriétés Quels sont les résultats


tribologiques de l'alumine ? de la céramique d'alumine
La céramique d'alumine a été introduite en chirur- à très long terme ?
gie en raison de ses propriétés tribologiques excep- La céramique d'alumine est la seule céramique pour
tionnelles [17]. Son extrême dureté, sa mouillabilité laquelle on dispose d'études à très long terme à plus
(angle α = 44°) qui favorise la formation d'un film de 20 ans. Les publications portant sur le couple de
lubrifiant, sa surface très lisse lui confèrent un indice frottement céramique-céramique sont nombreuses,
de rugosité (Ra) très bas de 0,02 μm. Sa résistance mais doivent faire l'objet d'une lecture attentive pour
aux rayures est 30 fois supérieure à celle des alliages en interpréter les résultats avec prudence. Parmi ces
métalliques. L'usure du couple de frottement en alu- études, il faut distinguer les séries qui portent sur les
mine-alumine dépend non seulement de la qualité premières générations d'implants dont les résultats
du matériau, mais aussi du dessin des pièces, dont la sont généralement décevants et à valeur historique, et
sphéricité doit être la plus parfaite possible, de même celles qui portent sur les générations plus récentes, à
que la clearance entre les deux surfaces articulaires, la conception beaucoup plus aboutie et aux résultats
de façon à éviter les phénomènes d'usure anormale meilleurs. Ce sont ces dernières qui permettent d'esti-
constatés au début des années 1990 [6, 7, 9]. Dans les mer les résultats escomptés en recourant aujourd'hui à
conditions habituelles, l'usure rapportée du couple ce type d'implants.
alumine-alumine est extrêmement faible, estimée Les résultats de la littérature doivent donc être
à quelques microns sur des périodes de 15 ans, ce appréciés en tenant compte de la période d'implanta-
qui est 2000 fois inférieur à celle du couple métal- tion, qui influe naturellement sur la qualité de la céra-
polyéthylène et 100 fois inférieur au couple métal- mique, mais aussi du dessin de la prothèse, et du mode
métal. Les analyses réalisées sur explants de prothèses de fixation des pièces, en particulier sur le versant
en alumine montraient que la sphéricité, l'indice de cotyloïdien. Ainsi, les descellements aseptiques fré-
rugosité et l'importance de l'usure dépendaient prin- quemment constatés au cours des premières implan-
cipalement de la qualité du matériau et donc de la tations n'étaient pas dus à la production de particules,
taille des grains de céramique. mais au fait que les implants acétabulaires en céra-
Dans des situations anormales de fonctionnement, mique, cimentés ou non, étaient massifs. Dans le cas
une usure plus importante par excavation de grains où la cupule était non cimentée, les propriétés d'ostéo-
de céramique a pu être observée, se traduisant par intégration, reflet de l'inertie de l'alumine sur le plan
une usure en bandes sur les matériaux explantés biologique, était insuffisantes pour assurer une tenue
[18–21]. Ce type d'usure est constaté en cas de clea- à long terme. Dans le cas où la cupule était cimen-
rance élevée (> 50 μm), ou en cas de subluxation due tée, la différence de rigidité entre le ciment et la cupule
à un effet came par malposition des implants ; des conduisait à son descellement rapide par fracturation
usures massives ont également été rapportées, mais du ciment et phénomène de stress shielding [8]. L'échec
elles concernaient des alumines de première généra- du cotyle en alumine massive fut confirmé dans une
tion dont les propriétés physicochimiques n'étaient série de patients opérés par Pierre Boutin et suivis à
pas optimales. très long terme [25]. Elle portait sur 106 patients
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D'un point de vue biologique, la réaction observée (118 hanches), d'âge moyen 62,2 ans, opérés entre
dépend de la taille des particules libérées (5 à 90 nm 1978 et 1980. La cupule utilisée était en alumine mas-
en cas de dépolissage ; 0,05 à 3,2 mm en cas de déco- sive dans tous les cas. Les deux composants étaient
hésion de grain) [22]. Elle est principalement fibrocy- cimentés dans 85 cas, impactés dans 29 cas, la tige était
tique, avec peu de macrophages et l'absence de cellules cimentée et la cupule impactée dans 4 cas. À 20 ans de
géantes. Des études in vitro ont montré une sécrétion recul moyen, 45 patients (51 hanches) n'avaient pas été
de cytokines pro-inflammatoires par les macrophages, repris, 25 patients (25 hanches) avaient eu une reprise
mais en quantité inférieure comparativement aux par- d'au moins un composant, 27 patients étaient décédés,
ticules de polyéthylène [23, 24]. L'apoptose des macro- et 9 étaient perdus de vue. Les taux de survie à 20 ans
phages était plus précoce et plus importante qu'avec pour les cupules cimentées étaient de 61,2 % versus
des particules de polyéthylène de même taille, ce qui 85,6 % lorsque la cupule était impactée. Aucune usure
peut expliquer l'absence de réaction inflammatoire, et n'était cependant détectée sur les radiographies.
l'absence d'ostéolyse constatée autour des prothèses L'introduction, dans les années 1980, de cupules en
en alumine-alumine. métal avec insert en céramique tenu par cône morse a
116 M. Zingg, A. Lübbeke, R. i d, . H nnouc e

permis d'améliorer de façon très significative l'ancrage sant cotyloïdien, et 77 % sur le versant fémoral), le
de la pièce cotyloïdienne, qui représentait jusqu'alors taux de reprise était de 4 %. Les causes de reprise
le maillon faible des prothèses Al-Al. Dans une série étaient la luxation (1,2 %), le descellement aseptique
portant sur 62 patients âgés en moyenne de 46 ans, (0,6 %), une fracture d'implant dans 6 cas (0,5 %).
opérés entre 1990 et 1992, et ayant reçu une tige en Aucun patient n'avait d'ostéolyse au recul, et seuls
titane cimentée et une cupule en titane avec un insert 2 patients avaient été repris pour squeaking (0,1 %).
en alumine, le taux de survie à 10 ans était de 93,7 %, Dans l'édition 2016 du rapport du registre austra-
en prenant comme critère d'échec la reprise quelle que lien, une prothèse en céramique-céramique avait été
soit la cause [26]. Un liseré continu de moins de 1 mm utilisée dans 72 139 cas [30]. Les têtes en alumine de
était constaté dans un cas ; il n'y avait aucune mobili- 3e génération de 32 mm étaient associées à un risque
sation des pièces, ni d'ostéolyse. plus faible de reprise à 10 ans comparativement aux
La série récente la plus importante a été rapportée têtes de 28 mm et de 36 mm. Chez les patients âgés
par Kim et al. [27] dans une étude publiée en 2016. de moins de 55 ans, le risque cumulé de reprise des
Les auteurs se sont intéressés aux résultats cliniques prothèses en Al-Al était de 6,6 % à 15 ans versus
et radiologiques après prothèse totale de hanche 17,4 % avec les prothèses à couple de frottement
(PTH) non cimentée avec couple de frottement Al-Al métal-polyéthylène conventionnel (figure 13.2).
de 3e génération, à 19 ans de recul moyen. L'étude
portait sur un collectif de près de 900 patients
(1130 hanches) âgés de moins de 65 ans au moment
Le risque de fracture
de la chirurgie. Les résultats cliniques étaient excel- et de squeaking de la céramique
lents avec un score de WOMAC de 90 ± 9,9 (65–100) d'alumine de 3e génération sont-
à 20 ans. Aucun bris d'implant n'avait été observé et
seuls trois cas de révision ont été rapportés (0,3 %),
ils différents de ceux des MCA ?
en raison de luxations récidivantes. La survie des
implants, toutes causes de révisions confondues,
Risque de rupture
était donc de 99,7 % à 20 ans. Une évaluation par Le point faible avancé par les détracteurs des prothèses
tomodensitométrie lors du contrôle final objectivait en alumine employées aujourd'hui en chirurgie pro-
une bonne stabilité des implants et une absence d'os- thétique est leur fragilité, qui a été associée à un risque
téolyse tant sur le versant acétabulaire que fémoral. de fractures d'implants. Les conséquences d'un tel évé-
Ces bons résultats tendent à confirmer ceux rapportés nement lorsqu'il survient au niveau soit de la tête pro-
par Lee et al. [28] sur 100 PTH non cimentées, avec thétique, soit de l'insert acétabulaire sont certainement
un taux de survie de 96,9 % à 10 ans. Les données lourdes, car il est très difficile de retirer la totalité des
du registre danois à 9 ans sont équivalentes. Dans débris générés, ce qui peut occasionner par la suite des
la série de Varnum et al. [29] portant sur 1773 PTH phénomènes abrasifs par interposition de particules au
à couple de frottement céramique-céramique (dont niveau des nouvelles parties mobiles qui vont s'user
81 % étaient en alumine de 3e génération sur le ver- prématurément.

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Figure 13.2. A, B. Résultat au recul de 10 ans d'un patient sportif de haut niveau opéré à l'âge de 47 ans pour arthrose primitive.
PTH bilatérale en un temps.
Pourquoi rester fidèle à la céramique d'alumine ? 117

Les fractures d'implants en alumine se produisent doit être parfaite pour éviter tout « tilt » et un éventuel
le plus souvent par propagation lente de fissures sous pic de contrainte locale, et qui doit se faire après un
l'effet de contraintes sous-critiques appliquées à des nettoyage minutieux du cône morse pour éviter toute
zones de faiblesse du matériau où siègent des imper- interposition de matériel.
fections (fissures préexistantes, rayures ou pores) Les fractures d'implants étant déjà très rares avec
[31]. Dans ce cas de figure, le facteur d'intensité des la céramique d'alumine, il est permis de se poser la
contraintes (KI) est inférieur au facteur d'intensité de question des répercussions cliniques de l'introduction
contrainte critique (KIC). Un indice de masse corporel des MCA. On notera que la rareté des événements fait
élevé, des activités physiques à impact, la présence d'in- que l'étude des fractures d'implants est un sujet délicat
terpositions de tissus entre le cône morse et l'implant à évaluer en raison de la nécessité d'une grande taille
et l'impaction au marteau des implants sont autant de d'échantillon et/ou de la longue durée d'étude néces-
facteurs de risque avancés de fractures de la tête ou de saire pour arriver à des conclusions pertinentes. À ce
l'insert acétabulaire [13]. Toutefois, l'importance des stade, seules les données issues de registres de grandes
facteurs extrinsèques par rapport aux caractéristiques tailles sont contributives.
mécaniques du matériau est à relativiser tant ces der-
nières sont importantes. Les améliorations successives Squeaking
des procédés de production de la céramique d'alumine
ont permis de passer d'un taux de fracture de > 1 % Le squeaking est une complication apparue récem-
dans les années 1970 a environ 0,004 % pour les der- ment avec l'augmentation du nombre d'implantations
nières générations d'implants [32, 33]. Dans le but de prothèses à couple de frottement céramique-céra-
de diminuer encore ce risque, ont été développées des mique. Il s'agit d'un bruit strident, audible par l'en-
MCA, dont les tests en laboratoire démontrent qu'elles tourage, et rappelant le grincement d'une charnière
présentent une ténacité environ deux fois supérieure à de porte. Observé aussi avec les prothèses à couple de
la céramique d'alumine de 3e génération [31]. frottement métal-métal, il peut être particulièrement
Le travail le plus complet comparant le risque de frac- angoissant pour le patient, et parfois source de repli et
ture entre céramiques d'alumine et MCA a été publié d'isolement social. Son incidence varie considérable-
par Massin et al. en 2014 [33]. Ce travail se fonde sur ment dans la littérature, entre 1 et 20 % [37–39]. Les
les données fournies par un seul fabricant (CeramTec) causes exactes du squeaking demeurent incertaines.
ainsi que sur les rapports de fractures d'implants rap- L'origine est vraisemblablement multifactorielle, fai-
portés à l'Agence nationale de sécurité du médicament sant intervenir des facteurs liés au patient, des facteurs
et des produits de santé (ANSM). Selon le fabricant, le anatomiques et des facteurs techniques. Le squeaking
taux de fracture de la tête fémorale est environ 10 fois peut être reproduit expérimentalement. Récemment,
plus faible pour la MCA (0,002 %), comparativement l'accent a été mis sur les phénomènes de décoaptation
à la céramique d'alumine (0,021 %). Les chiffres four- et de microséparation survenant lors des mouvements
nis par l'ANSM font état d'une différence plus impor- d'amplitude extrême.
tante avec un taux de rupture de 0,18 % pour les têtes Bien qu'aucune étude n'ait comparé le risque de
fémorales en alumine et 0,0013 % pour les têtes fémo- squeaking en fonction de la céramique utilisée, son
rales en MCA. incidence semble plus importante depuis l'introduc-
Une telle différence n'a pas pu être constatée avec tion des MCA, avec des incidences parfois élevées de
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les inserts cotyloïdiens en alumine de 3e génération l'ordre de 6 à 31 % [40–42]. En comparaison, l'inci-


et ceux en MCA, dont les taux de rupture étaient dence du squeaking avec le couple Al-Al était de 2,6 %
respectivement, selon le fabricant, de 0,086 % et de dans une cohorte de patients opérés entre 2003 et
0,025 %. Des taux de ruptures très élevés de liners 2004, et suivis à 3 ans de recul au minimum [43].
en MCA, entre 1,1 % et 3,8 %, ont cependant été Quelle que soit la céramique utilisée, plusieurs hypo-
récemment rapportés par plusieurs auteurs dans la lit- thèses ont été avancées pour expliquer la survenue du
térature, justifiant une surveillance à plus long terme squeaking. Dans une étude portant sur 1486 prothèses
de l'incidence de rupture des inserts en MCA [34–36]. de hanche implantées entre 2003 et 2007, un squeaking
Il semble que les fractures d'inserts soient davantage était rapporté dans 6 % des cas, mais seuls 9 patients
liées à un problème technique qu'à un défaut du maté- avaient dû être réopérés [41]. Aucune association n'a
riel, comme cela avait d'ailleurs aussi été avancé avec pu être établie dans cette série entre le positionne-
les inserts en alumine de 3e génération. À ce titre, il ment de la cupule et le squeaking. Une étude récente
faut à nouveau insister sur l'importance du temps d'in- montrait en revanche un lien entre un défaut d'anté-
sertion du composant en céramique, dont l'orientation version de la cupule implantée par voie postérieure et
118 M. Zingg, A. Lübbeke, R. i d, . H nnouc e

la survenue du squeaking. Les surfaces frottantes de délamination et augmente le risque de squeaking


étaient en MCA, l'incidence du bruit était de 14,7 %, dans certaines séries [50].
celle du squeaking de 7 %, significativement inférieure Dans une série de 208 prothèses de hanche à couple
en cas d'utilisation d'un système de navigation qui de frottement en MCA, l'incidence du bruit avec des
réduisait la survenue de bruit d'un facteur 2,7 par un têtes fémorales de 32 à 48 mm de diamètre était de
meilleur positionnement des pièces prothétiques [44]. 31 %, dont 66 % étaient des grincements [40]. La sur-
À l'inverse, une étude scannographique tridimension- venue d'un bruit était significativement plus fréquente
nelle montrait que le squeaking serait plus fréquent en en cas de mobilité excessive, de laxité ligamentaire, et
cas d'antéversion combinée excessive de 75° [45]. Pour de petit diamètre de tête fémorale. Plus récemment,
Sexton [46], le risque de squeaking était majoré en cas Tai et al. [51] ont observé 7,3 % de squeaking dans
d'offset accru, et de latéralisation de la tête fémorale, une série de 206 prothèses de hanche à couple de
et son incidence était plus élevée chez les patients de frottement en MCA avec un diamètre de tête de 32 à
moins de 65 ans. 48 mm. Aucun lien n'était observé entre le diamètre de
Dans une autre étude, Restrepo et al. [47] consta- tête et la survenue du squeaking.
taient un taux de squeaking plus élevé avec l'usage Au total, compte tenu de la fiabilité des têtes en céra-
de certaines tiges fémorales en alliage de titane- mique de 32 et 36 mm, du faible risque de luxation
molybdène-zircone-acier comparativement à des tiges avec ces diamètres, du recul aujourd'hui disponible
en titane-aluminium-vanadium, relevant ainsi le pos- pour ces diamètres, nous recommandons de ne pas
sible rôle de la composition et du dessin des implants dépasser 36 mm tant que les études à plus long terme
fémoraux qui feraient office de caisse de résonance. avec les plus gros diamètres n'auront pas apporté la
L'amplification du bruit par la cupule métallique est preuve de leur bénéfice et de leur innocuité.
aussi possible selon Walter et al. [48], notamment
lorsque l'insert en céramique se décoapte du métal- Conclusion
back dans certaines positions. Un effet came entre le
col fémoral et le rebord cotyloïdien accentuerait le La faiblesse des prothèses de type Charnley résidait
risque de microséparation, d'usures en bandes pou- dans le couple de frottement métal-polyéthylène, sujet
vant atteindre 4 mm et le détachement de grains en à l'usure et à la production de débris, source d'ostéo-
céramique. Pour Taylor et al. [49], le squeaking serait lyse et finalement de descellement. Pour remédier à ce
dû à un phénomène combiné de défaut de lubrifica- problème clairement identifié, le couple de frottement
tion, et de surcontrainte localisée à la périphérie des Al-Al a été introduit en raison de ses bonnes proprié-
implants, source d'usure en bandes plus importante tés tribologiques. Il se trouve que cette introduction
lors de phénomènes de subluxation. Cette hypothèse a a été accompagnée d'un ensemble de complications
été confirmée sur bancs d'essai lorsque le film de lubri- inconnues et initialement insoupçonnées jusque-là :
fication était rompu. fractures d'implants, problèmes de fixation de la tête
prothétique sur la tige fémorale et descellement asep-
tique de l'implant acétabulaire. Ce n'est qu'une fois ces
Peut-on augmenter le diamètre problèmes techniques résolus, à la fin des années 1980,
des têtes en céramique d'alumine c'est-à-dire près de 20 ans plus tard, que les PTH avec
au-delà de 36 mm ? couple de frottement Al-Al sont parvenues à surpas-

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ser la survie des implants conventionnels, notamment
La tentation existe d'augmenter le diamètre des têtes chez les patients de moins de 50 ans. C'est sur la base
fémorales en céramique, comme cela avait été proposé des implants posés à partir de ce moment que l'on peut
pour les têtes en métal pour augmenter les amplitudes aujourd'hui avancer que le couple de frottement Al-Al
articulaires, améliorer la proprioception articulaire, et est associé à une diminution du risque d'ostéolyse, et
réduire le risque de luxation. L'augmentation du dia- présente d'excellentes performances chez le sujet jeune.
mètre de tête impose cependant de réduire l'épaisseur Cet exemple illustre le fait qu'avant qu'une nou-
de l'insert en céramique, qui ne peut être inférieure velle technologie soit bien maîtrisée, il faut néces-
à 3,5 mm pour les inserts en MCA selon les fabri- sairement passer par une phase de tâtonnements au
cants, et à 6 mm pour les implants conventionnels. cours de laquelle des effets inattendus tant en termes
L'augmentation du diamètre de tête en céramique pose de bénéfices que de complications peuvent apparaître.
potentiellement plusieurs problèmes : elle réduit le film L'utilisation du couple de frottement Al-Al a été intro-
de lubrification, augmente le coefficient de friction, duite il y a près de quatre décennies. C'est maintenant
augmente les sur-contraintes périphériques, les risques une technologie mature dont les résultats sur le long
Pourquoi rester fidèle à la céramique d'alumine ? 119

terme sont très convaincants, tant au niveau des résul- ment les MCA, démontrent des résultats similaires
tats cliniques que de la survie et du risque de survenue voire supérieurs à la céramique d'Al. Néanmoins, cela
de complications (y compris du risque de fracture). Il reste à démontrer et, compte tenu des performances de
n'est pas exclu que les nouvelles céramiques, et notam- la céramique d'Al, cette tâche s'annonce ardue.

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121

La céramique d'alumine composite


ZTA en chirurgie orthopédique –
BIOLOX® delta
B. MASSON, M. KUNTZ

Introduction (AOANJRR ou Australian Orthopaedic Association


National Joint Replacement Registry) et italien des
Depuis plus de 40 ans, la céramique d'alumine est implants prothétiques orthopédiques (RIPO ou
utilisée en chirurgie orthopédique [1]. On compte Registro dell'implantologia protesica ortopedica),
aujourd'hui 5,6 millions de têtes fémorales et d'inserts les couples de frottement en céramique composite à
en alumine implantés à travers le monde [2]. Les deux matrice d'alumine ont démontré leur efficacité. Grâce
dernières décennies ont vu une progression constante à une ténacité et une résistance à la rupture élevée,
de l'emploi des composants en céramique en Europe, les risques de complications liées au matériau ont été
aux États-Unis et en Asie. considérablement réduits en comparaison aux céra-
La céramique d'alumine est un biomatériau qui a été miques conventionnelles.
choisi pour son excellente biocompatibilité et sa stabilité
dans le milieu vivant. Les premières applications étaient Composition du BIOLOX® delta
fondées sur l'alumine pure que la technologie a sans cesse
améliorée afin d'accroître sa fiabilité et ses performances. La céramique composite à matrice d'alumine connue
Aujourd'hui, quel que soit leur âge, les patients sous le nom commercial de BIOLOX® delta constitue
ayant bénéficié d'une arthroplastie de hanche sont de le dernier développement des céramiques techniques.
plus en plus actifs et aspirent à une meilleure qualité Celles-ci sont qualifiées de « céramique de quatrième
de vie après leur intervention chirurgicale. Depuis génération » par CeramTec. BIOLOX® delta est une
plus de 10 ans, les céramistes concentrent leurs efforts alumine renforcée à l'oxyde de zirconium (ZTA). Il
sur le développement de céramiques composites afin s'agit d'un composite à base de céramique d'alumine ;
de répondre aux exigences des patients et des chirur- 80 % du volume est constitué de grains d'alumine de
giens. L'objectif est d'obtenir un matériau présentant grande pureté très similaire au matériau en alumine
un comportement mécanique adapté au design des de la génération précédente BIOLOX® forte. Comme
nouveaux dispositifs toujours plus complexes, ainsi pour tous les matériaux composites, les propriétés
qu'une excellente biocompatibilité et une résistance à physiques fondamentales comme la dureté, le module
l'usure supérieure à celle de l'alumine pure. d'élasticité, la conductivité thermique, etc. sont princi-
Le premier matériau composite alumine-zircone à palement déterminées par la phase dominante.
usage clinique fut l'alumine renforcée à l'oxyde de zir- L'idée principale dans le développement de ce com-
conium (zirconia toughened alumina [ZTA]), connue posite en céramique était de tirer parti des avantages
sous le nom commercial de BIOLOX® delta (CeramTec du BIOLOX® forte avec ses millions de composants
GmbH, Plochingen, Allemagne) [3]. Aujourd'hui, cette implantés tout en augmentant la ténacité et la résis-
céramique cumule 14 ans de recul clinique dans le tance à la rupture. Ces propriétés ont été considérable-
domaine des prothèses de hanche. Elle est plus récem- ment améliorées en utilisant différents mécanismes de
ment utilisée pour les prothèses de genou [4]. Le déve- renforcement (figure 14.1).
loppement d'autres dispositifs médicaux en céramique Deux composants entrent en jeu dans les méca-
composite alumine-zircone progresse également. nismes de renforcement du BIOLOX® delta :
Entre 2003 et 2017, plus de 5,1 millions de têtes • les particules d'oxyde de zirconium en phase tétra-
fémorales et 1,9 million d'inserts en céramique com- gonale qui représentent 17 % du volume de la matrice.
posite BIOLOX® delta ont été implantés avec succès. La taille moyenne du grain de zircone est de 0,3 μm
Selon les registres de prothèses de hanche australien environ ;

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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122 B. Masson, M. Kuntz

Matrice d’alumine

Oxyde de zirconium

Plaquettes

Figure 14.1. Microstructure du BIOLOX® delta.


(Source : CeramTec.)

• les cristaux de strontium hexa-aluminate sous forme phase tétragonale en phase monoclinique. L'expansion
de plaquettes de 3 μm de longueur maximale qui repré- du volume associée au passage en phase monoclinique
sentent environ 3 % du volume de la matrice. engendre la formation de contraintes en compression
D'autres éléments ont été inclus dans le matériau, en qui bloquent la propagation de la fissure de manière
particulier de l'yttrium dissous dans l'oxyde de zircone très efficace.
afin de le stabiliser en phase tétragonale. Ce matériau Ce mécanisme de renforcement est parfaitement activé
contient également de l'oxyde de chrome, élément dans un périmètre de quelques micromètres. La perfor-
connu pour sa dissolubilité complète dans la matrice mance macroscopique du matériau dépend de l'activa-
d'alumine. On retrouve une composition similaire dans tion immédiate des mécanismes de renforcement dès
le rubis. En effet, cette pierre précieuse présente une l'amorcement des fissures. Il convient de rappeler que la
structure cristalline similaire à l'alumine simple avec distance moyenne entre les particules de renforcement en
la présence de chrome qui lui confère sa couleur. Le zircone est d'environ 0,3 μm et donc similaire à la taille
seul effet du chrome dans le BIOLOX® delta est de lui du grain de zircone. Le renforcement est donc activé
donner la couleur rose caractéristique. immédiatement lors de l'amorcement d'une microfissure.
Les éléments de renforcement et en particulier l'oxyde La capacité de renforcement des particules de zir-
de zirconium améliorent sensiblement la ténacité ainsi cone est la conséquence de la transformation de phase,
que la résistance à la fracture du matériau [5, 6]. La ici de la phase tétragonale à la phase monoclinique. La
ténacité (KIC) mesure la capacité du matériau de résister transformation de phase est accompagnée d'une trans-
à la propagation des fissures. La résistance mécanique formation de volume d'environ 4 % de la particule de
(σc) est définie comme la contrainte maximale au sein zircone, c'est-à-dire d'une expansion linéaire de 1,3 %.
de la structure qui provoque la rupture du composant. La transformation de phase provoquée par contrainte
Lorsque la ténacité de la céramique augmente, la résis- est un principe connu des sciences des matériaux.
tance mécanique est directement améliorée. Ce principe Il faut souligner que cette capacité de transforma-
de base est à l'origine du développement du BIOLOX® tion de phase est un prérequis pour que la zircone soit
delta. La microstructure est conçue de telle sorte que la bénéfique dans le matériau. Le composite est étudié

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résistance à la propagation des fissures soit maximale. pour que la transformation de phase ne se produise
Il est toutefois important de noter que, même si la capa- que lorsqu'elle est nécessaire, dans le cas précis où
cité de résistance à la propagation de fissure est direc- des microfissures apparaissent. La source principale
tement liée au concept du matériau, la résistance à la de stabilité de la phase tétragonale des particules de
fracture dépend également de sa qualité de fabrication. zircone dans la céramique composite est liée à l'inté-
L'intérêt de la résistance aux fissures, obtenue en gration de ces particules dans la matrice d'alumine très
incorporant de l'oxyde de zircone dans la matrice rigide. En revanche, la stabilité de la zircone pure ne
d'alumine, est bien connu dans le domaine des céra- dépend que de la stabilisation chimique (c'est-à-dire en
miques technique, comme montré dans la figure 14.2. rajoutant de l'yttrium). Cette différence majeure per-
La figure 14.2 représente de façon schématique la met de faire la distinction entre le matériau composite
microstructure du BIOLOX® delta. En cas de surcharge BIOLOX® delta et la zircone pure. La stabilisation des
importante du matériau, des fissures peuvent s'amor- particules d'oxyde de zircone dans le BIOLOX® delta
cer et se propager dans la matrice. Le contraintes méca- est optimisée afin de présenter une résistance méca-
niques créées à proximité de la fissure provoquent la nique maximale sans compromettre la stabilité et par
transformation des particules d'oxyde de zircone de la conséquent les résultats cliniques à long terme.
La céramique d'alumine composite en chirurgie orthopédique – BI L X® delta 123

Figure 14.2. Mécanisme de résistance à la propagation de fissures du BIOLOX® delta.


En gris : grains d'alumine. En jaune : grains de zircone en phase tétragonale. En rouge : grains de zircone en phase monoclinique.
(Source : CeramTec.)

Les propriétés du BIOLOX® delta


Les propriétés du matériau sont déterminées selon la
norme ISO 6474-2 applicable pour les céramiques
composites alumine-zircone. Par rapport aux céra-
miques d'alumine pure, ces composites présentent une
ténacité et une résistance mécanique considérablement
améliorées. On constate que la limite de résistance Figure 14.3. Schéma du test de flexion à 4 points et du test
requise par la norme ISO 6474-2 (1000 MPa) est d'éclatement.
dépassée de plus de 40 % par le BIOLOX® delta. (Source : CeramTec.)
La performance d'un système est multifactorielle et
dépend des propriétés intrinsèques du matériau, de sa
conception, de la qualité de fabrication, des contraintes des années. Les céramiques, comme les autres maté-
appliquées, de l'environnement spécifique ainsi que de riaux, peuvent se dégrader sous certaines conditions :
la qualité de l'assemblage des composants. L'analyse • fatigue : résistance à long terme aux charges statiques
du concept, la modélisation, les simulations et l'ana- et cycliques ;
lyse de risque ainsi que d'autres outils sont nécessaires • vieillissement : résistance hydrothermale et autres
pour évaluer ces corrélations complexes. Afin d'élimi- attaques chimiques ;
ner toute influence des éléments de conception, la plu- • usure : durabilité dans des conditions abrasives.
part des tests sur les matériaux sont effectués à partir En raison de leur excellente stabilité chimique et
de barres de flexion à 4 points. structurelle, les céramiques offrent naturellement un
La figure 14.3 montre la configuration du test stan- avantage majeur par rapport à d'autres matériaux
dard de flexion à 4 points, comme recommandé par tels que les métaux et les polymères. En effet, les céra-
la norme ISO 6474-2 ainsi que le test de fracture miques sont constituées de liaisons chimiques pleine-
ISO 7206. Le test de flexion démontre la résistance ment saturées, évitant par conséquent les interactions
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intrinsèque du matériau, tandis que le test d'éclate- chimiques avec l'environnement telles que la corrosion.
ment est conçu pour simuler la charge in vivo des têtes
fémorales en céramique et dépendra de la résistance Vieillissement hydrothermal
du matériau, de la conception de la tête ainsi que du
cône utilisé. La transformation de phase de la zircone se produit
Le tableau 14.1 compare les résistances en flexion et volontairement et uniquement en cas de contraintes
les charges d'éclatement des différentes têtes fémorales mécaniques importantes. C'est un prérequis pour obte-
fabriquées en BIOLOX® forte et en BIOLOX® delta. nir une ténacité et une résistance à la rupture élevée
du matériau. La présence d'eau et de températures
Stabilité à long terme élevées peut initier une lente transformation de phase
de la zircone en surface du composant. Ce phénomène
Tout matériau se dégrade après de nombreuses années appelé « vieillissement hydrothermal » n'est pas sou-
sous charge dans un milieu agressif. Créer un matériau haitable car il peut engendrer une détérioration de la
qui conserve une stabilité à long terme dans les condi- céramique. Le vieillissement hydrothermal dépend for-
tions les plus défavorables représente un réel défi depuis tement de la composition du matériau. En 2001 et en
124 B. Masson, M. Kuntz

Tableau 14.1
Comparaison des résistances* en flexion et des tests d'éclatement de têtes fémorales en céramique Biolox® forte et Biolox®
delta
Paramètre Test/concept Unité Biolox® forte Biolox® delta Ratio Delta/forte
Résistance en flexion Barre de flexion MPa 620 1370 2,2

Résistance à la fracture 28 mm 12/14 L kN 54 85 1,6

Résistance à la fracture 36 mm 12/14 M kN 110 131 1,2


* En raison de la collecte des données statistiques, la résistance dépend en partie de la taille de l'échantillon et de la répartition des
contraintes. Les effets de tailles peuvent être équilibrés mathématiquement. Afin d'obtenir des résultats qui puissent être directement
comparés, la configuration standard du test de flexion est préconisée.
(Source : CeramTec.)

2002, certains lots du matériau 100 % zircone Prozyr® 600 MPa), aucune défaillance prématurée n'a été
de la société Desmarquest ont montré des défaillances observée. Rappelons que ce niveau de stress est 4 fois
sévères in vivo suite à un taux de transformation supérieur au niveau de charge le plus élevé dans des
de phase conséquent. Il est important de souligner que conditions extrêmes in vivo. On peut donc conclure
de telles incidences ne sont pas possibles avec le com- que la fiabilité du BIOLOX® delta excède de loin les
posite BIOLOX® delta car le contenu en zircone ne exigences des composants chirurgicaux fiables.
dépasse pas 17 % du volume (en dessous du seuil théo- Le tableau 14.2 montre les résultats de l'analyse post-
rique de percolation). En d'autres termes, une fois ini- test comprenant la résistance mécanique résiduelle et
tiée, la transformation de la phase tétragonale en phase le taux de phase monoclinique. Conformément aux
monoclinique des grains de zircone ne pourra pas se attentes, nous observons une dispersion marginale
propager de grain en grain dans la matrice, comme cela naturelle de la résistance mécanique résiduelle. Une
s'est produit pour la zircone de la société Desmarquest. analyse statistique à l'aide du t-test de Student n'a
Il est important d'étudier si la transformation de également révélé aucune déviation significative dans
phase engendre une détérioration ou une baisse de les résultats sur la résistance.
résistance du matériau. À cet effet, des tests ont été La norme ISO 6474-2, applicable au BIOLOX®
élaborés afin de combiner une accélération du vieil- delta, exige un test qui simule un vieillissement hydro-
lissement et une charge mécanique à de très fortes thermal équivalent à 40 ans dans l'organisme humain.
contraintes. Les échantillons ont été préparés selon la Ces tests sont réalisés dans une atmosphère de vapeur
configuration de la flexion à 4 points comme précisé d'eau à 134 °C pendant une durée de 10 heures. Il
en figure 14.3. Ces barres de flexion ont été exposées exige que toutes les propriétés (résistance, dureté et
à une accélération du vieillissement et ensuite à des qualité de surface) soient, après le traitement, toujours
cycles de charge/décharge à fortes contraintes. Après équivalentes à la qualification initiale.
le vieillissement et les cycles de charge, la résistance
résiduelle a été déterminée. Comportement face à l'usure
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Deux niveaux de contraintes, 300 MPa et 600 MPa,
ont été sélectionnés pour les tests de charge cycliques. Dans des conditions habituelles d'usure (simulateur de
La contrainte la plus faible a été exercée sur 20 millions hanche standard ISO 14242), l'usure d'un couple de
de cycles et la contrainte la plus élevée sur 5 millions de frottement BIOLOX® delta est très similaire à la per-
cycles. Tous ces tests ont été effectués dans la solution formance de l'alumine pure BIOLOX® forte qui a fait
de Ringer. Le processus de vieillissement a été simulé par ses preuves cliniquement. La différence de dureté entre
5 heures et 100 heures de traitement dans des conditions ces matériaux ne compromet pas les performances
standard d'autoclave (134 °C, vapeur d'eau à 2 bars de tribologiques en condition standard. Cependant, un
pression). Il convient de rappeler que la durée de vieillis- avantage significatif du BIOLOX® delta est repéré lors
sement a été beaucoup plus longue que celle requise par d'une simulation en conditions extrêmes, comme mon-
les normes. À chaque étape du test (à réception, après tré en figure 14.4. Ce simulateur crée, à chaque cycle
vieillissement et cycles) le contenu de la phase mono de charge, une microséparation entre la tête et l'insert
clinique était mesuré par diffraction aux rayons X. en céramique entraînant d'importantes contraintes
Même dans les conditions les plus sévères (c'est- localisées, situées au point de contact lors de la remise
à-dire 100 heures d'autoclave, cycles de charge de en place de la tête dans l'insert. Cette configuration
La céramique d'alumine composite en chirurgie orthopédique – BI L X® delta 125

Tableau 14.2
Résistance mécanique résiduelle et taux de phase monoclinique après divers traitements
Durée Aucune charge 300 MPa 20*106 600 MPa
d'autoclave Cycle Cycles 5*106
Cycles
0h Résistance (Mpa) 1346 1433 1284
Contenu phase monoclinique [%] 18 33 43

5h Résistance [Mpa) 1332 1248 1361


Contenu phase monoclinique [%] 22 35 42

100 h Résistance (Mpa) 1234 1308 1300


Contenu phase monoclinique [%] 30 33 47
* La phase monoclinique est donnée en pourcentage selon le volume total du matériau.
(Source : CeramTec.)

zone de la surface usée. Dans la zone de stripe wear, un taux


de contraintes
localisées
plus élevé de phase monoclinique était mesuré. Cela
indique que la transformation de phase entraînant le
renforcement a bien eu lieu.
De nombreuses publications confirment aujourd'hui
ce mécanisme. L'Implant Research Center de l'Uni-
versité de Drexel [8] a mené une étude portant sur
15 explants BIOLOX® delta dont la durée d'implanta-
Figure 14.4. Résultats de l'usure du BIOLOX® delta et du tion moyenne est de 1,1 année (de 0,04 à 3,5 ans). La
BIOLOX® forte en simulateur de hanche avec microséparation. rugosité ainsi que le taux de phase monoclinique ont
(Source : CeramTec.) été mesurés. L'auteur décrit une augmentation typique
du taux de phase monoclinique au niveau de la zone
expérimentale simule les phénomènes de décoaptation d'usure sans augmentation de la rugosité. La rugosité
qui peuvent apparaître après une prothèse totale de moyenne rapportée est de l'ordre de 3 nm. Elpers et al.
hanche. L'examen d'explants a permis de conclure [9] ont également analysé la transformation de phase
que, dans certains cas, une zone d'usure intense loca- de 27 explants BIOLOX® delta grâce à la technique
lisée en forme de bandes apparaît à la surface de la de spectrométrie Raman. Les auteurs ont décrit une
tête en céramique d'alumine. Ce phénomène est connu augmentation de la transformation de phase de la zir-
sous le nom de stripe wear. cone en fonction de la durée d'implantation, de 24,3
Dans des conditions extrêmes de simulation (zone de à 27,5 mois dans cette étude. Aucune relation entre le
contraintes localisées), après 5 millions de cycles avec taux de transformation de phase et la rugosité n'a pu
microséparation, on observe que le volume d'usure être démontrée.
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du BIOLOX® delta est 10 fois inférieur à celui du Il est important de noter que, dans le cas de la céra-
BIOLOX® forte [7]. mique BIOLOX® delta, l'impact de la transforma-
La céramique BIOLOX® delta offre une excellente tion de phase reste minimal car cette transformation
tolérance face au stripe wear. L'analyse montre que, ne s'applique que sur les 17 % d'oxyde de zircone
dans la zone de stripe wear, le taux de phase monocli- du matériau. L'alumine, qui compose la majorité de
nique est fortement accru. Cela indique que le méca- la céramique composite (82 %) a montré sa stabilité
nisme de renforcement est activé à ce niveau et confère in vivo depuis plusieurs décennies.
l'excellente résistance du BIOLOX® delta face à cette En résumé, l'analyse d'explants BIOLOX® delta a
usure en bande. Initialement, il était présumé que ces permis de démontrer la présence de transformation de
conditions de test, avec une zone de contrainte très phase sans aucune influence sur la rugosité. Comme
localisée, pourraient provoquer la détérioration de la expliqué au début de ce chapitre, l'augmentation du
surface. En fait, la ténacité de la surface est augmen- taux de phase monoclinique indique bien que la trans-
tée par la transformation de phase, ce qui empêche la formation de phase joue comme prévu son rôle dans le
détérioration, même dans des conditions extrêmes. mécanisme de renforcement du matériau sans que les
Cette hypothèse était soutenue par l'analyse Raman résultats cliniques n'en soient affectés.
126 B. Masson, M. Kuntz

Résultats cliniques Fixation conique


« Fretting corrosion » La qualité de la fixation conique entre la tige et/ou la
cupule et le composant en céramique est un facteur clé
Une des préoccupations actuelles concerne l'hypothèse pour la fiabilité de la céramique [12].
que les connexions modulaires coniques pourraient Les trois étapes suivantes sont essentielles1.
contribuer au relargage d'ions ou de débris métal- 1. Utiliser uniquement des composants en céramique
liques dans les prothèses totales de hanche (PTH). compatibles, validés par le fabricant de prothèses et
Cette inquiétude est en grande partie associée à un selon les instructions d'usage. Il est important de noter
accroissement de l'utilisation de grandes têtes en métal que le terme « 12/14 » habituellement utilisé ne décrit
dans les PTH. pas la géométrie du cône. Cela ne renvoie qu'au dia-
De récentes publications ont analysé ces phéno- mètre du cône en deux points spécifiques et ne décrit
mènes de « fretting corrosion » à partir d'explants, en aucunement d'autres caractéristiques critiques telles
comparant la corrosion du cône de la tige fémorale que l'angle, les tolérances, la rugosité, la longueur, etc.
selon que le cône de la tige fémorale est au contact Cette remarque s'applique également à tout autre type
de face d'une tête en métal ou en céramique. Cross de cônes, comme 8/10, 9/11, etc.
et al. [10] ont étudié 52 explants d'un même modèle 2. Placer la tête fémorale dans le sens axial du cône
avec quatre couples de frottement différents (Me-Pe, mâle avec un léger mouvement de rotation sur le cône
Ce-Pe, Me-Me et Ce-Ce) et ont montré que les couples propre et sec. Les surfaces en contact doivent être net-
avec tête en céramique présentent une altération du toyées et rester propres de tous débris le temps de mettre
cône significativement inférieure car ces têtes sont plus en place les composants du couple de frottement. Un
résistantes à la corrosion que les têtes en métal. Kurtz quelconque dommage du cône mâle ou une contami-
et al. [11] ont comparé un groupe assorti de 50 têtes nation des surfaces de contact avec un corps étranger
en céramique avec 50 têtes en métal (sauf Me-Me) et (tissu, ciment, os, sang, etc.) aura une incidence sur les
ont également constaté que le niveau d'oxydation du transferts de contraintes sur la tête fémorale en céra-
cône de la tige fémorale était inférieur avec les combi- mique et aura un impact négatif sur la résistance à la
naisons avec tête en céramique. fracture de la tête fémorale (figure 14.5).
Il est aussi décrit que la perte de matériau au niveau
du cône femelle en métal est plus élevée que celle du
cône mâle et est principalement faite de CoCr. La céra-
mique atténue le phénomène de « fretting corrosion » 1.
Ces informations ne remplacent pas les instructions opéra-
en diminuant la perte de matériau sur le cône mâle toires. L'information dispensée dans les instructions opératoires
quel que soit le matériau de la tige. est contractuelle et doit toujours être respectée.

Propre/sec

Os/Ciment © 2017, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés


Eau

Serum bovin

Débris d’os bovin

Graisse de porc

Rayure

0 % 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 % 90 % 100 %

Résistance à l’eclatement

Figure 14.5. Contamination du cône mâle et diminution de la résistance à la fracture (en %) de la tête en céramique BIOLOX® delta.
(Source : CeramTec.)
La céramique d'alumine composite en chirurgie orthopédique – BI L X® delta 127

3. Appliquer un coup de marteau modéré sur l'impac- prédisposant une PTH au squeaking : des contraintes
teur dans le sens axial du cône mâle afin que la tête mécaniques élevées au sein de l'articulation, la pré-
fémorale soit bien fixée. Cela réduira tout micromou- sence d'edge loading ou un conflit prothétique.
vement entre les deux composants et une éventuelle
corrosion sur la tige ainsi que le relargage de parti-
cules de métal et d'ions métalliques. Les inserts en aux de fracture
céramique requièrent également une manipulation C'est grâce à ses propriétés mécaniques améliorées que
minutieuse lors du positionnement et de l'impaction. la céramique BIOLOX® delta a permis de réduire les
risques de complication comparativement à la céra-
mique d'alumine. Selon le fabricant, le taux de fracture
Bruits articulaires des têtes fémorales a baissé de manière significative
avec l'utilisation de la céramique BIOLOX® delta.
Les PTH peuvent parfois générer du bruit. Ce phéno- Lee et Kim ont déterminé les taux de fractures des
mène est plus fréquent avec les couples de frottement têtes fémorales en alumine (BIOLOX® forte) et céra-
dur-dur, parmi lesquels on retrouve les couples métal- mique composite (BIOLOX® delta) à l'aide des banques
métal et céramique-céramique. Ces bruits provenant de données CeramTec. Entre janvier 2000 et mars
des arthroplasties totales de hanche sont généralement 2013, plus de 3,2 millions de têtes BIOLOX® forte et
considérés comme bénins ; cependant, on dénombre 2,78 millions de têtes BIOLOX® delta ont été vendues
quelques cas de bruits problématiques [13]. et implantées. Pendant cette période, ils ont relevé un
Différent types de bruits ont été rapportés dans taux de fracture de 0,02 % pour le BIOLOX® forte
la littérature et ont été qualifiés de claquement, cra- et seulement 0,001 % pour la dernière génération de
quement, broiement ou grincement, etc. Cela peut céramique BIOLOX® delta.
indiquer, par exemple, une erreur d'appariement, la Une publication récente [14] a analysé le taux de
présence d'un troisième corps au sein du couple de fracture de la céramique en comparant les données du
frottement, une fracture du couple de frottement ou fabricant (CeramTec GmbH, Plochingen, Allemagne ;
une mise en charge du rebord de l'insert par la tête tableau 14.3) avec les dossiers de matériovigilance
fémorale lors de phénomène de subluxation (edge des dispositifs médicaux déposés par les chirurgiens à
loading). l'Agence nationale de sécurité du médicament et des
Le squeaking a été décrit comme un son audible produits de santé (ANSM).
spécifique de très haute fréquence. Il semble être pro- Selon l'ANSM, on compte 428 rapports de fractures
voqué par la combinaison à la fois d'une source de de tête en céramique d'alumine de troisième généra-
vibration et d'une réponse dynamique. La rupture du tion depuis 2001, et seulement 3 depuis 2008 avec la
film lubrifiant causée par les différents facteurs évo-
qués précédemment va augmenter le coefficient de
Tableau 14.3
friction à l'interface et créer un phénomène vibratoire. Taux de fracture des têtes et inserts en céramique
La fréquence de résonance des composants en céra- composite selon le fabricant de céramique et l'ANSM
mique est inaudible car inférieure au seuil d'audition.
Intervient alors la réponse dynamique de l'ensemble de Biolox® delta Biolox® delta
Têtes en Inserts en
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la prothèse qui amplifie la vibration et la rend audible


céramique céramique
car les fréquences de résonance des composants en
composite composite
métal de la prothèse de hanche sont, eux, perceptibles
par l'oreille humaine. Banque 0,001 % sur 0,021 % sur
Le phénomène de squeaking des couples de frotte- de données 4 080 000 têtes 1 650 000 inserts
ment dur-dur est multifactoriel et requiert une combi- Fabricant
naison de nombreux critères dont le patient, l'implant 5 730 000
et la chirurgie. Le squeaking est associé à des patients composants
plutôt jeunes, grands, en surpoids et actifs ainsi qu'à Massin et al. 0,001 % sur 0,025 % sur
certains types de PTH spécifiques. Certains éléments Analyse des 230 769 têtes 112 000 inserts
du concept de la tige tels que le matériau et la géomé- données de
trie impactent la capacité de résonner de la tige. La l'ANSM
technique chirurgicale, notamment l'orientation du 342 769
composant, peut influer directement sur le risque de composants
squeaking. Globalement, on discerne plusieurs facteurs (Source : CeramTec.)
128 B. Masson, M. Kuntz

céramique composite. Ces chiffres doivent être com- Les résultats des essais prospectifs, randomisés
parés au nombre de PTH pratiquées sur cette même et multicentriques de l'IDE (Investigational device
période. Selon l'Agence technique de l'information sur exemption) pratiqués aux États-Unis sur les couples
l'hospitalisation (ATIH), le nombre de PTH est passé de frottement céramique-céramique (CoC) BIOLOX®
de 107 803 en 2001 à 150 000 en 2011. Si l'on tient delta ont été rapportés [16]. Cette étude porte sur
compte du fait que 50 % des PTH ont des têtes en 177 couples de frottement CoC et 87 couples de frot-
céramique (quel que soit le type d'insert), le taux de tement céramique sur polyéthylène hautement réticulé
fracture des têtes était de 0,18 % avec la céramique (BIOLOX® delta/Marathon®, DePuy, J&J, Warsaw,
d'alumine et de 0,0013 avec la céramique composite, IN, États-Unis). Toutes les têtes avaient un diamètre de
ce qui représente une diminution de 100 % du taux de 28 mm. La durée moyenne du suivi était de 31,2 mois
fracture des têtes en céramique (tableau 14.3). (allant de 21 à 49 mois). Le score Harris hip global
La fracture d'un composant en céramique peut être du groupe CoC était plus élevé que celui du groupe
favorisée par divers facteurs qui ne sont pas dus aux CoP (94,4 contre 93,8), et le taux de survie des deux
propriétés intrinsèques du matériau. couples de frottement était similaire avec 97,6 % pour
Plusieurs paramètres pourraient influencer le taux le groupe CoC et 97,7 % pour le groupe CoP.
de fracture des têtes et inserts dont certains éléments
techniques (qualité de l'impaction, propreté du cône Développement de nouveaux
lors de l'impaction, etc.).
Les inserts en céramique doivent être manipulés avec dispositifs
soin lors du positionnement et de l'impaction. Il est Fin 2016, plus de 7 millions de composants en BIOLOX®
primordial de vérifier que l'insert en céramique soit delta étaient implantés au niveau mondial. L'excellent
correctement placé dans la cupule en métal. La cupule comportement mécanique de cette céramique compo-
en métal doit être propre et sèche avant de placer site en prothèses de hanche a permis le développement
l'insert en céramique. Les fluides, tissus adipeux, frag- de dispositifs plus complexes tels que le condyle pour
ments d'os et traces de ciments doivent être retirés de les prothèses de genou2 [17, 18], les inserts pour les
la cupule en métal. gros diamètres préassemblés (36 mm et plus) et les têtes
Avant l'impaction finale, le positionnement correct de révision [19]. D'autres dispositifs sont toujours à
de l'insert en céramique dans la cupule en métal doit l'étude dans l'épaule, le rachis et les petites articulations
être vérifié en palpant le bord de l'insert avec le doigt. ou pour permettre une fixation directe avec l'os.
Les bords en métal et céramique doivent être en ali- Lors d'une révision, une tête en céramique ne doit pas
gnement. Le taux de fracture dépend aussi du diamètre être utilisée sur un cône endommagé ou usagé. Ainsi,
de la tête fémorale. Le fabricant rapporte que le taux il a été conçu une tête fémorale de révision (BIOLOX®
de fracture des têtes en céramique de 3e génération OPTION) en céramique composite munie d'un man-
(BIOLOX® forte) était de 0,005 % pour un diamètre chon métallique (figure 14.6). La fabrication de têtes
de 36 mm, de 0,008 % pour les têtes de 32 mm et de en céramique avec une épaisseur réduite est possible
0,03 % pour les têtes de 28 mm. grâce à la céramique composite BIOLOX® delta qui
peut ainsi accueillir le manchon métallique en titane.
éries cliniques La déformation plastique du manchon s'adaptera,

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jusqu'à un certain point, aux rayures et endommage-
Oakley, dans une série de 386 PTH avec les couples ments du cône sans provoquer de contraintes sur la
de frottement CoC BIOLOX® delta [15], n'a rapporté céramique. Plusieurs modèles de manchons sont dis-
aucun échec pour cause de descellement aseptique ou ponibles et existent en différentes tailles de col (jusqu'à
luxation. Les implants avaient été posés entre 2006 et + 7 mm) [20]. Il est important de vérifier la compatibi-
2008 et le score postopératoire Oswestry Hip s'était lité entre le cône mâle de la tige et le cône femelle de la
considérablement amélioré (OHS, ou Oxford Hip tête de révision afin que le fabricant soit en mesure de
Score, à 43 contre 16 préopératoire). Aucune com- fournir les composants BIOLOX® OPTION adéquats.
plication en relation avec le couple de frottement n'a
été notée dans cette étude. Sur les radiographies prati-
quées à un an de suivi, on notait une cupule ébréchée,
certainement causée par une chute, mais asymptoma- Les implants de genou sont enregistrés par les clients de
2.

tique, donc ne nécessitant aucune action. CeramTec et ne sont pas disponibles dans tous les pays.
La céramique d'alumine composite en chirurgie orthopédique – BI L X® delta 129

Conclusion
La céramique d'alumine composite BIOLOX® delta
représente le développement technologique le plus
avancé dans le domaine des céramiques techniques.
Ce matériau est aujourd'hui une référence en
arthroplastie de la hanche. Sa biocompatibilité, son
excellente stabilité hydrothermale, associées à une
résistance mécanique élevée, ainsi que sa résistance
à l'usure donnent à cette céramique une place signifi-
cative dans le domaine des prothèses de hanche. Ces
Figure 14.6. Composants en céramique d'alumine composite améliorations ont permis non seulement d'augmenter
BIOLOX® delta. la longévité et la fiabilité des implants, mais égale-
êtes de révision BI L X® P I , têtes fémorales, inserts et ment de développer des dispositifs en céramique tou-
condyle (Lima Corporate) pour P G.
(Source : CeramTec.)
jours plus complexes et innovants.

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arthroplasty. Abstract of the 25th annual ISTA meeting ; 2012. plasty. J Arthroplasty 2010 ; 24 : 1231–5.
131

Le couple métal-métal :
peut-on encore y croire ?
F. BONNOMET, A. D'AMBROSIO, M. EHLINGER

Introduction d'utilisation et de détailler les éléments de surveillance


nécessaires chez un patient chez lequel ce couple de
Utilisé dans les premières tentatives de remplacement frottement a été utilisé, en tenant compte des recom-
prothétique de la hanche (Wiles, 1938), c'est au cours mandations faites de distinguer les prothèses totales
des années 1960 que naquit véritablement le concept du de hanche (PTH) à petit diamètre de tête (< 36 mm),
couple métal-métal (MM) sous l'impulsion de McKee celles à gros diamètre (36 mm et plus) et le resurfaçage
et Watson-Farrar. La clearance entre la tête et la cupule, total de hanche (RTH) [3, 4].
sans doute un peu juste, fut responsable de nombreux
échecs, notamment par grippage du couple et descelle-
ment acétabulaire, conduisant à l'arrêt de son utilisation.
Y a-t-il des résultats
Mais tirant les leçons de ces échecs et convaincu que les encourageants ? Y a-t-il
excellentes propriétés tribologiques du couple MM pou- des résultats inquiétants ?
vaient apporter une solution valable aux phénomènes
d'usure et d'ostéolyse rencontrés avec le polyéthylène Les résultats obtenus avec le couple MM diffèrent selon
(PE), Weber le réintroduisit en 1988 en diamètre de tête le type de prothèse (PTH ou RTH), le calibre de la tête
conventionnel (28 puis 32 mm). L'utilisation de têtes fémorale et la composition chimique de l'alliage utilisé.
plus grosses (36 mm et plus) fut ensuite proposée pour
limiter les risques de luxation en évitant, contrairement
au PE et comme les études in vitro le montraient, l'ac-
Têtes de petit diamètre (< 36 mm)
croissement du phénomène d'usure et donc de la libé- Le couple MM avec des têtes de petit calibre s'est
ration de particules délétères. Et pour permettre une avéré performant, avec un taux de révision à 10 et
reconstruction la plus anatomique possible de l'articu- 15 ans de recul comparable à celui du couple céra-
lation, garante d'une meilleure fonction et du maintien mique-céramique (CC) dans le registre australien de
d'un niveau d'activité élevé, ce couple fut utilisé dans le 2016 [5] (tableau 15.1).
cadre d'arthroplasties de resurfaçage de la hanche. L'utilisation d'un alliage forgé de chrome-cobalt-
Plus d'un million de prothèses utilisant le couple molybdène (Cr-Co-Mo), à haute teneur en carbone
MM furent implantées à travers le monde entre 1996 (0,20 % C), tel qu'on le retrouve dans le couple
et 2009 [1] avec des résultats initiaux très favorables. Metasul® (Zimmer-Biomet, Warsaw, IN, États-Unis),
Cependant, à la lumière des résultats rapportés par les avec des têtes de petit calibre, a donné et continue à
registres nationaux [2] montrant, à populations com- donner d'excellents résultats à long terme, en parti-
parables et particulièrement dans les gros diamètres de culier chez les patients jeunes et actifs (tableau 15.2).
tête, des taux d'échecs plus importants avec le couple En revanche, les résultats obtenus avec un alliage à
MM qu'avec d'autres couples de frottement, l'inquié- plus faible teneur en carbone ont été beaucoup plus
tude grandit dans la communauté scientifique et médi- inquiétants, comme en témoignent les séries rappor-
cale, conduisant certains industriels à retirer certains tant l'utilisation, avec un diamètre de tête 28 mm, de
de leurs produits du marché : R3® Acetabular System l'alliage Sikomet™ (0,08 % C) (Smith & Nephew,
(Smith & Nephew, Londres, Royaume-Uni), ASL® XL Londres, Royaume-Uni). En retenant comme cause
Acetabular Component (DePuy, Warsaw, IN, États- d'échec la reprise d'un des implants pour révision
Unis), Durom® Acetabular Component (Zimmer- aseptique, la survie de ce couple avec la tige SL-Plus®
Biomet, Warsaw, IN, États-Unis). et la cupule Bicon-Plus® (Plus Orthopédie, Rotkreuz,
Le but de ce texte est de faire le point sur les résultats Suisse) était, dans une série de 423 hanches, de 92 %
obtenus avec ce couple de frottement, de rappeler les à 10 ans pour Milosev et al. [12]. Elle atteignait 93 %
complications qui sont survenues en presque 30 ans à 9 ans dans une série de 217 hanches de Korovessis
La prothèse totale de hanche dans tous ses états
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132 F. Bonnome , A. d'Am rosio, . hlinger

et al. [13], mais chutait à 77 % à 15 ans de recul, dans


une mise à jour de cette série, rapportée par Repantis
Têtes de grand diamètre (> 36 mm)
et al. [14]. Dans chacune de ces études, une réaction Le couple MM utilisé dans le cadre d'arthroplasties
inflammatoire aux particules métalliques était retrou- totales conventionnelles avec des têtes de diamètre
vée histologiquement sous forme d'infiltration lym- égal ou supérieur à 36 mm a donné lieu à des taux
phocytaire, macrophagique et leucocytaire éosinophile de révision inacceptables : 12 % de révision à 3,5 ans
diffuse telle que décrite en 2005 par Willert et al. [15]. sur une série de 120 hanches pour Bosker et al. [20],
L'explication de cette différence de résultats est 8 % de révision à 5 ans, auxquels s'ajoutaient 7 %
discutée : l'usure volumétrique d'un alliage Cr-Co de patients en attente de révision, dans une série de
pourrait être liée à sa teneur en carbone. Les alliages 199 hanches pour Bolland et al. [21].
pauvres en carbone comme le Sikomet™ libéreraient Dès 2012, le registre australien (https://aoanjrr.
plus de débris métalliques in vitro [16] et in vivo [17], sahmri.com/fr/annual-reports-2012) avait mis en évi-
favorisant une réaction inflammatoire à ces débris dence un taux de révision à 10 ans 4 fois plus important
[18], ce d'autant que les particules libérées auraient (20,3 %) du couple MM que du couple céramique-
une activité biologique plus importante [19]. Son utili- céramique (CC), pour des diamètres de tête identiques.
sation a été suspendue depuis. Les causes de ces échecs sont directement liées à
l'accumulation dans l'articulation de particules métal-
liques, dont l'origine est variable.
Les caractéristiques physiques de lubrification des
Tableau 15.1 surfaces du couple MM sont radicalement différentes
Résultats du registre australien 2016 [5] des PTH selon le diamètre de la tête [22] : pour des diamètres
conventionnelles en fonction du couple de frottement de tête > 36 mm, le film liquidien est plus homogène et
dans la coxarthrose* plus épais que pour les petits diamètres. Le coefficient
Couples de Taux de révision Taux de révision de friction peut être divisé par 100 [23], offrant des
frottement 10 ans à 15 ans possibilités de glissement comparables au phénomène
d'aquaplaning lors de la conduite sur sol détrempé.
Céramique- 5,0 % (4,8–5,3) 7,1 % (6,4–7,8)
Mais il est beaucoup plus facile de rompre ce film en
céramique
cas de cupule trop verticale ou lors de mouvements de
Céramique-PE 7,0 % (6,3–7,8) 12 % (,7–13,5) décoaptation. Cette rupture est alors à l'origine d'une
friction plus importante, source de libération accrue de
Céramique- 4,4 % (4,0–4,8)
particules métalliques. Malgré une meilleure mouillabi-
XLPE
lité de la céramique, le couple CC est également exposé
Métal-métal 6,4 % (5,7–7,2) 8,8 % (7,6–10,1) à ce risque qui, dans ce cas, s'exprime fréquemment par
des bruits d'origine intra-articulaire, de type squeaking.
Métal-PE 6,3 % (6,1–6,6) 10,0 (9,5–10,6)
Les forces de torsion et de flexion (toggling effect)
Métal-XLPE 4,3 % (4,1–4,5) qui s'appliquent sur le cône morse sont plus impor-
* Les chiffres entre parenthèses sont donnés avec un IC de 95 %. tantes avec des têtes de gros diamètre, ce qui peut
PE : polyéthylène, XLPE : polyéthylène hautement réticulé. générer des micromouvements entre la tête et le cône

Tableau 15.2 © 2017, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés


Résultats du couple Metasul® (Zimmer-Biomet) en diamètre 28 mm*
Séries N hanches/patients Âge patients Survie
Migaud et al. [6], 2011 39 (30) < 50 ans (Devane 4/5) 100 % à 12 ans

Hwang et al. [7], 2011 78 (70) < 50 ans 98,7 % à 13 ans

Hwang et al. [8], 2013 195 (149) < 55 ans 97,8 % à 18 ans

Desmarchelier et al. [9], 2013 125 (111) moyen = 60 ans 98,4 % à 9 ans

Inmann et al. [10], 2014 100 (91) < 50 ans 98,9 % à 13 ans

Delaunay et al. [11], 2016 83 (68) < 50 ans (Devane 4/5) 99 % à 15 ans
* L'événement retenu pour la survie est la révision d'un implant pour descellement aseptique.
e couple métal-métal : peut-on encore y croire ? 133

prothétique, à l'origine de phénomènes de corrosion Cependant, ces résultats sont clairement influencés par
majeurs. La forme et le diamètre du cône, la longueur différents facteurs :
du col, l'adjonction d'une entretoise entre tête et col • le diamètre de la tête, avec des taux de révisions
prothétique, le bras de levier acétabulaire lié au dia- à 10 ans 4 à 5 fois plus importants des implants de
mètre de la tête, le bras de leveur fémoral lié au dessin diamètre < 44 mm (23,0 %, indice de confiance
de la tige, la différence de composition chimique entre [IC] 95 % 20,6–25,6) et 3 fois plus importants des
la tête et/ou l'adaptateur (Cr-Co) et la tige (alliage de implants de diamètre allant de 45 à 49 mm (14,3 %,
titane) sont autant d'éléments capables d'accentuer IC 95 % 13,1–15,7) que des implants de diamètre 50 à
ces phénomènes de corrosion [24, 25]. À propos d'une 54 mm (6,0 %, IC 95 % 5,5–6,6) ou > 55 mm (5,1 %,
série de 805 PTH à grosses têtes LDH-DUROM® IC 95 % 3,8–6,8) ;
(Zimmer-Biomet, Warsaw, IN, États-Unis), Meyer • le sexe du patient, puisque le taux de révision à
et al. [26] ont rapporté 114 cas (14 %) de révision 10 ans était nettement plus faible chez l'homme (6,6 %,
durant les cinq premières années : 94 % des patients IC 95 % 6,1–7,1) que chez la femme (18,3 %, IC 95 %
présentaient des signes d'instabilité au niveau de la 16,9–19,7) et devenait comparable pour des diamètres
jonction tête-cône se traduisant par des phénomènes d'implants > 50 mm (5,7 %, IC 95 % 5,2–6,3),
de corrosion. Dans le cadre des PTH à grosse tête plus fréquents chez l'homme, à celui des PTH conven-
MM, la corrosion joue donc un rôle plus impor- tionnelles (5,1 %, IC 95 % 6,9–8,6) ;
tant que l'usure du couple de frottement, comme • le type d'implant : si le taux de révision atteignait
l'ont également constaté Bolland et al. [21]. Notons 30,1 % (IC 95 % 27,4–33,1) pour l'ASR® (DePuy,
cependant que l'on observe aussi des phénomènes Warsaw, IN, États-Unis) et 16,1 % (IC 95 % 13,2–16,5)
de corrosion au niveau de la jonction tête-cône avec pour le Cormet® (Corin Ltd, Cirencester, Royaume-
le couple métal-polyéthylène (MPE), avec les mêmes Uni), il n'était que de 6,9 % (IC 95 % 6,4–7,5) pour
effets adverses [27, 28]. le Birmingham Hip Resurfacing (BHR®, Smith &
En France, depuis mai 2013, la Haute autorité de Nephew, Londres, Royaume-Uni).
santé (HAS) par l'intermédiaire de la CNEDiMTS Ces facteurs se retrouvent dans l'analyse des autres
(Commission nationale d'évaluation des dispositifs registres :
médicaux et des technologies de santé), a recom- • le registre néo-zélandais [29] a rapporté un taux de
mandé que « la collectivité ne prenne plus en charge les révision pour 100 implants et par an de 3,04 (IC 95 %
prothèses totales de hanche conventionnelles à couple 2,09–4,27) pour l'ASR® contre 1,00 (IC95% 0,79–1,24)
de frottement métal-métal avec têtes fémorales de dia- pour le BHR®, et un taux encore plus faible (0,73,
mètre supérieur ou égal à 36 mm ». IC 95 % 0,02–4,6) pour l'évolution de cet implant
(BMHR®) comparable au taux de révision des PTH
esurfaçage total de hanche ( T ) conventionnelles (0,73, IC 95 % 0,71–0,75). Il a aussi
confirmé l'influence péjorative des implants de dia-
L'analyse du registre australien 2016 des arthroplas- mètre < 44 mm, avec un taux de révision 4 à 5 fois
ties [5] a montré, à diagnostics équivalents, des résul- plus important que pour les diamètres > 50 mm ;
tats légèrement moins bons à 10 et 15 de recul du RTH • dans son rapport annuel, le National Joint Registry
comparé aux PTH conventionnelles (tableau 15.3). britannique [30] a également retrouvé des différences
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Tableau 15.3
Résultats du registre australien 2016 [5] des PTH conventionnelles et des RTH*
Taux de révision 10 ans Taux de révision à 15 ans
PTH Tous diagnostics 6,6 % (6,5–6,8) 9,7 % (9,4–10,0)
n = 346 782 Coxarthrose 5,1 % (5,0–5,2) 8,0 % (7,7–8,3)
Dysplasie 5,9 % (5,0–6,9)
ONAF 7,3 % (6,7–8,1)

RTH Tous diagnostics 9,8 % (9,3–10,4) 13,3 % (12,3–14,4)


n = 6 521 Coxarthrose 9,5 % (9,0–10,0) 12,9 % (11,8–14,0)
Dysplasie 20,6 %(16,7–25,2)
ONAF 10,6 % (7,3–15,2)
* Les chiffres entre parenthèses sont donnés avec un IC de 95 %.
ONAF : ostéonécrose aseptique de la tête fémorale.
134 F. Bonnome , A. d'Am rosio, . hlinger

importantes entre les divers implants, avec des probabilités Pseudotumeurs inflammatoires
de révision à 12ans égales à 30,35% (IC95% 26,94–34,09)
pour l'ASR®, 21,14 % (IC 95 % 19,27–23,16) pour Ce sont des lésions granulomateuses, apparaissant
le Cormet®, 14,09 % (IC 95 % 11,75–16,84) pour le sous forme de masses solides ou liquides d'allure kys-
Conserve Plus® (Microport Orthopedics Inc, Amsterdam, tique, développées dans les tissus périprothétiques, et
Pays-Bas) et 9,91 % (IC 95 % 9,29–10,57) pour le BHR® ; étant le plus souvent en communication directe avec
• il en est de même avec le registre finlandais [31] : à les implants. Initialement décrites dans les cas de RTH,
10 ans, 32,7 % d'échecs avec l'ASR®, 10,8 % avec le on les rencontre aussi après PTH utilisant un couple
Converse Plus®, et 9,7 % avec le BHR®. MM, mais aussi un couple métal-PE [28, 36, 37], du
En France, depuis mai 2013, la CNEDiMTS a décidé fait de phénomènes de corrosion possibles au niveau
que seuls les chirurgiens ayant une expérience impor- de la jonction tête-cône, en dehors de toute utilisation
tante pourraient poursuivre leur expérience du RTH du couple MM [38].
uniquement chez des patients jeunes, souffrant de Leur survenue est généralement précoce (< 5 ans)
coxarthrose, dont le diamètre de tête native est supé- et leur traduction clinique est variable : pesanteur
rieur à 48 mm et en assurant un suivi particulier. locale, douleurs plus ou moins invalidantes, masse
Par ailleurs, depuis juillet 2013, elle n'autorise plus palpable à la face antérieure ou latérale de la hanche,
que deux implants sur le marché français : BHR® et voire syndrome compressif vasculaire ou nerveux [39].
Conserve Plus®. À ce jour, le registre national qui a vu Mais elles peuvent être totalement asymptomatiques
le jour en 2013, et qui est essentiellement entretenu et quiescentes, expliquant la grande variabilité de leur
par les poses lilloises [32], a retrouvé à 4 ans un taux prévalence dans la littérature (4 à 69 %). Une méta-
de survie de 99,1 % à 4 ans (IC 95 % 98,8–99,2) et de analyse rassemblant 13 898 prothèses (PTH principa-
99,6 % (IC 95 % 99,3–99,7) si l'on exclut les infec- lement à grosse tête et RTH) à couple MM a estimé
tions [33]. leur incidence de survenue à 0,3 % [40].
De nombreux facteurs de risque ont été évoqués pour
expliquer leur survenue : élévation du taux sérique des
Quelles sont les conséquences ions métalliques, présence de débris d'usure métal-
liques dans l'articulation, sexe féminin, hypersensibi-
possibles de la libération lité aux métaux (dont on ne sait pas si elle constitue
de particules métalliques ? une cause ou une conséquence de la survenue d'une
pseudotumeur), malposition verticale de l'implant acé-
La libération de particules métalliques, favorisée par
tabulaire favorisant l'usure par edge loading. Mais ils
un dysfonctionnement du couple MM, peut être à
restent discutés et inconstamment retrouvés [41].
l'origine de réactions adverses locales ou générales.
L'intérêt du dosage des ions métalliques dans le sang
reste controversé [42]. Dans l'étude de Kwon et al.
éactions adverses locales [43], un taux sérique de Co > 2,8 μg/l et un ratio Co/Cr
> 3,8 avait une bonne sensibilité (88 % et 70 %) mais
Regroupées sein d'une entité dénommée ARMD une faible spécificité (32 % et 50 %), avec une valeur
(adverse reaction to metal debris) par Langton et al. prédictive positive moyenne (0,68 et 0,7), amenant les
[34], ces réactions associent diverses manifestations auteurs à conclure que ces dosages ioniques ne pou-

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cliniques et histopathologiques, parmi lesquelles sont vaient à eux seul constituer l'élément décisif pour le dia-
habituellement citées les pseudotumeurs inflamma- gnostic de pseudotumeur et la décision thérapeutique.
toires liquides ou tissulaires, les réactions de type Comme l'ont souligné récemment Sands et Schemitsch
ALVAL (aseptic lymphocytic vasculitiis associated [44], d'autres études sont nécessaires pour déterminer
lesions) et la métallose. Elles sont surtout redoutées la relation exacte entre le taux d'ions métalliques et le
au décours des arthroplasties (PTH ou RTH) avec un risque de survenue d'une pseudotumeur.
diamètre de tête > 36 mm ou utilisant un couple MM Le caractère asymptomatique des lésions n'est pas
pauvre en carbone, et restent exceptionnelles avec des rare [45], sans pour autant que des éléments prédictifs
têtes 28 ou 32 mm en alliage Cr-Co à haute teneur en du caractère symptomatique ou non soient clairement
carbone. En revanche, ces réactions locales ne sont identifiés. Cependant, d'après Hasegawa et al. [46], il
pas rares avec d'autres couples de frottement (7,5 % semble que le l'indice de masse corporelle (IMC), le
des ARMD du registre britannique, selon Matharu caractère solide ou mixte (solide et liquide), la situa-
et al. [35], sont le fait des couples CC et MPE en tion antérieure et la taille de la lésion soient des fac-
diamètre 36 mm). teurs qui prédisposent à la traduction clinique d'une
e couple métal-métal : peut-on encore y croire ? 135

pseudotumeur. En présence d'une lésion de petite taille, constitue sans doute le point de départ d'une éven-
plutôt kystique et en situation postérieure, ces auteurs tuelle pseudotumeur, d'après Langton et al. [34].
ne recommandaient pas de surveillance particulière.
À juste titre, d'autres considèrent que la surveil-
lance de ces lésions est nécessaire : dans une série de
éactions adverses générales
23 pseudotumeurs asymptomatiques diagnostiquées à Toxicité systémique
3,5 ans en moyenne, Konan et al. [47] ont rapporté
que 8 d'entre elles (35 %) ont nécessité dans les trois La toxicité systémique est exceptionnelle et n'a été
années suivantes une révision prothétique. Durant la rapportée dans la littérature que dans 6 cas, avec le
même période, au sein d'une cohorte comparable de couple MM, utilisé dans une arthroplastie de hanche
48 patients sans pseudotumeur initiale, 6 d'entre eux à grand diamètre de tête (RTH ou PTH) [51], avec des
ont vu apparaître une pseudotumeur asymptomatique. manifestations diverses : fatigue, perte de mémoire ou
difficultés de concentration, troubles de l'humeur,
perte de poids, hypertension artérielle, troubles
ALVAL (aseptic lymphocytic vasculitiis visuels, acouphènes, troubles de l'équilibre, paresthé-
associated lesions) sies, impression de goût métallique dans la bouche
chez des patients présentant une élévation considé-
Histologiquement, la présence de débris métalliques rable de leur taux de cobalt et de chrome dans le sang
peut provoquer, conjointement ou non : ou les urines (Co : S > 200 μg/l/U > 1700 μg/l ; Cr : S
• une réaction cellulaire à corps étrangers, sans > 65 μg/l/U > 290 μg/l).
mémoire immunologique, sous l'influence des Six autres cas ont été rapportés. Cinq concernaient
macrophages ; l'utilisation d'un couple MPE pour révision d'un
• et une réaction à prédominance lymphocytaire, couple CC, après fracture de la tête ou de l'insert ; les
dont le mécanisme ressemble à celui d'une hypersen- particules de céramique restées dans l'articulation et
sibilité à médiation cellulaire de type IV, induite par piégées dans la cupule en PE ont provoqué l'usure mas-
les lymphocytes T sensibilisés qui libèrent diverses sive de la tête métallique. Le dernier cas est une faute
cytokines favorisant le recrutement et l'activation de manifeste, puisqu'à la suite d'une rupture de tête en
macrophages et d'ostéoclastes. Cette seconde réaction céramique, l'insert avait été laissé en place et une tête
est caractérisée par des infiltrats lymphocytaires diffus métallique avait été implantée, provoquant des dégâts
et périvasculaires, et par une mémoire immunologique considérables à sa surface [51].
adaptable [48]. En dehors de ces cas extrêmes, d'après l'étude de van
Si les taux sériques d'ions métalliques ne permettent Lingen et al. [52], une élévation nette du taux de cobalt
pas de prédire le type de réponse (macrophagique ou dans le sang (47 μg/l) chez des patients asymptoma-
lymphocytaire), il semble en revanche qu'une concen- tiques n'exposait pas à des risques rénaux, thyroïdiens,
tration plus élevée de ces ions dans les tissus péri- cardiaques ou neurologiques significatifs. Cependant,
prothétiques favorise une réponse à prédominance selon Prentice et al. [53], l'exposition chronique aux
lymphocytaire [19] et que l'aire combinée du nombre ions Co et Cr, même à faibles doses, provoque chez des
et de la taille des particules, appelée « aire biologique- patients dont le couple MM fonctionne normalement,
ment active », soit prépondérante dans le déclenche- une modification de la fonction cardiaque (diminution
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ment de cette réaction lymphocytaire [49]. de la fraction d'éjection ventriculaire, augmentation


Dans la méta-analyse de Wiley et al. [40], portant prin- de la taille du ventricule gauche) et du métabolisme
cipalement sur des PTH à grosse tête et des RTH, l'inci- osseux (augmentation de la densité minérale osseuse et
dence de survenue d'une ALVAL était estimée à 0,6 %. baisse du turn-over osseux), sans toutefois provoquer
de modification de la fonction rénale.
L'innocuité sur le rein du couple MM est d'ailleurs
Métallose confirmée par plusieurs études [54–56] et les taux
Ce terme générique, autrefois utilisé, est défini par la d'ions Co et Cr ne sont pas augmentés en cas d'insuf-
présence d'un tissu fibreux aseptique, associée à des fisance rénale chronique [57].
phénomènes locaux de nécrose ou de descellement
des implants, secondaires à la libération de particules
métalliques (par usure ou corrosion), retrouvées dans Effet carcinogène
les prélèvements anatomopathologiques lors de révi- Les travaux de Dunstan et al. [58] ayant montré
sions pour réaction adverse locale [50]. En fait, elle l'existence d'aberrations chromosomiques de type
136 F. Bonnome , A. d'Am rosio, . hlinger

aneuploïdie dans les leucocytes issus du sang prélevé surtout sans effet sur le développement de l'enfant.
chez des patients porteurs d'une prothèse à couple Cette innocuité sur l'enfant a été confirmée depuis,
MM de première génération (implantation entre 1965 notamment dans le cadre du suivi de 48 femmes
et 1979), il paraissait licite, même en l'absence de ayant un RTH, ayant par la suite donné naissance à
preuve, que d'autres cellules pouvaient présenter les 14 enfants parfaitement développés.
mêmes modifications, et donc il était nécessaire de Malgré le caractère purement théorique de l'effet
s'interroger sur le rôle éventuel que pourrait jouer le tératogène du chrome et du cobalt, du fait de concen-
couple MM dans la survenue d'un cancer. trations parfois importantes après implantation
À l'instar des premiers travaux de Visuri et al. [59] d'une prothèse à couple MM, il reste recommandé
démontrant l'absence de risque accru de décès par can- aujourd'hui d'éviter son utilisation chez la femme en
cer des patients porteurs d'une PTH à couple MM de âge de procréer.
première génération (MacKee-Farrar) avec 28 ans de
recul, d'autres études menées sur de larges populations
n'ont pas prouvé l'existence d'un risque carcinogène
Quels sont les éléments
particulier d'un couple MM de seconde génération. de surveillance indispensables ?
L'analyse de patients issus du registre finlandais [60],
Les éléments de surveillance résultent d'un consen-
comparant les 10 728 patients opérés avec un couple
sus validé en 2012 par l'European Federation
MM aux 18 235 autres opérés avec un autre couple de
of National Associations of Orthopaedics and
frottement, n'a pas retrouvé d'augmentation du risque
Traumatology (EFORT) et la Hip Society [64], repris
de cancer ou de décès par cancer dû au couple MM.
par le Scientific Commitee on Emerging and Newly
L'étude de Brewster et al. [61] à propos de
Identified Health Risks (SCENIHR) dans son rap-
71 990 patients issus du registre écossais a montré,
port de septembre 2014 [65] et les dernières recom-
toutes prothèses confondues (MM ou autre), une
mandations de l'American Academy of Orthopedic
légère augmentation du risque de cancer (notamment
Surgeons (AAOS) [66] (tableau 15.4).
de la prostate) et de myélome, sans pouvoir toutefois
l'attribuer au couple MM. Elle a confirmé par ailleurs
l'absence de risque particulier chez les patients por- uivi clinique
teurs d'un resurfaçage.
Le suivi clinique est recommandé chez tous les patients
L'étude de Smith et al. [62] des patients issus
quel que soit l'implant.
du registre national anglais et gallois, comparant
• Pour les petits diamètres de tête (28 et 32 mm), avec
40 576 patients avec couple MM et 248 995 patients
un couple Cr-Co à haute teneur en carbone, sa fré-
avec un autre couple, a permis de montrer une inci-
quence est comparable à celle des prothèses utilisant
dence équivalente, 7 ans après l'intervention, de tous
d'autres couples de frottement (contrôles réguliers
les cancers (notamment de la prostate, du rein), des
selon les habitudes du chirurgien).
hémopathies et des mélanomes malins dans ces deux
• Les patients ayant une PTH à tête de grand diamètre
populations, même en cas de RTH ou chez la femme
(36 mm et plus) doivent être considérés comme étant
de moins de 60 ans.
des patients à risque. Une surveillance annuelle est
D'une manière générale, la littérature riche dans ce
recommandée tout au long de la vie de l'implant. Il
domaine, grâce aux nombreuses publications tirées

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paraît souhaitable d'instaurer le même suivi pour les
des registres (notamment nordiques), a conclu, en
couples à faible teneur en carbone, y compris dans les
l'état actuel des connaissances, à l'absence de preuve
petits diamètres de tête.
évidente d'un risque accru de survenue d'un cancer
• Pour les RTH, une surveillance annuelle est recom-
chez un patient porteur d'une prothèse à couple de
mandée pendant les cinq premières années.
frottement MM.
• Elle se poursuivra ainsi pour les patients qu'il faut
considérer comme étant à risque (diamètre < 50 mm,
sexe féminin, faible couverture de la tête par cupule
Effet tératogène verticale), mais pourra devenir classique chez les
On sait que les ions métalliques peuvent passer la bar- autres en l'absence d'anomalie du dosage ionique.
rière placentaire mais, dans leur étude à propos de
3 femmes ayant un RTH, de Souza et al. [63] ont mon-
tré que la concentration des ions Co et Cr, mesurée à
osage des ions
la naissance dans le sang du cordon ombilical, était 2 Les dosages peuvent être réalisés dans le sang total, le
à 4 fois plus faible que celle mesurée chez la mère et sérum ou les urines.
e couple métal-métal : peut-on encore y croire ? 137

Tableau 15.4
Recommandations concernant le suivi des patients avec couple de frottement métal-métal
PTH < 36 mm PTH > 36 mm RTH
Patient Non Oui Non Oui Non Oui
symptomatique

Rythme du Classique Annuel durant Annuel Annuel durant Annuel les Annuel durant
suivi (clinique et toute la vie de durant toute la toute la vie de 5 premières toute la vie
radiographique) l'implant vie de l'implant l'implant années puis de l'implant
classique

Dosage ionique Non sauf Oui Oui Oui Non sauf Oui
protocole protocole

Imagerie : IRM Non Oui dans tous Oui si dosage Oui dans tous Non Oui dans tous
ou échographie les cas ionique anormal les cas les cas

Révision des Oui si anomalie Oui si anomalie Oui si anomalie Oui si anomalie
implants IRM/échographie IRM/échographie IRM/échographie IRM/échographie
et/ou Co > 7 μg/l et/ou Co > 7 μg/l et/ou Co > 7 μg/l et/ou Co > 7 μg/l

Comme l'ont détaillé Delaunay et al. [39], les pré-


lèvements sanguins doivent être réalisés dans des
magerie
conditions strictes : aiguille de type Cathlon® IV pour Les clichés radiographiques conventionnels sont
éviter une contamination métallique, tube sous vide recommandés à chaque étape du suivi clinique.
de type Vacutainer® hépariné spécial pour le dosage En cas d'anomalie clinique, radiographique ou d'une
des éléments à l'état de traces, acheminement rapide élévation anormale d'un taux ionique, le recours à une
(< 14 jours) avec stockage à 4 °C. échographie et/ou une IRM-MARS (metal artifact
Pour les urines, il n'y a pas de précaution particu- reduction sequence) est recommandée.
lière en dehors des conditions de stockage identiques Le choix entre ces deux examens repose sur les
à celles des prélèvements sanguins. Dans un souci contraintes financières et les compétences à disposi-
d'homogénéité pour l'interprétation des résultats, il tion. Dans l'étude Matharu et al. [67], la corrélation
est conseillé de travailler toujours avec le même labo- entre les données opératoires et ces deux types d'exa-
ratoire d'analyse. men était la suivante :
Concernant les analyses sanguines, même s'il • 82,5 % pour l'échographie seule ;
existe une forte corrélation entre les taux ioniques • 87,5 % pour l'IRM-MARS seule ;
dans le sérum et dans le sang total, le suivi ne peut • 92,5 % pour les deux combinées. La combinai-
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pas se faire en utilisant de manière interchangeable son des deux types d'imagerie a toujours retrouvé la
le dosage de l'un ou de l'autre. lésion (sensibilité = 100 %) et, en cas de négativité de
En l'absence d'exposition particulière au Cr ou au ces deux techniques, aucune lésion n'a été retrouvée
Co, le taux sérique ou sanguin normal se situe aux (valeur prédictive négative = 100 %).
alentours de 1 μg/l.
Considérant que l'usure d'un couple MM devient
anormale au-dessus de 3 mm3/an, Sidaginamale
Conclusion
et al. [67] ont pu déterminer des valeurs seuils On peut encore croire au couple métal-métal (MM) et
pour les dosages du Co et du Cr dans le sang si l'on considère les résultats à plus de 15 ans obtenus
total (Co < 5,04 μg/l, Cr < 8,37 μg/l) et le sérum dans de larges séries avec des têtes de diamètre 28 et
(Co < 6,30 μg/l, Cr < 7,70 μg/l). 32 mm, utilisant un couple Co-Cr à haute teneur en
Concernant la surveillance des couples MM, la carbone (> 0,20 %), chez des patients jeunes et actifs, il
recommandation d'une valeur seuil de 7 μg/l pour le conserve la confiance de ses utilisateurs habituels [69].
dosage du Co est maintenant communément admise, Cependant, le fabricant historique (Zimmer-Biomet)
une valeur < 2 μg/l paraissant totalement rassurante. qui disposait du couple ayant le plus long recul sur
138 F. Bonnome , A. d'Am rosio, . hlinger

le marché avec les meilleurs résultats (Metasul®) a Mais le couple MM peut espérer garder une place
pris la décision d'interrompre la commercialisation réelle avec le RTH à la condition de respecter scrupu-
de ses prothèses à têtes de diamètre 28 et 32 mm, en leusement les recommandations faites : sujets jeunes
ne renouvelant pas le marquage CE au 31 décembre < 65 ans, pas de femme en âge de procréer, tête native
2016, sans doute pour des raisons financières du fait > 48 mm, inclinaison de la cupule < 45°, implant
de la baisse importante et constante ces dernières BHR® ou Conserve Plus®. La décision prise par l'HAS
années du nombre de poses, comme le reflètent tous en 2013 d'encadrer les poses permettra sans doute la
les registres nationaux. Cette baisse est la conséquence pérennité de ce couple dans le cadre du resurfaçage.
de la confusion provoquée par les résultats médiocres Remerciements. Les auteurs remercient Claude
des autres couples MM et par les PTH à tête de grand Rieker (Zimmer Biomet) pour ses conseils et la relec-
diamètre au cours des dix dernières années. Le com- ture attentive de ce chapitre.
bat va donc cesser faute de combattant pour ce qui
concerne les arthroplasties avec tige fémorale.

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143

Reste-t-il une place pour la fixation


fémorale cimentée dans l'arthroplastie
totale de hanche ?
L. KERBOULL

Introduction surface articulaire reste à discuter. La céramique garde


notre préférence en raison de sa remarquable résistance
Après avoir été longtemps la référence incontestée, la à l'usure et de la tolérance parfaite des rares débris
fixation cimentée dans l'arthroplastie totale de hanche produits par le frottement. Longtemps mal considérée
est de moins en moins utilisée, comme le montre l'ana- outre-Atlantique et dans les pays sous influence amé-
lyse des principaux registres nationaux réalisée par ricaine qui lui ont préféré le couple métal-métal, cette
Troelsen [1] en 2013. Les pays européens utilisent solution commence à être reconnue mondialement et
environ 50 à 60 % d'implants non cimentés, et en ses indéniables avantages admis [5].
Amérique du Nord (Canada et États-Unis), ce taux Nous limiterons donc volontairement le cadre de ce
atteint plus de 80 %. texte au débat concernant la fixation cimentée de l'im-
La question aujourd'hui est de savoir si ce mode de plant fémoral pour laquelle il reste, dans notre expé-
fixation va disparaître ou garder une place qu'il faut rience et également dans la littérature, des indications
donc définir. claires. Nous essaierons dans un premier temps d'ana-
Il est difficile et peu logique mécaniquement de trai- lyser les raisons qui conduisent à préférer la fixation
ter ensemble la fixation du cotyle et celle du fémur. non cimentée. Nous présenterons ensuite nos indica-
En France, la fixation cimentée de la cupule a tou- tions dans l'arthroplastie de première intention et dans
jours été fiable, en l'absence d'usure, et simple à réa- la chirurgie de reprise. Nous terminerons par quelques
liser. En revanche, elle est apparue complexe et moins réflexions personnelles sur le choix de l'implant et la
efficace ailleurs dans le monde, comme semble le technique de cimentation.
dire Ritter [2] qui, en 2004, se posait la question de
savoir s'il restait une place pour ce type de cupule. Ce
n'était pas le mode de fixation mais l'usure du polyé- Pourquoi abandonner la fixation
thylène qui était en fait responsable de la plupart des fémorale cimentée ?
échecs. La fixation non cimentée de la cupule, présen-
tée comme une solution idéale, n'a pas permis à elle Pour avoir une fixation biologique ?
seule de solutionner ce problème, induisant même au
départ une source supplémentaire de débris liée à la C'est probablement le seul argument parfaitement logique
mobilité de l'insert dans la cupule métallique. La dimi- et incontesté. En effet, la fixation de l'implant fémoral
nution de l'ostéolyse liée aux débris d'usure observée par ostéo-intégration a de multiples avantages, notam-
avec les nouveaux polyéthylènes hautement réticulés ment le respect du tissu osseux et l'absence de corps inter-
qui résistent mieux laisse penser que les cupules en médiaire. Le problème est que cette ostéo-intégration ne
polyéthylène cimentées ou non auront une fixation peut pas toujours être obtenue car elle reste dépendante
durable et fiable [3, 4], même si le polyéthylène restera de la qualité et de l'intégrité du tissu osseux ainsi que de
le maillon faible du système. Il est vrai néanmoins que la forme du canal médullaire fémoral [6].
l'utilisation de cupules en polyéthylène cimentées est
de plus en plus limitée aux reconstructions acétabu- Pour gagner du temps ?
laires associant une armature métallique et une greffe,
probablement parce que la fixation non cimentée en Il est vrai que la fixation cimentée impose de consa-
première intention de la cupule est extrêmement fiable crer 10 à 15 minutes de plus pour obturer le canal
et simple. Dès lors, seule la résistance à l'usure de la médullaire, le laver et le sécher, introduire le ciment

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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144 L. Kerbou

et patienter durant sa polymérisation. L'argument ne du patient soit parfaitement stabilisée au moment de


peut être retenu que si la fixation non cimentée était l'introduction du ciment. Pour Rothberg [10], l'utili-
supérieure en toutes circonstances, ce qui ne peut pas sation d'un ciment de basse viscosité, en diminuant
être affirmé clairement à ce jour. Dès lors, compro- la pression intracanalaire, limiterait le risque. Il s'agit
mettre le résultat à court ou moyen terme pour éco- néanmoins d'une étude cadavérique pour l'instant non
nomiser 10 minutes de temps opératoire ne paraît pas confirmée par un essai clinique. S'il faut admettre que
recevable. le taux d'embolie graisseuse est plus important avec
les implants cimentés, en revanche, la comparaison
Parce que la technique d'implants cimentés et non cimentés dans le traitement
des fractures du col fémoral démontre régulièrement
de cimentation est trop difficile la plus grande fréquence des fractures per- et posto-
et exigeante ? pératoires précoces avec les implants non cimentés,
comme dans l'article de Yli-Kyyni [11] en 2014. Cette
Les auteurs anglo-saxons, au premier rang desquels complication grave pour ces patients fragiles doit être
Harris [7], ont mal analysé les causes des descelle- mise en balance avec le risque d'embolie graisseuse et
ments fémoraux et ont, pour les prévenir, concentré faire réfléchir concernant le choix du mode de fixation
leurs efforts sur l'amélioration de la résistance du dans cette population.
manteau de ciment. La recherche d'une épaisseur
minimale de la couche de ciment et de la pénétration
du ciment dans l'os spongieux a conduit au dévelop-
Parce que les implants non cimentés
pement de techniques de cimentation effectivement ont démontré leur meilleure
longues et laborieuses, dites de deuxième puis de troi- fiabilité ?
sième génération, avec l'introduction de la préparation
sous vide du ciment. En France, le concept du French Le débat reste encore très ouvert et au mieux, à ce
paradoxe [8] a permis de démontrer que les éléments jour, les implants non cimentés font aussi bien que
les plus importants étaient la forme et l'état de sur- leurs homologues cimentés avec en général une durée
face du composant fémoral. Dès lors, le ciment, même d'observation inférieure, ce qui est logique [12, 13].
utilisé en couche mince et inhomogène, est parfaite- Néanmoins, certains articles dont celui de Troelsen [1],
ment capable de résister aux contraintes transmises analysant les résultats publiés dans les registres mon-
par l'implant fémoral puisque celles-ci sont unique- diaux dont la méthodologie est reconnue, continuent
ment des contraintes en compression. La technique de à reconnaître la supériorité des implants cimentés, en
cimentation devient alors très simple et accessible à particulier chez les patients les plus âgés. Dans cette
tous, comme nous le reverrons ultérieurement. population, il est également démontré que les fractures
périprothétiques per- ou postopératoires sont plus fré-
quentes avec les implants non cimentés et elles ont des
Parce que le ciment entraîne conséquences graves chez ces patients fragiles [14].
des complications spécifiques ? Par ailleurs, les implants non cimentés peuvent géné-
rer des complications spécifiques comme l'inégalité de
La plus spécifique est probablement l'embolie grais- longueur induite par un implant qui se cale nettement

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seuse, toujours grave et parfois responsable du décès au-dessus de la position prévue, ou une instabilité liée
peropératoire du patient [9]. Si cette complication a à un défaut d'antéversion dans le cadre d'un fémur
pu être observée il y a 30 ans durant des interventions dysplasique. Enfin, n'oublions pas que les implants
programmées au moment de la cimentation fémorale, cimentés sont en général associés à un meilleur résultat
elle semble aujourd'hui presque exclusivement obser- fonctionnel immédiat, notamment en ce qui concerne
vée dans le traitement des fractures du col fémoral par la douleur, probablement car leur fixation est d'emblée
arthroplastie totale ou unipolaire avec un implant fémo- stable [12, 13]. Dans le même esprit, il est également
ral cimenté. Dans la chirurgie programmée, les patients admis que le saignement postopératoire est souvent
sont évalués avant l'intervention et opérés dans de meil- moindre qu'avec les implants non cimentés [13] ; la
leures conditions, ce qui n'est pas forcément le cas dans cavité médullaire étant obturée par le ciment, le saigne-
la chirurgie d'urgence qui traite souvent des patients ment par l'orifice cervical est de fait limité ou absent.
très âgés et parfois dans un état général précaire. En résumé, il ressort clairement que les implants non
Pour prévenir ce type d'embolie, le plus important est cimentés ne représentent pas encore une panacée indis-
probablement d'obturer efficacement le canal médul- cutable. Aucun des arguments avancés par les défen-
laire, de le laver et de le sécher, et que l'hémodynamique seurs du tout sans ciment ne justifie l'abandon définitif
este-t-il une place pour la fixation fémorale cimentée dans l'arthroplastie totale de hanche ? 145

des implants cimentés. La réduction du temps opéra- de plus de 30 ans de fiabilité de la fixation cimentée
toire et la pseudo-difficulté de la technique de cimenta- dans un tissu osseux devenu médiocre, je choisis cette
tion sont probablement les plus mauvais arguments et dernière.
il paraît même peu sérieux de les défendre. Il faut donc
examiner avec objectivité les indications de ces deux La forme du fémur
types de fixation en se fondant sur des critères plus
déterminants pour l'avenir des implants. La résistance, l'harmonie et la pérennité de la fixation
non cimentée reposent sur l'étendue des surfaces en
contact et l'adéquation entre la forme de l'implant et
Les indications de la fixation celle du canal médullaire, justement pour optimiser
fémorale cimentée en chirurgie les surfaces en contact. Ainsi, un fémur cylindrique,
de première intention de type C dans la classification de Dorr, ou un fémur
en forme de flûte de champagne, de type A, sont l'un
La fixation non cimentée se constitue en deux étapes, comme l'autre problématiques pour assurer une fixa-
l'une purement mécanique, la fixation primaire, l'autre tion non cimentée de bonne qualité. Le fémur cylin-
biologique par l'intermédiaire d'une ostéo-intégration drique limite la possibilité de blocage et de résistance
homogène. Dès lors, on peut simplement définir à l'enfoncement de l'implant non cimenté en l'absence
les indications de la fixation cimentée quand l'une de rétrécissement isthmique capable de s'opposer à
ou l'autre de ces étapes risque d'être mise en défaut la force d'enfoncement. Le fémur de type A impose
puisqu'il a été largement démontré que l'utilisation du d'utiliser un implant fin dans sa partie distale en rai-
ciment n'exposait pas le patient à une perte de chance. son du diamètre étroit du canal fémoral. Dès lors, avec
les implants droits, le remplissage métaphysaire est
généralement insuffisant, la taille de l'implant étant
Les qualités mécaniques imposée par le petit diamètre du canal médullaire,
du tissu osseux exposant ainsi l'implant à une migration ou une fixa-
tion uniquement distale, responsable de douleurs ou
La fixation primaire d'un implant non cimenté repose
de résorption osseuse proximale. L'alésage du canal
premièrement sur sa forme, mais aussi sur la résis-
médullaire peut permettre d'augmenter la taille de
tance du tissu osseux qui le supporte pour résister aux
l'implant et d'améliorer le remplissage de la méta-
contraintes d'enfoncement, de varisation et de torsion
physe. Certains implants anatomiques ou sur mesure
que lui transmet l'implant. Si on limite la réflexion au
permettent de mieux s'adapter à ce type de fémur.
cas idéal où l'implant a un dessin adapté et une taille
Enfin, les implants raccourcis ou métaphysaires sont
idoine, il devient facile de comprendre que la résis-
particulièrement utiles dans cette indication, pour peu
tance du tissu osseux reste l'élément déterminant pour
que l'on fasse confiance à ce type de prothèse. Le der-
assurer cette fixation primaire indispensable. Ainsi,
nier choix est celui d'un implant cimenté avec ou sans
face à un os cortical aminci et un os spongieux sans
alésage qui permettra d'obtenir une fixation homo-
aucune résistance, il devient évident que la fixation
gène tout le long de l'implant grâce au manteau de
non cimentée expose à plus de risque de migration
ciment, certes un peu plus épais que d'habitude dans la
distale et à plus de risque de fracture en cas de trau-
région métaphysaire, mais assurant une fixation fiable
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matisme, même minime ou de sollicitation brutale en


et immédiate.
rotation [13]. La qualité de l'os est souvent facile à
apprécier sur les radiographies et en cours d'interven-
tion. Quand l'os est à l'évidence fragile, chacun appré- La taille du fémur
ciera sa volonté de prendre des risques en fonction
de ses convictions. En ce qui me concerne, je choisis La taille du fémur dans ses dimensions extrêmes, très
à chaque fois un implant cimenté. Le choix est plus petite ou très grande, peut également poser un pro-
difficile dans des circonstances où la qualité de l'os blème en fonction des gammes d'implants. Pour ces
au moment de la chirurgie semble compatible avec situations, il est important de choisir une gamme
une fixation non cimentée mais que la résistance du d'implants étendue, ce qui va devenir de plus en plus
tissu osseux semble compromise à moyen terme par difficile en raison des contraintes économiques. Ces
des facteurs intrinsèques au patient, comme le sexe tailles extrêmes sont logiquement les moins utilisées
féminin exposant à l'ostéoporose ou une pathologie et donc beaucoup moins rentables pour les industriels.
sous-jacente responsable de manière directe ou indi- En faveur des implants cimentés, on retiendra que la
recte d'ostéopénie. Dans ces situations également, fort gamme Charnley-Kerboull offre le choix de taille le
146 L. Kerbou

plus large, allant de petites tiges utilisées pour les dys- étapes de l'intervention : ablation de l'implant, recons-
plasies et les malformations à de grandes tailles avec truction osseuse et enfin fixation stable d'un nouvel
un col long et un corps large pour les plus grands. implant [16]. Les voies transfémorales, trochantéro-
Dans ces grands et larges fémurs, le contact cortical tomie élargie ou fémorotomie, sont souvent préférées
est parfois difficile à obtenir et de fait la stabilisation car elles facilitent l'ablation des implants bien fixés
d'un implant non cimentée plus précaire. et celle du ciment quand il y en a. En revanche, elles
n'autorisent pas de reconstruction endomédullaire
Les indications de la fixation spongieuse et imposent l'utilisation d'un implant long.
Dans cette situation, la crainte de voir le ciment s'in-
fémorale cimentée en chirurgie terposer dans le trait d'ostéotomie compromettant la
de reprise consolidation fémorale fait préférer à beaucoup l'uti-
lisation d'un implant non cimenté long à fixation dis-
Paramètres influençant le choix tale, verrouillée ou press-fit. Dans notre expérience, le
du type de fixation recours à ces voies d'abord agressives est peu fréquent
car rarement justifié par l'impossibilité de retirer l'im-
Le chirurgien plant ou le ciment par l'orifice cervical. La conserva-
tion de la continuité fémorale nous paraît plus logique,
En fonction de sa formation, de son expérience et de son
quand il est raisonnablement possible de l'envisager,
entraînement, le chirurgien sera amené à faire des choix
car elle offre un plus grand choix de solutions tech-
différents. Certains ont une attitude systématique repo-
niques. Ainsi, la trochantérotomie classique ou la voie
sant sur le choix de l'une ou l'autre des deux techniques ;
postérieure garde notre préférence.
d'autres utilisent les deux dans des indications différentes.

L'utilisation de greffe La durée de l'intervention


Comme en première intention, l'utilisation d'un
Le deuxième paramètre est l'utilisation ou non de
implant non cimenté et l'absence de reconstruction
greffe. Seule la fixation cimentée permet de recons-
osseuse séduisent par la réduction de la durée de l'inter-
truire les pertes de substance osseuse tout en assurant
vention qui les accompagne. Cette économie de temps,
la stabilité immédiate de l'implant le temps nécessaire
intéressante pour le chirurgien, permet aussi pour le
à l'ostéo-intégration de la greffe. De plus, lorsqu'elle
patient, en théorie, de limiter la morbidité du geste
est utilisée avec un comblement spongieux intramédul-
opératoire. Néanmoins, ce gain de temps ne peut à lui
laire, il devient possible de conserver à l'implant une
seul être le principal critère de choix. À long terme, les
longueur standard et ainsi de conserver intact le fémur
techniques de reconstruction par greffe endo- ou exo-
distal. Cette technique proposée par l'équipe d'Exeter
médullaire associées à des implants cimentés [15, 17]
continue de donner d'excellents résultats à long terme,
ont démontré leur fiabilité et leur capacité à restau-
comme le montre leur article publié en 2016 [15].
rer le capital osseux initialement déficient, et il paraît
dommage de les abandonner. Face à des pertes de
Le type d'implant repris substance osseuse sévères, les implants non cimentés
à fixation distale exposent à de nombreux problèmes

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La reprise d'un implant cimenté par un implant non
secondaires non encore résolus : échecs de la fixation
cimenté expose parfois à une mauvaise ostéo-intégration
par migration ou rupture, déviation des contraintes
de l'implant de reprise car il n'est pas toujours simple
(figure 16.1), absence de restauration du stock osseux
de retirer tout le ciment, ce qui limite la surface de
avec, au mieux, consolidation des traits d'ostéotomie
l'implant en contact avec l'os. Dans ce cas, un implant
fémorale [18].
à nouveau cimenté sera plus sûr, surtout si le premier
n'était pas descellé et est changé pour une autre raison
(problème de longueur ou d'orientation par exemple), Les indications des implants
situation dans laquelle il n'est pas indispensable de reti- cimentés dans les reprises fémorales
rer tout le ciment, comme nous le reverrons.
En préambule, je dois dire que je suis un utilisateur
exclusif et heureux de la fixation fémorale cimentée
La voie d'abord dans cette indication et que je ne pourrai donc pas être
Le choix de la voie d'abord est fondamental pour une objectif. Néanmoins, certaines indications paraissent
reprise fémorale afin de réaliser sereinement toutes les logiques et devraient être faciles à partager par tous.
este-t-il une place pour la fixation fémorale cimentée dans l'arthroplastie totale de hanche ? 147

Figure 16.1.
A. eprise par trochantérotomie étendue et implant non cimenté. Fracture peropératoire et non-consolidation du volet trochantérien.
. À 5 ans, non-consolidation du volet et résorption osseuse proximale liée à la fixation uniquement distale de l'implant.

La reprise d'un implant fémoral cimenté La reprise d'un implant mobile


bien fixé Que l'implant mobile soit cimenté ou non, son ablation
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Dans cette situation, le fourreau de ciment, en par- est en général facile, de même que celle du fourreau
ticulier distal, est généralement intact ou peu altéré. de ciment s'il est présent, sauf parfois au niveau de sa
Son ablation est souvent fastidieuse, parfois très partie distale. Le choix d'un implant cimenté se justifie
complexe, et même dangereuse par certaines voies soit pour ne pas avoir à enlever tout le ciment comme
d'abord n'offrant pas un accès axial au canal médul- dans la situation précédente, soit pour lui associer une
laire. Il est alors plus simple d'utiliser un nouvel greffe spongieuse intramédullaire et ainsi reconstruire
implant cimenté après avoir simplement aminci le capital osseux tout en assurant une fixation durable
l'épaisseur du fourreau de ciment originel. Les au nouvel implant (figure 16.2). Utilisée depuis plus
résultats de cette technique, appelée « cement into de 20 ans par certaines équipes au Royaume-Uni
cement » par les auteurs anglo-saxons, ont été lar- [15] et en France, elle semble se développer ailleurs et
gement publiés et semblent fiables à long terme [19, des publications récentes confirment cet intérêt avec
20]. Si le nouvel implant est un peu plus court que le des résultats comparables à ceux des promoteurs de
précédent, c'est encore plus simple puisqu'il devient la technique. À titre personnel, il s'agit de ma tech-
inutile de perforer le culot distal, même si une légère nique de référence [17]. Ses inconvénients sont qu'elle
recoupe du col est nécessaire [21]. demande patience et minutie pour être réalisée et une
148 L. Kerbou

Figure 16.2.
A. Descellement bipolaire avec perte de substance fémorale S FC T type 2. . econstruction par greffe endomédullaire spongieuse et
implant fémoral cimenté. adiographie postopératoire à 25 ans.

période de décharge prolongée 2 à 3 mois pour assu- cisaillement qu'il supporte mal. Ces deux implants dif-
rer l'incorporation des greffes. En revanche, à moyen fèrent par la présence d'une collerette sur la Charnley-
et long terme, les efforts du chirurgien et du patient Kerboull dont le rôle mécanique reste encore débattu.
sont largement récompensés par une reconstruction Pour les partisans de l'Exeter, la collerette est nocive
osseuse visible et une fixation stable de l'implant. et contraire au principe d'enfoncement et de relaxa-
Quand l'altération fémorale est majeure, avec notam- tion de la tige dans le fourreau de ciment qui soumet
ment des lésions distales, la reconstruction osseuse celui-ci aux contraintes positives de compression. La
par des greffes segmentaires associée à des implants collerette de la Charnley-Kerboull, quand elle repose
cimentés longs est également possible et efficace [22]. réellement sur l'os, améliore la stabilité rotatoire de
Cependant, l'obtention de ce type de greffe est de plus l'implant et n'empêche pas le microdéplacement de
en plus difficile, expliquant que, pour ces cas extrêmes, l'implant lisse dans le fourreau de ciment pour égale-
l'utilisation d'un implant non cimenté long à fixation ment le soumettre à des contraintes en compression,
distale associé à une fémorotomie reste pour certains comme l'a montré Kaneuji dans son étude expéri-
la technique de référence. mentale (étude non publiée). Ainsi, hormis l'apport
contesté de la collerette, les deux implants ont un com-
Quel implant cimenté choisir ? portement très proche dans le fourreau de ciment. Ce

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qui les différencie réellement est l'épaisseur et l'homo
Même si de très nombreuses solutions ont été expé- généité de la couche de ciment. Dans l'approche ini-
rimentées, au fil du temps et de la publication à long tiale d'Exeter, le fourreau de ciment, pour résister,
terme des résultats, deux types d'implants cimentés se devait être homogène et avoir une épaisseur minimale
sont imposés internationalement, dérivés des dessins de 2 à 3 mm sur toute sa longueur. À l'inverse, dans
originaux de John Charnley et de l'équipe d'Exeter. le concept proposé par Marcel Kerboull [23, 24],
En France, les modifications apportées par Marcel l'implant le plus adapté aux dimensions intérieures du
Kerboull ont abouti à l'implant Charnley-Kerboull qui canal médullaire est choisi pour avoir une stabilité pri-
reste probablement l'implant cimenté le plus utilisé. maire et le ciment utilisé pour combler l'espace entre
Il est admis maintenant que l'implant doit être poli- l'implant et l'os sans considération pour l'épaisseur et
brillant, droit, avec une section presque rectangulaire l'homogénéité du manteau. Avec le temps, de nom-
progressivement décroissante de face et de profil. Ces breuses études, comme celles de Janssens [25] et de
caractéristiques architecturales et mécaniques garan- Takahashi [26], ont confirmé l'intérêt de ce concept en
tissent la meilleure distribution des contraintes au four- démontrant que sous-dimensionner un implant pour
reau de ciment tout en le protégeant de contraintes en garantir une épaisseur minimale au manteau de ciment
este-t-il une place pour la fixation fémorale cimentée dans l'arthroplastie totale de hanche ? 149

n'était pas une bonne option car cela augmentait les identifiée comme la principale cause du descellement
contraintes transmises au ciment, surtout si la section de l'implant. Il a alors été recherché une épaisseur mini-
de celui-ci était plus ovale que rectangulaire, nuisant male et homogène du manteau de ciment ainsi qu'une
alors fortement à la résistance aux contraintes en rota- pénétration profonde du ciment dans l'os spongieux
tion. La gamme Exeter a évolué et offre maintenant pour améliorer sa résistance aux contraintes en cisail-
un large choix de col et de taille pour le corps de l'im- lement. C'est pour cela qu'ont été élaborées les tech-
plant qui permet de l'utiliser avec un concept proche niques permettant la préparation sous vide d'un ciment
de celui de la gamme Charnley-Kerboull, comme en de basse viscosité pressurisé associée à un implant
témoignent les résultats actuels de l'implant Exeter qui sous-dimensionné aux arêtes émoussées et centré dans
ne montrent plus les mêmes migrations distales dans le canal médullaire par un dispositif distal. Totalement
le fourreau de ciment autrefois radiologiquement bien à l'opposé de ce raisonnement, le concept de Marcel
visibles car dépassant souvent 5 mm. Kerboull a été de considérer que le ciment, même en
Ainsi, sans esprit partisan, il est logique de dire couche plus épaisse, ne résisterait pas mieux et que sa
aujourd'hui que ces deux gammes d'implants sont pénétration dans l'os spongieux n'avait pas d'intérêt
fiables et très proches dans leur comportement, offrant dans la mesure où les caractéristiques mécaniques de
l'une et l'autre à leurs utilisateurs l'assurance d'une cet os étaient non seulement médiocres, mais surtout
excellente fixation à très long terme (figure 16.3), évoluant avec l'âge et l'ostéoporose vers une dégra-
même chez des patients jeunes et actifs [8, 27–29]. La dation rapide. Cette réflexion est née de l'observation
collerette reste pour nous utile non pas pour préve- attentive à 2 ans des résultats obtenus avec l'implant
nir une migration distale, mais surtout pour renforcer original de Charnley [23]. Quand le ciment était en
la stabilité rotatoire et protéger le ciment. Ceci, asso- couche épaisse, 36 % des implants s'enfonçaient et se
cié à un choix d'implant particulièrement adapté à la varisaient dans le fourreau de ciment fracturé. Quand
reconstruction de l'architecture de la hanche artifi- le ciment était en couche mince, seulement 6 % des
cielle, nous fait préférer la gamme Charnley-Kerboull. implants montraient les mêmes modifications. Enfin,
dans les fémurs étroits des dysplasies, quand le ciment
Quelle technique de cimentation était en couche très mince, aucun implant ne s'enfonçait.
Ainsi est née en 1972 la volonté de protéger le ciment
utiliser ? en diminuant les contraintes qui lui sont appliquées et
L'autre débat concerne la technique de cimentation surtout de limiter ces contraintes à des contraintes en
et sa réelle importance pour la fiabilité de la fixation compression bien supportées par le ciment reposant
à long terme. Rappelons que les discussions concer- sur un os cortical. Pour atteindre cet objectif, c'est la
nant l'épaisseur du manteau de ciment et la technique modification du dessin de l'implant qui a été privilégiée
de cimentation ont eu pour but d'améliorer la résis- pour permettre de diminuer les contraintes varisantes
tance du manteau de ciment dont la fragilité avait été ainsi que les contraintes de cisaillement, et obtenir une
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Figure 16.3.
A. adiographie postopératoire à 6 mois . adiographie postopératoire à 33 ans. n l'absence d'usure cotyloïdienne, la fixation cimen-
tée des deux composants est inchangée.
150 L. Kerbou

A B
Figure 16.4.
A. Arthroplastie totale de hanche bilatérale chez un homme de 40 ans sur séquelles de dysplasie à 6 mois d'intervalle. . ésultat radio-
logique à 30 ans. ésultat fonctionnel parfait avec un épaississement cortical sur le fémur gauche.

stabilité et un centrage par un remplissage médullaire Ces considérations permettent d'insister sur le carac-
optimal permis par une large gamme d'implants, et une tère simple et facilement reproductible de la technique
préparation du canal médullaire retirant l'os spongieux de cimentation avec ce type d'implant. Les jeunes
et préservant les corticales. Avec un taux de survie de chirurgiens, en particulier, doivent être conscients que
l'implant fémoral compris entre 97 et 100 %, les résul- le choix d'un implant cimenté ne doit pas être écarté
tats à long terme de la Charnley-Kerboull [8, 29] dans au prétexte que la technique de cimentation demande-
ses différentes versions ont largement démontré la vali- rait un apprentissage et une expertise complexes.
dité de ce concept, même en présence d'un manteau de
ciment impur et inhomogène (figure 16.4). Ils sont tout Conclusion
à fait comparables à ceux d'implants cimentés avec des
techniques de deuxième ou troisième génération [27, L'époque où les adeptes du ciment et ceux du sans
30]. Dès lors, la réflexion sur la technique de cimenta- ciment se livraient une guerre farouche et partisane est
tion devient très simple et limitée. Il est logique d'obtu- à mon sens révolue. Les deux modes de fixation ont
rer le canal médullaire, principalement pour éviter la maintenant démontré leur fiabilité en même temps que
diffusion du ciment distalement. De même, le lavage est leurs limites. Il est temps de les évaluer sans passion
important pour limiter les risques d'embolie graisseuse et avec objectivité pour ainsi utiliser ces deux tech-
et retirer les fragments d'os spongieux. L'aspiration niques dans leurs meilleures indications au profit de

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par un drain du sang et de l'air durant l'introduction nos patients.
du ciment est également utile pour améliorer l'homogé- En première intention, les implants fémoraux cimen-
néité du manteau de ciment. En revanche, l'utilisation tés restent pour moi les plus fiables quand le tissu
d'un ciment à basse viscosité n'a que peu d'intérêt et osseux est fragile ou la forme du fémur inadaptée à la
la pressurisation encore moins. En fait, un ciment de fixation non cimentée. Dans la chirurgie de reprise, ils
viscosité moyenne permet d'être introduit à la seringue, sont également très utiles pour reprendre un implant
ce qui est commode, et la pressurisation est assurée par déjà cimenté ou pour permettre une reconstruction
le volume de l'implant lors de son introduction. osseuse intra- ou extramédullaire.
este-t-il une place pour la fixation fémorale cimentée dans l'arthroplastie totale de hanche ? 151

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review and meta-analysis of randomized controlled trials. of 382 hips. Bone Joint J 2016 ; 98-B : 1441–9.
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[13] Meding JB, Ritter MA, Davis KE, et al. Cemented and unce- cemented Exeter femoral component in patients under the age of
mented total hip arthroplasty using the same femoral compo- 40 : an update at ten to 20 years' follow-up. Bone Joint J 2017 ;
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Foundation Centre for Fast-Track Hip and Knee Replacement results of Charnley-Kerboull hip arthroplasty in patients
Collaborative Group. Increased risk of intraoperative and younger than 50 years. Clin Orthop Relat Res 2004 ; 418 :
early postoperative periprosthetic femoral fracture with unce- 112–8.
mented stems. Acta orthop 2017 ; 88(4) : 390–4. [30] Hirose S, Otsuka H, Morishima T, et al. Outcomes of Charnley
[15] Wilson MJ, Hook S, Whitehouse SL, et al. Femoral impaction total hip arthroplasty using improved cementing with so-called
bone grafting in revision hip arthroplasty : 705 cases from the second- and third-generation techniques. J Orthop Sci 2012 ;
originating centre. Bone Joint J 2016 ; 98-B : 1611–9. 17 : 118–23.
153

Les tiges sans ciment :


comment choisir ?
C. DELAUNAY

Introduction localisation proximale et plus ou moins circonféren-


tielles, soit en souhaitant cette repousse sur la plus
Depuis l'origine de l'arthroplastie totale de la hanche, grande surface possible des implants, alors totalement
le dilemme du mode de fixation des implants, avec poreux.
ou sans ciment, reste encore vivace, tout particulière- Enfin, plus récemment, sont apparus des implants
ment au niveau fémoral. Les premières tiges fémorales fémoraux à modularité cervicale ou à tiges courtes,
recherchant une fixation endomédullaire sans ciment voire minitiges, dont les reculs sont encore faibles mais
ont été conçues par Moore et Thompson dans les déjà suffisants pour que certains produits aient rapide-
années 1950. Leur ancrage primaire était fondé sur un ment disparu du marché.
autoblocage centromédullaire proximal dans le plan
frontal, un appui cervical par une collerette et, pour Quels sont les matériaux
Austin Moore, une repousse osseuse guidée par une
fenestration proximale [1]. Si, dans les années 1960, et alliages utilisés ?
Sir John Charnley allait donner à l'ancrage cimenté Historiquement, les premières tiges fémorales non
ses lettres de noblesse, depuis, le rajeunissement des cimentées modernes ont été réalisées en alliage
patients susceptibles de bénéficier de ce type de traite- de chrome-cobalt-molybdène (Cr-Co-Mb) : tige
ment et l'élévation consécutive des niveaux d'activité Porométal® de Judet dès 1969, ou Madréporique® de
et des espérances de vie ont conduit à une augmen- Lord à la fin des années 1970 en France, tige Anatomic
tation de la fréquence de survenue des descellements Medullary Locking® (AML) d'Engh, ou Porous Coated
à long terme. Un regain d'intérêt s'est donc fait jour Anatomic® (PCA) de Hungerford aux États-Unis au
pour le développement d'implants fémoraux à fixation début des années 1980.
« biologique ». En 2005, Chiron et al. avaient lancé les bases d'une
classification universelle des tiges fémorales cimen-
Peut-on classer les implants tées et non cimentées selon 9 critères listés dans le
fémoraux non cimentés ? tableau 17.1 [2]. Les tiges fémorales non cimentées
étaient finalement répertoriées en quatre générations,
Si le but recherché par tous les partisans de l'ancrage allant de la tige de Moore aux tiges plus anatomiques,
fémoral non cimenté est d'obtenir cette fixation dites à l'époque de 4e génération, avec une courbure
biologique par repousse osseuse dans les meilleurs sagittale (figure 17.1).
délais, les conceptions sont loin d'être univoques. La recherche sur la mise au point d'un alliage de
Schématiquement, elles obéissent à des choix concer- titane à haute résistance pour la fabrication d'implants
nant trois principaux paramètres : chirurgicaux a été initiée à la fin des années 1970 par
1. les matériaux : alliages de chrome-cobalt ou de Zweymüller en Autriche et par Semlitsch avec la firme
titane devant concilier solidité, biocompatibilité et Sulzer en Suisse [3]. Ce dernier décrivit le phénomène
absence de toxicité ; d'absorption chimique qui s'instaure entre les ions
2. le principe de l'ancrage primaire fémoral, soit hydroxyles (OH-) et le film d'oxydation passive à la
en adaptant l'os à la prothèse (tiges droites), soit surface des implants grenaillés en alliage de titane
en adaptant la prothèse à l'os (implants latéralisés dans l'environnement tissulaire aqueux, ce qui favo-
[droite-gauche], dits « anatomiques », voire person- rise le mécanisme de repousse osseuse sans nécessité
nalisés) ; d'adjuvant type hydroxyapatite [4]. Ce même alliage
3. enfin, le type d'ancrage secondaire, soit en limitant de titanium-aluminium-vanadium (Ti-6Al-4V) fut
la repousse osseuse à certaines zones prédisposées, de celui utilisé aux États-Unis par Harris et Galante pour

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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154 C. Delaunay

réaliser leur tige HG-I® dotée d'un filet de fibres de Ti mais qui a rapidement déçu par insuffisance d'ancrage
(fiber mesh) limité aux surfaces proximales, implant osseux. Dans la firme Sulzer, le vanadium fut remplacé
qui fut très populaire dès le milieu des années 1980 par le niobium au milieu des années 1980 du fait de
la toxicité potentielle d'éventuelles particules de vana-
dium relarguées dans l'organisme par dégradation
Tableau 17.1
Critères de classification des tiges fémorales en fonction ou corrosion, aboutissant à l'alliage Protasul-100™
de leur forme selon Chiron (Ti6Al7Nb). L'association de ces divers processus est
sans doute à l'origine non seulement de la résistance
SF Straight frontal Droite distalement dans à la fatigue avec diminution du risque fracturaire des
le plan frontal implants, mais surtout de l'excellente biocompatibilité
CF Curve frontal Courbe distalement dans de ces alliages de titane et de leur bonne tolérance en
le plan frontal cas d'impaction, à condition qu'elle soit limitée dans
son intensité et dans le temps.
SS Straight sagittal Droite dans le plan
Actuellement, les tiges non cimentées en alliage de
sagittal
Co-Cr très rigides, au module d'élasticité faible et for-
CS Curve sagittal Courbe dans le plan tement pourvoyeuses de détournement des contraintes
sagittal proximales vers les zones diaphysaires distales (stress-
shielding), ont disparu du marché et les implants non
FPF Frontal press fit Remplissante dans le plan
frontal
cimentés fémoraux aujourd'hui disponibles sont quasi
exclusivement fabriqués en alliage de titane.
SPF Sagittal press fit Remplissante dans le plan
sagittal
Formes droites ou anatomiques
Oval Oval Ovale dans le plan
coronal Il existe deux grandes familles de tiges fémorales non
cimentées : droites, les plus nombreuses, et anato-
Rect Rectangular Rectangulaire dans le
miques ou latéralisées (droite-gauche). En 2011, les
plan coronal
tiges droites non cimentées ont été classées par Khanuja
Col Collar Avec collerette d'appui et al. en cinq catégories (figure 17.2) : 1) conique
simple ; 2) à double conicité et remplissage métaphy-
saire ; 3) à effet « coin » (a, rondes ; b, coniques ; et c,
rectangulaires) ; 4) cylindriques totalement poreuses ;
et 5) à modularité diaphysaire. La sixième catégorie
était représentée par les tiges anatomiques [5].
La technique opératoire est certes différente pour
ces divers concepts (encombrement proximal variable,
alésage distal nécessaire pour certaines tiges rondes
et remplissantes, préparation trochantérienne précise
pour les tiges avec aileron trochantérien, etc.), mais

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pour toutes les catégories de tiges répertoriées, les
résultats cliniques rapportés dans la littérature sont
satisfaisants à long terme.

ffet de surface : nature et étendue


L'ostéo-intégration stable dans le temps des implants
prothétiques non cimentés est le but à atteindre afin d'en
assurer la longévité. Ce processus décrit en dentisterie
dès 1981 par Albrektsson pour des implants en titane
se définit par l'attachement d'os lamellaire à l'implant
sans interposition de tissu fibreux [5]. Pour ce faire, la
stabilité mécanique initiale de l'implant doit être aussi
Figure 17.1. Exemple de tige anatomique dite « moderne » selon parfaite que possible afin de réduire au maximum les
Chiron (tige Esop®, classée SF, CS, FPF, SPF, ovale). micromouvements à l'interface os-implant, idéalement
es tiges sans ciment : comment choisir ? 155

Figure 17.2. Classification en six morphotypes des tiges fémorales non cimentées selon Khanuja et al.
Source : Publiée avec l'autorisation de Rubin Institute for Advanced Orthopedics, Sinai Hospital of Baltimore, Inc. et soutien du CNP-SOFCOT.

inférieurs à 20 μm. Au-delà d'une micromobilité supé- Depuis la fin des années 1980, l'adjonction d'un
rieure à 150 μm, l'encapsulation de l'implant sera revêtement d'hydroxyapatite (HA) ostéoconducteur,
fibreuse, non pas osseuse, et donc instable dans le temps. habituellement épais de 50 μm, représente une « troi-
Il existe deux grands types de revêtement de surface sième voie », qui revendique sa spécificité. Là aussi,
destinés à assurer cette ostéo-intégration : les effets de le manteau d'HA peut n'intéresser que la région
surface macroporeux (entre 50 et 400 μm) avec repousse proximale (par exemple tige ABG®) ou revêtir l'en-
profonde (bone INgrowth) ou microporeux (3 à 5 μm) semble du pivot fémoral (par exemple tige Corail®).
avec repousse superficielle (bone ONgrowth). La nécessité de l'adjonction de ce type de revête-
Les effets de surface macroporeux peuvent être créés ment paraît plus cruciale pour assurer la longévité
par l'adjonction de microbilles, de filets de microfibres des implants anatomiques, alors que sur certains
ou par le recours à des métaux fortement poreux (75 implants droits, son seul effet positif est l'obten-
à 85 %) au maillage tridimensionnel uniforme. À tion d'une meilleure interface implant-os proximale,
l'inverse des tiges historiques en alliage de Co-Cr-Mb dont la traduction n'est jusqu'à présent que radio-
totalement revêtues, et de ce fait extrêmement difficiles graphique [6].
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à extraire, les tiges à effets de surface macroporeux ne Enfin, ces divers revêtements peuvent s'additionner
sont revêtues qu'au niveau de leur partie proximale entre eux.
alors que le reste de la tige, plutôt destiné à assurer un
bon centrage axial endomédullaire, en est dépourvu.
Les effets de surface microporeux sont obtenus par Quel dessin paraît le plus favorable
projection de grains de corindon (grit-blasting) ou de à une fixation de bonne qualité
poudres métalliques à l'aide d'une torche à plasma
(plasma spray). À l'inverse des tiges à revêtement
et pérenne ?
macroporeux uniquement proximal, les implants Il est logique de penser que la fixation non cimentée
microporeux sont habituellement revêtus sur la tota- d'un implant fémoral sera d'autant plus durable que sa
lité de leur surface. La qualité de la repousse osseuse fixation à l'os sera de bonne qualité et pérenne.
sur la microporosité de surface (de 3 à 5 microns) de Si les phénomènes d'adaptation de l'os à la pro-
tiges en alliage de titane corindoné a été démontrée par thèse sont inéluctables, et ce quels que soient le mode
les études histologiques d'explants menées par Lintner de fixation et le type d'implant, il est important de
et Zweymüller [6]. réduire les effets délétères liés à une répartition non
156 C. Delaunay

harmonieuse des contraintes avec réduction de la • il est certain que plus les tiges sont remplissantes en
densité minérale osseuse (DMO), essentiellement proximal (anatomiques latéralisées), moins le nombre
proximale (stress-shielding). de tailles nécessaires est élevé, du fait de la limitation
Dans leur méta-analyse, Knutsen et al. colligeaient induite par la dimension antéropostérieure du fût
21 études, examinant, par absorptiométrie diphoto- fémoral (plan sagittal), plus étroite que sa dimension
nique (DEXA), la DMO et surtout ses variations sur médiolatérale (plan frontal) ;
2 ans après l'implantation, autour d'implants fémo- • à l'inverse, les gammes de tiges droites et plates, peu
raux cimentés et non cimentés [7] : remplissantes dans le plan sagittal et à remplissage
• pour les tiges non cimentées (18 études), la perte principalement frontal, sont souvent plus étendues ;
minérale osseuse globale à 1 an était de 5 % pour • les modalités de croissance sont aussi extrême-
les implants en alliage de Ti et de 12,8 % pour les ment variables d'un implant l'autre et d'un fabricant
implants en alliage de CoCr ; à l'autre. Ainsi, la tige Alloclassic-SL®, archétype de
• pour les tiges non cimentées en alliage de Ti, la perte la tige droite press-fit rectangulaire, est produite en
minérale osseuse globale à 2 ans était : 14 tailles (figure 17.3) selon une progression obéissant
– pour les tiges droites : de 4,1 % pour les tiges à une loi mathématique régissant une croissance tridi-
remplissantes (straight) ; de 6,3 % pour les coniques mensionnelle qui concerne non seulement le volume de
(tapered) ; et de 6,9 % pour les plates rectangulaires l'implant, mais aussi la longueur du col et l'encombre-
(press-fit) ; ment de l'aileron trochantérien. Cela permet d'éviter
– alors qu'elle était de 5 % pour les tiges anatomiques. les effets de médialisation des petites tailles et de laté-
• à plus long terme, pour une tige droite press-fit rec- ralisation des grandes tailles.
tangulaire (Alloclassic-SL®) : À l'extrême, la conception d'implants sur mesure
– la diminution de DMO immédiate ne se modifiait permet de limiter à un exemplaire unique le nombre
pas sur une période d'étude de 4 ans ; d'implants disponibles pour un patient donné, avec les
– à 5 ans, la perte de DMO globale était nulle, mais coûts en découlant et le risque toujours possible d'une
avec redistribution au profit des zones distales 2,4 et impossibilité d'utilisation en cours de procédure.
5 de Gruen et avec une réduction proximale maxi-
male de 14 % en zone 7 ; Peut-on faire une synthèse
– enfin, à 10 ans, la perte de DMO ne concernait
que la zone de l'éperon de Merckel, en accord avec de toutes les données ?
les principes de fixation de ce type d'implant sans Dans leur analyse de la littérature couplée aux données
collerette [6]. de trois registres majeurs, Migaud et al. ont colligé
les données provenant de 50 162 prothèses totales de
Combien de tailles hanche (PTH) sans ciment (âge moyen de 48,9 ans au
sont nécessaires ? recul moyen de 6,5 ans), évaluées selon les fréquences
de réintervention, d'ostéolyse et de fractures peropéra-
Il n'y a pas de gamme de tailles d'implants standard, toires [8]. Les auteurs avaient individualisé 6 types de
adaptable à tous les dessins de tige fémorale non pivots fémoraux : 3 droits et 3 anatomiques, macropo-
cimentée. reux, revêtus d'HA ou corindonés :

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Figure 17.3. Gamme de tige Alloclassic SL® (de la taille 01 à la taille 12).
. Vue de face. B. Vue de profil.
es tiges sans ciment : comment choisir ? 157

• pour les pivots droits, l'ajout d'HA ne réduisait pas permettent théoriquement de s'adapter au mieux à la
le taux de réintervention et s'accompagnait même d'un biomécanique de la hanche remplacée dans tous les
taux d'ostéolyse plus élevé. En termes d'ostéolyse et de plans de l'espace.
réintervention, les pivots droits corindonés ou macro- Hélas, l'enthousiasme généré s'est vu rapidement
poreux étaient comparables ; contrecarré par des phénomènes tribologiques dus à
• pour les pivots anatomiques, l'ajout d'HA réduisait des réactions corrosives au niveau des cônes d'emboî-
la fréquence des réinterventions sans réduire la fré- tement avec relargage de débris métalliques créant des
quence des ostéolyses. Les pivots corindonés donnaient réactions néfastes (adverse reaction to metallic debris
des résultats comparables dans leur version droite ou [ARMD]) jusque-là réservées aux couples de frotte-
anatomique. À l'inverse, les pivots avec HA donnaient ment métal-métal des resurfaçage ou des arthroplas-
de meilleurs résultats dans leur forme anatomique ; ties dites à grosse tête [10].
• la forme du pivot avait moins d'influence que Certains implants fémoraux, jusque-là très perfor-
le traitement de surface sur les ostéolyses et les mants, se sont vus fortement impactés par cette erreur
réinterventions. de conception (tige ABG-II® exchangeable neck à col en
Pour Khanuja et al., tous les types de tiges convention- CrCo et tige en titane dans le registre australien) [11].
nelles non cimentées encore utilisés actuellement ont Plusieurs travaux internationaux (International
tous d'excellentes survies, similaires à plus de 15 ans, Society of Arthroplasty Registries [ISAR]) ou français
et les différences entre matériaux et effets de surface ne menés par l'Agence nationale de sécurité du médica-
semblent plus influencer le devenir à long terme autant ment et des produits de santé (ANSM) sont en cours
que les différences entre design et géométries [5]. pour évaluer à court et moyen termes ces tiges modu-
laires le plus souvent non cimentées, avec des résultats
qui s'annoncent pour l'instant plutôt en défaveur de
La géométrie du col prothétique cette innovation. Dans leur étude exploitant les don-
(angulation et offset) nées de l'Agence technique de l'information sur l'hos-
a-t-elle une influence pitalisation (ATIH) de 324 108 patients au recul moyen
de 42 mois, Colas et al. ont rapporté que les PTH à
sur la survie de l'implant ? modularité col-tige (exchangeable neck) étaient asso-
Si de nombreux implants existent en version standard ciées à un risque de révision augmenté d'un facteur 1,26
et latéralisée afin de pouvoir tenter de s'adapter au (p < 0,001) par rapport aux PTH à modularité fémorale
mieux à certains morphotypes anatomiques atypiques, conventionnelle (jonction tige-col fixe) [12]. Les causes
en particulier en coxa vara et/ou profonda, très peu d'un taux de révision majoré avec les PTH à modularité
d'études ont été menées sur des cohortes d'arthroplas- col-tige étaient : « fractures d'implant ou périprothé-
ties primaires latéralisées. tiques » (distinction non disponible) et « complications
mécaniques », causes somme toute assez peu précises.

atéralisation
La latéralisation peut avoir des effets délétères en
Tiges courtes
augmentant les contraintes varisantes avec un risque Si toutes les tiges non cimentées peuvent être implan-
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de non-ancrage, de bascule en varus, de descellement tées correctement par voie postérieure ou externe, il
et de fracture d'implants. Avec la tige non cimentée n'en est pas de même pour les voies d'abord anté-
Corail® (DePuy), Courtin et al. ont rapporté des résul- rieures du fait du risque de fracture trochantérienne
tats mitigés avec 10 % d'anomalies radiologiques et ou de sous-dimensionnement, en particulier en cas de
4 % de reprises au recul moyen de 6 ans sur une série recours à des voies mini-invasives et à des implants
de 172 tiges latéralisées [9]. Les facteurs de risque à important encombrement trochantérien. C'est afin
identifiés étaient un âge < 70 ans, une tige de petite de pouvoir satisfaire à ces abords antérieurs plus
taille et la restauration d'un offset fémoral important. contraints que se développent depuis quelques années
des implants fémoraux à tiges dites courtes.
Modularité tige-col Lors de sa veille technologique de 2014, la Société
française de la hanche et du genou (SFHG) proposait
La possibilité de s'adapter au mieux à l'anatomie cer- une classification selon le mode d'ancrage en cinq
vicodiaphysaire des patients a conduit à élaborer une types, allant du resurfaçage (type 1) au simple raccour-
modularité tige-col, inédite jusque-là, initialement cissement d'une tige classique sans autre modification
avec des tiges cimentées. Les options ainsi autorisées (type 5) (tableau 17.2).
158 C. Delaunay

Tableau 17.2 mais plus de révisions précoces pour luxation, fracture


Classification des arthroplasties à tiges courtes périprothétique et infection [19]. Dans leur revue concer-
de la SFHG-SOFCOT (2014) nant les séries publiées chez les patients de moins de
50 ans, De Kam et al. concluaient qu'en l'état actuel des
Caractéristiques du mode d'ancrage
connaissances, les résultats les plus fiables au plus long
Type 1 Ancrage céphalique (resurfaçage) recul étaient obtenus avec des implants cimentés [20].
Type 2 Ancrage cervical isolé
n fonction de la forme du fémur,
Type 3 Tige à appui sur le Merkel
de la qualité osseuse et du type
Type 4 Ancrage métaphysaire d'implant
Type 5 Tige raccourcie
Simple et aisément reproductible, la classification de
Dorr (figure 17.4) répertorie trois morphotypes selon
Les résultats de ces arthroplasties nouvelles sont la forme de la moitié supérieure du fût fémoral [21] :
encore peu nombreux mais indiquent que leur usage • Dorr type A : corticales épaisses, cavité médullaire
doit être considéré avec prudence. Dans une revue étroite, aspect en « flûte de champagne » ;
de résultats de tiges courtes publiés à court terme, • Dorr type B : corticales amincies, cavité médullaire
Khanuja et al. ont rapporté des taux élevés de malpo- élargie ;
sitionnement, de tailles inadaptées, d'instabilité axiale • Dorr Type C : corticale minces et cavité médullaire
et de fractures peropératoires, et recommandaient la très large, aspect en tuyau de pipe : ce dernier type se voit
plus extrême prudence quant à la généralisation de plus fréquemment chez les sujets âgés et de sexe féminin.
leur utilisation [13]. Le pire morphotype fémoral proximal (Dorr C) est
En revanche, certaines tiges courtes avec conser- associé à une ostéoporose plus sévère et à de faibles indices
vation du col fémoral ont permis de réduire la perte d'épaisseur corticale, d'où un risque majoré de fracture
d'offset avec une bonne restitution simultanée de peropératoire. Ce type C s'observe essentiellement chez
l'anatomie et de la longueur [14]. les femmes âgées avec des indices de masse corporelle
(IMC) bas. Pour Dorr, ces fémurs sont structurellement et
Y a-t-il des contre-indications cellulairement déficients et sont donc moins aptes à assu-
rer de manière fiable des implants non cimentés [21].
à l'utilisation d'une tige sans Il est évident que la recherche d'un remplissage
ciment ? médullaire adapté va conduire à utiliser des implants
non cimentés de plus en plus volumineux au fur et à
n fonction de l'âge et du sexe mesure que l'on s'éloignera du type A pour s'appro-
des patients cher du type C. Il est tout aussi évident que le type A
invitera plutôt à recourir à des implants non cimen-
À l'inverse du registre suédois qui ne l'a pas encore fait, tés anatomiques à remplissage préférentiel proximal
certains registres majeurs ont étudié les résultats par (type ABG, voire sur mesure) ou à un alésage diaphy-
catégories d'âge et de sexe des patients. Les données saire, alors que le type B sera correctement appareillé

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des dernières versions disponibles de quatre registres avec des tiges droites remplissantes. Le risque de frac-
(norvégien, néo-zélandais, Grande Bretagne-Pays de ture peropératoire sera surtout majoré dans le type C,
Galles-Irlande du Nord et Île de Man, et australien) en particulier en cas d'utilisation de tiges anatomiques
sont résumées dans les tableaux 17.3 et 17.4 [15–18]. très remplissantes ; dans ces cas, le recours au cimen-
Les conclusions sont globalement plutôt en défaveur du tage sera le plus souvent moins iatrogène.
recours à l'usage des tiges non cimentées chez les patients
de plus de 75 ans, en particulier chez les femmes.
Même chez les patients les plus jeunes, la littérature
L'utilisation d'une tige non
ne permet pas de trancher avec certitude entre fixation cimentée expose-t-elle à un
cimentée ou sans ciment. Les données cumulées des risque plus élevé de douleurs
quatre registres scandinaves réunis au sein de la Nordic
Arthroplasty Register Association (NARA) n'ont pas
et de fractures ?
mis en évidence de différence entre PTH cimentées ou Malgré les avertissements répétés provenant des registres
non chez les patients de moins de 55 ans, avec pour ces suédois et anglais, force est de constater que le recours
derniers moins de révision pour descellement aseptique, à la non-cimentation fémorale progresse dans le monde.
es tiges sans ciment : comment choisir ? 159

Tableau 17.3
PTH cimentées comparées aux PTH à tiges fémorales non cimentées dans les registres norvégiens (risque relatif de révision
[RRR]) et dans le registre néo-zélandais (indice de révision pour 100 composants observés année, IRevp100coa)
Registre Tranche d'âge PTH cimentées PTH non cimentées PTH hybrides inversées*
Norvégien (RRR) < 55 ans 1 1 1

< 75 ans 0,88 1,03 1,71

Hommes > 75 ans 1 0,95 1,03

Femmes > 75 ans 1 1,47 1,23

Néo-zélandais < 55 ans 1,81 0,97 1,14


(IRevp100coa)

< 75 ans 0,37 0,74 0,5


* PTH hybride inversée : correspond à une fixation fémorale non cimentée associée à un implant acétabulaire cimenté.

Tableau 17.4
Probabilité cumulée de révision à 10 ans dans les registres britannique et australien
Registre Tranche d'âge PTH cimentées PTH non cimentées PTH hybrides inversées*
GB-W-NI-IoM Hommes < 55 ans 7,26 10,05 6,21

Femmes < 55 ans 6,04 10,67 4,32

Hommes > 55 ans 2,83 4,63 3,01

Femmes > 55 ans 2,04 4,46 2,13

Australien < 55 ans 8,3 5,6 6,6


(coxarthrose seule)

> 75 ans 4,3 6 4


* PTH hybride inversée : correspond à une fixation fémorale non cimentée associée à un implant acétabulaire cimenté.

Co-Cr-Mb, ont presque disparu avec les tiges conven-


tionnelles modernes en alliage de Ti. L'auteur en
retrouvait un taux de 4 % dans les deux premières
années avec une tige droite rectangulaire en alliage de
Ti microporeuse corindonée et, pour la moitié d'entre
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elles, la constatation radiographique d'une impaction


secondairement stabilisée s'accompagnait d'une dispa-
rition des symptômes [6]. À l'inverse, certaines tiges
courtes, probablement plus difficiles à stabiliser régu-
lièrement d'emblée, ont pu conduire à la réapparition
de taux de douleurs fémorales anormalement élevés,
atteignant 25 % à 3 ans de recul moyen dans une série
Figure 17.4. Classification de la qualité osseuse fémorale selon Dorr.
Source : Publiée avec l'autorisation de Rubin Institute for Advanced
récemment publiée [22]. Dans une série de 200 cas de
Orthopedics, Sinai Hospital of Baltimore, Inc. et soutien du CNP- fractures cervicales à grand déplacement traitées par
SOFCOT. arthroplastie fémorale simple, le taux de fracture pero-
pératoire passait de 6,1 % avec un implant cimenté à
Les douleurs fémorales, dénommées cruralgies de 11,5 % avec une tige sans ciment.
façon bien impropre (le terme de « fémoralgie » eut Mais la forme de l'implant intervient tout autant
été plus adapté), fréquentes avec les tiges non cimen- que le mode de fixation [23]. Ainsi, dans l'étude de
tées longues massives, en particulier en alliage de la littérature de Migaud et al. [8], le taux de fractures
160 C. Delaunay

peropératoires des implants non cimentés était de a permis à des organismes tels que le National Institute
2,9 % pour les pivots droits contre 4,6 % pour les ver- for Health and Care Excellence (NICE) et l'Orthopae-
sions anatomiques. L'explication en revient à la néces- dic Data Evaluation Panel (ODEP) de fixer des normes
sité d'un travail « au plus près » de corticales parfois minimales de performance.
déficientes. Ainsi, le NICE recommandait en 2014 que le taux de
À côté du risque de fracture peropératoire, le risque révision des arthroplasties réalisées pour coxarthrose
de fracture périprothétique à distance de l'intervention au stade final soit inférieur ou égal à 5 % à 10 ans.
est lui aussi majoré avec les tiges non cimentées. Ainsi, L'ODEP, quant à lui, a défini une classification des
dans le NARA, elles représentent 27 % des causes de implants selon les données fournies volontairement
révision des tiges non cimentées contre seulement 4 % par les industriels [26]. À ce jour, le score maximal
en cas de cimentage [24]. possible est 10A (10 pour 10 ans au minimum de recul
Cependant, des données plus favorables à la non- et A pour l'adoption sans restriction de l'usage du dis-
cimentation fémorale étaient déjà avancées en 2007 positif correspondant). Concernant les tiges fémorales
dans le registre norvégien, le seul répertoriant des tiges non cimentées, selon les données de l'ODEP-2015,
non cimentées modernes [25]. 13 implants sont classés 10A dont une majorité de
tiges droites, et 6 sont classées 10A*, c'est-à-dire avec
Evidence-based medicine un très fort niveau de preuve (tableau 17.5).
Dans la littérature, les survies de certaines de ces tiges
La confrontation entre la littérature et les données des conventionnelles historiques non cimentées encore
registres représentatifs permet d'élaborer des indica- disponibles sur le marché, toutes en alliage de titane
teurs de qualité identifiant les implants fiables au plus et avec ou sans revêtement d'hydroxyapatite, sont
long recul disponible possible. Au Royaume-Uni, cela régulièrement supérieures à 95 % à 15 ans de recul et

Tableau 17.5
Liste des 13 tiges fémorales non cimentées classées 10A et 10A* par l'Orthopaedic Data Evaluation Panel (ODEP) et par
ordre d'ancienneté de mise sur le marché
Tiges classées ODEP Fabricant Année de mise sur le Année d'évaluation Nb d'années
10A marché britannique d'observation
Alloclassic SL® A* Zimmer-Biomet 1979 2014 35

CLS Spotorno® A* Zimmer-Biomet 1983 2014 31

Taperloc ®
Zimmer-Biomet 1983 2012 29

Bimetric® Zimmer-Biomet 1984 2012 28

Mallory-Head® Zimmer-Biomet 1985 2012 27

Furlong HA® A* JRI 1985 2012 27

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BiCONTACT® A* B Braun 1987 2014 27

Omnifit HA® Stryker 1987 2010 23

Zweymüller SLPlus® Smith & Nephew 1993 2012 19

Synergy ®
Smith & Nephew 1996 2014 18

ABG-II HA® Stryker 1998 2012 14

VerSys Fibermetal® Zimmer-Biomet 1999 2015 16


A*

Corail AMT® A* DePuy 2002 2015 13


A : niveau de preuve fort ; généralement sur un grand nombre de patients avec de bons suivis. A* indique un niveau de preuve
particulièrement élevé. B : niveau de preuve acceptable ; moins grand nombre de patients, mais des données suffisantes pour démontrer
le service rendu.
es tiges sans ciment : comment choisir ? 161

Tableau 17.6
Survies à plus de 15 ans de tiges fémorales non cimentées historiques pour l'événement « révision quelle que soit la
cause » (par recul décroissant) et classification selon l'Orthopaedic Data Evaluation Panel (ODEP)
Auteurs (pays)/C Implant (fabricant) N hanches (début) Survie/recul ODEP
Vidalain (France)/C Corail HA (DePuy)
®
347 (1986) 96,3 %/23 ans 10A*

McLaughlin et Lee Taperloc® (Zimmer- 145 (1983) 87 %/22 ans 10A


(États-Unis)/C Biomet)

Lombardi et al. Mallory-Head® 2000 (1984) 95,5 %/20 ans 10A


(États-Unis)/C (Zimmer-Biomet)

Capello et al. (États- Omnifit HA® 436 (1988) 95,3 %/18 ans 10A
Unis)/C (Osteonics)

Rajaratnam et al. Furlong HA® (JRI) 331 (1986) 97,4 %/17 ans 10A*
(Grande-Bretagne)

Baker et al. (Grande- ABG I HA® (Stryker) 69 (1990) 98,6 %/15 ans 10A
Bretagne)

Grübl et al. Alloclassic SL® 208 (1986) 98 %/15 ans 10A*


(Allemagne)/C (Zimmer-Biomet)

Delaunay (France) Alloclassic SL® 198 (1988) 98,1 %/15 ans 10A*
(Zimmer-Biomet)
C : série du(des) concepteur(s). A* indique un niveau de preuve particulièrement élevé.

au-delà (tableau 17.6) [6]. Il n'est pas surprenant de en particulier par voie antérieure mini-invasive, alors
constater que ces tiges fémorales fiables au plus long qu'elles le sont toutes par voies externe ou postérieure,
terme sont toutes classées 10A ou 10A* par l'ODEP. y compris mini-invasives. Prioriser la voie d'abord
L'analyse des caractéristiques des 6 tiges labelli- avant le choix de l'implant fémoral signifie que l'on
sées ODEP 10A* selon la classification de Chiron privilégie pour les patients un avantage relatif à très
(tableau 17.7) est assez percutante : elle montre que la court terme (potentiellement une hospitalisation rac-
formule tige en alliage de titane, droite dans les deux courcie, moins de risque de luxation, une récupéra-
plans (SF et SS), remplissante dans le plan frontal (FPF) tion plus rapide) à un avantage réel fiable et prouvé
et sans collerette apporte une garantie de résultat fiable à long terme : la longévité de l'ancrage fémoral. Ce
et jusque-là inégalée dans l'état actuel des connaissances choix de la voie d'abord prioritaire repose sur un pari :
et des reculs disponibles (qui pour quatre d'entre elles celui que les tiges courtes moins envahissantes, seules
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dépasse les 25 ans d'usage). Ainsi, la combinaison des implantables par voie d'abord antérieure mini-inva-
données de l'ODEP et des résultats spécifiques de leur sive, fonctionneront à long terme aussi bien, si ce n'est
registre national ont déjà permis à certaines sociétés mieux, que les tiges droites ou anatomiques conven-
savantes, comme la Dutch Orthopaedic Association tionnelles ayant déjà fait leur preuve. Seul le recul à
(Nederlandse Orthopaedische Vereniging [NOV]), de plus long terme permettra de confirmer ou d'invalider
définir des listes d'implants recommandés aux chirur- cette attitude.
giens hollandais et accessibles au public [27]. Dans cette attente, fonder son choix sur un implant
fémoral non cimenté en alliage de titane classé ODEP
Conclusion 10A ou 10A* (figure 17.5) met l'opérateur à l'abri d'un
risque d'échec excessif du versant fémoral de l'arthro-
Pour certains, le choix de la voie d'abord prend le plastie, sous réserve de l'indispensable acquisition de
pas et conditionne le type de l'implant fémoral tech- la maîtrise de la technique d'implantation spécifique
niquement le mieux adapté. Or, la majorité des tiges à chacun et du sage respect des indications résiduelles
fémorales non cimentées classées ODEP 10A* et 10A au cimentage en cas de trop mauvaise qualité du stock
ne sont pas implantables par toutes les voies d'abord, osseux fémoral.
162 C. Delaunay

Tableau 17.7
Caractéristiques des six tiges non cimentées labellisées ODEP 10A* selon la classification de Chiron
Tiges ODEP 10A* SF CF SS CS FPF SPF Oval Rect Col
Alloclassic-SL® SF SS FPF Rect

BiContact ®
SF SS FPF Rect

CLS® SF SS FPF ± SPF Rect

Corail ®
SF SS FPF Rect ±

Furlong® SF SS FPF SPF Oval

Versys FMT® SF SS FPF SPF Oval


A* indique un niveau de preuve particulièrement élevé.

Figure 17.5. Les six tiges classées ODEP 10A* (par ordre alphabétique de nom de marque).
. lloclassic-S ®. B. BiCO T CT®. C. C S®. D. Corail®. . Furlong®. F. VerSys®.

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165

Les cupules non cimentées :


une fixation à géométrie variable
P. MASSIN

Introduction son régime de déformation antérieur. L'interface de fixa-


tion, connectant une cupule rigide et non déformable à
La fixation sans ciment des cupules acétabulaires obéit un os déformable, est donc soumise à des contraintes
à certaines règles, notamment celle d'obtenir une sta- de cisaillement, ce qui avait fait dire à Charnley que le
bilité primaire permettant d'attendre sereinement le descellement était inéluctable avec le ciment – « Cement
développement de la fixation secondaire biologique. demarcates radiologically from the bone in about 60 %
La fixation primaire est obtenue par l'effet de press-fit of clinically successful cases » –, d'où la naissance de la
ou d'impaction en force d'une cupule légèrement sur- low friction qui améliorait la tolérance au descellement.
dimensionnée par rapport au site osseux, supposant C'est aussi la justification de la fixation sans ciment. La
une distension de la cavité acétabulaire préparée, en survenue d'un ancrage osseux même limité peut remé-
forme de fer à cheval ouvert sur l'échancrure ischiopu- dier à cet état de chose, car celui-ci est très résistant aux
bienne. L'achèvement d'un ancrage biologique néces- contraintes de cisaillement. Il permet notamment d'utili-
site plusieurs conditions : la stabilité de la cupule, un ser des plus gros diamètres de têtes fémorales (générant
contact étendu de la cupule avec un os vivant avivé, et de plus gros couples de friction) sans risque de mobilisa-
l'achèvement d'une interconnexion de travées osseuses tion secondaire de la cupule.
avec un revêtement poreux. De nombreuses controverses persistent concernant
Dans l'histoire des cupules non cimentées, le dessin le type de surface, le type d'alliage, son épaisseur et
a évolué et s'est uniformisé. Initialement, les cupules la nécessité de fixation adjuvante par des vis addition-
de Judet, puis de Roy Camille avaient une forme cylin- nelles ou des macrostructures de surface. Des variantes
drique et avaient pour inconvénient un sacrifice osseux techniques sont fréquentes, notamment concernant
excessif. Les anneaux vissés jouaient sur l'élasticité de l'importance du fraisage, la correspondance de taille
la cavité cotyloïdienne mais leur position, guidée par entre la cavité osseuse initiale et la cupule implantée.
l'axe du vissage, n'était pas toujours facile à maîtriser. Si la fixation sans ciment, au moins partielle, appa-
La pénétration des spires dans l'os hôte était difficile raît possible dans la grande majorité des cas, ces tech-
à contrôler en fonction des zones concernées (périphé- niques peuvent aboutir à des complications comme des
rie en os sous-chondral ou dôme spongieux) et pouvait malpositions de cupules et/ou des débords métalliques
maintenir la surface réhabitable à distance de l'os hôte avec risque de conflits avec les parties molles. Enfin,
en cas de mauvaise pénétration. De plus, la force de les impératifs de taille peuvent être différents selon les
vissage est difficilement quantifiable, entraînant parfois couples de frottement et le type d'insert utilisés.
une distension exagérée de la cavité osseuse, peut-être On peut schématiser les problèmes en distinguant
source de microfractures. C'est finalement la forme ceux qui sont inhérents à la préparation de la cavité
hémisphérique qui a progressivement fait la quasi- acétabulaire et ceux concernant les limites de la fixa-
unanimité, car pouvant s'inscrire dans la forme sphé- tion sans ciment à discuter en fonction de la qualité
rique de la cavité acétabulaire en assurant un maximum osseuse, et des altérations du site receveur rencontrées
de contact osseux et un minimum de sacrifice osseux. dans la chirurgie des dysplasies et les reprises.
La connaissance du régime des déformations péri- En ce qui concerne la fixation, on pourra discuter
acétabulaires en charge est importante car elle n'obéit la technique d'implantation et essentiellement la pré-
pas aux mêmes lois que celle du fémur. Contrairement paration de la cavité réceptrice : doit-elle ménager un
au versant fémoral, l'os péri-acétabulaire est déformable contact optimal par une adaptation complète entre
en charge et le reste après implantation de la cupule [1]. l'implant et son site receveur (hémisphérisation de
L'implantation engendre initialement des contraintes la cavité acétabulaire) ? Y a-t-il nécessairement une
rigidifiantes qui progressivement vont s'estomper avec la correspondance de taille étroite entre acétabulum et
résilience de l'os spongieux, lui permettant de reprendre cupule ?
La prothèse totale de hanche dans tous ses états
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166 P. Massin

En ce qui concerne les limites de la fixation sans l'importance du stock osseux postérieur, et d'épargner
ciment, la première série de questions concerne l'utili- la frêle paroi antérieure. Elle est sélective et permet de
sation de vis additionnelles : est-elle souhaitable dans respecter un anneau périphérique d'os sous-chondral,
certaines situations d'os fragile ou de cavité osseuse ce qui a le double avantage d'épargner les parois et
altérée ou doit-elle être systématique ? Où ces vis leur os sous-chondral, et de conserver ainsi le caractère
doivent-elles être situées ? L'autre série de questions élastique de l'anneau acétabulaire. Enfin, elle est ana-
consiste à discuter les modalités techniques dans cer- tomique car elle permet le recentrage en réséquant un
taines situations : peut-on modifier la position de la éventuel ostéophyte de l'arrière-fond pour retrouver
cupule pour s'adapter à un défect osseux localisé (apla- la lame quadrilatère bordée en bas par l'échancrure
sie antérieure) ? L'impaction en force est-elle toujours ischiopubienne, qui indique le niveau d'implantation
possible en chirurgie de reprise ? de la cupule.
La technique de la taille acétabulaire a rarement
été décrite précisément (figure 18.1A). Deux ciseaux
Description de la technique incurvés et bien affûtés sont nécessaires, l'un de
d'implantation forme convexe/convexe et l'autre de forme convexe/
concave (figure 18.1B). Le premier est utilisé perpen-
Préparation osseuse diculairement à la paroi postérieure et se redresse,
plus tangentiel, lors de la taille de la paroi antérieure,
La technique de fixation suppose une préparation de nécessairement plus économe. Il est indiqué de résé-
la cavité osseuse réceptrice, dont la forme est le plus quer l'extrémité inférieure de la corne postérieure
souvent modifiée par la pathologie en cause : arthrose pour abaisser le centre biomécanique de l'articulation
ovalisant la cavité, dysplasie d'une paroi antérieure en position anatomique et pour exposer largement le
atrophique, protrusion par usure de l'arrière-fond ou fond de l'échancrure ischiopubienne, cachée par cette
constitutionnelle. Quels que soient les instruments uti- corne surplombante. Ce premier ciseau ne doit pas
lisés (taille aux ciseaux ou fraisage), la logique conduit changer de direction et entailler l'os sous-chondral sur
à rendre sphérique cette cavité réceptrice. Est-ce une quelques millimètres. À la fin de chaque entaille, le
règle intangible ? ciseau doit tenir seul, planté dans l'os sous-chondral.
La préparation à la fraise se fait dans une direction Chaque entaille doit chevaucher la précédente. Le
dictée par la dureté de l'os et par la déformation de second ciseau est introduit dans l'entaille ainsi créée.
la cavité osseuse, qui, rappelons-le, est le plus sou- Cette seconde frappe doit être plus douce en accom-
vent pathologique. La préparation aux ciseaux peut pagnant la courbure du ciseau lors de sa progression
s'avérer utile car elle permet au chirurgien de guider dans l'os spongieux, permettant ainsi l'exposition de
le travail de la fraise qu'il utilisera dans un second la lame quadrilatère de l'arrière-fond et l'extraction
temps. La taille est asymétrique, car elle permet de d'une collerette osseuse correspondant à l'ostéophyte
repositionner la cupule vers l'arrière en profitant de de l'arrière-fond. Parfois, lorsque l'ostéophyte médial

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Figure 18.1.
Le trait en gras illustre le passage du premier ciseau ( ). La radiographie postopératoire (C) montre que le contact au niveau du toit n'est
pas toujours réalisé lorsqu'une cupule de petite taille est mise en place en position recentrée (B).
Les cupules non cimentées : une fixation à géométrie variable 167

obture complètement l'arrière-fond, il n'y a plus de bon indice de la taille de cupule définitive. Plus petite,
repère pour la profondeur de la taille. Il faut donc la cupule pourra s'inscrire dans la cavité préparée en
progresser un peu à l'aveugle, ce qui nécessite une étant complètement incluse dans l'acétabulum osseux,
bonne expérience pour ne pas être trop gourmand, ce sans débord, notamment antérieur. Le contact avec le
qui peut provoquer une perforation de l'arrière-fond toit est alors inconstant, avec la persistance d'un vide
(figure 18.2), ou à l'inverse trop craintif, conduisant supérieur en général limité, mais qui ne nuit aucune-
à une excentration de la cupule. In fine, c'est l'expo- ment à la stabilité de la cupule (figure 18.1C).
sition des restes du ligament rond qui était emmuré D'autres chirurgiens n'appliquent pas la technique
par l'arthrose qui témoigne de la bonne profondeur de la taille aux ciseaux et, par commodité, préparent
de creusement. Le détachement de la collerette ostéo- directement l'acétabulum avec les fraises. On peut
phytique doit se faire patiemment après un travail cir- effectivement commencer avec une petite fraise de 42
conférentiel et survient au dernier moment par un léger ou 44 pour effacer l'arrière-fond en prenant garde de
mouvement de levier imprimé au ciseau. Là encore, l'attirer vers l'arrière et de fraiser verticalement pour
une pression trop importante ou trop précoce après ne pas ascensionner le logement de la future cupule.
une taille incomplète peut provoquer une fracture Puis on effectue le calibrage avec des fraises de taille
d'une paroi, compromettant définitivement l'impac- croissante jusqu'à venir au contact des parois. Enfin,
tion en force. La précision de cette taille repose donc d'autres désireront à tout prix obtenir une cavité
sur l'expérience de l'opérateur et la qualité de l'affûtage sphérique en utilisant d'emblée des fraises venant au
des ciseaux, qui doit donc être vérifiée au préalable. contact des parois.
La taille aux ciseaux permet la préparation d'une Le danger est l'excès de fraisage en cherchant à
cavité sphérique recentrée plus petite que la cavité acé- rendre sphérique à tout prix la cavité osseuse. Ce n'est
tabulaire initiale, dans laquelle s'inscrira une fraise de finalement pas souhaitable ni utile, car on affaiblit
petite taille. Cette fraise n'a pas de rôle de creusement ainsi les parois qui vont jouer un rôle déterminant
ni d'avivement, puisque tout cela a déjà été accompli dans l'impaction en force et qui doivent pouvoir exer-
au ciseau, mais uniquement un rôle de calibrage. On cer une rétention en se refermant sur la cupule une fois
peut augmenter progressivement la taille de la fraise impactée (snap fit). Si l'on cherche à rendre sphérique
jusqu'au moment où elle commence à attaquer les à tout prix une cavité ovale, on agrandit le diamètre
parois antérieure et postérieure. La fraise, par sa taille, antéropostérieur qui devient supérieur à la profondeur
remplit alors la cavité acétabulaire dans sa dimension de la cavité osseuse native. Une partie de la circon-
antéropostérieure qui se rapproche de celle de l'acé- férence de la cupule sera donc extruse, ce qui peut
tabulum natif. La taille de la cupule ainsi déterminée remettre en cause la qualité du blocage équatorial.
peut apparaître inférieure à celle de la tête fémorale Finalement, la cavité osseuse préparée est donc
qui a été extraite et qui n'est finalement pas un très idéalement constituée de deux zones : l'une est
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Figure 18.2.
. Radiographie préopératoire d'une patiente de 63 ans montrant une coxarthrose sévère et une excentration de la tête fémorale plus
prononcée à droite. Une arthroplastie totale de hanche bilatérale a été pratiquée par voie postérieure avec implantation de cupules sans
ciment supportant un insert céramique. B. Résultat à 7 ans montrant la parfaite stabilité des cupules. La fonction est normale et cotée
à 18 des deux côtés.
168 P. Massin

périphérique, caractérisée par la persistance d'une col- rentiellement l'ancrage osseux. La résonance à l'im-
lerette d'os sous-chondral. Elle assure le maintien initial paction de la cupule prend alors une tonalité un peu
de la cupule et prévient sa migration supérieure. L'autre plus mate, témoignant de l'arrivée à quai du dôme
zone est centrale, là où l'os spongieux biologique le plus contre l'os. On peut aussi palper l'os au travers des
actif a été exposé par la préparation ; elle assurera l'an- orifices de vis s'il y en a et apprécier l'existence d'un
crage osseux au niveau du dôme de la cupule, si tant est espace résiduel. Dans les cupules double mobilité,
qu'un contact ait été obtenu à ce niveau. non ajourées, c'est plus difficile et il faut s'assurer de
l'existence d'un contact entre le rebord inférieur de
Choix de la cupule la cupule et l'os au niveau de l'échancrure ischiopu-
bienne. L'existence de macrostructures au niveau du
Comment déterminer la taille de la cupule par rapport dôme ou de plots peut gêner l'application complète
à celle de la dernière fraise utilisée ? Une différence du dôme de la cupule contre l'os car elles sont situées
de diamètre de 2 mm est en général respectée pour dans des zones d'os de densité variable. La qualité de
assurer l'impaction en force. De nombreuses cupules cette impaction peut d'ailleurs être prise en défaut
sont dessinées avec une surépaisseur circonférentielle dans des os très durs et scléreux, où un surfraisage
assurant la dilatation périphérique de l'anneau acé- d'une taille peut être nécessaire, parfois après une pre-
tabulaire. Cette différence de diamètre représente un mière tentative d'insertion infructueuse de la cupule.
certain pourcentage de la circonférence de la cupule, Une impaction incomplète avec persistance d'un
déterminant la force de l'impaction. Le fabricant espace de plus de 1 mm entre le dôme de la cupule et
indiquera la taille de la cupule par rapport au dia- l'os spongieux peut conduire au développement d'une
mètre du dôme, qui correspond alors à celui de la interposition fibreuse, car la repousse osseuse a une
fraise, le press-fit étant automatiquement généré par capacité limitée de comblement des vides résiduels
la surépaisseur périphérique. D'autres fabricants (osteoblastic jumping distance de Harris).
indiquent le diamètre de la cupule à sa périphérie. À l'inverse, la stabilisation de la cupule peut sembler
Il faut donc utiliser une cupule de taille supérieure précaire en fin d'impaction. La sensation de blocage
à celle de la dernière fraise utilisée. Les correspon- immédiat ne s'est pas produite, surtout si quelques
dances de taille varient ainsi d'un fabricant à l'autre. millimètres de périphérie de cupule restent non inclus.
Il faut donc connaître le matériel et le marquage spé- Il faut savoir reprendre la préparation avec une fraise
cifique du fabricant. plus petite pour approfondir la cavité osseuse et per-
On comprend que ce pourcentage de circonférence mettre une meilleure pénétration du dôme de la cupule,
soit variable selon la taille de la cupule. Ainsi, une quitte à provoquer une légère protrusion supplémen-
surépaisseur de 2 mm représente un pourcentage plus taire de 1 à 2 mm, suffisante pour obtenir le blocage
important de la circonférence pour une cupule de 46 périphérique. C'est donc une technique très sensible
(4 %), comparativement à une cupule de 64 (3 %). qui ne peut être maîtrisée constamment qu'après une
Obtenir la même quantité de press-fit au-delà de phase d'apprentissage.
60 mm de circonférence nécessiterait une différence de Finalement, le rebord inférieur de la cupule affleure
diamètre de 3 mm au lieu de 2. Cette considération idéalement l'échancrure ischiopubienne. Ce repère per-
peut être prise en compte dans la chirurgie de reprise, met de vérifier le bon recentrage de la cupule et le degré
où sont utilisées plus particulièrement des cupules de d'antéversion de la cupule par rapport à l'acétabu-

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grandes tailles. lum. Les rebords inférieurs des deux structures métal-
À la fin de la préparation osseuse, il est intéres- lique et osseuse devraient être parallèles (figure 18.2).
sant d'utiliser des fantômes de cupule ajourés, ceux- L'affleurement du rebord intérieur de la cupule indique
ci devant se bloquer au niveau de leur périphérie, l'inclinaison en fonction des repères observés au pré-
ménageant un espace au niveau de leur dôme, que alable sur le calque. Comme avec le ciment, il n'est
l'on pourrait qualifier de chambre d'impaction. Un pas rare que la cupule finalement implantée ait une
fantôme s'inscrivant immédiatement sans impaction taille inférieure à celle de la tête native, ce qui conduit
dans le fond de l'acétabulum ne peut pas se fixer par à médialiser le centre biomécanique de l'articulation si
un press-fit périphérique. Idéalement, la profondeur la cupule a bien été recentrée au contact de l'arrière-
de cette chambre d'impaction est de quelques milli- fond. Cette médialisation de quelques millimètres est
mètres. Lors de l'implantation de la cupule définitive, favorable à la balance de Pauwells en induisant en
l'impaction doit amener le dôme au contact de l'ar- quelque sorte un effet « Chiari ». Mais il faut mainte-
rière-fond acétabulaire. Ce contact est très important nir ou légèrement augmenter la latéralisation de la tige
parce que c'est à cet endroit que se constitue préfé- pour conserver le bras de levier des muscles fessiers.
Les cupules non cimentées : une fixation à géométrie variable 169

Quelles sont les limites ont observé plus de difficulté pour obtenir une impac-
tion en force satisfaisante chez les patientes à faible
de la technique ? niveau d'activité, et lorsque la cupule était placée en
position haute non anatomique. Ils ont observé que,
Chirurgie de première intention dans ces cas précis, l'utilisation de vis additionnelles
Le creusement au ciseau est adapté en chirurgie de avait été jugée nécessaire pour assurer la stabilité de
première intention à chaque fois qu'il existe un ostéo- la cupule. En revanche, la survie des cupules avec vis
phyte de l'arrière-fond. Le risque est la perforation de était la même que celle des cupules sans vis. Ainsi, l'uti-
l'arrière-fond, en l'absence d'ostéophyte, notamment lisation de vis additionnelles reste controversée dans
dans les coxarthroses protrusives, où l'avivement peut la chirurgie de première intention, sous réserve d'une
être directement effectué à la fraise. bonne technique d'implantation, ne lésant pas le site
L'impaction de la cupule sans ciment sur os fragile osseux. Elle peut servir de rattrapage en cas de press-fit
peut provoquer une fracture de l'arrière-fond, pou- insuffisant, notamment en cas de fracture d'une paroi
vant compromettre la stabilité primaire de la cupule ou de l'arrière-fond provoquée par une préparation
(figure 18.3). On peut alors observer une protrusion lors trop agressive, ou survenue lors de l'impaction de la
de la mise en charge. Parfois, la cupule se stabilise si les cupule. Plusieurs vis sont alors nécessaires [4].
parois sont suffisamment résistantes. Dans d'autres cas, Dans les hanches dysplasiques, une paroi antérieure
la migration de la cupule peut continuer, surtout si une mal développée peut compromettre la couverture de la
fracture des parois est associée. La reprise de la cupule cupule et sa tenue. Antéverser la cupule pour éviter le
est alors nécessaire avec mise en place d'une cage anti- débord antérieur n'est pas la bonne solution. Il est pré-
protrusion dans laquelle est cimentée une autre cupule. férable de recentrer la cupule vers l'arrière en orientant
Néanmoins, les résultats de l'implantation des la taille vers l'arrière aux dépens de l'épaisse colonne
cupules sans ciment n'apparaissent globalement pas postérieure et en majorant la protrusion de la cupule
compromis par la fragilité osseuse, notamment dans (sans dépasser la table médiale de la lame quadrilatère)
certaines étiologies comme la polyarthrite rhuma- (figure 18.4). Dans ces cas difficiles, le danger est, là
toïde, si l'on en croit la revue systématique de littéra- encore, l'excès de fraisage, qui ne permet pas de faire
ture faite par Zwartele et al. [2]. Garcia-Rey et al. [3] marche arrière. Si la paroi antérieure est affaiblie par
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Figure 18.3. Complication de la taille aux ciseaux.


–C. Chez cette patiente de 53 ans opérée d'une coxarthrose banale, l'ablation de l'ostéophyte médial a emmené l'arrière-fond avec
l'échancrure ischiopubienne. Le fragment a été laissé en place et a été impacté par la cupule. La cupule initialement en position anato-
mique a migré et s'est horizontalisée précocement pendant le premier mois. Mais il n'y a pas eu de migration secondaire entre le 1er et
le 13e mois. La patiente a une bonne fonction. Le suivi ultérieur permettra d'évaluer la stabilité de la fixation biologique.
170 P. Massin

Figure 18.4.
. Radiographie préopératoire d'une patiente de 41 ans avec une sévère coxarthrose enraidissante sur dysplasie de hanche bilatérale,
déjà opérée par butée et ostéotomie de varisation fémorale. Un remplacement prothétique bilatéral de hanche a pu être effectué par
voie postérieure avec implantation de cupules sans ciment supportant un insert céramique. B. Résultat à 9 ans avec une excellente
fonction (score PM à 17 des deux côtés). Les cupules sont stables et apparaissent ostéo-intégrées.

une fraise de trop grosse taille, l'impaction en force moyen, Sternheim et al. [7] rapportaient un taux d'échec
devient impossible et il faut alors changer son fusil mécanique de 7,5 % des cupules utilisées avec moins de
d'épaule et envisager une cupule cimentée. 50 % de contact avec l'os hôte contre 0 % d'échec si le
contact était supérieur à 50 %. Une fixation stable peut
ainsi être obtenue par un geste chirurgical simplifié, sans
Chirurgie de reprise nécessité de reconstruction par allogreffe. L'utilisation
de vis apparaît justifiée. Elle ne doit pas gêner l'impac-
En chirurgie de révision, l'utilisation de cupules sans
tion de la cupule et le contact entre le dôme et l'os hôte.
ciment est plus difficile mais reste possible. La trophi-
C'est pour cela que les vis sont au mieux introduites
cité de l'os est nécessairement altérée par la chirurgie
et vissées en compression par la concavité de la cupule
antérieure et le descellement. Cette dégradation du site
après l'impaction, en position intracotyloïdienne. Leur
osseux est de nature à compromettre à la fois la stabilité
mise en place doit être prudente car elle comporte un
primaire de la cupule et l'ancrage biologique. La cavité
risque de blessure des vaisseaux endopelviens par la
réceptrice est de taille supérieure à celle d'une chirurgie
mèche de forage et le mesureur.
de première intention, conduisant à l'emploi de cupules
de plus grand diamètre. Le problème est d'une part Enfin, l'utilisation de cupules recouvertes de surface
très poreuse, comme le trabecular metal, semble amé-
d'assurer leur stabilité primaire et d'autre part d'obte-
liorer la qualité de la fixation biologique et diminuer le

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nir un ancrage biologique stable. La classification de
nombre d'échecs à long terme, et apparaît donc particu-
Paprosky des dégâts osseux [5] est directement corré-
lièrement indiquée dans la chirurgie de révision. Sur une
lée à la possibilité de l'emploi de cupules sans ciment.
large série de révisions cotyloïdiennes par cupules sans
Elle montre qu'un défect segmentaire de l'arrière-fond
ciment, Kremers et al. [8] ont constaté que l'utilisation
n'interdit pas l'utilisation d'une cupule sans ciment si
de surfaces hautement poreuses diminuait par quatre la
la qualité des parois et de l'anneau acétabulaire reste
probabilité d'une reprise pour descellement aseptique.
bonne, c'est-à-dire sans défect segmentaire. L'intégrité
de l'échancrure ischiopubienne est également un point
important, pour maintenir l'inclinaison de la cupule et
empêcher son horizontalisation progressive. Il est fré-
Discussion
quent d'implanter la cupule avec un certain degré de
protrusion de façon à éviter les débords périphériques
Résultats
source de conflit avec les parties molles [6] (figure 18.5). La technique d'implantation des cupules sans ciment
La règle est de d'assurer un contact minimal de 50 % de hémisphériques est précise, difficile et rarement
la surface de la cupule avec l'os hôte. Avec 6 ans de recul enseignée, tout au moins dans ses détails. Bien exécu-
Les cupules non cimentées : une fixation à géométrie variable 171

Figure 18.5. Cas de chirurgie de révision avec des cupules sans ciment de grand diamètre.
. Radiographie d'une patiente de 41 ans souffrant d'une polyarthrite chronique juvénile opérée il y a 10 ans par arthroplastie totale de
hanche avec couple acier inoxydable/polyéthylène. Un descellement cotyloïdien asymptomatique s'est manifesté du côté droit puis du
côté gauche. B. La reprise a été effectuée des deux côtés en utilisant des grosses cupules sans ciment supportant un insert céramique,
implantées avec un certain degré de protrusion. À droite, le diamètre de la cupule est de 58 mm. Le recul est de 7 ans. À gauche, la cupule
a un diamètre de 64 mm et a été fixée par 2 vis additionnelles. Le recul est de 2 ans et demi. Le résultat est excellent avec des cotations
PM à 17 des deux côtés et des cupules radiographiquement stables.

tée, elle permet d'obtenir des résultats pratiquement


constants, fiables à long terme, comparables à ceux de
Cas particuliers
la fixation cimentée [9, 10]. Limites mécaniques de l'impaction
Stefl et al. [11] ont pu comparer à 20 ans deux en force
séries de cupules cimentées et non cimentées du même
opérateur. Le taux de descellements d'origine méca- Dans les situations extrêmes, parfois accidentelles
nique pour les cupules sans ciment était de 0,8 %. (fracture peropératoire), où la stabilité primaire
En revanche, le taux de complications mécaniques de la cupule apparaît insuffisante, on peut encore
reprises ou non pour les cupules cimentées était de repousser les limites des indications en utilisant des
14 %. Gerdesmeyer et al. [9] rapportaient un taux de vis de fixation additionnelles. Leur meilleure utilisa-
survie à 19 ans de 82,3 % chez des patients de moins tion consiste à les visser en compression au travers
de 65 ans. Kawamura et al. [10] rapportaient un taux d'orifices situés dans le dôme de la cupule, de façon
de survie à presque 25 ans de 90,3 %, les échecs de à optimiser le contact du dôme avec l'os de l'arrière-
fixation de la cupule étant liés à l'ostéolyse, et non à fond. Les macrostructures situées sur la convexité du
dôme, les ailerons ou rebords métalliques connectés
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des échecs mécaniques. Le pourcentage de la cupule


réhabitée par l'os est assez difficile à calculer car les à la périphérie de la cupule sont certainement suscep-
lisérés sont mal visibles sur la radiographie en deux tibles d'améliorer la stabilité primaire, mais risquent
dimensions. Il est possible que les surfaces poreuses en de compromettre l'ancrage biologique sur le som-
tantale contribuent à majorer la proportion de surface met du dôme car ils gênent l'impaction. La pénétra-
réhabitée [12]. Quoi qu'il en soit, la technique d'im- tion des macrostructures dans l'os est difficilement
plantation est finalement assez univoque. La technique contrôlable. Elle peut être incomplète, l'os de la
ici décrite a l'avantage d'assurer une bonne stabilité cavité acétabulaire ayant une dureté variable, diffi-
primaire, donc d'offrir les meilleures conditions pour cilement prédictible selon les localisations. Un espace
l'ancrage biologique osseux à condition que le dôme peut persister entre le dôme et l'os hôte, non visible
de la cupule soit recouvert d'une surface réhabitable et de l'intérieur de la cupule lorsqu'elle n'est pas ajou-
au contact avec l'os hôte. Cette forme de cupule faci- rée. Cet espace peut se remplir de tissu fibreux, moins
lite l'adaptation à la cavité osseuse réceptrice, permet résistant aux contraintes de cisaillement, et permettre
l'économie du stock osseux et un recentrage anato- aussi le cheminement des particules d'usure le long de
mique du centre biomécanique de l'articulation [13]. l'interface de fixation.
172 P. Massin

Indications particulières cipal de ces cupules métalliques est en fait de permettre


l'utilisation de nouveaux couples ou de nouveaux
En dehors de l'arthrose classique, la technique mécanismes, non (ou plus difficilement) compatibles
d'implantation reste possible avec des adaptations avec la fixation cimentée : les couples dur/dur avec
techniques à presque toutes les formes de dysplasie et des têtes fémorales de plus gros diamètre, représentés
à toutes les qualités d'os. Elle a aussi acquis de larges actuellement essentiellement par le couple céramique/
indications dans la chirurgie de révision acétabulaire, céramique ou la double mobilité. Dans le premier cas,
par l'emploi de grosses cupules encore appelées jumbo la cupule peut être conçue avec des orifices pour des
(soit plus de 62 mm de diamètre chez la femme et vis de fixation additionnelles, car l'insert en céramique
plus de 66 mm de diamètre chez l'homme) [14], uti- ne risque pas de subir un fluage dans les trous de vis
lisables jusque dans les stades de destruction 3a ou en raison de sa dureté. L'absence ou la très petite
b de Paprosky [5]. Von Roth et al. [15] rapportaient quantité de débris d'usure produits par ce couple éli-
un taux de survie mécanique à 20 ans de 88 % avec mine le risque d'ostéolyse en regard des trous de vis.
ces cupules fixées avec des vis additionnelles de fixa- Pour Schmalzried et al. [18], ce risque reste d'ailleurs
tion intracotyloïdiennes. Dans les cas plus complexes, très théorique. En revanche, avec la double mobilité,
une reconstruction classique peut être effectuée sur le dessin intérieur de la cupule doit être parfaitement
anneau de renforcement dans lequel on cimente une lisse, sans aspérité, pour ne pas abraser la convexité de
cupule en polyéthylène ou métallique (à double mobi- l'insert mobile. La stabilité primaire de la cupule doit
lité). L'alternative réside peut-être dans l'utilisation de alors reposer uniquement sur son dessin avec une tech-
ces grosses cupules à très hautes rugosité et porosité nique de pose adéquate, car l'utilisation de vis addi-
comme dans le cas du trabecular metal. tionnelles intracotyloïdiennes n'est pas possible. Des
cupules de révision avec des pattes, crochets extraco-
Résultats en fonction tyloïdiens, ont été proposées [19], et avaient l'intérêt
de la métallurgie d'améliorer et de prolonger la stabilité primaire des
cupules de première génération qui n'étaient pas tou-
La quasi-totalité de ces cupules sans ciment sont com- jours recouvertes de surface poreuse. Mais dans de
posées de titane, à l'exception de celles qui reçoivent nombreux cas de révision, le dessin de la cupule de
un insert mobile dans le cadre de la double mobi- première intention suffit pour assurer une stabilité suf-
lité. Les compatibilités tribologiques du polyéthylène fisante au moins à moyen terme [20].
nécessitent alors l'utilisation de cupules composées
soit d'acier inoxydable, soit de chrome-cobalt. Quel
que soit l'alliage, sa rigidité est bien supérieure à celle Difficultés d'extraction
d'une cupule en polyéthylène. Les conséquences sur
le remodelage osseux sont réduites, en tout cas bien Le principal inconvénient de cupules sans ciment
inférieures à celles observées au niveau fémoral. La bien fixées est la difficulté de leur extraction en cas
rigidité de la cupule ne semble pas être un paramètre de besoin (malposition, infection), si l'on ne pos-
déterminant dans la réussite de la fixation biolo- sède pas les instruments et la technique adéquats. En
gique. Des bons résultats à long terme sont obtenus dehors des reprises précoces avant la constitution de
aussi avec des cupules élastiques de type Atlas®. Lee l'ancrage osseux, des couteaux rotatifs spécifiques de

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et al. [16] en rapportaient les résultats à long terme, taille adaptée à celle de la cupule sont nécessaires. On
avec un taux de survie à 10 ans de 99,4 % si l'on se peut aussi s'aider de ciseaux courbes. Il est très impor-
fonde sur le nombre de révisions pour descellement tant de libérer le dôme en regard de la paroi antérieure
aseptique. et de l'arrière-fond avant d'effectuer toute tentative
d'extraction, sous peine d'emmener avec la cupule
ces parties fines et fragiles de la cavité acétabulaire.
Utilisation en fonction du couple Bien entendu, cette technique est d'autant plus facile
de frottement qu'il n'y a pas de macrostructures ou de vis gênant
le passage de la lame. En l'absence d'ostéolyse, une
L'utilisation de ces cupules sans ciment nécessite la extraction atraumatique permet d'éviter de majorer les
compréhension des phénomènes tribologiques car dégâts osseux, et d'obtenir une cavité bien sphérique,
l'utilisation d'une coque métallique réduit nécessaire- continente, d'une taille supérieure à celle de la cupule
ment l'épaisseur de l'insert en polyéthylène. Avec des extraite. La réimplantation d'une cupule sphérique
polyéthylènes conventionnels nécessairement moins de taille immédiatement supérieure est alors souvent
épais, les taux d'usure augmentent [17]. L'intérêt prin- possible.
Les cupules non cimentées : une fixation à géométrie variable 173

Conclusion des cupules cimentées, si tant est qu'elles soient recou-


vertes de surface poreuse réhabitable. L'utilisation
La fixation des prothèses cotyloïdiennes n'est fina- des cupules de grand diamètre permet de simplifier
lement pas à géométrie variable. Aucun impératif de la chirurgie de révision sans reconstruction par allo-
fixation ne justifie de sacrifier les termes du contrat greffe, ni anneaux de soutien. C'est probablement
mécanique, qui est de reconstruire une hanche stable dans ces situations de reprise que les vis de fixation
avec un centre biomécanique en position anatomique. additionnelle apparaissent justifiées, bien que pas
Sous réserve d'une bonne technique, des cupules toujours indispensables. L'intérêt de ces cupules sans
hémisphériques sans ciment remplissent ce contrat et ciment est en outre d'avoir ouvert la porte à de nou-
peuvent être fixées durablement dans la cavité acéta- velles voies tribologiques avantageuses, qui étaient peu
bulaire, avec des survies au moins équivalentes à celles compatibles avec la fixation cimentée.

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175

Passé, présent et futur


des interfaces prothétiques
de hanche sans ciment
J.-A. EPINETTE

Introduction En 1956, Siwash, un chirurgien soviétique, a mis au


point en URSS la première prothèse totale de hanche
La fixation d'un implant prothétique demeure la clé de (PTH) à ancrage direct tant pour la tige que pour le
voûte de sa longévité et de ses performances. Durant cotyle. Elle a été implantée pour la première fois en 1956
des décennies, les chirurgiens orthopédistes de tous mais le concept, élaboré en URSS, est passé inaperçu.
bords se sont rangés en ordre de bataille sous la ban- Ce n'est que plus de 15 ans plus tard que les travaux
nière « ciment » versus « sans ciment »… Nous n'en en France des frères Judet (1971), puis de Lord (1974),
sommes plus là, et la fameuse (et fumeuse) « maladie du d'Engh aux États-Unis (1977) ou encore de Zweimüller
ciment » n'est qu'un lointain souvenir. Chacun recon- en Autriche (1979) ont permis une avancée significa-
naît désormais les excellents résultats à long terme tive du concept de prothèse de hanche sans ciment.
de l'une et l'autre de ces options, même si le « sans La prothèse de Robert et Jean Judet était une pro-
ciment » compte depuis les deux dernières décennies thèse à ancrage direct. Ils ont donné à l'alliage à base
de plus en plus d'adeptes à l'échelle mondiale. de cobalt de cette prothèse le nom de porométal parce
Il n'est pas possible d'aborder ce chapitre sans évo- que les billes qui le recouvrent sont séparées par des
quer, dans l'historique complexe et parfois tumultueux pores. Ils ont implanté 1611 prothèses en porométal
du « sans ciment », ce qui constitue le principal acteur jusqu'en 1975, mais de nombreux échecs sont surve-
de cette option, à savoir les revêtements phosphocal- nus, dus aux mauvaises qualités mécaniques et métal-
ciques, avec au premier rang l'hydroxyapatite de cal- lurgiques de ces implants.
cium (HA) qui comptabilise 30 années d'excellents À leur suite, Gérald Lord a proposé, en 1974, sa
résultats cliniques. De façon parallèle, il nous a été prothèse « madréporique » qui ressemble au corail
donné d'assister au renouveau des anciens revêtements vivant : le madrépore. Sa surface est composée de billes
poreux dans une version nouvelle de type « ultrapo- de 1 mm. Malheureusement, cette tige présentait plu-
reux », sans revêtement « bioactif » spécifique, sous la sieurs inconvénients : difficultés d'extraction majeures
forme de nouveaux substrats métalliques de tantale ou et mauvaise adaptation à long terme de l'os à la pro-
de titane en structures tridimensionnelles, cette évolu- thèse, avec parfois une résorption osseuse autour de la
tion ayant été initiée par des avancées technologiques tige. Ces problèmes ont alors jeté un certain discrédit
permettant de reproduire presque à l'identique la struc- sur la fixation sans ciment.
ture trabéculaire de l'os hôte. En dernier lieu, ce survol Aux États-Unis, l'utilisation du ciment acrylique en
du passé, du présent et de l'avenir des prothèses sans chirurgie a été interdite jusqu'en 1967, puis elle est
ciment se devait d'évoquer le développement des procé- devenue obligatoire à partir de 1972. C'est en 1969 que
dés « additifs » de fabrication en 3D, lesquels vont sans Welsch a entrepris un travail de recherche considérable
aucun doute révolutionner l'avenir des prothèses non sur la fixation sans ciment, et en 1971 est né un revê-
cimentées, à l'ère numérique qui est désormais la nôtre. tement métallique poreux. En 1977, Engh a commencé
à utiliser ce « porous-coat » pour la tige fémorale de ses
Les prothèses sans ciment, une prothèses. Deux ans plus tard, en 1979, Zweimüller a
présenté à Vienne une prothèse fémorale dont la parti-
histoire complexe et passionnante cularité est sa forme pyramidale à section rectangulaire.
Les implants dits « sans ciment » ou « non cimentés » Le principe de fixation était l'autoblocage cortical. La
ont un historique singulier marqué par des évolutions tige en titane présentait une rugosité de 3 à 5 microns,
majeures. ce qui améliorait sa fixation primaire sur l'os.

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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176 J.-A. Epin tt

Dans la seconde moitié des années 1980, quelques rôle de l'« encre » traditionnelle. La caractéristique
orthopédistes, déçus par les prothèses sans ciment, fondamentale de ces implants de toute dernière géné-
sont revenus à la fixation cimentée tandis que d'autres ration est d'offrir un revêtement ultraporeux « dans
ont continué à chercher une solution aux différents la masse » et non plus en projection de type torche à
problèmes posés par la fixation biologique. Dès 1986, plasma, ce qui les rend moins résistants. Ils permettent
l'introduction en France du revêtement d'hydroxya- de reproduire toute caractéristique de surface, et
patite (HA) constitua une étape décisive dans la fixa- potentiellement, dans l'avenir, ils seront moins coû-
tion biologique des implants, avec aujourd'hui un teux que les procédés traditionnels.
bilan particulièrement favorable après trois décennies
d'utilisation de ce revêtement «  bio-conducteurs ». Les composés phosphocalciques
L'hydroxyapatite de calcium garde encore à l'heure
actuelle une position dominante malgré de multiples Ces composés phosphocalciques en tant que revête-
essais de différents autres composés phosphocalciques ment des prothèses articulaires ont pu être, durant de
ou d'autres surfaces bioconductives de type bioverres. nombreuses années, considérés comme une mode pas-
Les revêtements poreux de première génération sagère, à une époque où un certain discrédit touchait
de type billes de cobalt-chrome, fibres de titane les implants dits « non cimentés » lisses ou poreux.
(fibermesh), macrostructures de titane, ou apposition Cette « famille » de composés phosphocalciques se
par torche à plasma de titane sur un substrat métal- caractérise par leur capacité à libérer de façon plus
lique ont montré leurs limites pour la génération d'une ou moins rapide les composants ioniques de leur
apposition d'os néoformé au contact du métal pro- revêtement ; cette « sursaturation » en ions calcium
thétique (bone-ongrowth), notamment dans les cas de et phosphate au voisinage de l'implant va générer
première intention complexes ou les révisions prothé- une augmentation de la bioactivité et une véritable
tiques avec défects osseux. ostéoconduction, conduisant à la fixation biologique
Des procédés alternatifs à un revêtement d'HA se du substrat métallique sous-jacent. Toutefois, plus la
sont donc, durant la dernière décennie, développés résorption est précoce et la bioactivité accrue, plus
en parallèle, permis par les progrès technologiques, l'élimination du revêtement sera elle aussi précoce,
sous la forme de ce que l'on peut appeler les revête- susceptible de limiter la fixation mécanique de l'im-
ments « ultraporeux » (highly porous metal [HPM]), plant avant que la fixation biologique n'ait pu prendre
qui favorisent les propriétés bioconductives de certains le relais. C'est la recherche d'un compromis optimal à
métaux, notamment le tantale ou le titane. La struc- ce niveau qui a guidé les différentes tentatives de com-
ture « ouverte » de ces HPM, comportant un volume position de ces revêtements phosphocalciques.
optimal de porosité, un faible module d'élasticité et Ainsi, aux côtés de l'HA, des essais de fluorapatite,
une très grande capacité d'accrochage sur les sur- comprenant des ions fluorés, ont démontré une résorp-
faces osseuses, offre des possibilités idéales pour une tion très lente, mais une bioactivité moindre. Plus tard,
meilleure ostéo-intégration, non plus en ongrowth, le tricalcium-phosphate (TCP), qui possède une excel-
mais désormais en ingrowth, avec une fixation bio- lente bioactivité, mais se résorbe trop rapidement pour
logique renforcée par la pénétration en profondeur une fixation pérenne, n'a pas pu être utilisé en tant que
de structures osseuses néoformées. En fait, ces struc- revêtement prothétique. Un essai de composition mixte
tures ultraporeuses parviennent à reproduire presque HA-TCP dans les années 1990 a cherché à tirer profit

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à l'identique la structure osseuse native, gage d'une de la bioactivité accrue du TCP en surface, la couche
parfaite stabilité à très long terme, particulièrement d'HA sous-jacente ayant ensuite une action prolongée et
indispensable sur le versant acétabulaire, surtout dans procurant ainsi une fixation optimisée. Le caractère com-
les révisions prothétiques. Si le Trabecular Metal™ en plexe de ce revêtement « sandwich » et l'absence de gain
tantale a été pionnier dans cette technologie nouvelle significatif n'ont pas permis à ce revêtement HA-TCP de
et a des résultats cliniques probants à moyen terme, supplanter le simple revêtement d'HA.
plusieurs autres revêtements ont été successivement Les constituants de l'interface « sans ciment » ne résu-
mis sur le marché, et notamment le Tritanium®, le ment pas ses propriétés et il faut tenir compte à la fois
Regenerex®, le Stiktite® et le Gription®, tous quatre du type et de la rugosité du substrat métallique sous-
fixés sur un substrat métallique de titane. jacent, ainsi que du mode d'application du revêtement.
Une dernière et récente avancée technologique a été Concernant le dépôt du composé phosphocalcique, il
permise par le succès des procédés de fabrication addi- s'agit classiquement d'un dépôt « à chaud » par torche
tive selon le principe désormais familier des « impri- à plasma sous vide ou gaz rare, mais d'autres procé-
mantes 3D », en particulier pour les revêtements des dures sont possibles, notamment le dépôt électrochi-
cupules acétabulaires, la poudre de titane jouant le mique : c'est le cas de la périapatite (hydroxyapatite
assé, présent et futur des interfaces prothétiques de hanche sans ciment 177

de calcium classique) ou plus récemment du dicalcium globale « sans ciment » demeure la règle pour désigner
phosphate dihydraté (DCPD), encore appelé brushite. à la fois les implants revêtus d'HA et les implants en
Ces modes d'application procurent d'autres propriétés métal poreux. Cela confirme bien le rôle généralement
intéressantes dans certaines indications et constituent mal défini de ce revêtement phosphocalcique et son
une alternative intéressante par rapport au classique incapacité au fil des ans à exister en tant que « famille »
revêtement par torche à plasma. distincte. Il s'agit pourtant d'un mode spécifique de
fixation osseuse dite « biologique » en relais de la fixa-
tion mécanique obtenue en peropératoire, grâce à une
Hydroxyapatite (HA) : bilan adhésion biactive de l'os au substrat, rendue possible
de 30 années d'expérience clinique par les propriétés ostéoconductives de l'HA.
De nombreuses études histologiques [2–5] ont
L'HA s'est imposé comme le chef de file de ces interfaces prouvé cette ostéo-adhésion intime au revêtement HA,
« bioconductives » à partir des premiers travaux d'Os- avec absence de toute néoformation fibreuse entre os
borne et Furlong dès 1981, sur la base à la fois des don- et implant métallique. Ces études expérimentales ont
nées histologiques [1–5], de l'expérimentation animale pu être confirmées par les tests d'implantation canine
[6], et des différentes séries cliniques [7], permettant de comparatifs entre implants revêtus et non revêtus, rap-
confirmer la réalité d'une ostéo-apposition intime entre portés par Geesink [6].
os et implant. Celle-ci est le fait des propriétés ostéo- Les implantations chez l'homme ont débuté en
conductives de ce composé phosphocalcique, ainsi que 1985 et les données internationales tant expérimen-
du compromis optimal entre bioactivité et stabilité de ce tales que cliniques ont pu être colligées en 1994 dans
revêtement. Entre fixation par ciment acrylique et « sans une monographie de la SOFCOT [9]. Un ouvrage plus
ciment » par le biais d'un métal poreux, nous avions récent, en 2004 [10], a permis de colliger l'expérience
ainsi pu évoquer dès 1994, dans une monographie de mondiale des implants revêtus d'HA à 15 années
la Société française de chirurgie orthopédique et trau- de recul clinique. Tous les auteurs rapportaient les
matologique (SOFCOT), la notion de « HA : troisième mêmes excellents résultats, tant en chirurgie primaire
voie » [8]. Ce fut le premier ouvrage européen dédié aux qu'en révision, avec notamment pour les tiges revê-
données scientifiques relatives à l'HA [9]. tues d'HA des taux de survie de 99,2 % à 17 ans
Après plus de trois décennies d'expérience clinique dans une série personnelle (H13), en adéquation avec
depuis le milieu des années 1980, force est de constater d'autres séries similaires avec 99,5 % à 18 ans (H14).
que l'interface « biologique » apporté par ce revêtement Le taux de survie d'une tige de Zweymüller à revête-
d'HA a acquis droit de cité dans notre arsenal pro- ment poreux était un peu moins favorable, de 98 %
thétique en termes de fixation des implants. Pourtant, à 15 ans [11].
plusieurs controverses à ce propos ont vu le jour :
• certains points font régulièrement l'objet de débats,
comme le rôle exact de l'HA dans le mécanisme En quoi l'HA est-elle différente
d'ostéoformation au contact du métal du composant du simple métal à surface poreuse ?
fémoral ou acétabulaire ; Cette question est capitale pour déterminer si le rôle
• d'autres débats concernent la place de ces interfaces HA de l'HA se cantonne à un simple « starter » de l'ostéo-
dans les autres « familles » d'implants sans ciment actuelles ; apposition ou non. En effet, de nombreux auteurs ont
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• la dernière controverse, compte tenu des évolutions rapporté d'excellents résultats d'implants modernes
technologiques de ces dernières années, porte sur le deve- sans ciment sans revêtement phosphocalcique [12–15].
nir de ce revêtement HA sur les nouveaux états de sur- Pour déterminer les avantages respectifs de ces deux
face offerts par les technologies de fabrication additives. options, il est intéressant d'envisager deux paramètres
spécifiques à partir des données de la littérature : d'une
HA, simple « starter » part la quantité et la qualité du remodelage osseux, et
de l'ostéoconduction, ou élément d'autre part la tendance à la migration, la bascule ou
l'enfoncement des implants.
décisif de la fixation à long terme ? Søballe et al. [16] se sont particulièrement intéres-
sés à la fixation des implants revêtus de métal poreux
L'HA est un mode efficace versus HA et au comportement spécifique de ces deux
de fixation « biologique » types d'implants en cas d'instabilité prothétique. Dans
Il suffit de consulter les registres nationaux des pro- les situations « à risque » (existence d'un espace entre
thèses, qu'il s'agisse des registres scandinaves, austra- os et implant ; mise en charge précoce et continue), les
lien ou anglo-gallois, pour constater que l'appellation données histologiques comme les tests mécaniques ont
178 J.-A. Epin tt

pu démontrer que les implants revêtus d'HA avaient Les résultats cliniques ont pu être qualifiés d'excel-
de meilleurs résultats que les implants ne possédant lents pour des tiges « sans ciment » avec ou sans HA,
qu'un revêtement poreux : sans démonstration formelle de la supériorité de l'une
• dans une première étude, en présence d'un espace des deux options par rapport à l'autre [22, 23]. Il n'en
de 1 mm autour des implants, alors qu'une couche de demeure pas moins que l'efficacité des revêtements
tissu fibreux était observée en cas d'implants à revête- HA a pu être démontrée dans tous les cas, y compris
ment poreux, une couche d'os néoformé pouvait être en cas d'implants dont la stabilité mécanique obtenue
constatée directement au contact du substrat métal- lors de l'intervention n'était pas optimale. Ce n'est pas
lique en cas d'implants à revêtement HA, sans aucune le cas des implants seulement revêtus de métal poreux,
interposition de tissu fibreux ; ce qui permet de caractériser le revêtement HA non
• dans une deuxième étude d'implants mis en charge comme un simple «  starter » de l'ostéoconduction,
immédiatement et de façon continue, de la même mais bien comme un adjuvant au long cours de la fixa-
façon, une couche de tissu fibreux était observée à la tion biologique.
surface des implants à revêtement poreux, alors qu'on
observait une ostéo-apposition d'os néoformé au
contact des implants à revêtement HA ; Quel est le devenir du revêtement HA ?
• en outre, dans ces études, la mesure des forces Cette question était régulièrement posée [24, 25] dans
d'arrachement démontrait des résultats significative- les années 1990, avec ses deux corollaires :
ment meilleurs avec les implants avec revêtement HA • La résorption de l'HA au fil des ans a-t-elle des
qu'avec les implants à revêtement poreux. conséquences sur la tenue des implants ?
Coathup et al. [17] ont pu comparer le remodelage • Le possible relargage de particules d'HA peut-il cau-
osseux autour de trois types d'interface (HA, métal ser des usures à troisième corps ?
poreux ou simple corindonnage) sur des explants post- L'implantation d'un composant à revêtement HA
mortem de tiges fémorales : l'ostéoformation (p = 0,012) induit une sursaturation en calcium qui génère la
et l'ostéo-adhésion (p < 0,05) étaient significativement transformation progressive de ce revêtement HA « syn-
plus importantes avec le revêtement HA qu'avec le thétique » en HA bicarbonatée physiologique de l'os
métal poreux. De plus, la néoformation osseuse était humain. C'est ainsi que Thomas Bauer [3], Alphons
plus étendue, intéressant toute la surface du revête- Tonino [4] et de nombreux auteurs ont pu démontrer
ment HA. Les auteurs concluaient que l'HA augmente que l'HA est résorbée durant le cycle de remodelage
significativement le volume d'os néoformé au contact osseux ostéoblastique-ostéoclastique, et se trouve
du métal et l'ostéo-adhésion, tout en assurant une meil- remplacée progressivement par de l'os néoformé, tout
leure distribution de l'os néoformé sur la totalité de la particulièrement au contact des portions d'implants
surface de l'implant. Ces constatations pourraient avoir soumises aux forces de striction et de tension. Un tel
des implications majeures : réduction du stress-shielding remodelage et la pérennité de la fixation à long terme
et prévention plus efficace de l'ostéolyse due à la migra- nécessitent donc un substrat métallique tel que le
tion de particules d'usure du polyéthylène. titane, offrant sous le revêtement HA une géométrie et
Concernant les migrations comparées des implants une rugosité appropriées. L'os néoformé à partir de l'os
avec et sans HA : hôte remplace progressivement l'HA au fil des ans, per-
• une étude EBRA-FCA [18] prospective, randomisée, mettant un accrochage de l'os à l'implant solide, intime

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prenant pour critère la migration des tiges, a conclu et durable, parfois appelé « fixation tertiaire ». La pre-
que la fixation sans ciment de deux tiges de même mière fixation est la fixation mécanique peropératoire,
dessin, avec et sans revêtement HA, était plus perfor- la deuxième, la fixation biologique initiale, débutant
mante à 10 ans pour les tiges avec revêtement HA ; dès la 2e semaine et s'étendant jusqu'au 6e mois, et la
• de même, Donnelly et al. [19] ont pu montrer, à par- troisième, cette fixation définitive avec ancrage direct
tir d'études radiographiques, une migration moindre de l'os néoformé aux micro- et macrostructures de
et moins de lisérés pour les implants HA versus métal l'implant. Cela a pu être confirmé par les études cli-
poreux ; niques au long cours (figure 19.1).
• pour les études prospectives randomisées fondées Durant tout ce processus de remodelage osseux,
sur la RSA (radiostereometric analysis) : l'HA étant, du fait de sa structure phosphocalcique,
– Kärrholm et al. [20] observaient une moindre un composant biologique de l'os normal, ce revête-
migration des implants HA versus métal poreux ; ment n'a jamais été associé à une quelconque réac-
– il en était de même pour Søballe et al. [21], avec de tion inflammatoire pouvant générer de l'ostéolyse.
meilleurs scores fonctionnels et une moindre migra- Aucune étude scientifique n'a jamais réussi à prouver
tion pour les tiges HA. un quelconque problème provoqué par des débris de
assé, présent et futur des interfaces prothétiques de hanche sans ciment 179

tourne devant la torche), il en va tout autrement des


surfaces irrégulières se prêtant mal au dépôt unidirec-
tionnel de la torche à plasma. C'est en particulier le
cas des prothèses de genou, qui ont largement bénéfi-
cié des nouvelles technologies de dépôt électrolytique
« à froid » ; c'est le cas par exemple de la périapatite,
dans les années 2000, qui est une recombinaison élec-
trolytique des ions calcium et phosphate en précipités
d'HA. Certes le revêtement est plus fragile, mais ses
avantages sont importants. Il s'agit d'une déposition
multidirectionnelle en couches très minces de l'ordre
de 20 microns, assurant un revêtement uniforme
jusqu'au fond des moindres anfractuosités, même en
cas de structures poreuses d'une géométrie prothétique
complexe. Elle est obtenue à partir d'une HA abso-
Figure 19.1. Réalité de l'ostéo-apposition osseuse sur des
lument pure à 100 %, éliminant tout risque d'impu-
explants de composants prothétiques à revêtement d'hydro
xyapatite (HA). retés. On peut réellement parler dans ce cas de bone
A. ige HA ABG extraite à 3 ans post-opératoire pour fracture ingrowth et non plus de bone ongrowth. Si le subs-
fémorale accidentelle. B. Explant de cupule double mobilité ADM trat comporte des macrostructures, il pourrait sembler
lors d'une révision pour protrusion à un an postopératoire. C. rès logique de faire appel à ce type de revêtement. Quant
ancienne cupule vissée ARC2f à 22 ans de recul clinique révisée à y associer des protéines ostéo-inductrices, il s'agit de
pour usure isolée de l'insert polyéthylène… D. Apposition intime voies de recherche qui n'ont pas abouti à ce jour, mais
sur tige fémorale HA Omnifit révisée à 7 mois post-opératoire
tout comme l'adjonction d'antibiotiques, ce pourrait
pour luxations récidivantes chez un homme de 72 ans.
être techniquement réalisable.

revêtement HA, dans des conditions normales de fixa- Étendue du revêtement


tion prothétique, avec des revêtements HA respectant
les recommandations officielles de préparation de la Cette question a fait l'objet de multiples contro-
poudre et d'application par torche à plasma sous vide. verses, que nous avions développées notamment lors
C'est ainsi que plus de 30 années d'utilisation de l'HA d'une table ronde des Journées d'orthopédie de Fort-
n'ont jamais mis en évidence de problèmes en rapport de-France [26]. Le problème doit en fait être abordé
avec ce type de revêtement et augurent d'un avenir différemment en ce qui concerne les composants
favorable à très long terme. fémoral et acétabulaire.
Pour la cupule, tous les auteurs s'accordent sur l'inté-
rêt d'un revêtement total sur toute la surface au contact
Hydroxyapatite : laquelle, où, de l'os hôte, qu'il s'agisse d'une cupule à implanter en
comment et sur quel substrat ? press-fit pur ou avec adjonction de moyens de fixation
complémentaires (picots, vis).
Composition Au contraire, l'étendue du revêtement a fait long-
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Il peut sembler étonnant qu'après trois décennies, la temps débat entre tiges totalement revêtues versus
composition initiale « officielle » de l'HA soit demeu- revêtues seulement au niveau du tiers proximal. Les
rée strictement identique : application sous vide « à tenants de la première option favorisent la fixation
chaud » par torche à plasma d'une poudre ayant une la plus complète possible, tandis que les partisans de
cristallinité de plus de 75 %, pureté d'HA de plus de l'option « proximale » insistent sur le transfert privi-
90 %, rapport Ac/P de 10/6, porosité de moins de légié des lignes de force en zone métaphysaire et, au
10 %, volume des grains avoisinant 20 μ et épaisseur contraire, la possible survenue d'un transfert non
du revêtement entre 60 et 150 μ. harmonieux des contraintes en cas de fixation distale
L'inconvénient de la torche à plasma demeure le associée, pouvant conduire à un stress shielding avec
caractère irrégulier du revêtement, avec des couches appauvrissement osseux proximal.
plus épaisses dans les creux et moins épaisses au En théorie, l'étendue du revêtement HA doit être
niveau des crêtes. C'est ainsi que, si l'HA déposée liée à la forme de l'implant, le but étant d'obtenir une
« à chaud » par torche à plasma fonctionne remar- fixation essentiellement métaphysaire et d'assurer la
quablement bien sur les surfaces régulières, si pos- stabilité primaire et la réhabitation osseuse durant les
sible de forme cylindrique (puisque la pièce à revêtir six premières semaines.
180 J.-A. Epin tt

Le concept d'une fixation élective primaire puis ont démontré des résultats tout à fait satisfaisants, à
secondaire sur le tiers proximal du fémur a pu être l'instar des cupules vissées lisses, qui ont vu leurs résul-
confirmé par la qualité du remodelage osseux à plus tats devenir favorables dès lors que le substrat a été
de 10 ans, notamment les études par absorptiométrie rugueux de façon appropriée.
biphotonique. Ainsi, les cupules acétabulaires étant soumises à des
Le revêtement total pouvait faire craindre une fixa- forces de striction majeures à l'interface avec un acé-
tion préférentielle diaphysaire et un possible trans- tabulum à la géométrie « ouverte » et initialement élas-
fert des contraintes de la métaphyse vers la diaphyse. tique, elles nécessitent un substrat à forte rugosité et
On peut discuter les résultats des études densitomé- un métal bioconducteur tel que le titane ou le tantale.
triques, lesquels ne sont pas toujours concordants. Pour le fémur, les avis sont plus nuancés. Personne
Néanmoins, dès 1986, le groupe Artro a opté pour un ne conteste la réalité que plus la surface de contact est
revêtement HA intégral de façon à obtenir une ostéo- importante, plus la fixation est optimisée ; mais quels
intégration rapide et totale de la tige et, dès 1990, des sont les inconvénients qui résultent de cette option de
études densitométriques ont montré la persistance macrostructures « 3D », liés à la macrostructure elle-
d'un remodelage périprothétique physiologique avec même et aux difficultés d'extraction qui en résultent ?
une résorption limitée du capital osseux. Sur le plan sémantique, il faut différencier différents
À signaler, en tout cas, l'absolue nécessité d'un types d'effet de surface :
revêtement proximal totalement circonférentiel, de • la « microstructure » est obtenue par sablage ;
manière à s'opposer à la migration des débris de poly- • au contraire une « macrostructure » est un pro-
éthylène ou autres et ainsi à la survenue d'une ostéo- cédé permettant d'obtenir une surface en « 3D », qu'il
lyse distale. Il s'agit du classique effet « barrière » de s'agisse de billes, plasma-spray, mousses ou mèches de
l'ostéo-adhésion intime de l'os au métal, sans inter titane ou autre, structure madréporique ou autre ;
position d'une couche de tissu fibreux pouvant servir • c'est différent des « reliefs » à type de stries, « écailles
de voie d'accès à la portion médiodiaphysaire de l'en- de poisson » ou rainures, classiquement appelées « aug-
dofémur pour les particules d'usure. mentation » par les Anglo-Saxons ; de type « marches
d'escalier », elles sont indiscutablement utiles car elles
s'opposent mécaniquement à l'enfoncement, notam-
Importance du substrat ment après résorption de l'HA et son remplacement
Un « effet de surface » du substrat métallique est abso- par de l'os néoformé.
lument indispensable avant l'application du revête- Durant plusieurs décennies, la fixation fémorale a
ment HA, et ce pour deux raisons : reposé sur une microstructure telle que celle obtenue
• la première est de permettre une excellente liaison par le sablage du titane, permettant une adhérence
mécanique entre le substrat et la couche de revêtement osseuse rapide et durable en simple apposition osseuse
HA, afin d'éviter la délamination du revêtement par (bone ongrowth). Le régime des contraintes au fémur
les forces d'arrachement per- et postopératoires ; permet en effet de se passer de macrostructures 3D
• la seconde est de permettre un accrochage osseux pour peu que la géométrie de la tige lui permette de
fiable sur le plan mécanique lors du remplacement de conserver une bonne stabilité rotatoire après résorp-
l'HA par de l'os néoformé prenant appui, en fixation tion de l'HA. En associant cette adhérence osseuse
« biologique tertiaire », sur ce substrat de rugosité à des structures en relief intégrées à la géométrie de

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adéquate. la tige, la réhabitation osseuse de reliefs additionnels
Historiquement, la question s'est posée en termes (structures rainurées, écailles de poisson, ou autres)
différents pour la cupule et pour la tige, du fait de procure une stabilité mécanique à long terme. La
la distribution fondamentalement différente des résorption du revêtement sera alors compatible avec
contraintes, et de la géométrie de l'os receveur. une fixation osseuse directe sur le métal mécanique-
Les résultats des premières implantations en press- ment efficace.
fit pur sans vissage de cupules à revêtement HA sur Une simple microstructure de surface autorise une
un substrat simplement corindoné grit blasted ont été voie de sortie en cas de reprise (sablage, rugosité de
désastreux, comme rapporté dans des séries améri- surface, microstructure), sous réserve que les reliefs
caines dans les années 1990 [27], au point que l'on en additionnels aient été dessinés pour ne pas compro-
était alors arrivé à décréter que « l'HA ne fonctionne mettre l'extraction de l'implant.
pas pour les cupules »… Au contraire, les cupules HA à Une macrostructure n'est pas en principe néces-
filetage et vis additionnelles, ou implantées en précon- saire avec un revêtement HA, surtout si l'on considère
trainte puis pourvues d'une rugosité plus importante, qu'une réhabitation en 3D de type bone ingrowth peut
assé, présent et futur des interfaces prothétiques de hanche sans ciment 181

poser des problèmes d'extraction en cas de reprise son revêtement original par brushite expliquent son
chirurgicale et n'améliore pas la stabilité à long terme excellente ostéo-intégration.
de l'implant.
La tendance actuelle venant d'Amérique du Nord est Les revêtements poreux
de privilégier les macrostructures de tiges HA à revê-
tement proximal : la crainte de douleurs de cuisse pro- Quatre décennies de revêtements
voquées par des micro-pics de contraintes au niveau
de ces macrostructures ne semble pas fondée, mais poreux
demandera naturellement confirmation à moyen et Les prothèses comportant un substrat grenaillé ou
long terme. madréporique de type Judet et Lord ne sont plus
implantées depuis plusieurs décennies, notamment en
La possible alternative raison de leurs difficultés d'extraction. Ce problème
à l'hydroxyapatite : la brushite a généré dans les années 1980 l'éclosion de prothèses
« extractibles » par leur forme et surtout le substrat
Si l'HA conserve une hégémonie certaine en matière simplement rugueux obtenu par sablage au corindon,
de composés phosphocalciques, d'autres revêtements telles les tiges de Parhaufer® (B. Braun, Aesculap AG,
peuvent être également proposés, tel le dicalcium Tuttlingen, Allemagne), ou PDG® (FH Orthopaedics,
phosphate dihydraté (DCPD), encore appelé brushite. Mulhouse, France), comportant de simples aspérités.
Ce phosphate de calcium se distingue de l'HA par La plupart du temps, la reprise de l'élasticité naturelle
une résorption beaucoup plus rapide, de l'ordre de du fût osseux diaphysaire entraînait la survenue des
quelques semaines. Cette brushite recouvre en géné- fameuses « douleurs de cuisse », lesquelles n'étaient
ral un revêtement de titane pur déposé par torche à pas l'apanage des tiges sans ciment, mais de leur stabi-
plasma. L'avantage d'une résorption accélérée est lité insuffisante entraînant une mise en jeu des récep-
d'augmenter la bioactivité locale et l'ostéoconduction teurs proprioceptifs juxtapériostés.
par un relargage local d'ions phosphate et calcium, Bien que les alliages de titane soient en eux-mêmes
plus rapide et plus important, conduisant à une accélé- ostéoconducteurs, une fixation mécanique suffisam-
ration potentielle de la fixation biologique secondaire. ment performante durant suffisamment longtemps est
Ce revêtement n'est pas déposé par torche à plasma une condition nécessaire. Cela peut expliquer le succès
mais par un processus électrochimique qui permet de de la tige Alloclassic Zweymüller® (B. Braun, Aesculap
mieux contrôler son épaisseur, qui est assez réduite, de AG, Tuttlingen, Allemagne), laquelle demeure à ce
10 à 15 μm. Ce procédé de recouvrement permet un jour la tige non cimentée la plus implantée en Europe,
revêtement complet avec des cristaux de petites tailles depuis les premières poses en 1979. Cette fixation per-
avec un phosphate de calcium extrêmement pur. La formante est obtenue par son dessin très particulier
faible épaisseur du revêtement favorise la dissolution quadrangulaire autobloquant, avec ou sans collerette,
rapide, qui est en général de moins de 3 mois. Elle per- avec une rugosité de surface augmentée de 1 μ à 3–5 μ
met la préservation de la rugosité du revêtement de depuis 1985. À noter que, pour les cas difficiles, un
titane sous-jacent. Il n'y a pas d'obstruction des pores, revêtement complémentaire d'HA est disponible dans
ce qui favorise la colonisation par les cellules osseuses. sa moitié proximale.
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Mayer et al. [28] ont rapporté leur expérience d'un Au fil des ans, à partir des années 1980, sont appa-
implant fémoral revêtu sur son tiers proximal par de rus des revêtements poreux comportant une rugosité
la brushite dans une étude prospective monocentrique augmentée par des structures additionnelles de type
mono-opérateur au recul minimal de 5 ans. Le taux microbillage, comme pour les tiges PCA® (Stryker-
de survie à plus de 5 ans de 152 implants (Excia®, Howmedica, Mahwah, NJ, États-Unis), ou de type
B-Braun, Tuttlingen, Allemagne) était de 98,72 % mèches de titane, comme pour les prothèses de Harris-
selon Kaplan-Meier. Trois tiges ont été retirées, 2 pour Galante (Zimmer-Biomet, Warsaw Ind, États-Unis) dès
fracture périprothétique, 1 pour douleurs de cuisse ; 1985, sans oublier les revêtements par dépôt de titane
2 enfoncements de plus de 5 mm dont 1 sur fracture en plasma spray par torche à plasma. Parallèlement,
sont survenus. Tous les implants sauf un étaient ostéo- les tiges de Spotorno® (DePuy-Synthès, Warsaw, In,
intégrés, avec un score ARA moyen de 5,7 et d'Engh- États-Unis) ne comportaient qu'un revêtement en
Massin de 25,25 (score total). Le taux de survie au titane sablé, mais devaient leur succès, comme les pro-
recul considéré était excellent. La forme spécifique de thèses Alloclassic®, à une stabilisation mécanique effi-
l'implant avec des ailerons latéraux qui augmentent le cace de type autobloquant (blocage antéropostérieur
contact osseux, sans appui cortical systématique, et dû à leur tulipage proximal). À l'heure actuelle, les
182 J.-A. Epin tt

revêtements poreux encore utilisés comportent généra- Les revêtements « ultraporeux »


lement une rugosité très élaborée, notamment dans le
cas du Porocoat® (DePuy-Synthès, Warsaw, In, États- Trabecular metal™
Unis) avec projection en fusion de microbilles de titane (Zimmer Biomet, Warsaw, IN, États-Unis)
pur, avec des résultats à long terme très encourageants, C'est le plus ancien. Il s'agit d'un revêtement unique
tant pour la tige que pour la cupule dans la littérature. par le recours au tantale et non pas au titane, utilisé
pour la totalité des autres surfaces « ultraporeuses ». Le
ouvelles perspectives : tantale est un métal rare (élément 73). Le Trabecular
metal™ est obtenu par dépôt par couches atomiques
les revêtements « ultraporeux » de tantale sur un substrat vitrocéramique, créant ainsi
Caractéristiques communes un matériau nanotexturé, ce qui lui confère une archi-
de ces nouveaux revêtements tecture et un module d'élasticité proches de l'os trabé-
culaire humain.
Les nouvelles technologies, permettant de parler de Le Trabecular metal™, selon ses promoteurs, peut
revêtements « ultraporeux », ont ouvert une nouvelle être considéré comme le biomatériau « idéal » par
ère des interfaces bioconductrices. L'idée générale est sa biocompatibilité, ses capacités non seulement
de reproduire une structure identique à celle de l'os ostéoconductrices, mais également potentiellement
hôte au niveau d'un substrat de métal lui-même bio- ostéo-inductrices. Il pourrait être résorbable au fur
conducteur, tel que le titane ou le tantale, ce qui doit et à mesure de son remplacement progressif par de
permettre non plus l'ostéo-adhésion de type bony l'os néoformé, avec une repousse osseuse observée à
ongrowth, mais bien une ostéo-intégration qualifiée 24 semaines et l'obtention d'une interface uniforme
de bony ingrowth [29] (figure 19.2). et stable. Les résultats ont été constamment bons,
Le process industriel est pratiquement similaire pour en particulier pour les reconstructions acétabulaires,
tous ces composants ultraporeux, à savoir la création notamment pour Flecher et al. [30] dans une série de
d'une structure trabéculaire avec un dépôt de métal 72 cas avec défect osseux majeur dans près de la moi-
à la surface. Une mousse de polyuréthane, du bio- tié des cas (23 types 3A de Paprosky et 8 types 3B)
verre réticulé, ou tout autre substance organique peut sans aucun descellement ou migration au dernier recul
ainsi servir de support trabéculaire pour le revêtement (4 ans en moyenne ; 2–6 ans) Ses résultats [30–32] appa-
métallique appliqué par torche à plasma (sintering : raissent prometteurs et concordants avec les résul-
high temperature bonding), ou par un procédé électro- tats expérimentaux et cliniques publiés par ailleurs
chimique (dépôt de vapeur à arc à basse température). depuis les premières applications qui remontent à
Les analyses histologiques chez l'animal ont démon- 2003 [33].
tré une propension à une rapide infiltration des
éléments cellulaires avec des délais très rapides d'os-
téo-intégration et d'adhésion osseuse mécaniquement Tritanium® (Stryker Orthopaedics,
efficace précoce. Mahwah, NJ, États-Unis)
Le Tritanium® est obtenu à partir de titane com-
mercialement pur (CPTi), ce qui pourrait conférer à

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cette structure tridimensionnelle hautement poreuse
(72 %) des propriétés supérieures à celles des alliages
classiques de titane (TA6V). Il s'agit d'une mousse
de titane permettant une véritable interpénétration
osseuse (bone ingrowth). Cette structure est obtenue
par un procédé analogue à celui de la « cire perdue »,
mais faisant appel à un mélange de titane pur, de sel
et d'un liant ; ce mélange est compacté dans un moule
en forme de cupule, puis usiné et assemblé au substrat
Figure 19.2. Illustration des capacités d'ostéo-intégration au de titane. Il suffit alors de le placer dans l'eau pour
contact direct d'une cupule de hanche en Tritanium®. retirer le sel et le liant, puis de le sécher et d'effectuer
A. Vue per-opératoire d'une cupule de hanche en ritanium®.
un traitement thermique pour lier la poudre de titane
B. Vue en histologie de ce matériel ultra-poreux ; os vascularisé au
contact de la cupule ritanium® (bx) ; structure métallique ultra- à la cupule. La disposition aléatoire des particules de
poreuse de titane (by) ; interpénétration d'os-néoformé directe- titane confère à la structure des capacités accrues de
ment à l'intérieur de la structure métallique poreuse (bz). régénération cellulaire en bone ingrowth.
assé, présent et futur des interfaces prothétiques de hanche sans ciment 183

Le recul clinique est encore faible pour ce revête- Gription® (DePuy, Warsaw,
ment, avec une cupule disponible depuis 2007, et IN, États-Unis)
une première publication en 2009 de Ramappa et al.
[34], rapportant les résultats à un recul moyen de Le revêtement ultraporeux Gription® est une struc-
18 mois (13–24 mois) de 43 révisions acétabulaires. ture dénommée super-textured asperity topography
Ces résultats sont encourageants, avec une ostéo- (STAT), composée d'une distribution aléatoire et
intégration radiologique de la cupule dans 95 % des irrégulière de particules de titane pur, déposées par
cas à 6 semaines. Des études complémentaires à moyen frittage (sintered), formant ainsi un réseau tridimen-
terme devront statuer sur l'intérêt de ce type de surface sionnel de pores interconnectés. Ce STAT comprend
ultraporeuse, compte tenu de certaines interrogations à la fois une micro- et une macrostructure. La micros-
émises par Carli et al. [35] sur la pérennité de la réhabi- tructure, constituée par les irrégularités de la surface
tation osseuse à moyen terme. En effet, malgré un taux en titane, permet l'adhésion directe d'ostéoblastes,
de survie à 4 ans de 98,2 % en chirurgie de première optimisant la fixation mécanique et permettant la pro-
intention (109 hanches avec 2 échecs d'ostéo-intégra- lifération cellulaire ostéoblastique dans la structure
tion), il existait des lisérés évolutifs périphériques au métallique. Ce revêtement n'a pas fait l'objet d'études
cours de la deuxième année. cliniques publiées dans la littérature. Une analyse sur
cadavre de Goldman et al. [39] a comparé la résistance
à l'arrachement du Gription® à celle d'un revêtement
Regenerex® (Zimmer-Biomet-Warsaw, poreux classique (Porocoat®, DePuy-Synthes) et n'a
IN, États-Unis) pas retrouvé de différence significative entre ces deux
Comme chacune des autres structures ultraporeuses revêtements.
en titane, le Regenerex® présente des caractéristiques
proches de celles de l'os trabéculaire. Ce revêtement tri- Trabecular titanium® (Lima Corporate,
dimensionnel est utilisé non seulement dans les reprises Villanova di San Daniele del Friuli, Italie)
acétabulaires de hanche, mais également pour le genou,
l'épaule avec des structures additionnelles (cales, com- Ce revêtement, utilisé essentiellement pour les cupules,
blement). Les résultats en RSA de 61 prothèses de est en alliage de titane classique (Ti6Al4V) déposé en
genou étaient favorables à 2 ans, mais sans différence fusion par un faisceau d'électrons, en une seule étape,
significative par rapport à un groupe témoin de revête- ce qui garantit une continuité structurale entre la coque
ments tibiaux classiques de plasma-spray de titane [36]. elle-même et le substrat en contact avec l'os. Cette
Aucune série de cupules d'arthroplasties de hanche ne structure se caractérise par une porosité moyenne de
semble avoir été publiée dans la littérature à ce jour. 65 %, un diamètre moyen des pores de 640 μ et un
module d'élasticité comparable à l'os trabéculaire.
Selon Perticarini et al. [40], les résultats de la cupule
Stiktite® (Smith & Nephew, Delta-TT® revêtue de ce trabecular titanium sont favo-
Memphis, TN, États-Unis) rables, avec un taux de survie de 99,3 % à 5 ans.
Ce revêtement ultraporeux est présenté comme pos-
sédant une résistance à l'arrachement de l'os cortical Les procédés de fabrication
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ou spongieux plus importante que celle du métal tra-


béculaire, essentiellement grâce à un diamètre optimal
« additive »
des pores de la structure 3D. Il s'agit comme pour le Les imprimantes 3D, déjà utilisées dans de nombreux
Gription® d'un revêtement par dépôt irrégulier de par- domaines, représentent une véritable révolution indus-
ticules de titane appliquées à chaud (sintering). trielle, y compris pour la chirurgie orthopédique. Cette
Selon une étude de Zhou et al. [37] en RSA, une dimi- fabrication additive est essentiellement un procédé de
nution significative des translations 3D était constatée soudage de la matière par une source d'énergie de type
dès la 6e semaine avec ce revêtement à haute porosité de laser ou faisceau d'électrons, ce qui permet avant tout
61 %) par comparaison avec un revêtement poreux clas- de pouvoir fabriquer des pièces directement à partir
sique, de Roughcoat® (Smith and Nephew, TN, États- de données CAO (conception assistée par ordinateur),
Unis) à basse porosité de 45 %. Une étude similaire de sans outillage.
Naudie et al. [38] étudiant en RSA le comportement de Les premières indications en orthopédie concernaient
ces deux revêtements de cupules a démontré une excel- essentiellement les guides de coupes personnalisés en
lente fixation biologique à la fois pour la « haute poro- matériaux plastiques, des pièces d'ancillaires ou des
sité » (Stiktite®) et la « basse porosité » (Roughcoat®). prototypes, voire des implants pour reconstruction de
184 J.-A. Epin tt

pertes de substance osseuse majeures. Depuis quelques en dehors du TM, et tous les auteurs insistent sur la
années, ces procédés de fabrication « additive » ont nécessité d'études multicentriques à long terme.
trouvé une autre application : la création d'implants, La question est celle de leurs indications en pratique
notamment acétabulaires, reproduisant à l'identique la chirurgicale. En d'autres termes, avons-nous besoin de
structure acétabulaire, en monobloc à partir de poudre l'ingrowth dans tous les cas, ou pouvons-nous nous
de titane. Ces implants sont désormais utilisables en contenter encore de l'ongrowth ? La supériorité de
chirurgie de première intention (Adler, Stryker, etc.) et ces revêtements ultraporeux en chirurgie primaire n'a
constituent selon toute vraisemblance l'avenir des sur- pas pu être démontrée, non seulement en termes de
faces réhabitables des implants articulaires. résultats cliniques, mais également en RSA [38]. En
Il ne faut pas néanmoins perdre de vue les limitations revanche, dans les cas de défects osseux, notamment
réglementaires de ces implants qui doivent respecter au cours des révisions acétabulaires, le recours à de
les règles de conception et les normes concernant les telles cupules semble licite.
matériels implantables, avoir des performances opti- Il faudra néanmoins justifier le surcoût non négli-
misées en fabrication industrielle et faire l'objet d'une geable de ces nouvelles interfaces ultraporeuses par rap-
véritable normalisation pour diffusion [41]. port aux revêtements phosphocalciques traditionnels, et
Si de tels implants de fabrication additive semblent
être les implants de demain, ou plutôt d'après-demain,
ils ne concernent pour l'instant que les cupules acé-
tabulaires et les embases tibiales des prothèses de
genou, les tiges fémorales étant exclues. En effet, la
résistance mécanique de ces pièces en fabrication 3D
est faible par comparaison avec les implants tradition-
nels forgés, et celles-ci ne sont pas compatibles avec les
contraintes énormes auxquelles sont soumises les tiges
fémorales, d'autant que leur coût de fabrication reste
pour l'instant très élevé et non compatible avec la mise
à disposition de tiges fémorales en impression 3D.

Que penser de l'apport de ces


structures ultraporeuses ?
Les différentes propriétés des structures ultraporeuses
sont regroupées dans le tableau 19.1. Il semble difficile
Figure 19.3. Vues en microscopie électronique de cinq inter-
de prouver à l'heure actuelle telle ou telle supériorité faces de diverses structures ultraporeuses par comparaison avec
de tel ou tel revêtement de ce type en se fondant sur l'os haversien (a) démontrant la similitude de ces interfaces
des résultats cliniques (figure 19.3). Le recul moyen est poreuses avec l'os hôte, soit Tritanium® (b), Regenerex® (c),
inférieur à 6 ans pour tous les implants ainsi revêtus, Trabecular metal™ de tantale (d), Gription® (e) et Stiktite® (f).

Tableau 19.1. © 2017, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés


Caractéristiques comparatives des diverses structures « ultraporeuses »*
Caractéristiques Trabecular metal™ Tritanium® Regenerex® Skitite® Gription®
Type de revêtement Tantale Titane Titane Titane Titane

Module d'élasticité 2,5–3,9 106–115 1,6 NA NA

Taille moyenne des pores 550 μ 311–546 μ 300μ 200μ 300μ

Porosité 75 % 60 % 67 % 60 % 63 %

Coefficient de friction 0,88 0,65 NA 96–100 1,2


* Trabecular metal™ (Zimmer-Biomet- Warsaw, IN, États-Unis) ; Tritanium (Stryker, Mahwah, NJ, États-Unis) ; Regenerex® (Biomet,
®

Warsaw, IN, États-Unis) ; Stiktite® (Smith & Nephew, Memphis, TN, États-Unis) ; Gription® (DePuy, Warsaw, IN, États-Unis).
assé, présent et futur des interfaces prothétiques de hanche sans ciment 185

garder présent à l'esprit l'apport potentiellement majeur en chirurgie primaire, et surtout au niveau du cotyle,
des implants de fabrication « additive » en 3D. où la qualité de la fixation mécanique en apposition
sur une surface rugueuse appropriée l'emporte sur les
caractéristiques d'interface. Néanmoins, en se fondant
Conclusion sur l'adage « qui peut le plus peut le moins », et dans
la mesure où l'HA n'a jamais pu être jugée respon-
Il est clair que l'HA, comme cela a été souvent dit et sable de quelque problème secondaire que ce soit, on
redit, n'est pas une poudre magique. Un revêtement peut toujours la considérer comme un adjuvant salu-
optimal apposé sur une mauvaise prothèse, ou sur une taire et toujours utile. On ne peut dire s'il s'agit d'un
bonne prothèse mal implantée, n'évitera pas l'échec, et simple starter de l'ostéo-apposition osseuse ou d'un
cela reste valable quel que soit le type de revêtement non partenaire décisif car nul ne peut préjuger du com-
cimenté. Néanmoins, dans ce triptyque interface/géomé- portement futur de l'os receveur. Quoi qu'il en soit, à
trie/implantation, l'HA a pu faire la preuve d'une effica- plus de 30 ans d'une expérience clinique extrêmement
cité réelle en terme d'ostéoconduction et de bioactivité. favorable, il est permis de confirmer dans tous les cas
Opposer l'HA au ciment est le plus souvent une l'intérêt de ce revêtement d'HA parvenu aujourd'hui à
question d'école et de choix personnel. L'un et l'autre son stade de maturité.
ont permis des résultats excellents à long terme. En Les nouvelles perspectives offertes en parallèle par les
revanche, par rapport aux implants non cimentés non substrats ultraporeux représentent une voie nouvelle
revêtus d'HA, dits « à métal poreux », l'HA permet de particulièrement intéressante, notamment en chirurgie
ponter des espaces nettement plus importants, y com- de révision acétabulaire. Les études cliniques à long
pris en cas d'espace entre métal et os, ou de mise en terme, ainsi que les impératifs médico-économiques
charge immédiate [16]. Par ailleurs, l'HA a démontré devront permettre de statuer sur l'intérêt de ces nou-
sa capacité à ossifier secondairement des zones initiale- velles structures tridimensionnelles, notamment en
ment fibreuses, y compris en mouvement, comme cela chirurgie de révision. De même, les nouvelles techno-
a été prouvé par les travaux de Söballe, et confirmé logies de fabrication additive représentent sans aucun
depuis par les études radiographiques. La prévention doute une voie particulièrement attractive d'innova-
des ostéolyses fémorales distales et le respect de l'envi- tion industrielle, sous réserve de satisfaire à toutes les
ronnement osseux sont également à mettre à son actif. exigences réglementaires et normatives des dispositifs
Certes, certains implants en titane poreux peuvent médicaux en implantation humaine.
se fixer de façon durable à l'os sans HA, notamment

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189

Le diamètre des têtes prothétiques :


y a-t-il une limite ?
D. MAINARD, J. GIRARD

Introduction le registre national anglais, les têtes d'un diamètre de


36 mm et plus représentaient 5 % des poses en 2005,
Les prothèses totales de hanche (PTH) de première 26 % en 2009 et 31 % en 2012 [3]. De même, aux
intention donnent d'excellents résultats fonctionnels, États-Unis, les têtes de plus de 32 mm correspondaient
améliorent la qualité de vie des patients et montrent à 1 % des poses en 2001 mais 58 % en 2009 [3]. Le
une excellente fiabilité au long cours. Cependant, l'ins- registre français fait état d'un taux de pose de 7 % en
tabilité reste une complication redoutée et la luxation 2009 et 13,2 % en 2015.
une des principales causes de révision. L'augmentation
du diamètre des têtes fémorales permet de réduire le Diamètre de tête, instabilité,
taux de luxation, expliquant que, depuis de nom-
breuses années, on assiste à une fuite en avant tant
conflits et amplitudes articulaires
en ce qui concerne le diamètre des têtes que leur taux Le taux de luxation après PTH de première intention est
d'utilisation. L'avènement du polyéthylène haute- variable, de moins de 1 % à plus de 5 % selon les séries
ment réticulé (PEHR) et de la céramique composite a [5]. Philips et al. ont ainsi rapporté un taux de luxation
concouru à cette évolution. de 3,9 % à 6 mois parmi 58 521 patients opérés d'une
Toutefois, les têtes de grand diamètre modifient les PTH primaire [6]. Le taux de reprise pour luxation est
conditions biomécaniques locales et peuvent induire de 8,7 % dans le registre suédois, de 10,4 % dans la
des effets délétères qu'il convient de préciser et qui série de la Société française de chirurgie orthopédique et
peuvent menacer l'avenir de la prothèse, par exemple traumatologique (SOFCOT), proche de celui du registre
à l'interface tête-col. Par ailleurs, l'augmentation du français qui est de 13,5 %, mais il s'élève à 28 % dans le
diamètre de la tête prothétique a des implications registre australien et même 31 % dans le registre néozé-
sur l'épaisseur de l'insert et de la cupule avec des landais. Il est de 22 % aux États-Unis [7].
limites qui dépendent des propriétés de matériaux et L'intérêt des têtes de grand diamètre sur l'amplitude
des dimensions du cotyle opéré, et qu'il convient de et la stabilité articulaires, ainsi que sur la diminution
connaître et de définir. du risque de conflit a été parfaitement démontré expé-
rimentalement par Burroughs et al. qui ont étudié ces
Définition et évolution trois paramètres sur un modèle de hanche, permettant
de simuler les luxations avec des têtes de 28, 32, 38 et
Il n'y a pas dans la littérature de classification qui éta- 44 mm et différentes longueurs de col [8].
blisse à partir de quelle dimension une tête fémorale peut L'étude des registres et de la littérature confirme bien
être considérée comme de grand diamètre. Pour Girard, l'effet du diamètre des têtes fémorales sur le risque de
22 et 28 mm correspondent à de petits diamètres, 32 et luxation :
36 mm à des diamètres intermédiaires, plus de 36 mm à • il explique probablement la diminution globale du
des larges diamètres [1]. Cependant, pour de nombreux taux de révision toutes causes confondues rapporté par
auteurs, les larges têtes débutent à 36 mm [2, 3]. Lu le registre australien. En effet, ce registre montre que le
et al. ne distinguent que deux catégories de têtes, celles taux de reprise est de 6,2 % pour les têtes de 28 mm et
en dessous de 36 mm et celles de 36 mm et plus, considé- moins, 3,5 % pour les têtes de 32 mm, 2,6 % pour les
rées alors comme des têtes de grand diamètre [4]. têtes de 36 et 38 mm et 1,6 % pour les têtes de 40 mm
Compte tenu des avantages théoriques des têtes de et plus ;
grand diamètre, tels que rapportés dans la littérature, • de façon plus précise, le registre anglais constate une
tous les registres confirment l'utilisation de plus en diminution des luxations dont le pourcentage est passé
plus fréquente de têtes fémorales de 32 mm et plus, de 1,12 à 0,86 % entre 2005 et 2009 parallèlement à
par rapport aux têtes de 22 et 28 mm. Ainsi, selon une augmentation du diamètre des têtes fémorales [9].
La prothèse totale de hanche dans tous ses états
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190 D. Mainar , J. Girar

Dans une étude prospective randomisée, Howie la jumping distance qu'elles autorisent, c'est-à-dire
et al. ont comparé le risque de luxation après pose de la distance à parcourir par la tête avant luxation,
d'une prothèse de première intention ou de révi- mais également grâce à l'augmentation de l'amplitude
sion à couple métal-PEHR à tête 28 ou 36 mm chez articulaire et du débattement prothétique avant un
644 patients [10]. À un an de recul, le taux de luxation éventuel conflit prothétique ou osseux par effet came.
était significativement plus faible dans le groupe des L'effet came après PTH serait selon Marchetti et al.
têtes 36 mm, toute intervention confondue, ou qu'il extrêmement fréquent, exposant à des risques d'insta-
s'agisse des interventions de première intention ou de bilité, d'usure, de fractures et de libération anormale
révision (0,8 versus 4,4 %). de débris d'usure [17]. Or, pour un col 12/14, les têtes
Dans une étude rétrospective, Plate et al. se sont inté- de plus de 36 mm de diamètre permettent d'élever le
ressés plus spécifiquement à une population à risque ratio tête-col à plus de 2, et de supprimer les effets
préopératoire de luxation [11]. Ainsi, 52 patients avec came [18]. Pour de nombreux auteurs, dont Cooper,
une tête de 36 mm et plus ont été appariés avec autant la réduction du taux de luxation mise en évidence par
de patients ayant reçu une tête de 26 ou 28 mm. Au les registres et la littérature s'explique en premier lieu
recul moyen de 62 mois, les résultats fonctionnels sont par une augmentation de cette jumping distance [2, 3].
identiques dans les deux groupes. Il n'y avait aucune Plus elle augmente, plus le risque de luxation diminue
luxation dans le groupe à tête 36 et 2 luxations dans [19]. Ainsi, elle augmente de 5 mm entre des têtes de
l'autre groupe. 22 et 40 mm pour une cupule à 45° d'inclinaison [20].
Lachiewicz et al. ont confirmé l'intérêt des têtes de Cependant, pour Burroughs et al., cet effet n'a plus
grand diamètre chez les patients à risque préopératoire d'intérêt au-delà d'un diamètre de 38 mm car il n'y a
de luxation [12]. En effet, ils ont retrouvé un taux de alors plus de conflit entre composants mais un éven-
luxation précoce à 1 an de 4 % sur une population tuel conflit osseux [8].
de 112 opérés, sans luxation supplémentaire chez Dans une étude par modélisation, D'Lima et al. ont
74 d'entre eux suivis entre 5 et 10 ans. démontré l'influence du rapport tête-col sur les ampli-
Cuckler et al. n'ont rapporté aucune luxation sur tudes articulaires et la survenue d'un conflit prothé-
616 PTH de diamètre de tête de 38 mm mais 2 luxa- tique [21]. L'augmentation de 2 mm du diamètre du col
tions sur 78 PTH à diamètre 28 mm [13]. prothétique diminuait l'amplitude de 1,5 à 8,5° selon
Enfin, l'étude prospective menée par Allen et al. la direction du mouvement. Il existe bien évidemment
a démontré également l'intérêt des têtes de grand dia- une influence du positionnement de la cupule et de la
mètre sur la stabilité, en ne constatant aucune luxation tige fémorale sur ces amplitudes de mobilité.
chez les patients ayant une tête prothétique de plus de L'amélioration de la stabilité s'explique également
36 mm alors que le taux de luxation était de 1,25 % par l'augmentation des amplitudes articulaires de la
pour les têtes de moins de 36 mm [14]. hanche et le ratio tête-col, qui limitent le risque de
L'intérêt des têtes de grand diamètre concerne égale- conflit entre implants. Il n'est pas facile de mesurer
ment les reprises de PTH : de façon fiable, précise et reproductible les ampli-
• dans une étude multicentrique, Garbuz et al. ont tudes de mobilité de la hanche par l'examen clinique
retrouvé un taux de luxation de 8,7 % après pose de têtes car de nombreux facteurs indépendants du diamètre
de 32 mm et 1,1 % pour des têtes de 36 et 40 mm [15] ; de la tête peuvent interférer. Cependant, les résul-
• seuls Lu et al. n'ont pas retrouvé de différence tats des études sur modélisation ou in vitro sont

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d'instabilité entre des têtes de 36 mm et plus (aucune indiscutables :
luxation chez 41 patients) et des têtes de 32 mm et • ainsi, Yoshimine et al. ont prouvé par une formule
moins (une luxation chez 49 patients) mais la taille de mathématique que la flexion de hanche passait de
l'échantillon est faible ; 125° pour une tête de 26 mm à 133° pour une tête de
• Goel et al. considèrent que l'effet des têtes de grand 32 mm [22] ;
diamètre ne progressera plus. En effet, ils ont constaté • Tsuda et al. ont mesuré en peropératoire, grâce à
un taux de luxation à 6 mois de 2,8 % dans une popu- un système de navigation, les amplitudes de mobi-
lation de 51 901 patients opérés par PTH entre 1997 lité d'une PTH à tête de 28 ou de 40 mm [19]. Les
et 2011, alors que le taux de luxation de 2005 à 2011 amplitudes en flexion, extension, abduction et rota-
était de 2 % [16]. tion interne étaient significativement meilleures avec
Le succès grandissant des têtes de grand diamètre les têtes de 40 mm ;
tient donc essentiellement à leur efficacité sur l'ins- • dans une étude prospective et randomisée, Cai et al.
tabilité prothétique et le risque de luxation, grâce à ont comparé 51 patients ayant une PTH à couple céra-
l'augmentation du ratio tête-col, l'augmentation de mique-céramique à tête de 36 mm à 62 patients ayant
Le diamètre des têtes prothétiques : y a-t-il une limite ? 191

une PTH à couple métal-polyéthylène (M-P) à tête de usure. Cette limite dépend des propriétés mécaniques
diamètre inférieur [23]. Ils ont constaté une augmen- intrinsèques du matériau ;
tation d'amplitude de 6° avec les têtes de 36 mm de • c'est également cette épaisseur minimale qui condi-
diamètre. tionne le diamètre maximal de la tête pour les cupules
Cependant, il ne semble plus y avoir de gain d'ampli- de grande dimension.
tude au-delà de 36 mm, comme l'a montré l'étude cli-
nique de Delay et al. [24]. En effet, à partir de 36 mm, Couple céramique-céramique (C-C)
le choix d'une excentration du centre de la tête par
rapport au centre de la hanche a été privilégié pat les L'épaisseur minimale souhaitable pour un insert céra-
fabricants pour limiter la réduction d'épaisseur de l'in- mique a été diversement évaluée dans la littérature
sert. C'est aussi la conclusion de l'étude expérimentale [18]. L'avènement de la céramique composite, aux pro-
de Burroughs et al. qui n'ont pas constaté de différence priétés mécaniques supérieures à celles de la céramique
entre des têtes de 38 et de 44 mm [8]. d'alumine, a permis la réalisation d'inserts de dessins
différents, sans concession sur l'épaisseur des inserts.
La norme de la Food and Drug Administration (FDA)
Diamètre de la tête et fonction exige une résistance minimale de 46 kN à la rupture.
Si l'augmentation du diamètre de la tête semble bien Ainsi, une épaisseur minimale de 3,5 mm est compatible
diminuer le risque de luxation, elle ne semble pas avec le respect de cette norme pour les céramiques d'alu-
s'accompagner d'une amélioration de la fonction, mine comme pour les céramiques composites. Elle est
comme l'ont démontré Allen et al. dans une étude proposée depuis 1997, sans augmentation du risque de
prospective comportant 726 patients répartis en trois rupture [27]. Cette épaisseur minimale s'applique aussi
groupes selon le diamètre de la tête prothétique [14]. bien aux inserts à fixation conique modulaire standard
À 12 mois de recul, il n'y avait pas de différence sta- de type XL W 18° qu'aux inserts à fixation conique pré-
tistiquement significative entre les quatre scores utili- assemblés, quel que soit leur type.
sés, même si à 6 mois les scores des prothèses à têtes L'épaisseur de la cupule est également un facteur sur
de grand diamètre étaient meilleurs. Cela a également lequel on peut jouer pour augmenter le diamètre des
été affirmé par Delay et al, qui ont comparé les résul- têtes. Cependant, il faut là encore conserver une épais-
tats des prothèses à tête de 36 mm et plus selon les seur minimale pour éviter une éventuelle déformation
scores d'Oxford et de Postel-Merle d'Aubigné [24]. de l'implant, si faible soit-elle, car elle pourrait induire
Cai et al. n'ont pas trouvé un meilleur score de Harris des contraintes anormales sur l'insert en céramique
chez les patients ayant une PTH à tête de 36 mm ou et favoriser sa rupture. C'est une des raisons pour
moins [23]. lesquelles les cupules préassemblées ont été propo-
Les têtes de grand diamètre ne permettent pas non sées. L'épaisseur du métal est de 4 à 4,5 mm pour les
plus d'obtenir une meilleure cinétique de la marche [25]. cupules modulaires et peut descendre à 2,5 voire 2 mm
Cependant, Johnston et al. considèrent que l'aug- ou 1,5 mm (cupule Delta® Motion) pour certaines
mentation du diamètre de la tête fémorale, par l'opti- cupules préassemblées. Pour les cupules modulaires,
misation du ratio tête-col qu'elle procure, facilite les une épaisseur minimale de 4 mm est recommandée.
gestes de la vie quotidienne [26]. Une tête de 32 mm Cette épaisseur doit être validée par des tests spéci-
fiques afin d'évaluer la déformabilité de la cupule
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rend ces activités faciles dans 94 % des cas, contre seu-


lement 84 % des cas avec tête de 26 mm [8]. métallique, qui varie en fonction du dessin.
Ainsi, sont actuellement disponibles pour des
cupules modulaires :
Diamètre de tête • des têtes de 28 mm correspondant à des inserts
et épaisseur de l'insert d'un diamètre extérieur de 35, 37 et 39 mm, soit
une épaisseur de céramique de 3,5, 4,5 et 5,5 mm
L'augmentation du diamètre des têtes fémorales pro- respectivement ;
thétiques a des conséquences sur l'épaisseur de l'insert • pour des têtes de 32 mm, 5 inserts sont disponibles,
comme de la cupule : d'un diamètre extérieur de 39, 41, 44, 48 et 52 mm,
• en particulier, pour les cupules de diamètre inférieur soit une épaisseur de céramique de 3,5, 4,5, 6, 8 et
à 52 mm, il est nécessaire de diminuer l'épaisseur de 10 mm respectivement ;
l'insert avec une limite pour la céramique comme pour • pour des têtes de 36 mm, 3 inserts sont disponibles
le polyéthylène (PE), en deçà de laquelle il existe des d'un diamètre extérieur de 44, 48 et 52 mm, soit une
risques de complications : rupture, déformation ou épaisseur de céramique de 4, 6 et 8 mm respectivement ;
192 D. Mainar , J. Girar

• pour des têtes de 40 mm, 2 inserts sont disponibles première cohorte, 48 PTH avaient un insert PEHR
d'un diamètre de 48 et 52 mm, soit une épaisseur de de 3,8 ou 3,9 mm d'épaisseur ; dans la deuxième, les
céramique de 4 et 6 mm respectivement. inserts avaient une épaisseur minimale de 5,9 mm. Les
C'est alors l'épaisseur du métal, variable selon les auteurs n'ont constaté aucune complication mécanique
fabricants et le dessin de la cupule, qui détermine liée au PE et aucune différence en termes d'usure ;
la taille de la cupule. Par exemple, pour une tête de • enfin, il ne semble pas que la qualité et la tenue de
36 mm avec une épaisseur de céramique de 4 mm et l'encliquetage de l'insert dans la cupule soient compro-
une épaisseur minimale recommandée de 4 mm pour mises par la faible épaisseur de PE, en particulier en
le metal-back, le diamètre de la cupule sera de 52 mm. périphérie [35].
Les inserts à fixation conique préassemblés non
standard de type Delta® Motion, où l'épaisseur de la
céramique est de 3,5 mm, autorisent des diamètres de Diamètre de tête et lubrification
tête de 32 mm pour des cupules de 42 à 44 mm, de
Si l'utilisation de têtes céramiques de 36 mm et plus est
36 mm pour des cupules de 46 à 48 mm, de 40 mm
possible au plan théorique et mécanique, les couples
pour des cupules de 50 et 52 mm, de 44 mm pour des
C-C avec de tels diamètres semblent exposés à des
cupules de 54 et 56 mm, et de 48 mm pour des cupules
problèmes de lubrification qui modifieraient le com-
de plus de 56 mm. Il faut préciser qu'il y a peu de recul
portement en friction et se manifesteraient par des
sur ces dernières configurations et que le rapport 2016
phénomènes sonores. Pourtant, l'une des propriétés les
du registre australien montre un taux de reprise élevé
plus remarquable de la céramique est sa mouillabilité
pour les têtes en céramique de 40 mm et plus.
proche de celle du verre et bien supérieure à celle des
métaux, ce qui explique ses excellentes performances
Couple métal tribologiques et son faible taux d'usure.
ou céramique-polyéthylène En cas de perte de lubrification, la céramique
perd une partie de ses propriétés. Ainsi, McDonnell
Compte tenu du risque d'usure, de déformation et et al., dans leur série consécutive de 208 PTH à
de fracture du PE conventionnel, une épaisseur mini- couple C-C au recul moyen de 21 mois, ont rapporté
male de l'insert de 7 mm est en général recommandée 143 hanches silencieuses, 22 avec un bruit autre
[28]. Oonishi a bien montré, en comparant des inserts qu'un grincement (squeaking), 17 avec un grince-
d'épaisseur différente, que pour le PE conventionnel ment non reproductible à l'examen clinique et 26
l'usure était plus importante pour les composants de avec un grincement reproductible [36]. Les auteurs
plus faible épaisseur [29]. ont constaté que le diamètre moyen des têtes était
Les propriétés du PEHR permettent d'envisager une plus faible (40 mm) dans le groupe avec grince-
diminution de cette épaisseur minimale : ments et plus élevé (44 mm) dans celui des hanches
• ainsi, Muratoglu a proposé une épaisseur minimale silencieuses. Les grincements sont également plus
de 5 mm, comme la plupart des publications [30, 31] ; fréquents en cas de laxité, qui favorise les phéno-
• cependant, Tower et al. ont bien montré les risques mènes de microséparation (edge loading) et d'usure
d'une épaisseur trop faible, en particulier en périphérie en bande (stripe wear) et chez les patients ayant la
des inserts [32] ; plus forte somme d'amplitude.

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• Sayeed et al. ont montré qu'à court terme un PEHR Choi et al. n'ont constaté que 5 % de grincement dans
de faible épaisseur n'avait aucun effet délétère [33]. leur série de 173 hanches, mais ces bruits survenaient
Cinquante patients (53 hanches) ayant une PTH avec plus volontiers pour des têtes de grand diamètre [37].
un insert en PEHR d'épaisseur 3,8 mm et une tête Bishop et al. ont étudié spécifiquement sur simula-
métallique de diamètre 36 mm ou plus ont été compa- teur l'influence de la lubrification sur le comportement
rés à un nombre identique de patients appariés ayant de couples dur-dur avec des têtes de grand diamètre,
le même PEHR, mais avec une épaisseur de 5,8 mm ou 32 et 48 mm pour le couple C-C, 40 et 50 mm pour
plus et des têtes de diamètre 32 et 36 mm. À un recul le couple métal-métal (M-M) [38]. Chaque couple a
de 2 à 3 ans, les auteurs n'ont constaté aucune com- été testé avec différentes orientations de la cupule (0 à
plication clinique ou radiologique liée au polyéthylène 60°) et avec lubrification et à sec. À sec, la friction était
dans les deux groupes. De plus, le taux d'usure linéaire plus importante avec le couple C-C qu'avec le couple
était de 0,0004 mm/an, soit un taux comparable, voire M-M. À l'inverse, avec lubrification, la friction était
inférieur à celui d'études similaires ; 1,5 fois et 3,2 fois plus faible pour le petit et le grand
• Jauregui et al. ont confirmé ces résultats sur deux diamètre (respectivement) pour le couple C-C que
cohortes de patients à 4 ans de recul [34]. Dans la pour le couple M-M. La perte de lubrification était
Le diamètre des têtes prothétiques : y a-t-il une limite ? 193

plus péjorative pour le couple C-C que pour le couple Différentes études cliniques comme expérimentales
M-M. Ainsi, en cas de mauvaise lubrification, un montrent que le PEHR génère moins d'usure que le PE
couple C-C engendrait un moment de force de friction conventionnel. Selon certains auteurs, cette réduction
5 fois plus important que celui d'un couple M-M de d'usure serait de 60 à 100 % [33]. En revanche, le
même diamètre. Le grincement n'apparaît qu'à sec. Il PEHR offre une moins bonne résistance à la fatigue
était modéré et intermittent pour le couple métal sous et à la rupture, ce qui peut faire craindre des compli-
une charge moyenne. Pour le couple C-C de petit dia- cations mécaniques sous charge, avec le temps, pour
mètre et avec la même charge, il était plus fort et plus les inserts de faible épaisseur. Plusieurs cas de rupture
continu, et pour le grand diamètre il était le plus fort et d'inserts en PEHR ont ainsi été publiés [42, 43].
continu, indépendamment de la charge. L'examen des Le meilleur comportement à l'usure du PEHR per-
pièces a montré que l'endommagement de surface était met d'envisager des diamètres de tête plus grands,
moindre avec la céramique. Pour les auteurs, les avan- comme l'ont proposé et démontré Muratoglu et al. dès
tages du couple C-C de grand diamètre sont à modé- 2001. Entre 22 et 32 mm, le taux d'usure est indépen-
rer, compte tenu de leur moins bon comportement en dant du diamètre des têtes. Une étude sur simulateur a
cas de défaut de lubrification. comparé l'usure d'un PE conventionnel et d'un PEHR
Le phénomène de grincement serait donc lié à une face à une tête métallique de 22 mm pendant 20 mil-
lubrification défaillante qui pourrait traduire un lions de cycles. L'usure linéaire était de 0,015 mm et
dysfonctionnement du couple céramique. Dans ces de 0,12 mm par million de cycles et le taux d'usure
conditions, l'augmentation des moments de friction de 1,5 mg et de 14 mg par million de cycles, pour le
engendrerait des contraintes supplémentaires à l'inter- PEHR et le PE conventionnel respectivement [30, 31].
face tête-col [18, 39]. Une autre étude sur simulateur a comparé l'usure d'un
L'influence du diamètre de la tête sur l'apparition PE standard et d'un PEHR face à des têtes métalliques
de bruits anormaux n'est pas acceptée par tous les de 28 et 32 mm après 5 millions de cycles. Le PEHR
auteurs. Tai et al. n'ont retrouvé aucune corrélation procurait une réduction significative de l'usure [44].
entre la survenue d'un grincement et le diamètre de la Plank et al. ont évalué l'usure d'inserts de très
tête fémorale dans une série de 206 PTH consécutives faible épaisseur face des têtes de large diamètre sur
au recul moyen de 28 mois [40]. un modèle en éléments finis [45]. Selon ce modèle, les
Ainsi, il semble que les têtes de grand diamètre contraintes sur un PEHR de 3 mm d'épaisseur seraient
exposent aux mêmes risques pour le couple C-C moins fortes avec des têtes de 38 mm et plus que celles
que pour le couple M-M. Cependant, l'avantage du exercées sur un insert d'épaisseur 5 mm par des têtes
couple C-C est sa meilleure mouillabilité qui lui confère de petit diamètre.
une plus grande protection contre une interruption du Cependant, il y a certainement une limite à la dimi-
film de lubrification. Pour Bishop et al., les avantages nution de l'épaisseur de l'insert, comme montré par
théoriques du grand diamètre doivent néanmoins Johnson et al. qui ont testé sur simulateur quatre
être mis en balance avec leurs inconvénients en cas épaisseurs différentes de PEHR (1,9 à 7,9 mm) face à
de perturbation de la lubrification [38]. L'apparition une tête de 36 mm [46]. Le taux d'usure après 2,4 mil-
de bruits anormaux, en particulier d'un grincement, lions de cycles était plus important pour la plus petite
pourrait traduire une anomalie de lubrification et le épaisseur mais celle-ci restait inférieure à l'usure habi-
premier signe de dysfonctionnement du couple. tuelle d'un PE conventionnel.
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Ces données expérimentales trouvent leur confirma-


Diamètre de tête et usure tion clinique dans l'étude prospective d'Engh et al. qui
ont comparé à 10 ans de recul l'usure d'un PE conven-
L'utilisation de têtes de grand diamètre a longtemps été tionnel (114 patients) et d'un PEHR (116 patients) face
freinée pour le couple M-P par le risque accru d'usure à une tête métallique de 28 mm. Pour le PEHR, le taux
par adhésion ou par abrasion. En effet, la surface de d'usure linéaire était de 0,04 mm/an et aucune reprise
contact et la distance de glissement de la tête qui aug- pour usure n'avait été relevée ; pour le PE conventionnel,
mentent avec le diamètre de la tête sont des facteurs le taux d'usure était de 0,22 mm/an et le taux de survie
d'usure. Le volume de débris produit est proportionnel à 10 ans était de 94,7 % [47]. Aucune ostéolyse signifi-
au diamètre de la tête et à la distance parcourue par cative n'était retrouvée pour le PEHR alors qu'elle était
celle-ci à chaque mouvement. Or, ces débris sont une présente dans 22 % des cas avec le PE conventionnel.
des causes des descellements aseptiques. Ainsi, le taux Dans ces conditions, on peut penser que le com-
d'usure se majore de 7,5 à 10 % pour un couple M-P portement à l'usure du PEHR permet l'emploi de
quand le diamètre de la tête augmente de 1 mm [41]. tête de grand diamètre. C'est ce que montre l'étude
194 D. Mainar , J. Girar

de Lachiewicz et al. de 84 hanches à un recul moyen une tête chrome-cobalt et un cône en alliage de titane.
de 11 ans [12]. Dans une cohorte de 84 hanches avec Les contraintes augmentaient proportionnellement au
des têtes métalliques de 26 à 40 mm, Lachiewicz et al. diamètre de la tête. Les valeurs doublaient entre 28 et
ont constaté à un recul minimal de 10 ans une usure 40 mm. Au-delà de 40 mm, le pic de contrainte aug-
linéaire moyenne de 0,024 mm/an et une usure volu- mentait de respectivement 3,5 %, 9,5 %, 24 %, 40 %
métrique de 12,19 mm3/an. Il n'y avait pas de diffé- et 51 % pour des diamètres de 40, 44, 48, 52 et 56 mm.
rence d'usure linéaire entre les diamètres de tête. En Il existait une corrélation directe entre le diamètre et
revanche, l'usure volumétrique était plus importante l'importance des contraintes. Les auteurs concluaient
avec les têtes de 36 et 40 mm qu'avec les plus petites en une nécessaire répercussion sur les phénomènes
têtes. Une ostéolyse périprothétique limitée était de relargages ioniques et de corrosion, sachant que si
retrouvée dans 12 cas, sans lien avec le diamètre des la stabilité s'améliorait de 10 % de 32 à 36 mm, elle
têtes et l'usure volumétrique. n'augmentait que de 4,7 % de 40 à 48 mm.
Chua et al. ont étudié l'influence de l'épaisseur du En effet, une tête de large diamètre engendre un
PEHR dans une population de 64 patients asiatiques couple de torsion et un moment de flexion plus impor-
avec des cotyles de petite taille [48]. Au recul moyen tants qui s'exercent tout le long de la jonction quand
de 8 ans, il n'y avait pas de différence d'usure entre les la hanche est en charge, ce qui crée des micromouve
inserts de moins ou de plus de 7 mm d'épaisseur et pas ments entre la tête et le col. Ces micromouvements
de différence de taux de complications mécaniques. (inférieurs à 100 micromètres) à l'origine du méca-
Nebergall et al. ont également montré par RSA nisme de fretting, ou usure de surface, ont un effet
(radiostereometric analysis) le bon comportement délétère sur le film de passivation qui protège le métal
du PEHR face à des têtes de grand diamètre dans un de la corrosion. Comme la couche d'oxyde ne peut pas
travail prospectif à 13 ans de recul, comparant des se reconstituer assez rapidement, le substrat métallique
têtes de 28 et 36 mm [49]. L'usure était de 0,05 mm à est exposé aux fluides biologiques qui engendrent une
13 ans, sans différence entre les deux diamètres. corrosion. Celle-ci peut générer une libération d'ions
En conclusion, les recommandations sont les métalliques, favoriser l'usure à troisième corps ou des
suivantes : phénomènes de réactions tissulaires locales de type
• il ne faut pas descendre en dessous de 6 mm d'épais- ALTR (adverse local tissue reaction) identiques à ceux
seur pour les inserts en PE standard ; décrits pour les couples M-M de grand diamètre [3].
• il semblerait possible de limiter l'épaisseur des inserts Les phénomènes locaux de corrosion et fretting à la
en PRHR à 3,9 mm sans risque d'usure particulier, ce jonction tête-col peuvent être responsables de la faillite
qui laisse la possibilité d'utiliser des têtes de 36 mm pour de la prothèse et conduire à une réintervention.
des cupules cimentées de 44 mm, et des têtes de 32 mm Le comportement à l'interface est également
pour des cupules cimentées de 40 mm. Avec un metal- influencé par d'autres facteurs : la nature des maté-
back de 4 mm d'épaisseur, une tête de 36 mm est compa- riaux en présence, la géométrie des implants, l'offset,
tible avec une cupule de 52 mm de diamètre et une tête l'indice de masse corporelle, le processus de fabrica-
de 32 mm avec une cupule de 48 mm de diamètre. tion, la position des implants, des endommagements
de surface lors de la pose, etc.
Il est difficile d'estimer l'incidence clinique des phé-
Effet des têtes de grand diamètre nomènes de fretting-corrosion à l'interface tête-col.

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sur le cône morse Dans une étude de 569 reprises de PTH de couple M-P,
Cooper et al. ont considéré que 10 d'entre elles étaient
La modularité est pratiquement la règle pour les PTH. directement liées à ces phénomènes. Cependant, cer-
C'est la raison pour laquelle l'interface tête-col a sus- tains arguments laissent à penser que les têtes de grand
cité beaucoup d'interrogations et de recherches, d'au- diamètre constituent un risque supplémentaire pour
tant que certaines faillites cliniques ont incriminé cette l'interface tête-col et pour la survie des implants [51].
jonction. Un premier argument de l'influence potentielle du dia-
De nombreux facteurs influencent le comportement mètre de la tête résulte de l'étude du registre austra-
à l'interface tête-col ; l'augmentation du diamètre de lien, qui montre un plus grand taux de révision pour
la tête fémorale, en majorant les contraintes locales, les PTH à couple M-M à tête de diamètre supérieur
est l'un d'entre eux. Lavernia et al. ont bien montré à 32 mm que celui des implants à tête de moins de
sur un modèle 3D l'effet du diamètre de la tête sur les 32 mm [52]. De plus, le diamètre de la tête fémorale
contraintes à l'interface tête-col [50]. Les auteurs ont a été associé à la sévérité des mécanismes de fretting-
simulé l'effet de la marche sur une jonction 12/14 entre corrosion dans les prothèses à couple M-M pour des
Le diamètre des têtes prothétiques : y a-t-il une limite ? 195

valeurs de 36 mm et plus [38]. Ces phénomènes sont fretting-corrosion augmente avec le diamètre des têtes,
particulièrement accentués en cas de défaut de lubrifi- une tête en céramique semble mieux en limiter les
cation entre tête et insert, responsable d'une augmen- conséquences.
tation de contrainte entre tête et col [53]. De nombreuses publications semblent le confirmer.
Dyrkacz et al. ont clairement montré que l'augmen- • Munir et al. ont étudié le cône de 49 tiges explan-
tation du diamètre des têtes fémorales aggrave les tées. Le score de corrosion était plus élevé pour une
phénomènes de fretting-corrosion [54]. Les auteurs tête métallique (qu'il s'agisse d'un couple M-M ou
ont étudié 74 têtes et 40 cônes provenant de 74 révi- M-P) que pour une tête en céramique (qu'il s'agisse
sions de PTH, toutes causes confondues. Il s'agissait de d'un couple C-C ou C-P). Les couples dur-dur
têtes et cônes en chrome-cobalt, 12/14, avec un couple avaient toujours un score de corrosion plus élevé
M-P ; 59 têtes avaient un diamètre de 28 mm et 15 de que les couples avec PE, mais le couple C-C avait un
36 mm. Si la fréquence des mécanismes de fretting- score de corrosion inférieur au couple M-P. La corro-
corrosion n'est pas différente d'un groupe à l'autre, en sion était toujours maximale dans la région médiale
revanche les scores de corrosion pour les têtes comme du cône [59].
pour les cols étaient significativement plus élevés dans • Kurtz et al. ont également étudié les phénomènes
le groupe tête de 36 mm. Les scores de fretting ne de fretting-corrosion sur 100 cônes fémoraux de
montraient pas cette différence. Il existait une corré- tiges explantées, dont 50 avec tête métallique et 50
lation entre la corrosion de la tête et celle du col, et avec tête en céramique [57]. Les deux cohortes ont
celle-ci augmentait avec le diamètre de la tête. Enfin, été appariées selon la durée d'implantation, l'offset,
les auteurs ont constaté que ces scores variaient égale- le modèle de tige et la rigidité en flexion. Le score
ment d'un fabricant à l'autre. de fretting-corrosion était significativement inférieur
Cette opinion n'est pas partagée par Triantafyllo- pour les têtes en céramique, alors qu'il n'y avait pas
poulos et al. qui ont analysé 154 PTH à couple M-P de différence de fréquence de survenue. Il n'y avait
retirées chez 145 patients à un recul moyen de 6 ans. En pas de différence de type, ni de mécanisme de corro-
effet, ils n'ont pas retrouvé de corrélation entre le dia- sion selon la nature des têtes. La rigidité en flexion et
mètre de tête et les phénomènes de fretting-corrosion la nature de la tige avaient une influence sur les scores
[55]. En revanche, ils en ont confirmé la fréquence : 93 pour les têtes en céramique, de même que l'indice de
et 72 % de corrosion pour la tête et le cône respecti- masse corporelle, ce qui n'était pas le cas pour les
vement (score de modéré à sévère de 34 et 14 %), 73 têtes métalliques.
et 86 % de fretting (score de modéré à sévère de 23 et • Ces mêmes auteurs, dans une autre publication, à
10 %). Huot Carlson et al. ont fait la même constata- partir des mêmes explants, ont montré qu'il existait
tion dans leur étude de 78 cônes et 72 têtes, de même une différence entre l'angle du cône et l'angle de la par-
que Kurtz et al. dans leur série de 50 implants [56, 57]. tie femelle de la tête [60]. Cette différence est toujours
Le risque de développer une « trunnionite » est donc positive pour les têtes en céramique, c'est-à-dire que
bien réel, comme en témoigne la littérature. l'angle de la tête est supérieur à l'angle du cône (alors
La céramique est inerte et l'on pourrait penser qu'elle que tête et cône proviennent du même fournisseur).
génère moins de corrosion. Cependant, la différence Dans ces conditions, le contact tête-col se produit à
de module d'élasticité et de rigidité entre les maté- l'extrémité distale du cône. Pour les têtes métalliques,
riaux peut conduire à une différence de comportement la différence angulaire est variable, positive ou néga-
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sous charge et en particulier à une augmentation de tive, et la zone de contact est alors soit proximale, soit
la micromobilité pouvant générer une augmentation distale. Cependant, les auteurs ont montré que cette
de la fretting-corrosion. Ces phénomènes sont bien différence angulaire n'expliquait pas le meilleur com-
connus pour certains cols modulaires qui ont conduit portement de la céramique vis-à-vis des phénomènes
à des réinterventions. de fretting-corrosion.
Hallab et al. ont répondu à cette interrogation en • Tan et al. ont confirmé l'intérêt des têtes en céra-
comparant la fretting-corrosion entre une jonction mique pour limiter les phénomènes de fretting-
céramique-métal et une jonction M-M avec une tête corrosion en comparant deux cohortes de 52 têtes
de 28 mm sur banc d'essai [58]. Ils ont montré que en céramique appariées à 52 têtes métalliques selon
la libération d'ions cobalt et chrome était bien supé- le type de cône, le diamètre de l tête, la longueur du
rieure pour le couple M-M que pour son concurrent, col et la durée d'implantation au recul moyen de 8 ans
ce qui était également confirmé par la mesure des cou- (± 6 ans) [61]. Les scores étaient significativement
rants de corrosion. Pour les auteurs, un emboîtement meilleurs à la base et dans la région médiale du cône
plus stable pourrait être l'une des explications. Si la pour les têtes en céramique. À la partie apicale, il n'y
196 D. Mainar , J. Girar

avait pas de différence. Les scores étaient corrélés à s'exprimerait particulièrement au début de la flexion
la durée d'implantation uniquement pour les têtes jusqu'à 30° car la force d'application du muscle sur la
métalliques. tête fémorale est alors maximale [59]. Mais cet effet
• Enfin, Preuss et al. se sont intéressés aux manchons masse concerne plus largement l'ensemble des parties
d'adaptation permettant d'utiliser au cours d'une révi- molles antérieures. Par ailleurs, on ne peut pas exclure
sion une tête en céramique tout en conservant la tige que ce conflit volumique soit également la conséquence
fémorale dont le cône n'est pas trop abîmé. Ils ont d'épanchements liquidiens voire de pseudokystes.
constaté que même avec une tête de grand diamètre Enfin, il faut préciser que ces douleurs inguinales ont
et quelle que soit la nature du cône, les mécanismes de principalement été rapportées pour les couples M-M de
fretting-corrosion restaient faibles [62]. grand diamètre et pour les PTH de resurfaçage.
Pour Affatato et al., les capacités de résistance à
la torsion d'un cône morse de 12/14 sont limitées à
moins de 10 Nm le long de l'axe du col [63]. Or, un
couple C-C à tête de 36 mm génère une torsion sur le Conclusion
cône morse de 25 Nm, qui expliquerait certains échecs Les têtes de grand diamètre offrent de nombreux avan-
par usure du cône morse [39]. tages ; en particulier, ils réduisent indiscutablement le
En outre, l'implantation d'une tête de grand dia- risque d'instabilité et de luxation après PTH de pre-
mètre sur une tige fémorale courte pourrait faire cou- mière intention comme de révision. Il faut certaine-
rir un risque de descellement en raison de contraintes ment privilégier une tête de 32 ou 36 mm quand les
trop élevées à l'interface tige-implant. conditions anatomiques le permettent.
Il faut encore noter que certains auteurs privilégient Les biomatériaux actuels (PEHR, céramique com-
un col moyen voire long pour augmenter le contact posite, etc.) constitutifs des couples de frottement
entre le cône morse et la tête. autorisent ces têtes de grand diamètre sans risque
véritable d'usure ou de rupture rédhibitoire à ce stade
Complications spécifiques des connaissances, si l'on en juge les séries cliniques
des têtes de grand diamètre publiées avec un recul encore limité. Cependant, il
faut rester encore prudent pour le plus long terme car
Si l'utilisation de têtes fémorales de grand diamètre certaines questions ou certains phénomènes observés
offre de nombreux avantages, certains inconvénients n'ont pas encore d'explications définitives pour des
ont été mis en avant, nonobstant ceux déjà évoqués. diamètres plus importants.
Ainsi, les têtes de grand diamètre seraient plus volon- Le meilleur compromis semble correspondre aux
tiers source de douleurs inguinales [64]. Certains diamètres de 32 et 36 mm. Il n'y a pas de bénéfices
auteurs évoquent un effet volume, en particulier par parfaitement établis au regard d'éventuels inconvé-
contact entre la tête et le muscle psoas-iliaque. Ce conflit nients à poser une tête de plus de 36 mm.

Réfé ences

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201

La restauration de l'offset :
un objectif flou ?
X. FLECHER, M. OLLIVIER, S. PARRATTE, J.-M. AUBANIAC, J.-N. ARGENSON

Définitions : offset fémoral, de 200 fémurs de Massin et al. [4], sa valeur était de
41,0 ± 6,2 mm (20,5 à 59 mm) et dans une étude de
acétabulaire et total 200 fémurs de Noble et al. [3], elle était de 43,0 ±
L'offset fémoral est une variable définie pour décrire 6,8 mm (23,6 à 61 mm).
l'équilibre entre le poids du corps et la résistance four- S'agissant d'une distance, il convient de connaître le
nie par les muscles abducteurs de la hanche, en parti- coefficient d'agrandissement radiologique avec toutes
culier pour stabiliser le bassin lors de la marche dans les difficultés et limites que l'on connaît.
le cadre de la balance de Pauwels. Il s'agit de « la dis- Cette mesure radiographique varie aussi en fonction
tance perpendiculaire entre le centre de rotation de la de la rotation de la hanche. Il faudrait donc en théorie
hanche et la ligne d'action des muscles abducteurs » la mesurer sur un cliché du col fémoral de face stricte.
(figure 21.1) [1, 2]. Parce que cette distance ne peut Comme il est impossible de connaître l'antéversion
pas être mesurée en pratique clinique quotidienne, fémorale de chaque fémur, il est recommandé qu'au
c'est une autre valeur radiographique fixe qui est uti- minimum on demande à ce que le membre inférieur
lisée : la distance perpendiculaire entre l'axe métaphy- soit porté en rotation interne de 20° pour réaliser le
saire du fémur (ou l'axe médian du canal fémoral) et cliché, afin d'annuler l'antéversion fémorale moyenne
le centre de rotation de la tête fémorale (figure 21.1). qui est de 20°.
L'offset fémoral doit être analysé en tenant compte La valeur de l'offset est encore liée à celle de l'angle
de la notion d'offset global, qui fait intervenir la posi- céphalo-cervico-diaphysaire (CCD), augmentant avec
tion du centre de rotation de la hanche : l'offset global le varus et diminuant avec le valgus [3].
est la somme de l'offset fémoral et de l'offset acétabu- Pour certains, la valeur de l'offset fémoral augmen-
laire [1, 2], ce dernier étant la distance perpendiculaire terait avec la taille du fémur, avec un bon coefficient
entre le U radiographique et le centre de la tête fémo- de corrélation [5] et, par conséquent, la longueur du
rale (figure 21.1). col d'une tige fémorale devrait augmenter avec ses
La valeur moyenne de l'offset fémoral radiolo- dimensions intramédullaires. Pasquier et al. [6] ont
gique se situe entre 41 et 44 mm [3]. Dans une série analysé l'offset fémoral en trois dimensions avant et

Figure 21.1. Offset fémoral, acétabulaire et global.


A. Mesure de l'offset fémoral (1) et de l'angle d'attaque des abducteurs (2). B. Mesure de l'offset global (OG), somme de l'offset acéta-
bulaire (OA) et l'offset fémoral (OF).

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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202 X. Flecher, M. Ollivier, S. P rr tte, J.-M. Au ni c, J.- . Ar en n

après PTH. Il y avait plutôt une association entre les


petits canaux fémoraux et un offset fémoral impor-
tant, ce que l'on observe souvent dans les coxa vara.
En revanche, dans une étude anatomique tridimen-
sionnelle (3D) du fémur proximal de 689 hanches de
patients candidats à une PTH, Ollivier et al. [7] ont
trouvé qu'en fait aucun critère lié au patient ne per-
mettait d'anticiper son offset fémoral.

Analyse préopératoire de l'offset


Planification 2D sur radiographie
du bassin
La planification radiographique bidimensionnelle
(2D) des prothèses totales de hanche (PTH), décrite
il y a longtemps par Müller et Charnley, reste la réfé-
Figure 21.2. Indice d'Amstutz [1].
rence. Même si la numérisation des radiographies pose
orsque les deux hanches sont anormales, le sommet du grand
des problèmes d'agrandissement, des logiciels de pla- trochanter doit être positionné tel que A/B soit supérieur ou égal
nification permettent de s'affranchir de ce problème. à 0,5 (A : distance sommet du grand trochanter – centre de rota-
Historiquement, le positionnement proximo-distal tion, B : distance centre de rotation – symphyse pubienne).
de la tige prothétique cimentée, décidé par le chirur-
gien, permettait de régler la longueur. Une éventuelle
trochantérotomie permettait, en cas de nécessité, de
régler la tension des muscles abducteurs et ainsi de
s'affranchir de reproduire l'offset fémoral. Müller,
qui n'utilisait pas la trochantérotomie, a par la suite
introduit les tiges latéralisées afin de répondre aux
problèmes posés par les offsets importants.
Le principe de la planification 2D est de « calquer »
sur la hanche « saine », c'est-à-dire la hanche controla-
térale. On commence par décider où se trouve le centre
de rotation de la hanche en utilisant des calques de
cupule. Puis on présente les calques de la pièce fémo-
rale, on en choisit une et on reproduit sa position sur Figure 21.3. Influence de la rotation fémorale sur l'offset
le fémur controlatéral. C'est donc cette dernière qui radiographique.
orsque l'on positionne le membre inférieur en rotation interne
donne des informations sur un offset qualifié de « nor-
selon une amplitude identique à celle de l'antéversion fémorale
mal » pour le patient, que l'on reproduit sur la hanche (A), la mesure radiographique est équivalente à la mesure par

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anormale. Lorsque les deux hanches sont anormales, DM. Si l'on fait une radiographie de face simple, la mesure sous-
on peut utiliser l'indice d'Amstutz qui avait montré estime l'offset (B), et dans le cas où la hanche est en rotation
que les patients ne boitaient pas lorsque cet indice était externe fixée, la mesure radiographique le sous-estime encore
respecté [8] (figure 21.2). davantage ( ).
L'analyse de l'offset fémoral, nous l'avons vu, néces-
site des clichés radiographiques avec les cols fémoraux même en cas de coxarthrose primaire, est très variable
de face pour annuler l'influence de la rotation fémo- d'un individu à l'autre. Dans l'étude du symposium de
rale [9] (figure 21.3). Cependant, cette méthode n'est la Société française de chirurgie orthopédique et trau-
pas reproductible ; la moyenne d'erreur de la mesure matologique (SOFCOT) de 2008, comparant l'offset
radiographique en fonction de la rotation du membre mesuré sur les radiographies et par tomodensitomé-
inférieur est de l'ordre de 9,7 mm, soit d'environ 20 % trie (TDM) de 50 hanches, l'offset était en moyenne de
pour un offset de 40 mm [10]. De plus, en positionnant 42,6 mm (de 26,9 à 53,9 mm) sur les radiographies et
le membre inférieur en rotation interne de principe de 45,8 mm (de 31 à 56 mm) sur les coupes TDM. En
entre 15 et 20°, on n'est pas sûr d'annuler l'antéver- comparaison avec le scanner, l'offset radiographique
sion du fémur considéré (figure 21.4) dont la valeur, était toujours sous-estimé, en moyenne de 3,2 mm
a restauration de l'offset : un objectif flou ? 203

Figure 21.5. Mesure de l'antéversion et de l'hélitorsion fémo-


Figure 21.4. Influence de l'antéversion du fémur sur l'offset rale, mesure de l'angle alpha.
radiographique. Par rapport à l'axe bicondylien postérieur (AB P) transféré pour
n cas de nulliversion (A), la mesure radiographique est équiva- les mesures au niveau du col (AB P′), l'axe d'antéversion prothé-
lente à la mesure par DM. orsque l'antéversion est de l'ordre tique désiré est de l'ordre de 15° (A). Dans ce cas, l'axe d'antéver-
de 15 à 20°, la mesure radiographique sous-estime l'offset (B) et sion du fémur proximal ou hélitorsion ( ) est très important. Afin
en cas d'excès d'antéversion, la mesure radiographique le sous- d'avoir une antéversion finale de 15°, il faudra la corriger dans le
estime encore davantage ( ). col prothétique (angle alpha) en le rétroversant.

(p < 0,0001). Dans 28 % des cas, la sous-évaluation


dépassait 5 mm, soit plus de 10 %. Pasquier et al. [6] secondaires alors qu'elle est en moyenne proche de la
ont trouvé que les offset mesurés par scanner étaient normale dans les coxarthroses primitives, mais avec
significativement plus élevés que ceux mesurés sur des variations individuelles importantes [7].
les radiographies conventionnelles, en moyenne de Le système EOS® biplanaire à basses doses d'irra-
8 %. C'est la raison pour laquelle certains proposent diation peut être utilisé pour l'analyse des membres
actuellement de mesurer l'offset dans l'axe du col par inférieurs avec une dose de rayonnement sensible-
scanner. ment inférieure à celle des radiographies convention-
nelles. Il est disponible depuis plusieurs années, mais
Planification en trois dimensions il est moins popularisé que le scanner. Des logiciels
dédiés peuvent être utilisés pour produire un modèle
La planification des PTH en 3D est disponible 3D du squelette du membre inférieur du patient et en
depuis plus de 20 ans. Elle est fondée sur un logiciel extraire des paramètres cliniques comme la torsion
qui a été initialement développé pour concevoir et fémorale, avec une fiabilité identique au scanner.
planifier les arthroplasties de hanche avec tige sur Dans une étude radio-anatomique de 43 acquisitions
mesure [11–13]. des membres inférieurs (30 patients) par EOS®, la
Cette technique compense un mauvais position- corrélation intraclasse était très forte concernant
nement du patient lors de l'acquisition de l'image en l'analyse des torsions fémorale et tibiale. Des travaux
permettant de localiser et de marquer les références sont en cours concernant la planification 3D des
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anatomiques du patient. Pour mesurer l'offset fémo- arthroplasties de hanche à l'aide du système EOS®, et
ral, le quart supérieur de l'axe du canal médullaire du leurs premiers résultats rapportés par Barbier et al.
fémur doit être identifié [5, 11, 12]. Cet axe est situé sont encourageants [14], ce qui pourrait populariser
au centre de la métaphyse fémorale dans les trois plans cet outil au même titre que la TDM. S'ils se confir-
de référence [5] et permet ainsi de mesurer l'offset réel. ment, cet outil permettra probablement de planifier
L'acquisition 3D permet d'évaluer l'hélitorsion fémo- en 3D au quotidien avec EOS®, au même titre que
rale (axe dans lequel la tige fémorale vient se position- par l'intermédiaire du scanner.
ner) et l'antéversion fémorale (axe du col fémoral),
et elle permet de calculer l'offset en trois dimensions Analyse peropératoire de l'offset
(figure 21.5). En connaissant l'axe d'antéversion pro-
thétique désiré, il est alors facile de calculer la diffé- echnique chirurgicale
rence entre l'axe d'antéversion du fémur proximal (ou
hélitorsion) et l'axe d'antéversion prothétique final Des tests peropératoires de tension des tissus mous ont
désiré et de choisir l'implant adapté. Cette hélitorsion été décrits, comme le shuck test de Charnley (décoap-
peut être extrêmement variable dans les coxarthroses tation de la tête de quelques millimètres lors de la
204 X. Flecher, M. Ollivier, S. P rr tte, J.-M. Au ni c, J.- . Ar en n

traction de la hanche dans l'axe), le dropkick test (la Une réduction de l'offset fémoral est souvent le
hanche en extension, le genou reste fléchi à 90°) [1] ; résultat de l'utilisation d'une tige avec un angle CCD
on leur adjoint le leg to leg test [1] qui est un contrôle plus grand que celui du patient [17]. L'angle CCD du
de la longueur du membre opéré par rapport à celle fémur est en moyenne de 130° ± 5° alors que l'angle
du membre controlatéral (contrôle des longueurs aux CCD d'une tige standard est de 135°. Une médiali-
talons ou aux malléoles médiales chez un patient en sation de la cupule lors du fraisage induit elle aussi
décubitus dorsal). une diminution de l'offset global (figure 21.6). Sur un
Le premier défaut de ces tests est qu'ils rendent plan mécanique, la diminution de l'offset acétabulaire
compte de la tension des tissus mous et donc de l'in- est favorable car elle diminue la résultante des forces
fluence à la fois de la longueur et de l'offset. Ils sont appliquées sur l'articulation prothétique. Mais elle
de plus influencés par l'expérience du chirurgien, le doit être compensée par une augmentation de l'offset
type d'anesthésie et d'autres facteurs, comme la voie fémoral pour ne pas diminuer l'offset global, tout en
d'abord ou l'installation en décubitus latéral, dorsal évitant d'allonger le membre inférieur (figure 21.6).
avec ou sans table orthopédique, ce qui les rend peu Il s'agit d'un problème connu de longue date, en par-
reproductibles. Pour contrôler la longueur, on peut ticulier dans les coxa vara (figure 21.7), la tension des
aussi utiliser un point de référence pris sur le bassin, muscles fessiers pouvant se faire par l'allongement du
stable, et mesurer avant et après l'implantation pro- membre si l'on ne dispose pas d'un implant fémoral
thétique la distance qui le sépare d'une référence fémo- capable de reproduire l'offset. Dans le cadre d'une coxa
rale, à l'aide d'un étrier [15], mais cela nécessite une valga, c'est le respect de la longueur du membre qui doit
plus grande incision ou une incision séparée. faire craindre au chirurgien une augmentation de l'offset
L'inconvénient commun à tous ces procédés est la avec un implant standard à col fixe. On peut la limiter
difficulté d'évaluation de la position du composant en « suspendant » une tige et en utilisant un col court.
acétabulaire, qui est une étape essentielle de l'inter- Il faut aussi savoir que beaucoup d'implants fémo-
vention pour l'offset. En effet, il existe une tendance raux ont une longueur de col (influençant longueur du
naturelle à médialiser la cupule lors du fraisage, en membre et offset fémoral) qui augmente avec la taille
comparaison avec le centre de rotation natif (c'est- de l'implant. Il faut donc être attentif à l'association
à-dire avant apparition des ostéophytes centraux qui entre un fût diaphysaire étroit (nécessitant une tige de
latéralisent la tête fémorale donc le centre de rota- petite taille) et une coxa vara avec un col long (offset
tion). Dans de tels cas, il faudrait non pas restaurer fémoral important). Ce type de situation doit être anti-
l'offset fémoral, mais l'augmenter pour compenser cipé par la planification préopératoire.
la diminution de l'offset acétabulaire pour respecter
l'offset global.
De plus, pour que ces techniques fonctionnent cor-
rectement, la position de la hanche doit être repro-
duite avec précision dans tous les plans avant et après
l'implantation prothétique. Des variations de posi-
tionnement du fémur en abduction/adduction de 5° à
10° induisent des erreurs de mesure significatives et
faussent les comparaisons entre les situations avant et

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après l'implantation [16].
Enfin, aucune étude à notre connaissance n'a étu-
dié l'influence de la voie d'abord et du type d'installa-
tion (en décubitus latéral ou dorsal) sur la qualité du
contrôle peropératoire de l'offset fémoral.
Figure 21.6. Exemple de modification de l'offset acétabulaire
par excès de médialisation de la cupule.
nfluence du choix l s'agissait d'une hanche modérément dyplasique (A) pour
de l'implant fémoral laquelle logiquement le centre de rotation a été médialisé afin
d'obtenir une meilleure couverture osseuse de la cupule ( ′h
La gestion de l'offset et de la longueur se fait de < h) alors que la hauteur du centre de rotation a été globale-
ment respectée. B. e choix sur l'implant fémoral s'est porté sur
manière combinée avec un implant fémoral à col fixe, une tige sans ciment à angle fixe. Afin d'obtenir une bonne sta-
y compris en utilisant la modularité de la tête prothé- bilité articulaire, le chirurgien a choisi un col extralong (noter la
tique avec ses trois ou quatre (s'il existe un col extra- tête à jupe) au prix d'un allongement probablement infracenti-
long) profondeurs. métrique, donc négligeable.
a restauration de l'offset : un objectif flou ? 205

B C
Figure 21.7. Gestion d'une coxa vara lors d'une PTH.
A. 'utilisation d'une tige à col standard ( ′D2 < ′D 1) diminue l'offset (OF2 < OF1) et diminue la tension des abducteurs (Abd2
< Abd1). B. Pour avoir la même tension musculaire (Abd1 = Abd2) tout en conservant une tige à col standard (OF1 > OF2), on peut
allonger le membre. . Pour avoir la même tension musculaire (Abd1 = Abd2) tout en conservant la même longueur de membre, il faut
utiliser une tige latéralisée (OF1 = OF2, ou ′D1 = 'D2).

Le type de fixation interfère aussi avec la gestion


de l'offset. Le positionnement proximo-distal (« en
Apport de la chirurgie assistée
hauteur ») est bien plus facile à décider avec une tige par ordinateur ( AO)
cimentée qu'avec une tige sans ciment, de surcroît à L'utilisation de la navigation dans l'arthroplastie de
appui métaphysaire, ou dite anatomique. En effet,
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hanche a augmenté au cours des dernières années. Des


dans ce dernier cas, la tige se « cale » dans une posi- études ont démontré une amélioration importante et
tion, certes souvent déterminable en préopératoire, statistiquement significative de la précision du place-
mais peu ou pas modifiable en peropératoire. ment de la cupule acétabulaire à l'aide de la navigation
En cas de grande déformation, il peut être utile de dis- par rapport aux méthodes à main levée.
poser de cols modulaires, surtout et à nouveau quand on Néanmoins, l'offset fémoral est principalement
utilise des tiges sans ciment à fixation métaphysaire. Le influencé par le placement de la tige fémorale et il
chirurgien ne peut guère modifier l'antéversion de la tige existe peu d'études publiées sur le placement de la tige
qui se positionne dans l'axe d'hélitorsion fémorale. Il fémorale à l'aide de la navigation :
faut donc au moindre doute mesurer cette torsion fémo- • L'étude prospective appariée de Manzotti et al.
rale par un examen 3D. En peropératoire, on pourra [18], comparant la navigation à une technique à main
assurer la gestion de l'antéversion en prenant garde à levée conventionnelle avec une même tige fémorale
ce que cette dernière n'interfère pas avec la gestion de la non modulaire droite, a montré que, dans le groupe
longueur et de l'offset, grâce à l'utilisation de cols modu- navigation, l'inégalité de longueur postopératoire
laires « homothétiques », voire de cols sur mesure. moyenne était significativement réduite à 5,06 mm
206 X. Flecher, M. Ollivier, S. P rr tte, J.-M. Au ni c, J.- . Ar en n

(0–12), comparativement à 7,64 mm (0–20) dans le trouvé une moyenne de 23° de variation de l'orien-
groupe à main levée, mais l'offset fémoral n'a pas été tation du bassin en abduction-adduction, 16° en
mesuré dans cette étude. De plus, 5 patients du groupe flexion-extension et 40° en version. Pour une longueur
navigation (10,4 %) avaient une inégalité de longueur identique des deux membres inférieurs, une attitude
postopératoire de plus de 10 mm. en adduction du bassin fera mesurer le membre infé-
• Renkawitz et al. [19], dans une étude sur os secs, rieur comme étant trop court et inversement en cas
ont postulé que la navigation sans imagerie pourrait d'abduction.
aider le chirurgien à restaurer à la fois la longueur À défaut d'être parfaite, cette technique permet pro-
du membre inférieur et l'offset fémoral et ils ont éga- bablement, associée à la planification, de limiter le
lement réalisé une étude sur sujets anatomiques, à risque d'une importante inégalité de longueur. Notre
l'aide de mesures tomodensitométriques. Ils ont mon- expérience est que la navigation permet de diminuer
tré que les évaluations peropératoires de la longueur les écarts-types au même titre qu'un ancillaire fiable
des membres inférieurs et de l'offset fémoral étaient et/ou l'expérience chirurgicale, en particulier sur le
fiables et précises grâce à un algorithme de calcul sans versant acétabulaire, mais n'apporte pas d'aide pour
imagerie. restituer l'offset fémoral.
• Cependant, une étude rétrospective non appariée de
Mainard et al. [20] n'a montré aucun avantage clair de
l'utilisation de la navigation dans l'arthroplastie de la Influence de l'offset fémoral
hanche par rapport à une technique à main levée. sur les résultats de l'arthroplastie
• Une étude rétrospective appariée a comparé la res-
tauration de la longueur des membres et de l'offset ésultats fonctionnels
fémoral à l'aide de la navigation ou à main levée. Une
Un faible offset fémoral peut entraîner une boiterie
tige fémorale modulaire courte avait été utilisée. La
[24], la nécessité d'une aide à la marche et une ins-
navigation a donné des résultats nettement meilleurs
tabilité articulaire [1]. Le fémur se rapproche du bas-
pour ces deux paramètres [21]. Cependant, cette étude
sin, réduisant l'amplitude des mouvements [[17, 25] et
ne comportait que 22 patients dans chaque groupe.
favorisant un effet came [26].
Des critères d'exclusion stricts avaient été utilisés
On pourrait s'attendre à ce que l'augmentation de
et seuls des patients sans déformation de la hanche
l'offset fémoral améliore les amplitudes articulaires.
avaient été inclus. Enfin, le logiciel de navigation utilisé
Dans une étude cadavérique, Matsushita et al. [27] ont
n'avait évalué que le col modulaire de l'implant final et
montré que l'augmentation de l'offset fémoral amélio-
n'avait pas été en mesure de guider le positionnement
rait significativement les amplitudes articulaires. Ce
de l'implant d'essai ou de la tige définitive [21].
résultat n'a pas été confirmé dans une étude cinéma-
• Dans une étude prospective d'une série consécu-
tique peropératoire avec un système de navigation ana-
tive randomisée de 125 PTH guidées par navigation
lysant les amplitudes articulaires lors de l'implantation
ou contrôlées par fluoroscopie, avec les mêmes com-
des tiges d'essai puis définitives de la même taille en
posants prothétiques sans ciment et une voie d'abord
antérolatérale mini-invasive en décubitus latéral, la version standard ou latéralisée [28].
Un défaut de restauration de l'offset est une cause
longueur des membres inférieurs, l'offset fémoral et
d'insatisfaction des patients [17] et a de profondes
l'offset total (somme des offsets fémoral et acétabu-

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implications sur leur qualité de vie. Sariali et al. [29]
laire) ont été mesurés avant et après l'implantation
ont réalisé une étude en laboratoire de marche sur
[22]. Une inégalité de longueur résiduelle et une diffé-
28 patients après implantation d'une PTH. Les patients
rence d'offset global et fémoral inférieure à 5 mm ou
ayant un offset diminué de 15 % ou plus par rapport
à 8 mm ont été obtenues dans 93 % et 98 % respecti-
au côté sain avaient plus de troubles de la marche.
vement dans le groupe de navigation, et dans 54 % et
95 % respectivement dans le groupe fluoroscopie. Les
auteurs concluaient que la fluoroscopie peropératoire sure, descellement et survie
et la navigation sans imagerie avaient une précision des implants
équivalente pour rétablir la longueur du membre infé-
rieur et l'offset global et fémoral. Ces résultats sont Une diminution de l'offset peut aussi avoir une
probablement liés au fait que le fait de prendre le bas- influence sur la survie des implants [30–33] éventuel-
sin comme référence peut en soi induire des erreurs. lement par l'intermédiaire d'une usure prématurée du
• DiGioia et al. [23] ont étudié par la navigation le polyéthylène [17, 34]. Asayama et al. ont démontré
mouvement du bassin pendant une arthroplastie et ont qu'un offset fémoral élevé réduit l'énergie requise
a restauration de l'offset : un objectif flou ? 207

pour la marche, la résultante des forces appliquées sur Une étude cadavérique sur 5 fémurs a montré une
l'articulation et l'usure du polyéthylène [24]. Une aug- augmentation des micromouvements à l'interface os-
mentation de l'offset fémoral améliore par ailleurs la implant lorsque l'offset augmentait [26]. Mais il n'y
tension des tissus mous et la stabilité. avait que 5 cas et la comparaison se faisait entre 28 et
Peu d'études ont démontré les inconvénients d'un 53 mm d'offset.
offset important. L'augmentation de l'offset induit Une étude clinique analysant au recul de plus
souvent une sensation d'allongement du membre par de 5 ans la survie d'une tige cimentée high offset
excès de tension des muscles abducteurs, qui se nor- (Lubinus™ SP2 117°) retrouvait une survie inférieure
malise le plus souvent en quelques mois. Il n'a jamais à celle de tiges à angles CCD plus conventionnels
été démontré une éventuelle relation entre un excès (126° ou 135°) [35].
de latéralisation et des douleurs à type de tendinite Il en était de même dans l'étude de Cantin et al. avec
des muscles fessiers. En revanche, l'augmentation de un risque de descellement significativement plus élevé
l'offset, même pour normaliser l'offset (par exemple pour les tiges latéralisées que pour les tiges standard
dans le cas d'une dysplasie de hanche), peut induire un (1,8 % versus 0 % à 2,3 ans de recul moyen [1–7]) [36].
« abductum », à savoir que la hanche se met en abduc- Johnston et al., à l'aide d'un modèle mathématique,
tion antalgique pour détendre les muscles fessiers, sur- ont rapporté que l'augmentation de la latéralisation de
tout en cas d'allongement associé, même programmé, la tige augmentait le moment de flexion de la prothèse
avec éventuellement égalisation de la longueur des avec une augmentation de la pression sur la corticale
membres inférieurs. Le bassin devient oblique en bas médiale et de la traction sur la corticale latérale, et
et en dehors du côté opéré et induit une sensation pouvait conduire à une défaillance précoce de la fixa-
d'inégalité de longueur avec le membre opéré res- tion composant fémoral [37].
senti comme le plus long (figure 21.8). Ces sensations À l'inverse, Davey et al. [26], dans une étude expé-
s'estompent en quelques semaines ou mois. Dans les rimentale sur des fémurs cadavériques, ont conclu
coxa valga où l'offset est le plus souvent inférieur à qu'un offset plus important diminuait l'importance
la normale, on pourrait imaginer qu'on cherche à le de la force résultante appliquée sur la hanche et de
normaliser en l'augmentant, sous réserve de connaître la force des abducteurs lors de l'appui monopodal,
la normale pour chaque individu. sans augmentation significative des contraintes dans le
L'inconvénient d'un important offset est un moment manteau de ciment médial.
de flexion de la tige fémorale accru, exposant au risque À notre connaissance, très peu d'études ont rapporté
de descellement ou de rupture de la tige. l'influence de l'offset fémoral sur l'usure.
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A B C D
Figure 21.8. Exemple de l'influence de l'abductum dans la fausse inégalité de longueur des membres inférieurs.
A. n préopératoire, le membre inférieur gauche (côté à opérer) est plus court. B. ne fois la hanche recentrée, les deux membres ont
la même longueur. Mais les muscles fessiers à gauche étant rétractés, le patient abducte sa hanche pour les détendre (on le constate
parfois le patient couché dans son lit en postopératoire). . ors de la remise en charge, les fessiers sont encore rétractés et alors que le
patient a deux membres inférieurs de longueur identique, le bassin est oblique du côté opéré. e patient a une sensation d'inégalité de
longueur, le côté opéré étant ressenti comme plus long. D. ne fois les muscles fessiers détendus, le bassin se rééquilibre et la sensation
d'allongement disparaît.
208 X. Flecher, M. Ollivier, S. P rr tte, J.-M. Au ni c, J.- . Ar en n

• Sakalkale et al. [34] ont étudié 17 arthroplasties de deux PTH différentes à restaurer l'offset fémoral
totales de hanche bilatérales réalisées chez 17 patients normal et ont ensuite comparé l'usure du PE dans les
pour comparer l'usure du polyéthylène (PE) de chaque deux groupes. Lorsque l'implant restaurait l'offset
côté. Les implants utilisés des deux côtés étaient simi- fémoral à moins de 1 mm de la normale, il n'y avait
laires, sauf pour l'offset, avec d'un côté un composant pas de corrélation entre l'offset et l'usure. Lorsque l'im-
fémoral à offset standard, et de l'autre un composant plant réduisait l'offset fémoral de 7 mm en moyenne,
fémoral latéralisé. Le seul paramètre statistiquement ils observaient une forte corrélation entre la réduction
différent entre les deux côtés était l'offset fémoral. de l'offset fémoral et l'augmentation de l'usure du PE.
L'offset fémoral préopératoire moyen du fémur était Ils en concluaient que la sous-restauration de l'offset
de 38,8 mm. Du côté avec un composant fémoral stan- fémoral entraîne une augmentation de l'usure de PE.
dard, l'offset moyen (déterminé par les spécifications • Little et al. [39] ont rapporté que la reproduction de
du fabricant) était de 35,2 mm pour une mesure radio- l'offset fémoral à 5 mm près de l'offset fémoral natif
graphique de 31,5 mm. Du côté avec un composant était associée à une réduction de l'usure du PE conven-
fémoral latéralisé, l'offset fémoral déterminé radiogra- tionnel (0,12 mm/an versus 0,16 mm/an).
phiquement était augmenté en moyenne de 8,6 mm.
Tous les autres paramètres affectant l'usure du PE, tels
que la durée de suivi, la taille de la tête, le type de la Conclusion
tête, de la taille, de l'inclinaison et de la médialisation
de la cupule, et enfin les facteurs liés au patient étaient L'offset fémoral est un des nombreux paramètres à
les mêmes pour les deux côtés. L'analyse de régression prendre en compte pour espérer un résultat efficace et
a révélé que seuls l'offset fémoral et la taille de la cupule durable d'une arthroplastie de hanche.
étaient significativement corrélés avec le taux d'usure Des moyens modernes permettent d'analy-
linéaire. Du côté avec un composant fémoral standard, ser sa valeur, de réfléchir à sa reproduction ou à sa
le taux d'usure linéaire était de 0,21 mm/an, alors que du modification.
côté avec un composant fémoral latéralisé, le taux d'usure À notre connaissance, il convient au minimum de le
linéaire était de 0,10 mm/an. Les différences entre ces taux restaurer en évitant de le diminuer d'une valeur supé-
d'usure linéaires étaient significatives. La latéralisation de rieure à 10 % et peut-être de l'augmenter lorsqu'il
la tige fémorale dans cette série avait mieux restauré la est inférieur à la normale, sans que l'on connaisse la
biomécanique préopératoire de la hanche et diminué de valeur cible.
façon significative l'usure du PE. Cela a conduit à une La question reste ouverte en présence d'offsets éle-
réduction de 52,4 % de la vitesse d'usure linéaire du PE. vés et hors normes, en sachant que leur restauration
• Devane et Horne [38] ont étudié les facteurs affec- est probablement moins délétère que leur diminution
tant l'usure du PE des PTH. Ils ont comparé la capacité visant à les normaliser.

Réfé ences
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211

Inégalité des membres inférieurs


après prothèse de hanche
de première intention
P. HERNIGOU, A. DUBORY, D. POTAGE, F. ROUBINEAU, I. GUISSOU,
C.-H. FLOUZAT-LACHANIETTE

Phase préopératoire navigation par ordinateur. Il faut se rappeler que cette


précision pour un membre inférieur de 1 mètre de
Contrairement à ce que pensent beaucoup de chirur- long représente déjà une précision de 5 pour 1 000 !
giens, le problème de l'inégalité de longueur n'est pas Ce type de discours préopératoire est bien plus utile
un problème de millimètres, mais de gestion intellec- en cas de problème postopératoire que le discours
tuelle par le chirurgien et le patient d'une situation inverse qui consiste à dire à un patient que l'on va
souvent complexe et confuse pour les deux… tout faire pour lui garder les deux membres inférieurs
égaux alors que, dans 90 % des cas, ils ne le sont
Les données du problème pas en préopératoire et que l'on a peu de chances d'y
arriver compte tenu de la précision des mesures et
L'inégalité de longueur des membres techniques chirurgicales !
inférieurs est fréquente
L'inégalité de longueur des membres inférieurs est Chez les adultes jeunes,
fréquemment retrouvée [1] puisque 90 % de la popu-
les inégalités de longueur < 20 mm
lation présente une inégalité de longueur inférieure à
5 mm, habituellement non symptomatique et mécon-
ne sont pas symptomatiques
nue par le patient. L'usure du cartilage de la hanche L'importance clinique de l'inégalité et sa prise en
peut amener cette inégalité à 10 mm ou, à l'inverse, charge sur le plan orthopédique entraînent normale-
l'annuler selon le côté atteint. La prothèse de hanche ment une discussion lorsque celle-ci dépasse 20 mm.
qui va suivre peut ramener le patient à l'état préopéra- Lorsque l'inégalité de longueur concerne un patient
toire ou porter l'inégalité à 15 mm, inégalité qui peut après une prothèse totale de hanche (PTH), cette
devenir symptomatique. règle des 2 cm devient beaucoup plus discutable car,
Comprise entre 8 et 12 mm, elle est présente chez envi- si une inégalité de 2 cm est bien supportée par un
ron 10 % de la population à des degrés variables. Cela adulte jeune avec des articulations normales, il n'en
veut dire en pratique qu'un patient sur dix a une iné- est pas de même pour un patient âgé qui, en plus de
galité de longueur préopératoire d'environ 10 mm qui sa pathologie articulaire de hanche, a souvent des
là encore peut être réduite ou aggravée par l'arthrose ; pathologies associées du rachis, une sciatalgie, et par-
dans la majorité des cas, elle n'est pas connue du patient fois une insuffisance musculaire après la chirurgie.
et risque donc d'être méconnue par le chirurgien. L'ensemble de ces pathologies associées et la modi-
Il est donc nécessaire d'expliquer au patient qu'il fication de longueur des membres inférieurs chez un
a forcément une inégalité de longueur préopératoire patient opéré de la hanche sont suffisants pour géné-
préexistante ou acquise par l'arthrose et que l'inter- rer une insatisfaction postopératoire du patient. Il
vention va sans doute la pérenniser, même si on essaie est donc indispensable de rechercher, au cours d'une
de la corriger. De toutes les manières, s'il ne l'a pas, il PTH, à minimiser l'inégalité de longueur postopéra-
va l'avoir puisque la précision de la mesure clinique toire en l'évaluant bien entendu en préopératoire, en
et radiologique préopératoire [2–4] ne dépasse pas cherchant à la minimiser pendant l'acte chirurgical,
5 mm et que la précision chirurgicale ne dépasse pas et enfin en l'évaluant en postopératoire lorsque cela
5 mm même avec les techniques sophistiquées de apparaît nécessaire.

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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212 P. Hernigou, A. Dubory, D. Pot ge, F. oubine u, . uissou, C.-H. F ouz t-L niette

L'inégalité de longueur qui vont conditionner les possibilités de correction


peut être réelle ou fonctionnelle peropératoire.
Les bassins obliques peuvent être classés en trois
L'inégalité réelle est une inégalité existant de manière catégories : obliquité suprapelvienne, obliquité intra-
métrique sur les membres inférieurs. Elle n'est pas pelvienne et obliquité infrapelvienne.
forcément ressentie par le patient jusqu'à 15 mm. • L'obliquité suprapelvienne est habituellement d'ori-
L'inégalité fonctionnelle [5] est celle qui est ressentie gine rachidienne ; c'est celle qui pose les problèmes les
par le patient même si les deux membres inférieurs plus difficiles à résoudre.
sont égaux, ce qui peut être le cas lorsqu'il existe un • L'obliquité infrapelvienne a pour origine une inéga-
flexum, une attitude vicieuse, une insuffisance muscu- lité des membres inférieurs qui n'est pas située dans la
laire, etc. région de la hanche, et qui peut être par exemple une
Il faut poser la question directe au patient : « Avez- inégalité de longueur des tibias.
vous l'impression que vos deux membres inferieurs • L'obliquité intrapelvienne est celle qui a pour ori-
sont égaux ? » L'impression est le reflet de l'inéga- gine une anomalie située entre les crêtes iliaques et
lité fonctionnelle qui est aussi importante à prendre l'ischion, c'est-à-dire le plus souvent au niveau de la
en considération (voire plus) que l'inégalité réelle. hanche. C'est celle qui peut être le plus facilement cor-
Cette question n'empêche pas bien sûr de mesurer les rigée par une PTH.
membres inférieurs.

L'inégalité de longueur réelle Dans quelle catégorie de bassin


ou fonctionnelle est associée oblique se trouve le patient ?
à un bassin oblique Prothèse de hanche
Le bassin oblique se voit sur l'obliquité des sur obliquité suprapelvienne
épines iliaques antérieures qui peuvent être pal-
Les éléments qui doivent faire penser à un bassin
pées (figure 22.1) ou sur la radiographie du bassin
oblique d'origine haute sont les suivants :
debout. Une fois confirmée l'obliquité du bassin, elle
• existence d'une scoliose (figure 22.2), d'une arthro-
doit être classée dans l'une des catégories suivantes
dèse rachidienne dans les antécédents, d'une arthrose
lombaire importante [6–8] ;
• le patient perçoit une inégalité des membres infé-
rieurs alors que la mesure clinique montre que ses
membres inférieurs ont la même longueur.
Lorsqu'une obliquité suprapelvienne est discutée,
le patient devrait avoir une radiographie du bassin
de face effectuée en position debout et une radiogra-
phie du bassin de face effectuée en position assise [9].
L'obliquité suprapelvienne fixée persiste en position
assise (figure 22.3) alors qu'une obliquité pelvienne

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non fixée se réduit en position assise. Les clichés faits
avec la technique EOS® permettent d'avoir un cliché
du rachis et des hanches en position debout et en posi-
tion assise sans irradiation trop importante.
L'association d'une vraie inégalité de longueur à une
scoliose [10, 11] ou une attitude scoliotique [12] est fré-
Figure 22.1. Le bassin oblique se dépiste en palpant les épines quente (environ un patient sur deux). Cela veut dire que le
iliaques antérosupérieures. patient peut avoir un bassin oblique d'origine mixte supra-
La mesure de l'inégalité est différente. Pour que la mesure de pelvienne et infrapelvienne. Cette association, lorsqu'elle
l'inégalité soit possible sur un patient debout, il faut qu'il n'y ait existe (anomalie squelettique rachidienne et inégalité de
pas d'attitude vicieuse de la hanche, ni en flessum, ni en adduc- longueur des membres inférieurs), est une cause fréquente
tion, ni en abduction, ni de flessum de genou. Le dépistage de
de ressenti d'inégalité de longueur après la PTH.
l'inégalité peut se faire en appréciant la hauteur de l'épine iliaque
antérosupérieure de chaque côté, mais la mesure de l'inégalité ne La prévalence d'une obliquité pelvienne chez les
peut se faire qu'à partir d'une talonnette qui « horizontalise » les patients ayant une scoliose dégénérative à une seule
épines iliaques antérosupérieures. courbure est de 90 %, soit la quasi-totalité des patients.
négalité des membres inférieurs après prothèse de hanche de première intention 213

Si la scoliose est compensée par l'obliquité pelvienne, plus basse qui est opérée (le patient a déjà l'impression
la crête iliaque la plus haute est du côté de la conca- d'avoir un membre inférieur plus long, même s'il est
vité (voir figure 22.2). Le patient a la sensation d'avoir égal). Dans ce cas, on peut considérer comme étant le
le membre inférieur situé sous la crête iliaque la plus plus simple de vouloir accourcir le membre inférieur
haute comme étant plus court ; cela veut dire que le par l'intermédiaire de la prothèse du côté où le patient
risque d'insatisfaction du patient est le plus grand a la sensation d'avoir le membre inférieur le plus long,
quand c'est la hanche située sous la crête iliaque la mais une telle décision expose à l'évidence au risque
de luxation. Si le chirurgien choisit cette option, une
cupule à double mobilité peut certainement être dis-
cutée. Le raisonnement opposé peut être effectué sur
la hanche controlatérale. Il faut aussi se rappeler que
la tentative de compenser l'inégalité des membres infé-
rieurs ressentie sous une scoliose à bassin oblique peut
être suivie d'une inégalité de longueur iatrogénique si
une chirurgie du rachis pour arthrodèse qui corrige
une partie de la courbure est effectuée secondairement.
La prévalence du bassin oblique chez les patients
ayant une double courbure scoliotique (figure 22.4) est
presque aussi fréquente (85 %). En revanche, la règle
de l'aile iliaque la plus haute du côté de la concavité
n'existe plus : ce n'est qu'une fois sur deux que l'aile
iliaque la plus haute est du côté de la concavité de la
courbure la plus basse (lombaire). Le ressenti d'inéga-
lité de longueur des membres inférieurs qui existe chez
les scoliotiques à courbure unique est donc moins vrai
ici, ou du moins la règle s'applique moins fréquem-
ment, et le ressenti de membre inférieur plus long peut
concerner l'un ou l'autre des deux côtés. Il est donc
important de poser la question suivante au patient :
a-t-il l'impression d'avoir une inégalité des membres
Figure 22.2. Scoliose lombaire à courbure unique dont l'apex inférieurs, même si ses membres inférieurs sont égaux ?
est gauche.
L'obliquité du bassin permet au centre de gravité de rester entre
les deux membres inférieurs. Prothèse de hanche
sur obliquité infrapelvienne
L'obliquité infrapelvienne a pour origine une inégalité
des membres inférieurs qui est située sous les ischions,
habituellement sur le fémur ou sur le tibia. Elle est relati-
vement fréquente et souvent méconnue. Il est nécessaire
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Figure 22.3. En position assise, pour que le tronc reste vertical,


le bassin reste oblique, le patient reposant sur un seul ischion
(obliquité fixée d'origine suprapelvienne) pour garder l'équi- Figure 22.4. Scoliose à double courbure.
libre du tronc. Le patient peut équilibrer le tronc d'un côté ou l'autre.
214 P. Hernigou, A. Dubory, D. Pot ge, F. oubine u, . uissou, C.-H. F ouz t-L niette

d'expliquer au patient qu'elle ne peut pas être corrigée.


En effet, les inégalités de longueur préopératoires non
liées à la pathologie de la hanche persistent habituelle-
ment après l'arthroplastie. Il est en effet difficile de réta-
blir une inégalité de longueur des membres inférieurs
ayant pour siège un autre segment de membre que la
hanche sans compromettre l'arthroplastie en elle-même.

Prothèse de hanche
sur obliquité intrapelvienne
On peut retrouver les éléments suivants :
• il existe une usure simple de la coxarthrose ou un
effondrement céphalique de la nécrose ;
• la coxa vara est la source d'erreur la plus fréquem- Figure 22.5. Une adduction fixée de la hanche droite fait appa-
ment rencontrée. En effet, une arthroplastie totale raître le membre inférieur droit plus court.
dans ces hanches avec un col en varus entraîne souvent n effet, le patient est dans l'incapacité d'« horizontaliser » son
bassin (bassin oblique fixé d'origine intrapelvienne) du fait de
un allongement du membre inférieur par rapport à ce
l'attitude en adduction fixée et il raccourcit son membre infé-
qu'il était en préopératoire, en particulier si on utilise rieur gauche en fléchissant le genou. La même mesure en décu-
des pièces fémorales standardisées sans que l'on puisse bitus dorsal fait apparaître l'égalité des membres inférieurs si l'on
en modifier l'offset. Le même phénomène est observé prend soin de mesurer séparément chaque membre inférieur. À
pour les hanches protruses, l'association coxa vara et noter que l'association d'un flessum de hanche rend encore plus
protrusion étant d'ailleurs fréquente et majorant le difficile la mesure de l'inégalité de longueur compte tenu du fait
risque d'inégalité ; que, même en décubitus dorsal, le flessum persiste et oblige, pour
la comparaison avec le membre controlatéral, de mesurer chaque
• les hanches dysplasiques sont aussi à signaler, dans
segment de membre ou de positionner le membre inférieur
la mesure où le chirurgien n'est pas forcément totale- controlatéral avec le même flessum. La talonnette est dans ce
ment maître de la position dans laquelle il va implan- cas sans utilité pour mesurer l'inégalité ; elle est même un piège.
ter la cupule, ni des problèmes qu'il devra résoudre
au niveau du fémur ; de plus, si la dysplasie est unila- • cette méthode n'a de valeur que s'il n'y a pas de
térale, le bassin est habituellement asymétrique avec flessum du genou (figure 22.6) ou d'attitude vicieuse
une aile iliaque plus petite, ce qui donne une fausse de hanche (flessum adduction ou abduction), relative-
impression de bassin oblique. ment fréquente au stade de la prothèse de hanche ;
L'obliquité intrapelvienne peut aussi aboutir à un • et que la mesure de l'inégalité ne peut se faire qu'en
bassin oblique fixe secondaire à une adduction ou une plaçant une talonnette (voir figure 22.1) d'une épais-
abduction fixée d'une hanche (figure 22.5). C'est l'exa- seur déterminée sous le membre inférieur le plus court
men clinique de la hanche en décubitus qui permet de tandis que le patient est debout.
définir le caractère fixe de l'obliquité intrapelvienne. La méthode clinique directe consiste à mesurer la dis-
tance entre deux points, habituellement la crête iliaque
Comment mesurer une égalité
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antérosupérieure et la malléole interne (figure 22.7).
des membres inférieurs Parmi les problèmes associés à la mesure directe,
notons la difficulté à localiser les repères osseux chez
avant l'intervention ? les personnes obèses, la mauvaise qualité et le manque
Si l'inégalité des membres inférieurs est mesurée cli- de précision du ruban à mesurer, l'inconfort du patient
niquement et radiographiquement chez la même per- durant l'examen et la mise en position non fonction-
sonne, les deux méthodes révèlent une disparité, et nelle pour les inégalités structurelles. Pour être consi-
l'inégalité mesurée sur la radiographie est souvent déré fiable, un examen clinique doit se dérouler de la
moins précise que celle observée cliniquement. façon suivante :
• patient couché en décubitus dorsal, les deux genoux
aussi étendus que possible ;
Évaluation clinique • membres inférieurs en position neutre ;
La méthode clinique indirecte consiste à palper les • mesure de la distance entre l'épine iliaque antérosu-
épines iliaques antérosupérieures sur un patient périeure et la malléole interne pour chacun des deux
debout. Il convient néanmoins de se rappeler que : membres inférieurs.
négalité des membres inférieurs après prothèse de hanche de première intention 215

Il peut parfois être nécessaire d'apporter des modifi- Différents facteurs peuvent avoir une influence
cations à l'examen clinique, particulièrement dans les sur les effets de l'inégalité des membres inférieurs,
cas d'inégalité fonctionnelle (par exemple ankylose de notamment :
la hanche en abduction ou de la cheville en équin). Une • l'âge de la personne ; un enfant peut tolérer une iné-
attitude vicieuse soit dans le plan frontal (abduction ou galité des membres inférieurs mieux qu'un adulte en
adduction), soit dans le plan sagittal (flessum) entraîne raison de sa souplesse ;
une inégalité de longueur d'environ 1 cm pour 10°. • la durée de l'inégalité des membres inférieurs (appa-
Lorsque cette attitude vicieuse existe, il n'est plus pos- rition à l'âge adulte ou dans l'enfance) ;
sible de mesurer l'inégalité de longueur cliniquement • la présence d'autres anomalies (par exemple arthro-
sur un patient debout. Cette inégalité ne peut alors être pathie, arthrodèse, remplacement articulaire, défaut
appréciée qu'en décubitus, soit en plaçant le membre d'alignement des membres inférieurs).
inférieur controlatéral dans la même position que le
membre dont la hanche est fixée en attitude vicieuse,
soit en mesurant directement la longueur de chaque Mesure radiologique
membre inférieur séparément. Radiologiquement, la recherche d'une inégalité de
longueur sur une radiographie de bassin est soumise à
une interprétation dépendante des conditions dans les-
quelles a été prise la radiographie en position debout
ou couchée [13]. Une inégalité de longueur sur un cli-
ché (figure 22.8) pris en position debout peut s'expli-
quer [14] par trois possibilités :
• une inégalité vraie des membres inférieurs ;
• une simple attitude vicieuse sans inégalité réelle des
membres inférieurs ;
• l'absence d'appui sur une hanche douloureuse.
Une simple attitude vicieuse en adduction fixée de la
hanche fait apparaître le membre inférieur plus long ;
en effet, le patient étant habituellement dans l'inca-
pacité d'horizontaliser son bassin du fait de l'attitude
en adduction fixée, il raccourcit son membre inférieur
controlatéral en fléchissant le genou. Lorsque le cliché
du bassin est pris, il fait apparaître une inégalité appa-
rente qui n'est simplement liée qu'à l'attitude vicieuse.
Enfin, l'absence d'appui sur une hanche douloureuse
fait apparaître le membre inférieur qui n'a pas d'appui

Figure 22.6. L'inégalité oblige le patient à tricher en fléchissant


le genou du côté le plus long.
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Figure 22.7. Mesure de l'inégalité de longueur chez un patient Figure 22.8. Les figures démontrent la difficulté d'interpréter
couché. une radiographie de bassin prise en position debout.
216 P. Hernigou, A. Dubory, D. Pot ge, F. oubine u, . uissou, C.-H. F ouz t-L niette

plus long qu'il ne l'est en réalité, la hanche contro


latérale étant en appui monopodal et le moyen fessier
contracté faisant basculer le bassin du côté normal.
De la même manière, un cliché de bassin pris en
position couchée peut modifier l'apparence de lon-
gueur des membres inférieurs suivant la position de la
hanche (flessum ou en adduction).
Il faut donc confronter en préopératoire les données
cliniques et les données radiologiques pour dépister une
inégalité de longueur. Habituellement, il n'est pas néces-
saire d'effectuer une goniométrie pour mesurer cette iné-
galité de longueur, celle-ci étant comme une radiographie
standard, difficile à interpréter, la mesure n'étant qu'une
projection radiologique sur un plan et dépendant de la
position du patient au moment où cette projection est
effectuée. Le scanner peut être utilisé mais expose aux
mêmes difficultés d'interprétation, sauf si la reconstruc-
tion en 3D permet la mesure exacte de chaque segment. Figure 22.9. Le calque préopératoire doit tenir compte de la
position du cotyle, de l'éventuelle épaisseur de ciment, de la
section du col et du modèle de prothèse utilisé.
Quels sont les repères
permettant de contrôler
en peropératoire la longueur
des membres inférieurs opérés ?
La planification préopératoire est une étape importante
de l'arthroplastie totale de la hanche puisqu'elle permet
au chirurgien, sur la base de radiographies et de calques
(figure 22.9), de déterminer le centre de rotation de la
hanche à opérer ainsi que le type, la taille et la position
de la prothèse totale à implanter. Cette procédure stan- Figure 22.10. L'installation du patient en décubitus dorsal avec
le bassin perpendiculaire à la table d'opération accourcit appa-
dard a quelques limitations, notamment l'imprécision remment le membre à opérer du fait de l'adduction de hanche.
du facteur d'agrandissement de la radiographie. Une
erreur de quelques pour cent sur ce facteur d'agran-
dissement peut conduire à une imprécision de 2 tailles Sous les champs opératoires, la mesure de la lon-
dans le choix de l'implant, avec comme conséquence gueur des membres inférieurs n'est possible habituelle-
une inégalité de longueur. Avec l'avènement de la ment que si l'ensemble des deux membres est palpable
radiologie numérisée, ce problème s'est encore accru. durant l'intervention. La méthode utilise la palpation

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Le calque préopératoire est néanmoins utile car il des genoux fléchis et celle de la plante des pieds, mais
permet de se rendre compte des difficultés qui vont se n'est pas exempte d'imprécision en peropératoire.
présenter. Le calque consiste à superposer les éléments Pour mémoire, il faut se rappeler que si la mesure des
prothétiques dessinés sur un transparent à la radiogra- membres inférieurs en décubitus dorsal est relative-
phie. La méthode est simple dans son principe et doit ment facile, en décubitus latéral elle est plus difficile :
aboutir théoriquement à déterminer le niveau de sec- le simple fait de positionner le patient en décubitus
tion du col du fémur en tenant compte de la hauteur latéral entraîne une inégalité apparente des membres
d'implantation des pièces cotyloïdienne et fémorale, inférieurs si la table est horizontale et le bassin vertical
et en tenant compte aussi de la disparition du carti- (figure 22.10). Le seul moyen de rétablir une égalité
lage avant l'intervention chirurgicale. Mais ce calque des membres inférieurs sur un patient en décubitus
est souvent mis en défaut au cours de l'intervention latéral est de basculer de quelques degrés la tête du
chirurgicale, en particulier si le centre de rotation de la malade vers le bas. Il faut alors s'assurer que le bassin
hanche n'est pas rétabli de manière parfaite, si le creu- est vertical (les deux épines iliaques antérosupérieures)
sement de l'os sous-chondral pour implanter la cupule et qu'une ligne imaginaire passant entre les deux
est plus important que prévu. membres inférieurs est bien horizontale (figure 22.11).
négalité des membres inférieurs après prothèse de hanche de première intention 217

Figure 22.11. En inclinant la table et en plaçant la tête vers le


bas, de manière à ce qu'une ligne théorique passant entre les
deux membres inférieurs soit horizontale, l'adduction des deux
hanches est la même et on rétablit ainsi la longueur apparente
des deux membres inférieurs.

Dans ces conditions, si les deux hanches sont mobiles


en préopératoire, l'adduction des deux hanches est
symétrique et les membres inférieurs doivent être égaux Figure 22.12. Superposer en peropératoire le centre de la tête
s'ils l'étaient auparavant. Si l'on a oublié d'effectuer prothétique de la pièce d'essai avec le centre de la tête fémo-
cette manœuvre, le membre opéré apparaît plus court rale du patient est le moyen le plus simple pour maintenir la
alors qu'il ne l'est pas, et le risque est d'allonger le longueur du fémur par le biais de la coupe du col fémoral.
membre inférieur opéré. Certes le diamètre de la tête prothétique est moins grand (22, 28
ou 32 mm) que celui de la tête fémorale, mais la différence entre
De nombreux repères osseux ont été décrits et utilisés
ces deux diamètres sera utilisée par l'implant cotyloïdien, dont le
pour vérifier que l'on retrouve la même anatomie après diamètre extérieur avoisine habituellement le diamètre de la tête
la prothèse qu'avant la luxation de la hanche. En pra- fémorale du patient (autour de 50 mm).
tique, les trois repères essentiels au cours de la prothèse
sont : le centre de la tête fémorale, le petit trochanter et
radiologiques. Cependant, les systèmes sont encore
le grand trochanter. Une des méthodes pour modifier le
relativement lourds et coûteux et n'ont pas encore véri-
moins possible l'anatomie de l'extrémité supérieure du
tablement fait la preuve d'un bénéfice clinique mesu-
fémur est de superposer le centre de la tête prothétique
rable. Dans le domaine des PTH, de nombreux systèmes
de la prothèse d'essai sur le centre de la tête fémorale,
d'aide à l'implantation de la cupule existent. Le gain
la prothèse d'essai étant donc le guide pour donner le
clinique, qui n'est encore que partiellement démontré,
niveau de la coupe (figure 22.12). C'est habituellement
devrait être d'une part une diminution du taux de luxa-
plus précis que de prendre un repère sur le petit tro-
tion et d'autre part un meilleur respect de l'égalité de
chanter car le bord supérieur du petit trochanter appré-
longueur de membres inférieurs.
cié en peropératoire ne correspond pas forcément à sa
projection radiologique sur le calque préopératoire.
La tension peropératoire des parties molles est une Comment gérer une inégalité
postopératoire ?
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aide relative et souvent trompeuse, car elle dépend de


l'anesthésie et du relâchement du patient. L'existence
d'un « piston » peropératoire est en particulier peu Quelle est l'inégalité de longueur
fiable et, si l'on désire le faire disparaître, cela peut
amener à allonger de manière particulièrement impor-
acceptable en postopératoire ?
tante le membre inférieur opéré. Tous ces éléments expliquent que l'inégalité de lon-
Une radiographie de contrôle pratiquée au cours de gueur postopératoire [16] est loin d'être exception-
l'intervention peut aider dans certaines circonstances. nelle. Elle est encore plus difficile à mesurer que
Mais elle est elle-même une source d'erreur si l'instal- l'inégalité préopératoire [17–19].
lation du patient n'est pas correcte. La confusion vient du fait qu'il est difficile de savoir
La chirurgie assistée par ordinateur [4, 15] a été lar- immédiatement en postopératoire si l'inégalité est
gement investiguée ces dernières années. L'évolution réelle ou fonctionnelle. En effet, cette inégalité peut
de la puissance des ordinateurs a contribué de manière être parfaitement méconnue du patient et du chirur-
significative au développement et aux progrès de ces gien pendant le premier mois postopératoire. Elle peut
techniques, notamment dans le traitement des images n'être que fonctionnelle et liée aux attitudes vicieuses
218 P. Hernigou, A. Dubory, D. Pot ge, F. oubine u, . uissou, C.-H. F ouz t-L niette

postopératoires : le membre opéré apparaît habituel- réintervention ne doit pas être proposée pour des iné-
lement plus long du fait de l'abduction habituelle en galités inférieures à 2 cm.
postopératoire. Si une réintervention est décidée, elle est le plus sou-
Enfin, la boiterie par insuffisance du moyen fessier vent indiquée parce que le membre inférieur opéré
après l'intervention chirurgicale et la douleur pos- a été rallongé. Il faut prévenir le patient, lorsqu'on
topératoire expliquent habituellement une inégalité décide d'une telle réintervention, que le raccourcisse-
fonctionnelle apparente, même si les deux membres ment peut être source d'instabilité. En effet, il y a deux
inférieurs sont parfaitement égaux. catégories d'allongement du membre inférieur sur une
Il n'est pas rare qu'une talonnette soit mise en réé- prothèse :
ducation pour une inégalité des membres inférieurs • la première catégorie concerne un allongement du
qui n'est qu'apparente. Rajouter une talonnette en membre inférieur en rapport avec une mauvaise appré-
postopératoire immédiat ne fait qu'ajouter à la confu- ciation de la longueur du membre inférieur avant
sion du patient et il est souvent assez difficile de lui l'intervention chirurgicale ou en rapport avec une ano-
expliquer qu'il est préférable qu'il enlève sa talonnette, malie morphologique fémorale supérieure comme une
celle-ci pouvant être en elle-même responsable d'une coxa vara ou encore avec un implant cotyloïdien placé
attitude vicieuse. Quelle que soit la réalité de l'inéga- trop bas. Dans ce cas, le problème peut être éventuel-
lité de longueur des membres inférieurs en postopé- lement résolu par un changement de profondeur de la
ratoire (inégalité réelle ou simplement apparente), il tête fémorale (tête « col court ») si la pièce fémorale
faut éviter de mettre une talonnette au patient dans les est modulaire avec un cône morse. Il faut néanmoins
2 mois qui suivent l'intervention chirurgicale. Il faut se souvenir que de telles erreurs d'appréciation ne
en revanche lui expliquer, le plus tôt possible, que si donnent pas en général d'inégalité de longueur attei-
cette inégalité est réelle, elle devra éventuellement être gnant 2 cm ;
compensée, mais plus tard, par une talonnette. • lorsque l'inégalité de longueur atteint 2 cm, cette
Il faut rappeler au patient que le but de l'arthroplas- inégalité peut être la conséquence d'un allongement du
tie totale de hanche n'est pas d'égaliser les membres membre inférieur effectué par l'opérateur pour « sta-
inférieurs, mais de donner une hanche indolore et biliser » la hanche. Cela peut être dû à une malposi-
fiable dans le temps et qu'une reprise chirurgicale pour tion cotyloïdienne ou fémorale en antéversion ou en
inégalité de longueur des membres inférieurs après rétroversion, voire les deux. Dans ce cas, l'opérateur
PTH n'est habituellement pas nécessaire, et doit être a habituellement essayé de compenser l'instabilité due
le plus souvent évitée. La détermination de la hauteur à la malposition des implants par un allongement du
de la talonnette à utiliser n'est pas simple. Elle ne doit membre inférieur. Cette erreur de raisonnement initial
pas être prescrite à partir d'une mesure radiologique ne pourra pas être résolue facilement par un raccour-
mais à partir d'une appréciation clinique : l'épaisseur cissement. La modularité du cône morse est habituelle-
nécessaire est inférieure à l'inégalité mesurée sur la ment insuffisante pour autoriser un raccourcissement
radiographie (figure 22.13). La talonnette peut être de 2 cm. Par ailleurs, s'il existe une anomalie de posi-
placée sous la chaussure, en demandant au cordonnier tion des implants dans le plan axial, un raccourcis-
de ressemeler la chaussure, ce qui est plus confortable sement va augmenter le risque d'instabilité. Il faut
qu'une semelle à l'intérieur de la chaussure. donc être prudent dans l'indication de réintervention
si le patient a déjà présenté une luxation de hanche

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Quand discuter une nouvelle précédemment et qu'il a de plus le membre inférieur
rallongé. Vouloir égaliser les membres inférieurs dans
intervention ? ces circonstances peut amener à changer les implants,
Si l'inégalité de longueur est trop importante, on peut voire à envisager une stabilisation de la hanche par un
être amené à une réintervention chirurgicale. Cette cotyle rétentif ou à double mobilité.

Figure 22.13. La radiographie du patient debout fait apparaître selon le radiologue une inégalité de longueur de 18 mm.
A. ans talonnette. . Avec une talonnette de 7 mm, cette inégalité de longueur est réduite à 2 mm.
négalité des membres inférieurs après prothèse de hanche de première intention 219

Ce qu'il faut retenir Conclusion


Les patients à risque sont déterminés par les éléments L'égalisation des membres inférieurs est une partie
suivants : non négligeable de la technique opératoire des pro-
• les patients de petite taille car le col est plus court thèses de hanche. Même si l'indolence et l'améliora-
et le membre inférieur moins long : une inégalité de tion de la fonction (périmètre de marche et boiterie)
5 mm est relativement plus importante sur un membre sont les principaux objectifs de l'arthroplastie totale
de 80 cm que sur un membre inférieur de 1 mètre et de hanche, la conservation ou le rétablissement de
sera donc plus facilement perçue par un patient de l'égalité des membres inférieurs est souhaitable.
petite taille ; Un excellent résultat sur la douleur, le périmètre
• les hanches dysplasiques ; de marche, la mobilité et l'apparence radiographique
• la coxa vara, qui est la source d'erreur la plus fré- peuvent être ressentis comme un échec par le patient,
quemment rencontrée. En effet, ces hanches avec un simplement à cause d'une inégalité de longueur et d'une
col en varus entraînent souvent un allongement du boiterie. Celle-ci est particulièrement mal ressentie par
membre inférieur par rapport à ce qu'il était en préo- le patient si le membre inférieur opéré (habituellement
pératoire, en particulier si on utilise des pièces fémo- le plus court) se retrouve le plus long à la fin de l'inter-
rales standardisées sans que l'on puisse en modifier vention. Cela peut l'obliger à mettre une talonnette du
l'offset. Le même phénomène est observé pour les côté opposé « normal » pour compenser l'inégalité.
hanches protruses, l'association coxa vara et protru- Il faut se rappeler que l'inégalité des membres
sion étant d'ailleurs fréquente et majorant le risque ; inférieurs en postopératoire après prothèse totale
• les prothèses sans ciment et sans collerette, l'impac- de hanche est relativement fréquente ; elle est sou-
tion et l'absence de collerette rendant plus difficile vent explicable. Si elle est expliquée au patient, elle
l'appréciation de la position de l'implant fémoral par est souvent acceptée. Enfin, un raccourcissement sur
rapport à la coupe osseuse ; le membre opéré est beaucoup mieux accepté par le
• les scolioses avec bassin oblique fixé. patient que l'allongement du membre inférieur opéré.

Réfé ences
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minimally changed by total hip arthroplasty. Clin Orthop
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221

Comment prévenir
les tendinopathies douloureuses
après prothèse totale de hanche ?
H. MIGAUD, J. GIRARD, K. BENAD, G. PASQUIER, S. PUTMAN

Introduction 305 articles issus


de Pubmed
Les conflits douloureux et les tendinopathies après
arthroplastie totale de hanche (PTH) sont relativement
rares : moins de 5 % des prothèses totales de hanche 55 articles
se rapportant aux
douloureuses dans deux études sur l'irritation du
bursites sans prothése
muscle iliopsoas par les cupules [1, 2] ; la fréquence est
mal établie pour les tendinopathies latérales variant de 10 revues
4,4 % [3] à 36 % [4]. La plupart des publications s'y de la littérature 32 cas cliniques
comportant moins
rapportant sont des cas cliniques (figures 23.1 et 23.2)
de 5 cas
et ces symptômes sont rarement à l'origine des révisions 194 sans relation
de PTH : moins de 5 % des reprises de PTH sont liées avec le sujet
à une irritation de l'iliopsoas, et les autres conflits avec
les tendons (latéral, postérieur) ne sont pas mentionnés
dans la série continue de reprise de PTH de la Société 14 articles
sélectionnés
française de chirurgie orthopédique et traumatologique (tableau 23.2)
(SOFCOT) [5, 6]. Nous avons exclu de notre propos
les conflits intraprothétiques (effet came) dont la fré- Figure 23.2. Flowchart de sélection des articles sur les tendino-
quence et les moyens de prévention sont connus [7]. pathies latérales après prothèse totale de hanche.

Ces douleurs liées aux parties molles et tendons


autour de l'arthroplastie posent des problèmes diagnos-
52 articles issus tiques car des douleurs inguinales ou latérales après
de Pubmed
PTH ne sont pas spécifiques. En ce sens, la reconnais-
sance de la douleur tendineuse et son origine consti-
tuent le premier objectif. Pour l'irritation de l'iliopsoas
2 articles études
par la cupule, l'origine des troubles est incertaine car il
cadavériques
existe des débords antérieurs asymptomatiques et des
cupules non débordantes responsables d'authentiques
3 revues
de la littérature conflits (tableau 23.1) [1, 2, 5, 8–29]. Pour les tendi-
21 cas cliniques
comportant moins nopathies latérales, l'excès de latéralisation est souvent
de 5 cas incriminé mais, comme pour l'irritation de l'iliopsoas,
il existe des excès de latéralisation asymptomatiques
et inversement. Enfin, les conflits avec les tendons et
structures postérieures ne sont pas identifiés dans
PubMed ni dans les séries de reprises [5, 6]. Il existe
26 articles pourtant des cas cliniques de conflits avec les structures
sélectionnés
(tableau 23.1)
vasculonerveuses sortant de la grande échancrure.
Nous avons mené une analyse systématisée de la
Figure 23.1. Flowchart de sélection des articles pour l'irritation littérature destinée à répondre aux questions sui-
de l'iliopsoas par la cupule après prothèse totale de hanche. vantes : 1) Quels sont les conflits douloureux et
La prothèse totale de hanche dans tous ses états
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222 H. Migaud, J. irard, K. Benad, . Pasquier, . Put an

Tableau 23.1
Tableau résumant dans l'ordre chronologique les références sur l'irritation du muscle iliopsoas par la cupule
d'une prothèse totale de hanche
Référence Principales conclusions

1 Ala Eddine et al. [1] L'irritation de l'iliopsoas est observée dans 4,3 % des prothèses douloureuses.
Seulement 6/9 avaient un débord antérieur en TDM (1 révision avec armature et
8 primaires press-fit sans ciment). Guérison dans 7 des 9 cas : 4 après infiltration
(1 répétée) et 3 après ténotomie.

2 Bricteux et al. [2] L'irritation de l'iliopsoas observée dans 4,3 % des prothèses douloureuses. 12 cas
(10 postopératoires et 2 retardés à 3 et 5 ans) (9 primaires et 2 révisions). 4 défauts
d'antéversion, 1 vissant et 3 surdimensionnés. 8 débords antérieurs par défaut
d'antéversion ou acétabulum dysplasique et 4 vis faisant saillie.

3 Jasani et al. [8] Neuf cas dont 7 cupules non cimentées, toutes par voie de Hardinge. Amélioration
temporaire sur les 6 infiltrations. 7 révisions (ablation fragment ciment ou changement
de cupule)

4 Cyteval et al. [9] Étude cas-témoin en TDM de 8 irritations et 16 hanches révisées pour une autre cause.
4/8 (50 %) cupules surdimensionnées dans le groupe iliopsoas et 1/16 (6 %) dans
l'autre groupe. Pas d'erreur d'inclinaison dans le groupe iliopsoas. Tous les patients
avec une irritation de l'iliopsoas avaient un débord antérieur de plus de 12 mm contre
5/16 du groupe contrôle mais toujours ≤ 8 mm.

5 O'Sullivan et al. [10] Seize irritations du psoas-iliaque par la cupule (1 bilatéral) d'une prothèse sans ciment.
15 guérisons après relâchement du psoas et une révision de cupule. Le score de Harris
passant de 58 (44–70) à 91 (78–95).

6 Dora et al. [11] 30 irritations (24 anneaux vissants, 4 cimentés dont 3 dans armature, 2 impactés).
8/8 échecs infiltrations. Résultats identiques par section de l'iliopsoas (n = 6) et
changement de cupule (n = 16).

7 Hessmann et al. [12] 15 cas (11 reprises dont 6 réorientations et une section de l'iliopsoas). Lié à excès de
taille ou rétroversion ou vis ou ciment faisant saillie.

8 Vandenbussche et al. [13] La vallée du psoas est de forme variable (79 % courbe, 11 % angulaire, 10 %
irrégulière, et 0 % rectiligne) et sa profondeur est 5 mm (2 à10 mm) située 6 mm
(3 au-dessus et 15 mm en dessous) sous l'équateur de l'acétabulum, soit une
morphologie éloignée des cupules du marché. La profondeur de la vallée est fonction
du sexe mais surtout de la taille de l'acétabulum.

9 Nunley et al. [14] 19 injections de corticoïdes sous scopie dans la bourse du psoas-iliaque (1 cupule
cimentée et 18 sans ciment, 9/19 inclinaison cupule ≥ 50° et 13/19 débord antérieur

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cupule sur vue latérale). Le score de Harris progresse de 61 à 82, mais 8 (30 %) ont
eu une 2e injection et 6 (22 %) ont eu une réintervention (2 sections de l'iliopsoas et
4 révisions).

10 Bartelt et al. [15] 15/217 (7 %) de douleur antérieure après PTH métal-polyéthylène, 4/26 (15 %) après
PTH métal-métal et 7/39 (18 %) après resurfaçage.

12 Cobb et al. [16] Effet défavorable des grosses têtes métal sur la survenue d'une irritation de l'iliopsoas,
et ce indépendamment du composant acétabulaire.

13 Pattyn et al. [17] 5 irritations de l'iliopsoas après resurfaçage. Des biopsies sous arthroscopie ont
permis de redresser le diagnostic dans 2 cas sur 5 (1 infection, 1 réaction aux débris
métalliques).

14 Illical et al. [18] 21/116 (18 %) douleurs inguinales après resurfaçage au recul de 26 mois (12–61)
(13 voies postérieures, 7 voies de Ganz et 1 Hueter). Plus fréquent chez les femmes.
Une révision parmi les 3 avec épanchement et atrophie musculaire. Amélioration à
63 mois de recul.
Comment prévenir les tendinopathies douloureuses après prothèse totale de hanche ? 223

15 Gédouin et Huten [19] 10 irritations (5 cas primaires cupules impactées, 2 grosses têtes métal-métal,
1 resurfaçage, une révision) traitées par section sous arthroscopie du psoas. 8/10
guérisons, score Merle d'Aubigné 16,9 (15–18) au recul mais 3,2 mois pour récupérer
la force.

16 Jerosch et al. [20] 12 sections de psoas sous arthroscopie pour irritation (6 resurfaçages, 3 anneaux
vissants et 3 cupules impactées). Déficit de force durant 6 semaines puis résolutif.

17 Odri et al. [21] Augmentation de diamètre de cupule de plus de 6 mm par rapport au calibre de la tête
fémorale, augmente avec un facteur 26 le risque de symptomatologie d'irritation de
l'iliopsoas.

18 Stryker et al. [22] 3/114 (2 %) des révisions de métal-métal monobloc liées à une irritation de l'iliopsoas.

19 Tsai et al. [23] 2/1077 irritations du psoas-iliaque par voie antérolatérale réduite. Uniquement cupules
sans ciment.

20 Matsen et al. [24] 8 cas de corrosion tête-col entraînant épanchement dans la bourse rétro-iliaque guéris
après révision modularité.

21 Benad et al. [25] 5 plasties épaississement capsulaire avec à 1 an au minimum. Gain de 2,5 au score
Merle d'Aubigné et 18 (10–29) au score de Harris.

22 Filanti et al. [26] 35 débridements périprothétiques sous arthroscopie avec un score de Harris passant
de 44,1 (32–56) à 75,7 (50–91) à 2 ans de recul mais 83,3 (61–91) lorsque section du
tendon du psoas.

23 Park et al. [27] La survenue de l'irritation de l'iliopsoas favorisée par la différence de version entre
acétabulum natif et cupule plus que par la valeur absolue de la version de la cupule.

24 Schoof et al. [28] 12 révisions de cupule (3 rétroversions, 8/12 inclinaisons ≥ 50°, 4 anneaux vissants,
1 seule cupule cimentée). Test infiltration dans la bourse à la xylocaïne positif.
(initialement 4 voies postérieures, 5 Rottinger et 3 Hueter). 11 succès cliniques et
11 réductions du débord cupule.

25 Migaud et al. [5] Fréquence accrue (odds ratio 4,9 [2,7–9]) de révisions pour irritation de l'iliopsoas
pour les prothèses à couple céramique-céramique versus métal-polyéthylène. 8 %
révisions céramique liées au conflit versus 2 % métal-polyéthylène et 3 % métal-métal.

26 Rahman et al. [29] 3 cas d'irritation de l'iliopsoas ayant motivé la révision d'arthroplasties métal-métal à
grosse tête.
TDM : tomodensitométrie.

tendinopathies possibles après PTH et comment en Méthode de recherche


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faire le diagnostic de manière certaine ? 2) Le risque


d'irritation de l'iliopsoas est-il le même chez tous les de la littérature
patients, en fonction de la morphologie et des dimen- Nous avons fait une recherche sur PubMed avec
sions acétabulaires, de la voie d'abord et du type de les mots clés suivants : 1) « iliopsoas impingement
cupule, sans ciment ou cimentée ? 3) Comment pré- total hip arthroplasty », « iliopsoas irritation total
venir l'irritation de l'iliopsoas par la cupule ? Peut-on hip arthroplasty » ; 2) « lateral pain total hip arthro-
être amené à sectionner le tendon de l'iliopsoas au plasty » et « lateral bursitis total hip arthroplasty » ;
cours d'une PTH de première intention ? 4) Quelles 3) « total hip arthroplasty posterior pain ». Nous
sont les causes peropératoires des tendinopathies des avons sélectionné les articles à partir de ces trois
muscles moyen et petit glutéaux (voies d'abord ; off- recherches se rapportant respectivement aux irrita-
set excessif, etc. ?) et peut-on les prévenir ? 5) Existe- tions de l'iliopsoas, aux tendinopathies latérales et
t-il des conflits avec les structures tendineuses et/ou aux conflits postérieurs. Les cas cliniques (≤ 5 cas
vasculonerveuses dus à un débord postérieur et/ou rapportés) et les articles uniquement fondés sur
supérieur de la cupule ? des données in vitro ou sur cadavre et les revues
224 H. Migaud, J. irard, K. Benad, . Pasquier, . Put an

de littérature ont été exclus pour ne conserver que


les séries cliniques ou les articles de technique com-
Réponses aux questions
portant des résultats. uels sont les conflits douloureux
Résultats de la recherche et tendinopathies possibles après
bibliographique P H et comment en faire le
diagnostic de manière certaine ?
Pour l'irritation de l'iliopsoas, 52 références ont été
fournies par la recherche PubMed, mais 25 sélection- Deux groupes de tendinopathies sont identifiés formel-
nées (figure 23.1) avec les critères retenus, et les princi- lement dans la littérature : l'irritation de l'iliopsoas par
pales conclusions sont résumées dans le tableau 23.1. la cupule et le conflit latéral qualifié de « tendinobur-
Pour les tendinopathies et douleurs latérales après site latérale » ou « péritrochantérite ». Ce dernier n'est
PTH, 305 références étaient issues de Pubmed, mais pas l'apanage des PTH car il est très fréquemment
seulement 14 ont été sélectionnées (figure 23.2) avec rapporté sur hanche native. Une tendinopathie avec
les critères retenus, et les principales conclusions sont le droit de la cuisse est rapportée sous forme de cas
résumées dans le tableau 23.2. cliniques (articles exclus de l'analyse de la littérature)
Pour le conflit avec les parties molles postérieures, la et ne sera pas détaillée ici. Enfin, le conflit postérieur
recherche sur PubMed a collecté 213 références mais et les tendinopathies ne sont pas rapportés, sauf dans
n'a pas permis d'isoler un article spécifiquement dédié quelques cas cliniques de paralysie ou de souffrance
au conflit postérieur. Quelques cas cliniques sont rap- tronculaire du nerf sciatique.
portés (douleurs postérieures et paralysie sciatique liée Les tendinopathies antérieures et latérales sont révé-
aux débris d'usure, syndrome du piriforme bilatéral, lées par des douleurs et la difficulté vient de faire la
issue de vis et/ou de ciment avec douleurs postérieures preuve de l'implication de l'arthroplastie dans l'ori-
et/ou paralysie sciatique). gine des douleurs.

Tableau 23.2
Tableau résumant selon l'ordre chronologique les références sélectionnées pour les tendinopathies latérales
après prothèse totale de hanche
Référence Principales conclusions

1 Morrey et al. [30] Sur 507 PTH consécutives, comparaison des voies latérale, transtrochantérienne
et postérolatérale en termes d'ossifications (29 % latérale, 28 % transtrochantérienne, et
22 % postérieure [NS]). Moins de douleurs latérales résiduelles avec la voie postérieure en
lien avec un taux plus limité d'ossifications.

2 Weber et al. [31] Résultats des réparations de 9 avulsions des glutéaux après PTH primaire par voie latérale
au recul de 4,8 ans (2–13 ans). 5/9 réductions boiterie. ¾ résultat favorable si peu de
douleurs préopératoires, mais seulement 1/5 résultat favorable si douleurs préopératoires
importantes. La réparation permet la récupération de boiterie mais laisse persister des

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douleurs latérales.

3 Hawkins et al. [32] Pas d'influence de la pseudarthrose (n = 8) du grand trochanter sur les douleurs latérales
après 97 révisions de PTH en 22,2 mm. Au recul de 1 à 4 ans. Pas de différence en termes
de douleurs en cas de pseudarthrose trochantérienne.

4 Hendel et al. [33] 21 fractures de grand trochanter après 373 PTH par voie latérale (7,7 %) toutes chez
de femmes (15 intra-opératoires et 6 postopératoires). 4 douleurs latérales résiduelles et
8 boiteries au recul de 4 ans (1–7 ans). Pas de relation avec consolidation (19/21).

5 Pfirrmann et al. [34] État comparatif des abducteurs après voie latérale directe en IRM chez des patients
porteurs de PTH symptomatiques (n = 39) et asymptomatiques (n = 25). Les défauts
de cicatrisation étaient plus fréquents chez les patients symptomatiques (2/25 versus
22/39 pour le petit fessier et 4/25 versus 24/39 pour le moyen fessier). Pas de différence
d'atrophie entre les patients symptomatiques ou asymptomatiques, sauf pour le moyen
fessier qui était seulement atrophié chez tous les symptomatiques. Une bursite avec
épanchement. 8/25 asymptomatiques versus 24/39 symptomatiques.
Comment prévenir les tendinopathies douloureuses après prothèse totale de hanche ? 225

6 Harwin et al. [35] Localisation spécifique des ossifications après PTH par voie latérale directe : ossifications
situées en dehors de la capsule distales antérieures et latérales par rapport au grand
trochanter. 370/1420 THA consécutives (26 %) avaient des ossifications autour du grand
trochanter. 100/370 (27 %) avaient ce type d'ossification. Au total, cette ossification
était observée dans 210/1420 cas (14,8 %). Deux patients ont eu une résection de cette
ossification. Les ossifications hétérotopiques trochantériennes peuvent entraîner des
douleurs latérales précoces après PTH par voie latérale directe.

7 Iorio et al. [3] Fréquence des douleurs péritrochantériennes 24/543 (4,4 %) à 8 ans de recul. 1,2 %
(1/82) avec voie postérieure et 4,9 % après voie latérale directe (23/461). Pas d'influence
de l'inégalité de longueur, des variations d'offset et des ossifications hétérotopiques. Plus
fréquent chez les femmes. Efficacité du traitement médical.

8 Lübbeke et al. [36] 11/18 (19 ruptures de l'appareil abducteur sur 2657 prothèses par voie latérale soit 0,7 %)
ont eu une amélioration significative des douleurs latérales après réparation d'une rupture
des abducteurs faite 19 mois après l'arthroplastie (1–66 mois). Les résultats sur la douleur
latérale sont meilleurs en cas de réparation précoce (< 15 mois) et moins bons en cas
d'obésité.

9 Silva F et al. [37] Pas de différence en aveugle en histologie qu'il y ait ou non des signes de tendinobursite
latérale lors de la mise en place d'une PTH pour arthrose ou polyarthrite. La bursite est
donc remise en question dans l'origine des douleurs latérales péritrochantériennes après
PTH.

10 Yakovlev et al. [38] 12 cas de sonde électrostimulation sur des cas chroniques de douleurs trochantériennes
après PTH ayant résisté aux techniques conservatrices. Efficacité à 12 mois de recul.

11 Farmer et al. [39] 689 PTH (647 voies latérales et 42 postérieures). 32 trochantérobursites latérales (4,6 %)
(29 patients, 12 hommes, 17 femmes), mais seulement 25 hanches suivies (23 voies
latérales (92 %) et 2 voie postérieures [8 %]). Aucune différence versus 389 PTH (voie,
sexe, diagnostic). Efficacité injections stéroïdes sur les 25 hanches (11/25 ont eu injections
multiples et 14 unique) : 20/25 guérisons et 5 persistances (20 %) avec aucun facteur
prédictif d'échec sauf un plus jeune âge (50 versus 62) (p = 0,1) chez les non-répondeurs et
en cas d'allongement de membre (+ 4 mm versus – 4 mm) (p = 0,1) et les 2 cas après voie
postérieure ont été répondeurs (NS).

12 Bachour et al. [40] 74 pivots Lubinus 117° à offset augmenté suivi 6 ans. Une augmentation d'offset > 5 mm
lors de la pose de la PTH entraîne des douleurs latérales se traduisant par un score PMA
douleur inférieur (4,7 versus 5,5) (p < 0,05).

13 Nam et al. [4] Les sujets jeunes rapportent 40 % de douleurs près PTH ou resurfaçage. Parmi celles-ci,
36 % de douleurs péritrochantériennes après PTH et resurfaçage à 2,9 ans de recul.
Pas de différence entre resurfaçage (79/224 (35 %) et prothèse totale 73/196 (37 %).
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14 Rodríguez-Roiz 5 cas d'hypertrophie du tenseur du fascia lata sur 1767 PTH (5/1285 primaires et 1/482
et al. [41] révisions). Survenue en moyenne à 30 mois après 4 voies de Hardinge et une voie de
Röttinger. 2/5 entraînaient des douleurs et une masse palpable.
IRM : imagerie par résonance magnétique ; NS : non significatif ; PTH : prothèse totale de hanche.

Irritation de l'iliopsoas un véhicule). En dehors de cela, la hanche ne doit


pas être douloureuse ; typiquement, sur un terrain
Pour l'irritation de l'iliopsoas, il existe des arguments régulier, le patient doit être capable de marcher plu-
cliniques avec une douleur toujours antérieure dans sieurs kilomètres sans douleurs et, si ce n'est pas le
le pli inguinal qui survient en flexion contrariée de cas, le diagnostic est douteux, ou du moins le conflit
la cuisse sur le bassin (à la marche en accrochant avec le psoas-iliaque n'est pas isolé. L'examen de la
le pied sur un obstacle, ou à la déflexion en décu- hanche doit être complet, à la recherche : 1) d'un
bitus dorsal, ou en montant les escaliers ou dans
226 H. Migaud, J. irard, K. Benad, . Pasquier, . Put an

effet came sur notamment sur les couples dur-dur antérieure d'une vis, d'un plot ou de ciment, ce qui
car un conflit col-cupule peut entraîner une syno- est difficilement identifiable sur les clichés standard,
vite par la libération de débris provenant du col et alors que ces structures peuvent irriter directement
en imposer à tort pour un conflit iliopsoas-cupule ; le tendon du muscle iliopsoas.
2) une instabilité peut aussi entraîner des douleurs
inguinales et elle peut être démasquée par un piston
ou un effet came. Tendinopathies latérales
Les radiographies (bassin de face couche et profil de Pour les tendinopathies latérales, le diagnostic est
Dunn) sont indispensables pour éliminer : 1) une mal- souvent clinique devant une douleur latérale surve-
position de cupule qui peut favoriser l'effet came par nant parfois à la marche, mais surtout en décubitus
une inclinaison excessive ou une antéversion faible latéral du côté de l'arthroplastie et à la palpa-
induisant un effet d'edge loading à l'origine d'une tion profonde de la région péritrochantérienne.
douleur inguinale qui en impose pour une pseudo-irri- Un examen radiographique permet de rechercher
tation du psoas-iliaque ; 2) des images de descellement un descellement fémoral et/ou une ostéolyse qui
et/ou d'usure (qui peuvent favoriser des douleurs peuvent en imposer pour ce diagnostic en donnant
inguinales par la synovite) ; 3) ou les stigmates d'un des douleurs péritrochantériennes. La radiogra-
effet came. phie peut montrer des modifications de l'enthèse
Il est usuel de recommander en première intention du moyen glutéal, mais il n'y a pas de relation
une infiltration de la bourse séreuse rétro-iliaque directe avec la survenue de douleurs latérales après
(associant anesthésique local et dérivé cortisonique PTH (tableau 23.2). La radiographie permet aussi
local) sous contrôle échographique ou tomodensi- de mesurer de manière sommaire une augmenta-
tométrique pour faire le diagnostic (en montrant tion d'offset si la hanche controlatérale est saine
un débord et/ou un conflit vu en échographie dyna- et/ou de détecter des anomalies trochantériennes
mique). En revanche, nous n'hésitons pas à faire (saillie osseuse, matériel). Une échographie (une
régulièrement une ponction surtout si le diagnos- imagerie par résonance magnétique [IRM] avec
tic n'est pas typique ou s'il existe des arguments procédé d'atténuation MARS ou metal artifact
d'une histoire infectieuse car : 1) l'injection de cor- reduction sequence est une bonne alternative) est
ticoïdes dans la bourse peut faire flamber l'infec- essentielle pour conforter le diagnostic et recher-
tion, 2) et surtout, il existe des infections à bas bruit cher une rupture des muscles moyen et/ou petit glu-
(S. epidermidis, P. acnes) qui peuvent être à l'origine téaux qui pourrait être suspectée en cas de boiterie
d'une symptomatologie d'irritation du psoas-iliaque récente. La ponction n'est pas indispensable, sauf
plus ou moins typique. en cas de doute (antécédents septiques, histoire
Dans notre centre, nous estimons que la ponction non concordante entre examen clinique et écho-
permet de faire une infiltration-test de xylocaïne et graphie). Elle pourrait être complétée en cas de
naropéine. Nous proposons ce test qui peut venir doute par une infiltration test intra-articulaire de
en complément ou à la place de l'infiltration directe xylocaïne-naropéine : 1) si elle soulage immédiate-
de la bourse si le diagnostic est incertain : 1) si la ment le patient, cela remet le diagnostic en doute
douleur disparaît immédiatement au relevé de cuisse (sauf en cas de communication entre bourse péri-
sur le bassin contre pesanteur (juste après la ponc- trochantérienne et articulation, ce peut être le cas

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tion au bloc opératoire sur table guidée par un après un voie transglutéale) car témoignant d'un
amplificateur), cela va à l'encontre du diagnostic ; soulagement de douleurs intra-articulaires ; 2) au
2) en revanche, la disparation de la douleur après contraire, l'absence de soulagement par l'injection
5 à 10 minutes au cours de ce même test est très de xylocaïne-naropéine est en faveur du diagnostic,
en faveur du conflit iliopsoas-cupule, témoignant permettant d'écarter des douleurs d'origine articu-
d'une migration progressive du produit anesthé- laire avec une projection latérale. En complément,
sique dans la bourse du psoas-iliaque. Enfin, une une infiltration de la bourse positive, menée dans
mesure tomodensitométrique (TDM) de position des conditions d'asepsie stricte (sous échographie
des implants est utile pour détecter une malposition ou radioscopie), permet de porter le diagnostic avec
de cupule (défaut d'antéversion et débord antérieur certitude si elle apporte un soulagement immédiat
mieux visible sur les reconstructions 3D que sur les [11]. La TDM permet de rechercher une anomalie
coupes axiales ; figure 23.3) et/ou des images anor- de position des implants, mais surtout permet de
males (liseré ou rupture d'implant). Elle permet mesurer une modification d'offset de manière plus
aussi de rechercher la saillie en endopelvienne ou précise que la radiographie [42].
Comment prévenir les tendinopathies douloureuses après prothèse totale de hanche ? 227

A B

C
Figure 23.3. Radiographies standard. Coupes tomodensitométriques et reconstruction 3D au cours du bilan d'une irritation de l'iliopsoas
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par conflit avec la cupule.


, B. L'inclinaison et l'antéversion semblent correctes sur le bassin de face, sans effet came identifié sur le profil de unn. C. Le débord
antérieur est peu évident sur les coupes axiales. . Le débord antérieur est plus facilement identifié sur la reconstruction 3 (flèche rouge).

Le risque d'irritation de l'iliopsoas d'une irritation de l'iliopsoas par la cupule (des débords
antérieurs de cupule patents peuvent ne pas irriter
par la cupule est-il le même chez l'iliopsoas et au contraire des irritations de l'iliopsoas
tous les patients, en fonction de authentiques peuvent survenir en l'absence de débord de
la morphologie et des dimensions la cupule) (figures 23.4 et 23.5). En théorie, le sexe fémi-
nin est plus exposé à ce conflit du fait d'une forme moins
acétabulaires, de la voie d'abord couvrante de la paroi antérieure et d'une vallée du psoas
et du type de cupule, sans ciment plus profonde [13]. Cependant, les séries ne mettent
ou cimentée ? pas en évidence une prépondérance féminine formelle
(tableau 23.1). Le risque de conflit est théoriquement
À ce jour, il n'y a pas de données dans la littérature qui plus élevé en cas de dysplasie, du fait de la déficience de
permettent de prédire de manière formelle la survenue la paroi antérieure (tableau 23.1). La dysplasie comme
228 H. Migaud, J. irard, K. Benad, . Pasquier, . Put an

Figure 23.4.
. Patiente souffrant d'une irritation de l'iliopsoas par la cupule
à droite, bien que celle-ci soit correctement antéversée et incli-
née. À gauche, la cupule n'entraîne pas d'irritation de l'iliopsoas
A alors qu'elle est très inclinée et semble débordante (B, flèche
rouge), surtout sur les reconstructions 3 (C, flèche rouge à
gauche alors qu'à droite [flèche jaune] la cupule ne déborde
pas). Ce cas suggère l'absence de parallélisme entre les ano-
malies anatomiques et la survenue d'une irritation du psoas-
iliaque par le débord de la cupule.

B C

les révisions acétabulaires exposent à un conflit par


débord antérieur de matériel, mais surtout à une forme
particulière d'irritation de l'iliopsoas lorsque des vis sont
nécessaires à la fixation de la cupule ou d'une armature.
La saillie des vis peut entraîner une irritation directe
volontiers méconnue si l'exploration TDM est limitée au
rebord antérieur de l'acétabulum et à sa zone équatoriale
sans exploration par des coupes fines de la partie supra-

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acétabulaire et de la fosse glutéale médiale. Aucune
voie d'abord ne semble se dégager comme favorisant ce
conflit, comme l'indiquent les données du tableau 23.1.
Les premières descriptions de l'irritation de l'iliopsoas
par la cupule par Lequesne et Witvoet [43] portaient sur
les anneaux vissants, difficiles à antéverser et horizon-
taliser, et dont les arêtes tranchantes entraient en conflit
direct avec la terminaison de l'iliopsoas. Cependant, Figure 23.5. Prothèse de hanche gauche à couple céramique-
d'authentiques anneaux vissants débordants par défaut céramique au recul de 25 ans, chez une femme de 49 ans.
d'antéversion et verticalisation peuvent ne pas entraîner lle comporte plusieurs facteurs qui en théorie favorisent la sur-
de conflit (figure 23.5), confirmant bien que le débord venue d'une irritation du psoas-iliaque (sexe féminin, dysplasie,
cupule vissante et très inclinée débordant largement en bas et en
n'est pas obligatoire ou, au contraire, peut ne pas entraî- avant). Le trajet figuré du muscle posas iliaque est indiqué par la
ner d'irritation de l'iliopsoas. Les cupules sans ciment flèche rouge. Malgré tous ces éléments favorisants, la patiente
semblent être plus souvent à l'origine d'une irritation n'a pas d'irritation du psoas-iliaque mais se plaint d'un grince-
de l'iliopsoas que les cupules cimentées (tableau 23.1). ment intermittent.
Comment prévenir les tendinopathies douloureuses après prothèse totale de hanche ? 229

En fait, il s'agit d'un probable biais de recrutement antérieures que lors du passage du pas pour la stabi-
puisque les cupules sans ciment sont devenues majori- lisation du bassin et son rôle de hauban dynamique
taires au moment de la diffusion de la connaissance de quelle que soit la voie d'abord.
ce conflit. Les arthroplasties de resurfaçage sont parfois
grevées d'un taux de douleur inguinale élevé (de 2,7 % à uelles sont les causes
18 %) [15, 18, 44], avec une fréquence qui diminue avec
le temps [18], et qui a pu être attribué à l'effet « grosse
peropératoires des tendinopathies
tête ». Cependant, cette hypothèse est discutable si l'on se des muscles moyen et petit glutéaux
réfère aux cupules à double mobilité elles aussi cause pos- (voies d'abord, offset excessif, etc. ?)
sible d'un « effet grosse tête », puisqu'elles ne sont grevées
que de 2 % de douleurs inguinales dans la plus large série
et peut-on les prévenir ?
publiée (n = 2480) [45]. Le couple céramique en grand Les voies d'abord transglutéales antérolatérales et
diamètre peut entraîner des douleurs inguinales accom- transtrochantériennes se compliquent plus fréquem-
pagnant les grincements [46], évoquant pour les couples ment (5 à 20 %) de tendinopathies latérales que la
dur-dur en grand diamètre que ces douleurs inguinales voie postérieure (1,2 %) (tableau 23.2), surtout si
correspondent plus à une dysfonction du couple (décoap- elles sont associées à des ossifications hétérotopiques.
tation, edge-loading) qu'à un véritable conflit iliopsoas/ En l'absence d'étude comparant les douleurs latérales
cupule. après PTH par voie antérieure et postérieure, il n'est
pas possible de conclure. Les facteurs intrinsèques au
Comment prévenir l'irritation patient (âge, sexe, diagnostic) n'ont pas d'influence
déterminante dans la survenue de douleurs latérales
de l'iliopsoas par la cupule ? Peut-on après PTH [39]. Le type d'arthroplastie (resurfaçage
être amené à sectionner le tendon ou prothèse conventionnelle) n'a pas d'influence sur
de l'iliopsoas au cours d'une P H la fréquence des douleurs latérales [4]. La restitution
de l'offset est plus discutée (tableau 23.2). La majorité
de première intention ? des travaux évaluant l'offset fémoral analysent surtout
Pour prévenir l'irritation de l'iliopsoas, deux précau- son effet sur la boiterie [47] et, à notre connaissance,
tions doivent être prises : éviter l'excès de fraisage un seul travail a détaillé l'effet significatif d'une aug-
source d'une fragilisation de la paroi antérieure et mentation de l'offset de plus de 5 mm sur les douleurs
prendre soin d'antéverser la cupule qui doit laisser latérales [40], avec un pivot à offset augmenté. Hormis
quelques millimètres d'os pour protéger l'iliopsoas l'excès d'offset, la présence de matériel trochantérien
[27]. Il faut en l'occurrence viser une somme des anté- est aussi un facteur favorisant [30]. Enfin, l'existence
versions (fémur + cupule) entre 40° et 60° en inté- d'une tendinopathie latérale préalable à l'arthroplastie
grant l'antéversion fémorale qui peut permettre de et/ou d'une lésion des glutéaux doit rendre prudent à la
s'adapter à la conformation de l'acétabulum (dys- fois pour l'intervention (réparation des glutéaux, usage
plasique et/ou antéversé). Il faut aussi tenir compte d'une cupule à double mobilité, voire rétentive en cas
de l'antéversion native du fémur parfois importante de grand trochanter chauve) et pour ses suites, même
pour éviter un effet came postérieur aboutissant à une s'il n'y a pas de parallélisme entre le statut des fessiers
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somme excessive des antéversions, et qui peut don- et de la bourse et la survenue de douleurs latérales [37].
ner des douleurs inguinales et en imposer pour une
irritation de l'iliopsoas alors qu'il ne s'agit que d'une xiste-t-il des conflits
instabilité et/ou d'un effet came postérieur. Dans la avec les structures tendineuses
mesure du possible, il faut éviter de forcer le calibre
de la cupule (ce qui est parfois justifié pour augmen- et/ou vasculonerveuses
ter le calibre de la tête fémorale en vue d'améliorer la dus à un débord postérieur
stabilité), car augmenter le calibre de la cupule de plus et/ou supérieur de la cupule ?
de 6 mm par rapport au diamètre de la tête native
multiplie par 26 le risque de conflit [21]. À ce jour, Une analyse poussée de la littérature n'a pas montré de
rien ne permet de recommander une section distale série de cas de ce type. En revanche, des faits cliniques
du psoas-iliaque lors de la mise en place de la pro- (exclus du champ d'investigation bibliographique) ont
thèse en cas d'exposition de la cupule au-delà de la rapporté des conflits principalement avec des struc-
paroi antérieure. Sectionner l'iliopsoas supprime son tures nerveuses pouvant entraîner des paralysies secon-
rôle stabilisateur important, aussi bien pour les voies daires ou tardives parfois inexpliquées (figure 23.6).
230 H. Migaud, J. irard, K. Benad, . Pasquier, . Put an

B C
Figure 23.6. Patiente opérée d'une dysplasie de hanche dans la petite enfance puis d'une arthroplastie révisée 10 ans plus tard

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pour usure avec armature greffe et cupule cimentée.
, B. L'armature apparaît surdimensionnée et déborde en arrière. lle a développé un conflit entre les vis et le rebord de l'armature
et le tronc du nerf sciatique avec une symptomatologie irritative 3 ans après cette révision, puis un an plus tard une paralysie complète
s'est installée. C. lle n'a pas récupéré malgré le changement de cupule et la neurolyse (seuls les troubles irritatifs sont améliorés).

Conclusion survenue de ces symptômes, ce qui doit rendre encore


plus prudent dans l'acquisition diagnostique et les
L'irritation du psoas iliaque et les tendinopathies laté- choix thérapeutiques. Pour l'irritation de l'iliopsoas,
rales sont souvent évoquées après PTH mais, avant de une démarche systématisée [48] est souhaitable car trop
les incriminer, il faut un bilan précis de l'arthroplastie, de douleurs inguinales sont étiquetées « conflit iliop-
car leurs symptômes peuvent être liés à d'autres patho- soas-cupule » alors qu'il s'agit d'un défaut de fonction-
logies, notamment intra-articulaires, qui peuvent d'ail- nement de l'arthroplastie. Les douleurs latérales sont
leurs être associées. Il n'y a pas de parallélisme strict assez fréquentes après arthroplastie, surtout pour les
entre les anomalies anatomiques (débord antérieur, voies latérales et antérolatérales, mais leur persistance
augmentation de l'offset, matériel trochantérien) et la doit mettre en éveil afin de poursuivre les investigations.
Comment prévenir les tendinopathies douloureuses après prothèse totale de hanche ? 231

Réfé ences
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233

Prothèse totale de hanche


et navigation
C. LEFÈVRE, E. STINDEL

Il y a 30 ans, les patients, après une prothèse totale écarteurs, ne serait-ce que pour mieux voir le site opé-
de hanche (PTH), appréciaient de ne plus souffrir de ratoire, ce qui expose au risque de bascule du patient
leur hanche, et admettaient sans difficulté de porter vers l'avant et de « ventraliser » non seulement le bas-
une talonnette pour compenser un éventuel excès de sin, mais aussi, par phénomène d'entraînement, le
longueur du membre inférieur du côté opéré [1]. tronc du patient. On conçoit que cette situation puisse
En 2017, ces mêmes patients trouvent, avec raison, entraîner une modification de l'orientation du cotyle
normal de ne plus souffrir mais acceptent de moins dans l'espace et par voie de conséquence une erreur
en moins l'idée de devoir porter une talonnette à vie. lors du positionnement de la cupule prothétique,
Cette situation est même parfois tellement mal vécue souvent positionnée en fonction de la perception par
qu'elle peut aboutir à une issue judiciaire… Une pro- l'opérateur de la verticale et de l'horizontale, matéria-
grammation préopératoire à l'aide de calques peut lisées par les murs ou le plafond de la salle.
certes aider à limiter les erreurs, mais cette procédure Une installation soigneuse recherchant un contrôle
n'est pas d'une grande fiabilité, comme on peut sou- efficace et durable de l'installation permet de limiter
vent le constater en pratique clinique [2, 3]. La naviga- ces risques et l'expérience tient ici un rôle primordial.
tion, largement diffusée depuis l'année 2000, permet le À cet égard, il faut rappeler que les textes stipulent que
guidage peropératoire du geste chirurgical. Elle est en « l'installation du patient reste sous la responsabilité
cela un concept d'ancillaire innovant apportant préci- du chirurgien ».
sion et reproductibilité. Quel que soit le mode d'installation choisi, il appa-
raît intéressant, si ce n'est primordial, de pouvoir
La réalité pratique régler l'antéversion et l'inclinaison d'une cupule pro-
thétique en fonction du patient plutôt que par rapport
Les objectifs habituels d'une arthroplastie de hanche à l'environnement de la salle d'opération.
sont de respecter au mieux la longueur du membre Le réglage de l'antéversion de la pièce fémorale est
inférieur, l'offset total et l'orientation cotyloïdienne, moins sujet à des aléas d'installation du patient, le
garants objectifs de la conservation d'une bonne méca- repère clinique de l'axe jambier sur un genou fléchi à
nique articulaire et d'un bon ressenti, par définition 90° semblant relativement précis. Il est à noter que si
subjectif, du patient. Pour atteindre ces objectifs, il la première râpe va « là où l'on veut », la dernière va
faut tenir compte de la voie d'abord utilisée et donc du souvent « là où elle veut », ce qui fait que parfois on ne
type d'installation du patient. maîtrise pas totalement l'angle d'antéversion fémorale
L'installation en décubitus dorsal est par définition souhaité.
stable ; les plans de référence sont faciles à utiliser En pratique, il revient à l'opérateur de régler l'antéver-
durant l'intervention, et il n'y a pas de précautions sion des deux pièces prothétiques selon les constatations
particulières à prendre, notamment dans le choix des peropératoires. Ainsi, le deuxième implant sera posi-
appuis. tionné relativement au premier : l'antéversion de la tige
En revanche, l'installation en décubitus latéral tiendra compte de celle de la cupule si le premier temps
implique d'opérer un patient « sur la tranche », situa- a été la préparation acétabulaire, et réciproquement en
tion par essence instable qui nécessite plusieurs appuis cas de préparation fémorale première. Tout cela dépend
(thoracique, fessier, pubien). La région fessière du de l'impression de l'opérateur, mais cette description de
patient étant à l'aplomb de la table du côté de l'opé- la procédure fait comprendre qu'il existe en réalité un
rateur, son aide se trouve en face de lui, à distance du grand nombre de hanches prothétiques dont le position-
bord opposé de la table, penché en avant, « en porte- nement des pièces prothétiques est très varié (on sait que
à-faux ». Il a instinctivement tendance à tirer à lui les les angles d'antéversion cotyloïdiennes peuvent varier

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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234 C. Lefèvre, . Stinde

du simple au double), sans instabilité prothétique pour Choisir un système de navigation impose de répondre
autant. On est vraiment dans le relatif, et le dogme de au préalable à plusieurs questions très diverses :
l'orientation acétabulaire à « 45-20 » est bien loin d'être • L'objectif chirurgical est-il ?
absolu [4] ! – De contrôler l'offset et la longueur du membre
L'impression de l'opérateur, évoquée plus haut, est inférieur uniquement ?
par définition subjective, et fait donc appel à l'expé- – De contrôler également l'orientation de la cupule
rience chirurgicale. On améliore certes ses chiffres au prothétique ?
cours d'une carrière, mais l'intérêt de la navigation est • Quelle est la voie d'abord qui sera utilisée
de sécuriser le geste chirurgical, permettant une chirur- préférentiellement ?
gie quantifiée et non subjective. Elle permet, dans un – Voie antérieure ?
système de référence objectif, d'enrichir la réflexion – Voie postérieure ?
peropératoire de mesures angulaires et de distances • Quel temps suis-je prêt à consacrer à l'utilisation du
précises et reproductibles. système de navigation ?
Enfin, le fraisage acétabulaire entraîne un phé- – Le minimum ?
nomène de déplacement du centre prothétique par – Tout le temps nécessaire pour acquérir les infor-
rapport au centre de l'articulation opérée. Comme mations requises ?
rapporté par Clavé [2], la médialisation moyenne de la • Mon système doit-il être utilisable :
cupule après fraisage atteint 3,5 mm là où son ascen- – pour une seule gamme d'implants ?
sion moyenne est mesurée à 3,5 mm. Cette situation – pour tout implant disponible au bloc opératoire ?
vient perturber la précision espérée d'une programma- • Quel en sera le mode de financement ?
tion préopératoire classique et elle est inhérente à la En 2017, l'offre commerciale est variée, permettant
technique de fraisage du cotyle. Le porte-fraise étant de répondre à l'ensemble de ces besoins. Chez un même
oblique en haut, en dedans et souvent en arrière, le fournisseur, il est possible de trouver : 1) des logiciels
contact souvent recherché de la fraise avec l'arrière- d'entrée de gamme aux fonctionnalités limitées ; 2) des
fond acétabulaire entraîne un phénomène géométrique systèmes complets totalement paramétrables, dont le
d'excentrique qui crée avant tout une médialisation, workflow peut être adapté aux choix chirurgicaux de
mais aussi une ascension du centre de la future cupule l'opérateur et sauvegardé sous sa propre identité. On
par rapport au centre du cotyle opéré (figure 24.1). parle alors de « profils chirurgicaux ».
Les conséquences en sont une médialisation du centre Nécessairement, plus le nombre de paramètres à
de rotation prothétique et par conséquent une dimi- contrôler est élevé, plus la procédure est longue, le
nution de l'espace ischiotrochantérien à l'origine logiciel plus sophistiqué et donc plus coûteux.
d'une détente des muscles horizontaux (adducteurs) et Si l'on souhaite disposer de fonctionnalités en
verticaux (éventail fessier), favorisant une instabilité relation directe avec la forme des implants, comme
articulaire. la prédiction des conflits fémoro-acétabulaires, on
s'orientera vers des systèmes dits fermés, dédiés à une
Les différents systèmes gamme d'implants particuliers, ou à un ensemble de
gammes d'un même fournisseur. On parle alors de
de navigation systèmes fermés. Ils sont opposés aux systèmes dits
ouverts, ou universels, qui permettent de poser tous

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Face aux imprécisions et aléas décrits précédemment,
l'utilisation d'une assistance informatique au geste types d'implants. Intéressants par leur caractère géné-
chirurgical représente une valeur ajoutée certaine. Elle rique, ils sont pour la plupart limités au contrôle de
apporte précision et reproductibilité dans l'exécution l'offset et de la longueur.
du geste planifié. Quel que soit le système choisi, il comprendra trois
entités : 1) un système informatique associé à une tech-
nologie de guidage, 2) un ancillaire spécifique, 3) un
logiciel métier.

Système informatique
À ce jour, et depuis la disparition des systèmes élec-
tromagnétiques, la presque-totalité des solutions de
Figure 24.1. Effet de médialisation du fraisage : phénomène guidage s'appuie sur l'utilisation de systèmes optiques
d'excentrique. émettant ou réfléchissant des rayons infrarouges pro-
Prothèse totale de hanche et navigation 235

duit par Northern Digital [5]. Ils communiquent avec cadre du contrôle de l'offset et de la longueur est cepen-
un ordinateur, voire une tablette, sur lesquels sont réa- dant compatible avec le degré de précision requis [8].
lisés l'ensemble des calculs dont les résultats sont ren- Par ailleurs, l'avantage indéniable de cette procédure est
dus en temps réel. l'absence de séquelles cicatricielles.
Les capteurs sont le plus souvent amovibles pour
éviter la survenue de souillures (eau, gras, sang) durant
Ancillaire la procédure chirurgicale, qui rend alors leur utilisa-
tion impossible. Cependant, tant que les embases de
L'ancillaire est constitué de l'ensemble des capteurs fixés
ces capteurs restent fixées aux os, chaque réflecteur
sur le patient et sur les outils chirurgicaux. Ces derniers,
peut être remplacé en cas de dysfonctionnement.
détectables par la caméra infrarouge, permettent de
L'ancillaire peut être générique ou constituer la
suivre en temps réel les objets d'intérêt que sont : les os,
variation informatisée d'un système mécanique propre
les implants, les outils chirurgicaux (porte-fraise, porte-
à un fabricant. Cet élément est important au moment
râpes, impacteurs, etc.). Le nombre et la nature des objets
du choix.
détectés dépendent du nombre de paramètres à mesurer.
On comprend aisément que la complexité technique, la
courbe d'apprentissage et le temps opératoire augmen- Logiciel métier
tent proportionnellement aux exigences du chirurgien.
Le plus souvent passifs, les capteurs réfléchissent un Le logiciel métier constitue l'application avec laquelle
rayon infrarouge émis par la caméra selon une direc- interagit le chirurgien pour mener à bien la procédure
tion identique à celle du rayon incident. Le couplage de en fonction du workflow choisi.
deux caméras autorise alors une vision stéréoscopique Cette procédure repose sur une phase initiale de cap-
de l'objet et le calcul de son orientation tridimension- ture d'informations. De sa qualité dépend la précision
nelle (3D). Chaque capteur étant fixé rigidement à du guidage. Elle est fondamentale dans toute procé-
un objet à suivre (os, instrument), on parle de corps dure de navigation et doit être conduite avec la plus
rigide. Si le caractère rigide de cette relation entre le grande minutie. Elle permet deux choses :
capteur et l'objet est perdu durant l'intervention, plus • enregistrer la position de points remarquables dont les
aucune mesure n'est alors fiable. Le système ne doit variations peropératoires permettront de guider le geste ;
plus être utilisé. La fixation des capteurs sur l'os reste • construire des plans de référence nécessaires aux
l'un des points faibles des systèmes de navigation et mesures angulaires.
une attention toute particulière doit être portée à ce À ces fins, on utilisera un instrument spécifique per-
point durant toute la procédure chirurgicale. mettant d'enregistrer la position de points par rapport
Dans le cas particulier de la chirurgie de la hanche, on aux traqueurs iliaque ou fémoral.
utilisera le plus souvent deux capteurs, l'un iliaque et Le centre de la hanche opérée peut être acquis par une
l'autre fémoral. La position relative de ces deux capteurs approche morphologique en numérisant l'enveloppe
permet de calculer le déplacement des pièces osseuses au de la tête fémorale et en y ajustant une sphère de géo-
cours du geste. Si l'on souhaite mesurer l'orientation de métrie connue. Cependant, de nombreuses approches
la cupule, il convient d'acquérir des points complémen- dynamiques ont été introduites, consistant à enregis-
taires qui permettent de construire un système de réfé- trer le déplacement du traqueur fémoral dans l'espace
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rence anatomique propre à ces mesures [6]. au cours d'un mouvement de circumduction passif
De façon constante, le capteur iliaque est fixé par deux imprimé à la hanche par l'opérateur (figure 24.2).
fiches, de type fixateur externe, implantées en percutané Dès 2005, la robustesse de ces approches dynamiques
dans la crête iliaque. Le capteur fémoral est solidarisé a été évaluée [9]. Celles-ci sont fiables même en cas
au patient soit par des fiches diaphysaires distales intro- d'altérations significatives de la cinétique articulaire.
duites en percutané, soit au moyen d'un adhésif appli- Enfin, pour les systèmes les plus simples, l'acquisition
qué sur la cuisse. La première approche, en dépit de son des conditions initiales se fait par l'enregistrement des
caractère invasif, procure une plus grande précision des positions relatives du bassin et du fémur indépendam-
mesures. Les fractures rapportées dans la littérature [7] ment de toute considération de centre articulaire.
sont le plus souvent dues à une mauvaise utilisation Le centre de la cupule après implantation peut être
des fiches, implantées tangentiellement à la corticale. numérisé par une approche dynamique, par la numé-
La fixation adhésive, d'utilisation croissante, expose risation de points à sa périphérie, ou par le position-
à une imprécision induite par les mouvements relatifs nement d'une tête d'essai dont le centre est repéré par
de la peau par rapport aux os, et impose un contrôle un traqueur. L'orientation de la tige fémorale est faci-
peropératoire de ce déplacement. Son utilisation dans le lement réalisée à l'aide d'un ancillaire dédié.
236 C. Lefèvre, . Stinde

Hip Express® commercialisé par BrainLab, le sys-


tème BLU-IGS® de chez Orthokey, ou historiquement
les systèmes de BBraun ou PRAXIM disponibles dès
le début des années 2000. Cette liste, non exhaus-
tive, répond à un ensemble de systèmes pour lesquels
aucune étape technique n'est exigible avant l'interven-
tion proprement dite, en dehors de la planification de
l'objectif qui reste incontournable.
La procédure est toujours rapide et simple. Une fois le
patient et les champs installés, la mise en place des deux
capteurs iliaque et fémoral demande en règle 3 minutes
et se fait en réalité durant l'achèvement par l'équipe de
la préparation de l'intervention (installation de l'aspira-
tion, du bistouri électrique, de la poche à instruments,
etc.). L'utilisation proprement dite du système débute
par l'acquisition d'un nombre très limité de points de
référence (centre de la cupule, centre des épicondyles,
Figure 24.2. Évaluation du centre dynamique de la hanche.
etc.). Quels que soient les modèles, le temps global de
ces prises de données n'excède pas 2 minutes, enregis-
Le choix des points à acquérir dépend des fonctionna- trement de la position de la hanche opérée incluse. La
lités attendues, et des objectifs chirurgicaux. L'approche procédure chirurgicale est ensuite absolument inchan-
peut être réellement adaptée à tous les types de pratiques gée jusqu'à la pose de la cupule définitive.
répondant à des philosophies allant du plus simple au Il est alors fait appel une seconde fois au système de
plus compliqué, comme évoqué ci-après. navigation pour vérifier les variations de longueur et
d'offset du membre. En fonction des résultats obtenus,
Des systèmes de navigation les on ajustera la taille, le type (standard ou latéralisé) et la
plus simples aux plus sophistiqués position de l'implant fémoral, ainsi que la longueur du
col, jusqu'à obtenir le compromis recherché lors de la
Les systèmes de navigation sont avant tout des sys- planification. Il est ainsi toujours possible d'atteindre
tèmes de mesures dont la précision atteint 1 à 2 mm en l'objectif initialement fixé, à savoir une « navigation
translation et 1 à 2 degrés en rotation, lors d'une utili- 0 », si l'on veut éviter tout allongement, un allongement
sation en conditions réelles au bloc opératoire. Comme de n millimètres (défini sur les images préopératoires),
tout système de mesure, ils n'ont pas vocation à donner ou plus rarement un accourcissement, toujours limité
l'objectif à atteindre. Si l'on souhaite ne pas modifier, dans son importance, étant donné la détente musculaire
allonger, ou accourcir la longueur d'un membre infé- entraînée et le risque d'instabilité qui en découle.
rieur, l'objectif doit être quantifié en préopératoire. L'intérêt manifeste de la navigation réside dans sa
Cette définition de l'objectif reposera sur la méthode souplesse d'utilisation au cours des dernières étapes de
la plus fiable possible. L'unique rôle du système de l'intervention, dans sa simplicité et sa rapidité.
navigation est d'aider à réaliser ce qui a été planifié en Ces approches simples ont beaucoup contribué à

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trois dimensions. Une planification 3D s'impose donc ; une appropriation large du concept de navigation.
sa réalisation à l'aide du système EOS®, commercialisé
par EOS imaging [10] semble être idéale. Ce couplage Longueur, offset et navigation
permet en effet une évaluation 3D de la morphologie
fémorale et cotyloïdienne reposant sur deux radiogra-
de la cupule
phies à basses doses synchrones et orthogonales. Naviguer la cupule offre un avantage évident : celui
de l'orienter avec certitude et précision par rapport au
avigation longueur-latéralité patient, et ce indépendamment des variations éven-
tuelles de positionnement du patient sur la table. Il
Le contrôle de l'offset et de la longueur constitue le faut pour cela utiliser un plan de référence attaché au
minimum pour lequel sont utilisés les systèmes de patient qui servira de repère aux mesures angulaires.
navigation. Le couple « longueur-offset » est indisso- De nombreux plans de références ont été proposés :
ciable, ces deux paramètres variant l'un en fonction plan pelvien antérieur de Lewinneck [4], plan fémo-
de l'autre. De nombreuses solutions commerciales ral [11], plan sacré [12]. Seuls les deux premiers sont
existent, au nom parfois évocateur, comme le système utilisables en peropératoire ; aucun n'est totalement
Prothèse totale de hanche et navigation 237

satisfaisant car tous sont sujets à une grande variabi- l'approche introduite, par exemple, dans certaines
lité d'acquisition. applications commercialisées par la société Amplitude
Le plan de Lewinneck, défini par les deux épines [11]. Ces systèmes reprennent toutes les caractéris-
iliaques antérosupérieures et le pubis, est extrême- tiques évoquées plus haut. Ils permettent, via le posi-
ment difficile à acquérir en décubitus latéral après tionnement de capteurs iliaque et fémoral, le contrôle
champage et toute erreur de 1 mm dans la localisa- de la longueur, de l'offset, et la mesure de l'orientation
tion antéropostérieure du point pubien induit une du cotyle dans un plan de référence qui peut être soit
erreur d'un degré dans la mesure de l'antéversion de le plan pelvien antérieur (acquis en décubitus latéral
la cupule [13]. Acquis par une palpation peropéra- ou dorsal selon la voie d'abord), soit un plan fémoral.
toire, il est par définition considéré comme vertical, La différence principale réside dans la boucle finale
et afin d'intégrer l'inclinaison naturelle du pelvis dans d'optimisation. Celle-ci n'est plus uniquement géo-
le calcul de l'orientation, il convient d'introduire un métrique, visant à reproduire des critères théoriques
facteur correctif appelé angle α. Ce dernier correspond d'orientation anatomique. Elle intègre une approche
à la valeur de l'inclinaison pelvienne mesurée sur un fonctionnelle et prend en compte la prédiction des
cliché de profil du bassin debout. Pour minimiser les amplitudes articulaires et de potentiels conflits pro-
erreurs d'acquisition du plan pelvien antérieur, une thétiques. On quitte ici le dogme du « 45-20 » ; le but
solution de numérisation initiale en décubitus dorsal est d'obtenir avant tout une hanche stable, et l'on sait
a été développée et commercialisée par PRAXIM [6]. qu'il existe de nombreux modèles articulaires diffé-
Elle permettait ensuite une intervention en décubitus rents (avec des antéversions fémorale et cotyloïdienne
latéral par transfert de référentiel à l'aide d'un dispo- variables), mais tout aussi stables, l'essentiel étant le
sitif appelé Hip Lock®. Extrêmement précise, elle avait respect d'une certaine harmonie dans le positionne-
pour inconvénient majeur d'allonger significativement ment relatif de chaque implant par rapport à l'autre.
le temps opératoire et a été peu à peu abandonnée. Le temps fémoral est réalisé ici en premier et l'optimi-
Mais force est de constater que seule la voie antérieure sation de l'orientation de la cupule fémorale est guidée
se prête facilement à ce type de référentiel. en temps réel de façon à optimiser la balance stabi-
Le référentiel fémoral implémenté par la société lité/mobilité. De fait, il est plus difficile de maîtriser
Amplitude est sensible à l'acquisition d'une position l'orientation du col que celle de la cupule. En effet, une
neutre qui est ensuite transposée dans le bassin. Les cupule est une portion de sphère ; le manche du porte-
mesures sont alors particulièrement sensibles à la cotyle est aisément manipulable dans tous les plans de
position spatiale du fémur lors de cette acquisition de l'espace autour du centre de la sphère cotyloïdienne.
référence. Durant cette manipulation, on peut voir instantané-
Cette méthode permet de mesurer l'inclinaison et ment à l'écran les conséquences théoriques des diffé-
l'antéversion de la cupule par rapport au bassin du rentes combinaisons des deux antéversions sous forme
patient, mais ces critères restent indépendants de l'an- de courbes correspondant aux positions à risque de
téversion future du col fémoral prothétique et ne per- luxation par impingement. L'objectif de l'opérateur
mettent pas d'optimiser le positionnement relatif des est alors de maximiser l'aire sous la courbe qui corres-
implants fémoral et cotyloïdien. pond aux zones de stabilité articulaire, dans les plans
L'utilisation de la navigation comme outil d'optimi- sagittal et frontal (figure 24.3).
sation de l'orientation cotyloïdienne reste un challenge Ces systèmes offrent de nombreuses fonctionnalités,
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mal résolu. D'utilisation complexe, ces systèmes ont intégrant les dimensions géométriques et fonction-
quelques difficultés à trouver leur place dans l'arse- nelles. Leurs limites résident dans l'imprécision atta-
nal thérapeutique. Cependant, des solutions encore chée à la numérisation des plans de référence. Leur
plus complètes existent intégrant les critères géomé- diffusion est par ailleurs restreinte par leur complexité
triques décrits ci-dessus, mais également le dessin des d'utilisation.
implants, proposant alors un guidage plus fonctionnel
qu'anatomique.

Longueur, offset, navigation des deux


implants et stabilité articulaire
Par définition, ce type d'approche ne peut se décliner
que sous la forme de systèmes fermés, c'est-à-dire liés
à un ou des implants dont on connaît le dessin. C'est Figure 24.3. Tests peropératoires de stabilité.
238 C. Lefèvre, . Stinde

Des approches dynamiques pures visant à optimiser Le positionnement de l'implant fémoral était quantifié
le cône de circonvolution fémorale ont été développées par la hauteur de la coupe du col.
dès 2006 [14]. Leur diffusion est restée limitée. La longueur et l'offset étaient optimisés en peropé-
Plus récemment, sont apparus sur le marché des ratoire à partir des informations recueillies selon la
systèmes hybrides intégrant à la fois des informations méthodologie décrite plus haut. Le paramètre prio-
morphologiques très précises acquises par examen ritaire de la boucle d'optimisation était la longueur,
tomodensitométrique à des données biomécaniques suivi de l'offset, puis du positionnement antéroposté-
de la version pelvienne. Ces approches permettent une rieur du fémur.
planification réellement fonctionnelle de la pose des L'orientation de la cupule n'était pas guidée. Seule la
PTH et constituent une voie d'avenir intéressante. position du centre de la cupule était enregistrée après
implantation.
Méthode et analyse des résultats Les données de navigation, enregistrées en fin d'inter-
vention, ont été comparées aux données de planifica-
Le premier travail dont nous rapportons les résul- tion radiographique préopératoires et postopératoires
tats ci-dessous est celui présenté sous la forme d'une à 3 mois. Ont été considérés comme satisfaisants tous
table ronde lors du symposium SOFCOT-SFHG 2007 les résultats divergeant de moins de 5 mm de l'objectif
intitulé : « Offset fémoral » [2]. Il s'appuie sur l'ana- planifié, seuil de perception clinique.
lyse d'une série consécutive monocentrique mono-
opérateur d'arthroplasties totales de la hanche chez ésultats
des adultes. L'utilisation du système de navigation était
systématique dans notre centre pendant la période de Les résultats portent sur une série de 200 patients opé-
l'étude et les cas non navigués étaient uniquement liés rés entre 2004 et 2007 par un seul opérateur senior.
l'absence de disponibilité du localisateur. Les faits marquants à retenir, dans le cadre didac-
tique présent, sont les suivants.
Méthode • L'utilisation du système de navigation permet
d'obtenir 100 % de bons résultats sur le paramètre
La solution utilisée pour décrire les conséquences du longueur. Aucun patient n'avait une longueur posto-
geste chirurgical et mettre en exergue l'intérêt de la pératoire du membre inférieur (MI) s'éloignant de plus
navigation était le produit Total Hips Surgetics® de la de 5 mm de l'objectif recherché. Ce chiffre est à mettre
société Praxim Médivision. Système ouvert, il permet en opposition aux 60 % habituellement observés dans
de décrire les variations peropératoires du centre de la littérature [2], et dans notre expérience, lorsque la
rotation de la hanche, ainsi que les déplacements du chirurgie est réalisée sans guidage.
fémur dans les trois plans de l'espace : médiolatéral, • Ce phénomène est la conséquence directe de la
proximodistal et antéropostérieur. priorisation donnée à l'optimisation de la longueur
L'objet de ce travail était de mesurer la précision du et de l'aide apportée par le guidage. La proportion de
geste navigué par rapport à un objectif clinique défini patients dont la longueur et l'offset du membre répon-
en préopératoire. daient à l'objectif n'était que de 78 %. Cette proportion
Cet objectif chirurgical était variable pour chaque plus faible s'explique par le caractère non indépendant
patient. Il visait à restituer, en fin d'intervention, la de ces deux paramètres et par le choix limité d'implants

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tension du hauban musculaire, en : dont nous disposons pour optimiser à la fois la lon-
• corrigeant la longueur (allongement, accourcisse- gueur et l'offset en intra-opératoire.
ment, maintien de la longueur) ; • Si ces chiffres soulignent l'intérêt d'une chirurgie
• restituant l'offset préopératoire ; naviguée, la proportion de 53 % de planifications non
• restituant la position antéropostérieure du fémur. suivies est également importante à considérer. En effet,
Comme nous le montrerons ultérieurement, cher- si la planification radiographique avait été respectée
cher à restituer une position identique des centres en peropératoire, sans tenir compte des informations
articulaires pré- et postopératoires est un concept sys- fournies par le système de navigation, nous aurions
tématiquement remis en cause du fait de la médiali- observé 53 % de patients présentant une variation de
sation induite par le fraisage acétabulaire à la phase longueur du MI ou d'offset supérieur ou inférieur de
initiale de l'intervention. 5 mm par rapport à l'objectif souhaité.
Sur un cliché de bassin de face debout, une planifica- • La nécessité de modifier la planification durant
tion de la taille et de la position des implants était réa- l'intervention est la résultante de deux phénomènes
lisée de façon à répondre à l'objectif indiqué ci-dessus. bien objectivés dans ces travaux, que sont 1) la
Prothèse totale de hanche et navigation 239

médialisation et l'ascension systématique du centre de • modifier la taille ou l'orientation de l'implant


rotation par le fraisage ; 2) le non-respect de la hauteur fémoral ;
de coupe du col : • utiliser un implant latéralisé.
– le fraisage acétabulaire a pour objectif principal Le choix de la technique de cette optimisation
de permettre une bonne tenue primaire de l'implant reste l'apanage du chirurgien qui utilise le système
via un effet de press-fit suffisant, particulièrement comme un outil de contrôle intra-opératoire. Le
pour les cupules sans ciment. Il est donc guidé par système participe à la notion de contrôle qualité du
des considérations topographiques locales qui l'em- geste, et en est même un élément essentiel. La navi-
portent sur le contrôle de la position du centre articu- gation permet de réaliser une programmation pero-
laire. La quantification des conséquences du fraisage pératoire précise et fiable, en temps réel au vu de
sur la position du centre de rotation a été mesurée la situation chirurgicale présente, étape après étape
par le système THS®. La médialisation était systéma- (figure 24.5).
tique, retrouvée dans 100 % des cas avec une valeur À partir de 2007, une nouvelle version du logiciel
moyenne de 3,5 mm (figure 24.4). L'ascension était a été mise en production permettant la mesure du
également fréquente avec une valeur moyenne de déplacement antéropostérieur du fémur. Des mesures
4,5 mm. Ce phénomène est bien sûr totalement indé- ont été effectuées sur 16 patients (figure 24.6). Dans
pendant de l'orientation des implants ; 9 cas sur 16, on observait un déplacement antérieur du
– dans 20 % des cas, le niveau de coupe planifiée fémur secondaire à une diminution peropératoire de
du col n'a pas pu être reproduit en peropératoire, l'antéversion fémorale qui projette le fémur en avant
participant aux 53 % des cas dans lesquels l'erreur a (figure 24.7). L'amplitude moyenne de ces déplace-
été corrigée en peropératoire par la navigation. ments antérieurs était de 11 mm (min. : 1 – max. : 29).
Le défaut de reproduction du niveau de coupe du Dans 7 cas, le déplacement était postérieur avec une
col et la conséquence de la recherche de l'effet press-fit amplitude moyenne de 4 mm (min. : 1 – max. : 11 mm).
peuvent être corrigés en peropératoire dès lors qu'ils La distribution observée témoigne de notre incapacité
sont identifiés par le système de navigation, dont le de contrôler en peropératoire le déplacement antéro-
rôle premier est ainsi d'apporter une assistance au postérieur du fémur :
chirurgien. La navigation est un outil de mesure qui
permet d'atteindre un objectif qui reste chirurgical.
Elle permet de corriger les incertitudes inhérentes aux
gestes. Sans navigateur, il n'est pas possible de quan-
tifier l'erreur de réalisation du geste ni de contrôler la
correction à apporter.
Aussi, afin d'optimiser le couple offset-longueur, on
peut, après quantification d'une anomalie :
• modifier la longueur du col prothétique (allonger ou
raccourcir) ;
• reprendre le niveau de la coupe cervicale ou l'orien-
tation de l'implant fémoral ;
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Figure 24.5. Fréquence de modification peropératoire de la pla-


nification = 53 %.

Figure 24.4. Ascension et médialisation du centre cotyle. Figure 24.6. Déplacement antéropostérieur du fémur.
240 C. Lefèvre, . Stinde

pératoire. Chaque étape peut en effet être évaluée au


décours de sa réalisation. En quantifiant les résultats
intermédiaires d'une procédure chirurgicale, il devient
possible de corriger les erreurs intermédiaires au pro-
fit d'un résultat final plus précis. Cela constitue une
plus grande sécurité pour le patient et un plus grand
confort pour le chirurgien. L'adéquation entre le geste
planifié et le geste réalisé est sans cesse contrôlée, et
l'action suivante intègre les informations de l'étape
précédente, aboutissant au concept de planification
intra-opératoire.
Ces adaptations sont minimales dans les systèmes
fermés ; ceux-ci, intégrant des informations sur la
Figure 24.7. Compromis offset-longueur : 78 % des patients
à < 5 mm de l'objectif sur les deux paramètres. forme des implants, permettent de guider directement
le chirurgien vers un choix optimal d'implants. Les
systèmes ouverts s'appuient sur une boucle « essais-
• d'abord car ce critère apparaît comme le troisième erreurs » pour finalement converger vers la solution
paramètre dans la boucle d'optimisation ; optimale. La durée de l'intervention est alors systéma-
• mais surtout car la gamme de prothèses utilisées tiquement plus longue.
pour ce travail était constituée d'implants à version Tous les systèmes disponibles conduisent à com-
fémorale constante. Seul le recours à une gamme de penser dans le choix des implants la médialisation
prothèses à col modulaire aurait permis une optimisa- et l'ascension initiale du centre articulaire. Cela doit
tion plus précise de ce troisième paramètre. Celles-ci conduire à nous interroger sur les conséquences biomé-
offrent en effet de multiples combinaisons d'orienta- caniques de ces approches. L'utilisation plus fréquente
tion de col dans l'espace (valgus, varus, antéversions, des implants latéralisés par les chirurgiens utilisateurs
rétroversions, etc.). Cependant, la faillite de nombreux de systèmes de navigation est une réalité confirmée
implants à cols modulaires conduit peu à peu à leur par les industriels. Ces choix ont des conséquences
abandon. anatomiques et fonctionnelles certaines. Il en résulte
un bras de levier du col plus important que celui de
Conclusion la hanche opérée. L'appareil abducteur de la hanche
est ainsi sollicité dans de meilleures conditions, mais
Les inégalités de longueur des membres inférieurs le corollaire de ce nouveau contexte biomécanique est
constituent la première cause de conflit médico-légal une contrainte plus importante de l'implant fémoral,
dans les suites d'une arthroplastie totale de hanche. réalité physique incontournable.
C'est en effet un critère d'importance primordiale pour L'introduction de la navigation au bloc opératoire
le patient. Pouvoir quantifier la variation de longueur a permis de quantifier le geste opératoire, offrant une
obtenue et en apporter la preuve au patient est un atout précision avec laquelle l'œil d'un opérateur même
majeur dans la qualité de l'acte ainsi que dans la relation expérimenté ne peut prétendre rivaliser. C'est une
médecin-malade. Contrôler la longueur dans 100 % des sécurité pour le patient et un confort pour le chirur-

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cas justifie en soi l'intérêt de la navigation au cours de la gien. La mesure du résultat final est disponible avant
réalisation d'une arthroplastie totale de hanche. la fermeture de l'incision. Il est en ce sens possible de
Les systèmes de navigation ont permis d'introduire dire que le chirurgien orthopédiste navigateur « dort
une nouvelle notion, celle du contrôle qualité pero- bien après sa navigation »…

Réfé ences
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245

Double mobilité :
du principe à la copie
M.-H. FESSY, A. VISTE, R. DESMARCHELIER

La double mobilité (DM) est une idée ancienne (brevet


en 1976) que l'on doit à Gilles Bousquet (1936–1996),
membre de l'École lyonnaise d'orthopédie, Professeur
au CHU de Saint-Étienne. Grâce à sa collaboration avec
la société SERF, est née en 1979 la cupule tripode [1],
cupule qui a aujourd'hui 40 ans d'existence. C'était au
début une cupule métallique en inox, hémisphérique,
avec des oreilles latérales, dans laquelle étaient introduits
deux plots d'ancrage ischiatique et pubien et une vis
d'amarrage iliaque, pour assurer sa stabilité primaire. La
fixation secondaire était assurée par un spray d'alumine ;
ce modèle de la première heure a permis de démasquer un
problème spécifique : la luxation intraprothétique, favo-
risée par l'usure du listel de rétention en polyéthylène.
À la fin des années 1990, le brevet est tombé dans le
domaine public et, à partir de cette date, on a assisté
à la mise sur le marché d'une profusion de cupules à
DM. Cette mise en concurrence a permis le développe-
ment d'améliorations progressives du système :
• fixation press-fit ;
• chanfrein sur le bord de l'insert en polyéthylène ; Figure 25.1. Principe de la double mobilité.
• nouveaux dessins ;
• optimisation des traitements de surface pour une
C'est en principe la petite articulation qui se mobilise
meilleure fixation secondaire ;
pour des raisons purement mécaniques selon les lois
• amélioration du polyéthylène.
physiques des moments. Mais, lorsque le mouvement
Le système DM est aujourd'hui le système le plus
devient extrême, la deuxième articulation est mobili-
vendu en France ; sa diffusion est devenue mondiale.
sée par contact du col sur le rétreint du polyéthylène
Les publications internationales sur le sujet sont expo-
(PE). Ce contact entre le col et le PE constitue la troi-
nentielles depuis le symposium 2009 de la SOFCOT.
sième articulation, terme consacré depuis les travaux
de Daniel Noyer [3].
Définition et principe La DM est donc un concept original. Dans la DM, le
PE se mobilise sur la tête et se mobilise dans la cupule ;
La double mobilité [2] est un concept original dans le il y a bien deux mobilités. Ce système est en opposition
monde de l'arthroplastie de hanche : avec les systèmes conventionnels dont le PE est fixe
• la tête prothétique est mobile dans un polyéthy- dans le métalback et où il n'y a qu'une seule mobilité.
lène rétentif par le biais d'un listel de rétention (ou Il faut distinguer les cupules monobloc à DM des
rétreint) ; cupules avec inserts à DM. La cupule monobloc à
• lequel reste libre dans une cupule métallique fixée double mobilité est habituellement fixée à l'os sans
dans l'acétabulum ; ciment, plus rarement par l'intermédiaire de ciment
• ce polyéthylène se mobilise à travers deux articula- et s'articule directement avec le PE. L'insert à double
tions, l'une à grand diamètre avec la cupule, et l'autre mobilité est solidarisé à un métalback en titane par
à petit diamètre avec la tête prothétique (figure 25.1). l'intermédiaire d'un cône morse ; l'insert en inox ou
La prothèse totale de hanche dans tous ses états
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246 M.-H. Fessy, A. Viste, R. Des c elie

en cobalt chrome (jamais en titane) peut générer des de l'implant fémoral, diamètre de col, diamètre de bille.
problèmes de bimétallisme [4]. Avec l'implant NOVAE® (SERF, Decines) (figure 25.2),
en utilisant un col de 11 mm et une tête de 22,2 mm,
Avantages de la double mobilité la première mobilité autorise un cône de mobilité
d'amplitude constante de 51°. L'utilisation d'une tête
Le concept de la DM permet, en matière d'arthroplas- de 28 mm autorise un cône de mobilité d'amplitude
tie totale de hanche, d'obtenir des amplitudes articu- constante de 76°. L'augmentation du diamètre du col
laires qu'aucun autre système ne permet d'atteindre. diminue ce cône de mobilité.
Par ailleurs, ce concept autorise une très grande stabi- Au niveau de la deuxième mobilité (figure 25.3),
lité articulaire, là encore comme aucun autre système. c'est-à-dire de la mobilité entre la convexité du PE et
La DM s'autorise donc le paradoxe de la stabilité opti- le métalback, le cône d'amplitude augmente avec le
misée malgré une mobilité accrue. diamètre de la cupule. Pour une cupule de 43 mm, le
cône d'amplitude est de 126° ; il passe à 140° pour une
Amplitudes articulaires accrues cupule de 65 mm. Le diamètre du col fémoral joue un
rôle mineur ; ce cône reste indépendant du diamètre de
La première mobilité (figure 25.2), c'est-à-dire la mobi- la tête fémorale.
lité entre la tête et la concavité de l'insert en PE, confère Pour une cupule de 53 mm inclinée à 45°, antéversée
un cône d'amplitude qui dépend directement des carac- de 20°, en regard d'une tige ayant un col de 11 mm de
téristiques de l'insert à DM (caractéristiques dimension- diamètre, une antétorsion de 15° et un valgus de 7°,
nelles du rétreint et du dessin du chanfrein). Ce cône de l'amplitude d'abduction-adduction est de 126°, celle de
mobilité dépend aussi directement des caractéristiques flexion-extension de 186°, et celle de rotation de 220°.

Bille 22 mm 51°

Bille 28 mm 76°

Figure 25.2. La mobilité α de la petite articulation.

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Cupule 43 mm 126°

Cupule 65 mm 140°

Figure 25.3. La mobilité β de la grande articulation.


Double mobilité : du principe à la copie 247

Figure 25.4. Le cône de mobilité articulaire en fonction de l'insert.


1. nsert standard. 2. nsert avec débord postérieur. 3. nsert avec débord postérieur et chanfrein. 4. nsert de réorientation. 5. nsert
de réorientation avec chanfrein. 6. nsert double mobilité.

Si l'on extrapole les résultats publiés à l'American


Academy of Orthopaedic Surgeons (AAOS) en 2000
par Harkess [5] (figure 25.4), qui a étudié le cône de
mobilité en fonction de différents types d'inserts en
PE, il apparaît que la DM confère la plus grande mobi-
lité articulaire. Elle est plus importante qu'avec un
implant conventionnel, et beaucoup plus importante
qu'avec un insert à mur postérieur antiluxation. C'est
d'ailleurs, avec le couple métal-métal grand diamètre,
la seule méthode qui permette d'inclure dans son cône
de mobilité le cône de circumduction d'un sujet nor-
mal, mais aussi d'un sujet ayant des amplitudes articu-
laires au-delà des normes habituelles.

tabilité prothétique optimale


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L'instabilité prothétique résulte de deux mécanismes [6] :


• instabilité par décoaptation ; Figure 25.5. La distance AB ou jump distance caractérise un
• et/ou instabilité par effet came. implant en termes de risque luxant.
Qu'il s'agisse d'un effet came ou d'une décoaptation,
l'état de séparation reste identique : la luxation se pro-
duit lorsque la tête se déplace du point A au point B. 22 mm que pour une tête de 28 mm. Berry [7, 8] a
On peut considérer que le risque de luxation diminue confirmé ces résultats théoriques en clinique ; il a
quand AB augmente. AB est fonction du rayon R de insisté sur le rôle du diamètre de la tête ; il a insisté
la tête, de la profondeur de la cupule, mais aussi du aussi sur l'influence déterminante de la voie d'abord. Il
degré d'inclinaison de la cupule. AB, ou jump distance, a analysé en 2005 868 luxations issues de 21 047 pro-
caractérise un système en termes de risque luxant. Par thèses totales de hanche (PTH). Le risque cumulé [7, 9]
construction géométrique, il est possible de définir la de luxation, quelle que soit la voie d'abord, était de
distance AB (figure 25.5). 2 % à 1 an, de 3 % à 5 ans, de 4 % à 10 ans, de 6 %
Ainsi, il apparaît que pour une même configuration, à 20 ans. L'incidence de la luxation diminuait avec le
le risque luxant est plus important pour une tête de diamètre de la tête. La voie postérolatérale exposait le
248 M.-H. Fessy, A. Viste, R. Des c elie

Tableau 25.1
Instabilité et voie d'abord d'après D. Berry et d'après SOFCOT 2009
Abord tête 22,2 mm 28 mm 32 mm DM 09
Antérolatérale 3,8 % 3% 2,4 %

Transtrochantérique 3,5 % 3,5 % 2,8 % 0%

Postérolatérale 12,1 % 6,9 % 3,8 % 0,6 %

plus à la luxation. Avec cette même voie postérieure,


le risque de luxation cumulé à 10 ans pour une tête de
Dessins et matériaux
22,2 mm était de 12 %, passait à 7 % pour une tête
de 28 mm et chutait à 4 % pour une tête de 32 mm
Dessins
(tableau 25.1). À l'origine, la cupule de Bousquet [1] était une hémis-
Il est possible d'appliquer la formule déterminant la phère prolongée par une casquette cylindrique supé-
distance AB à la DM, et de définir la distance AB à rieure et avec un retrait de matériel au niveau de
parcourir pour le PE afin que la luxation se produise. l'échancrure acétabulaire. Cette association donnait à
En termes de DM, cette distance AB augmente avec le cette cupule une image d'hémisphère avec deux oreilles.
diamètre de la cupule. Si l'on admet que cette distance Ces oreilles pouvaient être à l'origine de conflit avec le
AB caractérise le système en termes d'instabilité pro- tendon du muscle iliopsoas, ce qui a généré des modi-
thétique, la DM apparaît aujourd'hui comme la meil- fications de ce dessin des cupules mises à disposition
leure solution pour combattre ce risque [2]. C'est en depuis le début des années 2000.
effet avec la DM que la distance AB est la plus impor- Aujourd'hui, il existe des cupules avec débords et
tante. Pour un diamètre extérieur de cupule équivalent, casquette comme sur le dessin original, des cupules
par exemple, la distance AB est plus importante avec hémisphériques pures, donc sans débord, et des cupules
la DM qu'avec un couple métal-métal grand diamètre cylindrosphériques, c'est-à-dire hémisphériques, pro-
(dont la cupule est en retrait par rapport à l'hémisphère longées par un cylindre plus ou moins long (jusqu'à
alors que la cupule à DM est au moins hémisphérique 3 mm). C'est l'évolution qu'a connu la cupule originelle
voire prolongée par un cylindre ou une casquette). de Bousquet et c'est la tendance actuelle du marché.
Dans la série du symposium SOFCOT 2009 [10], Ce modèle cylindrosphérique associe trois caracté-
de 3473 prothèses de première intention avec cupule ristiques essentielles que n'ont pas les autres dessins :
à DM, le risque luxant à 10 ans était de 0,4 % toutes • optimisation de la jump distance ;
voies d'abord confondues ; ce risque était de 0,6 % • facilité de préhension à l'aide d'un ancillaire ;
pour la voie postérieure (tableau 25.1). L'utilisation • facilité d'orientation dans l'acétabulum.
d'un diamètre de tête au-delà de 28 mm ou d'une Une cupule avec casquette procure une jump distance
cupule à DM fait donc disparaître le rôle de la voie équivalente à celle d'un modèle cylindrosphérique, mais
d'abord sur la stabilité. il est plus difficile de la tenir à l'aide d'un ancillaire.

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ransmission des contraintes Matériaux
à l'interface cupule-os receveur
Sur le marché, il existe des cupules en cobalt-chrome et
Il a souvent été mis en avant que la DM permettrait de des cupules en inox 316 L. L'expérience du titane dans
diminuer la transmission des contraintes à l'interface les années 1990 a rapidement été arrêtée. Le titane a
avec l'os receveur. Nous avons tenté de mettre en place certes d'excellentes propriétés d'ostéo-induction pour
une étude sur un banc d'essai pour caractériser ces la fixation secondaire ; en revanche, il constitue une
contraintes et les évaluer pour une prothèse conven- très mauvaise surface de frottement.
tionnelle et une prothèse avec une cupule à DM. Nous Le cobalt-chrome a une forte dureté, supérieure à
n'avons pas pu mettre en évidence de différences réel- l'inox ; l'acier inoxydable est quant à lui plus ductile.
lement significatives entre les deux (non publié). La ductilité d'un matériau désigne sa capacité de se
Quoi qu'il en soit, la mobilisation de la grande déformer plastiquement sans rupture. La dureté d'un
articulation par le col est protectrice pour l'interface matériau définit la résistance qu'oppose sa surface à la
par rapport au contact col-cupule d'une prothèse pénétration d'un poinçon par exemple. C'est donc un
conventionnelle. matériau résistant à l'usure. La dureté du chrome-cobalt
Double mobilité : du principe à la copie 249

est de 360 HV. Il est vrai que la dureté de l'inox 316 L, conventionnels, la littérature rapporte un risque de
issu d'une barre de métal, n'est que de 170 HV ; mais luxation de 1 % tous les 5 ans ; ce n'est pas le cas avec
cette dureté, après forgeage, première étape de fabrica- la DM ;
tion de la cupule, atteint 250 HV. On peut donc dire • la littérature retient habituellement des facteurs favo-
que la dureté de l'inox 316 L forgé est proche de celle risant la survenue de luxation : le sexe féminin, l'âge
du chrome-cobalt sans différence significative. supérieur à 70 ans, les troubles neurologiques, l'expé-
L'inox offre l'avantage d'être ductile. Cette propriété rience du chirurgien, le nombre de chirurgies précédem-
trouve tout son intérêt lorsque l'on veut adjoindre une ment réalisées, une atteinte rachidienne et l'atteinte de
patte de fixation à une cupule. La ductilité permet en l'appareil abducteur. Avec la DM, seul le nombre d'in-
effet la déformation du matériau, pour qu'il s'adapte terventions antérieures, affaiblissant l'appareil abduc-
à l'anatomie, sans qu'il se rompe. Ce n'est pas le cas teur, apparaît comme un facteur de risque significatif.
avec le cobalt-chrome. Il est difficile, en France, de préciser le taux d'ins-
Aucun de ces matériaux (chrome-cobalt ou inox) n'a tabilité prothétique. Les données recensées permettent
cependant une bonne biocompatibilité pour autoriser de définir une incidence de 2,6 %. Il existe une par-
une fixation secondaire, ce qui nécessite un traitement ticularité française : dans la plupart des registres, la
de surface complémentaire. luxation récidivante est la deuxième cause de reprise
Les capacités tribologiques de ces matériaux ne chirurgicale des arthroplasties de hanche primaires,
dépendent que des caractéristiques d'usinage (rugosité alors qu'en France ce n'est que la quatrième cause [15].
[Ra]), non communiquées habituellement (à tort) par Comment expliquer ce paradoxe français ? Certes, il y
les fabricants. Il faut bien reconnaître qu'aujourd'hui a eu l'avènement des grands diamètres de tête fémo-
le choix des matériaux chrome-cobalt ou inox est rale, mais elles sont à disposition dans tous les pays.
davantage une affaire de marketing qu'une donnée C'est sans doute le développement de la DM, plus
biophysique raisonnée ; le marché américain est en rapide en France que dans les autres pays, qui explique
effet plus friand du cobalt-chrome. ce faible taux de reprise pour luxation récidivante.
Du fait de la mauvaise biocompatibilité de ces deux Cette stabilité accrue a des conséquences médico-
matériaux, à la fin des années 1990, nous avons assisté économiques ; l'utilisation large du système pourrait
à un échec de toutes les cupules en chrome-cobalt ou contribuer à des économies de santé non négligeables
inox 316 L recouvertes d'hydroxyapatite. Faute de [16] quand l'on sait l'utilisation massive de la prothèse
fixation secondaire, les résultats à moyen terme étaient de hanche, innovation médicale majeure du XXe siècle
défavorables. Ces cupules ont été abandonnées. [17] du fait de la grande satisfaction des patients.
Depuis Massin et al. [11], il est admis que le revête- La survie de la cupule tripode originale de Bousquet
ment spray titane apposé sur la surface extérieure de est de 95 % à 10 ans [1] et de 90 % à 25 ans [18]. Le
la cupule est le traitement de choix pour autoriser une symposium SOFCOT 2009 a montré une survie glo-
fixation secondaire pérenne. Pour optimiser l'addition bale du système DM de 95 % à 10 ans [2], survie équi-
du titane sur le support métallique, il est préférable de valente à celle d'un système conventionnel.
la réaliser sous vide, pour minimiser le plus possible La survie de la cupule NOVAE SUNFIT® (SERF,
les pointes d'amorce de délamination des couches. Decines ; cupule à revêtement bicouche alumine-HAP®)
L'ajout d'un spray HAP® permet d'accélérer le proces- associée à une tige Corail® (DePuy, J&J) était de 95 % à
sus de fixation de la cupule à l'os sain receveur. 12 ans de recul. La survie de la cupule NOVAE SUNFIT
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TH® (SERF, Decines ; cupule à revêtement spray titane-


Données cliniques HAP®) associée à la même tige était de 100 % à 10 ans.
Dans ces deux séries, il n'y avait aucun cas de luxation
Le système DM a fait la preuve clinique de son effica- (voie postérieure). Il n'y avait également aucune luxa-
cité pour traiter et prévenir l'instabilité dans les situa- tion intraprothétique (LIP) [19].
tions à risque comme dans les situations standard : Ferreira [20] a rapporté des résultats similaires de
• chirurgie de première intention [10] : 0,7 % ; la cupule Quattro® (Lépine) avec 1 luxation par voie
• fracture du col [12] : 1,4 % ; postérieure mais aucune LIP à 10 ans. La survie de la
• reprise pour révisions aseptiques [2, 13] : 2,4 % ; cupule était de 99,6 % à 10 ans.
• reprise pour descellement septique [2, 13] : 6,6 % ; Toutes les séries récentes ont des résultats équiva-
• reprise pour instabilités chroniques [2, 13, 14] : 4 %. lents [21].
La DM n'est cependant pas une arme absolue contre
l'instabilité. Néanmoins, cette DM a des spécificités en
termes de luxation [2, 10] :
Usure
• ce risque existe au cours des premiers mois ; il L'usure de la petite et de la grande articulation est bien
n'y a pas de risque au-delà. Avec les systèmes plus connue depuis les études d'explants d'Adam et al. [22].
250 M.-H. Fessy, A. Viste, R. Des c elie

L'usure linéaire de la petite articulation est 7,5 fois 10 ans dans la série du symposium SOFCOT en 2009,
plus importante que celle de la grande articulation, suite à l'introduction du chanfrein sur le PE [2]. Ce risque
mais l'usure volumétrique, du fait des surfaces de est nul à 10 ans dans les dernières séries [19–21].
contact de superficie différente, est équivalente entre La LIP survient dès lors qu'il y a une perte moyenne
la grande articulation (grande surface de contact) et la de 35 % du volume du rétreint [25].
petite articulation avec une tête métallique de 22 mm. L'analyse des explants montre qu'il existe deux types
La grande articulation, pourtant la moins sollicitée, d'usure (figure 25.6).
génère un volume d'usure important ; c'est la raison • il existe tout d'abord une usure homogène symé-
pour laquelle la rugosité (Ra) de la concavité du métal- trique (figure 25.6A). Elle est constante. Elle corres-
back est un paramètre essentiel. pond à la collision du col sur le rétreint (effet came) ;
L'usure linéaire annuelle moyenne est, selon Adam • mais il existe aussi une usure asymétrique
et al. [23], de 9 μm pour la surface convexe et de 73 μm (figure 25.6B) qui est constante. Elle est due à une
pour la surface concave, soit un total de 82 μm avec subluxation progressive de la tête. Elle donne l'image
une tête métallique de 22,2 mm. Toujours selon caractéristique de la figure 25.6B.
Adam et al., le volume moyen d'usure annuelle est Ces deux mécanismes d'usure surviennent de manière
de 28,9 mm3 pour la surface convexe et de 25,5 mm3 concomitante et, selon la configuration prothétique, un
pour la surface concave, soit un total de 54,4 mm3 mécanisme d'usure devient prépondérant sur l'autre.
avec cette même tête. Le col fémoral joue un rôle essentiel dans l'usure du
La médiane du volume d'usure de 98 explants a été rétreint.
évaluée par Boyer et al. [24] à 276 mm3 pour la sur- Les causes de l'usure homogène du rétreint par effet
face concave et 347 mm3 pour la surface convexe. Ils came sont connues :
ont montré dans cette étude qu'il n'y a pas de relation • rôle néfaste d'un faible rapport tête-col ; on rap-
entre l'usure et la pénétration de la tête dans l'insert. pellera qu'il n'est pas pertinent d'utiliser une jupe en
En revanche, il en existe une entre l'usure et le dépla- regard d'une DM ;
cement du centre de rotation dans les trois dimensions • rôle néfaste des irrégularités macroscopiques du col,
de l'espace. L'usure est multidirectionnelle. comme un orifice d'extraction de tige ;
Cette usure n'est donc pas plus importante que pour • rôle probablement néfaste de la rugosité du col : un
une prothèse de Charnley. col grenaillé est plus agressif qu'un col mat ou qu'un
Les nouveaux PE constituent une piste d'amélioration. col polibrillant ;
• rôle néfaste d'un débord du cône sous la tête, du fait
de l'augmentation de diamètre par rapport au col qu'il
Luxation intraprothétique – représente et de sa rugosité ;
ses mécanismes • la nature des matériaux pourrait jouer un rôle
encore non élucidé.
Par définition, la LIP survient dès lors que la tête prothé- La littérature démontre que l'usure du rétreint par
tique n'est plus retenue par le rétreint. La fréquence de la effet came augmente avec la taille de l'insert en PE [22].
LIP, évaluée à 2 % dans la série initiale historique [1], est Quels sont les facteurs de l'usure par subluxation
en fait devenue exceptionnelle ; elle a été évaluée à 0,7 % à progressive de la tête ? Cette usure par subluxation

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Figure 25.6. L'usure du rétreint.


A. Usure symétrique et homogène par impingement. B. Usure asymétrique par subluxation.
Double mobilité : du principe à la copie 251

est, elle aussi, impactée par le col (figure 25.7). Elle l'usure interne par subluxation. Ce dessin optimisé
est d'autant plus rapide que la distance ZR est plus explique l'absence de LIP dans la série initiale de
faible : Caen [26] qui utilisait une tige de Charnley, alors que
• tout ce qui augmente la bascule du PE diminue la Bousquet [1] utilisait une tige vissée PF avec un très
distance ZR ; mauvais rapport tête-col, expliquant le taux de 2 % de
• le diamètre de l'insert en PE ne modifie pas cette dis- LIP dans sa série initiale ;
tance ZR, qui reste une donnée spécifique de chaque • d'autres cols aujourd'hui permettent d'obtenir les
constructeur ; mêmes résultats, grâce à des améliorations multiples
• le diamètre de la tête fémorale n'influence pas la [19] (chanfrein, caractéristiques du PE, col polibril-
bascule du PE, mais plus la tête a un grand diamètre, lant, etc.). Il est donc difficile de préconiser un col
plus le volume d'usure du rétreint est important, idéal.
contribuant ainsi à une destruction accélérée ; De même, il est bien difficile de conseiller un dia-
• plus le diamètre du col est petit, plus la bascule du mètre de tête. Il n'y a pas que le problème de la LIP ;
PE est importante. Un petit diamètre de col accélère il y a d'abord l'usure de la petite articulation qui doit
donc cette usure ; conditionner ce choix :
• la fermeture de l'angle cervicodiaphysaire (implant • une tête métallique de diamètre 22,2 mm diminue
varisé) diminue cette distance ZR. l'usure de la petite articulation, mais augmente l'effet
Il apparaît donc que certains facteurs ont un rôle came ; il faut sans doute préconiser le plus petit dia-
paradoxal : mètre de col (10 à 12 mm) pour cette taille de tête ;
• l'augmentation du diamètre de tête diminue l'usure • une tête en alumine de 28 mm génère un volume
par effet came mais use le listel par subluxation ; d'usure équivalent à celui d'une tête de 22 mm en
• l'augmentation du diamètre de col accentue l'usure métal. Ce diamètre de tête de 28 mm retarde l'effet
par effet came et diminue l'usure par subluxation. came. Cela semble un bon compromis. Mais quel col
Existe-t-il un col idéal  ? Il est bien difficile de mettre en regard ? Si un petit col diminue l'effet came,
répondre à cette question : il favorise la bascule du PE et l'usure interne…
• le dessin du col de Charnley associé à une tête de On ne peut donc pas raisonnablement répondre au
22,225 mm est un dessin optimisé. Le rapport tête- choix de la meilleure configuration. Tout est affaire
col optimal retarde l'effet came et l'usure externe. La de compromis. Seules les séries sauront répondre dans
forme conique du col s'oppose à la bascule du PE. l'avenir.
La tête use peu du fait de son diamètre. Cela retarde

Conclusion
Depuis la fin des années 1990, le concept de la double
mobilité (DM) est tombé dans le domaine public ;
c'est la règle après 20 ans d'exploitation d'un brevet.
Le modèle original a été copié avec plus ou moins de
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bonheur. Heureusement, certains fabricants, grâce à


leur réflexion, ont su apporter des modifications et
des améliorations qui ont contribué à l'optimisation
du concept. Ils ont aussi contribué à la reconnaissance
du principe et à sa diffusion. Malgré ces nombreuses
copies, la société SERF détient l'historique du concept
et le savoir-faire, et a su rester leader du marché avec
une dynamique toujours positive des ventes. La copie
reste la rançon du succès. La notoriété de ce dispo-
sitif médical est renforcée par la position de chirur-
giens hier détracteurs, aujourd'hui devenus défenseurs
incontournables !
« The object of total hip replacement is to build
Figure 25.7. L'usure par subluxation progressive du PE, la dis- well for 20 years ; it is not for sensational short-term
tance ZR. results » (Sir John Charnley)
252 M.-H. Fessy, A. Viste, R. Des c elie

Réfé ences
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253

La double mobilité pour tous ?


A. FERREIRA

Introduction Cependant, partant du constat établi par le sympo-


sium de 2009, la Haute autorité de santé (HAS) a émis
Le concept de la double mobilité (DM) a été conçu des recommandations et défini une population cible
entre 1974 et 1979 par Gilles Bousquet pour bénéfi- de la DM : seuls 30 000 patients à haut risque de luxa-
cier théoriquement et conjointement de la stabilité des tion justifieraient chaque année son usage en chirurgie
têtes de grand diamètre et de la réduction de l'usure primaire ou de révision. L'expansion de l'utilisation
favorisée par la low friction arthroplasty (LHA) décrite en France de la DM en première intention est pour-
par Charnley. À l'époque, les taux publiés de luxation tant supérieure à ces recommandations : près de 40 %
après prothèse totale de hanche (PTH) primaire étaient des cupules primaires et environ 70 % des implants de
compris entre 3 et 10 %, justifiant la recherche d'une révision sont des DM (40 à 50 000 cas en pratique).
meilleure stabilité. L'implant a ensuite été utilisé lar- Mais le débat reste ferme entre partisans de la DM
gement, chez tous les patients ou presque, dans le ser- pour tous (ou presque) et ceux, plus circonspects,
vice de G. Bousquet à Saint-Étienne, mais également désireux de la voir réservée aux indications décrites
à Caen, par J.-H. Aubriot et C. Vielpeau. En dehors par le symposium de 2009. L'usure potentielle est le
de ces deux centres, seuls quelques convaincus, le plus point d'achoppement car, désormais, l'effet sur l'ins-
souvent issus de ces écoles, l'utilisaient en routine. tabilité est incontesté, le taux de luxation étant passé
Lorsqu'en 1996 le brevet est tombé dans le domaine en France de 9,1 à 6,1 % entre 2005 et 2014 (sources
public, beaucoup de fabricants, en particulier français, Agence technique de l'information sur l'hospitalisa-
ont conçu de nouveaux modèles de DM pour répondre tion [ATIH], [2]).
à une demande frémissante du marché et les publica- Le développement international de la DM soulève les
tions ont dès lors commencé à se multiplier. Jusqu'en mêmes débats malgré l'accroissement important des
2009, avec le symposium de la Société française de publications sur le sujet, en particulier aux États-Unis
chirurgie orthopédique et traumatologique (SOFCOT) où le dernier rapport de l'American Joint Replacement
dirigé par M.-H. Fesssy [1], les indications étaient peu Registry (AJRR) [3] montre que la luxation y reste la
codifiées et l'usage habituel de la DM, en dehors de ses première cause de révision des PTH durant les trois
adeptes, consistait à l'implanter seulement en cas de premiers mois (17,4 % des cas), avant l'infection et les
révision pour instabilité ou en première intention chez fractures périprothétiques.
des sujets à très haut risque de luxation. Le symposium Actuellement, certains s'interrogent encore sur
a posé les bases de l'utilisation de la DM en s'appuyant le bien-fondé de l'utilisation de la DM chez tous les
essentiellement sur l'âge des patients. Si son effet anti- patients, sans distinction d'âge, de sexe ou d'étiologie.
luxant avéré a conduit à la proposer sans équivoque Ce débat se cristallise autour des sujets jeunes, dont
après 70 ans, de fortes réserves ont été émises pour le haut niveau d'activité présumé pourrait s'accompa-
les sujets jeunes, définis à moins de 55 ans, en raison gner d'une usure précoce conduisant au descellement
du risque potentiel de complications, et en particulier des implants et à la spécifique luxation intraprothé-
d'usure et de descellement. Enfin, pour les patients tique (LIP) décrite par Lecuire en 2004 [4].
« intermédiaires » (entre 55 et 70 ans), la recomman- Quelles sont les raisons de ces controverses autour
dation était de tenir compte de l'espérance de vie. Ce de la DM et existe-t-il réellement une différence de
symposium, élaboré à partir de 4186 dossiers, concer- résultats par rapport aux cupules standard ? Quels
nait essentiellement les cupules à DM de première ou sont les points forts et faibles de la DM qui justifient le
de deuxième génération. Depuis lors, une troisième, débat actuel ? Peut-on encore espérer des progrès tech-
l'actuelle, a vu le jour, tenant compte des points faibles niques ? Enfin, et surtout, peut-on raisonnablement
pointés par le symposium et encore plus prometteuse utiliser la DM chez tous les patients et en particulier
en termes de survie et d'usure. les plus jeunes ?

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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254 A. Ferreir

Quelle est la problématique le Canada, la DM est considérée comme un implant


à haute valeur technologique conduisant à autoriser
de la double mobilité ? un prix de vente plus élevé pour elle que les autres
systèmes (y compris la céramique-céramique) mais
Bases du raisonnement limitant, de ce fait, son utilisation pour des raisons
De tout temps se sont posées des questions d'indica- économiques. Ce n'est pas le cas en France où sa base
tion des implants de hanche : fallait-il réserver la PTH de remboursement est la même que celle d'une cupule
aux patients âgés ? Seulement aux atteintes dégénéra- standard comportant un metal back et un insert en
tives, par opposition aux fractures du col du fémur polyéthylène et est donc inférieure à celle des couples
justifiant plutôt une hémi-arthroplastie ? Avec quelle dur-dur ou utilisant le polyéthylène hautement réticulé
fixation, cimentée ou non, en privilégiant le sans (PEHR). La DM apporte pourtant un bénéfice écono-
ciment avant 65 ans ? Avec quel couple de frottement ? mique indéniable [5] grâce à la réduction des réhospi-
Doit-on réserver les couples dur-dur aux plus jeunes talisations et des révisions pour instabilité récidivante.
et plus actifs ? La Commission d'évaluation des pro- Malgré cela, ses indications restent restreintes, selon
duits et prestations (CEPP) en 2007 recommandait la HAS, à un sous-groupe des patients justifiant d'une
par exemple les prothèses cimentées à couple métal- prothèse à couple métal-polyéthylène conventionnelle
polyéthylène après 70 ans. (patients de plus de 65 ans).
L'histoire montre comment ces débats ont évolué et
combien certains semblent désormais obsolètes. Il n'en Quelle est la pertinence
demeure pas moins que la notion d'âge a toujours été du critère d'âge ?
au centre des discussions, l'objectif étant de proposer
aux plus jeunes patients des implants à la longévité a Ainsi, les indications de la DM s'appuient essentielle-
priori accrue. En filigrane transparaît l'idée qu'ils sont ment sur le critère âge, en y associant le risque de luxa-
les seuls à avoir une activité intense et que celle-ci a tion, ce qui sous-entend que ses résultats à long terme ne
pour corollaire étroit l'usure du polyéthylène (PE). permettent pas de la proposer à tous les patients. C'était
Dans cet esprit, la DM s'est retrouvée cantonnée aux l'esprit du rapport de la CEPP 2007 qui s'est fondée sur
patients les plus âgés, en vue d'améliorer la stabilité au un nombre d'études restreint, la communication scienti-
détriment de ses autres qualités possibles, considérant fique sur la DM n'ayant réellement augmenté qu'à partir
que cette population souffre surtout de déficience mus- de 2010, année de son agrément par la Food and Drug
culaire ou neurologique, sans tenir compte du niveau Administration (FDA) américaine (figure 26.1).
d'activité. La DM n'est donc pas considérée comme Pour faire évoluer ce paradigme, il faut étudier
un implant moderne mais plutôt comme un produit de les résultats actuels de la DM utilisée de manière
second recours. Pourtant, dans certains pays comme « conventionnelle », la comparer aux séries de cupules

14

12
Brevet dans le domaine public
Nombre d’articles publiés

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10
Approbation FDA

6
Avis CEPP

0
1986 1993 1998 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016

France États-Unis Suède/Pays-Bas Europe


Australie Canada Asie

Figure 26.1. Évolution de la communication scientifique autour de la double mobilité.


La double mobilité pour tous ? 255

standard, puis se focaliser sur les patients jeunes pour dans une série de 136 révisions de PTH (revues entre
déterminer si les réserves émises jusqu'à présent sont 2 à 5 ans), tous les travaux ont confirmé l'effet stabi-
justifiées. lisant de la cupule DM mais ont rapporté des résul-
Mais surtout, il semble souhaitable de faire évoluer tats à long terme des premiers implants qui peuvent
les critères d'appréciation de l'activité des patients : à première vue sembler moyens : 88,3 % de survie à
• un patient âgé peut être actif ; 22 ans pour Boyer et al. [9] (80 % si l'on ajoute les
• un patient jeune peut être sédentaire ; changements isolés d'insert), avec un taux d'échec pré-
• toutes les activités ne sont pas équivalentes ; coce plus important chez les moins de 50 ans. Pour
• la distinction entre activité à impact et activité à l'expliquer, le revêtement en alumine, non pérenne,
risque luxant est importante ; du metal-back sans macrostructure de surface et le
• les grandes amplitudes articulaires ont une physio- grand diamètre du col de la prothèse fémorale utilisé
pathologie propre ; ont été retenus. Mais dans une revue à très long terme
• l'usure du PE, cause d'une complication spécifique (> 25 ans) de la même série de patients, Neri et al.
(LIP) est multifactorielle (type de prothèse, activité [10] ont finalement rapporté une survie des cupules
physique, etc.) et ne dépend pas que de l'âge. NOVAE® de première génération de 90,6 % (critère
Cette analyse doit permettre de dégager d'autres d'échec retenu : toute cause de révision), prolongeant
paramètres au moins aussi pertinents que l'âge pour le travail de Philippot et al. (93,3 % à 17 ans) [11] ; ces
élargir (ou non) les indications de la DM, comme le survies sont comparables à celles des cupules conven-
suggère l'évolution de son utilisation. tionnelles. Par rapport à la publication de Boyer et al.
[9], l'amélioration des résultats s'explique par l'exclu-
sion des prothèses pour fracture du col fémoral (avec
Utilisation « classique » ainsi moins de patients décédés à la révision (76 contre
de la double mobilité 99) et par un plus grand nombre de dossiers radiolo-
giques étudiés.
Un élargissement progressif La seconde génération de DM (des années 1990) a
des indications amélioré le taux de survie avec des résultats autour
de 97 % à 10 ans [12]. L'étude de la dernière généra-
Si l'on excepte les précurseurs stéphanois et les pion- tion de la cupule de Bousquet de Philippot et al. [13] a
niers de la première heure qui ont utilisé exhaustive- confirmé ces données, avec moins de 2 % de luxation
ment la DM en chirurgie de première intention, les et seulement 3 % de descellement à 12 ans. Le taux de
chirurgiens utilisateurs ont respecté au départ des luxation reste très proche de 0 % dans la plupart des
indications plus étroites : patient âgé (de plus 70 ou travaux récents [14–16], même si le dessin des cupules
75 ans), patient à haut risque de luxation (pour des évolue.
raisons neurologiques, musculaires, tumorales, etc.), Enfin, dans les séries modernes, la survie des DM a
fractures du col du fémur, révision prothétique (sur- encore été améliorée : de 93 % à 10 ans (étude mul-
tout en cas d'instabilité récidivante). ticentrique de Combes et al. [17], de 95 % à 10 ans
Peu à peu cependant, les indications se sont étendues. (cupule Quattro® [14]) et même 100 % à 4 ans (cupule
L'âge à partir duquel il semble raisonnable d'utiliser la ADM® [16]), le taux de luxation étant inchangé.
DM s'est abaissé. Mais surtout, la notion d'instabilité
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potentielle liée à des situations particulières s'est impo- Les implants conventionnels
sée comme une indication légitime de la DM. C'est
ainsi que la DM a commencé à être utilisée chez les n'ont pas démontré de supériorité
patients opérés pour ostéonécrose aseptique, souvent Les résultats globaux rapportés par le Registre suédois
des hommes jeunes connus pour un risque de luxation de 2014 [18] (créé en 1979, il recense 157 829 PTH
plus élevé [6] ; de même, chez ceux ayant une raideur implantées entre 1991 et 2014) concernent des patients
rachidienne, en cas d'obésité [7] et de certaines activi- d'âge moyen à l'intervention (hommes : 67,2 ans ;
tés professionnelles ou de loisirs. femmes : 69,9 ans ; médiane de 71 ans pour 57,1 %
des PTH). La survie à 10 ans, selon la période d'im-
Les résultats à long terme plantation (avant ou après 2005) ou le mode de fixa-
de la DM n'ont pas été décevants tion des implants, était en moyenne proche de 95 %
(tableau 26.1). Au recul de 35 ans, la fréquence cumu-
Depuis le premier article de Bousquet et al. [8], publié lée de révision, toutes causes confondues, était proche
en 1986, rapportant un taux de luxation de 2,2 % de 25 % (23 % à 20 ans).
256 A. Ferreir

Tableau 26.1 majoritairement masculins : 66,7 % avant 55 ans dans


Survie à 10 ans dans le registre suédois de 2014 [18] la série de Puch et al. [26] (seulement 37,7 % après),
55 % dans celle de d'Almeida et al. [27], 58 % dans
Période d'implantation 1995–2004 2005–2014
celle de Bizot et al. [28], 74 % dans celle de Martz
Tous les implants 94,3 % 94,7 % et al. [6] dans son travail spécifique sur les ostéoné-
croses aseptiques, mais 44 % seulement dans celle de
Implants cimentés 94,7 % 95,2 %
Wroblewski et al. [29], beaucoup plus ancienne (1998).
Implants non cimentés 91,7 % 94,6 % Cette population est hétérogène avec un niveau
d'activité des patients très variable :
• certes, la prédominance masculine et une fréquente
Dans la littérature, qui regorge de résultats de PTH à activité professionnelle sont des facteurs d'usure connus ;
couple métal ou céramique-polyéthylène convention- mais celle liée à la friction entre la tête prothétique et
nel, on trouve une survie des cupules, toutes causes l'insert d'une part et entre l'insert et la cupule métallique
de révision incluses, de 78 % à 17 ans [19], 86 % à d'autre part soutient la comparaison avec les cupules
20 ans [20], 87 % à 25 ans [21], 66 % à 28,4 ans [22] conventionnelles comme nous venons de le voir ;
et de 84 % à 30 ans [23] (mais en prenant pour seul • mais surtout, les pratiques de sports à impact (course,
événement le descellement aseptique). saut), de sports à haut risque de luxations (sports de
La survie des cupules conventionnelles avec couple combat, alpinisme) ou avec des dangers vitaux en cas
céramique-céramique plafonne autour de 95 % à 12 de luxations (voile, trekking), plus fréquentes dans
ou 14 ans [24, 25], de même que celle des cupules cette population (mais pas exclusivement), doivent
avec insert en polyéthylène conventionnel à haut poids être prises en compte ; elles peuvent conduire à une
moléculaire [18]. usure et/ou des complications plus spécifiques de la
Ces résultats sont donc similaires et parfaite- troisième articulation entre l'insert et le col fémoral,
ment comparables à ceux de la DM (pour rappel : LIP en particulier.
90,6 % de survie des cupules à 25 ans pour Neri Aussi faut-il avoir pour ces patients une approche
et al. [10]). Déjà lors du symposium de 2009, Fessy différente pour les raisons suivantes :
rappelait que le taux de survie de 95,24 % à 10 ans • leur espérance de vie est plus importante ;
de sa cohorte comportant des implants très variés • une très bonne fixation des implants est nécessaire ;
était comparable à celui des cupules convention- • le risque d'usure est plus important du fait d'une
nelles rapporté par le registre suédois (93 % pour activité importante ;
les meilleurs implants au même recul). Ainsi, la DM • le risque de luxation est plus important du fait de
a démontré son efficacité et sa longévité à moyen et pratiques à haut risque d'instabilité plus fréquentes ;
long termes, sans souffrir de la comparaison avec les • certaines de leurs activités nécessitent des ampli-
cupules standard contemporaines. tudes de mobilité extrême, sources de luxation par
effet came mais également d'usure de la troisième arti-
Problème spécifique des sujets culation par conflit col-listel.
En pratique, les patients de moins de 55 ans ont
jeunes et actifs une demande d'usure minimale, malgré une activité
intense, souhaitent une stabilité assurée pour certaines

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Définition pratiques sans limitation de mouvement, et désirent au
final une longévité maximale.
La première question est de définir la limite supérieure
d'âge de cette population : 45, 50 ou 55 ans ? Ce chiffre
varie selon les auteurs, rendant les comparaisons par- ésultats
fois difficiles. Nous utiliserons pour ce travail la fron-
tière utilisée lors du symposium 2009 de la SOFCOT Prothèses standard
et par la HAS : 55 ans. Cette population particulière a des résultats moins
Ces patients sont le plus souvent opérés pour des bons que ceux de la population générale. Le registre
raisons particulières : dysplasie de hanche, ostéo- suédois de 2014 a comparé la survie globale des PTH
nécrose, séquelles de fractures, d'épiphysiolyse ou à 23 ans en tenant compte de l'âge à l'implantation
d'ostéochondrite. et du sexe. Il y avait une différence très nette entre les
Si, selon le registre suédois de 2014, il y a plus de moins de 50 ans (survie de 54 à 59 %) et les plus de
femmes opérées par PTH quelle que soit l'étiologie 60 ans (survie de 78 à 86 %) (tableau 26.2) quel que
(sauf pour les tumeurs), les patients opérés jeunes sont soit le sexe.
La double mobilité pour tous ? 257

Le registre finlandais de 2015 (à propos de 3668 PTH probablement en termes d'impacts provoqués par
implantées entre 1987 et 1996) a également montré une activité à risque, ce qu'un simulateur de hanche
chez les patients de moins de 55 ans des résultats alté- ne reproduit que rarement.
rés avec une différence significative selon le mode de
fixation en faveur du ciment, mais le nombre total
de prothèses sans ciment était faible dans ce registre Double mobilité chez les patients jeunes
(tableau 26.3) [30]. Pour Philippot et al. [32], dans une série de
Les données issues des séries de la littérature sont 137 cupules de Bousquet NOVAE® première géné-
globalement plus optimistes (survie d'environ 95 % ration (114 patients de moins de 50 ans opérés entre
à 10 à 12 ans), quel que soit le couple de frottement 1985 et 1995 et revus à un minimum de 20 ans), la sur-
utilisé, même si l'on dispose de peu de séries à long vie était de 77 % à 20 ans, sans occurrence de luxation
terme et même si, en général, il s'agit de séries limitées mais avec un taux de LIP de 10 %. Outre l'usure de
(tableau 26.4). l'insert, étaient également mis en évidence des conflits
En tout état de cause, le PE s'use davantage chez entre le col et le rebord métallique de la cupule, sources
les patients lourds et actifs, mais une étude in vitro d'effets cames plus ou moins luxants mais aussi de des-
récente [31] a confirmé que l'usure gravimétrique cellements aseptiques. Ce contact particulier est pro-
d'une DM est équivalente à celle d'une cupule stan- bablement plus fréquent chez les patients actifs (et/ou
dard à 5 millions de cycles sur un simulateur réglé jeunes) ayant des activités avec amplitudes articulaires
aux normes internationales. La situation particu- extrêmes. La cupule originale de Bousquet était très
lière de la DM doit donc s'analyser davantage en débordante, favorisant ainsi ces conflits, et aussi ceux
risque de conflit col-listel de rétention de l'insert et avec le tendon du muscle psoas-iliaque.
Tableau 26.2
Survie des implants en fonction de l'âge (registre suédois
de 2014) Tableau 26.3
Survie des PTH chez les patients de moins de 55 ans selon
Âge Survie hommes Survie femmes le mode fixation (registre finlandais) [30]
< 50 ans 59,1 % 53,8 % PTH < 55 ans Survie à 15 ans
50-59 ans 61,5 % 69,9 % Non cimentée avec tige droite 62 %

60-75 ans 78,3 % 85,8 % Non cimentée avec tige anatomique 58 %

> 75 ans 90 % 92,7 % Cimentée 71 %

Tableau 26.4
Données de la littérature
Auteur Limite Couple Recul Survie toutes causes de révision Taux de luxation
supérieure d'âge de frottement confondues
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Bizot 55 ans CC 9 ans 93,7 % 2,8 %

Almeida 55 ans Métal-alumine 10 ans 88 % N/A

Chana 55 ans CC 10 ans 96,5 % N/A

Kerboull 50 ans Métal-PE 10 ans 99 % 0,46 %

Wroblewski 51 ans Métal-PE 10 ans 94 % 1,2 %

Boyer 50 ans CC 12 ans 91 % 3,6 %

Kim 30 ans CC 14,6 ans 100 % 0,8 %

Delaunay 50 ans Métal-métal 15 ans 96 % 1,2 %

Wroblewski 51 ans Métal-PE 17 ans 82,5 % 1,2 %


CC : céramique-céramique ; PE : polyéthylène.
258 A. Ferreir

Puch et al. [26] ont rapporté les résultats d'une série • type 2, LIP par blocage de l'insert sans descellement
de 111 cupules de seconde génération (GYROS®) chez (conséquence d'une fibrose ou d'une déformation du
105 patients de moins de 55 ans, implantées entre metal-back) ;
2000 et 2005. La survie globale des PTH était de • type 3, LIP avec descellement.
96,1 % à 13,9 ans à confronter aux 95,6 % à 15,5 ans Toutes les trois surviennent à un délai moyen de 9 à
des 444 prothèses des patients de plus 55 ans étudiées 10 ans. Il s'agit, avant toute autre chose, d'un pro-
dans le même travail. Spécifiquement, la survie était blème d'usure du polyéthylène dans la zone du listel
de 98,4 % à 14 ans pour les cupules (LIP : 0 %). Ces de l'insert (le rétreint) par conflit entre celui-ci avec le
résultats sont meilleurs que ceux de la première géné- col ou le cône de la tige fémorale. La tête prothétique
ration de cupules de Bousquet, confirmant les amé- sort ensuite de l'insert tout en restant dans l'enveloppe
liorations apportées à l'implant. Le taux d'ostéolyse du metal-back. La LIP ne doit donc pas être confon-
(sans retentissement sur la tenue des implants au recul due avec une luxation prothétique consécutive à des
présenté) était de 7,7 % avant 55 ans et 3,6 % au- effets cames ou de translation provoquant l'expulsion
delà. Il était cependant doublé, confirmant qu'une de l'ensemble tête-insert en dehors du metal-back.
population plus jeune et plus active accélère l'usure
du polyéthylène.
Martz et al. [6] ont rapporté une survie de 100 % Facteurs d'une usure spécifique
à 10 ans chez 31 patients de moins de 55 ans, opérés à la double mobilité
entre 2000 et 2008 d'une ostéonécrose de la tête fémo-
rale (74 % d'hommes ; 40 PTH), sans luxation, sans Comme expliqué précédemment, la principale cause
LIP et sans descellement uni- ou bipolaire. de LIP de la première génération de cupule à DM de
Enfin, pour Epinette et al. [16], au court recul moyen Bousquet était le grand diamètre et la rugosité du col
de 48,1 mois, la survie était de 97,3 % à 5 ans (cupule des tiges fémorales utilisées en regard. Avec le pivot de
seule : 100 %) sans LIP ni luxation dans une série de Charnley au col très fin, l'équipe de Vielpeau [34] n'a
112 PTH chez 106 patients de moins de 70 ans opérés pas rencontré les mêmes problèmes (0,7 % de LIP à
avec la cupule ADM® à un insert en PEHR (le X3®). 17 ans contre 4,71 % à 15 ans dans la série historique
La DM a donc essentiellement souffert des résultats de de Neri et al.). Le dessin du listel de rétention qui ne
la première génération de cupules, avec un taux de des- comportait pas de chanfreins et procurait au col ou au
cellement élevé avant 65 ans pour Philippot et al. [11] cône un appui ponctuel était également en cause. Ces
et avant 50 ans pour Boyer et al. [9]. Les échecs étaient chanfreins, qui procurent un contact plan étendu, sont
directement liés à l'usure du PE entraînant des descelle- désormais présents dans toutes les cupules DM.
ments aseptiques ainsi qu'à des LIP (15 cas dans la série Une autre cause classique de LIP est le blocage de
de Philippot et al. [11]) sur lesquelles nous reviendrons l'insert par la capsule articulaire, une fibrose péripro-
plus loin. thétique ou une déformation de la cupule métallique
Les générations suivantes ont tenu compte des qui le font se figer, le plus souvent en varus, et à rester
faiblesses pointées et les résultats se sont hissés au en contact quasi permanent avec le col fémoral, ce qui
niveau de ceux des cupules conventionnelles récentes. explique l'accélération de l'usure. Une des parades est
Les cupules actuelles ont des résultats précoces excel- l'utilisation de matériaux plus durs et indéformables
lents, mais qui doivent être confirmés par un plus pour la fabrication de la cupule (chrome-cobalt ou

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long recul. acier inoxydable spécifique) ou la non-fermeture de la
capsule articulaire en cas de tension importante.
D'autres facteurs, plus ou moins bien étudiés ou avé-
Problème particulier rés, pourraient interférer dans la genèse de la LIP :
• diamètre du rétreint par rapport à celui de la tête
des luxations intraprothétiques (actuellement autour de 26,3 mm pour une tête 28 mm) ;
• décalage entre les centres de rotation de l'insert et de
Ce n'est pas une luxation la tête prothétique (par rapport à l'insert ou au metal-
stricto sensu back) permettant d'éviter théoriquement le blocage en
varus de l'insert grâce à un rappel automatique de ce
La LIP, initialement décrite par Lecuire et al. [4] en dernier, à l'inverse de la concentricité (figure 26.2) ;
2004 à propos de 7 cas survenus à 10 ans en moyenne, • force nécessaire à l'impaction et à l'extraction de la
a ensuite été classifiée par Philippot et al. [33] en 2013 : tête fémorale, elle-même directement liée à l'élasticité
• type 1, LIP par usure sans arthrofibrose ni descelle- du PE et source de déformation élastique puis plas-
ment de la cupule (simple usure du rétreint) ; tique du PE ;
La double mobilité pour tous ? 259

en acier inoxydable), une zone de rétention optimisée,


de nouveaux polyéthylènes et utilisant parfois le déca-
lage des centres, ils sont nettement mieux armés pour
retarder cette usure par conflit.
S'il est impossible et faux d'affirmer que la LIP ne sur-
viendra plus, il est probable que ce sera plus tardivement
(15 ans ou plus) compte tenu des améliorations tech-
niques et seulement chez des patients faisant des mou-
vements d'amplitude articulaire extrême, de manière
répétée et violente. Les mêmes causes produisant les
mêmes effets, les LIP favorisent également, chez les kara-
tékas ou les footballeurs, des coxarthroses précoces. C'est
donc la notion d'activité qui doit prévaloir dans l'analyse
de la genèse de cette complication, et non celle de l'âge.
Les patients hautement actifs auront toujours un risque
d'usure ou de défaillance précoce plus important.
Que préfère-t-on alors dans ce cas : une usure du PE
Figure 26.2. Position de l'insert sans (A) et avec (B) décalage à l'origine d'une LIP que l'on sait traiter, ou une usure
des centres.
du métal voire une fracture de céramique au traite-
ment plus difficile ? C'est une des questions que l'opé-
• nature exacte du PE ; rateur doit se poser lorsqu'il choisit un implant.
• clairance de l'insert par rapport au metal-back qui,
trop faible, peut favoriser le blocage ;
• rugosité du col (et éventuellement du cône) de la tige
Application de la double mobilité
fémorale ; aux sujets jeunes et actifs
• enfin, et en particulier chez les sujets très actifs,
de grandes amplitudes articulaires mettant régulière- Quels besoins ?
ment en contact le col avec l'insert et activant réguliè- Le plus souvent, ces patients requièrent une amplitude
rement la seconde articulation de la double mobilité de mouvement importante et souhaitent une usure
(insert-metal-back). minimale ; mais surtout, ils ne sont pas prêts à accep-
ter facilement une instabilité prothétique. La réponse
Une complication générationnelle est sans équivoque : la DM donne cette large mobilité
en voie de diminution articulaire et le taux de luxation est minime, ce qui
la place, dans ce domaine, devant les têtes de grand
Au final, la LIP est une complication historique de diamètre (quelle que soit la voie d'abord), même si
la DM dont l'impact sur la première génération de ces dernières ne déméritent pas et ont des arguments à
cupule reste fortement ancré dans la pensée générale. faire valoir pour l'usure.
Pourtant, sachant que c'est entre 8 et 11 ans qu'ap-
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paraît classiquement cette complication, les résultats


actuels sont tous concordants pour confirmer que le
Données expérimentales
chiffre de 4,71 % de LIP dans la série historique de Les amplitudes articulaires avant conflit (prosthetic
Neri et al. [10] est spécifique de la première génération impingement free range-of-motion [PIFR]) ont été étu-
de cupules et de tiges. diées sur simulateur par Heffernan et Nevelos [36] en
Le taux est désormais très faible (< 1 %) dans les comparant des cupules standard de 54 mm avec une
séries modernes : 0,3 % dans le symposium de la tête 28 et 36 mm à deux cupules DM, l'une subhé-
SOFCOT de 2009 à 7,5 ans de recul moyen (cupules de misphérique et l'autre anatomique (chacune de 54 mm
première et de seconde génération mélangées) et 0,1 % de diamètre extérieur avec un insert de 48 mm). La
dans la revue multicentrique de 1905 DM de seconde cupule anatomique procurait les mêmes amplitudes en
génération (patients > 55 ans) à 8 ans de recul moyen flexion, extension, abduction, adduction et rotations
en 2012 [35]. Dans les séries d'implants de génération que la cupule standard associée à une tête 36 mm,
actuelle, l'incidence des LIP est exceptionnelle, mais tout en lui étant un peu inférieure en adduction et
il est vrai que leur recul est encore faible. Cependant, extension ; la cupule DM subhémisphérique était lar-
avec un metal-back plus rigide (en chrome-cobalt ou gement supérieure à toutes les autres. La somme des
260 A. Ferreir

amplitudes théoriques sur simulateur était sans équi- stabilité dépend également d'autres facteurs non négli-
voque : 534° pour la tête 28 mm, 562° pour la tête geables (voie d'abord, qualité de l'orientation de la
36, 541° pour la DM anatomique et 610° pour la DM cupule et de la tige, diamètres du col et du cône) ?
subhémisphérique. Là encore, la DM était identique On peut donc être tenté de préférer des cupules sub-
ou supérieure aux cupules standard, sachant qu'un hémisphériques mais au risque de diminuer leur réten-
effet came n'entraîne pas nécessairement une luxation, tivité, de favoriser l'interposition fibreuse entre insert
grâce à sa seconde articulation, sécurité que n'offre et cupule source de blocage, et également de diminuer
pas la cupule standard. la surface de contact avec le cotyle osseux et ainsi de
Ce dernier point est confirmé par le calcul de la dis- compromettre la fixation mécanique. Ce choix doit
tance horizontale de luxation postérieure (posterior être effectué en connaissance de cause de ces para-
horizontal dislocation distance [PHDD] [36]) qui est mètres, et il faut l'adapter à l'activité et aux risques
le pendant tridimensionnel de la jump distance décrite propres à chaque patient.
par Masse et Wagner (figure 26.3). Elle est équiva-
lente entre une cupule standard et une cupule DM Évolutions en cours
subhémisphérique, mais elle est significativement plus
importante pour une cupule anatomique (ADM®), Génération actuelle
réduisant d'autant le risque de luxation. Les cupules
DM classiques, par leur caractère plus enveloppant, La troisième génération de DM privilégie le plus sou-
ont donc une qualité de rétention de l'insert supérieure vent la fixation press-fit avec un double revêtement
garantissant au noyau de PE de rester plus longtemps titane hydroxyapatite sur une cupule en chrome
stable (la rétentivité). cobalt, en association avec un traitement microporeux
de surface favorisant l'ancrage osseux.
Quelles cupules ? Le dessin des implants s'oriente vers la diminution
des débords et des superstructures pour éviter les
Le choix du dessin des implants est au final un com- conflits tendineux avec le psoas iliaque et le contact
promis [37]. Celui du dessin de la cupule métallique en col-cupule metal-back. Les formes peuvent être hémis-
est le meilleur exemple : phériques pures ou obliques, subhémisphériques ou
• doit-il reculer au maximum le risque de conflit col- avec des débords supérieurs limités et parfois anato-
metal-back pour augmenter les amplitudes articulaires miques (figure 26.4).
et ainsi diminuer le risque de descellement (hors usure) Les inserts ont des chanfreins et le PE utilisé est tou-
au prix d'une moindre rétentivité ? jours, à une exception près (X3® de l'ADM®), un PE
• ou au contraire privilégier la stabilité, au prix d'une conventionnel de haut poids moléculaire préférentiel-
augmentation du risque de contact, sachant que cette lement stérilisé par irradiation gamma [36] dont l'élas-

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Figure 26.3. Posterior horizontal dislocation distance (PHDD) selon Nevelos.
Distance minimale de translation dans le plan coronal, mesurée entre le centre de la cupule et le centre de la tête fémorale placée
à 9 heures (hanche droite) tangentiellement sur le bord de la cupule.

Cylindrosphérique Cylindrique Anatomique Sub-hémisphérique Modulaire

Figure 26.4. Exemples de types de dessin de metal-back.


La double mobilité pour tous ? 261

ticité est compatible avec la déformation induite par les plus critiques, avec le calcul exact du diamètre opti-
l'impaction de la tête. En cas de forte dureté du PE, mal du listel de rétention en fonction du PE utilisé ;
l'impaction peut en effet aboutir à une déformation • une meilleure diffusion de l'information concernant
plastique et non plus élastique de la zone de rétention la tige à utiliser en regard de la cupule à DM : col
et ainsi conduire à des microfractures des chaînes de affiné et ultra-poli pour diminuer la rugosité (valeur
PE se traduisant sur le plan macroscopique par des fis- rarement indiquée par le fabricant), cône non appa-
sures (cracks) ou des délaminations secondaires [38]. rent (en particulier avec les têtes dites « col long ») ;
Toutes les DM ne sont donc pas les mêmes avec des choix • une amélioration de la clairance de l'insert dans le
parfois très opposés (anatomique – subhémisphérique, metal-back dont la valeur optimale reste à déterminer
excentricité dans l'insert – dans le metal-back, fixation par (en tenant compte de la chaleur et de la présence de
vis – press-fit seul, diamètre de la zone de rétention, dessin liquide articulaire) ;
de l'insert, nature du PE, etc.) même si les nouveaux des- • une amélioration de la rugosité de la partie concave
sins se ressemblent de plus en plus. Des différences dans les de la cupule metal-back (poli brillant de la cupule qui
résultats à long terme sont prévisibles, à l'instar de ceux de ne bénéficie pas non plus de norme à ce jour).
la seconde génération [35] et à l'inverse de la première qui Cette liste n'est pas exhaustive mais reflète les pos-
ne reposait que sur un seul modèle de cupule. sibilités d'amélioration, particulièrement nécessaires
pour les patients les plus jeunes : moins d'usure, moins
Progrès prévisibles de contact, meilleure fixation.

Compte tenu de ce qui a été précédemment évoqué, on La double mobilité pour tous ?
peut s'attendre à de nouvelles évolutions :
• de la fixation secondaire et tertiaire, améliorée par des Bilan
matériaux nouveaux (trabecular titane, tantale, etc.) ;
• des dessins d'implant les plus proches possibles de Au final, cette revue permet de clarifier certaines
l'anatomie permettant d'avoir le meilleur compromis réponses aux questions préalablement posées :
entre PIFR et PHDD – imprimante 3D, etc.) ; • la DM a des résultats similaires à ceux des cupules
• du PE utilisé pour l'insert : les qualités du PEHR et dites standard dans les cohortes de patients non
notamment sa résistance à l'usure ont conduit à une sélectionnés ;
utilisation grandissante pour les cupules standard de • la DM chez les jeunes et/ou actifs a des résultats égale-
première intention, et ont permis d'augmenter le dia- ment comparables aux autres cupules hormis le fait que
mètre des têtes fémorales à 32 ou 36 mm, mais son la première génération d'implants a particulièrement
comportement à long terme dans une cupule à DM souffert d'une complication spécifique, la LIP, dont
n'est pas encore connu. En particulier, il apparaît plus la genèse est principalement due à des conflits répétés
exposé aux fractures et aux fractures de fatigue liées entre l'insert et un col inadéquat de la tige fémorale ;
à la biomécanique particulière de la DM (3e articula- • la DM offre l'avantage, par rapport aux autres
tion) du fait même de sa dureté. Les derniers travaux cupules, d'offrir une plus grande amplitude articulaire
tendent actuellement à recommander dans le cas de la tout en maintenant au plus bas le risque de luxation ;
DM le PEHR recuit (annealed) pouvant contenir de la • le risque de LIP a fortement diminué avec les nou-
vitamine E (ou tout autre procédé équivalent) afin de velles générations de DM et d'implants fémoraux. Il
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réduire le nombre de radicaux libres résiduels, sources persiste probablement chez les sujets les plus actifs
d'oxydation. Ainsi, une élasticité relative serait obte- avec des mouvements répétés d'amplitude extrême ;
nue, permettant d'obtenir un compromis avec la résis- • l'usure demeure une question pertinente, mais
tance à l'usure apportée par sa dureté et peut-être l'amélioration apportée par les générations actuelles
aussi en augmentant l'épaisseur du PE. Les modalités confirme qu'elle devient un problème moins obsédant ;
exactes de chauffage et de refroidissement de ce PE • les évolutions de la DM sont permanentes : le dessin
recuit restent cependant sujettes à controverses. De de la cupule, le PE, la qualité et la normalisation de
même, la stérilisation, pouvant modifier les qualités du tous les matériaux peuvent encore progresser et per-
PE, doit être codifiée pour être optimisée (sous vide, mettre d'améliorer les performances ;
dose idéale ?, emballage opaque, durée de stockage • le développement actuel des PEHR confirme que le
limitée dans le temps ?, etc.) ; couple céramique ne s'est pas imposé comme la solu-
• de l'assemblage des pièces : un préassemblage en tion universelle et qu'il conserve lui aussi ses complica-
usine de la tête dans l'insert permettrait d'optimiser le tions spécifiques, y compris en termes d'usure. La DM
geste d'impaction qui est probablement une des phases est susceptible d'en bénéficier.
262 A. Ferreir

ndications revisitées de la DM La question n'est donc plus de discuter si la DM doit


être utilisée pour tous, mais si l'on peut la proposer à
Peut-on se passer aujourd'hui de la DM ? Non, car le tous ? Dans ce cas, la réponse est oui.
gain en stabilité est tel que chirurgiens et patients la Faut-il dès lors la proposer à tous ? Peut-être, mais
plébiscitent. en mettant en balance les avantages et les inconvé-
Ainsi, à défaut de pouvoir affirmer péremptoirement nients de ce choix. Si le patient actif souhaite pri-
qu'il faut proposer la DM à tous les patients (même vilégier sa liberté de mouvement avec un risque de
si l'impact économique et médical de la réduction du luxation au plus bas, il doit savoir que c'est au prix
taux de luxation documenté par ailleurs [5] est un d'une usure potentielle qu'il retrouvera également
argument en faveur de ce choix), on peut affirmer que avec tous les autres couples de frottement, peut-
la DM est possible pour tous. Sa fixation osseuse est être dans une moindre mesure, mais avec d'autres
bonne ; seule persiste la question de l'usure. risques.
Les patients les plus actifs (pas seulement les plus
jeunes) représentent à cet égard une demande particulière Conclusion
à laquelle aucun implant actuel ne répond véritablement.
C'est pourquoi cette crainte de l'usure est plutôt un frein L'enseignement final est que la DM est un choix à part
potentiel à l'arthroplastie en général qu'une raison de entière, au même titre qu'un couple céramique ou un
limiter l'usage de la DM en particulier chez ces patients. resurfaçage de hanche.
Pour décider d'utiliser ou non la DM, il faut donc avant Ce n'est plus un dérivé des couples standard métal-
tout tenir compte du profil du patient à opérer. L'âge est PE mais une entité propre permettant de répondre
un critère, mais il y en a d'autres au moins aussi perti- idéalement à une demande d'activité élevée, surtout
nents : sport/activité à risque de luxation ou non ; sport à avec risque de luxation.
impact ou non ; amplitudes maximales répétées ou non ? La segmentation proposée par la HAS n'est plus per-
À la première question, la DM est la réponse appro- tinente. Le critère d'âge, utilisé précédemment pour
priée. Concernant la réponse aux problèmes de trau- définir les indications de la DM, est obsolète. On peut
matismes liés aux impacts et aux amplitudes extrêmes, être actif à haut risque de luxation et/ou d'usure à
la DM doit être mise en balance avec d'autres couples, 65 ans et totalement sédentaire à 50.
en se rappelant cependant que ces mêmes critères L'algorithme de choix de la DM, comme pour tout
servent aussi à évaluer le risque d'instabilité et que autre couple de frottement (tant pour leur usage
dans ce cas elle demeure un excellent choix. que pour leur mode de prise en charge réglemen-
Mais restreindre la DM à la prévention de l'instabi- taire), doit donc s'appuyer sur les critères d'activité
lité est particulièrement réducteur et injuste pour un propres à chaque patient, sans a priori et sans crainte
implant qui offre également une plus grande liberté infondée.
de mouvement et une survie comparable aux autres Seules, peut-être, les situations dans lesquelles le
couples de frottement. Le choix doit donc s'effectuer risque d'usure est absolument rédhibitoire doivent
non plus uniquement en fonction de l'âge, mais conduire à délaisser la DM au profit des couples dur-
d'abord en fonction du type d'activité souhaité par le dur. Mais la DM est possible, efficiente et sans danger
futur opéré et les risques potentiels. pour tous les patients.

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265

Les tiges courtes dans les prothèses


totales de hanche
S. BOISGARD, P. PIRIOU

Introduction du spongieux. Elles peuvent avoir une collerette. On


peut en distinguer trois sous-groupes :
À l'heure actuelle, tout le monde a un avis sur l'inté- – type 2A (figure 27.2) : prothèse cervicale à section
rêt ou non des tiges courtes dans les prothèses totales transversale trapézoïdale ;
de hanche (PTH) : certains les utilisent, d'autres sont – type 2B : prothèse cervicale cylindrique ;
contre et d'autres sont indifférents. Mais les faits – type 2C : prothèse à géométrie filetée pour la sta-
sont là, les tiges courtes représentent en Europe bilité en rotation.
10 % des implantations, avec un marché qui pro-
gresse tous les ans.
Un certain nombre de questions se posent : qu'est-
ce qu'une tige courte ? Existe-t-il une classification des
tiges courtes ? Quels sont leurs avantages et incon-
vénients ? Les résultats cliniques démontrent-ils une
supériorité de ces implants sur les tiges classiques et
permettent-ils de dégager des indications ?
Le but de ce texte est de faire un point de l'état de
l'art et d'apporter des réponses à ces questions.

Qu'est-ce qu'une tige courte


et peut-on classer ces tiges ?
Il n'existe pas de définition consensuelle d'une tige
courte. Tige courte est une dénomination qui s'ap-
plique à toute tige qui est « plus courte » que les tiges Figure 27.1. Tige courte – type 1.
« standard » qui, elles-mêmes, n'ont pas toutes la
même longueur. On peut donc définir une tige courte
comme une tige significativement plus courte que la
moyenne des tiges standard du marché, ce qui va des
tiges accourcies au resurfaçage.
De la même manière qu'il n'y a pas de définition, il
n'y a pas de classification des différentes tiges courtes.
La Société française de la hanche et du genou (SFHG),
lors de son symposium, a proposé une classification
selon le mode de stabilisation de l'implant :
• type 1 – stabilisation (ancrage) céphalique : ce sont
les resurfaçages et les tiges apposées Mid Head®
(figure 27.1) ;
• type 2 – stabilisation cervicale isolée : ces tiges ont
seulement une fixation au niveau du col du fémur. Bien
que leur extrémité distale puisse dépasser la ligne inter-
trochantérienne, elles ne comportent aucune fixation
latérale. La stabilité primaire se fait par compaction Figure 27.2. Tige courte – type 2.

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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266 S. Boi gard, P. Piriou

• type 3 – stabilisation par appui sur l'éperon de Leur expansion latérale est prononcée, à la recherche
Merkel : ces tiges peuvent s'étendre dans la métaphyse d'une amélioration de la fixation et d'une distribu-
à laquelle elles transfèrent des contraintes, par le biais tion proximale des contraintes. Elles se fixent en s'ap-
de leur fixation sur l'éperon de Merkel et sur les cor- puyant à la fois sur le Merkel et la corticale latérale
ticales fémorales proximales. Leurs principes sont les métaphysaire. Elles tendent à remplir la métaphyse
suivants : préservation de l'éperon de Merkel sur lequel fémorale proximale au maximum ;
elles s'appuient et ancrage par compaction du spon- • type 5 – stabilisation (ancrage) convention-
gieux métaphysaire. La conservation de plus de 50 % nelle, métaphysodiaphysaire, ou tiges raccourcies
du col améliore la fixation en offrant une résistance (figure 27.5) : ce sont des tiges conventionnelles, sans
aux forces axiales et de varisation. L'extrémité distale appui sur le Merkel, le plus souvent coniques, péné-
de la tige pénètre dans le canal fémoral où elle com- trant largement la diaphyse mais moins que les tiges
pacte l'os spongieux auquel elle transfère des forces et habituelles. Leur revêtement peut être métaphysaire
où elle résiste aux forces varisantes. On peut en propo- ou total. Pratiquement chaque industriel en propose
ser quatre sous-groupes fondés sur leur géométrie : un modèle. Ils ont simplement diminué la longueur
– type 3A (trapézoïdale) (figure 27.3) : il s'agit de de leur tige habituelle. Elles soulèvent la question du
tiges sans collerette, trapézoïdales, et doublement réglage du curseur de la longueur : jusqu'où peut-on
coniques. Elles s'appuient sur l'éperon de Merkel. aller ? Ce sont les plus utilisées.
Leur extrémité distale, arrondie ou angulaire, est en
contact avec la corticale latérale du fémur ;
– type 3B (arrondie) : elles ont une section ovalaire
et peuvent présenter des nervures longitudinales qui
résistent aux forces de torsion ;
– type 3C (filetée) : ce sont des tiges à transfert de
charge métaphysaire, filetées, cylindriques, avec une
collerette. Leur partie proximale s'appuie sur la cor-
ticale de l'éperon. Leur partie distale a un plus petit
diamètre qui pénètre dans le cortex latéral et qui est
autotaraudeuse ;
– type 3D (thurst plate) : elles réalisent une compres-
sion axiale dans l'axe du col, destinée à s'opposer
aux forces varisantes, en attendant la stabilisation
secondaire confiée à une fixation sans ciment.
• type 4 – stabilisation métaphysaire (figure 27.4) :
ce sont des tiges ayant un dessin arrondi latéralement.

Figure 27.4. Tige courte – type 4.

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Figure 27.3. Tige courte – type 3A. Figure 27.5. Tige courte – type 5.
Les tiges courtes dans les prothèses totales de hanche 267

Ces cinq types permettent de classer en grandes plus simples. La qualité osseuse ne contre-indique pas
familles les implants en fonction de leur ancrage, ce qui l'utilisation de tiges courtes et donc il n'existe pas
devrait faciliter l'exploitation des résultats cliniques. de critère d'âge et/ou de sexe [14, 15]. Néanmoins,
certains auteurs les jugent contre-indiquées chez les
Avantages des tiges courtes : obèses [16].
Les scores cliniques sont identiques à ceux des PTH
mythes et réalité classiques [17, 18]. Les douleurs de cuisse sont moins
L'idée première de ces implants était d'économiser le fréquentes qu'avec les implants classiques [2, 19], sauf
stock osseux fémoral pour le long terme. Cet objec- pour un auteur [20].
tif, qui est d'autant mieux atteint que la tige est plus Sur le plan radiologique, ces implants courts migrent
courte, ne doit pas être acquis aux dépens de la stabi- modérément [21, 22], permettent un alignement correct
lité de l'implant. de la tige [16] et une restauration de l'offset [23, 24].
Les études biomécaniques ont montré que la stabilité Cependant, certaines difficultés ne doivent pas être
primaire dépend essentiellement de la géométrie de la occultées, avec des difficultés de réglage de la longueur
tige et que tous les dessins ne sont pas équivalents (un des membres inférieurs [18], des fractures peropéra-
dessin quadrangulaire et remplissant ayant un impact toires plus fréquentes et un risque de sous-dimension-
important). Quand la géométrie métaphysaire est nement [6, 9, 25].
optimale, leur stabilité est identique et, expérimentale- À moyen terme, les résultats de la majorité des études
ment, il y a peu de différence de la qualité de l'ancrage sont satisfaisants [21,26–29], avec des taux de survie
entre les tiges standard et les tiges raccourcies [1]. à moyen terme comparables à ceux des prothèses clas-
Il existe avec les tiges courtes une diminution du siques [10, 19, 30].
stress-shielding, avec un bon transfert des forces [2–4],
qui ne sont pas modifiées par le niveau de la résection Que retenir ?
du col fémoral [5].
Sur le plan chirurgical, les avantages techniques des • Sur le plan biomécanique, il n'y a pas de différence
tiges courtes sont indéniables : de stabilité entre les différents types de tige, à condi-
• facilité d'exposition fémorale dans certaines voies, tion que leur dessin soit quadrangulaire, remplissant,
minimisant l'agression musculaire [6–8] avec une et leur procure un appui sur la corticale médiale et
courbe d'apprentissage cependant plus longue [9] ; latérale de la métaphyse (types 3, 4 et 5).
• reprises plus simples grâce à la conservation d'un • Les études cliniques confirment les éléments biomé-
stock osseux plus important qu'avec les tiges clas- caniques à moyen terme, mais il faut attendre d'avoir
siques [10]. un recul plus important pour valider par la clinique le
Ces avantages techniques n'ont de sens que si les concept mécanique de chaque dessin.
résultats cliniques et radiologiques sont comparables à • La multiplicité des types de tige rend difficiles les
ceux des tiges standard à moyen et long terme. comparaisons.
• Si ces tiges permettent des voies d'abord moins
Les résultats nous permettent- agressives sur le plan musculaire, il ne faut pas pour
autant choisir une tige pour faire telle ou telle voie
ils d'évaluer la pertinence
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d'abord, aucune voie d'abord n'ayant montré sa supé-


du concept et d'affiner les riorité avec ce type d'implant [31] ; il faut choisir une
indications ? voie d'abord adaptée au patient et à sa coxopathie et
choisir une tige, quelle que soit sa longueur, dont le
Hormis certains implants de resurfaçage, il existe peu cahier des charges biomécaniques est satisfaisant pour
de déclaration de matériovigilance concernant les tiges la morphologie fémorale du patient.
courtes, mais il existe un biais lié à l'absence d'exhaus- • Les tiges courtes peuvent être utilisées chez la majo-
tivité des déclarations. Seul le registre australien a rap- rité des patients sans limite concernant l'âge et le sexe,
porté un taux plus élevé de révision précoce. mais avec une attention particulière pour certains
La littérature valide les avantages théoriques des risques spécifiques : les fractures peropératoires et le
tiges courtes : préservation du capital osseux [6], meil- sous-dimensionnement de l'implant.
leure ostéo-intégration [8, 11] et appui métaphysaire • À moyen terme, les résultats cliniques et radiolo-
plus physiologique [2, 9, 12, 13]. giques sont comparables à ceux des tiges classiques,
Sur le plan clinique, tous les auteurs s'accordent sur mais seul le recul à long terme pourra valider défini-
une plus grande facilité technique [6–8] et des reprises tivement ce concept. En effet, même si l'on n'a pas
268 S. Boi gard, P. Piriou

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269

La cupule RM® :
une fixation originale
P. ROSSET, L.-R. LE NAIL

Introduction encourageants, mais Wilson-MacDonald [8] rappor-


tait en 1990 des résultats imparfaits à 5 ans de recul au
Le mode de fixation idéal des cupules des prothèses minimum : dès la 6e année, des liserés apparaissaient
totales de hanche est toujours discuté et il n'a pas été qui aboutissaient en 2 ans à une mobilisation de la
démontré de supériorité du ciment par rapport au sans cupule. Histologiquement, des granulomes avec débris
ciment [1]. Les cupules en polyéthylène (PE) cimentées de PE liés à l'abrasion du PE par l'os (due à des micro-
ont prouvé leur fiabilité [2, 3], mais l'ostéolyse liée aux mouvements) étaient retrouvés.
débris d'usure du PE reste un problème à long terme En 1984, Mathys, conservant le même dessin, a
[4]. Pour y pallier, deux techniques ont été proposées cherché à améliorer l'ostéo-intégration en implantant
par la suite : le PE était fixé dans une cupule métallique un revêtement non rigide, sous forme de grains, à la
(metal-back) permettant une ostéo-intégration ou bien surface du PE. Deux types de revêtements ont été réa-
directement implanté dans l'acétabulum. lisés : avec de l'hydroxyapatite (HA) et avec des grains
La cupule RM Pressfit® est une des évolutions de de titane. Roffman, en 1999 [9], évaluait avec la
cette dernière option, dont un des buts est d'avoir méthode EBRA les migrations d'une série comportant
un implant dont l'élasticité se rapproche de celle de trois types de cupules (non revêtues, avec HA et avec
l'os pour assurer une transmission harmonieuse des titane) qui montraient la supériorité des cupules revê-
contraintes de l'implant à l'os. tues. Cependant, les cupules avec revêtement HA ont
L'originalité de cet implant monobloc tient à son été abandonnées du fait d'une usure anormale du PE
revêtement extérieur très fin (150 μm) de grains de responsable d'ostéolyse avec des grains d'HA enchâs-
titane directement ancrés dans le PE et assurant l'os- sés dans le PE des cupules explantées et des rayures sur
téo-intégration de la cupule tout en permettant d'avoir les têtes métalliques [10].
une épaisseur maximale de PE et théoriquement d'évi- La version avec revêtement par grain de titane est
ter les inconvénients du ciment et de la coque rigide commercialisée depuis, sous le nom de RM Classic®
d'un metal-back.

Historique
Les premières cupules en PE non cimentées conçues
dans les années 1970 proposaient deux types
d'ancrage :
• la cupule d'Endler [5, 6] de forme conique avec un
pas de vis a été rapidement abandonnée du fait d'un
taux élevé de descellement aseptique [7]. Cela était lié
aux granulomes provoqués par les débris d'usure du
PE dont l'absence d'ostéo-intégration entraînait une
mobilisation et une abrasion par l'os ;
• un autre type de cupule utilisant non pas le vissage
mais le press-fit pour assurer la stabilisation primaire ;
Figure 28.1. Les différents modèles de RM.
la première cupule RM® en PE haute densité et non A. RM Classic® sans revêtement. B. RM Classic® avec revête-
revêtue a été conçue en 1975 (figure 28.1). Elle était de ment titane. C. RM Pressfit Cup®. D. RM Pressfit Cup vitamys®.
forme hémisphérique avec deux plots supérieurs pour E. Revêtement titane.
compléter l'ancrage. Les premiers résultats étaient Source : Mathys.

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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270 P. Ross t, L.-R. L N i

(figure 28.1), dont les bons résultats à long terme ont RM® press-fit PE standard et de + 1,4 mm pour les
été rapportés par Ihle en 2008 [11], avec un taux de RM Pressfit Vitamys® pour avoir un press-fit optimal.
survie à 20 ans de 94 % en prenant comme événement Il est possible de sécuriser la fixation primaire par des
le descellement aseptique. vis en titane de 4 mm de diamètre introduites dans l'un
Le dessin de la cupule a été modifié. Pour simpli- des 4 trous répartis sur le rebord du PE.
fier la technique et préserver le stock osseux, les deux
plots ont été supprimés et le press-fit est assuré au Technique de pose
niveau de l'équateur par la forme de la cupule dont la
région polaire est aplatie. Ce modèle RM Pressfit Cup® La cupule RM® peut être implantée par les voies
(figure 28.1) est commercialisé depuis 2002 avec un d'abord habituelles, en suivant les règles habituelles
PE à très haut poids moléculaire. Depuis 2009, il est d'implantation d'une cupule sans ciment. La forme
aussi disponible avec un PE hautement réticulé enrichi de la cupule permet un press-fit équatorial ; il est
en vitamine E (Vitamys®). donc important de réaliser un fraisage parfaitement
sphérique de l'acétabulum. La préparation débute
par l'ablation des ostéophytes et des parties molles
Description de l'implant RM pouvant être un obstacle à la descente de l'implant.
Pressfit Cup® Le revêtement peut facilement accrocher les parties
molles, surtout à la partie inférieure de l'acétabulum,
La cupule RM Pressfit Cup® (Mathys, Bettlach, Suisse) et celles-ci peuvent alors s'interposer entre l'implant
est la cupule sans ciment comportant du polyéthylène et l'os, empêchant une impaction et un press-fit satis-
standard (UHMW-PE GUR 1020, ISO 5834-1 + 2), ou faisants et pouvant induire une verticalisation de l'im-
hautement réticulé enrichi en vitamine E (Vitamys®) avec plant. Le positionnement de l'implant par rapport à
un revêtement de particules de titane pur (TiCP, ISO l'arrière-fond de l'acétabulum est déterminé lors de
5832-2). Ces particules d'un diamètre moyen de 150 μm la planification préopératoire à l'aide des calques. Le
sont pressées à chaud sur le PE pour obtenir un revête- fraisage doit atteindre l'os dense sous-chondral sai-
ment dont l'épaisseur moyenne est de 150 μm. La cupule gnant, sans chercher à aller en os spongieux, en parti-
est elliptique avec un diamètre plus grand à l'équateur et culier en périphérie, pour assurer un press-fit efficace.
un pôle légèrement aplati. Les diamètres extérieurs vont On vérifie que la cupule d'essai ajourée de la taille
de 44 à 70 mm pour le RM Pressfit Vitamys® PE et de de la dernière fraise est bien au contact des parois de la
46 à 64 mm pour le RM Pressfit Cup®, avec une pro- cavité sphérique fraisée. On contrôle son orientation,
gression de 2 mm, pour des têtes de diamètres 28, 32 ou en particulier sa couverture externe et ses rapports
36 mm (pas de diamètre 36 dans le modèle RM Pressfit avec le bord antérieur de l'acétabulum, pour s'assu-
Cup®) permettant toujours de conserver une épaisseur rer de l'absence de conflit potentiel avec le psoas. Le
minimale de PE de 8 mm. La cavité s'articulant avec la tête diamètre de la cupule d'essai fait 1 mm de moins que
est une demi-sphère, sans portion cylindrique à son ouver- celui de la fraise ; il est donc normal qu'elle ne soit pas
ture. Les cupules en PE standard sont stérilisées par irradia- complètement autostable (figure 28.2).
tion aux rayons gamma sous atmosphère inerte, les cupules L'impaction de la cupule doit se faire dès le départ
Vitamys® par plasma de gaz. avec l'orientation finale souhaitée car, dès que la zone
L'originalité de cet implant est liée à son revêtement : équatoriale entre en contact avec l'os, le press-fit

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les particules de titane sont pressées à chaud dans le PE débute très rapidement et rend difficile une modifi-
mais, n'étant pas soudées entre elles, elles ne constituent cation de l'orientation. Du fait de l'élasticité du PE,
pas une coque rigide comme un metal-back classique. la sensation à l'impaction est différente de celle d'un
Cela permet de conserver à l'ensemble l'élasticité du metal-back beaucoup plus rigide et peut surprendre. Si
PE dont le module d'élasticité est très proche de celui l'os est très scléreux, et que la cupule d'essai se bloque,
de l'os acétabulaire. L'excellente biocompatibilité du
titane au contact de l'os permet une ostéo-intégration.
La fixation primaire est assurée par un press-fit
équatorial renforcé par une « accroche » liée au relief
des particules. Le dôme légèrement aplati évite qu'un
contact trop précoce du pôle de la cupule avec le fond
du cotyle s'oppose au press-fit équatorial. La tech-
nique de pose prévoit de fraiser taille pour taille, en Figure 28.2. Comparaison des tailles entre fraise, cupule d'essai
sachant que le diamètre réel de la cupule par rapport et implant Pressfit Cup®.
au chiffre pair entier indiqué est de + 1,6 mm pour les Source : Mathys.
La cupule RM® : une fixation originale 271

il est possible de fraiser avec un diamètre de + 1 mm (moins de 50 ans) avec un recul minimal de 10 ans. Le
(fraises impaires). taux de survie à 14 ans était de 98 % pour le descelle-
Il est prévu quatre orifices pour des vis si une fixa- ment aseptique et une ostéolyse évolutive était retrou-
tion complémentaire semble nécessaire. Cependant, vée dans 3 %. Il n'y avait que 2 cas de descellement
compte tenu de la forme elliptique de la cupule, il est aseptique, mais sur les 22 reprises, 14 étaient liées à
probablement préférable en cas de doute sur la fixa- une usure dont 12 avec une tête métallique ; la reprise
tion d'envisager une cupule de taille supérieure si cela avait toujours lieu après la 10e année. Ces résultats
est possible ou d'un autre type. Sur une cupule ayant confirment ceux d'Ihle.
une stabilité peropératoire satisfaisante, les vis n'amé- En conclusion, les résultats du RM Classic® sont
lioraient pas la stabilité de la cupule à 2 ans dans une comparables à long terme aux autres types de cupule,
étude randomisée avec contrôle par RSA (radiostereo- mais chez le sujet jeune, il faut certainement privilégier
metric analysis) [12]. les têtes en céramique.
Sauf circonstance particulière, l'appui immédiat est
autorisé. Résultats de la cupule RM Pressfit®
avec PE standard UHMW
Résultats des trois types Le RM Pressfit® ayant été mis sur le marché en 2002,
de cupules RM® les études ont un recul moins important que celles du
RM Classic®. Le revêtement est le même que celui du
Résultats de la cupule RM Classic RM Classic® mais sa surface ne comporte pas de rai-
Cup® nures et surtout les deux plots contribuant à la fixation
ont été remplacés par un press-fit équatorial. La ques-
Cette cupule est disponible depuis 1984 ; ses résultats tion de la stabilité de la fixation primaire de l'implant
ont été rapportés dans plusieurs séries et ils sont bons pouvait se poser suite à cette modification de forme.
à moyen et long termes. Wyss et al. en 2013 [16] ont analysé 50 cupules
Diks et al. [13], en 2005, dans une série de 630 cas RM Pressfit® avec 5 ans de recul minimal : aucun
avec un recul moyen de 8,2 ans, retrouvaient 34 patient n'avait été réopéré et les résultats cliniques
reprises (5 %), dont 15 pour luxations récidivantes, étaient satisfaisants. L'analyse radiographique faite
dues à un défaut d'orientation, 5 pour descellement avec la méthode EBRA retrouvait une mobilisation
aseptique, 1 seul pour usure, 9 pour usure due à un de 0,82 mm à 2 ans et 1,25 mm à 5 ans et son rythme
conflit avec une tige fémorale descellée et 4 pour des ralentissait avec le temps. L'usure annuelle était de
causes diverses. Le taux de survie avec comme évé- 0,09 mm.
nement le descellement aseptique était de 99 % à L'intérêt d'une fixation complémentaire de la
10,7 ans. Les auteurs insistaient sur l'importance du cupule RM Pressfit® avec une ou plusieurs vis a été
bon positionnement de la cupule. analysé par RSA en 2012 par Pakvis et al. [12] sur
Ihle et al. en 2008 [11] rapportaient une série de 93 une série randomisée avec 2 vis (19 cas) ou sans vis
cas avec un recul minimal de 17,4 ans sans perdu de (18 cas). L'absence de vis augmentait significativement
vue, avec une survie de 96,2 % à 15 ans et 94,4 % à la migration, mais celle-ci était toujours inférieure à
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19,8 ans en prenant pour événement le descellement 1 mm, le déplacement angulaire était inférieur à 3° et à
aseptique. Les 14 reprises étaient motivées par 5 des- 2 ans de recul il n'y avait aucun problème. Les auteurs
cellements aseptiques et 7 ostéolyses survenus entre expliquaient ces résultats par un recalage de la cupule
13,7 et 15,7 ans et 2 infections. Les deux facteurs de dans les deux premiers mois, sans conséquence péjo-
risque identifiés pour le risque de reprise étaient les rative pour l'avenir et estimaient que les vis n'avaient
sujets jeunes (risque × 4 comparé aux sujets âgés) et pas d'intérêt. Cela a été confirmé pour cette série en
les têtes métalliques (risque × 8 par rapport aux têtes 2016 par Minten et al. [17], à 6,5 ans de recul avec
céramiques). Les reprises n'avaient pas posé de pro- une usure de 0,08 à 0,09 mm par an et une rotation
blèmes techniques. de 1,0° à 1,33°.
En 2010, Ihle et al. [14] rapportaient des bons résul- Lafon et al., en 2014 [18], dans une série continue
tats dans les dysplasies même si la couverture n'était de 91 cupules RM Pressfit® sans perdu de vue, avec un
pas complète. recul minimal de 4 ans rapportaient 3 révisions pour
Pakvis et al. en 2011 [15] s'étaient intéressés à ce luxations liées à un défaut de positionnement. Trois
problème d'ostéolyse et de descellement aseptique implants s'étaient recalés dans les six premières semaines
dans une série de 158 RM Classic chez des sujets jeunes et étaient restés stables. Il n'y avait pas d'ostéolyse.
272 P. Ross t, L.-R. L N i

L'élasticité du RM étant censée éviter le stress shielding tout en conservant des propriétés mécaniques très
observé avec les cupules metal-back rigides, les auteurs proches de celles du PE standard UHMW (ultra high
ont analysé l'aspect de la trame osseuse acétabulaire qui molecular weight polyethylene ou polyéthylène de
était plus dense ou inchangée par rapport à l'état préo- masse molaire très élevée), en particulier son élasti-
pératoire dans 87 % des cas, ce qui traduisait l'absence cité. L'enrichissement de la poudre d'UHMWPE en
de stress shielding. L'usure était de 0,07 mm/an. vitamine E, agent antioxydant, permet d'éviter cer-
Hooper et al., en 2015 [19], à partir d'un groupe taines étapes du traitement thermique habituel des
de 550 patients (615 cupules RM Pressfit®) dont HLXPE qui entraînent une rigidification du PE [24],
30 % avaient été perdus de vue, constataient, entre ce qui n'est pas le but d'une cupule RM® dont le prin-
les radiographies postopératoires et à 5 ans de recul cipe est de transmettre les contraintes à l'os grâce à
de 434 cupules RM Pressfit® que 22 % avaient modi- l'absence de metal-back rigide. Par rapport à la cupule
fié leur orientation de plus de 3°, mais qu'il n'y avait RM Pressfit Cup® PE UHMW, la cupule RM Pressfit
aucun descellement à 5 ans. La migration n'était pas Vitamys® a une élasticité plus importante et un press-
mentionnée. Six cupules (1,3 %) avaient été changées fit inférieur.
pour luxation récidivante. Aucune ostéolyse n'était Halma et al., en 2015 [25], rapportaient une pre-
retrouvée. L'âge moyen des patients était de 76 ans et mière série de 117 cupules Vitamys® avec un recul
l'ostéoporose n'avait pas posé de problème. minimal de 2 ans. Il n'y avait aucune complica-
Erivan et al. [20], dans une série de 189 cupules RM tion liée à la vitamine E et les résultats fonctionnels
Pressfit® (âge moyen des malades 75,4 ans) revues à un étaient satisfaisants. Il n'y avait pas eu de migration
recul minimal de 5 ans avec 2,1 % de perdus de vue, d'implant. La pénétration de la tête était très faible
n'avaient relevé aucune reprise pour descellement et (0,055 mm par an) et peut-être liée au remodelage du
seulement 3,2 % des cupules avaient dû être changées PE pendant la première année. Dans 7 cas (6 %), un
pour une autre raison. Au recul de 5 ans, l'usure était espace de 1 à 3 mm entre le pôle de la cupule et l'os
de 0,065 mm par an avec une tête en céramique. Il n'y était visible en postopératoire ; 4 se sont comblés en
avait pas d'ostéolyse acétabulaire. 3 mois ; 3 sont restés visibles sans qu'il n'y ait de pro-
Les mobilisations constatées dans ces séries restent blème de fixation. Lafon et al. [18] retrouvaient un
inférieures à 1 mm à 2 ans, limite au-dessus de tel espace de 2 mm en moyenne dans 27 % des cas en
laquelle le risque de reprise augmente [21]. Les usures postopératoire ; il avait disparu ou était inframillimé-
ne dépassent pas le taux annuel de 0,09 mm par an, trique au recul maximal, sauf dans un cas, sans qu'il
taux au-delà duquel une ostéolyse est plus souvent n'y ait d'anomalie de fixation du cotyle. Ces images
observée [22]. sont probablement liées au pôle aplati de la cupule et
Dans le dernier rapport du registre des arthro- à un os peu élastique rendant le press-fit équatorial
plasties de Nouvelle-Zélande portant sur la période très efficace. Le comblement de cet espace en quelques
1999–2015 [23], la cupule RM Pressfit Cup® avec mois peut aussi être considéré comme le témoin d'une
PE standard avait un taux de révision pour 100 com- transmission physiologique des contraintes entre la
posant-années de 0,56, taux meilleur que celui de la cupule et l'os du fait de leurs modules d'élasticité très
moyenne des couples céramique-céramique (0,64), proches.
métal-PE (0,82) ou céramique-PE (0,66). Scemama et al., en 2016 [26], dans une étude sur
Ces résultats à moyen terme de la cupule RM Pressfit® 100 cupules randomisées en deux groupes, UHMWPE

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permettent d'être raisonnablement optimistes, mais et Vitamys®, dont 74 ont pu être analysées avec un
il faudra particulièrement suivre les cupules s'étant recul minimal de 3 ans, ont montré que la pénétra-
mobilisées précocement avant de se fixer, et rechercher tion d'une tête de 28 mm de diamètre en chrome-
une ostéolyse à partir de la 10e année. cobalt était significativement moins importante dans
le groupe Vitamys®.
Wyatt et al., en 2017 [27], ont rapporté les résul-
Résultats de la cupule RM Pressfit tats de 100 cupules Vitamys® avec un recul minimal
Vitamys® de 5 ans chez 92 patients âgés de 40 à 74 ans, sans
aucun descellement ni liseré évolutif ou ostéolyse.
Les résultats précédents montrent que l'usure et l'os- Les mesures radiographiques avec la méthode EBRA
téolyse sont les principales causes des rares échecs montraient une migration de la cupule de 1,3 mm en
à moyen et long termes des cupules RM Classic® et moyenne à 2 ans, qui progressait de 0,2 mm entre 2
Pressfit®. Le PE Vitamys® a été introduit en 2009. Son et 5 ans. La migration maximale était observée dans
but est de bénéficier de l'amélioration de la résistance à les 12 premières semaines. Ces chiffres sont supérieurs
l'usure d'un polyéthylène hautement réticulé (HXLPE) à ceux de Wyss et al. [28] avec le RM Pressfit Cup®.
La cupule RM® : une fixation originale 273

Wyatt et al. expliquent cette migration plus impor- transmission harmonieuse des contraintes entre PE et os
tante par une moins bonne impaction initiale, liée à la permet de conserver une trame osseuse d'excellente qua-
moins bonne exposition que procure la voie d'abord lité (figures 28.3 et 28.4) évitant le phénomène de stress
antérieure utilisée dans cette série, alors que dans la shielding au niveau de l'acétabulum, décrit pour les metal-
série de Wyss la voie d'abord postérieure procurait back par Wright et al. [29] ; celui-ci, du fait de la trame
une meilleure exposition. Ils n'évoquent pas l'élasticité osseuse moins dense en arrière du cotyle (figure 28.5),
plus importante du Vitamys®, ni son press-fit inférieur peut favoriser la progression de granulomes, ce qui peut
à celui de la cupule RM Pressfit Cup® PE UHMW. poser un problème lors des reprises. Il est à cet égard
intéressant de noter que le stress shielding au niveau de
Analyse critique de l'implant l'arrière-fond est un des cinq critères d'ostéo-intégration
des cupules metal-back décrits par Moore en 2006 [30].
Avantages Le risque d'usure est diminué par rapport à une
cupule metal-back avec insert en PE [31] du fait de
Le RM Pressfit Cup®, du fait de l'absence de metal- l'épaisseur du PE plus importante à diamètre égal et
back, permet d'avoir une épaisseur maximale de PE, aussi de l'absence de back-side wear. L'introduction
au moins équivalente à celle d'un cotyle cimenté. du HXLPE enrichi en vitamine E (Vitamys®) devrait
Comme tout cotyle impacté, il permet de réduire la encore réduire l'usure tout en conservant les qualités
durée d'intervention en évitant le scellement. mécaniques du PE, en particulier son élasticité, voire en
Le revêtement composé de grains très fins fixés dans l'améliorant car d'après le fabricant, le module d'élas-
le PE mais n'ayant pas de liaison solide entre eux ne crée ticité du Vitamys® serait de 0,8 GPa, soit 0,2 GPa de
pas une interface rigide entre PE et os. L'élasticité du PE, moins que celui de l'UHMWPE. L'intérêt de ce gain
dont le module de Young est d'environ 1 Gpa, est beau- vis-à-vis de l'usure et des qualités mécaniques du PE
coup plus proche de celle de l'acétabulum (0,5 à 0,7 GPa) est la possibilité d'utiliser des têtes de diamètre allant
que de celle d'un metal-back (environ 110 GPa). La jusqu'à 36 mm pour diminuer le risque d'instabilité.

Figure 28.3. A. Radiographie préopératoire. B. Radiographie à 9 ans d'un RM PressfitCup® : trame homogène de l'acétabulum.
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Figure 28.4. Évolution à 4 ans de RM Pressfit® avec scanner montrant une trame osseuse de l'acétabulum d'aspect normal.
274 P. Ross t, L.-R. L N i

l'articulation et pouvant migrer dans la trame osseuse


de l'arrière-fond. Cela a été rapporté pour la cupule
RM Classic® à plus de 12 ans de recul [11], mais pas
pour la cupule RM Pressfit Cup®. Les orifices de vis de
la cupule RM Pressfit Vitamys® sont obturés par une
fine pellicule de PE recouverte de grains de titane pour
éviter ce risque.
La cupule RM Pressfit® étant impactée avec un press-
fit équatorial de 1,6 mm, on pourrait penser, comme
l'évoque Minten [17], que le PE se déforme lors de la
pose, ce qui pourrait favoriser une usure plus impor-
tante qu'en cas d'insert PE dans une cupule metal-back
rigide. Cependant, les taux d'usure ne sont pas plus
élevés pour la cupule RM®.
Le revêtement avec les grains de titane fait l'ori-
ginalité de cette cupule, mais on ne dispose pas de
données publiées sur des explants post-mortem de
cupules avec des radiographies satisfaisantes pour
Figure 28.5. Stress shielding au niveau de l'acétabulum en
arrière d'une cupule céramique metal-back à 10 ans.
apprécier la part de la fixation liée à une fibrose et
celle liée à une véritable ostéo-intégration. Lors de
l'impaction ou à l'occasion de manœuvres de réduc-
Le caractère monobloc de la cupule supprime les dif- tion, si le rebord de la cupule déborde, la libération
ficultés liées à l'insertion ou au démontage de l'insert. de grains de titane est possible et ils peuvent migrer
Bien que l'industriel ne communique pas sur le coût dans l'interligne. Pour l'instant, cela n'est pas docu-
du procédé de fabrication, celui-ci est certainement menté ou publié, mais c'est une question importante.
inférieur à celui d'une cupule metal-back. C'est peut-être une des raisons, en plus des protec-
Le changement d'une cupule metal-back parfai- tions liées au brevet, qui fait que ce revêtement n'a
tement ostéo-intégrée peut être difficile, et le stock pas été copié. D'après le fabricant, cela ne poserait
osseux est souvent altéré derrière la cupule. L'ablation pas de problème. Quoi qu'il en soit, l'analyse des
d'une cupule RM® est plus simple. Si la mobilisation séries publiées est plutôt rassurante dans la mesure
à l'aide d'un chasse-greffon s'avère impossible, il est où le procédé de fixation des grains de titane est le
possible avec des fraises de diamètre croissant d'arri- même depuis la mise sur le marché de la cupule RM
ver à la périphérie du PE sans aller jusqu'au contact Pressfit Classic® en 1984.
des grains de titane et de détacher cette couche de PE Ihle et al. [11] évoquent un risque de révision pour
souple en passant entre les grains et l'os. L'absence de ostéolyse ou descellement dû à l'utilisation d'une tête
macrostructure ayant un effet rétentif rend ce décolle- métallique et pas en céramique. La présence de grains
ment facile et cela permet de laisser les grains fixés au de titane dans l'interligne est certainement moins bien
PE. Cela permet de ne pas altérer le cotyle osseux et supportée par un couple métal-PE que par un couple
d'impacter un nouveau cotyle de taille immédiatement céramique-PE.

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supérieure après un fraisage modéré. L'importance du bon positionnement de la
cupule pour éviter l'instabilité est soulignée par plu-
nconvénients sieurs auteurs. On peut invoquer plusieurs facteurs
favorisants :
Les débris d'usure du PE peuvent entraîner des gra- • le press-fit équatorial survenant très tôt lors de la
nulomes. Les taux d'usure rapportés dans les séries pose rend difficile une modification de la position de
de cupules RM Pressfit® avec UHMW PE sont la cupule une fois celui-ci engagé ;
acceptables. Le fait d'avoir une bonne ostéo-inté- • du fait du caractère monobloc de la cupule, on ne
gration en périphérie, dans la zone de press-fit, et peut pas comme dans une cupule metal-back pallier un
une trame osseuse de bonne qualité peut limiter leur défaut de stabilité par un insert PE à rebord ;
progression. • l'absence de partie cylindrique à l'entrée de la cavité
La présence d'orifices pour les vis dans la cupule intérieure de la cupule, pour améliorer la stabilité
RM Pressfit Cup® pourrait être une source de granu- comme sur les cupules pour tête de 22 mm, peut aussi
lome à partir de particules d'usures présentes dans contribuer à cette instabilité.
La cupule RM® : une fixation originale 275

Conclusion RM Pressfit® est une alternative intéressante quand on


souhaite poser une cupule sans ciment.
Les résultats à long terme de la cupule RM Classic® Comme pour toute cupule comportant du PE, la sur-
sont satisfaisants en termes de survie de l'implant, venue d'une ostéolyse est possible à long terme. Pour
mais au-delà du cap de la 12e année, une ostéolyse l'instant, aucune série de cupules RM Pressfit Cup® n'a
peut, rarement, apparaître ; ce cap n'a pas encore été été publiée avec un recul minimal de 10 ans ; or, au-
franchi pour la cupule RM Pressfit Cup® ; il faut donc delà de ce délai, une ostéolyse pouvait apparaître avec
encore attendre. les cupules RM Classic®. L'utilisation d'une tête céra-
Halma et al., en 2013 [32], dans une revue de la mique est sûrement souhaitable, en particulier chez
littérature, ne constataient pas de différence entre les le sujet jeune. Comme pour toute cupule sans ciment
cupules sans ciment, qu'elles soient avec PE monobloc impactée, la qualité de l'os acétabulaire doit être cor-
ou modulaire, pour l'usure, la présence d'ostéolyse ou recte ; sinon, une cupule cimentée est indiquée.
la migration ; la conclusion était que le choix d'une Enfin, le coût de cette cupule est inférieur à celui
cupule sans ciment devait être fondé sur d'autres fac- d'une cupule metal-back avec insert, mais supérieur à
teurs que son caractère modulaire ou non. Compte celui d'une cupule en PE cimentée dont les résultats à
tenu des éléments évoqués précédemment, la cupule long terme restent satisfaisants [1, 25].

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277

Le resurfaçage de hanche :
une mode passée ou raisonnée ?
J. GIRARD

Introduction resurfacing) en plusieurs configurations : un implant


fémoral sans ciment lisse ou cimenté couplé à une
Le resurfaçage total de hanche (RTH) est un concept cupule cimentée ou sans ciment avec hydroxyapatite.
d'arthroplastie très ancien. En 1923, à Boston, naquit Les résultats furent excellents sur la configuration
la première génération de RTH lorsque Smith-Petersen implant fémoral cimenté et cupule poreuse, condui-
implanta une cupule (initialement en Viscaloïd, puis en sant à l'essor de cette génération de RTH. Dans le
Pyrex et enfin en bakélite) sur la tête fémorale. En 1936, même temps, Amstutz développa sur le même principe
l'alliage de la cupule évolua vers le Vitallium® (alliage l'implant Conserve Plus® mais sans ajout d'hydroxya-
de chrome-cobalt-molybdène). Ce fut Charnley qui patite sur la cupule acétabulaire (figure 29.1) [2].
implanta le premier RTH sans ciment avec un couple Il est primordial de connaître la tribologie du couple
poly-tétra-fluoro-éthylène/poly-tétra-fluoro-éthylène MoM en configuration RTH. En effet, si toutes les
dont le taux d'ostéolyse très élevé précipita son aban- conditions optimales sont réunies, il existe alors une
don. Il eut alors l'idée de remplacer le matériau de lubrification continue à l'interface du couple indui-
la tête prothétique par du métal et développa ainsi sant une usure nulle et un parfait fonctionnement
le concept de low friction arthroplasty. Müller fut le des implants. Mais cette lubrification continue est
pionnier des RTH à couple métal/métal (metal-on- dépendante de nombreux facteurs tribologiques (tels
metal [MoM]) dans les années 1960 alors que paral- que rugosité, sphéricité, clearance articulaire), de fac-
lèlement se développèrent de façon prédominante des teurs chirurgicaux (position frontale et sagittale des
RTH à couple métal/polyéthylène (PE) dans le reste du implants) et enfin de facteurs prothétiques (taille des
monde. Seul Wagner essaya le couple céramique/PE. implants, angle d'ouverture de la cupule, etc.) [1, 2].
Malheureusement, tous ces couples de friction de Depuis les années 2000, le concept du RTH a connu
RTH de première génération essuyèrent des échecs une évolution fluctuante car de nombreux fabricants
à moyen terme. Ceux-ci étaient liés d'une part à un et chirurgiens n'ont pas retenu les leçons du passé [1].
taux d'usure très important du PE et d'autre part à une Il est toujours étonnant de voir que le RTH suscite des
nécrose osseuse thermique induite par la polymérisa- réactions très virulentes de nombreux leaders d'opi-
tion du ciment. Les taux de survie de cette première nion qui l'ont condamné sans l'avoir jamais essayé. À
génération à 10 ans ne dépassaient pas les 50 %. En l'inverse, de nombreux patients jeunes et sportifs ont
France, les frères Judet conçurent en 1946 un resur- porté et défendu ce concept. Cela constitue une dicho-
façage fémoral en Plexiglas® avec de bons résultats à tomie schizophrénique assez unique en orthopédie où
court terme sur les 600 premiers cas. Ils évoquaient il apparaît que ce sont les patients qui sont les prin-
déjà à cette époque l'intérêt de conserver le col fémoral cipaux défendeurs d'un concept. Pourtant, il s'avère
en cas de révision [1]. de façon assez indiscutable que le RTH constitue la
Dans les années 1970–1980, le couple MoM démon- seule alternative séduisante aux PTH dans une popu-
tra des résultats intéressants en configuration prothèses lation de patients spécifiques (jeunes et/ou actifs). En
totales de hanche (PTH) conventionnelles. Certains effet, ses avantages sont nombreux par rapport à la
implants (Ring, McKee, Stanmore) à couple MoM de PTH (figure 29.1) : absence de luxation, préservation
grand diamètre montrèrent même des taux d'ostéolyse du stock osseux, restauration de la proprioception,
et d'usure nuls. Wagner développa dans les années absence de douleur de cuisse, absence d'inégalité de
1970 les premiers RTH à double cupule métal-PE qui longueur, retour à toutes les activités sportives [3], etc.
furent très utilisés puis abandonnés. Ce concept permit Ses inconvénients sont secondaires à la difficulté tech-
la résurgence du RTH en configuration de deuxième nique d'implantation et au couple MoM.
génération avec un couple MoM. En 1991, McMinn En 2017, le nombre de RTH varie fortement d'un
développa un tel implant (BHR®, Birmingham hip pays à l'autre. En France, le Registre national des RTH
La prothèse totale de hanche dans tous ses états
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278 J. Girard

Figure 29.1. Radiographie de face d'un RTH (Conserve Plus®)


à 9 ans de recul et d'une PTH (cimentée sur les 2 versants) Figure 29.2. RTH droit effectué il y a 5 ans chez une danseuse
à 10 ans illustrant les nombreuses différences entre les deux professionnelle de 40 ans.
concepts (diamètre de tête, préservation osseuse, dessin des La radiographie a été effectuée avec la jambe droite en grand écart
cupules, etc.). facial. l n'y a pas d'instabilité ni de décoaptation de l'implant.

dénombrait un peu plus de 600 implants (avec un taux réduit le saignement osseux (réduction des pertes
de survie de 99,4 % à 2 ans) alors que le Registre aus- sanguines globales) et ne fait pas courir de risque
tralien en incluait 8895 chez les moins de 55 ans. d'emboles graisseux (source de complications poten-
tiellement graves) ;
Quels sont les avantages du RTH ? • la préservation de la biomécanique coxofémorale
est automatique étant donné l'impossibilité de modu-
À côté des avantages classiques des arthroplasties de ler les paramètres tels qu'offset fémoral, longueur du
hanche communs aux PTH et RTH (indolence fonc- membre, etc. [5, 6]. En effet, à l'inverse des PTH, il n'y
tionnelle, restauration des amplitudes articulaires), le a pas de modularité des implants, ni de possibilité de
RTH possède de nombreux avantages spécifiques : choisir la longueur de col. L'épaisseur de l'os réséqué,
• un taux de luxation nul. L'absence totale d'instabi- tant sur le versant fémoral qu'acétabulaire, est stricte
lité est directement liée au strict respect du diamètre ment remplacée par l'épaisseur des implants [6]. Ce
de la tête fémorale et à la préservation biomécanique respect de la biomécanique apparaît comme un avan-
et proprioceptive coxofémorale [2]. Cet avantage per- tage majeur, garantissant un fonctionnement optimal
met ainsi, à l'inverse des PTH, de ne donner aucune du bras de levier des fessiers et l'absence d'inégalité
consigne postopératoire pour les mouvements. Toutes de longueur. Il est aussi un parfait rempart contre les

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les amplitudes de mobilité peuvent être autorisées fréquentes procédures médicolégales d'inégalité de
sans restriction (figure 29.2), ce qui contribue à un longueur après PTH [5]. En revanche, son corollaire
excellent résultat subjectif par absence d'appréhen- est qu'il est impossible de corriger des anomalies bio-
sion psychologique d'une instabilité. Cet avantage est mécaniques préexistantes. Ainsi, une inégalité de lon-
un atout majeur du RTH, surtout lorsque l'on sait gueur de membre de plus de 1cm, un défaut d'offset
que l'instabilité représente, en France, 10 % des révi- fémoral, un ratio tête-col médiocre sont autant de
sions [4] ; contre-indications à un RTH qui ne pourra pas pré-
• la préservation du stock osseux fémoral est la défini- tendre restaurer des paramètres biomécaniques phy-
tion même du RTH (voir figure 29.1). Celle-ci permet siologiques, ce que seule une PTH permet de faire
de faciliter grandement une révision fémorale ulté- [5, 6]. Cela explique que la coxarthrose primitive
rieure. Ainsi, un fémur vierge permet non seulement représente la meilleure indication des RTH ;
l'implantation de n'importe quelle tige, mais de plus • le maintien de la proprioception est l'apanage du
évite les déboires de l'extraction potentiellement dif- RTH. Il découle du fait que les mécanorécepteurs et
ficile d'une tige (fémorotomie, fragilisation osseuse). propriocepteurs sont localisés sur le col fémoral et
L'absence de trépanation du fût fémoral peropératoire la jonction tête-col [7]. Le respect de cette structure
Le resurfaçage de hanche : une mode passée ou raisonnée ? 279

anatomique par le RTH induit une proprioception


physiologique, élément majeur dans l'optique de
la restauration de la gestuelle sportive. Ce point est
d'ailleurs parfaitement illustré pas de nombreuses
études stabilométriques et posturales qui retrouvent
des résultats similaires chez les patients sains et ceux
avec RTH alors que les patients avec PTH ont systé-
matiquement des résultats médiocres [7, 8]. Chez la
population cible des RTH, cet élément est véritable-
ment l'une des explications de la reprise sportive à
haut niveau ;
• l'absence de douleur de cuisse est corrélée à l'ab-
sence de tige fémorale. Bien que le taux de douleur de
cuisse soit rare après PTH, à l'exception de certains
dessins de tige (à section arrondie), il est nul avec un
RTH. Mais surtout, c'est le respect de l'élasticité fémo-
rale qui est important. En effet, l'absence d'implant
métallique dans la diaphyse évite sa rigidification [8].
La déformation élastique osseuse physiologique est Figure 29.3. RTH droit implanté au-dessus d'un clou fémoral
respectée avec un RTH, expliquant ainsi la possibilité posé il y a 28 ans avec deux échecs d'extraction.
Le TH permet ainsi de s'affranchir des difficultés diaphysaires.
de reprise de sport à impact tel que la course à pied
sans douleur de cuisse ou de sollicitation extrême des
implants.
Les divers éléments précités expliquent la possibilité
de reprise sportive à haut impact avec un RTH. Cet
avantage est capital car de très nombreuses indications
de RTH sont posées chez de jeunes patients arthro-
siques dont le retour à la pratique sportive constitue
un élément majeur de satisfaction [9]. Plusieurs études
randomisées ont ainsi vérifié la supériorité du RTH
sur les PTH en termes de retour aux activités spor-
tives, notamment à haut impact [8, 9]. D'autres études
ont démontré la possibilité de reprise de sports à haut
impact tels que course à pied, triathlon, football, sport
de combat, etc. [9].
Enfin, certaines étiologies sont véritablement d'ex-
cellentes indications à un RTH : antécédent d'infection
fémorale, cal vicieux fémoral imposant une fémoroto-
mie ou un implant sur mesure, ostéopétrose, matériel
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fémoral inextractible (figures 29.3 et 29.4). Figure 29.4. RTH gauche effectué au-dessus d'un clou de
Kuntscher posé 44 ans auparavant avec impossibilité d'extraction.

Le RTH a-t-il des inconvénients ? nconvénients d'ordre mécanique


Les complications observées après PTH et RTH sont
différentes mais leur taux de reprise est similaire. Dans
Fracture du col fémoral
le RTH, la préservation du col fémoral, le couple Le respect du col fémoral induit de fait la possibilité
MoM, la vascularisation osseuse épiphysaire sont à d'observer une fracture périprothétique spécifique : une
l'origine des complications. fracture du col fémoral. En effet, alors que les fractures
Les causes de révision des PTH sont la luxation, l'in- périprothétiques des PTH impliquent très majoritaire-
fection, les fractures périprothétiques et l'usure. Celles ment la région métaphyso-diaphysaire fémorale, celles
des reprises des RTH sont la fracture du col, le des- des RTH sont strictement localisées au niveau du col. En
cellement fémoral et les réactions adverses au couple outre, alors que les fractures périprothétiques des PTH
MoM. sont très souvent la résultante de traumatismes à haute
280 J. Girard

énergie et/ou d'une ostéoporose, les fractures du col des • Le collapsus de la tête entraîne un tableau cli-
RTH sont observées durant la période postopératoire nique assez bruyant et rapide. Les douleurs ingui-
précoce [10]. Elles sont en effet secondaires à des erreurs nales sont importantes et les radiographies sont très
techniques, avec au premier chef l'encochage peropé- évocatrices. Il est secondaire à une nécrose osseuse
ratoire du col [10]. Si ce dernier est supérieur à 2 mm induite par le ciment (figure 29.7). Ses causes sont
d'épaisseur, il crée les conditions favorisantes d'une frac- multiples : hyperpénétration du ciment dans la tête,
ture de stress du col. Ainsi, le constat peropératoire d'une manteau de ciment trop fin, utilisation d'un ciment à
encoche du col supérieure à 2 mm doit inciter à la conver- haute viscosité, etc.
sion en PTH ; 80 % des fractures du col surviennent suite
à une telle encoche du col et 72 % suite à un varus de la
pièce fémorale [10, 11]. Le Registre australien a montré
que ces fractures survenaient majoritairement lors des
100 premiers cas et/ou chez les chirurgiens pratiquant
moins de 50 RTH/an [11]. L'auteur confirme ces don-
nées avec un seul cas de fracture du col survenu dans son
88e cas d'une série de plus de 2600 RTH.

Stress shielding fémoral


Le vol de contrainte du col fémoral associé au RTH
entraîne un amincissement osseux. Ce dernier est très
fréquemment minime (moins de 10 % de diminution
du diamètre du col), mais peut dans certains cas être
évolutif et imposer une révision devant le risque frac-
turaire (figure 29.5). Les causes de ce phénomène sont
assez mal connues mais certains facteurs de risque
semblent exister : implant de petite diamètre, sexe
féminin, dysplasie de hanche, etc. [1, 12].

Échecs fémoraux Figure 29.5. Amincissement du col fémoral gauche de plus de


10 % par rapport au côté controlatéral constaté 7 ans après
Les échecs sont de deux types : collapsus de la tête l'implantation d'un RTH chez une femme de 44 ans.
fémorale et descellement fémoral (figures 29.6 et 29.7). l existe une ligne réactive condensante de autour de la tige fémorale.

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Figure 29.6. Descellement fémoral d'un RTH droit.


Le cliché à 2 ans de recul montre un implant bien en place ( ) alors qu'au délai de 4 ans (B), un descellement progressif apparaît.
L'implant fémoral s'est varisé et médialisé avec un épaississement cortical en zone 1 de Gruen traduisant la progressivité de la faillite.
Le resurfaçage de hanche : une mode passée ou raisonnée ? 281

• Le descellement fémoral est, à l'instar des PTH, plus Impossibilité de correction d'une
lent à apparaître, avec une mobilisation progressive de anatomie préopératoire perturbée
l'implant fémoral. Les premiers signes radiographiques
sont visibles autour de la tige fémorale (figure 29.6). Évoquée dans le paragraphe précédent, cette impos-
Ces deux complications ont été à l'origine du déve- sibilité représente une des contre-indications les plus
loppement d'implant fémoral sans ciment afin d'éviter fréquentes du RTH [5, 6].
ces complications [12].
Difficultés techniques
Les difficultés techniques représentent un des facteurs
limitants les plus importants du RTH et expliquent
l'existence d'une courbe d'apprentissage. En effet, il est
important de comprendre que l'implantation d'un RTH
est un geste chirurgical différent de celui d'une PTH.
Outre les connaissances indispensables de l'implant,
l'abord chirurgical, la préparation osseuse et le posi-
tionnement des implants représentent autant de défis
techniques [12]. L'abord chirurgical doit être le même
que pour une PTH car il n'existe aucune raison d'être
plus agressif sur les parties molles. En revanche, la posi-
tion des écarteurs et la tenue du membre inférieur sont
différentes de celles des PTH. L'exposition acétabulaire
implique une translation de la tête et un positionnement
optimal des écarteurs [13]. La préparation fémorale
impose un positionnement en léger valgus par rapport
à l'angle céphalo-cervico-diaphysaire (CCD) préopéra-
Figure 29.7. Collapsus de la tête fémorale d'un RTH droit. toire, avec une légère antériorisation et sans encoche du
La tige fémorale s'est désolidarisée de l'implant fémoral. Ce der- col (figure 29.8). La cupule acétabulaire doit suivre des
nier a basculé sur le moignon cervical. règles strictes de position frontale et sagittale, garantes
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A B
Figure 29.8. RTH gauche avec malposition fémorale majeure.
. Sur le profil, la tige est très antéversée entraînant un contact cupule-col fémoral. Ce dernier induit une encoche du col visible sur
les deux incidences et un effet came antérieur à l'origine de libération ionique importante. B. À noter un positionnement en varus de
l'implant fémoral.
282 J. Girard

de la longévité des implants (figures 29.1 et 29.8). Le La production de ces ions induit un risque de com-
ligament transverse est ainsi l'une des clés de la position plications spécifiques regroupées sous le terme ARMD
de la cupule [13]. Le dessin de la cupule pleine fait qu'il (adverse reaction to metal debris) [19]. Ce terme
est impossible de s'assurer après impaction de l'absence englobe les réactions d'hypersensibilité de type IV
d'un espace cupule-os. Il faut donc être particulièrement (ALVAL ou aseptic lymphocytic vasculitis-associated
vigilant lors de l'impaction. lesions), les métalloses, les synovites et les pseudotu-
meurs (PT) [17–19].
nconvénients liés au couple MoM • l'ALVAL est définie par une réaction inflammatoire
prédominante dans les tissus mous périprothétiques,
Le relargage des ions métalliques est l'apanage avec un épanchement articulaire important ;
du couple MoM et induit certaines complications • la métallose correspond à une usure anormale du
spécifiques. couple de friction entraînant une coloration noirâtre
des tissus mous ;
• les PT sont secondaires à une nécrose inflammatoire
Risque carcinologique macrophagique et peuvent revêtir un aspect kystique
Ce risque a été largement étudié dans de nombreuses ou solide [17–19].
études au très long recul [14]. À la lecture de ces Ces ARMD sont très majoritairement dépendantes
méta-analyses portant sur des dizaines de milliers de de trois facteurs : la position de la cupule acétabu-
patients, non seulement il apparaît que ce risque n'a laire, le patient et, nous le verrons plus loin, le type
aucun fondement, mais de plus il semble même que les d'implant. Ainsi, 64 % des PT sont liées à une cupule
patients avec un RTH présentent des taux de cancer trop verticale (supérieure à 55° [20]). Le sexe fémi-
inférieurs à ceux de la population générale à 20 ans nin est un facteur de risque lié au fait que le diamètre
de recul [14]. Pour le Registre anglo-gallois, à 7 ans de des implants y est plus petit que chez les hommes
recul, le taux de cancer apparaissait plus faible dans le et que la dysplasie y est plus répandue que chez les
groupe RTH alors qu'il était plus élevé dans le groupe hommes [20]. La dysplasie comporte fréquemment
témoin non opéré ou dans le groupe PTH métal-PE une hypoplasie de la paroi antérieure pouvant entraî-
[15]. Bien entendu, cela n'est pas lié à un quelconque ner une malposition, avec un excès d'antéversion
effet protecteur du couple MoM, mais à un meilleur de la cupule source d'effet came postérieur. Ainsi,
niveau d'activité des patients avec RTH, diminuant la pour les femmes opérées avant l'âge de 40 ans avec
fréquence des cancers favorisés par la sédentarité. une dysplasie et une tête fémorale de petit diamètre,
le risque de PT est 12 fois plus élevé que chez les
hommes du même âge [21]. En revanche, pour les
Libération des ions métalliques têtes de plus de 48 mm, le risque de PT est quasi nul
Les ions chrome et cobalt issus de l'implant se dis- (moins de 0,5 %) [22].
persent dans la circulation systémique et peuvent donc Cependant, le taux de PT apparaît extrêmement dif-
aisément être évalués [16]. Les taux internationale- férent entre une configuration RTH (où ce risque est
ment admis selon le concept de l'evidence-based medi- faible) et PTH MoM de grand diamètre. Dans cette
cine correspondant à un parfait fonctionnement d'un dernière configuration, ce taux est très important et a
couple MoM sont de moins de 3 μg/l en cas d'implant conduit à son interdiction. Il est capital de souligner

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unilatéral et de 7 μg/l en cas d'implant bilatéral [17]. que les PT ne sont pas secondaires au couple MoM
L'analyse des taux d'ions métalliques est cependant mais à la modularité des PTH MoM à grand diamètre
assez complexe car elle fait intervenir de nombreux de tête [22]. Les PT y sont directement corrélées à des
facteurs [18]. Ainsi, dès le prélèvement, des conditions phénomènes de corrosion de deux interfaces : cône
rigoureuses doivent être respectées, avec l'absence morse/adaptateur (trunnionite) et tête/adaptateur
d'usage d'aiguille métallique. Il est primordial de [19]. De plus, ces deux interfaces sont soumises à des
connaître le type de support de l'analyse (sang total, contraintes de micromobilité et à un effet « batterie »
plasma, érythrocytes, urines) [18]. L'analyse sur sang (entre l'alliage Cr-Co de la tête et le titane de l'adap-
total semble communément admise, même s'il n'y a tateur) qui augmente la libération ionique [19]. Ces
pas de référence internationale. L'absence d'autres fac- phénomènes se retrouvent d'ailleurs avec des PTH
teurs pourvoyeurs d'ions doit être strictement recher- modulaires à autre couple que MoM, ce qui prouve
chée (autres implants métalliques, consommation de l'innocuité du couple MoM. Le RTH étant dépourvu
certains médicaments ou de compléments alimen- d'interface et de modularité, il n'est que très peu
taires) [19]. exposé à ces problèmes.
Le resurfaçage de hanche : une mode passée ou raisonnée ? 283

Néanmoins, certaines ARMD peuvent survenir si les la cupule Conserve Plus® a un angle fixe de 170° quel
implants sont mal positionnés. La position de la cupule que soit son diamètre [12]. L'ASR a ainsi entraîné des
acétabulaire est primordiale. Étant donné l'angle d'ou- taux inacceptables d'ARMD et jeté le discrédit sur le
verture restreint des cupules de RTH, l'inclinaison RTH.
souhaitable est différente de celle des cupules des PTH. Le jeu articulaire (ou clearance) doit être parfai-
Ce qui est acceptable avec une cupule de PTH (incli- tement ajusté afin d'éviter l'edge-loading [23]. Une
naison frontale de 45° à 50°) ne l'est pas pour un RTH clearance trop faible entraîne des contacts polaires
[22]. L'inclinaison doit impérativement être inférieure équatoriaux entre tête et cupule, avec interruption de
à 45°, l'idéal étant de 40°. Surtout, cette inclinaison la lubrification. À l'inverse, une clearance trop large
est directement corrélée à la taille de l'implant. Pour entraîne un contact polaire supérieur. L'impaction de
une cupule de RTH avec un angle d'ouverture de 167°, la cupule peut aussi engendrer une certaine déforma-
l'inclinaison frontale doit être de 44° pour une taille de tion de la cupule modifiant ainsi cette clearance. Enfin,
54 mm mais de 39° pour une taille de 48 mm. Cela est la rugosité du matériau est importante : un implant
lié aux phénomènes d'edge loading et de CPR (contact coulé aura toujours une rugosité supérieure à un
patch rim) [23]. implant forgé et imposera donc une clearance plus éle-
• L'edge loading est un contact punctiforme entre la vée. La finition du matériau (à haute ou faible teneur
tête prothétique et la cupule interrompant la lubrifica- en carbone) a les mêmes conséquences [2].
tion. Il peut survenir si la zone de contact (patch area)
s'étend au-delà du bord de la cupule et il augmente
l'usure. Quelles sont les spécificités
• La distance du centre de la zone de contact au bord
de la cupule (CPR) doit donc être la plus grande pos-
techniques et la courbe
sible [23]. Ce CPR est directement lié au dessin de la d'apprentissage ?
cupule (angle d'ouverture), au diamètre, à l'inclinaison
La voie d'abord postérolatérale est communément
et l'antéversion de la cupule. Ainsi, une cupule verti-
admise comme étant la voie idéale pour un RTH. En
cale ou trop antéversée, un petit diamètre ou un angle
effet, bien que certains aient essayé d'autres voies, l'ex-
d'ouverture réduit diminuent le CPR. Or, un CPR de
position chirurgicale est réellement meilleure avec une
moins de 10 mm entraîne une hausse de × 37 du taux
voie postérieure.
de chrome et de × 32 du cobalt [24] ! À l'inverse, un
La préparation est fémorale première car elle permet
CPR de plus de 10 mm assure un parfait fonctionne-
d'affiner la tête (à 2 mm de plus que le diamètre du col
ment du RTH.
sous la tête le plus souvent) avant le fraisage acétabu-
Ainsi, à la différence des PTH où seule la position
laire, qui est ainsi facilité. L'ouverture du plan capsu-
de la cupule est importante pour réduire l'usure, dans
lomusculaire postérieure en deux plans, le respect de
le RTH, de nombreux autres facteurs entrent en jeu et
la capsule et la réinsertion des pelvitrochantériens sont
font la spécificité de cette technique [23].
indispensables [13].
Aucun geste supplémentaire n'est nécessaire par rap-
Comment choisir l'implant port à une voie postérieure mini-invasive de PTH.
et le matériau ? La visualisation du ligament transverse est un élé-
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ment majeur [13]. En effet, la cupule doit être posi-


Le dessin de l'implant acétabulaire est très différent de tionnée parfaitement parallèle à ce dernier (dans le
celui d'une PTH. L'angle d'ouverture de la cupule doit plan frontal et sagittal), ce qui lui confère automati-
être inférieur à 180° afin de préserver l'os acétabulaire. quement une position anatomique.
Ainsi, un fraisage médialisant de quelques millimètres Un débord osseux antérieur de 2 à 3 mm permet de
permettra de pouvoir implanter une cupule de RTH s'affranchir du risque de conflit iliopsoas.
(avec un même diamètre de cupule). Mais cet angle Le cimentage est un point crucial. Il existe un risque
d'ouverture ne doit pas être trop réduit. L'avantage de surpénétration du ciment dans la tête qui expose à
théorique de meilleures amplitudes articulaires et de la nécrose osseuse. Le risque de nécrose est directement
diminution des conflits col-cupule avec une cupule à lié à l'épaisseur du manteau de ciment. Un manteau très
faible angle d'ouverture se heurte au problème majeur fin expose à une hyperpressurisation du ciment dans la
de l'edge-loading. La cupule ASR® est l'exemple parfait tête. Un manteau plus épais expose à une cimentation
de cette erreur de conception. Son angle d'ouverture plus périphérique de la tête fémorale. En cas d'os de
variait de 143° pour une cupule de 44 mm à 164° pour mauvaise qualité (ostéoporose ou kyste), une surpéné-
une cupule de 70 mm [23]. À titre de comparaison, tration du ciment augmente le risque de nécrose [25].
284 J. Girard

Le respect des tissus mous péricervicaux (et notam- Le Registre finlandais a analysé 5068 RTH appa-
ment des lames porte-vaisseaux inférieure et supé- riés avec 6485 PTH sans ciment. À 10 ans de recul,
rieure) permet de respecter la vascularisation intra- et le taux de survie était de 91 % pour la BHR® et de
extra-osseuse de la tête fémorale [13, 25]. Le risque 92 % pour les PTH. Le taux de révision était doublé
théorique de nécrose avasculaire est ainsi quasi nul, pour les femmes. À 5 ans de recul, le taux de reprise de
comme l'attestent les séries à long terme. l'implant Conserve Plus® était de 5 % [52].
Le Registre australien a étudié 8895 RTH effectués
Quels sont les résultats à moyen chez les moins de 55 ans avec utilisation préférentielle
du BHR®. Il retrouvait un taux de 6,9 % de révision
et long termes ? cumulé à 10 ans (14,5 % femmes et 3,7 % hommes). À
Le nombre de RTH à travers le monde a beaucoup 15 ans, si le diamètre de la tête était de plus de 50 mm,
fluctué ces dernières années. Il a diminué, bien que cer- le taux de révision était de 7 %, et s'il était de moins
tains implants comme le BHR® dépassent désormais de 50 mm, il était de 21 % [11].
les 200 000 poses. Le Registre anglo-gallois a retrouvé pour le BHR®
Plusieurs niveaux de lecture sont à considérer pour un taux de révision de 9 % à 10 ans [53].
les résultats des RTH. Ceux-ci peuvent reposer sur
les séries publiées, sur les comparaisons RTH et PTH Quelles sont les indications ?
ou sur les registres. Ces derniers sont cependant très
sensibles à leur exhaustivité (faible pour le Registre L'indication idéale est un patient jeune avec une coxar-
anglo-gallois : moins de 29 %) et ne reflètent pas auto- throse primitive. La qualité osseuse et le diamètre de la
matiquement l'expérience nationale. tête fémorale sont deux paramètres qu'il faut analyser.
L'analyse des résultats des RTH versus PTH semble En cas de doute (notamment chez la femme après la
idéale mais se heurte à un écueil majeur. En effet, dans ménopause), une densitométrie osseuse est indispen-
le cas des RTH, les révisions sont effectuées beaucoup sable et le constat d'une ostéoporose contre-indique
plus rapidement que pour les PTH. Ainsi, pour un le RTH. Le diamètre minimal de la tête fémorale doit
résultat fonctionnel médiocre (Harris hip score infé- être de 48 mm. Il est très fréquemment corrélé avec la
rieur à 30), 63 % des RTH sont révisés contre seule- taille (1,70 mètre est souvent le minimum).
ment 12 % des PTH [26] ! Enfin, les séries publiées Ces deux facteurs expliquent que le RTH est plus
sont fréquemment mono-opérateurs et mono-implant. fréquemment pratiqué chez l'homme que la femme.
Pour une analyse objective des résultats, nous rappor- Ce n'est pas le sexe féminin qui est en cause car une
terons les données des principaux registres. Une analyse femme avec une densité osseuse correcte et une tête
sur MedLine a été effectuée sur tous les articles publiés de large diamètre représente une excellente indication.
jusque février 2017. Afin de rapporter les résultats L'étiologie est aussi un facteur important. Un défect
extrapolables pour la France, seuls les deux implants osseux de plus d'un tiers de la tête fémorale (larges
actuellement autorisés sur notre territoire ont été éva- kystes ou volumineuse ostéonécrose) contre-indique le
lués. Les termes suivants ont été utilisés avec les articu- RTH. Une déformation importante de la jonction tête-
lations « AND », « NOT », et « OR » : hip resurfacing, col (éphysiolyse, ostéochondrite, etc.) expose à un effet
Birmingham Hip Resurfacing, Conserve Plus. Les cri- came col-cupule et doit être parfaitement identifiée.

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tères d'inclusion étaient les suivants : études rapportant La dysplasie de hanche n'est pas une contre-indication
les taux de survie ou de révision, recul minimal de 4 ans, tant qu'il est possible d'impacter la cupule acétabu-
patients âgés de moins de 70 ans. Les études reprenant laire. L'absence de possibilité de fixation complémen-
les mêmes cohortes de patients ont été analysées et taire (vis, plot) de la cupule rend fréquemment le RTH
celles présentant le plus long recul ont été retenues. Les difficile en cas de dysplasie à angle (VCE/VCA) négatif.
critères d'exclusion étaient les études de cas cliniques, Le corollaire du respect de la biomécanique est l'im-
de technique chirurgicale, d'analyse histologique. possibilité de moduler la longueur du membre infé-
La recherche a mis en évidence 251 citations dont rieur. Une inégalité de longueur de plus de 1 cm est
24 répondaient aux critères d'inclusion et d'exclu- impossible à corriger.
sion (tableau 29.1). Le critère principal d'analyse De même, une anomalie de version du col fémoral
était le NICE (National Institute for Health and Care contre-indique le RTH.
Excellence) (0,5 % de révision/an) [27].
Le resurfaçage de hanche : une mode passée ou raisonnée ? 285

Tableau 29.1
Récapitulatif des séries cliniques de RTH
Auteurs Implants Âge Recul (ans) Critère NICE Nombre de cas Taux de survie
rempli (%)
Amstutz et al. [28] Conserve Plus® 40,8 14,8 Non 99 90,3
®
Somers et al. [29] Conserve Plus 53 4,3 Non 42 95
®
Lons et al. [30] Conserve Plus 48,7 4,1 Oui 502 99,4
Zylberberg et al. [31] Conserve Plus® 48,3 6,6 Non 548 94,5
®
Nam et al. [32] Conserve Plus 45,7 5 Non 136 96,9
®
Nam et al. [32] BHR 44,6 5,3 Non 136 96,4
®
Woon et al. [33] Conserve Plus 47,5 8 Oui 62 95 %
Hulst et al. [34] Conserve Plus® NC 10 Oui 580 98,9
®
Amstutz et al. [35] Conserve Plus 49,1 11,7 Non 100 88,5
®
Halawi et al. [36] BHR 49,7 6,9 Oui 442 97,8
®
Oak et al. [37] BHR 53 6,2 Oui 541 98,8
Guarrido et al. [38] BHR® 51,8 4,1 Non 206 97,4
®
Brooks. [39] BHR 53,1 5,7 Oui 1333 99,2
®
Azam et al. [40] BHR 53,6 12,1 Non 244 93,7
®
Mehra et al. [41] BHR 50 10,6 Non 120 94,2
Daniel et al. [42] BHR® 55,8 13,7 Oui 1000 97,4
®
Sandiford et al. [43] BHR 44 8,2 Oui 109 96,2
®
Su et al. [44] BHR 51,3 5 Oui 265 97,6
®
Pailhe et al. [45] BHR 69,2 10 Oui 180 96,4
Matharu et al. [46] BHR® 41,5 10,1 Oui 447 96,3
®
Murray et al. [47] BHR 51,9 10 Non 646 92
®
Holland et al. [48] BHR 53,7 10,6 Non 100 92
Coulter et al. [49] BHR® 56,8 10,4 Oui 230 94,5
®
Treacy et al. [50] BHR 57,2 10,6 Oui 144 95,5
®
Reito et al. [51] BHR 50,5 6,1 Oui 144 96,7
Total 50,8 8,4 Oui 8356 95,8
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Les patients sportifs sont la cible parfaite des RTH


étant donné la possibilité de retour aux activités spor-
Conclusion
tives à haut impact. Cependant, le respect du stock En implantant selon des conditions de positionnement
osseux et l'absence de luxation font que l'âge repré- précises un RTH au dessin éprouvé, les résultats de ce
sente le principal facteur. Un patient avec une espé- concept se comparent largement aux PTH. Les séries à
rance de vie élevée (plus de 20 ans), et donc un risque moyen et long termes confirment le respect des critères
de reprise important, est un excellent candidat au stricts du NICE avec de faibles taux de révision.
RTH. Surtout, les avantages uniques du RTH en font un
Au final, toutes les coxarthroses primitives chez des implant particulièrement indiqué dans une population
patients de moins de 65 ans avec une densité osseuse de patients spécifiques (jeunes, sportifs, etc.) afin non
correcte et un diamètre minimal de tête de 48 mm sont seulement de retrouver un niveau d'activité fonction-
des indications idéales de RTH. nelle important, mais aussi de préserver le futur.
286 J. Girard

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291

Dysplasie et luxations congénitales


C. LEFÈVRE, F. GAUCHER

La prothèse totale de hanche (PTH) sur maladie 1. Luxation antérieure


luxante de hanche (MLH) reste encore de nos jours 2. Luxation intermédiaire ou haute appuyée
une réalité, si l'on se réfère au Registre national des 3. Luxation postérieure ou haute non appuyée
prothèses totales de hanche qui mentionne un taux Secondairement, cette classification a été complétée
assez constant avoisinant 6 à 7 % de cette étiologie en 1996 par M. Kerboull [3] en intégrant deux stades
pour les prothèses de première intention. sans luxation aboutissant à la classification française
Du fait de certaines mesures de prévention appliquées actuelle en cinq stades (figure 30.1) :
depuis plusieurs années, il devient de plus en plus fréquent 1. Dysplasie. La tête fémorale est totalement incluse
d'avoir à prendre en charge des patients ayant déjà eu dans le paléocotyle, sans rupture du cintre cervico-
dans le passé une chirurgie conservatrice préalable à type obturateur, avec des déformations mesurables : fémur
d'ostéotomie plutôt que des « hanches vierges » avec des en coxa valga et antéversion excessive, paroi antéro
séquelles architecturales de la maladie luxante. supérieure du cotyle hypoplasique.
Quoi qu'il en soit, deux étapes préalables restent 2. Subluxation. La tête fémorale est ici partiellement
indispensables avant d'envisager une solution chirurgi- incluse dans le paléocotyle, avec rupture du cintre,
cale : une analyse complète du terrain du patient et une déformation en coxa valga, accourcissement du col
classification du stade lésionnel. C'est en respectant fémoral, tête déformée aplatie avec un excès d'anté-
ces règles que l'on adoptera une technique chirurgi- version. Le cotyle présente une déformation en miroir,
cale appropriée, évitant ainsi des situations complexes ovalisé avec un grand axe antérosupérieur, une paroi
et surtout inhabituelles par rapport à la coxarthrose supérieure haute et courte, une paroi antérieure sou-
primitive. vent absente.
3. Luxation antérieure. La tête fémorale n'a plus
Anatomopathologie de contact avec le paléocotyle, avec une ascension
moyenne du centre de rotation de 2,5 cm. Le fémur
et classifications est en grande coxa valga, le col est accourci et anté-
La MLH est une maladie à grand polymorphisme, pou- versé, la tête fémorale est déformée et souvent aplatie
vant aller de la simple dysplasie laissant des troubles en tampon de wagon. Le néocotyle est situé au-des-
architecturaux discrets (tête fémorale plus ou moins sus et en avant du paléocotyle, déformé en contre-
déformée mais encore dans un paléocotyle plus ou moule. Le paléocotyle, jamais mis en charge, est lui
moins déformé, découverture de la tête, arrière-fond aussi déformé : étroit, avec une paroi antérosupérieure
épais, rupture modérée du cintre cervico-obturateur, hypoplasique. Souvent, il existe un contact entre petit
etc.) aux luxations franches parfois hautes, voire non trochanter et ischion.
appuyées. Ces divers stades anatomopathologiques 4. Luxation intermédiaire (ou haute appuyée). Le néo-
ont été « malheureusement » à l'origine de classifica- cotyle est maintenant en haut et en arrière du paléo-
tions toutes déduites d'analyses 2D seulement, à partir cotyle avec une ascension moyenne de 5 cm. Le canal
de radiographies standard, pour définir et classer des fémoral est étroit et droit, entraînant une diminution
lésions parfois complexes qu'il faut considérer dans de l'offset, le col fémoral est en valgus et antéversé, la
l'espace. Rappelons que l'intérêt d'une classification tête est en général petite et non sphérique. Il existe un
est d'être reproductible et de pouvoir prédire les lésions néocotyle peu profond aux parois fines. Le paléocotyle
afin d'anticiper les difficultés techniques peropératoires. est étroit, de forme triangulaire à sommet supérieur
avec une paroi antérieure toujours hypoplasique voire
Classification de Cochin absente. Il existe souvent une bonne réserve osseuse
dans la colonne postérieure.
Cette classification a été initialement décrite en 1974 5. Luxation postérieure (ou haute non appuyée). La
par M. Postel et M. Kerboull [1, 2] en trois stades de tête fémorale est luxée très haut et en arrière sans
luxation vraie : aucun contact avec l'aile iliaque, avec une ascension
La prothèse totale de hanche dans tous ses états
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292 C. LefÈvre, . Gau her

Figure 30.1. Les 5 stades de la classification de Cochin.


1. Dysplasie. 2. Subluxation. 3. Luxation antérieure. 4. Luxation intermédiaire. 5. Luxation postérieure.

moyenne de 6,5 cm. Le canal médullaire demeure 1. Dysplasie : tête fémorale restant dans le paléocotyle
étroit et rectiligne. Tête et col sont courts et de petites plus ou moins déformé
tailles avec souvent une antéversion excessive. 2. Luxation basse : tête juste au-dessus du paléocotyle
Dans le plan sagittal, plus la luxation est haute, plus ou à cheval
le bassin est rétroversé, par adaptation de la balance 3. Luxation haute
musculaire, ce qui explique l'hyperlordose constatée Les deux classifications de Crowe et de Hartofilakidis
dans les luxations hautes bilatérales. ont été validées et comparées entre elles [9,10]. La
Actuellement validée en termes de reproductibilité [4], classification de Crowe demeure très utilisée dans les
cette classification garde une robustesse au moins égale publications internationales car facilement reproduc-
à celle des deux suivantes ; elle reste par essence même tible, puisqu'il s'agit de mesures.
la seule pertinente au niveau anatomo-pathologique.
En revanche, on reproche à cette classification de Classification de la Société française
n'être que descriptive, donc subjective, ce qui explique
qu'elle n'est malheureusement pas utilisée dans la litté- de la hanche et du genou (S G)
rature internationale ; pourtant, le niveau d'expérience Cette classification ne fait que reprendre les cinq stades de
de l'observateur, qu'il soit jeune ou ancien, n'influence la classification de Cochin modifiée, non plus descriptive

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pas la reproductibilité de sa lecture [5]. mais mesurée à partir de rapports utilisant des critères
quantifiables mais plus fins que ceux de la classification
Classification de Crowe [6] de Crowe. L'avantage de cette conception est l'obten-
tion de bornes au plus près des stades anatomopatho
Purement quantitative, cette classification est fondée logiques avec des zones frontières plus étroites.
sur le rapport distance « jonction tête-col/ligne des U » Le principe de base (figure 30.4) utilise un référentiel
sur le cinquième de la hauteur totale du bassin. Quatre bassin avec la hauteur (H) du bassin mesurée des crêtes
stades sont individualisés en fonction de la valeur de ce iliaques à la ligne des U. Le référentiel tête (D) mesure la
rapport (figure 30.2). distance : jonction tête/col à la ligne des U. Le gradient
de luxation (L) est finalement le rapport D sur trois cin-
Classification de artofilakidis quième de H. On obtient ainsi cinq nouveaux stades
(figure 30.3) avec leurs bornes et des zones frontières entre deux
stades bien précisées en fonction du niveau du petit tro-
Descriptive comme celle de Cochin, cette classification chanter par rapport à la ligne des U. Cette conception
comprend trois stades [7, 8] : récemment validée apparaît donc fiable [11].
Dysplasie et luxations congénitales 293

A
Stade =
B/5

Stade 1 : R < 0,1


B Stade 2 : 0,1 < R < 0,15
A
Stade 3 : 0,16 < R < 0,2
Stade 4 : R > 0,2

A = distance jonction tête-col/ligne des U


B = hauteur totale du bassin

Figure 30.2. Principe et stades de la classification de Crowe.

Figure 30.3. Les trois stades de la classification de Hartofilakidis.


. Dysplasie. B. Luxation basse. C. Luxation haute.
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L = D/(H/3,5)

H
1. Dysplasie : L < 20 %

2. Subluxation : 21 % < L < 40 %


D
3. Luxation antérieure : 41 % < L < 100 %

4. Luxation haute : L > 100 %

Figure 30.4. Principe et stades de la classification SFHG.


294 C. LefÈvre, . Gau her

Bilan préopératoire et un déport de la tête vers l'extérieur, au-delà de la


surface d'appui au sol ;
Bilan clinique • en cas d'insuffisance isolée des stabilisateurs, l'adap-
tation se fait par une bascule du bassin vers le côté en
Terrain décharge (signe de Trendelenburg), ce qui entraîne une
adduction de la hanche portante et un abaissement de
Le contexte de la MLH n'est pas celui d'une coxar-
la tête ;
throse banale. Il s'agit de patients très tôt handicapés,
• en cas de raideur isolée de la hanche, la boiterie se
qui vivent avec cette maladie depuis toujours, avec un
traduit par une asymétrie à la marche avec une rota-
fort retentissement sur leur vie personnelle et profes-
tion du bassin pour le passage du pas antérieur.
sionnelle, avec un vécu psychologique particulier dont
L'examen de la hanche en elle-même analyse les
il faudra savoir tenir compte. L'inégalité de longueur
amplitudes articulaires et les éventuelles attitudes
est fréquente, souvent associée à une raideur et une
vicieuses, en sachant qu'il est parfois difficile de faire
boiterie. De plus, ce sont des patients aux demandes
la part des choses entre mobilité coxo-fémorale et
fonctionnelles souvent complexes. Ils arrivent jeunes
compensations dans le bassin et le rachis lombaire.
à l'heure de la chirurgie prothétique avec souvent
Cet examen sera systématiquement complété par
des antécédents de chirurgie conservatrice. Tout cela
une analyse globale des membres inférieurs, en par-
engage à un suivi long, parce qu'il y a plus de compli-
ticulier l'existence d'un fémur adductus, et d'un genu
cations dans ce type de chirurgie, et aussi parce qu'il y
valgum compensateur, réductible ou non, avec parfois
a un risque très vraisemblable de reprises pour usure
même un pied plat d'adaptation.
ou descellement.
Il convient d'apprécier une inégalité de longueur des
membres inférieurs en décubitus dorsal et debout en
Examen clinique charge, cette inégalité apparaissant parfois diminuée
On commence par recueillir les antécédents du patient par adaptation d'un bassin non fixé.
au niveau des hanches, l'existence d'un traitement Enfin, il est toujours indispensable de rechercher une
orthopédique antérieur, avec éventuellement des traces scoliose structuralisée thoracolombaire, souvent liée à
de souffrance cutanée sous plâtre qui ont pu laisser des une bascule pelvienne frontale enraidie, ainsi qu'une
adhérences cutanées parfois importantes. Il convient hyperlordose lombaire basse d'adaptation à une bascule
de préciser le type et même le nombre d'interventions pelvienne sagittale antérieure dans les luxations hautes.
antérieures, la répartition des cicatrices, en particulier
celle la plus proche de la voie d'abord envisagée, qu'il Bilan paraclinique
est préférable de reprendre au moins en partie plutôt
que d'en créer une supplémentaire. Le bilan radiologique standard comprend :
L'étude de la marche est indispensable et parfois • des radiographies du bassin de face (visualisant
complexe à analyser, surtout en cas d'atteinte bilaté- la totalité du bassin, des crêtes iliaques à la ligne
rale asymétrique. Il faut savoir faire la différence entre bi-ischiatique), une hanche de face et de profil, ce qui
une boiterie d'évitement douloureuse avec un simple permet de définir le stade anatomique. Le bilan est
raccourcissement du temps du pas, et une boiterie liée complété par un rachis en entier de face, un profil en
aux troubles de la stabilisation frontale du bassin [12] ; charge, et éventuellement une goniométrie. En cas de

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ses origines peuvent être soit une diminution de la scoliose avérée, des clichés en inclinaisons latérales sont
force musculaire des stabilisateurs (essentiellement le nécessaires ;
moyen fessier), soit une diminution du moment méca- • un examen tomodensitométrique des hanches, qui
nique de la force stabilisatrice (perte de longueur des est indispensable pour évaluer l'antéversion acétabu-
bras de levier osseux, accourcissement du col fémoral, laire et fémorale, l'état du stock osseux, en particu-
abaissement de la crête iliaque, rapprochements divers lier la réserve osseuse dans la colonne antérieure, et
des points d'insertions musculaires). la dégénérescence graisseuse de l'éventail fessier. Il
L'analyse de cette stabilisation frontale s'apprécie au permet une reconstruction 3D, et par technique de
mieux en appui unipodal : soustraction d'images, de mieux préciser le stade de la
• lorsque la force stabilisatrice est nulle, on constate luxation (figure 30.5).
une inclinaison avec abaissement de l'épaule du côté D'autres examens peuvent être utiles, comme une
en charge (signe de Duchenne de Boulogne), avec une analyse IRM du bassin entier dans les antécédents
verticalisation de l'axe mécanique du membre inférieur d'ostéotomie pelvienne pour rechercher une nécrose
porteur, une abduction positive de la hanche portante osseuse ou une dégénérescence graisseuse musculaire.
Dysplasie et luxations congénitales 295

Néocotyle

Paléocotyle

A B C
Figure 30.5. Bilan d'imagerie.
. adiographie. B. TDM. C. econstruction 3D ; soustraction du fémur à droite.

L'examen EOS® devrait remplacer avantageusement des difficultés peropératoires, soit la reprise d'une
les classiques téléradiographies en apportant une réelle voie d'abord initiale pour une éventuelle ablation de
précision dans l'analyse du rachis, des segments de matériel.
membre et de la bascule pelvienne. L'antéversion définitive des pièces devra se conformer
aux chiffres habituels selon la voie d'abord choisie, et
non pas aux anomalies anatomo-pathologiques initiales.
Technique chirurgicale
oies d'abord Abord transtrochantérien
L'abord transtrochantérien (figure 30.6) permet d'ex-
Principes du choix poser l'articulation coxofémorale par relèvement d'un
Si toutes les voies d'abord ont pu être utilisées, certaines médaillon trochantérien restant pédiculé sur les moyen
d'entre elles ne sont peut-être pas recommandables en et petit fessiers et une partie des muscles pelvitrochanté-
fonction du stade anatomique. En ce qui concerne les riens. Cette ostéotomie peut être réalisée de deux façons
voies d'abord classiques (postéro-latérales, antéro- selon l'objectif de l'ostéosynthèse trochantérienne :
latérales et antérieures), il faut respecter quelques prin- • si l'on envisage de refixer le médaillon en place,
cipes dans cette pathologie : l'ostéotomie est préférentiellement réalisée à l'aide de
• obtenir une installation stable pour un meilleur deux ciseaux en biplan (= toit de pagode) pour renfor-
contrôle des modifications de longueur peropératoires ; cer la stabilité antéropostérieure du médaillon lors des
• prévoir un abord de crête iliaque pour une éven- mouvements de flexion de la hanche ;
tuelle greffe complémentaire, même si elle ne paraît • en revanche, si l'on envisage de modifier le position-
pas indispensable sur le bilan préopératoire ; nement du médaillon, l'ostéotomie doit ici être réali-
• anticiper soit la possibilité d'un agrandissement de sée en un seul plan, de façon à pouvoir la fixer avec
la voie d'abord, en proximal et en distal en fonction une tension physiologique des fessiers, le plus souvent
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Figure 30.6. Voie transtrochantérienne.


. Ostéotomie trochantérienne au ciseau. B. elèvement du médaillon trochantérien. C. Cerclage avec abaissement et translation du
médaillon.
296 C. LefÈvre, . Gau her

par un abaissement et une antéposition (figure 30.6C). Notons enfin qu'une ostéotomie d'accourcissement
Indéniablement, cette possibilité de modification de la fémoral est possible par cet abord.
tension de l'éventail fessier (en intensité et direction)
est un des avantages de la voie transtrochantérienne.
Quoi qu'il en soit, le trait d'ostéotomie transtro- Abord transfémoral
chantérien doit aboutir dans le bord supérieur du col L'abord transfémoral est une voie postérolatérale avec
fémoral, voire dans la tête (figure 30.6A), de façon à ostéotomie fémorale diaphysaire [12,13].
avoir un médaillon d'épaisseur suffisante et à pouvoir Initialement décrite pour la réaxation fémorale
relever les muscles fessiers sans les léser (figure 30.6B). dans les PTH après ostéotomie d'angulation sous-
On peut alors exposer correctement la capsule articu- trochantérienne de type Milch ou Schanz (figure 30.7),
laire et en faire une excision complète, clé du succès ses indications ont été élargies aux luxations hautes
de l'abaissement. La large exposition du paléocotyle pour lesquelles il est prévu un accourcissement fémo-
ainsi obtenue permet sa reconstruction anatomique ral pour :
par greffe osseuse et plaque en croix si nécessaire. • limiter les risques neurologiques d'un abaissement
La fixation du médaillon en bonne position par trop important ;
rapport à l'axe des fibres du moyen glutéal se fait par • faciliter l'adaptation des longueurs des membres
quatre cerclages frontaux inox 14 ou 15/100, passés inférieurs dans une luxation haute asymétrique ;
dans un orifice foré à la mèche de 4 mm au milieu de • réduire sans tension ;
la face latérale du fémur, entre 3 et 4 cm sous le lit • et enfin, dernier avantage, modifier éventuellement
de la trochantérotomie. Les cerclages doivent être har- l'orientation de l'éventail fessier par rotation du frag-
monieusement répartis, équidistants par rapport au ment proximal.
sommet du grand trochanter, leur serrage commençant L'abord se fait dans l'ostéotomie fémorale diaphy-
par les fils intermédiaires, et se poursuivant par les fils saire (figure 30.8), après réalisation d'une barrette
antérieur et postérieur ; il doit aboutir à une tension osseuse de la ligne âpre de 5 mm de large et 5 cm de
équivalente des quatre cerclages pour une répartition haut avec ses insertions musculaires, servant de lame
harmonieuse des forces de traction sur l'ensemble du porte-vaisseaux pour faciliter la consolidation de cette
montage. Ce temps peut être facilité par la mise en ostéotomie (figure 30.8A).
légère abduction et flexion de la hanche. Planifié en préopératoire, le niveau du trait proximal
En postopératoire, l'appui est autorisé, protégé par doit laisser une hauteur de 3 à 4 cm sous le petit tro-
deux cannes béquilles jusqu'à consolidation de la tro- chanter de façon à ne pas fragiliser la partie médiale
chantérotomie (45 jours au minimum). de ce fragment.

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Figure 30.7. Ostéotomies fémorales sous-trochantériennes.


. Milch. B. Schanz.
Dysplasie et luxations congénitales 297

A B C
Figure 30.8. Voie transfémorale (de Pont-l'Abbé).
. éalisation d'une barrette osseuse sur la ligne âpre. B. ésection du cylindre osseux. C. Synthèse de l'ostéotomie par une plaque
renforcée par les deux hémicylindres de la résection osseuse.

On réalise ensuite la résection d'un cylindre osseux Une fois ces deux réglages réalisés, l'ostéotomie
monobloc dont la hauteur a aussi été calculée sur la fémorale est fixée par une plaque verrouillée à 4 ou
planification préopératoire et qui servira d'autogreffe 5 trous de part et d'autre du trait en utilisant des vis
autour de l'ostéotomie une fois l'accourcissement réa- monocorticales à bouts ronds dites périprothétiques.
lisé (figure 30.8b). Ce montage est suffisamment solide pour luxer la pro-
Le fragment supérieur est relevé par traction et thèse comme dans une voie postérolatérale.
bascule progressives vers le haut et l'avant. Cette On peut alors enlever la tige d'essai, et cimenter la
manœuvre permet d'aborder toute la capsule articu- tige définitive sur un bouchon distal et au canon de
laire, de la réséquer entièrement, ce qui expose par- pressurisation rétrograde avec un ciment aux antibio-
faitement le néocotyle et surtout le paléocotyle. Le tiques et à haute viscosité.
fragment proximal reste pédiculé sur les moyen et petit La hanche est à nouveau réduite. La consolidation de
fessiers et le plus souvent le piriforme. l'ostéotomie est favorisée à la fois par autogreffe avec
La qualité de l'exposition du paléocotyle permet les deux hémicylindres diaphysaires et l'amarrage de la
toutes les reconstructions anatomiques. barrette osseuse de ligne âpre, l'ensemble étant fixé par
Le temps fémoral nécessite une préparation aux deux cerclages inox 14/100es (figure 30.8C).
râpes voire aux alésoirs de chaque fragment de façon En postopératoire, l'appui complet est différé
à utiliser une tige le plus souvent dysplasique droite. Il jusqu'à la consolidation de l'ostéotomie diaphysaire
faut veiller à ce que l'extrémité de la tige soit au moins (60 jours environ)  ; la mobilisation précoce de la
à 5 cm sous le trait d'ostéotomie. hanche doit éviter les rotations pour ne pas solliciter le
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Notons que la fréquente incongruence des diamètres foyer d'ostéotomie.


endofémoraux des deux fragments rend habituellement
plus difficile l'utilisation d'une tige non cimentée, même Comment bien réduire
droite ; la sécurité est d'utiliser alors une tige cimentée. une luxation ?
La tige d'essai est introduite de proximal à distal dans
chaque fragment ; la hanche est réduite par poussée et Quelle que soit la voie d'abord choisie, la réduction
non en traction, avec le genou fléchi. On peut alors d'une luxation nécessite le respect de certains prin-
procéder aux réglages en longueur et en antéversion. cipes. Les meilleurs résultats fonctionnels obtenus
Si la réduction s'avère difficile, une recoupe osseuse et durables dans le temps le sont avec des hanches
cylindrique sur le fragment distal permet de diminuer recentrées dans le paléocotyle, avec une tolérance de
la tension des parties molles et de réduire. ± 10 mm par rapport à la ligne des U, résultats en
Le réglage en antéversion du col prothétique se fait accord avec ceux de la littérature [14,15].
classiquement par alignement de la ligne âpre des deux L'excision capsulaire complète est utile à double
fragments à 15 à 20° d'antéversion de la pièce fémo- titre : localisation exacte du paléocotyle à sa partie
rale par rapport au fragment distal. inférieure, facilitation de la réduction. Cette excision
298 C. LefÈvre, . Gau her

permet de surcroît d'éviter des ténotomies ou sections du toit et/ou de la paroi antérieure, en sachant que la
musculaires, facteurs d'instabilité. zone greffée ne doit pas dépasser 40 % de la surface
Au temps cotyloïdien, le meilleur repère du niveau de la cupule. Au-delà, la tenue primaire de la cupule ne
d'abaissement reste le bord supérieur du foramen sera pas assurée [17].
obturé toujours présent. Le creusement jusqu'à la lame
quadrilatère se fait à l'aplomb de ce dernier en le « pos- Stratégies de recentrage
tériorisant » dans la colonne postérieure où la réserve
osseuse est toujours suffisante de façon à préserver la dans les luxations hautes
paroi antérieure hypoplasique, voire absente. Les stratégies de recentrage varient selon le caractère
Il ne faut pas hésiter à reconstruire un défect osseux uni- ou bilatéral, symétrique ou asymétrique de la
du toit par butée autologue vissée voire armée par une hanche luxée. Elles doivent également tenir compte
plaque en croix. des déformations sus- et sous-jacentes (rachis scolio-
Au temps fémoral, la coupe du col se situe au ras du tique raide, genu valgum d'adaptation à l'adduction
petit trochanter pour supprimer toute difficulté liée à fémorale).
une antéversion excessive. Dans la luxation postérieure unilatérale, situation en
En cas d'impossibilité de réduction, il ne faut pas hési- fait assez rare, le recentrage est à l'évidence impératif.
ter à réaliser un accourcissement fémoral diaphysaire. Dans les luxations bilatérales symétriques, il n'y a
Afin de prévenir une complication neurologique, la en général pas de déformation du rachis ni de bassin
réduction de la hanche, rappelons-le, doit se faire par oblique ; en revanche, la bascule antérieure augmente
poussée directe sur le col ou la tête prothétique et non avec la hauteur de la luxation. Dans ce contexte, la
par traction, la hanche en adduction et légère flexion stratégie implique un geste prothétique bilatéral, rare-
et sur un genou fléchi à 70°. ment en un temps ; le raccourcissement diaphysaire
Au final, la planification préopératoire sur calques, fémoral, soit avec trochantérotomie, soit directement
voire numérique, garde toute son importance pour comme voie d'abord (transfémorale), peut faciliter
préciser le type et la position du cotyle, les gestes l'abaissement et la symétrisation tout en limitant les
osseux complémentaires (excision, butée), le type risques neurologiques.
et le positionnement de la tige (niveau de section du Les formes bilatérales et asymétriques sont certai-
col, trochantérotomie, ostéotomie d'accourcissement nement celles qui posent le plus de problèmes stra-
diaphysaire). tégiques. Le scanner préopératoire est dans ces cas
particulièrement nécessaire pour préciser la position
Comment fixer une cupule respective des néocotyles et l'état du stock osseux au
niveau du paléocotyle. Cela permet d'anticiper les
dans les dysplasies et subluxations ? gestes associés à type d'excision d'un effet came ou de
Il existe dans tous les cas de figure une réalité ana- reconstruction par greffe.
tomique : un petit diamètre antéropostérieur et une
hypoplasie de la paroi antérieure, voire du toit. PT après chirurgie conservatrice
Face à ce contexte, trois options de fixation de la
cupule sont possibles :
préalable

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• implanter une cupule cimentée en position anato- Le sujet est d'actualité, la majorité des MLH vues pour
mique, avec ou sans greffe vissée complémentaire. une chirurgie prothétique ayant actuellement déjà fait
Préférer alors une cupule full poly de type Charnley l'objet d'une chirurgie conservatrice préalable. Si cette
avec une tête de 22,2 mm pour garder une épaisseur dernière est censée retarder ou stopper l'évolution de
optimale de polyéthylène ; l'arthrose sans gêner l'implantation d'une PTH ulté-
• implanter une cupule non cimentée en position non rieure, elle induit néanmoins des difficultés techniques
anatomique, ce qui entraîne une ascension et une média- qu'il faut anticiper tant lors du bilan préopératoire que
lisation voire une protrusion, pour obtenir à la fois une lors de l'intervention.
tenue et une couverture correctes de l'implant. En modi-
fiant les centres de rotation et les bras de leviers mus-
culaires, ce choix peut altérer les résultats fonctionnels
Ostéotomies fémorales
en termes de mobilité et de boiterie, avec des risques de intertrochantériennes
moins bonne longévité de la prothèse [16] ; Plusieurs cals vicieux sont possibles, le plus fréquent
• implanter une cupule non cimentée en position ana- étant lié à une translation soit dans le plan frontal, avec
tomique, ce qui nécessite souvent une reconstruction risque de positionnement en varus de la tige fémorale
Dysplasie et luxations congénitales 299

voire de fausse route, soit dans le plan sagittal, avec bulaire ou une pseudarthrose d'une branche compro-
risque de fausse route postérieure. mettant sa vitalité et qui imposerait une reconstruction
Plus difficile à déceler, le cal vicieux rotatoire peut avec armature de soutien et autogreffe. En outre, l'IRM
induire un défaut de version de la tige et donc une ins- a l'avantage de préciser le taux de dégénérescence
tabilité postopératoire. graisseuse musculaire, ce qui est utile pour prévenir le
C'est souligner encore la nécessité d'une imagerie patient d'une récupération fonctionnelle incomplète.
préopératoire, dont la radiographie de profil et une Dans les ostéotomies d'agrandissement type Chiari,
tomodensitométrie (TDM), et d'une planification de les parois antérieure et postérieure sont présentes et
face et de profil afin de prévoir une éventuelle ostéoto- permettent la mise en place de cupules convention-
mie correctrice, voire une prothèse sur mesure. nelles ou augmentées. La médialisation acétabulaire
inhérente au Chiari est parfois importante, au point de
compromettre la biomécanique de la hanche. Elle peut
Après ostéotomies fémorales alors être corrigée par une tige latéralisée.
sous-trochantériennes Un excès de couverture externe entraîne parfois un
de type Milch ou Schanz effet came, nécessitant de réséquer le butoir osseux.
Une vis intra-articulaire après fraisage doit être
La correction angulaire par désostéotomie est indis-
enlevée, ce qui peut nécessiter le recours à une voie
pensable, qu'elle soit ou non de principe comme dans
complémentaire.
la voie transfémorale (voir figure 30.7). Elle permet
Au final, le problème est ici dans le choix du centre
d'implanter une tige fémorale dysplasique droite pon-
de rotation avec deux options possibles :
tant la désostéotomie, et de corriger le fémur adductus,
• soit un placement dans le paléocotyle nécessitant
ce qui soulagera d'autant le genu valgum sous-jacent.
une armature de soutien et une greffe osseuse ;
Sur un matériel ancien encore en place (plaque vissée
• soit un placement en position intermédiaire, avec
coudée), l'ablation de celui-ci peut s'avérer longue et
éventuellement une grosse cupule, en ne méconnais-
difficile, ce qui nécessite de prévoir une instrumenta-
sant pas un conflit douloureux possible avec le psoas
tion adaptée (tournevis spécifique, matériel d'extrac-
en avant.
tion de vis cassées).

Après butée Résultats


Si la butée a été correctement positionnée (à la bonne Les résultats évoqués sont ceux de la série du sympo-
hauteur, antérolatérale, juste au-dessus de la tête), on sium SFHG « PTH sur MLH en 2012 » à partir d'une
peut utiliser un implant acétabulaire de taille conven- étude rétrospective multicentrique continue de PTH
tionnelle sans greffe osseuse. Il faut tout de même se primaires sur séquelles de maladie luxante.
méfier d'un éventuel effet came soit sur la butée, soit L'étude a porté sur 434 prothèses dont 22 % bilaté-
sur le matériel, dont la résection ou l'ablation peut rales, essentiellement des femmes (83 %), avec un âge
nécessiter la reprise complémentaire de la voie de la moyen de 56 ans (17–80). Il s'agit donc d'une popula-
butée. tion jeune avec 62 % d'actifs.
Si la butée a été positionnée sur une tête en position Concernant la hanche opérée, 44 % avaient déjà eu
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haute non anatomique, le recentrage dans le paléo une chirurgie conservatrice préalable.
cotyle nécessite le plus souvent de réséquer la butée Le stade anatomique a été défini selon :
(pour limiter l'effet chevalet sur les muscles fessiers) et • la classification de Cochin (haute non appuyée :
de reconstruire le paléocotyle à l'aide d'une autogreffe. 19 % ; haute appuyée : 21 % ; antérieure : 31 % ;
subluxée : 30.%) ;
• la classification de Crowe (stade 4 : 34 % ; stade 3 :
Après ostéotomie pelvienne 19 % ; stade 2 : 25 % ; stade 1 : 22 %).
Dans les ostéotomies de réorientation (Salter, PAO), Parmi les patients, 84 % avaient une inégalité de
le problème principal est la rétroversion acétabulaire longueur. Le retentissement sur les articulations sus- et
avec un possible effet came antérieur (pouvant nécessi- sous-jacentes était fréquent : 49 % de genu valgum,
ter une désostéotomie ou une transposition de paroi). 21 % de scolioses (dont la moitié structuralisées) et
Le scanner est ici incontournable pour anticiper ces 13 % d'hyperlordoses.
difficultés. Seul le score PMA a pu être analysé. La douleur
Dans ce contexte, une IRM préopératoire paraît moyenne était à 2,8, la mobilité à 3,7, la stabilité à
utile pour rechercher une nécrose d'un fragment acéta- 3,4 (81 % de boiterie).
300 C. LefÈvre, . Gau her

La trochantérotomie a été utilisée dans 61 % des et que le bord supérieur du foramen obturé est tou-
cas, la voie postérolatérale dans 20 %, la voie antéro- jours un repère fidèle en hauteur. Les greffes osseuses
latérale dans 12 %, la voie transfémorale dans 7 %. sont fréquentes et nécessitent souvent un matériel
Les suites postopératoires ont été marquées par de renfort, type croix de Kerboull, qu'il faut avoir à
2,8 % de complications neurologiques (autant de disposition.
paralysies sciatiques que crurales) dont un tiers seule- Le fémur est également très pathologique : fût étroit,
ment a partiellement ou totalement récupéré, la moitié rectiligne, avec une antéversion souvent majorée, voire
survenues après les abaissements de luxation haute. une hélitorsion, déformation secondaire à une chirur-
Par ailleurs, on dénombrait 3,2 % de luxation. gie antérieure intertrochantérienne, voire sous-tro-
Certaines complications ont nécessité une réinter- chantérienne. On devra donc avoir à disposition des
vention : 4 infections, 5 pseudarthroses (4 grands tiges adaptées, appartenant à des gammes étendues
trochanters, 1 diaphyse), 9 luxations, et 1 cas d'ossifi- comportant des petites tailles, voire dysplasiques (tiges
cations périprothétiques. « droites »), qu'elles soient cimentées ou non. En cas de
Un changement de tout ou partie de la prothèse a été déformation majeure, on peut choisir entre deux phi-
nécessaire dans 13,6 % des cas, essentiellement pour losophies : soit une ostéotomie correctrice préalable,
descellement, usure ou ostéolyse, au recul théorique soit une tige sur mesure [18].
maximal de 20 ans. Le couple de frottement est aussi dépendant du
Au final, le recul moyen de la série est de 13 ans, choix d'un recentrage anatomique, puisqu'il impose
dont 38 % ont plus de 15 ans. très souvent d'utiliser des petites cupules. Le couple
Pour le résultat fonctionnel, le PMA global est passé métal-polyéthylène reste la sécurité, mais le couple
de 9,9 à 16, la douleur de 2,8 à 5,3, la mobilité de alumine-alumine, quand il est possible, a maintenant
3,7 à 5,3 et la stabilité de 3,4 à 5,1. fait la preuve de son efficacité.
Le membre inférieur opéré était de la même lon- Les difficultés d'abaissement sont prévisibles du fait
gueur que le membre controlatéral dans 50 %, plus même de la stratégie de recentrage ; un certain nombre
court dans 28 % et plus long dans 22 % des cas. de points clés permettent de les réduire :
Indéniablement, la survie globale d'une PTH • faire une capsulectomie élargie ;
sur MLH reste dépendante du stade anatomique • limiter au maximum les ténotomies, facteurs d'ins-
(figure 30.9). tabilité postopératoire ;
• savoir réaliser une ostéotomie d'accourcissement
fémoral, soit par nécessité en cas d'impossibilité réduc-
Quels sont les facteurs de succès tionnelle (ou pour pouvoir introduire la tige), soit de
d'une PTH sur MLH ? principe comme dans la voie transfémorale.
En cas de chirurgie conservatrice préalable, il faut
Le raisonnement pour l'intervention chirurgicale doit s'efforcer d'appliquer le même raisonnement d'un
partir d'un objectif de recentrage anatomique. recentrage en position anatomique. Il augmente les
C'est cette nécessité qui va conditionner le position- difficultés techniques, mais sans majorer les compli-
nement des implants et par conséquent le choix de la cations, tout en donnant au final des résultats com-
voie d'abord et du type d'implant : parables aux arthroplasties sur hanches non opérées
• dans les formes basses, toutes les voies d'abord sont auparavant [19].

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possibles et le résultat final dépend plus de la qualité Au total, au moment du choix définitif, si l'on
du recentrage que de la voie elle-même ; a fait une bonne analyse du terrain et des lésions
• en revanche, dans les luxations hautes, les deux anatomopathologiques, si l'on a anticipé la stratégie
voies sécurisantes restent la trochantérotomie par de recentrage, que l'on maîtrise la voie d'abord et que
abord latéral, avec ou sans accourcissement diaphy- l'on dispose d'une gamme d'implants adaptés, on peut
saire, et l'abord transfémoral dit de Pont l'Abbé. Ces alors, avec des risques connus, proposer au patient une
deux abords permettent de remplir le contrat du recen- arthroplastie dont il devrait tirer bénéfice.
trage anatomique, sans méconnaître leur risque de Remerciements : à Joël Savéan du Laboratoire
pseudarthrose. du traitement de l'information médicale de Brest
Il faut reconstruire un paléocotyle souvent petit, (LaTIM) pour son professionnalisme et le temps
déformé voire comblé, en sachant qu'il existe souvent passé à travailler les images 3D présentées dans ce
une bonne réserve osseuse dans la colonne postérieure travail.
Dysplasie et luxations congénitales 301

,8

Survie cumulée
Crowe 1 98 %
,6 Crowe 2 93 %
Crowe 3 92 %
,4
Crowe 4 80 %
,2 Intervalle de confiance : 5 %
Sortie : toute reprise chirurgicale
0
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180
Temps (mois)

Figure 30.9. Survie de la PTH à 15 ans en fonction du stade lésionnel.

Réfé ences
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305

Gestion périopératoire
de la prothèse totale de hanche
au CHU de Rennes
Analgésie et épargne sanguine

T. DESSIEUX, A. SION

Introduction effets secondaires de ces substances peuvent en effet


s'avérer néfastes (effets sédatifs), en particulier pour la
La date de sortie des patients dépend en grande partie RRAC et l'ambulatoire.
de la gestion de l'analgésie et de l'anémie périopéra- Il en va de même pour les analgésiques morphiniques
toires, qui doivent donc être optimisées pour autoriser à libération prolongée (Skénan®, oxycodone) ; en effet,
une récupération rapide après chirurgie (RRAC), voire en cas d'arrêt de ceux-ci en préopératoire, on peut
une prise en charge ambulatoire. observer un rebond douloureux et une difficulté d'ob-
Il existe divers protocoles. Ceux qui suivent sont tention d'une analgésie satisfaisante en postopératoire.
le reflet de notre activité quotidienne dans le service Concernant les stratégies d'épargne sanguine, celles-ci
d'orthopédie du CHU de Rennes. Ils n'ont pas forcé- dépendent du taux d'hémoglobine préopératoire :
ment prétention à référence. Ils peuvent être discutés, • entre 11 et 13 g/dl, il est conseillé d'administrer de
améliorés et sont d'ailleurs régulièrement modifiés en l'érythropoïétine ou EPO (EPREX®) sous-cutanée, une
fonction de la littérature. injection par semaine dans les 3 semaines précédant
Le lecteur trouvera facilement dans la littérature l'intervention ; un délai important est donc nécessaire ;
internationale les nombreux travaux se rapportant ne faire qu'une ou deux injections n'a pas d'utilité.
aux protocoles décrits dans ce texte. Une quatrième injection en postopératoire immédiat
peut être réalisée. L'administration d'EPO se fait de
En préopératoire façon concomitante avec du fer per os (Fumafer®,
Tardyféron®, etc.) ;
Conformément à ce qui est admis dans la littérature, • en dessous de 13 g/dl chez l'homme et 12 g/dl chez la
nous ne donnons plus de prémédication anxiolytique femme, un bilan martial est systématiquement demandé
systématique, souvent peu utile et délétère pour une à la recherche d'une carence en fer. En cas d'anémie
réhabilitation précoce. Ces agents sont en effet pour- avec carence martiale documentée biologiquement,
voyeurs de troubles de l'équilibre, ainsi que de troubles une injection de fer IV (Ferinject®) peut être proposée,
de déglutition et d'effets sédatifs incompatibles avec en association ou non avec l'EPO. L'injection se fait
une sortie précoce. exclusivement à l'hôpital, en raison d'un faible risque
Nous ne donnons également pas de prémédica- d'anaphylaxie imputé à la substance ;
tion particulière à visée antalgique, comme certaines • en cas d'anémie marquée non liée à une carence
équipes qui prémédiquent avec des anti-inflammatoires martiale, il faut rechercher une cause inflammatoire,
non stéroïdiens (AINS ; standard ou anti-COX-2). un saignement occulte (digestif) ou une insuffisance
Nous les administrons en effet en peropératoire, sauf rénale avant tout.
contre-indication.
La prémédication avec certains antalgiques à visée En peropératoire
neuropathique, comme la gabapentine (Neurontin®)
et la prégabaline (Lyrica®), n'est pas recommandée à Dans notre centre, l'anesthésie générale (AG) est quasi
titre systématique, et nous la donnons uniquement si exclusivement pratiquée. Une rachianesthésie peut aussi
le patient possède déjà ce traitement au long cours. Les être proposée, avec injection de morphine intrathécale

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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306 T. Dessieux, A. ion

pour prolonger l'analgésie postopératoire. Le choix de incisé, et les études n'ont pas montré de supériorité par
l'AG est pour nous un choix d'équipe, car nous pensons rapport à une simple PCA (patient controlled analge-
que le confort du patient est meilleur durant l'interven- sia) morphine en postopératoire. Le bloc iliofascial est
tion. Des molécules à élimination rapide sont parfaite- proposé par certains mais ne nous paraît pas néces-
ment compatibles avec une récupération et une sortie saire, dans la mesure où le contrôle de la douleur par
précoces. L'AG évite certains désagréments liés à la l'analgésie multimodale et les infiltrations locales suf-
rachianesthésie comme la rétention aiguë d'urine pou- fisent à contrôler la douleur chez nos patients.
vant retarder la sortie de salle de réveil. Les infiltrations d'anesthésique local par le chirurgien
L'AG est de protocole standard, utilisant des molé- en peropératoire se sont montrées particulièrement effi-
cules d'élimination rapide. caces pour l'analgésie postopératoire dans notre expé-
• Le recours à une curarisation correcte est plus sou- rience. C'est une infiltration à gros volume (de l'ordre
vent de mise pour les interventions par voie antérieure de 100 ml) d'anesthésiques locaux de longue durée
ou mini-invasive, qui nécessitent un relâchement mus- d'action (ropivacaïne) des différents plans tendineux,
culaire plus important. Dans ces cas, nous utilisons un musculaires, articulaires, cutanés, avec des volumes
curare pouvant être immédiatement antagonisé (rocu- déterminés pour chaque compartiment. L'adrénaline
ronium- antagonisation par sugammadex) permettant est utilisée pour les injections profondes (pas dans la
le réveil et l'extubation du patient en salle d'opération sous-peau) pour prolonger l'action des anesthésiques,
dès la fin de l'intervention. et certaines équipes ajoutent des anti-inflammatoires,
• En ambulatoire ou en cas de RRAC, un morphinique voire des morphiniques, mais sans preuve d'efficacité
d'élimination rapide (rémifentanyl) est de rigueur. démontrée. Cela permet une analgésie efficace pour les
• Dans le même ordre d'idée, l'hypnotique et le 12 à 24 heures postopératoires.
morphinique utilisés sont administrés selon le mode Concernant l'épargne sanguine, nous n'utilisons pas
AIVOC (anesthésie intraveineuse à objectif de concen- de récupération peropératoire du sang, notamment
tration), qui permet de réveiller plus rapidement le en raison du système de lavage chirurgical à l'aide de
patient sans effets résiduels de l'anesthésie et de le sérum pulsé qui rend impropre le traitement du sang
mettre rapidement debout. Par exemple, les patients récupéré.
opérés de PTH en ambulatoire ont leur premier lever Nous administrons en début et en fin d'intervention
en salle de réveil avec le kinésithérapeute. de l'acide tranexamique (Exacyl®), poursuivi pen-
• Un monitorage de la profondeur de l'anesthésie dant 24 heures en postopératoire. Ce produit permet
(par le biais de l'index bispectral [BIS] de l'électro- de diminuer le saignement local, et certaines équipes
encéphalogramme [EEG]) et de l'analgésie peropéra- l'administrent même en topique (dans l'articulation)
toire (analgesia nociception index [ANI]) nous permet isolément ou en association avec la voie systémique.
de réduire les doses d'anesthésiques au minimum. Les besoins transfusionnels, grâce aux stratégies
• L'analgésie est multimodale, assurée par des antal- d'épargne sanguine et aux progrès chirurgicaux, ont
giques non morphiniques : paracétamol, néfopam (qui diminué ces dernières années. Le seuil transfusionnel
réduit les besoins morphiniques sans effet secondaires pour un patient tout venant est de 7 g/dl. En cas de
majeurs) et kétoprofène (les AINS ont en effet une pathologie associée (coronarienne, insuffisance respi-
action antalgique synergique sans augmentation du ratoire ou rénale, etc.), ce seuil remonte à 10 g/dl. Ce
saignement). seuil n'est pas figé et est parfois laissé à la discrétion

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• Une dose de dexaméthasone (8 mg) est systémati- du praticien : en cas d'instabilité hémodynamique chez
quement administrée en IV en début d'intervention, un patient qui saigne, on pourra décider d'une transfu-
à visée analgésique postopératoire, de réduction des sion pour des seuils supérieurs.
morphiniques et de réduction de l'incidence des nau- De plus, il faut savoir que le saignement et la fibri-
sées et vomissements ; elle n'a pas d'incidence néfaste nolyse vont perdurer en postopératoire, ce qui nous
sur la cicatrisation. Elle permet également un allon- fait poursuivre en postopératoire immédiat les mêmes
gement de la durée d'action des anesthésiques locaux stratégies d'épargne sanguine (supplémentation en fer
utilisés en infiltration. par voie IV, acide tranexamique par voie systémique
L'anesthésie locorégionale (ALR) n'est plus utili- pendant les premières 24 heures).
sée dans notre service. Auparavant, le bloc du plexus Les médecins rééducateurs et les centres de conva-
lombaire procurait une analgésie excellente, mais ses lescence ont fait remarquer que la réhabilitation pos-
complications potentiellement graves nous l'ont fait topératoire, notamment chez les personnes âgées, était
abandonner. Le bloc du nerf crural échoguidé, pratiqué corrélée au seuil d'hémoglobine. Ainsi, pour eux, un
un temps, ne couvrait qu'insuffisamment le territoire taux de 10 à 12 g/dl pourrait être souhaitable. Mais la
Gestion périopératoire de la prothèse totale de hanche au CH de Rennes 307

transfusion n'étant pas anodine et liée à de nombreux Pour les chirurgies non ambulatoires, ou avec douleurs
facteurs de morbimortalité, le débat n'est pas clos. postopératoires importantes attendues, une PCA de
L'autotransfusion n'est plus recommandée comme morphine est prescrite, avec un relais par morphine
stratégie d'épargne sanguine, car elle n'est pas contri- orale secondaire à dose adaptée.
butive et elle n'est pas dénuée de risques (risque Le froid a un effet adjuvant, sous forme d'attelles
bactérien, risque d'erreur transfusionnelle). Elle est réfrigérantes en association avec une compression
maintenant réservée aux groupes sanguins rares. (Game Ready™) en respectant scrupuleusement les
durées d'utilisation recommandées.
En postopératoire L'ensemble des traitements intraveineux est relayé
de façon précoce par leur forme per os.
L'analgésie multimodale est la référence.
Les antalgiques classiques sont poursuivis par voie
orale : paracétamol, AINS, néfopam. Conclusion
Les AINS sont donnés en fonction des antécédents
d'insuffisance rénale et d'ulcère gastrique récent. Le L'application à la chirurgie de prothèse de hanche des
kétoprofène est administré systématiquement (sauf principes généraux utilisés en réhabilitation rapide a
contre-indication) pour une courte durée (48 heures permis de réduire considérablement les durées d'hospi-
au plus). talisation, permettant même la sortie en ambulatoire.
Les AINS type COX-2 sont donnés par certaines La gestion périopératoire du patient doit être globale
équipes. Ces molécules sont réputées pour avoir moins et multidisciplinaire et repose sur des principes fon-
de répercussions gastriques et rénales, mais ont été damentaux : protocole d'épargne sanguine, éducation
incriminées dans la survenue d'événements cardiovas- du patient, adaptation des techniques et médicaments
culaires (même si les études concernées ont été remises anesthésiques permettant un réveil rapide et de bonne
en cause secondairement). qualité.
Une titration de morphine est réalisée en salle de La prévention de l'anémie, l'analgésie multimodale
réveil en fonction d'une échelle numérique (supérieure avec épargne morphinique, la prévention des nausées
à 3, 10 étant la douleur maximale), suivie d'une pres- vomissements sont les principaux enjeux de la réhabi-
cription de morphine per os délivrée en cas de nécessité. litation rapide.
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309

Réhabilitation améliorée encadrant


la chirurgie prothétique
de la hanche
Pour un retour rapide au domicile
A. LE VIGUELLOUX, N. BONIN

Introduction à l'esprit que tous les patients et toutes les interven-


tions ne peuvent prétendre à l'ambulatoire. La part
Les récents « buzz » médiatiques, suite à la réalisation de chirurgie ambulatoire en France est en constante
de prothèses totales de hanche (PTH) en ambulatoire, augmentation : selon les chiffres de l'Agence tech-
n'ont pu que faire réagir la communauté médicale sur nique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH),
le bien-fondé de telles procédures, et faire suspecter un elle est passée, en chirurgie orthopédique, de 35,1 %
« coup médiatique ». en 2011 à 40,7 % en 2015. Pour autant, la prothèse
Provenant des pays nordiques et anglo-saxons, la totale de hanche (PTH) en ambulatoire en 2015 ne
mouvance « rapid recovery » est en réalité un profond représentait que 0,3 % de toutes les implantations
travail de remise en question de tout ce que l'on a appris prothétiques au niveau national, malgré les bons résul-
au cours de décennies de pratique chirurgicale : faut-il tats de l'ambulatoire dans cette indication [5–7].
hospitaliser un patient la veille de l'intervention ? Faut-il La mise en place de critères d'éligibilité permet de
laisser un drain de Redon ? Comment lever le patient cibler les patients qui peuvent prétendre à une sor-
précocement et mieux prendre en charge sa douleur ? Ces tie rapide de la structure de santé. Ces critères sont
remises en question nécessitent un engagement et une primordiaux lors de la prise en charge en ambula-
collaboration étroite de tous les intervenants (chirurgien, toire, et le patient doit être orienté dès la program-
anesthésistes, cadres, infirmiers, kinésithérapeutes, etc.) mation de l'intervention, au cours de la consultation
pour supprimer les temps inutiles d'une hospitalisation chirurgicale, avec confirmation lors de la consultation
classique et ajouter les détails qui permettent une récu- d'anesthésie.
pération plus rapide en replaçant le patient au centre du Sont éligibles pour une sortie précoce ou une prise en
soin [1]. Elles permettent d'optimiser la prise en charge charge ambulatoire les patients :
et d'apporter une réelle valeur ajoutée à la chirurgie tout • classés ASA 1 à 3 ;
en diminuant les coûts liés aux soins. Il s'agit d'une évo- • dont l'état général permet d'envisager un lever et
lution inéluctable de la santé. une mobilisation précoces, sans limite d'âge [8] ;
Nous aborderons dans ce chapitre les différents • dont le domicile est adapté (accès aux soins, dis-
aspects de la réhabilitation améliorée après chirurgie tance, confort, salubrité) ;
(RAAC), en gardant à l'esprit que la chirurgie ambu- • pouvant être entourés lors des premiers jours du
latoire n'est que la forme la plus aboutie de cette prise retour à domicile ;
en charge [2–4]. • acceptant d'être soignés selon les principes de la
réhabilitation améliorée après les explications par le
Patients éligibles chirurgien et l'anesthésiste.

Critères d'éligibilité Critères de non-éligibilité


La RAAC dans sa globalité peut être appliquée à Après s'être assuré que le patient pouvait être éligible
chaque patient et chaque intervention, avec pour à une sortie rapide, il reste encore à s'assurer qu'il n'y
objectif d'améliorer leur récupération, en gardant a pas de contre-indication :

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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310 A. Le Vigue oux, N. Bo i

• impossibilité de contacter son médecin ou le service Enfin, une prescription de rééducation préopératoire
hospitalier en cas de besoin ; participe à la RAAC, en enseignant l'utilisation des
• comorbidités associées sévères ou mal équilibrées cannes en terrain plat et dans les escaliers. Elle permet
(insuffisance cardiaque sévère, antécédents d'accident au patient d'anticiper ses rendez-vous de rééducation
vasculaire cérébral, diabète, immunodépression, etc.) ; postopératoire.
• autre critère médical de contre-indication identifié Cette préparation préopératoire est primordiale : elle
par le médecin anesthésiste. a pour objectif de réduire l'angoisse liée à l'inconnu.
Lorsque l'on a défini qu'un patient était bien éligible, Le patient sait désormais parfaitement comment vont
la RAAC se joue comme une valse à trois temps : pré- se passer son intervention et ses suites. Il a pu orga-
paration à l'opération, puis modification de nos pra- niser tout ce dont il aura besoin lors de son retour à
tiques le jour de l'intervention, et enfin suivi adapté à domicile [9].
la sortie du bloc opératoire. La veille de l'opération, le patient doit être appelé à
domicile pour les dernières vérifications, le rappel des
Organisation préopératoire consignes préopératoires, des documents à apporter,
et pour l'informer de son heure d'arrivée à l'hôpital.
Dès la programmation de l'intervention au cours de la
consultation, le praticien doit délivrer une information Organisation peropératoire
de qualité. Selon l'âge et la compréhension du patient,
il est parfois souhaitable de demander une personne La structure de soins doit être adaptée : pour obtenir
accompagnante, qui deviendra l'« aidant du patient » les autorisations légales délivrées par l'Agence régio-
tout au long de son parcours chirurgical. Le chirur- nale de santé (ARS), l'établissement doit être organisé
gien doit expliquer au patient, et à son aidant, l'inter- pour un parcours ambulatoire dédié en parallèle au
vention, ses suites, le principe du lever et du retour parcours de soin standard, avec des prestations équi-
précoces. Il doit être clair et concis, et répondre avec valentes (article D.6124-301 du Code de la santé
précision aux questions posées, notamment en cas publique). Le service d'ambulatoire peut être intégré
d'inquiétude sur une hospitalisation courte ou ambu- dans un service d'hospitalisation ou être autonome,
latoire. Ces informations doivent être orales mais avec des locaux, voire un bloc opératoire, dédiés.
également écrites dans un dossier de soins complet L'hospitalisation la veille de l'intervention doit deve-
à l'intention du patient. Ce dossier doit comprendre nir l'exception. Elle n'est indiquée que chez les patients
les différentes étapes de la prise en charge, depuis la présentant des pathologies associées qui nécessitent un
consultation d'anesthésie jusqu'au retour à domicile, bilan et une surveillance péri-opératoires. Ces patients
voire jusqu'à la consultation de contrôle. sortent donc des critères d'éligibilité. Tous les autres
La collaboration avec les équipes d'anesthésie doit patients arrivent au bloc opératoire le jour de l'inter-
être parfaite pour que le message reste identique lors de vention, ce qui diminue l'anxiété liée à l'attente en
la consultation préanesthésique. Plus le patient entend milieu hospitalier. Au mieux, ils sont appelés la veille
les mêmes explications par les différents intervenants, pour être hospitalisés 1 à 2 heures avant leur interven-
plus il est rassuré, ce qui renforce son adhésion à une tion. Cela nécessite une organisation spécifique de la
hospitalisation courte. Des informations contradic- structure de soins, qui peut aller jusqu'à l'accueil du
toires engendrent un doute, délétère pour une bonne patient debout au bloc opératoire (figure 32.1).

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prise en charge. Le patient doit également entendre Le patient est à jeun depuis minuit mais le « jeûne
que toutes les mesures nécessaires seront prises pour moderne  » recommande la prise de liquides clairs
soulager sa douleur, à l'hôpital comme à domicile, et jusqu'à 2 heures avant l'intervention [10, 11].
que le retour à domicile n'est pas un arrêt de la prise Une prémédication antalgique de paracétamol est
en charge. La consultation anesthésique préopératoire systématiquement administrée, ce qui diminue l'utili-
permet également de valider les critères d'éligibilité du sation postopératoire d'antalgiques [12]. En revanche,
patient à une hospitalisation courte ou ambulatoire. la prémédication anxiolytique est à éviter. Si l'état
Dans les structures les mieux préparées, une infir- d'anxiété du patient la rend nécessaire, elle ne doit pas
mière peut rencontrer les patients pour répéter le mes- être sédative afin d'autoriser un réveil plus rapide.
sage et répondre aux dernières questions. Elle peut Les nausées et vomissements ralentissent la récu-
vérifier que les prescriptions indispensables (ordon- pération du patient. Elles sont la deuxième cause
nances de béquilles, d'antalgiques, d'attelle réfrigé- d'échec des prises en charge ambulatoires [13, 14].
rante, etc.) ont été remises et que le patient a déjà le Une bonne prise en charge de la douleur avec épargne
nécessaire à domicile. morphinique et l'utilisation d'antiémétiques de type
Réhabilitation améliorée encadrant la chirurgie prothétique de la hanche 311

A B

C
Figure 32.1. Accueil du patient debout.
A. Vestiaires. B. Salon d'attente. C. Accompagnement du patient dans le bloc opératoire.

dropéridol associés à de la dexaméthasone en systé- est cruciale. Nous recommandons l'utilisation d'anesthé-
matique permettent de diminuer leur survenue [15]. siques locaux pour infiltrer les tissus péri-articulaires lors
La prise en charge des pertes hémorragiques est éga- de l'intervention. Cela diminue le risque de sidération
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lement indispensable. Elle passe par une gestion hémo- musculaire et de chute postopératoire par rapport aux
dynamique maîtrisée avec comme objectif un équilibre blocs plexiques, dont la supériorité n'a pas été démon-
tensionnel entre 100 et 120 mmHg de pression arté- trée [17]. De nombreux protocoles d'infiltration existent.
rielle systolique. L'utilisation d'acide tranexamique, L'adjonction d'adrénaline et/ou d'anti-inflammatoires
quasi systématique, limite le risque de saignement non stéroïdiens (AINS) à l'anesthésique local n'a pas fait
peropératoire et le risque d'hématome postopératoire, la preuve de sa supériorité ; l'adrénaline expose au risque
sans augmenter le risque thrombo-embolique [16]. théorique de nécrose cutanée.
Bien entendu, l'hémostase chirurgicale doit être parti- Le drainage chirurgical n'est pas recommandé : il favo-
culièrement soigneuse. rise le saignement, le risque de transfusion et d'infection
Les techniques chirurgicales ont en effet leur impor- sans diminuer le risque d'hématome postopératoire
tance pour la récupération postopératoire, avec l'amélio- [18–20]. De plus, le drain retarde la récupération en rai-
ration des voies d'abord notamment. Au-delà des conflits son de la gêne à la mobilisation du patient qu'il procure.
partisans, la diminution de l'« agression chirurgicale » par Enfin, le pansement a également son importance.
la diminution de l'incision cutanée et, dans la mesure du L'utilisation d'un pansement hydrocolloïde et polyu-
possible, par le respect des structures musculotendineuses réthane, par exemple, diminue la fréquence des soins
312 A. Le Vigue oux, N. Bo i

en étant laissé plus longtemps, et augmente le confort


du patient en lui permettant de prendre des douches
et de s'habiller immédiatement (figure 32.2). L'une
des priorités de la RAAC est en effet de supprimer la
sensation de dépendance du patient en lui redonnant
précocement son autonomie.

Logistique postopératoire
Dans le service
La prise en charge de la douleur en postopératoire doit
se faire avec les plus faibles doses possibles de morphi-
niques. Le Nefopam® réduit la consommation de mor-
phine et a un effet synergique avec le paracétamol. Les
AINS diminuent également le recours à la morphine,
ainsi que les bolus de kétamine et de dexaméthasone
[21–24].
Les attelles de cryothérapie, largement utilisées
pour les genoux, sont également disponibles pour les
hanches. Elles sont malheureusement d'application
plus difficile, sont probablement moins efficaces, et
s'opposent à la récupération de l'autonomie. Elles ne
semblent donc utiles qu'en salle de réveil et l'applica-
tion de glace est à renouveler dans le service.
La reprise des boissons est désormais autorisée
dès le retour du bloc opératoire. L'alimentation est
reprise dans l'heure suivante, en l'absence de nausées Figure 32.3. Premier lever quelques heures après la chirurgie.
ou de vomissements. Cette reprise précoce améliore le
confort des patients, diminue la consommation d'an-
ce premier lever va surprendre le patient tout en lui
talgiques et l'insulinorésistance [11].
donnant confiance. Il lui montre que sa prothèse est
Le premier lever ne nécessite pas d'avoir repris l'ali-
« bien en place », et sa hanche solide et fonctionnelle.
mentation et doit être effectué précocement avec l'aide
Enfin, dans le service comme au bloc opératoire, les
du kinésithérapeute (figure 32.3). Généralement réa-
équipes doivent être formées pour délivrer au patient
lisé sans douleur grâce à l'infiltration peropératoire,
le même message : la chirurgie et ses suites doivent
se dérouler comme l'information que tout le monde
délivre. Cela renforce le sentiment de sécurité en ne
laissant pas de place au doute.

Le retour à domicile © 2017, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Même lors d'une procédure correctement réalisée, la


décision du départ revient au patient. Il est en confiance
car tout se passe comme on le lui a dit et répété. Il
connaît la suite et sait qu'il doit monter et descendre
les escaliers pour être autorisé à rentrer, ce qui va le
motiver (figure 32.4). C'est alors au chirurgien d'effec-
tuer le contrôle final pour confirmer la sortie, selon
les critères établis par le Groupe francophone de réha-
bilitation améliorée après chirurgie (GRACE) [25] :
douleur contrôlée, alimentation solide tolérée, mobi-
lisation autonome ou identique à l'état préopératoire,
Figure 32.2. Pansement hydrocolloïde et polyuréthane. absence de signes infectieux. Ces critères nécessitent
Réhabilitation améliorée encadrant la chirurgie prothétique de la hanche 313

• un suivi médical connecté, par Internet, ou par appli-


cation smartphone [27]. Ces applications, de plus en
plus perfectionnées, tracent les réponses des patients et
renvoient des scores à l'équipe de soins, tout en don-
nant des conseils au patient selon les réponses qu'il a
cochées. En cas de réponses considérées comme anor-
males, elles créent une alarme pour l'équipe hospita-
lière ou le chirurgien en charge du patient.
La traçabilité du suivi à domicile est aussi importante
que la traçabilité de l'hospitalisation et sert de preuve
médico-légale de la surveillance postopératoire du patient.
Elle permet également le retour de scores de douleur et de
satisfaction pour que l'équipe de soins garde un œil sur ce
type de prise en charge et les points à améliorer.
Enfin, il ne faut pas oublier l'infirmière de ville, le
kinésithérapeute et le médecin traitant qui sont un lien
direct entre le patient et le chirurgien ou le centre de
soins. Ils doivent, eux aussi, disposer d'une informa-
tion écrite, complète et à jour sur le protocole RAAC,
pour assurer au mieux la coordination des soins à
domicile. On peut à cet égard souligner l'intérêt du
service de retour à domicile des patients hospitali-
Figure 32.4. Réalisation des escaliers en sécurité, passeport
sés Prado, qui a été initié par l'Assurance maladie en
pour la sortie.
2010, pour anticiper les besoins du patient liés à son
retour à domicile et fluidifier le parcours hôpital-ville.
d'être validés et tracés, sans perdre de vue que la seule
personne responsable de la sortie du patient et de son
suivi est le chirurgien.
Lors du retour à domicile, le patient sait comment
Conclusion
se passe une convalescence normale, et ne doit s'aler- • La réhabilitation améliorée après chirurgie, ou
ter qu'en cas de divergence de son parcours avec celui RAAC, est aujourd'hui devenue le gold standard dans
prévu. La prise en charge de la douleur reste la prin- notre pratique orthopédique.
cipale difficulté, et les différents antalgiques prescrits • Elle est reconnue comme gage de qualité des soins par
lui sont de nouveau expliqués pour qu'ils soient bien les patients et les tutelles, qui récompensent les établisse-
utilisés. Il connaît les signes des principales complica- ments pratiquant la RAAC par des labels d'excellence.
tions, dispose d'une fiche informative, avec les situa- • Sans perdre en qualité de soins, la RAAC permet la
tions qui doivent l'alerter et des numéros pour joindre diminution des dépenses de santé par la réduction des
en permanence un correspondant. En cas de nécessité, durées moyennes de séjour (DMS) (figure 32.5).
l'établissement de santé doit permettre la réadmission • Ses avantages en termes de récupération sont indé-
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d'un patient à n'importe quelle heure [26]. niables, avec une diminution significative de la morbi-
L'établissement de santé doit avoir mis en place une mortalité postopératoire [28].
infirmière coordinatrice de la RAAC, formée spécifi- • Ses grands principes sont :
quement pour l'appel du lendemain. Son objectif est – une information complète, précise et répétée de la
de rassurer le patient, de s'assurer que tout se passe totalité du parcours de soins ;
bien, et de redonner des conseils de prise en charge. – un timing précis de chaque étape du soin ;
Cela permet de tenir informé le chirurgien, de l'aler- – une prise en charge multimodale et individualisée
ter et de tracer le suivi en cas d'anomalie. Depuis peu, de la douleur ;
d'autres techniques de surveillance du patient ont été – une démédicalisation et une autonomisation
mises en place : précoces ;
• des équipes d'infirmières dédiées qui viennent déli- – une préparation en amont du retour à domicile ;
vrer au patient les antalgiques, les anticoagulants et – des moyens de surveillance adaptés à domicile.
s'occuper des soins immédiats. Cette possibilité pose le • La satisfaction du chirurgien et la surprise des
problème du coût et de sa prise en charge, non résolu à patients de marcher sans douleur le jour de leur inter-
ce jour ; vention restent le moteur de cette prise en charge [29].
314 A. Le Vigue oux, N. Bo i

DMS comparative
10,00

9,00 8,43
8,13
7,78
8,00 7,43
6,74
7,00 6,31
6,04
5,71
6,00
5,02
DmS 5,00 PTH DMS Nationale
en jours 4,30
PTH DMS CSV
4,00
3,25
3,00
2,04 1,93
2,00

1,00

0,00
2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016

Figure 32.5. Évolution des durées moyennes de séjour (DMS) nationales et des DMS de la clinique de la sauvegarde (CSV ; proto-
coles RAAC) dans la chirurgie de PTH sur coxarthrose au cours des six dernières années.

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317

Faut-il rééduquer les patients


après arthroplastie totale
de hanche de première intention ?
P. MERTL, B. BENAZECH, M. CHELLI

Introduction Méthode de recherche


L'arthroplastie totale de hanche est une des interven- Nous avons réalisé une recherche informatique sur les
tions les plus courantes en chirurgie orthopédique. bases de données Medline® et Cochrane.
En 2015, plus de 150 000 prothèses totales de hanche Toutes les combinaisons de mots clés, « randomised »
(PTH  ; NEKA020 et NEKA014) ont été réalisées ou « randomized », « arthroplasty » ou « replacement »,
en France [1]. Le nombre croissant d'interventions et l'un des termes suivants : « physiotherapy » ou « reha-
(83 000 en 2005 pour les mêmes codes) représente un bilitation » ont été testés. Les références citées dans les
coût croissant pour la société, qu'il s'agisse des frais articles sélectionnés ont également été explorées. Parmi
liés à l'intervention, à l'hospitalisation ou aux soins les résultats, toutes les études prospectives contrôlées,
post-hospitaliers. randomisées ont été analysées. Le double aveugle n'était
L'hospitalisation des patients représente la première pas une condition indispensable mais influait positive-
part de dépenses (3,5 %) des « épisodes hospitaliers ment l'évaluation de la qualité méthodologique.
ponctuels » (hors maladies chroniques), devant les Il s'agissait dans tous les cas d'arthroplasties de
opérations sur le cristallin (3,4 %) [2]. La Haute auto- hanche de première intention pour arthrose primitive
rité de santé (HAS) recommande pour les PTH un ou post-traumatique ou pour rhumatisme inflamma-
maximum de 15 séances postopératoires sans accord toire (fractures exclues).
préalable [3]. Devant les besoins grandissants et un Dans tous les cas, les articles sélectionnés devaient
recours souvent systématique à la rééducation après comparer deux types de prise en charge : rééducation
PTH, peut-on envisager une diminution de ces coûts et par un médecin rééducateur ou un kinésithérapeute en
une optimisation de la prise en charge et de la récupé- centre ou à domicile et autorééducation à domicile,
ration de ces patients ? assistée ou non, ou un autre moyen de rééducation
Notre objectif est de répondre à plusieurs questions différent des deux premiers. Nous avons également
concernant la prise en charge post-hospitalière : retenu des articles comparant la rééducation par un
• L'autorééducation à domicile est-elle aussi efficace kinésithérapeute à aucune rééducation.
que de la rééducation par un kinésithérapeute, que ce
soit en centre ou en ville ?
• Quel est l'intérêt réel de la kinésithérapie sur la Résultats de la recherche
récupération clinique et sur la qualité de vie après une
PTH de première intention, quand on la compare à Sélection des études
une absence de rééducation ?
• Enfin, de nouvelles techniques de rééducation Les recherches électroniques et manuelles dans les réfé-
peuvent-elles être utilisées, afin de diminuer le coût de rences citées dans les articles ont permis d'identifier
la prise en charge et d'optimiser les résultats ? 1234 articles. Quatre-vingt-deux correspondaient au
Pour répondre à ces questions, nous avons fait une sujet d'intérêt. Nous n'avons pu retenir, selon les critères
revue systématique de la littérature, et sélectionné précédemment exposés, que 8 articles (figure 33.1). Les
exclusivement des essais randomisés. causes d'exclusion étaient les suivantes :

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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318 P. Mertl, B. Benazech, M. helli

1234 articles Les patients avaient au moment des études un âge


potentiellement identifiés moyen de 68 ans.
Ces 8 études retenues ont toutes étudié la réhabilita-
Études exclues, 1152 : tion au domicile par autorééducation.
– ne traitant pas du sujet Seul le groupe contrôle différait selon les publications :
(1135)
– non randomisées (15) • 5 études comparaient l'autorééducation à domicile
– résultats non pertinents par le patient à une rééducation en centre ou au cabi-
cliniquement (2)
net du kinésithérapeute ;
• 3 études comparaient l'autorééducation à domicile à
82 études extraites l'absence de prise en charge rééducative.
pour analyses
supplémentaires
Évaluation des études
74 études exclues :
– comparaison de deux méthodes Deux auteurs (B.B. et M.C.) ont indépendamment éva-
rééducatives par de
skinésithérapeutes (59 articles)
lué la qualité méthodologique des études sélectionnées.
– méta - analyses (5 articles) En cas de désaccord sur la sélection d'un article, il était
– seul le protocole était disponible entièrement analysé et revu par les deux auteurs puis
(2 articles)
– une études en cross-over
discuté de nouveau. Si aucun accord ne se dégageait,
– une étude comparait une un troisième auteur (P.M.) prenait la décision finale.
rééducation en centre à une
hospitalisation à domicile incluant
de la rééducation [7]
– une étude avec 14 jours xtraction des données
d'hospitalisation identique
– 5 articles intéressant uniquement Les données étaient extraites indépendamment par
une rééducation après prothèse
totale de genou deux auteurs en utilisant un formulaire créé pour l'oc-
casion, combinant les critères de qualité CONSORT
8 études incluses dans 2010 (Consolidated Standards of Reporting Trials),
la revue systématique les résultats principaux parmi les critères de qua-
lité précédents, les biais possibles de l'étude et les
Figure 33.1. Flow chart. conclusions cliniques pertinentes. Les données étaient
ensuite informatisées à l'aide du logiciel EasyMedStat®
(EasyMedStat.com, Neuilly-Sur-Seine, France).
• comparaison de deux méthodes rééducatives par des
kinésithérapeutes (59 articles) ;
• méta-analyses de revues systématiques de la littéra- Résultats de l'analyse
ture (5 articles) ; de la littérature
• études encore en cours [4, 5] dont seul le protocole
était disponible (2 articles) ; utorééducation versus rééducation
• comparaison de deux groupes après une hospitalisa-

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tion de 7 ou 14 jours, incluant une rééducation iden- L'autorééducation après PTH a été comparée à la réé-
tique pour les deux groupes [6] ; ducation dans 5 articles sur 8 sélectionnés pour un
• comparaison d'une rééducation en centre à une hos- total de 291 PTH. La qualité méthodologique a été
pitalisation à domicile incluant de la rééducation [7] ; jugée bonne pour trois d'entre eux et faible pour deux
• essai randomisé croisé (cross-over) ne comportant (voir tableau 33.1).
que 15 PTH et 12 prothèses totales de genou (PTG) [8] ; L'autorééducation des PTH consistait en une com-
• rééducation après PTG seulement (5 articles) [9–13]. binaison variable d'exercices répétés à domicile.
Les articles retenus sont résumés dans les L'éducation du patient était réalisée durant l'hospita-
tableaux 33.1 et 33.2. lisation ou à l'aide d'un livret explicatif. Pour 4 études
sur 5, la visite d'un kinésithérapeute au domicile était
Description des études prévue. Cette visite correspondait uniquement à un
contrôle du bon déroulement de l'autorééducation ;
Les 8 études incluses se déroulaient entre 1988 et 2014 elle était prévue seulement dans les deux premières
et ont toutes été publiées pendant la même période. semaines postopératoires. Cela correspondait à une ou
Elles réunissaient un total de 400 PTH implantées. deux visites selon les études. Seule une étude prévoyait
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Faut-il rééduquer les patients après arthroplastie totale de hanche de première intention ?
Tableau 33.1
Analyse méthodologique résumée des études sélectionnées
Auteur Année Nombre Résumé Description des Évaluation Flux des Valeurs Limites Généralisation Qualité globale
de patients structuré interventions en aveugle participants de base des résultats (selon les auteurs)
Galea [14] 2008 23 Oui Oui Non Non Oui Oui Oui Faible
Mahomed [15] 2008 234 Oui Oui Non Oui Oui Oui Oui Bonne
Mikkelsen [18] 2014 73 Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Bonne
Siggeirsdotir [16] 2005 50 Oui Oui Non Oui Non Oui Non Faible
Jan [20] 2004 53 Oui Oui Non Oui Oui Oui Oui Bonne
Johnsson [21] 1988 30 Non Oui Non Non Oui Oui Non Faible
Trudelle Jackson [17] 2004 28 Oui Oui Non Oui Oui Oui Oui Bonne
Unlu [19] 2007 26 Oui Oui Non Oui Oui Oui Oui Bonne
Total 400

319
320 P. Mertl, B. Benazech, M. helli

Tableau 33.2
Description des études retenues pour la revue systématique
Auteur Année Interventions groupe 1 Interventions groupe 2 Principaux résultats*
Pas de kinésithérapeute Avec kinésithérapeute/
standard
Galea [14] 2008 Autorééducation à domicile ; Rééducation en centre Δ WOMAC fonction : 177
guide illustré ; 1 à 2 visites 2 fois par semaine ; vs 193 (NS)
chez le kinésithérapeute pour adaptation progressive
adapter les exercices des exercices.
Mahomed [15] 2008 Retour à domicile avec Centre de rééducation WOMAC fonction : 71 vs
soins à la maison et un 72 (NS)
kinésithérapeute à domicile 3 mois
dans les 48 premières heures 76 vs 80 NS
12 mois
Mikkelsen [18] 2014 Exercice d'amélioration des Prise en charge 2 fois HOOS 10 semaines
amplitudes articulaires à faire par semaine dans par – Douleur : 86,3 vs 88,7
seul 2 fois par jour tous les un kinésithérapeute (NS)
jours avec des exercices à – Symptômes : 80,3 vs 82,9
faire à domicile (NS)
Siggeirsdotir [16] 2005 1 mois avant l'opération Protocole standard Score Oxford combiné :
éducation du patient, visite du du centre avec ou non – 21 vs 27 p < 0,05 2 mois
kinésithérapeute au domicile centre de rééducation – 22 vs 26 p < 0,05 4 mois
pendant les deux premières – 20 vs 27 p < 0,05 6 mois
semaines autant que nécessaire
Jan [20] 2004 Autorééducation, bilatérale Pas d'intervention Δ Score Harris hanche à
avec 30 minutes de marche, pas 12 semaines :
de supervision, mais mesure – haute compliance : 13,1 vs
de la compliance par carnet de 12,0 (NS)
suivi – basse compliance : 12,7 vs
12,0 (NS)
Johnsson [21] 1988 Autorééducation avec Pas d'intervention Pas de différence constatée
programme détaillé sur la force d'abduction,
l'extension et la flexion de
hanche
Trudelle-Jackson [17] 2004 Autorééducation avec exercice Rééducation normale Résultats sur HQ 12 :
à réaliser à domicile, contrôle à avec contrôle à 2, 4 et – pré-exercice : 21,0 (15-33)
2, 4 et 6 semaines 6 semaines vs 19,0 (13-31) (NS)
– post-exercice : 16,0 (12-
38) vs 17,5 (12-33) (NS)

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Unlu [19] 2007 Autorééducation. Programme Pas d'intervention Pas de mesure sur des score
avec exercice isométrique fonction ou de qualité de vie
et excentrique de hanche Δ Groupe 1 :
d'amélioration des amplitudes – mouvement : 30 vs 12 p
articulaires < 0,05
– cadence : 97,7 vs111 (NS)
Δ Groupe 2 :
– mouvement : 18 vs 19 (NS)
cadence : 87,0 vs 88,2 (NS)
* Les résultats sont présentés de la manière suivante : groupe 1 versus (vs) groupe 2 (p < 0,05 ou NS).
NS : non-significatif (p > 0,05) ; Δ : différence entre les valeurs de base et les valeurs au dernier recul ; WOMAC : Western-Ontario and
McMaster index.
Faut-il rééduquer les patients après arthroplastie totale de hanche de première intention ? 321

une visite toutes les 2 semaines pendant 6 semaines. À l'instar de ce qui peut être retrouvé dans la littéra-
Dans certaines études, une évaluation clinique lors de la ture pour les prothèses de genou [10, 22, 23], aucune
première semaine était également prévue. L'évaluation évaluation de la télérééducation ou de la stimulation
clinique était réalisée par les investigateurs des études, électrique neuromusculaire ou autre n'a pu être trou-
en grande majorité des médecins rééducateurs ou des vée pour les prothèses de hanche.
kinésithérapeutes rattachés au service de chirurgie.
L'autorééducation a été comparée à une rééducation
en centre [14, 15], à une rééducation standard en ville Analyse des résultats
[16, 17] ou à une rééducation intensive en ville [18]. L'autorééducation à domicile semble être au moins
• Trois études n'ont pas trouvé d'infériorité de l'auto- aussi efficace pour les PTH que la rééducation conven-
rééducation à domicile pour leur critère de jugement tionnelle en ville ou en centre d'après les résultats de
principal (leg extension power [18], WOMAC fonc- notre revue systématique. Elle nécessite cependant
tion, douleur et raideur [14], WOMAC total [15]). des attentions particulières pour s'assurer de la bonne
• Une étude [16] a retrouvé une différence significative compréhension et du bon déroulement de la prise en
pour l'Oxford Hip Score en faveur de l'autorééduca- charge :
tion à domicile à 2 et 6 mois postopératoires par rap- • une information et un entraînement à l'autoréédu-
port à la rééducation en ville ; cependant, les auteurs cation en préopératoire ;
n'ont pas comparé les résultats aux valeurs préopéra- • une ou plusieurs visites de contrôle par un
toires, qui étaient différentes dans les deux groupes. kinésithérapeute ;
• Un autre auteur [17] retrouvait une différence sta- • et un livret explicatif que le patient peut garder à
tistiquement significative entre les scores SF12 item domicile [14, 16].
Hip questionnaire pré- et postopératoire, et ce pour le En ce qui concerne l'absence complète de réédu-
groupe expérimental (correspondant au groupe auto- cation postopératoire, les résultats retrouvés ne per-
rééducation). En revanche, cette différence entre le mettent pas de la recommander après PTH.
pré- et le postopératoire n'était pas retrouvée dans le En ce qui concerne les nouvelles approches de réé-
groupe contrôle (voir tableau 33.2). ducation, notamment la téléréhabilitation, qui est lar-
gement évaluée pour les PTG, nous ne pouvons que
utorééducation versus absence déplorer l'absence de publication. Pourtant, du fait
de rééducation d'un faible coût lié à une combinaison de technologies
peu onéreuses, et de la participation humaine requise
Trois études comparaient l'autorééducation à aucune située à distance, elles permettraient d'éviter les frais
prise en charge spécifique. Deux d'entre elles ont été et les inconvénients liés aux transports des patients,
considérées comme bonnes méthodologiquement [19, et probablement de diminuer le nombre de séances
20] et une considérée faible [21]. nécessaires par une meilleure adhésion.
• Pour Jan et al. [20], les résultats étaient meilleurs
dans le groupe rééducation à domicile, tant pour les
scores fonctionnels que les scores de qualité de vie. omparaison à la littérature
Cependant, il existait une différence selon la compliance Une revue Cochrane de 2008 [24] concluait qu'il y
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des patients : l'amélioration des scores n'était statisti- avait un niveau élevé de preuve (silver-level evidence)
quement significative par rapport au groupe contrôle qu'une réhabilitation multidisciplinaire pouvait amé-
que dans le sous-groupe de patients très compliants. liorer les niveaux d'activité, sans cependant montrer
• Pour Johnson et Unlu [19, 21] la différence à long d'effet sur la fonction ou la mobilité après PTH.
terme n'était pas significative entre les deux groupes. Une revue systématique de la littérature, en 2013,
• Pour Unlu [19], la récupération des patients, même visait à déterminer l'efficacité de la rééducation
si elle était identique à 1 an, paraissait plus rapide conventionnelle avec un kinésithérapeute [25]. Pour
dans le groupe avec exercices à domicile et supervision ce faire, les auteurs ont sélectionné des études com-
rapprochée. parant l'autorééducation sous la supervision ou non
d'un kinésithérapeute à une rééducation standard ou
Utilisation d'autres moyens à aucune rééducation. Les auteurs concluaient que la
de rééducation rééducation permettait d'améliorer la force en abduc-
tion, la vitesse et la cadence de la marche, mais que
Malheureusement, dans notre revue systématique de cette rééducation était aussi efficace lorsqu'elle était
la littérature, aucun des articles retrouvés ne traitait pratiquée en ville, en centre ou à domicile sans assis-
de l'utilisation de nouvelles techniques de rééducation. tance (autorééducation).
322 P. Mertl, B. Benazech, M. helli

mplications pour la recherche Conclusion


Cette revue systématique met en évidence une tendance L'autorééducation après PTH paraît être au moins
à la non-infériorité de l'autorééducation à domicile. aussi efficace que la rééducation en ville avec un kiné-
Un nombre plus important d'essais randomisés et une sithérapeute. Elle suppose une aide extérieure, que ce
homogénéisation des critères de jugement permettraient soit par des visites chez le kinésithérapeute ou par un
de conduire une méta-analyse sérieuse. Des essais com- livret explicatif, ou une éducation du patient lors de
parant la rééducation en ville à une autorééducation l'hospitalisation. Elle est indiquée chez des patients
à domicile, avec des niveaux différents d'assistance capables de regagner leur domicile et d'y être auto-
(nombre de visites du kinésithérapeute différent par nomes avec au plus une aide technique. Les systèmes
exemple), seraient intéressants pour juger de l'aide exté- de stimulation électrique neuromusculaire ou de télé-
rieure requise pour un programme d'autorééducation et réhabilitation devraient pouvoir faire l'objet d'une
en préciser les indications. Des études sont actuellement évaluation ultérieure.
en cours, et la publication préalable de leur protocole
laisse espérer une bonne qualité méthodologique [4, 5].

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Faut-il rééduquer les patients après arthroplastie totale de hanche de première intention ? 323

replacement applied to patients with preoperative functio- following total knee replacement. J Arthroplasty 1998 ; 13(7) :
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325

Doit-on opérer les sujets jeunes ?


De quelle manière ?
J. CZEKAJ, M. OLLIVIER, J.-N. ARGENSON, S. PARRATTE

Introduction stress-shielding tout en procurant un ancrage durable


os-prothèse.
La prothèse totale de hanche (PTH), qualifiée d'« inter- L'anatomie du fémur proximal est fréquemment alté-
vention du siècle  », est devenue une intervention rée dans les arthroses secondaires des sujets jeunes [4,
chirurgicale courante, offrant une satisfaction posto- 5]. Il peut donc être difficile d'obtenir un bon ajustement
pératoire importante. Grâce aux progrès du dessin des de la tige à la métaphyse, un remplissage métaphysaire
implants, des matériaux et des techniques chirurgi- optimal, une bonne stabilité primaire et une compensa-
cales, la majorité des patients peuvent reprendre leurs tion exacte de leurs paramètres intra- et extramédullaires
activités de la vie quotidienne, leur vie professionnelle dans tous les cas. En effet, les altérations de l'anatomie
et leurs activités de loisir [1]. du fémur proximal intéressent non seulement la cavité
Chez les sujets jeunes, les pathologies de hanche intramédullaire, mais aussi les paramètres extramé-
responsables du handicap sont particulières. Avant dullaires, tels que l'angle céphalo-cervico-diaphysaire
50-55 ans, ce peuvent être des séquelles de maladies de la (CDD), l'offset, l'antéversion et l'angle d'hélitorsion [6].
petite enfance (maladie de Legg-Perthes-Calvé, luxation Le développement de tiges fémorales non cimentées
congénitale, séquelles d'épiphysiolyse), une ostéonécrose sur mesure conçues pour s'adapter parfaitement aux
aseptique de la tête fémorale, des affections rhumatis- paramètres intramédullaires et restaurer des para-
males (arthropathie chronique juvénile, spondylarthrite mètres extramédullaires satisfaisants s'est avéré utile
ankylosante), une synovite villonodulaire, certaines dans les coxarthroses secondaires des sujets jeunes, sur
arthroses rapidement évolutives d'origine indétermi- dysplasie [7] et luxation congénitale [8] notamment.
née, des séquelles traumatiques et enfin une arthrose Pour ces jeunes patients présentant une déformation
secondaire à un conflit fémoro-acétabulaire. Dans cette du fémur proximal et/ou une longue espérance de vie,
population, il faut s'attendre à une anatomie fémorale et les prothèses de hanche non cimentées sur mesure sont
acétabulaire perturbée avec souvent, dans le cadre des donc une alternative utile aux tiges cimentées et aux
ostéonécroses, des varus fémoraux et des rétroversions prothèses anatomiques non cimentées du marché. Elles
acétabulaires [2], et dans le cadre des dysplasies des réduisent les phénomènes de lyse proximale péripro-
antéversions fémorales et acétabulaires excessives [3]. thétique et procurent une stabilité primaire optimale,
Les particularités morphologiques et les attentes éle- grâce à leur dessin sur mesure qui assure un remplis-
vées de ce groupe des patients doivent être bien prises sage métaphysaire proximal.
en compte : La fixation sans ciment, sur laquelle nous revien-
• dans la stratégie chirurgicale, notamment pour le drons, est attractive dans cette population jeune et
choix des implants et des couples de frottement ; active. Le registre finlandais suggère que, chez les
• mais aussi dans la discussion thérapeutique, car la sujets jeunes, la durée de vie des implants fémoraux
satisfaction des jeunes patients est corrélée au carac- non cimentés est au moins aussi importante que celle
tère « raisonnable » de leurs attentes. des implants cimentés [9], mais qu'elle varie selon le
dessin de l'implant, les matériaux et le revêtement uti-
lisé [10, 11]. Quoi qu'il en soit, l'utilisation d'implants
Dessin d'une tige fémorale fémoraux non cimentés impose d'apporter un soin par-
optimale ticulier à la stabilité primaire de l'implant, prérequis
indispensable à la fixation à long terme de l'implant à
Dans une population jeune, la survie des implants est l'os par le biais de son ostéo-intégration, et cette sta-
une question fondamentale et, sur le versant fémoral, bilité primaire dépend en grande partie du remplissage
un implant optimal doit prévenir les phénomènes de métaphysaire proximal, donc de son dessin [12].

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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326 J. Czeka , M. Ollivier, J.-N. rge s , . Parratte

Les implants fémoraux dits « droits » diffèrent des des fémurs proximaux à l'anatomie altérée assure une
implants dits « anatomiques » par leur portion méta- transmission de forces similaire à celle de tiges fémo-
physaire proximale quadrangulaire et l'absence d'an- rales standard implantées dans des fémurs à l'anato-
téversion (imposée par la conception d'un implant mie normale.
« anatomique »). Recouverts d'hydroxyapatite (HA) En 2007 [8], nous avons montré l'intérêt d'une
dans leur portion proximale, leur survie à 15 ans peut tige fémorale adaptée à chaque anatomie fémorale
atteindre 99,4 % en prenant pour événement la révi- proximale (tige sur mesure) pour trouver le nécessaire
sion pour descellement aseptique, lorsque le remplis- équilibre entre le risque d'ostéopénie proximale des
sage métaphysaire est optimal [13]. prothèses ancrées distalement et le risque de descel-
En raison des grandes variations de l'anatomie lement précoce des tiges à ancrage proximal. Il exis-
du fémur proximal [14, 15], l'implantation de tiges tait une ostéolyse fémorale dans 3 % des cas de notre
fémorales «  standard  », comme celles actuellement étude [7] sans aucune migration, ce qui soutient favo-
disponibles sur le marché, peut rendre difficile le rem- rablement la comparaison avec les résultats d'autres
plissage optimal de la métaphyse fémorale proximale, études [4, 13, 21].
même en prenant en compte la diversité des dessins de Peu d'études rapportent la survie à long terme des
tiges parfois dites « anatomiques » [4]. tiges sans ciment chez les patients âgés de moins de
50 ans (tableau 34.1).
Fixation de l'implant fémoral • Dans notre expérience (sujets à risque : 76), la
survie à 20 ans était de 96,8 % (indice de confiance
Pour diminuer l'ostéolyse fémorale autour de la tige [IC] 95 % : 95,1–98,5) en prenant pour événement
chez les jeunes patients, l'utilisation de tiges non la reprise pour descellement fémoral aseptique, et de
cimentées est considérée comme une alternative depuis 77,7 % (IC 95 % : 72,4–83) en prenant pour événe-
les années 2000 [16]. ment la révision pour toute raison.
Cependant, une revue systématique de la littérature • McAuley et al. [22] ont rapporté une survie de 60 %
publiée fin 2010 [17] a estimé, dans les registres sué- à 15 ans dans une série de 488 PTH avec implant
dois et finlandais, le risque de révision dans les sous- fémoral non cimenté standard en chrome-cobalt à
groupes définis par le moyen de fixation et l'âge. Elle a revêtement poreux.
conclu que, chez les patients les plus jeunes et les plus • Muirhead-Allwood et al. [23] ont présenté les résul-
âgés, le risque de révision des implants cimentés était tats entre 10 et 17 ans de 112 composants fémoraux
inférieur à celui des implants non cimentés. En consi- non cimentés sur mesure conçus avec une assistance
dérant tous les implants, cimentés et non cimentés, le par ordinateur. Le score Harris Hip moyen s'était amé-
risque de révision était plus faible chez les patients âgés lioré de 42,4 (7 à 99) à 90,3 (38 à 100). Une révision
que chez les patients jeunes. Ces séries prenaient pour était due à une défaillance de la cupule acétabulaire,
événement la révision pour quelque raison que ce soit, mais aucune défaillance de la tige fémorale pour des-
sauf le registre suédois, qui ne prenait pour événement cellement aseptique n'était rapportée. La survie glo-
que la révision pour descellement aseptique. bale était de 97,3 % (IC 95 % : 95–99).
En 2002, Götze et al. [18] ont montré dans une • Akbar et al. [14] n'ont signalé aucun échec fémoral
étude in vitro qu'une tige sur mesure réduit l'impor- avec un implant sur mesure non cimenté à 14 ans de
tance des micromouvements dus aux sollicitations recul moyen dans une population de patients âgés de

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mécaniques. Ils ont comparé la micromobilité d'une moins de 40 ans.
tige sur mesure à la métaphyse élargie, conçue à • Des résultats encourageants de survie à 10 ans ont
partir d'une tomodensitométrie (TDM) du fémur, à également été rapportés chez des patients présentant
celle d'une tige Alloclassic® dans 7 paires de fémurs une arthrose secondaire à une luxation congénitale de
humains cadavériques, sous l'effet des mêmes forces. la hanche avec des implants fémoraux sur mesure non
Les micromouvements longitudinaux et rotationnels cimentés [8, 24].
de la tige sur mesure étaient moindres que ceux de la • Des niveaux élevés de satisfaction des patients,
tige Alloclassic® dans la région proximale. Cette étude d'amélioration des scores fonctionnels et l'absence de
justifie l'utilisation en pratique clinique d'une tige révision à 10 ans ont été constatés chez des patients
fémorale sur mesure dans les arthroplasties totales de ne présentant pas de déformation fémorale, opérés à
hanche sans ciment [19]. l'aide de tiges sur mesure non cimentées [12].
En 2003, Arabmotlagh et al. [20] ont montré que les • Aldinger et al. [25] ont rapporté une survie de la tige
tiges fémorales conçues sur mesure n'empêchent pas de 90 % à 20 ans dans une série de 154 PTH avec une
la résorption osseuse périprothétique. Cependant, ils tige fémorale droite en titane (Spotorno®) non cimen-
ont conclu que l'implantation de tiges sur mesure dans tée chez des patients de moins de 55 ans.
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Tableau 34.1
La survie des tiges sans ciment après PTH chez les patients jeunes
Survie 99/10 88/18 88/10 94,6/10 98/12,5 89/10 98,2/3 100/5 100/10 86/10 100/14 92/18,3 96,8/20
(%/ans) 60/15
DA tige 0% 1,3 % 0% 6% 0,9 % 7% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 2,5 % 1,3 %
fémorale

Doit-on opérer les sujets jeunes ? De quelle manière ?


Douleurs de 10 17 0,8 2 0 0 0 0 2,8
hanche (%)
HHS 92 89 98 88 91,5 92 90,3 96 80 95 71 87 80 94
moyen (54–100) (48–100) (62–100) (38–100) (55–100) (51–94) (76–100) (47–89) (42–100) (51–94) (48–100)
Suivi moyen 9,8 16 10 10 > 10 10,2 6,92 13 5 10,1 8 12 3 14 10,1 18
(ans) (8–11) (15–18) (8–13) (0–19) (10–17) (5–15) (4,9–14,1 (2–23) (10–16) (4–18) (1,6–26,7)
Àge moyen 47 52 51 38 39 37 (20–50) 40 46,2 61 32,8 51 22 36,5 35 37,5 43
(ans) (21–49) (24–68) (20–77) (16–50 (18–49) (16–50) (25–62) (22–75) (23–55) (21–71) (SD 7) (15–50) (22–40) (18–61) (20–50)
Nombre de 118 75 89 84 123 108 561 112 69 15 129 97 14 72 40 33
PTH
Année 2003 2008 2000 2004 2003 2000 2004 2010 2013 2014 2010 2015 2011 2009 2011 2017
Études Kim Reigstad Schramm Duffy Capello McLaughlin McAuley Muirhead– Patel Al– Santori Swarup Osagie Akbar Sewell Notre
et al. et al. et al. et al. et al. et al. [57] et al. Allwood et al. Khateeb et al. et al. et al. et al. et al. étude
[52] [53] [54] [55] [56] [22] et al. [23] [21] et al. [58] [59] [60] [15] [14] [61]

DA – descellement aseptique ; HHS – Harris Hip Score,

327
328 J. Czeka , M. Ollivier, J.-N. rge s , . Parratte

Considérations sur les couples à l'alumine. Ces nouvelles céramiques ont trouvé une
place chez le sujet jeune. L'insert est fixé dans une cupule
de frottement acétabulaire métallique. L'usure est pratiquement nulle,
inférieure à 0,0015 mm/an, et les particules sont par-
Métal-polyéthylène faitement tolérées. Il existe un risque de fracture qui est
Les prothèses de hanche avec tête métallique et cupule évalué à 3/10 000 et concerne essentiellement les têtes de
en polyéthylène donnent de bons résultats tels que diamètre 28 en configuration « col long ». Les fractures
ceux de Kerboull [26] en France, Callaghan [27] aux de l'insert sont rares et généralement en rapport avec
États-Unis et Wroblewski [28] en Angleterre. Avec son mauvais positionnement dans la cupule métallique.
un recul de 20 ans, ces auteurs ont rapporté 85 % de Les erreurs de positionnement, en particulier les cupules
résultats satisfaisants en prenant pour événement la trop verticales ou trop antéversées, sont associées à un
révision pour descellement. risque d'usure localisée et de bruit à type de grincement
Il existe un consensus pour admettre que les échecs lors de la mobilisation [33]. Ces problèmes mécaniques,
de ces prothèses sont en rapport avec l'usure du poly- qui sont souvent le fait d'une technique imparfaite, sont
éthylène qui entraîne une ostéolyse, puis un descelle- responsables de la majorité des échecs [34].
ment. Une corrélation positive a été retrouvée entre une Pour Kim et al. [35], l'arthroplastie non cimentée
activité plus élevée et l'usure, avec un taux de révision de la hanche avec couple de frottement céramique-
plus élevé dans le groupe des patients plus actifs [29]. céramique est néanmoins une option fiable chez les
Lübbeke et al. [30] ont ainsi démontré qu'un haut patients jeunes et actifs avec des attentes fonction-
niveau d'activité physique, évalué selon le score UCLA nelles et une espérance de vie élevées. Ils n'ont en
(UCLA 8–10), était associée à un risque 3 fois plus élevé effet observé aucun descellement et aucune migra-
d'ostéolyse fémorale qu'une activité physique modérée tion des implants sur les radiographies standard ou
(UCLA de 5–7). Dans le groupe avec UCLA ≥ 8 (11,5 % en TDM à 13 ans de recul moyen dans un groupe de
d'une série de 503 PTH), le taux d'ostéolyse était de 277 patients (334 hanches) âgés de moins de 50 ans
24 % à 5–10 ans de suivi. Pour Ollivier et al. [29], l'usure lors de l'implantation.
linéaire et le nombre de révisions étaient plus élevés chez
les sujets participant à des sports à haut impact.
Il est possible de diminuer ce risque d'usure par le
Métal-métal
choix de l'implant et en optimisant sa fabrication : C'est le premier couple de frottement qui a été utilisé
• le diamètre de la tête est essentiel pour l'usure [31], dans une arthroplastie totale de hanche (prothèse de
les têtes de petit diamètre entraînant moins d'usure McKee-Farrar). Ce couple a été abandonné du fait de
mais plus d'instabilité ; la fréquence des complications, et surtout des descelle-
• différents essais sur simulateur ont montré que ments précoces par grippage. Le renouveau du couple
l'épaisseur minimale de polyéthylène devait être de métal-métal s'est fait sous l'impulsion de l'école suisse
8 mm pour un implant cimenté et de 10 mm pour un et en particulier de Weber [36], qui avait constaté à
insert fixé dans cupule métallique ; plus de 20 ans de recul que certains patients avaient
• les modifications récentes des polyéthylènes par conservé leur prothèse à couple métal-métal. Cette
réticulation augmentent la cohésion des chaînes du constatation fut le principal fondement du dévelop-

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matériau, et ainsi augmentent sa résistance à l'usure. pement d'une articulation métal-métal de deuxième
De nombreuses études montrent une diminution de génération appelée Metasul®.
l'usure sans ostéolyse avec un recul supérieur à 10 ans. Les études in vitro et in vivo ont confirmé que l'usure
Un chapitre de ce livre est consacré à ces polyéthylènes du couple métal-métal est de 60 à 100 fois inférieure
hautement réticulés ; à celle du couple métal-polyéthylène, mais les parti-
• l'état de surface de la tête prothétique, contrô- cules de chrome et de cobalt libérées par le frottement
lable au microscope, joue aussi un rôle : un indice de métal-métal sont plus nombreuses et surtout plus
rugosité faible permet de limiter l'usure par abrasion. petites, ce qui explique leur dissémination, en particu-
L'usure avec une tête de 28 mm en céramique est équi- lier dans le sang. S'il n'existe pas d'étude démontrant
valente à celle d'une tête de 22,2 mm en métal [32]. un risque tératogène, des risques locaux tels que l'hy-
persensibilité retardée [37] et les pseudotumeurs ont
Céramique-céramique été décrits, essentiellement avec les prothèses « à grosse
tête », et ont stoppé l'utilisation à grande échelle de
Les nouvelles céramiques (céramique Delta®) arri- ces implants. Comme le couple céramique-céramique,
vées après 2010 sur le marché associent de la zircone le couple métal-métal est peu tolérant aux erreurs de
Doit-on opérer les sujets jeunes ? De quelle manière ? 329

pose avec un risque d'effets came source de « métal- Williams et al. [46] ont montré que la technique opé-
lose » conduisant à l'échec. ratoire, les habitudes du chirurgien ou le type d'im-
plant utilisé n'influencent pas de façon significative
Céramique-polyéthylène le niveau de la reprise des activités physiques après
l'arthroplastie.
Dans une méta-analyse récente, Wyles et al. [38] Orienter nos patients vers une reprise intense de leur
ont examiné les essais contrôlés randomisés compa- activité sportive est un sujet de controverse du fait
rant les résultats des PTH avec couple de frottement d'une potentielle influence adverse de cette activité
céramique-céramique à ceux des PTH avec couple de sur la survie des implants. La littérature est cependant
frottement céramique-polyéthylène hautement réticulé pauvre en études de qualité et le plus souvent fondée
chez les patients de moins de 65 ans lors de l'implan- sur des avis d'experts (tableau 34.2) [47–49] :
tation avec un recul minimal de 2 ans. Ils n'ont pas • les activités à faible impact sont permises par
démontré de différence de survie à court et moyen la quasi-totalité des praticiens ayant pris part au
terme entre les couples ainsi étudiés. sondage ;
Leurs résultats étaient similaires à ceux du registre • pour les activités à impact intermédiaire, leur atti-
australien, dans lequel les taux de révision à 10 ans tude est plus réservée. L'expérience dans la pratique
de recul étaient de 4,8 % et 5,1 % pour les couples de ces sports semble nécessaire pour pouvoir les
céramique-céramique et céramique-polyéthylène hau- continuer ;
tement réticulé respectivement [39]. • concernant les sports de haut impact, la majorité des
Chez les sujets jeunes et actifs, notre préférence va orthopédistes questionnés ne les autorisent pas.
actuellement au couple céramique-polyéthylène haute- Nous avons rapporté dans notre étude de 2012
ment réticulé ; en effet, ce couple est le plus tolérant en des résultats inquiétants chez les patients jeunes pra-
termes de positionnement des implants et procure une tiquant de façon régulière des sports à haut impact
usure minime à moyen terme qui devrait se confirmer avec un couple de frottement métal-polyéthylène
sur le long terme. [20]. À l'heure actuelle, il n'y a pas assez de preuves
objectives permettant d'autoriser ou d'interdire des
Double mobilité sports à impact haut ou intermédiaire. La tendance
est à l'augmentation de la pratique des activités à bas
L'utilisation d'implants double mobilité, bien que pro- impact aux dépens des sports à haut impact après
metteuse, n'a pas fait l'objet de publication de niveau PTH [50, 51].
de preuve suffisant pour être recommandée dans cette Concernant la question du délai entre l'intervention
population de sujets jeunes [40, 41]. et la reprise du sport (tableau 34.3), la plupart des pra-
ticiens s'accordent sur un délai minimal de 3 mois.
Reprise de l'activité physique
après PTH chez les sujets jeunes Conclusion
Les facteurs prédictifs de la reprise de l'activité phy- • Les sujets jeunes candidats à une PTH présentent
sique après PTH ont été étudiés. Le sexe masculin, des pathologies diverses, différentes de celles des sujets
plus âgés. Leur anatomie acétabulaire et surtout fémo-
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l'âge jeune lors de l'implantation, un indice de masse


corporelle (IMC) bas, un niveau socio-économique rale est souvent particulière et nécessite une planifica-
élevé et l'absence d'autre pathologie ostéoarticulaire tion optimale.
des membres inférieurs favorisent le retour au sport • L'utilisation d'une prothèse avec une tige fémorale
à un niveau supérieur ou égal à l'état préopératoire anatomique non cimentée permet de diminuer les
[42, 43]. risques d'ostéolyse et de stress-shielding.
La capacité de reprise sportive est fortement corrélée • Le couple de frottement céramique-polyéthylène
à la motivation des patients, à la durée des symptômes hautement réticulé semble être le meilleur compromis
avant l'intervention et au score fonctionnel (Harris Hip longévité-complications.
Score) préopératoire [1]. Une pratique régulière avant • La satisfaction postopératoire des patients jeunes
la maladie a également été identifiée comme un élé- est liée à leurs attentes préopératoires et à la possibi-
ment prédictif de la reprise sportive [44]. L'existence lité de la reprise de leurs activités professionnelles et
de troubles neurologiques ou un IMC élevé étaient au sportives.
contraire des facteurs limitant les activités physiques • Le retour au sport après PTH est corrélé de façon
après l'implantation [45]. prépondérante à des facteurs liés au patient.
330
Tableau 34.2
Pourcentage des chirurgiens qui autorisent ou déconseillent la reprise des sports selon leur degré d'impact
Recommandations

Permis Permis avec experience Interdits Pas d'avis


Sport
BHS HS et BHS HS et BHS HS et BHS HS et
AAHKS AAHKS AAHKS AAHKS

Golf 97 99 3 1 0 0 0 0

Natation 98 99 2 0 0 1 0 0
Bas
Marche 99 98 1 0 0 0 0 0
impact

J. Czeka , M. Ollivier, J.-N. rge s


Elliptique 98 92 2 0 0 0 0 0

Vélo statique 99 95 1 0 0 0 0 0

Vélo route 95 80 5 19 0 1 0 0

Randonnée 94 79 6 18 0 3 0 0

Danse 88 94 12 6 0 0 0 0

Impact Musculation 28 24 45 4
intermédiaire Patin/roller 43 35 31 43 25 21 1 2

Rowing 66 64 24 21 9 13 2 2

, . Parratte
Pétanque 90 90 9 8 1 1 0 1

Aérobic faible 88 86 11 9 1 4 0 1

Sport contact 9 2 14 2 75 93 1 2

Jogging (terrain) 22 6 17 5 59 87 2 2

Jogging (machine) 32 87 28 8 39 4 1 1

Haut impact Squash 24 11 31 27 43 60 2 2

Arts martiaux 10 9 33 38 56 49 1 4

Cricket/baseball 47 13 40 27 12 57 1 3

Aérobic intense 23 6 13 7 60 84 4 3
AAHKS : American Association of Hip and Knee Surgeons ; BHS : British Hip Society ; HS : Hip Society.

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Doit-on opérer les sujets jeunes ? De quelle manière ? 331

Tableau 34.3
Le délai conseillé de la reprise de l'activité physique après PTH
BHS HS AAHKS
Nombre de 206 99 727
participants

Taux de réponse 42 % (109/206) 93 % (92/99) 72 % (522/727)


% (n)

Délai % Délai %

6s 6,8 0–1 m 0 1

6-12 s 36,9 1–3 m 24 32

> 12 s 43,7 3–6 m 71 60

Autre/sans 8,2/5,5 6–12/> 12 m 2/2 5/1


réponse
AAHKS : American Assocation of Hip and Knee Surgeons ; BHS : British Hip Society ; HS ; Hip Society ; m : mois ; s : semaine.

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41 : 605–10. less THA in patients with Legg-Calve-Perthes disease.
[41] Philippot R, Neri T, Boyer B, et al. Bousquet dual mobility J Arthroplasty 2014 ; 29 : 792–6.
socket for patient under fifty-years old. More than twenty- [59] Santori FS, Santori N. Mid-term results of a custom-made
year follow-up of one hundred and thirty one hips. Int Orthop short proximal loading femoral component. J Bone Jt Surg Br
2017 ; 41 : 589–94. 2010 ; 92-B : 1231–7.
[42] Wagenmakers R, Stevens M, Groothoff J, et al. Physical acti- [60] Swarup I, Lee Y, Christoph EI, et al. Implant survival and
vity behavior of patients 1 year after primary total hip arthro- patient-reported outcomes after total hip arthroplasty in
plasty : a prospective multicenter cohort study. Phys Ther young patients with juvenile idiopathic arthritis. J Arthroplasty
2011 ; 91 : 373–80. 2015 ; 30 : 398–402.
[43] Stevens M, Wagenmakers R, Groothoff JW, et al. Physical activity [61] Sewell MD, Hanna SA, Muirhead-Allwood SK, et al. Custom
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lower limb arthroplasty. Bone Joint J 2014 ; 96–B : 923–7.
333

Participation sportive après prothèse


totale de hanche
M. BONNIN, T. AIT-SI-SELMI, J.-C. ROLLIER, J.-C. CHATELET,
J. CHOUTEAU, L. JACQUOT, M. SAFFARINI, M.-H. FESSY

Introduction • seuls Abe et al. [20] ont étudié la participation à


des activités sportives, et uniquement au jogging, après
La prothèse totale de hanche (PTH) est une des plus une PTH CoC, et ont rapporté qu'il n'y avait pas à
grandes réussites de l'orthopédie au point qu'elle a été court terme d'effet néfaste du jogging sur la survie de
considérée par certains comme la « procédure du siècle » l'implant.
[1]. Chaque année et à travers le monde, le nombre La pratique de sports après PTH dépend des spécifi-
d'interventions ne cesse d'augmenter et les patients opé- cités du patient et des recommandations du chirurgien.
rés deviennent de plus en plus jeunes et actifs [2]. Étant Des études attestent que la participation sportive ne
donné la popularité et grande qualité des résultats de dépend pas seulement de la fonction de l'articulation
cette opération, les attentes des patients deviennent plus opérée, mais également de la motivation du patient
importantes, notamment en ce qui concerne le retour à [21–23].
leurs activités quotidiennes et au sport [3, 4]. L'objectif de notre étude était d'évaluer la participa-
Différentes études rapportent un pourcentage impor- tion à des activités sportives d'un large échantillon de
tant de participation à des activités sportives après une patients ayant une PTH à couple de frottement céra-
PTH [3, 5–9], avec certains patients reprenant des mique-céramique. Le but était d'évaluer la relation
sports « violents » tels que la course, le football ou les entre la participation sportive et la motivation associée
arts martiaux, et cela bien que des professionnels de à chaque sport, ainsi que les résultats fonctionnels des
santé le leur aient déconseillé [10–12]. La question patients. Nos hypothèses étaient que la participation
est régulièrement posée avant la chirurgie désormais : sportive après PTH : 1) dépend en premier lieu de la
« Quels sports pourrai-je faire après l'intervention ? » motivation du patient pour chaque sport ; et 2) qu'elle
Cependant, il est difficile d'y répondre car les opinions n'est pas limitée par la PTH pour les patients motivés
des chirurgiens diffèrent encore quant aux effets du ayant de bons résultats cliniques.
sport sur la longévité de la prothèse [4, 12–14].
Alors que certains chirurgiens affirment qu'un retour
progressif au sport ne compromet pas la longévité de
Patients et méthode
l'implant et même prévient ou retarde sa révision [15], Dans notre étude, 1381 patients âgés de moins de
beaucoup de chirurgiens ne recommandent pas la pra- 75 ans au jour de l'opération, opérés par PTH de pre-
tique des sports dits « violents », sources de fractures mière intention sans ciment à couple de frottement
[6, 16] et de forte usure du polyéthylène [17], due à CoC, entre janvier 2010 et décembre 2013, ont été
des sollicitations répétitives par d'importantes forces inclus. Les patients ont été opérés consécutivement par
(cycles d'activité) [18]. 7 chirurgiens dans 4 centres utilisant la tige Corail™
Les inquiétudes ne sont pas les mêmes pour les (DePuy, Leeds, Royaume-Uni) et la cupule Pinnacle™
couples de frottement «  dur-dur », céramique/céra- (DePuy, Leeds, Royaume-Uni). Cinq des chirurgiens
mique (ceramic-on-ceramic [CoC]) ou métal/métal avaient utilisé une voie d'abord postérieure, alors que
(metal-on-metal [MoM]). Peu d'articles rapportent les deux autres avaient utilisé une voie d'abord anté-
l'activité sportive après une PTH utilisant ces couples rolatérale (Watson-Jones) sur table de traction. Les
de frottement. À notre connaissance : patients n'avaient reçu de la part de leur chirurgien
• seuls Naal et al. [19] ont étudié la participation à aucun avis défavorable concernant la reprise d'activi-
des activités sportives après un resurfaçage MoM et tés sportives postopératoires.
ont rapporté une forte activité dans les deux années Les patients étaient exclus s'ils avaient été opérés
suivant l'opération ; pour arthrite rhumatoïde (n = 6, 0,4 %) ou avaient

La prothèse totale de hanche dans tous ses états


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334 M. Bonnin, T. Ai -Si-Sel i, J.-C. Rollie , J.-C. Ch ele , J. Chou e u, . J quo , M. S ff ini, M.- . e y

une arthroplastie du genou (n = 50, 3,6 %). Les Les patients étaient considérés comme étant moti-
patients ayant présenté les complications postopéra- vés par une catégorie de sport (« léger », « modéré » ou
toires suivantes ont également été exclus : luxations « violent ») si leur réponse à la question « Cette caté-
(n = 6, 0,4 %), infections (n = 6, 0,5 %), patholo- gorie de sport est-elle importante dans votre vie » était
gies spinales ou neurologiques limitant la mobilité du « importante » ou « très importante » pour au moins
patient (n = 3, 0,2 %). un des sports de la catégorie concernée.
L'étude a été préalablement approuvée par un comité Les patients étaient considérés comme participant
d'éthique consultatif. à un sport si la réponse à la question « À quelle fré-
Au total, 1310 patients répondant aux critères d'in- quence participez-vous à ce sport » était « régulière-
clusion dans l'étude ont reçu par courrier un question- ment », ou « fréquemment ».
naire comportant trois parties : Nous avons présumé qu'une question sans réponse
• la première partie collectait des données générales concernant un sport signifiait que le patient n'y portait
(âge, genre, indice de masse corporelle [IMC], côté pas d'intérêt, qu'il n'était par conséquent pas motivé
opéré, niveau d'activité, date de la chirurgie et des par ce dernier et n'y participait pas.
visites de suivi) ainsi que la satisfaction globale du Les patients n'ayant pas renvoyé le questionnaire
patient vis-à-vis de la (des) hanche(s) opérée(s) ; dans les 2 mois ont été rappelés par téléphone et/ou
• la deuxième partie évaluait leur motivation pour un nouveau questionnaire leur a été réexpédié par
22 sports différents et leur participation réelle à ces courrier, si nécessaire. Il est important de noter que
sports, selon la méthodologie décrite par Weiss et al. les patients n'ayant pas renvoyé leur questionnaire
[23]. Pour chaque sport, les patients étaient ainsi inter- n'étaient pas pour autant perdus de vue dans notre
rogés sur leur motivation pour un sport en particulier base de données pour le suivi de leur prothèse, mais
(« un peu ou pas du tout », « modérée », « haute ou très afin d'éviter des réponses biaisées, aucun d'entre eux
haute »), la fréquence de leur pratique sportive (« rare- n'a été interrogé par téléphone ou lors des visites de
ment », « occasionnellement », « régulièrement », ou suivi habituelles.
« fréquemment »), le niveau de cette pratique (« pas Les mesures de dépendance entre les variables caté-
du tout », « récréatif » ou « compétitif »), un éven- goriques (réponses aux questions de satisfaction) ont
tuel inconfort pendant la pratique du sport (« pas été testées en utilisant le test du χ2 pour les données
du tout », « modéré », « haut ou très haut »), et/ou la continues.
raison de l'absence de pratique sportive (« à cause de Un test de Student a été utilisé afin de comparer
ma hanche », « cela ne m'intéresse pas » ou « autre les moyennes dans le cas de la comparaison de deux
raison ») ; groupes, ou un test d'ANOVA dans le cas de plus de
• la troisième partie analysait l'état de santé général à deux groupes.
l'aide des scores suivants : Si les données n'avaient pas une distribution nor-
– Forgotten Joint Score (FJS, score de la hanche male et si l'échantillon était de petite taille, un test de
oubliée) sur une échelle de 0 (pire) à 100 (meilleur) ; « rang » a été utilisé (Kruskal-Wallis dans le cas de plus
– Oxford Hip Score (OHS) sur une échelle allant de de deux groupes et test de Mann-Whitney pour deux
60 (pire) à 12 (meilleur) ; groupes).
– Short-Form 12 score (SF-12) avec ses deux com- Un test était statistiquement significatif si p < 0,05.
posantes (mentale et physique), cotées chacune sur Les analyses statistiques ont été réalisées avec le

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une échelle allant de 0 (pire) à 100 (meilleur), avec logiciel R version 3.3.1 1 (R Foundation for Statistical
50 comme médiane pour une population en bonne Computing, Vienne, Autriche).
santé.
Les sports étaient classés selon leur intensité : « léger » Résultats
(vélo en salle, vélo d'extérieur, pêche, natation et golf),
« modéré » (jardinage, randonnée, gymnastique/fitness, Sur 1310 patients inclus, 9 (0,7 %) sont morts pour
chasse, yoga, tai-chi-chuan, voile, et danse), ou « violent » des raisons indépendantes de leur opération, et 259
(ski de fond, ski alpin, ski de randonnée, escalade, judo/ (19,9 %) n'ont pas retourné leur questionnaire malgré
karaté, tennis/squash, course à pied [> 500 mètres]), un rappel (figure 35.1).
sports collectifs de ballon, trail/course en montagne). Les 1042 patients restants (1206 hanches) ayant
Pour chaque sport, les patients étaient considérés répondu aux questionnaires ont été suivis avec un
comme étant motivés si leur réponse à la question recul moyen de 44,4 ± 14,0 mois (médiane 45,0 ; inter-
« Cette activité est-elle importante dans votre vie ? » valle : 21,0-79,0). La cohorte comprenait 598 hommes
était « importante » ou « très importante ». (699 hanches) et 444 femmes (507 hanches), âgés de
Participation sportive après prothèse totale de hanche 335

1 381 patients opérés

5 infections (0,4 %)
6 luxations (0,4 %)
50 arthroplasties de genoux
(3,6 %)
71 exclus (5,1 %)
1 lavage (0,1 %)
6 arthrites rhumatoïdes (0,4 %)
1 kyst (0,1 %)
2 autres (0,1 %)

1 310 patients contactés

9 décédés (0,7 %)

259 n'ont pas répondu


(19,9 %)

1 042 patients ont répondu


(1 206 hanches)

Figure 35.1. Étude portant sur la participation sportive après PTH.

60,6 ± 8,8 ans (médiane 62,1 ; intervalle : 18,1-78,9) Un total de 93 (8,9 %) patients ne participaient à
au moment de l'opération. aucun des sports cités dans le questionnaire.
Il n'y avait pas de différence significative entre les Il n'y avait pas de différence significative entre les
patients, qu'ils aient été opérés d'un seul ou des deux taux de participation des patients ayant une PTH uni-
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côtés, par voie d'abord postérieure ou antérolatérale, latérale versus bilatérale, ni entre les patients opérés
ni en termes de données démographiques ou de scores par une voie d'abord postérieure versus antérolatérale.
cliniques (tableau 35.1). La seule exception concernait la participation sportive
Dans la cohorte globale, 92 % des patients étaient régulière ou fréquente à un sport « violent », qui était
satisfaits ou très satisfaits de leur intervention, plus élevée chez les patients opérés par voie d'abord
et seulement 0,9 % étaient déçus ou insatisfaits antérolatérale (24,9 %) que chez ceux opérés par une
(tableau 35.2). voie d'abord postérieure (17,4 %).
En ce qui concerne la participation des patients à La motivation était généralement supérieure ou
chaque catégorie de sports (tableau 35.3), 51,1 % ont équivalente à la participation réelle pour la plupart des
répondu que leur participation à au moins un sport sports, sauf pour le vélo en salle, le jardinage et la gym/
« léger » était régulière ou fréquente, 72,7 % partici- fitness (figure 35.2). Un total de 66 (6,3 %) patients
paient au moins à un sport « modéré », et 22,1 % pra- n'étaient motivés par aucun sport.
tiquaient un sport « violent ». Les différences entre la motivation et la partici-
Seulement 57 (5,5 %) patients ont indiqué pratiquer pation étaient plus élevées pour les sports « vio-
un ou plusieurs sports à un niveau de compétition. lents » ; toutefois, pour certains sports « légers »
336 M. Bonnin, T. Ai -Si-Sel i, J.-C. Rollie , J.-C. Ch ele , J. Chou e u, . J quo , M. S ff ini, M.- . e y

Tableau 35.1
Données démographiques et scores cliniques après arthroplastie totale de hanche
Total Unilatérale Bilatérale Approche postérieure Approche antéro-latérale
1206 hanches (1042 patients) 878 hanches (878 patients) 328 hanches (164 patients) 816 hanches (705 patients) 390 hanches (337 patients)

Age à la chirurgie (ans) 60,6 ± 8,8 (18,1 – 78,9) 60,7 ± 8,6 (18,1 – 78,9) 59,6 ± 10,1 (24,6 – 76,9) 60,1 ± 9,0 (18,1 – 78,9) 61,6 ± 8,1 (28,8 – 75,8)

Recul 44,4 ± 14,0 (21,0 – 79,0) 44,7 ± 14,1 (21,0 – 79,0) 42,8 ± 13,6 (24,0 – 75,0) 44,5 ± 14,0 (21,0 – 79,0) 43,9 ± 13,8 (24,0 – 72,0)

IMC 26,6 ± 4,6 (16,6 – 61,1) 26,5 ± 4,6 (16,6 – 61,1) 27,2 ± 4,7 (17,6 – 42,2) 26,5 ± 4,6 (16,6 – 61,1) 26,9 ± 4,6 (17,9 – 44,6)

Genre masculin 598 (57,4%) 497 (56,6%) 101 (61,6%) 402 (49,3%) 196 (58,2%)

Score FJS-12 69,2 ± 27,0 (2,1 – 100,0) 69,5 ± 27,1 (2,1 – 100,0) 68,6 ± 26,5 (2,1 – 100,0) 68,6 ± 27,0 (2,1 – 100,0) 70,7 ± 26,9 (2,1 – 100,0)
Score Oxford 19,8 ± 9,3 (0,0 – 55,6) 20,0 ± 9,4 (12,0 – 54,0) 19,3 ± 9,0 (12,0 – 55,6) 19,7 ± 9,2 (0,0 – 55,6) 20,1 ± 9,8 (12,0 – 54,0)
Score SF-12 - PCS 50,4 ± 8,4 (11,9 – 67,3) 50,4 ± 8,4 (11,9 – 67,3) 50,1 ± 8,0 (21,1 – 64,3) 50,4 ± 8,2 (11,9 – 67,3) 50,4 ± 8,7 (21,6 – 65,7)
Score SF-12 - MCS 52,2 ± 10,6 (7,5 – 79,1) 52,2 ± 10,6 (7,5 – 79,1) 52,4 ± 10,6 (12,2 – 66,6) 52,2 ± 10,7 (7,5 – 79,1) 52,2 ± 10,5 (19,1 – 70,9)

Il n'y a aucune différence statistiquement significative entre les patients opérés d'une hanche (unilatérale) versus deux hanches (bilatérale) et
entre l'approche postérieure versus antéro-latérale.

Tableau 35.2
Satisfaction générale après PTH

Unilatérale Bilatérale Approche chirurgicale


Total
Droite Gauche Postérieure Antéro-latérale
n = 1206 n = 878 n = 164 n = 164 n = 816 n = 390

Très satisfait 67,3 % (812) 67,3 % (591) 67,7 % (111) 67,1 % (110) 67,5 % (551) 66,9 % (261)
Satisfait 25,0 % (301) 24,7 % (217) 25,6 % (42) 25,6 % (42) 25,4 % (207) 24,1 % (94)
Plus ou moins satisfait 5,5 % (66) 5,5 % (48) 5,5 % (9) 5,5 % (9) 5,3 % (43) 5,9 % (23)
Décu 0,7 % (8) 0,0 % (8) 0,0 % (0) 0,0 % (0) 0,0 % (5) 0,8 % (3)
Insatisfait 0,2 % (3) 0,2 % (2) 0,0 % (0) 0,6 % (1) 0,2 % (2) 0,3 % (1)
N'a pas répondu 1,3 % (16) 1,4 % (12) 1,2 % (2) 1,2 % (2) 1,0 % (8) 2,1 % (8)

Il n'y a aucune différence statistiquement significative entre les patients opérés d'une hanche (unilatérale) versus deux hanches (bilatérale) et
entre l'approche postérieure versus antéro-latérale.

Tableau 35.3
Participation par groupe de sports

Total Unilatérale Bilatérale Approche Approche


postérieure antéro-latérale
n = 1042 n = 878 n = 164 n = 705 n = 337

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Au moins 1 sport léger
Occasionel, regulier, ou fréquent 73,8 % (769) 73,8 % (648) 73,8 % (121) 75,9 % (535) 69,4 % (234)
Régulier ou fréquent 51,1 % (532) 51,0% (448) 51,2 % (84) 52,3 % (369) 48,4 % (163)

Au moins 1 sport modéré


Occasionel, regulier, ou fréquent 85,5 % (891) 85,4 % (750) 86,0 % (141) 85,0 % (599) 84,6 % (285)
Régulier ou fréquent 72,7 % (758) 72,3 % (635) 75,0 % (123) 71,1 % (501) 72,4 % (244)

Au moins 1 sport violent


Occasionel, regulier, ou fréquent 51,2 % (533) 51,6 % (453) 48,8 % (80) 49,6 % (350) 50,7 % (171)
Régulier ou fréquent 22,1 % (230) 22,3 % (196) 20,7 % (34) 17,4 % (123) * 24,9 % (84)

* p < 0,005.
Il n'y a aucune différence statistiquement significative entre les patients opérés d'une hanche (unilatérale) versus deux hanches (bilatérale) et
entre l'approche postérieure versus antéro-latérale.
Participation sportive après prothèse totale de hanche 337

44,9 %
50 %

41,5 %
40 %

25,2 %
30 %

20,8 %
19,4 %

19,5 %
20 %

11,3 %
Participation

5,7 %

4,4 %
4,1 %

4,3 %
4,1 %
3,7 %
10 % 3,6 %

2,7 %
2,3 %
2,0 %
1,0 %

1,1 %
0,9 %
0,8 %
0,7 %
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Figure 35.2. Taux de participation aux différentes activités sportives.

100 %

90 %

80 %

70 %

60 %
100 %

100 %

100 %

100 %

100 %

100 %

98 %

97 %

50 %
90 %
90 %

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79 %

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71 %

69 %

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47 %
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Figure 35.3. Taux de participation parmi les patients motivés.

ou « modérés », comme la natation et la danse, la à 16,5 % pour les sports « modérées », et 7,3 % à
motivation était supérieure à la participation. La 14.1 % pour les sports « violents » (figure 35.4). La
proportion de patients en capacité de pratiquer un PTH limitait les patients dans leur pratique de course
sport pour lequel ils étaient motivés était plus éle- à pied, natation, pêche ou vélo en salle.
vée pour les sports « légers » (88 % à 100 %) et Une faible proportion de patients rapportaient un
« modérée » (56 % à 100 %), que pour les sports inconfort sévère à cause de la(des) hanche(s) opérée(s)
« violents » (47 % à 79 %) (figure 35.3). lors de la pratique de sports : 0,8 à 4,7 % pour les
Une faible proportion de patients a répondu ne sports « légers », 4,8 à 7,8 % pour les sports « modé-
pas pratiquer de sports à cause de leur(s) hanche(s) rés », et 8,3 à 18,4 % pour les sports « violents »
opérée(s) : 3 à 8,9 % pour les sports « légers », 6,2 (figure 35.5). Un fort niveau d'inconfort était plus
338 M. Bonnin, T. Ai -Si-Sel i, J.-C. Rollie , J.-C. Ch ele , J. Chou e u, . J quo , M. S ff ini, M.- . e y

18,0 %
16,5 %
16,0 %
14,1 %
14,0 %

12,0 % 11,2 % 11,3 %

9,8 %
10,0 %
8,9 % 8,9 %
8,4 % 8,6 % 8,4 % 8,4 % 8,4 %
8,0 % 7,7 %
7,3 %
6,7 % 6,6 %
6,1 % 5,9 % 5,9 % 6,4 % 6,2 %
6,0 % 5,3 %

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ou

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C

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Sp

Tr
Figure 35.4. Taux de participants ne pratiquant pas de sport à cause de leur hanche.

100 % 3% 2% 1% 4% 5% 5% 5% 5% 6% 5% 5% 8% 5%
10 % 9 % 10 %10 %11 % 8 % 11 %
16 % 18 %
90 % 18 %12 % 12 % 10 %
23 % 18 % 14 %10 % 11 % 6 %
27 % 13 %12 %
80 % 27 % 20 %
33 %33 % 33 % 27 %
29 %
20 % 17 %
70 %

60 %

50 %

81 % 82 %
40 % 80 % 80 % 78 % 80 % 80 % 80 % Grande
75 % 74 % 74 % 76 %
70 % 66 % 68 %
Légère
30 % 60 %61 % 61 % 61 % 62 %63 %63 %
Absente
20 %

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10 %

0%
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ts

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or

ai
Sp

Tr

Figure 35.5. Gêne à cause de la hanche opérée pendant le sport.

fréquemment évoqué pour la pratique de la course à L'analyse de régression confirmait que la participa-
pied et pour les sports collectifs de ballon. La relation tion au sport était fortement corrélée à la motivation
entre la fréquence de la participation et le niveau d'in- (r = 0,97, p < 0,001) (figure 35.7). La participation à un
confort lors de la pratique sportive n'était pas signifi- sport spécifique n'était pas corrélée aux résultats fonc-
cative (r = 0,22, p = 0,292) (figure 35.6). tionnels des patients (OHS et FJS) (figures 35.8 et 35.9).
Participation sportive après prothèse totale de hanche 339

3,0 Sports :
Légers
9 Golf
12 Pêche
17 Vélo en salle
19 Natation
Gêne pendant le sport après PTH

2,5 20 Vélo dehors


Modérés
4 Voile
5 Tai-Chi-Chuan
10 Chasse
11 Yoga
2,0 15 Danse
18 Gym/Fitness
21 Randonnée
22 Jardinage
Violents
6 13
16 1 Judo/Karaté
1,5 14 21 22
8 18 2 Escalade
2 15 3 Trail, montagne
7 19
3 10 11 20 6 Sports collectifs de ballon
1 4 7 Tennis/Squash
5 9 12 17 8 Ski de randonnée
14 Ski de fond
13 Course à pied (> 500 m)
1,0 16 Ski de piste
1,0 1,5 2,0 2,5 3,0
Participation après PTH

Figure 35.6. Relation entre la fréquence de la participation et le niveau d'inconfort lors de la pratique sportive.

3
Sports :
Légers
21
9 Golf
22 12 Pêche
17 Vélo en salle
2,5 19 Natation
20 Vélo dehors
Modérés
19 20
4 Voile
5 Tai-Chi-Chuan
10 Chasse
11 Yoga
Motivation

2 15 Danse
16 18 18 Gym/Fitness
21 Randonnée
17 22 Jardinage

15 Violents
1 Judo/Karaté
14 2 Escalade
1,5
3 Trail, montagne
12 6 Sports collectifs de ballon
8 13
7 Tennis/Squash
11 8 Ski de randonnée
4 6
7 9 10 14 Ski de fond
2 13 Course à pied (> 500 m)
1 5 16 Ski de piste
1 3
1 1,5 2 2,5 3
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Participants après PTH

Figure 35.7. Corrélation entre la participation au sport et la motivation.

Discussion sportive de forte intensité physique comme la course,


le football, ou les arts martiaux, malgré les avis défavo-
La littérature est source de controverses concernant rables des professionnels de santé [10, 11]. Cependant,
la participation à des activités sportives après PTH. la plupart de ces études concernent des athlètes, ce qui
Celle-ci est d'une part facilitée par la diminution des ne reflète pas la participation sportive au sein de la
douleurs ainsi que par l'amélioration de la mobilité population générale après PTH.
[19, 24], mais d'autre part limitée par le vieillissement Les patients interrogent fréquemment leur chirur-
des patients et par la crainte d'« abîmer la prothèse gien sur la possibilité de reprendre une activité spor-
artificielle » [7, 13, 16, 24]. tive après l'opération. Les chirurgiens sont souvent
Certaines études rapportent pourtant une impor- réticents pour répondre à cette question à cause du
tante participation de patients [3, 5–7] à une activité manque d'études objectives sur de grandes cohortes
340

FJS–12 OHS

10
20
30
40
50
60

10
25
50
75
100
Vélo dehors Vélo dehors
Vélo en salle
OHS by Sport

Vélo en salle

FJS-12 by Sport
Natations Natation

Pêche Pêche

Golf Golf

Jardinage Jardinage

Randonnée Randonnée

Gym/Fitness Gym/Fitness

Danse Danse

Yoga Yoga

Chasse Chasse

Sport
Tai-Chi-Chuan

Sport
Tai-Chi-Chuan
Voile Voile
Ski de piste Ski de piste
Course à pied (> 500 m) Course à pied (> 500 m)
M. Bonnin, T. Ai -Si-Sel i, J.-C. Rollie , J.-C. Ch ele , J. Chou e u, . J

Ski de fond Ski de fond


Ski de randonnée Ski de randonnée

Figure 35.9. Participation à un sport spécifique et résultats fonctionnels des patients (FJS).
Figure 35.8. Participation à un sport spécifique et résultats fonctionnels des patients (OHS).

Tennis/Squash Tennis/Squash
Trail, montagne Trail, montagne
quo , M. S ff

Sports collectifs de ballon Sports collectifs de ballon


Escalade Escalade
Judo/Karaté Judo/Karaté
ini, M.- . e y

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Participation sportive après prothèse totale de hanche 341

pouvant démontrer la sécurité et la longévité de l'im- un taux de retour de questionnaire de 80 %. Notre taux
plant [4, 13, 14] en dépit de la pratique de sport(s). de réponse aurait pu être amélioré si le suivi des patients
Les principales conclusions de notre étude sont : avait été réalisé par des entretiens téléphoniques, ou s'il
• qu'une importante proportion de patients motivés leur avait été demandé de remplir les questionnaires
pratiquaient régulièrement ou fréquemment une acti- durant la visite de suivi de routine, mais cette démarche
vité sportive intense après une PTH ; aurait pu influencer les réponses des patients ;
• que la proportion de patients incapables de, ou • l'analyse n'a pas tenu compte du niveau de l'activité
ne désirant pas pratiquer de sports, pour lesquels ils sportive des patients, mais uniquement de la fréquence
étaient motivés, était faible, de 7 % à 14 % pour les de leur participation. Toutefois, une quantification
sports « violents » ; objective du niveau de l'activité n'aurait été possible
• et que la participation des patients ne semblait pas que pour les patients pratiquant des sports à un niveau
être influencée par un inconfort ou une douleur ressen- de compétition, ce qui ne représente qu'une minorité
tie lors de leur pratique sportive. des patients (n = 57, 5,5 %), et qui est impossible à
Les points forts de cette étude étaient l'analyse de la réaliser sur une série d'un tel effectif ;
participation à des activités sportives spécifiques dans • enfin, il est intéressant de signaler que certaines de
une série consécutive de patients issus d'une popula- nos observations pourraient être liées à la localisation
tion non sélectionnée, opérés à l'aide d'un seul type géographique de notre étude, dans une région où les
d'implant et de couple de frottement. sports de montagne comme le ski et la randonnée sont
Cette étude s'est intéressée tout particulièrement des activités sociales couramment pratiquées, plutôt
au sous-groupe des patients motivés, qui a procuré le que des exercices physiques per se.
plus de résultats pertinents et notamment le fait que, Cette étude n'a pas été conduite dans l'objectif
bien que 22 % de la totalité des patients participaient d'évaluer si la pratique d'un sport « violent » après
régulièrement ou fréquemment à au moins un sport PTH représente ou non un danger pour l'implant,
« violent », ce taux était de 70 % dans le sous-groupe mais seulement de décrire la participation sportive
des patients motivés. d'une population non sélectionnée. Néanmoins, les
Seulement 5,3 % à 16,5 % des patients ont rapporté excellents résultats cliniques de cette série, associés à
ne pas pratiquer de sport à cause de leur(s) hanche(s) une forte participation sportive, indiquent que la pra-
opérée(s). tique de sport après PTH semble être inoffensive et
Les deux sports pour lesquels les patients avaient le bénéfique au bien-être du patient, bien que ces consta-
plus d'appréhension étaient la course et la randonnée, tations aient besoin d'être corroborées par une étude
qui ont tous les deux un fort impact sur les membres présentant des résultats à long terme.
inférieurs. À l'opposé, 60 à 82 % des patients ont rap- Cette étude ne démontre aucune supériorité d'une
porté qu'ils ne ressentaient aucun inconfort ou dou- voie d'abord chirurgicale en termes de satisfaction,
leur lors de leur pratique sportive. Un inconfort élevé de résultats fonctionnels ou de participation spor-
était généralement plus fréquent chez les patients pra- tive. Bien que certains affirment que la voie antérieure
tiquant les sports « violents », tels que la course et les procure de meilleurs résultats, très peu de rapports
sports collectifs de ballon. Cependant, le questionnaire scientifiques ont comparé les approches antérieures
ne précisait pas si cette gêne était due à la douleur, à et postérieures en termes de résultats et de partici-
l'inconfort, ou à la crainte d'abîmer l'implant. pation sportive. Barrett et al. [25] ont rapporté de
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Il est important de souligner que les patients meilleurs scores fonctionnels à court terme après un
n'avaient pas reçu d'avis défavorable concernant des abord antérieur, mais sans aucune différence avec un
activités sportives postopératoires de la part de leur abord postérieur avec un recul de 6 mois. À l'inverse,
chirurgien. Poeling-Monaghan et al. [26] ont observé une meil-
L'absence de corrélation entre la fréquence de par- leure récupération précoce après abord postérieur
ticipation et le niveau de gêne ressentie au niveau de qu'après abord antérieur. Aucun de ces auteurs n'ont
la hanche lors de la pratique sportive soutient l'hypo- analysé la participation sportive.
thèse selon laquelle la participation sportive n'est pas Notre étude a comparé rétrospectivement une
limitée par la prothèse chez les patients motivés (ayant cohorte de patients opérés par une voie d'abord anté-
de bons résultats cliniques). rolatérale (Watson-Jones) à une cohorte de patients
Quelques limitations de cette étude méritent d'être opérés par une voie d'abord postérieure, et très peu de
soulignées : différences significatives ont été relevées, ce qui sug-
• il s'agissait d'une étude rétrospective de patients inclus gère que la voie d'abord n'a que peu ou pas d'impact
dans une étude de suivi prospectif de leur prothèse, avec sur les résultats fonctionnels des patients.
342 M. Bonnin, T. Ai -Si-Sel i, J.-C. Rollie , J.-C. Ch ele , J. Chou e u, . J quo , M. S ff ini, M.- . e y

Conclusion La pertinence clinique de cette étude est d'infor-


mer correctement le patient, en fonction de ses capa-
Cette étude suggère qu'un fort niveau de participa- cités fonctionnelles, afin de répondre au mieux à ses
tion sportive peut être attendu après implantation attentes. Cette étude rapporte en effet une description
d'une prothèse totale sans ciment à couple céramique- représentative des possibilités de retour au sport après
céramique. Elle démontre également que les activités PTH, chez des patients plus ou moins motivés, et
sportives ne dépendent pas seulement de la PTH en pourrait donc aider les chirurgiens à donner des infor-
elle-même, mais surtout de la motivation du patient. mations claires et adaptées à leurs patients.
Nos résultats confirment que la satisfaction des Remerciements. Les auteurs aimeraient exprimer
patients n'est pas systématiquement définie par une leur reconnaissance envers Luca Nover, Hugo Bothorel
absence de douleur ou de symptômes relatifs à l'opé- et Ryan J. Reynolds pour leur aide dans la gestion de
ration, mais par une hanche fonctionnelle permettant données, les analyses statistiques et dans la finalisation
de répondre aux attentes préopératoires du patient. du manuscrit.

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