Bulletin de la Société

préhistorique française

A. Ducros , J. Ducros , F. Joulian La culture est-elle naturelle ?

Histoire, Épistémologie et Applications récentes du Concept de
Culture
Claude Masset

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Masset Claude. A. Ducros , J. Ducros , F. Joulian La culture est-elle naturelle ? Histoire, Épistémologie et Applications
récentes du Concept de Culture. In: Bulletin de la Société préhistorique française, tome 96, n°1, 1999. pp. 84-85;

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(Les amas coquilliers anthropiques, l'autre malacofaune) ou de C.
Cade (Les coquillages marins dans les gisements préhistoriques du
Midi méditerranéen français).
Évidemment toutes ces études ne sont pas de même niveau.
Sans mettre en cause la compétence des auteurs, on peut
remarquer que certaines questions ont profité de recherches beaucoup
plus poussées que d'autres et que Ton ne peut comparer l'étude
des Occupations néolithiques de la côte occidentale de l'Ile d'Oléron
(L. Laporte, J.-P. Cros, M. Fontugne, A. Gebhardt, Y. Gruet, D.
Marguerie et C. Oberlin) à celle de L'occupation littoral du
Cotentin au Paléolithique moyen récent (D. Cliquet).
Au-delà de cette diversité, les auteurs manifestent presque
tous le souci de bien mettre en valeur les activités humaines dont
ils étudient les témoins. Certains ont tenu à le souligner
d'emblée, tels C. Descamps (Amas coquilliers du banc d'Arguin,
Mauritanie, une approche palethnologique) ou R. Dalongeville, A. Prieur
et P. Bernier (Une lagune et des hommes dans le désert, évolution
littorale et habitats côtiers à Umm al-Qowayn, Emirats arabes
unis). Ainsi ce gros livre répond bien à son titre et ne peut
qu'intéresser ceux qui veulent prendre en compte tous les aspects de la
vie préhistorique.
Gilles GAUCHER
MOHEN J.-P. et TABORIN Y. (1998) - Les sociétés de la
Préhistoire, Collection Histoire Université, Hachette, Paris,
1998, 320 pages, figures, plans et cartes.
Cet ouvrage, à propos duquel on peut songer au terme de
magistral, donne, sous un volume relativement réduit, une vision
très large de la période appelée pré- et protohistorique.
Un caractère enrichissant est la densité informative et la
concision. Aucun mot, aucune phrase ne " fait de la figuration " ; tous
traduisent un aspect précis et concret de la réalité préhistorique
et, pour les phases plus récentes, de la réalité historique en
corrélation avec l'information archéologique. L'effort de concision
mène parfois à une formulation quelque peu hermétique,
laquelle suggère d'aller chercher le sens des mots ou des formules
dans un ouvrage plus accessible, sinon dans le dictionnaire. On a
l'impression que les auteurs se sont efforcés d'élaguer, de
supprimer tout ce qui ne relève pas strictement du fil de leur
démarche. Ils y ont réussi, mais sont parfois allés un peu trop loin,
risquant la carence (rôle de Pincevent) ou la dysharmonie entre le
texte et l'illustration (Biskupin) ; ils n'ont pas évité quelques
erreurs, situant par exemple la grotte de la Marche dans l'Indre
ou réunissant les sites de Kostenki et d'Avdeevo dans la vallée de
la Desna..., mais ce ne sont évidemment là que peccadilles que je
n'aurais pas dû trouver...
J'ai été par contre et combien heureusement, frappé par le fait
que, pour toutes les époques, on ne s'est pas limité à la région
classiquement significative, mais qu'on a systématiquement
élargi au monde entier le champ de la description c'est là un
caractère précieux et qui personnalise en même temps l'exposé. Tout
:
aussi précieux sont les cartes de répartition et surtout les tableaux
chronologiques qui suggèrent des relations fort intéressantes.
Il y aurait encore beaucoup à dire sur ce volume, mais je me
contenterai d'ajouter que, malgré sa concision, il suggère la
réflexion. Je n'en évoquerai que deux exemples. Le premier, c'est
que les premières statuettes néolithiques, comme celles de
Mureybet ou d'Aswad, sont fémmines, ce qui ne manque pas
d'esquisser, malgré la différence probable de motivation, un lien
avec les figurines du Paléolithique supérieur. Un autre
phénomène concerne lui aussi la comparaison entre le Paléolithique et
le Néolithique, ce dernier se révélant beaucoup plus diversifié et
" compartimenté " du fait de la multiplication des paramètres de
distinction (par ex. la céramique avec ses différences de forme, de
taille, de technique et surtout de décor).
C'est évidemment un livre qui ne se lit pas comme un roman,
mais qui représente, parfaitement calquée sur la recherche la
plus actuelle, une source incomparable d'enseignement et
Bulletin de la Société Préhistorique Française
Comptes rendus
d'information. On pourrait le considérer comme un manuel, mais
c'est aussi une fresque que je dirais presque colorée (je pense à la
description du tyrolien gelé de l'Ôztal) de l'épopée de l'humanité
depuis ses origines juqu'aux premiers siècles de son histoire
proprement dite.
Henri DELPORTE
WAGNER G.A. (1998) - Age Determination of Young Rocks
and Artifacts : Physical and Chemical Clocks in Quaternary
Geology and Archaeology, éd. Springer.
Les études en Géologie du Quaternaire ou en Préhistoire font
de plus en plus appel aux données chiffrées en datation soit pour
établir la chronologie soit pour calculer la vitesse de tel ou tel
phénomène. Or depuis la mise au point des techniques de spec-
trométrie de masse avec accélérateur, les possibilités de plusieurs
méthodes de datation se sont considérablement améliorées
tandis que de nouvelles méthodes apparaissent. L'ouvrage de
G.A. Wagner fait un bilan complet de toutes les techniques de
chronométrie disponibles. L'auteur, directeur d'une équipe d'Ar-
chéomètrie et professeur de Géologie à l'Université d'Heidel-
berg, a voulu un ouvrage essentiellement pratique, répondant
tout à la fois aux questions " quelle méthode peut
éventuel ement s'appliquer, pour tel type de matériel ? ", et " que peut-on
:
attendre de telle méthode, pour telle période ? " Pour chacune
des méthodes de datation qui ont été parfaitement classées, est
décrit, très précisément mais succinctement, le principe et on
n'insiste pas sur la technologie de mesure préférant développer
les applications avec des exemples en géologie ou en archéologie.
Les limites et les difficultés d'emploi des méthodes sont bien
soulignées.
Cet ouvrage très exhaustif, dans un domaine où il n'existe
pratiquement pas de manuel mais seulement des publications très
spécialisées, constitue une bonne source de documentation car
un très bon index permet de trouver rapidement l'information
désirée tandis qu'une abondante bibliographie (seulement en
anglais et malheureusement pas classée par méthode) permet
d'avoir accès aux compléments de documentation. On regrettera
toutefois l'absence de tableaux de synthèse ou d'intercompa-
raison entre méthodes.
Le texte, traduit en anglais à partir de l'allemand, est d'une
lecture très facile, n'impliquant aucune connaissance très poussée
en physique. Il est bien illustré de graphiques très clairs. Il devrait
constituer l'ouvrage de référence en chronologie absolue pour
toutes les bibliothèques scientifiques.
Jacques EVIN
DUCROS A., DUCROS J., JOULIAN F. (dir.) (1998) - La culture
est-elle naturelle ? Histoire, Epistemologie et Applications
récentes du Concept de Culture. Paris, Errance, 238 p.
(col ection des Hespérides).
La culture dont traite ce livre n'est pas la tranche arbitraire
qu'y découpe notre ministère dit de la culture, et moins encore le
genre d'assemblage d'outils dépareillés dont, par nécessité, se
contente habituellement le préhistorien. Cette culture est celle
des philosophes et des ethnologues, propriété qui, avec le rire, est
le propre de l'homme: "Culture", classiquement opposée à
"Nature". Chaque groupe humain a la sienne, par quoi il se
rattache à ses ascendants et s'oppose à ses voisins. Quand et
comment a pu apparaître dans notre espèce une particularité
aussi essentielle ? S'agit-il d'une sorte de deus ex machina,
manifesté soudainement sans qu'on sache trop pourquoi ? C'est ce
1999, tome 96, n° 1, p. 77-Í
Comptes rendus
qu'exprime implicitement tel auteur américain écrivant:
" L'Homme de Néandertal n'avait pas de culture ". Ou peut-on,
au contraire, relier valablement ce caractère à d'autres plus ou
moins largement biologiques ?
S'il l'on n'est pas encore en mesure de répondre à cette
question, la recherche a lait dans ce domaine d'importants progrès.
On connaissait, chez certains primates, des faits d'acquisitions de
procédés techniques et même des cas d'inventions. On a appris
plus récemment, en observant macaques et chimpanzés, que de
telles acquisitions sont parfois susceptibles de transmission d'une
génération à la suivante. Il arrive que se constituent de la sorte, au
sein d'une espèce restée homogène, des sous-groupes nantis
chacun de petits ensembles de techniques et de coutumes distinc-
tives, ensembles hérités qu'on ne peut guère appeler autrement
que "traditions". N'est-il pas permis d'appeler "culturels" des
COLLOQUES
L'extinction tardive des Néandertaliens et l'Art rupestre
paléolithique - 22-24 octobre 1998 Vila Nova de Foz Côa
(Portugal)
Le colloque sur l'extinction tardive des Néandertaliens et l'Art
rupestre paléolithique s'est déroulé du 22 au 24 octobre 1998 à
Vila Nova de Foz Côa, sous l'égide de la Commission VIII de
ru. i. s. p.p.
L'organisation du colloque était placée sous la responsabilité
d'Antonio Faustino Carvaho, J. Zilhao, M. H. Moura et Th.
Aubry. Elle a bénéficié de l'organisation logistique parfaite de F.
Pinto, directeur du Parc archéologique et de son secrétariat. La
journée du 23 octobre a été consacrée à une visite guidée
mémorable du Parc archéologique de la vallée du Côa par A. Baptista, et
le 24 octobre à une visite du site d'Olga Grande par Th. Aubry.
L'extinction tardive des Néandertaliens
Des recherches récentes dans le sud de la péninsule ibérique
ont fait état de la probable persistance des néandertaliens jusque
dans le Wurm récent. L'objet de ce colloque était de faire le point
sur la question, sur l'ensemble du territoire européen.
B. Vandermersch, en ouverture de session, a souligné la rareté
des restes humains indiscutables dans la période 40 000-30 000
B.P. Beaucoup de vestiges ont en effet une attribution incertaine
(Mládec, Cro-magnon, Veliká Pecina, Carihuela, Zafaraya, etc.).
Les restes néandertaliens indiscutables de Saint Césaire (Cha-
rentes) avec un squelette incomplet et d'Arcy-sur-Cure (dents),
confirment que les auteurs de l'industrie castelperronienne sont
des Néandertaliens. Par contre, aucun reste humain
indiscutablement attribué à un niveau aurignacien n'est suffisamment
diagnostique pour connaître avec certitude les caractéristiques
anthropologiques de l'homme aurignacien. Cependant les études
morphocrâniennes montrent qu'il n'y a pas de continuité entre le
Néandertalien d'Europe occidentale et l'homme moderne. Et les
fragments d'ADN montrent une distance entre ADN
néandertalien et ADN moderne supérieur à la variabilité interne des
hommes modernes, résultat que de nouvelles analyses devront
confirmer. La probabilité de l'irruption d'un homme moderne
dans l'univers néandertalien de l'Europe occidentale reste donc
le modèle le plus plausible.
N. Soler a précisé les stades typologiques de l'Aurignacien de
la côte espagnole méditerranéenne sur le site de référence de
l'Arbreda. Un Protoaurignacien avec une industrie osseuse à
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caractères qui sont acquis, qui sont transmis, qui définissent des
sous-groupes ?
Dans ce livre, qui étudie aussi l'histoire de la notion de culture
et qui en traite les aspects épistémologiques. nous intéressent
plus particulièrement les contributions qui tentent de faire le
pont entre " le singe " et l'homme, contributions dont les auteurs
cherchent à reconstruire, sur ce plan, ce qu'il en était jadis des
plus anciens hominiens. Ce terrain est difficile, les conclusions
des différents auteurs ne convaincront pas toujours. Quoi qu'il en
soit, cette lecture est l'occasion de dépasser pour un temps le
quotidien des fouilles et des collections. Pardonnant aux auteurs
quelques hardiesses, on lira donc leur livre avec intérêt et avec
protít.
Claude MASSET
pointes (ni base fendue, ni losangique), puis un Aurignacien I,
sans carénés, à pointes à base fendue, enfin un Aurignacien II
avec pièces carénées et pointe losangique. L'existence du
Protoaurignacien daté entre 38 000 B.P. et 40 000 B.P. est confirmé à
Reclau-Viver et à l'abri Romani.
G. Vega-Toscano recense les sites moustériens de la Sierra
d'Andalousie (chaîne Bétique) Palomar, Aviones, Cueva Palo-
marico, Hora, Carihuela, Zafaraya, Barondillo, Malara, Palmeras.
:
Il arrive à la conclusion que le Moustérien est présent dans l'in-
terpléniglaciaire et survit jusqu'au début du pléniglaciaire du
Wurm récent (Hora, Carihuela, Zafaraya), associé avec des restes
néandertaliens (Zafaraya, Carihuela V).
L. Raposo fait l'inventaire des sites moustériens portugais
ayant fait l'objet de datations U/Th et 14C grottes de Columbeira
et de Figuera Barava en Estramadoure, sites de plein air de Foz de
:
Enxarrique et de Conceicao sur le Tage, mais aussi la grotte de
Caldeirao (cK), Pepo de Diablo (сЗ), Salemas Quarry (c2),
Salemas (c4). Sur la base de ces datations, il suggère une présence
néandertalienne au Portugal prolongée jusqu'à 27-28 000 B.P.
V. Chabaî donne les résultats préliminaires des récents
travaux internationaux menés en Crimée depuis 4 ans, sur les sites
de Siuren I, Buren Kaya 111 et Kabazi II. À Kabazi II, les niveaux
moustériens 1A à 7B ont fourni une séquence de dates IJC AMS
autour de 32 000 B.P. À Buren-Kaya III, un niveau moustérien
(Micoquien de Crimée) daté autour de 28 600 B.P., est retrouvé
au dessus d'une industrie strélétienne (datée entre 32 000 et
37 000 B.P.). À Siuren I, un Aurignacien daté autour de 29 000
B.P. possède une industrie chargée en traits moustériens.
O. Soffer a proposé un modèle développant la notion de zones
de refuges des derniers néandertaliens dans le sud de l'Europe
(Péninsule ibérique, Italie, Péninsule balkanique, Crimée).
M. Otte développe le thème de l'influence culturelle
réciproque des populations néandertaliennes et modernes,
principalement dans leur rapport à l'animal.
J.-Ph. Rigaud apporte de nouveaux résultats sur l'Aurignacien
et le Castelperronien du Périgord, et l'évolution de sa vision sur
ces industries. Deux nouvelles datations sur le Castelperronien
de la grotte XVI (autour de 38 000 et 35 000 B.P.) confirment son
ancienneté en Périgord à un âge plus ancien que 35 000 B.P. J.-Ph.
Rigaud admet maintenant l'absence d'interstratification entre
Castelperronien et Aurignacien au Roc de Combe (couches 9 et
10 indistingables) et au Piage (stratigraphie inversée). La couche
G de Caminade Est proposée par H. Delporte comme
Aurignacien 0, résulterait en fait d'un mélange avec les niveaux
moustériens et castelperroniens sous-jacents. J.-Ph. Rigaud admet
1999, tome 96, n" 1, p. 77-i