Journal d'imagerie diagnostique et interventionnelle 2022;5:141–153

Mise au point

Imagerie des dysthyroïdies

Insights into dysthyroidism ultrasound features

J.-G. Marchand a a
Polyclinique de Poitiers groupe Elsan, service
G. Russ b,c imagerie médicale, 1, rue de la Providence,
E. Ghanassia d,e 86000 Poitiers, France
J. Tramalloni b b
Unité thyroïde et tumeurs endocrines, hôpital La
H. Monpeyssen d Pitié-Salpêtrière, Sorbonne université GRC no 16,
P.-Y. Marcy f Paris, France
c
Centre de pathologie et d'imagerie, 14, avenue
René-Coty, 75014 Paris, France
d
American Hospital of Paris, 63, avenue Victor-Hugo,
92200 Neuilly-sur-Seine, France
e
Polyclinique Sainte-Thérèse, 6, quai du Mas Coulet,
34200 Sète, France
f
Polyclinique les Fleurs groupe Elsan, service
imagerie médicale, 332, avenue Frederic-Mistral,
83190 Ollioules, France

Reçu le 2 décembre 2021 ; accepté le 10 décembre

2021
Disponible en ligne sur ScienceDirect le 10 janvier 2022

RÉSUMÉ MOTS CLÉS

Introduction. – L'échographie doppler est l'imagerie de référence pour l'exploration thyroïdienne. Échographie
En cas de dysthyroïdie, l'échographie ne doit pas être systématique. Doppler
Données récentes. – Chez le patient atteint d'hypothyroïdie, l'échographie est indiquée en cas Thyroïde
de palpation cervicale anormale ou de signes compressifs, initialement ou lors du suivi. Elle peut Hypothyroïdie
se discuter lorsque la palpation clinique est difficile, en présence de facteurs de risque de cancer Hyperthyroïdie
thyroïdien, en cas d'anxiété persistante du patient ou de TSH (thyroid stimulating hormone)
élevée persistante avec anticorps anti-thyroperoxydase (TPO) négatifs. Dans les hyperthyroï- KEYWORDS
dies, c'est le seul examen réalisable en cas de contre-indication à la scintigraphie (grossesse, Ultrasonography
allaitement). L'échographie doit être réalisée avant tout traitement radical (chirurgie ou traitement Doppler
par iode 131) afin de mesurer le volume glandulaire à traiter et d'écarter la présence d'un nodule Thyroid
suspect. Le doppler pulsé est utile pour l'aide à l'arrêt du traitement par antithyroïdiens de Hypothyroidism
synthèse. L'échographie doppler permet le plus souvent de poser le diagnostic causal de Hyperthyroidism
l'hyperthyroïdie, en complément de la scintigraphie.
Conclusion. – Cette mise au point propose un résumé des principales causes des dysthyroïdies
et de leur aspect échodoppler dans leur forme typique.
© 2021 Société française de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

SUMMARY
Introduction. – Doppler ultrasound of thyroid gland is the first-line examination of thyroid gland
assessment, but this is not systematic in case of dysthyroidism. Auteur correspondant :
Recent findings. – In case of hypothyroidism, US Doppler is indicated in case of abnormal neck J.-G. Marchand,
and clinical compressive local signs. Neck US should be particularly indicated in the following service imagerie médicale,
polyclinique de Poitiers, 1, rue de
cases: poor clinical assessment of the neck, patient's anxiety, high TSH serum level associated
la Providence, 86000 Poitiers,
with normal TPO antibodies and risks factors for thyroid carcinoma. In case of hyperthyroidism, France.
US Doppler is indicated when scintigraphy is contraindicated (breast feeding, pregnancy). Adresse e-mail :
Thyroid US Doppler should be performed before performing radical treatment (thyroidectomy jeanguillaume.marchand@gmail.
or radioactive iodine therapy), to assess the thyroid gland volume and rule out a suspicious com

https://doi.org/10.1016/j.jidi.2021.12.006
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 Mise au point
thyroid nodule. Doppler US is useful to decide when to discontinue anti thyroid drug medication. Doppler US, in addition to
scintigram, helps to determine the causal diagnosis of hyperthyroidism.
Conclusion. – This update article provides an overview of thyroid dysthyroidism causes and Doppler ultrasonography features in
typical cases.
© 2021 Société française de radiologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
INTRODUCTION
L'échographie doppler est l'imagerie de référence pour l'explo-
ration thyroïdienne. Elle est très largement utilisée ; environ
900 000 échographies ont été réalisées en 2020 (assurance
maladie : actes techniques en 2020). En 2017, l'European
Thyroid Association publiait des recommandations de stratifi-
cation du risque des nodules thyroïdiens chez l'adulte, le EU-
TIRADS (European thyroid imaging and reporting data sys-
tem), où la vascularisation est un signe accessoire qui module
le risque au sein de chaque score sans le changer [1].
En septembre 2021, la Haute autorité de santé (HAS) publiait
une recommandation portant notamment sur la pertinence de
l'échographie thyroïdienne en cas de dysthyroïdie [2]. Si
l'échographie doppler n'est plus systématique en cas de dys-
thyroïdie, elle reste indiquée dans certaines circonstances.
Cet article est une mise au point sur l'apport de l'échographie
doppler dans les dysthyroïdies.
Prérequis
Vascularisation artérielle thyroïdienne
La vascularisation artérielle est assurée principalement par
deux artères paires et symétriques (une pour chaque lobe), les
artères thyroïdiennes supérieures et inférieures et une artère
inconstante impaire née de la crosse aortique, l'artère thyroï-
dea ima (anciennement dénommée artère thyroïdienne
moyenne de Neubauer).
L'artère thyroïdienne supérieure est la première branche col-
latérale de l'artère carotide externe. Elle naît au-dessus du
cartilage thyroïde et descend vers le pôle supérieur de la
glande. Elle se termine en se distribuant par trois branches
au pôle supérieur du lobe latéral de la glande thyroïde : les
rameaux glandulaires antérieur, postérieur et latéral.
L'artère thyroïdienne inférieure est une des branches du tronc
thyrocervical qui naît de l'artère subclavière. Elle chemine
derrière l'artère carotide commune puis remonte au pôle infé-
rieur du lobe latéral de la glande thyroïde où elle se divise en
trois branches terminales, inférieure, postérieure et profonde.
Les artères thyroïdiennes supérieure et inférieure s'anastomo-
sent entre elles et avec leur homologue controlatérale.
L'artère thyroïdea ima est inconstante, elle naît directement de
la crosse de l'aorte et se distribue à l'isthme de la glande
thyroïde (Fig. 1).
Comment faire un doppler pulsé des artères
thyroïdiennes ?
Artère thyroïdienne supérieure
Elle s'explore grâce à une coupe sagittale. La sonde est
centrée sur la carotide commune, puis le transducteur est
déplacé vers la ligne médiane (Fig. 2). L'artère thyroïdienne
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J-G Marchand et al.
supérieure est bien visualisée à l'aide du doppler couleur au
pôle supérieur de la thyroïde (Fig. 3). Pour l'enregistrement
d'un spectre doppler, la coupe sagittale associée à une incli-
naison de la boîte couleur permet d'avoir un angle de tir ou
angle d'incidence le plus parallèle possible au vaisseau (Fig. 4)
[3]. Pour mesurer un débit, ce sont les vitesses moyennes qui
sont utilisées, le volume d'échantillonnage dans ce cas est de
la taille de la section du vaisseau (paroi à paroi) [4].
Artère thyroïdienne inférieure
Elle s'explore grâce à une coupe axiale. La sonde est centrée
au pôle supérieur de la thyroïde et déplacée vers la clavicule
jusqu'à trouver l'artère thyroïdienne inférieure d'orientation
transversale et qui croise la carotide commune en arrière
de celle-ci (Fig. 5). L'enregistrement du flux s'effectue comme
décrit précédemment (Fig. 6).
Valeurs normales
Macedo et al. ont publié en 2007 dans le British Journal of
Radiology les valeurs de référence des paramètres dopplers
dans une population saine non déficiente en iode [5]. Pour
l'artère thyroïdienne supérieure, la moyenne des vitesses
systoliques maximale était de 25,84 cm/s (étendue : 17,08–
34,6 cm/s) et de 21,50 cm/s (étendue : 13,78–29,22 cm/s) pour
l'artère thyroïdienne inférieure.
DONNÉES RÉCENTES
Les dysthyroïdies regroupent toutes les affections altérant la
fonction thyroïdienne aboutissant soit à une insuffisance de
sécrétion d'hormones (hypothyroïdie), soit à une hypersécré-
tion d'hormones (hyperthyroïdie) (Tableau I). Parfois les deux
formes peuvent se succéder dans le temps (Fig. 7).
Les dysthyroïdies sont fréquentes dans la population géné-
rale. Les données de la cohorte SU.VI.MAX1 estiment à 2 %
l'incidence des dysthyroïdies évaluées sur un suivi de 7,5 ans.
Les dysthyroïdies sont plus fréquentes chez les femmes
(3,6 % chez les femmes de 45-60 ans versus 0,5 % chez
les hommes de la même tranche d'âge). L'incidence annuelle
des dysthyroïdies est de 70 pour 100 000 chez les hommes et
403 pour 100 000 chez les femmes [6].
Parmi les dysthyroïdies, les hypothyroïdies sont les plus fré-
quentes. Les principales causes d'hypothyroïdie sont les thy-
roïdites auto-immunes, les hypothyroïdies faisant suite
à l'ablation chirurgicale de la thyroïde ou à un traitement par
iode 131 [7].
Les trois causes qui dominent dans l'hyperthyroïdie (90 %)
sont la maladie de Basedow, le goitre multinodulaire toxique et
l'adénome toxique [8].
L'HAS a publié en septembre 2021 une recommandation
portant notamment sur la pertinence de l'échographie thyroï-
dienne en cas de dysthyroïdies.
 Imagerie des dysthyroïdies
Figure 1. Schéma anatomique de la vascularisation artérielle thyroïdienne.
Hypothyroïdie
L'échographie n'est plus indiquée de manière systématique
dans la prise en charge d'un patient atteint d'hypothyroïdie.
Elle est indiquée en cas d'anomalie à la palpation cervicale ou
de signes compressifs (dysphagie, dysphonie, dyspnée), ini-
tialement ou au cours du suivi.
Elle peut se discuter lorsque la palpation est difficile (par
exemple en cas d'obésité, de cicatrice, de lésions dermatolo-
giques, etc.), en présence de facteurs de risque de cancer
thyroïdien, en cas d'anxiété persistante du patient ou de TSH
(thyroid stimulating hormone) élevée persistante avec anti-
corps anti-thyroperoxydase (TPO) négatifs.
Dans ces indications, l'échographie recherche une pathologie
nodulaire et des signes de thyroïdite (cause la plus fréquente
d'hypothyroïdie). Les thyroïdites avec hypothyroïdie sont
dominées très largement par l'origine auto-immune et, dans
une moindre mesure, par une origine iatrogène. Le trait
commun échographique des thyroïdites est l'hypoéchogéni-
cité de la glande (Fig. 8). L'échogénicité normale de la glande
(plus échogène que les muscles préthyroïdiens) est due à sa
structure folliculaire : l'interface entre la cellule thyroïdienne et
la colloïde présente une impédance acoustique élevée,
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Mise au point
provoquant la réflexion des ondes acoustiques à haute fré-
quence vers la sonde. L'hypoéchogénicité s'explique par la
diminution de la colloïde du fait de l'inflammation mais aussi
par l'infiltrat lymphocytaire diffus [9].
Thyroïdites auto-immunes (TAI)
Elles peuvent être subaiguës ou chroniques avec une alter-
nance possible de ces phases.
Thyroïdite chronique de Hashimoto
Dans cette forme, le goitre initial fait partie de la définition
(volume thyroïdien > 18 mL chez la femme et > 20 mL chez
l'homme). L'aspect en mode B retrouve le trait commun des
thyroïdites, à savoir l'hypoéchogénicité et son échostructure
hétérogène. L'hétérogénéité peut avoir plusieurs aspects :
tacheté, pommelé, microkystique ou pseudo-nodulaire [10].
Très fréquemment, des ganglions réactionnels du secteur VI
sont observés (Fig. 9). Avec le mode doppler couleur ou
énergie, l'hypervascularisation est corrélée au taux de TSH
mais probablement aussi, comme le suggèrent Schulz et
Iitaka, au processus auto-immun sous-jacent lié aux taux
élevés d'anticorps anti-TPO et anti-Tg (thyroglobuline), ainsi
143
 Mise au point J-G Marchand et al.

Figure 4. Coupe longitudinale de l'artère thyroïdienne supérieure en

doppler couleur (la boîte couleur, en vert, est inclinée) et doppler
pulsé. Le volume d'échantillonnage est adapté à la taille de l'artère
(2/3) et la correction d'angle inférieure à 608.

ne pourrait activer l'angiogenèse qu'en présence d'une aug-

mentation de la TSH. En doppler pulsé, une accélération
modérée des flux est observée : moyenne des vitesses sys-
toliques maximales au sein de l'artère thyroïdienne inférieure
de 55 cm/s (étendue 49,2–60,8 cm/s) [13].

Figure 2. Déplacement du transducteur de la carotide commune Thyroïdite lymphocytaire chronique

vers la ligne médiane pour trouver l'artère thyroïdienne supérieure. Dans cette forme, l'aspect est exactement le même que pour la
thyroïdite de Hashimoto mais sans goitre (Fig. 10 et 11).

qu'au taux élevé de VEGF (vascular endothelial growth factor)

circulant. Le VEGF semble jouer un rôle important dans
l'angiogenèse intrathyroïdienne [11,12]. Cette hypervasculari-
sation tend à diminuer avec l'évolution de la maladie mais peut
croître à nouveau en cas de variation de la TSH ou de poussée
inflammatoire. En effet, comme le suggèrent Schulz, le VEGF

Figure 5. Déplacement du transducteur du pôle supérieur de la

Figure 3. Artère thyroïdienne supérieure ici en doppler SMI (superb thyroïde vers la clavicule pour trouver l'artère thyroïdienne
microvascular imaging). inférieure.

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 Imagerie des dysthyroïdies
Mise au point

Thyroïdite lymphocytaire chronique de forme

atrophique
L'aspect est le même que précédemment mais avec un
volume inférieur à 6 mL, et la plupart du temps une vascula-
risation normale en doppler couleur. Il existe aussi des formes
hyperéchogènes, qui se rencontrent lorsque la totalité du tissu
glandulaire est remplacée par un tissu fibreux. La vascularisa-
tion est alors pauvre ou absente.

Thyroïdite subaiguë juvénile

Cette forme associe généralement un goitre, une hypoécho-
génicité diffuse et une hypervascularisation pouvant varier
dans le temps.

Thyroïdite subaiguë du postpartum

Figure 6. Coupe axiale de l'artère thyroïdienne inférieure en doppler
couleur et doppler pulsé. Le volume d'échantillonnage est adapté
à la taille de l'artère (2/3) et la correction d'angle inférieure à 608.
Son évolution est en général en deux phases avec une phase
initiale d'hyperthyroïdie (thyrotoxicose, traitée dans le para-
graphe suivant), puis une phase d'hypothyroïdie. En phase
d'hypothyroïdie, l'aspect échodoppler est, là encore, celui
d'une thyroïdite : une glande hypoéchogène associée fré-
quemment à un petit goitre, une hypervascularisation au

Tableau I. Classification des dysthyroïdies d'après J. Tramalloni et H. Monpeyssen.

Hypothyroïdies Hyperthyroïdies
Spontanées Thyropathies auto-immunes
Thyroïdites auto-immunes Maladie de Basedow
Thyroïdites subaiguës Phase hyperthyroïdienne des TAI
Anomalie de l'hormonogenèse Hashitoxicose (formes mixtes)
Ectopies thyroïdiennes à révélation tardive Phase initiale des thyroïdites biphasiques
Syndrome de Marine-Lenhart (avec autonomisation)
Thyropathies iatrogènes
Hyperthyroïdie iodo-induite type 1
Iatrogènes Hyperthyroïdie iodo-induite type 2
Thyroïdectomie totale ou partielle Hyperthyroïdies iatrogènes non iodées
Irradiation externe ou IRA thérapie Thyrotoxicose factice
Médicaments : surcharge iodée, antithyroïdien de synthèse, Gains de fonction
lithium, amiodarone, cytokine
Carence iodée Thyrotoxicose gestationnelle transitoire
Antithyroidiens d'origine alimentaire Hyperthyroïdie gravidique par mutation du R-TSH
Autonomisation
Nodule toxique
Toxicité par autonomie diffuse
Goitre multihétéronodulaire toxique
Syndrome de McCune-Albright
Hyperplasies thyroïdiennes toxiques
Épithélioma hyperfonctionnel
Inflammation
Phase précoce de la thyroïdite subaiguë
Autres causes
Hyperthyroïdie paranéoplasique
Adénome hypophysaire à TSH
Goitre ovarien toxique
Hyperthyroïdie néonatale

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 Mise au point
Figure 7. Dysthyroïdies : évolution possible du taux de TSH en
fonction du temps (M : mois). Courbe rouge :
hyperthyroïdie transitoire avec retour à la normale. Courbe verte :
hypothyroïdie progressive et définitive. Courbe bleue :
hyperthyroïdie initiale (2e mois), puis passage progressif
à l'hypothyroïdie transitoire (5e mois), puis retour progressif
à l'euthyroïdie (8e mois).
Figure 8. Coupe longitudinale : glande hypoéchogène, isoéchogène
aux muscles préthyroïdines. La différence entre la thyroïde et les
muscles est difficilement perceptible.
Figure 9. Coupe sagittale du lobe inférieur : adénites réactionnelles
du secteur VI inférieur.
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Figure 10. Hypervascularisation en doppler couleur chez une
patiente avec thyroïdite lymphocytaire chronique (volume thyroïdien
normal) et TSH augmentée.
doppler couleur et une accélération modérée des vitesses
circulatoires [14].
Thyroïdite iatrogène
Les substances responsables d'hypothyroïdie sont l'iode, les
cytokines, le lithium, les inhibiteurs des thyrosines-kinases et
l'immunothérapie. Elles peuvent induire une hypo ou une
hyperthyroïdie, voire une forme biphasique. L'aspect le plus
fréquent en cas d'hypothyroïdie est un goitre simple avec une
glande globalement hypoéchogène.
Dans le cas particulier de la thyroïdite radio-induite (131I), on
observe une diminution du volume thyroïdien, une glande
hypoéchogène et dont la vascularisation s'est raréfiée.
Hyperthyroïdie/Thyrotoxicose
L'hyperthyroïdie correspond à une production accrue d'hor-
mones thyroïdiennes par la thyroïde tandis que la thyrotoxi-
cose correspond à une circulation excessive d'hormones
thyroïdiennes. Toutes les thyrotoxicoses ne sont donc pas
des hyperthyroïdies.
Comme pour les hypothyroïdies, l'HAS indique que l'échogra-
phie n'est plus utile dans la prise en charge diagnostique des
hyperthyroïdies, en l'absence de nodule ou de ganglion cervi-
cal suspect à la palpation, en cas de forme clinique typique de
maladie de Basedow, de positivité des anticorps antirécep-
teurs de la TSH ainsi qu'au début d'une thyroïdite de De
Quervain typique.
Elle reste indiquée dans les autres cas.
L'échographie doppler est un examen complémentaire de la
scintigraphie. Elle permet de rechercher des nodules notam-
ment en cas de fixation hétérogène, de goitre ou de nodule
chaud, et d'effectuer un prélèvement cytologique si besoin.
L'échographie est le seul examen réalisable en cas de contre-
indication à la scintigraphie (grossesse, allaitement).
Une échographie doit être effectuée avant tout traitement
radical (chirurgie ou traitement par 131I) afin de mesurer le
volume glandulaire à traiter et d'écarter la présence d'un
nodule suspect.
Les principaux points de discussion du groupe de travail de
l'HAS ont porté sur les cas particuliers des thyrotoxicoses iodo-
induites, des thyroïdites du post-partum et des maladies de
 Imagerie des dysthyroïdies
Figure 11. Même patiente en doppler pulsé. On note des vitesses modérément augmentées à 44 cm/s ici au sein de l'artère thyroïdienne
inférieure droite.
Basedow associées à un nodule. Le groupe de travail men-
tionne que ces indications relèvent d'une prise en charge
spécialisée. Un dernier point a fait l'objet de discussion :
l'intérêt du doppler pulsé en cas de traitement par antithyroï-
diens de synthèse. En effet, des vitesses élevées sont pré-
dictives d'un risque de rechute à l'arrêt du traitement.
Le groupe a décidé de ne pas émettre de recommandation
pour ou contre sa réalisation en pratique courante.
En 2016, l'American Thyroid Association (ATA) recommandait
la mesure du débit sanguin thyroïdien par échographie doppler
pour déterminer la cause de l'hyperthyroïdie lorsque la pré-
sentation clinique et biologique n'est pas évidente (recomman-
dation forte, niveau de preuve modéré) [15]. En 2018,
l'European Thyroid Association (ETA) recommandait l'utilisa-
tion de l'échographie doppler comme aide au diagnostic de la
Figure 12. Maladie de Basedow : goitre hypoéchogène homogène de 40 cm3 environ.
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Mise au point
maladie de Basedow [16] (recommandation forte, niveau de
preuve élevé).
Les différents aspects échographiques que l'on peut observer
dans les hyperthyroïdies/thyrotoxicoses en fonction de leurs
causes sont détaillés comme suit.
Thyropathies auto-immunes
Maladie de Basedow
Le goitre est très fréquent mais modéré en général entre 20 et
60 cm3. La glande est dans la grande majorité des cas hypo-
échogène mais, contrairement à la maladie de Hashimoto, son
échostructure est homogène avec une possibilité de fine réti-
culation dite en « rayons d'abeille » (Fig. 12). En mode doppler
147
 Mise au point
Figure 13. Maladie de Basedow : hypervascularisation en doppler énergie.
couleur et énergie, la vascularisation est intense et diffuse. Elle
a été qualifiée par Ralls de thyroïd inferno (Fig. 13 et 14) [17].
En doppler pulsé, on observe une nette accélération des
vitesses au sein des artères thyroïdiennes supérieures et
inférieures (Fig. 15) [18]. Cette augmentation est régulière-
ment supérieure à 150 cm/s [13] (élément quasi pathognomo-
nique). Les débits au sein des artères thyroïdiennes sont eux
aussi augmentés.
Les rechutes sont fréquentes après traitement par antithyroï-
diens de synthèse (ATS), de l'ordre de 50 % [19]. Dans ce cas,
l'aspect échodoppler est assez différent de la forme initiale
avec une glande plus hétérogène, plus échogène et une
vascularisation moins importante avec toutefois en doppler
pulsé des vitesses toujours élevées.
L'HAS a décidé de ne pas émettre de recommandation pour ou
contre la réalisation en pratique courante du doppler pulsé
Figure 14. Maladie de Basedow : hypervascularisation en doppler couleur.
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J-G Marchand et al.
comme facteur prédictif de rechute précoce de la maladie de
Basedow en cours de traitement. Pourtant, l'apport du doppler
pulsé est d'une grande aide [20]. Cette utilisation du doppler
pulsé permet de moduler la durée du traitement par ATS, en
l'interrompant avant 18 mois ou au contraire en la prolongeant.
En effet, il existe des cas de normalisation de la TSH et des
hormones périphériques alors que les paramètres dopplers
sont toujours pathologiques, signant la persistance de la
maladie.
Après traitement radio-métabolique (iode radioactif), le volume
thyroïdien diminue de l'ordre de 70 % et la vascularisation en
doppler couleur et pulsé se normalise [21].
Il existe des formes associées notamment avec la maladie de
Hashimoto (« Hashi-Basedow ») mais aussi avec un nodule
toxique, c'est le syndrome de Marine-Lenhart. Ce syndrome
est rencontré chez 2,7 à 4,1 % des patients atteints de maladie
 Imagerie des dysthyroïdies
Mise au point

Figure 15. Maladie de Basedow : augmentation des vitesses de circulation à 139 cm/s en doppler pulsé et du débit à 226 mL/min ici au
sein de l'artère thyroïdienne supérieure.

de Basedow [22]. L'échographie est d'une grande aide car elle

met en évidence un parenchyme basedowien avec le nodule
très richement vascularisé.

Phase hyperthyroïdienne (thyrotoxicose) des TAI

L'aspect échographique du parenchyme est celui d'une thy-
roïdite auto-immune, à savoir un parenchyme hypoéchogène
et dans cette phase est retrouvée une vascularisation souvent
riche en doppler couleur associée à des vitesses augmentées
en doppler pulsé mais inférieures à celles de la maladie de
Basedow, de l'ordre de 40 à 70 cm/s [15,18]. Cet aspect
échographique et notamment l'utilisation du doppler pulsé
est une aide diagnostique, il permet de différencier maladie Figure 16. Thyroïdite suraiguë : plage hypoéchogène « en aile de
de Basedeow et thyrotoxicose, comme le montre une méta- papillon » pouvant être confondue avec un nodule suspect.
analyse de 2019 (sensibilité de 86 % et spécificité de 93 %)
[23].

Thyroïdite subaiguë de De Quervain (TSA)

Cette thyroïdite fait suite à un épisode viral (épisode rhinopha-
ryngé banal) volontiers saisonnier au printemps et à l'automne.
Cliniquement, elle se caractérise par une douleur cervicale
irradiant à l'oreille. Biologiquement, un syndrome inflamma-
toire est quasi constant (élévation de la CRP – C reactive
protein). L'HAS ne recommande pas de faire une échographie
dans les formes typiques. L'échographie est très utile dans les
formes cliniques atypiques notamment peu douloureuses, et
rétrospectivement car les signes échographiques persistent
(jusqu'à un an) après régression des symptômes, pouvant
inquiéter à tort si une échographie est réalisée alors [24].
En phase initiale, le goitre est en général modéré, le paren-
chyme est hétérogène avec des zones focales hypoéchogè-
nes mal délimitées, très peu vascularisées, périphériques
typiquement en « ailes de papillon », pouvant facilement être
confondues avec des nodules suspects en cas de méconnais-
sance du phénomène inflammatoire (Fig. 16 et 17). L'hypo- Figure 17. Thyroïdite suraiguë : zones focales hypoéchogènes mal
échogénicité peut aussi être diffuse dans un lobe, voire les délimitées très peu vascularisées.

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 Mise au point
deux. La topographie des plages focales est évolutive dans le
temps avec notamment des formes dites « à bascule ».
Lors de la phase de récupération qui peut prendre plusieurs
semaines et jusqu'à 1 an, l'échogénicité se normalise et en
doppler couleur, on observe une hypervascularisation des
zones focales de thyroïdite.
Thyropathies iatrogènes
Les substances responsables de ces thyroïdites sont l'iode,
les cytokines, le lithium, les inhibiteurs des thyrosines-kinases,
l'immunothérapie et les hormones thyroïdiennes.
Hyperthyroïdie iodo-induite (HII)
Elle est principalement liée à l'amiodarone mais aussi, dans
une moindre mesure, aux produits de contraste iodés. Ce sujet
a fait l'objet de discussions au sein du groupe de travail de
l'HAS qui a conclu à la nécessité de la prise en charge par
l'endocrinologue.
Le clinicien attend de l'échographie dans le cas d'une HII liée
à l'amiodarone que l'on détermine s'il s'agit d'une HII de
type 1 ou de type 2 car la prise en charge médicamenteuse
peut être différente. L'HII liée à l'amiodarone est retrouvée
avec une fréquence de 7–15 % des patients traités [25] :
 l'hyperthyroïdie iodo-induite de type 1 correspond à l'activa-
tion d'une hyperthyroïdie fruste préexistante (nodule auto-
nome, TAI), l'iode agissant ici comme un « carburant ».
L'aspect échographique est donc celui de la pathologie
sous-jacente : maladie de Basedow frustre, nodule auto-
nome, goitre multinodulaire toxique ;
 l'hyperthyroïdie iodo-induite de type 2 est la plus fréquente. Il
s'agit ici d'un effet cytotoxique de l'iode mais aussi de la
molécule d'amiodarone [26]. L'aspect échographique est
celui d'une atteinte de type inflammatoire telle que retrouvée
dans les thyroïdites avec un parenchyme homogène, dis-
crètement hypoéchogène, associé à une vascularisation
pauvre et sans accélération des vitesses circulatoires en
doppler pulsé.
L'aspect échographique de ces deux formes fournit au clini-
cien le diagnostic étiologique et permet ainsi de choisir le
traitement adéquat [27,28]. Toutefois, il existe aussi des for-
mes mixtes de diagnostic plus difficile et la scintigraphie garde
alors une place dans les explorations.
Hyperthyroïdies iatrogènes non iodées
Les cytokines (notamment l'interféron alfa) peuvent donner
des hyperthyroïdies avec une fréquence de l'ordre 4 % [29].
L'aspect échodoppler est celui d'HII de type 2.
Le lithium donne peu d'hyperthyroïdies, de l'ordre de 1 % [30].
Les inhibiteurs des thyrosines-kinases peuvent être à l'origine
d'une hyperthyroïdie qui précède généralement l'hypothyroï-
die et correspondent à des phases de thyrotoxicose avec une
fréquence comprise entre 3 et 30 % en fonction des molécules
[31]. L'aspect échographique associe donc un parenchyme
hypoéchogène, une hypervascularisation en doppler couleur
et des vitesses modérément augmentées en doppler pulsé.
L'immunothérapie peut elle aussi donner une hyperthyroïdie
qui correspond à une phase de thyrotoxicose parfois sévère
avec une fréquence comprise entre 3 et 16 % [32]. L'écho-
graphie peut à nouveau aider au diagnostic en montrant les
signes d'une thyroïdite destructrice [33].
La thyrotoxicose factice répond à la prise cachée d'hormones
thyroïdiennes en vue d'un amaigrissement. L'échodoppler
strictement normal (sauf en cas de thyropathie préexistante)
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contraste avec les signes cliniques, une TSH basse et un taux
de thyroglobuline bas [34].
Syndrome d'autonomisation
Il s'agit d'une autonomisation du parenchyme thyroïdien sous
forme nodulaire ou diffuse suite à une mutation activatrice du
récepteur de la TSH. Les cellules mutées sécrètent donc des
hormones thyroïdiennes sans régulation de l'axe thyréotrope.
La scintigraphie est l'examen de référence pour étudier cette
anomalie fonctionnelle. Trois phases successives peuvent
être distinguées : le nodule autonome, le nodule prétoxique
et le nodule toxique :
 le nodule autonome est hyperfixant (« chaud ») au sein d'un
parenchyme fixant normalement en scintigraphie, la TSH est
alors normale ;
 le nodule prétoxique est hyperfixant mais avec une extinc-
tion partielle du parenchyme, la TSH est en baisse ;
 enfin, le nodule toxique est hyperfixant au sein d'un paren-
chyme complètement éteint, la TSH est alors très basse et
les hormones prériphériques élevées.
L'histoire naturelle de ces nodules autonomes étant l'évolution
vers la toxicité avec un taux de 4 % par an, il est important de
dépister ces nodules à un stade non symptomatique [35].
Nous pouvons être amenés à détecter un nodule autonomisé
lorsque la TSH est inférieure à la normale mais il est important
de savoir qu'environ 50 % des nodules autonomes sont à TSH
normale [36]. La scintigraphie n'étant plus systématique, il
n'est donc pas rare de méconnaître ce caractère autonome.
Lorsqu'une cytoponction est réalisée dans ce type de nodule,
elle est le plus souvent de type indéterminé, en raison d'une
celullarité intense aboutissant bien souvent à une chirurgie
d'intérêt discutable. Or les thérapeutiques non chirurgicales
comme le traitement radiométabolique par 131I sont simples et
très efficaces dans cette indication, mais aussi plus récem-
ment la thermo-ablation par radiofréquence qui obtient d'excel-
lents résultats, notamment en cas de contre-indication à la
thérapie par iode radioactif ou à la chirurgie [37].
Nodule autonome
L'échogénicité de ces nodules est variable, plutôt isoéchogène
[38]. Le doppler couleur et pulsé apporte de précieux rensei-
gnements car dans ce type de nodules, il est généralement
observé une hypervascularisation de tout le nodule (Fig. 18)
associée à une augmentation des vitesses circulatoire au sein
du nodule mais aussi au sein de l'artère thyroïdienne dont il
dépend (Fig. 19). Le doppler permet de détecter des nodules
autonomes avec une sensibilité comprise entre 90 et 96 %
[28,39].
Autonomisation diffuse
C'est une hyperthyroïdie non nodulaire et non basedowienne.
L'atteinte dans ce cas est de type dystrophique micronodu-
laire, isoéchogène et dont la vascularisation est variable.
Thyrotoxicose gestationnelle transitoire
C'est la première cause d'hyperfonctionnement thyroïdien
pendant la grossesse (3 % des femmes enceintes) et elle
s'observe surtout au 1er trimestre. Elle s'explique par une
importante concentration d'HCG (hormone chorionique gona-
dotrope) stimulant le récepteur de la TSH en raison de la
similitude entre les deux hormones. L'aspect échographique
est celui d'une glande d'échogénicité normale et dont la
 Imagerie des dysthyroïdies
Figure 18. Hypervascularisation en doppler couleur d'un nodule autonome.
Figure 19. Augmentation des vitesses circulatoires au sein de l'artère thyroïdienne dont dépend le nodule de la Fig. 18.
vascularisation n'est que faiblement augmentée avec des
vitesses systoliques normales dans les artères thyroïdiennes.
Nous voyons bien ici l'intérêt de l'échographie qui permet de
différencier en général facilement une maladie de Basedow et
une thyrotoxicose gestationnelle transitoire. Cependant, le
diagnostic repose essentiellement sur l'absence d'élévation
des anticorps antirécepteurs de la TSH.
CONCLUSION
L'échographie doppler est l'imagerie de 1re intention des dys-
thyroïdies. L'échographie doppler mesure le volume glandu-
laire, évalue l'extension locale du goitre, recherche et
caractérise le ou les nodule(s) thyroïdien(s), étudie la
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Mise au point
vascularisation et détermine la présence d'une thyroïdite
sous-jacente (aspect échographique associant une glande
hypoéchogène et hétérogène). Elle participe en association
avec la biologie et la scintigraphie thyroïdienne au diagnostic
causal d'hyperthyroïdie. Elle module la durée du traitement par
ATS dans la maladie de Basedow grâce à l'utilisation du
doppler pulsé.
Protection des droits des sujets humains et animaux
Les auteurs déclarent que les travaux décrits n'ont pas impliqué
d'expérimentations sur les patients, sujets ou animaux.
Consentement éclairé et confidentialité des données
Les auteurs déclarent que l'article ne contient aucune donnée
personnelle pouvant identifier le patient ou le sujet.
151
 Mise au point
Déclaration de liens d'intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.
Financement
Cette étude n'a reçu aucun financement spécifique d'une agence
publique, commerciale ou à but non lucratif.
Contribution et responsabilité des auteurs
L'ensemble des auteurs attestent du respect des critères de l'Inter-
national Committee of Medical Journal Editors (ICMJE) en ce qui
concerne leur contribution à l'article.
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