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Le viol sous l’Ancien Régime

Sous l’Ancien Régime, le terme de viol n’exister pas encore. Ce terme est apparu et a été utilisé
couramment à partir du XIXe siècle. Était alors utilisé le terme de rapt ou de forcer une femme.

Le terme de forcer une femme montrer l’usage de la violence sur la victime. Or le rapt avait un sens
différent. Selon le dictionnaire Larousse, le rapt est le fait de s’emparer illégalement de quelqu’un,
c’est un enlèvement, un kidnapping. Autrement dit, c’est le fait d’enlever une femme de chez elle pour
avoir des relations sexuelles forcées avec. Lorsqu’il y avait un rapt, il n’y avait pas besoin de prouver le
viol car on présume de manière incontestable que l’enlèvement était pour le viol.

La définition moderne du viol est inscrite dans l’article 222-23 du Code Pénal qui indique que « Tout
acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la
personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un
viol. Le viol est puni de quinze ans de réclusion criminelle. »

Sous l’Ancien Régime, du XVIe au XVIIIe siècle, il y a viol lorsque la femme est forcée d’avoir des
relations sexuelles. Le viol faisait partie de la catégorie de violence. Les violences sont très condamnées
à cette époque. Il faut donc montrer qu’il y a bien eu viol par des preuves : il faut des traces matérielles
et des indices corporels. Pour que la justice puisse la croire, la victime avait besoin de se faire entendre
en criant pour attirer des passants afin qu’ils soient témoins du viol, et ainsi pour qu’ils témoignent en
cas de procès. La gravité de l’acte commis est déterminée par l’atteinte de l’honneur de la famille. Les
familles de la victime tel que le père, les frères ou le conjoint sont d’autant plus victime que la propre
victime.

Du XVIe au XVIIIe siècle, à Paris, il y a seulement 49 dossiers de viol puni qui sont recenser. Et pour le
XVIIIe siècle, seulement 20, mais alors pour quelles raisons, sous l’Ancien Régime, y a-t-il eu si peu de
condamnation pour viol ?

Il y a peu de condamnations pour viol car le principal motif de condamnation était l’atteinte à l’honneur
(I) et s’ajoute à cela une passivité de la justice (II).

I – Un enjeu d’honneur

L’honneur étant quelque chose de fondamental, porter atteinte à celui-ci était fortement condamné
dans les textes juridiques avec des punitions importantes (A) et ces punitions étaient donner selon la
gradation de la gravité de l’acte commis (B).

A/ Punitions du condamné

Pour punir quelqu’un accusé de viol sous l’Ancien Régime, « les juges classiques n’accordent foi à la
plainte d’une femme que si tous les signes physiques, les objets brisés, les blessures visibles, les
témoignages concordants permettent de confirmer son propos. » (Histoire du viol, de Georges
Vigarello). La victime doit apporter des preuves afin que le violeur soit condamné selon les différentes
punitions que la justice de l’Ancien Régime a mis en place.

Mais avant tout, pour empêcher toute forme de violence ou violence sexuelle, la société de l’Ancien
Régime fait office de terreur. Elle choisit d’avoir une image terrifiante et de cruauté en matière de
punitions. La violence est utilisée pour incriminer la violence de ceux qui la commettent. Il y a une sorte
d’application de la loi du Talion. La politique de l’Ancien Régime sait se faire craindre par les
souffrances qu’elle fait endurer à un condamné avec notamment le fouet, la pendaison, le bûcher, le
poing coupé, etc. Ils mutilent le corps du condamné en mettant en place une offense physique.

Généralement, la punition ultime d’un violeur est la condamnation à la peine de mort par pendaison.
Cette condamnation est inscrite dans les textes juridiques : « Le ‘’violemment des femmes’’ est un
crime ‘’exécrable’’ disent ces textes, il anéantit les familles et défie le roi : ‘’C’est un crime capital qu’on
punit de mort’’ ; un acte de ‘’tigre affamé’’, un geste de ‘’bouc puant’’, imposant une vengeance
solennelle et publique : la pendaison, mais parfois aussi ‘’la mort accompagnée de cruels tourments’’ »
(Histoire du viol, G. Vigarello). Cette condamnation est à l’image de celle du Moyen-Age où le violeur
était condamné de peine de mort par pendaison également, s’ajoutant à cela l’arrachement des yeux
et la castration.

Cependant, malgré les textes juridiques sévères concernant la condamnation du violeur, la peine de
mort était utilisée que très rarement. Car il y avait une gradation de la gravité de l’acte selon
l’appartenance sociale, le degré d’atteinte à l’honneur, selon le profil de la victime ou encore le
contexte du viol.

B/ Le gradation de la gravité de l’acte

Il y a une tentative de gradation de la gravité de l’acte et très souvent il y a une impunité sociale. C’est-
à-dire que la gradation de la gravité des actes se faisaient généralement selon l’appartenance sociale
de celui qui a commis le viol ou de la victime. Ainsi, l’accusé qui était haut placé dans la société, avait
beaucoup moins de risque de se faire condamner qu’un homme étant en bas de l’échelle sociale. Un
violeur considéré comme « indigne socialement » avait des peines plus lourdes. Il y a en fait, une
indignation sélective. La réalité est donc tout autre et bien différente des textes juridiques qui
condamne, en principe, fortement le violeur. De plus, la condamnation se fait également selon une
hiérarchisation des actes jugé plus ou moins grave.

Lorsqu’il y avait un ravissement de la virginité sur une jeune fille, la condamnation était plus lourde car
étant vierge cela porte d’autant plus atteinte à son honneur mais aussi celui de son père ou de ses
frères. Le Dictionnaire de droit de 1749, indique que « moins la fille est âgée, plus celui qui l’a forcée
est criminel. » La perte de la virginité est un signe de perte de valeur pour la fille, c’est un des enjeux
d’honneur les plus décisif.

Les relations hiérarchiques était également considéré comme très grave car par exemple, un
professeur et un élève ont généralement une relation de confiance que ce soit avec l’élève ou la famille
de l’élève. Le professeur exerce une certaine influence sur ces élèves. Ainsi en commettant un viol,
cela était considéré comme une violation de cette relation de confiance et une atteinte à l’honneur
d’autant plus importante.

Ce qui formait une exception à ces condamnations de viol, concerné principalement les militaires qui
dans un contexte de guerre commettait un viol. Ils n’étaient pas condamnés pour cela, leur acte était
justifié. Mais aussi, lorsque la victime était une prostituée, comme elle n’avait ni famille, ni mari, ni
enfants elle était considéré comme n’ayant pas d’honneur donc il y a une impossibilité à faire
condamner l’accusé car en rien l’honneur de la victime est touché.

Mais encore lorsqu’un homme marié avait commis un viol sur sa servante, ce n’était pas considéré
comme tel mais plutôt comme un adultère et la question se poser si ce n’était pas la femme qui l’avait
poussé à le faire du fait des trop nombreux préjugés sur les femmes qui ont alimenté les mentalités
durant l’Ancien Régime.

Ou encore lors des jours de fête, lorsque les hommes ivres violer des femmes, ils n’étaient pas
condamnés car leur abus de consommation de nourriture et de boisson justifie le viol.

Une citation du livre Histoire du viol de Georges Vigarello résume bien cette hiérarchisation de la
gravité des actes : « La sensibilité à la violence n'a pas les mêmes critères ni les mêmes degrés,
longtemps focalisée sur le statut des acteurs, leur prestige, leur vulnérabilité, admettant longtemps et
implicitement une brutalité quasi ouverte envers les dominés. »

Une relation sexuelle forcée, peu importe le contexte, n’était pas toujours considéré comme un viol
sous l’Ancien Régime. Et souvent les peines des violeurs étaient de donner une compensation
financière pour les plus riches et des coups de fouets pour d’autres. Les douleurs physiques et
psychiques de la femme était au second plan, car l’enjeu principal était la perte d’honneur des hommes
de son entourage. De plus, une partie des inculpés était condamné plus pour les violences commises
que pour le viol en lui-même. Les juges prenaient donc en compte d'autres circonstances, ce qui
rendaient la justice passive vis-à-vis des condamnations des violeurs.

II – Une justice passive

La justice était passive à cause des contraintes qui s’imposaient au juge (A) ce qui avait pour
conséquence la rareté des procès pour viol (B).

A/ Contraintes à la condamnation

Pour justifier cette passivité de la justice par rapport aux faibles condamnations des violeurs, la justice
se dit impuissante à causes de nombreux obstacles et contraintes qui vienne leur empêcher de
condamner l’accusé :

- Il y a un grand nombre de personnes coupables à juger et condamner


- Le manque d’aide pour le magistrat chargé d’instruire
- L’absence de police judiciaire

S’ajoute à cela le type de preuves à apporter à temps avant qu’elles ne disparaissent et les nombreux
préjugés associés aux femmes. Des préjugés tel que la femme avait la force de se débattre pour
empêcher le violeur de passer à l’acte sans prendre en compte le traumatisme qu’elle pouvait éprouver
sur le coup sans qu’elle ne puisse ni bouger, ni crier, ni se débattre.

Dans la Genèse, lorsqu’Eve influence Adam en lui donnant la pomme pour qu’il la mange fait que les
femmes sont considérées comme vicieuses et pouvant influencer l’homme. Ce qui pousserai l’homme
à avoir des relations avec. S’ajoute à cela, l’identité du violeur et le contexte du viol, rappelé
précédemment, tel que les militaires dans un contexte de guerre qui ne sont pas condamnés et
l’identité de la victime qui était prise au sérieux ou non, comme les prostitués.

Toutes ces supposées contraintes, font qu’il y a une rareté des procès.
B/ La rareté des procès

La rareté des condamnations se fait donc par les contraintes et obstacles auxquelles fait face le juge.
En effet, les accusés sont peu condamnés ce qui entraine une rareté des plaintes car il y a une
impression que justice n’est pas faite. Les victimes vont faire toute une procédure, vont se lancer dans
un long processus, vont perdre du temps dans l’implication dans cette affaire, vont perdre de l’argent,
pour qu’au final, la sentence était déjà connue avant même de lancer la procédure : l’accusé ne sera
pas ou peu condamné.

Souvent, la plainte n’est même pas entendue : il n’y a pas le désir de connaitre les faits, ainsi les accusés
passent dans l’oubli et ne sont pas interrogés. Ce phénomène s’explique par le fait qu’un apport de
preuves pour que le témoignage de la femme soit pris en compte était essentielle. Il fallait donc des
traces matérielles et des indices corporelles : des blessures sur le corps, des traces de sang, des
témoins présents lors du viol, etc.

Il fallait donc porter plainte dans l’immédiat, cependant les victimes de viols, à cause du traumatisme
vécu, ne sont pas dans la capacité de pouvoir expliquer les faits, elles ont des troubles psychiques que
les policiers sous l’Ancien Régime ne prennent pas en compte car elles étaient sans émotions
lorsqu’elle témoigner, oublier des choses, etc. Ou encore, elles ne peuvent pas porter plainte car n’ont
pas de preuves, les blessures se sont estompées et les témoins ont surement oublier les faits, si cela
fait des années que l’épisode s’est passer. En d’autres termes, lorsqu’il n’y a pas de preuves, la plainte
n’est pas prise au sérieux.

S’ajoute également cette question d’honneur. Porter plainte et aller devant la justice pour viol, c’est
rendre public cet acte considéré comme humiliant car il porte atteinte à l’honneur de la victime. Ainsi,
cela pouvait être un motif empêchant les victimes de porter plainte. D’autres motifs s’ajoutent à cela,
comme le fait que la victime peut être condamné pour diffamation, car, en portant plainte, elle porte
atteinte à l’honneur de l’accusé si elle n’arrive pas à prouver le viol.

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