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La recommandation internationale de séparation administrative des deux

pouvoirs n'est intervenue qu'à la 4ème Conférence du SSCC RSAA en 1929 à


Paris (où la Roumanie était représentée par Jean PANGAL 33), ainsi que par
l'adoption du point 5 des « Principes de régularité et reconnaissance » de
l'UGLE, également créée la même année.
Avant la Première Guerre Mondiale, notre
Ordre Maçonnique comptait environ vingt-
sept Loges Symboliques. Moroïu s'est
distingué en créant des liens forts entre la
Grande Loge Nationale Roumaine et de
nombreuses loges maçonniques dans le
monde, devenant même membre d'honneur de certaines d'entre elles. Le rôle
de Constantin Moroïu fut donc décisif, celui-ci devenant à juste titre le
fondateur de la franc-maçonnerie roumaine moderne, à travers
l'établissement et la reconnaissance de la Roumanie en tant que puissance
maçonnique indépendante et souveraine. Parmi les attributions majeures
ayant une implication directe sur la société civile, mentionnons celle de la
création d'imprimeries, dans le but évident de propager les nouvelles
orientations socio-administratives et économiques du pays. La première
publication de la nouvelle région récupérée est née à l'été de 1879, à Tulcea,
appelée, non par hasard, « l’Etoile de Dobroudja », Feuille d'intérêts locaux.
Hebdomadaire dont seuls les numéros du 27 novembre 1879 et du 3
septembre 1883 ont été conservés, bien qu'il ait eu une vie plus longue. Le
10 mai 1880, apparaissait Le Phar de Constanţa, le journal officiel du Comté
de Constanţa, parut à Constanţa. A cette occasion, le préfet Remus Opreanu
a acqui la première imprimerie de la ville. Cette publication a été suivie par
la Roumanie Trans-Danubienne et Le Triangle, et à partir de 1882 – par La
Gazette de Constanţa et L’Eco de Dobroudja.
Le Triangle, sous-intitulé Le Journal de la Maçonnerie de Roumanie, a eu
une apparition controversée: d'abord à Bucarest, en mai 1880, jusqu'en
octobre 1882, puis à Mangalia, à partir de novembre 1882, jusqu'en
septembre 1883. Il revient ensuite à Bucarest et cesse son activité,
probablement en 1885. Il apparait mensuellement, au format in quatro, sans
illustrations, l’abonnement y coûte 8 lei par an étant édité exclusivement par
C. M. Moroïu. Le Grand Maître Constantin Moroïu (en tant qu'officier de la
garnison de Mangalia, en mai 1882), s'occupe de l'établissement de la
« Loge de l’Étoile du Midi » à Mangalia et de l'apparition mensuelle du
Triangle. Bien qu'il mène une vie de caserne, placé à une unité militaire
frontalière, dans une ville qui vient de renaître à la vie roumaine, il entretient
un lien permanent avec des loges de tous les coins du pays, mais aussi avec
des frères d'Europe. Mangalia n'était qu'un village d'environ un millier
d'âmes, un conglomérat ethnique où certains initiés avaient besoin de
traducteurs pour apprendre le rituel maçonnique. Ainsi, après l'arrivée de
Constantin Moroïu à Constanța et Mangalia, la ville portuaire de la côte
ouest-pontique connaîtra une période d'émulation dans le domaine
maçonnique. Ici, Moroïu remplira à la fois les obligations imposées par la
position militaire qu'il occupait, ainsi que celles maçonniques, qu'il avait
assumées en tant que Grand Maître de l'Ordre Maçonnique Roumain. Moroïu
exerce son œuvre maçonnique en s'appuyant sur une série d'officiers de
l'armée roumaine, que l'on retrouvera dans de nombreuses loges, dont celles
de la zone située entre le Danube et la mer Noire. L'implantation de la
première loge à Constanța est liée au nom de Ștefan Corvin (1844-1913), qui
travaillerait après le 23 novembre 1878 en tant que médecin, dans les
hôpitaux militaires et civils de la ville. De la publication mensuelle du
Triangle nous apprenons qu'en mai 1882, par la décision de Constantin
Moroïu, Ștefan Corvin avait été autorisé à établir, dans l'ancienne ville de
Tomis, une loge nommée Le Phare. Ainsi, lors de la réunion du 29 septembre
1882, les dignitaires suivants ont été élus: docteur Ștefan Corvin - vénérable,
capitaine R. Alexandrescu et lieutenant Ghiță Emanuel - superviseurs, I.
Iordănescu - orateur, sous-lieutenant D. Vasiliu - secrétaire , H. Hagi Artin -
trésorier et aubergiste, P. Mihăilescu, grade 32 - grand expert et maître de
cérémonie, N. Costescu - architecte, T. Mihăileanu - représentant à la Grande
Loge Nationale de Roumanie et Ioan Petroianu - représentant à la loge
« l’Étoile du Midi » à Mangalia. Lors de la réunion du 20 novembre 1882,
avec les personnes inscrites, Constantin Moroïu et Oreste Cecchi ont été élus
vénérables honoraires de la loge Le Phare, ce dernier ayant depuis le 7 mai
1882 également la qualité de représentant du Conseil Suprême 33 de
Roumanie et du Suprême Conseil 33 d'Italie. En février 1883, le Souverain
Sanctuaire de grade 33, admettant la loge du Phare sous ses auspices, la
constitua en loge capitulaire, celle-ci acceptant l'Ancien Rite Primitif de
Memphis. Le même mois, la loge La Propagande de Memphis à Bucarest
affilie I. A. Seni, membre de la première loge de l’ancienne ville de Tomis.
De l'album olographe intitulé « La Chronologie », compilé par le colonel I.
T. Ulic, nous apprenons la création d'un chapitre et de neuf loges : le Chapitre
« Les Chevaliers de Dobroudja », « La Valée de Tulcea », le 27 mars 1882,
la Loge « L’étoile du Midi » à Mangalia, le 7 mai 1882, La loge « Le Phare »
de Constanța, le 29 septembre 1882, la loge « La Gloire Roumaine » de
Babadag, le 5 mars 1883, la loge « Mircea le Grand » de Medgidia, le 5 mars
1883, la loge « La Modestie de Tulcea », le 6 juillet 1883, la loge « La
Nouvelle Roumanie » d'Ostrov, le 26 juillet 1884, la loge « Ovide » de
Medgidia, le 3 août 1884 et la loge « l’Étoile de Dobroudja » de Constanţa,
le 8 septembre 1892. En 1905, les loges qui étaient encore actives étaient:
« l’Étoile du Midi », à Mangalia, « La Roumanie », à Ostrov, et « l’Étoile de
Roumanie », à Babadag, se trouvant toutes sous l'obédience de la Grande
Loge Nationale de Roumanie.
Néanmoins, la décision la plus audacieuse de Constantin Moroïu, pour
l'époque, fut d'initier ses propres filles, Maria et Elena, à la Loge « l’Étoile
du Midi » à Mangalia. Leur initiation n'était pas accidentelle, son ami Michel
Kogălniceanu ayant des opinions bien avancées sur le statut des femmes dans
les pays roumains mais aussi sur ce que celui-ci devrait devenir, se
distinguant par une attitude très raffinée et quelque peu émancipée envers les
femmes, sur le sexe féminin qu’il décrirait en 1841 comme :
« La femme, dans mon lexique, désigne un être tendre, faible, joli, beau, conçu de
fleurs, d'harmonie et des rayons de l’arc-en-ciel, capricieux, parfois mauvais, bon
le plus souvent, un être fait pour l'amour, destiné à enchaîner les héros les plus
inflexibles, qui pour un sourire te fait vendre l’âme dans ce monde et ta partie du
ciel dans l'au-delà, qui a une âme comprenant tout ce qui est beau, qui pour la
moindre chose tantôt pleure et tantôt est à même de sacrifier sa vie, fait qui lui
permet de mettre en œuvre les plus audacieuses actions, qui est tantôt apprivoisée
comme une colombe, tantôt furieuse comme une lionne et qui agit tantôt
cruellement, tantôt miséricordieusement; la femme est un mélange de grâces, de
bonté, de méchanceté, d'esprit, de coquetterie, de faiblesses et de force, qui confine
toute sa vie à aimer et à être aimée; une femme, enfin, c'est quelque chose qui ne
peut être ni décrite, ni nommée, ni déterminée mathématiquement, étant une chose
que l’on pourrait nommée « la chose la plus rare en Moldavie »(...) (Du moins en
Moldavie, n.n) on trouve assez de mères, d’épouses, de veuves, de filles, de salopes,
d’estropiées, des femmes des bourgmestres ou des premiers-ministres, des
boulangères, d’épicières, de marchandes ou de négociantes, de gitanes et d’autres
créatures similaires qui naissent, grandissent, se marient, ont des enfants et se
meurent. Pourtant des femmes, c'est un peu difficile d’en trouver ! » (terme mis en
gras dans l'original). Néanmoins, l'essayiste restait d'avis, relativement atypique de
son époque, « qu'une femme est faite pour quelque chose de plus élevé que de
donner des ordres et de ne rechercher que les corvées prosaïques de la maison; je
l'estime d'une mission plus noble dans la société européenne. Par conséquent,
bien que mon enthousiasme pour Napoléon submerge toute comparaison, je ne
peux cependant lui pardonner sa haine injuste envers Madame de Staël, simplement
parce qu'elle était une femme de génie... »1
Ainsi, l'initiation des filles de Moroïu à la franc-maçonnerie, en 1883, a non
seulement ouvert la voie à la franc-maçonnerie féminine ou mixte en
Roumanie, bien avant l'Europe de l'Ouest!, mais, outre une série d'autres
«entreprises maçonniques », parmi lesquels nous citons : Le Conseil pour la
Roumanie à partir de 1882, ou la fondation du Chapitre de la Grande Arche
Royale, à partir du 5 juillet 1882 et l’établissement des liens avec les
Suprêmes Conseils de Belgique et de France, ensuite devenant Membre
Honoraire de la Loge Fratellanza Universale à Pise, Italie ou celui de 1883,
en tant que Grand Maître Honoraire du Suprême Grand Conseil Général de
Misraïm aux États-Unis d'Amérique, place Constantin Moroïu parmi les
francs-maçons les plus éminents du pays. L'initiation de ses filles par le

1
Mihail Kogălniceanu, Illusions perdues. Dans Ecrits. Textes choisis et étude introductive par Geo Şerban.
Bucarest: Maison d'édition Tineretului. Extraits cités des pp. 60-61.
baptême maçonnique est un fait unique dans l'histoire de la franc-maçonnerie
roumaine et universelle, comme les analystes allaient apprécier plus tard, qui
a provoqué à l’époque des réactions contradictoires aboutissant
apparemment au retrait des titres des deux jeunes femmes. Mais, le fait était
déjà consommé et la voie vers la franc-maçonnerie féminine ou mixte était
grande ouverte. Le fait qu'en 1883 et 1905 il soit devenu Garant du
Souverain Sanctuaire de Grande-Bretagne et d'Irlande dans le Souverain
Sanctuaire de Roumanie et qu'en 1883 et également en 1905 il ait été élu
garant de l'amitié du Conseil Suprême de la Juridiction du Nord des États-
Unis d'Amérique et du Conseil Suprême pour le Mexique en Roumanie ou
qu'en 1886 il fonda la Loge « Constantin Moroïu » au Caire, en Egypte, et
en janvier 1899 il promulgua la nouvelle Constitution maçonnique, fait du
PR Grand Maître Constantin M. Moroïu le véritable artisan de
l’affranchissement et de l'émancipation de Dobroudja et de la Roumanie
moderne.
C. Moroïu allait se retirer de l'activité en 1911 à l'âge de 77 ans, « fatigué par
le travail et la vieillesse », comme il l'explique dans son acte d'abdication,
laissant le prince George-Valentin Bibescou 33, son gendre, comme
successeur. Les liens avec la franc-maçonnerie européenne et mondiale ainsi
que l'activité inlassable visant à mettre la Roumanie indépendante sur la carte
maçonnique du monde, rendent Constantin Moroïu non seulement un ami et
un collaborateur de Michel Kogălniceanu dans la libération et l'émancipation
de la Roumanie moderne libérée du joug culturel levantin, mais surtout un
véritable fondateur du nouvel État qui poursuivra son développement avec
la réunification de 1918.

Bibliographie et webographie sélectives:


 Basil, Grigore, (2006), Francmasoneria pe teritoriul Dobrogei,
1875-2005, Editura Muntenia, p.55;
 Encyclopedia of Revolutions; Gorovei, p.9; Iorga, La Monarchie de
juillet et les Roumains;
 Farul Constanţei, ll, nr.37, 25 ianuarie 1881, p.3;
 https://cararilevirtutii.ro/constantin-Moroïu/;
 https://ro.wikipedia.org/w/index.php?title=Mihail_Kogălniceanu&ve
action=edit&section=13;
 https://templulmasonic.blogspot.com/2021/09/constantin-
Moroïu.html;
 https://www.cugetliber.ro/stiri-cultura-educatie-secretele-masoneriei-
constantene-care-a-fost-prima-loja-din-tomis-260953;
 https://www.mangalianews.ro/2020/02/22/mangalia-si-marele-
maestru-constantin-m-Moroïu-episodul-5-al-serialului-municipiul-
mangalia-la-25-de-ani/;
 Iordachi, Constantin, 2002, Citizenship, Nation-and State-Building:
The Integration of Northern Dobrogea into Romania, 1878-1913,
University of Pittsburgh Press;
 Kogălniceanu, Mihail, (1908) Iluzii pierdute. Ed. Librăriei Socec, În
Scrieri. Texte alese și studiu introductiv de Geo Șerban. București:
Editura Tineretului, 1967, p. 60-61;
 Lăpușan, Aurelia & Lăpușan, Ștefan, (2018) Mangalia 100 de
repere, Editura Next Book, Constanța;
 Mironescu, Eufrosina, (1929) Din Memoriile lui Ion V. Moţoi, unul
dintre primii descălecători în Dobrogea de după Războiul din 1878,
în Analele Dobrogei, anul X, 1929, Institutul de Arte Grafice şi
Editura “Glasul Bucovinei”, Cernăuţi;
 Nestorescu-Bălceşti, Horia, (1993), Ordinul masonic român, Casa
de editură şi presă Şansa SRL Bucureşti, p.131;
 Surcel, Vasile, (2011) Istoria României și lojile masonice, Wayback
Machine, în Jurnalul Național, 11 octombrie 2004.

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