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Le rôle de Constantin Moroïu dans l'organisation de la franc-maçonnerie en

Dobroudja, mais aussi au niveau national, à travers l'établissement de la


Grande Loge Nationale en Roumanie, a été écrasant. Le choix de Moroïu
n'était pas du tout aléatoire. Ayant reçu une éducation militaire stricte et
faisant son début dans la grande famille de la maçonnerie en tant que
« louveteau », (Moroïu était le petit-fils de Costake Moroïu, l'un des premiers
professeurs du Collège « Saint-Sava » de Bucarest, qui avait poursuit des
études à l'étranger, d'où il rentra, en 1830, initié dans le Grand Est de l'Italie).
Initié à la franc-maçonnerie à l'étranger et appartenant à de nombreuses loges
étrangères, Moroïu était plus que providentiel pour la confrérie roumaine. Il
semblait être l'homme juste au bon endroit, tenant compte de la
multiethnicité de Dobroudja, mais surtout des difficultés hostiles-
irrédentistes avec lesquelles la nouvelle administration roumaine allait se
confronter. Comme la population autochtone était mixte, le territoire ayant
appartenu à l'Empire Ottoman, en particulier celle d'origine turco-tatare ne
regardait pas la nouvelle administration d'un bon œil. Aussi n’y
opposerait-elle plus qu'un dédain interethnique pendant une courte période.
Iancu Moţoi rapporte dans ses mémoires :
« Ceci (le chef des Tatars du village où ils ont mis pied à terre, n.n.) nous a
accueillis avec résignation et pendant de nombreuses années, que nous avons bien
cohabité, nous nous sommes bien entendus avec tout le village. De plus, ils ont
toujours dit qu'ils étaient plus satisfaits de l'administration roumaine que de
l'administration turque. Ils ont reconnu que les Roumains ne les prenaient pas en
ennemis - au contraire, ils les traitaient de la même manière que les colons installés
autour d'eux. Certains d'entre eux, les plus jeunes, avaient très bien appris le
roumain, et ils étaient très satisfaits de la nouvelle administration. Ils étaient des
gens bigots et obstinés, mais ils étaient soumis et honnêtes. »
Par contre, le plus dangereux et le plus difficile à adapter était l'élément
ethnique bulgare, qui a soulevé des revendications sur Dobroudja depuis
vant les Guerres des Balkans. Ainsi les Bulgaires volaient, tuaient, violaient
en se livrant à des actes répréhensibles et la stabilisation de ce segment de
population ne pouvait se faire que par l'imposition de la loi, mais surtout
par l'adaptation volontaire de la communauté aux nouvelles réalités
administratives. Et ici la maçonnerie et Constantin Moroïu allaient jouer le
rôle dominant du modélage social. Moroïu fut initiée dans la Maçonnerie
en juin 1874 à Bucarest, dans la Loge « Les Sages d'Héliopolis » sous
l'obédience du « Grand Orient de France », se trouvant sous la direction
spirituelle du Vénérable Maître Dr. Carol Davilla. Il a été élevé au degré
sublime de maître maçon un an plus tard. A l'époque, le GOdF était
considéré comme une Obédience Régulière, la rupture avec la « Grande
Loge Unie d'Angleterre » (UGLE) n'ayant lieu qu'en 1877. Les « Sages
d'Héliopolis » étaient un Atelier réputé, rassemblant aussi bien des
dirigeants libéraux que conservateurs ainsi que les plus importants
banquiers israéliens, impliqués dans le financement du développement
économique du jeune Etat. La Loge représentait le noyau d'influence de la
soi-disante «monstrueuse coalition anti-Cuza». À cette fin, la loge a attiré
des soldats, cooptés pour le plan visant à supprimer le dirigeant et à
préparer un corps armé pour mettre en œuvre le coup d'État du palais. Les
officiers qui arrêtèrent Couza, le forçant à démissionner le 11 février 1866,
étaient des francs-maçons, membres de cette loge. Nous parlons du Frère
Constantin Pillat, du Frère Alexandru Lipoianu et enfin du Frère Anton
Costiescu. En effet, la Loge avait préalablement demandé et obtenu le
soutien du GOdF pour intervenir auprès des Grandes Puissances afin
d'installer la monarchie constitutionnelle en Roumanie et tracer ainsi une
voie européenne définitive pour le jeune Etat indépendant. En 1879,
Moroïu démissionna des « Sages d'Héliopolis » et fonda la Loge Militaire
« l’Etoile du Danube - Estrela del Danubio » sous l'obédience de « Grande
Oriente Lusitano Unido ». Plus tard, il réunit la plupart des loges
roumaines, jusqu'alors sous obéissance étrangère quelle qu’elle fut
française, italienne, allemande, portugaise, etc. Le 8 septembre 1880,
Moroïu constitua la Grande Loge Nationale Roumaine. C'est le moment où
la franc-maçonnerie roumaine passe du stade de la fragmentation en
obédiences étrangères à celui de la Grande Loge Nationale. En 1881,
Moroïu fonda le « Conseil Suprême de Roumanie du RSAA » dont il fut le
Grand Maître et Souverain Grand Commandeur jusqu'en 1911.

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