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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 21-550-A-02

21-550-A-02

Strabismes précoces
D Thouvenin

Résumé. – Le syndrome de strabisme précoce est l’ensemble des conséquences sensorimotrices oculaires
survenant dans les suites d’une rupture du développement visuel normal avant l’âge de 6 mois. Il est probable
que le déficit initial atteigne le mécanisme de fusion. À partir d’une revue de la littérature, nous exposons les
hypothèses pathogéniques, les signes et les traitements. Sur le plan sensoriel, il existe une correspondance
rétinienne anormale avec neutralisation. Les signes spécifiques du syndrome atteignent l’œil fixateur :
fixation en adduction et incyclotorsion, nystagmus manifeste latent, asymétrie du nystagmus optocinétique.
Les signes atteignant l’œil non fixateur sont moins spécifiques : strabisme, le plus souvent en ésotropie de
grand angle ; déviations dissociées ; anomalies cycloverticales diverses (dont élévation en adduction). Ces
signes évoluent avec l’âge. Le traitement médical vise à prévenir et traiter l’amblyopie, corriger un facteur
accommodatif associé et permettre une alternance de fixation. Le traitement chirurgical doit être précoce,
mais après préparation, et vise à mettre en microtropie. L’utilisation de la toxine botulique ouvre une voie
thérapeutique moins agressive et prometteuse.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : ésotropie précoce, strabisme précoce, strabismes infantiles, nystagmus manifeste latent,
déviations verticales dissociées, torticolis oculaire, toxine botulique.

Introduction. Définitions Le syndrome est assez fréquent et nous l’avions retrouvé dans 34 %
de 622 cas consécutifs de désordres oculomoteurs [44] , nous
rapprochant des données de la littérature. La fréquence globale est
Le strabisme précoce ou plutôt le « syndrome de strabisme précoce »
appréciée entre 0,1 et 0,5 % de la population générale.
est l’ensemble des signes oculomoteurs et oculosensoriels survenant
progressivement quand une déviation permanente des axes visuels
est présente avant l’apparition des liens binoculaires, en pratique Historique
avant l’âge de 6 mois de vie.
Le concept de strabisme précoce est assez récent. On a regroupé
Comme tout syndrome, il comporte un ensemble de signes dont
sous un même cadre pathologique des signes connus depuis
certains sont majeurs, quasi pathognomoniques, et d’autres plus
longtemps, isolant ainsi une entité strabologique particulière.
inconstants et de valeur diagnostique moindre. Le tableau évolue
avec le temps et tous les signes ne sont pas présents au même Worth (1905) et Chavaase (1934) isolent des strabismes dont la cause
moment. Certains apparaissent avec la croissance, d’autres remonte à la petite enfance, avec absence de fusion, le plus souvent
disparaissent ou s’amenuisent. Le strabisme, ou au moins sa part définitive.
horizontale, n’est qu’une facette du syndrome ; on l’observe en Costenbader [8], à partir de 1950, regroupe sous le terme d’ésotropie
grande majorité en convergence (ésotropie), mais parfois aussi en avec blocage en convergence, l’association d’un strabisme
divergence (exotropie), voire en quasi-orthotropie (microtropie). Ce d’apparition précoce, avec un grand angle de déviation, peu modifié
sont surtout les signes associés qui permettent de caractériser le par la correction optique. L’amétropie associée est souvent faible.
syndrome. Ciancia [7] en 1962 et Cuppers en 1964 précisent l’association de ce
Le terme de « strabisme précoce » (« infantile strabismus ») est syndrome à un nystagmus augmentant en abduction et diminuant
préférable à celui de strabisme congénital, car même si la cause peut en adduction, avec limitation bilatérale de l’abduction, fixation
être prénatale, le strabisme n’est que rarement permanent avant croisée et une composante accommodative faible. On appelle alors
quelques mois de vie [53]. En revanche, le dérèglement oculomoteur le syndrome « syndrome de Ciancia » en Amérique et « nystagmus
et sensoriel retrouve son origine durant les 6 premiers mois de vie, bloqué de Cuppers » en Europe.
phase de maturation fondamentale du système optomoteur, et laisse Lang, en 1967 [24] , a rattaché au syndrome la présence d’une
des séquelles durant toute la vie, quelle que soit la qualité du hyperphorie alternante, de l’excyclodéviation de l’œil non fixateur
traitement médicochirurgical [5]. Le terme « essentiel » (« strabisme et a fait la description globale du syndrome d’ésotropie précoce telle
essentiel à début précoce » de Hugonnier [21]) est parfois rajouté pour qu’elle est retenue actuellement.
signifier l’absence de cause connue, notamment paralytique, C’est par la suite que des explications pathogéniques ont été
musculaire ou accommodative. avancées à la lumière de découvertes neurophysiologiques récentes
concernant le développement de la vision binoculaire et de
l’oculomotricité. Si on reste incertain quant au mécanisme causal,
Dominique Thouvenin : Ancien interne des hôpitaux de Toulouse, chef de clinique-assistant des Hôpitaux,
on comprend mieux les relations unissant des signes sensorimoteurs
76, allée Jean-Jaurès, 31000 Toulouse, France. très variés dans le même syndrome.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Thouvenin D. Strabismes précoces. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Ophtalmologie, 21-550-A-02, 2002, 8 p.

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Développement normal et anormal selon l’œil fixateur et témoignent tous d’un arrêt du développement
de l’oculomotricité binoculaire. Le système fonctionne sur un mode
de la vision binoculaire monoculaire, qu’elle rapproche du syndrome du monophtalme
congénital [42] . Même si une certaine stéréoscopie, voire une
Les 6 premiers mois de vie sont considérés comme fondamentaux limitation des perversions oculomotrices peuvent être obtenues dans
dans le développement de la vision binoculaire et de l’équilibre des cas d’excellents résultats chirurgicaux réalisés précocement, une
oculomoteur. Hubel et Wiesel [20] démontrèrent que 80 % des vision binoculaire réelle, avec amplitude de fusion correcte, vision
neurones du cortex visuel étaient binoculaires. Ce sont les supports stéréoscopique au-delà de 120 secondes, et surtout correspondance
cellulaires des champs récepteurs et de la notion de points rétiniens rétinienne normale, n’est jamais récupérée.
correspondants. Les études ultérieures montrèrent que la vision dite
« binoculaire » était acquise chez l’homme durant les 6 premiers
mois de vie, au terme d’un développement sensoriel et moteur Syndrome de strabisme précoce
complexe. La présence d’un strabisme précoce est la preuve clinique
d’une anomalie de ce développement. Toutefois, il est probable que Il associe, de manière plus ou moins complète et évoluant avec le
plusieurs formes et plusieurs degrés d’atteinte et d’irréversibilité temps, certaines caractéristiques.
soient possibles selon la cause et le moment de l’atteinte.
À la naissance, les yeux sont le plus souvent en exotropie et la ANTÉCÉDENTS
coopération binoculaire est quasi absente [11]. La rétine de chaque œil Le plus souvent, l’enfant présentant un strabisme précoce est sain,
est sensible de manière fruste à la perception des mouvements neurologiquement normal, sans problèmes associés et sans
d’objets sur sa partie nasale, par les voies magnocellulaires, et antécédents. Toutefois, un certain nombre de situations prédisposent
capable d’induire des mouvements oculaires de poursuite à développer le syndrome. La présence dans la famille directe de
temporonasale. La stimulation de la rétine temporale est moins syndromes de strabisme précoce, voire d’anomalies plus frustes du
efficace, et il existe une quasi-impossibilité de déclencher une développement de la vision binoculaire (syndrome de déficience
poursuite oculaire nasotemporale. Ceci est bien représenté par fusionnelle de Parks avec neutralisation maculaire monolatérale)
l’étude du nystagmus optocinétique (NOC) [10] et plus récemment favoriserait l’apparition, mais les études à ce sujet manquent
des potentiels évoqués visuels (PEV) dynamiques [30] et de leur d’homogénéité quant à la définition des types de strabismes et
asymétrie avant l’âge de 6 mois. Nous avions pu aussi confirmer notamment en incluant parfois les strabismes d’apparition
cette prédominance initiale des voies visuelles croisées à cet âge et secondaire. Les lésions neurologiques pré- ou néonatales, par
sa persistance en cas de strabisme précoce sur des enregistrements souffrance neurologique, hydrocéphalie, embryofœtopathies… sont
d’électroencéphalogrammes numérisés avec étude de la réactivité associées à une haute fréquence de strabismes précoces (20 à 40 %
électrique du cortex visuel [49]. selon les auteurs), en raison de la perturbation évidente du
Le développement lié à l’expérience visuelle et la coopération développement de la vision binoculaire. C’est dans cette population
bioculaire permettent une symétrisation progressive du système que l’on retrouve le plus d’exotropies précoces, à tel point qu’un
optomoteur. Il est lié à la maturation de la macula, permettant une bilan neurologique doit être systématique devant la découverte
résolution monoculaire suffisante, à l’apparition de connexions d’une exotropie permanente avant l’âge de 6 mois. La prématurité,
synaptiques tout le long des voies visuelles jusqu’au cortex visuel pour les mêmes raisons, d’autant plus qu’associée à des hémorragies
primaire (V1). L’apparition de la vision binoculaire est liée au intraventriculaires, est liée à une haute fréquence de strabismes
développement de synapses horizontales entre les colonnes de précoces. Des amétropies importantes peuvent être responsables du
dominance oculaire des deux yeux dans la couche V1 [50]. La légère syndrome, par leur facteur accommodatif ou par un facteur de
disparité des messages de chaque œil est encodée pour aboutir à la déprivation si elles sont majeures. Une interruption prolongée et
perception stéréoscopique, d’autant plus fine que venant de champs précoce des connexions binoculaires, telle une amblyopie organique
récepteurs correspondants maculaires, voire fovéolaires. Dans le unilatérale congénitale, peut être responsable d’un strabisme précoce
même temps, l’oculomotricité se développe. On note une non alternant ou syndrome du monophtalme congénital, et nous
symétrisation de tous les réflexes visuomoteurs : la poursuite avions montré [48] que la récupération de l’amblyopie le transforme
oculaire devient symétrique et harmonieuse ainsi que le NOC. Ces en un syndrome de strabisme précoce alternant classique.
fonctions sont centralisées par les voies visuelles extrastriées ou
magnocellulaires. L’exodéviation initiale diminue en même temps
ÂGE DE DÉBUT DES SIGNES
qu’apparaissent les vergences. La fixation se stabilise. Les deux
fovéas se correspondent au niveau cortical et une véritable force Il est recherché à l’interrogatoire car l’enfant est rarement vu à cet
unit, verrouille l’image centrale binoculaire : c’est la fusion. Cette âge par l’ophtalmologiste. La déviation est notée par les parents ou
fusion est dite motrice par les Anglo-Saxons, notamment Helveston, les médecins traitants avant l’âge de 6 mois. Toutefois, elle peut
car sous dépendance des mouvements fusionnels. La fusion n’être constatée que plus tard, et confondue à tort avec un strabisme
sensorielle serait pour eux un phénomène passif survenant quand la à potentiel binoculaire normal. La recherche des signes associés
fusion motrice a permis une superposition parfaite et stable des pathognomoniques est alors fondamentale, notamment la présence
images bifovéolaires. Elle a en fait probablement un support d’un nystagmus manifeste latent ou d’une asymétrie du NOC.
sensorimoteur : les mouvements fusionnels sont induits par la
sensation de disparité des images transmises par les deux fovéas, et AMÉTROPIE ASSOCIÉE
nous ne parlerons que de fusion sans précision sur l’origine motrice
Elle est le plus souvent modérée : 40 % d’hypermétropes légers
ou sensorielle. Le centre neurologique de la fusion est intracérébral
(< 2 dioptries), 40 % d’hypermétropes moyens (2 à 5 dioptries), 10 %
mais n’est pas actuellement isolé. Il existe une période de latence
de myopes, 10 % d’hypermétropes forts pour Costenbader (in Von
pendant les premières semaines de vie durant laquelle des
Noorden [53]), statistiques confirmées ailleurs. Il est, en revanche,
anomalies telles qu’une paralysie ou un defect sensoriel transitoires
nécessaire de répéter les évaluations sous cycloplégiques dans les
sont sans conséquences. En revanche, un déficit plus profond
premières années, un facteur accommodatif pouvant se démasquer
touchant les centres neurologiques a des conséquences définitives
secondairement.
sur ce développement.
Le syndrome de strabisme précoce est probablement lié au non-
développement des liens binoculaires dans ces premiers mois de vie ANOMALIES SENSORIELLES
pour des raisons variables [17]. A Spielmann [43] pense que le système Les anomalies sensorielles binoculaires sont constantes et définitives
visuel reste alors archaïque, bioculaire, les deux yeux évoluant de pour la plupart. Si le traitement précoce minimise les conséquences
manière autonome. Les signes oculomoteurs et sensoriels alternent optomotrices et permet d’obtenir une meilleure qualité de vision

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binoculaire, il n’obtient jamais de vision binoculaire vraie avec et afin d’éviter la confusion avec les autres formes de nystagmus, on
amplitude de fusion normalisée et stéréoscopie de haut grade. Les devrait le nommer NCML [46]. Malauzat et Quéré [27] l’incluent dans
tentatives de normalisation de la vision binoculaire après prismation le groupe des tropies nystagmiques (association d’un strabisme et
et traitement déneutralisants n’ont jamais atteint un tel but. d’un nystagmus) dont il représente la majeure partie des cas (82 %
La neutralisation est le mécanisme puissant de lutte contre la des tropies nystagmiques, 53 % des nystagmus congénitaux). La
diplopie dans les grands angles de strabisme. Il s’agit le plus physiopathologie des NCML est totalement différente de celle des
souvent d’une neutralisation alternante selon l’œil fixateur. Cette nystagmus congénitaux patents (NCP). En effet, dans les NCML, le
neutralisation s’adapte assez facilement aux changements nystagmus est le témoin de l’immaturité du développement de la
angulaires, notamment après chirurgie, chez l’enfant. Toutefois, le binocularité sensorielle et motrice et toujours intégré dans le cadre
scotome devient plus étroit et moins plastique avec l’âge, ce qui d’un syndrome de strabisme précoce. À l’inverse, le NCP est le
souligne la nécessité de le tester en réalisant un test d’adaptation témoin d’une immaturité du réflexe de fixation et souvent observé
prismatique quand une intervention est envisagée à l’âge adulte. sans aucun strabisme ni trouble de la vision binoculaire associé. Il
La correspondance rétinienne anormale est constante, définitive s’agit de deux pathologies différentes, pouvant d’ailleurs coexister
mais finalement utile si l’angle est faible [5]. Elle permet alors sous la forme d’un nystagmus congénital mixte. Le NCML est une
d’obtenir une pseudovision binoculaire ou union binoculaire pathologie de l’œil fixateur, rendue plus évidente lorsqu’on le prive
(anomalous binocular vision), avec stéréoscopie de faible grade du soutien pourtant imparfait de l’autre œil. Il témoigne de
(toujours inférieure à 240 secondes d’arc) et même quelques l’attraction vers l’adduction avec nystagmus battant vers la tempe.
mouvements fusionnels (anomalous fusional movement). Quéré [34] a Le NCML s’observe et s’analyse assez facilement à l’examen
montré que cet état, qui n’est pas éducable ni rééducable, ne dépend clinique, éventuellement aidé par l’observation au biomicroscope,
que de l’angle strabique résiduel qui doit être inférieur à 8 dioptries mais il est au mieux décrit en électro-oculo-motilographie
horizontales et 4 dioptries verticales. Il ne garantit pas, selon lui, la (EOMG) [28] . C’est un nystagmus à ressort, le plus souvent
stabilité motrice ultérieure. horizontal, mais parfois avec une composante torsionnelle ou
La fréquence de l’amblyopie est diversement appréciée. Von verticale, apparaissant ou augmentant lors de l’occlusion
Noorden fait état de 35 % d’amblyopies sur 408 cas d’ésotropies monolatérale (composante latente). Les deux yeux ouverts, on
précoces. En revanche, fait étonnant, Calcutt [4] n’en retrouve que observe souvent un nystagmus moins important (composante
9 % chez 145 adultes ayant une ésotropie précoce prouvée jamais manifeste). Caractéristique spécifique, sa direction s’inverse selon
traitée. Quoi qu’il en soit, elle doit être le souci constant de la l’œil fixant : il bat du côté de l’œil découvert, vers la droite en
surveillance de ces strabismes précoces, sa prévention étant réalisée fixation monoculaire droite, et réciproquement. Son intensité
par le maintien d’une alternance de fixation, autant avant qu’après diminue en adduction et augmente en abduction, ce qui explique ou
intervention. au moins s’associe au torticolis de fixation en adduction et à la
préférence de fixation en adduction. D’ailleurs, la position de
fixation en adduction est celle de meilleure acuité visuelle et donc
ANOMALIES OCULOMOTRICES de meilleur confort visuel. Le NCML est retrouvé à une fréquence
Nous pourrions les décrire classiquement en signes horizontaux et variable selon les auteurs dans les strabismes précoces, de 40 à 90 %
signes verticaux. Nous inclinons plutôt à regrouper les signes selon des cas. Quand le nystagmus domine le tableau, avec strabisme
une logique physiopathologique. Nous avons vu que les signes typique, on parle de strabisme précoce avec nystagmus en
apparaissant sur l’œil fixateur sont liés à l’absence de maturation et abduction, forme décrite par Ciancia [7]. Quand le nystagmus domine
de symétrisation du système optomoteur ; ils sont spécifiques du le tableau mais que le strabisme est moins typique, on considère,
syndrome de strabisme précoce, ce sont des anomalies de la fixation. jusqu’à preuve du contraire, qu’il peut s’agir d’une forme mixte de
Les signes observés sur l’œil non fixateur sont parfois mal expliqués. nystagmus et un bilan étiologique de NCP doit être réalisé,
On y inclut les déviations des axes visuels (c’est-à-dire le strabisme notamment oculaire, neurologique, voire neuroradiologique.
proprement dit) avec des composantes horizontales, verticales ou
torsionnelles. Les déviations dissociées sont des anomalies de l’œil • Asymétrie du nystagmus optocinétique
non fixateur retrouvées le plus souvent dans ce syndrome, mais pas L’aspect du NOC est caractéristique des strabismes précoces [3]. On
totalement pathognomoniques. observe, en fixation monoculaire, un aspect d’inexcitabilité
optocinétique dans le sens nasotemporal alors que celui-ci est
¶ Signes apparaissant sur l’œil fixateur présent quand le tambour tourne dans le sens temporonasal. Le
phénomène s’inverse selon l’œil fixateur. En réalité, on observe plus
Signes témoignant de l’attraction vers l’adduction souvent une asymétrie d’amplitude du NOC qu’une abolition
complète, et il est donc préférable de parler d’hypoexcitabilité
• Fixation en adduction optocinétique nasotemporale. Cet aspect persiste toute la vie et
Il s’agit d’un signe plus ou moins fréquent et intense. Il est permet de dater l’âge d’apparition du strabisme chez un adulte.
responsable d’une attitude de fixation en torticolis, retrouvée dans
20 à 80 % des cas selon les auteurs. Le torticolis change de direction Fixation en incyclotorsion
selon l’œil fixateur ; on l’appelle « torticolis alternant dissocié ». Lors Ce signe est moins prononcé que la fixation en adduction (fig 1). La
de l’occlusion monolatérale, le sujet tourne alternativement la tête fixation se fait tête penchée sur l’épaule de l’œil fixateur, afin de
du côté de l’œil fixateur, prenant ainsi une attitude de fixation en compenser une incyclotorsion de fixation. Lang [25] l’explique en
adduction (fig 1). Il s’agit aussi d’une situation où le nystagmus soulignant que dans les strabismes précoces, la perte de fixation est
diminue en intensité (cf infra). Dans de rares cas, un torticolis accompagnée d’une élévation et d’une excyclorotation. La reprise
alternant dissocié d’abduction de l’œil fixateur est observé (8 % des de la fixation est accompagnée d’un abaissement et d’une
cas), plutôt dans les exotropies précoces, probablement lié à une incyclorotation. Ce phénomène peut expliquer en partie les
situation de repos musculaire. En fixation bioculaire, c’est le déviations verticales dissociées (DVD) (cf infra).
torticolis de l’œil fixateur qui est présent. C’est celui qu’il convient
de neutraliser (en tout cas ne pas aggraver) lors du traitement ¶ Signes apparaissant sur l’œil non fixateur
médical ou chirurgical. Ceci explique la nécessité d’opérer souvent
de manière bilatérale, œil dominant et œil dominé. Déviation horizontale

• Nystagmus congénital manifeste latent (NCML) • Le plus souvent en ésotropie


Il s’agit d’une forme particulière de nystagmus, spécifique du La forme typique du strabisme précoce est accompagnée d’une
syndrome de strabisme précoce. Il s’agit d’un nystagmus congénital déviation majeure apparaissant assez rapidement après la naissance,

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1 Strabisme précoce avec fixation en adduction, torticolis


d’adduction et incyclotorsion alternés en fonction de l’œil fixa-
teur.

*
A *
B

devenant le plus souvent permanente, en convergence d’au moins incyclorotation. Il ne s’agit pas d’une phorie puisqu’il n’y a pas de
30 dioptries, sans grande variation en cours d’examen et sans grande trouble vertical de la position de repos des yeux. Il ne s’agit pas non
différence selon la distance de fixation. Elle est accompagnée d’une plus d’une déviation concomitante puisque l’autre œil ne s’abaisse
fixation croisée, œil droit fixant à gauche et œil gauche fixant à pas lors de l’occlusion alternée ; au contraire, il réalise à son tour un
droite, corollaire de la fixation en adduction. Elle est souvent mouvement de DVD. La DVD est en général bilatérale et
accompagnée d’un aspect de paralysie de l’abduction, qui est en fait asymétrique, prédominant sur l’œil non fixateur. Il ne s’agit pas
une pseudoparalysie. En effet, elle ne résiste pas, le plus souvent, à d’une simple hyperaction du droit supérieur puisqu’elle est associée
la manœuvre des yeux de poupée ou à des stimulations temporales, à une excyclorotation.
et l’abduction est toujours excellente dans les suites opératoires Elle peut être difficile à mettre en évidence, notamment chez le tout-
immédiates ou après injection de toxine botulique. petit et quand la déviation horizontale est importante, où elle peut
La déviation peut se modifier avec le temps. Quelques cas peuvent être confondue avec une hyperaction des muscles obliques. On dit
se détendre spontanément, voire même passer spontanément en classiquement qu’elle apparaît progressivement entre 18 mois et 5
exotropie en quelques années. Initialement, la déviation a une ans ; elle est sans doute présente plus tôt mais difficile à mettre en
origine innervationnelle prédominante. D’ailleurs, pour Péchereau, évidence.
sous anesthésie profonde réalisée précocement [31], la plupart des Sa physiopathologie n’est pas élucidée. Il est probable qu’il s’agisse
enfants ont leurs yeux centrés et un test d’élongation musculaire en fait d’un trouble autonome de la maturation oculomotrice, même
(TEM) quasi normal sur les droits médiaux. La permanence de la si elle est retrouvée essentiellement dans les strabismes précoces. La
déviation entraîne progressivement une rétraction musculaire. Les DVD ne serait pas un signe spécifique, mais une association
adultes opérés de strabisme précoce présentent souvent une fréquente des strabismes précoces (Von Noorden, Lang). Guyton [15]
déviation sous anesthésie et des TEM perturbés. Ces constatations a étudié l’aspect oculomoteur de la DVD en enregistrant les
ont des conséquences importantes sur le traitement physique des mouvements oculaires à l’aide d’électrodes sclérales. Il l’expliquerait
strabismes. par une hyperaction des muscles obliques de l’œil fixateur,
initialement supérieur (abaissement et incyclotorsion), puis inférieur
• Parfois en exotropie (pour compenser l’abaissement de l’œil fixateur), et ensuite oblique
Ces cas sont rares et souvent associés à des problèmes neurologiques inférieur et droit supérieur de l’œil non fixateur. L’origine serait
précoces. On peut retrouver dans leur cadre toutes les pour lui un mécanisme de compensation des composantes
caractéristiques des strabismes précoces, y compris le torticolis de cycloverticales du NCML.
fixation en adduction. Leur traitement, notamment chirurgical, doit
en tenir compte [41]. Leur variabilité fréquente ne doit pas non plus • Autres déviations dissociées
les faire confondre avec une exophorie-tropie à sensorialité normale. Il s’agit de la déviation horizontale dissociée, apparaissant lors de
l’occlusion, toujours en ésodéviation. Ce n’est pas une phorie
• Parfois en microtropie puisqu’elle est sans rapport avec la position de repos. Elle est
Les microstrabismes ont toujours une binocularité anormale. souvent associée au NCML pour Spielmann, sans en être un
Toutefois, ils ont la meilleure binocularité des binocularités mécanisme compensateur puisqu’elle apparaît en même temps que
anormales, c’est-à-dire l’union binoculaire. Leur physiopathologie le NCML se décompense.
n’est sans doute pas univoque, mais un certain nombre sont des L’excyclorotation d’occlusion est aussi une déviation dissociée,
strabismes précoces typiques, avec déviations horizontales minimes. torsionnelle, mais elle est directement associée, voire incluse dans le
On les retrouve alors associés aux NCML, fixation en adduction. phénomène de DVD.
Ces formes sont rares car ces perturbations motrices sont
probablement tempérées par l’union binoculaire. Il faut d’ailleurs se Déviations verticales non dissociées
souvenir que la microtropie est justement le but idéal du traitement
Ce sont des déviations apparaissant hors occlusion, lors de l’étude
des strabismes précoces, car elle atténuerait les conséquences
de la motilité oculaire, parfois concomitantes. Elles ne sont pas
sensorimotrices du syndrome [43].
spécifiques des strabismes précoces.
Déviations dissociées
• Élévation en adduction
Ce sont des déviations apparaissant ou se modifiant lorsque
Ce n’est pas toujours une hyperaction des muscles obliques
l’illumination rétinienne est réduite sur l’œil concerné par un filtre
inférieurs et il faut en connaître les différents mécanismes.
ou un cache. Parfois, elles peuvent se décompenser spontanément.
Elles sont d’origine centrale. – Hyperaction des obliques inférieurs : c’est la cause la plus fréquente.
Von Noorden la retrouve dans 68 % des cas sur 400 ésotropies
• Déviation verticale dissociée précoces. Sa fréquence semble diminuer avec le temps, puisque
Elle est la plus connue mais sa physiopathologie reste incertaine. Calcutt ne la retrouve plus que dans 5 % des cas d’évolution
Elle réalise une élévation lente et progressive de l’œil occlus, spontanée jusqu’à l’âge adulte.
accompagnée d’une excyclorotation. Lors de la reprise de la fixation, – Droit interne hyperactif sur un globe en extorsion (car non fixateur) :
l’œil s’abaisse, voire dépasse la ligne horizontale, et réalise une ce mécanisme est sans doute fréquemment impliqué, au moins dans

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les élévations modérées en adduction dont beaucoup disparaissent signes oculomoteurs et rejoint en partie les constatations de Guyton.
après une intervention simple sur les droits médiaux. Ces théories pourraient aider à expliquer le développement des
– Anomalies de position des poulies ténoniennes : suspectées depuis signes moteurs du syndrome.
longtemps mais bien analysées récemment par Demer [9], elles sont
sans doute responsables de bon nombre de syndromes
alphabétiques associés. Traitement
– DVD, avec élévation lors de l’occlusion « naturelle » de l’œil non
Notre but n’est pas ici de reprendre la totalité du principe de
fixateur en convergence par l’arrête nasale.
traitement des strabismes mais d’en discuter les grandes lignes et
Ces considérations doivent bien sûr rendre prudent sur les leur actualité. Des différences notables existent d’un pays ou d’un
conséquences chirurgicales de la découverte d’une élévation en continent à l’autre, bien soulignées par l’étude de Bourron [2]. Il faut,
adduction. en revanche, se rappeler que l’on ne guérit pas ce syndrome puisque
l’on n’agit qu’en périphérie sur un dérèglement central dont les
• Syndromes alphabétiques conséquences sensorimotrices sont définitives, quels que soient les
Ils sont souvent associés aux strabismes précoces, sans en être efforts de traitement précoce ou ultraprécoce. Le but idéal et actuel
spécifiques. Leur mécanisme n’est pas univoque. Pour Gomez de du traitement doit être d’obtenir une microtropie, avec isoacuité
Llano [12], 50 % des syndromes V sont associés à des hyperactions visuelle, facteur accommodatif traité, en débutant la prise en charge
des muscles obliques inférieurs et 75 % des syndromes A à une au plus tôt. Les moyens et le moment varient considérablement d’un
hyperaction des obliques supérieurs. On retrouve classiquement centre à l’autre. Toutefois, une logique générale se dégage
plus de syndrome en V chez l’enfant mais l’évolution spontanée progressivement à la lumière de notre meilleure compréhension du
semble montrer une diminution de leur fréquence et une syndrome.
prépondérance des syndromes en A chez l’adulte (55 % de syndrome
A pour 15 % de syndrome V dans l’étude de Calcutt). Ceci doit [36]
ÉLÉMENTS DU TRAITEMENT SENSORIEL ET OPTIQUE
encore une fois rendre prudent quant au traitement systématique
des obliques inférieurs dans la petite enfance.
¶ Traitement du facteur accommodatif
Ce facteur est classiquement peu important dans les ésotropies
Tableau récapitulatif des signes du syndrome.
précoces, mais il ne faut pas le négliger, d’autant que l’amétropie
– Apparition de la déviation avant l’âge de 6 mois.
peut évoluer dans les premières années de vie et être responsable
– De manière isolée, mais plus souvent si prématurité, souffrance d’une récidive ou d’un échec de traitement. La répétition
néonatale, antécédents familiaux, privation congénitale systématique des skiascopies sous cycloplégie et la correction
unilatérale, anomalies chromosomiques. systématique de toute amétropie dès la petite enfance sont les
– Correspondance rétinienne anormale, neutralisation. meilleurs moyens de traitement.
Amblyopie inconstante.
– Amétropies fortes rares. ¶ Vérifier l’alternance de fixation et l’absence
– Signes oculomoteurs : d’amblyopie
– sur l’œil fixateur : signes pathognomoniques du syndrome.
Témoins de l’attraction vers l’adduction : torticolis alternant Les moyens d’obtention de l’alternance reconnus actuellement dans
le syndrome de strabisme précoce sont d’abord et avant tout
dissocié, fixation pseudoparalysie de l’abduction, NCML,
l’occlusion totale sur peau, alternée à un rythme adapté à
asymétrie du NOC. À part, l’incyclotorsion de fixation.
l’alternance spontanée de fixation. Utilisée précocement, elle
– sur l’œil exclu : signes non spécifiques aux strabismes
minimiserait les conséquences optomotrices de la déviation [23]. Elle
précoces : prépare donc à l’intervention précoce. Si l’alternance doit être
– déviation horizontale, le plus souvent ésotropie de grand entretenue plus longtemps (ie si une chirurgie différée est choisie),
angle. Microtropie, exotropie, plus rares. Déviations l’utilisation des pénalisations optiques alternées est une bonne
verticales fréquentes : élévation en adduction surtout, solution. Les secteurs binasaux [26] sont réputés exercer l’abduction,
syndromes alphabétiques ; s’opposer aux spasmes des droits médiaux. Ils sont peu
– déviations dissociées : DVD, association fréquente mais non recommandés dans ce syndrome car ils privent l’enfant de la fixation
pathognomonique du syndrome. Plus rarement déviation en adduction, zone de repos, de moindre nystagmus et
horizontale dissociée, déviation torsionnelle dissociée. probablement de meilleure vision monoculaire. D’autre part, ils
nécessitent une surveillance étroite par des soignants expérimentés
pour ne pas passer à côté d’une fixation monolatérale et d’une
Discussion de l’étiologie du syndrome amblyopie.
Les autres traitements sensoriels (déneutralisants ou basés sur un
La raison du développement d’un syndrome de strabisme précoce renforcement de l’amplitude de fusion) sont a priori proscrits,
n’est pas connue actuellement. Il est toutefois probable que tout puisque la vision binoculaire ne peut être normalisée. Ils risquent
réside dans une anomalie du développement du réflexe de fusion, au contraire d’avoir des effets négatifs en affaiblissant la qualité de
par absence congénitale de ce réflexe ou par retard de maturation, la neutralisation et exposant à un risque de diplopie postopératoire.
ou encore par atteinte périnatale de la zone corticale impliquée [18].
L’absence de fusion laisse les vergences toniques et accommodatives ¶ Durée du traitement
totalement débridées, et après un bref passage en exoposition, en
général une ésotropie majeure se met en place. Ce traitement médical doit être poursuivi jusqu’à obtention d’une
La genèse des signes oculomoteurs n’est pas plus résolue. L’absence microtropie, spontanée ou après chirurgie.
de fusion et de coopération binoculaire dans les premiers mois de La microtropie permet d’équilibrer au mieux les influx bioculaires et
vie laissant le système évoluer sur un mode archaïque, d’autant plus limite les conséquences sensorimotrices du syndrome. Toutefois,
que l’événement initial est précoce, semble la raison la plus logique. même dans le cas idéal de l’obtention précoce d’une microtropie, la
Elle explique la totalité des signes survenant sur l’œil fixateur. Les surveillance régulière et le port de la correction optique doivent être
signes de l’œil non fixateur sont alors secondaires, voire autonomes. poursuivis au moins jusqu’en sortie de la période sensible, voire
Gracis [14] a proposé récemment une hypothèse incluant un plus, étant donné les risques d’évolution du syndrome (amblyopie,
dysfonctionnement des noyaux du III qui explique la totalité des DVD, exotropie secondaire…).

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21-550-A-02 Strabismes précoces Ophtalmologie

TRAITEMENT DU STRABISME PROPREMENT DIT • Interventions précoces


¶ Traitement chirurgical On parle d’interventions précoces si celles-ci sont réalisées avant
l’âge de 2 ans. Elles semblent capables de restituer les plus hauts
Protocoles opératoires grades d’acuité stéréoscopique [19, 54] mais exposent aussi à plus de
réinterventions [16]. Elles ne dispensent pas, bien sûr, du traitement
Les conceptions évoluent considérablement sur ce point, tant sur la pré- et surtout postopératoire, ce qui est parfois difficile à faire
technique à utiliser que sur le moment de l’intervention. Nous ne admettre aux parents. C’est toutefois actuellement la tendance la
pouvons discuter ici de l’ensemble des éléments entrant en compte plus générale, limitée par la difficulté de la chirurgie et de
dans le choix de la technique et du protocole opératoire et nous l’établissement d’un protocole opératoire à cet âge. Des études
renvoyons pour cela aux manuels spécialisés. randomisées comparant les bénéfices d’une intervention précoce
Il faut traiter le strabisme, mais aussi l’excès d’adduction qui atteint versus différée sont en cours et permettront sans doute de trancher
l’œil fixateur. En cas de strabisme alternant, le traitement le plus dans quelques années [51], le bénéfice sensorimoteur n’étant toujours
logique est donc l’affaiblissement des deux droits médiaux. La pas prouvé [33]. Les interventions ultraprécoces, avant 1 an, voire 6
chirurgie monolatérale est réservée aux cas de strabismes sans mois, n’ont pas montré actuellement de bénéfice-risque positif [22].
torticolis et non alternants ; parfois, elle est décidée volontairement. Deux arguments annexes et non scientifiques en faveur de la
Il semble aussi logique, et c’est le choix le plus souvent en Europe, chirurgie précoce sont l’amélioration de l’image sociale de l’enfant
de dissocier le geste en utilisant l’ancrage postérieur pour traiter la et l’amélioration subjective de l’agilité motrice de l’enfant. À risque
part dynamique du strabisme (part innervationnelle, excès égal, ils doivent intervenir à notre sens pour une chirurgie précoce.
d’adduction, NCML…) et la chirurgie conventionnelle de recul-
résections pour traiter la part anatomique ou statique. On est obligé, • Intervention différée
si l’on veut réaliser une telle chirurgie, de faire appel à des tests
On ne parle plus de chirurgie volontairement différée au-delà de
peropératoires complétant le bilan préopératoire [31]. Le protocole
l’âge de 5 ans. L’amélioration des techniques chirurgicales, de la
opératoire tient donc compte de l’angle minimal (avec correction
sécurité des gestes anesthésiques, de la prise en charge médicale
optique et en fixation de loin) à l’état de veille et de ses variations,
précoce réfutent les arguments pour les interventions tardives.
des troubles de la motilité, du NCML, du torticolis, du caractère
L’intervention différée après l’âge de 2 ans (et avant 5 ans) est
alternant ou franchement unilatéral de la déviation. Le signe de
soutenue par de nombreux auteurs dont Roth [37] et Quéré [35], qui
l’anesthésie (SA) et le TEM sont les compléments indispensables de
arguent que le strabisme est alors mieux stabilisé grâce à un
ce bilan préopératoire, même si les conséquences de leur utilisation
traitement médical soutenu. L’examen est aussi plus facile,
ne sont pas encore parfaitement quantifiées. Le SA évalue la
notamment concernant l’appréciation des facteurs verticaux. L’acte
différence entre l’angle d’éveil et l’angle sous anesthésie. Il affine la
chirurgical aurait plus de chance d’être unique dans ce cas.
répartition du protocole opératoire entre chirurgie conventionnelle
et ancrage postérieur des droits médiaux. Par exemple, une détente Enfin, certains parents peuvent refuser l’intervention pendant de
parfaite sous anesthésie signifie un strabisme d’origine nombreuses années ou celle-ci peut être impossible pour des raisons
innervationnelle et incite à utiliser plutôt l’ancrage postérieur. La annexes. Le traitement médical prolongé par correction optique,
chirurgie conventionnelle seule expose dans ce cas à une divergence pénalisation optique alternée, est nécessaire pour préparer au mieux
secondaire. Le TEM apprécie l’élasticité, le degré de rétraction à une chirurgie tardive.
musculaire et permet d’affiner le dosage de la chirurgie
• Intervention à l’âge adulte
conventionnelle. La répartition interoculaire est affinée par
l’appréciation de la polarisation symétrique ou non de la déviation Un strabisme précoce peut tout à fait être opéré à l’âge adulte, avec
sous anesthésie générale. On devrait reculer les muscles rétractés et quelques particularités et précautions. Le facteur accommodatif,
réséquer les muscles hyperélongables, de manière proportionnelle à souvent négligé, doit être toujours réévalué précisément et traité.
l’anomalie du TEM. Les protocoles ne peuvent donc plus être Les zones de neutralisation sont souvent plus étroites et moins
systématisés ; le nombre de variables impliquées nécessite la mise malléables, même en cas d’amblyopie profonde. Le risque de
en place de systèmes experts et de modélisations assistées qui se diplopie postopératoire est facilement évalué par un test
développent actuellement [40]. d’adaptation prismatique [52]. Le strabisme est souvent anatomisé et
L’utilisation de protocoles plus simples, basés sur le double recul la chirurgie conventionnelle est plus souvent utilisée. La chirurgie
systématique des droits médiaux, expose à des divergences réglable est d’un appoint considérable, tant pour les facteurs
secondaires plus fréquentes et à des résultats plus dispersés. En effet, horizontaux que cycloverticaux [47].
ils ne tiennent pas compte du caractère innervationnel et de l’état
musculaire propre à chaque cas.
• Réinterventions
Le facteur vertical n’est traité en première intention que s’il est Elles sont envisagées quand le but du traitement n’est pas atteint :
majeur. Il s’agit le plus souvent d’un recul des obliques inférieurs. angle horizontal résiduel, divergence secondaire, facteurs verticaux
Ce geste ne doit pourtant pas être systématique devant une non traités, notamment DVD. On attend toujours une stabilisation
élévation en adduction, surtout chez le jeune enfant puisque, d’une postopératoire avant de considérer la situation comme non
part son origine n’est pas univoque, et d’autre part elle a tendance à satisfaisante, en général plus de 6 mois. Ces réinterventions sont
diminuer avec la croissance. S’il est modéré, on a intérêt à attendre toutefois envisageables durant toute la vie du strabique. Selon les
de voir l’efficacité du geste sur les droits horizontaux. La DVD est auteurs, les techniques et le moment de la première intervention,
très rarement traitée d’emblée, sauf chez le grand enfant et l’adulte. une deuxième intervention est nécessaire dans 10 à 50 % des cas,
On fait appel essentiellement au recul des droits supérieurs. sans que l’on puisse dégager une technique initiale plus efficace.
Quelques auteurs (Guyton notamment) proposent un geste sur les Cela souligne encore nos limites dans la prise en charge chirurgicale
obliques supérieurs. des strabismes précoces et le caractère multifactoriel des décisions
thérapeutiques.
Moment de la chirurgie
¶ Traitement par injection de toxine botulique
Le moment de la chirurgie est avant tout limité par l’âge de prise en dans les droits médiaux
charge et la réalisation d’un traitement médical initial. Dans l’idéal,
une remise en microtropie la plus précoce possible devrait permettre Ce traitement physique, proposé initialement par Scott [39], apporte
de reprendre un développement visuel subnormal le plus vite des éléments nouveaux dans la prise en charge des strabismes
[1, 32]
possible et d’espérer limiter ainsi les conséquences sensorielles et précoces .
motrices du syndrome. On sait en tout cas qu’une restitutio ad Les injections sont réalisées sous anesthésie au masque, en
integrum est impossible, aussi précoce qu’ait été l’intervention. ambulatoire et de visu après mise en charge du muscle sur un

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Ophtalmologie Strabismes précoces 21-550-A-02

crochet [45]. Le geste est moins agressif et iatrogène que la chirurgie, Par la suite, l’enfant est surveillé. En cas de microtropie avec
tout en ayant les mêmes avantages. Il n’existe pas de risque de isoacuité visuelle, une simple surveillance avec le port de la
divergence secondaire iatrogène. Enfin, en cas d’inefficacité après correction optique est poursuivie jusqu’à 10 ans. En cas d’angle
plusieurs injections, elle n’empêche ni ne gêne la chirurgie. Au résiduel supérieur à 8 dioptries, un traitement visant à maintenir
contraire, elle la prépare en évitant l’anatomisation de la déviation. l’alternance est poursuivi. Une réintervention n’est envisagée
McNeer [29], à partir d’une large expérience personnelle et d’une qu’après plus de 6 mois de stabilité.
revue de littérature, propose un protocole thérapeutique incluant
systématiquement l’utilisation précoce, éventuellement itérative, de ¶ En cas de prise en charge après l’âge de 18 mois
toxine botulique dans les strabismes précoces.
L’accent est mis sur la qualité du traitement médical qui doit obtenir
Les résultats sont encourageants puisque, selon diverses séries
une stabilisation de l’état sensorimoteur. Il comporte la prise en
[6, 13, 38]
, l’alignement oculaire à moins de 10 dioptries de déviation
charge acharnée du facteur accommodatif et de l’amblyopie si elle
est obtenu dans 60 à 85 % des cas en une à trois séries d’injections
est présente. La toxine est d’autant moins proposée que l’enfant est
bilatérales si le traitement est entrepris précocement, à partir de 6
grand. L’intervention est proposée après un minimum de 6 mois de
mois d’âge et si possible avant 18 mois pour les premières injections.
stabilité après récupération maximale d’une éventuelle amblyopie.

SCHÉMA THÉRAPEUTIQUE ¶ Chez l’adulte


À partir des données de la littérature et de notre expérience Nous insistons sur la nécessité de réévaluer le strabisme après
personnelle, nous utilisons un protocole assez uniformisé, laissant correction du facteur accommodatif. Le test d’adaptation
de plus en plus de place à la toxine. prismatique est systématique. Le plus souvent, les sutures ajustables
sont proposées afin de réaliser un protocole adapté au mieux à la
¶ En cas de prise en charge avant l’âge de 18 mois situation sans prendre de risque de sur- ou sous-correction majeure.
On pratique une occlusion alternée sur peau permanente, le plus
souvent de manière symétrique.
Dès l’obtention d’une alternance facile, le traitement par injection de Conclusion
toxine botulique dans les deux droits médiaux est proposé, sous
anesthésie ambulatoire. En cas de bonne efficacité initiale mais de Le strabisme précoce est une entité strabologique à part entière. Son
récidive dans les 6 mois, une réinjection est proposée avec un origine reste incertaine, mais inclut une anomalie précoce du
maximum (arbitraire) de trois injections. développement du phénomène de fusion qui induit des anomalies
En cas de refus ou d’impossibilité d’utiliser la toxine, ou de récidive majeures du développement oculomoteur. Les signes les plus spécifiques
du strabisme après son utilisation, ou encore de facteurs verticaux sont ceux atteignant l’œil fixateur mais de nombreux autres signes
manifestes, nous poursuivons le traitement médical et réalisons peuvent être associés. La guérison totale de ce syndrome est impossible
l’intervention dès la stabilisation des signes oculomoteurs et si et celui-ci peut évoluer durant toute la vie. Une prise en charge la plus
possible avant l’âge de 3 ans. Considérant que le strabisme précoce précoce possible est nécessaire. Elle doit avant tout éviter les
est une maladie bioculaire et dont les signes atteignent avant tout conséquences sensorielles définitives telles que l’amblyopie. Il n’est pas
l’œil fixateur, l’intervention est le plus souvent bilatérale et comporte prouvé de manière formelle que la chirurgie précoce avec remise en
en général un ancrage postérieur, associé à une chirurgie microtropie améliore le pronostic à long terme, même si de nombreux
conventionnelle adaptée aux tests peropératoires [47]. Nous réservons arguments vont dans ce sens. L’utilisation précoce de la toxine
la chirurgie unilatérale aux faibles déviations sans torticolis ni botulique dans le protocole thérapeutique semble une alternative
nystagmus de l’œil fixateur, ou aux strabismes non alternants malgré d’avenir. La surveillance est poursuivie pendant toute la phase de
le traitement médical prolongé. Le facteur vertical n’est traité en développement visuel afin de limiter ou de traiter les conséquences
première intention que s’il est majeur, notamment les hyperactions tardives. Enfin, le résultat initial peut se modifier plusieurs années
des obliques inférieurs. Nous ne traitons que très rarement la DVD après, ce qui doit nous rendre toujours prudents quant au pronostic
avant l’âge de 3 ans. oculomoteur à long terme.

Références ➤

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21-550-A-02 Strabismes précoces Ophtalmologie

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