Vous êtes sur la page 1sur 12

Le mythe des Amazones

Le mythe des Amazones est aussi ancien que celui du Centaure. Vraies
guerrières ou personnages légendaires, leur existence questionne depuis
l’Antiquité, liant intrinsèquement la femme au cheval. Ne serait-ce que par le
nom de leur reine - Hippolytè, signifiant « libérer les chevaux » en grec -
l’Amazone illustre une certaine idée de la liberté (de mœurs, de droit, spatiale
et physique) permise par le chevauchement.

Par Diane GUIRARD DE CAMPROGER - | 07.06.2022 |

Niveau de technicité :
Qui sont les Amazones ?

Le mythe des Amazones semble aussi ancien que celui du Centaure. De nos jours, s’il désigne communément une
femme guerrière, il lie au départ intrinsèquement la femme au cheval. C’est d’ailleurs encore sa définition
principale : une amazone est une femme qui monte à cheval (Cnrtl, 2012 ; Larousse, 2020). De nombreux
noms d’Amazones possèdent la même racine « ipp », dérivée d’« ippo » (soit « cheval » en grec), comme
Hippolytè ou Menalippe (cheval noir).

Ainsi, la figure d’amazone que nous retrouvons dans nos textes est avant tout une femme à
cheval, mais aussi une femme illustrant une certaine idée de la liberté.

Une origine divine


Comme point de départ du mythe, il y a une union improbable : celle de la guerre et de la paix, puisque les
Amazones sont dites filles du dieu Arès et de la nymphe Harmonia dans la mythologie grecque. Elles
suivent aussi les principes d’Artémis, chassant comme elle, et promptes à se défendre des hommes.

Elles sont alors une figure double de la féminité : pures, puisque supposément vierges, mais
aussi d’une grande violence, n’ayant pas le droit de se marier tant qu’elles n’ont pas tué un
ennemi au combat.

Combat entre les Grecs et les Amazones, sarcophage du


Ier siècle avant J.C., musée du Louvre, Paris - domaine
public

Comme les Centaures, elles possèdent une importante amazonomachie, c’est-à-dire une histoire relatant leurs
hauts faits guerriers, et immortalisant leurs principaux acteurs (ou plutôt actrices, dans ce cas). On retrouve
plusieurs récurrences des Amazones dans l’Iliade. Elles sont d’abord introduites sous forme générique, lorsqu’on
fait état de leur meurtre par Bellérophon. Hercule doit dérober la ceinture d’Hippolytè dans la liste de ses travaux,
mais la tâche qui s’annonçait facile s’achève par une bataille et la mort de la reine des Amazones. Antiope
s’éprend ensuite de Thésée - ou est enlevée par lui - déclenchant la rage des Amazones et leur alliance avec les
Troyens, dans la guerre de Troie. Enfin, durant le combat, Achille tombe amoureux de Penthésilée, au moment où
elle meurt dans ses bras, de sa main.

Après Homère, Hérodote pose l’existence des Amazones pour véritable, et les lie aux Scythes, avec lesquels elles
fondent le peuple des Sauromates. Si les Grecs descendent en droite ligne des héros et des dieux, les éventuelles
femmes guerrières rencontrées sont, elles aussi, descendantes des combattantes mythiques (Sebillotte-Cuchet,
en préface à Mayor, 2020). Il y a donc un certain parallélisme entre l’archétype du héros grec et celui de l’héroïne
amazone dans la tradition littéraire dès l’Illiade. Cela implique que, pour conforter la véracité de l’ascendance
grecque, il faut de même prouver l’existence des Amazones. Sans elles, les récits des héros ne seraient alors que
des fictions.

Histoire et généalogie des Amazones : l’amazonomachie

Amazonomachie : bataille livrée par les grecs au peuple


mythique de femmes guerrières - Arts de l'Islam, cubes de
marbre et de calcaire, les Amazones, Turquie, IVe siècle
après J.C. - mosaïque, Musée du Louvre, Paris - domaine
public

Le mythe des Amazones est le deuxième mythe équestre, avec celui du Centaure, à avoir une histoire et
des personnages célèbres. Il engendre une confusion de la matière fictive et de l’histoire. Alexandre le Grand
n’a-t-il pas rencontré la reine des Amazones ? Sa propre demi-sœur, Cynané, était d’ailleurs elle-même « élevée
comme une chasseuse guerrière » par sa mère, Audata, épouse de Philippe de Macédoine et « princesse guerrière
» (Mayor, 2017, page 71). Alexandre le Grand réunissait alors tous les visages des figures mythiques, à la fois
élevé avec des Amazones, il était le dresseur d’un cheval indomptable qui, au contraire de Pégase, se laissera
dompter et ainsi se transformera en Centaure. Ce cheval fantastique a d’ailleurs marqué, non pas le ciel comme
Chiron, mais la terre, en donnant son nom à la ville de Bucéphalie.

Les descendantes des Scythes et des Sarmates ?


domaine public

Les Amazones se sont aussi vu attribuer un lieu géographique autour de la mer Noire car, en les situant dans
l’espace, le mythe acquiert une réalité.

Depuis Hérodote, les Amazones sont liées aux peuples nomades des rivages de la mer Morte, en
particulier les Scythes, peuple cavalier dont la matière mythique regorge aussi de récits guerriers. Les Amazones
du mythe partagent avec ces guerriers une culture équestre importante et un lien au cheval, qu’elles sont
les premières à avoir monté pour combattre, selon l’orateur grec Lysias (Mayor, 2017, page 160). Elles ont aussi
des traits d’habillements similaires, munies d’un chapeau pointu selon l’iconographie. Mais, contrairement à ce
que l’on connaît des chevaux de cette région, les Amazones sont souvent représentées avec des chevaux clairs
ou blancs, parfois même dotés d’yeux bleus. Ceux-ci s’inscrivent alors dans la lignée des chevaux magiques
scythes du Ferghana, cette région d’Asie Mineure où vivent des chevaux exceptionnels, plus grands que la
moyenne et plus rapides que le vent. Le nom de la reine des Scythes, Amazen (Mayor, 2017, pages 31-32), serait
d’ailleurs une source étymologique plus crédible que la supposée mutilation du sein droit.

La représentation du mythe au fil du temps

Les Amazones et les Grecs : de la fascination à la haine


Si l'on se réfère au récit mythique de l’apparition des Scythes, adorateurs d’Arès selon Hérodote (les Amazones
ne sont-elles pas considérées comme les filles du dieu de la guerre ?), ils seraient eux-mêmes le fruit de l’union
d’Hercule et du monstre Echidna, la femme-serpent, voués à régner grâce à leur habileté à l’arc.

Les Scythes seraient donc d’une nature hybride, nés d’une femme monstrueuse. Leur attirance pour les
Amazones, femmes indépendantes et guerrières, peut alors s’expliquer par leur origine. Le personnage d’Echidna
rappelle aussi le lien fort entre la femme et le serpent, particulièrement dans les récits bibliques. Ève souhaite
goûter au fruit de la connaissance, et le serpent renforce un désir d’indépendance et une curiosité déjà présente
dans son esprit. Ces traits contribuent à dresser une image négative de la femme curieuse et indépendante dans
les religions monothéistes.

Dans les nombreux récits écrits par la suite, on retrouve des thématiques similaires, comme la virginité ou la
violence marquant la féminité des Amazones. Elles ne peuvent se marier qu’après avoir tué un héros au combat,
trait qui unit le meurtre à l’initiation féminine, puisqu’elles ne peuvent devenir femmes à part entière qu’après ce
rite de mort. Ensuite, les Amazones sont connues pour tuer leurs héritiers mâles et se mutiler le sein droit
(amputé ou brûlé), sous prétexte de ne pas gêner leur pratique du tir à l’arc. Il y a alors deux motifs à la base de
la construction du mythe, selon John Man (Man, 2018) : d’abord, prouver la valeur guerrière des Grecs, et ensuite
leur ascendance divine. Si les Amazones étaient moins fortes, elles n’auraient pas justifié la création du récit
héroïque. La construction du mythe vient aussi de l’indépendance sociale de l’Amazone, qui se traduit par un "non
besoin" des hommes, dans la sphère tant guerrière et politique que biologique et sexuelle. Par la liberté de
disposer de son corps et de son désir, elles sont à l’opposé des valeurs machistes et patriarcales prônées par la
société traditionnelle grecque, une « société à l’envers ». Même s’il est évident que le fait d’en triompher, dans
les récits légendaires, renforce justement la suprématie de la société grecque sur le peuple des Amazones, elles
n’en constituent pas moins une figure de l’altérité comme le Centaure. Au lieu de constituer une altérité ethnique,
elles introduisent une altérité de genre, s’opposant aux idéaux machistes et virils des sociétés grecques et hittites
de l’époque.

Atalante, musée du Louvre, Paris


- domaine public

C’est peut-être la non-acceptation de la liberté des Amazones à disposer de leur corps qui est à l’origine de
l’attribut littéraire, car il n’y a pas de traces iconographiques du sein droit coupé ou brûlé (Muller-Dufeu, 2011).
Cette caractéristique attribuée aux Amazones, couplée au meurtre de l’enfant mâle, dresse un tableau où lui sont
refusées à la fois la féminité propre à son genre, dont le sein est le symbole, mais aussi l’existence d’un
quelconque sentiment maternel, puisqu’elle tue son propre enfant et coupe en même temps l’un des moyens de
la subsistance de celui-ci. Que des femmes tuent leurs enfants de façon systématique ou s’automutilent rend le
récit choquant. Cette mutilation est tellement présente dans les écrits grecs, qu’on est venu y chercher
l’étymologie du mot « amazone », imaginant qu’il était l’addition du « a » privatif à la racine « mazo- », dérivant
de « mastos » (signifiant « sein » en grec).

Selon Adrienne Mayor, le mythe des Amazones s’inscrit comme une variante du mythe d’Atalante, cette jeune
fille élevée par les ours, plus forte et plus rapide qu’un homme, au point de défier des jeunes hommes à la course
pour éviter le mariage. Atalante est finalement conquise, non par le plus rapide, mais par le plus rusé, Hippomède
(chez qui on retrouve le préfixe « hippo- », signifiant « cheval » en grec), aidé des pommes d’or d’Aphrodite. Le
couple est par la suite transformé en couple de lions pour s’être uni dans un lieu sacré. Il y a ainsi une « éternelle
tension » entre violence et désir. La guerrière est objet de colère (l’ennemie) et de désir (la femme libre) dans le
mythe de l’Amazone. Cette tension est à l’origine de récits doubles, à la fois récits de guerre et de hauts faits, et
d’histoires d’amour. Les récits d’Antiope et de Thésée ou d’Achille et de Penthisélée sont tragiques, justement en
raison de cette dualité. L’autre composante du mythe est l’altérité que représentent les Amazones pour les Grecs
: à la fois leurs égales au combat ou en amour, elles sont aussi profondément différentes par leur sexe.

Le Moyen-Âge : la sorcière, une amazone comme les autres ?

De l’oubli à la transformation du mythe


Après l’époque romaine où les récits mythiques grecs sont réutilisés plus ou moins fidèlement, les Amazones
disparaissent des récits. Pourtant, encore à l’époque romaine, on retrouve des poupées aux effigies des
[1]
Amazones scythes , ce qui met en valeur la représentation positive dont jouissait l’Amazone jusqu’au
développement du Christianisme. Celle-ci, guerrière indépendante à cheval, est très loin de l’idéal chrétien et
s’affirme en antithèse de la figure de la vierge Marie défendue par l’Église catholique. D’autant que les Amazones
avaient en commun avec les Celtes une référence aux cultes païens, en particulier celui d’Arès, dieu de la guerre,
et d’Artémis, déesse de la chasse. Elles sacrifient aussi les chevaux avant les combats dans des rituels de bonne
fortune.

Les Amazones recommencent à inspirer les récits à la fin du Moyen-Âge, dont on sait l’attirance pour les
mira bilia et les récits merveilleux. D’ailleurs, avec les découvertes et les connaissances terriennes des
populations d’Asie Mineure - qui n’ont pas connaissance d’Amazones en chair et en os - la terre de ces guerrières
mythiques se déplace progressivement vers le continent américain. Penthésilée, la dernière Amazone de la

guerre de Troie, est le centre de révisions littéraires du mythe grec au XVe siècle [2]. C’est à la même période que
se développe un courant d’animosité envers la femme indépendante, non intégrée dans la société, avec les
chasses aux sorcières. Même si on ne peut pas dire que les sorcières soient entièrement inspirées des Amazones,
l’usage du chapeau pointu rappelle le chapeau scythe, et l’imaginaire populaire les dote d’un balai à chevaucher
à défaut de cheval. Les « amazones » rencontrées par les explorateurs ont aussi cet effet effrayant, par leur
nature guerrière comme par leur peau brune, puisqu’il s’agit de tribus autochtones. Réelles ou non, c’est en
raison de cette incursion du mythe que proviennent les noms du fleuve Amazone de la région d’Amazonie, ainsi
que d’une région des Amazones au Brésil (« Amazonas »). On retrouve un processus de mythification similaire à
la même époque avec le personnage de Pocahontas, à la fin du XVIe et au début du XVIIe siècle. La configuration
est la même que dans les mythes grecs, avec une dualité de désir et de peur représentée par le personnage de la
femme étrangère, aux mœurs et à la culture différents. Les colons deviennent, dans ce schéma, les héritiers des
Grecs en proie à la fascination pour ces femmes étrangères, totalement opposées à leurs épouses et aux qualités
normalement attribuées à la gent féminine sur le vieux continent.
Guerrière scythe, musée du Louvre, Paris - domaine
public

Sorcière au chapeau pointu, chevauchant un balai -


domaine public

De la guerrière scythe au bonnet phrygien sur son cheval à la sorcière au chapeau pointu « à
cheval » sur un balai… il n’y a qu’un pas !

L’époque moderne : l’amazone devient un symbole


En Europe, représenter une amazone permet aussi de peindre la société et ses travers, comme le
tableau La bataille des Amazones de Rubens (1617-1618), dans lequel le peintre transcrit la violence de la guerre
de trente ans. Au XVIIIe siècle, en pleine période de mutations sociales et de conflits politiques, d’autres
amazones apparaissent, comme au Bénin, en particulier à Dahomey, avec la formation d’un bataillon de
guerrières.

On remarquera que la figure de la République qui apparaît en France au même moment est aussi incarnée par
une femme dont le bonnet phrygien rappelle les chapeaux scythes des Amazones. La Liberté guidant le
peuple de Delacroix (1830) met en scène une amazone, héritière des héroïnes mythiques grecques et armée d’un
fusil en guise d’arc. Le mythe des Amazones existe toujours même si l’on assiste peu à peu à une adaptation à
l’époque, qui s’illustre par une disparition du cheval au profit d’autres attributs, ainsi qu’à un isolement de
l’amazone. Tels les grands noms des amazonomachies, l’amazone moderne est de plus en plus seule dans
son combat et perd l’appartenance au groupe ou à la communauté de même genre pourtant liée au
mythe originel.

« La bataille des Amazones » de Rubens (1617-1618) -


domaine public

« La liberté guidant le peuple » de Delacroix (1830) -


domaine public

Un retour à l’élément équestre marque néanmoins le XIXe siècle. Avec le développement de l’équitation
et du cheptel équin, la mode de la monte « en amazone » se répand. Il s’agit pourtant d’une contradiction
totale avec le mythe de l’Amazone, puisqu’est nommée « amazone » une monte à cheval très peu confortable, de
côté, comme une façon de maintenir la cavalière « à sa place » d’élément féminin fragile et dépendant de
l’homme. On nomme aussi « amazone » la tenue de cavalière, qui tient plus de la mode vestimentaire que du
confort nécessaire à la pratique. C’est d’ailleurs pour cela que quelques rebelles, marchant sur les pas des
véritables amazones, refusent ce carcan (Nauleau, op.cit.). L’engouement pour les cavalières de cirque redore
aussi le blason des cavalières. Celles-ci réussissent à dépasser la restriction de la monte en amazone et
s’illustrent, sur la piste de cirques, par des prouesses équestres égales ou supérieures à celles des hommes.

Le XXe siècle voit un retour au mythe originel dans des œuvres grand public, destinées à questionner

les figures genrées traditionnelles. Aux États-Unis, en 1924, la pièce de théâtre The Warrior’s husband[3], avec
Katherine Hepburn dans le rôle d’Antiope, illustre une société encore peu préparée à laisser plus d’importance
aux femmes. La création de la pièce n’est certainement pas sans rapport avec le droit de vote des femmes ratifié
peu de temps auparavant. Elle réapparaîtra ensuite durant plusieurs années, adaptée au cinéma ou au théâtre à
nouveau, jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale.

Affiche du film « Wonder Woman »


(1941) - domaine public

À la même époque apparaît un autre personnage directement inspiré des Amazones, celui de Diana Prince,
autrement connue sous le nom de Wonder Woman. Créée en 1941 comme personnage de bandes dessinées, sa
popularité ne s’est pas encore tarie aujourd’hui. Le mythe y est néanmoins complètement modifié, l’héroïne étant
alors supposément l’enfant de la reine des Amazones, Hippolytè, élevée dans une terre dissimulée aux humains
depuis l’époque grecque. Portant le nom de la déesse de la chasse, le dieu Arès devient à présent l’ennemi, à
l’origine du conflit mondial. On retrouve de nombreux thèmes issus de réappropriations du mythe. L’histoire de
Wonder Woman commence en effet par l’arrivée inopinée d’un aviateur américain sur l’île des Amazones. Tels
Antiope et Thésée, puis plus tard Pocahontas et John Smith, l’héroïne tombe amoureuse de l’homme et lui sauve
la vie, avant de décider de quitter la paix de son île pour sauver l’humanité. Derrière cette énième réutilisation du
mythe, on retrouve la qualité première de l’Amazone, celle d’apporter l’harmonie aux hommes tout en participant
aux conflits sur un pied d’égalité. D’ailleurs, l’Amazone n’essaie pas, contrairement aux hommes, d’asseoir une
suprématie, mais seulement d’affirmer son indépendance et sa liberté. Depuis les années 80, avec le
développement des écoles de tir à l’arc à cheval sous l’influence de Lassai, de nombreuses femmes se sont mises

à ce sport dans lequel le sexe importe peu puisqu’il est surtout question d’équilibre et d’habileté [4].

Encore aujourd’hui, le mythe des Amazones fascine, et surtout la possibilité de leur existence passée.
Récemment, de nouvelles découvertes concernant des squelettes de femmes guerrières en Arménie en 2019 -
année de la sortie d’un nouveau film sur Wonder Woman - faisaient les gros titres avec le titre suivant : La
découverte d’un squelette relance le mythe des Amazones, ont-elles vraiment existé ? (auteur inconnu, 2019).

[1] Deux de ces poupées sont conservées au Louvre, selon A. Mayor (2017, page 43), ce qui
justifie l’existence d’un modèle positif pour les petites filles, contrecarrant le modèle du héros
grec (ou romain) présenté au petit garçon.
[2] C’est l’héroïne des romans de C. de Pisan, La cité des dames (1405), et de J. Lydgate, Le
Livre de Troie (1420).
[3] La pièce originale The warrior’s wife est mise en scène par J.F. Thompson en 1924 avec K.
Hepburn dans le rôle principal. Elle sera ensuite réadaptée au théâtre en 1932, puis au cinéma
par W. Lang en 1933. La pièce réapparaît en 1942 sous le nom By Jupiter.
[4] La massification des pratiques équestres en France montre aussi la hausse de l’intérêt des
femmes pour l’animal, et en particulier le cheval, avec 80% de cavalières. Chiffre concernant
les 650 000 pratiquants licenciés de la Fédération Française d’Équitation (sources : Institut
Français du Cheval et de l’Équitation (IFCE) et Observatoire Économique et Social du Cheval
(OESC), 02 avril 2018).

Conclusion

Contrairement au Centaure, l’Amazone puise sa force dans le groupe et pas dans le cheval, selon John Man,
l’important étant le fait de s’attribuer l’outil symbolisant la domination masculine et d’apprendre à dépasser

l’homme dans l’art de le contrôler, pour justifier sa légitimité [5].

La peur déclenchée par les Amazones viendrait de l’observation selon laquelle, sociologiquement, lorsqu’un
groupe de femmes commence à s’approprier un savoir ou un territoire traditionnellement masculin, il finit par
occuper l’espace vide et en chasser les hommes (Tourre-Malen, 2006). C’est peut-être là qu’il faudrait chercher
une explication à cette fascination teintée de crainte des hommes pour les Amazones, ou les femmes libres en
général.

Pour beaucoup, les Amazones ne sont plus cantonnées aux guerrières antiques à cheval. Le mythe s’est élargi à
toute femme forte et indépendante, œuvrant pour un nouveau monde, non en opposition avec les hommes, mais
en communion avec eux. L’égalité entre sexes reste le principal objectif de l’amazone moderne.

Il est néanmoins à regretter que, encore aujourd’hui, la femme doive se réfugier derrière la figure de l’Amazone
pour justifier ses actions et sa légitimité à exister à parts égales avec l’homme dans la société. Le héros masculin
n’a lui pas besoin de justifier d’une ascendance divine ou de pouvoirs surhumains pour être élevé au rang de
héros. L’Amazone, paradoxalement, confirme qu’il reste un long chemin à faire à la femme pour atteindre
l’égalité dans les représentations sociales. Elle reste, encore aujourd’hui, une figure de l’altérité effrayante dans
une société toujours majoritairement façonnée par les idéaux et les comportements masculins.
[5] J. Man cite par exemple le cas des « Night Witches », ce bataillon d’aviatrices russes de la
Seconde Guerre Mondiale, dont l’avion a remplacé le cheval.

En savoir plus sur nos auteurs

Diane GUIRARD DE CAMPROGER Docteure en langue et littérature françaises et chercheuse au LASLAR à l’Université de
Caen - spécialiste des représentations du cheval dans la littérature contemporaine - co-fondatrice de l’association « Cheval et
Sciences Humaines et Sociales »

Bibliographie

MAN J. (2018). Searching for the Amazons, the real warrior women of the ancient world. Pegasus Books,
304 pages.
MAYOR A. (2017). Les Amazones. Quand les femmes étaient les égales des hommes (VIIIe siècle avant J.C
- Ier siècle après J.C.). La découverte, Paris, 560 pages.
MULLER-DUFEU M. (2011). Créer du vivant : sculpteurs et artistes dans l’Antiquité grecque. Villeneuve
d’Asq, Presses Universitaires du Septentrion, page 87.
TOURRE-MALEN C. (2006). Femme à cheval. La féminisation des sports et des loisirs équestres, une
avancée ? Belin, 300 pages.
VANESSE S. (2015). Essai sur la transmission et l'évolution d'un motif iconographique antique : la
Centauresse. Université de Liège, Postprint éditeur, 14 pages.

Articles
Auteur inconnu (2019). La découverte d’un squelette relance le mythe des Amazones, ont-elles vraiment
existé ? L’Ouest-France, L’édition du Soir, mercredi 11 décembre 2019 [en ligne]. Consulté le 01/06/2022.
MAYOR A. (2020). Mythologie : les fières Amazones ont bel et bien existé. National Geographic [en ligne].
Consulté le 01/06/2022.

Pour retrouver ce document: www.equipedia.ifce.fr


Date d'édition :10 05 2023
Fiche réalisée avec nos partenaires

Vous aimerez peut-être aussi