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ÉCLAIRCISSEMENT

Actualisation en continu

L’ÉCLAIRCISSEMENT
INTERNE DE LA DENT
DÉPULPÉE DYSCHROMIÉE :
QUEL SUBSTITUT
AU PERBORATE DE SODIUM ?
AL
Application d’une technique combinée ER
ra ION
interne/externe au peroxyde de carbamide
EN

fr
AT
à 10 % avec intervention du patient

e.
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nc
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co OC CE

PHILIPPE FRANÇOIS
N

AHU en Odontologie Conservatrice et Endodontie, Université Paris Descartes


E
df
Étudiant du Diplôme Inter-Universitaire d’Endodontie et du Diplôme Universitaire de Dentisterie Restauratrice et Prothèse Fixée
FI

Unité de Recherche en Biomatériaux Innovants et Interfaces (EA 4462)


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Hôpital Bretonneau, Paris


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ÉRIC BONTE
O

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MCU-PH en Odontologie Conservatrice et Endodontie, Université Paris Descartes


Hôpital Bretonneau, Paris
JEAN-PIERRE ATTAL
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MCU-PH en Biomatériaux, Université Paris Descartes


Unité de Recherche en Biomatériaux Innovants et Interfaces (EA 4462)
nt

Hôpital Charles Foix, Ivry-sur-Seine

Face à la croissance de la demande des patients INTERNAL BLEACHING OF DISCOLOURED


en esthétique [1], l’éclaircissement dentaire ENDODONTIC TREATED TOOTH : WHICH
interne prend une place de plus en plus grande SUBSTITUTE TO SODIUM PERBORATE
dans notre arsenal thérapeutique. Cela s’explique
Regarding the growing demand of patients
par la préservation dentaire maximale
on esthetics, non vital dental bleaching takes
que cette solution apporte par rapport
an increasing part in our practice. This is explained
à la réalisation de facettes ou de couronnes
by the non-invasive answer that this technique
dentaires : elle entre ainsi parfaitement
offers compared to crowns or veneers.
dans l’esprit du gradient thérapeutique [2].
The aim of this paper is to detail the French
Le but de cet article est de faire le point
legislation for dental bleeching, and to suggest
sur la réglementation et de proposer
secure protocols that respect this regulation.
un protocole en accord avec celle-ci.

Actualisation via l’url : http://bit.ly/2NroNK6


ou le QR code

50 Biomatériaux Cliniques • Vol. 3 - n° 2 octobre 2018


ÉCLAIRCISSEMENT

L
es étiologies des dyschromies sont nombreuses. Les industriels ont cependant cherché à maintenir sur le
Dans le cas où les dents sont dépulpées, cette dépul- marché des produits d’éclaircissement externes marqués
pation peut s’accompagner immédiatement ou CE et qualifiés de « dispositifs médicaux » afin de conti-
secondairement d’une dyschromie. Dans cette situation, la nuer à diffuser des produits dont la concentration équiva-
technique d’éclaircissement interne a fait ses preuves [3]. lente en peroxyde d’hydrogène était supérieure ou égale à
Pendant longtemps, pour la réalisation de cet éclaircisse- 6 %. La réglementation du marché a été précisée le 9 juil-
ment interne, différentes techniques ont été proposées let 2013 par une décision de police sanitaire de l’Agence
associant parfois un éclaircissement externe. Quelle que Nationale de la Santé et du Médicament (ANSM) stipu-
soit la technique utilisée, le principe actif repose toujours lant que les produits d’éclaircissement à plus de 6 % en
sur le peroxyde d’hydrogène. peroxyde d’hydrogène destinés à être utilisés sur la face
Consécutivement à l’ouverture des « bars à sourire », est externe des dents étaient interdits et devaient être retirés

AL
apparue la nécessité de réglementation. En effet, une dys- du marché. Cependant, il est bien précisé que cette déci-
chromie unitaire peut être le signe d’une infection et son sion ne s’applique pas aux produits d’éclaircissement des-

ER
traitement par des non professionnels pourrait éliminer ce tinés à être utilisés par voie interne.

ra ION
signe d’alerte important pour le traitement de la pathologie. Notons que cette interprétation n’est pas la même selon les
Dans le cadre des réglementations récentes de l’éclaircisse- organismes nationaux. Ainsi, au Royaume-Uni, l’intégra-
EN
ment interne, il semble que le produit le plus utilisé depuis lité des produits d’éclaircissement avec une concentration

fr
trente ans, à savoir le perborate de sodium, et parfaitement en peroxyde d’hydrogène supérieure à 6 % sont interdits,
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e.
évalué sur le plan clinique soit déconseillé voire interdit. que ce soit pour l’éclaircissement interne ou externe. Cela
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Ainsi, nous nous trouvons dans une situation paradoxale nous a été confirmé par le Dr Linda Greenwall, spécialiste

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où le seul produit largement évalué serait interdit alors que anglaise de l’éclaircissement dentaire.
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des produits de remplacement peu évalués et peut-être L’ANSM prend en compte la zone tissulaire où le produit
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moins efficaces sont distribués. va être appliqué : superficielle dans le cas d’un éclaircisse-
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ment externe (le produit relève alors de la réglementation


df
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LE POINT SUR LA RÉGLEMENTATION des dispositifs cosmétiques) et profonde dans le cas d’un
M

ET SES CONSÉQUENCES CLINIQUES


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éclaircissement interne (le produit relève alors de la régle-


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Cette partie réglementaire est volontairement développée mentation des dispositifs médicaux).
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exhaustivement afin de cerner au mieux les produits et les De ce fait, il est toujours possible de se procurer des pro-
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concentrations utilisables, et de permettre au chirurgien- duits d’éclaircissement intra-canalaires à plus de 6 % en


dentiste de mieux retrouver les textes de loi concernés. peroxyde d’hydrogène en France, bien que cela ne s’ins-
ac

Ces dernières années, deux nouvelles réglementations crive pas dans la philosophie première de la directive euro-
D

concernant les éclaircissements interne et externe sont péenne. Cette ambiguïté juridique nous paraît cependant
nt

apparues afin d’encadrer ces pratiques. avoir trop d’implications pour engager la sécurité des
D’une part, les produits d’éclaircissement sont considé- patients et la responsabilité des praticiens dans des trai-
rés comme des produits cosmétiques par la directive euro- tements d’éclaircissement internes avec de tels produits.
péenne 2011/84/UE du 20 septembre 2011. Cette directive D’autre part, le perborate de sodium est considéré comme
a pour conséquence l’interdiction des produits comportant un agent CMR de groupe 1b, c’est-à-dire un présumé agent
plus de 6  % de peroxyde d’hydrogène pour l’éclaircissement carcinogène, mutagène ou toxique pour la reproduction
dentaire. Cette même directive interdit l’éclaircissement depuis février 2012 (règlement UE 109/2012). Ainsi, bien que
dentaire sur des mineurs de moins de 18 ans1 et impose le décret d’interdiction de l’ANSM n’ait pas encore été publié
la démonstration professionnelle. Elle interdit également pour le moment, son utilisation en tant que produit d’éclair-
l’utilisation de concentrations supérieures à 0,1 % pour les cissement dentaire même avec une obturation réalisée par
non professionnels de l’art dentaire. un bouchon adhésif étanche du système canalaire est diffici-
La transposition de cette directive sur les produits cosmé- lement envisageable à la fois médicalement et éthiquement.
tiques a été effectuée en France le 24 août 2012 par arrêté. De plus, un communiqué de presse du Council of European
Dentists (CED) le 30 avril 2015 a précisé que l’interdiction
1. Notons que le Council of European Dentist, organe qui conseille la commission de ce produit à des fins d’éclaircissement ne comportait
européenne, a demandé en juillet 2016 d’appliquer dix exceptions à cette loi inter-
disant les éclaircissements chez les mineurs. Ces exceptions comprennent tous « aucune exception » dans son application.
les cas où il serait nécessaire de réaliser un éclaircissement (MIH, trauma, fluo- Le tableau 1 récapitule les éléments clés de cette
rose, souffrance de l’enfant…). Nous ne connaissons pas le calendrier de la com-
mission européenne et donc ne savons pas quand cette loi sera modifiée. réglementation.

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Tableau 1 - Tableau récapitulatif sur la législation des éclaircissements interne et externe selon les directives européennes

Éclaircissement externe Éclaircissement interne


• Législation des dispositifs cosmétiques • Législation des dispositifs cosmétiques
• Peroxyde d’hydrogène relargué < 6 % • Peroxyde d’hydrogène relargué < 6 %
• Démonstration au fauteuil indispensable • Peroxyde d’hydrogène relargué > 6 % trouvable sur le marché
• Interdit sur les mineurs de moins de 18 ans français mais ne respectant pas la directive européenne
• Interdit sur la femme enceinte • Perborate de sodium non utilisable car classé CMR
• Interdit sur les mineurs de moins de 18 ans
• Interdit sur la femme enceinte

À la vue de ce tableau, il apparaît que les seuls produits gène : il serait donc préférable au peroxyde d’hydrogène
utilisables pour les éclaircissements internes ou externes pur dans cette indication. De même, son effet éclaircissant

AL
sont les gels de peroxyde d’hydrogène inférieurs à 6 % ou est rapporté comme plus stable dans le temps que celui du
bien les gels de peroxyde de carbamide inférieurs à 18 %. peroxyde d’hydrogène [8, 9].

ER
Il est donc important de mettre rapidement au point des D’autres produits ayant des résultats corrects comme le

ra ION
protocoles pour les éclaircissements internes afin de déter- percarbonate de sodium [10] ont été proposés. Cependant,
miner une nouvelle technique ambulatoire efficace, abor- ils sont bien moins utilisés que les produits précédents : les
EN
dable financièrement, sûre pour le patient et la moins études cliniques sont donc peu nombreuses et leur com-

fr
chronophage possible pour le praticien. mercialisation marginale.
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e.
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LE POINT SUR LA LITTÉRATURE Les risques de l’éclaircissement interne


ET LES PROTOCOLES D’ÉCLAIRCISSEMENT
nc Concernant les risques du traitement [11], [12], le risque
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co OC CE

INTERNE PROPOSÉS DANS LA LITTÉRATURE [4] majeur est la résorption cervicale externe. Le mécanisme
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Données actuelles sur les produits exact n’a pas encore été élucidé, mais il a été proposé par
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d’éclaircissement internes utilisés plusieurs auteurs que le peroxyde d’hydrogène puisse


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Quatre produits sont classiquement retrouvés dans la lit- atteindre l’espace parodontal par les tubules dentinaires
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og

térature pour réaliser l’éclaircissement interne. Selon celui et induire une réaction inflammatoire [13]. D’autres hypo-
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choisi et la concentration utilisée, on observera une varia- thèses ont également été émises.
O

tion dans la durée de traitement [5]. Ces risques de résorptions semblent corrélés à la fois à
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Le perborate de sodium : c’est le produit le plus largement la concentration importante en peroxyde d’hydrogène et
étudié dont le rapport bénéfice/risque au niveau dentaire a l’utilisation de la thermocatalyse [14]. L’augmentation de la
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été montré le plus favorable par de nombreuses études. Il température semble être le facteur de risque principal et un
D

s’agit d’un mélange poudre liquide qui aboutit à la libération consensus sur son abandon semble émerger [15].
nt

de peroxyde d’hydrogène dans la cavité endodontique étan- Un avis d’expert [16] sur des années de pratique de l’éclaircis-
chéifiée. Il n’y a pas de différences d’efficacité concernant l’uti- sement interne au peroxyde d’hydrogène à 30 %, ne montre
lisation d’eau ou de peroxyde d’hydrogène comme liquide [6]. pas une augmentation de la prévalence de résorptions cer-
Le peroxyde d’hydrogène « pur » pour l’éclaircissement vicales dans le cas d’une obturation cervicale correcte. De
interne se trouve dans des concentrations allant de 3 % à plus, l’auteur étend son obturation cervicale à l’ensemble
plus de 40 %. Sa durée d’action généralement rapportée se des parois dentaires ne nécessitant pas d’action éclaircis-
situe entre 1 à 2 heures pour une demi-vie du produit de sante (par exemple : la paroi linguale/palatine de l’incisive).
l’ordre de l’heure. Il convient de le stocker dans un endroit D’autres facteurs de risques ont également été proposés
frais et à l’abri de la lumière afin de limiter sa réactivité. comme les antécédents de traumatismes de la dent, une
Le peroxyde de carbamide est un précurseur du peroxyde jonction émail-cément discontinue ou une épaisseur den-
d’hydrogène. Il s’agit d’une association entre urée et tinaire fine.
peroxyde d’hydrogène. C’est actuellement le produit le Le diagnostic de cette résorption peut parfois se faire plu-
plus utilisé dans les protocoles d’éclaircissement externe sieurs années après l’éclaircissement [17]. C’est pour-
de par sa durée d’action plus importante (6 à 10 heures) et quoi, quel que soit le traitement réalisé, le suivi n’est pas à
son action plus douce sur les dents. Une étude in vitro [7] négliger : une éventuelle résorption radiculaire devra être
sur l’utilisation de peroxyde de carbamide à haute concen- identifiée et traitée précocement pour en limiter les consé-
tration pour l’éclaircissement interne lui a montré un quences. Pour ce faire, un contrôle radiographique régulier
pouvoir éclaircissant similaire à celui du peroxyde d’hydro- est fortement recommandé.

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- Le risque d’échec esthétique : une erreur diagnostique le champ opératoire est mis en place. Il peut être amé-
peut être à l’origine d’un échec thérapeutique. En effet, cer- lioré avec de la digue liquide, notamment lors de la mani-
tains chromogènes ne sont pas, ou difficilement, sensibles pulation de peroxyde d’hydrogène à haute concentration.
à l’éclaircissement : les sels d’argents, les colorations à Pour des raisons de sécurité, dans toutes les techniques
l’amalgame, ainsi que celles causées par le MTA gris/blanc décrites, patients et praticiens doivent porter des lunettes
(oxyde de bismuth) ne peuvent être traités du fait de leur de protection ;
caractère inorganique [11]. Parfois, le praticien doit faire - une désobturation de la gutta-percha est effectuée 2 à
face à un succès relatif [18]. Une association avec un pro- 3 mm en dessous du niveau crestal ;
tocole d’éclaircissement externe peut être proposée pour - un contrôle radiographique ou un contrôle à la sonde
améliorer/atteindre le résultat. Enfin, il convient de garder parodontale fait suite afin de vérifier la qualité de la
en tête qu’un léger suréclaircissement devra être obtenu désobturation ;

AL
pour compenser la légère recoloration arrivant les pre- - un bouchon étanche est mis en place coronairement à
mières semaines. De même, la restauration d’usage devra la gutta. Le matériau utilisé sera préférentiellement un
être réalisée après stabilisation de la teinte.
ER CVIMAR [22] ;

ra ION
- Le risque de fracture radiculaire : il s’agit d’un point très - un contrôle radiographique de la position de ce bou-
discuté dans la littérature avec des méthodologies diffé- chon est effectué : une attention majeure est portée sur
EN
rentes proposées. Il semble que peu de séances d’éclaircis- sa localisation supra-osseuse pour limiter les risques de

fr
sement interne n’altèrent pas la résistance à la fracture de résorptions. La suite dépend de la technique utilisée.
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e.
la dent [19] à l’inverse de multiples séances d’éclaircisse-
G

ment [20]. À noter que ces études sont effectuées avec des Technique n°  1 : la « Walking Bleach Technique », classique-

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gels très fortement dosés en peroxyde d’hydrogène. ment décrite avec le perborate de sodium. Elle peut égale-
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Nous nous retrouvons ainsi dans une situation ambiguë où ment être employée avec des gels faiblement concentrés
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le recueil du consentement éclairé du patient est difficile : en peroxyde d’hydrogène. En revanche, le produit devra,
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le produit historique le plus étudié et proposant le meilleur contrairement au perborate de sodium, être changé plus
df
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rapport bénéfice-risque dentaire est prohibé (perborate de souvent. Une séquence de traitement dure classiquement
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sodium), alors que les produits alternatifs proposés par les de 2 à 5 jours et sera répétée pour atteindre le résultat sou-
F

industriels sont plus agressifs (exemple du peroxyde d’hy- haité. On procède comme suit :
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drogène fortement dosé) et pouvant être probablement à - le produit d’éclaircissement (gel de peroxyde de carba-
t@

l’origine de complications. De plus, leur utilisation est en mide à 10 %) est mis en place dans la chambre pulpaire en
contradiction avec les directives européennes (gels forte- limitant un espace coronaire de 1,5 mm pour le matériau
ac

ment dosés en peroxyde d’hydrogène). Les seuls produits d’obturation provisoire ;


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s’inscrivant dans le cadre des législations européennes - le matériau d’obturation provisoire, qui peut être un com-
nt

et présentant un rapport bénéfice-coût-risque satisfaisant posite fluide, un CVI ou un IRM, est mis en place ;
pour le patient sont les gels de peroxydes d’hydrogène - le contrôle de l’occlusion est effectué.
et de carbamide faiblement dosés. Ce consentement est Cette technique, employée avec des gels faiblement concen-
encore plus délicat dans le cas d'enfants mineurs. Il faut trés en HP permet de respecter la législation. Cependant,
donc bien informer les parents de la situation réglemen- la multiplicité éventuelle des applications au fauteuil peut
taire et bien expliquer pourquoi on choisit malgré tout engendrer un surcoût du traitement pour le praticien par
cette thérapeutique [21]. Il existe toutefois un risque juri- rapport à la technique utilisant le perborate de sodium.
dique en cas de procédure de la part de la famille.
Technique n°  2 : l’éclaircissement interne au fauteuil avec
Description des différentes techniques des gels fortement dosés en peroxyde d’hydrogène. Il s’agit
On distingue, à l’heure actuelle, trois protocoles suscep- de l’approche la plus rapide, mais également la plus aléa-
tibles de venir remplacer l’utilisation du perborate de toire pour l’éclaircissement de la dent dépulpée. Une fois
sodium qui était, jusqu’à présent, le « gold standard ». l’étanchéité du système canalaire obtenue avec le même
Chacune des techniques présentées peut être associée à protocole que celui décrit pour la « Walking Bleach », du
un éclaircissement externe pour obtenir le résultat sou- peroxyde d’hydrogène à 35 ou 40 % va être mis en place
haité. Elles commencent toutes par les étapes suivantes : pendant 15 minutes, puis renouvelé le nombre de fois
- le retraitement endodontique est souvent nécessaire. nécessaire pour obtenir le résultat souhaité. Trois grandes
Après avoir réalisé cet acte dans une séance précédente, critiques peuvent être formulées sur cette technique :

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- C’est celle qui présente la plus grande diffusion de la « Walking Bleach », c’est-à-dire étanchéifier le système
peroxyde d’hydrogène transdentinaire : elle pourrait donc canalaire mais secondairement de laisser la chambre pul-
favoriser la résorption cervicale invasive. paire ouverte.
- La stabilité à long terme est également moindre que celle L’objectif étant que, chaque soir, après un brossage minu-
d’un éclaircissement ambulatoire. tieux des dents, le patient vienne injecter le produit dans la
- Enfin, il est plus difficile d’évaluer la teinte finale avec le cavité pulpaire puis le recouvrir par du coton idéalement,
champ opératoire qui entraîne la déshydratation de la dent. puis d’une gouttière pour éviter les fuites de matériau. Ce
Il convient également de différer la restauration d’usage qui rend possible, en même temps, un éclaircissement
adhésive à cause de la grande teneur en oxygène des externe de la dent à éclaircir. En effet, dans la majorité des
parois de la cavité. De ce fait, cette technique est complète- cas, elle permettra également de proposer conjointement
ment à l’opposé des concepts contemporains de l’éclaircis- l’éclaircissement externe au patient étant donné que le

AL
sement dentaire qui le veulent sûr et reproductible. Elle est même matériel (gels faiblement dosés en HP/CP, gouttières
donc à proscrire. thermoformées) est nécessaire.

ER Notons que, dans un premier temps, seule la dent avec une

ra ION
Technique n° 32 : technique combinée avec intervention du dyschromie est éclaircie par voie externe. C’est pourquoi
patient [23]. Cette technique nécessite que le patient mette deux fenêtres sont découpées dans la gouttière au niveau
EN
en place lui-même régulièrement le produit d’éclaircisse- des faces vestibulaires des dents adjacentes.

fr
ment dans la cavité endodontique étanchéifiée. La procé- Cette technique permet d’utiliser des produits faiblement
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e.
dure a été jusqu’à présent relativement peu documentée dosés en peroxyde d’hydrogène. L’application de ce proto-
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et utilisée : la participation active du patient étant un frein cole peut paraître plus fastidieux que ceux précédemment

nc
par rapport aux autres techniques auparavant autori- décrits mais il permet cependant de réaliser l’éclaircisse-
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sées. La partie technique au cabinet consiste à venir réa- ment interne en accord avec la législation, de façon sûre.
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liser le même début de séquence que celle décrite dans De plus, en limitant le temps au fauteuil le coût devient rai-
E

sonnable. La participation active et l’éducation thérapeu-


df
FI

2. Notons que des variantes ont été récemment proposées à ces procédures. Il a
tique du patient sont indispensables dans cette technique.
M

été suggéré que la gouttière présente une petite invagination dans l'orifice de tré-
og

panation, ce qui semble éviter l'utilisation de coton [24]. Ou encore l'absence de


F

renouvellement du produit en faisant confiance au seul éclaircissement externe [25].


O

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CAS CLINIQUE PRÉSENTANT UNE TECHNIQUE COMBINÉE AVEC INTERVENTION DU PATIENT


ac

À la vue des précédents paragraphes, nous avons choisi C’est la technique qui semble bénéficier à l’heure actuelle
D

de décrire un protocole d’une technique combinée interne/ du meilleur rapport bénéfice-coût-risque pour le patient.
nt

externe.

1 . Jeune fille de 15 ans, en cours


de traitement d’orthodontie
(Dr Estelle Debarre), ayant subi
un traumatisme qui a entraîné
une dyschromie de 21.
Photo à l’échelle du visage.

2 . À l’échelle du sourire, on note


une perte de hauteur coronaire
et la présence d’un petit composite
coloré au niveau du bord libre.

3 . À l’échelle dento-gingivale,
on note une hygiène perfectible
de la patiente. Les parents sont
bien informés de la réglementation
des éclaircissements pour
les mineurs et ils acceptent
le traitement.

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AL
ER
ra ION
4 . À gauche : radiographie avant la reprise du traitement
EN
canalaire. À droite : radiographie après traitement

fr
canalaire (par le Dr Sandrine Dahan), avec de la biodentine
et un bouchon de CVIMAR de 2 mm.
AT

e.
G

5 . La gouttière est réalisée avec des fenêtres sur 11 et 22

nc
[26] afin d’éviter la diffusion du produit qui entraînerait
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leur éclaircissement.
N

6 . Essai de la gouttière. On explique à la patiente


E

de ne mettre le produit qu’au niveau de la face


df
FI

vestibulaire de 21 à l’intérieur de la gouttière.


M
og
F

U
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t@

7 . La démonstration
est faite en expliquant
ac

à la patiente d’insérer
D

le produit (peroxyde
de carbamide à 10 %)
nt

dans la cavité, puis avec


une sonde de le répartir,
de mettre en place un coton,
et enfin la gouttière
(voir également la vidéo
via le lien en fin d'article).

8, 9 . Au bout
d’une semaine,
le résultat est déjà excellent
à l’échelle du sourire et
du visage.
La patiente a très bien
exécuté les manœuvres
de mise en place du produit
d’éclaircissement. Si elle avait
témoigné de difficultés,
nous aurions continué
le traitement en « Walking
Bleach Technique ».

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AL
10 . À l’échelle dento-gingivale quelques jours
supplémentaires sont prescrits. ER 11 . À l’échelle du visage, 15 jours après le début
du traitement. Ce jour-là, on nettoie le canal

ra ION
et on met une restauration provisoire (Cavit).
L’obturation définitive sera réalisée 15 jours après.
EN

fr
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e.
G

nc
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E N
df
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M
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12 13
ac

. À l’échelle du sourire, 15 jours après le début . À l’échelle dento-gingivale, 15 jours après le début
D

du traitement. du traitement. Secondairement, nous referons


le composite au niveau du bord libre.
nt

CONCLUSION - réaliser une « Walking Bleach Technique » (associée ou


L’évolution de la réglementation sur les produits d’éclair- non à un éclaircissement externe) en renouvelant proba-
cissement interne nous a amenés à modifier nos pratiques. blement plusieurs fois le gel en intra-canalaire au fauteuil.
D’autres discussions en cours au niveau européen nous Cette séance n’est pas longue (5 minutes) mais requiert
amèneront peut-être à faire une nouvelle fois le point sur toutefois un temps non négligeable d’occupation au fau-
ce qui est réalisable ou non. Si le perborate de sodium ou teuil (nettoyage de celui-ci, nouveau plateau…). Ce produit
les gels fortement dosés en peroxyde d’hydrogène sont peut être renouvelé dès le lendemain de son application
potentiellement toujours utilisables du fait d’une légis- étant donné la faible demi-vie du peroxyde d’hydrogène ou
lation incomplète, il apparaît impossible éthiquement de du peroxyde de carbamide ;
continuer à les utiliser : la seule possibilité restante réside - réaliser une technique combinée interne/externe avec
dans l’utilisation de gels faiblement dosés en peroxyde intervention du patient, où après éducation thérapeutique
d’hydrogène (< 6 %) ou en carbamide (< 16 %). de celui-ci, il vient mettre en place chaque jour le produit
d’éclaircissement dans la cavité endodontique étanchéi-
Deux solutions s’offrent au praticien pour rester dans le fiée puis le recouvrir à l’aide d’une gouttière préalablement
cadre de la législation : imprégnée sur la face vestibulaire.

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Biomatériaux Cliniques • Vol. 3 - n° 2 octobre 2018 57

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