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RÉPUBLIQUE DU NIGER
CNE1116
SOMMAIRE
I.
I - Le Secteur et les enjeux ....................................................................................................... 4
2.1 - Présentation du secteur .............................................................................................. 4
2.2 - Politique du gouvernement ...................................................................................... 10
2.3 - Importance pour le pays .......................................................................................... 11
2.4 - Contribution aux axes stratégiques de l’aide française et de l’AFD ................... 13
2.4.1 - Enseignements tirés des activités principales de l’AFD et des autres acteurs de
l’aide française dans le secteur ......................................................................................... 13
2.4.2 - Contribution aux axes stratégiques de l’aide française et de l’AFD ................... 15
II - Le projet............................................................................................................................ 15
3.1 - Finalité ....................................................................................................................... 16
3.2 - Objectifs spécifiques ................................................................................................. 16
3.3 - Contenu du projet .................................................................................................... 16
3.4 - Intervenants et mode opératoire ............................................................................. 23
3.5 - Coûts et plan de financement .................................................................................. 25
3.6 - Nature et justification du produit financier proposé par l’AFD.......................... 26
III - Évaluation des impacts du projet ................................................................................. 26
4.1 - Effets économiques ................................................................................................... 26
4.2 - Effets sociaux ............................................................................................................ 26
4.3 - Effets institutionnels ................................................................................................. 27
4.4 - Durabilité des effets du projet ................................................................................. 27
IV - Dispositif de suivi-Évaluation et indicateurs ................................................................ 28
5.1 - Dispositif de suivi-évaluation................................................................................... 28
5.2 - Indicateurs d’impact ................................................................................................ 28
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Liste des sigles et acronymes
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II. I - LE SECTEUR ET LES ENJEUX
En 2009, le Niger compte une population de 14 millions d’habitants concentrée sur une bande
de 150 km le long du Nigeria, sur une superficie de 1,3 million de km². Le climat très aride
limite fortement les potentialités agricoles du pays dont les terres cultivables ne représentent
que 12 % de la surface et ne sont exploitées que pour moitié. Toutefois, l’économie du Niger
repose très largement sur la production agricole, elle-même largement dépendante des aléas
climatiques. Le secteur manufacturier contribue pour moins de 10 % au PIB (produit intérieur
brut). L’uranium y conserve un rôle stratégique (5 % du PIB, 40 % des recettes
d’exportation). Il demeure le principal pôle du secteur moderne et offre de réelles perspectives
de développement.
Sur le plan conjoncturel, les performances économiques nationales enregistrées au cours des
dernières années étaient satisfaisantes. La croissance, bien qu’inférieure aux objectifs fixés
par le gouvernement, est restée soutenue ces dernières années (+ 9,3 % en 2008, 3,2 %
en 2007). En 2009, le taux de croissance est tombé à - 1,2 %, conséquence de la crise
économique mondiale, des difficultés du secteur agricole et de la chute d’activité des
compagnies minières qui ont fermé des sites non rentables. Toutefois, les bons résultats
attendus de la campagne agricole en cours ainsi que la reprise progressive des décaissements
extérieurs à partir du deuxième semestre 2010 permettent de projeter un taux de croissance de
5,8 % en 2010. Néanmoins, et en dépit d’un effort pour accroître les recettes publiques
(fiscales et douanières notamment), l’État demeure très largement tributaire de l’aide
extérieure et le budget de l’administration centrale est financé pour un tiers par les dons.
Sous programme avec le FMI (Fonds monétaire international) depuis 2000, le Niger s’est doté
en 2002 d’une stratégie de réduction de la pauvreté (SRP 2002-2007). Cette dernière a été
actualisée en 2007 (SDRP – stratégie de développement et de réduction de la pauvreté –
2008-2012) et vise les objectifs suivants : soutien à la croissance et amélioration des revenus ;
développement du capital humain et promotion d’un cadre approprié pour la gestion du
développement ; maîtrise de la croissance démographique et renforcement des capacités et de
la gouvernance.
Le secteur de la microfinance
Historique et contraintes
Au Niger comme dans beaucoup d’autres pays africains, la réflexion sur la microfinance est
née de celle menée sur le financement de l’agriculture paysanne. Elle a pendant longtemps
porté sur le seul crédit à la production agricole (campagne, équipements et
commercialisation). À partir de la fin des années 1980, cette réflexion a progressivement
abordé les autres demandes de services financiers des populations rurales (épargne et
financement des activités non agricoles).
Sous l’impulsion de plusieurs bailleurs de fonds1, la décennie 1990 a ainsi été celle de l’essor
du secteur, avec l’émergence de nombreux SFD (systèmes financiers décentralisés,
appellation des institutions de microfinance en zone UEMOA – Union économique et
monétaire ouest-africaine) et de projets et programmes à volet crédit, ce qui a eu pour effet
une rapide augmentation tant du nombre de bénéficiaires que du volume de crédit distribué et
de l’épargne collectée. Une croissance exponentielle est observée dans le secteur en 1995.
Toutefois, cet élan a été ralenti par les crises financières qui ont affecté plusieurs institutions
importantes. Les troubles politiques de 1996 ont ainsi entraîné le retrait de la plupart des
bailleurs et un changement profond du paysage de la microfinance au Niger. Plusieurs projets
avec volet crédit ont été clos, ce qui entraîna une baisse importante du nombre de
bénéficiaires. D’autres structures de microfinance ont été souvent fragilisées, le passage à
l’autogestion ayant été précipité et non planifié. Le cas le plus connu au Niger est celui du
Mouvement des caisses populaires d’épargne et de crédit (MCPEC), le réseau nigérien le plus
ancien, aujourd’hui encore placé sous administration provisoire.
Comparativement aux huit pays de la sous-région UEMOA, le Niger est celui où le secteur de
la microfinance apparaît le moins développé, juste devant la Guinée-Bissau. C’est l’un des
enseignements retirés par le ministère des Finances nigérien dans son Inventaire des systèmes
financiers décentralisés2, rendu public en mars 2010.
1. AFD et Fida : Programme de développement des services financiers ruraux (PDSFR) pour 21 M€ ; Banque
mondiale : Projet d’assistance technique pour le développement du secteur financier (PDSF) pour 12,2 M€ et
Projet promotion de l’irrigation privée (PIP 2002-2007) pour 38,8 M€ ; UE (Union européenne) : Programme
d’appui à la sécurité alimentaire par la petite irrigation (Asapi) dont le volet crédit est estimé à 5 M€.
2. « Atelier de présentation des résultats de l’Inventaire des activités de microfinance au Niger et validation du
plan d’action pour le redressement et le développement du secteur » organisé par le ministère de l’Économie et
des Finances le 17 mars 2010.
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des facteurs d’ordre social et humain : malgré des avancées ces dernières années, le Niger
est l’un des pays les moins scolarisés. Le taux brut de scolarisation dans l’enseignement
primaire s’élevait à 53 % en 2005, il se chiffre désormais en 2010 à 73 %, et le taux
d’alphabétisation est estimé à 29 %. Moins de 5 % de la population active a un niveau de
scolarisation qui dépasse celui du premier cycle scolaire. D’après le ministère des
Finances, « il est difficile de dégager un vivier de professionnels et un encadrement
performant. Le faible niveau d’éducation demeure d’autre part une des explications aux
difficultés que les sociétaires des IMF éprouvent pour s’approprier les règles de
fonctionnement des systèmes mutualistes » ;
des facteurs d’ordre économique : le Niger enregistre un taux d’incidence de pauvreté de
63,5 % et d’extrême pauvreté de 34 %. L’économie nigérienne se trouve, en raison de sa
faiblesse, fortement investie par les ONG (organisations non gouvernementales) et par les
bailleurs. Or d’après le ministère des Finances, « les approches en matière de
microfinance relèvent parfois plus de l’aide sociale que du développement des activités
économiques selon les règles du marché, ce qui ne favorise pas l’émergence d’institutions
pérennes et viables ».
Toutefois malgré ces contraintes, le secteur enregistre ces dernières années une progression
certaine.
La révision de la loi Parmec vise ainsi à élargir le cadre juridique dans lequel les institutions
peuvent exercer leurs activités et pallier les faiblesses du cadre réglementaire précédent :
ratios prudentiels insuffisants, difficulté à opérer pour les institutions non mutualistes, format
comptable peu adapté aux activités de microfinance, etc.
En avril 2007, le Conseil des ministres de l’UEMOA a adopté une nouvelle loi cadre sous-
régionale pour le secteur de la microfinance, et a proposé aux États un projet de décret
d’application. Cette loi-cadre a été adoptée par l’Assemblée nationale nigérienne en
janvier 2010 et publiée au Journal officiel de mars de la même année.
Les changements apparaissant comme les plus significatifs sont les suivants :
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l’uniformisation du régime d’autorisation d’exercice sous forme de l’agrément, et la
suppression qui en découle du régime de la convention. En effet la loi Parmec fixait
auparavant trois formes d’autorisation d’exercice :
• l’agrément pour les institutions mutualistes coopératives d’épargne et de crédit
(IMCEC), comprenant les institutions de base, unions, fédérations et confédérations,
• la reconnaissance pour les groupements d’épargne et de crédit ou groupements,
• le régime de la convention pour les structures ou organisations non constituées sous
forme mutualiste ou coopérative (autorisation valable pour une durée de cinq ans,
renouvelable) ;
l’avis conforme de la BCEAO (ou de la commission bancaire) est requis dans la
procédure de délivrance des agréments par les ministres chargés des Finances ;
la BCEAO (ou la commission bancaire) se voit également confier la surveillance des
SFD les plus importantes ;
les mêmes SFD devront faire certifier les comptes par un commissaire aux comptes et les
publier ;
la loi encadre les opérations d’affiliation et de désaffiliation dans les réseaux ;
la loi fait obligation aux SFD de notifier aux autorités la création d’une agence ou d’un
guichet ;
l’adhésion à l’association professionnelle des SFD est rendue obligatoire dans les
trois mois qui suivent l’obtention de l’agrément, sous peine de sanction ;
il est fait obligation aux SFD d’adhérer à un système de garantie des dépôts.
Analyse du marché
Globalement, et selon des estimations fournies par l’association professionnelle des SFD
(Anip), le taux de pénétration de la microfinance est de 7 % seulement au Niger (contre 15 %
en moyenne dans la zone UEMOA).
Le secteur occupe ainsi une place relativement modeste dans le paysage financier du pays, par
rapport au marché potentiel de la microfinance. Fin 2009, les dépôts de la microfinance
représentaient 3 % des dépôts bancaires et leurs encours de crédits 6 % des crédits bancaires.
Il est à noter cependant que le nombre de bénéficiaires directs de ces services de proximité
(plus de 169 000 sociétaires et clients) est plus important que celui du secteur bancaire et
financier traditionnel (78 456 comptes ouverts).
Toutefois, malgré les déboires auxquels il a été confronté dans le passé et qui ont requis de
nombreuses restructurations, le secteur connaît, depuis environ quatre ans, un regain de
dynamisme, favorisé notamment par l’intérêt croissant des banques. Le secteur enregistre
ainsi ces dernières années des taux de croissance importants, comme en témoigne le tableau
ci-dessous.
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Taux de
INDICATEURS 31/12/2007 31/12/2008 30/12/2009 croissance
2008-2009
Nombre SFD 79 87 187 115 %
Nombre de bénéficiaires 141 945 147 945 169 000 14 %
Encours d’épargne en 9 360 244 866
FCFA 6 005 572 786 7 532 412 775 20 %
Encours de crédit en 18 199 796 768
FCFA 11 203 728 252 15 252 737 651 19 %
Fonds propres en FCFA 4 415 129 675 5 710 403 099 9 441 025 865 63 %
Crédit en souffrance 233 138 479 1 252 153 994 1 266 963 949
Dans le cadre de l’inventaire réalisé en 2009 par le ministère des Finances, une grande
majorité des SFD a déclaré ne pas viser une clientèle cible particulière en dehors de la
population de son ressort géographique. Ainsi, la clientèle de la plupart des SFD est mixte
(hommes, femmes, personnes morales ou groupements) et correspond à toutes les catégories
représentatives de la population (fonctionnaires, salariés du privé, petits commerçants,
agriculteurs, éleveurs, artisans…).
Les produits offerts sont, dans la quasi-totalité des crédits, de court terme. Le taux de crédit
nominal généralement appliqué par ces institutions est celui du taux d’usure de la BCEAO
(27 % l’an). Par contre les commissions et l’épargne obligatoire peuvent entraîner un taux
effectif global (TEG) beaucoup plus élevé pour les clients.
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Sur les dix SFD cités, huit ont été rencontrés lors de la mission d’instruction de
septembre 2010, au cours de laquelle la totalité des acteurs interrogés a indiqué qu’il y a « de
la place » pour un nouvel acteur. Ainsi, le compte-rendu de mission d’instruction de
septembre 2010 relevait que « les institutions existantes ne semblent pas pour l’instant en
mesure de répondre à l’ensemble de la demande pour le segment de clientèle visé par ACEP »
(Alliance de crédit et d’épargne pour la production).
Notons par ailleurs que certains SFD spécialisés en crédit solidaire rural se sont installés en
milieu urbain dans une deuxième phase de leur activité (Asusu, Kokari, Taanadi). Ces
derniers, « non spécialistes » du crédit individuel ou productif, enregistrent de ce fait en
milieu urbain des taux de contentieux très élevés. Ils se disent ainsi réticents à maintenir ce
segment particulier de leur activité.
3. Les conclusions mentionnées font suite aux entretiens réalisés au cours de la mission d’instruction de
septembre 2010.
4. Référence citée.
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…qui souligne la nécessité de favoriser l’émergence d’institutions répondant aux besoins
des très petites entreprises (TPE)
Le type de crédits mentionnés ne paraît dès lors pas pleinement adapté à une clientèle pour
l’essentiel constituée de particuliers et commerçants modestes, de TPE (en moyenne, les
entreprises emploient trois salariés, dont l’un est de la famille du patron), d’actifs ruraux,
d’artisans et d’autres entrepreneurs. De même, les besoins de financements stables des TPE
ne peuvent être satisfaits par l’offre actuelle, qui répond essentiellement à des activités
d’appoint. Enfin, les SFD s’adressant à des groupes féminins d’épargne ne permettent pas non
plus de répondre aux besoins de la très grande majorité des entrepreneurs, qui, contrairement
à d’autres pays voisins où les femmes sont plus actives dans le commerce, sont, au Niger, à
86 % des hommes.
L’institution dont il est proposé d’appuyer la création ne devrait donc pas entrer en
concurrence avec les acteurs déjà présents sur le secteur. La totalité des interlocuteurs
rencontrés pendant la mission d’instruction a ainsi souligné qu’il existait largement « de la
place » pour un nouvel acteur dans le secteur nigérien de la microfinance.
Difficultés du secteur
Le secteur ne cesse de connaître des mutations et reste confronté à des défis majeurs liés à des
facteurs aussi bien externes (climat, infrastructure, situation économique et politique),
qu’internes.
5. Étude réalisée en 2002 par la Direction de la statistique et des comptes nationaux du Niger avec la
collaboration technique d’Afristat (Observatoire économique et statistique d’Afrique subsaharienne) et de Dial
(Développement, institutions et mondialisation).
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microfinance, plus à même, compte tenu de ses caractéristiques propres, de répondre aux
attentes de la population.
Cependant, force est de constater que le plan d’action n’a pas été mis en œuvre. Des tentatives
ont eu lieu avec le PDSF (cf. supra), mais depuis la clôture dudit projet, l’exécution s’est
arrêtée faute de structure chargée de cette mise en œuvre.
Plus spécifiquement, les mesures et actions envisagées par l’ARSM en vue d’assainir et de
renforcer le secteur portent sur :
des contrôles sur pièces afin d’apprécier la santé financière des SFD ;
le suivi de la mise en œuvre des recommandations formulées par des contrôles sur le
terrain ;
un suivi rapproché des SFD en difficulté. Ce suivi permettra de décider du maintien en
activités ou non de ces institutions ;
des inspections (par l’ARSM seule ou conjointement avec la BCEAO pour les IMF ayant
un encours de crédit supérieur à 2 milliards FCFA). Au total sept inspections conjointes
seront ainsi réalisées au Niger en 2010. Cinq d’entre elles avaient été réalisées au
moment de la mission d’instruction, et les deux restantes étaient planifiées.
Le ministère des Finances relève ainsi dans son Inventaire des SFD, qu’« une [nouvelle]
politique en faveur du secteur devrait viser par priorité la mise en place d’institutions de
microfinance pérennes ».
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Si la microfinance urbaine et périurbaine est particulièrement développée dans certaines
géographies (Amérique du Sud, certains pays d’Asie), les zones urbaines et périurbaines
d’Afrique subsaharienne connaissent des besoins importants en termes d’accès des
populations aux services financiers.
Au Niger, plus de 85 % de la population vit avec moins de 2 dollars par jour, et n’a pas accès
au secteur bancaire classique. Les réseaux de microfinance constituent donc pour la plus
grande partie de la population nigérienne la seule possibilité d’accès à des services financiers
à des conditions non usuraires, élément essentiel pour permettre l’amélioration des conditions
de vie et le développement économique.
Les besoins de financement de ces unités de production urbaines peuvent être affinés selon les
secteurs d’activité :
commerçants (gros et détail) : secteur de l’activité urbaine la plus répandue et dynamique,
ses entreprises, pour un grand nombre, exerçant dans des locaux fixes et présentant une
stabilité dans la durée ;
services : recouvrant des activités très diverses (notamment le domaine des transports, qui
affiche une croissance importante en lien avec le secteur extractif) ayant d’importants
besoins de financement ;
artisans : au nombre de 66 000 environ en milieu urbain, atomisés en toutes petites
structures, mais généralement regroupés dans des coopératives qui les aident dans la
commercialisation, et disposant seulement d’un équipement rudimentaire. Les plus
développés d’entre eux (notamment les bijoutiers) et les exportateurs font également face
à des besoins de financement ;
la transformation : très rares, les petites unités structurées de transformation (tailleurs,
menuiserie, etc.) travaillent sur commande, sans stock ni production de série, par manque
de financement pour les équipements et le fonds de roulement ;
agriculteurs et éleveurs périurbains (élevage de poules pondeuses, élevage laitier,
maraîchage) : les entrepreneurs dynamiques de ce secteur bénéficient du marché urbain
en pleine expansion.
En outre le projet pourrait avoir des conséquences positives sur le secteur nigérien de la
microfinance dans son ensemble, et ainsi contribuer aux grandes réorientations actuellement
souhaitées par les autorités nigériennes.
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En effet dans cette période charnière de restructuration du secteur, l’arrivée de nouveaux
acteurs professionnels pérennes pourrait enclencher un cycle vertueux de professionnalisation
et d’échange de bonnes pratiques (notamment dans le cadre de l’association professionnelle
Anip).
2.4.1 - Enseignements tirés des activités principales de l’AFD et des autres acteurs
de l’aide française dans le secteur
Les premières interventions de l’AFD en microfinance (1987), comme celles qui ont suivi
dans la première moitié des années 1990, sont nées du constat de la faillite de la plupart des
banques de développement et de la nécessité de trouver des modes de financement adaptés
aux spécificités du monde rural et aux besoins des populations non bancarisées. Depuis lors,
l’AFD a octroyé près de 282 M€ à la microfinance, destinés à une quarantaine d’IMF ou de
projets de création d’IMF répartis dans 25 pays, avec une forte concentration en Afrique
subsaharienne.
Les avantages comparatifs dont dispose l’AFD en microfinance, soulignés par la revue
croisée des pairs, sont les suivants :
un investissement de longue date dans le secteur et une capacité d’intervention sur la
durée, dans un secteur où la viabilité d’une IMF ne s’acquiert qu’en cinq à dix ans ;
des appuis réussis à des IMF aujourd’hui reconnues, principalement en Afrique ;
un positionnement large, aux niveaux méso-macro ainsi que micro ;
une équipe dédiée au siège et, au sein des agences, des intervenants non spécialisés mais
ayant acquis sur le terrain une réelle expérience du secteur ;
une légitimité de la coopération française, plus largement sur la construction d’IMF en
milieu rural, la mésofinance, le renforcement sectoriel.
enfin, l’AFD dispose d’une large gamme d’outils d’intervention qu’elle a su développer
pour répondre aux besoins de plus en plus diversifiés des IMF.
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Depuis le début des années 1990, l’AFD a mené plusieurs projets de microfinance au Niger.
Ces derniers ont connu un succès relatif, mais ont permis à l’agence d’acquérir une bonne
connaissance du secteur et du contexte nigérien.
Au cours des années 1990, dans un contexte national caractérisé par des services de
microfinance fragiles, peu développés et très inégalement distribués, l’AFD s’est engagée
dans deux opérations de microfinance au Niger : le Projet de crédit rural décentralisé (PCRD),
entamé en 1993, et le projet crédit rural de Tahoua (CRT), entamé en 1997. Les résultats du
PCRD et du CRT sont restés modestes, mais ont été jugés « encourageants » au regard de
l’état général de la microfinance en milieu rural au Niger. L’AFD a donc décidé de poursuivre
ces projets en s’impliquant dans un programme national de microfinance entamé en
juin 2001 : le PDSFR. Ce programme offrait à l’AFD la possibilité d’inscrire son action dans
le cadre d’une approche globale, tout en partageant les coûts et les risques avec le Fida, qui
voyait dans ce dispositif un moyen de toucher les populations rurales les plus défavorisées.
La contribution initiale de l’AFD était de 3,4 M€, mais a été réduite à 1,95 M€ en 2004, suite
à une évaluation qui a conduit à un recadrage du projet fin 2003.
En outre, il s’agissait de tirer les leçons de ces échecs successifs. Il convient de noter que ces
échecs sont imputables en grande partie aux approches adoptées alors. En effet les projets
concernés se trouvaient être soit des projets de microfinance rurale – que l’on sait
particulièrement risqués dans un pays sahélien fréquemment marqué par des épisodes de
sécheresse –, soit des approches de type multisectorielles au sein desquelles la microfinance
ne constituait qu’un objectif parmi d’autres.
Or le projet repose sur une approche radicalement différente, très ciblée, et en zone urbaine. Il
est en outre apparu indispensable, compte tenu des échecs passés, de faire appel à un
opérateur sérieux et expérimenté, notamment dans des contextes difficiles.
Après plusieurs expériences réussies dans les années 1990 (Adéfi Madagascar – Action pour
le développement et le financement des micro-entreprises – en 1995, ACEP Cameroun
en 1999), l’AFD a approuvé en 2008 un appui à un projet de création d’IMF au Burkina Faso
(ACEP Burkina Faso) et cofinance aujourd’hui le plan d’assistance technique des IMF en
création MicroCred Nigeria, MicroCred Côte d’Ivoire et Advans Côté d’Ivoire.
Les différents projets en cours reflètent l’intérêt que porte désormais l’AFD au modèle
greenfield (création d’IMF commerciales via un investissement important en capital et en
assistance technique) comme vecteur de développement d’un secteur de la microfinance
professionnel en Afrique subsaharienne.
La viabilité des IMF est un impératif qui a été mis en évidence dans différentes expériences
conduites dans le secteur de la microfinance au Niger et dans d’autres pays africains. Cette
préoccupation a été prise en compte dès la conception d’ACEP Niger qui sera une société
anonyme privée menant une activité commerciale classique et se fondant sur une logique de
rentabilité financière de son exploitation.
Le projet s’insère dans les secteurs de concentration définis dans le cadre du Plan
d’orientation stratégique 2007-2011 de l’AFD en contribuant à la stabilité et l’efficacité de
l’économie par l’appui au développement et à la structuration des systèmes financiers locaux.
Le développement du secteur financier, et tout particulièrement de sa profondeur, peut être
considéré comme un objectif en soi pour accélérer la croissance (cadre d’intervention
sectoriel, secteur financier, juin 2007). Il a une influence considérable sur la capacité des
acteurs économiques à exploiter les nouvelles possibilités de croissance qui s’offrent à eux et
il permet d’améliorer la distribution des revenus dans une population donnée et, ainsi, de
réduire la pauvreté. Par l’accès du plus grand nombre aux services financiers, il contribue à la
cohésion sociale et à la lutte contre la pauvreté, axe majeur d’intervention de l’AFD.
II - LE PROJET
2.5 - Finalité
La finalité du projet est de concourir à la génération de revenus pour les producteurs des
secteurs informel et formel.
L’institution sera créée sous forme de société anonyme, conformément au cadre réglementaire
en vigueur dans l’UEMOA, et aura son siège à Niamey.
L’appui de l’AFD consistera en une subvention d’un montant de 785 887 € pour le
financement de l’assistance technique et de l’acquisition du système d’information et de
gestion (SIG) ; et un prêt de 714 113 € à taux concessionnel en monnaie locale (FCFA)
permettant de financer une partie de l’encours de crédit de l’IMF naissante.
Clientèle et produits
La clientèle visée sera essentiellement composée de petits entrepreneurs informels dont les
activités s’exercent dans les secteurs de l’artisanat, de la transformation, du commerce ou des
services et ayant des besoins de crédits compris entre 300 000 et 17 millions de FCFA environ
(450 à 26 000 €). Les besoins de la clientèle visée sont essentiellement des besoins en fonds
de roulement et, dans une moindre mesure, d’équipements.
Il convient de noter que, bien que la clientèle visée affiche des besoins de crédit importants,
s’étalant sur un large spectre de montants, ACEP n’a pas vocation à couvrir l’ensemble de ces
besoins. Des montants trop élevés poseraient un problème de diversification des risques pour
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une institution dont les fonds propres seront relativement faibles au démarrage. De plus, si
ACEP a développé une expertise dans le financement du « haut de la microfinance » (TPE),
elle n’a en revanche pas développé de méthodologie lui permettant de prêter à des PME
(petites et moyennes entreprises). Cela requerrait une approche crédit et une tarification
adaptées. Et il existe au Niger quelques institutions qui répondent aux besoins des PME6. Il
s’agit donc ici de répondre à une partie de la demande de financement constatée.
ACEP Niger financera l’ensemble des activités des entrepreneurs répondant à sa cible. En
termes de volume, l’essentiel de la clientèle d’ACEP Niger sera constitué de petites
entreprises du secteur informel. Toutefois des prêts pourront être offerts à certaines petites
entreprises formelles requérant des crédits légèrement plus élevés, dans la limite du niveau
unitaire maximum envisagé (2,2 millions FCFA, soit 3 350 €). Aussi, si le cœur de la cible est
le secteur informel, on ne peut qu’encourager l’accès au financement du petit secteur formel
dans la mesure où les banques commerciales ne touchent pas ce secteur.
Pour assurer une diversification suffisante des risques, ACEP Niger financera des activités de
commerce en mettant l’accent sur celles ayant un maximum d’effet d’entraînement sur
l’économie locale : commerce de produits élaborés et/ou transformés sur place (produits de
confection, produits agricoles), exportation de produits locaux…
Les produits proposés par ACEP Niger seront des crédits individuels à très court terme
(quatre mois) ou à court terme (dix mois). Ces crédits d’un montant initial compris entre
450 000 et 800 000 FCFA (environ 650 à 1 200 €) évolueront vers des montants allant jusqu’à
2,2 millions FCFA (3 350 €) en moyenne en année 7. Les montants unitaires initiaux
correspondent au premier crédit octroyé à chaque emprunteur. Or ACEP développe une
méthode de progressivité des montants prêtés à un même client. Ainsi, du fait du
renouvellement prévisible de certains crédits, le montant unitaire moyen prévu augmentera
assez rapidement.
Les crédits seront octroyés sans épargne préalable ou bloquée, sur la base d’une analyse du
risque et des prises de garanties souples. En effet, la méthode d’ACEP repose plus sur
l’analyse préalable du dossier et les enquêtes de moralité effectuées par les agents de crédits
que sur les garanties. Cette souplesse repose également sur le fait que l’analyse est faite au cas
par cas : le niveau d’exigence et le niveau de formalisation des garanties sont déterminés pour
chaque dossier en fonction des risques spécifiques.
Par exemple, des nantissements d’équipements sont pris mais il n’est pas exigé
systématiquement que ces actes soient enregistrés (pour ne pas surenchérir le coût de crédit) ;
des promesses d’hypothèque sont également acceptées sur des garanties immobilières, évitant
ainsi aux clients les frais très importants d’une hypothèque notariée, mais les titres fonciers
sont demandés. ACEP complète l’enregistrement des actes et la mise en place de
6. Par exemple le groupe Tanyo, dont le capital est détenu par trois banques (BOA – Bank of Afrika –, BIA –
Banque internationale pour l’Afrique – et Sonibank) et plusieurs associations professionnelles, et appuyé par la
BEI (Banque européenne d’investissement), sert d’intermédiaire entre le monde bancaire et les PME désireuses
d’accéder au crédit pour financer leurs investissements.
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l’hypothèque, à ses frais, uniquement lorsqu’un crédit se déroule mal et que le recouvrement
doit se faire par voie judiciaire.
Par ailleurs, la souplesse porte également sur les types de biens acceptés en garantie : des
voitures d’occasion, des biens mobiliers, etc. sont acceptés. La facilité de réalisation et
l’attachement qu’y porte l’emprunteur sont les critères principaux dans le choix des garanties.
Par exemple, la promesse d’hypothèque est prise surtout pour son poids psychologique,
sachant que cette garantie est difficile à réaliser.
Les taux d’intérêt annuels dégressifs facturés aux clients seront de 27 % HT. Le rendement du
portefeuille de crédit (intérêts et commissions reçus sur encours de crédit/encours de crédit
moyen) sera de 32 %, reflétant un TEG qui sera inférieur à celui pratiqué par les principaux
concurrents. En effet, même si l’on ne dispose pas d’une information complète sur les taux
pratiqués par l’ensemble des institutions existantes, on peut déduire qu’ACEP Niger
pratiquera de fait un TEG bien inférieur à celui des autres IMF en place. Ainsi, les institutions
pratiquent un taux nominal correspondant au taux d’usure, auquel s’ajoutent les commissions,
mais également une épargne bloquée exigée (au minimum 10 % du montant de crédit ; le plus
souvent 20 à 30 %) ; ce qui constitue un coût supplémentaire important pour le client et entre
dans le calcul du TEG. À titre d’exemple, la Mecref pratique un TEG de 41 à 56 %, et Asusu
de 60 à 66 % en prenant en compte l’épargne bloquée.
Plan d’expansion
ACEP Niger évoluera en plusieurs étapes pour couvrir progressivement l’ensemble des zones
présentant un fort potentiel économique :
ouverture du siège à Niamey, capitale politique devenue également, du fait de son
dynamisme, la capitale économique du pays ;
ouverture d’une branche à Maradi, ville connue pour le dynamisme de son secteur
informel et demandeuse des services qui seront proposés par l’IMF ;
extension du réseau par l’ouverture d’un bureau de crédit, géré depuis la branche de
Maradi, vers Zinder et/ou Agadez, villes qui ne justifient pas l’installation d’une agence
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régionale. Le choix de l’une des deux villes dépendra des potentiels qui y seront
détectés ;
extension des services d’ACEP Niger à deux villes secondaires, choisies parmi Tahoua,
Dosso, Konni, Tillabéry et Gaya, où seront progressivement implantés deux bureaux de
crédit supplémentaires.
Ressources humaines
ACEP Niger démarrera avec une structure minimum : cinq cadres et quatre agents de crédit
dont un deviendra superviseur avant la fin de la première année d’activité.
Par la suite, ACEP met en œuvre un système de promotion des talents en interne : les
meilleurs agents de crédit deviennent superviseurs et les meilleurs superviseurs deviennent
directeurs ; le principal critère de promotion interne étant la connaissance du terrain et la
culture d’entreprise.
La direction générale sera assurée par un cadre expérimenté d’une institution ACEP existante
qui assurera également au démarrage la fonction de superviseur. Les autres cadres seront
recrutés localement.
ACEP international prévoit d’envoyer une équipe de management expatriée réduite. En effet,
seul le directeur général sera expatrié et il sera remplacé par une personne recrutée localement
au cours de l’année 3. ACEP international assurera le recrutement et la formation du
personnel local puis la supervision du développement de l’activité en base arrière et à
l’occasion de missions au Niger.
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Structure du capital
Les actionnaires pressentis, ayant exprimé un intérêt de principe pour le projet, sont les
suivants :
ACEP international (voir présentation supra) : en tant qu’opérateur, ACEP international a
vocation à entrer au capital des IMF qu’elle a contribué à créer. C’est le cas au Cameroun
où elle détient une participation de 15 % du capital et ou elle préside le conseil
d’administration, à Madagascar (ACEP Madagascar) et au Burkina Faso (ACEP
Burkina). Cet investissement en capital s’inscrit dans la durée avec la perspective d’être
le garant de la mission des ACEP ;
Investisseur & partenaire pour le développement (I&P) : I&P est une société de
financement privée créée en 2002 par des entrepreneurs issus du métier du Private Equity
en Europe. Sa démarche est celle du capital développement : investir aux côtés
d’entrepreneurs du secteur privé des pays en développement, dans une relation de
partenariat de long terme. Son intervention est centrée sur deux domaines : les entreprises
de taille moyenne en Afrique, et les institutions de microfinance. Dans ces deux
domaines, I&P investit sous forme de participation minoritaire au capital en tant que
prêteur, en assurant un accompagnement continu. En effet, au-delà de l’apport de fonds
propres, I&P est un actionnaire actif très présent dans la gouvernance des IMF dans
lesquelles il investit. I&P est un des principaux partenaires d’ACEP international, étant
un des actionnaires fondateurs d’ACEP Cameroun et le premier prêteur international
d’Adéfi (ACEP Madagascar). Proparco (Promotion et participation pour la coopération
économique) est l’un des actionnaires d’I&P ;
la BOA Niger : le groupe BOA est un des premiers réseaux bancaires en Afrique de
l’Ouest avec des filiales au Mali, au Burkina, au Niger, au Bénin, en Côte d’Ivoire et au
Sénégal. Le groupe est également présent en Afrique de l’Est (Kenya, Ouganda,
Tanzanie) et à Madagascar. En 2006, le groupe comptait plus de 2 000 salariés, gérait
plus de 500 000 comptes bancaires dans ses différentes filiales, affichait un total de bilan
de 1,4 milliard d’euros et un chiffre d’affaires d’environ 200 M€. La microfinance est un
des quatre axes de d’expansion sectorielle affiché par le groupe. Cet intérêt stratégique se
manifeste par la volonté de se rapprocher d’IMF dans les pays où le réseau de la banque
est présent, principalement par des prises de participation minoritaire et de refinancement
d’IMF. La BOA est ainsi devenue actionnaire de Microcred Madagascar depuis la fin de
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l’année 2006. L’investissement du groupe BOA sera porté par la BOA Niger. La BOA
sera également la banque de référence d’ACEP Niger pour ce qui est du refinancement de
son encours. Des synergies opérationnelles pourraient également être recherchées,
notamment par la mise à disposition de guichets au sein de la banque pour les
remboursements des prêts des clients de l’IMF ;
un fonds géré par Blue Orchard : Blue Orchard est une société suisse spécialisée dans la
conception et la gestion de fonds et produits destinés à l’investissement dans la
microfinance. Depuis sa création, en 2001, la société s’est imposée comme l’un des
leaders du financement privé des institutions de microfinance. Ses sept fonds et produits
ont permis de lever 450 millions de dollars, investis dans plus de 34 pays et
92 institutions de microfinance. La société travaille en partenariat avec Credit Suisse,
Morgan Stanley, JPMorgan, Citi, Dexia et BBVA.
Le capital envisagé au démarrage d’ACEP Niger est de 400 millions de FCFA (609 797 €s).
La répartition suivante est envisagée :
groupe BOA : 34 % ;
I&P : 30 % ;
ACEP international : 15 % ;
Blue Orchard : 21 %.
Un pacte, qui liera les différents actionnaires et détaillera les conditions de la gouvernance et
des cessions des actions, est en cours de négociation entre les parties mentionnées.
Projections opérationnelles
L’objectif est d’atteindre à un horizon de sept ans, à Niamey, Maradi et dans quelques autres
centres urbains (Zinder et/ou Agadez, et au choix Tahoua, Konni, Gaya), environ
2 600 entreprises finançables clientes, représentant un volume d’encours de 3,2 milliards de
FCFA (4,9 M€).
Projections financières
L’institution devrait atteindre l’équilibre au terme de sa quatrième année d’activité, avec pour
objectif de réaliser en année 5 un résultat net de 141 millions de FCFA (215 000 €), sous
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l’effet de l’accroissement de l’encours et de la dilution des frais fixes (économies d’échelle),
et de dégager à terme un résultat net équivalent à 6 % de l’encours moyen. Le coût des
ressources ramené à l’encours aura tendance à diminuer entre les années 4 et 7 suite à
l’autofinancement progressif de l’accroissement de l’encours.
On note que ce plan d’affaire est relativement prudent, conformément au « modèle » mis en
place dans les autres ACEP. Ainsi, la croissance des encours et des emprunteurs est
particulièrement lente pour une IMF récente, en comparaison des autres modèles greenfields.
Cette faible croissance se justifie par la taille du marché nigérien. De même, le point
d’équilibre sera atteint en année 4, ce qui témoigne d’une prise de risque mesurée (en général
le point d’équilibre est visé en année 3 et la rentabilité croît ensuite très rapidement).
Intervenants
Le bénéficiaire final du financement de l’AFD est ACEP Niger SA. Toutefois, il est important
de signaler que l’ensemble de l’assistance technique sera fourni par ACEP international. Le
succès du projet dépend donc du professionnalisme, de l’expérience et des capacités de cette
entité.
À l’origine, l’ACEP est un projet de l’USAID (United States Agency for International
Development) au Sénégal initié en 1986 comme projet de crédit aux micro-entreprises et
arrivé à l’équilibre financier en 1991 puis institutionnalisé comme mutuelle d’épargne-crédit
en 1993.
Les promoteurs de l’ACEP Sénégal ont ensuite créé ACEP développement (bureau d’études –
SARL) dont l’objectif est de « labelliser » des IMF adhérant à une charte de qualité et de
mettre en œuvre des projets de crédit aux TPE basés sur la méthodologie de l’ACEP et
utilisant leur paquet technique (procédures, organigrammes, logiciels, modes de gestion du
personnel, etc.).
Par la suite, la société, devenue ACEP international, a été constituée en 1998 sous forme de
société unipersonnelle à responsabilité limitée de droit américain.
Petite structure, ACEP international a réalisé un chiffre d’affaires de 314 000 dollars en 2009,
pour 17 000 dollars de résultat net. Son actif s’élevait à 179 000 dollars en 2008, et
196 000 dollars en 2009.
Le système ACEP a ainsi été mis au point avec succès au Sénégal (ACEP Sénégal) en 1989, à
Madagascar à partir de 1995 (ACEP Madagascar/Adéfi) et au Cameroun en 1999 (ACEP
Cameroun).
Depuis 2007, ACEP international intervient en outre comme opérateur technique sur une
opération de downscalin permettant à la Banque de développement des Comores de créer des
guichets mésofinance et microfinance, sur financement AFD.
La stratégie d’expansion des ACEP est toutefois limitée, avec un rythme de créations assez
lent. Notons qu’aucun autre projet de création n’est actuellement envisagé par les dirigeants
d’ACEP international, qui préfèrent asseoir, dans les années à venir, la réussite des
institutions existantes ou en passe d’être créées.
Les crédits sont octroyés individuellement de façon répétitive et progressive après une étude
rapide ; ils sont décaissés au maximum en 15 jours avec des procédures très simplifiées et
transparentes. Les montants de crédit sont adaptés aux capacités de gestion des micro-
entrepreneurs qui empruntent sur une durée qu’ils peuvent maîtriser (3 à 18 mois). Les crédits
permettent aux micro-entrepreneurs d’accroître très rapidement leur production, d’acheter au
meilleur prix, et de satisfaire de nouvelles commandes. Les revenus supplémentaires procurés
grâce au crédit permettent d’améliorer les conditions de vie de la famille, de sécuriser et de
développer l’entreprise.
Les crédits sont distribués à partir de points de service rudimentaires situés dans les différents
quartiers des villes. Les agents de crédit qui animent ces points de service sont recrutés sur
leur capacité à évaluer la moralité des clients et à connaître leur milieu social ; ils sont jugés et
rémunérés en fonction de la performance de leur portefeuille.
Les institutions ACEP sont gérées avec une logique d’entreprise privée, qui vise la rentabilité
et la pérennisation. Les institutions ACEP adoptent dès le démarrage (même en phase projet)
une comptabilité de type bancaire et des normes de gestion plus restrictives que les standards
internationaux. Elles maintiennent un système de contrôle interne et d’audit externe
rigoureux.
Le portefeuille est géré avec dynamisme et prudence. Les taux de perte annuelle (abandon de
créance + variation de provision) se situent en moyenne à 1,5 % de l’encours géré.
Mode opératoire
Notons que cette modalité s’applique uniquement dans les cas de création de nouvelles
institutions de microfinance locales (greenfield). La fiscalité locale doit bien sûr se voir
encouragée dès lors que les institutions sont en mesure d’y faire face du fait d’un bilan
financier équilibré (notons le cas d’une subvention directe à Advans Cameroun, créée
deux ans auparavant, dans le cadre d’un projet de mésofinance). Dans le cas des greenfields
cependant, il s’agit de favoriser un allégement des charges en période de démarrage : le fait
que ces dernières soient contraintes de s’acquitter d’une retenue à la source viendrait grever
les ressources disponibles pour recourir à l’assistance technique.
Pour atteindre les objectifs mentionnés ci-dessus, ACEP Niger recherche en complément un
financement permettant de financer une partie du fonds de crédit de départ. L’AFD est
sollicitée pour un prêt permettant d’y répondre. Il est ainsi proposé un prêt concessionnel de
long terme visant à financer à des conditions favorables, en monnaie locale, l’encours de
crédit de l’institution pendant sa phase de démarrage.
Le coût total de l’assistance technique pour le lancement d’ACEP Niger ainsi que le fonds de
crédit de démarrage sont estimés respectivement à 785 887 € et 714 113 € et sont entièrement
financés par l’AFD.
Par ailleurs, les investissements matériels mobiliers et le résultat déficitaire des premières
années seront également financés par emprunt, auprès d’investisseurs privés ou
institutionnels, d’autres ressources concessionnelles consenties par des bailleurs de fonds, ou
de ressources bancaires (en général inférieures à trois ans) provenant de banques présentes ou
non au capital.
Ci-dessous la répartition envisagée des différents types d’emprunt dans la couverture des
besoins.
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On constate donc qu’il est prévu que les emprunts bancaires se substituent progressivement à
l’apport concessionnel de l’AFD.
L’assistance technique sera financée par une subvention de 785 887 € financée à partir de la
facilité renforcement de capacités microfinance (MCFSU)7. Outre les investissements
matériels et immatériels habituels dans la création d’une IMF (mise en place d’une
méthodologie de crédit et d’un SIG notamment), le démarrage d’ACEP Niger requerra un
effort important de formation du personnel local et de gestion des ressources humaines.
Le fonds de crédit de démarrage est financé par un prêt sur la facilité investissement
microfinance (MCFPR) concessionnel en monnaie locale (FCFA) au taux d’intérêt annuel de
4 %, avec un profil de maturité de dix ans dont cinq ans de différé. Les caractéristiques du
produit financier proposé sont en phase avec le plan d’affaire d’ACEP Niger, et ont été
conçues dans le but de permettre le refinancement à long terme de l’institution dans cette
phase de démarrage. En effet, l’institution en cours de démarrage aura besoin de ressource
longue, dans la mesure où le marché ne lui permettra pas de se refinancer à long terme dès le
début de son activité. L’AFD jouera ainsi un rôle d’accompagnateur dans la première phase
de croissance de l’institution. Le taux proposé est comparable aux taux proposés pour la
création d’institutions similaires (ACEP Burkina) et déclarable APD.
7. Il s’agit d’une facilité consacrée exclusivement au financement de projets sur subvention permettant de
renforcer les capacités d’institutions de microfinance existantes ou en création. Cette facilité a vocation à
financer en priorité des projets de la ZSP (zone de solidarité prioritaire) en Afrique subsaharienne et pour des
montants n’excédant pas 1,5 M€.
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Les effets positifs de la microfinance sur le développement d’activités économiques par des
populations n’ayant pas accès au système bancaire classique ne sont plus à démontrer pour
autant que les financements soient majoritairement dédiés à des activités génératrices de
revenus.
Les effets sociaux attendus vont découler principalement de la capacité d’ACEP Niger à
financer des PME nigériennes actuellement non financées ou sous-financées. Permettre
l’accès au financement de ces populations défavorisées contribue au développement
d’activités génératrices de revenus et, ainsi, à la réduction de la vulnérabilité financière des
plus pauvres. Le projet participe directement à la lutte contre la pauvreté et à la réduction des
inégalités sociales dans le pays.
La durabilité des effets du projet est liée à la pérennité financière d’ACEP Niger. Les
projections financières, la solidité des équipes proposées, le potentiel du marché dans lequel
l’institution compte opérer sont autant d’éléments qui permettent de conclure que l’IMF sera
une institution pérenne. D’autres ACEP ont atteint le point d’équilibre conformément à leurs
projections financières, ce qui reflète la capacité d’ACEP international à promouvoir la
création d’institutions pérennes.
La durabilité d’ACEP Niger dépendra aussi de sa capacité à transférer son savoir-faire à des
cadres locaux, afin de ne pas dépendre sur le long terme d’équipes expatriées coûteuses et par
définition temporaires. Le modèle ACEP prévoit l’expatriation d’un seul cadre de direction
venant lui-même d’un autre ACEP en Afrique, et la formation de cadres locaux en mesure
d’assurer la relève. Cet objectif a été atteint avec succès dans le cas d’autres ACEP.
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IV. IV - DISPOSITIF DE SUIVI-ÉVALUATION ET INDICATEURS
Un système d’information de qualité est mis en place, qui permet de gérer les dossiers de
crédits aux différentes étapes de leur cycle de vie. Le logiciel intégré de gestion (crédit
+ comptabilité) spécialement développé pour le réseau ACEP est fourni par ACEP
international, via sa nouvelle filiale, ACEP New Tech, dans le but de développer une solution
interne la plus efficiente possible. Ce logiciel fonctionne à ACEP Sénégal et a été installé plus
récemment à ACEP Cameroun et à ACEP Madagascar ; il sera installé prochainement à
ACEP Burkina ; il a fait ses preuves et a été audité par des cabinets d’audit externes.
Ainsi, les remontées de tous les ACEP utilisant le logiciel ont été centralisées ; dans le but de
le mettre à jour avant son exploitation par ACEP Burkina et par la future ACEP Niger. En
outre, le rating réalisé par Planet Rating au Sénégal note que ce même logiciel « est
généralement stable et fonctionne correctement, générant ainsi une grande fonctionnalité et
proposant un nombre important de rapports. Le personnel des agences maîtrise bien le logiciel
et un guide d’utilisateur détaillé et à jour est disponible pour consultation ».
En outre, un audit sera réalisé sur une base annuelle, et sera à la charge du bénéficiaire.
Dans ce domaine, ACEP Niger pourra profiter de l’expérience des trois ACEP existants qui
opèrent avec le même système d’information et de gestion et ont déjà fait l’objet d’études
d’impact (cf. Adéfi à Madagascar).
Indicateurs agrégeables
Nombre de personnes concernées par les opérations de crédit. L’objectif à cinq ans sur
cet indicateur est de 3 379 personnes.
Volume des financements de microfinance et des services financiers aux particuliers.
L’objectif à cinq ans sur cet indicateur est de 8 251 813 €.
Autres indicateurs
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Indicateurs qui figurent dans les projections, notamment :
encours de crédit ;
nombre de crédits déboursés ;
encours de dépôts ;
nombre d’épargnants ;
nombre d’agences ;
encours moyen de crédit ;
PAR (portefeuille à risque) > 30 jours/PAR > 90 jours.
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