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Les passions de l’âme

René Descartes

Jérémy Bavaud et Johan Richoz


Oc philosophie
Collège Voltaire
Table des matières

Pages

Introduction……………………………………………………………………………… 3

Définition générale des passions (Art. 25-46)................................................................................ 3

Causes des passions: nature des objets des passions et ce qu’ils procurent (Art. 51-67)............... 4

Les six passions primitives (Art. 69-93)......................................................................................... 5

Les conséquences physiologiques de cinq passions primitives (Art. 97-137)................................ 6

Conclusion……………………………………………………………………………………..…. 7

Avis personnel……………………………………………………………………………………. 7

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Introduction

L’extrait de texte est tiré des “Passions de l'âme” qui est un traité philosophique écrit par René
Descartes en 1649. Notre extrait est issu d’une édition de l'œuvre datant du 19ème siècle. R. Descartes
était un mathématicien, physicien et philosophe français. Il est né en 1596 et mort en 1650. Il est
notamment le fondateur de la philosophie rationaliste, philosophie selon laquelle la raison est le seul
moyen d'acquérir de la connaissance. Il était un dualiste des substances, ce qui signifie que l’on
considère que l’âme et le corps sont deux substances distinctes: l’âme est immatérielle et le corps est
matériel. Les thèmes qui sont soulevés par le texte sont les sciences, l’humain, les passions, l’âme et
le corps. La problématique est implicite et peut être formulée en : Que sont les passions de l’âme?
R. Descartes défend d’abord que les passions de l’âme sont “des perceptions ou des sentiments, ou
des émotions de l’âme, qu’on rapporte particulièrement à elle, et qui sont causées, entretenues et
fortifiées par quelques mouvements des esprits” (Art. 27) et il soutient qu’il n’y a que six passions
primitives, et que les autres en sont des espèces ou des mélanges.

Définition générale des passions (Art. 25-46)

L’Homme ressent deux sortes de perceptions : celles qui se rapportent aux événements
physiques, qui se produisent en dehors de nous et que nous percevons par nos organes des sens, puis
celles qui se rapportent à l’âme. Par définition, ces deux types de perceptions devraient être
considérées comme étant des passions par rapport à l’âme ; cependant, Descartes, au cours de ce
texte, ne se penchera que sur la question des passions de l’âme-même, celles qui ne trouvent pas
d’explications véritables dans l’esprit commun. (p.ex, la joie, la colère)
Ainsi, on peut définir les passions de l’âme comme ceci : “des perceptions ou des sentiments,
ou des émotions de l’âme, qu’on rapporte particulièrement à elle, et qui sont causées, entretenues et
fortifiées par quelque mouvement des esprits”, les esprits étant des parties matérielles très petites et
rapides du sang. Cette description sera développée aux articles suivants.

La première partie de la définition des passions se présente comme telle : il y a trois manières
de parler des passions. Ce sont : 1. des perceptions, ce sont des pensées sur lesquelles nous n’avons
aucun contrôle ; elles ne sont pas choisies. 2. Des sentiments, ou sensations : on peut les appeler ainsi
car comme pour les objets par nos sens, l’âme reçoit les passions en elle. 3. Des émotions de l’âme :
cela représente tous les changements ou pensées de l’âme, dont les passions sont les plus “puissantes”
(qui “secouent” le plus l’âme).
Par ailleurs, les passions ne viennent pas du cœur, l’accélération du pouls par exemple n’en
est qu’une conséquence. Avoir mal au pied ne signifie pas que l’âme se trouve dans le pied.

La deuxième partie de la définition se présente comme ceci : lorsqu’une figure, effroyable par
exemple, se trouve en face de nous, le corps va émettre un jugement en fonction des liens que la
figure a avec ce qui a pu nous être nuisible auparavant. Cela crée des impressions dans le cerveau. Ces
images formées sur la glande pinéale vont réfléchir des esprits qui iront en partie dans les nerfs
propices au jugement du corps, c’est-à-dire dans les nerfs des jambes pour courir et du dos pour se
retourner dans le cas où la figure est effroyable et nous rappelle donc des choses nuisibles, et en
partie dans les nerfs du coeur. Ces derniers accélèrent le rythme et envoient donc des esprits, présents
dans le sang pour rappel, au cerveau. Finalement, les esprits ouvrent les pores du cerveau qui mènent
aux mêmes nerfs que vu précédemment. C’est également le passage des esprits dans ces pores qui
crée l’émotion. Le système forme donc une boucle. L’émotion que nous ressentons face à un même
objet dépend du tempérament du corps, de la force de l’âme et de nos expériences précédentes. Les

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passions ont comme effet d’inciter l’âme à vouloir la chose à laquelle se prépare le corps (la peur
incite à la fuite).
Nous ne pouvons contrôler les passions, puisque c’est un système fermé. Nous devons
attendre que l’émotion du cœur se calme. Les seules émotions que nous pouvons ignorer sont les plus
faibles, mais grâce à la volonté, nous pouvons nous empêcher de suivre ce que le corps nous dispose à
faire (s’empêcher de frapper quand on est en colère par exemple).

Causes des passions: nature des objets des passions et ce qu’ils procurent (Art. 51-67)

A présent, le texte se penche sur les causes des passions de l’âme, la nature des objets des
passions et ce qu’ils procurent. Il distingue deux types de causes, d'abord “la cause directe” qui est
l’agitation des esprits qui meuvent la glande pinéale, puis “les causes premières” qui sont celles qui
causent l’agitation des esprits. Les “causes premières” sont divisées en deux catégories, d’abord les
causes internes, soit la volonté de l’âme, la tempérance du corps et les impressions du cerveau, ou les
causes internes, soit les objets. De cette première cause découle l’admiration, qui est la première
passion, seulement si le contact avec l’objet crée une surprise (soit s’il est nouveau, différend ou
inattendu). Ensuite, de l’admiration découle le mépris ou l’estime. Si l’objet est intérieur, on peut
aussi éprouver de la magnanimité, de l’orgueil, de l’humilité ou de la bassesse. Ensuite, si l’objet est
extérieur il en résulte de la vénération si l’objet était estimé ou du dédain s’il était méprisé. Enfin, si
l’objet est représenté comme bon, on éprouve de l’amour. Tandis que s’il est présenté comme
mauvais, on éprouve de la haine.

Degré de probabilité d’acquérir notre désir Ce qu’on éprouve

Très probable sécurité - assurance

Probable espérance

Improbable crainte (ex: jalousie)

Très improbable désespoir

Figure: Le désir

Ensuite, après avoir parcouru les différentes causes qui sont à l’origine des passions, le texte
explique le rôle et les effets du désirs. Ceux-ci jouent un rôle important quand on doit faire un choix.
En effet, les désirs vont nous orienter vers ce qui est bénéfique pour nous, soit en nous poussant à
conserver l’objet s’il est bon, ou à s’en débarrasser s’il est mauvais. En fonction de la probabilité
d’obtenir ce qu’on désir (soit en conservant ou en se débarrassant de l’objet) on va éprouver un
sentiment d’assurance ou de sécurité si il est très probabl, d'espérance si c’est probable, de crainte si
c’est improbable ou de désespoir si c’est très improbable. Face à cette probabilité plus ou moins
probable, on peut avoir l’impression qu’obtenir le désir qu’on souhaite dépend de soi, alors on peut
faire face à deux difficultés: soit dans le choix des moyens, de quoi découle l’irrésolution qui consiste
à délibérer et à prendre conseil, soit dans l’exécution, duquel on peut être démotivé par de la lâcheté,
qui induit de la peur ou de l’épouvante à la hardiesse, ou par de l’émulation, qui induit du courage ou
de la hardiesse.
Si l’on considère qu’un mal nous appartient, on ressent de la tristesse alors que si c’est un
bien qu’on possède on éprouve de la joie. Maintenant, si une personne est digne de posséder du bien,
alors on voie être joyeux de façon sérieuse alors que si cette personne possède indignement un mal, on
sera joyeux, moqueur et rieur. Mais si une personne est indigne de posséder du bien, on est envieux
alors que si elle est indigne de posséder du mal, on aura pitié. Si l’on ne possède pas le mal mais

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qu’on le crée, on sera satisfait alors que si on crée du mal, on se repent. Ensuite, si les autres créent ce
bien pour les autres, on aura de la faveur, alors que si ce bien est pour nous, on sera reconnaissant.
Mais si les autres créent du mal pour autrui, on sera indignés, alors que si ce mal est pour soi, on aura
de la colère. Si on s’imagine que les autres considèrent que le bien est ou a été en nous, on aura
l’impression d’être glorieux alors que si les autres considéraient que le mal est ou a été en nous, on
serait honteux. Quand le bien dure dans le temps, on peut être dégoûté ou ennuyé. Par exemple, si on
mange du chocolat en grande quantité, on sera dégoûté d’en manger davantage. Si le mal dure dans le
temps, on sera moins triste, car on sera habitué par la douleur occasionnée. Par exemple, si l’on se
pince longtemps, on ne sentira plus la douleur aussi intensément. Pour finir, si le bien est passé, on
sera triste, car l’objet nous manquera, alors que si c’est le mal qui est passé, on sentira de l’allégresse,
car on aurait été libéré d’un objet pénible.

Les six passions primitives (Art. 69-93)

Les six passions primitives sont : l’admiration, l’amour, la haine, le désir, la joie et la tristesse.
Les autres sont toutes des dérivées ou des mélanges de ces 6 passions. Les passions servent à garder
des bonnes pensées utiles (la peur par exemple), mais elles nous font aussi garder les mauvaises
pensées ou les pensées inutiles. Voyons l’amour et la haine : l’amour est causé par le mouvement des
esprits. Ces derniers donnent envie à l’âme de se joindre de volonté à ce qui lui paraît convenable. La
haine est aussi causée par le mouvement des esprits, mais elle donne envie à l’âme de se séparer des
objets qui lui semblent nuisibles. Donc, les émotions peuvent influencer la volonté de l’âme. Il y a
deux types d’amour : 1. l’amour de bienveillance quand on veut du bien pour l’objet, 2. l’amour de
concupiscence lorsqu’on désir l’objet, sans lui vouloir du bien pour autant. Les deux sont de l’amour,
mais dans celui de la concupiscence, il se dirige vers la possession et non l’objet même. Prenons des
exemples : l’amour de l’ambitieux pour la gloire, l’avaricieux pour l’argent, l’ivrogne pour le vin, le
brutal pour une femme qu’il veut violer. Tous ces amours sont purement de concupiscence, il désirent
l’objet mais ne l’aiment pas en lui-même. Contrairement à cela, l’amour de bienveillance qu’un bon
père éprouve pour ses enfants fait qu’il ne veut pour eux que du bien.

Type d’amour Degré d’estime Types d’objets

Simple affection amour de l’autre < amour de soi Fleurs, oiseau,


cheval

Amitié amour de l’autre = amour de soi Hommes

Dévotion amour de l’autre > amour de soi Divinité


Prince
Pays
Ville
Homme
particulier

Figure: Les types d’amour

Nous pouvons séparer les types d’amour en trois catégories. Tout d’abord, il y a la simple
affection, qui arrive uniquement lorsque l’on estime l’autre moins que soi-même. C’est par exemple le
cas pour les fleurs ou les animaux. Ensuite, il y a l’amitié, lorsque notre estime de l’autre est pareille à
la nôtre. Nous ne pouvons être amis avec les animaux selon Descartes car nous les estimons inférieurs
à nous, seuls les fous dérogent à la règle. (À titre informatif, Descartes a déclaré que les animaux
n’ont pas de conscience). Enfin, il y a la dévotion, lorsque notre estime de l’autre est plus grande que
la nôtre. Cela peut arriver pour les Dieux, la patrie, le Prince. Aucun Homme n’est trop imparfait pour

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que l’on ne puisse ressentir une amitié pour lui lorsqu’on sait qu’il nous aime. À l’inverse, il n'y a pas
autant d’espèce de haine que d’amour car on est séparé de volonté face à la haine, donc on ne fait pas
forcément de différences. Maintenant, parlons du désir. En général, le désir tend à la fois à la
recherche d’un bien comme à la fuite d’un mal. L’horreur et l’agrément sont des exceptions :
L’horreur est une émotion qui montre à l’âme un danger de mort imminente. Elle est si intense qu’elle
force l’âme à réagir fortement, ce qui résulte en la fuite ou l’aversion. L’agrément, lui, représente le
plus grand des biens pouvant appartenir à l’Homme. Cette émotion crée un désir et nous pousse à agir.
Comme pour l’amour, il y a plusieurs niveaux d’agréments : en effet, une fleur nous incitera à
l’observer, tandis qu’un fruit à le manger. Cependant, l’agrément principal est notre “âme soeur”.
Passé un certain âge, la nature fait que notre cerveau nous donne l’impression que nous sommes
incomplets, et que seul une personne du sexe opposé sera capable de nous compléter. Ainsi,
l'acquisition de cette moitié, qui devient donc un désir, nous est présenté comme le plus grand des
biens dont nous puissions jouir. Cette personne sera forcément unique, nous n’avons besoin que
d’une autre moitié. Désormais, abordons la joie et la tristesse. La joie est une émotion qui consiste en
la jouissance des biens que notre corps considère comme nôtres (l’âme est passive). Il ne faut pas
confondre cette émotion avec la joie intellectuelle, qui n’est pas une émotion. Elle consiste en la
jouissance des biens que nôtre entendement nous montre comme nôtres (l’âme est active). La joie
intellectuelle suscite généralement la joie émotionnelle, car lorsqu’on réalise que nous possédons un
bien, des impressions dans le cerveau vont être créées et déclencheront la joie. La tristesse, elle, est
l'incommodité que l’on a du mal, ou lorsque notre corps considère un défaut comme nous appartenant.
La tristesse intellectuelle existe également et fonctionne de la même manière. Ainsi, la tristesse et la
joie intellectuelles nous viennent de notre opinion d'avoir un bien ou un mal. Cependant, ce n’est pas
toujours clair pour la joie et la tristesse. Les biens et les maux forment des impressions dans le
cerveau, et l’âme est passive, mais nous ne savons parfois pas pourquoi nous sommes tristes ou
joyeux. Selon Descartes, il y a deux possibilités : soit les impressions ne touchent pas l’âme, et sont
donc exclusives au corps, soi ces émotions sont causées car l’âme ne considère l’objet ni comme un
mal, ni comme un bien, mais comme une autre forme dont l’impression est liée avec celle du mal ou
du bien.

Les conséquences physiologiques de cinq passions primitives (Art. 97-137)

Amour Haine Joie Tristesse Désir

Pouls* égal et beaucoup plus fort inégal (souvent égal/plus rapide et lent et faible plus rapide et violent
>) et plus petit fort

Poitrine/coeur douce chaleur froideur, chaleur agréable coeur se serre,


chaleur âpre et se gèle, froid
piquante dans tout le
corps

Digestion rapide mauvaise se fait moins que bonne


d’habitude digestion, bon
appeti

Autres sang se répand dans plus d’esprits,


les parties extérieurs sens plus aigus,
du corps plus de mobilité

*par rapport à la normale


Figure: Les conséquences physiologiques de cinq passions primitives

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R. Descartes décrit, de l’article 97 à 101, les conséquences physiologiques de l’amour, de la
haine, de la joie, de la tristesse et du désir. Comme on peut le voir sur le tableau, il attribue à chacune
des passions des conséquences physiologiques: l’émotion aura un impact sur le pouls, la sensation
dans la poitrine, la digestion et le sang. On peut en tirer que les émotions ont un impact plus ou moins
positif sur la santé, comme dans le cas de l’amour, où la digestion est rapide. De l’article 97 à 137, il
décrit les manifestations physiologiques sur le visage, donc les actions particulières des yeux, les
actions particulières du visage et les couleurs. On constate que ces types de manifestations peuvent
être comparées à des micro-expressions, ce qui est une bonne intuition de R. Descartes.

Conclusion

En conclusion, les passions dépendent des mouvements des esprits qui sont influencés par les
objets les sens du corps. En l'occurrence, la glande pinéale joue un rôle central car elle influence la
manière dont l’âme interprète les données provenant des sens du corps. Puis, des six passions
primitives découlent les passions secondaires, et les émotions étant très complexes, il y a la plupart du
temps plusieurs catégories pour différentes passions.

Avis personnel

Selon nous, ce texte comporte plusieurs points positifs. D’abord, le texte est bien structuré et
clair. Cette organisation permet une meilleure compréhension du raisonnement de R. Descartes.
Ensuite, R. Descartes a une approche pluridisciplinaire, en l’occurrence, la médecine, la physiologie,
la philosophie. Cette approche qui est une qualité, car rassembler autant de connaissances permet de
faire plus de liens, et d’être d’autant plus complet et créer une théorie complexe. Puis, R. Descartes
prédit déjà des notions qui sont reconnues aujourd’hui, comme les aspects sociaux, cognitifs,
comportementaux et physiologiques avec le matériel et la connaissance de son époque. Pour les points
négatifs, l’avis de Descartes pose un vrai problème. Si l’on admet que le corps peut réagir de
lui-même face aux objets extérieurs, comme nous l’avons vu pour la figure effroyable, alors à quoi
l’âme sert-elle ? Le dualisme cartésien du corps et de l’esprit admet une possibilité déroutante qui est
celle du zombie philosophique et ne donne pas une place assez importante à l’âme dans le corps. Il est
donc parfois difficile de distinguer l’âme du corps, car les deux fonctionnent de façon dépendantes
dans un même individu, et cette ambiguïté peut mener à penser que le corps et l’âme sont comme
mélangées.

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