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Avis d’experts
Les idées
légitimement posée un grand industriel
du secteur pharmaceutique. C’est ici l’incertitude de mesure qui va per-
mettre de déterminer la limite d’accepta-
Pour répondre à cette question, rien de tion des erreurs des pipettes. Quelle que
plus simple, il suffit de se référer à la soit la technique considérée, la pipette n’est
norme. Par chance, il en existe une qui qu’un des nombreux moyens qui mènent
traite exactement de ce sujet [1]. C’est au résultat. Beaucoup d’autres facteurs y
ce qu’a fait cet industriel : pendant plu- contribuent : les opérateurs (répétabilité),
sieurs années, il a scrupuleusement suivi les conditions environnementales, les
cette norme, en toute confiance, dans le autres moyens utilisés (balances, fioles…),
cadre des vérifications des micropi- et surtout le produit analysé lui-même.
pettes. Mais cette démarche générait un Dans le monde du vivant, les réactions dis-
grand nombre de non-conformités et persent beaucoup pour un même échan-
d’opérations d’ajustage. Avec un peu de tillon… Aussi, il ne sert à rien d’avoir une
recul, et compte tenu des coûts générés pipette “ultra-précise” si les autres facteurs
par les opérations périodiques et le trai- sont des sources prédominantes de dis-
tement des non-conformités, une grande Figure 1. persion.
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l’incertitude de mesure globale au mentaux, et en connaissant les incertitudes mentation FD X 07-014 [3]. Celui-ci
milieu de tous les autres facteurs. en X et en Y, on simule numériquement introduit l’idée du rapport de périodicité,
Pour ce faire, le principe est d’appliquer d’autres valeurs possibles pour ces points noté Rper, qui représente le poids de
les recommandations de la norme (au regard des incertitudes), qui condui- l’instrument dans le processus. Elle
NF ENV 13005 (GUM) [2]. Or, les tech- sent à autant de résultats différents. Il est propose ensuite une relation entre ce
niques concernées peuvent être com- alors possible, phase après phase (prépa- rapport et la périodicité, soit :
plexes et l’écriture du “modèle” n’est ration de la solution mère – référence –,
pas simple, surtout lorsque les opéra- dilution, courbe…) et par simulation
tions se succèdent au sein d’une même numérique, d’estimer les incertitudes
technique. D’une façon générale, il s’agit induites par les différents facteurs sur Et la périodicité (en années) :
de diluer un produit de référence, soit en chacun des résultats intermédiaires et
cascade (ce qui suppose la prise en surtout, sur le résultat final.
compte des covariances !), soit unitai- Ainsi, l’incertitude sur le résultat final,
rement, pour obtenir des valeurs-étalons notée utitre sur la figure, dépend des Il est intéressant de noter qu’il est possible
secondaires permettant d’établir une phénomènes de répétabilité et de repro- de considérer cette relation dans l’autre
courbe d’étalonnage, suivant un modèle ductibilité interopérateurs, de l’erreur de sens. Sachant que la périodicité maximale
plus ou moins complexe (polynômes de la pipette, de l’incertitude sur le modèle a été fixée à 12 mois par l’industriel, on
puissance diverse, sigmoïde, “power utilisé, notée g(u(a), u(b)), etc. En faisant peut se demander à quelle EMT de la
fit”…). Le produit à doser est ensuite varier numériquement l’erreur de la pipette correspond cette périodicité. En
lui-même dilué pour “ramener” sa pipette de 0 à x %, on peut voir évoluer connaissant cette EMT pour chaque tech-
concentration dans le domaine d’éta- l’incertitude sur le titre, donc l’impact nique, il est possible de déterminer l’EMT
lonnage puis de “remonter” à la concen- de la pipette. Cette relation, difficile à minimale qui convient à l’ensemble des
tration initiale en tenant compte du retranscrire en équation mathématique, pipettes (une gestion individuelle étant
modèle et de la dilution du produit. se retrouve ici de façon quasi expéri- trop lourde à mettre en place). Nous nous
La modélisation d’un tel enchaînement mentale, les manipulations en moins replaçons ici dans une stratégie “au pire
d’événements reste assez compliquée à grâce à la simulation numérique ! des cas”, contraire au “juste nécessaire”,
conduire jusqu’au bout et le bilan des Ainsi, on détermine l’erreur maximale mais imposée par des soucis d’organisa-
causes d’incertitudes se révèle bien fas- de la pipette qui n’impacte pas le résul- tion qu’il convient évidemment d’intégrer.
tidieux. Dans ce cas, il est préférable tat final. C’est l’EMT recherchée. Elle présente néanmoins l’avantage d’être
d’opter pour une solution bien plus Poursuivant le raisonnement, si l’EMT adaptée au “pire des cas” de cette société,
simple, et peut-être plus performante : ainsi déterminée est plus importante que et non “au pire des cas, tout court”,
la simulation numérique. l’EMT initiale, on est en droit de remettre souvent encore “pire” !
en cause la périodicité d’étalonnage. En
L’informatique effet, moins la pipette impacte le résul-
tat, moins il est utile de la vérifier. À l’in-
La figure 2 présente les différentes verse, si son poids est important dans le
étapes d’une technique classique et le processus, il convient de l’étalonner/véri-
principe de la simulation numérique : fier souvent pour s’assurer du maintien
Comme le montre la petite figure entou- de sa capacité à fournir des résultats de
rée de rouge, et puisqu’il existe une incer- mesure acceptables.
titude sur la valeur mesurée en X et en L’optimisation des périodicités d’éta-
Y, la valeur vraie peut se trouver en diffé- lonnage/vérification pour ce parc de
rentes positions matérialisées par les croix. micropipettes s’est appuyée sur les prin- Figure 3 : copie d’écran extraite
Sur la base du nuage de points expéri- cipes décrits dans le fascicule de docu- du logiciel Six Sigma Designer.
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