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Les techniques de tests de produits. Essai de classification et de clarification

Conference Paper · May 1999

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1 author:

Sophie Morin-Delerm
Université Paris-Saclay
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LES TECHNIQUES DE TESTS DE PRODUITS :
ESSAI DE CLASSIFICATION ET DE CLARIFICATION

Sophie Morin-Delerm

Maître de conférences en gestion


à l’Université de Versailles -Saint Quentin -en -Yvelines
47, boulevard Vauban
78047 GUYANCOURT
tél : 01 39 25 56 20

J'adresse tous mes remerciements à Frédéric Dorion, P.D.G. de l'Institut d'Etudes


Dimensions, pour ses précieux conseils. Je tiens également à remercier les responsables
études interrogés en profondeur dont les réponses ont contribué à bâtir cet article.

1
Les techniques de tests de produits :

essai de classification et de clarification

Résumé

Cet article a pour objectif de classer et de définir les techniques de tests de produits,

leurs conditions d'utilisation, leurs avantages et leurs inconvénients. Nous verrons que le

choix de l'une ou l'autre technique de tests de produits peut influencer largement l'évaluation

des produits par le consommateur, et par conséquent la politique de produit d'une entreprise.

Product tests technics :

organization and clarification essay

Abstract

The purpose of this article is to organize and define product tests technics, their

conditions of use, their advantages and drawbacks. We will underline that the choice between

the described technics products has a serious effect on the products consumer appraisal and

therefore on the firm product policy.


2
3
Introduction

En 1993, l’ANVAR1 nous annonce que la moitié des échecs de lancement de produit

sont d'origine commerciale. Selon ce même organisme, cette proportion est restée inchangée

en 1998. Multiples et contingents, les problèmes commerciaux méritent par conséquent une

attention particulière car mieux les comprendre pourrait signifier augmenter les chances de

succès des nouveaux produits et assurer un avenir florissant aux entreprises qui les lancent.

Dans cette optique, les acteurs de l'entreprise doivent prendre conscience :

- des moments de développement et de lancement pendant lesquels le produit a le

plus de chance d'être mis en difficulté ;

- des raisons pour lesquelles un produit échoue, ou au contraire, réussit.

Les réponses à ces questions ne sont certes pas uniques. Elles ont constitué le fruit de

nombreuses réflexions et NOVACTION2, dans un document interne à l'entreprise, a émis des

hypothèses issues de son expérience. Selon cet institut, 60% des produits échouent lors des

tests de concept, des tests techniques et des tests sensoriels. Ensuite, 54% des produits

restants faiblissent lors de la réalisation des tests de produits et des tests de marchés.

Enfin, 25% des produits rescapés meurent après leur lancement. Ces chiffres mettent bien en

évidence "l'épuration successive" liée aux différents stades du lancement.

Lancer un nouveau produit est donc de nature hautement incertaine. Les études

marketing, quelles qu'elles soient, puisent leur signification dans ce risque. Tout

naturellement, le décideur recherche l'information qui lui permettra de comprendre le plus

1ANVAR, Histoire(s) d'innover, InterEditions, Paris, 1993


2NOVACTION, « Les déterminants du processus d’adoption des innovations », IDSI, 1983
4
vite possible les besoins des clients, de situer le niveau d'un produit et d'apporter rapidement

des corrections éventuelles. Finalement, il espère un outil qui lui offre la base d'une décision

un peu moins incertaine.

Les tests de produits font partie des outils qui offrent une information essentielle à la

décision du lancement. Ils s'appliquent à tous les types de produits mais les entreprises des

secteurs de la grande consommation en sont les plus grandes utilisatrices. Ils ont pour

objectif de faire évaluer, par le consommateur, les caractéristiques intrinsèques d'un

produit et servent donc à mettre en évidence les qualités et les défauts des formules

proposées, à situer ces dernières par rapport aux produits concurrents. Les tests de

produits répondent à une mission de diagnostic. A l'issue du test et avant que le produit

ne soit livré aux turbulences du marché, les caractéristiques mal perçues sont modifiées

Mais les tests de produits sont régulièrement remis en cause dans les entreprises. Il

semblerait qu'ils répondent mal aux objectifs qui leur sont assignés et qu'ils soient trop

onéreux en regard de l'information qu'ils prodiguent. Si, comme nous l'avons constaté au

cours de nos travaux, les tests de produits doivent jouer un rôle stratégique dans le succès

d'un produit, une remarque remet en cause la réelle utilité de ces tests en l'état actuel des

pratiques : ceux-ci sont très hétérogènes, tant du point de vue de leurs noms que de leurs

objectifs, des procédures de tests utilisées, de la catégorie de produits testés, etc. Cette

grande diversité _ qui s'apparente à une anarchie des objectifs et des méthodes _ nuit à

la compréhension et à la mission des tests de produits.

L'objectif de cet article est de faire valoir l'importance des tests de produits dans la

politique de produit des entreprises en centrant notre recherche sur les techniques de tests et

5
en proposant une typologie de celles-ci, les décrivant telles qu'elles apparaissent dans la

littérature (rare) et dans les entreprises. Nous soulignerons les avantages et les intérêts de

chaque technique puis établirons des préconisations d’action.

Pour répondre aux objectifs de notre recherche, la méthodologie mise en oeuvre se

fonde sur deux types de données, secondaires et primaires. Nous avons tout d'abord exploité

des données secondaires en réalisant une étude de la littérature existante complétée par

l'analyse approfondie de quelque six cents rapports de tests de produits du secteur de

l'hygiène-beauté. Simultanément, nous nous sommes appuyée sur les propos de douze

responsables études interrogés en profondeur.

Pour résumer le champ de notre recherche, nous présentons une typologie simplifiée

des procédures de tests existant ; elle sert de fondement à notre article et permet de situer les

techniques de tests dans l’ensemble des procédures de tests. Nous ne décrirons pas ici les

protocoles de tests, mieux connus que les techniques qui retiendront dès lors toute notre

attention.

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pour affi cher une image Macintosh.

6
Fig.1 : Les procédures de tests

1. Test monadique ou solo-test. Caractéristiques générales

1.1. Définition

Un test réalisé selon cette procédure propose au consommateur d'évaluer un seul

produit en même temps. Ce test a pour objectif principal de mesurer et d'évaluer les

caractéristiques intrinsèques d'un produit, comme le goût3, la saveur et l'odeur dans

l'alimentaire ou le parfum, la texture, la couleur, les effets sur la peau pour les produits

cosmétiques.

On distingue :

- le test monadique "absolu". Il est utilisé dans le cas où le produit testé est totalement

nouveau c'est à dire qu'il n'existe pas de produit de référence. Les repas en portion BOLINO

(NESTLE) sont un exemple de produit innovant testé en monadique "absolu". Ce mode de

test est rare.

- le test monadique "relatif". Il représente 99% des cas puisqu'implicitement, le produit

testé seul est comparé au produit habituellement utilisé par le répondant.

Cette méthode peut s'effectuer soit en direct (il s'agit alors du test monadique direct),

soit avec dépôt (c'est le test monadique avec dépôt en une ou plusieurs visites).

Pour l'entreprise SEITA et sa société d'études REPERES4, la seconde visite, si elle

existe, ne fait souvent qu'amplifier les tendances apparues au moment de la première visite.

Le test monadique en deux visites (avec dépôt) semble être une solution intéressante car

confirmatoire.

3N. de SAINT JORES, J.-P. LOISEL, "Comment optimiser les tests de goûts, l'exemple de la SEITA", Revue
Française du Marketing, n°142-143, 1993/2-3.
7
Selon R. BENGSTON et H. BRENNER5, malgré ses avantages, la méthode de test

monadique est peut-être la plus controversée de toutes. Tous les experts interrogés

confirment cette affirmation.

1.2. Avantages et inconvénients de la procédure monadique

AVANTAGES INCONVENIENTS
- Proche de la réalité dans les conditions - nécessité d'apparier les échantillons i.e.
d'usage (on utilise un seul produit à la augmentation du coût et plus grand risque
fois) 6 d'erreur11
- information plus riche sur les intervalles - difficile d'obtenir des éléments
de préférence entre les produits permettant d'agir sur les composants du
alternatifs7 produit12
- rapide et facile à administrer8 - risque lié à l'effet de nouveauté13
- permet des comparaisons de niveaux de - risque lié à l'effet de gratitude14
préférence absolue au cours du temps et à - loin de l'environnement concurrentiel15
travers les populations9
- peu coûteux si on a une grande fiabilité
à l'unité10

Tab.1 : Intérêts et limites des tests monadiques

4N. de SAINT JORES, J.-P. LOISEL, 1993/2-3, op. cit.


5R. BENGSTON, H. BRENNER, "Product test results using three different methodologies", Journal of
Marketing Research, Novembre 1964, p 49-52
6J.C. PENNY, I.M. HUNT, W.A. TWYMAN, "Product testing methodology in relation to marketing problems -
A review", Journal of the Market Research Society, vol. 14 n° 1, pp. 115-137, 1972
7R. SEATON, "Why ratings are better than comparisons", Journal of Advertising Research, Volume 14. Number
1. 1974, p.45-48
8R. SEATON, "Why ratings are better than comparisons", Journal of Advertising Research, Volume 14. Number
1. 1974, p.45-48
9R. SEATON, "Why ratings are better than comparisons", Journal of Advertising Research, Volume 14. Number
1. 1974, p.45-48
10R. SEATON, "Why ratings are better than comparisons", Journal of Advertising Research, Volume 14.
Number 1. 1974, p.45-48
11affirmé par 5 experts sur 12
12affirmé par 6 experts sur 12
13G. BROWN, T. COPELAND, M. MILLWARD, "Monadic testing of new products - an old problem and some
partial solution", Journal of the Market Research Society, Volume 15. Number 2. 1973, p 112-131
14G. BROWN, T. COPELAND, M. MILLWARD, "Monadic testing of new products - an old problem and some
partial solution", Journal of the Market Research Society, Volume 15. Number 2. 1973, p 112-131
15G. BROWN, T. COPELAND, M. MILLWARD, "Monadic testing of new products - an old problem and some
partial solution", Journal of the Market Research Society, Volume 15. Number 2. 1973, p 112-131
8
1.3. Recommandations

Une grande précaution doit être requise dans le plan d'échantillonnage des tests

monadiques, de sorte que les groupes appariés soient contrôlés statistiquement.

R. BENGSTON et H. BRENNER16 estiment que, si une étude "repère" était conduite

au préalable, le test monadique offrirait alors une voie utile pour évaluer des nouveaux

produits dans la même catégorie.

En testant monadiquement un certain nombre de produits dans le temps, il est

possible d'établir des normes ou moyennes servant ensuite de base de comparaison pour

de nouveaux produits. Cependant, ceci peut générer une procédure relativement longue,

puisque les normes établies pour une classe de produit ne peuvent pas être appliquées à

une autre et que l'évolution technologique des produits peut poser un problème de

comparaison des scores obtenus.

G. BROWN, T. COPELAND et M. MILLWARD17 soulignent que le test monadique

est souvent nécessaire dans les situations où il n'y a pas de concurrents évidents. De même,

dans le cas de produits innovants, où aucun repère ou contrôle sur le produit n'est possible,

il n'y a pas d'autre recours que le test monadique.

Le test monadique est également recommandé quand il y a des différences facilement

discernables entre les produits, et particulièrement des différences visuelles, qui pourraient

être amplifiées bien au-delà de leur importance commerciale dans un test de comparaison par

paire.

Il permet enfin de mesurer avec efficacité l'incidence des interventions sur les

composantes du produit ou du marketing (substitution de produit, repositionnement, ...)

16Op. cit.
17G. BROWN, T. COPELAND, M. MILLWARD, 1973, op. cit.
9
La méthode présente des qualités remarquables lorsqu'il s'agit d'introduire des variables

dont l'interprétation aboutira à une prise de décision marketing (lancement de nouveau

produit ...)

2. Variantes du test monadique

2.1. Test proto-monadique ou semi-monadique

2.1.1. Définition

C'est une technique qui comporte une phase monadique suivie d'une phase comparative.

Concrètement, le répondant teste dans un premier temps le produit A et l'évalue, puis, dans un

second temps, il teste les produits A et B simultanément et les compare.

Cette technique, évoquée spontanément par un unique interviewé, n'est que très

rarement utilisée.

2.1.2. Avantages et inconvénients

Cette technique bénéficie des avantages du test monadique que nous avons évoqués ci-

avant et des intérêts et limites des tests comparatifs directs développés dans la section

suivante (3.). Cette façon de procéder est relativement longue et onéreuse.

2.2. Test monadique double

2.2.1. Définition

Chaque individu teste deux fois le même produit sans savoir qu'il est identique. On

recueille une appréciation hédonique après l'essai du premier produit et après l'essai du

second produit.

Comme le proto-monadique, cette technique, citée par un seul interviewé (le même que

celui qui a parlé du proto-monadique), est assez rarement utilisée.

10
2.2.2. Objectifs

Cette technique de test permet de mesurer une éventuelle évolution de comportement

de la part du répondant. Dans le cas d'un test de produits alimentaires, on cherche à mesurer

le rassasiement, la satiété, l'effet d'aliesthésie18, l'appétence.

L'évolution de la perception des caractéristiques hédoniques (visuel, odeur, goût) du

produit est mesurée.

2.2.3. Cas pratiques

Un des interlocuteurs interviewés nous indique que cette technique est particulièrement

adaptée pour le test des boissons. Elle permet de voir à quel rythme le répondant boit, s'il a

envie de se resservir et dans quel délai.

Il est intéressant de souligner que les techniques proto-monadiques et monadiques

doubles sont très mal connues des interviewés. Dix experts sur douze ne les citent pas

spontanément et, lorsque nous leur proposons de définir ces deux techniques (après les leur

avoir suggérées), ils sont très embarassés. Un des dix spécialistes propose des définitions

correctes mais les confond.

3. Test comparatif, test par paire ou duo-test. Caractéristiques générales

3.1. Définition

Contrairement à la technique monadique où le consommateur évalue un seul produit en

même temps, avec les tests comparatifs chaque sujet évalue plusieurs produits19.

18cité par un des spécialistes études interviewés. Concept le plus souvent associé aux boissons. Evoque l'envie
de renouveler la dégustation en réduisant l'intervalle de temps entre chaque consommation.
19N.R. DRAPER, W.G. HUNTER, D.E. TIERNEY, "Analysing paired comparison tests", Journal of Marketing

11
Il existe deux types de tests comparatifs :

- le comparatif instantané ou direct ou simultané où l'évaluation est donnée en une seule

fois pour tous les produits,

- le test comparatif décalé ou monadique séquentiel ou test échelonné où l'évaluation est

donnée au cours du temps après avoir expérimenté tous les produits. La comparaison peut

également avoir lieu en plusieurs phases successives telle la technique du "Round Robin"

éprouvée dans le sport. On crée un affrontement entre le produit à évaluer et une multitude

d'autres, en faisant tourner les produits référents.

Quelle que soit la procédure comparative choisie, l'objectif est :

- soit de demander explicitement l'ordre des préférences20,

- soit d'évaluer implicitement la préférence ou l'intention d'achat.

Remarquons que cette situation de test est artificielle, puisqu'il est rare qu'un

consommateur, dans sa vie quotidienne, mette en compétition deux produits. Cela a des

conséquences sur la sensibilité du test, et sur le type de réponse que l'on peut obtenir.

3.2. Avantages et inconvénients de la procédure comparative

AVANTAGES INCONVENIENTS
DES TESTS COMPARATIFS / CARACTERES GENERAUX

Research, pp. 477-480, novembre 1969


20P. BALLOFFET, "La comparaison par paire et le classement simple : évaluation comparée de la fidélité de
deux méthodes permettant au consommateur d'exprimer ses préférences de manière globale sur un ensemble de
produits", Actes du Congrès A.F.M., Reims, 1995
12
- comparaison systématique de tous les - incite à marquer une différence même
aspects des produits testés2122 lorsqu'il n'y en a pas
- les résultats ne sont pas affectés par des - les produits comparés ne sont pas
variations d'échantillons23 forcément les "meilleurs" du marché, la
- assez peu coûteux et relativement court valeur du jugement est donc relative
(on teste deux produits avec un seul - risque d'effet d'ordre (annulé si on utilise
échantillon) 24 la technique du Round Robin)
- la comparaison incite à aller loin dans la
critique25
- permet d'introduire tous les produits
présents sur le marché i.e. on est proche
de la situation réelle26
- donne des pistes pour l'amélioration du /
des produits testés27

Tab.2 : Intérêts et limites des tests comparatifs

La liste des inconvénients fait apparaître que la procédure comparative peut véhiculer

des risques d'interprétation par rapport aux notions de "différence", d'effet de "majorité" et

d'effet "d'ordre". Quelques explications sont ici nécessaires.

3.2.1. Tests comparatifs et différence

Selon J. C. PENNY, I. M. HUNT, W. A. TWYMAN28, dans un test comparatif, les

interviewés croient qu'il y a forcément une différence entre les produits, et peuvent essayer de

manière artificielle d'en trouver une pour être coopératif avec l'enquêteur. Six interlocuteurs

sur douze confirment cette crainte.

21P. BALLOFFET, 1995, op. cit.


22R. R. BATSELL, Y. WIND, "Product testing : current methods and needed developments", Journal of the
Market Research Society, Volume 22 Number 2. 1981, p 115-137
23P. BALLOFFET, 1995, op. cit.
24T. HALLER, "Let's not bury paired comparisons", Journal of Advertising Research, Volume 6. Number 3.
1966, p 29-30
25T. HALLER, "Let's not bury paired comparisons", Journal of Advertising Research, Volume 6. Number 3.
1966, p 29-30
26T. HALLER, "Let's not bury paired comparisons", Journal of Advertising Research, Volume 6. Number 3.
1966, p 29-30
27T. HALLER, "Let's not bury paired comparisons", Journal of Advertising Research, Volume 6. Number 3.
1966, p 29-30
28J.C. PENNY, I.M. HUNT, W.A. TWYMAN, 1972, op. cit.

13
Il est donc nécessaire de rendre très explicite et plausible le fait qu'il existe la

possibilité de répondre "aucune différence"29.

On peut critiquer l'utilisation des tests comparatifs (particulièrement par paire), car si

un produit est évalué "bon produit" contre un produit moins bon, il n'est pas évident qu'il

réussira sur le marché, face à beaucoup d'autres produits très bons.

On doit tenir compte d'un excès de contraste possible, lié à la mise en concurrence des

deux produits. On devra toujours considérer qu'il ne s'agit pas là d'une mesure dans

l'absolu30.

3.2.2. Tests comparatifs et erreur de majorité

Ces risques sont associés à la notion "d'erreur de majorité" ("majority fallacy")

développée par R.L. DAY et A.A. KUEHN31 .

"L'erreur de majorité" consiste à supposer que tout produit doit être acceptable

par une majorité de consommateurs pour réussir. Or, tout dépend du nombre de

concurrents du marché et de la taille des segments non exploités. Ainsi, même si la majorité

des consommateurs préfère les gateaux à concentration moyenne en chocolat, il serait sans

doute judicieux pour une entreprise de satisfaire les consommateurs qui préférent un gâteau

plus léger en chocolat, ou un autre segment qui préfére une concentration beaucoup plus

forte, plutôt que de se partager un marché certes important mais très concurrentiel.

Malheureusement, les tests de produits traditionnels fournissent peu d'éclairage sur

l'existence de tels sous-marchés. Cependant, cette limite ne signifie pas que les tests

29H.S. ODESKY, "Handling the neutral vote in paired comparison product testing", Journal of Marketing
Research, mai 1967 et I. ROSS, "Handling the neutral vote in product testing", Journal of Marketing Research,
pp. 221-222, mai 1969
30G.P. HYETT, J.R. MC KENZIE, "Discrimination tests an repeated paired comparisons tests", Journal of the
Market Research Society, vol. 18, n° 1, pp. 24-31, 1976 et C. GREENHALGH, "Discrimination tests and
repeated paired comparison tests", Journal of the Market Research Society, vol. 18, n° 4, pp. 214-215, 1976
31 A.A. KUEHN, R.L. DAY, "Strategy of product quality", Harward Business Review, vol. 40, nov.-déc. 1962,
pp.100-110.
14
comparatifs sont sans valeur. Elle suggère plutôt le besoin d'une méthode plus rigoureuse

pour organiser les tests de produits et pour interpréter leurs résultats.

3.2.3. Tests comparatifs et effet d'ordre

Si l'on utilise un test comparatif, l'ordre de la présentation des stimuli affecte-t-il

les résultats ?

Alors que l'ensemble des spécialistes études interviewés soulignent la présence d'un

effet d'ordre, les données basées sur les tests comparatifs menés par R.L. DAY32 en 1969, et

impliquant 1433 consommateurs se sont montrées insensibles à cet effet.

Comme d'autres études avaient cependant été biaisées par l'effet d'ordre, il mena une

expérience où 85 sujets donnaient leurs préférences lorsque deux produits identiques en tout

point étaient présentés.

Quand les produits étaient différents, il n'y avait pas d'effet d'ordre. Mais quand ils

étaient identiques, les résultats favorisaient le produit présenté en premier.

En 1985, la marque de thé TETLEY testa sur un échantillon de 200 individus

consommateurs de thé, selon la technique comparative, deux formes de sachets contenant les

mêmes qualités et quantités de thé.

Les scores étaient presque les mêmes ; ceci amenait à penser que l'ordre d'essai

avait un effet particulièrement fort parce que le sachet de thé carré ne semblait plus

tout à fait le même après une première expérience de sachet rond.

Selon R.L. DAY33, lorsque les produits comparés sont très différents, les effets d'ordre

sont moins fréquents, et le produit préféré dans le test est celui qui l'est réellement. Quand

deux produits sont très similaires, voire identiques, les facteurs externes comme l'ordre

32R.L. DAY, "Position bias in paired product tests", Journal of Marketing Research, Volume 6., Number 1.
1969, p 98-100
33Ibid.

15
de présentation peuvent affecter le résultat de manière significative. Cette opinion est

partagée par F. DORION, P.D.G. de la société DIMENSIONS. Il a constaté que l'effet d'ordre

était particulièrement préoccupant lors de tests de produits alimentaires et affirme que :

"si les produits sont similaires, c'est toujours le produit présenté en premier qui est

préféré. Si c'est le deuxième produit qui emporte l'adhésion, cela signifie qu'il est très

supérieur à celui présenté en premier".

Cette affirmation peut être résumée dans les tableaux qui suivent :

Produits proches
Présenté en premier Produit A Produit B
Produit A A>B
Produit B B>A

Produits différents
Présenté en premier A>B B>A
Produit A A >> B B>A
Produit B A>B B >> A

J.C. PENNY, I.M. HUNT et W.A. TWYMAN34 ont cherché la présence des effets

d'ordre dans 463 tests comparatifs concernant trois catégories de produits : des produits

ménagers, des produits alimentaires et des cosmétiques.

Dans les produits ménagers, les effets d'ordre favorisent le produit présenté en premier

dans 83 tests, aucun produit dans 68 tests et le produit présenté en second dans 39 tests.

Dans les produits alimentaires, les nombres étaient respectivement 60, 72 et 115. En ce

qui concerne les cosmétiques, les nombres étaient 2, 13 et 11.

Ces résultats montrent d'abord qu'il existe deux sortes d'effet d'ordre : soit en

faveur du produit présenté en premier, soit en faveur du produit présenté en second. De

plus, il semble différent selon les catégories de produits. En résumé, il n'existe pas de

règle concernant l'effet d'ordre ; il semble que toutes les situations puissent être

rencontrées.

16
D. BERDY35 suggère que, quand des tests comparatifs de goût sont utilisés, le

répondant devrait avoir l'autorisation de choisir le produit qu'il désire essayer en premier, et

qu'il teste répétitivement chaque produit jusqu'à ce que des préférences globales soient

établies. Là seulement, on devrait interroger le répondant sur la préférence ou les

caractéristiques du produit. Ces propositions semblent pertinentes puisqu'elles ont mis en

évidence une diminution des biais dans les tests de goût de deux recettes de gâteau.

Une chose semble sûre : il faut être vigilant vis-à-vis des effets d'ordre dans les tests

comparatifs, parce qu'ils réduisent la sensibilité et le degré de signification des résultats.

Cependant, il reste encore des recherches à mener pour mieux comprendre et réduire

ces effets d'ordre.

3.3. Recommandations

Perception de la différence, effet de majorité et effet d’ordre nécessitent, nous l’avons

vu, une grande vigilance. Un quatrième biais a été mis en évidence par un des experts

rencontré : pour que les résultats de tests comparatifs de produits alimentaires soient fiables,

il est indispensable que les produits testés aient le même degré de fraîcheur. Ainsi , il

affirme : "C'est assez difficile de tester contre un concurrent à cause de l'âge des produits :

on peut difficilement prendre notre produit sorti d’usine et demander à notre gros concurrent

de nous donner des produits sortis d’usine. la solution est d’acheter le produit concurrent en

magasin et de faire vieillir notre produit pendant un certain temps."

Les méthodes comparatives peuvent être choisies chaque fois qu'il est nécessaire :

34.J.C. PENNY, I.M. HUNT, W.A. TWYMAN, 1972, op. cit.


35D. BERDY, "Order effects in taste test", Journal of the Market Research Society, vol. 11. n° 4. 1969, p 361-
371
17
- de mettre en évidence les éléments qui fondent la ressemblance ou la différence entre les

produits,

- de mettre en évidence le degré d'importance de ces éléments,

- de mesurer les interactions entre les variables produits,

- de déterminer, dans le cas d'une substitution de produit, si la nouvelle proposition est une

amélioration ou non de la formule actuelle.

R. BATSELL et Y. WIND36 plébicitent le test comparatif pour deux raisons

essentielles :

- la tendance à la publicité comparative relevée plus particulièrement aux Etats-Unis mais

quasi inexistante en Europe. Si cette tendance continue et si les consommateurs sont tentés

par le modèle de comportement montré dans la publicité, de plus en plus de choix de produits

pourront tendre vers les différences de plus en plus fines dans les caractéristiques produits.

On devrait alors favoriser l'utilisation des tests comparatifs.

- la réalité du marché semble plutôt tournée vers l'approche comparative. Le marché

oblige à faire des choix entre différents produits alternatifs, et une procédure de test réaliste

nécessite aussi un choix entre différents produits alternatifs.

Nous l'avons vu, de part la situation artificielle créée, la méthode comparative est peu

apte à offrir les moyens d'une prise de décision : il ne s'agit pas d'une procédure de test

permettant de décider du lancement de tel ou tel produit.

4. Variantes des tests comparatifs

Les tests comparatifs sont constitués de deux variantes.

36R. R. BATSELL, Y. WIND, "Product testing : current methods and needed developments", Journal of the
18
Soulignons la disparité des termes et des techniques qui nuisent à la transparence des

procédures mais qui désignent en fait deux types de tests : le comparatif instantané et le

comparatif décalé.

4.1. Comparatif instantané ou direct ou simultané

4.1.1. Définition

Le sujet évalue deux produits ou plus en une seule fois.

Les interviewés interrogés sont tous très défavorables à cette technique car ils

s'accordent pour dire qu'elle "ne reconstitue en rien les conditions réelles de consommation."

Market Research Society, Volume 22 Number 2. 1981, p 115-137


19
AVANTAGES INCONVENIENTS
SPECIFIQUES AU COMPARATIF INSTANTANE, SIMULTANE
OU DIRECT
- empêche la reconnaissance et la - extrême sensibilité qui met parfois en
valorisation du produit habituel évidence des différences pas
commercialement significatives car trop
ténues ou sans importance pour la
catégorie de produit étudiée

Tab.3 : Intérêts et limites des tests comparatifs instantanés

4.1.2. Recommandations pour l'utilisation du comparatif

instantané

R. BENGSTON et H. BRENNER37 estiment que l'utilisation la plus appropriée du

comparatif instantané réside certainement dans le test d'éléments comme la différence de

saveur entre des produits alimentaires.

Pourtant on peut se demander si la prolongation dans le temps de certaines réactions

sensorielles (le goût, l'odorat, ...) ne risque pas de modifier l'appréciation de l'interviewé lors

du test du second produit.

R. BENGSTON et H. BRENNER38 estiment que l'utilisation du comparatif instantané

diminuera au fur et à mesure que des méthodes plus élaborées seront utilisées.

4.2. Comparatif décalé ou différé ou monadique séquentiel ou test

échelonné

4.2.1. Définition

Ce test est en quelque sorte un compromis entre le comparatif instantané et le

monadique.

37 R. BENGSTON, H. BRENNER, 1964, op. cit.


38R. BENGSTON, H. BRENNER, 1964, op. cit.
20
Il vise à éliminer le côté artificiel du comparatif instantané en faisant essayer les

produits à des moments différents.

Test du produit A ----> réponse au questionnaire

Test du produit B ----> réponse à un second questionnaire strictement

identique au premier

AVANTAGES INCONVENIENTS
SPECIFIQUES AU COMPARATIF DECALE, MONADIQUE
SEQUENTIEL OU TEST ECHELONNE
- phase monadique alliée à phase - effet d'ordre : le produit testé en premier
comparative, test proche de la vie réelle39 devient le standard ? Ce biais peut être
- adapté pour mesurer l'acceptabilité d'un partiellement nivelé en faisant tester en
nouveau produit quand un "vieux" premier chaque produit par la moitié des
standard est disponible40 répondants
- peu onéreux car utilisation du même
échantillon41
- sécurisant pour le Marketing42

Tab.4 : Intérêts et limites des tests comparatifs décalés

4.2.2. Recommandations d'utilisation du comparatif décalé

Afin de multiplier les précautions, il est conseillé de disposer d'un échantillon

suffisant pour que l'essai du premier produit, comparable à une phase monadique, soit

analysé séparément. Ainsi, on a deux sous-groupes qui évaluent les produits en comparatif

décalé, et grâce à la rotation (pour atténuer les effets d'ordre), on dispose d'une évaluation

monadique de chaque produit.

Dans les techniques monadiques simples et séquentielles, les interviewés sont

interrogés après l'essai de chacun des produits. Par mesure de précautions, le premier produit

est d'abord donné au répondant et c'est seulement après quelques jours d'essai et après qu'il ait

39R. R. BATSELL, Y. WIND, 1981,op. cit.


40R. BENGSTON, H. BRENNER, 1964, op. cit.
41 affirmé par tous les experts
42 affirmé par 9 experts sur 12

21
répondu au questionnaire, que le deuxième produit à tester lui est remis. Il n'y a donc pas

possibilité de tester deux produits en même temps. Cette contrainte semble judicieuse dans

le cas des produits cosmétiques puisqu'il est difficile de tester deux crèmes spécifiques en

même temps. Certains produits cosmétiques sont cependant très bien adaptés à cette

technique. En effet, les produits solaires par exemple doivent être utilisés quasi-

simultanément pour comparer leurs qualités essentielles (capacité de protection, parfum,

texture,...). On demande à l'interviewé de comparer explicitement les deux produits l'un

par rapport à l'autre.

Il est difficile de mettre à jour les réelles motivations du choix quasi-exclusif de telle ou

telle technique de test. Les entretiens menés tant dans la société DIMENSIONS avec les

chargés d'études qu'auprès des experts études rencontrés révèlent l'absence d'une réelle

stratégie dans le choix des techniques.

En effet, la technique de test choisie dépend plus des points de vue des responsables

marketing en place que d'une analyse des caractéristiques du produit à tester et des objectifs

auxquels il est nécessaire de répondre.

Cependant, si les responsables marketing imposent le plus souvent la technique qui leur

semble la meilleure, les chargés d'études peuvent guider le choix en tenant compte des

contraintes méthodologiques imposées par le produit.

5. Test triangulaire. Caractéristiques générales

5.1. Définition

22
Il consiste à tester trois produits dont deux sont identiques. Le consommateur a alors

pour tâche d'identifier le produit différent. Les trois produits sont présentés dans les six

configurations suivantes : AAB, ABA, BAA, BBA, BAB, ABB.

Seul un des spécialistes études cite spontanément cette technique de test. Mais pour lui,

cette technique est :

" ...inadaptée aux tests de produits. Elle s'apparente aux tests sensoriels et sert à voir si

une légère différence opérée sur un produit est perceptible. Elle est utilisée en particulier

quand on doit répondre à un objectif de reduction des coûts. Pour moi, c'est un test d'experts,

les consommateurs ne sont pas capables de juger pertinemment plus de deux produits."

Les responsables interrogés sont capables de donner une définition approximative mais

disent ne pas utiliser cette technique.

5.2. Objectifs

Cette technique n'a pas le même objectif que les techniques précédemment citées,

puisqu'elle ne sert pas directement à évaluer les qualités d'un produit mais à :

- évaluer la perception par les consommateurs de la différence entre deux produits,

- vérifier la non ressemblance entre deux variantes d'un produit en développement,

- ajuster ou modifier les formules des produits,

- vérifier que deux productions ne sont pas perçues comme différentes (par exemple un

même produit fabriqué dans deux usines)

Un des responsables études interviewés affirme le test triangulaire a un "pouvoir

descriptif faible" : seul le meilleur goût pour une boisson par exemple vient justifier les

intentions d'achat supérieures. Le test triangulaire est, par conséquent, presque toujours

suivi d'un test comparatif pour évaluer les qualités des deux produits révélés différents.

5.3. Constats pratiques

23
Nous évoquons cette technique car elle est très régulièrement utilisée dans les tests de

produits alimentaires mais il semble que sa place au sein des procédures de tests de produits

soit controversée. En effet, certains responsables des études interrogés estiment que cette

technique est une technique de tests de produits au même titre que les techniques monadique

ou comparative. D'autres excluent cette technique de la famille des tests de produits. Ces

derniers estiment que seuls des experts sont capables de tester plus de deux produits à la fois

et de percevoir les différences et les similitudes existant entre les produits. Selon ces

interlocuteurs (issus de trois entreprises du secteur de l'hygiène-beauté), le test triangulaire

appartient à la famille des tests sensoriels. Il est vrai qu'il paraît plus délicat, pour un

consommateur lambda, de tester trois produits cosmétiques et d'en souligner les éventuelles

différences que de faire de même pour des produits alimentaires, plus aisés à comparer

simultanément. Cela explique sans doute le relatif enthousiasme manifesté par les

responsables des études des grands groupes alimentaires et l'aversion exprimée par ceux de

l'hygiène-beauté. Quoiqu'il en soit, R.L. DAY43, puis R.L. DAY et A.A. KUEHN44 ont

montré que la capacité du consommateur à discriminer et à préférer est toute limitée, quelle

que soit la catégorie de produits. Le plus souvent, le répondant décèle une différence en

fonction de l'effet d'ordre ou détermine son produit préféré au hasard45. Ces réflexions nous

incitent donc à faire participer des experts dès qu'on est confronté à un choix entre plus de

deux produits, et à bannir les tests triangulaires de la famille des tests de produits.

6. Variantes du test triangulaire : test mono-triangulaire ou duo-trio

6.1. Définition

43R.L.DAY, 1969, op. cit.


44A.A. KUEHN, L.R. DAY, 1962, op. cit.
45D.G. MORRISON, "Triangle taste tests : are the subjects who respond correctly lucky or good ?", Journal of

24
Il consiste à tester trois produits dont deux sont identiques. Le premier produit est

testé en référence (produit témoin), les deux autres sont présentés ensuite au consommateur

qui a alors pour tâche d'identifier le produit identique à celui testé en référence.

Seul un interviewé (le même que celui qui a cité spontanément la technique

triangulaire) évoque cette procédure de test en admettant toutefois qu'elle est très rarement

utilisée. Comme le test triangulaire classique, cette technique est inadaptée à l'évaluation par

les consommateurs car elle implique un trop grand nombre de produits.

6.2. Objectifs

Ce sont les mêmes que dans le test triangulaire classique.

6.3. Constats pratiques

Cette méthode est exploitée par deux interviewés seulement. Les autres ne la

connaissent pas ou refuse de l'employer. Selon ses utilisateurs, elle permet une bonne

description des produits testés, meilleure que dans le test triangulaire classique car le

répondant essaie les trois produits en deux temps bien distincts (le premier produit est évalué

seul et les deux autres ensemble). Par contre, comme pour le test triangulaire, ses détracteurs

lui reprochent le nombre trop important de produits à tester quasi simultanément. Selon eux,

on cherche à transformer les interviewés en experts et les résultats obtenus se révèlent

finalement peu cohérents. De plus, si l'un des trois produits est le produit habituel du

consommateur, cette méthode semble forcer la reconnaissance de son propre produit et le

valoriser excessivement.

7. Choix entre les principales techniques de tests et préconisations d’action

Marketing, n°45, 1981/3


25
7.1. Remarques générales

Les désaccords sur le choix de l’une ou l’autre technique proviennent essentiellement

de deux sources :

- les différences au niveau des objectifs du test (par exemple prise de décision ou

caractérisation du profil d'un produit)46,

- les problèmes de mise en oeuvre du test (contraintes de coûts et de délais)47.

R. BENGSTON et H. BRENNER48 en 1964, puis G. G. TREBBI, Jr et E.J. FLESH49

en 1983, ont comparé les résultats obtenus par les techniques monadique, comparative et

comparative décalée. Les résultats obtenus par ces techniques sont sans conteste

différents.

Cette constatation devrait mettre en garde le chargé d'études qui mène souvent un test

en n'utilisant qu'une seule méthodologie.

Selon R. BENGSTON et H.BRENNER50, la principale conclusion de cette

expérience est que les chargés d'études se doivent d'utiliser leur bon sens et leur

perception du problème étudié pour sélectionner la technique qui sera utilisée lors du

test produit. Chaque technique a sa place et le choix de celle-ci pour un test doit être fait

avec précaution.

Dans le domaine de l'hygiène-beauté, les tests en comparatif décalé ou monadique

séquentiel sont les plus couramment utilisés, viennent ensuite les tests monadiques puis

46 J.C. PENNY, I.M. HUNT, W.A. TWYMAN, 1972, op. cit.


47 R. SEATON, "Why ratings are better than comparisons", Journal of Advertising Research, vol. 14, n° 1,
pp.45-48, 1974
48 R. BENGSTON, H. BRENNER, 1964, op. cit.
49G. G. TREBBI, Jr and E. J. FLESCH, "Single versus Mutiple concept tests", Journal of Advertising Research,
Vol 23, N° 3, juin/juillet, 1983 p 21-25
50 R. BENGSTON, H. BRENNER, 1964, op. cit.

26
les tests comparatifs instantanés. Les tests triangulaires, rarement cités tant par les

praticiens que dans la littérature et ne s’inscrivant pas dans la même logique que les autres

techniques (évaluation de qualités intrinsèques), ne suscitent pas de recommandations

particulières.

7.2. Préconisations d’action

Voici un tableau récapitulatif des techniques de tests à préférer en fonction des objectifs

que l’on s’assigne.

27
OBJECTIFS TECHNIQUES
Evaluer un produit • Monadique
vraiment nouveau
Identifier le produit • Comparatif décalé ou instantané (2 versions d'un même produit ou
le plus prometteur par rapport au leader du marché), même si les différences sont
exacerbées51
• Monadique (par rapport au produit habituel référent)
Identifier les • Comparatif instantané si pas de risque d'effet de lassitude ou de
différences entre les mélange des sensations (parfum, goût,...)52
produits • Comparatif décalé si risques d'effets de lassitude ou de mélange
des sensations (parfum, goût,...)53
• Monadique si le produit test est comparé (implicitement) au
référent (produit habituel) ou s’il est insensé de tester deux produits
en même temps (la plupart des produits cosmétiques)54
• Triangulaire si les différences sont très légères
Identifier les Comparatif décalé ou instantané avec leader du marché ou produit
améliorations habituel car exacerbe les différences sur chacun des attributs55
nécessaires pour
reformulation
Estimation • Comparatif décalé lorsqu’un vieux « standard » est disponible56
d’acceptabilité • Monadique si on souhaite respecter au mieux les conditions
d’usage57

Tab.5 : Les techniques de tests de produits préconisées en fonction


de l'objectif du test

Conclusion

Nous l'avons constaté au travers des propos recueillis lors des interviews en profondeur

et de l'analyse de la littérature, les techniques de tests de produits sont nombreuses et

correspondent chacune à une terminologie variée. Un des experts interviewés affirme à ce

sujet :

51 G. BROWN, T. COPELAND, M. MILLWARD, 1973, op. cit


52J.C. PENNY, I.M. HUNT, W.A. TWYMAN, 1972, op. cit.
53 J.C. PENNY, I.M. HUNT, W.A. TWYMAN, 1972, op. cit.
54 G. BROWN, T. COPELAND, M. MILLWARD, 1973, op. cit
55 G. BROWN, T. COPELAND, M. MILLWARD, 1973, op. cit
56 R. BENGSTON, H. BRENNER, 1964, op. cit.
57 J.C. PENNY, I.M. HUNT, W.A. TWYMAN, 1972, op. cit.

28
"....ce qui est amusant c’est que certains termes ont un sens différent selon les

responsables études. Lorsque nous sommes en réunion européenne, nous croyons parler de la

même chose et nous réalisons enfin que le sens affecté à telle ou telle technique n'est pas le

même selon les responsables études et les pays d'origine. J'en viens à définir les techniques

dont je parle pour éviter toute ambiguité."

Par ailleurs, même si les spécialistes des tests de produits rencontrés n'ont pu mettre

explicitement en évidence - en raison de l'absence de budget recherche consacré aux études -

des différences de résultats en fonction des procédures de tests adoptées58, ils sont conscients

de cette possibilité.

Afin de sélectionner avec pertinence la technique de test la plus appropriée, nous

suggérons cinq axes de réflexion :

- la capacité de la technique à fournir les informations utiles au diagnostic et à la décision

(cf tab.5),

- l'opportunité de la technique de test pour un type de produit (industriel ou de

consommation courante, alimentaire ou cosmétique, ...) et les caractéristiques de son marché

(enfants59, personnes agées60, territoire étranger61,...)

- le coût de la technique en termes de temps et d'argent62,

- la fiabilité et la validité de la technique d test63,

58 58R. BENGSTON, H. BRENNER, 1964, op. cit, puis G. G. TREBBI, Jr and E. J. FLESCH, 1983, op. cit.
59 Tenir compte de leur capacité à ordonner ou évaluer des produits, tâches typiques des tests de produits.
60 Présentation plus lente des différents stimuli, environnement de test qui réduit les possibilités de distractions,
construction particulière du test, qui tient compte de la plus forte tendance des personnes âgées à choisir les
réponses comme "sans opinion" ou "aucune différence".
61 On peut trouver des différences dans les préférences exprimées pour les produits. Ainsi, le Français réagit
plus favorablement aux desserts que l'Anglais et l'Espagnol donne de meilleures notes aux produits cosmétiques
que le Français.
62 Nos experts affirment que toutes les techniques de tests se situent dans le même ordre de prix. La différence
dépend plus de la taille et des caractérisqtiques de l’échantillon.
63 Les tests de produits étant délicats à mettre en oeuvre et à interpréter, leur fidélité et leur validité sont, à
l’heure actuelle, limitées et paraissent dépendre largement de la compétence des instituts et des services études.
29
- le degré de comparabilité entre les études64.

64 Le degré de comparabilité entre les études est un critère essentiel mais paraît peu utilisé dans la pratique. La
plupart des spécialistes études des entreprises de grande consommation rencontrés insistent sur leur volonté de
pouvoir comparer les performances des produits de même catégorie mais déplorent l'absence de canevas de
questionnaires de tests de produits, de "guide-line" en fonction des catégories de produits ainsi que de base de
données de résultats de tests. Malheureusement, il semble que les tests ne soient pas comparables entre eux et
que l'évaluation des résultats des tests de produits soit fondée sur l'intuition et l'expérience et non sur des
normes d'acceptabilité établies sur les principales interrogations (notes sur les caractéristiques hédoniques,
note globale, degré de préférence, niveau d'intention d'achat).
30
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