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ECOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE DE LYON


Année scolaire 1924 1925 - N 20

CONTRIBUTION A L’ÉTUDE
DE

L'ABLATION DES MAMELLES

ritESESTiÉE

A LA FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE LYON


• et «tou/cjitfè publiquement te Awf7 19?}
POUR OBTENIR LE GRADE DÊ DOCTEUR VETERINAIRE
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Charles DELBÈ
né à REIMS (Marne) le 24 Juin 1887

Imprimerie BOSC Frères & ftlÔU


4>. Quai Gaillelon. 41
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CONTRIBUTION A L'ÉTUDE
DE L'ABLATION DES MAMELLES CHEZ LA VACHE
—T~

ECOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE DE LYON


Année scolaire 1924-1925 - N 20

CONTRIBUTION A L’ÉTUDE
DE

L'ABLATION DES MAMELLES


CHEZ LA VACHE
THÈSE

A LA FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE LYON


et sou tenue publiquement le 2Æ /925
POUR OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR VÉTÉRINAIRE

FJkB

Charles DELBË
né à REIMS (Marne) le 24 Juin 1887

LYON
Imprimerie BOSC Frères & R10U
41, Quai Gaillcion, 41
63-55

ig»5
PERSONNEL ENSEIGNANT DE L ÉCuLE VÉTÉRINAIRE DE LYON

Directeur . . . . M. F.-X. LESIIRE.


Frofestcur honoraire M. Alfred TAI RE, ancien directeur.

PROFESSEURS
Physique et chimie médicale» Pharmacie^ Toxicologie . MM. PORCHER.
Botanique médicale et fourragère, Zoologie médicale, Parasi­
tologie et Maladies parasitaires. , ♦............................... M A HOTEL.
Anatomie descriptive de* animaux domestiques. Tératologie. Mémoire de mon Oncle
Extérieur LESBRE.
Physiologie. Thérapeutique générale. Matière médicale. . JUNG.
Histologie cl Embryologie. Anatomie pathologique. Inspection
des denrées alimentaires cl des établissements classés
soumis au contrôle vétérinaire........................................... HALL.
Pathologie médicale de* Equidés et de» Carnassier*. Clinique.
Sémiologie et Propédcutique. Jurisprudence vétérinaire .
A m a M ÊnE
CADEAC.
Pathologie chirurgicale des Equidés et de* Carnassiers.
Clinique. Anatomie chirurgicale. Médecine opératoire . DOU VILLE
Pathologie bovine, ovine, caprine» porcine et aviaire. Clinique.
Médecine opératoire, Obstétrique ........ CLINY.
Pathologie générale et Microbiologie. Maladie* microbiennes
cl police sanitaire. Clinique................................................. BASSET. A mûN P É R E
Hygiène et Agronomie* Zoolechuîc et Economie rurale. BOUCHER.
Faible témoignage de reconnais
CHEFS DE TRAVAUX
sance et de profonde affection.
MM. PORCHEREL. MM, TAPERNOl X,
AUGER. TAGA.XD.
LOMBARD.

EXAMINATEURS DE LA THÈSE
Président: M. le Dr TIXIER, Professeur de Clinique chirurgicale â la Faculté
de Médecine, Chevalier de la Légion d’honneur.
due-Heur.r : M C. CL'N Y, Professeur à P Ecole Vétérinaire.
M. M. DOUVILLE. Professeur A TEcole Vétérinaire,

La Faculté d e Médecine et l’Ecole Vétérinaire déclarent que If* opinion»


émises L-- dissertations qui leur tout présentées doivent être considérée»
•/>
s
-

cjmme propres à leurs auteurs cl qu'elles n’entend ont leur donner ni approbation
ni improbation.
A Monsieur le Docteur T1X1ER
Professeur de Clinique Chirurgicale
à la Faculté de Médecine de Lyon
Chevalier de la Légion d’honneur

A Monsieur le Professeur I.ESBRE


A mon Beau-Père
Directeur à l’Ecole Vétérinaire
Reconnaissance affectueuse. Correspondant national de /’Académie de Médecine
Officier de la Légion d’honneur

A mon Epouse
A Monsieur le Professeur CLIN Y
Professeur de ixttludogie hou inc

A Monsieur le Processeur DOUVILLE


Professeur de pathologie chirurgicale

Respectueux cl reconnaissants
hommages.
CONTRIBUTION A L ETUDE
DE L’ABLATION DES MAMELLES CHEZ LA VACHE

Introduction

A mes Parents

Le sujet de cette thèse a trait à une opération que


nous avons pratiquée cinquante-deux fois, pendant
nos quatorze ans de clientèle. Nous ne craignons pas
d’être démenti en disant qu’il est bien peu de véterî-
naires qui Faicnt pratiquée aussi couvent est

T
2
A mes Amis
bien décrite dans nos ouvrages classiques et en*
soignée dans nos écoles, mais elle est de celles qui
effrayent par retendue de la plaie qui en résulte et
les risques d*liénmrragie : effroi non justifié pour
qui connaît bien l'anatomie de la région et le manuel
opératoire, ainsi que la puissance de cicatrisation
des animaux de l'espèce hoyine. C'est en raison de
la facilité avec laquelle nous Pavions vu pratiquer
à FEcole, pendant les exercices de médecine opéra­
toire que nous nous enhardîmes à la tenter dans
notre clientèle et nous pouvons dire, sans fausse
modestie, que nous y avons acquis une certaine habi­
lité qui nous u valu plus d’une fois d’être appelé
par des confrères.
— 11 —

Il convient toutefois d'ajouter que le manuel opé­


ratoire classique comporte des difficultés cl des mo­
difications subordonnées au volume des organes à
enlever, à leurs lésions et surtout à leurs adhérences.
Certaines de ces difficultés ne peuvent être prévues ; Anatomie
il faut y parer au fur et à mesure qu’elles se présen­
tent.
Mais que nos confrères se rassurent, avec des con­
naissances anatomiques précises cl du sang-froid, on
en vient à bout. Avant de pénétrer dans le vif de notre sujet, il con­
Aussi, nous manquerions à tous nos devoirs en ne vient de rappeler sommairement l’anatomie de la
profilant pas de l’occasion qui nous est offerte de région.
remercier ici publiquement notre éminent Maître. Les mamelles de la vache sont au nombre de qua­
M. le Professeur I.csbrc, pour renseignement aussi tre, agglomérées dans la région de l’aine en une seule
pratique (pic scientifique qu’il donne a ses élevés, avec masse, que l’on appelle souvent, mais improprement,
lin inlassable dévouement. les mamelles, ou mieux le pis. C’est un pis à quatre
Nos remerciements iront aussi à M. le Professeur quartiers opposes deux à deux latéralement et portant
Cuny, tant pour son enseignement, lorsqu’il était no- chacun une grosse tétine, dite trayon, percée u son
trc chef de travaux» que pour les directives qu’il extrémité d’une unique orifice donnant accès dans un
bien voulu nous donner relativement à ce travail. vaste sinus galaclaphore.
Ils iront enfin à M. Lênel, vétérinaire à Rue, dont Ces quatre quartiers correspondent à autant de
les lumières et la grande expérience nous ont permis mamelles indépendantes, aussi bien celles d’un même
en bien des cas de tenter des interventions que, sans côté que celles opposées d’un coté à l’autre, mais
ses conseils, nous n'aurions pas osées. M. Lénel symbo­ étroitement unies par un tissu conjonctif plus ou
lise à nos veux l'opiniâtreté, l'acharnement à attein­ moins chargé de graisse et recouverte'» ensemble par
dre le but. des fascias élastiques qui les maintiennent contre la
Nous avons toujours trouvé auprès de lui des con­ tunique abdominale, où elles sont en outre fixées par
seils judicieux et réconfortants ; qu’il trouve ici l'ex­ deux ligaments suspenseurs, émanation de cette der­
pression de notre reconnaissance affectueuse. nière.
Il est fréquent de rencontrer en arrière du pis, des
mamelles supplémentaires, le plus souvent rudimen*
laires cl indiquées seulement par de petits trayons,
quelquefois assez développes pour entrer en lactation. 'écartant Finie de l'autre el décrivant des flexuosités

Z
Chez les bonnes laitières, le pis prend des dimen­ plus ou moins accentuées, avant d’atteindre les trous
sions véritablement énormes, en s'étendant du pé­ qui, à l’arrière du sternum, leur livrent passage dans
ri né à l'ombilic et en écartant, pour ainsi dire, les la cavité pectorale où elles se jettent dans les veines
membres postérieurs. II serait sans utilité de parler thoraciques internes.
ici de sa structure intérieure ; par contre, il importe Les dits trous sont communément désignés par les
d’être renseigné exactement sur ses vaisseaux et ses éleveurs sons le nom de portes ou fontaines du lait,
nerfs. car l’observation démontre que leur grandeur, en
Les artères et les nerfs émergent des anneaux ingui­ corrélation avec te calibre des veines qui les traver­
naux inférieurs ; ce sont les artères honteuses exter­ sent. témoigne des qualités laitières de la bctc envi­
nes, enlacées pur des filets sympathiques émanant du sagée. Il est à remarquer que les veines mammaires
ganglion de la petite mésentérique, et les nerfs ingui­ antérieures présentent souvent sur leur trajet une
naux. ou plusieurs branches qui s’en détachent pour les re­
Les veines, à leur sortie de l’enveloppe, se rassem­ joindre un peu plus loin.
blent pour la plupart en une sorte de ceinture qui Le système ganglionnaire est représenté par deux

oZ -
circonscrit la face supérieure de la mamelle ; cein­ gros ganglions lymphatiques réniformes appliq
ture qui a pour voie de décharge : sur la face postérieure du pis, sous la peau du périnée,
1“ Deux veines périnéales ou mammaires posté­ de part el d'autre de la ligne médiane; ce sont les
rieures, s’élevant vers l’arcade ischiale, 1res rappro­ ganglions rctromammaircs équivalents des ganglions
chées l’une de l’autre, en décrivant des flexuosités et inguinaux du mâle. 11 n’est pas rare qu’ils soient sur­
eu se lançant plusieurs anastomoses ; souvent, en montes de deux autres ganglions plus petits.
outre, une ou lieux petites branches les mettent en En résumé, pour libérer la mamelle de ses attaches
communication avec la saphène interne. vasculaires, il faut sectionner après ligature :
2° Deux veines honteuses externes ou mammaires tr Les veines antérieures et postérieures qui s’en
inguinales, satellites des artères de même nom en échappent pérîphériquemenL
avant desquelles clics se trouvent placées. 2* Les deux pellicules artério-veineux qui y plon­
3° Enfin, deux veines sous-cutanées abdominales ou gent par lu base» après leur sortie des anneaux ingui­
mammaires antérieures les plus volumineuses, se dé­ naux inférieurs.
tachant de la partie anterieure de la ceinture vei­
neuse du pis, rampant sur la tunique abdominale en
■■ta

— 15 _

Indications

La médecine vétérinaire étant avant tout une mé­


decine utilitaire, nous devons, dans 110s interventions,
rechercher sinon la guérison rapide des sujets, tout
au moins une utilisation avantageuse pour leur pro­
priétaire.
S’il est vrai que tout organe qui ne fonctionne pas
s’atrophie, il est vrai également, chirurgicalement
parlant, que tout organe atteint d’une atFectioii incu­
rable, doit être supprimé, une mamelle malade, im­
productive, n’a plus sa raison d’être. C’est ce qui
faisait dire à Peuch, en 1883 : L induration de la

*
mamelle est liai d’autant plus fâcheux que

»■
Ui
tout moyen de traitement reste sans efficacité ; aussi,
quand on ne peut l’éviter, Je seul parti à prendre est-
il d’utiliser l’animal pour la boucherie, n
Ceci est rai, lorsque l’induration ne prend pas un

---
caractère hypertrophique et ne constitue pas une

I
gène mécanique pour le sujet ; mais, parfois, ce pro­ Nous avons eu une fois l’occasion de nous trouver
cessus est tel que Tétai general du patient en souffre; en présence de gangrené diffuse, nous avons utilisé
dans ces conditions, le seul moyen de porter un les procédés classiques, les injections intramammai-

=-
remède aux souffrances de Tanima) et de le rendr rcs d’eau oxygénée, les injections intraveineuses

n
utilisable pour une autre destination que sa première, collargol, Tampu talion des trayons, nous nous dis­
est de pratiquer l'ablation de la mamelle, ainsi que posions à essayer la dernière ressource quand on vint
nous le pouvons par la relation suivante : nous apprendre que l'animal avait succombé.
Dans les deux antres cas où nous avons etc amené
OBSERVATION I à constater la mammite gangréneuse, nous fûmes ap­
pelé trop tard. L'étal général des sujets ne nous per­
Nous sommes appelés par un confrère voisin pour
mettait pas d’intervenir d’une façon heureuse, les
examiner a D„. vache danmndc atteinte de mam- deux sujets mouraient, en effet, Tun huit heures, l’au­
mite indurée. La vache, âgée de six ans, porte une nia-
nielle énorme, dure, ne présentant plus de phénomènes tre douze après notre passage.
inflammatoires. Klîc est amaigrie considérablement mal­ Nous conserverons néanmoins la conviction que»
gré un régime de suralimentation, Le poids de l’organe contrairement à ce qui a etc dit plus haut, l’ablation
est tel qu’elle se déplace difficilement. Le propriétaire
de la mamelle au lieu d’être de la dernière ressource
nous demande les causes de Ta maigri ssement de son
sujet et après examen attentif, nous acquérons la cer­ devrait être l’intervention de choix et que, pratiquée
titude que seul le poids de la mamelle est la cause dépri­ dès le diagnostic posé, dès que l’on voit le trayon froid,
mante. quelques taches rouges violacées sur la mamelle, l’opé­
D’accord avec notre confrère, nous décidons l'ablation ration serait couronnée- de succès.
du pis, nous enlevons un organe pesant quarante-trois
kilos, ne présentant nulle part dans le parenchyme in­
duré de traces d’abcès récents ou anciens. L'animal qui 3° L’ablation de la mamelle est la seule indication
diminuait de valeur de jour en jour depuis près de qua­
économique lors de mammites consécutives à l’infec­
tre mois, est mis à l'engraissement et est vendu pour la
boucherie moins de trois mois après l'intervention. tion aphteuse. Dans ces cas. en effet, la suppuration
s’établit très vite et on peut dire que quoiqu’on puisse
faire les sujets ne tardent pas à perdre toute valeur.
2 Les classiques nous indiquent encore comme der­ Nous avons eu, au cours des épidémies de fièvre
nière ressource Tablai ion de la mamelle lors garv
F

aphteuse de 1912, 1920 el 1923, de nombreux cas de


-

grène diffuse de Torgunc. mammites parenchymateuses avec foyers multiples


(le suppuration ; dans ces cas particuliers, comme les Quinze jours après l’opération on voyait l'étal général
foyers purtilcnls sont dissémines dans toute retendue du sujet s’améliorer de jour cil jour cl il engraissa en
des mamelles, qu’ils sont bien cloisonnes, sépares net­ trois mois.
tement les uns des autres, qu’ils sont généralement
profonds, qu’aucune indication externe ou interne ne Au cours de nos nombreuses interventions, nous
donne de résultat, que révolution successive de ces avons remarqué qu'il y a bénéfice à intervenir rapide­
foyers purulents déprime le sujet et l'amaigrit rapi­ ment. D'abord les tissus n'ont pas le temps de s’orga­
dement, nous estimons que l'ablation est le traite­ niser, la technique opératoire en est d’autant simpli­
ment de choix.
fiée; en outre, les complications les plus fréquentes et
en même temps les plus redoutables, sont les suppura-
En effet, sur cinquante-deux opérations, quarante-
lions profondes.
cinq ont été motivées par la niammite aphteuse.
Trasbot nous signa meme des complications de
nécrose de la (unique abdominale cl nous avons eu la
OBSERVATION II confirmation du fait, ainsi qu’en témoigne l’observa­
tion suivante.
La première vache qu'il nous fut donne d’opérer était
une vache normande que nous traitions depuis presque OBSERVATION Ht
six mois, pour une niammite aphteuse. Ayant épuisé la
gamine des procédés classiques (pommades à l'onguent Nous sommes appelés à B... pour examiner une vache
populeum saturne, mercurielle double, a l’onguent popu- normande de cinq ans. livrée à son propriétaire comme
leu ni additionné de biiodure de mercure, ponction des • herbagère • destinée à l’engraissement, atteinte de
abcès au fur et a mesure de leur formation). Malgré niammite suppuréc d’origine aphteuse, les traitements
tous ces traitements, la vache présentait un état sque­ locaux semblent avoir amélioré l’étal des mamelles,
lettique qui la mettait au rang d'animal d’équarrissage. néanmoins le sujet maigrit. Nous diagnostiquons : abcès
Le propriétaire nous l'abandonne. Malgré le mauvais profonds de la mamelle et décidons l’ablation. Nous
étal du sujet, accompagné de M. Lénel de Rue, nous ten­ trouvons, lors du décollement de l'organe, une adhérence
tons l’ablation des mamelles. Après bien des difficultés intime entre la tunique abdominale et le quartier anté­
de technique, eu égard à la vascularisation des tissus rieur gauche, en essayant d’énuclécr l’ahcès. en pé-
néoformés, aux adhérences intimes entre la peau et le scncc duquel nous nous trouvions il se rupture sponta­
tissu glandulaire au niveau des abcès ponctionnés ou nément. Après nettoyage et détersion, nous nous aper­
ouverts spontanément, nous extirpons une mamelle de cevons que la partie supérieure de l’abcès de la taille
35 kilos présentant à son intérieur des foyers multiples d’un œuf de poule était formé aux dépens de la tunique
de suppuration à tous les stades de leur évolution. abdominale très amincie à ce niveau. Il est certain qu'une
— 21 —
- M -

L'appétit du sujet est conservé; néanmoins, son état


temporisation de quelques jours eût suffit pour déter­ général devient de plus en plus précaire, nous décidons
miner l'ouverture de l’abcès dans la cavité splanchni­ l'ablation sous huit jours. Nous enlevons une mamelle
que.
de trente-deux kilos. Après l’opération nous examinons
Au cours des diverses interventions, nous avons ren­ l'organe ; trois quartiers seulement sont intéressés.
contré trois fois ce commencement de nécrose de la
tunique abdominale. A l'incision nous trouvons deux kystes volumineux
ayant une enveloppe de trois centimètres d'épaisseur et
contenant de quinze à dix-sepl litres de liquide. Le poids
relativement faible de l’organe nous permet d’inférer que
1 L’ablation de la mamelle est encore indiquée lors les résorptions purulentes beaucoup plus que la gène
de kystes de la mamelle, surtout lorsqu'il s’agit de mécanique, contribuaient ;i anémier le sujet.
kystes laiteux : ces kystes laiteux sont des kystes de
rétention produits par l'oblitération accidentelle d’un
conduit. Cotte obstruction peut être réalisée par des 5° L'ablation de la mamelle est une indication lors
coagula de caséine ou cire «lue à une atrésie par ré­ de tumeurs intéressant celle-ci; nous disons à dessein
traction du tissu conjonctif néoformé, le plus souvent intéressant et non tumeur de la mamelle, car ainsi
consécutif à une manœuvre intempestive sur le trayon. que le dit si bien Moussu, les tumeurs de la mamelle
Le volume de ces kysles est souvent considérable ont été mal étudiées chez nos grandes femelles domes­
el il y a toujours tendance rapide à la suppuration. tiques : la raison s’en trouve dansée fait que l’exploi­
Malgré fépaississemenl de l’enveloppe kystique, il sc tation en vue de la production laitière n'étant plus
forme souvent des résorptions préjudiciables à la ma­ possible, les animaux passent a l'abattoir des que leur
lade, l'observation suivante en est un exemple. état d'engraissement le permet.
Personnellement, il ne nous a pas encore été permis
jusqu'ici de rencontrer des tumeurs de la mamelle;
OBSERVATION IV
en ce cas, notre ligne de conduite serait indiquée par
Nous sommes amenés à examiner à IJ... une vache 1 état du sujet et le résultat d'une biopsie, car si on sc
flamande de 9 ans, épuisée par une lactation prolongée, trouve en présence d'un sarcome ou d’un épithéliome,
en mauvais étal d'entretien* La mamelle est énorme, les l'opération pourrait amener une généralisation.
trayons descendent jusqu’aux boulets; à la palpation, la
mamelle est inforinémcnt dure, donnant l’impression Nous pourrions néanmoins faire entrer dans ce pa«
d’une mainmitc indurée. Etant donnes les commémora­
tifs et surtout devant l'absence de phénomènes inflam­ ragraphe l’observation suivante.
matoires. nous posons le diagnostic de kyste laiteux.
— 22 —

crifice de deux quartiers d'un même côté, les deux


OBSERVATION V
quartiers laissés intacts ne produiront pas par hyper­
Nous sommes appelés à A... le pour examiner trophie compensatrice, la quantité de lait correspon­
une génisse flamande de deux ans, dont les travail s et dante à celle donnée par les quatre mamelles, donc
la base de la mamelle sont envahis de papillonies. économiquement la vache est perdue pour la lactation.
Normalement, quel qu’en soit le nombre, ces végéta­ Nous avons pratiqué trois fois l'ablation de deux
tions s'excisent assez bien et une ou deux interventions quartiers sur quatre et en dehors du fait que cela
suffisent à les faire disparaître, mais dans ce cas parti­
complique le manuel opératoire, on obtient une cica­
culier, et malgré tes interventions répétées de notre con­
frère. la prolifération papillomalense va sans cesse crois­ trisation beaucoup moins rapide.
sant. Lors du décnbiliis ces veines s’excorient et saignent
fréquemment ; les hémorragies répétées affaiblissent
Ranimai dont l’état, aux dires du proprietaire, baisse de
jour en jour. Nous décidons Tablalion complète de la
mamelle; l'animal se rétablit 1res vile et est rapidement
amené à l’engraissemml.

En résumé, l’ablation de la mamelle doit être pra­


tiquée lors de mamniites indurées, de mamniites pa­
renchymateuses, de kystes laiteux do la mamelle ou
de tumeurs.
Nous ne saurions trop insister sur la nécessité de la
pratiquer lors delà inammile aphteuse, c’est d'ailleurs
la plus fréquente, car. ainsi que nous le mentionnons
déjà plus haut, sur cinquante-deux opérées, nous avons
eu quarantc-cînq mamniites aphteuses, quatre inam-
nütcs indurées, deux kystes de la mamelle et un seul
cas relatif aux tumeurs.
En outre, au point de vue opératoire, nous estimons
qu‘il n’y a pas bénéfice à n’enlever que deux mamel­
les sur quatre. Nous pouvons dire avec Cadiot et Al-
niy, que si les dispositions anatomiques exigent le sa­
Technique

Elle comprend quatre temps, comme le décrit si


bien Moussu dans son traité des maladies du bétail.
Premier temps, incision cutanée. ; deuxième temps,
dissection décollement des plans conjonctifs, ligature
de la veine mammaire antérieure ; troisième temps,
décollement de mamelle et ligature du pédicule
vasculaire ; quatrième temps, suture et drainage.

Premier temps. — Le sujet, les quatre membres


entravés, est abattu ; le postérieur superficiel est de-
senlrave et porté en adduction, grâce ïi deux plate-
longes, tirées, l'une en avant, l’autre en arrière ; on
lui donne, pour dégager la région inguinale, une po­
sition analogue à celle du cheval lors de la castration
du cryptorcliide.
région est savonnée, nettoyée ; les abcès ouverts

-■
sont détergés, puis on anliseplise avec une solution
lysolée ou crésylée.
On procède à fincision cutanée ; elle devra être
en cote de melon, circonscrivant les trayons. La ligue
d'intersection doit, en arrière, remonter assez haut
sur le périnée.
Nous recommandons de tracer, avant l'abatage, soit l’hémostase par compression manuelle sur son trajet
au crayon encre, soit au bistouri, quelques repères, entre la mamelle et la fontaine de lait. Lavoir débar­
car apres déplacement du membre désentrave les rap­ rassée du tissu conjonctif qui l’englobe, ou la décolle
ports sont changés. Nous insistons sur le fait que l'on de la tunique abdominale, on la charge sur une sonde
a toujours tendance, quand on a affaire à un pis vo­ cannelée et en imprimant à l'instrument un mouve­
lumineux, à laisser des lambeaux de peau trop im­ ment de glissement d’avant en arriére, on la décolle
portants ; il faut opérer en sorte qu'apres ablation sur un trajet de quatre à cinq centimètres, pour per­
de la mamelle les deux lambeaux se juxtaposent lors­ mettre la pose d'une ligature double.
que le pansement est terminé. Si l’on a affaire à une mamelle fortement vascula-
Quand, an cours de l’incision cutanée, on se trouve riser. avant de serrer les ligatures, on commence le
en présence d'abcès anciens, il est préférable de dé- troisième temps de l'opération, pour éviter les perles
vier légèrement sa lign pour les comprendre dans de sang trop abondantes. En temps ordinaire, nous
la partie a énucléer, car ces points indurés cicatri­ plaçons nos ligatures n la soie à quelques centimètres
sent mal. l'une de l’autre cl nous sectionnons aux ciseaux entre

les deux ligatures.
Deuxième temps. — Dissection et décollement des
plans conjonctifs. Troisième temp — Décollement do la mamelle

*Z>
Celle dissection, quand elle est possible, s'opérera d’avant en arrière, ligature du pédicule vascularisé.
autant à la main qu’au bistouri ; on laisse ainsi davan­ Le décollement s’opérera comme précédemment,
tage de lissif conjonctif adhérent à la tunique abdo­ autant à la main qu'au bistouri ; plus on arrivera
minale et la cicatrisation par bourgeonnement est dans les zones postérieures, [dus on devra être cir­
plus intense. conspect dans la manœuvre de l'instrument tran­
Lorsque, au cours du décollement, on rencontre chant ; heureusement, l'apparition du (issu adipeux
des abcès profonds, nous conseillons de les ponction- dans le conjonctif, même chez les sujets émaciés,
non sauf à désinfecter ensuite le champ opératoire, annonce la présence du faisceau vasculo-nervcux ; la
car si on se trouve en présence d’un commencement ligature de ce faisceau artério-veineux constitue,
de nécrose de la tunique abdominale, on risquerait, noire humble avis, le point le plus délicat de l’opéra­
en essayant de les cnuclcer, d’avoir une éventration tion, celui sur lequel les ailleurs n'insistent pas assez
(voir Observation III). eu égard aux conséquences désastreuses que fient
La ligature de la veine mammaire anterieure est entraîner une faute do technique.
souvent facile, après l'avoir repérée en faisant de Lorsque l'on aura repéré la position de l'artère, on
s’assurera de sa présence en saisissant le faisceau
tionna l’artère, produisant une hémorragie mortelle
entre le pouce et l’index ; on sent alors nettement les
pulsations artérielles ; on disséquera un peu le con­ eu quelques minutes.
jonctif en arrière du faisceau tenu toujours entre les Une seconde fois (et. détail curieux, un deux inter­
doigts, puis on continuera la dissection avec la main, ventions successives) nous avions, pour éviter le re­
pour délimiter un tunnel que Ton agrandira ensuite tour d’un semblable accident, utilisé de la ficelle dite
au bistouri, pour permette le passage des ligatures. « ficelle de fouet ». Nous nous trouvions, cette fois-là,
On fera son possible pour que le bout central soit eu présence d’une artère volumineuse et nous avions
hgaturé serre fortement la ligature ; malheureusement, sous
•CS

centimètres environ de son émergence
île Panneau inguinal inférieur; la ligature du bout rinfluencë d’une tension artérielle élevée et des pul­
périphérique se fera à trois ou quatre centimètres île sations violentes, la ligature glissa, dans la nuit, et
la ligature supérieure. La section se fera aux ciseaux, l’animal fui trouvé mort le matin.
le plus près possible de la ligature inférieure. Deux insuccès aussi rapprochés nous amenèrent à
Nous insistons sur la nécessité de ne pas trop pous­ modifier notre technique, pour la mettre à l’abri de
ser la dissection du faisceau vasculaire. Au cours toute défaillance. Nous décidâmes, avant la section
d’une intervention sur un sujet maigre, nous avions île l’artère, de ligaturer à la ficelle de fouet et de pla­
cer sur cette ligature un point de suture au fil ou à
isolé parfaitement la veine, l’artère et le nerf. Nous
posons les ligatures, nous sectionnons et au cours de la soie.
l’operalion. nous aperçûmes que, sous l'influence des Enfin, par crainte que les pulsations ne déchirent
pulsations violentes du moignon sectionné, la ligature la tunique artérielle au niveau du point de suture,
glissait le long des vaisseaux* Nous dûmes faire une nous pratiquons une deuxième ligature à quelques
seconde ligature au-dessus de la première. centimètres au-dessus de la première. Depuis ce /no-
Le choix de la substance pour établir la ligature dus faciendi, nous avons pratique vingt-huit interven­
aussi une importance, sur laquelle nous nous per- tions sans le moindre insuccès.
-

mettons d'insister. L’artère étant sectionnée, nous continuons la dissec­


Parmi nos cinquante-deux opérations, nous avons tion en arrière en ligaturant les unes après les autres
eu trois décès, dont deux sont imputables à la liga­ les anastomoses des veines mammaires postérieures;
ture. Une première fois, instruits par l’observation elles sont d’ailleurs en nombre variable. Nous recom­
relatée plus liant, nous avions, pour éviter le glisse­ mandons de les ligaturer toutes, car elles lancent par­
fois des branches qui s’anastomosent avec la saphène
ment, pratiqué la ligature à'la soie, en serrant très
intente ; si on néglige ce détail, on risque des hémor­
fortement. Quelques heures après, la ligature sec­
ragies en nappe, peu graves, il est vrai, mais
vert, les muscles du plat de la cuisse le sont aussi.
qui souillent le pansement ou font craindre, lors­
Nous saupoudrons la plaie opératoire, après
qu’elles arrivent à le traverser, un accident plus
l’avoir antiseptisée une dernière fois avec «le l’acide
grave.
borique iodoformé : nous étendons dessus de la gaze
Arrivé ii ce point de l’opération, on retourne la
iodoformée, que nous recouvrons d’une lame de
patiente, pour opérer sur les deux autres mamelles
de la même façon : à cet effet, le membre postérieur ouate hydrophile.
Nous attachons enfin les bourdonnets en rappro­
superficiel est récnlravé, Je sujet retourné sur le dos
chant les lambeaux de peau le plus possible.
et place dans la même position que pour le pre
Le sujet est relevé cl placé sur une litière propre,
côté. Utilisant les traits repères faits avant de cou­
que Fou ne changera qu’avec le pansement.
rber le sujet, on opère comme précédemment.
Nous attirons Fattention sur un détail de technique
relativement au décollement définitif de la mameHc,
A ce moment de l’opération, la mamelle n’adhère
plus à la tunique abdominale que par les ligaments
suspenseurs du fascia fibreux intermammaire, mais
le poids de l’organe que Fou va enlever opère sur ces
ligaments une traction violente. Le fascia fibreux de­
vra ctre sectionne à ras de la mamelle, sinon on ris­
querait de loucher la tunique abdominale qui a suivi
sous l’effet de traction les ligaments suspenseurs.

Quatrième temps. — Suture et drainage de la


plaie opératoire.
Après quelques essais, nous avons abandonné la
suture a points séparés* pour nous contenter de
suture dite à « bourdonnets ». avec un ruban de fil-
Nous procédons de façon à mettre autant de bour-
donnels sur un lambeau de peau que sur Vautre et
à les mettre à peu près en face les uns des autres,
A ce moment, les délabrements paraissent formida­
bles, la (unique abdominale est largement à decou-
Suites opératoires

En règle générale, les sujets supportent assez bien


l’intervention. Deux heures après, on observe quel­
quefois un peu de schock se traduisant par des trem­
blements musculaires.
Nous avons même cil deux opérées ayant eu une
lièvre aphteuse violente» chez lesquelles il nous a
fallu intervenir î une injection de caféine de 0 gr. 50
et un litre d'excitant diffusible ont suffi à faire dis­
paraître les Iroubles.
Nous devons néanmoins signaler que dans les an­
nées où la lièvre aphteuse revêt une forme grave,
entraînant une mortalité élevée (épidémie de 1923),
il persiste souvent des lésions d'endocardite et de
myocardite et c’est pour avoir négligé ce détail que
nous avons perdu une, opérée (la troisième de celles
signalées plus haut) de schock traumatique, deux
heures après l'intervention. L’autopsie nous a, en
effet, révélé des lésions de myocardite*
Instruit par l'expérience, nous devions opérer une
vache dans la clientèle d*un confrère voisin. L’exa-
men exteneur du sujet, le poil « piqué et brûlé »,
nous amena à ausculter le cœur. Nous y trouvâmes de
1 arythmie. Le sujet fut mis à la digitale pendant
dix jours, date â laquelle nous enlevâmes à un sujet
affaibli quarante-deux kilos de mamelles, sans qu’il
y ait eu de réaction port-opératoire. Nous avions
néanmoins, par mesure <le prudence, pratiqué une Conclusions
injection de caféine.
Chez toutes nos opérées, trois jours apres l'inter­
vention, nous enlevons le pansement de colon ; nous
rapprochons les bonrdonnels, apres un lavage à
l’eau oxygénée étendue ; cinq à six jours après, nous
nous contentons de lavages antiseptique cresylés De ce qui précède, il appert que :
ou permanganates. ]. - L’ablation des mamelles chez la vache est
Malgré des délabrements qui paraissaient effrayants l'opération de choix, chaque fois que celles-ci sont
au début, la cicatrisation se fait rapidement et la devenues impropres à leur fonction physiologique,
guérison est complète cinq à six semaines après par suite d*un état pathologique incurable par les
l'opération. moyens thérapeutiques (immunité indurée, kystes
laiteux, tumeurs, murniiiilc supptirée), et qui réagit
sur l'économie au point de causer le dépérissement.

— Celle opération, qui nécessite une dissection


minutieuse et des ligatures vasculaires faites avec
soin, pour éviter d’abondantes hémorragies, laisse
une vaste plaie, qui se cicatrise relativement vile et
sans grande suppuration.

111. — Toutefois, elle ne devra être tentée que sur


des sujets exempts de tares physiologiques (endo­
cardite, myocardite, tuberculose).
87 —

IV. ■— La condition sine qua non pour éviter une


hémorragie post-opcraloire est la ligature double de
chacun des deux pédicules formés par les artères et
veines honteuses externes avec suture de la ligature
inférieure.

V. L’opération doit être pratiquée dès que l'on BIBLIOGRAPHIE


s’est rendu compte de l’incurabilité des lésions qui
l’indiquent, autant pour la facilité de son manuel
que pour éviter l'épuisement du sujet.

Le Professeur de l’Ecole Vétérinaire


C. CUNY
Vit. Chauveau, Ahloinc. cl Leslner. — Anatomie.
Le Directeur Maussu. — Traité sur les maladies du hélait.
de l’Ecole Vétérinaire de Lyon.
Peu CH et Toussaint. — Médecine bovine.
F.-X. LESBRE
Bulletins vétérinaires. 188?. 1887, 191?.

Va / Le Président delà Thèse,


l^e Doyen, Docteur TIXIER
J.LÊPINE

Va tl permis d'imprimer :
Lyon, le 30 Mars 19?57
Le Recteur. Président du Conseil de l'üniverslté,
J. CAVALIER
- 2Ç —

TABLE DES MATIERES

Introduction.......................................................... 9
Anatomie . . •........................................... tl
Indications............................................ . . . . 15
Technique ....................................................... « - 25
Suites opératoires.................................................. 33
Conclusions...................................................... .... 35
Bibliographie. *.................................. 37
I '**■

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