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Cours : Introduction à la linguistique

Professeur : M.BOUSFIHA
Département de langue et littérature françaises
Faculté des lettres et des sciences humaines Ain Chok
CASABLACA / MAROC

Prolégomènes de la linguistique

Conflit de définitions.

Le terme linguistique vient du latin « lingua » c’est-à-dire langue. La


linguistique est l’étude scientifique du langage humain ou plutôt le langage verbal.

Objectifs : Si la linguistique s’est autant développée au fil du XX e siècle, c’est donc


essentiellement en s‘appuyant sur une ambition théorique novelle par rapport au XIXe
siècle, elle s’est ramifiée en de nombreuses écoles, et de nombreux domaines nouveaux
sont apparus. Dans chacune de ces écoles et dans chacun de ces domaines, se retrouvent
quelques constantes : le désir de créer des concepts (notions définies de manière très
stricte et très rigoureuse), le souci d’appliquer à l’étude du langage des méthode
scientifiques et, surtout, la volonté de s’écarter absolument de toute idée de norme
comme de tout parti esthétique ou évaluatif. L’objectif dans l’étude du langage n’est pas
de recenser des petits faits vrais dans le détail de telle ou telle langue et leur évolution
historique, mai d’essayer de saisir la nature du langage de façon théorique.

Il est indéniable que la linguistique succède à la grammaire, cette dernière était


établie pour respecter une démarche proprement normative, c’est-à-dire qu’elle prescrit
la manière de bien écrire, sur la base de l’avis des philosophes linguistes et érudits. Une
petite comparaison de deux définitions proposées par des dictionnaires (le Littré et le
Robert) nous permet de saisir cette rupture épistémologique radicale et constater
l’évolution tout à fait patente.
1/ GRAMMAIRE

➢ La grammaire : « est l’art d’exprimer ses pensées par la parole ou par


l’écriture d’une manière conforme aux règles établies par le bon usage »
➢ La grammaire figure donc au nombre des arts. Ce qui implique un
jugement de valeur esthétique (beau /laid). Voire éthique ( bien/mal). La visée de
cette grammaire est proprement normative.
▪ L’idée de norme = implique celle de transgression
▪ L’idée de règle implique celle de son infraction
▪ L’idée de faute fonde donc la grammaire. L’académicien ou le
professeur de français sont les juges du respect de la règle.

2/ GRAMMAIRE SCIENTIFIQUE OU LINGUISTIQUE

Le Robert définit le terme comme suit :

➢ « 1, jusqu’au XIXe siècle de nos jours dans le langage courant. Ensemble des
règles à suivre pour parler et écrire correctement une langue.
➢ 2, étude systématique des éléments constitutifs d’une langue, sons, formes, mots,
procédés. »

Donc, si nous nous arrêtons pour lire les deux définitions on voit que la
première acception renvoie à la notion de « règles à suivre » la deuxième change
complètement la perspective et donc prône une étude systématique qui demeure
descriptive et explicative et non prescriptive.

Je me permets de vous proposer une métaphore du phénomène naturel


pour comprendre ce phénomène grammatical : Quand Isaac Newton voit la
pomme tomber, ne lance aucun jugement d’ordre esthétique ou éthique (ce n’est
ni beau ni bien) ; il décrit et tente une explication. Donc cette grammaire suit la
démarche purement scientifique recherchant ainsi l’exhaustivité
(systématique). Elle vise à l’étude objective de la langue dans ses différentes
composantes qui sont les éléments constitutifs de la forme et du sens (phonétique,
phonologie, morphologie, lexicologie, stylistique ou rhétorique).
(Je vous ai expliqué la définition que Propose Emile Benveniste pour parler de la
langue « une tête de Méduse » ayant deux aspects forme et sens)

La grammaire d’une langue correspond à un ensemble abstrait de règles qui


permettent au locuteur de cette langue de produire la totalité infinie des énoncés
grammaticalement acceptables (grammaticalité et acceptabilité). On parle de
grammaire de la compétence des sujets parlants.

Logique et philosophie du langage

Au XXe siècle, de nombreux logiciens ont dénoncé notre obstination à croire


que notre langage a un lien avec le monde et que, si l’on s’exprime
« logiquement », on dit la vérité sur le monde. Ce courant a été dénommé
empirisme logique. Il a des conséquences importantes en philosophie du langage.
Cette dernière, n’a pas cessé de se nourrir de la logique, d’ailleurs, les recherches
logiques du philosophe allemand Edmund Husserl (parues en 900- 1906), par
exemple, inspirent le structuralisme. Si Husserl imagine l’existence d’une
grammaire « pure », logique, c’est parce qu’il remarque que, dans le langage
courant, tous les signes n’ont pas le même degré de signification : certains n’en
ont que très peu, les conjonctions, par exemple.

Enfin, il s’agit d’un travail d’arrache-pied qui a consisté à la séparation de


l’analyse des formes de l’analyse de leur contenu. L’étude structurale des langues
va s’efforcer d’appliquer ce principe ? Sur ce modèle, de très nombreuses théories
linguistiques du XXe siècle ont adopté une présentation très abstraite. Elles
séparent la syntaxe et la sémantique, et considèrent volontiers que la syntaxe a
une structure logique, qui a besoin d’être formalisée, comme on pourrait le faire
d’un langage logique.
➢ Pourtant, la philosophie du langage et la linguistique restent deux disciplines
relativement séparées. La philosophie du langage estime ne pas devoir
s’occuper de ce que les langues naturelles comportent de codes ; De son côté, la
linguistique se propose d’être une discipline infiniment plus pratique et concrète.
Elle se veut d’abord une étude de langues ^plutôt que du langage, l’essentiel,
pour elle, est d’en tirer des applications pratiques dans l’étude de telle
configuration linguistique ou de telle situation de parole.

❖ Reste donc à se poser la question : à quoi sert la linguistique ? dans son


ambition la plus fidèle à celle des précurseurs que nous venons de nommer, la
linguistique, à proprement parler, ne sert à rien. Elle est un discours scientifique,
objectif, descriptif, de l’objet langage ou de l’objet langue. Dans cette visée, on
parle parfois de linguistique générale. Néanmoins, une grande part de la
linguistique peut avoir une utilité pratique : on parle alors parfois de linguistique
appliquée. Citons-en quelques domaines : la pathologie du langage, l’acquisition,
le traitement automatique des langues…

Qu’est-ce que le langage ?

On propose très souvent un synonyme au terme linguistique c’est : science du


langage. Donc comment définir ce qu’est un langage ? Il y a de nombreux points de vue
possibles. Le premier, adopté par les théories de la communication, dira par exemple
qu’il y a langage chaque fois qu’il y a système de signes destiné à transmettre une
information. Dans de nombreuses disciplines scientifiques, comme dans les
mathématiques ou l’informatique, l’algol, le cobol.. par exemple, sont des ensembles
de signes, ou des codes, destinés à donner des instructions à es ordinateurs. De ce point
de vue et par opposition à ces langages artificiels ou formalisés, les langues du monde
seront appelées des langages naturels.

Tous utilisent une sémantique et une syntaxe (qu’on considère comme des universaux
du langage) ils donnent un sens aux signes qu’ils utilisent, et ils les articulent entre eux.
Indépendamment de ces définitions techniques, et qu’on peut utiliser dans des
contextes bien précis, les philosophes ont souvent été tentés de donner une signification
plus large au mot Langage. ils lui ont par exemple donné le sens de « faculté de
produire un langage », « faculté d’expression ». De plus on a attribué au langage,
outre la fonction de communiquer, celle d’exprimer les pensées de celui qui l’utilise
En effet, la question du langage animal a beaucoup fasciné dans l’histoire, et continue
d’être beaucoup débattue. Au XVIIe siècle René Descartes disait que, du fait que les
animaux ne parvenaient pas à assembler des mots différents de manière à
témoigner d’une pensée, le langage était le propre de l’homme. Aujourd’hui nous
connaissons mieux les langages animaux. Nous savons, par exemple, que les abeilles
sont capables de transmettre des informations à leurs congénères concernant la situation
géographique des fleurs. Du point de vue de la communication, par conséquent, elles
possèdent indiscutablement un langage.

Le langage est d’abord une performance qui met en œuvre certains organes
du corps. Ce fait a clairement une origine animale. Il s’agit aussi d’une faculté qui, dans
certain de ses aspects, est peut-être propre à l’homme, mais qui a des fondements
biologiques. La neurolinguistique montre que cette faculté dépend de la mise en activité
de certaines zones du cerveau, tout comme le autres facultés, la faculté motrice, par
exemple,. Cette faculté s’acquiert, elle peut aussi subir des pathologies

Cette analyse faite, n pourra s’interroger sur ce qui fait la spécificité du langage
humain, par rapport au langage animal, d’une part, et par rapport aux langages
artificiels, d’autre part. On pourra noter par exemple, que le langage humain articule des
unités successive, qu’il s’agisse de phonèmes, de mots, de aussi noter que certains de
ces unités renvoient à de contenus descriptibles en dehors du code qui le véhicule (au
moyen d’un autre code, d’une autre langue, par exemple.

Dans les systèmes de communication animale, pour autant qu’on les connaisse, il
semble que, chaque fois qu’il y a message, l’unité la plus petite de ce message soit le
message tout entier, dans sa globalité, chaque message s’opposant aux autres. A
l’inverse, la communication verbale humaine est langage dans la mesure où elle utilise
des unités articulées entre elles : Phonèmes et morphèmes

Qu’est-ce que la langue ?

On peut dire tout d’abord que la linguistique étudie tout ce qui a trait au langage ; on
peut dire également, qu’elle étudie les langues. Chez le linguiste suisse Saussure,
apparait le concept de « langue ». Ce concept prend sens au sein de l’opposition
langue/parole. Sous son influence, la linguistique structurale se définira comme objet
l’étude de la langue (au singulier).

« La langue » en linguistique

Il y a différents emplois du terme en linguistique, dans son sens courant, la langue est
un langage commun à un groupe social, à une communauté linguistique. C’est le
moyen de mise en œuvre du langage, cette faculté d’expression et de communication
verbale entre les hommes. La distinction langue/langage semble une particularité
française. Dans la linguistique anglo-saxonne, un seul mot, language, recouvre les deux
notions.

La linguistique s’intéresse surtout aux langues naturelles. On définit celle-ci comme des
systèmes de signes vocaux doublement articulés – unités distinctives, les phonèmes, et
unités significatives, les morphèmes ; cela afin de les opposer à d’autres systèmes de
communications humains (comme la musique) ou animaux (le langage des abeilles).

La langue comme objet de la linguitique.

Pour que l’on puisse parole de science, il faut pouvoir délimiter un objet d’étude.

Le langage selon Ferdinand de Saussure, est « multiforme et hétéroclite ». Aussi


distingue-t-il, à l’intérieur du langage, d’un côté, l’ensemble des phénomènes liés de
près ou de loin à son utilisation, qu’il regroupera sous le nom de parole, et, de l’autre,
l’objet du linguiste, c’est-à-dire l’aspect de ces phénomènes sur lequel le linguiste doit
se pencher : Saussure l’appelle la langue

✓ En tant qu’objet d’étude du linguiste, la langue doit être « un tout en soi », elle
est « un principe de classification » : elle doit constituer u système qui permette
de mieux comprendre et de mieux organiser les phénomènes liés à la parole, qui
constituent en fait la matière de la linguistique. La tâche du linguiste consistera
donc à élaborer un modèle qi rende compte du système général de la langue.

Saussure et le structuralisme
Ferdinand de Saussure (1957-1913) représente l’aube de la linguistique contemporaine
européenne. C’est en effet au début du XX siècle que la linguistique sera exercée en
elle-même (avec le temps, à un moment de son histoire) et pour elle-même (objet et
outil d’approche de la linguistique).
Saussure va poser les jalons de la linguistique en faisant une rupture épistémologique
radicale. Le livre Cours de linguistique générale post-mortem, publié en 1916 par ses
disciples fut le fruit de ses cours dispensés à l’université de Genève.

Les fondements de l’apport saussurien se résument dans les trois distinctions, appelées
Dichotomies, qu’il a mises en évidence

❖ Langue/parole : pour Saussure,, l’objet unique de la linguistique est la


langue. Il recourt à trois métaphores pour le faire comprendre :

* le trésor : la langue est un trésor commun à tous ceux qui la parlent.

* le dictionnaire : chaque individu appartenant à une communauté a reçu un


dictionnaire qui est commun à tous les membres de cette communauté.

* le code : la langue a un caractère impératif, codé : si je veux dire arbre, pour faire
comprendre ce que je désigne, je ne peux changer de nom.

La langue se définit par opposition à la parole, qui est l’exploitation individuelle du


trésor, du dictionnaire, du code. Cette opposition revient à distinguer ce qui est
collectif de ce qui est individuel. En disant que la linguistique a pour unique objet la
langue, Saussure donne la priorité à tout ce qui est collectif. Dès lors, la langue revêt
un caractère social important

❖ Signifiant/Signifié : la langue est constituée de signes linguistiques,


qui se décomposent e signifié (concept) et signifiant (image acoustique). Le signe
linguistique est arbitraire, linéaire et ordonné.

Arbitraire ? la première définition du terme « arbitraire » dans le Lexis nous dit qu’il
renvoie à ce « qui dépend de la seule volonté humaine » c’est-à-dire qu’il n’existe
aucun rapport naturel entre le signifié (le concept) et le signifiant ( l’image
acoustique), en d’autres termes entre le sens et sa réalisation visuelle et acoustique (
le signe). Cet arbitraire du signe explique que, pour désigner un même concept, il soit
possible d’utiliser différentes réalisations graphiques et phoniques, telles que Chat en
français [ꭍa], 猫.[neko] e n japonais, kucing [ kutꭍiὴ] en malais et cetera. Je me
permettrai d’expliquer davantage pour dire que que l’image acoustique (le signifiant)

Linéaire ? il se déroule dans le temps, deux unités se présentent toujours l’une après
l’autre, donnant ainsi vie à la chaine parlée.
Correspondant à un mot est indépendante de son contenu sémantique (le signifié).
Cependant signifié et signifiant sont intimement liés par une convention qui assure
l’intercompréhension des sujets parlants. Une fois que le signe est établi dans un
groupe, l’individu ne peut en rien le changer.

❖ Synchronie/diachronie

L’étude de la langue peut se faire de deux manières : soit elle envisage la langue dans
son évolution, comme l’ont fait jusque-là la grammaire et la phonétique historique – la
perspective est diachronique ; soit elle envisage l’état du système de la langue à un
moment donné de son histoire, comme si on étudiait une coupe géologique – la
perspective synchronique. Saussure affirme la primauté de la perspective synchronique ,
ce qui a mis fin à la prédominance des études historiques.

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