Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ
EN AFRIQUE
REMERCIEMENTS
Avis de non-responsabilité
J
e voudrais tout d’abord reconnaître la bonne nouvelle que, selon les rapports sur les perspectives
économiques de l’Afrique publiés par la Banque Africaine de Développement en 2018 et 2019, que
l’Afrique compte plusieurs des pays à plus forte croissance économique du monde. Le secteur de
l’électricité africain connaît présentement son plus rapide taux de croissance. En effet, 2017, la puissance
totale d’électricité installée a atteint 175 GW (de 165 GW en 2012), dont 35 GW sont de sources renouvelables.
Cela montre clairement que l’investissement dans la production d’électricité est en effet en pleine expansion, et
pour la première fois, en 2017, à un rythme qui était plus élevé que le taux de croissance de population 1.
Toutefois, la mauvaise nouvelle est que, en dépit de cette croissance, près de 600 millions d’Africains restent
sans électricité, fondement même du développement. Les performances des sociétés d’électricité dans de
nombreux pays ont été médiocres, principalement en raison de problèmes de gouvernance et de gestion,
de mauvaise planification, ressources humaines inadéquate, et une tarification qui ne reflète pas les coûts :
cela a conduit à la mauvaise qualité de la prestation d’approvisionnement et des services, caractérisée par de
fréquents et omniprésents délestages, des pertes financières et techniques élevées et un mécontentement
des clients très répandu. En conséquence, de nombreuses industries et consommateurs se trouvent obligés
d’autoproduire leur électricité à un coût très élevés atteignant les 0,40 $/ KWh, alors que la baisse des prix des
équipements solaires ont permis une parité des coûts sur le réseau.
Inévitablement, les sociétés d’électricité doivent être transformées ! Les difficultés ci-dessus citées sont variées
et limitent considérablement la capacité des sociétés d’électricité à recouvrer le coût des investissements
réalisés le long de la chaîne de valeur électrique et à réaliser un bilan solvable.
En réponse à ce qui précède, la Banque a lancé en 2016, le Nouveau Partenariat pour l’Energie en Afrique
(NDEA), basé sur le partenariat stratégique qui vise à mobiliser les finances et l’expertise pour atteindre un accès
universel à l’électricité sur le continent à l’horizon 2025, conformément au programme « éclairer et alimenter
l’Afrique en électricité » qui est sensé accélérer la mise en œuvre les objectifs du NDEA. Une nouvelle Vice-
Présidence en charge de l’Energie, Electricité, Changement Climatique et Croissance Verte comprenant quatre
départements, a été créée, afin de conduire les efforts à l’échelle de la banque, dans la mise en œuvre de ce
pilier, dont la transformation des sociétés d’électricité constitue l’épine dorsale.
La présente étude s’inscrit dans les actions de l’Agenda « Transformation Durable des Sociétés d’Electricité (SUT)
» de la banque. Le rapport vient à point nommé et fait le point sur les résultats de plus de trente ans de réformes
dans le secteur, grâce à une approche fondée sur des preuves : Il met en évidence des tendances en constante
évolution dans la politique, les réformes réglementaires et institutionnelles ; technologies, financement, modèles
d’affaire et facteurs critiques de succès pour la participation du secteur privé. En effet, les performances
de la plupart des sociétés d’électricité, quelle que soit leur structure institutionnelle (verticalement intégrée,
entièrement ou partiellement dégroupées) ont été entravées par des dettes importantes, les passifs éventuels
et les déficits budgétaires (dans l’ordre de 200 millions $ à plus de 25 milliards $US), des structures tarifaires et
subventions médiocres. Les ministres de l’énergie et les ministres des finances devront collaborer tôt et mieux !
J’encourage vivement les décideurs politiques dans le secteur, les régulateurs, les sociétés d’électricité, les
pools d’électricité régionaux, les acteurs du développement et autres parties prenantes dans l’énergie, à lire ce
rapport attentivement et à prendre la mesure de la complexité et de la diversité des défis et solutions spécifiques
à la situation du secteur électrique dans tous les pays du continent. Quoi qu’il en soit, nous devrons tous
contribuer à l’émergence de la société d’électrique Africaine du futur !
Batchi Baldeh
Directeur,
Département du Développement du Secteur Electrique
Banque Africaine de Développement
____________
1 https://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Development_Effectiveness_Review_2018/ADER_2018_Ch_2.pdf
AVANT-PROPOS DE L’ASSOCIATION
DES SOCIÉTÉS D’ELECTRICITÉ (ASEA)
D
epuis sa création en 1970, ASEA a atteint plusieurs résultats importants, y compris des études sur
les réseaux d’interconnexion électriques en Afrique, la création d’une école supérieure d’ingénieur
en électricité et une contribution à la création de plusieurs organisations régionales africaines de
Pools Énergétiques. Parmi les réalisations les plus récentes, on peut citer :
- La tenue de l’Assemblée constitutive de la Commission Africaine Electrotechnique et de la normalisation
(AFSEC), en février 2008, à Accra. L’idée de créer un organisme d’élaboration de normes adaptées aux
conditions africaines a été préconisée par l’ASEA depuis le début des années 2000. Plus tard, la Commission
de l’Union africaine (CUA) et la Commission Africaine de l’Energie (AFREC) ont fait leur cette idée.
- L’étude d’évaluation des réformes dans le secteur de l’électricité africain. Sur la demande de l’ASEA, a été
réalisée une étude sur les résultats des réformes dans le secteur de l’électricité en Afrique, sur financement de
l’Union Européenne par le biais de l’initiative BizClim. Les conclusions de l’étude ont été présentées lors d’une
conférence tenue les 27 et 28 mars 2008 à Bruxelles (Belgique). Parmi les recommandations de cette conférence,
on notait la nécessité d’élaborer un recueil de bonnes pratiques dans la mise en œuvre des réformes en Afrique.
Le recueil produit, était divisé en plusieurs sections, chacune décrivant une pratique considérée comme bonne
par rapport à la mise en œuvre d’un objectif majeur du processus de réforme. Le recueil incluait des analyses
stratégiques et des outils décisionnels de prise en charge visant les autorités gouvernementales, les experts, les
gestionnaires des compagnies d’électricité, les décideurs et membres des organisations internationales ayant
un intérêt dans le secteur de l’énergie en Afrique.
- Afin de renforcer le rôle des Pools Energétiques africains, l’ASEA a participé activement à la création du Pool
Energétique d’Afrique Centrale (PEAC), qui est un organe spécialisé de la CEEAC (Communauté Economique
de l’Afrique Centrale) et le Pool Energétique d’Afrique de l’Est (EAPP), qui est un organe spécialisé du COMESA
(Marché Commun d’Afrique Orientale et Australe). Par la suite, tous les cinq Pools Régionaux Africains, c’est-à-
dire le COMELEC (Comité d’Electricité du Maghreb), le WAPP (Pool Energétique d’Afrique de l’Ouest), le SAPP
(Pool Energétique d’Afrique Australe), le PEAC et l’EAPP ont convenu, sous les auspices de l’ASEA et AFREC,
à signer un protocole d’entente de coopération en 2005 à Lusaka.
Durant la dernière décennie, beaucoup de choses ont changé dans les compagnies d’électricité africaines, dont
la plupart sont membres de l’ASEA. Avons-nous réussi à améliorer la performance commerciale, financière,
technique et managériale des compagnies d’électricité national, objectif principal de la plupart des programmes
de réforme dans le secteur ? Qu’est-ce que les diverses réformes réalisées dans le secteur ont apporté?
Le cadre d’une collaboration sensiblement renforcée et un partenariat privilégié entre l’ASEA et la Banque
Africaine de Développement ces dernières années, nous donne une opportunité intéressante de revenir sur
l’étude de 2008 sur les réformes du secteur électrique africain et d’approfondir l’analyse des impacts des
reformes dans un contexte de changements profonds dans le secteur, avec la percée de nouvelles technologies
dites perturbatrices.
Je suis convaincu qu’avec les conclusions de la présente étude, tirant les leçons des faiblesses et des défis du
secteur de l’électricité africain, ensemble, nous parviendrons à trouver les voies et moyens afin de prendre les
décisions idoines pour la gestion plus efficace du secteur.
4 Réformes prospectives :
et défis opportunités 48
4.1 African power sectors continue to face weaknesses and worries 48
4.2 Change, challenge, optimism define the next decade of reforms in Africa 50
4.2.1 Disruptive technologies are prompting a new wave of power sector reforms 50
4.2.2 African utilities begin to anticipate the relevance, impact and timing of innovations in power
technologies and markets 52
4.2.3 Utilities of the future will emerge 54
4.3 Implementing a sustainable utility transformation agenda 54
Figures
Figure 1—Indice de Réforme du secteur de l’électricité présentant l’état actuel des réformes par pays, %
Figure 2—Indice R-G présentant l’état des réformes combiné avec les classements au titre de la gouvernance
(50/50) 28
Figure 3 — Note de l’Indice de Performance du secteur de l’électricité avec des indicateurs désagrégés, %
29
Figure 4 — Comparaison des indices de réforme-gouvernance et de performance 15
Figure 5 — Structure du secteur de l’électricité et participation du secteur privé dans 42 pays
Figure 6 — Réglementation du secteur de l’électricité en Afrique : Indice de réglementation de l’électricité
(ERI)
Figure 7 — Appels d’offres internationaux pour la production d’électricité en Afrique 12
Figure 8 — Les producteurs d’électricité indépendant (PEI) en Afrique : part de la capacité totale installée (en
pourcentage) et investissements par pays (en dollars EU) 43
Figure 9 — Pourcentage des raccordements électriques des ménages en Afrique 47
Figure 10 — Ajouts PEI depuis 2008, par type de technologie 51
Figure 11 — Evolution des Appels d’Offres en Afrique
Figure 12 — Principaux moteurs des réformes du secteur de l’énergie 54
Figure 13 — Obstacles aux réformes 55
Figure 14 — Classement de la gouvernance 59
Figure 15 — Niveau de préoccupations potentielles (moyenne de 26 réponses) 63
Figure 16 — Les institutions du secteur énergétique sont-elles équipées pour faire face à ces tendances et
défis à venir ? 64
Figure 17 — Évolution du bouquet énergétique mondial 67
Figure 18 — Notes moyennes pour la pertinence, l’impact et la reconnaissance des nouvelles tendances (sur
5) 70
Figure 19 — Dans quel délai l’impact des nouvelles tendances se fera-t-il sentir ? (réponse moyenne) 72
Figure 20 — Part des pays qui ont adopté des politiques ou des réglementations pour faire face aux
tendances 73
Figure 21 — Nombre de PEI par pays 96
Figure 22 — Montant total des investissements des PEI par pays 96
Figure 23 — Capacité installée des PEI par pays
Encadrés
Encadré 1 : Réforme de la réglementation au Uganda 38
Encadré 2 : Réforme de la réglementation au Nigeria 38
Encadré 3 : Réformes et participation des privés en Afrique du Sud 45
Encadré 4 : Electrification par méthode hors-reseaux et mini-reseaux en Tanzanie 45
Encadré 5 : Approches d’énergie renouvelable (ER) au Ghana 53
Résumé analytique
____________
4
Voir section 2.4.
16 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
Paysage actuel des réformes du secteur de Les réformes de la régulation ont constitué la première
l’électricité en Afrique étape du processus de réforme pour la plupart des
pays africains : 33 des 42 pays couverts par cette étude
Les pays africains ont conservé, dans une large ont créé une autorité de régulation de l’électricité (soit
mesure, la structure traditionnelle de sociétés de 79%). La mise en place d’une autorité indépendante de
monopole intégrées de leur secteur de l’électricité, régulation vise à créer une concurrence équitable fondée
bien que la plupart aient intégré des PEI. Seuls 10 des sur des règles pour les producteurs, les consommateurs
42 pays couverts par la présente étude ont dégroupé en et les opérateurs privés du secteur de l’électricité grâce
partie ou en totalité le secteur (soit 24%).5 D’autres pays à des règles et mécanismes clairs de supervision du
envisagent la possibilité de procéder à une restructuration secteur et à des tarifs reflétant les coûts pour les sociétés.
et de créer un gestionnaire de réseau indépendant L’indépendance par rapport à l’État et à d’autres intérêts
pour assumer la responsabilité de la planification de la demeure un problème pour de nombreux organismes
production, de l’achat de l’électricité, de l’exploitation et de régulation du secteur de l’électricité en Afrique, ce
du transport de l’électricité, ainsi que de la planification qui limite leur capacité à assumer efficacement leurs
du transport et de la distribution de l’électricité à moindre fonctions de régulation.
coût. Ainsi, des pays tels que le Kenya, le Nigeria, le
Ghana et l’Ouganda, qui ont entrepris d’importantes
réformes, sont mieux classés que d’autres (voir ci-
dessous).
Indice de réforme du secteur de l’électricité par pays indiquant l’état de la réforme (%)
100
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
AN YPT
NI NYA
NA CCO
Z ON
BA A
SO M WE
TE FR I
NE E
GO
NZ LI
GA RIA
BU T BIA
TS SO
A A
BI N
OT E
M G NDA
AN N O
RI LIC
AS U
LIB IN
RU A
CO TIC C DI
O, U D
PU IC
IC
GH IA
UG ANA
M EPU ER
M A-B NEA
ER A
D' ICA
OR LA
TO L
A
EG A
YA
TU NIA
AL SIA
IN GU IA
BE R
CO A AW
GA
LE QU
SE OIR
M BI
RW AN
BU ERI
D
M IBI
IN PI
CA
NG RE HA
AG SA
AM BO
H
TA MA
RE BL
BL
R
N
N
LIB
M GO
R IG
BO A FA
AN
AU B
O
NI
B
RK HIO
ZI AM
GE
M
GE
TA
KE
CA M
AD IS
UT AL
I
O
OZ A
IV
P
S
H
E
GU
RA
IC
FR
OC
LA
M
RA
DE
NT
O,
CE
NG
CO
REGULATORY REFORM RESTRUCTURING REFORM COMPETITION REFORM PRIVATE SECTOR PARTICIPATION REFORM
L’ouverture du secteur de l’électricité Africain aux flux donne lieu à une controverse, voire à des annulations de
d’investissement de capitaux est souvent à l’avant- contrat. La qualité de la gouvernance – notamment les
plan des objectifs de réformes. Les PEI constituent les niveaux de corruption, l’état de droit et l’environnement
sources privées d’investissement dans ce secteur qui se réglementaire – constitue un facteur essentiel de l’appui
développent le plus rapidement, parallèlement aux projets à la transparence et à la stabilité pour l’investissement
financés par la Chine. Elles opèrent, à présent, dans plus privé dans le secteur.
de 30 pays, 270 d’entre eux étant déjà opérationnels
ou en construction, avec une capacité totale de plus Lorsqu’il s’agit de combler les déficits en matière
de 27 GW, représentant environ 51,7 milliards de $ d’accès à l’électricité et d’abordabilité de l’électricité,
d’investissement (voir Figure ci-dessous). Le transport les réformes sont loin de pouvoir suffire à résoudre
n’a pas tiré parti du même afflux d’investissement privé le problème. Des politiques complémentaires, la
que la production. Seuls quelques pays bénéficient d’une planification, le financement et les organismes dédiés pour
forme ou une autre de participation du secteur privé dans l’électrification contribuent tous à donner l’orientation
le transport. La gestion privée a été introduite sous forme des réformes du secteur de l’électricité, aidant les pays à
de concessions, d’affermage et de programmes de étendre l’électrification, l’accès à l’énergie et l’abordabilité
privatisation complets pour certains volets du secteur de au profit des ménages pauvres. La plupart des pays
l’électricité dans plusieurs pays. De temps à autre, ceci africains ont créé des organismes nationaux chargés
____________
5
Liste des 10 pays qui ont entrepris des réformes de restructuration : Algérie, Angola, Ethiopie, Ghana, Kenya, Lesotho, Nigeria, Soudan, Ouganda, Zimbabwe
RÉSUMÉ ANALYTIQUE 17
ALGERIA
LIBYA EGYPT
MALI
NIGER SUDAN
CHAD
NIGERIA
ETHIOPIA
CAR
Legend CONGO,
KENYA
Has hosted interna9onal DEM
REPUBLIC
compe99ve bidding process(es) TANZANIA
for genera9on
Regulatory Reform Indicator Score ANGOLA
0 - 20 ZAMBIA
0 - 20
21 - 40
21 - 40 NAMIBIA
41 - 60
41 - 60
61 - 80
61 - 80 SOUTH AFRICA
81 - 100 81 - 100
____________
6
Les indices de réforme-gouvernance (R-G) et de performance (IR) ont un coefficient de corrélation de 0,57 (coefficient de Pearson). L’exclusion des indicateurs de gouvernance — qui ne comparent que les notes des
réformes et de celles de la performance – réduit l’évolution positive entre les réformes et la performance.
18 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
KEY
Source : Indices des auteurs tirés du questionnaire de l’étude, complétés par les données de SONELGAZ (2012), de la
Banque mondiale (2014), de la Banque mondiale (2016), de l’EEHC (2017), de NamPower (2017), de la Banque mondiale
(2018) et de la BAD (2018).
____________
6
The R-G and performance indices have a correlation coefficient of 0.58 (Pearson coefficient, where a perfect correlation is 1.0). This indicates a positive, moderately strong correlation. Excluding the governance indica-
tors—comparing only reform with performance scores—reduces the positive trend between reforms and performance to 0.45.
RÉSUMÉ ANALYTIQUE 19
Les mini-réseaux et les modèles d’alimentation promotion d’une performance optimale du système.
en électricité hors réseau – en particulier ceux qui Depuis les années 90, différents pools énergétiques,
utilisent les technologies de production d’énergies réseaux électriques communs et systèmes binationaux
renouvelables modulaires à petite échelle – sont de production et de transport d’électricité en Afrique
de plus en plus attrayants et économiques pour ont tenu lieu d’outils de planification de l’électricité à
les communautés éloignées. Plus de la moitié des l’échelle régionale. Néanmoins, le volume des échanges
personnes sondées dans le cadre de l’étude (toutes en d’électricité demeure à la traîne par rapport aux objectifs
Afrique subsaharienne) ont fait état de l’existence d’une fixés. De nombreux pools énergétiques africains
industrie de mini-réseaux dans le pays. Ces industries souffrent d’un déficit de financement, de l’insuffisance
se développent rapidement, surtout avec l’appui des de l’investissement dans le système de transport et de
institutions de développement, notamment la BAD. l’entretien nécessaires pour créer la capacité d’échange
souhaitée.
Les efforts en cours d’interconnexion régionale des
réseaux électriques demeurent un important outil de
Wind, 18,5%
MSD/HFO, 4,5%
OCGT, 5,0%
Des percées sans précédent concernant les prix de garantir les prix les plus abordables pour les nouveaux
l’énergie solaire et éolienne au cours de la dernière projets d’énergies renouvelables.
décennie ont amené les pays africains à recourir à des
technologies de production d’énergies renouvelables Contextes politico-économiques
variables qui sont, à présent, bien établies. Toutes les
des réformes
personnes sondées dans le cadre de l’étude ont affirmé
qu’une loi et une politique nationales visant à promouvoir
La gestion de l’économie politique complexe de la
les énergies renouvelables avaient été adoptées dans
gouvernance du secteur de l’électricité demeure
leur pays. L’ouverture de la production à l’investissement
difficile pour nombre de pays africains. Le secteur
privé a été un facteur important de l’ajout des énergies
joue un rôle essentiel sur le plan économique et est, par
renouvelables aux réseaux nationaux. Rien qu’au cours
conséquent, très politisé, ce qui crée des divergences
de la dernière décennie, plus de 42 pour cent des
autour des réformes. Les programmes de réformes
nouveaux apports de capacité par le truchement des
sont souvent présentés comme des stratégies visant
PEI concernent l’énergie solaire photovoltaïque et plus
à améliorer les performances d’une société, attirer
de 37 pour cent les autres énergies renouvelables,
l’investissement et juguler la crise financière. En outre,
notamment l’énergie éolienne, l’hydroélectricité, la
les parties prenantes invoquent des problèmes de
biomasse et l’énergie géothermique. Les ventes aux
gouvernance, de corruption, et d’intérêts politiques
enchères (programmes d’appel d’offres internationaux)
profondément enracinés pour expliquer l’arrêt ou l’échec
sont, de nos jours, une tendance bien établie pour
des réformes. L’instabilité politique a favorisé ce problème
20 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
0
Poor governance, Labour unions Regulatory en8ty Macroeconomic issues Poorly explained Poli8cal instability
corrup8on benefits
1.2 Comprendre l’histoire des réformes du Bien que plusieurs pays aient accepté de tels paquets
secteur de l’électricité d’ajustement structurel et de recommandations, aucun
pays africain n’a mis en œuvre les réformes du secteur de
Les réformes dans le secteur de l’électricité en Afrique
ont été menées avant tout, en tant qu’outils de
politique économique en vue d’améliorer l’efficacité
____________
9
The “Manufacturing, value added” share of GDP measures the role of manufacturing in the economy
26 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
l’électricité aussi largement que dans d’autres régions, de l’électricité et de la prolifération des technologies,
notamment l’Amérique latine et l’Europe de l’Est. déclencheront un besoin de nouvelles approches et
règles de gestion du réseau, notamment les modèles
Les paquets de réforme du «modèle standard» de gestion. De même, les modèles de réglementation
promettaient aux sociétés étatiques une voie pour et de gestion classiques sont confrontés à de nouveaux
s’ouvrir aux opérations commerciales et attirer les défis, mais doivent saisir aussi les opportunités liées à
investissements privés axés sur le marché. Ceci devait l’émergence des prestataires de mini-réseaux et de
soutenir les centrales de production chancelantes et systèmes hors réseau dans les zones sous-électrifiées
alléger les crises d’approvisionnement en électricité qui (par exemple, les communautés énergétiques qui
entraînaient des pannes d’électricité et des délestages souhaitent être indépendantes des systèmes nationaux).
généralisés. Ces transformations s’accompagnent de la numérisation
croissante, de l’arrivée de consommateurs proactifs,
Cependant, la forme prescriptive des ajustements qui produisent leur propre électricité (prosommateurs),
structurels n’a souvent pas pris en compte les ainsi que de l’électrification du transport et des véhicules
préoccupations, les visions et les besoins locaux. électriques.
La logique et les résultats escomptés des réformes
semblaient peu clairs, voire cyniques pour les parties Certains acteurs du secteur de l’électricité prévoient
prenantes du secteur, entraînant de faibles niveaux des changements de leurs rôles, voire la perte de leur
d’appropriation et de soutien aux mesures au niveau statut, suite à ces nouvelles évolutions. Les fournisseurs
local. La suspicion des prêteurs étrangers, des de combustible pour les groupes électrogènes privés
investisseurs et des institutions de développement, peuvent choisir de se diversifier dans le commerce
associée à l’importance stratégique des réseaux et des des panneaux solaires domestiques — ou d’étudier
équipements électriques a alimenté les craintes que les d’autres pistes intéressantes pour les petits fournisseurs
réformes visaient à favoriser le secteur privé au détriment d’énergie. Dans le contexte de l’intégration régionale
des entités locales et menaçait la sécurité énergétique. plus large, les échanges d’énergie, la production
d’énergie décentralisée et les systèmes appartenant aux
La première vague de réformes n’a généralement pas consommateurs, les opérateurs du système de transport
accordé la priorité aux objectifs sociaux et politiques et les sociétés de distribution pourraient voir leurs rôles
de l’élargissement de l’accès à l’électricité et à des et responsabilités changer de fond en comble.
sources d’énergie propres, ou à l’amélioration de
l’équité ou de l’abordabilité. Au contraire, des Par ailleurs, les forces physico-économiques
initiatives parallèles ont souvent été mises en œuvre extérieures interagissent – au-delà des décisions
pour promouvoir les progrès dans ces domaines, prises sur les marchés locaux de l’électricité – pour
notamment par le truchement de programmes changer les régimes météorologiques et climatiques.
spécifiques d’électrification et de fourniture d’énergie Ces changements progressifs, mais imprévisibles dans
en milieu rural et de financement pour améliorer l’accès notre environnement, entraînent une autre série de
et de subventions et/ou subventions croisées ciblées conséquences et créent d’autres paramètres en ce qui
afin d’appuyer les tarifs forfaitaires pour les ménages à concerne la production, les politiques et l’économie de
faible revenu10. La durabilité politique des réformes s’est l’électricité. Ils amènent les planificateurs africains de
améliorée, lorsque les gouvernements ont combiné les l’électricité à se pencher sur les questions du manque de
mesures du « modèle standard » avec les thèmes qui prévisions et de ressources pour le climat, à envisager
suscitent un soutien plus important des populations à de bâtir un futur énergétique sûr à l’aide des ressources
la base et peuvent générer des avantages politiques, internes.
par exemple l’accès à l’énergie et l’abordabilité de celle-
ci, ainsi que l’accent mis sur l’amélioration de la fiabilité Les nouveaux acteurs et relations économiques
de l’approvisionnement en électricité et de la qualité du qui émergent changeront le système électrique
service. physiquement, entraînant une décentralisation et
une réorganisation plus importantes des réseaux
1.3 Prévoir une nouvelle vague de électriques. Les consommateurs et les prestataires
de services seront de plus en plus interconnectés et
changements et de réformes de 2019 à 2030
localisés. Progressivement, les consommateurs se
rendront davantage maîtres de l’utilisation et de la
Les prochaines années augurent de nouveaux défis
production de leur énergie, notamment par le truchement
importants pour les secteurs de l’électricité à l’échelle
des systèmes solaires domestiques, des compteurs
mondiale. Les nouveaux acteurs et technologies
intelligents et des maisons intelligentes, des solutions
qui font brusquement leur apparition catalyseront
de stockage et des véhicules électriques. Certaines
les évolutions rapides du paysage et des besoins
technologies seront présentes partout à la fois, à mesure
du secteur.11 Par exemple, l’explosion des ajouts de
qu’elles deviennent économiques pour tous ; d’autres
capacité de production axée sur les différentes énergies
perdront rapidement de leur valeur économique et
renouvelables, grâce à la baisse importante des prix,
pourraient devenir des actifs au rebut.
suivies d’une baisse similaire des coûts du stockage
____________
10
Voir section 2.4.
11
Voir section 4.
30 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
Les pays africains ont adapté les réformes du indicateurs de réformes, voir details dans l’Annex 3))
«modèle standard» à différents niveaux afin de avec une dimension de la gouvernance (fondée sur six
restructurer le secteur de l’électricité (Section 2.1), indicateurs de gouvernance mondiaux). L’IR classe les
d’introduire de nouveaux cadres de gouvernance pays en fonction de l’ampleur des réformes mises en
et de réglementation (Section 2.2) et de s’ouvrir œuvre dans chacune des quatre catégories suivantes:
à la PSP et à la concurrence (Section 2.3). Ces les réformes règlementaires, l’ouverture à la PSP,
réformes interagissent avec d’autres dimensions de la l’encouragement de la concurrence dans le secteur
planification, de l’expansion et des politiques du secteur et la restructuration de la société. Des pays, tels que
de l’électricité, ainsi que par le truchement des efforts le Kenya, le Nigeria, le Ghana et l’Ouganda, qui ont de
visant à élargir l’accès à l’électricité (Section 2.4), en solides antécédents en matière de réformes se classent
vue d’interconnecter les réseaux nationaux, permettre mieux que les autres pays (voir Figure 1). Ces quatre
les échanges transfrontaliers et régionaux de l’électricité pays ont mis en œuvre des variantes de chaque aspect
(Section 2.5) et assurer le passage à des systèmes de la réforme du « modèle standard » (bien qu’aucun
d’énergie propre (Section 2.6). n’ait appliqué toutes les réformes dans toute la mesure
du possible, par conséquent, aucun pays n’a reçu un
L’Indice de «réforme-gouvernance » (R-G) élaboré «satisfecit»). Cinq autres pays ont également adopté des
pour les besoins de la présente étude (défini de mesures dans chacune de ces catégories, mais à des
manière exhaustive à l’Annexe 3) constitue un point degrés moindres, tandis que d’autres ont choisi de ne
de départ pour la diffusion des réformes du secteur pas mettre en œuvre des réformes dans l’une ou l’autre
de l’électricité dans 42 pays 13. Cet indice composite de ces catégories.14
combine un indice de réforme (IR) (fondé sur quatre
Figure 1—IR du secteur de l’électricité présentant l’état actuel des réformes par pays, %
100
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
AN YPT
NI NYA
NA CCO
Z ON
BA A
SO M WE
TE FR I
NE E
GO
NZ LI
GA RIA
BU T BIA
TS SO
A A
BI N
OT E
M G NDA
AN N O
RI LIC
AS U
LIB IN
RU A
CO TIC C DI
O, U D
PU IC
IC
GH IA
UG ANA
M EPU ER
M A-B NEA
ER A
D' ICA
OR L A
TO L
A
EG A
YA
TU NIA
AL SIA
IN GU IA
BE R
CO A AW
GA
LE QU
SE OIR
M BI
RW AN
BU ERI
D
M IBI
IN PI
CA
NG RE HA
AG SA
AM BO
H
TA MA
RE BL
BL
R
N
N
LIB
M GO
R IG
BO A FA
AN
AU B
O
NI
B
RK HIO
ZI AM
GE
M
GE
TA
KE
CA M
AD IS
UT AL
I
O
OZ A
IV
P
S
H
E
GU
RA
IC
FR
OC
LA
M
RA
DE
NT
O,
CE
NG
CO
REGULATORY REFORM RESTRUCTURING REFORM COMPETITION REFORM PRIVATE SECTOR PARTICIPATION REFORM
Source : Les indices des auteurs sont tirés du questionnaire de l’étude et ont été complétés à l’aide des données
de l’Indice de réglementation de l’électricité de la BAD (2018) et de la Banque mondiale (2016).
____________
13
Sudan is excluded due to lack of information on regulatory reform.
14
Voir Annexe 3 pour une explication complète de la méthodologie des indices de réforme et de performance.
2. PAYSAGE ACTUEL DES RÉFORMES DANS LES SECTEURS DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE 31
La Figure 2 ci-dessous présente l’indice R-G composite qui combine l’IR et les données de la gouvernance à l’échelle
mondiale, attribuant les deux notes – de l’IR et des indicateurs de gouvernance – un poids égal (World Bank 2019).
Figure 2—Indice R-G présentant l’état des réformes (50 %) combiné avec les classements
80 au titre de la gouvernance (50 %)
70
60
50
40
30
20
10
0
KE A
UG RIA
EG A
SE YPT
AN WI
H IBIA
OR CA
TS CO
ZA NA
NZ N
D' DA
TO E
GO
GA ALI
BU B IA
A E
AL SO
BI N
NI E
M G HO
M RI IN
L A UI GU IA
IC A- EA
NG RE AU
PU C
IC
TI RU D
PU I
IC
M GAL
T LA
SO NA DA
YA
M ISIA
CO RW IA
AS A
NI YA
LE RIA
LIB AR
M B R
RE ND
QU
R
IN W
RE BLI
AN
BI
AG NI
RA BU HA
GE
TA OO
AM BO
BL
BL
ZI MB
ER
AN
AU EN
LIB
GO
N
OI
FR NE IN
A
M FRI
FA
TE AN
C
BO OC
AN
CO AN BISS
A
T
RK AB
GE
GE
AD TA
CA UN
NE
UT M
AL
SO
O, PU
W
GH
C
OZ A
IV
ER
A
C
RA G
OC
M
DE
NT
GOVERNANCE REGULATORY REFORM
O,
CE
NG
RESTRUCTURING REFORM COMPETITION REFORM
CO
PRIVATE SECTOR PARTICIPATION REFORM
Source : Les indices des auteurs sont tirés du questionnaire de l’étude complétés à l’aide de données de l’Indice de
réglementation de l’électricité de la BAD (2018) et des Indicateurs mondiaux de gouvernance de la Banque mondiale (2018).
100 Figure 3—Note de l’IP du secteur de l’électricité avec des indicateurs désagrégés, %
80
60
40
20
0
IA
PT
AL CA
RW A
SE N
D' IA
I
TA NDA
LE AL
ET IRE
IA
N
GO
I
M UE
BA N
E
IN IA
GA SO
M UR A
AG DI
GH A
GU A
UG YA
TS IA
GA A
M IA
A
R
AM AL
W
BW
E
AN
CA
I
NI
D
BI
AN
BO
NI
ZI OO
TH
IB
TE ER
OP
RK ER
AN
BO ER
AD UN
B
UT EGY
G
N
IN
M ALA
RI
FA
CA BIQ
AN
OZ M
O
TO
TA
BE
NE
M
KE
AS
SO
W
CO LIB
IG
G
AF
IV
ER
HI
NZ
ZA
A
NA
RI
N
M
H
AU
B
BU
SO
IMPROVING ACCESS ELECTRICITY AFFORDABILITY FINANCIAL VIABILITY OPERATIONAL EFFICIENCY RELIABILITY OF SUPPLY
Source : Les indices des auteurs sont tirés du questionnaire de l’étude, ont été complétés à l’aide de données de
SONELGAZ (2012), de la Banque mondiale (2014), de la Banque mondiale (2016), de l’EEHC (2017) et de NamPower (2017).
____________
15
L’indicateur de l’amélioration de l’accès, une composante de l’indice de Performance, comporte deux points de données pour chaque pays : (i) le taux de 2016 d’accès de l’électricité (part des ménages ayant
une connexion) et (ii) l’amélioration du taux d’accès dans la période de 2007 à 2016. Il n’est pas simplement une mesure pour comparer les niveaux d’accès d’électricité en un point précis dans le temps. L’annexe 3
présente une description complète de la méthodologie et les sources.
32 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
L’Indice de R-G et l’IP permettent de montrer la manière secteur de l’électricité – assure le suivi des résultats
dont les réformes interagissent avec la gouvernance techniques, financiers et opérationnels des systèmes
et la performance dans le secteur pour déterminer électriques africains, grâce aux données tirées des
les résultats. L’Indice de R-G combine les classements études antérieures, actualisées à l’aide des informations
de l’IR et six principaux indicateurs de gouvernance. les plus récentes disponibles. Cet indice mesure le
Ceci contribue à une dimension essentielle de la « niveau d’accès à l’électricité, d’abordabilité, de viabilité
qualité de la gouvernance » afin de mettre en évidence financière, d’efficacité opérationnelle et de fiabilité de
les relations entre les différents types de réforme et les l’approvisionnement dans les secteurs de l’électricité
résultats constatés dans le secteur de l’électricité en ce étudiés, dans la mesure où la disponibilité des données
qui concerne la performance technique, opérationnelle le permet. La combinaison de l’IP et de l’Indice de R-G
et financière (voir Figure 4). L’IP – fondé sur cinq permet de comprendre les résultats des réformes dans
mesures largement enregistrées de la performance du des pays et systèmes électriques très différents.
Source : Les indices des auteurs sont tirés du questionnaire de l’étude et ont été complétés à l’aide des données de SONELGAZ
(2012), de la Banque mondiale (2014), de la Banque mondiale (2016), de l’EEHC (2017), de NamPower (2017), de la Banque
mondiale (2018) et de la BAD (2018.)
centrales électriques et les raccorder au réseau national. est un élément clé du « modèle standard » des réformes
Nombre de pays ont expérimenté d’autres formes de proposées par les IFD à l’échelle mondiale depuis
PSP, notamment les contrats de concession permettant les années 80. Ce processus transforme une société
à une entité privée de gérer la société d’électricité (voir monopolistique intégrée de manière verticale, souvent
Section 2.3.). La concurrence pour l’achat d’une capacité en étages, par la séparation verticale des composantes
supplémentaire en vue de produire de l’électricité s’est « production », « transport » et « distribution » en des
faite essentiellement par le biais des ventes aux enchères sociétés distinctes. Éventuellement, un secteur de
des PEI. l’électricité peut connaître une transition par le truchement
de la séparation horizontale pour permettre à plusieurs
Les réformes ont des conséquences indirectes dans tous opérateurs de la production et de la distribution d’entrer
les domaines du secteur de l’électricité. En ce qui concerne en concurrence pour la vente en gros et la vente au détail
les efforts visant à combler les écarts en matière d’accès à sur un marché de l’électricité.
l’électricité et d’abordabilité de celle-ci, les réformes sont
loin de suffire à résoudre le problème (voir Section 2.4.). Les systèmes électriques en Afrique demeurent
La fourniture et le transport de l’électricité à faible coût sur caractérisés, pour l’essentiel, par la structure de sociétés
le continent nécessitent des investissements importants monopolistiques intégrée de manière classique (datant
et de vigoureux efforts de planification d’intégration d’avant les réformes de restructuration). Seuls 12 des 43
régionale, ainsi que des interconnexions de transport, dont pays représentés par les sociétés membres de l’ASEA
certains sont déjà en cours (Section 2.5.). Entretemps, les (plus la Tanzanie) ont séparé partiellement ou entièrement
ajustements institutionnels, structurels et de procédures le secteur de l’électricité. Dans ces cas, la société
que requièrent les réformes du « modèle standard » sont monopolistique a été scindée en sociétés distinctes pour
devenus la pierre angulaire des politiques d’ER de nombre la production, le transport, et la distribution (dans certains
de pays, frayant la voie à des acquisitions transparentes, cas, en ne séparant que la production ou la distribution
équitables et fiables et concurrentielles pour la production des autres composantes). Les autres pays ont maintenu
d’énergies renouvelables (Section 2.6.). des sociétés d’électricité intégrées avec différentes formes
de participation étatique et privée supplémentaires dans
2.1. Structure des sociétés d’électricité le secteur. Dans certains cas, la production, le transport
et la distribution ont été séparés des opérations, mais
La restructuration des sociétés d’électricité nationales demeurent la propriété d’une même société étatique
Figure 5— Structure des secteurs de l’électricité et participation du secteur privé dans les 43 pays
KEY
34 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
Encadré 1—Réformes de restructuration et acquis 28 PEI (pour une capacité totale d’environ
participation du secteur privé en Ouganda 588 MW et des investissements d’un montant
total de 1,6 milliard de dollars). UEGCL et UEDCL
L’Ouganda était bien placé pour bénéficier des ont fait l’objet de marchés de concession d’une
ajustements structurels de la Banque mondiale, durée de 20 ans, négociés en 2003 et 2005-
après deux décennies d’instabilité politique, de 06, respectivement. Umeme, le concessionnaire
coups d’État et de guerre civile qui ont connu chargé de la distribution, a reçu une approbation
leur dénouement au milieu des années 80. Les réglementaire pour plusieurs majorations
services d’électricité s’étaient effondrés : les taux tarifaires successives de 2006 à 2012, ainsi que
d’accès sont demeurés inférieurs à 5 % de la des subventions publiques visant à alléger les
population totale jusqu’en 1995, parmi les plus tarifs pour les consommateurs à faible revenu.
faibles d’Afrique ; la capacité de production a L’adoption de tarifs reflétant les coûts a garanti
baissé de 60 % ; et les pertes de distribution ont la santé financière d’Umeme ; la société a été
atteint 40 %. Un accord préliminaire sur les PEI partiellement cotée à la Bourse de l’Ouganda en
– relatif au projet hydroélectrique du barrage de 2012.
Bujagali – a été signé en 1993 afin de contribuer à Umeme a réduit de manière considérable les
combler le déficit d’approvisionnement. Mais, un pertes techniques ces dernières années, bien que
accord définitif n’a été conclu qu’en 2007, après les progrès en matière d’amélioration des résultats
une longue période d’acquisition (la centrale a aient été lents et la mise en œuvre des réformes
finalement été mise en service en 2012). La critiquée. Le concessionnaire subit des pressions
crise de l’électricité des années 90 a exigé politiques au cours de la période précédant le
des changements décisifs et un afflux urgent renouvellement prévu de sa concession. Sa
d’investissements dans le secteur. performance en matière de recouvrement et ses
Le Gouvernement ougandais (GoU) a lancé, résultats financiers sont satisfaisants, mais les
en 1998, l’un des programmes de réformes du tarifs sont élevés, en partie du fait de certains des
secteur de l’électricité les plus radicaux en Afrique, premiers PEI thermiques. L’Ouganda est parvenu
avec de nouveaux plans stratégique et de mise en à attirer l’investissement privé dans les PEI. Ses
œuvre pour la restructuration et la privatisation du premiers PEI thermiques étaient onéreux et
secteur de l’électricité, notamment le dégroupage contribuaient au niveau élevé des tarifs appliqués
vertical complet de la société. Une nouvelle loi sur aux consommateurs. Toutefois, les acquisitions
l’électricité a été adoptée en 1999. Au cours des récentes ont été plus compétitives, notamment
deux années suivantes, le GoU a majoré ses tarifs le programme GETFiT, qui a encouragé
d’électricité de 100 %, acquis le premier PEI en 30 l’investissement dans les petites centrales
ans et mis en place un organisme indépendant de hydroélectriques, à biomasse et à énergie solaire
régulation du secteur de l’électricité, ainsi qu’un photovoltaïque.
fonds et une commission dédiés à l’électrification L’Ouganda a sollicité récemment le concours de
rurale. Ensuite, le gouvernement a dégroupé la Chine pour la construction et le financement de
verticalement la société en trois entités pour la deux nouvelles grandes centrales hydroélectriques.
production (UEGCL), le transport (UETCL) et la Les coûts de ces centrales n’ont pas encore
distribution (UEDCL). été publiés. Mais, ils devraient être de nature à
Le GoU a encouragé une forte participation du rendre plus compétitifs les coûts de production
secteur privé, depuis la séparation des services et augmenter la capacité du pays à exporter de
de production et de transport en 2001. UETCL a l’électricité sur le réseau régional de l’EAPP.
____________
17
Dans son discours à la Nation devant le Parlement africain, le 7 février 2019, le Président Ramaphosa a annoncé l’intention de scinder Eskom en trois entités.
18
Kenya Power and Lighting Company, également appelée couramment KPLC. Une société séparée, KETRACO, reçoit les nouveaux investissements dans le transport.
2. PAYSAGE ACTUEL DES RÉFORMES DANS LES SECTEURS DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE 35
ALGERIA
LIBYA EGYPT
MALI
NIGER SUDAN
CHAD
NIGERIA
ETHIOPIA
CAR
CONGO,
KENYA
DEM
REPUBLIC
TANZANIA
Legend ANGOLA
ZAMBIA
0 - 20
21 - 40 NAMIBIA
41 - 60
61 - 80 SOUTH AFRICA
81 - 100
Source : Indice de régulation du secteur de l’électricité 2018 (BAD), reegle.com, et questionnaire de l’étude
La création d’entités de régulation indépendantes s’est de la réglementation et débouchant sur une concurrence
développée rapidement en Afrique depuis le début des totale entre la vente en gros et la vente au détail. La
années 2000 - 33 des 42 pays couverts par la présente première mesure, est dans certains cas, la seule adoptée
étude ont créé un régulateur de l’électricité – plus que dans les secteurs de l’électricité en Afrique, qui ont
tout autre type de mesure de réforme. Rien qu’au cours favorisé la réforme de la réglementation comme solution
des deux (2) dernières années, le Botswana, le Liberia, simple pour améliorer la surveillance, les procédures
le Maroc, et le Mozambique ont créé des organismes de réglementation et la transparence dans la prise de
de régulation de l’électricité ou adopté des lois stipulant décision. Seuls quelques (petits) secteurs de l’électricité
leur création. Dans les pays de l’OCDE, les réformes au ne disposent toujours pas de régulateur, notamment le
titre du « modèle standard » ont généralement suivi une Swaziland, la Sierra Leone et la Guinée équatoriale (voir
séquence recommandée, en commençant par la réforme Figure 6).
____________
19
L’indice de réforme de la règlementation (une dimension de l’IR) mesure le niveau de réforme de la règlementation dans le secteur de l’électricité, en fonction de quatre dimensions : l’existence d’un régulateur, sa
mission juridique, le nombre d’années depuis sa création (maturité) et l’indépendance par rapport aux parties prenantes. L’Annexe 3 présente la méthodologie complète de calcul de l’indice.
36 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
La réforme de la réglementation vise à créer des règles reflète les pratiques commerciales appropriées et l’on
du jeu équitables et fondées sur les règles pour les évite le détournement des ressources financières par les
fournisseurs et consommateurs d’électricité. Le sociétés. Les régulateurs gèrent également les régimes
régulateur doit veiller à répartir les risques de manière de délivrance des licences, en exigeant que certains types
égale entre les sociétés, les utilisateurs finaux et les d’opérateurs dans le secteur de l’électricité demandent
opérateurs privés dans le secteur. Cette responsabilité une licence pour la production, la vente, le transport ou la
comprend l’élaboration de régimes tarifaires permettant distribution de l’électricité dans des conditions spécifiques.
un recouvrement suffisant des coûts pour la société Ils jouent souvent un rôle important dans l’interprétation de
d’électricité, tout en assurant une électricité abordable et la politique et de la législation gouvernementales en vue
créant les conditions de la fourniture d’un service fiable, de les traduire en règles concrètes, notamment la mise en
sûr et garanti aux consommateurs. Pour ce faire, le place de tarifs de subventionnement (TR) ou les régimes
régulateur indépendant offre des incitations à la société de facturation nette pour les énergies renouvelables
pour qu’elle améliore sa performance technique et distribuées.
commerciale. Grâce à ces incitations, le coût du service
distinctes de celles de l’État ou d’autres ingérences), donne a commencé à changer au cours de la dernière
ainsi que les opérations et la prise de décision (par décennie, étant donné que les projets financés par la
exemple, le processus de nomination des commissaires Chine et les PEI, financés en grande partie par le secteur
est transparent et équitable et il leur est interdit d’avoir privé et les IFD grâce à des montages construction-
des relations de travail, d’investisseur ou de consultant propriété-exploitation (BOO), sont devenus les sources
avec les sociétés soumises à leur régulation au cours d’investissement les plus dynamiques dans le secteur
d’une période donnée, suivant la fin de leur mandat). énergétique de la région.
L’indépendance permet au régulateur d’évaluer avec
exactitude la situation financière et le coût du service Les PEI se sont répandus à travers l’Afrique et sont
de la société, ce qui est essentiel pour prendre des maintenant présents dans plus de 30 pays. À l’échelle
décisions équitables sur les régimes tarifaires et les des sociétés d’électricité (capacité de production
normes de service. Selon l’IRE de la BAD (2018), seuls supérieure à mégawatts) (MW)), 270 montages PEI
deux des quinze régulateurs nationaux étudiés (Nigeria et sont en cours d’exploitation ou en construction en
Tanzanie) ont des règles de bonnes pratiques interdisant Afrique (MIRA database 2019). Cela représente
tous liens financiers afin d’assurer l’indépendance des environ 51,7 milliards d’investissements et 27,1 GW de
commissaires de la régulation par rapport aux sociétés capacité de production installée20. La Figure 7 montre
soumises à la régulation (voir encadré 2). La plupart des les pays du continent qui ont accueilli des processus
autorités de régulation étudiées tirent leurs revenus de d’appel d’offres internationaux pour la production
prélèvements effectués sur des sociétés soumises à d’électricité (représentée par une étoile), et met en
leur régulation, y compris parfois des redevances de évidence pour chaque pays la note de l’indicateur de
licence, bien que près d’un tiers continue de dépendre réforme réglementaire (RRI) (en bleu). Les réformes
du budget de l’État (en totalité ou en partie) pour le permettant l’investissement extérieur dans la production
financement de leurs activités de régulation. Par ailleurs, sont essentielles pour permettre cette croissance
l’étude de l’IRE de la BAD a montré que le budget de 68 de l’investissement, ainsi que d’autres mesures
% des régulateurs est approuvé par le gouvernement, réglementaires, ce qui permet à son tour aux sociétés
entremêlant davantage les intérêts du gouvernement et de production privées de vendre de l’électricité à travers
ceux du régulateur. le réseau national de distribution aux utilisateurs tiers,
Le manque d’indépendance et de capacité du régulateur y compris des sociétés de distribution, ou les grands
contribue aux difficultés financières de la société, clients industriels et commerciaux. Environ la moitié
lorsque le régulateur n’a pu créer une structure tarifaire de ceux qui ont répondu au questionnaire signalent
reflétant pleinement les coûts du service de la société. que les producteurs et distributeurs indépendants ont
L’IRE de la BAD montre que moins de 10 % des sociétés des opportunités d’échanger directement le courant
sondées ont des tarifs reflétant le coût pour le secteur moyennant rémunération. La Figure 8 montre la part
résidentiel, tandis que seuls 20 % en ont dans les croissante des capacités installées par les IPPs.
catégories commerciale et industrielle. Par ailleurs, les
régulateurs assurent la qualité du service en élaborant
des normes de service et assurant le suivi et la mise en
œuvre. L’analyse en temps opportun de la performance
technique de la société revêt une importance primordiale
afin de s’assurer qu’elle honore ses obligations à l’égard
des consommateurs. Cependant, selon le rapport
de l’IRE, seuls quelques régulateurs effectuent des
vérifications fréquentes conformément aux meilleures
pratiques (tous les 3 mois).
2.3. Le financement et la participation du
privé au secteur énergétique vus à travers le
prisme des réformes
ALGERIA
LIBYA EGYPT
MALI
NIGER SUDAN
CHAD
NIGERIA
ETHIOPIA
CAR
Legend CONGO,
KENYA
Has hosted interna9onal DEM
REPUBLIC
compe99ve bidding process(es) TANZANIA
for genera9on
Regulatory Reform Indicator Score ANGOLA
0 - 20 ZAMBIA
0 - 20
21 - 40
21 - 40 NAMIBIA
41 - 60
41 - 60
61 - 80
61 - 80 SOUTH AFRICA
81 - 100 81 - 100
Figure 8—Les producteurs d’électricité indépendant (PEI) en Afrique : part de la capacité totale
installée (en pourcentage) et investissements par pays (en dollars EU)
MALI NIGER
CHAD SUDAN
NIGERIA SOUTH
SUDAN ETHIOPIA
KENYA
Legend
CONGO, DEM
Share of IPPs in total Total IPP investment REPUBLIC
installed capacity (for plants >5MW) TANZANIA
0% - 20%
< USD 0.5 Bn ANGOLA
21% - 40%
ZAMBIA
41% - 60% USD 0.5 Bn – 1.3 Bn
NAMIBIA
61% - 80%
> USD 2 Bn
81% - 100%
Source : les auteurs d’études et base de données MIRA (2019). SOUTH AFRICA
2. PAYSAGE ACTUEL DES RÉFORMES DANS LES SECTEURS DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE 39
Les réformes du «modèle standard», y compris la réformes et conservent des structures opérationnelles
participation du secteur privé (PSP), présentent traditionnelles. Il est essentiel de planifier efficacement
également un moyen d’améliorer l’efficacité la production pour montrer que le pays s’est bien
opérationnelle grâce à la gestion privée du secteur, préparé aux besoins et anticipé la production pour une
ainsi que les flux d’investissements en immobilisations. période définie. Assurer des contrats bancables avec
Le transfert d’une entreprise ou d’un actif public sous le un fournisseur de sociétés d’électricité financièrement
contrôle de l’État à la propriété ou à la gestion privées viable, des garanties de risque pour soutenir les accords
est une solution classique au défi de l’inefficacité et de d’achat d’énergie (PPA), un environnement politique
la mauvaise performance technique et commerciale du stable et prévisible, et des processus d’appel d’offres
service public. Un tel transfert peut se produire selon des bien conçus et gérés : autant de facteurs qui ont joué
mécanismes différents et à des degrés différents dans dans différents contextes pour renforcer la confiance
les filières de l’énergie. Dans certains cas, les contrats des investisseurs et minimiser les risques.
PSP sont des concessions sur des durées fixes allant La qualité de la gouvernance (compte tenu des
jusqu’à 30 ans, mais ils peuvent également prendre la niveaux de corruption, de la stabilité politique, de l’état
forme d’une privatisation complète et illimitée. Un secteur de droit, de l’environnement réglementaire et de la
de l’énergie introduira généralement la PSP dans une responsabilisation du public) est un facteur déterminant
filière pour commencer — souvent pour la production, important qui sous-tend les niveaux de PSP et les
avec des mécanismes de BOO ou de construction- investissements dans le secteur énergétique. Les
propriété-exploitation-transfert (BOOT), et parfois dans États fragiles ou touchés par un conflit luttent contre la
des services de distribution incluant des contrats de faiblesse de la gouvernance et des politiques précaires
franchisage. qui créent des obstacles supplémentaires pour attirer
les investissements du secteur privé. Des pays comme
Des ententes de concession à long terme, contrats l’Angola qui mettent en œuvre des réformes modérées
d’affermage ou de bail, des contrats de gestion privée dans les PSP, mais qui ont des indices de gouvernance
et des programmes de privatisation complète ont faible, y compris la responsabilisation, l’état de droit
été déployés dans tous les segments du secteur de et le contrôle de la corruption, affichent des taux
l’électricité, y compris dans le transport. Plus de la d’investissement privé plus lents. En revanche, l’Afrique
moitié des personnes qui ont répondu au questionnaire du Sud a bénéficié de flux d’investissement élevés dans
ont signalé qu’au moins une de ces formes de PSP avait la production à l’origine du secteur privé, même avec
été utilisée dans leur secteur énergétique. Les pays qui une structure traditionnelle de sociétés d’électricité en
ont des accords d’affermage ou de concession à long situation de monopole. Une programmation bien conçue
terme en cours comprennent la Côte d’Ivoire, le Mali, le et échelonnée dans le temps prévisible donne un élan
Cameroun et l’Ouganda ; la société ghanéenne, ECG, important à ce succès, ainsi que des notations de
a également conclu un accord de concession en 2019. gouvernance élevées dans la plupart des domaines (voir
Ces arrangements peuvent être couronnés de succès encadré 1).
et durer ans le temps. Le gouvernement camerounais,
par exemple, a prolongé sa concession d’Eneo de 2001 La filière du transport n’a pas bénéficié du même afflux
pour 10 années supplémentaires en 2017. Ils peuvent d’investissements privés que la production dans les
également faire l’objet de controverses, notamment pays africains, notamment dans les pays sub-sahariens,
en cas de processus d’acquisition non transparents. où seule une poignée de membres ont une certaine
Dans le cadre de ces concessions, les investisseurs forme de participation privée au transport. La plupart
privés peuvent parfois être soupçonnés de tirer des des pays continuent de financer les investissements
profits abusifs, ou d’aboutir à une privatisation pure et pour le transport directement à partir des recettes des
simple, avec les craintes associées de voir l’État perdre sociétés d’électricité ou du budget de l’État, ce qui
le contrôle public d’actifs essentiels. Cela entraîne constitue une contrainte majeure à l’expansion du réseau.
l’annulation ou le non-renouvellement des contrats de De nombreux pays comptent sur les financements
concession et de gestion privée, comme dans le cas concessionnels des IFD ou même des subventions des
du Sénégal, qui a mis fin à la concession de SENELEC pays donateurs. L’investissement dans le transport, tant
après seulement 2 années en 2001, ou le cas récent de domestique que transfrontalier, est essentiel pour relier
SEEG au Gabon. les sources de production d’électricité à faible coût et à
grande échelle (en particulier des nouveaux PEI solaires
L’ampleur des réformes adoptées dans les pays africains et éoliennes) aux centres de distribution importants des
est généralement liée au montant des investissements villes. L’Afrique subsaharienne dispose d’un réseau de
réalisés par le biais de PCIP. Par exemple, des pays transport combiné plus petit que celui du Brésil. Par
comme l’Ouganda et le Kenya, qui ont des réseaux de habitant, l’Afrique a moins de kilomètres de lignes de
transport indépendants, ont attiré le plus de projets PEI. transmission que les autres régions du monde (bien
Dans plusieurs cas, comme l’Algérie et l’Afrique du Sud, qu’ayant une masse terrestre beaucoup plus importante
des facteurs supplémentaires ont contribué à stimuler et une population dispersée, nécessitant plus de
les investissements privés, même lorsque les aspects capacité de transport que l’on ne s’y attendrait).21 (World
centraux du secteur de l’énergie n’ont pas fait l’objet de Bank/PPIAF 2017) Seuls 11 des personnes qui ont
____________
21
Les lignes de transport du Brésil s’étendent sur plus de 137 000 km, contre 112 000 km en Afrique subsaharienne. Global transmission Report, «Mise à jour sur le secteur brésilien de l’énergie : principaux points
saillants de 2017», 8 janvier 2018, https://www.globaltransmission.info/archive.php?id=32000; Banque mondiale/Fonds consultatif public-public pour l’infrastructure : Partenariats public-privé pour le transport de
l’électricité en Afrique, 2017, https://openknowledge.worldbank.org/bitstream/handle/10986/26842/LinkingUp.pdf?sequence=3&isAllowed=y.
40 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
Encadré 3—Réformes et participation des privés Lancé en 2011, le REIPPPP invite les PEI à des
en Afrique du Sud séries successives de ventes aux enchères pour
soumettre leurs propositions de développement
Le département de l’énergie de l’Afrique du de projets à partir de vents terrestres, de solaire
Sud a conçu un programme d’appel d’offres, PV, d’énergie solaire concentrée (CSP), de petits
Renewable Energy Independent Power Producer projets d’hydroélectricité, de biomasse, de biogaz
Procurement Programme (REIPPPP), pour ou de gaz d’enfouissement. Les entreprises,
stimuler l’investissement privé dans la production PEI soumissionnaires, ou les consortiums,
d’ER à l’échelle des sociétés d’électricité. Le doivent avoir parmi leurs propriétaires une
plan national de développement et le plan intégré partie importante de locaux, y compris les noirs
de ressources ont fixé les objectifs stratégiques et les fiducies communautaires, ainsi que des
suivants pour l’Afrique du Sud en 2010 : investissements étrangers directs.
Le programme a stimulé les investissements PEI
• Investir dans l’infrastructure pour soutenir ses rapides en Afrique du Sud, et en plus de 5 ans,
objectifs économiques et sociaux, y compris a entraîné une baisse des tarifs des soumissions
10 000 MW de capacité additionnelle à de 80 pour cent pour le solaire PV solaire et de
l’horizon 2019 (une croissance de 23 pour 50 pour l’éolienne, à environ 0,043 dollar EU/
cent sur les niveaux de 2010), kWh pour les dernières offres (Eberhard et Naude,
• Augmenter la production d’ER pour rattraper 2017). Quelque 24 projets ont été sélectionnés,
17 800 MW de bouquet énergétique pour pour une capacité de plus de 2000 MW, et 4
2030, afin de répondre aux besoins en milliards de dollars EU d’investissements.
électricité du pays
répondu au questionnaire ont pu fournir des données dépasser les concurrents (voir encadré 3). En plus de
sur l’importance de l’extension du réseau de transport la technologie de production et du prix de l’énergie, les
depuis 2010 (en kilomètres) ; les informations sur les propositions soumises au titre du REIPPP sont évaluées
PEI était beaucoup plus abondantes. Le Nigéria, avec 8 en fonction du contenu local de l’installation proposée
000 km ajoutés depuis 2010, a rapporté la plus grande (définie sur la base des coûts en immobilisations et de
extension de son réseau de transport au cours des coûts des services pour la construction de l’installation),
dernières années. Plusieurs pays, tels que le Mali et le de l’estimation de la création d’emplois dans le cadre
Cameroun, ont mis en place des concessions privées, du projet envisagé, de la part de la propriété locale
comme mentionné précédemment, comme moyen de l’installation et des mesures de développement
d’attirer les capitaux dans le transport. Le Gabon et communautaire local (entre autres facteurs) (IRENA
la Côte d’Ivoire ont introduit la PSP dans le transport 2014). Dans le même ordre d’idées, une loi et une
à long terme à travers des contrats d’affermage, avec politique adoptées au Ghana prévoient des conditions
un service intégré verticalement, où les investisseurs en matière de contenu local pour l’emploi et la fabrication
ont convenu d’exploiter et de maintenir les lignes de dans l’industrie pétrolière et gazière (Baako 2014).
transport, mais sans être obligés de financer les actifs du
transport. La Zambie est le seul exemple où une part du 2.4. Développer les raccordements au
réseau de transport est détenu indéfiniment par le privé,
réseau électrique
par l’entremise de la Copperbelt Energy Corporation
(société d’électricité créée à l’origine pour desservir
L’accès à l’électricité reste un problème épineux pour
l’industrie minière dans la partie nord du pays).
la plupart des pays africains, en particulier au sud
du Sahara, où quelque 600 millions de personnes
Certains pays ont décidé d’atténuer le risque perçu
manquent encore d’une connexion électrique (Figure
d’influence et de contrôle étrangers par le biais
9). L’insuffisance de l’offre dans la majeure partie du
d’investissements du secteur privé dans le secteur
continent freine la croissance économique depuis des
de l’énergie, en stipulant un seuil de participation ou
décennies. Pour répondre aux énormes besoins de
de propriété locale. Ces seuils sont souvent appelés
développement des systèmes d’alimentation pour fournir
exigences en matière de contenu local dans le contexte
de l’électricité aux foyers et aux entreprises à travers
de l’évolution des énergies renouvelables, et sont souvent
le continent, la plupart des pays ont fixé des objectifs
liés à des processus d’approvisionnement tels que des
d’électrification ambitieux et des plans pour mobiliser
enchères concurrentielles ou des régimes de rachat
les capitaux, que ce soit sous forme de stratégies de
de tarifs (voir 2.6) (OECD 2015). Le programme phare
développement national ou dans le contexte d’initiatives
d’enchères de l’Afrique du Sud, le REIPPPP, incorpore
internationales telles que le programme Energie durable
plusieurs facteurs socio-économiques spécifiques à
pour tous des Nations Unies et le programme NDEA de
l’échelle locale ainsi que des conditions minimales,
la Bad.
que les promoteurs participants doivent respecter pour
2. PAYSAGE ACTUEL DES RÉFORMES DANS LES SECTEURS DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE 41
Les réformes du «modèle standard» dans le secteur La complémentarité des politiques, de la planification,
de l’électricité n’avaient pas pour objectif préliminaire du financement et les agences d’électrification créées
d’accélérer la création de nouvelles liaisons électriques à cette fin, contribue à orienter les réformes du secteur
dans les zones sous-électrifiées. Leurs principaux de l’électricité, les efforts pour étendre l’électrification,
objectifs sont d’améliorer l’efficacité et la performance l’accès à l’énergie et l’accessibilité économique pour
économique du secteur en améliorant la performance les ménages pauvres. Ces stratégies ciblées sont
des entreprises d’approvisionnement en électricité et essentielles pour accélérer les taux d’électrification,
l’environnement de l’investissement pour le financement par exemple avec une Agence et des politiques
local et international. Les produits imaginés comprennent d’électrification rurale dédiée.
des sociétés d’électricité performantes, techniquement
et financièrement solides, un système de réglementation La plupart des pays africains, soit près de 70 pour
indépendant et efficace, une planification de l’extension cent des enquêtés, ont créé des agences nationales
à moindre coût économiquement efficace et un afflux chargées de la planification et de l’élaboration des
d’investissements externes pour financer le système de politiques d’électrification rurale et de mise en œuvre
développement de l’alimentation. Bien sûr, ces produits des projets d’électrification rurale. Certains pays ont
destinés aux réformes sont des ingrédients puissants créé des fonds ou des entités distincts dont la tâche
pour catalyser l’essor du système électrique, stimuler consiste à recevoir et à décaisser des fonds pour ces
la capacité des sociétés d’électricité à étendre la grille projets. Dans d’autres pays comme le Ghana, des taux
aux centres précédemment non électrifiés, construire d’électrification exceptionnels ont été obtenus grâce
de nouvelles connexions, et assurer une capacité de à une politique et une collaboration ciblées entre les
production suffisante pour approvisionner la clientèle de organismes du gouvernement central et la compagnie
manière fiable. d’électricité (sans passer par la création d’une agence
d’électrification rurale distincte).
ALGERIA
LIBYA EGYPT
MALI
NIGER SUDAN
CHAD
NIGERIA
ETHIOPIA
SOUTH
SUDAN
CONGO,
KENYA
DEM
REPUBLIC
TANZANIA
Legend
0% - 20% ANGOLA
ZAMBIA
21% - 40%
41% - 60%
NAMIBIA
61% - 80%
Les mini-réseaux et les modèles d’alimentation de fournir de l’électricité de haute qualité aux collectivités
électrique hors réseau sont devenus attrayants et qui, autrement, auraient dû attendre des années pour
compétitifs pour les pays ayant de communautés être connectées au réseau principal (voir encadré 2).
éloignées et sous-électrifiées. L’attention s’est Contrairement aux solutions individuelles telles que les
concentrée en particulier sur les systèmes qui exploitent systèmes solaires à domicile, les mini-réseaux peuvent
les petites technologies modulaires renouvelables offrir de l’énergie non seulement pour les utilisations de
de production. Il s’agit de réseaux électriques base, mais aussi à des fins de production telles que les
localisés reliant plusieurs clients d’une communauté petites applications commerciales et industrielles. Ils
ou d’un village, utilisant souvent des ressources peuvent se développer et fonctionner sur la base de la
renouvelables disponibles sur place telles que le solaire propriété communautaire, privée ou publique, en fonction
photovoltaïque (PV), la biomasse, ou de petites centrales des politiques locales, des paramètres réglementaires et
hydroélectriques. Les mini-réseaux offrent la possibilité des modèles de financement disponibles.
Encadré 4—L’électrification hors réseau et en national, EWURA, qui exempte les promoteurs
mini-réseau en Tanzanie des exigences de licences et de revues tarifaires
sous certaines conditions. Les nouveaux projets
Plus de 80 pour cent de la population rurale de doivent être inscrits auprès de la REA mais ne
Tanzanie ne disposent pas d’une connexion nécessitent pas d’approbation d’EWURA. La
électrique (Banque mondiale, 2016). Pour moitié des projets existants ont moins de 100 kW
combler ce fossé, l’Agence de l’énergie rurale de capacité, et dans ce cas ils ne relèvent pas de
(REA) du pays a élaboré des politiques et des la réglementation tarifaire.
projets depuis 2005 qui encouragent les petits Le succès naissant du secteur du mini-réseau en
producteurs d’énergie (SPP) à investir et à fournir Tanzanie a attiré l’attention et els financements
des services d’électricité aux communautés internationaux. La REA collabore avec des
rurales, en ciblant les zones où l’extension du partenaires de développement, dont la BAD, au
réseau serait coûteuse et lente. programme de développement du marché du
Le pays est maintenant un leader régional dans mini-réseau vert pour favoriser le développement
le développement des mini-réseaux. Depuis de mini-réseaux à énergie renouvelable. La plupart
l’adoption de sa politique et de son cadre des systèmes de mini-réseaux et de la capacité
réglementaire novateurs en 2008, le nombre de installés depuis 2008 utilisent des technologies
mini-réseaux a doublé dans le pays et le taux renouvelables, y compris la biomasse, le PV
d’accès à l’électricité rurale a fait un bond de solaire, les petits systèmes hydroélectriques et
plus de 800 pour cent. Plus de 110 systèmes de hybrides (sources renouvelables avec générateurs
mini-réseaux fonctionnent maintenant et vendent diesel de secours). Appuyé par des partenaires
de l’électricité aux clients ruraux. Les mini- au développement, le gouvernement tanzanien
réseaux appartiennent à des entreprises privées, a également offert des mécanismes financiers
des collectivités locales, ainsi qu’à l’entreprise pour faciliter l’accès au financement au cours du
nationale d’électricité (TANESCO) ou à des processus d’élaboration du projet. La REA a offert
organisations à but non lucratif. des subventions de compatibilité et de rendement
Le succès du secteur du mini-réseaux en Tanzanie aux projets de mini-réseaux (grâce à une facilité
est dû en partie aux réglementations légères appuyée par la Banque mondiale).
élaborées par l’organisme de réglementation
Plus de la moitié des répondants à l’étude — tous en 2.5. Efforts d’intégration régionale : faciliter
Afrique subsaharienne — signalent l’existence d’une les échanges d’énergie et la production à
industrie du mini-réseau dans le pays. Certains, comme
le Zimbabwe, qui a presque 500 de mini-réseaux en
moindre coût
exploitation, intègrent le développement des mini-
Les efforts en cours visant les interconnexions
réseaux à travers les modèles de propriété privée et
électriques régionales demeurent un outil important pour
publique comme un outil central de la stratégie nationale
soutenir des performances optimales du système. Les
d’électrification. D’autres, comme la Tanzanie, ont adopté
pays africains peuvent mettre à profit les interconnexions
des conditions réglementaires spécifiques pour les mini-
de transport pour créer des économies d’échelle, en
réseaux et offrent des voies de financement spéciales
particulier lorsque les systèmes d’électricité nationaux ne
pour les développeurs de mini-réseaux (encadré 4).
sont pas suffisamment importants pour bénéficier de ces
économies. L’interconnexion crée des débouchés pour
le commerce énergétique, en permettant aux partenaires
d’optimiser leurs coûts d’énergie, de se protéger contre
les chocs des prix du carburant et d’être soulagés en cas
2. PAYSAGE ACTUEL DES RÉFORMES DANS LES SECTEURS DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE 43
de déficit de production. Financée par la BAD, une étude production partagée, citons le barrage de Manantali,
récente intitulée Roadmap to the New deal on Energy in géré par la société tripartite Mali-Mauritanie-Sénégal,
Africa : An Analysis of Optimal Expansion and Investment Société de gestion de l’Energie de Manantali, preuve
Requirements (feuille de route pour le Nouveau pacte de coopération multinationale réussie en matière de
pour l’énergie en Afrique : analyse des conditions planification rentable de la production et du transport
optimales d’expansion et d’investissement), prévoit des transfrontaliers depuis sa création en 1997.
besoins totaux en investissement de 8,9 milliards de
dollars US dans les interconnexions régionales de 2018 Dans de nombreux cas, le commerce de l’énergie en
à 2030 pour soutenir un plan d’investissement et de Afrique est en retard sur les cibles fixées par les pools
développement de l’énergie moins coûteuse sur tout le énergétiques, dont beaucoup souffrent de déficits de
continent.(Multiconsult 2018) financement, de l’insuffisance des investissements et
de l’entretien des lignes de transport pour permettre
Les investissements dans le transport constituent une la capacité d’échanges souhaitée. Les IFD sont
fraction modeste du coût final de l’approvisionnement particulièrement actives dans le financement des
en électricité, avec des avantages importants pour les interconnexions de transport. La BAD a cofinancé à
régions et les pays. La même étude estime qu’un tel différents stades plusieurs interconnexions majeures
investissement dans l’intégration et le commerce de telles que l’interconnexion Côte d’Ivoire-Libéria-Sierra
l’énergie permettrait une réduction annuelle des coûts de Leone-Guinée, l’interconnexion Zambie-Zimbabwe,
3,4 milliards de dollars EU des coûts de production, ce l’interconnexion Zambie-Tanzanie-Kenya, dont
qui est particulièrement avantageux pour les systèmes l’achèvement est prévu en 2021 (Olingo 2018a and
électriques nationaux plus petits et isolés. 2018b). La Banque mondiale cofinance l’interconnexion
entre le Kenya et l’Éthiopie (ligne DC à haute tension
Le plan d’action prioritaire du programme de l’Union de 500kV de plus de 1000 km), qui devrait être
africaine pour le développement des infrastructures opérationnelle en 2019. En 2018, elle a annoncé un
en Afrique (PIDA-PAP) a permis de mettre en évidence financement de 455 millions de dollars EU portant sur
quatre grandes interconnexions de transmission une interconnexion entre la Tanzanie et la Zambie. La
nécessaires en 2020 et 2040 pour transporter privatisation pure et simple n’est pas une solution
l’électricité à faible coût vers les acheteurs en Afrique claire pour améliorer l’investissement et le maintien des
et plus loin et au-delà. Le plan d’action prioritaire (PAP) actifs de transport dans le contexte de petits systèmes
a identifié neuf centrales hydroélectriques qui offriraient d’alimentation centralisée. Mais d’autres modes de PSP,
une production de moindre coût pour le continent, et tels que le PPP, peuvent contribuer positivement au
fait noter les investissements d’intégration régionale financement du développement des réseaux de haute
nécessaires pour évacuer correctement l’énergie ainsi tension, tout en maintenant la propriété publique. Ces
produite vers les pays qui en seraient bénéficiaires. Les programmes se poursuivent au Kenya sur des lignes
quatre projets de transmission — le corridor de transport choisies.
de l’énergie de l’Afrique de l’Ouest, l’interconnexion de
transport de l’Afrique centrale, le corridor de transport Les institutions nationales et régionales doivent
Nord-Sud et l’interconnexion de transport en Afrique du coordonner leurs actions pour créer des politiques,
Nord — varient selon les estimations, passant de 1,2 des réglementations et des mécanismes d’application
milliards de dollars EU à 10,5 milliards de dollars EU communs aux acteurs participant au commerce
(World Bank/PPIAF 2017) transfrontalier. Les politiques et réglementations
nationales doivent s’aligner sur celles du niveau
Depuis les années 1990, les différents pools régional pour garantir la cohérence du marché. Les
énergétiques, les réseaux électriques communs, pools énergétiques ont besoin de cadres rationalisés
ainsi que les systèmes binationaux de production pour organiser la planification et le fonctionnement
et de transport d’électricité en Afrique ont fourni des systèmes et établir des règles commerciales pour
des possibilités pour la planification régionale et les échanges énergétiques (World Bank 2019). Les
l’élaboration de politiques énergétiques internationales. contrats doivent être respectés. Le régulateur régional
Dans de nombreux cas, l’établissement de pools ou un autre organisme désigné a besoin de mandats
énergétiques a obligé les pays à mettre en œuvre clairs pour régir le marché, y compris les mécanismes
des réformes commerciales et réglementaires pour commerciaux, les prix du transport et la résolution des
permettre l’adoption de règles et de mécanismes différends. Les responsabilités et les pouvoirs devraient
d’application communs. Le Comité maghrébin de être clairs pour faire respecter les règlements et trouver
l’électricité (COMELEC) a été créé en 1989 entre le des issues aux différends.
Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Libye et la Mauritanie pour
promouvoir l’échange d’énergie et l’interconnexion entre Les incertitudes politiques et l’instabilité des relations
les membres. Le premier véritable pool énergétique a été entre pays voisins sapent la confiance nécessaire pour
le pool énergétique de l’Afrique australe (SPU), fondé en soutenir les marchés transfrontaliers. Les parties doivent
1995, avec 16 membres représentant 13 pays. Le pool d’abord établir une base solide de confiance, basée sur
énergétique ouest-africain (WAPP) a suivi en 2000 entre le réalisme des affaires. Les questions de souveraineté
14 pays. Sept pays composent le pool énergétique de nationale et de sécurité énergétique peuvent compliquer
l’Afrique de l’est (EAPP) et 10 pays sont membres du les relations qui sous-tendent le commerce de l’énergie.
pool énergétique centrafricain. Parmi les initiatives de Les pays sont prudents quant au recours à un pays
44 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
étranger ou à un tiers pour assurer leur sécurité de production renouvelable variables bien établies.
énergétique de base, mais ils peuvent être convaincus L’enquête montre qu’une loi, une politique ou une
des avantages partagés évidents de la coopération stratégie visant à promouvoir les énergies renouvelables
régionale. L’accord continental, au plus haut niveau (ER) ont été mises en œuvre dans tous les pays étudiés.
autour des projets du corridor d’interconnexion de la Investir dans l’extension des capacités de production
PIDA, et l’accélération des efforts pour créer les marchés grâce aux énergies renouvelables offre à l’Afrique un
régionaux de l’énergie dans chaque pool énergétique, début de transition vers les filières de la croissance
sont des exemples convaincants de la volonté politique verte et la décarbonisation du secteur de l’énergie, tout
existante. en renforçant la sécurité énergétique des pays et en
réduisant leur dépendance à l’égard des importations
2.6. Énergies renouvelables et transition de combustibles. Cela crée une occasion pour les pays
de concevoir et de passer à de nouveaux dispositifs sur
vers la croissance verte
le marché de l’énergie qui répondent à leurs besoins
et accélèrent les investissements dans la production
Des percées sans précédent dans les prix de l’énergie
d’énergie propre, par des mécanismes de distribution
solaire et éolienne, au cours de la dernière décennie,
en réseau ou hors réseau.
ont incité les pays africains à tirer parti des technologies
Wind, 18,5%
MSD/HFO, 4,5%
OCGT, 5,0%
de nouveaux projets d’ER, tandis que la concurrence kWh (cinq cents US), notamment en Namibie, en Afrique
permet à l’acheteur de solutions d’énergie nouvelle du Sud, au Sénégal, en Éthiopie, au Maroc et en Egypte.
d’avoir les meilleurs prix. En Afrique du Sud, des séries L’autorité contractante offre généralement un PPA d’une
d’appels à concurrence ont entraîné des réductions de capacité spécifiée d’ER et pour une période déterminée.
prix sur les centrales éoliennes et solaires de plus de Cela inclut parfois une garantie gouvernementale pour
75 pour cent (voir encadré 3). Les réductions de coûts atténuer les risques, et occasionnellement du contenu
sur toute la chaîne de valeur contribuent à des prix local ou d’autres conditions spécifiques.
d’enchères plus bas. Le programme bien connu REIPPP
a amené une chute rapide des coûts de financement Étendre la capacité en ER au-delà des investissements
et de développement. Les coûts d’ingénierie, à l’échelle des sociétés d’électricité repose sur des
d’approvisionnement et de construction (EPC) ont politiques et mécanismes de financement traditionnels
également diminué progressivement grâce à un marché ciblés tels que FiT, le comptage net et les cibles ou
en maturation et à des volumes de production plus conditions des énergies renouvelables. Les FiT ont été
importants. Le solaire PV et l’éolienne sont maintenant les introduites dans près de la moitié des pays répondants
moins chères des nouvelles technologies de production au questionnaire, dont l’Egypte, le Ghana (voir encadré
en Afrique du Sud. 5), le Kenya et la Namibie. La transition vers les
économies vertes et la décarbonisation des industries
Plus de la moitié des répondants à l’étude déclarent avoir enregistrées à l’échelle internationale ont concentré
accueilli des appels d’offres pour l’achat concurrentiel de de plus en plus les financements des bailleurs autour
PEI (Figure 11). La plupart d’entre ont acquis la capacité des énergies renouvelables, notamment par le soutien
photovoltaïque solaire, ainsi que d’autres technologies, technique aux gouvernements nationaux pour la mise en
y compris l’énergie hydroélectrique, éolienne, et les œuvre des lois et politiques d’ER. D’autres technologies
technologies thermiques. Les enchères organisées dans vertes, telles que le stockage des batteries, pour varier la
tous les coins du continent ont maintenant eu pour effet production, et les véhicules électriques, sont à un stade
des prix de l’énergie descendant jusqu’à 0,05 dollar EU/ naissant en Afrique (voir la section 4.2.1).
ALGERIA
LIBYA EGYPT
MALI
NIGER SUDAN
CHAD
NIGERIA
ETHIOPIA
SOUTH
SUDAN
CONGO,
KENYA
DEM
REPUBLIC
TANZANIA
Auc,on—program(s) announced
NAMIBIA .
SOUTH AFRICA
46 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
15
10
0
Need to improve Part of broader World Bank, Lack public Need to aDract Financial crisis Environmental Renewable
performance economic AfDB, other DFIs finance to fund private concerns energy
reforms investments investment
Source : questionnaire de l’étude.
L’on donne le plus souvent comme raison d’être des comme conduisant ou provoquant des réformes, ou
réformes du secteur de l’énergie la nécessité d’améliorer comme les facilitant par leur assistance technique et
les performances, d’attirer les investissements et leurs ressources financières. Les répondants citent
de remédier à la pénurie de ressources ou à la crise également le leadership politique, les tendances et les
du secteur. En Afrique subsaharienne, en particulier, expériences internationales, et un consensus autour de
le financement des infrastructures est en manque la gouvernance sectorielle comme facteurs déterminants
d’approvisionnement, et les gouvernements se sont pour lisser la voie de la réforme. La Figure 12 montre la
souvent appuyés sur l’aide des bailleurs depuis les prévalence, parmi les répondants au questionnaire, des
indépendances. Les bailleurs internationaux et les éléments moteurs des réformes.
IFD sont présentés dans la plupart des réponses
0
Poor governance, Labour unions Regulatory en8ty Macroeconomic issues Poorly explained Poli8cal instability
corrup8on benefits
Source : questionnaire de l’étude.
3. LES RÉFORMES DANS LEURS CONTEXTES POLITICO-ÉCONOMIQUES 49
Les échecs de la gouvernance et des intérêts politiques que l’organisme de réglementation n’était pas en mesure
enracinés sont plus susceptibles d’être cités comme de tenir l’utilité responsable de sa performance selon
des facteurs qui paralysent le progrès ou le succès les conditions des examens tarifaires. L’opposition du
des réformes (see Figure 13). Cette section examine les syndicat aux réformes a aggravé la situation, réduisant
contextes politico-économiques et de gouvernance ainsi encore les chances de rompre le monopole.22
que les facteurs qui se sont entremêlés à la planification
et la mise en œuvre des réformes, et comment les Les groupes défendant les positions acquises partagent
réponses au questionnaire ont abordé et examiné ces également un intérêt à maintenir le modèle industriel
questions : traditionnel (ou hybride). La structure verticale intégrée
offre moins de transparence et plus de possibilités
• Financement, structure et performance du secteur de recherche d’avantages. Les parties intéressées
de l’énergie, comprennent celles qui bénéficient de parrainages
• Conjoncture macroéconomique : crise, sous- acquis par le biais de connexions, d’appels d’offres et
développement, d’emplois. D’autres reçoivent des services d’électricité
• Conditions socio-politiques : instabilité politique, subventionnés ou ont été autorisés de façon informelle à
corruption et inégalités, et ne pas régler leurs factures d’électricité. Des structures
• Environnement institutionnel : institutions nationales, institutionnelles opaques et changeantes dans le
dirigeants politiques et acteurs internationaux. secteur créent également l’espace pour que les acteurs
imposent leurs intérêts acquis.
3.1. Financement, structure et performance
du secteur de l’énergie 3.2. Conjoncture macroéconomique :
crise, sous-développement, tendances
Le secteur de l’énergie est au cœur des grands systèmes internationales
économiques politiques des pays africains, ce qui
le rend très politisé et crée une discussion contestée Les forces macroéconomiques ont façonné à la fois la
autour des réformes. Le secteur a une importance nécessité et les résultats des réformes dans les pays
stratégique et des liens avec le développement social africains depuis leur premier déploiement dans les
et économique, qui renforcent son poids idéologique années 1990. Près de 25 pour cent des répondants
en tant que moteur de croissance et d’industrialisation. au questionnaire, dont l’Egypte, le Ghana, la Guinée,
Parallèlement, ses besoins massifs en matière le Nigéria, l’Ouganda et la Zambie, ont évoqué l’impact
d’investissement sont couplés à une dépendance à des conditions macroéconomiques comme des
l’égard des sources externes de technologie et de facteurs qui entravaient le succès de la mise en œuvre
financement. des réformes. La forte volatilité des taux de change, le
coût des matériaux et les prix des carburants placent
Les sociétés d’électricité financièrement insoutenables les pays africains dans une situation vulnérable. Les
et le manque d’investissements dans le secteur sont taux d’inflation élevés et la dévaluation de nombreuses
une composante majeure de la justification des monnaies ont érodé les tarifs et les autres actifs libellés
réformes. Le financement du secteur de l’énergie est en devises dans le secteur de l’énergie. Cela a affecté
toujours étroitement lié au budget national des pays la capacité du Trésor à mobiliser des ressources pour
africains. Les subventions tarifaires et d’exploitation sont soutenir le secteur de l’énergie et a découragé les PSP
presque insurmontables dans de nombreux contextes, (généralement entraînés par la rentabilité).
et les recettes des sociétés d’électricité demeurent
faibles, même si les tarifs tendent à être inférieurs aux Les concepteurs des réformes ont souvent omis
niveaux de recouvrement des coûts. Les efforts en de prêter une attention particulière à la façon dont
faveur des tarifs réfléchissant la réalité des coûts se sont les réformes interagiront avec les circonstances
parfois avérés inutiles même en présence de réformes macroéconomiques très complexes vécues par la
législatives ou réglementaires solides, ce qui a aggravé la plupart des pays africains. Ceux qui promeuvent
pression exercée sur les sociétés d’électricité. le «modèle standard» comprenaient clairement
l’importance du secteur énergétique pour la croissance
Peu de pays africains ont reconnu les échecs du modèle et le développement économiques. Les réformes,
traditionnel de réforme et sa vulnérabilité structurelle dans le cadre des mécanismes d’ajustement structurel
face à la corruption systémique. Il se peut que les pays liés aux grands prêts au titre du développement, ont
pensent que cet aveu pourrait déclencher une crise de inévitablement été liées aux chocs monétaires, aux
confiance dans l’État lui-même, dans le contexte de la pressions inflationnistes et à la crise budgétaire. Cela a
volatilité macroéconomique et des transitions politiques. accru les coûts de transaction liés à la mise en œuvre
En de nombreux cas, la consolidation du secteur de des réformes, tout en augmentant le risque (et en
l’énergie dans un service central s’est traduite par une très démotivant) le type d’investissement privé concurrentiel
forte opposition aux efforts déployés pour restructurer le qui était au cœur du «modèle standard».
secteur. En Zambie, «Le service public avait une influence
excessive sur l’organisme de réglementation», de sorte Les premières expériences de réforme sectorielle ont
____________
22
Réponse au questionnaire, Zambie.
50 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
façonné les attitudes à l’égard des processus, tant à 3.3. Conditions socio-politiques : instabilité
l’intérieur qu’à l’extérieur des pays pour les décennies politique, corruption et inégalités
à venir. Dans certains pays, comme l’Ouganda, les
réformes des «modèles standard» ne se traduisent pas Les systèmes socio-politiques des années 1990 se
immédiatement par des apports d’investissements caractérisent par les conflits, les contestations et les
privés. Il est arrivé que ces crises prolongées de l’offre incertitudes. De longues périodes de pouvoir absolu,
exigent du gouvernement des mesures extraordinaires de troubles civils et de conflits ethniques, et les ruines
pour attirer des investissements (comme un retour sur des guerres impérialistes par procuration ont laissé
investissement garanti par le gouvernement). Dans de nombreux pays africains dans la tourmente dans
d’autres contextes, l’investissement privé a afflué en les années 1990 et 2000. S’attaquer aux problèmes
amont des crises qui menaçaient le renouvellement financiers et au sous-développement dans le secteur de
ou la renégociation des contrats privés, lésant les l’énergie s’est avéré plus difficile dans les pays souffrant
investisseurs et le profil d’investissement de ces pays. d’instabilité politique, d’ingérence et de perception
généralisée d’un manque d’état de droit23. Les défis
Il n’existait pas de programme de réformes du secteur à la performance découlent parfois d’un contexte
énergétique bien défini et consolidé expliquant le macroéconomique difficile auquel ils se surajoutent.
choix des mesures de réforme, leur séquence et leur Ceux-ci aggravèrent les batailles idéologiques et les
cohérence. D’autre part, le programme de réformes était divisions sociales en cours. Au Soudan, un embargo
plus susceptible de répondre aux besoins des donateurs politique et financier combiné à un conflit prolongé
et des prêteurs que d’être un programme de réforme «a amené certains bailleurs à renoncer à financer les
national véritablement dirigé par le gouvernement. – projets»24, intensifiant les déficits financiers dans le
Réponse au questionnaire (Mozambique). secteur. La stabilité politique a été rarement citée dans
les questionnaires comme contribuant au succès des
Dans certains cas, les réformes des «modèles standard» programmes de réforme, avec des exceptions telles que
ne sont pas explicitement alignées sur les priorités l’Angola, l’Egypte (après 2014) et le Kenya.
économiques nationales, au-delà de la croissance
économique. Les défenseurs de la réforme n’ont pas Les troubles politiques et la guerre civile jusqu’à
fait de liens explicites avec la création d’emplois, la 1986 ont laissé une infrastructure délabrée avec des
fourniture de services sociaux, l’enracinement local ressources gouvernementales limitées pour financer
et l’industrialisation. Les logiques de réforme n’ont l’expansion du système. Cette situation a créé un
pas expliqué comment elles se rapportent à la base besoin de réformer et de rénover le réseau, ainsi que
idéologique de ces besoins. Par exemple, au Malawi, d’investir dans l’extension de la production. L’idéologie
les réformes ont été considérées comme une menace de la libéralisation économique, prescrite par le FMI et
sur les emplois dans le secteur de l’énergie et pour la la Banque mondiale, était une condition préalable à la
souveraineté nationale, plutôt que comme une occasion fourniture de financements au secteur de l’énergie et
d’améliorer le statut financier du secteur de l’énergie au budget national dans son ensemble. – Réponse au
et de mobiliser des financements extérieurs pour le questionnaire (Ouganda).
développement.
Les tendances internationales de la libéralisation du Les donateurs internationaux ont utilisé des prêts
marché de l’électricité ont progressivement envahi conditionnels et des embargos pour faire progresser
d’autres régions dans les années 1990, montrant des la démocratisation, parallèlement aux programmes
succès en Europe et en Amérique latine. S’attaquer aux d’ajustement structurel, qui ont souvent provoqué une
crises de financement par la privatisation est devenu résistance. Dans certains cas, des réformes de type «
une norme mondiale. La réforme de la concurrence modèle standard » ont mis en cause les arrangements
offrait une solution prometteuse aux défis du secteur politiques existants ou constitué une menace pour les
de l’énergie en Afrique, surtout en raison des succès accords fragiles conclus en faveur de la démocratisation
enregistrés ailleurs. Séparer le consommateur d’énergie (souvent un équilibre entre les intérêts des dirigeants
des producteurs d’électricité semblait un choix évident politiques, les réseaux clientélistes et les alliances
dans certains pays, pour stimuler la PSP et profiter des spéciales). Au Sénégal, des syndicats de travailleurs
gains d’efficacité technique et opérationnelle. puissants ayant des affiliations politiques connectés ont
De nombreux États ont ouvert le marché à utilisé les actes de sabotage pour entraver les réformes à
l’investissement RE en réponse à des prix imprévisibles la fin des années 1990, conduisant à une panne nationale
des carburants importés en raison de l’amortissement de trois jours. Pour maintenir le contrôle politique sur
des monnaies, ainsi qu’à la hausse de la demande une entreprise d’État, le Kenya a résisté à des années
d’électricité. Le coût de la production thermique en d’embargo sur les prêts du secteur de l’énergie entre
raison de la volatilité des prix, combinée à une faible 1992 et 1997, ce qui a contribué à une crise nationale
disponibilité de l’hydroélectricité due aux sécheresses de l’offre.
(un effet croissant du changement climatique) incitent à
l’adoption de technologies RE variables. Les soupçons à l’égard des réformes sont liés aux
relations entre les idées sur le secteur de l’énergie, la
____________
23
Selon les répondants aux questionnaires
24
Selon les répondants aux questionnaires
3. LES RÉFORMES DANS LEURS CONTEXTES POLITICO-ÉCONOMIQUES 51
légitimité politique de l’élite dirigeante et les intérêts dans ces contextes, au-delà de la promesse peu fiable
acquis en concurrence pour le contrôle de l’État. d’investissement, ou de la menace d’embargo sur l’aide
Les systèmes de base des idées — les conceptions sur les prêts.
socialistes, libérales ou centrées sur l’État, et les idéaux
d’autonomie — se combinent de différentes manières De nombreux pays ont connu, depuis les années 199
avec la nature stratégique du secteur de l’énergie. ou avant, une instabilité politique qui constituait une
Diverses formes de corruption, de favoritisme ou pierre d’achoppement pour le développement et mettait
d’instrumentalisation (par exemple par les syndicats) en péril la mise en œuvre à long terme des réformes.
peuvent également être déployées dans le secteur. Les Même lorsque des réformes ont été mises en œuvre,
dirigeants politiques dépendent souvent du pouvoir des mouvements politiques pour y faire échec peuvent
pour subventionner les dépenses sociales, maintenir survenir. La Figure 14 montre le Classement Global du
les réseaux de parrainage et financer les élections. niveau de Gouvernance des pays étudiés à partir des
Les réformes du « modèle standard » peuvent ne pas Indicateurs de Gouvernance Mondiaux.
s’aligner sur les préoccupations des dirigeants politiques
TUNISIA
BENIN
ZAMBIA
MALAWI
MOROCCO
BURKINA FASO
TANZANIA
GAMBIA
UGANDA
MAURITANIA
GABON
MADAGASCAR
TOGO
MOZAMBIQUE
SENEGAL
LESOTHO
COTE D'IVOIRE
NIGER
MALI
ANGOLA
CAMEROON
NIGERIA
GUINEA-BISSAU
ZIMBABWE
CHAD
BURUNDI
GUINEA
CONGO, REPUBLIC
SOUTH AFRICA
ALGERIA
LIBYA
EGYPT
La moitié des répondants à l’étude signalent les structurel ont provoqué des changements déroutants
problèmes de mauvaise gouvernance et de mauvaise dans les structures institutionnelles vers la fin du XXe
gestion, souvent aggravés par la corruption. Ceux-ci siècle. Avec une capacité technique mineure, dotée de
agissent à la fois comme un obstacle en entravant la ressources insuffisantes, les institutions formelles étaient
mise en œuvre et la viabilité des réformes, et en tant déjà faibles et peinaient à gagner en légitimité aux yeux
que conducteur en créant un besoin de réformes pour du public. Parallèlement, les institutions informelles
éliminer les conflits d’intérêts et le potentiel d’ingérence menaçaient de déstabiliser l’équilibre délicat du pouvoir
dans la prise de décision du secteur de l’énergie. La économique et politique.
faiblesse de la gouvernance et de la corruption est
souvent citée comme ayant chassé les investisseurs Le gouvernement, y compris le Bureau et du Président,
étrangers, avec des conséquences négatives sur la a également exécuté un programme de réformes
viabilité financière et commerciale de l’utilité. Dans publiques dans tous les secteurs de l’économie du
certains pays, des allégations de corruption et de coups Malawi. – Réponse au questionnaire (Malawi).
de pied aux responsables sectoriels ont entouré la
question de la privatisation des avoirs de l’État. Une direction politique ferme impulsée par une coalition
motrice fournit la dynamique politique nécessaire pour
3.4. Environnement institutionnel : faire avancer les réformes. Plus d’un tiers des répondants
ont cité la «volonté politique» comme facteur ou
institutions nationales, dirigeants politiques
condition préalable pour assurer le succès des réformes.
et acteurs internationaux Les ministères de l’énergie et des finances, ainsi que les
régulateurs compétents en matière d’électricité, sont
Les réformes sont difficiles à mettre en œuvre dans les souvent perçus comme les moteurs des réformes, ou
incertitudes des contextes des institutions naissantes ou comme les acteurs pour en améliorer les résultats. A titre
faibles qui prévalent dans de nombreux pays africains. d’exemple, les régulateurs encouragent l’amélioration
Les programmes de démocratisation et d’ajustement
52 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
des performances en exigeant des sociétés d’électricité souvent un soutien important en assistance technique
qu’ils remplissent les conditions requises pour bénéficier et en formation des institutions locales. Des allocations
d’augmentations tarifaires ou de subventions, dans de financement adéquates pour le renforcement
le cas des ministères des finances. Un dirigeant clé, des capacités des organismes gouvernementaux,
comme un Président, un ministre du gouvernement ou statutaires et indépendants, sont indispensables, ainsi
un commissaire à la réglementation, peut mener des que pour les ministères de l’énergie et des finances, les
réformes s’ils les considèrent comme des outils pour régulateurs sectoriels, les sociétés d’électricité et les
redresser l’économie, éradiquer la corruption, ou attirer autres organismes touchés par le secteur de l’énergie.
les investisseurs. Au Kenya et au Nigéria, le soutien Les programmes de renforcement des capacités
présidentiel a fait progresser les réformes, créant une traduisent aux acteurs locaux les idées qui sous-tendent
stabilité politique qui a favorisé des relations stables les réformes, tout en modernisant et en renforçant les
pour bâtir la confiance entre le gouvernement et les institutions établies à la suite des réformes. Ils peuvent
investisseurs. également financer des études de faisabilité sur les
réformes. Les professionnels du secteur peuvent
La logique et les résultats attendus des réformes doivent renforcer les compétences et le savoir en vue d’agir
être bien transmis aux parties prenantes et au public. en tant que champions locaux pour promouvoir les
Les avantages des réformes en Zambie n’ont pas été mesures de réforme, en expliquant leur justification et
entièrement articulés, conduisant à des proclamations en renforçant l’appui des arguments clés du modèle.
que l’utilité resterait dans les mains publiques après la Au Kenya par exemple, les missions d’étude et les
réforme. De même, au Mozambique, le programme efforts de formation ont été un élément clé du succès
de réformes du secteur de l’énergie n’indiquait pas à long terme des réformes en faveur du progrès.
clairement les avantages, la structure et la séquence L’accent mis sur le renforcement des capacités locales
des réformes. Ce qui a contribué à diffuser le sentiment a permis au pays de bénéficier d’un approvisionnement
que les réformes avaient été conçues pour s’aligner sur concurrentiel en production. De même, certains pays
les besoins des donateurs ou d’autres parties, plutôt (p. ex. le Malawi, le Ghana et le Sénégal) ont reçu des
que comme une initiative nationale pour répondre aux subventions à concurrence de 600 millions de dollars EU
besoins locaux dans le contexte du pays. du Fonds du Millénaire pour les défis, sur financement
du gouvernement des États-Unis, qui a déclenché la
La restructuration du service suscite des appréhensions restructuration du marché de l’énergie dans le pays.
de pertes d’emplois associées, tant chez les travailleurs
que chez les gestionnaires. Les employés des sociétés Un manque de leadership politique clair peut engager
d’électricité sont souvent parmi les plus grands le secteur de l’énergie dans de « fausses » réformes,
opposants aux réformes. Au Nigéria, le personnel par lesquelles le pays semble adopter de nouvelles
pléthorique et sous-qualifié d’un service public, par politiques ou institutions sans que les mesures de mise
l’entremise de son syndicat, a refusé de voir réduire ou en œuvre associées aillent dans la direction indiquée par
d’accepter les indemnités de licenciement. les réformes. Les intérêts économiques et politiques qui
se cachent dans le secteur peuvent utiliser leur capacité
La faiblesse des cadres juridiques existants, les d’accéder à des positions de pouvoir pour empêcher la
mécanismes d’application peu clairs et le manque de réforme institutionnelle ou le développement. Là où les
responsabilisation peuvent compliquer la traduction des libertés des médias sont limitées, les acteurs puissants
politiques de réforme en une législation contraignante peuvent plus facilement mobiliser une large opposition
et leur exécution. Même dans les pays où il existe un publique aux réformes sur des bases idéologiques. De
engagement en faveur des réformes «modèle standard», faibles niveaux de transparence et de responsabilisation
la conception de législations et de cadres réglementaires renforcent le manque de volonté politique de changer le
exécutoires a posé un défi à la mise en œuvre de ces statu quo.
réformes. Le manque d’indépendance, le manque
de capacité ou l’inexpérience du régulateur entrave
l’avancement des réformes dans certains pays. Le choix
des commissaires et des présidents de réglementation
reste une décision politique dans la plupart des pays, ce
qui rend impossible toute séparation totale de la sphère
politique.
En nous tournant vers l’horizon, nous considérons les dysfonctionnel. Entre-temps, les près de 650 millions
faiblesses actuelles (section a), les défis pressants et les personnes qui n’ont pas accès à l’électricité représentent
tendances (section b) auxquels sont face les secteurs la plupart des populations pauvres et rurales du continent,
de l’énergie en Afrique, dans des contextes de grande ce qui soulève le problème des clivages entre la ville et
insécurité financière, de forte croissance de la demande, la campagne. Les problèmes d’équité sont aggravés par
ainsi que innovations technologiques et économiques le coût élevé de l’électricité, la corruption banalisée et les
perturbatrices. subventions souvent opaques et non viables.
Pour faire ressortir les opinions dominantes des
4.1. Les secteurs de l’énergie en Afrique professionnels du secteur de l’énergie sur les menaces
qu’ils considèrent les plus urgentes dans leur secteur,
continuent d’être confrontés à des
les répondants au questionnaire ont été invités à évaluer
faiblesses et des préoccupations (sur une échelle de un à cinq) la pertinence de diverses
préoccupations susceptibles de se manifester de
Les défis et les faiblesses généralisées qui troubleront différentes manières dans le secteur de l’énergie :
les secteurs énergétiques africains se combinent pour
créer un défi de sécurité énergétique chronique pour • Attirer des investissements
le continent. Les écueils opérationnels, techniques, • Performance des services collectifs
financiers, d’équité et politiques continuent d’entraver • Raccordements électriques
la performance des sociétés d’électricité, affectant leur • Sécurité énergétique
capacité à fournir des services d’électricité de qualité et à • Changement climatique
investir dans le développement ainsi que la maintenance • Perte de la souveraineté ou du contrôle par l’État
des infrastructures. En conséquence, la plupart • Pression financière sur le Trésor
des sociétés d’électricité sont aux prises avec des • Corruption
infrastructures sous-développées et mal entretenues,
entraînant finalement des pannes de courant, des taux Les réponses accordent presque universellement la plus
d’accès réduits, une faible disponibilité de l’électricité grande urgence à la capacité d’attirer les investissements.
et des niveaux élevés de pertes de système. Les La sécurité énergétique et les performances des sociétés
sociétés d’électricité gèrent souvent leurs déficits d’électricité retiennent des niveaux de préoccupation
énergétiques par le délestage stratégique, causant des similaires dans l’échantillon. Cela souligne le besoin
pannes imprévisibles aux foyers et aux entreprises. encore important de mécanismes de réforme pour
L’infrastructure de transport, maillon critique pour la améliorer l’accès au financement, augmenter la capacité
fourniture d’électricité, a également souffert de sous- de production diversifier le bouquet énergétique, et
investissement et se voit dans l’incapacité de transporter transformer la gestion opérationnelle, technique et
l’énergie nécessaire de ses sites de production vers financière des services collectifs.
les millions de consommateurs qui comptent sur elle Étant donné que les taux d’accès à l’électricité sont
(World Bank/PPIAF 2017). Ces faiblesses augmentent inférieurs à ceux de tout autre continent, il n’est
les coûts globaux du système et contribuent également pas étonnant que les répondants au questionnaire
à la mauvaise qualité et au peu de fiabilité de considèrent les raccordements électriques comme un
l’approvisionnement en électricité sur le continent, en autre domaine de préoccupation élevée (4,3 sur 5 au
général, sauf dans certains pays de l’ASS et la plupart total). Ici, une variation importante se produit entre les
des pays d’Afrique du Nord, qui se distinguent par la groupes régionaux de réponses. Les pays d’Afrique de
fiabilité des systèmes. l’Ouest et du Nord signalent une forte préoccupation pour
Confrontés à de grands défis techniques et financiers, les raccordements électriques (note moyenne de 4,7 sur
les services collectifs africains luttent pour gagner la 5), un peu plus que l’Afrique australe (4,2 en moyenne).
confiance des clients et des investisseurs. L’accès au En revanche, les répondants d’Afrique de l’Est ne
financement est essentiel pour développer de nouveaux signalent qu’un niveau modéré de préoccupation dans
projets. La plus grande source potentielle de fonds ce domaine (note seulement de 3,3 sur 5 en moyenne).
— le secteur privé — est facilement découragée par
le risque élevé de l’investissement dans un système
4. RÉFORMES PROSPECTIVES : OPPORTUNITÉS ET DÉFIS 55
5
4
3
2
1
ts
ce
ge
n
y
/
y
on
ty
it
ur
o
en
an
an
ur
p,
ign
as
,
tm
ec
rm
ch
ec
rru
tre
re
s
es
nn
fo
ve
Co
gy
on
at
nv
er
co
so
er
im
gi
yp
re
y
En
te
Cl
cit
n
su
lit
ta
c,
tri
s
U,
fs
re
ra
ec
so
lp
A(
El
cia
s
Lo
an
Fin
Les préoccupations des parties prenantes pour sur le climat ne se mesurent pas aux questions des
l’avenir tournent autour des besoins de financement investissements sectoriels, de la performance et de la
et des responsabilités opérationnelles des sociétés sécurité. Investir dans le solaire, l’éolienne et d’autres
d’électricité d’électricité, chargés de répondre aux technologies de production d’ER constitue déjà une
besoins en matière de sécurité énergétique du pays grande partie de la solution à la crise énergétique dans
(Figure 15). Attirer des investissements représente les pays africains. Les problèmes de décarbonisation de
une voie pour intensifier les réseaux et les connexions l’industrie ou de réduction des émissions de carbone en
électriques, et l’offre d’énergie si nécessaire. Ces gains Afrique sont minimes par rapport aux préoccupations
renforceront à leur tour la sécurité énergétique du pays, plus graves pour le développement du secteur de
et au-delà, celle des régions voisines, les interconnexions l’énergie, et restent négligeables par rapport aux besoins
régionales continuant à se développer. Il n’est pas de décarbonisation dans d’autres régions. La BAD prend
surprenant que l’amélioration des performances des l’initiative dans ce domaine et dispose d’un plan d’action
sociétés d’électricité reste une priorité, puisque les pour le changement climatique (2017).
sociétés d’électricité crédibles sont plus susceptibles
d’attirer les investissements. La plupart des professionnels du secteur interrogés ont
des réserves sur la question de savoir si les institutions
L’avenir des questions politiques et de gouvernance de leur secteur énergétique sont suffisamment prêtes à
suscitent moins d’inquiétude ou de controverse pour affronter les défis à venir présentés dans le questionnaire
les professionnels de l’utilité. Les répondants de toutes (Figure 16). Ces répondants mentionnent la nécessité
les régions ont tendance à convenir que les perspectives d’un renforcement supplémentaire des capacités,
de la diminution de souveraineté de l’État dans le secteur afin d’accroitre les capacités organisationnelles,
de l’électricité, ainsi que les risques de corruption, opérationnelles, réglementaires et financières. L’appui
présentent des raisons de préoccupation modérées. En aux politiques et les nouveaux mécanismes financiers
tant que telle, la résistance à la coopération régionale, sont des facteurs supplémentaires qui, selon les
due aux préoccupations de souveraineté et aux priorités répondants, faciliteront la capacité des institutions
mal alignées, demanderait à être mieux mise en contexte à adopter de nouveaux modèles commerciaux et à
au niveau des projets. gérer les défis à venir. Cependant, la plupart des pays
engagés dans les cadres des accords mondiaux sur
Le changement climatique a un peu plus de visibilité, le changement climatique ont pris volontairement
par rapport à la gouvernance et aux questions l’engagement de réduire leurs émissions de carbone, et
politiques, avec des liens probables entre la hausse ils sont soutenus dans leurs efforts par DFI, ainsi que la
des températures mondiales, l’augmentation des BAD, qui a adopté des objectifs ambitieux pour réduire
sécheresses et la réduction des niveaux des barrages les émissions de carbone dans toutes ses opérations.
de production hydroélectrique. Mais les inquiétudes
56 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
4
Frequency of Response
T
N
EA
IA
GO
IA
DA
SO
I
RE
A
L
AW
GA
YP
BW
NY
RI
AN
BI
OO
NI
AN
OP
OI
IN
FA
AN
TO
GE
EG
BE
NE
KE
AL
GH
BA
IV
GU
ER
HI
NZ
ZA
A
UG
NI
M
SE
D'
ET
IN
M
M
TA
RK
TE
CA
ZI
CO
BU
Source : questionnaire d’étude
Les impacts attendus des tendances à venir sont ouvrant la porte sur une nouvelle vague de réformes
en grande partie positifs. La plupart des répondants dans le secteur de l’énergie (section 4.2.3.)
anticipent la baisse des coûts du système et de la
production à la suite de la compétitivité des marchés, 4.2.1 Les technologies perturbatrices
ouvrant des possibilités d’augmenter les taux d’accès
incitent à une nouvelle vague de réformes
à l’électricité avec des effets d’entraînement sur le
développement et la croissance économiques, en du secteur de l’énergie
particulier dans les zones rurales. La décentralisation, les
ressources énergétiques distribuées, les technologies Le monde de l’énergie évolue profondément et
d’efficacité énergétique et les mini-réseaux constituent rapidement. Les innovations accélérées dans les
une préoccupation réglementaire pour les structures technologies, les services et les marchés de l’énergie
tarifaires, ce qui incite également à la nécessité de créer changent, ainsi que les prix et les parts de marché, ainsi
de nouveaux modèles commerciaux pour les sociétés que l’emplacement et les schémas de production et
d’électricité. La performance des sociétés d’électricité – d’utilisation de l’énergie. Les consommateurs d’électricité
tant technique que financière – est également envisagée deviennent progressivement des producteurs, car la
comme un gagnant potentiel, grâce à l’introduction numérisation, les technologies de l’information et de
d’appels d’offres concurrentiels et de technologies la communication, ainsi que les infrastructures, sont
de paiement mobiles. Les opérateurs des systèmes utilisées de manière plus complexe et décentralisée.
d’alimentation en capacité sont un niveau important pour
soutenir les performances du service tout en gérant un Les augmentations de capacité en Afrique
réseau décentralisé avec des ressources flexibles, des jusqu’au 2030 seront dominées par les ressources
énergies renouvelables variables et un flux d’électricité hydroélectriques, le gaz naturel, le solaire, le vent, la
bidirectionnel. géothermie et la biomasse. Cela est conforme à de
grands changements dans le mix énergétique global (voir
Figure 17). La demande en Afrique devrait augmenter
4.2. Le changement, les défis et l’optimisme à un taux de croissance annuel composé de 5,7 pour
définissent la prochaine décennie de cent (Multiconsult 2018). L’augmentation de l’accès
réformes en Afrique à l’électricité et la croissance du PIB contribuent à
l’augmentation de cette demande, et certaines régions,
Les technologies perturbatrices ouvrent de nouvelles notamment l’Afrique de l’Ouest et de l’Est, projettent
perspectives et imposent la nécessité de nouveaux d’augmenter la demande de 10 pour cent et 11 pour
outils réglementaires, politiques et économiques cent par an.
pour les exploiter (section 4.2.1). Les répondants au
questionnaire pointent du doigt la forte sensibilisation à Pour la nouvelle génération de consommateurs-
ces tendances croissantes dans les secteurs de l’énergie producteurs — ou de « prosommateurs » — l’électricité
africaine, et les signes que les décideurs du secteur circulera dans les deux directions. Grâce à un contrôle
prennent assidument note de leurs effets imminents en temps réel de leur consommation et de leur production
(section 4.2.2). Ces changements appellent l’attention d’électricité, les personnes privées pourront obtenir
sur la nécessité de réexaminer le modèle commercial des informations sur leurs besoins énergétiques et leur
traditionnel et la structure des sociétés d’électricité, en consommation, et acquérir la capacité de contrôler les
4. RÉFORMES PROSPECTIVES : OPPORTUNITÉS ET DÉFIS 57
sources d’énergie qu’ils utilisent et l’utilisateur final à commerce de l’énergie entre les ménages.
qui ils vendent. Les dispositifs et contrôles intelligents
compléteront les compteurs intelligents, équipés de Les réseaux et les systèmes d’énergie électrique
systèmes d’apprentissage automatique et d’intelligence passeront à des structures plus radiales à modèles
artificielle pour maximiser le confort et l’économie. maillés (Buljan 2018). Des réseaux intelligents à
Les systèmes de distribution et de paiement de nouvelles géométries commenceront à émerger d’un
l’électricité pourraient utiliser les registres distribués ou nouveau paysage de réseaux électriques traditionnels
la technologie de la blockchain à des fins comptables, intercalés de mini-réseaux, de réseaux communautaires
même au niveau des ménages (Nsikak 2018). La et de systèmes de production individuels repartis25.
blockchain, un protocole de communication en ligne qui Les technologies d’énergies renouvelables modulaires
élimine les intermédiaires, permet aux entreprises ou aux permettent de rapprocher la production des
particuliers de créer un registre chiffré vérifiable qui peut consommateurs, même si les grandes sources de
enregistrer la consommation d’énergie et l’historique production à faibles coûts demeurent centralisées et
du crédit. Ces registres sécurisés peuvent faciliter le éloignées.
Source: Bloomberg New Energy Finance (2018), “New Energy Outlook (NEO) 2018”,
at https://bnef.turtl.co/story/neo2018.
Les pays industrialisés ressentent les effets de ces ont le potentiel pour croître rapidement et pourraient être
innovations différemment des pays en développement. influencés à nouveau par des technologies novatrices et
Les marchés de gros et de la vente au détail développés perturbatrices.
de l’énergie ont du mal à s’adapter à la part croissante
de l’énergie renouvelable concurrentielle. La tarification L’énergie solaire et l’énergie éolienne font également
nulle, voire négative, est un phénomène de plus en plus leur percée en Afrique, grâce à des ventes aux enchères
fréquent et les actifs d’électricité irrécupérables sont réussies. Elles permettent de fournir de l’électricité bon
de plus en plus répandus. Les fournisseurs de services marché, non subventionnée et raccordée au réseau. Avec
en place craignent la spirale classique de la disparition l’innovation continue dans les technologies de stockage
des sociétés d’électricité, avec une baisse des ventes et l’expérience croissante des nouveaux modèles
et des désertions accrues des réseaux (O’Boyle 2017). d’affaires pour les mini-réseaux ainsi que les solutions
D’autres modèles de service public voient le jour. hors réseau, de nombreux pays du Sud peuvent ignorer
les réformes standard du marché. La possibilité leur
Les difficultés que connaissent les marchés de est offerte de concevoir et de migrer vers de nouveaux
l’électricité dans les pays industrialisés sont pour la arrangements du marché de l’électricité adaptés à leurs
plupart inexistantes en Afrique. En effet, on ne trouve besoins pour accélérer les investissements dans la
nulle part sur le continent des marchés de gros ou de production, tant en réseau que hors réseau. Toutefois,
vente au détail de l’électricité. En fait, la plupart des pour la production en réseau, une charge de base
pays ont encore de faibles niveaux d’électrification et de adéquate sera nécessaire pour garantir la stabilité.
consommation. Néanmoins, leurs réseaux électriques
____________
25
Voir l’adresse http://fractal-grid.eu/
58 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
2
or
RE
s
E
on
s
as
s
en
ie
ce
er
vR
at
a:
ge
og
um
of
ur
em
er
ith
ra
fic
ol
so
re
op
os
ur
sto
hn
tri
re
ha
pr
oc
es
m
ec
ec
gs
gy
s+
pr
e
ste
rc
tt
el
er
om
in
ou
le
ve
en
sy
l
en
ow
ra
ab
ec
s
::
ym
e
re
ru
ew
d
Gr
sb
at
pe
te
le
s,
pa
cit
n
er
bu
rid
m
xib
Re
pa
um
Co
ri
i-g
Fle
Ne
Ca
st
ns
in
Di
Co
Source : Données du questionnaire de l’étude
Les parties prenantes du secteur de l’électricité, en énergétiques variables augmentera et que le rôle et
particulier les sociétés d’électricité, semblent reconnaître la fonction des opérateurs de réseau deviendront
que les technologies d’énergie renouvelable, telles plus complexes, il faudra renforcer leurs capacités
que l’énergie solaire photovoltaïque et l’énergie pour équilibrer adéquatement les réseaux électriques
éolienne, connaissent une percée. De plus en plus, ces nationaux en acquérant et en distribuant des ressources
technologies sont acquises selon un mode concurrentiel flexibles et complémentaires, y compris des technologies
par le biais de ventes aux enchères inversées plutôt que qui peuvent fournir la puissance, l’inertie, l’électricité
d’accords directement négociés ou de tarifs de rachat réactive et les autres services auxiliaires nécessaires
garantis. À mesure que la part de ces technologies pour garantir la fiabilité et la qualité du réseau.
Recon- Préoc-
Popularité Pertinence
Pertinence naissance cupation
dans le Impact/ Utilité pour moyenne
Pertinence (1 à 5) de la ten- par les politique/
secteur de importance le pays de la ten-
dance décideurs réglemen-
l’électricité dance
politiques taire future
Part croissante des énergies
4.3 4.3 4.3 4.1 4.3 4.4 4.3
renouvelables
Outiller les opérateurs de
4.5 4.3 4.2 4.4 4.7 4.4 4.4
réseau
Passation de marchés
4.5 4.1 4.3 3.8 4.2 4.6 4.3
concurrentielle
Flexibilité des ressources
avec énergies renouvelables 4.0 4.0 3.8 4.0 4.2 4.2 4.0
variables
Nouvelles technologies de
3.9 3.6 3.3 3.8 4.1 4.0 3.8
paiement
Ressources énergétiques 3.9 3.7 3.7 3.8 4.0 4.0 3.8
distribuées
Mini-réseaux, modèles 3.8 3.5 3.4 3.1 3.9 4.0 3.6
d’électrification rurale
Les consommateurs
deviennent des 3.2 3.1 3.0 3.6 3.7 3.6 3.4
prosommateurs
Énergies renouvelables +
stockage comme électricité 3.2 3.5 3.1 3.6 3.8 3.7 3.5
de base
Les personnes interrogées reconnaissent également de conscience de ces questions par les décideurs et
que les réseaux électriques sont de plus en plus les organes de régulation n’est que légèrement en deçà
décentralisés et que ce phénomène s’accompagnera de celle des autres parties prenantes du secteur de
d’une prolifération future des mini-réseaux et des l’électricité.
systèmes hors réseau. La probabilité que de nombreux
consommateurs deviennent également producteurs La plupart des sociétés d’électricité estiment également
d’électricité demeure moins largement acceptée, de que les répercussions de ces tendances se feront sentir
même que les changements à venir de la nature et de au cours des deux prochaines années, en particulier
la forme des réseaux, les systèmes de facturation et la percée des technologies d’énergie renouvelable, le
de paiement, et le degré de numérisation. L’idée que recours accru aux appels d’offres et aux ventes aux
l’énergie renouvelable avec stockage pourrait remplacer enchères et l’augmentation des investissements dans
les technologies actuelles de production d’électricité de les ressources énergétiques distribuées et les modèles
base était la moins bien admise (pourtant, même ici, on commerciaux (voir Figure 19). La question de l’acquisition
a enregistré un taux de pertinence moyen de 3 sur 5). de ressources flexibles par les opérateurs de réseau
L’enquête révèle généralement un niveau relativement pour compenser la variabilité de l’énergie solaire et de
élevé de sensibilisation à ces nouvelles tendances du l’énergie éolienne n’a été jugée pertinente qu’à partir
marché des technologies et de l’électricité et à leurs de 2020 ou à une date ultérieure, et celle d’une forte
impacts potentiels. Les résultats indiquent que la prise croissance des « prosommateurs » à partir de 2025.
Figure 19—Dans quel délai l’impact des nouvelles tendances se fera-t-il sentir ? (réponse moyenne)
Renewables + storage as
Distributed energy resources
baseload
Les pays et les sociétés d’électricité commencent faire face à la nécessité de renforcer les capacités
à formuler des réponses à bon nombre de ces de leurs opérateurs de réseau à acheter et gérer
technologies perturbatrices et aux nouvelles tendances des ressources flexibles qui pourraient constituer un
du marché de l’électricité (Figure 20). Le passage à des complément adéquat à une part croissante d’énergie
systèmes de passation de marchés plus concurrentiels renouvelable variable et garantir la solidité et la qualité
en est un indicateur et il en va de même pour les ventes requises du réseau. De même, peu de pays anticipent
aux enchères inversées pour l’énergie solaire et l’énergie la manière dont la nature des sociétés d’électricité
éolienne, afin de faire baisser les prix et d’accroître les pourrait être révolutionnée si un plus grand nombre de
investissements ainsi que la transparence. Les cadres consommateurs devenaient également des producteurs
politiques, juridiques et réglementaires créent un espace d’électricité, avec l’émergence de réseaux locaux
pour les ressources énergétiques distribuées, ce qui de communautés d’énergie, intégrés de différentes
a pour effet d’améliorer la stabilité du réseau et, bien manières aux réseaux urbains, régionaux ou nationaux,
entendu, l’accès à l’électricité, tout comme le font les même si l’on sait que ces tendances pourraient avoir un
nouveaux modèles commerciaux pour l’électricité impact négatif sur les recettes des sociétés d’électricité
hors réseau utilisant des systèmes monétaires mobiles si elles ne changent pas leurs modèles économiques.
prépayés. Un nombre moindre de pays doivent encore
4. RÉFORMES PROSPECTIVES : OPPORTUNITÉS ET DÉFIS 61
Figure 20—Part des pays qui ont adopté des politiques ou des
réglementations pour faire face aux tendancesds
100%
80%
60%
40%
20%
0%
t
or
as
RE
t
s
en
en
er
el
ce
VR
at
ge
od
um
of
ur
em
m
er
ith
ra
ay
m
so
re
op
os
ur
sto
w
,p
re
ha
ec
pr
oc
m
es
ile
el
gs
gy
s+
pr
e
ste
rc
ob
om
l
er
in
ra
le
ou
ve
sy
en
ow
m
ru
ab
ec
::
e
re
ew
d
s,
Gr
sb
at
pe
te
Ne
rid
le
cit
n
er
bu
m
xib
Re
i-g
pa
um
Co
tri
Fle
in
Ca
sr
ns
M
Di
Co
Source : Données du questionnaire de l’étude
Les pays et les sociétés d’électricité commencent façons plus complexes et plus réactives. L’exploitation
à formuler des réponses à bon nombre de ces des réseaux nécessitera également l’intégration des
technologies perturbatrices et aux nouvelles tendances prévisions de production d’énergie renouvelable de
du marché de l’électricité (Figure 20). Le passage à des pointe. Les opérateurs de réseau répartis dans les zones
systèmes de passation de marchés plus concurrentiels métropolitaines pourraient émerger avec la complexité
en est un indicateur et il en va de même pour les ventes accrue de l’intégration aux centres nationaux de contrôle.
aux enchères inversées pour l’énergie solaire et l’énergie
éolienne, afin de faire baisser les prix et d’accroître les Des réformes du marché et de la réglementation seront
investissements ain essentielles pour faire face à ces transformations. Ces
réformes seront conçues dans le but de libéraliser les
4.2.3. Les sociétés d’électricité de l’avenir marchés pour les accords entre acheteurs et vendeurs
consentants, permettant de passer d’un réseau à
verront le jour
un autre et d’utiliser les compteurs intelligents. Les
structures tarifaires devront inclure des redevances
L’Afrique a la possibilité d’adopter des innovations
reflétant la différenciation dans le temps des coûts
en matière de technologies favorables, de modèles
énergétiques (indiquant à quel moment la production
d’affaires, de fonctionnement des réseaux et de
ou la consommation d’électricité est moins coûteuse ou
conception des marchés. Les technologies favorables
plus coûteuse). La réforme tarifaire permettra également
et les nouveaux modèles d’affaires comprendront une
d’introduire des redevances pour la capacité de charge
part croissante d’énergie renouvelable à faible coût, qui
de crête coïncidente des réseaux, les ressources
est complétée par des batteries à fins commerciales
flexibles et les services pour garantir la fiabilité (en vue de
et distribuées, la recharge intelligente des véhicules
compléter leur propre production).
électriques, le renforcement des interconnexions
au réseau et des mini-réseaux à base d’énergie
À moyen et à long terme, la numérisation du réseau
renouvelable, la gestion axée sur la demande et les
électrique transformera tous les aspects de l’exploitation,
centrales électriques virtuelles, les communautés
de la planification et de l’entretien du réseau. L’explosion
énergétiques avec réseaux intégrés et échanges de pair
des nouvelles sources de données modifiera la façon
à pair, la propriété communautaire partagée, le système
dont travaillent les opérateurs de réseau et la manière
prépayé et peut-être même, à la longue, les grands
dont les clients perçoivent, consomment l’électricité
comptes distribués.
et gèrent leur consommation. Outre les compteurs
intelligents et les systèmes d’information géographique
Le dégroupage des réseaux de transport donnera
(SIG), par exemple, les réseaux de données «5G»,
un nouvel élan à la création d’opérateurs de réseau
les médias sociaux, les applications mobiles, les
indépendants et de marché. Il incombera à ceux-
applications et le stockage dans les nuages, les
ci de gérer la variabilité, la flexibilité, la fiabilité ainsi
données de capteurs, les systèmes de positionnement
que les atouts et la qualité des réseaux. Ils devront
mondial (GPS), les drones, les données d’infrastructures
exploiter les ressources hydroélectriques et autres de
64 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
L’approche prescriptive du « modèle standard » n’a crédible et à long terme, à l’amélioration de la capacité
pas été la panacée attendue pour relever les défis du réglementaire, à l’accroissement de la transparence
secteur de l’électricité dans les pays africains. Aucun dans les appels d’offres concurrentiels pour les PEI et à
pays africain n’a adopté, littéralement, la série complète l’application des contrats de ressources, de production
des prescriptions politiques découlant du « modèle et de distribution (Williams and Ghanadan 2006). Les
standard » des réformes du secteur de l’électricité. gouvernements hésitent parfois à se démarquer de
Dans certains cas, cela a été décidé formellement dans la gouvernance directe des compagnies d’électricité
la politique ; dans d’autres, la décision a été due aux publiques en accordant aux organes de régulation
coûts de transaction élevés, aux défis de l’économie un degré d’autonomie approprié, ce qui compromet
politique ou à d’autres obstacles à la mise en œuvre. souvent la viabilité financière des sociétés d’électricité.
Les mesures visant à établir un organe de régulation Lorsque les organes de régulation (et les lois) réagissent
indépendant ont été la réforme la plus courante à travers à une conjoncture politico-économique aussi difficile en
le continent, à côté des règles permettant l’entrée des collaborant avec les acteurs politiques et en gérant les
PEI dans la production (Victor and Heller 2007; Gratwick intérêts établis, la gouvernance du secteur peut en tirer
and Eberhard 2008). Les véritables marchés de gros et immédiatement parti.
de la vente au détail de l’électricité ne sont pas encore
fonctionnels en Afrique. Mettre en place et renforcer des organismes
indépendants de régulation du secteur de l’électricité
La réforme et le développement du secteur de ayant le mandat légal de prendre des décisions
l’électricité ont été des processus lents et exigeants. efficaces, transparentes et équitables en matière
Les levées de boucliers du public et les réactions d’octroi de licences et de tarification. Les organes
politiques ont trop souvent fait dérailler les réformes en de régulation doivent être en mesure d’appliquer les
protestation contre les promesses vides associées aux contrats et des règles d’octroi de licences cohérentes
résultats de la réforme, en particulier en ce qui concerne pour encourager la PSP dans le secteur de manière
les promesses d’afflux d’investissements privés, de durable. La réforme de la réglementation est probante
baisse des tarifs et d’élargissement de l’accès. lorsque les parties prenantes peuvent être confiantes
qu’une décision de régulation est prise dans le cadre
Près de trente ans d’application des réformes du d’un processus transparent et fondé sur des règles, et
«modèle standard» en Afrique ont donné lieu à un qu’elle résistera à l’ingérence politique. Au Kenya, par
ensemble d’enseignements et d’implications politiques, exemple, l’indépendance de l’organe de régulation
tirés à la fois d’expériences locales directes et de permet de mettre en œuvre les réformes en obtenant
la littérature mondiale. Les enseignements tirés des des résultats positifs. Il est tout aussi important que
réformes passées peuvent éclairer l’avenir en matière de les réglementations soient définies et appliquées
prise de décision dans le secteur de l’électricité dans les équitablement, en tenant compte des préoccupations en
pays africains. La présente partie formule un ensemble matière de bien-être social et d’équité et en équilibrant
de stratégies pour la mise en œuvre réussie des réformes les droits perçus par les entités réglementées, afin
adaptées à partir des approches du « modèle standard d’alléger les charges réglementaires. Les exigences
» (section a) et des recommandations visant à adapter de régulation allégées ont permis aux industries de
le secteur de l’électricité d’aujourd’hui pour relever les mini-réseaux et hors-réseaux d’éclore pour fournir des
défis émergents et les défis existants (section b) ; et des services d’électricité aux communautés rurales pauvres
implications additionnelles destinées à être mises en dans de nombreux pays, dont le Zimbabwe, la Tanzanie
œuvre par les décideurs (section c). et d’autres pays.
5.1 Les éléments adaptés des réformes du Prendre des dispositions fermes pour garantir
«l’indépendance » budgétaire et décisionnelle de l’organe
«modèle standard» sont toujours pertinents
de régulation. Le cadre doit garantir l’indépendance
pour stimuler la performance du secteur opérationnelle et financière de l’organe de régulation
vis-à-vis du politique, tout en minimisant l’implication
Dissocier les rôles et responsabilités entre le politique dans la nomination ou l’établissement des
gouvernement et les sociétés d’électricité, en particulier directeurs et présidents d’organes de régulation.
par le biais d’une réforme de la réglementation, et Renforcer la capacité financière et opérationnelle de
les clarifier. L’amélioration de la gouvernance est l’organe de régulation permet d’assurer une transition
un signal clair pour attirer les investissements et en douceur vers des tarifs reflétant les coûts, à condition
permettre les efforts de réforme et de développement. qu’ils soient équilibrés avec les priorités d’équité sociale.
La bonne gouvernance ouvre la voie à une politique La dépendance des organes de régulation à l’égard
5. IMPLICATIONS POLITIQUES POUR LA CONCEPTION ET LA MISE EN ŒUVRE DE LA PROCHAINE VAGUE DE RÉFORMES 65
du processus politique et du gouvernement a nui au de production ces dernières années, surtout, dans le
succès des réformes dans d’autres situations, comme cas des sources renouvelables (solaires et éoliennes)
au Cameroun, en Guinée et en Zambie. d’électricité, par exemple. Les données établies montrent
que les appels d’offres et les adjudications ouverts à la
Faire en sorte que les tarifs soient prévisibles et reflètent concurrence permettent d’obtenir des prix inférieurs
les coûts (et soient applicables). Cette disposition à ceux des tarifs de rachat garantis ou des projets
crée une base de viabilité financière pour le service spontanés faisant l’objet de négociations directes.
public, aidant à attirer de nouveaux investissements
qui reposent sur un preneur bancable. Le Nigéria – un Améliorer les incitations et les structures pour améliorer
exemple à titre de mise en garde – a mis en œuvre de la gouvernance, la gestion et les systèmes des sociétés
nombreuses réformes du modèle standard, mais n’a d’électricité pour sous-tendre leurs performances
pas encore mis en place des tarifs reflétant les coûts. techniques et financières. La réglementation, la PSP, le
L’introduction d’une réglementation sur les compteurs dégroupage et la passation de marchés concurrentielle
qui assure un déploiement adéquat des compteurs sont importants, mais pas nécessairement suffisants
auprès des consommateurs d’électricité réduira les pour garantir la viabilité des sociétés d’électricité. Il est
raccordements illégaux fort répandus, améliorera la essentiel de mettre en place des mesures incitatives
méthode d’estimation de la facturation et réduira les bien alignées pour améliorer les performances. Les
vols d’électricité, ce qui permettra d’accroître la fiabilité, contrats de performance entre les actionnaires et les
l’efficacité opérationnelle et la viabilité financière de la conseils d’administration des sociétés d’électricité, ainsi
société d’électricité. qu’entre les conseils d’administration et la direction,
devraient prévoir des récompenses et des pénalités
Encourager la PSP, en particulier dans les liées à la performance réelle à moyen et à long terme.
investissements de production, dans un cadre juridique Le renforcement des capacités des actionnaires des
et réglementaire clair. L’investissement du secteur privé sociétés d’électricité, des ministères, des entreprises
et de sources internationales est essentiel pour permettre d’État et des organismes de réglementation est
à tout pays d’atteindre ses objectifs de développement essentiel pour permettre un suivi adéquat des contrats
du secteur de l’électricité. L’expansion et l’entretien de performance. Des interventions supplémentaires
du réseau peuvent aussi bénéficier considérablement sont aussi souvent essentielles pour renforcer les
de l’afflux de capitaux privés dans le cadre d’accords fonctions de base des sociétés d’électricité, appuyées
appropriés. Ces investissements ne peuvent être par les investissements nécessaires dans les nouvelles
possibles que dans un environnement approprié qui technologies et les systèmes opérationnels.
concilie équitablement les intérêts nationaux et publics
et les intérêts des investisseurs. Dans le même temps, 5.2 Pour faire face à l’avenir, il faut des
les contrats, les concessions et les investissements ont
réformes proactives des politiques, de
souvent été une source de controverse politique. Pour
atténuer ce risque, il faut s’assurer que des organes la réglementation, des marchés et des
de régulation respectés et matures sont en place avant institutions
d’autoriser la PSP au marché. Il est essentiel à cet égard
d’échelonner les interventions de réforme de manière Les transformations allant au-delà du secteur de
stratégique et opportune. l’électricité appellent un cadre de réformes des politiques,
de la réglementation, des marchés et des institutions qui:
Renforcer les capacités de planification du secteur de
l’électricité au moindre coût à l’échelle de la chaîne • sont flexibles pour faire face aux changements
de valeur. Ce domaine du secteur de l’électricité incertains déjà en cours ;
manque trop souvent de ressources et les pays sont • permettront l’émergence d’un portefeuille efficace
tributaires des subventions des donateurs et du travail de projets énergétiques à la fois centralisés et
des consultants pour actualiser leurs plans directeurs décentralisés ; et
du secteur de l’électricité. Les divisions de planification • structureront le secteur de l’électricité de manière à
doivent régulièrement actualiser leurs plans pour tenir réduire au minimum les conflits d’intérêts potentiels.
compte des données les plus récentes sur la demande et
les coûts, et pour éclairer la planification de l’acquisition Dégrouper l’activité de production de l’activité de
de la nouvelle production, ainsi que les initiatives axées transport pour créer des opérateurs de transport, de
sur la demande – l’investissement dans l’efficacité réseau et de marché indépendants, et pour éliminer
énergétique demeure l’une des solutions les moins les conflits d’intérêts potentiels (en particulier, dans les
coûteuses pour satisfaire la demande. Les documents réseaux de moyenne à grande taille, ayant une capacité
produits par des conseillers externes devraient servir installée allant en général au-delà de 1000 MW). Les
de cartes vivantes et à jour pour investir dans le réseau réseaux à acheteur unique donnent souvent lieu à des
électrique et l’entretenir. conflits d’intérêts : les entreprises étatiques de service
public doivent investir dans leur propre production tout en
Adopter des processus de passation de marchés étant obligées d’acheter de l’électricité auprès des PEI,
ouverts à la concurrence pour la nouvelle production suite à la planification du réseau. Dissocier les fonctions
d’électricité. Les appels d’offres concurrentiels ont d’exploitation et d’achat des systèmes et des réseaux
permis une chute spectaculaire des prix des projets de celles de l’investissement et de l’exploitation de la
66 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
production crée une plateforme permettant de planifier, et plus efficaces, afin d’interagir avec les consommateurs
d’acheter de l’électricité et de passer des contrats dans qui deviennent de plus en plus des producteurs d’énergie
ce domaine au moindre coût, de manière transparente (ou des « prosommateurs ») également. La distribution
et compétitive. Les rôles de planification, d’acquisition, et la vente au détail de l’électricité nécessiteront des
de passation de contrats et de répartition des ISO pour systèmes avancés de comptage et de paiement. Les
la gestion du réseau et des marchés de l’électricité redevances réglementées devront tenir compte de la
deviendront cruciaux à mesure que de nouvelles différenciation dans le temps des coûts de l’énergie,
technologies énergétiques à faibles coûts feront leur comme la capacité de pointe et hors pointe et les
apparition. Les opérateurs de réseaux centraux ou les redevances d’énergie pour les réseaux, les ressources
ISO devront renforcer les capacités dans de nombreux flexibles et les services pour garantir la fiabilité.
domaines, notamment pour :
Concevoir des tarifs, des subventions intelligentes, des
• organiser des ventes aux enchères efficaces pour politiques et des réformes du marché pour encourager
l’acquisition de nouvelles capacités énergétiques, l’investissement dans les ressources énergétiques
ainsi que de ressources flexibles et distribuées, distribuées et l’efficacité énergétique. Permettre
y compris des batteries, afin de compléter et l’émergence de marchés pour les accords entre
d’équilibrer les technologies de production d’énergie acheteurs et vendeurs volontaires, l’acheminement de
éolienne et solaire variables bon marché ; l’énergie à travers le réseau et les compteurs intelligents,
• gérer la variabilité, la flexibilité, la fiabilité et la stabilité afin d’encourager les ajouts de capacité à faible coût
du réseau, ainsi que la qualité grâce à une répartition par le biais de ressources énergétiques distribuées.
adaptée de la production et des services auxiliaires ; Alléger les droits de douane sur les matériaux et les
• planifier l’extension du réseau et l’interconnexion technologies d’efficacité énergétique, afin d’encourager
avec les systèmes localisés et les mini-réseaux l’investissement dans les économies d’énergie. Des
lorsque cela est économiquement faisable. structures tarifaires novatrices doivent accompagner
ces marchés afin de permettre aux sociétés d’électricité
Adopter les innovations dans les technologies d’étendre leur offre de produits.
habilitantes et les modèles d’affaires, y compris
l’investissement dans la recherche-développement Investir dans les interconnexions de transport et
(R&D) locale et la fabrication de produits énergétiques. les capacités institutionnelles associées (pools
La part croissante des énergies renouvelables à faible énergétiques, planification régionale, réglementation et
coût devra être complétée à la fois par des batteries à fins exploitation du réseau). Les pools énergétiques peuvent
commerciales et distribuées, ainsi que par une gamme créer des économies d’échelle, des gains d’efficacité
de ressources énergétiques distribuées. Elles rendront et une sécurité d’approvisionnement dans les cadres
les réseaux électriques plus efficaces et augmenteront réglementaires et commerciaux appropriés. Les réseaux
la capacité de production, tout en intégrant les énergies de transport et les centrales de production ont besoin
renouvelables variables et en catalysant la transition vers de capacités suffisantes pour soutenir le commerce
une croissance verte. L’adoption de mesures incitatives transfrontalier, y compris par des investissements
appropriées pour investir dans le renforcement des coordonnés pour l’entretien et l’expansion. Des entités
capacités et les centres locaux de fabrication de ces spéciales doivent être créées ou nommées pour
technologies permettront aux pays africains de tirer le coordonner et superviser les échanges transfrontaliers.
meilleur parti de ces innovations. Créer des politiques, des règles et des mécanismes
d’application communs entre les membres d’un pool
Libérer les marchés pour les ressources énergétique participant aux échanges transfrontaliers. Les
énergétiques distribuées grâce à des politiques et politiques et réglementations nationales doivent s’aligner
des réglementations tournées vers l’avenir. Les pays sur celles du niveau régional pour assurer la cohérence
doivent faciliter l’innovation et l’investissement dans les du marché. Les pools énergétiques ont besoin de cadres
systèmes énergétiques distribués à petite échelle en rationalisés pour organiser la planification des systèmes,
exemptant ou en simplifiant les conditions d’autorisation l’élaboration, la construction et l’exploitation des projets,
et d’enregistrement pour la production d’électricité ainsi que pour établir des règles commerciales régissant
à petite échelle, y compris les mini-réseaux et les le commerce de l’électricité, y compris la participation
systèmes hors réseau. Les sociétés d’électricité doivent des PEI (World Bank 2009). Les contrats doivent être
également adopter de nouveaux modèles commerciaux respectés afin de garantir la confiance et la sécurité
pour pénétrer ces nouveaux marchés ou, à tout le de l’approvisionnement en énergie. L’organisme de
moins, assurer une interface efficace avec ceux-ci, régulation régional ou tout autre organisme désigné a
notamment par le biais de coentreprises et de l’offre de besoin de mandats clairs pour régir le marché, y compris
services d’efficacité énergétique. Les cadres politiques les accords commerciaux, la tarification du transport
et réglementaires doivent s’ajuster pour permettre et le règlement des différends. Les responsabilités et
aux particuliers et aux entreprises de choisir comment pouvoirs relatifs à l’application des règlements et à la
et quand contrôler leurs services énergétiques, leurs présentation de conclusions des consultations sur les
fournisseurs et leurs clients. différends devraient être clairs.
Prêter attention à la dynamique d’un pouvoir politique et Considérer le développement du secteur de l’électricité
économique enraciné, en particulier dans les sociétés comme une combinaison d’approches optimales,
caractérisées par des niveaux élevés d’inégalité. La plutôt que comme un choix entre une approche fondée
faiblesse des institutions formelles et du développement sur le marché ou une approche étatique. Les ressources
économique, conjuguée à une forte dépendance vis- humaines, financières, techniques et organisationnelles
à-vis des investissements internationaux, constituent sont limitées dans de nombreux contextes, notamment
des contraintes majeures aux processus de réforme. dans les économies africaines. Les pays doivent exploiter
Les planificateurs et les partisans de la réforme peuvent toutes les capacités existant dans les secteurs privé et
sous-estimer le pouvoir de groupes d’intérêt particuliers public (Hudson and Leftwich 2014). Dans la communauté
d’influer sur les processus politiques, économiques, des praticiens du développement, le programme de «
réglementaires et physiques. Il peut en résulter des ratés gouvernance » ou de « bonne gouvernance » examine
dans les plans, avec des retours de bâton de la part du la manière d’y parvenir, en mettant l’accent sur la
public ou des échecs spectaculaires, voire des retours distribution du pouvoir et des contraintes y afférentes, les
en arrière, peu après (par exemple, au Gabon, en Afrique institutions bureaucratiques, juridiques et réglementaires
68 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
(y compris les capacités, l’indépendance et la mesure le Portail de l’énergie en Afrique, une plateforme pour
dans laquelle elles sont respectées), la corruption et la mettre à disposition d’importantes statistiques sur le
stabilité sociopolitique (World Bank 1989). secteur de l’électricité à travers le continent. L’étude des
secteurs de l’énergie dans 42 pays africains a révélé de
Assurer le suivi et évaluation des processus, des nombreuses leçons, mais a également montré combien
activités et des résultats après les réformes. Un organe il reste difficile d’accéder à des données standard et
de régulation du secteur de l’électricité indépendant peut actualisées pour aider à éclairer les décisions futures26.
être une force efficace pour assurer le suivi et évaluation Un projet de recherche à plus long terme examinant le
de l’évolution des nouvelles réformes, ainsi que pour bilan, les résultats et l’avenir des réformes permettrait
s’assurer que les nouvelles institutions et parties aux pays africains de suivre et d’obtenir des informations
prenantes respectent leurs contrats de performance. précieuses pour concevoir et gérer leurs secteurs de
Dans le cas du Nigéria, les réformes du secteur de l’électricité.
l’électricité n’ont pas répondu aux attentes, générant peu
de gains d’efficacité opérationnelle et d’expansion de la 5.4. La prochaine vague de réformes du
production d’électricité. Nombre d’acteurs du secteur
secteur de l’électricité est imminente
privé qui ont acquis les actifs appartenant auparavant
à l’État n’ont pas pleinement honoré leurs contrats de
D’importants progrès ont été réalisés au cours des
performance – ne parvenant pas à réduire les pertes
20 dernières années pour améliorer les secteurs de
et à étendre les sociétés d’électricité comme prévu –
l’énergie en Afrique, bien que les modèles de réforme
en partie, à cause de leur propre incapacité financière
proposés par les IFD n’aient pas été pleinement mis en
et des tarifs en vigueur ne reflétant pas les coûts qui
œuvre. La plupart des pays ont créé des régulateurs
devaient être pris en compte par le gouvernement.
indépendants et l’on note un mouvement général
vers une fixation des tarifs plus transparente, et seuls
Planifier des programmes de réforme qui doivent être
quelques-uns d’entre eux ont adopté des tarifs reflétant
souples et durables, rythmés et séquencés de façon
davantage les coûts. La PSP est de plus en plus
appropriée, en prêtant attention à la période transitoire
courante, en particulier grâce aux investissements
(Jamasb, Nepal and Timilsina 2015). S’assurer que les
dans les PEI. Certains pays ont également introduit des
réformes parviennent à leur mise en œuvre escomptée
concessions et des baux privés de sociétés d’électricité,
prend souvent plus de temps que prévu. Il importe donc
ainsi que des systèmes de transport et de distribution.
de planifier le maintien de l’élan du programme et de
Seuls quelques pays ont des services de production, de
gérer les attentes. Des forums réguliers de discussion
transport et de distribution dégroupés. Mais, une telle
ouverte entre les parties prenantes du secteur peuvent
restructuration deviendra de plus en plus importante à
aider à influer sur l’élaboration de politiques actualisées
mesure que les sociétés d’électricité relèveront les défis
et à réaffirmer l’engagement en faveur de la réforme.
de l’avenir.
La participation du public et des parties prenantes aux
processus d’élaboration des politiques peut contribuer
Les innovations accélérées dans les technologies,
à légitimer les programmes de réforme en renforçant la
les services et les marchés de l’énergie modifient
transparence et les pratiques de bonne gouvernance.
les marchés de l’énergie et les modes de production
Le choix de mesures de réforme stratégique pour
et d’utilisation de l’énergie. Les consommateurs
maintenir l’élan des réformes du secteur – par exemple,
d’électricité en Afrique deviendront progressivement et
l’introduction de cycles de passation de marchés
également des producteurs lorsque la numérisation,
concurrentielle des services de PEI – peut aider à
les technologies et les infrastructures d’information
atténuer l’incertitude des processus de consultation
et de communication intelligentes se généraliseront et
(Bhattacharyya 2007; Besant-Jones 2006; Jamasb,
que les prix des énergies renouvelables et distribuées
Nepal and Timilsina 2015; Williams and Ghanadan
baisseront et que des ressources de stockage seront
2006).
davantage disponibles. On s’attend à ce que les
structures physiques du réseau se transforment suite à
Élaborer des normes institutionnelles pour la collecte
ces changements.
de données sur le secteur de l’électricité dans tous
les pays africains, aux niveaux national et régional et
Certains pays africains sauteront probablement l’étape
par le biais de centres d’apprentissage internationaux
du passage à des marchés de gros et de détail complets,
– Le dicton « Le savoir, c’est le pouvoir » n’est pas
qui constitue la norme dans les pays de l’OCDE. Les
seulement un cliché, mais également une réalité qui
pays africains peuvent au contraire adopter diverses
façonne le monde. Le suivi de l’information à jour
innovations technologiques, commerciales et en matière
sur le secteur de l’électricité permet aux décideurs,
de marché et de règlementation, qui permettent de faire
aux planificateurs, aux organes de régulation et aux
un bond en avant vers un avenir de l’électricité plus
investisseurs d’acquérir de précieuses connaissances
résilient et durable sur le plan climatique.
pour s’acquitter de leurs fonctions et prendre des
décisions judicieuses. La collecte des données devrait
Compte tenu du rythme de l’innovation, la prochaine
être institutionnalisée et normalisée aux niveaux national
vague de réformes du secteur de l’électricité en Afrique
et des sociétés d’électricité. La BAD a récemment lancé
____________
26
Des 55 sociétés d’électricité membres de l’ASEA qui ont été contactés pour demander des données dans le cadre de la présente étude, seulement 23 (moins de la moitié) ont répondu à nos messages, tandis que
seulement 17 ont rempli le questionnaire (soit moins d’un tiers des personnes et entités interrogées).
70 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
Annexe
72 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
Annex
Annexe 1
Methodologie—Questionnaire
Le questionnaire est conçu comme un outil complet motivation, conditions et acteurs qui ont conduit
de collecte de données qui permet de recueillir des aux réformes), les catalyseurs (cadres contextuels
informations spécifiques sur les expériences des pays et ou acteurs qui ont facilité ou encouragé la mise en
les points de vue des sociétés d’électricité concernant œuvre des réformes) et les obstacles (conditions et
les réformes du secteur de l’électricité. Ces données acteurs qui ont empêché ou découragé les réformes)
servent à inventorier les facteurs contextuels historiques, pertinents pour les réformes du secteur de l’électricité
les événements donnant lieu aux réformes et les résultats dans le pays ;
en découlant, ainsi que les tendances et les perceptions • effets des réformes. Collecte des données pour créer
futures dans les pays participant à l’étude, afin de un instantané de la situation actuelle dans le secteur
brosser un tableau plus large des succès et des défis de l’électricité, en indiquant tout effet ou impact des
des réformes du secteur de l’électricité ainsi que des réformes. Le questionnaire sollicite notamment des
besoins actuels pour répondre aux tendances futures. données sur : les investissements et l’expansion
Le questionnaire est structuré en quatre parties : du réseau électrique ; la performance financière et
technique des sociétés d’électricité ; les niveaux
• calendrier des événements liés à la réforme et d’accès à l’électricité ; l’accessibilité financière pour
structure du secteur. Collecte des données sur les consommateurs ; le niveau de concurrence ; et
différents aspects de la réforme (y compris la politique, la corruption ;
la législation, la réglementation, la concurrence, la • tendances et préoccupations à venir. Fait un
restructuration et la participation du secteur privé), sondage des perceptions et des prévisions des
en précisant les dates pertinentes pour chaque participants à l’étude par pays quant à la pertinence
événement ou initiative de réforme ; et aux impacts potentiels de divers changements
• contexte des réformes : facteurs clés, catalyseurs prospectifs se produisant ou susceptibles de se
et obstacles. Demande aux participants à l’étude produire dans le secteur de l’électricité.
d’identifier les différents facteurs clés (facteurs de
Annexe 2
Entités ayant répondu au questionnaire
Le tableau ci-après présente les entités qui ont participé des postes au sein du gouvernement et chargés
à l’étude ou l’affiliation professionnelle des personnes qui de l’élaboration des politiques, et quatre d’experts
ont répondu au questionnaire. Au total, 30 réponses au indépendants travaillant dans le secteur de l’électricité.
questionnaire ont été reçues de 26 pays. Les deux tiers L’efficacité du questionnaire en tant qu’outil de collecte
des réponses (20) proviennent des sociétés d’électricité de données dépend de l’engagement de participants
ou de leurs responsables, six réponses proviennent de à l’étude bien informés dans le pays, qui sont bien
fonctionnaires travaillant pour les organes nationaux placés pour répondre à ses questions détaillées par des
de régulation du secteur de l’électricité ou occupant réponses franches et de qualité.
ANNEXE 73
Annexe 3
Annex 3 Liste des pays couverts par la réforme et
l’indice de Performance
Le tableau 3 montre, pour chaque pays, où la disponibilité La deuxième colonne indique, pour chaque pays,
des données a permis le calcul des scores pour l’Indice si suffisamment de données était disponible pour
de la Réforme et l’Indice de Performance. La première compléter les cinq indicateurs qui composent l’indice
colonne indique, pour chaque pays, si suffisamment de Performance (« Oui »). Pour les cas où certaines
de données a été identifié pour terminer tous les quatre données manquent pour compléter le score d’indice de
indicateurs qui composent l’indice de la réforme (« Oui Performance global, la colonne liste de cinq indicateurs
»). La colonne note où des données sont manquantes ayant suffisamment de données disponibles pour
pour constituer un score complet pour l’Indice (dans le composer une partition secondaire pour l’indicateur.
cas du Soudan, donnée suffisante indisponible sur l’état
de la réforme de la réglementation).
Annex 4
Méthodologie – Indices de réforme et de performance
L’un des objectifs de l’étude est d’évaluer la situation tiennent compte que de quelques variables parmi les
actuelle et les résultats des réformes. En plus de nombreuses qui pourraient intervenir – sont incapables
déterminer si, oui non, une réforme a été pleinement de proposer des causes, des diagnostics ou des
mise en œuvre et menée à bien, l’évaluation de ses relations définitives entre ces deux dimensions.
effets implique que l’on vérifie s’il existe un lien entre une Ci-dessous, nous décrivons les méthodologies qui
réforme mise en œuvre avec succès et les résultats du sous-tendent notre indice de réforme (IR) du secteur de
fonctionnement ou la situation du secteur de l’électricité l’électricité et l’indice de performance (IP).
à la suite de ces réformes.
Nous avons conçu une méthodologie d’indexation qui Indice de réforme (IR)
nous permet de créer un classement simple selon deux
dimensions, à savoir la performance et les réformes, basée L’IR est un classement numérique montrant l’ampleur
sur plusieurs variables clés d’un secteur de l’électricité. des différents types de réformes mises en œuvre dans les
Cette méthodologie d’indice nous permet de proposer pays africains couverts par l’étude. Cette méthodologie
des comparaisons simples de réseaux électriques dont s’inspire de la récente étude mondiale menée par la
les tailles, les technologies, les caractéristiques de Banque mondiale pour évaluer les réformes du secteur
performance, les structures commerciales et d’autres de l’électricité dans les pays en développement (Foster
caractéristiques de réforme sont très différentes. Elle et al 2017) et de la récente étude de la BAD sur
nous permet également de tester, de façon préliminaire l’ampleur des réformes de la réglementation du secteur
et provisoire, la façon dont les mesures de réforme de l’électricité en Afrique (AfDB 2018). Nous utilisons
ont mis en corrélation, ou non, les caractéristiques de les données des profils de pays du Réseau mondial
performance d’un réseau électrique. de promotion des énergies renouvelables pour le 21e
En quantifiant et en traitant un volume important de siècle (REN 21) (REN 21/Partenariat pour les énergies
données à l’aide d’une méthodologie bien définie, la renouvelables et l’efficacité énergétique, REEEP 2015),
création de ces indices nous permet de proposer des les publications précédentes de l’auteur principal27, ainsi
idées sur la façon dont la mise en œuvre de différents que des recherches documentaires pour les données
types de réformes aurait pu affecter ou interagir avec les actuelles.
différentes dimensions de la performance des réseaux
électriques. Toutefois, ces formules simples – qui ne Nous évaluons l’ampleur globale de la réforme du
____________
27
La série de connaissances sur l’énergie et la croissance économique d’Oxford Policy Management a été réalisée par le groupe de recherche de la Managing Infrastructure Investment Reform and Regulation in Africa
(MIRA) basé à la Graduate School of Business de l’Université du Cap.
76 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
secteur de l’électricité dans certains pays africains en 3). Pour chaque pays, nous déterminons le degré de
utilisant quatre dimensions parallèles de la réforme du chaque dimension de la réforme actuellement en place
secteur de l’électricité, à savoir : la réglementation, la et obtenons une note supérieure à 100. La moyenne des
restructuration, la concurrence et la PSP (voir Tableau quatre notes donne un indice global sur 100.
Ci-dessous, nous définissons chacune des quatre et financière des autorités gouvernementales ou
dimensions de la réforme et expliquons les paramètres politiques ;
de notation de l’indice. • l’organe de régulation possède une ou plusieurs
caractéristiques qui répondent aux exigences
Réforme de la réglementation des meilleures pratiques en matière de réformes
réglementaires. Tel que défini ci-dessous, l’organe
La réforme de la réglementation fait référence à la création de régulation présente une ou plusieurs des
officielle d’une entité indépendante ayant la responsabilité caractéristiques suivantes : un mandat légal pour
légale de prendre des décisions réglementaires et exercer ses fonctions ; la maturité institutionnelle ;
éventuellement de définir une politique réglementaire l’indépendance opérationnelle et financière.
pour les aspects commerciaux, et dans certains cas
techniques, les activités du secteur de l’électricité. En Aux fins de l’indicateur de la réforme de la réglementation
plus d’être établi par une loi ou un décret législatif, il est (IRR), nous définissons et évaluons l’organe de régulation
important que l’organe de régulation soit indépendant selon son degré de maturité, son mandat légal et son
dans la pratique de toute influence politique, afin de lui indépendance, comme ci-après :
permettre de jouir d’une impartialité appropriée dans sa
prise de décision et dans ses relations avec les entités • mandat légal. Il implique que l’organe de régulation
réglementées (y compris, par exemple, les services soit établi par la loi (loi sur l’électricité et acte
d’électricité). réglementaire), plutôt que par une loi sur l’électricité
Nous déterminons le degré de réforme de la exclusivement ou par décret présidentiel. Cela
réglementation à l’aide des sous-indicateurs ci-après : devrait permettre de se prémunir contre la
possibilité qu’un changement de gouvernement ou
• inexistence d’organe de régulation. Il n’existe pas de leadership entraîne des changements radicaux
d’autorité ou d’entité statutaire distincte pour assurer ou imprévisibles dans la politique réglementaire. Les
la régulation du secteur de l’électricité ; la régulation entités de régulation établies par le biais de lois et
se fait au travers de la politique et de la législation d’actes réglementaires du secteur de l’électricité
mises en œuvre par un service gouvernemental ; encouragent le respect du cadre réglementaire dans
• existence d’un organe de régulation. Une entité de une plus grande mesure que celles établies par
régulation existe, mais elle peut ne pas posséder les décret présidentiel. Un organe de régulation établi
autres caractéristiques requises pour se conformer par la loi jouit d’une crédibilité et d’une confiance
pleinement aux réformes de la réglementation, accrues auprès des investisseurs ;
telles qu’un mandat légal d’exercer des fonctions • maturité. En principe, un organe de régulation mature
de régulation ou l’indépendance opérationnelle possède une meilleure expérience et une meilleure
ANNEXE 77
• indépendance. Elle implique que l’organe de opérationnelle a trait aux règles et aux processus
régulation jouit d’une indépendance opérationnelle entourant la nomination et la conduite des directeurs
et financière (budgétaire). L’indépendance de de la régulation ou des membres du conseil
l’organe de régulation limite les conflits d’intérêts d’administration, y compris les règles concernant
qui pourraient survenir entre les autorités politiques les relations professionnelles et financières des
et l’organe de régulation. L’indépendance personnes nommées avec les entités et sociétés
Nous attribuons des points aux organes de régulation en fonction de leur degré d’indépendance, comme ci-après:
Annexe 5
Données supplémentaires sur les PEI en Afrique
This section contains charts drawn from MIRA’s database, with additional information on IPPs in Africa in 2019.
90
80
70
60
50
40
31
30
19
20
11 9
10 6 5 4 3 2 1
0
pe di
a
Ug t
Na da
ia
Se a
M gal
M cco
us
d' a
Za ia
Al a
ba a
m r
am ia
Rw ue
A a
ad ola
rra on
in e
o
Tu i
Ga e
Ni e
Bu ia
ng bia
ea
Gu .
T we
go
al
p
yp
Ca sca
ny
ric
te an
bi
Zim geri
d
ir
rk on
rd
as
ib
oz an
s
Ca u n
Re
riE
in
an
an
q
Sie ero
ge
Ivo
To
ni
ne
M ng
m
Co m
Eg
Ve
o
aF
Ke
m
Af
Cô Gh
bi
Bu Le
a
M anz
r
or
o,
au
ag
h
ut
So
____________
28
SAIDI: the annual average duration of power outages for each customer served; SAIDI: the average number of interruptions that a customer would experience in a year.
29
The cost component includes all the fees and costs associated with completing the procedures to connect a facility to electricity, excluding value-added tax. These include the related costs of obtaining government
permits, applying for connection, site and internal wiring inspection, buying materials, securing actual connection works, and paying the applicable security deposit.
So So
ut ut
0
1000
2000
3000
4000
5000
6000
7000
8000
9000
h
0
5000
10000
15000
20000
25000
Af h
ric Af
a M rica
Eg or
oc
7675
M ypt co
19,670
or Eg
oc
8,824
c yp
Al o
3531
Gh t
4,189
ge
r an
Ni ia Ni a
2,852
ge ge
ria r
Al ia
2030
Gh
an ge
a ria
Cô Ke Ke
2,492
te ny ny
d' a Ug a
Ivo an
i da
Se re
866
ne Cô Zam
1,686
ga te bi
Ug l d' a
an Iv
d M oire
au
Za a
604
m riF
bi
Tu a Se us
n ne
g
T isia Rw al
883
M anz an
oz an
am ia T da
bi M anz
oz an
M que am ia
au b
355
Ca riPu Ca iqu
m s m e
Co ero Co ro e
ng on ng on
468
o,
304
o, Re
Re p
Na p. Tu .
m ni
ib sia
Rw ia An
an go
da la
153
M
Zim Ma al
i
ba li To
bw
e Na go
196
m
Figure 23—Capacité installée des PEI par pays
To ib
go Gu ia
Sie Ang Zim ne i
rra ola b a
72
Le Ca abw
on pe e
90
Figure 22—Montant total des investissements des PEI par pays
G e Sie Ve
M uin rra rde
ad e
a a
50
Bu gas Bu Le
rk on
rk ca
in in e
a r M aF
ad as
Ca Fa
51
pe so ag o
as
34,6
Ve
rd c
Ga ar
Ga e m
m b
b Bu ia
Bu ia ru
ru nd
i
22
nd
i
7,5
ANNEXE
81
82 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
Annexe 6
Références
Africa Intelligence, Veolia’s SEEG ejection: Libreville picks arbitrator at last, last modified January 2019,
https://www.africaintelligence.com/aem/consultants/2019/01/15/veolia-s-seeg-ejection-libreville-picks-arbitrator-
at-last,108340285-bre
African Development Bank, Interconnecting, integrating and transforming a continent, Programme for Infrastructure
Development in Africa, 2013, https://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/ Documents/Project-and-Operations/
PIDA%20 note%20English%20for%20web%200208.pdf
African Development Bank: Power, Energy, Climate Change and Green Growth Complex, Electricity Regulatory
Index for Africa, 2018. https://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Generic-Documents/Electricity_
Regulatory_Index_2018.pdf
Baako, Abdul, “Local content law …engine of growth for Ghanaian enterprises,” GhanaWeb, last modified
February 2014. https://www.ghanaweb.com/GhanaHomePage/NewsArchive/Local-content-law-engine-of-
growth-for-Ghanaian-enterprises-301693
Besant-Jones, John E. 2006. Reforming power markets in developing countries: what have we learned? Energy
and Mining Sector Board discussion paper 19. Washington, DC: World Bank. http://documents.worldbank.org/
curated/en/483161468313819882/Reforming-power-markets-in-developing-countries-what-have-we-learned
Bhattacharyya, Subhes, “Power sector reform in South Asia: Why slow and limited so far?” Energy Planning, Policy
and Economy, 2007, 35(1)
Buljan, Adrijana. Offshore wind and meshed offshore grid(s) to benefit energy security in EU, offshorewind.biz, last
modified in October 2018. https://www.offshorewind.biz/2018/10/19/offshore-wind-and-meshed-offshore-grids-
to-benefit-energy-security-in-eu/
Eberhard, Anton and Catrina Godinho, “A Review and Exploration of the Status, Context and Political Economy
of Power Sector Reforms in Sub-Saharan Africa, South Asia and Latin America,” Management of Infrastructure
Investment and Reforms in Africa (MIRA) Program Working Paper, University of Cape Town Graduate School of
Business, 2017. http://www.gsb.uct.ac.za/files/Eberhard_Godinho_2017.pdf
Foster, Vivien, Samantha Witte, Sudeshna Ghosh Banerjee, Alejandro Moreno, Charting the Diffusion of
Power Sector Reforms across the Developing World, Policy Research Working Paper 8235, Washington, DC:
World Bank Group, 2017. https://openknowledge.worldbank.org/bitstream/handle/10986/28853/WPS8235.
pdf?sequence=1&isAllowed=y
Global Transmission Report, “Update on Brazilian power sector: Key highlights of 2017,” 8 January 2018. https://
www.globaltransmission.info/archive.php?id=32000
Gore, C.D., J. N. Brass, E. Baldwin, and L. M. MacLean. “Political autonomy and resistance in electricity sector
liberalization in Africa.” World Development, 2018. doi:10.1016/j.worlddev.2018.03.003
Gratwick, Katharine N. and Anton Eberhard. “Demise of the standard model for power sector reform and the
emergence of hybrid power markets,” Energy Policy, 36(10), 2008
Hudson, David and Adrian Leftwich. “From Political Economy to Political Analysis,” DLP Research Paper, 2014.
IRENA. The socio-economic benefits of solar and wind energy, 2014. https://www.irena.org/-/media/Files/IRENA/
Agency/Publication/2014/Socioeconomic_benefits_solar_wind.pdf
Jamasb, Tooraj, R. Nepal, R., G. Timilsina. “A Quarter Century Effort Yet to Come of Age: A Survey of Power
Sector Reforms in Developing Countries,” World Bank Policy Research Working Paper, 2015, https://
openknowledge.worldbank.org/handle/10986/22211
Kapika, Joseph and Anton Eberhard. Power-Sector Reform and Regulation in Africa: Lessons from Kenya,
Tanzania, Uganda, Zambia, Namibia and Ghana. Human Sciences Research Council Press, Cape Town, 2013
ANNEXE 83
Kaufmann, Daniel, Aart Kraay, and Massimo Mastruzzi. “The Worldwide Governance Indicators: Methodology and
Analytical Issues,”World Bank Policy Research Working Paper No. 5430. 2010
Kojima, Masami and Chris Trimble. Making Power Affordable for Africa and Viable for Its Utilities, ESMAP/World
Bank Group, 2016
Kruger, Wikus, Anton Eberhard, and Kyle Swartz. “Renewable Energy Auctions: A Global Overview,” Report for
Energy and Economic Growth Research Programme, 2018
Mbodiam, Brice R. “A 10 years’ extension on public service concession on electricity in Cameroon was
granted to Actis,” Business in Cameroon, last modified October 2017. https://www.businessincameroon.com/
electricity/0510-7447-a-10-years-extension-on-public-service-concession-on-electricity-in-cameroon-was-
granted-to-actis
Multiconsult “Roadmap to the New Deal on Energy for Africa: An analysis of optimal expansion and investment
requirements,” Report to the African Development Bank, 2018
Nsikak, John. “Blockchain can revolutionise the energy industry in Africa,” World Economic Forum, last modified
November 2018. https://www.weforum.org/agenda/2018/11/blockchain-will-change-the-face-of-renewable-
energy-in-africa-here-s-how/.
O’Boyle, Mike. “Three ways electric utilities can avoid a death spiral,” Forbes.com, last modified September 2017.
https://www.forbes.com/sites/energyinnovation/2017/09/25/three-ways-electric-utilities-can-avoid-a-death-
spiral/#4f4904f2758d
OECD (2015), «Local-content requirements in the solar- and wind-energy global value chains», in Overcoming
Barriers to International Investment in Clean Energy, OECD Publishing, Paris. https://www.oecd-ilibrary.org/
environment/overcoming-barriers-to-international-investment-in-clean-energy/local-content-requirements-in-the-
solar-and-wind-energy-global-value-chains_9789264227064-6-en.
Olingo, Allan. “Boost for East Africa power pool project as Dar, Nairobi secure $600m,” The East African, last
modified July 2018. https://www.theeastafrican.co.ke/business/Boost-for-East-Africa-power-pool-project/2560-
4642124-tgp4b6/index.html
Olingo, Allan. “Phase one of regional power pool project set for completion by mid-2019,” The East African, last
modified August 2018. http://www.theeastafrican.co.ke/business/Phase-One-of-regional-power-pool-project-set-
for-completion/2560-4699790-g706gj/index.html.
Power Futures Lab/Managing Infrastructure Investment and Regulation in Africa Programme. Internal database.
University of Cape Town Graduate School of Business.
REN 21 and Renewable Energy and Energy Efficiency Partnership (REEEP). “Country Profiles,” reegle, 2015,
https://www.reegle.info/countries/.
Thomson Reuters. “Gabon accuses France’s Veolia of polluting amid concession dispute,” last modified February
2018, https://www.reuters.com/article/us-gabon-veolia-environ/gabon-accuses-frances-veolia-of-polluting-amid-
concession-dispute-idUSKCN1GB2OO.
Trimble, Chris. “The performance of power utilities in Africa,” presentation. World Bank Group, 2018.
Victor, David, and Thomas Heller (Eds.). (2007). The Political Economy of Power Sector Reform: The Experiences
of Five Major Developing Countries. Cambridge: Cambridge University Press.
Williams, J. H., R. Ghanadan, “Electricity reform in developing and transition countries: A reappraisal,” Energy 31,
2006.
World Bank. World Development Report 1989: Financial Systems and Development, Oxford University Press. ©
World Bank, 1989. https://openknowledge.worldbank.org/handle/10986/5972
World Bank. International Experience with Cross-border Power Trading. Washington, DC, 2009
World Bank/Public-Private Infrastructure Advisory Fund. Linking Up: Public-Private Partnerships in Power
84 REVUE DES RÉFORMES DU SECTEUR DE L’ÉLECTRICITÉ EN AFRIQUE
World Bank. Worldwide Governance Indicators, 2018, © World Bank Group. Accessed at http://info.worldbank.
org/governance/wgi/index.aspx#home
World Bank: Doing Business, “Getting Electricity: Cost % of income per capita,” 2018, http://www.doingbusiness.
org/en/data