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Argumentation et Analyse du Discours 

29 | 2022
Discours politique et usages du passé en Argentine

La notion d’ethos : faire dialoguer l’analyse du


discours selon D. Maingueneau et la théorie de
l’argumentation dans le discours 
The notion of ethos: A dialogue between D. Maingueneau's Discourse Analysis
and Argumentation in Discourse

Ruth Amossy

Édition électronique
URL : https://journals.openedition.org/aad/6869
DOI : 10.4000/aad.6869
ISSN : 1565-8961

Éditeur
Université de Tel-Aviv

Édition imprimée
Date de publication : 18 octobre 2022
 

Référence électronique
Ruth Amossy, « La notion d’ethos : faire dialoguer l’analyse du discours selon D. Maingueneau et la
théorie de l’argumentation dans le discours  », Argumentation et Analyse du Discours [En ligne], 29 |
 2022, mis en ligne le 18 octobre 2022, consulté le 20 octobre 2022. URL : http://
journals.openedition.org/aad/6869  ; DOI : https://doi.org/10.4000/aad.6869

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- CC BY-NC-ND 4.0
https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/
La notion d’ethos : faire dialoguer l’analyse du discours selon D. Mainguenea... 1

La notion d’ethos : faire dialoguer


l’analyse du discours selon D.
Maingueneau et la théorie de
l’argumentation dans le discours
The notion of ethos: A dialogue between D. Maingueneau's Discourse Analysis
and Argumentation in Discourse

Ruth Amossy

RÉFÉRENCE
Dominique Maingueneau. 2022. L’ethos en analyse du discours (Louvain-la-
Neuve : éditions Academia), ISBN : 978-2-8061-0647-6, 184 pages.

1. La notion d’ethos discursif : un cadrage linguistique

1 L’ouvrage de Dominique Maingueneau, L’ethos en analyse du discours, répond au besoin


de rassembler en une synthèse cohérente les nombreux écrits sur l’ethos de celui qui a
plus que tout autre contribué à introduire, mais aussi à théoriser, cette notion en
analyse du discours (AD)1. Il prolonge ce faisant ses tentatives récentes de faire le point
sur la nature de cette notion et les problèmes que soulève son exploitation (ainsi, par
exemple, Maingueneau 2014). Comme l’auteur l’indique, il n’y a guère, en-dehors de La
présentation de soi. Ethos et identité verbale (Amossy 2010), de livre entièrement consacré
à la question – si l’on ne tient pas compte de divers collectifs, comme Images de soi dans
le discours (Amossy éd. 1999), et dernièrement Ethos collectif et identités sociales (Orkibi et
Amossy éds 2021), ou encore de numéros spéciaux de revue (comme Grinshpun éd.
2014. Ethos discursif, Langage et Société 149 ou Couleau et al. éds 2015. Ethos numériques,
Itinéraires) – recueils auxquels D. Maingueneau a d’ailleurs contribué.

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2 Qui plus est, mon propre livre de synthèse (Amossy 2010) se situe délibérément à la
croisée des disciplines, comme le signalait déjà le titre de l’article de 1999 paru dans
Images   de   soi   dans   le   discours : « L’ethos au carrefour des disciplines : rhétorique,
pragmatique, sociologie des champs ». Il se propose, non seulement de construire un
cadre théorique adapté à ce que j’appelle « l’argumentation dans le discours », mais
aussi d’esquisser un panorama des nombreux travaux réalisés jusque-là,
principalement dans le domaine francophone. Le chef de file de l’AD « à la française »
entend, quant à lui, explorer les tenants et les aboutissants de l’ethos discursif dans le
champ bien délimité de sa propre discipline ; il expose les résultats de ses recherches
personnelles sur l’ethos dans cette branche particulière des études du discours. C’est
cette focalisation que souligne un intitulé en apparence anodin : L’ethos en analyse du
discours. Il attire l’attention sur le fait que l’ouvrage travaille à appréhender la notion
dans l’espace singulier de l’AD, plutôt que dans le domaine de la sociologie, de la
rhétorique et de l’argumentation, de la socio-pragmatique et de l’analyse des
interactions – ou à leur intersection.
3 Ce cadrage rigoureux signifie selon l’auteur qu’« étudier l’ethos, c’est en réalité étudier
l’énonciation » (7) – et c’est bien parce que l’ethos est un phénomène d’énonciation qui
relève des sciences du langage qu’il y occupe une place légitime. C’est aussi pourquoi il
importe de le saisir dans ses modalités langagières et sa régulation. L’auteur note
cependant que pris en gros, l’ethos se signale par un ensemble de traits communs
« relativement pauvre ». Aussi délaisse-t-il toute tentative de fournir une grille à valeur
générale. C’est selon lui au niveau des types et des genres de discours qu’on peut saisir
la régulation et les modes de fonctionnement de l’ethos à la croisée du discursif et du
social (comme le veut l’AD) dans leur richesse et leur complexité. Cette exploration
permet d’élaborer ou d’affiner les outils nécessaires pour analyser les configurations
singulières de l’ethos dans des cas de figure particuliers.
4 Pour ce faire, D. Maingueneau choisit de ne pas se situer uniquement au niveau
théorique. Il mène son enquête sur des corpus concrets (locuteurs politiques, porte-
parole des sans-voix, spécialistes du management, représentants de l’Action française,
textes littéraires, …) dont il fournit des analyses détaillées. Certaines sont reprises à des
publications antérieures mais développées ou infléchies (comme le signalent les notes),
et certaines sont inédites. Ensemble, elles offrent un panorama qui permet de préciser
mais aussi de revisiter la notion, et de repenser des aspects qui n’avaient pas été
suffisamment questionnés.
5 Ayant largement puisé dans les travaux de D. Maingueneau (toujours cité dans mes
écrits comme une référence primordiale) pour aborder, et traiter, de la question de la
construction d’une image de soi dans le discours, j’ai été extrêmement intéressée par le
projet de circonscrire strictement la notion d’ethos en termes d’AD, de voir son
rendement quand elle est utilisée dans ce cadre pour explorer des types et des genres
de discours divers, en bref, de comprendre comment l’ethos est ici pensé. Quelle est la
spécificité de l’approche synthétisée, en quoi diffère-t-elle des autres angles d’attaque
proposés sur la même question, quels sont ses bénéfices et/ou ses éventuelles limites ?
Comment la lecture de l’ouvrage permet-elle par ailleurs de reprendre des aspects de
l’ethos qui ont été insuffisamment approfondis, ou de cerner des questions de portée
générale qui restent ouvertes ? On l’aura compris, ce texte se veut moins un compte
rendu de l’ouvrage qu’une réflexion critique qui entre en dialogue avec lui pour
relancer un questionnement commun.

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6 Pour ce faire, je ne m’en tiendrai pas nécessairement à l’ordre des chapitres, mais
organiserai ma présentation autour de points parfois traitées à divers endroits de
l’ouvrage, et qui me semblent faire l’originalité d’une approche d’AD et, parfois,
soulever des questions stimulantes. Précisons donc dans ce texte liminaire qu’une
première partie du livre explore la problématique de l’ethos en AD tout en exposant les
distinctions au fondement de l’approche de l’auteur, alors que les cinq autres
parties (« Montrer qui on est », « Faire adhérer », « Ethos polyphoniques », « Ethos
enchâssés » et « La part des choses ») étudient l’ethos dans des cadres discursifs variés,
pour concrétiser les notions mises en jeu.

2. L’étude formelle de l’ethos : catégories énonciatives

7 La première partie, significativement intitulée « Problèmes d’ethos », reprend


succinctement et avec certains ajouts les notions déjà élaborées par ailleurs par
l’auteur. Notons que la perspective de l’AD, comme celle de l’argumentation dans le
discours qui s’en inspire (Amossy 2021 [2000]), étend élargir à tout discours une
appellation que la rhétorique classique réservait aux discours destinés à persuader. On
considère désormais qu’au-delà des genres oratoires visant à la persuasion, tout
discours projette bon gré mal gré une image du locuteur à l’intention de
l’auditoire : c’est un effet de l’énonciation et non pas simplement, comme le voudrait
Aristote, un moyen de preuve lié à la triade logos, ethos, pathos.   Cette approche
englobante (qui comprend non seulement l’oral mais aussi l’écrit et l’iconique) dont D.
Maingueneau est l’un des pionniers est caractéristique de toutes les études
contemporaines sur l’ethos, ce qui ne les empêche pas bien sûr d’en analyser le cas
échéant les vertus persuasives et performatives.
8 Dans son entrée en matière, D. Maingueneau rappelle la distinction fondamentale, et
extrêmement précieuse, qu’il avait établie entre l’ethos dit (ce que le locuteur dit de lui-
même au niveau de l’énoncé) et l’ethos montré (ce que les modalités d’énonciation du
locuteur révèlent de sa personne). L’écart entre les deux peut générer des effets qui
varient en fonction du genre de discours, et qui perturbent ou au contraire viennent
servir des stratégies de présentation de soi (Partie II, 1 « Quelques mots à propos de
moi » et 2 « Quand l’écrivain se manifeste »). On y retrouve aussi en bonne place la
distinction reprise à Images   de   soi   dans   le   discours (1999) entre ethos   discursif et
prédiscursif, que l’auteur définit (en suivant Amossy 2010) soit comme le statut du
locuteur (son autorité) soit comme les images préalables qui circulent de sa
personne (sa réputation). Cet ethos prédiscursif peut, en l’absence d’autres indices, être
déduit du type ou du genre de discours mobilisé (par ex. l’image qu’on se fait d’un
romancier). D. Maingueneau rajoute une catégorie qu’il nomme l’ethos intrinsèque qui
serait constitutif de l’individu : adulte ou enfant, homme ou femme, handicap, etc.
9 Une petite remarque à ce stade. Cet ajout ne me semble pas indispensable dans la
mesure où le genre, l’âge, l’origine ethnique, la beauté ou la laideur, etc. font partie de
l’ethos prédiscursif (ou, comme je l’avais appelé, ethos préalable) qui ne se résume pas au
statut et à la réputation ; il consiste dans l’ensemble des données disponibles sur le
locuteur au moment où il prend la parole (Amossy 2010 : 73). Que la personne soit
homme ou femme, adulte ou enfant, blanc ou de couleur, etc., fait partie de ces
données – lesquelles s’accompagnent des représentations sociales attachées à ces
catégories. Ce dernier élément est capital : comme je l’écrivais ailleurs, « l’ethos ne se

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confond pas avec la réalité de la personne, mais consiste en la schématisation d’une


réalité préexistante » (ibid. : 77). La notion d’ethos « intrinsèque » risque de suggérer
une « nature » qui s’imposerait a priori, même si ce n’est bien sûr pas ce qu’entend
l’analyste du discours qui ne réfléchit pas en termes d’essence. Elle risque alors de
voiler ce qui fait à mes yeux l’intérêt de l’ethos prédiscursif : la possibilité d’étudier le
retravail de l’ethos et, par-là, de déceler la capacité du locuteur à construire une image
de soi qui modifie ou déjoue les représentations préalables, ou encore qui les infléchit
pour mieux atteindre l’objectif de l’échange verbal.
10 Dans l’ensemble des analyses, qui rassemblent des discours empruntés à divers genres
et différentes époques, l’auteur nous montre tout le parti qu’on peut tirer de la
distinction entre ethos   dit et montré, et suggère des catégories supplémentaires
qu’appelle à son avis un examen attentif des textes. Ainsi, la notion d’ethos montré est
mise en relation avec celle de style : par exemple, le travail sur la langue qui permet de
se présenter dans certaines petites annonces sur les sites de rencontres, ou encore la
façon dont les modes d’énonciation singuliers d’un manifeste artistique projettent un
ethos moderniste sans qu’il y ait besoin de recourir à un dire explicite. La juxtaposition
des deux genres de discours précités, totalement distincts, montre bien que le style
déborde ici largement la sphère littéraire pour se rapporter aux façons de dire du
locuteur individuel (l’émetteur de l’annonce) ou collectif (le ou les émetteurs du
manifeste). On peut bien sûr se demander dans quelle mesure le style se confond avec
les modalités d’énonciation, ce qui appelle une réflexion plus approfondie sur la notion
de style et son utilisation dans l’étude de la présentation verbale de soi.
11 Fidèle à son projet d’étudier l’ethos dans le cadre de l’énonciation, D. Maingueneau y
ajoute la notion d’ethos discursif « enchâssé » incarné par le locuteur qui rapporte les
paroles de l’autre, que ce soit le journaliste, le dramaturge ou le romancier (V, 1
« L’intenable ethos de l’archiénonciateur »). Cet élément fait écho aux études du
discours rapporté dont traite l’ouvrage d’Amossy de 2010 (« Les jeux de l’ethos dans le
discours rapporté », 148-153) et, comme elles, Maingueneau se penche sur le jeu subtil
de la construction d’ethos du locuteur dit « enchâssant » dans son rapport à l’ethos du
locuteur « enchâssé ». Comment celui qui rapporte la parole des autres manie-t-il celle-
ci de façon à orienter la façon dont s’y construit une image de soi ? Mais aussi,
comment se dit-il indirectement à travers les mots des autres qu’il rapporte, et qui
profitent en dernier lieu à sa propre image ?
12 Examinant le cas de l’effacement énonciatif – à savoir, des locuteurs invisibilisés –
l’ouvrage se penche plus particulièrement sur un cas problématique : celui du
dramaturge, repensé à travers l’exemple de Molière. Là où certains nient l’existence
d’une image d’auteur interne à la pièce dans le cas du théâtre (Siess 2009),
Maingueneau pose au contraire l’hypothèse d’un « archiénonciateur » invisible mais
néanmoins présent (position défendue en 1985 par Michael Issacharoff) ; il s’exerce à le
montrer à travers une analyse fine de Le   Misanthrope et L’école   des   femmes. De quoi
relancer la réflexion sur l’image d’auteur qui a fait couler beaucoup d’encre. S’y ajoute
même l’hypothèse d’un ethos du metteur en scène qui, à l’époque contemporaine, « fait
interagir les ethos2 de l’archiénonciateur et des personnages avec le sien » (123). Là
encore, il s’agit d’une constatation suggestive qui invite à des études plus approfondies.
Encore faut-il rappeler qu’elle nous fait passer du plan de la pièce de théâtre à celui de
la représentation, deux plans qui bien sûr ne peuvent être confondus.

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13 À l’analyse de l’ethos   enchâssé  au théâtre s’ajoute celle, plus aisée, de l’ethos du


narrateur dans le roman (V, 2 « Ethos de narrateur, ethos de personnage »). Ainsi dans
Emma de J. Austen, « la narratrice fait partager au lecteur son ethos  teinté d’ironie »,
lequel lui permet de disqualifier « les ethos discursifs enchâssés », ceux de ses
personnages (135). Les cas de Zola ou Barbey d’Aurevilly conduisent l’auteur à poser la
présence d’une instance textuelle nommée « archinarrateur » ; celle-ci désigne dans le
récit une voix qui domine les autres, avec des traits stylistiques transversaux. L’AD
croise ici la poétique dans ses catégorisations formelles destinées à éclairer le
fonctionnement du récit ; elle le fait cependant sans négliger d’en dégager les enjeux
sociaux : elle montre ainsi que l’ethos enchâssant des deux romanciers français donne
accès à un monde autre, celui du peuple (selon des modalités diverses détaillées dans
l’analyse), contrairement à l’ethos de régulatrice manifestant ce que devraient être les
normes qui caractérise J. Austen.
14 Dans l’optique des voix qui en rapportent d’autres, l’ouvrage reprend par ailleurs la
notion d’ethos collectif à travers la figure politique du porte-parole qui parle au nom
d’une collectivité, rôle dont il lui incombe de faire reconnaître la légitimité (IV « Ethos
polyphonique », 1 « Le corps du porte-parole »). L’auteur distingue le porte-parole
« délégué », donc institutionnel, et le porte-parole « inspiré » par des motivations
d’ordre éthique, qui s’appuie sur le seul pouvoir de sa réputation (comme Bové dans le
discours étudié dans l’ouvrage [92]). Dans la catégorie de ceux qui énoncent au nom des
autres, D. Maingueneau introduit la catégorie des « porte-voix », ceux qui relaient une
plainte ou une revendication venant d’en bas, de sujets qui ne peuvent et/ou ne savent
pas prendre la parole (IV, 2, « Du porte-voix à l’administratif »). Il prend comme
exemple les cas des figures compassionnelles qu’il avait d’ores et déjà
analysées (Maingueneau 2020), pour montrer comment les locuteurs qui entendent
faire entendre la voix inaudible de l’autre peuvent y parvenir (le groupe de Rock « Les
Sans-Voix », la « Chanson des Enfoirés » (103-107). Il avance pour ce faire la notion de
« superethos » – une tentative de cerner une spécificité qui apporte une précision mais
risque en même temps de démultiplier les catégories avec le risque de confusion que
cela peut apporter. En même temps, cette étude fait réfléchir sur le fait (qu’elle ne
mentionne pas explicitement) que ceux pour lesquels on prend la parole sont privés,
jusque dans cette constellation censée jouer en leur faveur, d’ethos et donc incapables
de récupérer leur agentivité : ils restent enfermés dans l’image de l’autre, celui au nom
de qui on parle et qui ne peut pas se construire d’identité autonome.
15 Enfin, l’auteur propose la catégorie d’ethos « décorporé » sur laquelle on reviendra plus
loin, et qui répond aux cas des « locuteurs dissimulés » (Amossy 2010 : 182-208). Ce sont
ceux qui ressortent essentiellement des discours fortement contraints où il semble que
personne ne parle (textes scientifiques, textes de loi, discours administratifs,
doctrinaires, …) et qui néanmoins comportent un énonciateur caché projetant un ethos 
à travers ses façons de dire.

3. La spécificité d’une étude de l’ethos dans une perspective d’AD


3.1. Un caractère contraint : les déterminations sociales

16 Un élément capital sur lequel l’ouvrage revient en ce qui concerne la construction


discursive de l’ethos est son caractère contraint. En effet, l’image de soi projetée par le
locuteur est au moins partiellement déterminée par la scène englobante (qui se

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rapporte au type de discours : le discours politique, ou médiatique, par exemple), et la


scène générique (qui se rapporte au genre de discours : une interview télévisée, par
exemple). C’est seulement, comme l’avait déjà souligné l’auteur, au niveau de la
scénographie que le locuteur peut effectuer un libre choix. A ce niveau, il sélectionne
son propre scénario et sa distribution des rôles, même s’ils dépendent en partie des
normes constitutives des deux autres scènes dans lesquelles ils s’insèrent. Ce rappel des
notions de base ancre bien l’ethos   dans  le champ de l’AD qui insiste sur les
déterminations socio-historiques, politiques et culturelles pesant sur celui ou celle qui
prend la parole ou la plume.
17 Dans la suite de l’ouvrage (IV, 1 « Agencement et ethos éditorial », 2 « Les lieux de la
confession »), l’auteur ajoute des éléments qui font peser des contraintes
supplémentaires sur la construction d’ethos. Il parle ainsi de « l’agencement » qui se
réfère à l’organisation de l’espace de la communication (148) – le pupitre surmonté
d’un microphone derrière lequel parle l’orateur, ce qui favorise un ethos institutionnel,
ou le confessionnal du passé par rapport à l’espace de la confession tel qu’il est conçu
aujourd’hui, qui établit entre le prêtre et le fidèle un rapport de conversation (168).
Une tension peut se créer entre l’agencement et la scénographie ; ainsi par exemple
l’agencement par définition polémique du débat télévisé d’entre-deux tours entre F.
Hollande et N. Sarkozy entre en tension avec la tirade d’anaphores rhétoriques (« Moi,
président… ») dans laquelle se lance Hollande en transcendant la situation
d’énonciation pour se poser en « surlocuteur » rassemblant l’auditoire autour de ses
valeurs (150). La notion d’agencement est étendue à l’écrit, en particulier à travers la
notion d’ethos   éditorial – le nom d’une maison d’édition, d’une collection active un
certain ethos qui peut différer pour le même auteur, comme on le voit dans l’exemple
sur le philosophe Michel Serres. Là aussi, il peut y avoir harmonie ou tension entre
l’ethos éditorial et l’ethos auctorial, ce qui donne lieu à des cas de figure intéressants.
L’essentiel est ici que dans tous les cas précités, la dimension sociale et institutionnelle
est ancrée dans des espaces et des objets concrets (une salle de classe, un microphone,
une couverture de livre, etc.), qui contribuent à configurer la présentation de soi.

3.2. L’importance de la corporalité

18 Cette insistance sur les aspects matériels qui participent à la modélisation d’un ethos 
s’accompagne d’une insistance très sensible sur la corporalité, qui fait elle aussi l’une
des originalités de l’approche de D. Maingueneau (plus que de l’AD de façon générale).
Pour lui, l’objet d’étude se rapporte à « une manière de dire, un corps parlant,
articulateur privilégié entre une activité verbale et le monde dont elle participe » (174).
C’est ainsi, par exemple, qu’est analysé l’ethos dit « multilocutoire » où plusieurs
locuteurs prononcent ensemble un même énoncé (un sujet que Maingueneau développe
plus avant dans ce numéro 29 d’Argumentation et Analyse du Discours) en référence aux
tableaux de David ; ou encore que l’ethos entrepreneurial étudié dans la partie III
s’exprime entre autres dans un style vestimentaire et une façon de se mouvoir (71-79).
La première partie de la partie IV est intitulée « Le corps du porte-parole », et on y
trouve l’analyse d’une affiche électorale de José Bové où des indices comme la
moustache à la gauloise, la chemise à carreaux, etc. allient les attributs du paysan et de
l’ouvrier et « donnent corps » à un « positionnement “alternatif” qui intègre ruralité et
gauche ouvrière » (95).

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19 Un autre aspect de l’importance conférée à la corporalité apparaît dans l’analyse très


intéressante que fait l’auteur des discours administratifs émis en vue de l’organisation
de la rafle du Vel d’Hiv, où il explique partiellement du moins l’obéissance des policiers
sommés par leurs autorités d’arrêter les Juifs pendant l’Occupation nazie. D.
Maingueneau utilise la notion d’ethos   décorporé » (évoqué plus haut) pour montrer
comment celui-ci peut faciliter la violence (111). Il consiste ici en un ethos administratif
qui répond à une autorité supérieure et se caractérise par le recours à des routines qui
participent du monde ordinaire des allocutaires. L’analyse offre un éclairage original
sur une question d’importance, qu’il serait sans doute utile de creuser plus avant en
étudiant les fonctions, dans la pratique de la violence, d’une voix administrative sans
corps et sans affects, qui s’en tient à son système de règles et de routines. Elle invite par
ailleurs à explorer plus avant les effets de la décorporation traitée au début de
l’ouvrage dans des genres et des situations de discours particuliers.
20 Notons enfin que l’attention portée aux corps, qui explique la place accordée à
l’iconique au-delà du verbal, s’accompagne d’une notion propre à D. Maingueneau, et
développée dans ses travaux antérieurs : l’incorporation (on en trouve déjà un exposé
développé dans Maingueneau 1999). Celle-ci insiste sur la corporalité à trois niveaux,
en soulignant le rôle de l’allocutaire (sur lequel je reviendrai plus loin). C’est lui qui
donne corps au garant, et qui incorpore à travers lui une manière d’être – deux
incorporations qui en permettent une troisième sous la forme d’une intégration à la
communauté imaginaire de ceux « qui adhèrent au monde qu’implique
l’énonciation » (14), et que l’auteur nomme des « mondes éthiques », associés à des
catégories d’acteurs comme l’entrepreneur de start-ups, déjà évoqué, le savant, etc.
Reprenant une proposition de 2014, D. Maingueneau propose trois
catégories : catégorielle (ex. : fonctionnaire), expérientielle (ex. : agressivité),
idéologique (ex. : anticlérical). Associant la parole orale ou écrite, la voix et le corps,
l’incorporation constitue pour Maingueneau un trait d’union entre le locuteur/la
locutrice et son allocutaire.
21 Si on l’examine de plus près, on voit que la notion d’incorporation qui reste quelque
peu opaque se greffe sur différents sens de l’action d’incorporer, et se nourrit de sa
dimension métaphorique. Incorporer signifie « donner corps à » ; c’est le premier sens
mobilisé par l’auteur : l’auditoire donne corps à l’orateur. Mais c’est aussi « intégrer (un
élément) à (un ensemble), faire entrer (une partie) dans (un tout) (TLFi). Ainsi,
l’allocutaire intègre et fait sienne la façon dont le locuteur parle, se meut, bref se
présente verbalement et corporellement. L’ethos agit sur lui par un phénomène
d’assimilation directe des manières d’être de l’autre (celle de l’entrepreneur, par
exemple), qui court-circuite la persuasion. Au troisième stade, celui de l’incorporation à
une communauté imaginaire, l’allocutaire n’intègre pas l’autre en lui, mais est intégré à
l'autre, absorbé en lui ou plutôt dans la communauté qu’il incarne et représente (le
monde des start-ups par exemple). Dans tous les cas, « le trait d’union » entre le
locuteur et l’allocutaire dont traite D. Maingueneau est censé se faire de façon
immédiate, spontanée : le corporel ne suppose pas la réflexion, le choix ; il se situe en-
dehors de la persuasion comme tentative de rallier à ses vues un autre qui est libre
d’accepter ou de refuser les arguments avancés (Perelman et Olbrechts-Tyteca
1970 [1958], Koren 2019).

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3.3. Ethos, persuasion et adhésion : la question de l’agentivité

22 Les deux derniers aspects de l’incorporation renvoient à la notion d’adhésion,


différenciée de la notion rhétorique de persuasion, dans laquelle l’ethos   faisait
originellement sens. Sans s’y substituer, elle la relaie chez D. Maingueneau quand il ne
s’agit pas selon lui d’adhésion à une thèse, mais d’une tentative d « influer sur une
décision (un vote, un achat, un verdict, …) ou modifier une opinion » (59). Déjà
dans « Problèmes d’ethos » (2002 : 60), Maingueneau soulignait que sa « perspective
excède de beaucoup le cadre de l’argumentation. Au-delà de la persuasion par les
arguments, la notion d’ethos permet en effet de réfléchir sur le processus de l’adhésion 
des sujets à un certain positionnement ».
23 On peut néanmoins s’étonner de la différenciation qu’introduit ici l’analyste du
discours. La persuasion rhétorique recouvre en effet les domaines énumérés, et cela
d’autant plus que c’est par le logos, mais aussi l’ethos et le pathos que le locuteur cherche
à rallier l’autre à ses façons de penser et de faire. L’argumentation dans le discours va
même plus loin en introduisant la notion de dimension argumentative (Amossy
2021 [2000], 2018) appelée par A. Rabatel argumentation indirecte (2018), qui permet de
voir comment le discours peut, sans manifester d’intention de persuasion et sans avoir
recours à des arguments en forme, faire adhérer l’allocutaire à des façons de voir, de
comprendre le monde environnant, et d’y agir d’une certaine façon en s’y positionnant.
Dans cette perspective, l’adhésion prend un sens qui recouvre celui que lui confère ici
D. Maingueneau.
24 On comprend mieux cependant la nécessité pour l’AD de la distinction opérée ici quand
l’auteur écrit qu’il s’agit de voir comment l’ethos « contribue à faire adhérer des sujets à
un certain univers de sens » – comment « il façonne l’existence de vastes communautés
de conviction », « assigne une identité aux individus et donne sens à leur
existence » (59). On est dès lors dans le domaine de l’idéologie. L’auteur expose cette
façon de faire adhérer à un espace idéologiquement marqué dans le premier chapitre
de la partie III « Faire adhérer », intitulée « Douceur et clarté ». Il le fait à partir de
l’usage des adjectifs « doux » et « clair », et leurs dérivés nominaux et adverbiaux qui
correspondent à l’humanisme dévot (que D. Maingueneau avait analysé dans Sémantique
de la polémique, 1983) et au discours scolaire républicain (étudié dans Les livres d’école de
la République. Discours et idéologie, 1979), ou encore au discours de l’Action française.
Dans les termes de l’auteur, le chapitre montre comment l’ethos « permet d’envelopper
à la fois l’énonciateur, ses destinataires, l’activité énonciative et le monde configuré
dans l’énoncé » (68).
25 Ce ne sont pas seulement les stratégies visant un public cible (59) qui sont ici évincées.
C’est aussi une conception de l’agentivité rhétorique qui est revisitée. Elle est déplacée
au profit de l’action d’un discours idéologiquement marqué, au sein duquel se construit
un ethos « enveloppant » l’allocutaire en le plongeant à son insu, avec le locuteur dont il
est censé « incorporer » l’ethos, dans un univers de sens et de valeurs. Ainsi, par
exemple, en examinant le discours des manuels républicains, le texte montre qu’il est
centré sur la clarté de la langue française et a le pouvoir à travers ses qualités
sensibles – ses schèmes métaphoriques, son lexique – de faire adhérer l’auditoire à
l’idéologie républicaine de l’école et à l’idéologie républicaine tout court. Il analyse
pour ce faire des réseaux discursifs qui englobent mais aussi débordent de toutes parts
la construction de l’ethos pour décrire l’idéologie dont il participe. 

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La notion d’ethos : faire dialoguer l’analyse du discours selon D. Mainguenea... 9

26 Cette strate d’analyse est fidèle à la vocation originelle de l’AD qui dévoile la façon dont
le discours transmet à l’allocutaire, à son insu, une vision du monde et des valeurs
modelant ses positions et ses façons d’être (il « a imprégné de larges couches de la
population française », 62). Corollairement, il est significatif que le discours mis en
question soit celui des manuels scolaires, et que ce soit « une République institutrice
éclairée » qui « suscite l’incorporation des enfants en mobilisant les pouvoirs d’une
langue claire, à la fois aboutissement et source du Progrès » (66). Les sujets parlants
sont absorbés par cette idéologie dominante dont ils reproduisent les schèmes et qui
modèlent la présentation de soi des auteurs de manuels et des instituteurs (qu’à la
limite l’analyse absorbe dans le locuteur abstrait qu’est la République). On est loin de la
rhétorique classique, où l’art oratoire permet à un locuteur individuel de façonner un
ethos approprié à ses desseins relevant d’une volonté personnelle, d’un libre choix et
d’une stratégie consciente dirigée vers un objectif déterminé.
27 Peut-être est-ce l’importance de cet univers de sens auquel l’allocutaire est invité à
adhérer qui fait que l’analyse s’attarde longuement sur ses caractéristiques dans le
discours, bien au-delà du processus verbal au gré duquel se construit l’image de soi du
locuteur. L’univers de la douceur de l’humanisme dévot, ou celui de l’idéologie
républicaine dont se nourrissent les manuels, par exemple, font en soi l’objet d’une
analyse développée. Sans doute la perspective ici offerte de l’adhésion à un monde
singulier rend-elle cette démarche nécessaire. On pourrait cependant souhaiter une
analyse plus focalisée sur la construction de l’ethos lui-même et l’exploration de ses
modalités discursives – tâche pour laquelle dans certains exemples le lecteur est parfois
quelque peu laissé à lui-même.

4. Ethos singulier et ethos collectif : sciences sociales et sciences


du discours face à la question de l’agentivité

28 Cette perspective peut expliquer pourquoi l’ouvrage de D. Maingueneau n’établit pas


toujours une distinction nette entre l’ethos individuel et l’ethos collectif, pris dans le
sens que donnent à l’ethos   les sciences sociales (qui y sont d’ailleurs convoquées à
travers des noms comme celui de Weber [2007] ou de Fusulier [2011]). « En sociologie,
l’usage habituel de l’ethos en fait une catégorie explicative des comportements, une
dimension de l’être au monde qu’il devient alors possible de nommer : l’ethos puritain
chez Weber, l’ethos de la science chez Merton, l’ethos d’une institution, d’un groupe,
d’une profession » (Bédard 2016 : 261). Dans la mesure où pour les sciences sociales
l’ethos   est par définition collectif, l’usage distinctif de ce qualificatif s’avère
inutile : ethos collectif y correspond à ethos tout court. Or, n’est-ce pas dans ce sens que
va l’étude de l’ethos « entrepreneurial », par exemple, ou encore celle de l’ethos 
républicain que manifestent les manuels scolaires, ou de l’ethos juridique des textes de
loi ? Dans la partie sur l’ethos   collectif, il est question d’ethos   typique d’une
profession ou d’une communauté et donc des « comportements langagiers, des
habitudes locutoires caractéristiques d’un groupe plus ou moins vaste » (25) : « les
paysans », « les snobs », etc. Dans le même esprit, D. Maingueneau parle d’ethos
« intertextuel » en se référant à « des locuteurs typiques, dont l’ethos est stabilisé par
une tradition culturelle » (24). Il s’agit plus de la façon dont une manière d’être et de
faire enracinée dans une culture transparaît dans la parole d’un locuteur, que de la

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La notion d’ethos : faire dialoguer l’analyse du discours selon D. Mainguenea... 10

façon dont ce dernier gère une présentation de soi destinée à atteindre un objectif ou à
réaliser une interaction.
29 Sans doute, l’analyse du discours ne traite pas comme la sociologie de dispositions en
quelque sorte prédiscursives : elle examine la façon dont l’ethos du savant ou de
l’administrateur émerge dans le discours par des procédures langagières et se configure
discursivement en situation ; elle permet de voir comment le discours d’un locuteur
individuel ou collectif le positionne dans l’espace social. Elle se penche aussi sur les
stratégies discursives propres à des types de discours comme la publicité, par exemple,
qui mettent en œuvre des procédures d’influence verbales et iconiques. Mais l’approche
de D. Maingueneau a tendance à minoriser (sans bien sûr l’effacer) la part de choix et la
dimension d’action orientée que l’argumentation dans le discours, plus proche de la
tradition rhétorique, confère à la construction éthotique du locuteur ou de l’instance
de locution. Peut-être est-ce aussi la raison pour laquelle elle n’accorde pas une place
prépondérante à la notion de retravail de l’ethos, qui est centrale dans le cadre de
l’argumentation dans le discours, ou encore au potentiel d’action de l’ethos collectif
comme construction identitaire dans une situation de revendication ou de
lutte (Amossy 2021).
30 En fin de compte, c’est ici la question de l’agentivité, qui a de nos jours suscité de
multiples débats (en particulier auprès des spécialistes contemporains de rhétorique),
qui est en jeu – et cela d’autant plus que l’analyste du discours, on l’a vu, insiste sur les
contraintes que les cadres institutionnels et génériques font peser sur la construction
de l’ethos. L’étude de l’ethos doit-elle s’attacher à une stratégie de présentation de soi
liée à l’action que le locuteur espère exercer sur son auditoire (qui suppose, pour le
meilleur et pour le pire, une maîtrise et un pouvoir) ? Ou doit-elle au contraire dévoiler
comment la présentation de soi verbale ou iconique est soumise à un système
idéologique dans les rets duquel elle prend le locuteur aussi bien que l’allocutaire ? Ou
faut-il plutôt allier les deux – une stratégie consciente et une présentation de soi
fortement contrainte matériellement, institutionnellement, idéologiquement ? Cette
question mérite d’autant plus d’être approfondie à travers le prisme de l’ethos qu’elle
met en jeu la question à la fois du pouvoir de la parole, et de la responsabilité
énonciative et de son corollaire, la déresponsabilisation.

5. La construction de l’ethos : travail du locuteur et/ou interprétation


de l’allocutaire ?

31 Venons-en à un point capital. Il apparaît clairement que l’ethos est ici défini dès le
départ, moins en termes d’image de soi que le locuteur construit dans son discours, que
comme le résultat d’une interaction entre le locuteur et l’allocutaire, donc « en termes
de tension » entre ce que projette l’un et ce que perçoit l’autre. Il y a là bien plus qu’une
remarque triviale sur le fait qu’une présentation de soi est nécessairement dirigée vers
autrui, et que dans l’interaction en face à face le locuteur réagit de façon dynamique à
la représentation de sa personne que lui propose l’autre. En rapportant ce qu’il appelle
« une réalité simple, intuitive, extensive à tout emploi du langage », non pas au fait que
le locuteur en prenant la parole construit ipso facto une image verbale de soi, mais au
fait que « le destinataire construit une représentation évaluée du locuteur en
s’appuyant sur les catégories et les normes de la communauté concernée » (11), D.

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La notion d’ethos : faire dialoguer l’analyse du discours selon D. Mainguenea... 11

Maingueneau opère un déplacement à première vue insensible, mais en réalité


important.
32 En effet, c’est ici l’auditoire qui construit l’image de l’orateur ; c’est lui qui lui confère
sa teneur et son sens, c’est lui aussi qui l’évalue en termes d’éthique ou de tactique. Dès
lors, l’ethos   n’est pas appréhendé comme une construction verbale inhérente à
l’énonciation, inscrite en elle (« l’image de soi que le locuteur construit dans son
discours »). Il est le produit d’une construction effectuée par l’allocutaire et pose donc
des « problèmes d’interprétation » dont on ne peut pas faire l’économie.
33 Cette position ne manque pas de soulever des difficultés ; et en même temps, elle met le
doigt sur des questions souvent éludées. Sans doute, la projection d’une image de soi
est toujours adressée à un autre – c’est la nature même de l’échange verbal qui l’exige.
Mais faut-il en conclure que l’ethos est moins le fait du locuteur que de l’allocutaire ?
Faut-il chercher l’image de soi que projette le locuteur dans la trame du discours, ou se
focaliser sur celle que l’auditoire perçoit dans la parole de l’énonciateur ? En gros, il
s’agit de savoir si c’est dans l’interprétation que fait l’allocutaire que se construit
l’ethos, ou dans le discours du locuteur.
34 Chacune de ces possibilités entraîne une démarche analytique appropriée. Ainsi,
l’insistance sur l’ethos comme construction effectuée par l’allocutaire explique le besoin
de distinguer, comme le fait D. Maingueneau, entre un type d’ethos   « compact »
facilement déchiffrable car il fait converger l’ethos   dit, montré et le contenu de
l’énoncé ; et un ethos « flottant » où cette convergence s’effectue moins clairement, et
qui se laisse plus malaisément saisir (23). Par ailleurs, c’est bien par le biais de la
reconstruction effectuée par l’allocutaire que sont abordées, par exemple, les petites
annonces données à lire aux potentiel(le)s conjoint(e)s : seul leur déchiffrement fait
advenir une image du locuteur/de la locutrice qui recherche une relation amoureuse.
Ces éléments conduisent D. Maingueneau à utiliser le terme d’« interprétation ». Et en
effet, c’est le déchiffrement effectué par l’auditoire qui fait advenir dans la
communication l’image du locuteur. Or, rien ne garantit qu’une même construction
éthotique soit perçue de la même manière par des allocutaires qui ont une doxa, une
position politique, une culture, etc. différentes. Si tout est dans l’œil du destinataire,
est-ce à dire que l’analyste doit repérer les lectures que peuvent en faire différents
membres de l’auditoire ?
35 On le voit, c’est la question du statut de l’analyste qui se pose ici. Il faut se demander s’il
est un allocutaire comme les autres, nécessairement situé, ou une instance
supérieure capable de reconstruire l’ethos   du locuteur à partir de la façon dont
l’appréhendent les autres. Dans cette dernière alternative, avec quels instruments est-il
censé le faire ? Et comment garantir qu’il le fait à bon escient ? Si l’on exclut la
tentative d’en appeler aux réactions de l’auditoire effectif par le biais de sondages et de
questionnaires (démarche qui ne relève pas des sciences du langage), il faut
s’interroger sur ce qui permet d’analyser de façon rigoureuse les réactions variées du
public.
36 Pour ne pas se prendre dans le cercle vicieux dans lequel risque de nous entraîner une
définition centrée sur l’allocutaire, il me semble qu’il est bon de revenir à la définition
de l’ethos comme image de soi que le locuteur construit dans son discours. Cela ne
signifie pas qu’on se rabat sur le point de vue de la rhétorique classique où, selon D.
Maingueneau, l’orateur maîtrisait sa stratégie si bien que l’analyste « qui connaissait la
boîte à outils de l’orateur, son ethos prédiscursif et les paramètres de la situation

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d’énonciation se sentait en droit de refaire le chemin en sens inverse […] et de


souligner d’éventuels écarts entre ce qu’aurait visé l’orateur et l’effet qu’il avait
effectivement produit » (20). Les lectures d’une même présentation de soi peuvent être
plurielles, pour ne pas parler de l’évaluation qui les accompagne ; et il n’y a pas de
certitude sur la volonté qui animait le locuteur. Mais l’analyste du discours et de
l’argumentation travaille à retrouver toutes les marques langagières inscrites,
consciemment ou non, par le locuteur dans sa présentation verbale de soi. Il les scrute
attentivement en s’en tenant aux observables et en les envisageant dans leur situation
de discours, pour voir comment ils peuvent offrir aux membres de l’auditoire des
facettes parfois divergentes, voire conflictuelles de celui qui leur adresse la parole. Il
examine alors la façon dont des marques discursives de nature diverse peuvent être
combinées différemment par des auditeurs ou des lecteurs différents en fonction de
leur doxa, de leurs compétences, ou de leurs positions. L’analyste, s’il ne peut s’extraire
totalement de son conditionnement propre, garantit ainsi la fiabilité de son travail et le
justifie aux yeux de son propre public.
37 Reste la question de savoir comment mesurer l’impact de la performance discursive et
corporelle que représente une présentation de soi. Il me semble que si l’on s’en tient à
l’analyse discursive et argumentative, il est difficile de voir si l’entreprise éthotique a
porté (une limite qui semble frustrante à tous ceux qui voudraient en mesurer les
retombées dans le réel). Selon moi, l'analyste peut néanmoins se tourner vers les
réactions discursives qu’on trouve dans le jeu des interactions, un domaine dans lequel
l'analyse du discours s’aventure volontiers, même si, de l’aveu même de l’auteur, il ne
fait pas partie des études entreprises dans L’ethos en analyse du discours. On peut aussi
relever les réactions effectives dans les médias ou les réseaux sociaux – c’est-à-dire
analyser des réactions écrites où l’ethos du locuteur se reflète sous forme d’image de
l’autre dûment réinterprétée et évaluée par ses destinataires. On peut alors tenter
d’évaluer dans quelle mesure elle correspond à celle que tentait (selon l’analyste) de
projeter le locuteur dans son discours, et dans quelle mesure elle réalise l’interaction
visée.

6. Ethos en analyse du discours et ethos en régime rhétorique

38 En conclusion, on peut dire que la lecture de cet ouvrage de synthèse stimulant permet
non seulement d’obtenir un arsenal de notions et de techniques analytiques, mais aussi
de soulever des questions de fond sur la notion d’ethos qui est aujourd’hui largement
mobilisée dans l’étude du discours politique, médiatique, publicitaire, littéraire et dans
les multiples domaines où la présentation de soi remplit ses fonctions. Ma lecture
critique s’est focalisée à la fois sur ce qui faisait la spécificité d’une conception de l’ethos
envisagée dans les limites de l’AD, sur quelques aspects caractéristiques de l’approche
de D. Maingueneau, et sur les éléments qui différencient l’ethos en analyse du discours
de l’étude de l’ethos dans une perspective d’argumentation rhétorique. Elle a aussi tenté
de relever des points qui faisaient problème, de façon transversale, et qui restent
encore ouverts : de l’adhésion et/ou de la persuasion, des contraintes sociales et
institutionnelles et de l’agentivité, du rôle de l’allocutaire ou du locuteur dans la
définition de l’ethos, des voies qui permettent de mesurer l’efficacité de la présentation
de soi en fonction de ceux auxquels elle est destinée.

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La notion d’ethos : faire dialoguer l’analyse du discours selon D. Mainguenea... 13

39 En ce qui concerne la spécificité de l’ethos en AD, elle porte avant tout sur l’intégration
de l’ethos dans l’étude de l’énonciation, avec tout ce que cela comporte au niveau des
distinctions opérées : ethos   dit/montré, prédiscursif/discursif, enchâssant/enchâssé,
individuel/collectif, énonciateur présent/effacement énonciatif du locuteur, locuteur
singulier/multilocuteur. S’y ajoute tout ce qui modèle l’énonciation, au niveau des
cadres sociaux et institutionnels et des espaces concrets dans lesquels se déploie la
parole du locuteur : scène englobante, scène générique, scénographie ; agencement. On
a noté l’intérêt particulier de D. Maingueneau pour la matérialité des corps, des lieux et
des objets qui accompagnent l’échange verbal, et dont il fait des attributs de
l’énonciation. On a également souligné la centralité donnée à un élément constitutif de
l’appareil formel de l’énonciation (et les problèmes qui en découlent) : l’allocutaire. Il
apparaît ici comme celui qui détermine le profil de la présentation de soi et l’évalue –
au point qu’il joue un rôle déterminant dans la définition de l’ethos qui ne se donne pas
comme l’image de soi que le locuteur construit dans son discours mais comme l’image
du locuteur que l’auditoire (re)construit à partir de sa parole.   Enfin, l’analyse du
discours ne conçoit de construction d’ethos   qu’au sein de cadres qui contribuent
largement à le modeler, avec leur scène d’énonciation propre : les types et les genres de
discours.
40 Il faut de plus souligner que l’analyse ancrée dans la notion d’énonciation et située à la
croisée du discursif et du social confère une importance considérable aux
déterminations sociales, institutionnelles, culturelles, idéologiques qui pèsent sur la
présentation de soi. Elles se situent dans les cadres génériques (un texte administratif,
une pétition, une petite annonce sur un site de rencontres, etc.) qui sont façonnés par
une culture, une institution, une idéologie ; et dans les cadres matériels (une chaire à
l’église, une salle de classe, la couverture d’une maison d’édition…) qui varient
également en fonction des mêmes paramètres. L’AD ne se penche pas seulement sur les
déterminations sociales de l’ethos, elle se préoccupe aussi des effets sur l’autre que vise
la construction d’une image de soi. Elle les étudie en termes d’incorporation (où
l’accent est mis sur l’allocutaire) et d’adhésion (où il est question de faire participer
l’allocutaire à un univers de sens, à une façon d’être dans le monde).
41 En quoi cette approche de l’ethos, qui paraît si proche de celle qu’en a élaboré à la suite
de D. Maingueneau l’argumentation dans le discours (Amossy 2021 [2000]), en diffère-t-
elle ? Sans doute le cadre théorique de cette dernière, qui entend intégrer analyse
discursive et argumentative, ne peut que donner toute son importance à l’étude de
l’énonciation, qu’il double de celle des interactions verbales. Soucieuse des enjeux
sociaux de l’analyse, l’argumentation dans le discours est, comme l’AD dont elle relève,
attentive aux déterminations sociales de la présentation de soi. Elle explore entre
autres sa dimension de construction identitaire et son ancrage dans une doxa partagée.
42 En même temps, elle se réclame de la tradition de la rhétorique et de la nouvelle
rhétorique de Perelman qui accorde une importance primordiale à la tentative de
persuasion, à l’effort d’agir sur l’autre en l’invitant à effectuer un certain choix parmi
toutes les possibilités présentes. L’AD de D. Maingueneau n’élimine certes pas la
persuasion, mais elle la court-circuite. Elle le fait en mettant en vedette la notion
d’incorporation et, plus encore, en détournant celle d’adhésion, arrachée à son sens
rhétorique – amener quelqu’un à adopter une thèse ou un point de vue dont une
justification discursive doit être offerte. La perspective rhétorique signifie qu’il importe
d’étudier une construction d’ethos   non pas seulement en examinant les diverses

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contraintes dont elle est tributaire, mais aussi en termes d’action. En même temps que
les pesanteurs sociales qui déterminent la façon de construire une image de soi dans un
contexte déterminé, elle met l’accent sur une dynamique, et une capacité d’agir dans et
sur le monde. Elle voit ainsi dans toute présentation de soi un retravail de l’ethos, à
savoir une reprise, modulation ou tentative de transformation de l’image préalable du
locuteur (qui peut aller jusqu’à une réparation d’image quand celle-ci est
abîmée [Amossy 2018, Sadoun-Kerber 2018]). Elle déchiffre la façon dont ce retravail
peut être volonté d’action – dont il s’efforce d’agir sur les autres et d’agir sur le réel,
dont il dote le locuteur de son agentivité.
43 Il ne s’agit bien sûr pas d’un écart infranchissable – loin de là. D. Maingueneau (2013, §
6) note certes qu’« une analyse du discours comme je la pratique ne peut pas
appréhender l’ethos de la même manière qu’une théorie de l’argumentation » – et j’ai
tenté de le montrer dans ce qui précède. Néanmoins, il se réfère plutôt à la rhétorique
classique qu’à ses développements contemporains, et l’argumentation dans le discours
qui se veut à la croisée de l’argumentation rhétorique et de l’analyse du discours se
rapproche sur bien des points des perspectives développées par D. Maingueneau. Les
questions d’énonciation sous toutes leurs formes y sont toujours centrales en même
temps que le souci des genres de discours ; l’examen des cadres sociaux et
institutionnels qui président à la construction de l’ethos y est crucial, comme l’est la
prise en compte de la doxa et de l’interdiscours d’époque. L’analyse du discours, quant à
elle, est loin d’ignorer les stratégies de présentation de soi mises en œuvre par des
constructions discursives programmées en fonction d’un objectif. En fin de compte, les
deux approches se croisent et se recoupent fréquemment. Elles font face aux mêmes
problèmes, même si elles ne leur apportent pas des réponses identiques – le rôle de
l’allocutaire, le statut de l’analyste, la nature du lien que l’ethos crée entre le locuteur et
son auditoire, pour ne rappeler que ceux-là. Elles pratiquent toutes deux une analyse
discursive aussi fine que possible, laquelle peut, selon moi, harmonieusement se
combiner avec une analyse argumentative.
44 Je salue donc la parution de la belle synthèse de D. Maingueneau qui est à la source du
présent questionnement. L’ethos   en   analyse   du   discours est sans nul doute un travail
précieux, non seulement pour les analystes du discours, mais aussi pour les spécialistes
de rhétorique et d’argumentation, des sciences du langage au sens large et de toutes les
disciplines sociales qui se penchent sur la présentation de soi.

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NOTES
1. On trouvera dans la bibliographie de l’ouvrage les références aux nombreux travaux antérieurs
de l’auteur traitant de la question qui ont précédé la présente synthèse. Je n’indiquerai ici que les
textes auxquels j’ai explicitement fait référence.
2. D. Maingueneau a choisi d’utiliser la forme « ethos » au pluriel, à la place de la forme grecque
généralement usitée, ethè.

AUTEURS
RUTH AMOSSY
Université de Tel Aviv, ADARR

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