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MARY Ellian
SUJET DU MEMOIRE
Le financement de l'e-sport au regard de son cadre juridique
actuel
J'aimerais remercier celles et ceux qui d'une manière ou d'une autre ont participé à
l’élaboration de ce mémoire. Je tiens à remercier ma mère pour son oreille attentive et
pour ses encouragements malgré la distance…
SOMMAIRE.........................................................................................6
INTRODUCTION...................................................................................8
PARTIE I : LA CREATION DU CADRE JURIDIQUE DE L’E-SPORT.................14
CHAPITRE 1 : UN NOUVEAU CADRE LEGISLATIF CONÇU DE FAÇON RESTRICTIVE
......................................................................................................................... 15
Section 1 : L’émergence difficile de l’e-sport.................................................16
Section 2 : Un nouveau cadre prévu pour les joueurs et les organisateurs...26
CHAPITRE 2 : LA NATURE INCERTAINE DE L’E-SPORT NE FACILITANT PAS LA
CONCERTATION DES ACTEURS..........................................................................41
Section 1 : Une absence de consensus des acteurs autour de la qualification
de l’e-sport.................................................................................................... 42
Section 2 : La volonté des acteurs de s’organiser autour d’une institution...50
PARTIE II : L’ABSENCE DE CADRE JURIDIQUE SPECIFIQUE AU
FINANCEMENT DE L’E-SPORT OBLIGEANT A SE SATISFAIRE DU DROIT
COMMUN..........................................................................................60
CHAPITRE 1 : UN DROIT COMMUN INADAPTE AU MODELE ECONOMIQUE DE L’E-
SPORT............................................................................................................... 61
Section 1 : Un financement plural des acteurs de l’e-sport...........................62
Section 2 : Un régime juridique limité cédant sa place à un droit commun
inadapté........................................................................................................ 76
CHAPITRE 2 : DES PISTES POUR LE FINANCEMENT DE L’E-SPORT.....................87
Section 1 : Les paris e-sportifs......................................................................88
Section 2 : Un meilleur soutien public de l’e-sport ?.....................................94
CONCLUSION GENERALE....................................................................98
TABLE DES MATIERES......................................................................101
BIBLIOGRAPHIE GENERALE...............................................................104
I. OUVRAGES............................................................................................... 104
II. ARTICLES.................................................................................................. 105
III. RAPPORTS, THESES, MEMOIRES...............................................................106
IV. SITOGRAPHIE........................................................................................... 108
ANNEXES........................................................................................120
ANNEXE I : PREMIÈRES SOCIÉTÉS AGRÉÉES.............................................................121
ANNEXE II : QUESTION À MADAME LA MINISTRE LAURA FLESSEL.................................122
ANNEXE III : RÈGLEMENT DE LA COMPÉTITION DU JEU « OVERWATCH »........................123
ANNEXE IV : CHARTE D'ÉTHIQUE ET DE DÉONTOLOGIE DES ADHÉRENTS DE FRANCE ESPORTS
....................................................................................................................... 129
ANNEXE V : CONVENTIONNEMENT DE LA CHAINE ES1..............................................133
ANNEXE V : LETTRE DU SÉNATEUR JÉRÔME DURAIN À L’ARJEL CONCERNANT LES « LOOT
BOXES »............................................................................................................ 147
L’e-sport, s’il n’est pas un phénomène vraiment récent, a vu sa popularité croitre à un rythme
surprenant. En 2016, les prémices d’un cadre juridique du secteur ont vu le jour. Il semblait
donc pertinent de se demander quel effet aurait ce cadre sur le secteur pour lequel il fut pensé.
Et plus particulièrement sur son financement.
L’industrie du jeu vidéo est aujourd’hui la première industrie culturelle au monde avec
un chiffre d’affaire de 80 milliards en 2015 et une croissance ne semblant pas sur le point de
s’arrêter. En 2016, son chiffre d’affaire était passé à 86 milliards 1. L’e-sport, quant à lui, avec
un chiffre d’affaire beaucoup moins important, peut se vanter d’une croissance de 53% entre
2014 et 2017.
Il est possible de dater le début de l’e-sport dès lors que les joueurs ont eu
l’opportunité de s’affronter sur un même support. Dès lors les communautés de joueurs
passionnés ont commencés à se regrouper dans des tournois en réseaux anonymes à l’époque,
les LAN-parties. Avec la création du premier jeu vidéo « Spacewar » en 1962, par Steve
Russell, l’e-sport en est à ses prémices. C’est avec l’organisation de la toute première
compétition utilisant ce jeu comme support, l’Olympic Spacewar Intergalactic organisée par
les étudiants de l’université de Stanford en octobre 1972, que nait l’e-sport. Bruce Baumgart,
alors vainqueur de cette compétition reçoit en guise de « cash prize » un an d’abonnement au
Rolling Stones magazine. Nolan Bushnell après avoir pu jouer à Spacewar décide de créer la
première machine d’arcade, Computer Space puis le très célèbre jeu de « tennis », Pong, qui
sera le premier grand succès de l’industrie du jeu vidéo.
Par la suite, cet évènement a donné lieu à l’organisation d’une véritable compétition en
1980, le Space Invaders Championship, où se sont affrontés plus de 10 000 participants.
Notre étude se focalisera sur l’appréhension par la loi de ces compétitions de joueurs.
Toute comparaison entre notre système juridique national et des cadres juridiques étrangers
sera donc écartée. L’examen de l’état du droit à ce sujet se fera entre autre par le biais de
l’étude du rapport parlementaire du sénateur Jérôme Durain et du député Rudy Salles
concernant la pratique compétitive du jeu vidéo. Il s’agira d’étudier l’émergence du cadre
juridique de l’e-sport lors de l’adoption de la loi du 7 octobre 2016 pour une République
numérique.
Dans ce contexte la question première sera de savoir dans quelle mesure le régime
juridique a évolué avec l’adoption de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique
et dans quelle mesure cette loi est venue consacrer cette pratique. La seconde problématique
sera de savoir si ce cadre juridique est adapté et s’il permet l’épanouissement économique de
cette jeune industrie.
Cela semble chose difficile car ce secteur compte de nombreux acteurs qui se
financent tous par une multitude de moyens. Les joueurs, les éditeurs, les organisateurs, les
sponsors et les médias ont tous des intérêts économiques qui leur sont propre. Cependant les
financements qui leur permettent de vivre en l’absence d’un véritable cadre juridique de l’e-
sport, sont soumis à un régime juridique de droit commun. Sans grand étonnement ce cadre
juridique n’est pas adapté aux spécificités du secteur. Plusieurs grandes problématiques
juridiques ressortent à ce stade : la titularité des droits de diffusion des compétitions e-
sportives, la diffusion de ces compétitions par les médias et une fiscalité assez trouble. Ainsi
en présence de modes de financement pouvant présenter des risques on peut se demander si
des alternatives ne pourraient pas exister. Le cadre juridique du sport semble ici très
intéressant dans la mesure où il propose à cette activité « jumelle » de l’e-sport, de bénéficier
de revenus afférant à l’organisation de paris sportifs, mais aussi d’un soutien public. Alors il
faudra se questionner sur la possibilité, pour l’e-sport, de bénéficier de subventions publiques
qui seraient à n’en pas douter une source de revenus assez sûre (Partie II).
Ce nouveau cadre vient sans conteste rassurer l’ensemble des acteurs de l’e-sport,
jusque-là il était difficile de voir sur le long terme et de pouvoir se faire une idée du potentiel
de développement de ce phénomène. Lorsque de but en blanc un organisateur de compétition
pouvait être sanctionné pénalement pour ce qui s’avérait n’être qu’un moment de partage
entre des passionnés de jeux vidéo, cette vocation de mettre en place une compétition ne
pouvait pas être croissante.
Il est possible d’affirmer qu’un e-sportif professionnel a du mérite, car à ses débuts il a
très certainement dû subir la pression sociale du au rejet de son activité (Section 1) puis dans
un second temps prendre le risque d’évoluer dans un secteur où rien n’était vraiment sur
(Section 2).
Il conviendra de se rendre compte tout d’abord qu’il existe « une nouvelle façon de
consommer le jeu vidéo » (paragraphe1) puis que ce secteur est victime de son cadre juridique
« la prohibition des compétitions e-sportives » (paragraphe 2).
1. Etat des lieux sur le profil des joueurs français de jeux vidéo
A ses débuts le jeu vidéo semblait être un domaine presque exclusivement masculin,
réservé aux adolescents et aux jeunes adultes. Depuis, le jeu vidéo a gagné en maturité et en
diversité.
« Chaque homme cache en lui un enfant qui veut jouer » écrivait Nietzsche, et c’est bien
ce que semblent confirmer les chiffres…
Depuis les années 1970 la popularité des jeux vidéo n’a cessé de croître. Aujourd’hui le jeu
vidéo est le bien culturel le plus vendu en France10.
10 https://www.challenges.fr/high-tech/jeux-video/fifa-17-le-bien-culturel-
le-plus-vendu-en-france_451966
Le profil a donc bien évolué. On constate que l’âge moyen du joueur est de 31,5 ans 12
et que la proportion de joueuses est beaucoup plus importante avec 44,9% de la population.
Alors comment le jeu vidéo a-t’il pu atteindre un public si large en France ? Pour les
éditeurs il a toujours été question de se diversifier, car le joueur est avant tout un
consommateur. Pour ce faire il a fallu continuer d’innover. En effet l’industrie des jeux vidéo
est une industrie fortement liée à l’industrie des nouvelles technologies, de ce fait son
développement est plutôt cyclique.
Les supports se sont eux aussi très largement diversifiés 13. Les bornes d’arcade ont
laissé place aux premières consoles de salon. Dans les années 1990 les constructeurs vont
révolutionner le marché en créant les premières consoles portables. Mais ces dernières
décennies on a continué de diversifier les supports, on ne joue plus exclusivement sur
ordinateur, sur console de salon ou sur console portable. Une grande partie des joueurs jouent
dorénavant sur tablette numérique, sur smartphone ou encore directement sur des téléviseurs
connectés.
11 Rapport du CNC sur « Les pratiques de consommation des jeux vidéo
des Français », novembre 2014
12 Ibid.
13 Le parisien. Fr, http://www.leparisien.fr/economie/business/business-
des-jeux-video-les-francais-font-fort-18-04-2016-5723621.php
De plus avec l’essor d’internet dans les années 2000 de nouvelles possibilités
apparaissent pour les éditeurs de jeux. Dorénavant il est possible de faire interagir les joueurs
en les faisant jouer ensemble ou les uns contre les autres. Et ainsi commencent à se
démocratiser de nouvelles catégories de jeux telles que les MOBA15, les MMORPG16 ou les
FPS17 en ligne.
Mais internet outre le rapprochement des joueurs a aussi permis une diffusion plus
facile du jeu vidéo par une évolution du système de distribution. Si traditionnellement la
distribution des jeux vidéo était physique par le placement de ce produit en boutique, s’est
développée en parallèle la distribution numérique. Le jeu se numérise, il s’affranchit
complètement de son support physique et devient du contenu directement téléchargeable en
ligne. On peut le constater aujourd’hui à travers la multiplication des plateformes de
téléchargement en ligne de jeux vidéo tel que Steam18, où le consommateur peut se constituer
une véritable bibliothèque dématérialisée de jeux vidéo.
Le jeu vidéo est donc aujourd’hui un bien culturel reconnu et d’une grande diversité
aussi bien dans son offre de contenu que dans sa communauté de joueurs. Evoluant du loisir
solitaire vers le divertissement multijoueur. Mais une autre tendance est à relever, le jeu vidéo
peut s’affranchir de son aspect ludique et devient sérieux dans sa pratique par certains joueurs.
B. Du geek à l’e-Sportif
Ce fut le cas pour le jeu vidéo dans les années 2000 qui était et reste encore
aujourd’hui un phénomène socialement mal perçu 21. La croyance collective assimilant le jeu
vidéo à une pratique aliénante pour le corps car l’individu se détournerait naturellement de
l’effort physique. De plus cet individu est perçu comme quelqu’un s’adonnant à un loisir
malsain, pouvant le rendre violent ou complètement addict et le coupant du monde social. Les
entrepreneurs de morale vont le qualifier de nolife qui a alors une consonance plutôt
péjorative pour le joueur car littéralement cela ne signifie « pas de vie » ou « sans vie » c’est-
19 Le Streaming est une technique de diffusion et de lecture en ligne et en
continu de contenus audiovisuels, qui évite le téléchargement des
données et permet la diffusion en direct
20 GARCIA-BARDIDIA (R.) et NAU (J-P) et VELPRY (A.)
« L’institutionnalisation du e-sport », in G. Rabu et M. Reverchon-Billot
(dir.), Les enjeux juridiques de l’e-sport, PUAM, coll. Centre de droit du
sport, p. 44.
21 http://www.gameblog.fr/blogs/evilmarmotte/p_121700_le-jeu-video-une-
passion-honteuse
Dans une telle situation les joueurs vont devoir trouver comment assumer la pression
sociale qui pèse sur cette pratique. Cela peut se faire par la dissimulation de la pratique du jeu
vidéo ou encore par le regroupement des joueurs entre eux qui viendront se soutenir
mutuellement et petit à petit créer une véritable communauté de « gamers ». Ainsi les joueurs
vont légitimer eux même leur pratique en en rejetant le caractère déviant et en y associant des
valeurs que la société défend. Ce sera notamment le cas de la performance et de la sportivité.
Mais est apparue ces dernières années la catégorie des pro-gamer ou PGM 24 ou encore
joueur professionnel, qui est un joueur qui ne joue plus uniquement par plaisir ou pour se
divertir : il participe à des tournois et arrive à dégager une rémunération de son activité de
joueur.
Certains joueurs vont s’intéresser en détail aux multitudes de possibilités que va offrir
le jeu vidéo, de quelle façon celui-ci est pensé par ses développeurs. Ils vont par exemple se
renseigner sur la proportion de hasard ou sur l’équilibrage même des composantes du jeu.
Ainsi dans certains jeux, en fonction de leurs états de développement, la communauté de
joueurs va considérer que le choix de certains équipements, personnages, véhicules, peut
procurer un avantage plus ou moins important au joueur. Il y aura donc en fonction des patchs
du jeu certains comportements qui favoriseront le joueur : on va parler ici de la META25 qui
est un acronyme signifiant « The Most Efficient Tactic Available », que le joueur
professionnel se devra de connaitre sur le bout des doigts.
Ainsi on peut citer l’apparition de sites ou start-up tels que panda score qui vont
récolter et analyser de la data pour fournir aux joueurs, aux éditeurs, aux sponsors ou tout
autre acteur de l’e-sport des statistiques sur les pratiques des joueurs professionnels de jeux
vidéo.
Cependant l’ensemble des jeux vidéo n’est pas concerné par cette transformation.
N’importe quel jeu ne peut pas forcément devenir un jeu e-sport. En effet ce sont
principalement les jeux de confrontation qui vont le permettre et d’autant plus depuis la
démocratisation d’internet qui est venue faciliter l’interaction entre les joueurs.
La communauté de joueur peut donc passer par plusieurs stades. Celui-ci commence
toujours comme joueur amateur, c’est la population de joueurs la plus nombreuse. Il s’agit
souvent du joueur pour lequel le jeu reste avant tout un divertissement. Puis s’il s’investit, que
Jusqu’en 2016, avec l’élaboration de la loi pour une République numérique, l’Etat a
longtemps ignoré le phénomène e-sportif laissant le droit commun encadrer ce secteur. Ce
cadre juridique inadapté fut une épreuve à surmonter pour les acteurs de l’e-sport Français.
Cette assimilation ne semblait pourtant pas être complètement évidente car la Cour
d’appel de Toulouse avait jugé dans un arrêt du 17 janvier 2013 35, qu’en application de la
jurisprudence de la Cour de cassation 36, le poker « Texas Hold’em » ne pouvait pas être
considéré comme un jeu de hasard. Mais la Cour de cassation, dans une affaire ultérieure, 37 ne
s’était pas conformée à cette qualification et était venue affirmer la soumission du poker au
régime de la loterie. Suite à cela, la loi du 17 mars 2014 vient préciser le régime des loteries.
En effet le code de la sécurité intérieure, en son article L. 322-1, dispose que « Les
loteries de toute espèce sont prohibées ». Puis il est précisé dans l’article L. 322-2 du même
code que : « Sont réputées loteries et interdites comme telles : […]toutes opérations offertes
au public, sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l'espérance d'un gain qui
serait dû, même partiellement, au hasard et pour lesquelles un sacrifice financier est exigé
par l'opérateur de la part des participants ». Enfin, l’article L322-2-1 ajoute que « Cette
interdiction recouvre les jeux dont le fonctionnement repose sur le savoir-faire du joueur. Le
sacrifice financier est établi dans les cas où l'organisateur exige une avance financière de la
part des participants, même si un remboursement ultérieur est rendu possible par le
règlement du jeu ». Cette assimilation à la loterie vient donc poser un principe général de
prohibition.
Si cela n’a certainement pas favorisé le développement de l’e-sport Français, cela n’a
pas empêché pour autant les organisateurs de tournois de continuer leurs activités et les
joueurs passionnés de s’impliquer au sein de ces rencontres sur lesquelles planaient l’ombre
de l’illégalité. Pour les acteurs du secteur, la loi sur les loteries semblait inadaptée aux
compétitions de jeux vidéo car elle vise expressément les jeux de hasard. Or, on l’a vu
précédemment, trop de hasard et e-sport ne peuvent pas faire bon ménage, c’est le savoir-faire
du joueur qui aura vocation à déterminer le résultat d’une partie. De plus, en France, les jeux
de hasard comme on en trouve en quantité dans les tabacs, sont autorisés. Pourquoi donc
s’évertuer à interdire les compétitions d’e-sport40 ?
Il est nécessaire de comprendre que le joueur professionnel de jeux vidéo, dès lors
qu’il se professionnalise, va intégrer une équipe. Cependant, jusqu’en 2016, aucun cadre
juridique spécifique n’avait été prévu concernant les relations entre joueurs et les sociétés.
Tout d’abord, le succès et la popularité d’une équipe est souvent lié à ses résultats en
compétitions. Or la société n’a juridiquement pas la main sur la préparation et la participation
de ses propres joueurs car, selon le contrat, elle devait se contenter de mettre à disposition
tous les moyens nécessaires à la réalisation de la prestation dont la compétition n’était pas
De par ce classement par défaut des compétitions de jeux vidéo dans le régime
juridique des loteries, les acteurs de l’e-sport Français ont tenté d’alerter les pouvoirs publics
de ce qui semblait être, pour eux, une source importante d’insécurité. Un véritable traitement
juridique de cette problématique était nécessaire. C’est l’organisation d’une consultation
publique lors de l’élaboration de la loi pour une république numérique qui a permis aux
acteurs de saisir l’occasion de faire entendre leurs revendications. Par cette initiative, les
autorités publiques ont pu prendre conscience de la croissance importante de l’e-sport en
France et donc de l’importance d’encadrer ce secteur pour favoriser son développement. C’est
au travers de ses articles 101 et 102 que la loi pour une République numérique va venir
reconnaitre officiellement et légitimer la pratique compétitive de jeux vidéo, au travers d’une
meilleure protection juridique du joueur professionnel de jeux vidéo et au moyen de
l’encadrement strict des compétitions47.
Il conviendra de voir dans tout d’abord « un cadre législatif en plusieurs temps »
(paragraphe 1) puis « une meilleure protection du joueur professionnel » (paragraphe 2) et
enfin « un véritable cadre juridique pour les compétitions de jeux vidéo (paragraphe 3).
C’est grâce à un processus législatif aussi original qu’inédit 48 qu’un régime juridique a
pu être adopté en 2016 par la loi pour une République numérique 49. En octobre 2014, une
Par la suite, le Premier Ministre, Manuel Valls, avec le concours de la Secrétaire d’Etat
chargé du numérique, Axelle Lemaire, confie par un courrier en date du 18 janvier 2016 à
deux parlementaires, le sénateur Jérôme Durain et le député René Salles, une mission
parlementaire sur l’e-sport. Le rapport s’intitulera « E-sport. La pratique compétitive du jeu
vidéo52 ».
Ainsi, les parlementaires à la demande d’un premier ministre favorable au
développement des compétitions, ont constitué un groupe de travail. Ils ont pendant plusieurs
mois interrogé les différents acteurs de l’e-sport, qu’il s’agisse des joueurs, des éditeurs, des
sponsors, des agents ou encore des organisateurs de compétitions, avec la volonté de faire
comprendre aux élus les enjeux du secteur et l’intérêt de l’encadrer. Les propositions faites
dans la version finale de ce rapport parlementaire seront au nombre de quatorze53.
50https://www.gouvernement.fr/action/pour-une-republique-numerique
51https://www.republique-numerique.fr/projects/projet-de-loi-
numerique/consultation/consultation/opinions/section-2-travaux-de-
recherche-et-de-statistique/les-competitions-de-jeux-video-e-sport
52R. Salles et J. Durain, E-sport. La pratique compétitive du jeu vidéo,
rapport intermédiaire, La Documentation Française, mars 2016
53 R. Salles et J. Durain, E-sport. La pratique compétitive du jeu vidéo,
rapport intermédiaire, p 57.
Pour faire de l’e-sport une véritable pratique professionnelle, la loi pour une
République numérique a dû patienter jusqu’au 9 mai 2017 pour se doter de ses décrets
d’application55. Ces derniers sont notamment venus clarifier le cadre à respecter pour les
entreprises souhaitant faire usage du nouveau contrat pour les joueurs professionnels 56, l’une
des premières conditions étant l’agrément.
L’article 10257, dès son premièrement définissant le joueur professionnel, puis lors de
son troisièmement et huitièmement, évoque la nécessité pour celui-ci d’être rémunéré par une
association ou une société ayant été agréée au préalable par le ministre chargé du numérique.
Les organismes intéressés par l’utilisation de ce nouveau contrat devront donc montrer
compétence et fiabilité avant de pouvoir salarier des joueurs.
Chose intéressante, l’agrément n’est valable que pour une durée de 3 ans renouvelable,
forçant donc un contrôle régulier de la part du ministre chargé du numérique. L’article 6 du
décret prévoyant les délais d’une éventuelle demande de renouvellement de l’agrément.
Enfin, les articles 7 et 8 du décret prévoient les conditions dans lesquelles le ministre
chargé du numérique peut retirer un agrément.
Dans un communiqué du 5 janvier 201859 venant délivrer les trois premiers agréments
à Gamers Origin, LDLC Event et l’Olympique Lyonnais, le gouvernement, en la personne de
Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, Mounir Mahjoubi, secrétaire d’Etat
chargé du Numérique, et Delphine Geny-Stephann, secrétaire d’Etat auprès du ministre de
l’Economie et des Finances, « renouvelle son soutien aux acteurs Français de l’e-sport », et
semble faire preuve de beaucoup de bienveillance envers cette « activité remarquable par son
59 Cf. annexe I.
Comme évoqué plus tôt, c’est l’article 102 de la loi pour une République numérique
qui vient poser pour la première fois la définition du joueur professionnel de jeux vidéo,
évacuant au passage la notion couramment utilisée « d’e-sport » mais ce sera l’objet d’un
développement ultérieur.
Il faut noter une certaine similitude entre ce nouveau statut des joueurs professionnels
de jeux vidéo et celui des sportifs professionnels. Le législateur fait le choix du contrat à
durée déterminée au détriment du contrat à durée indéterminée. Ce faisant, le législateur
s’aligne sur ce que préconisait le rapport parlementaire qui semblait considérer comme
impossible l’utilisation du contrat à durée indéterminé dans ce secteur très proche du milieu
sportif61.
Dans un autre rapport de M. Jean-Pierre Karaquillo sur le statut des sportifs 62, ce
dernier considère le CDI comme inadapté aux équipes de sportifs car certaines « règles sont
complètement inadéquates notamment celles relatives à la démission ou le licenciement de
droit commun avec la pratique internationale (rachats de joueurs et transferts) , l’aléa sportif
L’article 102 dispose que : « I.-Le joueur professionnel salarié de jeu vidéo compétitif
est défini comme toute personne ayant pour activité rémunérée la participation à des
compétitions de jeu vidéo dans un lien de subordination juridique avec une association ou
une société bénéficiant d'un agrément du ministre chargé du numérique, précisé par voie
réglementaire64 ».
Pour certains auteurs, ce CDD spécifique est le bienvenu car il était urgent de mettre
fin à l’utilisation inadaptée et abusive des contrats de service qui étaient une source
d’incertitude et d’insécurité juridique pour les parties65. Pour d’autres, l’utilisation de contrats
de service apportait une certaine souplesse contractuelle bénéfique au secteur66.
Le législateur doit donc concilier deux exigences : plus de sécurité pour les acteurs de
l’e-sport sans perdre en souplesse contractuelle. En imposant ce nouveau contrat comme le
contrat de principe pour les e-sportifs et les structures agréées, il fait en sorte que le code du
travail vienne s’appliquer mais prévoit un certain nombre d’exceptions incompatibles avec le
secteur : en matière de condition de recours, de terme, de forme et de modalités de rupture du
contrat de travail à durée déterminée.
La loi vient fixer les conditions de forme à respecter : celui-ci doit être rédigé en trois
exemplaires qui comporteront chacun la totalité de l’article 102. Elle précise les clauses
indispensables (identité des parties, date d’embauche, durée, montant de rémunération etc..) et
celles qui sont interdites. Le risque pour la structure en cas de non-respect étant double : d’un
côté la possible requalification du contrat en CDI mais aussi la sanction pénale avec une
amende allant de 3750 € à 7500 et six mois d’emprisonnement en cas de violation des règles
de forme ou de fond. Ici le législateur cherche à prévenir la fraude.
Cependant l’euphorie relative à ce nouveau cadre est à tempérer car si d’un côté le
législateur cherche à sécuriser le joueur par l’application du droit du travail, de l’autre il
soulage l’employeur de la question du licenciement. Ce faisant il assure à certains acteurs de
l’e-sport des garanties qu’ils sollicitaient.
Cet effort du législateur, certes tardif, n’en reste pas moins une avancée dans le secteur
de l’e-sport français. Cependant on peut espérer qu’il ne s’agisse que des prémices de celui-ci
car certaines questions restent à se poser notamment vis-à-vis de ce nouveau contrat.
L’exclusion du CDI est-il vraiment le bon choix ? « Car ce nouveau CDD aboutit, in fine, à
De plus, on peut regretter qu’un certain nombre de problématiques n’aient pas été
abordées par le législateur. On peut notamment évoquer l’absence de consultation des
partenaires sociaux concernant les conditions de travail des joueurs qui peuvent facilement
passer jusqu’à plus de 50 heures par semaine à s’entrainer. On peut aussi se poser la question
des visas professionnels qui étaient une proposition formulée dans le rapport parlementaire,
car dans un milieu tel que celui-ci, de nature internationale, il est essentiel de faciliter la
circulation des talents. Enfin, alors que le législateur semble vouloir emprunter largement au
cadre juridique du sportif professionnel, pourquoi ne pas étendre aux joueurs de jeux vidéo
certaines prérogatives telles que l’accès aux aides financières et la couverture sociale mise à la
charge de l’état ?
1. Une légitimation des compétitions de jeux vidéo par leur définition juridique
C’est la loi du 7 octobre 2016 pour une république numérique qui vient mettre fin à
cette assimilation. En effet, en plus de reconnaitre le joueur professionnel de jeux vidéo, elle
va mettre au point un cadre légal pour les compétitions de jeux vidéo. Ce cadre, prévu à
l’article 101, permet donc à la compétition de sortir du régime des loteries sous conditions.
Dans cet article 101 qui sera intégré au Code de la sécurité intérieure comme l’article
321-8, le législateur commence par définir la notion de compétition de jeux vidéo. Pour ce
faire il rappelle que la définition de « jeu vidéo » qu’il utilise est celle prévue au sein du II de
l’article 220 terdecies du Code général des impôts. Est donc un jeu vidéo « tout logiciel de
loisir mis à la disposition du public sur un support physique ou en ligne intégrant des
éléments de création artistique et technologique, proposant à un ou plusieurs utilisateurs une
série d’interactions s’appuyant sur une trame scénarisée ou des situations simulées et se
traduisant sous forme d’images animées, sonorisées ou non. »
La loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique vient cependant dans son
article 101 conditionner la légalité de ces compétitions. L’article L. 321-9 dispose tout
d’abord que la compétition doit être organisée en la présence physique des participants. La
suite de l’article prévoit notamment quelles sont les conditions d’équilibre financier que
l’organisateur de la compétition devra respecter. L’organisateur n’aura notamment pas le droit
de faire de bénéfices grâce aux droits d’inscriptions des joueurs : ce sacrifice financier doit
être rapporté à 100% au coût de l’organisation et aux « cash prize »75. Il s’agit ici de protéger
le joueur car « implicitement, cela signifie que les frais de participation ne doivent pas être
disproportionnés par rapport aux gains que peut envisager le joueur 76». Concernant le
C’est le décret n° 2016-871 du 9 mai 2016 qui vient apporter plus de précision quant
au mécanisme de déclaration préalable et va notamment désigner cette autorité administrative
comme étant le ministère de l’intérieur chargé des courses et des jeux. La déclaration doit être
faite auprès des services du ministère au plus tard un an et trente jours avant la date prévue.
Dans un article suivant, le décret apporte les précisions qu’attendait l’article L. 321-9
concernant les coûts d’organisation qu’il décline en sept catégories :
« 1° Les dotations aux amortissements des immobilisations créées ou acquises à l'état neuf et
affectées directement à l'organisation de la compétition ;
« 2° Les dépenses de personnel relatives aux salariés des organisateurs affectés directement à
l'organisation de la compétition ;
« 3° Les autres dépenses de fonctionnement, pour leur quote-part affectée à l'organisation de
la compétition. Ces dépenses comprennent les achats de matières, fournitures et matériels, les
loyers des locaux utilisés, les frais d'entretien et de réparation afférents à ces locaux, les frais
de voyage et de déplacement exposés par les organisateurs ;
« 4° Les dépenses exposées pour l'organisation de la compétition et résultant de prestations
confiées à d'autres entreprises ou organismes, dans des conditions normales de marché ;
« 5° Les contributions volontaires en nature ;
« 6° Les dépenses de communication et de promotion directement liées à l'organisation de la
compétition et les frais liés à la retransmission de la compétition, quels que soient les médias
utilisés, à la charge de l'organisateur ;
« 7° Les lots et les gains mis en jeu par les organisateurs pour la compétition ».
C’est au travers de l’article 101 de la loi venant encadrer les compétitions de jeux
vidéo que le législateur pose le principe. On constate à la rédaction qu’un rôle important est
laissé au représentant légal car c’est lui qui décidera d’autoriser ou non la participation du
mineur à la compétition. Pour ce faire, il est précisé que le représentant légal devra être mis au
courant des enjeux financiers de l’évènement, c’est-à-dire le sacrifice financier nécessaire à la
participation du mineur ainsi que les gains pécuniaires ou en nature prévus en cas de victoire.
L’article 101 de la loi va ensuite classer les rémunérations des joueurs de jeux vidéo de
moins de seize ans dans les rémunérations soumises à versement à la Caisse des dépôts. Le
décret précise qu’un certain montant de ces récompenses monétaires peut être laissé à la
disposition des représentants légaux, montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du
numérique et du travail. L’organisateur aura l’obligation de verser directement le surplus à la
Caisse des dépôts et consignations. A partir de là, le régime légal de ces récompenses est le
même que celui prévu par le Code du travail pour les rémunérations des mineurs de moins de
seize ans88.
Ici il est question de« protéger le mineur d’une part de lui-même et d’autre part, de
ses représentants qui pourraient abuser de sa situation comme il a été possible de le voir avec
l’affaire Jordy89 ».
87 SOULEZ (M.), ROTHMONY (V.), « Présentation et parution des nouveaux décrets e-sport », Lexing
Propriété Intellectuelle, https://www.alain-bensoussan.com/avocats/decrets-e-sport/2017/06/16/
88 Articles L. 7124-9 et R. 7124-34 à R. 7124-37 du code du travail.
89 DROIT ESPORT, « La présence d’un mineur dans une compétition
esport », https://droit-esport.com/2017/02/20/regime-des-joueurs-mineurs-
en-competition/
Comment répondre à cette question animant les débats. La création de topics à ce sujet
et de « sujets » sur les forums est perpétuelle. La communauté de joueurs se dispute autour de
cette question depuis des années. Et le législateur, certainement de peur d’aller trop vite, ou
peut être jute car ne sachant pas trop quoi en penser, a écarté le sujet. Alors il sera intéressant
de se saisir du débat et d’essayer d’apporter quelques éléments de réponse. (Section 1) Car
résoudre cette question permettrait de savoir, pour les acteurs du secteur, « sur quel pied
danser ». Faut-il attendre l’aide du législateur pour pouvoir s’organiser autour d’une
institution reconnue par l’Etat ? Ou faut-il tout de suite s’atteler à la tache de réunir les
différents acteurs privés de l’e-sport pour commencer à encadrer et réguler le secteur ? Ici
encore nous tenterons de répondre, tout en précisant les raisons de cette urgence. (Section 2).
L’e-sport fait l’objet de nombreux débats, mais si l’on ne devait retenir que celui
faisant couler le plus d’encre, ce serait très certainement la question du rapprochement entre
l’e-sport et le sport90. Si pour certains auteurs il semble nécessaire d’encadrer rapidement l’e-
sport, pour d’autres « il est urgent d’attendre », car il serait dangereux pour un secteur aussi
jeune que l’e-sport d’aller trop vite et de sauter les étapes. Et la définition même de la nature
de l’e-sport est naturellement une question essentielle à traiter avant de pouvoir envisager le
développement d’un cadre juridique plus approfondi (Paragraphe 1). Alors quant à la question
de savoir si l’e-sport est une pratique sportive, il sera aussi nécessaire de se demander si l’e-
sport peut et doit être du sport ? « Ne devrait-il pas conserver ses distances avec cette
qualification qui pourrait lui être préjudiciable ? L’e-sport serait-il autre chose de bien
plus ? »91 (paragraphe 2).
C’est aujourd’hui la problématique qui divise aussi bien l’ensemble des acteurs de l’e-
sport que les spécialistes du sport, les médias généralistes, la communauté de joueurs, les
entreprises du secteur. Les compétitions de jeux vidéo peuvent elle être vues comme une
pratique sportive à part entière ?
Une grande partie du problème vient du fait qu’il est difficile de s’accorder autour de
la définition même du sport. Une chose semble sûre en revanche, le sport est un terme
polysémique et en « devient un terme pansémique »92. Ce faisant chacun semble avoir sa
conception propre de ce qui peut être ou ne pas être du sport. A travers l’histoire, historiens,
Si cette définition semble claire, simple et précise, il n’en va pas de même avec celle
prévue par le code du sport. L’article L. 100-1 du code du sport se contente de décrire les
aspects sociaux du sport, « Les activités physiques et sportives constituent un élément
important de l'éducation, de la culture, de l'intégration et de la vie sociale. Elles contribuent
notamment à la lutte contre l'échec scolaire et à la réduction des inégalités sociales et
culturelles, ainsi qu'à la santé. La promotion et le développement des activités physiques et
sportives pour tous, notamment pour les personnes handicapées, sont d'intérêt général. L'égal
accès des hommes et des femmes aux activités sportives, sous toutes leurs formes, est d'intérêt
général ».
Le Conseil d’Etat, en matière d’octroi des agréments pour les fédérations, a donc
développé au fil des années une jurisprudence94 en prévoyant un faisceau d’indice. Depuis sa
décision du 3 mars 200895, il est question de « l’organisation d’une activité dont le caractère
de discipline sportive repose sur un faisceau d’indices incluant la recherche de la
performance physique, l’organisation régulière de compétitions et le caractère bien défini des
règles applicables à la pratique de cette activité ». Et refuse de fait d’adopter la conception
large de cette notion choisie à l’article 2 de la charte européenne du sport : « On entend par
"sport" toutes formes d'activités physiques qui, à travers une participation organisée ou non,
93 BESOMBES (N.), « Les jeux vidéo compétitifs au prisme des jeux
sportifs : du sport au sport électronique »
https://journals.openedition.org/sdj/612
94CE, 28 janv. 1998, no 158339 et no 158380, Union des grandes écoles de danse de France : critère de la
compétition. – CE, 13 avr. 2005, no 258190, Fédération de paintball sportif, Lebon, p. 147 ; Gaz. Pal. 25 août
2005, no 237, p. 8, obs. P. POLÈRE ; Revue juridique économie du Sport no 76, 2005, p. 31, obs. F. LEMAIRE ;
Cahier droit du sport no 2, no 2005, p. 128, note V. MERCIER : recherche de la performance physique,
compétition, règles bien définies (les abstracts du Recueil Lebon évoquent déjà l’idée du faisceau d’indices). CE,
26 juill. 2006, no 285529, Fédération française de bridge, Cahier droit du sport no 5, 2006, p. 82, note J.-M.
MARMAYOU : recherche de la performance physique et compétition.
95 CE, 3 mars 2008, no 308568, Fédération des activités aquatiques d’éveil et de loisir,AJDA 2008, p. 1219,
note M. TOUZEIL-DIVINA.
On peut donc constater au travers de ces définitions que le critère premier est souvent
celui de l’activité ou de la performance physique. De ce fait, il est difficile pour beaucoup de
considérer la compétition de jeux vidéo comme une activité sportive, l’engagement physique
y étant moins important. L’e-sport souffre, comme le jeu vidéo avant lui, d’une image
péjorative, celle d’une « simple distraction abrutissante et légèrement addictive pour enfants,
voire pour adultes renfermés96. » Etant une activité dite sédentaire, on ne la considère pas
comme une activité nécessitant un effort physique quelconque.
Cependant l’activité physique n’est pas forcément la condition retenue par certains
auteurs dans leur définition du sport. C’est le cas notamment de Pierre Parlebas pour qui le
sport est « une activité de nature motrice, elle est règlementée, donne lieu à des compétitions
et se manifeste par une prise en compte institutionnelle97 ».
On peut constater que des sports socialement et institutionnellement acceptés tels que
le tir à l’arc, le tir au pistolet, le golf ou le curling nécessitent une dépense énergétique bien
moindre que d’autres sport. L’utilisation du critère de l’activité de nature motrice semble plus
appropriée pour qualifier le critère physique de l’activité. Alors est-ce que l’e-sport pourrait
être un sport au vu de cette définition ?
Tout d’abord, oui, l’e-sport est une activité de nature motrice. Les joueurs de haut
niveau, en utilisant la souris et le clavier peuvent exécuter plus de 300 actions par minute ou
APM. Si on considère une partie d’un jeu, telle une partie de League of Legends, qui peut
facilement atteindre les 40 minutes, la dépense physique est effective, à raison de cinq actions
96 HUET (J.), CHOMIAC DE SAS (P-X.), « L’e-sport : pas un sport, mais une
« compétition de jeux vidéo » désormais encadrée », Communication
commerce électronique, revue mensuelle LEXIS NEXIS, Jurisclasseur,
Juillet-Aout 2017.
97PARLEBAS (P.), « Jeux, sports et sociétés », Lexique de praxéologie
motrice, Paris, INSEP-publications, 1999, p. 196.
On constate donc qu’il est difficile à l’heure actuelle de caractériser l’e-sport de sport à
proprement parler. Cependant il n’en reste pas moins qu’une partie de la communauté du
secteur semble souhaiter que l’e-sport puisse tendre vers cette qualification. On peut
notamment citer Matthieu Dallon, créateur de l’ESWC, co-fondateur et président de France
Esports qui définit l’e-sport comme « Un nouveau sport, le nouveau sport du XXIe siècle
grace auquel, depuis sa chambre d’adolescent, on peut être propulsé dans un stade bouillant
de supporters102 ». On peut aussi citer Samy Ouerfelli, directeur général de Turtle
Entertainment France, ESL, qui le définit comme « une nouvelle discipline sportive comme
nous n’en avons pas vu depuis plusieurs années. La nature vidéoludique de ce mouvement
empêche le consensus autour du curseur « sport » ou « divertissement » mais je pense que
l’on retrouve suffisamment de critères pour ne plus avoir à se poser la question103. »
Ce débat a récemment été relancé par plusieurs actualités. Tout d’abord, l’organisation
d’un forum sur l’e-sport par le comité international olympique (CIO) et l'association mondiale
des fédérations internationales de sport (GAISF) dans le but d’étudier les compatibilités entre
l’e-sport et le sport108. Puis son intégration par le Conseil olympique d’Asie aux prochains
jeux asiatiques de 2018 en Indonésie et en Chine en 2022 comme discipline médaillable.
Enfin, par l’initiative de la ministre des Sports, Laura Flessel, d’organiser la signature
d’une convention entre la Team Vitality et l’Institut National du Sport, de l'Expertise et de la
Performance (INSEP) portant sur trois axes majeurs : l'entraînement, le développement et la
reconversion des e-sportifs109.
Ainsi, difficile d’y voir clair sur la volonté des pouvoirs publics et du législateur. Doit-
on s’attendre à la reconnaissance de l’e-sport dans les années à venir ? Rien n’est moins sûr
car pour certains auteurs, cette reconnaissance pourrait être « mortelle »110.
106 « Xpeke » est le pseudonyme de Enrique Cedeño Martinez. C’est un joueur professionnel Espagnol League
of legends. C’est l’utilisation d’une stratégie très audacieuse lors d’une compétition internationale qu’il va
marquer les esprits des joueurs. https://euw.leagueoflegends.com/fr/news/esports/esports-editorial/un-symbole-
de-league-legends-xpeke
Et que dire du contenu. Il semble assez facile de reconnaitre que certains jeux, comme
les FPS du moment, ne sont pas en adéquation parfaite avec les principes et les valeurs de
l’olympisme, et c’est le point de vue de l’actuel président du CIO Thomas Bach. Il faut à ce
titre remarquer que si le Comité olympique d’Asie a intégré l’e-sport aux disciplines
présentes, il n’a sélectionné que six jeux : League of Legends, Hearthstone, Clash Royale,
Starcraft 2, Pro Evolution Soccer ou encore Arena of Valor.
Il faut cependant reconnaitre que l’e-sport Français aurait aussi à gagner du régime
protecteur du code du sport112. Certaines dispositions pourraient permettre un meilleur
financement de ce secteur qui peine un peu à trouver son modèle économique, soit par de
nouvelles sources de revenus soit par une réduction des dépenses. On pourra penser aux
avantages légaux en matière de publicité, en matière de droit d’exploitation des compétitions
sportives113, de sécurité des manifestations sportives114, d’assurance115 et de statut des joueurs
professionnels116 ou encore en matière de paris sportifs.
112HUET (J.), CHOMIAC DE SAS (P-X.), « L’e-sport : pas un sport, mais une
« compétition de jeux vidéo » désormais encadrée », Communication
commerce électronique, revue mensuelle LEXIS NEXIS, Jurisclasseur,
Juillet-Aout 2017.
113 Article L. 333-1 et s. du code du Sport.
114 Article L. 332-1 à L. 332-21 du code du Sport.
115 Article L. 331-9 à L. 331-12 du code du Sport.
116 Article L 222-7 à L. 222-22 du code du Sport.
La création d’un interlocuteur unique de l’e-sport en France n’est pas une idée
nouvelle. Les tentatives sont plurielles : on peut penser à la fédération française des jeux en
réseaux (FFJR), la fédération la fédération française de jeu vidéo (FFJV) ou encore plus
récemment la création de France eSports. Mais quel intérêt à cela ? Structurer permettrait
notamment aux investisseurs d’y voir plus clair sur ce secteur, et de gagner en lisibilité. Avoir
un interlocuteur unique représentant l’e-sport français pourrait aussi permettre une certaine
concertation de la régulation et l’émergence d’une règlementation harmonisée pour protéger
cette pratique.
« La mission est convaincue que le véritable enjeu est celui de permettre la pratique
ordonnée et convenablement encadrée d’un phénomène touchant des millions de Français, en
répondant progressivement aux difficultés qui ne manqueront pas de se poser au cours de son
développement117 ».
A l’issue de l’élaboration du rapport parlementaire sur la pratique compétitive du jeu
vidéo un certain nombre de propositions ont étés faites dont une portant sur l’organisation du
secteur. Effectivement, après avoir rencontré une grande partie des acteurs de l’e-sport
Français, le sénateur Jérome Durain et le député Rudy Salles sont, semble t’il, arrivés à la
conclusion qu’une structuration du secteur favoriserait son développement. Conscients que
La loi du 7 octobre 2016 pour une république numérique ne vient pas consacrer cette
proposition. Elle se contente de mettre au point un mécanisme d’agrément à la charge du
ministre chargé du numérique119 et un mécanisme de déclaration pris en charge par le
ministère de l’intérieur120.
Mais aujourd’hui, après l’entrée en vigueur de la loi pour une République numérique, on
ne peut que constater l’absence d’un interlocuteur unique et l’existence d’une co-régulation
non harmonisée entre une pluralité d’acteurs se partageant cette fonction. En effet, l’e-sport
On pourrait considérer que les principaux acteurs privés de la régulation sont les éditeurs,
les organisateurs, et les opérateurs de plateforme en ligne.
Effectivement, les éditeurs, en tant que propriétaires des jeux supports des compétitions et
donc des droits d’auteurs sur leur œuvre, doivent contrôler l’utilisation et l’exploitation de
leur jeu. Ils ont historiquement pris l’habitude de s’autoréguler. De ce fait, avant
l’organisation d’une compétition, l’organisateur, lorsqu’il ne s’agit pas de l’éditeur lui-même,
va devoir obtenir l’autorisation d’utiliser le jeu comme support. Cependant, les éditeurs n’ont
pas tous la même politique au sujet de l’organisation de tournois, certains imposant des règles
à respecter aux organisateurs122 et d’autres pas. En plus de réguler le jeu en lui-même par la
mise en place de règles, les éditeurs vont contracter avec ces organisateurs pour décider du
déroulé des compétitions et des obligations de chaque partie. Les éditeurs ont l’habitude de
l’autorégulation, en témoigne le système de signalétique PEGI123 mis au point par les éditeurs
européens, qui a pour but la protection du consommateur mineur en signalant aux parents le
contenu d’un jeu. De plus, l’éditeur règlemente aussi l’usage fait du jeu par les joueurs, et à ce
titre, il peut les sanctionner pour tout comportement inapproprié au regard des conditions
générales d’utilisation124. A titre d’exemple, l’éditeur « Riot » prévoit, en plus des sanctions
disciplinaires, la possibilité de supprimer le compte du joueur arbitrairement. L’éditeur peut
mettre fin à la carrière d’un joueur professionnel en cas de suppression de son compte.
Viennent ensuite les organisateurs de compétition qui vont fixer les conditions à respecter
pour la participation des joueurs. Pour ce faire, il va s’engager dans une relation contractuelle
avec chaque participant en leur faisant accepter des conditions générales de participation125
dans lesquelles il va prévoir l’organisation du tournoi (cession du droit à l’image des joueurs,
les comportements autorisés et prohibés, les sanctions envisageables etc..). Là encore des
Les opérateurs de plateformes en ligne 127 ne sont pas forcément les premiers auxquels on
va penser lorsque l’on évoque les acteurs de l’e-sport car ils ne sont pas les acteurs directs de
celui-ci. En revanche, ils sont actuellement indissociables de son développement. Ils
participent plus indirectement que les autres acteurs à la régulation du secteur. A titre
d’exemple, on peut citer principalement la plateforme « Twitch » qui est la première
plateforme de streaming128. Cette plateforme va permettre la diffusion en direct par des web
TV ou, dans notre cas, par des joueurs professionnels, des compétitions de jeux vidéo ou du
contenu non compétitif mais toujours vidéo ludique. Cependant, comme les acteurs
précédents, l’acceptation de conditions d’utilisation129 est obligatoire pour pouvoir accéder au
service proposé. Là encore, il est question de prévoir les comportements autorisés et ceux
prohibés, ainsi que des sanctions pour le non-respect de ce règlement. Il faut savoir que les
joueurs professionnels se financent en grande partie grâce à ces plateformes, ainsi leur
exclusion de celle-ci peut venir freiner fortement, voire définitivement, leur carrière de joueur
professionnel.
A l’opposé se trouvent les régulateurs publics qui doivent être considérés comme des
régulateurs indirects de l’e-sport.
On peut aussi citer, au titre des autorités de régulation intervenant dans ce secteur, le
Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA). Si celui-ci n’intervient pas directement pour
réguler l’e-sport, ses décisions peuvent être lourdes de conséquence pour son financement. En
effet, le CSA a vocation à gérer la répartition du spectre hertzien et à réguler l’audiovisuel
public. De ce fait, il vérifie le contenu de ce qui est diffusé et applique pour se faire une
signalétique contraignante. Les médias audiovisuels français, au vu de la croissance de l’e-
sport et de l’âge moyen de son audimat, ont voulu se saisir du phénomène et proposer de plus
en plus de contenu de ce genre. Cependant le CSA applique à ce nouveau contenu la
règlementation normalement applicable. Et du fait de la nature même de certains jeux diffusés
(CSGO, Call Of Duty), ceux-ci se voient apposés des signalétiques ayant pour conséquence
leur diffusion à des horaires tardifs. De plus le CSA applique sa règlementation sur les
contenus publicitaires venant notamment interdire l’apparition des sponsors aux écrans ou
venant assimiler la compétition de jeux vidéo à de la publicité dissimulée… Alors que dire de
la possibilité d’une extension des pouvoirs de régulation du CSA aux plateformes en ligne
telles que « Youtube » ? Une application de la règlementation actuelle du CSA à « Youtube »
aurait pour conséquence probable de priver les joueurs professionnels d’une partie non
négligeable de leurs revenus. Mais la question de la régulation du secteur par le CSA fera
l’objet de développements ultérieurs.
Enfin, parmi les régulateurs publics, depuis la loi du 7 octobre 2016 pour une
République numérique, on peut citer le service du ministère de l'intérieur chargé des courses
et jeux, qui a vocation à vérifier les déclarations de compétition de jeux vidéo. On peut aussi
citer le ministre chargé du numérique qui a la charge de réceptionner les demandes
d’agrément et de les attribuer après examen.
Malgré l’absence d’aide législative dans la structuration de l’e-sport Français alors même
que le rapport parlementaire le préconisait, les acteurs privés du secteur ont conscience de
l’importance d’institutionnaliser et de faire émerger un interlocuteur central.
C’est sous l’impulsion de la secrétaire d’Etat au numérique, Axelle Lemaire, que fut créée en
avril 2017 l’association France eSport131. L’idée était de créer une institution pouvant
prétendre à une véritable légitimité. L’association regroupe à la fois des joueurs, des éditeurs,
des promoteurs. Son principal objectif ? Structurer pour continuer de promouvoir l’e-sport en
France sans que les acteurs n’entrent en conflit les uns avec les autres. Et pour ce faire,
l’association compte bien continuer à se diriger vers une organisation fédérale sans attendre
dans l’immédiat de reconnaissance étatique. Il s’agit pour l’association d’encadrer le secteur
professionnel de l’e-sport. Mais elle a d’autres prétentions : organiser la pratique amateur de
l’e-sport et réfléchir aux problématiques qui se posent aujourd’hui telles que l’addiction chez
les jeunes ou encore la déscolarisation. Il est intéressant de préciser que toute personne
adhérant à cette association doit accepter la charte d’éthique et de déontologie 132. Cette charte
vient, entre autre, préciser les valeurs de l’e-sport telles que l’esprit e-sportif, la convivialité et
la solidarité mais aussi les engagements de chaque adhérent comme le respect des règles, de
l’adversaire et du public ; l’interdiction de tricher, la lutte contre la discrimination et la
protection des mineurs.
En devenant cet interlocuteur principal de l’e-sport, France eSport a vocation à traiter avec
les pouvoirs publics pour éviter une sur-régulation mais on peut imaginer à l’avenir que cette
association puisse devenir le régulateur central de l’e-sport. Car l’e-sport est victime, au
même titre que le sport, d’un certain nombre de maux contre lesquels chaque acteur du
secteur a du mal à lutter de façon isolée. De plus, on peut imaginer l’encadrement du secteur
par une règlementation des acteurs privés, ce qui pourrait permettre à terme d’harmoniser la
régulation de l’e-sport et d’aller progressivement vers un partenariat public-privé comme
semblait le souhaiter les auteurs du rapport parlementaire. Pourrait-on imaginer à terme en
On peut aussi évoquer l’organisation régulière de conférences par les acteurs privés de l’e-
sport dans le but de favoriser son développement en évoquant notamment les diverses
problématiques du secteur133.
L’e-sport, contrairement au sport traditionnel, est le fruit d’un grand nombre d’acteurs
privés avec des intérêts leur étant propres. A l’heure actuelle, faute de régulateur central du
secteur, difficile pour les acteurs d’harmoniser et de dégager des règles pour la pratique de l’e-
sport. Cela permet donc la propagation d’un certain nombre d’abus contre lesquels il est
absolument nécessaire de lutter.
Tout d’abord, le dopage, certes moins présent dans l’e-sport que dans le sport
traditionnel, est une pratique qui devient de plus en plus courante à haut niveau. Parmi les
substances utilisées on peut citer l’Adderall134, un médicament dont l’usage est détourné par
les joueurs pour augmenter les capacités intellectuelles. Sa présence est avérée chez les
joueurs professionnels cependant il est très difficile à l’heure actuelle pour l’e-sport de lutter
contre cette pratique. En effet, en l’absence de fédération officielle, aucune autorité n’existe
pour obliger les joueurs à se soumettre à des tests. De plus, quand bien même les joueurs
accepteraient des tests sanguins comme dans le sport, sur qui pèserait le poids financier de cet
encadrement ? L’organisateur pour qui, on le verra par la suite, les sources de financements
sont à la fois rares et sujettes à question ? L’organisateur de compétition de jeux vidéo, au
même titre que les organisateurs de rencontres sportives, devra aussi lutter contre la tricherie.
L’utilisation de programmes tiers est aussi un problème mais ici propre à l’e-sport. En
effet, il s’agit d’utiliser un logiciel qui n’est pas prévu par l’éditeur et qui aura pour but de
donner un avantage au joueur qui l’utilise. Il peut s’agir de différents types d’avantages : la
possibilité de voir à travers les décors pour pouvoir situer exactement les adversaires, un
« aimbot135 » ou aide à la visée que l’on trouve souvent dans les FPS mais aussi dans les
MOBA. S’il est globalement plus simple de lutter contre ce type de triche lors de
compétitions physiques, c’est chose ardue lors des phases de sélection en ligne. Il est
impossible pour un organisateur de vérifier le matériel utilisé par le joueur comme cela se fait
dans les grandes compétitions. Encore une fois, il s’agit pour les éditeurs et les organisateurs
de tournoi de coopérer pour lutter contre cette pratique, cependant il s’agit d’une charge
financière de plus.
Au titre des dérives propres à l’e-sport on peut aussi citer le DDos 136 ou attaque par
déni de service137. Il s’agit d’un piratage informatique qui « vise à rendre un serveur, un
service ou une infrastructure indisponible. L'attaque peut prendre différentes formes : une
saturation de la bande passante du serveur pour le rendre injoignable ; un épuisement des
ressources système de la machine, l'empêchant ainsi de répondre au trafic légitime 138». Cette
pratique peut cibler une compétition dans sa globalité ou le matériel d’un joueur à titre
particulier. Il est compliqué pour l’organisateur de lutter contre cette pratique qui peut avoir
des répercussions catastrophiques sur une compétition de jeu vidéo. Il s’agit là encore d’une
protection à la charge de l’organisateur.
Récemment, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) est venue relancer les débats
autour de l’addiction aux jeux vidéo. En effet, le 18 juin 2018, l’OMS a reconnu l’addiction
aux jeux vidéo comme une maladie. Il ne s’agit pas de considérer la pratique des jeux vidéo
comme pathologique mais la pratique persistante du jeu par une minorité de joueurs peut en
revanche l’être. Le « trouble du jeu vidéo » intègre donc le chapitre sur les troubles de
l’addiction de la 11e version de la Classification internationale des maladies. Cependant à
l’heure actuelle, la structuration de l’e-sport français semble peu adaptée pour lutter contre
l’addiction. Cette lutte pourrait devenir, au même titre que la lutte contre la sédentarisation,
une politique de santé publique. Il sera donc indispensable pour l’e-sport mondial de coopérer
avec les Etats pour lutter efficacement contre ce phénomène.
139 https://france-esports.org/site/rencontre-esport-et-mixite-recap/
140 kitsuntsun, « [Chronique] Pourquoi si peu de mixité dans l’eSport ? »,
le 15 janvier 2018, Journal du Geek,
https://www.journaldugeek.com/2015/01/15/chronique-mixite-esport/
141 « Interview : Marie-Laure « Kayane » Norindr », in Le guide de l’esport,
CHANSON (R.).
L’e-sport est un secteur qui s’est construit autour d’un grand nombre d’acteurs. On y
trouve l’éditeur du jeu vidéo qui sera le support des compétitions, le joueur professionnel, les
sponsors qui souhaitent profiter de la croissance et du succès de ce phénomène pour se mettre
en avant et les médias qui, qu’ils soient traditionnels ou pas, permettent la diffusion de ces
compétitions. Et pour chacun de ces acteurs, les sources de financement sont plurales (Section
1). Le législateur, en s’arrêtant à la simple légalisation des compétitions de jeux vidéo et à
l’instauration d’un contrat de joueur professionnel de jeu vidéo, condamne dans un premier
temps l’e-sport à un cadre juridique insuffisant. De fait, certaines spécificités propres à l’e-
sport sont encadrées par un droit commun qui n’est pas pensé pour ces situations (Chapitre 2)
et peuvent mettre certains acteurs en difficulté. Ce sera notamment le cas de la question de la
titularité de l’exploitation des compétitions, de la diffusion de ces évènements et de la fiscalité
du secteur qui mériterait d’être simplifiée.
Il conviendra d’étudier en premier lieu les différents acteurs et leur rôle (Paragraphe
1), puis les modes de financement de l’e-sport (Paragraphe 2).
On l’a vu le joueur professionnel de jeux vidéo est l’acteur central de l’e-sport, c’est
autour de lui que s’organise le secteur. A l’heure actuelle, on dénombre environ un millier de
joueurs à travers le monde qui arrivent à en vivre. Ce sont eux qui vont s’entrainer
intensivement sur les jeux, qui vont en parler et qui vont animer et faire vivre l’e-sport. Si, on
le sait, le but premier de l’e-sportif est de participer aux compétitions, on peut constater
qu’une partie d’entre eux sont aussi animateurs et créateurs de contenu sur les plateformes.
En effet, sur la plateforme « Twitch » le joueur va créer une chaine142 pour pouvoir
diffuser en direct ou avec un léger délai ses sessions de jeu auxquelles s’ajoutent ses
commentaires en direct et éventuellement une vue sur son clavier et sa souris. C’est ce que
l’on appelle couramment le « streaming ». L’avantage pour lui est que cette diffusion, qu’il
contrôle, lui permet de gagner en visibilité et, si la communauté le soutient, en réputation.
Autre avantage, la plateforme prévoit l’ajout d’un « chat143 » qui donne l’occasion aux fans ou
« viewers 144», via un fil de conversation, d’échanger avec le joueur qui leur répondra
directement en vocal. A travers ce système, l’internaute va se sentir plus proche du diffuseur.
Le contenu à sa disposition est plus riche du fait du double sens de la communication. Le
joueur ne se contente alors plus de jouer sa partie, il va animer une session de streaming
durant laquelle il va devoir faire le « show », devant souvent plusieurs milliers de « viewers »,
en interagissant simultanément avec eux.
142 « Chaine », par chaine est entendu le compte sur lequel pourront être
diffuser des « Stream » ou des vidéos.
143 « Chat » littéralement bavardage, désigne la messagerie instantanée,
dialogue en ligne.
144 « Viewers » désigne le spectateur.
Les équipes sont les structures regroupant et organisant les joueurs. Si, aux prémices
de l’e-sport, il ne s’agissait que d’un groupe de joueurs se rendant aux compétitions pour le
plaisir, désormais avec la professionnalisation des joueurs et une circulation plus importante
de capitaux, ces équipes sont devenues de véritables entreprises. Ou alors ces équipes se
regroupent ou en grandissant fondent des structures. On peut citer à titre d’exemple la
structure Solary, une web TV, mais qui dispose en son sein de plusieurs équipes d’e-
sportifs/animateurs telles que l’équipe Solary et l’équipe Lunary.
B. Les éditeurs
C. Les organisateurs
D. Les « sponsors »
Les « sponsors148 » ou parrains depuis 1989149 sont eux aussi, incontestablement des
acteurs du développement de l’e-sport. « Le parrain s’appuie sur l’image ou la notoriété d’un
club, d’un sportif, voire d’un championnat ou d’une manifestation sportive organisée par une
fédération ou un organisateur indépendant, en vue de valoriser sa propre image 150 ».
Historiquement, les sponsors de l’e-sport sont les équipementiers informatiques, les marques
d’ordinateurs (Asus, Acer, Dell, Razer, Logitech etc..), les marques de composants (Corsair,
Gigabyte, MSI etc..). Il était facile de saisir l’intérêt d’une collaboration avec ces marques,
« pour devenir joueur professionnel, il faut être bien équipé ».
Cependant ces dernières années, avec l’amélioration de l’image de l’e-sport dans son
ensemble, sa croissance économique très importante et surtout un audimat composé d’un
public très jeune, les entreprises non endémiques, qu’on appelle aussi les partenaires « hors
captif », du secteur se sont prises d’intérêt pour l’e-sport151. Le « sponsoring » intéresse alors
dans un premier temps les secteurs les plus proches comme les opérateurs téléphoniques
(SFR, Orange), puis des secteurs plus éloignés comme les boissons énergisantes (Red Bull,
Monster…) jusqu’aux secteurs n’ayant plus aucun rapport, comme les banques, les assurances
ou encore des marques de voiture.
E. Les médias
Les médias de l’e-sport sont très nombreux et utilisent divers procédés pour relayer
l’information. Aussi cet ensemble d’acteur regroupe les réseaux sociaux, les sites internet
Les médias télévisuels Français voient leur audimat décroitre et vieillir au fil des ans.
Dans un premier temps, ils n’ont pas pris au sérieux ce phénomène et ont même participé à sa
stigmatisation. Notamment, lors d’une chronique du Grand Journal de Canal+, autour de la
question du rachat de la plateforme Twitch puis plus récemment toujours au sein de la même
émission, avec l’invitation des deux célèbres « Youtuber » Squeezie et Cyprien. Mais ces
médias se sont rendus compte du potentiel télévisuel de l’e-sport car celui-ci semble détenir
les mêmes codes que le sport (l’organisation de championnats, un véritable show autour des
matchs etc…). Et actuellement les programmes sportifs sont les seuls programmes ayant une
audience croissante. Ainsi, dernièrement, des chaines de télévisions se dotent de programmes
traitant d’e-sport tels que Canal+, avec son émission Canal Esport Club, dans l’espoir de
Enfin il est possible de citer, parmi les médias de l’e-sport, les webTV 160, qui se
servent des plateformes de streaming telles que Twitch, pour diffuser sur internet les
émissions qu’elles animent. Souvent ces webTV se trouvent au sein de structures plus
généralistes exerçant d’autres activités autour de l’e-sport. Ce peut être la rédaction et la
publication d’articles dans ce domaine ou encore la création de véritables équipes de joueurs
professionnels. Les principales webTV Françaises sont aujourd’hui Millenium, O’Gaming,
Lestream, ArmaTeam et Solary. De plus la presse généraliste s’intéresse aussi au phénomène
et va jusqu’à introduire des sections y étant consacrées dans leur journal en ligne161.
L’économie de l’e-sport repose aussi en grande partie sur la publicité qui se décline sous
différentes formes. L'article 2 du décret n° 92-280 du 27 mars 1992 relatif à la publicité et au
parrainage audiovisuel précise que « constitue une publicité toute forme de message télévisé
diffusé contre rémunération ou autre contrepartie en vue soit de promouvoir la fourniture de
biens ou services, y compris ceux qui sont présentés sous leur appellation générique, dans le
cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou de profession libérale, soit
d'assurer la promotion commerciale d'une entreprise publique ou privée ».
Si cette définition ne fait pas directement la distinction, sont pourtant à différencier
« sponsoring » (ou parrainage) et publicité. Car si dans le premier cas, la société souhaitant
mettre sa marque en avant va se lier directement à un acteur ou à un évènement par un contrat
exigeant des contreparties réciproques, la publicité ne se rattache à aucun acteur en particulier
et va directement bénéficier de la pluralité des modes de diffusion de ce secteur. Les différents
acteurs vont se contenter de diffuser un ou plusieurs spots publicitaires sur leur site ou au
travers des autres moyens de diffusion à leur disposition. Généralement, les
streamers/Youtubers vont se voir appliquer par les publicitaires un système de rémunération
au nombre de vues ou de « clicks167 » : on parle de « CPV168 ». Ce système de rémunération
est proportionnel à la visibilité qu’a cet acteur sur internet.
C’est ce système qui est souvent en vigueur sur les plateformes, qu’elles soient « live » ou de
« VOD ». Par le biais de régies publicitaires vont être mis en relation des annonceurs
souhaitant bénéficier de plus de visibilité en diffusant leurs publicités avec les utilisateurs de
ces plateformes postant régulièrement du contenu vidéoludique (comme c’est le cas su
Youtube) ou faisant du streaming (comme sur Twitch). Sur Youtube, le vidéaste pourra choisir
le nombre de publicités qu’il diffusera dans sa vidéo, le moment où elles apparaitront. Il est
169 https://www.forbes.com/sites/erikkain/2014/06/18/youtuber-
pewdiepie-is-making-4-million-a-year/#4c171a225b25
170 https://www.millenium.org/news/291247.html
Il faut d’ailleurs distinguer ce que l’on entend par e-sport. A l’heure actuelle, la loi ne
considère pas l’e-sport dans son ensemble mais uniquement par le biais de l’e-sportif
professionnel. Cependant l’e-sport n’est pas constitué que de joueurs professionnels mais
aussi de joueurs amateurs qui, dans un premier temps, se financent uniquement grâce aux
plateformes précédemment évoquées et grâce à leur communauté de fans.
177 BUY (F.), « Contrats conclu avec les spectateurs », Lamy droit du
sport, n°366-15.
178 Numérama.com, « L’addiction aux jeux vidéo, une maladie selon
l’OMS : la classification ne fait pas consensus »
https://www.numerama.com/politique/387033-laddiction-aux-jeux-video-
une-maladie-selon-loms-la-classification-ne-fait-pas-consensus.html
L’éditeur, on l’a vu, est une partie prenante de l’e-sport. Soit par son rôle premier de
développeur du jeu soit par son rôle plus secondaire d’organisateur de compétitions de jeux
vidéo. Or, il ne faut pas oublier qu’en France les éditeurs bénéficient d’un soutien public de
taille : le crédit d’impôt. En effet c’est l’article 220 terdecies du Code général des impôts
(CGI) qui le prévoit pour les entreprises de création de jeux vidéo soumises à l’impôt sur les
sociétés et respectant la législation sociale en vigueur. Ce crédit d’impôt est un avantage fiscal
consistant en une réduction d’impôts par le biais de trois dispositions : un taux du crédit porté
à 30%, un plafond de ce crédit porté à 6 millions d’euros et le plafond de dépenses
externalisées pouvant être prises en compte pour le calcul du crédit d’impôt porté à 2 millions
d’euros. Cette politique fiscale en faveur du secteur vidéoludique montre une volonté
Française de soutenir le développement de ce secteur. Ce secteur, qui se porte plus que bien
avec un chiffre d’affaire mondial de 100 milliards de dollars et une croissance de 8%, se
démocratise de plus en plus grâce aux nouveaux médias, d’internet et à l’apparition de
179 Gameblog.fr, « Gamers Assembly 2017 : Les coulisses d'une LAN à
succès, notre compte-rendu complet »
http://www.gameblog.fr/news/67649-gamers-assembly-2017-les-coulisses-
d-une-lan-a-succes
180 « Zerator fait sauter la subvention de webedia suite à un tweet troll ?
» https://www.puregamemedia.fr/esport/zerator-fait-sauter-la-subvention-
de-webedia-suite-a-un-tweet-troll/
181 « Zerator fait sauter la subvention de webedia suite à un tweet
troll ? » https://www.puregamemedia.fr/esport/zerator-fait-sauter-la-
subvention-de-webedia-suite-a-un-tweet-troll/
On voit donc que le financement public n’est pas fondamentalement incompatible avec
l’e-sport ou les jeux vidéo et que, outre l’attractivité économique et culturelle de cette
industrie, certaines problématiques de santé publique notamment pourraient venir justifier un
partenariat public-privé plus régulier.
182 Steam est une plateforme de jeux vidéo permettant d’acheter des jeux exclusivement au format numérique.
Il conviendra d’étudier les difficultés tenant à la titularité des droits d’exploitation (paragraphe
1), puis les difficultés relatives à l’exploitation audiovisuelle (paragraphe 2), et enfin la
nécessité de clarifier la fiscalité de revenus annexes de l’e-sportif (paragraphe 3).
Si le jeu vidéo n’est pas expressément désigné comme œuvre de l’esprit par l’article
L112-2 du Code de la Propriété Intellectuelle, l’adverbe « notamment » utilisé pour la
rédaction de cet article dénote cependant d’une volonté du législateur de laisser l’opportunité
au juge de faire bénéficier, d’autres œuvres que celles listées, de la protection du droit
d’auteur.
Rappelons que l’article 220 terdecies II du Code général des impôts définit le jeu
vidéo comme « tout logiciel de loisir mis à la disposition du public sur un support physique
ou en ligne intégrant des éléments de création artistique et technologique, proposant à un ou
plusieurs utilisateurs une série d'interactions s'appuyant sur une trame scénarisée ou des
situations simulées et se traduisant sous forme d'images animées, sonorisées ou non ». On
comprend à travers cette définition que le jeu vidéo est une œuvre composée d’autres
éléments protégeables comme la musique, le design d’un niveau, les graphismes, le scénario,
le logiciel etc…
Dans la pratique, l’éditeur semble ne pas abuser de cette prérogative et préfère, dans
certains cas, tolérer l’organisation de compétitions autour du jeu vidéo dont il est le
propriétaire. Les éditeurs Blizzard et Riot Games prévoient tous deux dans leurs conditions
générales d’utilisation d’autoriser toute utilisation non-commerciale du jeu188.
A ce stade peut se poser la question du streaming de jeux vidéo par les joueurs
professionnels. Comme évoqué précédemment, le streaming est une source non négligeable
de revenus pour les joueurs dans la mesure où cela leur permet de toucher des revenus
183 Voir en ce sens :Cour d'Appel de Versailles, 13e chambre, 18 novembre 1999
Cour d'Appel de Paris, 4e chambre, 2 avril 2004, n° 02-05541
Cour d'Appel de Paris, 4e chambre, 10 novembre 2004, n°04-08.927
Cour d'Appel de Paris, 3e chambre, 20 septembre 2007, n° 07-01793
Mais alors, le « stream » rentre-t-il dans le cadre de l’utilisation autorisée par les
conditions générales d’utilisation ? Il semblerait que oui, car en dehors de quelques rares
exceptions191, les éditeurs ne viennent généralement pas réclamer les revenus publicitaires des
« YouTubers ». Pour les éditeurs cela doit être perçu comme une publicité à moindre frais en
faveur des jeux qu’ils développent.
195Article L 420-1 du Code de commerce prévoyant : « Sont prohibées même par l'intermédiaire direct ou
indirect d'une société du groupe implantée hors de France, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet
d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées,
conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu'elles tendent à :1° Limiter l'accès au
marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises ;
2° Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur
baisse ;
3° Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique ;
4° Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement ».
196Article L 420-2 du Code de commerce prévoyant : « « Est prohibée, dans les conditions prévues à l'article L.
420-1, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises d'une position dominante sur le
marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente,
en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales
établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées.Est en
outre prohibée, dès lors qu'elle est susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence,
l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises de l'état de dépendance économique dans
lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur. Ces abus peuvent notamment consister en
refus de vente, en ventes liées, en pratiques discriminatoires visées au I de l'article L. 442-6 ou en accords de
gamme ».
197 CJCE, 6 avril 1995, Radio Telefis Eireann (RTE) et Independent Television Publications Ltd (ITP) contre
Commission des Communautés européennes. Concurrence - Abus de position dominante - Droit d'auteur.
Affaires jointes C-241/91 P et C-242/91 P
Pour ce secteur, le régulateur n’est plus privé mais bien public. Depuis la loi n°86-
1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, c’est au Conseil supérieur
de l’audiovisuel qu’il revient d’assurer l'exercice de la liberté de communication
audiovisuelle200. L’article 9 du décret du 27 mars 1992 pris en application des articles 27 et 33
de la précédente loi prévoit que :
« La publicité clandestine est interdite. Pour l'application du présent décret, constitue une
publicité clandestine la présentation verbale ou visuelle de marchandises, de services, du
L’application stricte de cette règle ferait entrer le jeu vidéo en lui-même ainsi que
toutes les apparitions de sponsors dans la catégorie des publicités clandestines. Les diffuseurs
prennent alors soin de citer le moins possible le jeu dont il est question et cachent au mieux
les sponsors. Alors quel intérêt pour les différents acteurs d’investir et de soutenir ces
manifestation e-sportives à la télévision ? Avec la création de la chaine ES1 ayant comme
vocation unique la diffusion de programmes e-sportifs, il semble que le CSA ne souhaite pas
qualifier les compétitions de jeux vidéo comme relevant de la publicité clandestine 201 et
applique la même politique de tolérance que celle appliquée à la diffusion de compétitions
sportives à la télévision. Cela donne donc la possibilité aux joueurs filmés de porter leurs
sponsors sur leurs maillots ainsi que la possibilité d’afficher les sponsors de l’évènement 202.
Cette tolérance s’explique certainement par les contraintes financières du secteur : le CSA ne
souhaitant pas priver les acteurs de ces secteurs d’une partie de leur source de revenus.
En matière de jeux vidéo et de protection des mineurs, le principe fut d’abord celui de
l’autorégulation203. Créée en 1998, la fédération européenne des éditeurs de logiciels de
loisirs204, qui rassemble les associations nationales d’éditeurs tel que le SELL 205, en
collaboration avec la Commission européenne et sur validation du Conseil de l’Union
européenne créent un programme d’autorégulation nommé PEGI 206. L’objectif ici n’est pas
l’interdiction de certains jeux mais d’informer les parents du contenu des jeux vidéo qu’ils
L’e-sport, en tant que compétition d’un nouveau genre, pose un certain nombre de
questions, notamment vis-à-vis de la fiscalité de certaines sources de revenus. Sont
concernées ici la fiscalité relative aux récompenses financières ou « cash prize » et celle
relative aux donations.
A. Concernant le joueur
Tout d’abord il est nécessaire de rappeler que les joueurs professionnels de jeux vidéo
doivent soit être salariés par une structure, soit adopter un statut légal comme le statut
d’autoentreprise ou de société pour pouvoir par la suite déclarer ses revenus210.
Il faut aussi relever que l’administration fiscale fait preuve de tolérance vis-à-vis de
ces gains pour les joueurs dont ce n’est pas un revenu habituel. Tant que le joueur ne vit pas
des gains de ces compétitions, alors l’administration accepte de considérer ces revenus
comme non imposables.
A relever aussi que ces gains ne doivent pas en principe être soumis à la taxe sur la
valeur ajoutée (TVA) dans la mesure où ils ne viennent pas rémunérer le joueur vainqueur
pour une prestation qu’il aurait effectué pour l’organisateur, mais uniquement rétribuer sa
performance212.
Concernant les dons, il peut s’agir d’une source non négligeable de revenus pour le
joueur professionnel, qui, souvent, ne sait pas comment il doit légalement les considérer et les
déclarer. Pour un joueur non professionnel, les dons de la communauté, s’ils ne sont pas trop
importants, peuvent être considérés comme des présents d’usage et ne sont alors pas soumis à
déclaration fiscale. En revanche, si le joueur est professionnel ou qu’il s’agit simplement
d’une somme élevée, la donation entre personnes non-parentes est fiscalement imposée à
60%. Lorsqu’ un membre de la communauté de fans du joueur va lui faire bénéficier d’une
transaction financière mais que celle-ci lui permet d’obtenir « un avantage individualisé et
non symbolique ou dérisoire », cela peut être considéré comme une prestation de service
assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Et c’est souvent le cas lors des cessions de
« streaming » des joueurs : les donataires bénéficient de petits avantages comme la possibilité
de diffuser en direct son nom et une « dédicace » sur le « stream » du joueur qui le lira et le
remerciera en direct.
B. Concernant l’organisateur
Il sera aussi soumis à la TVA pour toutes recettes encaissées. Cependant quel taux
appliquer aux recettes de billetterie ? Si le taux normal est de 20%, celui relatif aux foires et
salons est de 10% alors que celui relatif aux spectacles et compétitions sportives est de 5,5%.
L’e-sport et ses compétitions ne figurant pas à la liste limitative du Code général des impôts
prévoyant les manifestations pouvant bénéficier du taux réduit213, et ne disposant pas de
fédération d’e-sport agréée par le ministère des sports, se voit alors appliquer le taux normal
de 20%. Dans son rapport, la mission parlementaire propose, du fait des similitudes existant
entre le sport et l’e-sport, mais surtout car il semblait raisonnable que l’on puisse considérer
une compétition comme un spectacle, de soumettre les droits d’entrée des compétitions d’e-
sport au taux réduit de 5,5%214.
L.-Les droits d'entrée pour la visite d'un parc zoologique répondant aux conditions fixées par arrêté des ministres
compétents.
Les sources de financement privées, bien que nombreuses et avantageuses sur certains
aspects n’en restent pas moins peu fiables du fait d’un cadre juridique flou ou surtout dirons-
nous, peu adapté au secteur de l’e-sport. Naturellement, en tournant le regard vers un proche
parent, il s’avère que certaines pistes pourraient être intéressantes en matière de financement.
Effectivement le sport traditionnel, bien plus vieux que l’e-sport a eu tout le temps de se
légitimer auprès des pouvoirs publics pour bénéficier aujourd’hui d’un cadre juridique
complet et avantageux. On se demande alors s’il ne serait pas envisageable de s’en inspirer
pour penser le nouveau régime juridique du secteur des compétitions de jeu vidéo. Il s’avère
notamment que le pari sportif est un des modes de financement du sport, et on peut tous les
jours constater que l’e-sport est secteur en proie aux paris. L’e-sport pourrait-il bénéficier d’un
régime similaire ? (Section 1), de plus l’Etat est un soutien très important au financement du
sport, ce second mode de financement serait-il envisageable ? (Section 2).
Le marché du pari e-sportif en ligne pèse pour 5,5 milliards de dollars en 2016 et pourrait
s’élever à 12,9 milliards en 2020218. Il sera étudié dans un premier temps « Le cadre juridique
du sport plus favorable que celui de l’e-sport » (paragraphe 1) puis dans un second temps il
sera question d’« Un contournement de l’interdiction ? » (paragraphe 2).
Le pari doit être considéré comme un jeu d’argent et c’est la loi du 21 mai 1836 219 qui
vient instaurer le principe de prohibition des jeux d’argent. En effet l’article L.322-1 du Code
de la sécurité intérieure prévoit que les loteries de toute espèce sont prohibées. Cependant
depuis la loi du 12 mai 2010220, le régime des paris a été précisé. Sont dorénavant à distinguer
les paris en dur et les jeux et paris en ligne. Et si l’article L324-1 du Code de la sécurité
intérieure interdit formellement les paris en dur sous peine de prison et d’amende, la loi du 12
Qu’il s’agisse des paris sportifs ou des paris hippiques, seules les épreuves fixées par
décret peuvent en faire l’objet. La loi veille aussi à la préservation de l’aléa sportif en veillant
notamment à empêcher les conflits d’intérêt.
L’e-sport n’étant pour le moment pas assimilé à une discipline sportive et ne disposant pas
d’une fédération délégataire de service public comme c’est le cas dans le secteur du sport,
impossible pour les organisateurs de compétitions e-sportives de bénéficier de ce cadre
juridique instaurant le droit au pari des organisateurs et des fédérations. Cependant même sans
autorisation, à l’heure actuelle, des opérateurs en ligne proposent illégalement de parier sur
des compétitions de jeux vidéo.
Face à la prohibition des paris e-sportifs, certaines pratiques semblent démontrer une
volonté de certains opérateurs de contourner le cadre légal. C’est le cas notamment par
l’utilisation de monnaies électroniques et de crypto monnaies (A) : certains décident de ne
plus utiliser de monnaie (B), et d’autre pratiques tel que les « loot boxes224 » sont plus
difficiles à cerner (C).
Certains opérateurs en ligne passent par la monnaie électronique 225. L’utilisateur, pour
pouvoir miser, doit impérativement convertir de la monnaie scripturale, c’est-à-dire de la
monnaie disponible en compte en banque, en monnaie électronique. La question étant de
savoir s’il est possible de considérer cette monnaie comme un véritable sacrifice financier. Il
semble que la réponse soit positive. Effectivement l’usage de cette monnaie passant
obligatoirement par une conversion de monnaie scripturale, cette pratique ne permet pas
d’échapper à la qualification de pari en ligne226.
Une autre pratique est à rapprocher de celle-ci, celle de « l’in-game item betting ». C’est le
jeu vidéo « Counter Strike » de l’éditeur Valve qui a popularisé ce phénomène en intégrant à
son jeu la possibilité d’échanger via des plateformes tierces, des items. Il s’agit de parier un
bien immatériel qui peut être un objet ou un « skin » dans un jeu vidéo. Le joueur ne possède
C’est suite à la sortie du jeu « Star Wars Battlefront 2 » de l’éditeur Électronic Arts, en
novembre 2017 qu’éclate l’affaire dite des « loot box ». Ce jeu a cristallisé une importante
controverse. En effet l’éditeur propose aux joueurs dans son jeu des caisses de butin aléatoire
moyennant micro transaction. Pour comprendre de quoi il retourne :
« Une loot box servant à équiper un soldat coûte par exemple 4 000 crédits. Sachant
qu'on remporte en moyenne un millier de crédits par heure de jeu, il faudrait donc jouer aux
alentours de 4 heures pour pouvoir l'acheter, sans avoir aucune assurance d'y trouver un
contenu intéressant (près des trois quarts des « cartes des étoiles » sont d'un intérêt relatif et
les doublons sont monnaie courante). Pour être efficaces sur le champ de bataille, les joueurs
doivent alors faire un choix : attendre, ou sortir la carte bleue – cette dernière offrant un
Le système d’évaluation des jeux vidéo, Pan European Game Information (PEGI) a été
questionné sur le sujet. Il affirme ne pas être l’autorité ayant compétence à se pencher sur
cette question. Question qui doit donc être traitée par l’autorité nationale qui semble de fait
être l’autorité de régulation des jeux en ligne.
« Compte tenu de la définition française des jeux d’argent, toutes les «loot boxes» ne
peuvent pas être qualifiées de jeu d’argent, il n’en va pas de même lorsque le lot est
monétisable. La légalité de ce type de jeu est discutable lorsque le lot est susceptible de
cession en dehors de la plateforme de jeu et que l’éditeur permet l’utilisation de lots acquis
ailleurs que dans l’environnement de sa plateforme. Dans ce cas, l’ARJEL intervient: un
certain nombre d’enquêtes sont en cours. » (p5).
234C. JACQUIER, « Ces « pochette-surprise » monnayables sèment la zizanie. Mais elles participent d'un
modèle économique de plus en plus incontournable... », 1/12/2017, lepoint.frhttp://www.lepoint.fr/pop-
culture/jeux-videos/pour-tout-comprendre-sur-la-polemique-des-loot-boxes-dans-le-jeu-video-01-12-2017-
2176543_2943.php
Les deux principaux acteurs publics de ce soutien sont bien entendu l’Etat (Paragraphe
1) et les collectivités territoriales (Paragraphe 2). Une étude du ministère des sports de 2008,
montre que le montant global des dépenses sportives de l’Etat et des collectivités territoriales
s’élevait à 14 milliards d’euros. Un montant pouvant faire rêver le marché émergent de l’e-
sport quand on sait que malgré sa croissance fulgurante, il ne peut espérer dépasser les 3
milliards d’euros de revenus d’ici 2021. Un soutien même minime dans un premier temps
pourrait encore favoriser le développement économique de ce secteur.
Dans l’attente d’une évolution législative en faveur du secteur des compétitions de jeu
vidéo, on pourrait envisager un soutien actif de l’état notamment par le biais de subventions.
C’est l’article 9-1 de la Loi du 12 avril 2000 relatif aux droits des citoyens dans leurs relations
avec les administrations236 qui définit la subvention. Ne serait-il pas possible d’envisager que
l’e-sport possède des valeurs qu’il serait louable de diffuser mais qu’il est aussi un secteur en
236 Article 9-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec
les administrations définit la subvention comme : « les contributions facultatives de toute nature, valorisées dans
l'acte d'attribution, décidées par les autorités administratives et les organismes chargés de la gestion d'un service
public industriel et commercial, justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation d'une action ou d'un
projet d'investissement, à la contribution au développement d'activités ou au financement global de l'activité de
l'organisme de droit privé bénéficiaire. Ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par
les organismes de droit privé bénéficiaires. Ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de
prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent. »
Le sport bénéficie, en tant qu’activité d’intérêt général, de l’aide de l’état. Cette aide se
concrétise principalement par le biais de deux moyens : les conventions nationales d’objectif
(CNO) et le centre national pour le développement du sport (CNDS). Cependant les CNO sont
des conventions passées entre le ministère des sports et une fédération sportive agréée.
Fédération qui n’existe pas encore à l’heure actuelle mais qui aurait pu voir le jour avec la loi
du 7 octobre 2016 si les parlementaires avaient suivi la proposition faite par le sénateur
Durain. Le CNDS, lui, est un organisme ayant pour objectif le développement du sport sur le
territoire, et cela suppose là encore l’existence d’une fédération avec laquelle négocier mais
surtout une reconnaissance de l’e-sport comme activité sportive.
Pour le moment les seules personnes publiques affirmant leur soutien à l’organisation
des compétitions de jeux vidéo sont les collectivités territoriales.
Tout comme pour le sport, les collectivités territoriales telles que les communes ou les
regroupements de communes sont les plus présentes. En effet, en 2008, sur les 14 milliards
d’euros de dépense publique, la part des collectivités territoriales était de 10,6 milliards.
Les collectivités territoriales peuvent alors s’appuyer sur l’article L1111-10 du Code
général des collectivités territoriales qui permet aux départements, régions et communes de
venir subventionner certaines opérations. Et les compétitions de jeux vidéo semblent en faire
partie.
On peut constater que des collectivités territoriales se sont rendues compte ces
dernières années de l’attractivité de ce secteur et du potentiel qu’il représente notamment pour
elles. A titre d’exemple on peut encore citer la Gamers Assembly qui est en partie financée par
la communauté urbaine de Grand Poitiers : c’est le premier évènement e-sport à bénéficier
d’un soutien public et pour son édition 2017 la collectivité est venue supporter 20% du
financement. Il s’agit de la 4ème édition subventionnée par la communauté urbaine et il
semble que ce partenariat durable soit bien perçu et apprécié des joueurs. Les collectivités
territoriales semblent pouvoir être des interlocuteurs privilégiés pour les organisateurs de
compétitions de jeux vidéo en mal de financement.
Ce phénomène, malgré le fait qu’il soit issu d’une longue évolution de la pratique des
jeux vidéo, est une industrie naissante qui peine encore à trouver un modèle économique.
C’est un secteur aux frontières de plusieurs matières faisant de lui un secteur à la nature
incertaine. Une grande partie de la problématique actuelle de l’e-sport se situe en ce point
précis. Comment faut-il considérer ce phénomène ? Sa proximité avec le sport est-elle
suffisante pour que l’on puisse le considérer comme tel ? La doctrine est partagée, tantôt en
faveur de la reconnaissance de l’e-sport comme une discipline sportive, tantôt en sa
défaveur239. On peut rappeler que le Comité International Olympique étudie la question.
L’e-sport est un secteur composé d’une multitude d’acteurs dont une partie s’accorde
sur le fait qu’il est urgent de se structurer. Motivés par cette idée, des acteurs publics et les
acteurs privés de l’e-sport ont collaboré pour permettre l’émergence en 2016 de l’association
Il pourrait être intéressant d’étudier l’évolution du cadre juridique de l’e-sport des pays
précurseurs en la matière. Notamment la Corée, les Etats Unis ou l’Allemagne. Et d’en
envisager une possible transposition en droit interne, voir même au sein d’un cadre juridique
ad h
SOMMAIRE3
INTRODUCTION...................................................................................4
PARTIE I : LA CREATION DU CADRE JURIDIQUE DE L’E-SPORT..................9
CHAPITRE 1 : UN NOUVEAU CADRE LEGISLATIF CONÇU DE FAÇON RESTRICTIVE
......................................................................................................................... 10
Section 1 : L’émergence difficile de l’e-sport.................................................11
Paragraphe 1 : Une nouvelle façon de consommer le jeu vidéo..........................................11
A. Une diversification des profils des joueurs..............................................................11
1. Etat des lieux sur le profil des joueurs français de jeux vidéo.............................11
2. Une évolution des profils favorisé par l’innovation technique.............................12
B. Du geek à l’e-Sportif............................................................................................... 14
1. Le jeux vidéo : ce loisir déviant ?........................................................................ 14
2. L’e-Sportif : lorsque le jeux vidéo devient une affaire sérieuse...........................15
Paragraphe 2 : la prohibition des compétitions e-sportives.................................................17
A. L’assimilation des compétitions au régime de la loterie..........................................17
B. Précarité des joueurs professionnels d’eSport.........................................................19
Section 2 : Un nouveau cadre prévu pour les joueurs et les organisateurs...20
Paragraphe 1 : un cadre législatif en plusieurs temps.........................................................21
Paragraphe 2 : une meilleure protection du joueur professionnel........................................22
A. Un agrément indispensable à l’employeur..............................................................22
B. Un contrat à durée déterminée spécifique au joueur professionnel de jeu vidéo... .24
1. Un nouveau contrat d’inspiration sportive..........................................................24
2. Un contrat imposé pour clarifier l’embauche des joueurs...................................25
Paragraphe 3 : Un véritable cadre juridique pour les compétitions de jeux vidéo................27
A. Une organisation encadrée..................................................................................... 27
1. Une légitimation des compétitions de jeux vidéo par leur définition juridique.. . .28
2. La compétition soumise à un formalisme strict...................................................29
B. La protection du mineur, au centre du nouveau régime..........................................32
1. Mineur soumis à l’autorisation de son représentant légal...................................32
2. Une protection des gains du mineur...................................................................34
CHAPITRE 2 : LA NATURE INCERTAINE DE L’E-SPORT NE FACILITANT PAS LA
CONCERTATION DES ACTEURS..........................................................................35
Section 1 : Une absence de consensus des acteurs autours de la qualification
de l’e-sport.................................................................................................... 36
Paragraphe 1 : Doit-on considérer l’e-sport comme une discipline sportive ?......................36
A. Le « sport », une notion complexe.......................................................................... 36
B. Une connexité indéniable entre « sport » et « e-sport »..........................................38
Paragraphe 2 : Sport et l’e-sport, deux phénomènes antinomiques ?..................................41
Section 2 : La volonté des acteurs de s’organiser autour d’une institution...44
Paragraphe 1 : Une régulation plurielle............................................................................... 44
A. Le refus législatif de soutenir la structuration du secteur.......................................44
B. Une régulation déstructurée................................................................................... 45
Paragraphe 2 : Une harmonisation de la règlementation à la préservation de l’intégrité et la
sincérité des compétitions e-sportives................................................................................ 48
A. « L’urgence est d’abord de structurer »..................................................................48
B. Les maux de l’e-sport............................................................................................. 49
CONCLUSION GENERALE....................................................................88
TABLE DES MATIERES........................................................................90
BIBLIOGRAPHIE.................................................................................92
ANNEXES..........................................................................................93
I. OUVRAGES
Ouvrages généraux
Ouvrages spéciaux
II. ARTICLES
ANSYNGEL, S. (2015). Futur du sport ou sport du futur ? Regard sociologique sur les
enjeux de l'e-sport en France, Mémoire, Université de Nantes
BESOMBES (N.), Sport électronique, agressivité motrice et sociabilités, Thèse de doctorat,
Université Paris Descartes, 2016.
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Numerama.com, « Un sénateur appelle les pouvoirs publics à se pencher sur les loot boxes »,
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