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Compte-rendu de la soirée débat du Jeudi 8 Décembre 2016

Organisée par l’Espace Associatif Cantonal d’Aime


et animée par Béate Bongrand :

« Eduquer sans punition ni récompense »

Béate Bongrand est praticienne en relation d’aide et en psychothérapie. Voir


son site : www.psychotherapie-beatebongrand.fr

Introduction :
Etre parent ne s’apprend pas à l’école !
Aujourd’hui, devenir et être parent n’est vraiment pas évident… Les jeunes
couples sont vraiment assommés par toutes sortes de conseils, de remises en
question, …
Quand l’enfant est là, la société, l’entourage disent : « Allez-y, soyez des parents
parfaits ! ». Or, des parents parfaits, pour l’enfant, c’est horrible !
Alors, comme le propose Béate Bongrand, il faut faire ce que l’on peut.

1) La punition – La sanction :
La punition : Pourquoi ?

En principe, on utilise la punition en ayant de bonnes intentions, par devoir


parental.
Parfois, parce que l’on ne connaît que cela. Elle a une fonction de signal et nous
l’utilisons pour poser une limite.
Elle est souvent utilisée quand nous n’en pouvons plus.
Nous pensons qu’elle permettra à l’enfant de comprendre et d’apprendre, en vue
de sa vie future.

Différences entre punition et sanction :

-La punition tombe après-coup, parfois de manière très inattendue (ex : Quand
l’enfant saute sur le canapé… Parfois, je ne lui dis rien / D’autres fois, quand je
suis fatiguée, il y a punition !).
-La punition est chargée d’affects.
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-Il y a rarement une cohérence entre l’acte et le choix de la punition (ex : « Vas
dans ta chambre ! »).
-L’enfant ou l’ado n’est pas toujours préparé.

-La sanction est annoncée ;


-Parfois, il y a de la cohérence entre le comportement et la conséquence ;
-L’adulte pense que l’enfant est libre de décider…

Le système punition-sanction ne dure qu’un temps limité et a son prix.


Quand l’enfant grandit, les parents sont obligés de tirer de nouveaux registres.
A l’adolescence, cela ne marche plus car l’ado veut du vrai, du relationnel.

Les effets de la punition sur la psyché de l’enfant / l’ado :

La punition et la sanction renvoient à l’enfant que ce qu’il vient de faire n’est


pas bien alors que, selon lui, son action était animée par un besoin. De plus, il y
a souvent incohérence entre l’acte de l’enfant et la punition. Il y a donc souvent
incompréhension pour l’enfant.

L’attitude (verbale et non-verbale) de l’adulte qui impose la punition joue un


rôle important dans le vécu de l’enfant : l’imprévisibilité peut induire du stress.
Parfois, la punition est reportée, ce qui entraîne pour l’enfant du stress mais
aussi de l’angoisse.

Réactions possibles à la punition-sanction :

Le combat :
-épreuve de force, usant pour les 2 (adulte et enfant) ;
-l’enfant ne va pas se concentrer sur ce qu’il doit apprendre (ex : ne pas taper)
mais sur la lutte et devient de plus en plus sourd aux messages des parents ;
-l’enfant devient méfiant et agressif ;
-la relation s’envenime.

La peur :
-rend sage, calme, obéissant ;
-peut terroriser, sidérer l’enfant ;
-celui-ci se focalise sur sa peur et comment se protéger (il met en place des
stratégies) ;
-il n’est plus capable / disposé à entendre la valeur, la règle… enseignées ;
-il risque de se déconnecter de ses sentiments, voire de ses besoins ;
-une partie de l’enfant s’éteint : il devient stressé, angoissé, agressif, sur la
défensive, hyperactif, …

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La soumission :
-l’enfant est résigné ;
-triste, dépressif ;
-apathique ;
-effacé ;
-il manque de confiance en lui, d’estime de soi…

La fuite :
-l’enfant ou l’ado se ferme ;
-fuit toute tentative de discussion car n’y croit plus ;
-il se réfugie dans les écrans, avec les copains ;
-il utilise le mensonge (mentir = « je m’en tire ») ;
-éventuellement fugue, drogue.

L’enfant se sent aussi incompris, parfois humilié, nul, triste, seul…


Il peut arriver à douter de l’amour de ses parents.

Les effets de la punition – sanction sur le cerveau :

Plus l’enfant est petit, plus son cerveau est malléable : les effets induits par
l’environnement ont une forte influence sur l’évolution cérébrale, la capacité
d’apprendre, de mémoriser.

Jusqu’à 5 ans environ, le cerveau est :


-immature, fragile, vulnérable : dominance du cerveau archaïque ;
-reçoit émotions, peurs, colères, cris, signaux non-verbaux menaçants, … de
plein fouet, sans pouvoir s’en protéger ni prendre du recul.

Avant l’âge de 5 ans, l’enfant n’est pas du tout capable de se mettre à la place de
l’autre (ex : « Je le mords pour qu’il comprenne que ça fait mal » ne fonctionne
pas).

Selon Catherine Gueguen, la maltraitance psychiques a des effets pires que la


maltraitances physiques sur l’enfant.

2) La récompense :
La récompense est une mesure qui cherche à contrôler et modifier le
comportement et l’être de l’enfant/ l’ado par le « positif ». D’ailleurs, notre
société est basée sur le même système (primes au travail, …).

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C’est une sorte de chantage : pour que cela marche, l’enfant doit la vouloir ou en
avoir besoin ; il doit la juger « intéressante » ; il doit être dépendant de l’adulte.

Quels sont les messages de la punition, sanction et de la récompense ?

-Moi, en tant qu’adulte, je sais ce qui est juste, faux, vrai, bon, mauvais, … pour
tout, tous et toi ;
-Je sais que tu es méchant(e) quand tu fais cela ;
-Si tu fais ou es comme je veux que tu fasses ou sois, je t’apporterai tout mon
amour.

L’épanouissement de la singularité de l’enfant / l’ado peut donc se trouver


restreint.

Béate Bongrand nous propose quelques exemples de phrases pour remplacer la


récompense « classique » :
« Je me réjouis avec toi ! » ; « Waouh, tu y es arrivé ! » ; « Et si on allait fêter
cela ensemble en allant à … »

Ce qui est à l’œuvre dans les réactions de l’enfant – l’adolescent ?

1-Ses besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits


voir Powerpoint, la pyramide de Maslow ;

2-Les probl-aime-s qui sont des messages d’amour !

Lorsque l’enfant résiste à toute mesure, la source du problème ne se situe pas


chez lui.
L’enfant est parfois plus proche de la souffrance de ses parents que eux-mêmes
et, par amour pour eux, par loyauté, il peut s’épuiser à mettre en exergue cette
souffrance en :
-appuyant là où ça fait mal, où c’est sensible, fragile, … ;
-tendant le miroir ;
-répétant une partie difficile de leur histoire.

Exemple : Des problèmes de sommeil persistants chez un enfant peuvent être en


lien avec la mort d’un enfant dans la famille (« Regarde Maman, je suis bien
vivant ! Et je m’interdis de dormir pour que tu sois sûre que je ne suis pas mort
dans mon berceau ! »).

3) Solutions proposées :
1-Le regard de l’adulte sur l’enfant ou l’ado :
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Un enfant se construit sur ou à-travers le regard de ses parents. Dès le jour de sa
naissance (ou même de l’échographie), quelque chose se passe.
Par exemple, l’accueil peut être différent selon le sexe de l’enfant (ex : « Encore
un garçon ! »).
L’enfant a des canaux qui perçoivent ce que la mère et le père ressentent à son
arrivée.

Il est important de retenir qu’un enfant ne veut jamais nuire !


Un enfant qui fait quelque chose qui nous agace ne le fait pas parce qu’il est
sadique !

Considérons alors l’enfant comme une personne ayant droit au même respect
qu’un adulte.
Abandonnons notre filtrage d’adulte ! (ex : A la question « Quel est le plus long
mot en français ? », un enfant pourra répondre : « train » ou « attends ! »).

Parfois, il y a une question derrière un acte ou un comportement.

2-Etre un bon parent pour soi :

-Apprendre à aller à l’écoute de ses propres sentiments / émotions (Prendre le


temps de se poser les questions, par moment : « Et là, qu’est-ce que je
ressens ? » ; « Comment je me sens ? ») ;
-S’autoriser l’empathie envers soi-même (sortir de la culpabilité !) ;
-Se pardonner ;
-Prendre soin de soi-même et de son couple.

Avant d’intervenir, de punir l’enfant, il est important d’informer l’enfant de


notre humeur, notre état du moment (pour le prévenir d’une possible explosion
…).

3-L’écoute active ou la méthode Thomas Gordon comme alternative :

Cette méthode ouvre un espace de parole, de rencontre et de compréhension


mutuelle à travers une attitude d’empathie.

Etape 1 : Je me connecte à moi-même, à mes émotions, sensations,


sentiments.
Ex : Mon enfant ne veut pas manger… Cela me fait quoi ?, J’ai besoin de quoi,
moi ?, Pourquoi ?

Cette prise de recul peut me donner des billes pour constater que le problème ne
vient pas forcément de l’enfant.

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Etape 2 : Je me mets à la place de mon enfant / ado :
Je branche mon oreille de mon cœur à son cœur.
Il a besoin de quoi ? Il vit comment cette situation ?

Etape 3 : Si le problème vient de l’enfant, je reformule de manière


interrogative ce que je pense être ou avoir été son sentiment et besoin.

Ex : « Tu es en colère parce que tu n’aimes vraiment pas ça et tu ne veux pas le


manger ? » ; « Tu étais vraiment blessée quand il t’a dit ça ? (oui) Et alors tu lui
a pris son ballon ? » ; « Quand je te dis d’aller au lit alors qu’on est bien
ensemble ici au salon, tu n’as vraiment pas envie du tout d’aller dormir, c’est
ça ? »

En cas de réponse positive, exprimer d’abord notre compréhension : « Oui, je


comprends » puis reformuler : « Tu vas encore apprendre cela, aimer cela,
… ».

Quand l’enfant se sent compris, il est plus coopérant !


Il est donc important d’être à l’écoute de ce qu’il se passe pour lui à ce moment-
là (ex : Quand l’enfant doit aller se coucher alors que tout le monde est au
salon… On peut dire : « Tu aimerais bien rester encore au salon. Et bien oui, je
comprends… Et en même temps, demain, il y a école et c’est important que tu
aies suffisamment dormi »).

Attention, il est très important de ne pas employer le « MAIS » qui annule la


phrase précédente.
Béate Bongrand propose de le remplacer par « ET » pour montrer que les 2 sont
importants : son envie/besoin et le nôtre.

Ou aussi : J’informe l’enfant de mon sentiment et propose le dialogue.


Ex : « Quand tu tapes ton copain, je suis à la fois triste et en colère parce qu’il
est important pour moi que l’on ne tape pas » ; « Tu trouves cela vraiment
injuste ? Veux-tu qu’on en parle ? »…

Si je fais part à l’enfant / l’ado de ce que je viens de vivre, de ressentir, le


dialogue est possible.

Il est important ensuite de :


-Vérifier ce qu’il a entendu / compris (à partir de 5-6 ans) ;
-S’il a compris autre chose que ce que je veux qu’il entende, je ne juge pas sa
réponse, je ne la relève pas mais je répète ou je reformule différemment.

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L’écoute active = l’empathie

-élimine les peurs de l’enfant / l’ado ;


-lui permet de rester ouvert pour écouter l’adulte ;
-clarifie ses sentiments ;
-lui permet de développer la capacité d'apprendre à se représenter le point de vue
des autres et ainsi à s'ouvrir aux autres ;
-lui apprend une gestion des émotions et des conflits harmonieuse et
respectueuse ;
-lui apprend à analyser une situation et à trouver une solution qui respecte lui et
l'autre ;
-l'aide à accueillir ses émotions sans peur ou honte pour :
-comprendre que ses émotions sont naturelles, humaines et légitimes,
-apprendre à se familiariser avec elles.

L’écoute active a une répercussion extrêmement positive et structurante sur


le système cérébrale.

L’Écoute active n'est pas un truc ou une astuce.


Elle doit reposer sur :
-La conviction que l'enfant est une personne ayant droit au même respect qu'un
adulte ;
-L'empathie ;
-La confiance réciproque ;
-L'acceptation mutuelle.

Quelques petits trucs à retenir :

-Accordons-lui un peu de temps !


Ex : « Tu mets la table tout de suite ou dans 5 minutes ? »
Permettons à l’enfant d’avoir une marge où il peut décider lui-même.

-Evitons : « mais », « toujours », « jamais », « encore ! », « ce n’est pas


grave ! » (cela veut dire « c’est moi qui sait ce que tu ressens ; c’est moi qui sait
ce que tu es ! »), « pourquoi ? ».
Tous ces mots vont bloquer la relation.

Il est aussi important de ne pas utiliser l’ironie (non compris par l’enfant) car un
petit enfant « colle » aux mots. Il est donc essentiel de bien se mettre à leur
place.

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Conclusion :

Pour que nos enfants aillent bien, il faut s’occuper de nous, de notre couple
(important de ne pas se disqualifier devant les enfants !). Il est important de
veiller à nous représenter l’âge cognitif de l’enfant afin de se mettre à sa hauteur
cognitive (cela demande une gymnastique cérébrale… mais qui paye au bout
d’un moment).

BIBLIOGRAPHIE :

Gordon Thomas :
1.Parents efficaces, Poche Marabout
2.Enseignants efficaces, Poche Marabout
3.Éduquer sans punir, Poche Marabout

Rosenberg, Marshall B. :
1. Nous arriveront à nous entendre, Éditions Jouvence
2. Les ressources insoupçonnées de la colère, Éditions Jouvence

J.P. Faure : Éduquer sans punitions ni récompenses, Éditions Jouvence

C. Gueguen : Vivre heureux avec son enfant, Robert Laffont

Vidéo : Les neurosciences et le développement de l'enfant - youtube

I. Kashtan : Être parent avec son coeur, Éditions Jouvence

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