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ECONOMIE DE L’EDUCATION
1. Efficacité interne
Que produit l'école (output) ? Il n'y a pas d'accord unanime sur ce que doit être la
production de l'école. Toutefois, dans la liste possible des outputs, on peut citer :
Quelles sont les principales ressources consommées par l'école (inputs) ? Ces moyens
prennent des formes diverses : enseignants, matériel pédagogique (manuels,
ordinateurs, fournitures diverses : papier, crayons, etc.), méthodes pédagogiques,
etc. En général, ces moyens sont mobilisés dans une classe : il faut donc tenir compte
de ce niveau pour appréhender l'intensité de ces moyens mis à disposition des
élèves. Ainsi, on peut s'intéresser à la taille des classes : puisqu'un moindre nombre
d'élèves par professeur signifie une dépense plus grande par élève, il va falloir
s'interroger sur les liens entre cette réduction du nombre d'élèves et le niveau des
acquisitions des élèves. On peut s'intéresser aussi à la composition de la classe, qui
peut comprendre des élèves de niveau homogène (classes de niveaux) ou à l'inverse
des élèves de niveaux scolaires différents (classes uniques).
L'ensemble de toutes ces dimensions rend a priori difficile leur prise en compte
conjointe.
C'est pourquoi deux approches se rencontrent dans la littérature. La première
consiste à rapporter une variable de produit à une variable représentant la quantité
de ressources mobilisées. Elle se limite donc à considérer la relation au sein d'un
couple de variables. La seconde prolonge la métaphore de la production, en
recourant au concept de fonction de production. Elle relie la variable produit à
l'ensemble des variables facteurs.
Cette fonction de production scolaire prend la forme d'une équation où le produit est
égal à une somme pondérée des différents facteurs, comme par exemple :
Une telle équation est estimée par une démarche économétrique, qui, à partir de
l'observation de la valeur des variables produit et facteurs pour un grand nombre
d'élèves, fournit les estimations des paramètres , β, , etc. qui indiquent l'influence
des différentes variables sur la variable produit.
En réalité, cette première formulation peut être considérée comme insuffisante car le
niveau d'acquisition repéré à un instant donné ne reflète pas uniquement les
apprentissages relatifs à la période décrite par les variables facteurs retenues dans
l'équation. Les ressources mobilisées antérieurement expliquent aussi, sans aucun
doute, une part de ces acquisitions. Il s'agit alors de ne prendre en compte que la
progression du niveau d'acquisition relative à la période considérée. En général, il
s'agira de l'année scolaire pour laquelle on aura repéré les caractéristiques du maitre,
de la classe, de la pédagogie utilisée, etc. Autre métaphore économique, on se
référera à la valeur ajoutée, définie ici par l'écart entre le niveau d'acquisition en
début de période et le niveau d'acquisition en fin de période. Et c'est donc à cette
valeur ajoutée que l'on rapportera les facteurs de « production scolaire ».
Analyser le flux des élèves au cours d’un cycle et évaluer l’efficacité interne consiste
à comparer le nombre d’élèves qui accèdent à la première année du cycle avec le
nombre d’élèves qui atteignent la dernière année dans le temps normalement imparti
(sans redoubler). Plus la différence est petite, plus le flux est considéré continu ou
efficient.
Parmi les indicateurs les plus fréquemment utilisés pour mesurer l’efficacité interne,
il y a les niveaux de connaissance, le taux de réussite, le taux de redoublement, le
taux d'abandons, le coefficient d’efficacité interne, le taux d'achèvement, etc.
Le redoublement a un impact sur les coûts. Le redoublement fait payer deux années
d’étude au système et aux familles pour une seule année validée. Autrement dit, à
contrainte budgétaire donnée, les redoublants occupent des places qui surchargent
les classes et/ou empêchent d’autres enfants d’accéder à l’école. Le lien entre taux de
redoublement et rapport élèves-maîtres a été montré par plusieurs travaux.
Sans redoublement, tout sortant d’un cycle particulier devrait avoir passé dans ce
cycle un nombre d’année équivalent à la durée théorique du cycle. Or, lorsque
certains élèves redoublent un ou plusieurs niveaux d’études, ils y passent par
définition plus de temps, et ils utilisent plus de ressources du système pour le même
niveau final d’éducation. En outre, les élèves qui abandonnent l’école en cours de
cycle dépensent des ressources du système sans en tirer les bénéfices (pour eux-
mêmes ou pour la société). Le nombre d’années effectivement utilisées (et financés
par le Gouvernement ou les familles) pour obtenir l’ensemble des sortants (années-
élèves effectives ou « consommées » par tous les élèves du cycle, y compris ceux qui
abandonnent avant la fin) est donc plus important que le nombre d’années-élèves
idéalement utiles pour former le nombre de sortants.
Le rapport entre ces deux grandeurs (nombre d’années-élèves théoriques utiles d’un
côté, et nombre d’années-élèves effectivement consommées de l’autre) est la
définition du Coefficient d’Efficacité Interne (CEI). Il est toujours compris entre 0 et 1,
qui représentent des cas hypothétiques extrêmes : 0 représente une situation dans
laquelle aucun élève ne conclue le cycle, malgré de nombreux effectifs, redoublement
et abandons ; 1 représente une situation idéale, sans redoublement ni abandons. Un
CEI de 0,4 par exemple signifie que le nombre d’années élèves idéalement utiles
représentent seulement 40% des années élèves consommées. 60% (1-0.4) des années
élèves effectives correspondent à une surconsommation due aux abandons et
redoublement. Dans une logique d’efficacité interne du système, cette
surconsommation peut être vue comme un gaspillage de ressources.
Figure 5 – Taux de survie en Afrique à la dernière année de l’enseignement primaire et à la cinquième année (2009)
2. Efficacité externe
L’efficacité externe prend comme référence l’usage, pendant leur vie adulte, des
connaissances acquises par les sortants du système éducatif. On analyse la mesure
dans laquelle l’éducation a permis à chacun d’être utile à la société mais aussi de tirer
des bénéfices de la formation acquise. L’analyse de l’efficacité externe est peu
commune dans l’évaluation des performances des systèmes éducatifs, très souvent
du fait de la rareté ou mauvaise qualité des données nécessaires. L’analyse de
l’efficacité externe est en particulier essentielle pour la planification de l’offre de
formations au-delà du cycle primaire, pour aider à orienter les financements publics
vers des formations justifiées par leur capacité à insérer de manière adéquate les
diplômés sur le marché du travail et à influer positivement le développement
humain du pays.
Les effets de l’éducation peuvent être classés en deux ordres : économique et social.
La dimension économique porte principalement sur la relation entre l’éducation,
l’insertion et la productivité des sortants du système éducatif sur le marché du
travail, mais également sur la contribution de l’éducation à la croissance économique.
La dimension sociale mêle de nombreux aspects tels la mortalité, l’état sanitaire de la
population, la maitrise de la fécondité, la participation à la vie civique, la protection
de l’environnement etc.
Tableau 1 – Les quatre dimensions analytiques de l’efficacité externe de l’éducation
Les impacts, tant dans le domaine économique que social, peuvent être lus à la fois
au niveau individuel (un individu plus éduqué peut avoir de meilleurs revenus que
celui qui l’est moins) et au niveau collectif (les sociétés plus éduquées peuvent avoir
une plus forte croissance économique, obtenir de meilleures performances dans les
indicateurs de santé, par exemple). Le croisement de ces dimensions (économiques et
sociales d’une part, puis individuelle et collective de l’autre) conduit à un tableau
synthétique des différentes analyses qui peuvent être conduites dans le domaine de
l’efficacité externe (cf. Tableau ci-dessus).
L’analyse de l’efficacité externe peut donc se faire selon une lecture verticale
(dimensions économique et sociale) ou selon une lecture horizontale (dimensions
individuelle et collective). De façon opérationnelle, le graphique suivant présente les
différentes problématiques soulevées par la mesure de l’efficacité externe. Ces
problématiques orienteront les différentes analyses.
Accès à l’emploi. Il s’agit ici d’analyser la situation des jeunes sur le marché
du travail, et plus particulièrement de mettre en exergue l’acuité du chômage
suivant les niveaux de formation des sortants du système éducatif. Si les
données le permettent, il est utile d’affiner cette analyse sur la situation des
sortants du système éducatif en apportant des éléments factuels sur la qualité
des emplois occupés. La précarité, l’informalité de l’emploi ainsi que le sous-
emploi font partie des préoccupations majeures des actifs occupés dans les
pays en développement. Les emplois précaires sont les emplois qui
comportent un élément d'instabilité du contrat de travail. Ils comprennent
entre autre les contrats à durée déterminée, l'apprentissage, les stages, le
travail par intérim.
Déclassement dans l’emploi. Un actif est dit déclassé si celui-ci possède un
niveau de formation a priori supérieur à celui requis pour l'emploi occupé.
Dans la plupart des pays, il existe un consensus sur le niveau d’éducation
minimal requis pour l’occupation dans une catégorie professionnelle
spécifique (cf. le tableau ci-après).
Rémunération selon le niveau de sortie. Toutes les études concluent sans
équivoque à un effet positif de l’éducation sur le revenu. Il ne s’agira donc pas
d’insister sur cet aspect, mais plutôt de comparer les contributions à un
meilleur revenu de chaque niveau d’enseignement additionnel. Pour ce faire,
une analyse descriptive des revenus des individus suivant le niveau
d’éducation (en utilisant les données d’une enquête de ménages contenant les
informations de revenu) peut être faite dans un premier temps. Ensuite, on
peut utiliser les modèles de type Mincer pour estimer le revenu attendu
suivant le niveau d’études atteint, autres facteurs égaux par ailleurs. L’analyse
peut être poursuivie par le calcul des taux de rendement de chaque niveau
d’éducation.
Ceci permet d’estimer la structuration par niveau d’éducation des nouveaux entrants
sur le marché du travail en appliquant les pourcentages du profil à la cohorte de
jeunes considérée.