La cire d’abeille, un produit utile et précieux
La cire est le matériau utilisé par les
abeilles pour construire leur nid. Elle est
produite par les jeunes abeilles domes-
tiques sous forme d’une sécrétion liquide
provenant des glandes cirières. Au
contact de l’air, la cire se solidifie et for-
me des écailles qui ressemblent à des pe-
tites lamelles de cire sous le ventre de
l’abeille. Il faut environ 1 million de la-
melles de cire pour obtenir 1 kg de cire.
Les abeilles utilisent la cire pour
construire les alvéoles hexagonales bien
connues qui composent la structure soli-
de et efficace appelée rayon. Les abeilles
utilisent les alvéoles du rayon pour y en-
treposer le miel et le pollen; la reine y
pond ses œufs, et les jeunes abeilles s’y
développent. Toutes les espèces
FIGURE 12 Cire d’abeille.
d’abeilles domestiques produisent de la
cire, mais différentes espèces d’abeilles
produisent des cires aux propriétés chi-
miques et physiques légèrement diffé-
rentes.
■ Qualité de la cire d’abeille
La cire d’abeille est évaluée en fonction
Apiculture et moyens d’existence durables
de sa pureté et de sa couleur. La cire de
couleur claire est davantage appréciée
que la cire foncée parce que la cire foncée
risque d’avoir été contaminée ou sur-
chauffée. La cire la plus pure provient des
opercules, qui sont les couvercles de cire
avec lesquels les abeilles scellent les
rayons de miel quand il est mûr. Cette cire
neuve est pure et blanche. La présence du
pollen lui donne sa couleur jaune.
23
■ Revenu engendré par la cire
d’abeille
Pour diverses raisons, la cire d’abeille est
une excellente denrée de rapport ou d’ex-
portation au profit des communautés ru-
rales:
• La transformation de la cire est un pro-
cédé simple. Pour obtenir une cire de
qualité conforme aux critères d’exporta-
tion, il suffit d’appliquer des méthodes
simples de chauffage et de filtrage pour
la nettoyer. A l’aide de contenants de
tailles variées qui servent de moules, on
coule la cire pour former des blocs que
l’on casse en morceaux pour que les
clients vérifient sa pureté et sa propreté.
• Le transport et le stockage de la cire
d’abeille sont faciles parce qu’aucun
emballage particulier n’est nécessaire.
La cire d’abeille est généralement ex-
FIGURE 13 Transformation de la cire d’abeille en Tanzanie.
24
portée sous forme de petites boules en
vrac dans des sacs de toile.
• La cire d’abeille ne se détériore pas avec
le temps. Les apiculteurs indépendants
ou les coopératives la stockent par pe-
tites quantités jusqu’à ce qu’ils en aient
suffisamment pour la vente.
• Comme le miel, la cire d’abeille est un
produit d’exportation qui convient aux
pays en développement parce que l’api-
culture peut se pratiquer sans qu’il soit
nécessaire d’occuper la terre indispen-
sable à la production alimentaire locale.
• Dans les régions où le miel produit est,
en grande partie ou en totalité, consom-
mé localement et où la cire d’abeille est
peu utilisée, les rayons de miel sont sou-
vent détruits, malgré leur valeur mar-
chande. Il est parfois nécessaire d’ensei-
gner aux apiculteurs comment récupérer
 la cire d’abeille et les encourager à la
vendre en même temps que le miel.
■ Utilisations de la cire d’abeille
La cire d’abeille a beaucoup d’utilisa-
tions traditionnelles. Dans certains pays
d’Asie et d’Afrique, elle est utilisée dans
la création de batik et dans la fabrication
des petits objets de métal par moulage à
la cire perdue. La cire d’abeille est com-
munément utilisé pour imperméabiliser le
bois et le cuir, et pour renforcer les fils; el-
le est utilisé dans les industries de village
pour la fabrication des bougies, et en tant
que composante des pommades, remèdes,
savons et encaustiques. La cire d’abeille
est très demandée sur le marché mondial.
On recense plus de 300 utilisations indus-
trielles de la cire d’abeille. Les industries
cosmétiques et pharmaceutiques, qui en
sont les principaux utilisateurs, à raison de
70 pour cent du commerce mondial, utili-
sent de la cire d’abeille de très haute qua-
lité qui n’a pas été surchauffée. Le prix
varie de 4 à 8 dollars EU le kilogramme.
Les autres principaux utilisateurs sont les

Apiculture et moyens d’existence durables

TABLEAU 2 Commerce mondial de la cire d’abeille, 1994

Production Exportation Importation

(tonne) (tonne) (tonne)
Angola 1 500
Argentine 1 500
Australie 482 317
Chili 500 264
Chine 12 800
Rép. dominicaine 350 206
Ethiopie 2 100 210
France 1 563
Allemagne 1 275
Japon 766
Kenya 1 050 1 615
Corée 600
Mexique 9 150 50
Portugal 375
Espagne 730
Tanzanie 1 050 437
Thaïlande 2 302
Ouganda 780
Royaume-Uni 421
Etats-Unis 3 027 847

Source: Bees for Development.

Note: L’Afrique exporte une grande quantité de cire d’abeille par des voies non officielles.

25
industries apicoles des pays industrialisés
où la cire d’abeille entre dans la composi-
tion des fonds de teint en cosmétique et
des bougies. La cire d’abeille est utilisée
dans la fabrication des composantes élec-
troniques et des CD, dans les techniques
de modelage et de coulage industriels et
artistiques, dans les cirages à chaussures,
meubles et planchers, dans le mastic à
greffer et dans les lubrifiants industriels
spécialisés.
Les pays industrialisés utilisent des
ruches à cadres. Une fois vidés, les rayons
à miel sont replacés dans la ruche, ce qui
signifie que relativement peu de cire est
collectée. Avec les ruches à cadres, la
quantité de miel produite par rapport à
celle de la cire est de l’ordre de 75 pour 1.
Les chasseurs de miel ou les ruches tradi-
FIGURE 14 Des commerçants discutent les prix de la cire d’abeille récoltée dans les colonies
d’abeilles sauvages au Pakistan.
26
tionnelles ou à barres supérieures donnent
certes des rendements de cire plus élevés
mais le rayon ne résiste pas à l’extraction
du miel en raison de sa fragilité, et ne peut
pas être replacé dans le nid ou la ruche. La
quantité de miel ainsi produite par rapport
à celle de la cire est de l’ordre de 10 pour
1. Ceci explique pourquoi les pays
d’Afrique, d’Asie et d’Amérique centrale
et du Sud produisent d’énormes quantités
de cire d’abeille, dont la valeur d’exporta-
tion est considérable (tableau 2). En
Ethiopie, par exemple, la cire d’abeille est
une denrée précieuse pour l’exportation,
et dans le nord-ouest de la Zambie, les
apiculteurs récoltent à la fois la cire et le
miel des abeilles qui font leurs nids dans
les ruches en écorce pour l’exporter en
Europe.
 Les autres produits des abeilles
Outre le miel et la cire, les abeilles pro-
duisent un nombre d’autres produits qui
ont tous une valeur commerciale. Ils
comprennent le pollen, la propolis et la
gelée royale.
■ Le pollen
Le pollen a valeur d’aliment diététique;
certaines personnes pensent qu’il per-
met de lutter contre les allergies. Il
contient 30 pour cent de protéines, 30
pour cent de glucides, 5 pour cent de
graisse et des oligo-éléments, ce qui en
FIGURE 15 Pollen prêt à être récolté.
fait une source à potentiel nutritionnel
riche. Le pollen est facile à récolter
dans les ruches à cadres qui sont munies
d’une trappe fixée à l’entrée de la
ruche. Quand les abeilles passent par la
trappe, une grille fait basculer le pollen
contenu dans les corbeilles à pollen si-
tuées sur leurs pattes de derrière et le
Apiculture et moyens d’existence durables
fait tomber dans un plateau d’où il est
récupéré. Les prix du pollen sont élevés
en Europe et en Asie de l’Est.
■ La propolis
Les abeilles domestiques récoltent la
résine et la gomme des bourgeons ou
des entailles sur la plante. Cette sub-
stance qui ressemble à de la colle, géné-
ralement de couleur marron foncé, s’ap-
pelle la propolis. Comme pour le miel,
la composition de la propolis diffère se-
lon la plante que l’abeille a butinée.
Grâce à la propolis les abeilles peuvent
maintenir la ruche au sec et à l’abri des
courants d’air, en sécurité et propre. La
propolis sert à obturer toutes les fis-
sures où pourraient se développer des
micro-organismes, et ses huiles vola-
tiles sont une sorte de désodorisant anti-
septique. Les abeilles utilisent la propo-
lis :
• comme matériau de construction
pour rétrécir l’entrée du nid et en
rendre les parois plus lisses afin de
faciliter le passage des abeilles ;
• pour vernir l’intérieur des chambres à
27
 couvains avant que la reine n’y ponde
ses œufs, pour que les larves se déve-
loppent dans un endroit solide,
étanche et hygiénique ;
• pour embaumer le corps des souris ou
des autres prédateurs trop gros pour
être transportés hors du nid par les
abeilles, et qui, sans cela, se décom-
poseraient et seraient un foyer d’in-
fection.
L’Apis florea, une des espèces
d’abeilles domestiques d’Asie, fabrique
des anneaux avec la propolis et les en-
roule comme des rubans de graisse au-
tour de la branche où elle suspend son
nid à rayon unique pour se protéger des
prédateurs. La propolis est depuis long-
temps utilisée comme remède; il a été
prouvé scientifiquement que la propolis
FIGURE 16 Depuis 1970, la gelée royale produite par les abeilles domestiques d’origine eu-
ropéenne est un produit d’exportation pour les apiculteurs thaïlandais.
28
tue les bactéries. Elle entre générale-
ment dans la composition des denti-
frices, savons et pommades. La propo-
lis diluée dans l’alcool donne une tein-
ture à laquelle on reconnaît de nom-
breuses propriétés médicinales. La pro-
polis peut être une source de revenu in-
téressante: son prix actuel sur le marché
mondial est de l’ordre de 10 dollars EU
par kg. Pour les apiculteurs des zones
reculées, l’accès aux marchés est plus
problématique que la récolte du produit.
■ La gelée royale
La gelée royale est la nourriture que
donnent les ouvrières aux larves juste
nées. Elle contient les hormones de
croissance de nombreux insectes et est
très prisée comme remède, produit toni-
fiant ou aphrodisiaque dans beaucoup
de régions du monde. La gelée royale
contient aussi des protéines, des sucres,
des sels minéraux et des vitamines.
Dans des conditions normales, la lar-
ve qui est destinée à devenir reine
construit une grande alvéole spéciale
en cire, dans laquelle les ouvrières dé-
posent de grandes quantités de gelée
royale. Les apiculteurs manipulent les
colonies d’abeilles domestiques de sor-
te qu’elles produisent un grand nombre
de reines, voire 50 ou davantage, spé-
cialement pour récolter davantage de
gelée royale. Les ouvrières produisent
alors des quantités considérables de ge-
lée royale – pour ce faire, il est néces-
saire d’augmenter l’approvisionnement
en sucres de la colonie – et les dépo-
sent dans les alvéoles des futures reines
pour les nourrir. A ce moment-là, les
larves sont retirées des alvéoles et les
apiculteurs récupèrent la gelée royale.
La récolte de la gelée royale et les
techniques de transformation et d’em-
ballage font appel à une technologie
sophistiquée et à des compétences par-
ticulières concernant la manipulation
des colonies d’abeilles domestiques.
La gelée royale ne se conserve pas
longtemps après avoir été récoltée, il
est nécessaire de la congeler ou de la
lyophiliser pour la manutention, le
stockage, le transport et la commercia-
lisation. Les principaux pays qui font la
Apiculture et moyens d’existence durables
récolte de la gelée royale à des fins
commerciales sont la Chine, la Provin-
ce de Taiwan, et la Thaïlande. Le prin-
cipal marché pour la gelée royale est le
Japon; des quantités relativement
moins importantes sont importées par
les autres pays industrialisés.
29
 Les produits à valeur ajoutée

C’est tout à l’avantage des producteurs de
trouver les moyens d’ajouter de la valeur
aux produits apicoles, au lieu de se
contenter de vendre le produit brut. La fa-
brication des produits d’apiculture à va-
leur ajoutée peut faire intervenir des
groupes différents dont certains ne sont
pas nécessairement intéressés par l’éleva-
Fabriqué avec soin et bien présenté, le sa-
von à la cire d’abeille peut être vendu à
bons prix sur le marché et c’est un produit
qui plaît beaucoup aux touristes.
Il est facile de réaliser des bénéfices en
fabriquant des cosmétiques et des pom-
mades. L’important est de travailler dans
des conditions d’hygiène optimales, et

Apiculture et moyens d’existence durables

ge des abeilles ou n’ont pas les moyens de d’avoir une bonne connaissance des com-
l’entreprendre. Le miel, la cire d’abeille, posants et des produits, et accès à des
le pollen ou la propolis entrent dans la contenants de petite taille pour l’emballa-
composition d’une série d’aliments, de
cosmétiques, de pommades et autres pro-
duits qui peuvent être fabriqués et vendus
localement, créant ainsi de nouvelles pos-
sibilités de moyens d’existence.
La cire d’abeille est un excellent pro-
duit de fabrication du savon de haute qua-
lité: la principale difficulté de la produc-
tion du savon réside dans l’obtention et la
manipulation sans risque de la soude
caustique (hydroxyde de sodium), qui est
un des principaux ingrédients du savon.
Dans certains villages où les habitants
connaissent les techniques de production
des cendres nécessaires à la fabrication de
la soude caustique, ces méthodes peuvent
être appliquées. Les méthodes tradition-
nelles de fabrication du savon sont nom-
breuses et il est possible de les modifier
ou de les améliorer en incorporant de la
cire d’abeille. La cire d’abeille utilisée
FIGURE 17 Utilisation de la cire d’abeille
dans la fabrication du savon doit être dans la fabrication de petits objets décoratifs
d’excellente qualité – pure, dorée ou jau- en métal, par moulage à la cire perdue, pour
ne pâle et ne pas avoir subi de surchauffe. les vendre aux touristes, au Ghana.

31
ge et la commercialisation. La fabrica-
tion des bougies en cire est probable-
ment la façon la plus simple d’accroître
les bénéfices produits par la récolte de
la cire d’abeille. Dans les pays en déve-
loppement, l’industrie du tourisme, l’art
batik et la fabrication des petits objets
décoratifs en métal par moulage à la ci-
re perdue – ces deux derniers procédés
utilisent la cire d’abeille – sont créa-
teurs de moyens d’existence pour les
artisans.

FIGURE 18 Utilisation de la cire d’abeille dans l’art batik en Malaisie.

32
 L’apithérapie:
la guérison par les produits des abeilles
On dit que le terme « médecine » dérive
de « mead » (en anglais: vin de miel).
Que cela soit vrai ou faux, le miel et les
produits des abeilles sont depuis long-
temps utilisés comme remèdes. Certains
pays d’Asie et d’Europe de l’Est ont une
tradition très riche en apithérapie – la
guérison par les produits des abeilles.
Depuis ces dernières années, ils font
l’objet d’un regain de popularité dans le
monde entier. Le miel, la cire d’abeille, la
propolis et le venin d’abeille, utilisés en
thérapie contre les piqûres d’abeilles,
sont les principaux produits apicoles uti-
FIGURE 19 Vente de propolis au Brésil.
lisés en apithérapie.
Le miel a des propriétés antibiotiques:
c’est une solution stérile à forte concen-
tration de sucres qui prévient le dévelop-
pement des micro-organismes. Sa teneur
en acide est élevée. Il contient des en-
zymes qui produisent le peroxyde d’hy-
drogène qui tue les bactéries. Le miel est
Apiculture et moyens d’existence durables
efficace pour guérir les plaies et pour le
traitement de la peau: sa propriété hygro-
scopique permet d’assécher les plaies, et
sa perméabilité laisse passer l’oxygène.
La propolis a aussi des propriétés
médicinales: la gomme et la résine que
33
les abeilles récoltent sur les plantes pour mêmes que les plantes secrètent pour
fabriquer la propolis sont les substances leur propre protection et guérison.

FIGURE 20 Une gamme de produits apicoles mise en vente.

34
 L’apiculture en bref: comment s’y prendre
La chasse au miel, c’est à dire le pillage
des nids des abeilles domestiques sau-
vages pour récolter le miel et la cire, est
pratiqué dans le monde entier partout où
abondent les colonies d’abeilles sau-
vages. Depuis des milliers d’années, on
sait aussi qu’il est plus rentable et plus
pratique d’encourager les abeilles à faire
leur nid dans une ruche. L’élevage des
abeilles dans cet abri est la définition de «
l’apiculture » au sens le plus strict du ter-
me, mais dans un sens plus large, elle
comprend toutes les activités ayant trait
aux abeilles, à la récolte et à la transfor-
mation de leurs produits. Il existe beau-
coup de techniques d’utilisation des
abeilles domestiques à des fins pollinisa-
trices ou productrices. Les méthodes em-
ployées sont choisies en fonction du type
d’abeilles disponibles et des compé-
tences et des ressources dont dispose
l’apiculteur.
■ Comment obtenir les abeilles
On obtient les abeilles en transportant le
nid d’une colonie sauvage dans une
ruche. La colonie a déjà un certain
nombre de rayons, qu’on attache aux
barres supérieures ou à l’intérieur des
cadres dans la ruche. On peut aussi com-
mencer par induire l’intérieur d’une nou-
velle ruche de cire d’abeille dont l’odeur
servira d’appât, et attendre qu’un essaim
d’abeilles passe et s’y installe. Cette mé-
thode réussit seulement dans les régions
où il y a encore beaucoup de colonies
d’abeilles dans la nature. Mais la
meilleure façon de commencer est de de-
mander de l’aide aux apiculteurs locaux.
Dans le dernier quart du siècle der-
nier, le déplacement de colonies
d’abeilles par l’homme a contribué à
propager les maladies des abeilles dans
Apiculture et moyens d’existence durables
le monde entier; dans certains pays,
l’apiculture en a gravement souffert. Les
rares régions qui n’ont pas été contami-
nées par les maladies des abeilles sont
principalement situées dans les pays en
développement. Il est souhaitable que
ces pays protègent leurs stocks d’abeilles
exemptes de maladies. Le déplacement
de colonies d’abeilles domestiques, ou
même d’une seule reine, et de matériel
d’apiculture qui a déjà servi, d’un en-
droit à un autre ne doit jamais s’effectuer
sans l’avis d’un expert sur les consé-
quences possibles.
■ Comment choisir la ruche
Pour pratiquer l’apiculture, il n’est pas
nécessaire d’occuper la terre, dont la va-
leur est précieuse. Selon le type, les
ruches peuvent être placées dans les
arbres, sur des parcelles de terres incultes
ou sur des toits en terrasse. C’est pour ce-
la que l’apiculture est viable pour les pe-
tits exploitants et les paysans sans terre.
Pour que l’emplacement soit favorable, il
doit être situé près d’une source d’eau et
de beaucoup de plantes et arbres à fleurs,
35
et être abrité du vent et de la lumière trop
forte. La ruche est un abri qui est mis à la
disposition des abeilles pour qu’elles y
fassent leur nid. Il en existe trois types
principaux: les ruches locales tradition-
nelles, les ruches à cadres mobiles et les
ruches à barres supérieures.
■ Les ruches traditionnelles
Elles sont fabriquées à partir de maté-
riaux locaux comme les rondins de bois
évidés, les cylindres d’écorce roulée,
les pots en argile, la paille ou la canne
tissées – tout ce qui est pratique et dis-
ponible. La ruche a pour unique rôle
d’encourager les abeilles à faire leur nid
dans un endroit facile d’accès pour
l’apiculteur. Les abeilles construisent
leur nid dans la ruche de la même façon
qu’elles le feraient dans la nature.
FIGURE 21 Des ruches locales traditionnelles faites de rondins au Bhoutan.
36
L’apiculteur récolte le miel et la cire
dans le nid. Selon l’habileté de l’apicul-
teur, les abeilles seront tuées ou non
pendant cette opération. Si la colonie
est détruite, la ruche reste vide pendant
quelques temps. S’il y a beaucoup de
colonies d’abeilles domestiques dans la
région, il est fort probable qu’un essaim
s’installera dans la ruche vacante et
commencera à y construire un nouveau
nid. Les apiculteurs traditionnels sont
souvent propriétaires de plusieurs
ruches et ne s’attendent pas à ce
qu’elles soient toutes occupées en mê-
me temps.
Tous les matériaux nécessaires doi-
vent être disponibles localement, mais il
est bon d’aider les apiculteurs tradition-
nels à se procurer les vêtements de pro-
tection, les enfumoirs et les contenants à

FIGURE 22 La partie inférieure d’une ruche locale traditionnelle a été enlevée pour montrer
l’intérieur: les abeilles construisent leurs rayons au plafond de la ruche.
miel, et à localiser les marchés pour
vendre leurs produits.
■ Les ruches à barres supérieures
Les ruches à barres supérieures présen-
tent les mêmes avantages de maniabilité
et d’efficacité dans la récolte que les
ruches à cadres mobiles, sans l’inconvé-
nient du prix élevé de fabrication. Elles
sont pratiques à utiliser car les abeilles
construisent leurs rayons sur la partie in-
férieure d’une série de barres qui permet-
tent à l’apiculteur de sortir chaque rayon
de la ruche individuellement. Comme
pour les ruches locales traditionnelles, la
caisse de la ruche est à base de n’importe
quel matériau disponible sur place. Il en
existe beaucoup de modèles différents
(Aidoo, 1999 et Sakho, 1999).
Tout le matériel peut être construit lo-
Apiculture et moyens d’existence durables
calement. Les seuls éléments à construi-
re avec précision sont les barres supé-
rieures, dont l’écartement doit permettre
aux rayons d’être espacés comme à l’état
sauvage. Cet écartement varie selon les
espèces et les races d’abeilles. D’une fa-
çon très générale, l’Apis mellifera d’ori-
gine européenne a besoin d’un écarte-
ment de 35 mm, l’Apis mellifera d’origi-
ne africaine d’un écartement de 32 mm
et l’Apis cerana d’origine asiatique d’un
écartement de 30 mm. La meilleure fa-
çon de déterminer avec précision l’écar-
tement nécessaire est de mesurer l’espa-
ce entre les rayons dans un nid sauvage
construit par les mêmes abeilles. Le vo-
lume de la chambre à couvains doit être
approximativement le même que celui
de la cavité qu’occupe le nid des abeilles
dans la nature.
37
FIGURE 23 Pratique de l’apiculture en ruches à barres supérieures au Cap-Vert.

Ce type de matériel a pour avantage

de rendre l’apiculture accessible à
d’autres groupes de la société. Dans
certains pays, l’apiculture traditionnel-
le est une activité plutôt réservée aux
hommes, qui utilisent des ruches
d’écorce placées au plus profond des
forêts. Des groupes de femmes apicul-
trices préféreront pratiquer l’apiculture
dans les ruches à barres supérieures fa-
briquées et installées à proximité des
habitations. Qui plus est, les ruches à
barres supérieures sont un moyen rela-
tivement économique d’abriter un
grand nombre de colonies d’abeilles à
des fins pollinisatrices.

■ Les ruches à cadres mobiles

Ces ruches sont utilisées dans la plu-
FIGURE 24 Barre supérieure de ruche part des pays industrialisés et dans cer-

38

FIGURE 25 Une ruche à barres supérieures
au Népal.
tains pays en développement, notam-
ment en Amérique centrale et du sud et
en Asie. Elles contiennent des cadres
rectangulaires en bois ou en plastic qui
servent de support aux rayons. Ces
cadres présentent deux avantages inté-
ressants:
• ils permettent d’inspecter et de ma-
nipuler facilement les colonies,
comme par exemple transporter les
cadres d’abeilles ou les cadres rem-
plis de miel (magasins) d’une colo-
nie à forte production dans une
autre où la production est plus
faible pour la renforcer;
• ils permettent de récolter efficace-
ment le miel dans les rayons qui,
une fois vidés, sont remis en place
dans la ruche, contribuant ainsi à
accroître la production de miel car
les abeilles n’ont pas à les recons-
truire.
Les ruches à cadres sont composées
d’une série de boîtes, habituellement
en bois, empilées les unes sur les
autres. Les cadres sont placés dans les
boîtes comme les dossiers suspendus
dans un meuble classeur. La boîte infé-
rieure est généralement réservée au nid
à couvain, où la reine pond ses œufs et
où les jeunes abeilles se développent.
Un chasse-reine – une grille de métal
dont les trous laissent passer les ou-
Apiculture et moyens d’existence durables
vrières mais pas la reine qui est plus
grosse – est placé entre la boîte qui
contient le couvain et la boîte supé-
rieure. Ainsi, seul le miel est stocké
dans les boîtes situées au-dessus du
chasse-reine. Il est aussi nécessaire
d’avoir un support de ruche, un plateau
et un toit, ainsi que plusieurs autres ou-
tils spéciaux.
Les ruches à cadres doivent être
construites avec précision. Il faut que
les boîtes s’emboîtent parfaitement et
que l’espace entre les cadres soit iden-
tique à celui du nid à l’état naturel.
Elles sont fabriquées avec du bois sec
taillé aux dimensions exactes et bien
raboté, et des matériaux comme les fils
de fer, les clous et la cire gaufrée. Leur
fabrication et leur entretien sont par
conséquent relativement exigeants en
main d’œuvre. Il est nécessaire de pré-
voir l’accès aux pièces de rechange, à
la cire gaufrée et aux cadres. L’espace
entre les rayons, le volume du nid et
autres caractéristiques des ruches à
cadres standard sont adaptés aux
abeilles domestiques d’origine euro-
39
péenne utilisées en Europe, en Amé- d’abeilles domestiques. Au moment de
rique du Nord et centrale, en Australa- l’achat du matériel, il importe de savoir à
sie, et ne conviennent pas nécessaire- quel type d’abeilles il est destiné, et
ment aux autres races ou espèces quelles sont ses caractéristiques.

FIGURE 26 Des apiculteurs avec leurs ruches à cadres en Albanie.

40
 Le matériel d’apiculture
■ L’enfumoir
L’enfumoir fournit aux apiculteurs une
source de fumée fraîche nécessaire pour
apaiser les abeilles. Il consiste en une
boîte remplie de matériaux à combus-
tion lente, comme de la bouse de vache
séchée, de la toile grossière, des rafles
de maïs ou du carton, à laquelle on fixe
un soufflet. L’apiculteur envoie un peu
de fumée près de l’entrée de la ruche
avant de l’ouvrir et enfume légèrement
les abeilles pour qu’elles passent d’un
FIGURE 27 Le matériel nécessaire à l’apicul-
ture à petite échelle devrait être fabriqué loca-
lement: un fabricant d’enfumoirs en Gambie.
côté à l’autre de la ruche. Les enfumoirs
importés sont utiles comme prototypes,
et les forgerons des villages peuvent les
fabriquer, contribuant ainsi à accroître
les moyens d’existence locaux.
■ Les vêtements de protection
Un chapeau à large bord muni d’un voi-
Apiculture et moyens d’existence durables
le protège la tête et le cou contre les pi-
qûres. Les vêtements de protection ras-
surent les apiculteurs débutants; les
plus expérimentés trouvent que ces vê-
tements donnent chaud et empêchent de
travailler suffisamment délicatement
auprès des abeilles. Certains apiculteurs
couvrent simplement leurs mains d’un
sac en plastic, retenu par un élastique
autour du poignet. Les élastiques empê-
chent aussi les abeilles de rentrer par les
jambières des pantalons ou les manches
des chemises. Les vêtements importés
sont des prototypes utiles mais les vête-
ments d’apiculture – à la base, des com-
binaisons de travail modifiées – peu-
vent être fabriqués sur place, créant ain-
si un stimulant utile à l’industrie locale.
■ Le lève-cadre
Certaines espèces d’abeilles ont la par-
ticularité de fermer toutes les fissures et
sceller tous les joints de la ruche avec la
propolis. Le lève-cadre est un outil de
métal pratique qui sert à séparer les
boîtes, racler les morceaux de cire et sé-
parer les extrémités des cadres de leurs
41
supports. Il est possible de se servir
d’un vieux couteau, bien que la lame en
soit souvent trop flexible et l’effet de le-
vier ainsi produit soit insuffisant. Les
forgerons dans les villages peuvent fa-
cilement fabriquer les outils qui
conviennent.
■ Récolte et transformation
Le miel est récolté à la fin de la période
de floraison. Dans les ruches tradition-
nelles ou les ruches à barres supérieures,
l’apiculteur sélectionne les rayons pleins
de miel mûr recouvert d’une fine couche
de cire blanche, qui sont généralement
ceux situés le plus près de la partie exté-
rieure du nid. Les rayons qui contiennent
le pollen ou les jeunes abeilles ne sont
pas touchés. On coupe tout simplement
le rayon à miel en morceaux pour vendre
à prix fort les portions de gâteaux de
42
miel frais. Ou bien on écrase le gâteau de
miel et on le tamise à l’aide d’une toile
ou autre type de filtre pour séparer le
miel de la cire. Une fois que le miel est
séparé des rayons, on fait délicatement
fondre la cire au bain-marie pour la
mettre en bloc. Les rayons de miel récol-
tés par les chasseurs de miel sont traités
de la même manière.
Dans les ruches à cadres, le miel est
récolté par rotation des cadres dans une
centrifugeuse. Les rayons vidés sont en-
suite replacés dans la ruche. Le recycla-
ge des rayons permet aux abeilles de se
concentrer sur la production du miel
plutôt que sur la fabrication de la cire à
rayons. C’est la raison pour laquelle le
rendement de la production de cire
d’abeille dans l’apiculture pratiquée en
ruches à cadres est inférieur à celui des
méthodes traditionnelles.