L IA Va T Elle Remplacer Les Designers Graphiques 1689178593

REMERCIEMENT
Je voudrais particulièrement remercier mon tuteur

de mémoire, Joan HAEGELE, pour son accom-
pagnement, le temps qu’il a pu m’accorder et ses
conseils précieux tout au long de l’élaboration de
mon mémoire.
Je souhaite remercier l’équipe pédagogique de

Mediaschool dont Maude FRIEH pour son aide et
sa disponibilité.
Je tiens également à remercier mon entreprise,

l’agence Blackbird pour sa bienveillance, ainsi que
mes collègues pour leur soutien.
Merci à mes proches, à Nicolas STEINMETZ et Eve

BLESCH pour leur soutien moral.
Enfin, je tenais à exprimer ma reconnaissance, à

toutes les autres personnes et IA qui ont contribué
de près ou de loin à la réalisation de ce mémoire.
[ 2]
PRÉAMBULE
Après les rapides évolutions sur les intelli-
gences artificielles (IA) génératives en 2022,
le sujet devient inévitable sur les réseaux
sociaux. Tout le monde en parle, que ce soit
de manière positive ou négative, l’IA fait débat
dans le monde du design. Personnellement, je
m’interroge sur les utilisations de ces IA, que
vont-elles augurer pour mon métier ? L’im-
pact sera-t-il fort et négatif comme certains
le prétendent, ou au contraire radieux pour la
profession ?
Ayant été moi-même graphiste puis à présent

UI Designer, ces questions me touchent direc-
tement. Il est important pour moi de mieux
comprendre le domaine dans lequel je vais
évoluer et de pouvoir appréhender ces tour-
nants décisifs de mon métier.
Mon mémoire s’adresse à vous les designers

graphiques, que vous soyez graphiste, direc-
teur artistique, UI / UX Designer, Motion Desi-
gner ou encore Illustrateur. Étroitement liés,
ces métiers créatifs pouvant être fortement
impactés par l’intelligence artificielle dans les
années à venir, ont tout intérêt à réfléchir dès à
présent sur la place que l’IA peut prendre dans
leur profession.
[ 3]
De plus, grâce à ces informations vues sur les
réseaux sociaux, j’ai notamment pu participer
à la conférence de design “La conf qui tue
le game”, lors de la prise de parole de David
Raichman sur ”La révolution des IA créatives”.
La fonction “enregistrer” sur les réseaux
Relecteurs
sociaux m’a également permis de garder les
Un grand merci à Nicolas STEINMETZ posts intéressants de côté afin de les étudier
et Christine MARTZOLFF d’avoir parti- le moment venu.
cipé à la relecture et la correction de ce
mémoire. Dans le but de récupérer et comprendre le
point de vue des designers sur l’actualité et
l’utilisation des IA, j’ai créé un court sondage
ciblé. Celui-ci a été envoyé sur Linkedin, à
Méthode de collecte d’infos mon réseau et à des groupes spécialisés en
graphisme et design dans le but d’avoir un
Afin d’appréhender mon sujet, il m’a maximum de réponse de ma cible principale.
tout d’abord fallu comprendre l’intelli-
gence artificielle. Pour cela, j’ai recher- Les informations récoltées ont été stockées et
ché et consulté différents livres à la triées sur l’outil notion dans différentes pages.
médiathèque André-Malraux sur le sujet Pour planifier un avancement régulier, j’ai créé
de l’IA et de son lien avec l’art. un rétroplanning avec les principales étapes
nécessaires à la réalisation de ce mémoire.
Suivre des personnes référentes de l’IA
sur Linkedin comme Etienne Mineur
ou encore David Raichman m’a été très
utile pour être au courant de toutes
les actualités, podcast et webinar sur
le sujet. Leurs différentes interviews et
interventions sur le domaine m’ont gran-
dement aidées à me poser les bonnes
questions.
[ 4]
SOMMAIRE
INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
01 ÉTAT DES LIEUX :

IA & DESIGN GRAPHIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
A. L’IA dans le domaine créatif
1. Qu’est-ce que l’IA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
2. Comprendre le passé de l’IA pour appréhender son futur . . 14
3. Les IA génératives, dernières arrivées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
4. L’IA, un marché prometteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
B. Designer graphique, un métier en questionnement

1. La créativité au cœur du métier. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
2. L’évolution des outils du designer graphique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

3. Un métier encore mal reconnu en France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
4. L’appréhension des designers face à l’IA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
5. Législation et droits d’auteurs face à l’IA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
02 UNE COMPLÉMENTARITÉ
ENTRE IA ET DESIGNER . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
A. Comment l’IA peut aider les designers
1. L’IA un outil de libération créative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
2. Augmentation de l’efficience grâce à l’IA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
B. Les limites de l’IA

1. Un manque d’humanité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
2. Les limites techniques de l’IA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
[ 5]
03 QUEL AVENIR POUR LE
MÉTIER DE DESIGNER ? ................................... 54
A. L’avenir du design graphique

1. Transformation du métier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
2. Un nouveau rapport avec les clients . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

3. Une Accentuation de l’amateurisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
B. Points de vigilances
1. L’IA, un domaine à encadrer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
2. Un appauvrissement graphique à long terme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
c. Comment utiliser l’IA en tant que designer graphique

1. Mode d’emploi : Comment créer un site avec IA . . . . . . . . . . . . . . . . 63
2. Recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
SOURCES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
ANNEXES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
[ 6]
>> Introduction
@Midjourney
INTRODUCTION
Au cours des dernières années, l’intelligence arti-
ficielle a connu une croissance exponentielle dans
de nombreux domaines, y compris en design. De
plus en plus de tâches de conception tendent à être
automatisées, ce qui amène à se questionner sur
l’avenir de certains métiers. Les domaines créatifs et
artistiques ont longtemps été épargnés par l’auto-
matisation des processus, mais tout ceci est en train
de changer. En effet, nous sommes à un tournant
décisif dans les métiers du design graphique et il
est difficile de ne pas voir sortir chaque semaine
de nouvelles actualités sur l’intelligence artificielle
générative.
[ 7]
>> Introduction
Adobe définit le designer graphique En effet, une fois la fascination passée, la

comme “un spécialiste de la commu- génération de rendus graphiques par les
nication visuelle qui a pour mission de IA vient questionner l’avenir du métier
convertir des idées ou des concepts en de designer graphique. Les clients vont-
image”. Avec l’émergence de l’IA, il est ils utiliser des solutions d’intelligence
important de se demander comment artificielle pour créer leurs propres
cette technologie peut aider ou menacer visuels ? Aura-t-on encore besoin des
ce métier créatif. designers dans un avenir proche et
qu’adviendra-t-il de leur métier à long
Selon le Parlement européen, le terme terme ?
d’intelligence artificielle représente tout
outil utilisé par une machine afin de « C’est pourquoi nous allons dans ce
reproduire des comportements liés aux mémoire examiner de plus près le débat
humains, tels que le raisonnement, la sur l’IA et le design, en se posant la ques-
planification et la créativité ». Pour cela, tion suivante : “L’IA peut-elle remplacer
elle reçoit généralement des données, les designers graphiques ?“
les analyses, puis réagit selon le but qui
lui a été spécifié. Auparavant unique- Ce sujet d’actualité et d’avenir concerne
ment utilisée dans les laboratoires de l’ensemble des designers graphiques,
recherches en mathématique, l’IA a peu importe leur statut, la taille de leur
entamé sa révolution depuis qu’elle a entreprise, ou qu’ils soient employés ou
trouvé “son application dans le monde freelance. L’ensemble des réflexions se
réel”1. Les IA génératives, dont tout le portera majoritairement sur la France et
monde parle actuellement, ses spécificités.
permettent de générer des L’IA PEUT-ELLE
La première partie de ce
images, textes ou vidéos,
selon une requête entrée par
REMPLACER mémoire servira à réaliser un
état des lieux sur l’intelligence
l’utilisateur. Disponibles au LES DESIGNERS artificielle, sa place dans le
grand public, elles entraînent
design actuel et les question-
fascinations et inquiétudes GRAPHIQUES ? nements qui en découlent.
dans le milieu des designers,
Ensuite, nous aborderons
mais aussi pour les métiers connexes.
la complémentarité entre l’IA et les
L’évolution rapide des versions donne
designers graphiques, pour mieux
un aperçu de la vitesse à laquelle peut
comprendre ce qu’ils peuvent s’apporter
changer le secteur. Certains considèrent
mutuellement. Pour finir, nous réfléchi-
les générateurs d’images comme fasci-
rons à l’impact à long terme de l’IA sur
nants tandis que d’autres les perçoivent
le métier de designer, son avenir et les
avec un regard effrayé. Une partie des
recommandations pouvant être faites
designers commence déjà à intégrer l’IA
sur le sujet.
dans leurs processus de travail alors que
d’autres s’opposent à son utilisation.
1
CYPE, Axel, Au cœur de l’intelligence artifi-
cielle, 2020
[ 8]
État des lieux :
IA & Design graphique
L’intelligence artificielle est une technologie émergente

qui suscite de nombreuses interrogations dans le monde
professionnel. Les designers graphiques ne font pas
exception, car l’IA pourrait potentiellement remplacer
leur travail. Dans cette partie, nous allons explorer les
différentes facettes de l’IA et les questionnements qu’elle
soulève dans le métier de designer.
[9]
[ 9]
>> Introduction
@Midjourney
A. L’IA DANS LE
DOMAINE CRÉATIF
L’intelligence artificielle est un sujet d’actualité majeur, mais sa
complexité peut parfois échapper à certains. Pour saisir pleinement
ses enjeux, il est important de se plonger dans son histoire et de
comprendre son fonctionnement.
[ 10 ]
>> 01.Etat des lieux
1. QU’EST-CE QUE L’IA

Derrière le terme d’intelligence artificielle se cache en réalité des
algorithmes mathématiques.
Selon la CNIL, un algorithme est “la description d’une suite d’étapes

permettant d’obtenir un résultat à partir d’éléments fournis en entrée.
Par exemple, une recette de cuisine est un algorithme permettant
d’obtenir un plat à partir de ses ingrédients !”.
IA & DESIGN : L’IA va-t-elle remplacer les designers graphiques ?
Il existe des algorithmes conçus de manière à ce que leur comportement

puisse évoluer au fil du temps, en fonction des données qui leur sont
fournies. Les algorithmes dits «auto-apprenants» font partie du domaine
de la recherche des systèmes experts et de l’intelligence artificielle. Ils
sont de plus en plus employés dans divers secteurs, tels que la prédiction
météorologique ou encore l’analyse d’images médicales.
Après avoir défini ce qu’est un algorithme, nous allons pouvoir en distin-
guer deux types, les systèmes experts et systèmes apprenants.
Le système expert
Le système expert est un type d’algorithme qui est construit sur la base
du raisonnement humain. Ce système est aussi connu sous le nom d’in-
telligence artificielle symbolique. En effet, cette dernière applique un
ensemble de règles prédéfinies dans un domaine spécifique d’expertise,
dans le but d’arriver à une conclusion logique. Rien de nouveau n’est
créé par l’ordinateur, il se contente de mettre en application le savoir
de l’expert en utilisant l’expression conditionnelle “si… alors”. Prenons
l’exemple cité dans le livre “L’IA peut-elle penser ?” de Hubert KRIVINE.
L’auteur utilise un cas médical pour appuyer sa définition “si l’enfant
est malade, s’il a de la fièvre et des boutons, alors c’est probablement la
rougeole.” De la même manière, l’algorithme symbolique se positionne en
tant qu’outil d’aide à la décision permettant de diffuser et d’automatiser
un savoir humain.
Le système apprenant
Le deuxième type d’algorithme est celui qui va nous intéresser dans
ce mémoire, il s’agit du système apprenant, encore connu sous le nom
d’algorithme d’apprentissage ou de machine learning. En effet, on parle
[ 11 ]
aujourd’hui d’intelligence artificielle pour désigner des algorithmes

simulant le fonctionnement du raisonnement humain. Ainsi, le machine
learning est un sous domaine de l’intelligence artificielle au sein duquel
les algorithmes apprennent, à partir d’exemples, à exécuter des tâches
pour lesquelles ils n’ont pas été directement programmés. Il faut pour
cela, fournir à ces machines des bases de données (textes, images, son)
à partir desquelles elles pourront accomplir une tâche ou réaliser une
prédiction. Cet algorithme apprend de manière autonome.
Par exemple, on renseigne une base de données à la machine afin de

distinguer automatiquement une photo de chat de celle d’un chien.
Cette tâche pourra ensuite être réalisée de différentes manières. En
effet, nous pouvons distinguer plusieurs types d’apprentissage : super-
visé, non supervisé ou par renforcement.
Les différents types d’apprentissages

» L’apprentissage supervisé : Il requiert de catégoriser la
base de données manuellement par l’homme. Après avoir
montré des milliers d’exemples de chien, en lui indiquant qu’il
s’agit d’un chien, la machine sera capable d’en reconnaître un
lorsqu’on lui en présentera un.
» L’apprentissage non supervisé : Avec l’apprentissage non

supervisé, nul besoin de montrer à la machine s’il s’agit d’un
chien ou d’un chat sur la photo. En effet, l’algorithme est
autonome et trouve lui-même la structure des données. Il n’y
a ainsi pas de catégories pour superviser son travail, il crée
des groupes par similarité. La machine va donc diviser les
photos en deux groupes distincts sans savoir qu’il s’agit de
“chats” et de “chiens”.
» L’apprentissage par renforcement : L’apprentissage

par renforcement repose sur un système de récompenses
positives ou négatives. Prenons cette fois-ci l’exemple d’un
système de recommandation pour une boutique e-com-
merce. Celui-ci est conçu pour proposer des produits à l’uti-
lisateur en fonction de ses actions précédentes, ses achats
et avis laissés. Lorsqu’un client achète un produit proposé, le
système se voit récompensé. Au contraire, s’il ne l’achète pas
ou laisse un avis négatif sur celui-ci, une pénalité pourra être
donnée. Le système apprend ainsi lui-même en fonction des
résultats qu’il obtient.
[ 12 ]
Apprentissage humain vs apprentissage machine

On pourrait penser que l’apprentissage humain est une combinaison
de ces 3 types d’apprentissages. Le co-créateur de Siri, Luc Julia, nous
explique : “On a construit des systèmes capables de reconnaître des chats
avec un taux de réussite de 95% en leur fournissant 100 000 images de
l’animal. Mais un enfant n’a besoin que de deux images de chat pour en
reconnaître un toute sa vie, avec un taux de réussite de 100%”1En effet,
l’être humain apprend rapidement grâce à des expériences très variées,
contrairement à une machine qui va avoir du mal à l’interpréter dans de
nouveaux contextes.
Deep learning
Sous-composante du machine learning, le

deep learning en est une version améliorée.
Créée en 1926 par Geoffrey Hinton, elle est
aujourd’hui prédominante dans les avancées
majeures en intelligence artificielle. Le deep
learning est un réseau de neurones artificiels
“dont le fonctionnement est calqué sur celui de
notre cerveau”2
IA faible et IA forte
L’IA peut également être divisée en deux
catégories : l’IA faible et l’IA forte. L’IA faible
ou étroite doit répondre à un cadre défini (reconnaissance d’images, jeu
d’échecs, traduction de texte, etc). Elle n’a pas de conscience propre et
fonctionne de la manière dont elle a été programmée par l’être humain.
L’IA forte quant à elle “viserait à émuler le cerveau humain” 3. Aussi
appelée intelligence véritable ou intelligence artificielle générale, elle est
définie par Wikipédia comme étant “une machine dotée de conscience,
de sensibilité et d’esprit”. Ce type d’intelligence artificielle n’existe pas
encore, mais elle est vue comme le futur du domaine. D’après une étude
publié dans le livre «Architects of Intelligence» de Martin Ford, auprès
de 23 acteurs du secteur, il y aurait 50% de chances que l’IA forte voit le
jour entre 2029 et 2200. Ainsi, même pour les experts du domaine, il est
très difficile d’estimer une potentielle date d’arrivée de cette intelligence
artificielle extrêmement complexe.
1
A. CAGAN, “IA faible / IA forte : on en est où au fait ?”, Le Journal Du Geek, 2019
2
D’ASCOLI, Stéphane. Comprendre la révolution de l’intelligence artificielle, 2020.
3
KRIVINE, Hubert. L’IA peut-elle penser ?, 2021.
[ 13 ]
2. COMPRENDRE LE PASSÉ
DE L’IA POUR APPRÉHENDER
SON FUTUR
Pour se rendre compte des récentes évolutions de l’intelligence artificielle, il
est important de comprendre comment elle en est arrivée là.
Faisons un rapide tour d’horizon des événements clés qui ont permis de
construire l’intelligence artificielle d’aujourd’hui.
Alan Turing, mathématicien et informaticien britannique, aborde dès

1941 la notion d’intelligence des machines. En 1950, il propose un test
“le test de Turing” qui évalue la capacité d’une machine à imiter le
comportement et l’intelligence humaine. Pour cela, le test consiste à
faire échanger un évaluateur humain avec une machine et un autre être
humain. L’évaluateur sait qu’une machine est l’un des participants, mais
ne sait pas lequel. S’il ne peut pas faire la distinction entre la machine et
l’être humain, la machine a réussi le test. Ce test est considéré comme
un critère important pour évaluer les progrès de l’intelligence artificielle
et a été largement discuté dans la communauté scientifique depuis sa
proposition.
Dans les années 1940 et 1950, quelques scientifiques appartenant à

une diversité de domaines (mathématiques, psychologie, ingénierie,
économie et science politique) ont commencé à échanger sur la possi-
bilité de créer un cerveau artificiel. C’est en 1956, lors de la conférence
de Darmouth que le terme “intelligence artificielle” est utilisé pour la
première fois, par John McCarthy. Suite à ce regroupement scientifique,
les premières recherches sur l’IA sont officiellement lancées.
Au début des années 1970, les capacités des programmes d’IA sont
limitées. En effet, les ordinateurs sont bien trop peu performants pour
montrer les premiers signes “d’intelligence”. Hans Moravec utilise l’ana-
logie suivante pour faire comprendre ce phénomène : « En dessous d’un
certain niveau de puissance, un avion reste plaqué au sol et ne peut pas
décoller du tout, c’est juste impossible 1»
1 Wikipédia, Histoire de l’intelligence artificielle
[ 14 ]
En 1990, la puissance de calcul entame une

progression exponentielle et permet de débloquer
le développement de l’intelligence artificielle. C’est
la Loi de Moore ; à prix égal, la puissance de calcul
des processeurs double tous les deux ans.
En 1996, l’ordinateur deep Blue conçut par IBM

bat le champion du monde d’échecs, Garry Kaspa-
rov. Bien que n’utilisant qu’un système expert ne
mettant pas en avant un réel apprentissage, cette
victoire a une forte symbolique pour le domaine
de l’intelligence artificielle. En effet, il s’agit de
la première victoire à un jeu d’intelligence d’une
machine face à un être humain.
En 2014, Google rachète Alphago, un programme

informatique capable de jouer au jeu de go.
Contrairement au jeu d’échecs, le jeu de go propose
un nombre incalculable de mouvements et place-
ments sur le plateau. Pour réussir à combiner stra-
tégie, logique et créativité, AlphaGo s’est appuyé
sur de l’apprentissage profond. En 2016, Alphago
bat Lee Sedol, le champion du monde de go.
Chacun de ces évènements marquants rapproche

davantage l’IA des capacités humaines, et montre
que dans des tâches spécifiques, elle surpasse l’hu-
main. Un domaine épargné jusqu’à récemment est
devenu le nouveau terrain de jeu des IA : la création
graphique.
Jeu de Go
[ 15 ]
3. LES IA GÉNÉRATIVES,
DERNIÈRES ARRIVÉES
Nouvelle génération d’intelligence artificielle, l’IA générative se nourrit de
contenus existants afin d’en créer de nouveaux de la même manière qu’un
homme pourrait le faire. Basés sur le machine learning, ces algorithmes
permettent de créer des images, des vidéos, du texte et des musiques
à partir de bases de données. Pour cela, il suffit de rentrer une requête
textuelle de quelques mots, aussi appelé “prompt” demandant ce que l’on

souhaite à l’IA.
Le 29 août 2022, une œuvre intitulé ‘‘Théâtre d’opéra spatial’, réali-

sée à l’aide d’une IA générative a remporté le concours d’art de la foire
annuelle du Colorado dans la catégorie ‘‘art numérique et photos retou-
chées numériquement’’. Jason Allen, son créateur, a réalisé son œuvre
en donnant des instructions au programme d’IA Midjourney. Il affirme
avoir demandé à l’intelligence artificielle de générer plusieurs centaines
d’images. Il a ensuite choisi une image, puis l’a retouchée sur Photo-
shop et agrandie à l’aide de Gigapixel AI pour ensuite l’imprimer sur un
tableau. Plusieurs autres participants ont contesté cette victoire, jugeant
celle-ci comme non méritée. Cet évènement a fait le tour de la toile et
a ouvert des débats sur l’intelligence artificielle au service de la créa-
tion. De nouvelles questions émergent : Est-ce réellement une création
personnelle, bien que l’intervention humaine ait été limitée ?
Jason Allen, Théâtre

d’opéra spatial.
Colorado State Fair,
2022.
[ 16 ]
Tour d’horizon des IA génératives

L’année 2022 a été pionnière en matière d’IA générative, difficile de ne
pas avoir entendu parler de Midjourney, Dall-E ou encore de ChatGPT.
En effet, c’est le domaine qui a le plus évolué dernièrement parmi les
intelligences artificielles. Chaque mois, de nouvelles versions de ces IA
sont dévoilées, toujours plus performantes et réalistes. Les investisse-
ments dans les intelligences artificielles génératives auraient progressé
de 425 % depuis 2020 pour atteindre 2,1 milliards de dollars selon
Pitchbook cité par le Financial Times1. Les grands acteurs de la tech se
battent pour être sur le devant de la scène, que ce soit Google, Meta ou
encore des collectifs indépendants.
ChatGPT créé par Open AI est une IA conversationnelle, en parcourant

les données trouvées sur internet, elle répond aux demandes que lui
font les utilisateurs. Parmi ses utilisations, il est possible de lui poser une
question, de lui demander de résumer un article ou encore de rédiger un
texte sur un thème donné à la manière de quelqu’un (professeur, poète,
écrivain, scientifique…). Cette IA fait preuve d’un engouement sans
précédent et à beaucoup fait parler d’elle récemment dans les médias
Dans le domaine de la création d’image, plusieurs acteurs majeurs se

sont distingués, tels que Midjourney, Stable Diffusion, Dall-E ou encore
Adobe. Ces entreprises offrent des solutions permettant de générer des
images en utilisant leurs propres bases de données ou en exploitant des
données provenant d’internet.
Les GAFAM suivent de près ces nouveautés pour faire partie de la révo-
lution engendrée par les IA génératives. Ainsi, Google, Amazon, Meta ou
encore Microsoft développent leurs solutions dans le but de les intégrer
à leur écosystème.
Une révolution de l’image

Lorsque l’on s’intéresse à ces IA génératives, on se rend compte que les
médias parlent d’une révolution de l’image causée par ces intelligences
artificielles. En allant plus loin dans les analyses de cette dite révolu-
tion, on tire un constat qui est partagé par certains designers. La vraie
révolution de l’image prendrait naissance dans sa large diffusion au
grand public et non dans ses progrès technologiques. Auparavant, ces
IA étaient majoritairement destinées aux scientifiques et restreintes
aux utilisations des entreprises, désormais tout le monde peut y avoir
accès et créer du contenu avec elles. Prenons l’exemple de la révolution
1
L’ADN, L’IA générative : la nouvelle folie des investisseurs, 2022
[ 17 ]
numérique et son explosion au milieu des années

1990. Le fait d’avoir un ordinateur dans son foyer
s’est démocratisé et lorsque Internet a été déployé
à travers la société, l’utilisation de l’ordinateur a
alors explosé.
En janvier 2023, ChatGPT dépassait les 100 millions

d’utilisateurs alors qu’il était sorti seulement le
30 novembre 2022, soit 2 mois auparavant. En
comparaison1, il a fallu plus de neuf mois à TikTok
et deux ans à Instagram pour atteindre ce nombre
d’utilisateurs.
L’IA a une influence considérable dans le domaine

de la création web. Toutefois, son impact va bien
au-delà de ce secteur spécifique, elle peut trans-
former de manière significative le marché du travail
dans son ensemble. Dans cette perspective, il est
crucial d’examiner non seulement l’application de
l’IA dans la création web, mais également sa portée
générale et son potentiel à bouleverser le monde
professionnel.
1
Pourquoi l’Intelligence Artificielle générative est une révo-
lution d’envergure
@Midjourney
[ 18 ]
4. L’IA, UN MARCHÉ
PROMETTEUR
Dans un monde où le digital et les nouvelles technologies sont en perpé-
tuelles évolutions, l’IA trouve sa place en tant que secteur d’avenir dans le
marché du travail.
D’après une étude de Fortune Business Insights, le marché de l’IA est

de 27,23 milliards de dollars en 2019 et est évalué à 266,92 milliards de

dollars d’ici 2027. Cela représente un résultat quasiment multiplié par
dix en l’espace de 8 ans. En France, dès 2018 le gouvernement a fait de
l’Intelligence Artificielle une priorité pour booster la compétitivité des
entreprises, en annonçant un investissement public de 1.5 milliard d’eu-
ros sur 5 ans. Le but de cet investissement étant clairement d’encoura-
ger le développement de l’ ’’IA France’’.
L’intelligence artificielle est vue par les entreprises comme un booster de

productivité, permettant de libérer les salariés de tâches chronophages
et répétitives. En effet, d’après une étude de PwC1, 54% des chefs d’en-
treprises affirment que l’adoption de l’IA par leur entreprise a entraîné
une augmentation de la productivité. De plus, 44% des entreprises2 qui
utilisent des solutions d’IA ont réalisé des économies dans les départe-
ments où ces solutions ont été mises en place.
Les entreprises se rendent compte du potentiel et des opportuni-

tés relatives aux intelligences artificielles, plus de 91% des entreprises
leaders ont investi dans l’IA3.
Du côté des consommateurs, 62% se montrent favorables au partage de

leurs données à des IA pour améliorer leur expérience client4. Ainsi, la
plupart des utilisateurs acceptent l’utilisation d’intelligence artificielle
lorsqu’ils en voient leur propre intérêt, mais d’autres restent méfiants sur
la façon dont les entreprises utilisent cette technologie et traitent leurs
données.
1
Étude de PWC, 2018 AI predictions
2
McKinsey, 2019
3
Étude NewVantage, 2020
4
Étude Salesforce, 2019
[ 19 ]
>> Introduction
@Midjourney
B. DESIGNER
GRAPHIQUE,
UN MÉTIER EN
QUESTIONNEMENT
Le développement rapide des outils de génération d’images suscite des
questionnements chez les designers graphiques. Les compétences qu’ils
ont acquises se voient être remises en question et l’IA menace d’impacter
la vision des clients sur le métier.
[ 20 ]
1. LA CRÉATIVITÉ AU CŒUR
DU MÉTIER
Le métier de designer graphique allie créativité, expertise technique et
sensibilité artistique pour répondre aux problématiques qui lui sont confiées.
Contrairement aux idées reçues, le design n’est pas seulement une

affaire d’esthétisme. Selon l’Alliance Française des Designers1, “Le design
est un processus intellectuel, créatif, pluridisciplinaire et humaniste, dont

le but est de traiter et d’apporter des solutions aux problématiques de tous
les jours, petites et grandes, liées aux enjeux économiques, sociaux et envi-
ronnementaux.” En effet, le rôle du designer graphique est d’imaginer et
de concevoir des solutions visuelles pour répondre à des besoins précis.
La création visuelle est un moyen pour résoudre une problématique,
mais ne représente pas la problématique en elle-même. Pour ce faire,
les domaines d’interventions du designer graphique sont variés, allant
de la création d’identité graphique avec la conception de logo, au choix
de typographie, de couleurs et d’éléments graphiques, à la réflexion et
création d’interface utilisateurs pour des sites et applications jusqu’à la
création de support de communication visuels.
Méthode de conception
Qu’importe le type de support, le designer commence par l’analyse du
besoin et des enjeux de son client. Cela implique une compréhension
complète du brief, des attentes de celui-ci ainsi que des différentes
contraintes techniques, mais aussi du contexte du projet, notamment
le secteur d’activité de l’entreprise et le pays où celui-ci aura lieu. Une
analyse de l’existant ainsi qu’un benchmark concurrentiel lui permet de
compléter le périmètre du projet. Pour commencer la phase de créa-
tion, l’étape de brainstorming est essentielle afin de faire émerger les
premières idées, seul ou en équipe cette étape permet d’explorer rapi-
dement un grand nombre de possibilités. Ces premières pistes seront
triées pour être par la suite approfondies. Suite à cela, la réalisation d’un
moodboard permet de centraliser les inspirations trouvées : typogra-
phies, images, textures, couleurs. Il permet notamment de valider une
1
L’Alliance France Design est le plus grand syndicat pluridisciplinaire du design en
France.
[ 21 ]
première ligne directrice du projet avec le client. Vient ensuite la réali-

sation de croquis, permettant de trouver rapidement plusieurs pistes
graphiques. Une fois le tri fait, ces pistes serviront de point de départ
pour la création. Il est important de préciser que le processus créatif
n’est pas linéaire, il rebondit entre les différentes idées du designer et
à travers les itérations. Chaque itération nourrit le processus créatif et
permet l’émergence de nouvelles idées afin d’améliorer le projet. Une fois
la première proposition faite au client, un nouvel échange avec celui-ci
permet de faire les derniers ajustements ou de recommencer une série
d’itérations. Lorsque le client est satisfait, la version finale peut être
livrée.
Culture graphique, créativité, sensibilité propre

La créativité du designer en fait sa force, elle est liée à son expérience
personnelle, à sa culture et à ses émotions. Il peut trouver l’inspiration
dans sa vie, ses relations et son environnement. La créativité est souvent
influencée par la conscience de soi et la capacité d’auto-réflexion. Le
bagage créatif de chaque designer en fait son identité et va avoir un
impact sur ses créations. À travers ses expériences et ses diverses expé-
rimentations, il développe son style et sa signature propre. De plus, sa
culture graphique acquise au fur et à mesure de ses recherches et de ses
formations, lui apporte un socle de connaissances lui permettant d’affir-
mer sa créativité.
@Midjourney
[ 22 ]
2. L’ÉVOLUTION DES OUTILS

DU DESIGNER GRAPHIQUE
L’évolution du designer graphique au fil des ans a été marquée par plusieurs
révolutions. De même, les outils de travail du designer n’ont cessé d’évoluer
dans le temps. À l’origine, le travail du graphiste était principalement
manuel. Les graphistes devaient créer leurs designs en utilisant des tech-
niques telles que la gravure, la peinture, le dessin, la calligraphie et la comp-
osition typographique manuelle. Ces procédés chronophages demandant un

véritable savoir-faire laissaient peu de place à l’erreur.
La révolution photographique a permis de développer de nouvelles

techniques de composition et de mise en page, qui ont elles-mêmes été
bouleversées avec l’avènement de l’ère digitale. Aujourd’hui, le designer
doit également maîtriser les outils de création web, afin de proposer
des solutions graphiques adaptées aux sites internet et aux applications
mobiles.
L’arrivée de l’ordinateur et de la publication assistée par ordinateur (PAO)

révolutionne la mise en page et la composition graphique. Les logiciels
de la Suite Adobe, dont Illustrator sorti en 1987, font encore aujourd’hui
partie des outils phares des designers graphiques.
Dans un article de Libération datant de 19951, Alain, un maquettiste en

agence témoigne :
«Dès 1987 est apparue une forte concurrence entre bidouil-

leurs sur Mac et graphistes ‘‘traditionnels” rompus au métier.
À cette époque, les autodidactes, même nuls, étaient rois car
ils savaient se servir de la machine. On a vu des publications
d’une laideur à peine imaginable. Le Mac était l’occasion pour
les clients d’agences de création d’éviter la sous-traitance.
Mais deux ou trois ans après, ils ont compris qu’un raisonne-
ment de strict gestionnaire ne menait pas loin.»
1
MIZIO, François.Libération. La révolution graphique a dix ans. 1995
[ 23 ]
En fin de compte, l’arrivée de l’informatique et

des logiciels de conception graphique a changé
le métier de graphiste, mais cela n’a pas éliminé
l’importance des compétences en design et de la
créativité. Censés accélérer le travail des designers,
les outils POA ont donné l’illusion d’une facilité du
métier de designer et que la conception graphique
serait à la portée de tout le monde.
Bien que l’année 2022 ait été pionnière dans les

intelligences artificielles créatives, les outils d’IA
dans les logiciels de designs ne sont pas si récents.
Au fil des ans, les avancées technologiques ont
permis aux outils d’IA de devenir de plus en plus

sophistiqués et de s’intégrer à des logiciels de
conception graphique tels que Photoshop et Illus-
trator. Ces outils d’IA aident les designers à accé-
lérer leur travail et à automatiser certaines tâches.
Ainsi, l’intelligence artificielle d’Adobe nommée
Sensei permet de créer des sous-titres automa-
tiques sur les vidéos, de sélectionner automatique-
ment des objets dans la retouche photo, ou encore
d’ajuster automatiquement la couleur et l’éclairage
d’une image.
Avec toutes ces avancées technologiques, le temps

passé sur les réalisations est moins palpable. Le
travail de designer graphique parait plus facile
qu’autrefois, le client ne se rend pas compte de la
démarche de recherche derrière une création et
cela joue en défaveur des designers.
[ 24 ]
@Midjourney
3. UN MÉTIER ENCORE MAL

RECONNU EN FRANCE
Malgré son expansion depuis une dizaine d’années, le secteur du design
graphique souffre d’un manque de reconnaissance et d’une méconnais-
sance de ses métiers. Tous types d’entreprises, peu importe le secteur, peut
avoir besoin des services d’un designer graphique. Cependant, l’absence de
connaissance sur le métier et les stéréotypes présents peuvent entraver la
relation entre le designer et l’entreprise cliente.
Des stéréotypes ancrés

Le métier de designer graphique est perçu par beaucoup comme un
métier passion, seulement rémunération et passion ne font pas toujours
bon ménage. Ainsi, il est fréquent que dans un cercle privé, il soit
demandé au designer de faire un logo gratuit “vite fait”, sous-entendu :
il ne lui faudra pas beaucoup de temps pour faire un visuel. La création
est donc parfois perçue comme un don, une simple respiration, et non
le fruit d’un travail réfléchi et chronophage source parfois de stress
pour son auteur. Le métier de designer est moins pris au sérieux que
certains métiers plus techniques. En effet, il est plus rarement demandé
à un autre corps de métier de travailler gratuitement. Par exemple, la
participation à des appels d’offres peut amener des designers à travailler
gratuitement sans promesse de rémunération.
De plus, les entreprises telles que les PME et TPE qui ont souvent un
budget serré pour leur communication, ne vont pas hésiter à le réduire
encore en cas de restriction budgétaire. Ainsi le budget pour la commu-
nication visuelle est vu par beaucoup d’entreprises comme option-
nel, non prioritaire. Pourtant, 94% des personnes déclarent que leurs
premières impressions sur une entreprise sont liées au design, à l’image
qu’elle véhicule1.
Des clients qui ne connaissent pas le métier

De nombreux clients font appel à un designer graphique car ils ne
maîtrisent pas les outils tels que Photoshop, mais ils n’ont pas forcément
1
Porte de la recherche
[ 25 ]
conscience de la valeur ajoutée que cet expert peut

leur apporter. Ils demandent un beau logo ou site
web sans se douter de toutes les étapes qu’implique
cette démarche créative. En effet, les clients ne se
rendent compte que du résultat fini et peuvent,
à tort, considérer le designer graphique comme
un simple prestataire de service, un outil chargé
de donner forme à leur demande en oubliant la
démarche personnalisée et spécifique qui leur est
apportée. En réalité, au final, le designer joue le
rôle de médiateur entre le milieu d’activité du client
et celui de l’art, il s’agit d’une réelle collaboration
avec l’entreprise.
Des outils qui permettent à tous de se croire

designer graphique
L’arrivée de nouveaux outils simples d’utilisations
n’a pas aidé à faire régresser les stéréotypes sur les
designers. Des outils tels que Canva permettent à
n’importe qui de créer gratuitement tous types de
visuels sans compétences graphiques préalables.
En effet, de plus en plus d’outils en ligne proposent
des modèles ou templates permettant de créer
rapidement des documents esthétiques. Les visuels
créés avec ces outils répondent généralement à
un besoin de “beau”, créé dans une grande majo-
rité sans réflexion profonde, ils ne permettent pas
à une entreprise de se démarquer en envoyant un
message fort et identitaire.
Exemple de modèles proposés gratuitement par Canva
[ 26 ]
4. L’APPRÉHENSION DES
DESIGNERS FACE À L’IA
La récente démocratisation d’outils d’intelligence artificielle dans la création
graphique a généré diverses appréhensions dans le métier de designer.
Pour comprendre au mieux les appréhensions et le ressenti des desi-

gners face à ces nouveaux outils, j’ai réalisé un sondage leur étant
destiné (cf annexe 1). J’ai pu recueillir la vision qu’ont différents profils de
designers sur l’impact de l’IA sur leur métier parmi un échantillon de 84
participants : dont 19 graphistes, 14 étudiants en design, 13 UI Designer -
Webdesigner, 9 Directeur Artistique, 6 UX Designer, 6 Motion Designer.
Analyse du questionnaire
72,6% des participants ont déjà utilisé une IA générative telle
72,6% que Midjourney, Dall-E ou ChatGPT et ont ainsi pu découvrir

cette technologie ainsi que ses différentes possibilités. D’après
des participants ont déjà les résultats du panell, 15,3% sont contre l’utilisation de l’IA
utilisé une IA générative dans leur métier et 6% n’y voient pas d’utilité. Quant
aux autres, 27,1% vont l’utiliser sans enthousiasme, s’ils n’ont
pas le choix et 38,8% pensent l’utiliser à l’avenir, “car c’est un super outil”.
Ainsi, on constate qu’une majorité des personnes sondées pense être
amenée à utiliser les IA génératives que ce soit par choix ou par effet de
masse.
[ 27 ]
Ensuite, à la question, “Avez-vous l’impression que votre métier est

menacé par l’arrivée des IA génératives ? “ ; Ils ont répondu pour 14,3%
“complètement”, pour 27,4% “beaucoup”, pour 39,3% “un peu” et pour
19% “pas du tout”. On peut comprendre qu’une petite majorité ne se
sente pas ou peu menacée directement par l’arrivée des IA. Cependant la
question divise les designers et ne les laissent pas indifférents.
En effet, la question “Quelles sont vos plus grandes inquiétudes à

propos de l’IA dans votre métier ?”, fait émerger des craintes et peurs
des participants à mon enquête.
“Que les TPE-PME utilisent encore davantage l’IA pour éviter

de passer par un professionnel (même si leurs résultats ne
seront pas forcément au rendez-vous).”
“Beaucoup se disent graphistes alors qu’ils n’en ont pas réel-

lement les compétences et cassent les prix du marché. L’IA
risque d’accentuer ce phénomène.”
La première peur émergente est le non-respect des droits des images

et des auteurs. Le manque de lois actuelles sur l’utilisation d’images
“non libres de droits” pour l’entraînement des IA pose question. Certains
parlent de “vol” et déplorent le fait que les œuvres d’artistes soient utili-
sées sans leur consentement.
L’inquiétude qui revient le plus dans les réponses au questionnaire

concerne l’incompréhension des personnes externes au métier de
designer. Une majorité des sondés a ainsi peur d’une amplification du
manque de reconnaissance de leur métier dans l’opinion publique et
indirectement de leurs clients. En donnant une impression de facilité,
l’IA peut appauvrir la vision de la valeur ajoutée ainsi que de la somme
de travail à fournir pour être un bon designer. Selon les personnes
sondées, cette incompréhension de la part des clients pourrait entraîner
une perte de demande et ainsi de revenus. Un des participants partage
son inquiétude : que “Les clients fassent appel à des IA qui sont gratuites
ou du moins, moins onéreuses. [...] Un grand nombre de clients auront du
mal à voir la qualité qu’apporte un graphiste et ne comprendront encore
moins le prix pour une création graphique.” Ceci traduit donc également
la peur d’être remplacé, que ce soit par des amateurs ou en interne dans
les entreprises avec des rendus moins qualitatifs, mais dont celles-ci se
satisferaient. Cela engendrerait non seulement une perte de qualité mais
également d’efficacité des supports qui sont produits.
[ 28 ]
Certains designers craignent aussi un

appauvrissement de la créativité humaine et
même “une disparition de la créativité”. En
effet, si le designer utilise sans cesse l’IA pour
créer, il pourra peut-être à terme oublier sa
propre créativité ou la mettre en sommeil.
Restera-t-il finalement du créatif dans son
processus de création ? Créer toujours plus
rapidement, mais à quel prix ? Cette automa-
tisation pourrait aussi accentuer l’“[...]unifor-
misation des images et styles graphiques”.
Tandis que certains ont peur du changement

et que leurs compétences acquises ne soient

plus utiles à l’avenir, d’autres sont inquiets
au sujet de la disparition complète de leur
métier. En effet, il ressort d’une autre ques-
tion du sondage que 74% pensent que certains
de leurs clients pourraient les remplacer
totalement si l’utilisation d’IA leur donnait
un résultat équivalent au leur. Cela fait d’au-
tant plus ressortir le manque de vision sur
la valeur ajoutée d’un designer par certains
clients. Mouvement ‘‘Notoaiart’’ sur instagram
En conclusion, les résultats du sondage

montrent que les designers ont des inquié- Le hashtag “#notoaiart” a été utilisé plus
tudes légitimes quant à l’impact de l’IA géné- de 11 900 fois par des artistes, illustrateurs
rative sur leur métier. et designers sur Instagram. Ce mouvement
ne montre pas forcément une opposition
complète à l’IA, mais a pour but de sensibi-
Mouvement No to AI generated
liser sur son utilisation dans la création de
À l’image de ces craintes, des designers contenus. Il amène à réfléchir sur les enjeux
prennent position et se montrent défavo- éthiques et l’utilisation d’œuvres pour l’entraî-
rables à l’utilisation d’intelligence artificielle nement des algorithmes est pointée du doigt.
dans leur métier. En décembre 2022 émerge
le mouvement “No to AI generated images’’
(BP non aux images générées par IA), slogan
de protestation créé pour lutter contre les
images générées par intelligence artificielle.
Le visuel a été partagé et relayé par de

nombreux designers sur les réseaux sociaux.
[ 29 ]
5. LÉGISLATION ET DROITS
D’AUTEURS FACE À L’IA
De nombreuses questions émergent au sujet des droits d’auteurs de ces
créations, est-ce l’intelligence artificielle ou la personne qui a initié la
création qui en est l’auteur ? De plus, l’utilisation d’images sans le consente-
ment de ses auteurs pose question sur la limite légale de ces créations.
Le droit d’auteur
Tout d’abord, rappelons ce qu’est le droit de paternité concernant le
droit d’auteur dans le cadre de la création d’œuvres graphiques. Le
droit de paternité est défini par l’article L121-1 du Code de la propriété
intellectuelle : “ L’auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa
qualité et de son œuvre. Ce droit est attaché à sa personne. Il est perpé-
tuel, inaliénable et imprescriptible ”. Le droit d’auteur protège les
œuvres automatiquement dès leur création. Le droit moral de l’auteur
donne à l’auteur le droit d’être reconnu comme le créateur de son
œuvre, ainsi que le droit de s’opposer à toute utilisation non autorisée
ou attribution de paternité erronée par un tiers.
Pour être protégée, une œuvre doit être considérée comme

originale et exprimer la personnalité de l’artiste. Dans le cadre
de la loi actuelle, il est important de préciser qu’un artiste est
une personne physique, et ne peut pas être une machine. Un
concept, un style ou un genre n’est pas directement protégé
par le droit d’auteur et peut ainsi être reproduit.
Des œuvres protégées pour nourrir les IA

Le manque de cadre légal sur l’exploitation des bases de données est
un sujet au cœur de nombreux débats. Bon nombre d’artistes sont
inquiets au sujet de l’utilisation d’œuvres dans les bases de données des
IA. En effet, de nombreuses images ont été récupérées d’internet pour
l’apprentissage de l’IA et utilisées sans le consentement des créateurs
de celles-ci.
[ 30 ]
En janvier 2023, trois artistes ont attaqué en justice

les services de générations d’images Midjourney,
DreamUp de DeviantArt et Stability. Ils accusent
ces entreprises d’avoir utilisé sans autorisation
des milliards d’images protégées par le droit d’au-
teur dans le but d’entraîner leurs algorithmes.
Outre les particuliers voyant leurs droits bafoués,
les banques d’images ne sont pas épargnées pour
autant. En février 2023, Getty image porte plainte
contre Stable Diffusion pour violation du droit
d’auteur. Elle affirme que l’entreprise Stability AI
a utilisé, sans son consentement, 12 millions de
ses œuvres pour nourrir sa base de données. Pour
générer une image, une IA entreprend une fouille

dans tout le contenu qu’elle a ingéré, elle décon-
struit pixel par pixel le contenu puis le reconstruit
pour proposer une œuvre. Cette nouvelle image ne
reproduit pas en théorie les éléments des œuvres
parcourues, mais en est inspirée. Pourtant, sur
des images générées par les premières versions de
Stable Diffusion, le logo de Getty image apparaît.
Droit d’auteur d’une œuvre générée par IA

Qui est l’auteur d’une œuvre générée par intelli-
gence artificielle, l’algorithme, son concepteur ou
l’artiste à l’initiative de la création ?
Pour Mario Klingemann, artiste allemand et pion-

nier dans la création d’œuvres d’art par IA, la ques-
tion ne laisse pas de doutes :
“Que ces réseaux neuronaux soient des

machines complexes n’en fait pas des
artistes. Un appareil photo est une machine
complexe […] mais personne ne se demande
s’il s’agit de l’artiste.” 1
Cependant la réponse n’est pas si simple.
1 CARRE, Marion ; SCHMITE, Valentin. Propos sur l’art et l’intelli-

gence artificielle, 2020
[ 31 ]
Aux États-Unis, la création d’une bande

dessinée déclarée comme ayant été
“assistée” par l’IA de Midjourney fait
débat dans le monde juridique. C’est en
septembre 2022, que la bande dessinée
Zarya of the Dawn créée par Kashtanova,
une photographe new-yorkaise, reçoit la
confirmation de son copyright sur l’en-
tièreté des éléments de l’œuvre. Après
avoir accepté le copyright, les juges sont
Bande dessinée Zarya of the Dawn, Kashtanov, 2022
revenus sur leur décision en février 2022,
remettant en question le rôle de l’IA dans le
procédé de création et annulant de ce fait la protection des images de la
bande dessinée. Ainsi, uniquement les textes, l’organisation et la mise en

page sont protégés, quant aux images, elles peuvent être librement utili-
sées de manière individuelle. L’autrice soutient pourtant que chacune de
ses images a été produite grâce à une démarche créative et mériterait
ainsi le droit à la protection.
Lorsqu’une œuvre est créée par l’IA “à la manière” d’un auteur ou d’une
œuvre, cela soulève d’autres interrogations en matière de droit. La légis-
lation européenne et américaine ne considère l’acte de contrefaçon que
lorsqu’une œuvre protégée précise est copiée sans autorisation préalable
de son titulaire.
Maître Eric Barbry, du cabinet Racine nous informe que :

«Ni un genre, ni un style, ni une idée ne sont protégeables par
le droit d’auteur»1
Une règlementation en pleine création

Se développant à toute vitesse, l’IA ne devrait pas tarder à être encadrée
par des lois sur la protection des données et la propriété intellectuelle.
Depuis le 20 octobre 2020, la Commission européenne réfléchit au sujet
des droits de propriété intellectuelle pour le développement des techno-
logies liées à l’intelligence artificielle. En attendant les nouvelles dispo-
sitions légales européennes, la CNIL a créé le 23 janvier 2023 un service
dédié à l’IA et va lancer des travaux sur les données d’apprentissage. Elle
va ainsi proposer les premières recommandations sur le sujet des bases
de données d’apprentissage.
1
BFM, Artistes contre Intelligence artificielle : la bataille des droits d’auteurs est
lancée, 2023
[ 32 ]
Une complémentarité
entre IA et designer
Bien que fondamentalement différents, l’intelligence

artificielle et les designers peuvent s’enrichir
mutuellement. La collaboration entre IA et designer peut
se révéler complémentaire à bien des égards, malgré
certaines limites de l’IA. Et si, au lieu de remplacer les
designers, l’IA pouvait être un outil leur permettant
de gagner du temps et d’améliorer l’efficacité dans le
processus de création ? Dans cette partie, nous allons
voir comment l’IA peut aider les designers graphiques
dans leur travail, tout en soulignant les limites de cette
technologie.
[ 33 ]
[ 33 ]
>> Introduction
@Midjourney
A. COMMENT L’IA
PEUT AIDER LES
DESIGNERS
Tout d’abord, nous allons essayer de comprendre comment l’in-
telligence artificielle peut aider les designers dans leur quotidien.
[ 34 ]
>> 02.Une complémentarité entre IA et designer
1. L’IA UN OUTIL DE
LIBÉRATION CRÉATIVE
Dans cette partie, nous allons découvrir comment l’IA peut devenir un
outil de libération créative pour les designers graphiques, en leur offrant de
nouvelles perspectives et de nouveaux défis.
La co-créativité Homme-Machine
Pour parler de créativité Homme-Machine, il faut déjà comprendre
ce que l’on entend par “créativité”. La créativité est le fait de chercher
des idées nouvelles dans un contexte donné et limité par des lois, des
ressources, des coûts et des valeurs.
Dans ses recherches, Margaret A. Boden1, chercheuse en sciences cogni-

tives et en intelligence artificielle, essaye de mieux cerner la créativité de
l’IA. Elle évoque ainsi trois formes de créativité :
» La créativité combinatoire : le fait de combiner plusieurs

idées existantes dans le but d’en créer une nouvelle.
» La créativité exploratoire : consiste à explorer les poten-

tiels non envisagés d’un cadre donné
» La créativité transformationnelle : la capacité à trans-

gresser, transformer ou révolutionner l’existant.
On parle souvent de personnalité créative quand on décrit les designers

graphiques, mais qu’est-ce que la créativité humaine ? Elle est décrite
comme étant “la capacité d’un individu à imaginer ou construire et
mettre en œuvre un concept neuf, un objet nouveau ou à découvrir une
solution originale à un problème”. Aujourd’hui, la notion de créativité
est reliée à un individu physique. C’est le concept de créer et d’imaginer
quelque chose de nouveau qui la caractérise. L’humain n’a pas de recette
toute faite pour être créatif. Sa créativité se révèle grâce à son imagina-
tion, dans la recherche et l’expérimentation.
1
The Creative mind, myths and mecanisms, 1990 ; Computer Models of Creativity,
2009
[ 35 ]
L’IA, une créativité propre

Si l’on se base sur la nouveauté comme caractère de créativité, l’IA
pourrait prétendre l’être. Pour Margaret A. Boden, “les ordinateurs s’en-
gagent effectivement dans des comportements créatifs et la créativité n’est
pas l’apanage de la seule intelligence humaine.” En créant des images
nouvelles, des textes, on se rend rapidement compte du potentiel créa-
tif de l’intelligence artificielle. En effet, cette forme de créativité qui
apprend par l’exemple peut être comparée à celle chez l’Homme.
Mais plutôt que de chercher à comparer la créativité de l’Homme et de

la machine, il serait intéressant de se demander comment combiner les
deux. Émilien Dereclenne1 propose ainsi une vision optimiste : « l’algo-
rithme, plutôt que de se substituer à la créativité humaine, peut lui servir
d’instrument amplificateur, de moyen exploratoire. » L’IA, à l’aide de sa

logique algorithmique, lance une nouvelle façon pour l’Homme d’aborder
la créativité.
Émilien Dereclenne ouvre l’esprit sur cette question d’une IA qui en

viendrait à dépasser l’Homme :
« Mais quand bien même l’IA serait plus créative que l’homme,
pourquoi croire que la créativité humaine disparaîtra, que
l’autonomie imaginative et réflexive de l’humain s’écroulera
sous le poids de l’excellence artificielle ? Avoir un ami ou un
partenaire créatif supprime-t-il notre créativité ? Pourquoi
envisager le remplacement, quand on pourrait parler, de
manière plus nuancée, d’évolution des modes opératoires de la
créativité humaine-technique ? »
Il suggère que l’avènement d’une IA créative ne signifie pas nécessaire-

ment la fin de la créativité humaine, mais plutôt une transformation des
processus créatifs.
Ainsi, la co-créativité homme-machine pourrait être considérée comme

l’évolution de la créativité humaine et de l’IA, en combinant le meilleur
des deux mondes pour produire des résultats encore plus novateurs.
1
Emilien Dereclenne, Doctorant en sciences cognitives et IA, musicien baroque et
entrepreneur. Welcome to The Jungle, L’intelligence artificielle peut-elle être plus
créative que l’homme ?, 2018
[ 36 ]
Des possibilités techniques décuplées

Les outils d’intelligence artificielle ouvrent de nouvelles perspectives
de création. Les limites techniques sont repoussées et permettent aux
designers graphiques d’appréhender leur travail d’une manière nouvelle.
Jusqu’ici, notre créativité était limitée non seulement à notre vécu
personnel, mais surtout à nos connaissances techniques et à notre intel-
ligence. L’IA ouvre alors le champ des possibles, on parle même d’une
“créativité augmentée”.
L’IA permet également de créer des images de qualités et uniques sans

nécessiter des compétences avancées dans le domaine.
La création de photographies “à la carte” offre de nouvelles perspec-

tives et restreint les contraintes matérielles et de temps. En effet, avec

l’IA générative il est possible de créer une image tel un photographe et
de choisir l’angle de vue, l’ouverture de l’objectif, la vitesse d’obturation
ou encore l’émotion des sujets sur la photographie. Cette alternative à
la réalisation d’un shooting traditionnel permet de contourner les défis
logistiques liés à la mobilisation d’une équipe composée notamment d’un
photographe, d’un directeur artistique, d’un maquilleur et de modèles,
ainsi que les coûts qui y sont associés.
Toutes les entreprises n’ont pas le budget pour créer des photos person-
nalisées et font ainsi appel à des banques d’images non personnalisées.
Elles se tournent alors vers des banques d’images génériques pour
répondre à leurs besoins. Cette pratique peut s’avérer chronophage, car
le designer doit passer de nombreuses heures à chercher des images
correspondant au projet du client. En choisissant de créer des images
sur mesure, le designer peut consacrer plus de temps à la conception
d’une image spécifiquement adaptée aux besoins de l’entreprise, et ainsi
obtenir un résultat personnalisé.
L’IA permet également de produire des images de qualité et originales

sans nécessiter des compétences avancées. En effet, grâce à l’automati-
sation de certaines tâches, comme le choix des paramètres de l’appareil
photo ou la retouche d’image, l’utilisateur peut créer des visuels uniques
et esthétiquement plaisants sans avoir une grande expertise dans le
domaine. Cela ouvre la porte à de nouvelles possibilités pour les entre-
prises ou les particuliers souhaitant créer des visuels personnalisés, mais
qui ne disposent pas des compétences ou des ressources nécessaires
pour le faire manuellement.
[ 37 ]
David Raichman a voulu tester le plein potentiel de

la création de photographies par IA en repoussant
les limites de cet outil au maximum. Suite à des
nuits entières passées à faire des tests, il a publié
une série photographique tel un ‘‘tour du monde’’
dans laquelle il parcourt le monde à travers diffé-
rents clichés créés par l’IA Midjourney. Quand il
crée ses photographies, il précise les moindres
détails de celles-ci, certaines de ses images ont
ainsi été réalisées avec des prompts de plus de 200
mots. En effet, lors de la création d’images, plus la
description est pointue et plus l’image sera qualita-
tive et complète. Il nous prouve qu’avec de l’entrai-
nement il est possible de créer des photographies

réalistes et pleines d’émotions.
Jérusalem,
15 août 2022,
Bangladesh,
@davethepreacher
25 août 2022,
@davethepreacher
Jérusalem,
5 sept. 2022
@davethepreacher
Lhasa, Tibet: Potala Palace

5 sept. 2022
@davethepreacher
[ 38 ]
Plus qu’un outil, une source d’inspiration

L’IA offre aux designers graphiques une nouvelle
source d’inspiration et de recherche créative. L’ins-
piration peut venir d’une image, d’une texture, d’un
mot, elle se compose de différentes idées pour en
faire germer une nouvelle dans notre esprit.
En effet, l’étape d’idéation créative peut être

enrichie grâce aux intelligences artificielles en
permettant de créer et de faire émerger rapide-
ment des concepts originaux. À l’aide de quelques
mots clés et d’une IA générative, il est facile,
par exemple, de créer rapidement une planche
tendance qui nous servira d’inspiration. L’IA va

créer de toute pièce des visuels que nous n’aurions
vus nulle part ailleurs et pourra faire émerger de
nouvelles idées. C’est une manière d’aborder des
perspectives novatrices et de voir notre probléma-
tique sous un autre point de vue.
De plus, l’IA peut aider le designer dans la phase de

recherche avec son client. Lors du brainstorming
avec le client, il peut être utile de pouvoir rapide-
ment tester différentes idées pour avoir un retour
en direct de celui-ci. L’IA pourra ainsi nous aider
à tester des concepts rapidement afin de savoir
si l’on va sur la bonne piste tout en nous faisant
gagner un temps précieux.
@Midjourney
[ 39 ]
2. AUGMENTATION DE
L’EFFICIENCE GRÂCE À L’IA
En plus de permettre de pousser davantage la créativité humaine, l’IA offre
un gain de temps dans les tâches se montrant chronophages au quotidien.
Automatisation des tâches chronophages

Les outils d’intelligence artificielle permettent d’automatiser une partie

des tâches des designers graphiques et ainsi d’augmenter fortement leur
efficience. Selon une étude menée par Adobe en 2018 :
«74% des sondés expliquent passer plus de la moitié de leur

temps à accomplir des tâches techniques non créatives”.
L’IA, grâce au machine learning, permet de supprimer les tâches chrono-

phages et répétitives, dans lesquelles le designer n’a pas une importante
valeur ajoutée. C’est notamment le cas de la retouche photo et du détou-
rage qui prend beaucoup de temps et gagne à être de plus en plus auto-
matisé. Cela fait plusieurs années que l’IA a intégré la suite Adobe dans le
but de simplifier la vie des designers. Prenons l’exemple d’Adobe juste-
ment, qui a été précurseur de l’automatisation en design, avec l’utilisa-
tion de scripts dans ses logiciels de création tels que Adobe Photoshop,
Illustrator et InDesign. Adobe a donc inclus la prise en charge de scripts
dans Photoshop dès 1994, permettant ainsi aux utilisateurs de créer des
scripts personnalisés pour automatiser des tâches, telles que la correc-
tion automatique de couleurs, l’ajout d’effets et la conversion de formats
de fichier.
Grâce aux avancées dans le développement de l’intelligence artificielle,

les outils de sélection d’images sont de plus en plus poussés. Il est
désormais possible de sélectionner automatiquement un sujet, un objet
ou encore l’arrière-plan et d’y faire des modifications spécifiques. Ces
avancées dans les outils de sélection d’images ont permis aux designers
et aux photographes de travailler plus rapidement et ne vont cesser de
s’améliorer dans les années à venir.
De la même manière, les tâches telles que la recherche d’image ou
[ 40 ]
encore le sous-titrage automatique des Il facilite la collaboration et garantit une

vidéos peuvent facilement être automatisées, homogénéité et une cohérence sur différents
permettant ainsi aux designers de se concen- supports.
trer sur des tâches plus créatives et straté-
giques. Ainsi, en évitant de faire les tâches En résumé, la simplification des processus
rébarbatives et cognitivement exigeantes, est rendue possible grâce aux outils créatifs
le designer graphique peut donc gagner en proposant des fonctionnalités clés en main,
temps et en efficacité. à l’automatisation des tâches répétitives et
cognitivement demandantes par le biais de
plugins et l’utilisation de l’intelligence artifi-
Simplification des processus cielle pour accélérer le développement des
L’heure est venue à la simplification des design systems. Ces avancées favorisent l’effi-
processus, les outils créatifs proposent de cacité, la productivité et la cohérence dans les
plus en plus des solutions clés en mains. Par projets de design et de développement.
exemple, l’outil Canva réunit de nombreuses
ressources photos, vidéos, illustratives, et
intègre à présent un système de généra-
tion d’image. L’objectif est de permettre aux
utilisateurs d’accomplir l’ensemble de leurs
tâches créatives au sein d’une seule plate-
forme ou d’un seul logiciel. Cette tendance Exemple du design system de decathlon
vise à faciliter la tâche des professionnels de

la création en leur offrant un accès simplifié
à une variété de ressources et d’outils au sein
d’un même environnement. Au lieu de jongler
entre différentes applications ou sites web, les
utilisateurs peuvent trouver tout ce dont ils
ont besoin au même endroit, ce qui leur fait
gagner du temps et de l’énergie.
Figma fait le même constat dans son article

“The future of design systems is automated”
publié en 2023, mettant en avant les plugins
qui permettent d’automatiser les tâches répé-
titives. Les plugins faisant gagner du temps
aux membres de la communauté sont les plus
populaires sur la plateforme. Ainsi, l’intelli-
gence artificielle peut également contribuer
à accélérer le développement des design
systems. Pour rappel, un design system est
un ensemble d’éléments graphiques et de
composants réutilisables qui servent de réfé-
rentiel aux designers et aux développeurs.
[ 41 ]
Tâches connexes d’organisation

En outre, l’automatisation peut également être
utilisée pour des tâches connexes telles que la
prise de notes pendant les réunions ou le résumé
de conversations. En analysant la conversation lors
d’une visioconférence, une intelligence artificielle
peut par exemple créer une liste de missions à faire
découlant de cet échange. Cela permet aux desi-
gners de gérer leur temps de manière plus efficace
et de se concentrer sur les aspects les plus impor-
tants de leur travail.
De plus, lors des tâches répétitives, il arrive

fréquemment que l’humain fasse des erreurs. L’IA

quant à elle, est particulièrement forte pour éviter
ce type d’erreurs. Effectivement, l’IA contraire-
ment à l’Homme ne se fatigue pas et ne perd pas sa
concentration suite à un effort prolongé.
En somme, l’automatisation des tâches chrono-

phages grâce à l’utilisation d’outils d’intelligence
artificielle permet aux designers graphiques de
gagner en efficience et en productivité tout en
se concentrant sur des missions plus stimulantes
avec des projets plus complexes et créatifs. Cela
leur permet également de garantir une qualité
constante et élevée dans leur travail.
Une aide à la prise de décision / UX amélioré

L’intelligence artificielle peut aider à la prise de
décision en fournissant des analyses approfondies
de données et en proposant des recommandations
éclairées. Par exemple, dans le domaine de l’expé-
rience utilisateur, l’IA peut aider à choisir l’inter-
face la plus appropriée pour un site web en analy-
sant les données d’utilisation et en suggérant des
améliorations.
Cependant, il est important de noter que la

prise de décision ne se résume pas uniquement
à suivre des règles mathématiques de manière
aveugle. Les décisions prises par l’IA doivent être
[ 42 ]
contextualisées et interprétées par des humains qui

sont capables d’évaluer les risques et les avantages
de chaque option.
Personnalisation de l’expérience
L’IA peut également être utilisée pour améliorer
l’expérience client sur les sites web. Les chatbots,
par exemple, peuvent répondre rapidement aux
questions des clients et leur fournir un service
personnalisé en utilisant les données collectées
par le système. Selon une étude d’Oberlo, 62%
des consommateurs sont prêts à utiliser l’IA pour
améliorer leur expérience. En effet, les clients sont

de plus en plus exigeants et sont particulièrement
sensibles à vivre une expérience personnalisée.
Un autre exemple de l’utilisation de l’IA pour

améliorer l’expérience client est la personnalisation
des images comme sur Netflix. Les ingénieurs de
la plateforme expliquent dans un article comment
les algorithmes de recommandations fonctionnent.1
Dans ce contexte, l’IA utilise les données collectées
sur les préférences de l’utilisateur pour proposer
des affiches de séries personnalisées selon leur
profil. Netflix utilise l’apprentissage automatique
pour recommander des films et séries susceptibles
de plaire à l’utilisateur, en se basant sur ce qu’il a
vu et ce qu’il a indiqué avoir aimé ou non. Cette
personnalisation pourrait également être étendue
aux synopsis et aux bandes-annonces.
Les visuels sont la première porte d’entrée dans

l’univers d’un contenu, ils sont décisifs dans le
choix des utilisateurs. Les ingénieurs collectent
de nombreuses informations pour savoir quand
un utilisateur clique sur une vignette, car elle lui
plaît, et quand il ne clique pas à cause de celle-ci.
Les designers vont parfois créer “jusqu’à quelques
douzaines” de visuels pour un même contenu. L’en-
semble des visuels doit couvrir différents thèmes
1
Netflix Technonlogy Blog. Artwork Personalization at Net-
flix, 2017
[ 43 ]
et différents styles esthétiques pour

être parlant pour le plus grand nombre.
L’élaboration d’un profil pour chaque
visionneur va déterminer l’image qui
sera le plus susceptible de lui plaire. Il
est possible de prendre en compte de
nombreux facteurs : les titres qu’il a
visionnés, le genre des titres, les interac-
tions du membre avec le titre spécifique,
son pays, ses préférences linguistiques,
Différentes miniatures de la série Stranger Things l’appareil que le membre utilise et même
l’heure de la journée et le jour de la
semaine.
Dans l’article, ils prennent l’exemple du film Good Will Hunting avec
2 miniatures différentes : A et B. L’algorithme sélectionne l’image B de
Robin Williams, un comédien célèbre, pour les profils appréciant la
comédie tout en sélectionnant l’image A d’un couple qui s’embrasse pour
les profils plus sensibles à la romance.
En réalisant des A/B test proposant les images classiques ou personnali-

sés, il a été confirmé que les images personnalisées ont un meilleur taux
de clic. L’amélioration de la personnalisation était d’autant plus impor-
tante dans les cas où l’utilisateur n’avait eu aucune interaction préalable
avec le titre.
Grâce à cette approche de personnalisation, la plateforme Netflix

améliore la rétention des utilisateurs et offre à ses clients une expé-
rience plus agréable et personnalisée.
[ 44 ]
Persona utilisateurs
Enfin, l’IA peut être utilisée pour créer des personas en utilisant des
outils tels que ChatGPT. En demandant à une IA de créer un persona
détaillé et en lui précisant le contexte du projet, elle pourra nous donner
une base complète et utilisable. Contrairement aux designers, l’IA peut
générer différents persona marketing d’utilisateurs en un temps record.
De plus, les intelligences artificielles peuvent désormais prendre en

compte les données démographiques et les comportements d’utilisa-
tion améliorant ainsi la précision et la pertinence des personas. Dans le
cas d’un site e-commerce, les données recueillies par celui-ci sont des
sources précieuses d’informations. Que ce soit le panier moyen, les habi-
tudes de consommation ou la fréquence et le contexte d’achats, ce sont
autant d’informations qui permettent de mieux comprendre les utilisa-

teurs. En analysant ces données, l’IA peut faire ressortir différents profils
types de consommateurs.
En somme, l’utilisation de l’IA pour créer des personas peut permettre de

gagner du temps et d’améliorer la qualité des personas en utilisant des
données plus nombreuses et plus précises. Tout cela permet de mieux
comprendre les besoins et les préférences des utilisateurs et de conce-
voir des produits et des services adaptés à leurs attentes.
Exemple de Persona utilisateur, Dribbble, @RH
[ 45 ]
>> Introduction
@Midjourney
B. LES LIMITES DE
L’IA
Après avoir vu ce que peut apporter l’IA aux designers
graphiques, il ne faut pas oublier que cette intelligence n’a pas
que des aspects positifs. Voyons ensemble les limites existantes
dans l’utilisation de cette technologie.
[ 46 ]
1. UN MANQUE D’HUMANITÉ
L’IA a encore du mal à rivaliser avec la richesse et la complexité de
l’expérience humaine.
L’absence de sensibilité et d’émotion

L’IA est encore loin de décoder l’ensemble des émotions humaines. Pour-
tant, comprendre et créer de l’émotion est l’un des enjeux principaux
dans la création graphique.
L’intelligence artificielle est faite pour traiter des problèmes de manière

logique et rationnelle. Elle ne peut pas ressentir d’émotions, elle se
contente d’essayer de les reconnaître, de les comprendre et de les simu-
ler. C’est sur ce sujet que se concentrent des chercheurs en intelligence
artificielle, domaine aussi appelé “informatique affective”. Ces cher-
cheurs travaillent notamment sur des algorithmes capables de détecter
et de reconnaître les émotions humaines en analysant des données telles
que les expressions faciales, les intonations vocales, les mouvements
corporels, et d’autres signaux non verbaux.
Les systèmes de reconnaissance faciale sont entraînés à partir de photos

d’expressions faciales prises dans des conditions idéales, avec des
expressions exagérées et dans un décor isolé. Lorsqu’ils sont utilisés face
à des données extraites d’environnement plus
naturel, l’efficacité de reconnaissance en est
fortement diminuée. En effet, les émotions
peuvent s’exprimer de manière subtile et
complexe dans la vie quotidienne. Rien que
pour exprimer un sentiment, il peut y avoir
plusieurs expressions faciales qu’il faudra
interpréter selon le contexte. Le contexte
justement se construit autour de la person-
nalité de la personne, de l’environnement qui
l’entoure, de ses expériences, de sa culture…
De manière plutôt instinctive, les humains
utilisent un large ensemble d’informations
pour exprimer ou comprendre les émotions.
[ 47 ]
Edward Sapir, célèbre linguiste et anthropologue, a écrit :
“Nous réagissons aux signaux corporels (…) en accord avec un

code secret et sophistiqué qui n’est écrit nulle part, n’est connu
de personne mais est compris par tous.”1
Ainsi, le design émotionnel prend en compte l’importance des émotions

dans notre expérience en tant que client. C’est une approche de concep-
tion centrée sur l’utilisateur, ayant pour but de créer, à travers l’utilisa-
tion d’un produit ou d’une interface, des émotions positives. L’objectif du
design émotionnel est de construire des expériences utilisateur qui sont
non seulement pratiques et fonctionnelles, mais aussi agréables, enga-
geantes et mémorables.
Prenons l’exemple de la solution d’emailing Mailchimp. Son ancien UX

designer a rédigé un livre intitulé “design émotionnel”. Sur sa page “tone
of voice”, la marque explique qu’elle est consciente des difficultés que
peuvent rencontrer les experts dans le domaine de l’email, et souhaite
apporter de l’empathie et de la joie dans leur travail. L’humour fait partie
de leur identité, ils souhaitent être clair dans leur discours. Le singe
présent dans le logo, Freddie, est la mascotte de la marque et “Freddie
fait toujours des clins d’œil parce qu’il a une super attitude”.
Mailchimp a bien compris l’importance du design émotionnel dans l’utili-

sation de sa plateforme. Un des exemples le plus connu est le “high five”
qui s’affiche juste après l’envoi d’une campagne.
Logo de Mailchimp
‘‘High fives’’ de Mailchimp
1
Bienvenue aux algorithmes qui décodent les gestes humains. Le nouvel Econo-
miste, 2016
[ 48 ]
Aarron Walter, Directeur de l’UX chez Mail-

chimp nous explique comment est venue
cette idée :
“Je suis devenu client de Mailchimp en

2005 et j’ai connu le sentiment d’en-
voyer une campagne et d’être totale-
ment stressé à ce sujet. Car une fois
que vous avez envoyé un e-mail, vous
ne pouvez plus vraiment l’aspirer. J’ai
toujours pensé : «Quelqu’un devrait
venir dans mon bureau et me féliciter

Exemple de post de réaction aux ‘’high fives’’ de
tout de suite ! Je le mérite.» En 2008, Mailchimp
j’ai donc rédigé un texte qui s’affichait

n’a jamais eu un commanditaire ne sachant
après l’envoi d’une campagne : «Bravo ! formuler précisément son besoin ? Aider à
Votre courriel est dans la file d’at- cadrer le besoin du client est essentiel afin de
tente»” 1 lui présenter les propositions les plus perti-
nentes pour son projet. La mission créative ne
Après la sortie de la première version de la correspond pas seulement à la réponse à un
main, il y a eu des retours immédiats sur les brief, il s’agit d’une réelle collaboration entre
réseaux sociaux, confirmant que l’émotion fait le designer et le client. Un projet né des diffé-
réagir. Ce “high five” est devenu un véritable rents allers-retours entre ceux-ci, il évolue en
symbole de la marque. Grâce à cette anima- fonction des échanges. C’est un vrai accom-
tion, l’entreprise crée un lien particulier avec pagnement personnalisé qu’offre le designer à
ses utilisateurs dont il vont se souvenir. son client.
Le designer joue le rôle de médiateur entre

La relation client propre aux designers le milieu d’activité du client et celui de l’art. Il
Malgré des évolutions d’IA en termes de agit comme un traducteur pour le client qui
relation client, celles-ci restent limitées et ne n’a pas le vocabulaire du design, les références
répondent pas à toutes les attentes que peut artistiques et les bonnes pratiques. Le desi-
avoir l’être humain. gner sait reformuler les envies du client pour
mieux comprendre son besoin. Par exemple,
En effet, les échanges avec le client sont un quand un client demande de grossir son logo,
aspect important du métier de designer. En il faut par là comprendre qu’il est fier de sa
dehors de son rôle créatif, le designer a égale- marque et souhaite la mettre en avant. Le
ment un rôle de conseil en accompagnant logo au lieu d’être grossi pourra être mis à
le client dans sa démarche de réflexion. Qui un endroit stratégique sur le visuel afin qu’il
attire l’œil sans prendre le pas sur le message
1
BLANDA, Sean. Invision. A mini oral history of the
Mailchimp high five, 2019 à transmettre.
[ 49 ]
La compréhension du contexte, l’empathie, la sensibilité humaine, sont

autant d’atouts humains qui font la différence. Certains clients sont prêts
à payer plus cher si la relation client est bonne, en effet travailler avec
quelqu’un qui nous comprend et se met à notre place rend la mission
plus facile et agréable. La citation de Benjamin Franklin en 1733, « l’amer-
tume de la faible qualité dure plus longtemps que la douceur du prix le plus
bas » continue à refléter l’état d’esprit des clients actuels.
Dans le rapport de l’étude, intitulé « Why Customer Satisfaction is No

Longer Good Enough »1, il est révélé que 81 % des consommateurs
seraient disposés à dépenser davantage pour bénéficier d’une expé-
rience client de meilleure qualité. Ainsi, 40% des clients aimeraient
une amélioration de l’expérience générale, et 35 % recherchent un
accès rapide à l’information et l’occasion de poser plus facilement des

questions. C’est notamment pour cette raison que les chatbots sont
de plus en plus utilisés sur les sites internet. Ces chatbots conversent
avec les utilisateurs pour améliorer leur expérience client. Leur aide
permet d’apporter des réponses aux questions les plus posées par les
internautes et de les mettre en relation avec un humain lorsqu’il y en
a le besoin. Malgré leur utilité pour de nombreuses tâches précises de
service client, ils ne peuvent pas encore remplacer complètement l’inte-
raction humaine.
Une absence de prise d’initiative de l’IA

Bien que l’IA ait fait des progrès impressionnants ces dernières années,
elle est encore loin d’être capable de rivaliser avec l’imagination et la
créativité humaine. Une des plus grosses limites de l’intelligence artifi-
cielle, et non des moindres, est qu’elle ne peut pas créer à partir de rien.
L’IA peut générer des idées, des images et des textes, mais cela se fait
en utilisant des algorithmes avec des règles prédéfinies. Contrairement
aux humains, elle ne peut pas concevoir quelque chose de complètement
nouveau et original sans qu’il n’y ait déjà eu un modèle ou une base de
données préexistante.
Ainsi, toute décision de la machine est le résultat d’un entraînement

et non d’une prise d’initiative. Pour comprendre, rien de mieux que
l’exemple des voitures autonomes qui peuvent être mise en face de
situation de danger. Dans ce cas, elle devra parfois faire des choix
éthiques et humains. Là où l’Homme pourra faire des choix contraires
aux règles morales, par exemple dans le but de sauver sa vie ou celles
des autres, la machine se contera de faire ce qu’on lui a appris.
1
Étude Oracle, Why Customer Satisfaction is No Longer Good Enough
[ 50 ]
“Le dilemme du tramway” créé par Philippa Foot

permet de mieux comprendre cet aspect. Il s’agit
d’une expérience de pensée souvent utilisée en
éthique pour explorer les choix moraux dans les
situations où il n’y a pas de solutions parfaites.
Ce scénario suppose que vous êtes le conduc-
teur d’un tramway et que vous devez choisir entre
laisser le tramway tuer cinq travailleurs sur la voie
principale ou détourner le tramway et tuer une
seule personne sur la voie secondaire. Le dilemme
du tramway soulève des questions sur la façon
dont les machines peuvent prendre des déci-
sions éthiques dans des situations de crise et il est
souvent utilisé pour évoquer les limites de l’IA dans

les prises de décisions.
Dans le domaine créatif, l’intelligence artificielle

a besoin que l’Homme lui fournisse un concept
préalable pour donner un résultat. Sans inter-
vention de l’humain, l’IA ne crée pas, son sens de
la prise d’initiative est donc inexistant. Lorsqu’un
designer cherche à répondre à une problématique,
il va trouver un concept créatif qu’il aura créé à
travers ses différentes idées et recherches. Lorsque
l’on crée une image sur Midjourney par exemple,
l’on doit rentrer au minimum des mots clés pour
lancer la création. Le visuel créé dépendra donc
des informations qu’on aura donné à l’intelli-
gence artificielle. Si on fournit uniquement deux
mots-clés comme “photo chien” à un générateur
d’images, on ne peut pas attendre de la machine de
créer une image que l’on considère créative. Ainsi,
pour créer un visuel original, il faut qu’il y ait une
démarche créative derrière. En d’autres termes il
faut savoir vers où l’on souhaite aller pour que la
part de hasard généré par l’IA soit placée au bon
endroit. L’IA reste un outil au service du créatif qui
l’utilise, mais ne remplace en rien sa créativité. Au
contraire, les artistes humains eux sont capables de
créer des œuvres d’art originales à partir de rien,
en utilisant leur imagination, leur intuition et leur
inspiration.
[ 51 ]
2. LES LIMITES TECHNIQUES

DE L’IA
En plus des limites relationnelles et émotionnelles de l’IA, celle-ci comporte
des limites plus techniques relatives aux données et aux modèles
d’apprentissages.
Le biais algorithmique
L’intelligence artificielle apprend à partir de bases de données qu’on

lui fournit. Pourtant, ces données sont elles-mêmes subjectives et
provoquent une distorsion de la réalité. Ainsi, l’intelligence artificielle
reflète et renforce non seulement les biais des données utilisées pour
son apprentissage, mais également ceux de ses concepteurs.
Selon Wikipedia, un biais algorithmique est “le fait que le résultat d’un
algorithme d’apprentissage ne soit pas neutre, loyal ou équitable”. Dans
les résultats de recherche, ce biais peut refléter des préjugés racistes,
sexistes, sociaux ou culturels, même si les données sont censées être
neutres. Les biais de l’IA sont simplement le reflet des biais humains.
Une étude de l’institut AI Now de 2018 nous montre que la surreprésen-

tation des hommes blancs chez les data scientists et la sous représenta-
tion des minorités peut amener les data scientists à ne pas suffisamment
prendre en considération les biais et les discriminations. Ce phénomène
est appelé le biais des programmeurs.
Lorsque l’IA est utilisée dans des prises de décisions, les biais algorith-
miques aussi appelés biais statistiques peuvent avoir des lourdes consé-
quences. En 2015, Amazon a ainsi arrêté d’utiliser une IA pour son aide
au recrutement, car elle engendrait une discrimination sexiste envers les
femmes. Une majorité d’hommes avait été embauché par le passé, l’IA a
donc conclu que les hommes étaient davantage faits pour le poste.
De la même façon, les minorités et personnes peu représentées dans les

bases de données ne le seront pas dans les contenus créés par l’intelli-
gence artificielle. C’est par exemple le cas des bases de données pour la
reconnaissance faciale, en majorité composées de personnes à la peau
blanche, celles-ci sont facilement reconnues. À l’inverse, les photos de
[ 52 ]
personnes de couleurs sont peu représentées,

l’algorithme se trompe alors plus fréquemment sur
celles-ci dû à un manque d’entraînement. De plus,
le programmeur peut ajouter inconsciemment des
biais cognitifs aux algorithmes.
Etienne Mineur aborde également ce sujet dans le

podcast Design MasterClass “Machine Machine :
Design & IA”. Il se rend compte, en générant des
images d’hommes et de femmes, que les femmes
ont systématiquement un décolleté. C’est le reflet
de la représentation de la femme dans les images
que l’on peut trouver sur internet. Il faut, pour
contrer ces biais, ajouter un paramètre supplémen-
taire à la demande initiale.
Finalement, l’IA ne peut pas remplacer le jugement

humain, une intervention de l’Homme reste néces-
saire pour surveiller et corriger les biais.
@Midjourney
Quel avenir pour le
métier de designer ?
Le métier de designer graphique est en constante

évolution et l’arrivée de l’IA n’a fait que renforcer cette
tendance. Même si elle ne va pas entièrement supprimer
le métier de designer graphique, elle va indéniablement
l’impacter et le transformer. Dans cette partie, nous allons
explorer l’avenir du design graphique à l’ère de l’IA, tout
en mettant en lumière les points de vigilance à prendre
en compte. Enfin, nous verrons comment les designers
peuvent utiliser concrètement l’IA dans leur travail pour
créer de la valeur ajoutée durant tout le long de leur
processus de création.
[ 54 ]
[ 54 ]
>> Introduction
@Midjourney
A. L’AVENIR DU
DESIGN GRAPHIQUE
Quel est l’avenir du design graphique avec l’arrivée de l’IA ?
Découvrez les tendances et les évolutions à venir dans ce secteur.
[ 55 ]
>> 03.L’avenir du design graphique
1. TRANSFORMATION DU
MÉTIER
L’arrivée de l’intelligence artificielle dans le domaine du design graphique va
transformer progressivement le métier de designer. Bien que l’IA ne puisse
pas encore remplacer complètement la créativité humaine, nous avons vu
précédemment comment elle peut automatiser certaines tâches et
améliorer l’efficacité du processus de création. Cependant, cette évolution
technologique ne se fait pas sans conséquences sur l’emploi. En effet, la

réduction du temps de travail induite par l’automatisation risque d’entraîner
une diminution de la demande de main-d’œuvre, ce qui peut poser des défis
pour l’avenir du métier de designer.
Le métier de designer n’a cessé d’évoluer et continuera à se transformer

au fil du temps. Comme lors de la révolution numérique et l’apparition
de la PAO, les méthodes de travail des designers graphiques sont vouées
à changer au fur et à mesure des transformations numériques et de ses
usages. Prenons l’exemple du design web, le nom webdesigner laisse peu
à peu sa place à la dénomination UI/UX Designers. Ces spécialisations
sont apparues suite à la croissance et à la complexification du web, mais
aussi en raison de l’importance croissante de l’expérience utilisateur et
de l’optimisation des plateformes web et mobiles. Ce n’est pas seulement
l’appellation des métiers qui change, mais également les compétences
qui y sont liées.
L’IA va ainsi s’installer durablement dans le workflow des designers

graphiques, offrant des opportunités pour gagner du temps et améliorer
l’efficacité grâce à l’automatisation des tâches chronophages. En mini-
misant les compétences requises pour créer des visuels, la créativité et
l’imagination vont être exacerbé. Ainsi, les designers ont tout intérêt à
utiliser des outils d’intelligence artificielle dans leur processus de créa-
tion. L’IA va s’intégrer naturellement dans tous les outils utilisés dans ce
métier et il sera difficile d’échapper à son utilisation. Cependant, il est
légitime de se demander jusqu’où va aller cette transformation du métier
et de ses composantes.
[ 56 ]
2. UN NOUVEAU RAPPORT
AVEC LES CLIENTS
Une nouvelle manière d’aborder le métier de designer graphique pourrait
émerger. L’IA va transformer le métier en approfondissant certaines compé-
tences et en modifiant le rôle des designers. La sous traitance des tâches
chronophages et peu créatives à l’IA permet de libérer du temps pour les
tâches à valeur ajoutée.
Les compétences relationnelles, aussi

connues sous le terme de ‘‘soft skills’’, vont
ainsi pouvoir se développer en prenant une
place de plus en plus importante dans le
métier. Les soft skills telles que la capacité à
travailler en équipe, à écouter, à comprendre
les retours, ou encore à gérer les relations
avec les clients, seront de plus en plus valori-
sées. L’intelligence relationnelle et émotion-
nelle est l’atout fondamental du designer
face à l’IA. En effet, sa capacité à comprendre
de la stratégie et la définition de la direction
les émotions et les langages verbaux et non
artistique. En d’autres termes, les designers
verbaux de ses interlocuteurs, ainsi qu’à créer
graphiques seront plus des conseillers straté-
des liens avec eux, reste primordiale dans le
giques pour leurs clients que de simples créa-
métier. La relation humaine est au cœur de la
teurs de designs. L’utilisation de l’IA permettra
création graphique, et l’IA ne peut pas entiè-
de se concentrer sur ces nouvelles missions,
rement la remplacer.
tout en valorisant les compétences relation-
nelles et les soft skills indispensables pour
Le métier de designer graphique va aussi
conseiller les clients.
progressivement évoluer vers des missions de
conseil client et d’accompagnement dans la
Avec l’émergence de l’intelligence artificielle,
définition de la stratégie de communication
certains clients n’ayant pas conscience de la
visuelle de l’entreprise. Les designers devront
plus-value d’un designer vont tout simple-
être d’autant plus capables de comprendre
ment cesser de faire appel à eux. Nous pour-
les enjeux de l’entreprise et ses objectifs de
rons assister à la perte d’une catégorie de
communication pour lui proposer des solu-
clients à “bas potentiel” au profit de clients
tions adaptées. La création graphique sera
mieux ciblés. Un tri automatique de la clien-
donc de moins en moins le cœur du métier,
tèle pourrait se faire de cette façon.
qui devra se concentrer sur la conception
[ 57 ]
3. UNE ACCENTUATION DE
L’AMATEURISME
L’essor de l’IA dans le monde du design graphique rend de plus en plus
accessible la création de designs esthétiques à des personnes sans compé-
tences préalables. Cela peut sembler bénéfique pour certains, mais soulève
des problématiques dans le milieu professionnel.
L’intelligence artificielle permet à n’importe qui

de prendre en main facilement des outils de créa-
tion graphique, sans compétences préalables. Ce
phénomène va accentuer davantage l’amateurisme
dans le milieu du design graphique. En effet, de
plus en plus de personnes non initiées utilisent l’IA
sans avoir de notions de graphisme et de design.
Pour se démarquer, les designers graphiques vont
devoir redoubler de créativité et prouver leur
expertise. Il n’y aura à l’avenir plus la place aux
designers “moyens”, le métier va devenir encore
plus exigeant. Ceux qui n’apportent pas de plus-va-
lue au client, en comparaison à une intelligence
artificielle, risqueront de se faire remplacer peu à
peu. Créer des interfaces et des visuels esthétiques
ne suffira plus à satisfaire les clients.
En somme, l’IA va impacter le métier de designer

graphique en renforçant l’exigence pour les profes-
sionnels. Les designers graphiques doivent être
en mesure de fournir une véritable valeur ajoutée
à leurs clients en étant des conseillers straté-
giques plutôt que de simples créateurs de designs
esthétiques.
[ 58 ]
>> Introduction
@Midjourney
B. POINTS DE
VIGILANCES
L’IA est sur le point de transformer profondément le métier,
cependant, il est crucial de rester conscient des défis et des
questions éthiques qu’elle soulève. En examinant attentivement
ces points de vigilance, nous pourront être mieux préparés à
comprendre les enjeux que l’intelligence artificielle présente pour
les designers graphiques.
[ 59 ]
1. L’IA, UN DOMAINE À
ENCADRER
Ces dernières années, l’intelligence artificielle a connu une évolution accé-
lérée. Cependant, avec la disponibilité rapide des outils d’IA génératives au
grand public, les lois encadrant leur développement n’ont pas réussi à suivre
le rythme. Pourtant, l’utilisation de cette technologie affecte directement les
créateurs et un encadrement législatif est plus que nécessaire, notamment
dans un contexte professionnel et commercial.
La réglementation du contenu et de l’uti- automatique, appelé «MUSE». En publiant des

lisation des bases de données est devenue ensembles de données ouvertes, les orga-
une priorité. L’utilisation de l’open source est nisations encouragent la collaboration et
une option possible, car cela rend le code l’innovation dans le domaine de l’intelligence
source accessible à tous. De plus, exiger une artificielle, tout en contribuant à la transpa-
transparence des données utilisées par un rence et à l’éthique dans l’utilisation de ces
outil d’intelligence artificielle permettrait de technologies.
vérifier l’éthique de celles-ci. En effet, cela
donnerait la possibilité de vérifier la diversité Il serait par ailleurs intéressant d’imposer une
de ses données, afin d’éviter les biais algo- transparence sur l’origine de la création des
rithmique qui y sont liées. De nombreuses œuvres. En effet, il est plus honnête d’indi-
organisations ont commencé à publier des quer lorsqu’une création a été réalisée à l’aide
ensembles de données ouvertes spécifique- de l’IA ou entièrement par celle-ci. Certains
ment destinées à l’entraînement de modèles créateurs et communicants utilisent des
d’IA, c’est ce qu’on appelle l’open data. Ces images générées par l’intelligence artificielle
ensembles de données sont accessibles à et le précisent de leur propre initiative à leur
tous, sans restriction de licence ou de coût, communauté pour plus de transparence. Une
ce qui permet aux développeurs et cher- loi pourrait rendre obligatoire une mention
cheurs d’accéder à des données de haute écrite sur le visuel lorsqu’une IA a été utili-
qualité pour entraîner des modèles d’IA plus sée pour la création, par exemple “Image
performants. Par exemple, Google a publié créée à l’aide d’une intelligence artificielle”.
un ensemble de données pour l’apprentis- De cette manière, tout comme nous spéci-
sage de la reconnaissance d’objets dans les fions la provenance d’une image provenant
images, appelé «Open Images». De même, d’une banque d’images, nous apporterions une
Facebook a publié un ensemble de données information claire sur l’utilisation de l’IA.
pour l’apprentissage de la traduction
[ 60 ]
2. UN APPAUVRISSEMENT
GRAPHIQUE À LONG TERME
Les IA génératives créent à partir d’une base de données de création exis-
tantes, réalisées par des illustrateurs, peintres, photographes, designers…
Sans eux, pas de données. Mais qu’arrivera-t-il quand la majorité des
données sur lequel se base l’intelligence artificielle aura été créée par
celle-ci ?
Selon un rapport d’experts, 90% des contenus en ligne pourraient être

générés de manière artificielle d’ici 2026.1 Nous pouvons penser que
nous allons inévitablement assister à un appauvrissement graphique des
visuels qui vont être créés dans les années à venir. Bien que les IA soient
capables de produire des images à une vitesse et une précision jamais
atteintes auparavant, cela pourrait avoir des conséquences à long terme
sur la qualité et la diversité des créations graphiques.
Le premier effet négatif potentiel est la restriction des images produites.
Les IA ont besoin d’un grand nombre d’exemples pour apprendre et
reproduire des motifs et des styles, ce qui signifie que les images géné-
rées peuvent finir par se ressembler. Par conséquent, la diversité des
créations graphiques pourrait être compromise, ce qui pourrait nuire à
l’originalité et à la fraîcheur des idées.
De plus, le vocabulaire restreint et répétitif pourrait également poser un

problème. Les données utilisées pour alimenter les intelligences artifi-
cielles les limitent. Si elles n’ont pas été formées avec un large éventail de
styles et de motifs, elles risquent de produire des créations restreintes
dans leur vocabulaire graphique. Cela pourrait finir par entraîner une
certaine lassitude et répétition dans les créations qui manquerait de
surprise et d’originalité.
Enfin, l’utilisation de recommandations d’IA pour guider les choix de

création pourrait également restreindre la créativité. Les algorithmes de
recommandation ont tendance à favoriser les choix populaires ou simi-
laires à ceux qui ont déjà été réalisés, ce qui pourrait entraîner une sorte
de boucle où les créations se répètent sans surprises ni innovations.
1
Rapport du laboratoire d’innovation d’Europol, 2022
[ 61 ]
>> Introduction
@Midjourney
C. COMMENT
UTILISER L’IA EN
TANT QUE DESIGNER
GRAPHIQUE
Avec l’avancée de l’intelligence artificielle et du deep learning,
les designers sont aujourd’hui confrontés à un nouveau défi :
comment utiliser ces technologies pour améliorer leur travail
plutôt que d’être remplacés par celles-ci ? Prenons le cas d’un
freelance, créant des sites web pour ses clients, comment peut-il
mettre à profit l’IA dans son quotidien ?
[ 62 ]
1. MODE D’EMPLOI :
COMMENT CRÉER UN SITE
AVEC IA
Découvrez à travers ce mode d’emploi comment l’IA peut être utilisée pour
concevoir un site web rapidement et facilement. Durant toute la phase de
conception, il est possible de tirer parti de différents outils pour améliorer
son processus de création.
Il est important de noter que l’utilisation de l’IA en tant qu’outil dans

votre processus de conception graphique doit toujours être accompagné
d’un discernement et d’un sens critique. L’IA peut fournir des sugges-
tions et des idées, mais en fin de compte, c’est vous en tant que designer
qui avez la capacité de prendre des décisions éclairées et de donner
votre propre touche créative à votre travail.
Analyse et compréhension du contexte

Tout début de projet commence par la compréhension approfondie du
contexte de celui-ci. Comprendre les cibles, le domaine d’expertise du
client, le contexte géographique sont autant de clés pour réaliser un
projet personnalisé en tant que designer. Toute stratégie créative néces-
site de comprendre le contexte d’un projet de manière globale pour
proposer la solution la plus adaptée.
Dans la phase de benchmark, l’intelligence artificielle peut aider à analy-

ser la concurrence de son client. Par exemple, elle peut rapidement lister
les 5 concurrents principaux dans le domaine de l’entreprise cliente
et examiner leurs sites web, réseaux sociaux et toutes les publications
à leurs sujets. Cela peut fournir des informations précieuses sur les
tendances du marché, les forces et faiblesses des concurrents, ainsi que
sur les opportunités à saisir pour se démarquer.
De la même manière, l’IA peut aider à mieux comprendre l’univers d’ex-

pertise de son client. En tant que designer, il est possible de se retrouver
démunit face au vocabulaire d’une expertise client que l’on ne maîtrise
[ 63 ]
pas. Quelques secondes suffisent à l’intelligence artificielle pour vous

expliquer les spécificités sur un métier donné, sur le marché d’une
entreprise et peut le champ sémantique qui lui est propre. Ces informa-
tions seront précieuses lors des différents échanges avec le client, ses
utilisateurs et lors de la recherche et créations d’images.
Brainstorming
Les outils de génération de texte tel que ChatGPT peuvent se révéler
comme de réels assistants pour les designers. En effet, ChatGPT peut
produire beaucoup de texte sur n’importe quel sujet, il peut donc être
pertinent de l’interroger pour faire émerger des idées auxquelles nous
n’aurions pas pensé et les amener
plus loin. Il peut aider celui-ci à

faire un brainstorming créatif en
peu de temps, à faire un persona et
bien plus encore.
En cas de page blanche, le géné-

rateur de texte peut nous propo-
ser des idées afin de débloquer
la situation : demandez lui par
exemple comment illustrer le
header d’un site e-commerce de Extrait d’un exemple d’idées d’illustrations
produits de beautés bio. proprosé par ChatGPT
Exemple d’interface générées sur le thème Artdeco Générer un moodboard

avec Midjourney
Créer un moodboard est une tâche très chro-
nophage, chercher chaque image sur différents
sites comme Pinterest ou encore Dribbble
prend plus de temps qu’il n’y parait. Avec un
générateur d’image, vous pouvez générer un
moodboard en quelques secondes. En premier
temps, Pinterest permet de trouver de l’inspi-
ration et de rebondir d’une idée à l’autre. Une
fois votre idée affinée, passez là sur un géné-
rateur d’images pour approfondir le concept et
faire des associations d’idées. Les générateurs
d’images feront ressortir des visuels et des
combinaisons que vous n’auriez vues nulle part
ailleurs.
[ 64 ]
Lorsqu’ils sont utilisés ensemble, ces

différents outils sont complémentaires
et améliorent la qualité des planches
d’inspiration.
Choix des couleurs

Choisir la palette de couleur est une étape
importante et technique. Utilisez l’IA pour
vous aider dans le choix des couleurs. Il existe
Extraction de couleurs d’une image sur Coolors.co
des outils alimentés par l’IA qui peuvent
analyser des images, extraire les palettes de
couleurs dominantes et suggérer des combinaisons harmonieuses. Cela
vous permet de gagner du temps et d’explorer des options de couleurs

inspirantes pour vos projets de design graphique.
Photos & illustration

La retouche d’images par intelligence
artificielle permet d’améliorer les images
grâce à l’analyse de millions d’autres, afin
d’obtenir le rendu que l’outil considère
comme le plus esthétique. Par exemple,
remove.bg permet de supprimer l’ar-
rière-plan d’une photo. D’autres outils
comme snapedit.app permettent de
retoucher rapidement une photo en y
supprimant des objets ou personnes.
Les logiciels de la suite créative Adobe Exemple de texture générée avec
Mijourney
quant à eux, utilisent l’IA Adobe Sensei.
Cette technologie permet notamment
le célèbre remplissage d’après le contenu sur Photoshop, la sélection
automatique de sujets ou encore l’ajustement automatique des couleurs
dans Premiere Pro. On parle souvent de l’IA pour la génération de photo-
graphies, mais vous pouvez aussi l’utiliser pour créer des motifs et des
textures sur mesure pour vos projets.
Rédiger du contenu pour le site

Dans la phase de conception des maquettes du site, du texte généré par
IA peut remplacer les textes factices. Dans la phase de structuration de
la page, le “Lorem ipsum” permet de ne se concentrer que sur la struc-
ture de la page et non sur son contenu. Cependant, lors de la réalisation
[ 65 ]
des maquettes, ajouter du texte rédigé par l’intelligence artificielle

permettra au client de se projeter plus facilement et d’appréhender le
design dans son ensemble. Il est important de noter que l’idéal est d’in-
tégrer le texte final fourni par le client ou par un prestataire SEO. Cela
permet d’avoir un contexte réaliste pour la conception, mais le vrai
contenu peut parfois prendre du temps à être donné au designer. En
attendant, l’utilisation de texte généré par une IA peut aider à fournir
une représentation plus précise de la maquette en offrant une vision
globale du projet.
Prise de note et organisation

En tant que designer, une partie du temps de travail est accordée aux
échanges avec les différentes parties prenantes d’un projet, qu’ils aient
lieux à distance ou en présentiel. Les réunions se déroulent avec le
client mais aussi avec les différents collaborateurs qu’il peut avoir :
développeur web, rédacteur web, community manager, etc. Lors de ces
réunions, l’IA peut agir comme un précieux assistant. En effet, difficile
d’être à l’écoute du client, de prendre des notes et de faire en parallèle
d’éventuelles modifications en direct.
Une intelligence artificielle peut écouter la réunion, faire un résumé

de celle-ci, et dresser la liste des tâches à faire ou éléments à modifier
qui en découlent. Elle peut également archiver un enregistrement de la
réunion et répertorier quel interlocuteur a dit quoi et à quel moment.
En tant que designer, vous êtes ainsi complètement à l’écoute de votre
client sans perdre de temps à noter ce dont vous êtes en train de
discuter.
@Midjourney
[ 66 ]
2. RECOMMANDATIONS
Alors que les possibilités offertes par l’IA dans ce domaine semblent infinies,
il est essentiel de garder à l’esprit certaines recommandations générales
pour apprécier pleinement son potentiel.
Générer des prompts efficaces

Pour utiliser les IA génératives au maximum de leurs capacités, il faut
apprendre à maîtriser les prompts. Pour cela, rien de mieux que de
tester par soi-même pour mieux comprendre comment fonctionne l’IA.

Aux premiers essais, il est difficile de trouver la phrase parfaite pour
décrire ce que l’on imagine. Pour gagner du temps, il existe de plus en
plus d’outils d’aide à la génération de prompts. Ces outils donnent des
idées de paramètres à ajouter et montre des exemples de prompt avec
leur résultat.
Pour créer des images intéressantes, il faut lui indiquer le maximum

d’informations et de critères. Dans votre prompt précisez si vous souhai-
tez une photo, une illustration, un rendu 3D ou tout autre type de rendu.
Indiquez, la ou les couleurs dominantes, l’angle de vue ou encore l’ob-
jectif photo. Il y a énormément de paramètres possibles permettant de
créer des rendus uniques. Il ne faut pas oublier que tous les détails que
vous ne donnez pas seront inventés et décidés par l’IA.
Pour obtenir davantage de variations, il est possible de

remplacer certains termes par leurs synonymes.
Des moteurs de recherches comme Lexica regroupe des

œuvres créés à partir d’IA avec leurs prompts associés. Ce
type de site aide à comprendre les prompts tout en donnant
des exemples concrets d’utilisation. De plus, si une image
trouvée sur internet nous plaît, il est maintenant possible
de demander à une IA de nous décrire le prompt qui aurait
pu être utilisé pour la générer. De cette manière il est facile
d’avoir des exemples de prompts qui ressemble à ce que l’on
Moteur de recherche lexica souhaite.
[ 67 ]
Introduire du contexte
En envoyant un prompt à un générateur de texte il est important de
toujours ajouter un contexte à sa requête. Il permet à l’IA de mieux
comprendre la situation et de produire des résultats plus précis et
pertinents. Sans contexte, le modèle peut générer des réponses qui sont
hors sujet ou peu informatives. En fournissant du contexte, vous pouvez
aider l’intelligence artificielle à mieux cibler sa réponse et à gagner du
temps en évitant les suppositions inutiles. Il permet d’adapter le ton et
le style de la réponse en fonction de la situation. Par exemple, si vous lui
demandez de générer du texte pour un article de presse, il peut utiliser
un ton formel et une structure de phrase spécifique. Il est ainsi possible
de lui demander de réagir comme un designer graphique ou comme
développeur web, il emploiera alors des termes experts et spécifique au

métier dont il est question.
Donner un exemple de réponse

Donner un exemple de réponse à une intelligence artificielle permet
d’améliorer la qualité des résultats. Par exemple, si l’on souhaite créer
un persona, il est plus efficace de fournir à l’IA une liste des différents
critères dont on a besoin, accompagnée d’exemples de réponses corres-
pondantes. En fournissant un exemple concret, l’IA comprendra précisé-
ment ce qui est attendu d’elle et pourra fournir un résultat d’autant plus
pertinent et adapté à la situation. En effet, en montrant des exemples de
réponses attendues pour chaque critère, on établit une référence claire
pour l’IA, qui peut ensuite utiliser ces exemples comme base pour géné-
rer des réponses similaires et cohérentes.
Exploiter des IA personnelles

À l’avenir il deviendra probablement courant de créer sa propre IA
personnelle. Une IA personnelle est une application d’intelligence arti-
ficielle entraînée avec une base de données propre. Cette approche
permet de personnaliser les fonctionnalités de l’IA en fonction de ses
propres besoins, préférences et surtout à partir de son propre style.
En ayant été entraîné sur ses créations graphiques, l’intelligence artifi-
cielle sera en mesure de reproduire notre style et la touche artistique
qui nous est spécifique. Cette manière d’utiliser l’IA permet de contrer
la non-personnalisation des bases de données classiques. En créant à
partir de vos réalisations, l’IA agit comme un assistant personnel qui va
transmettre votre créativité et personnalité.
[ 68 ]
NVIDIA propose aux entreprises de créer leurs propres modèles d’intel-

ligence artificielle générative. Sa solution nommée AI Foundations est
un service cloud ciblant les grandes entreprises possédant un ensemble
conséquents de données. De grands noms utilisent ce service comme
Adobe pour son IA générative “Firefly”. Ce type de solutions va sure-
ment se développer pour être proposé aux particuliers et aux petites et
moyennes entreprises.
Se former à l’IA dès à présent

Que l’on soit favorable ou non à leur
utilisation, il est indéniable que les intel-
ligences artificielles ont bel et bien pris
place dans le domaine du design. Pour

faire face à l’évolution de la technolo-
gie et à l’impact de l’IA sur le métier de
designer, il est impératif de s’adapter dès
maintenant en se formant à l’utilisation
de l’IA. Les designers qui sauront maîtri-
ser les outils d’IA auront un avantage
certain sur ceux qui ne le font pas et
sur les plus réfractaires. En effet, savoir
utiliser et parler aux IA va devenir une
compétence recherchée, c’est pourquoi l’apprentissage de ce nouvel
outil sera d’autant plus un atout pour rester compétitif sur le marché.
La nouvelle génération de designers est dès à présent en train de se

former à ces nouveaux outils. Pour s’adapter aux besoins futurs, les IA
commencent à être intégrées dans les formations des designers. Des
acteurs majeurs du design français, comme David Serrault, anime des
workshops dans des écoles supérieurs de design. En effet, expliquer le
fonctionnement de l’IA et son histoire permet d’ajouter du contexte et de
comprendre les nouvelles technologies qu’ils voient émerger sur inter-
net et sur les réseaux sociaux. À travers des exercices pratiques, il est
intéressant de leur demander de tester différents outils d’intelligence
artificielle, de leur apprendre à les faire collaborer et de les utiliser dans
des projets concrets. Tester l’IA dans différents contextes permet de
comprendre son ampleur et la diversité de l’utilisation qu’on peut en
faire.
En développant leurs connaissances sur le sujet et en étant sensibilisés

aux nombreux enjeux de l’IA, ils pourront l’intégrer de manière réfléchie
et éthique dans leur futur métier et avoir un impact positif sur le futur
du domaine.
[ 69 ]
>> 01>>
.Etat
Conclusion
des lieux
CONCLUSION
En conclusion, l’intelligence artificielle est un
domaine en constante évolution qui a bouleversé
plusieurs secteurs d’activité, y compris celui du
design graphique. Les IA génératives ont participé à
une révolution de l’image en offrant des possibilités
créatives encore jamais vues auparavant.
En effet, le métier de designer graphique, centré

sur la créativité, la culture graphique et la person-

nalisation, est en plein questionnement face à ces
solutions. Une appréhension par rapport à l’émer-
gence de l’IA dans cette profession se dégage des
résultats du questionnaire mené auprès de desi-
gners graphiques. Ces derniers se voient confron-
tés à une évolution technologique qui remet en
question leurs compétences. De plus, des inter-
rogations restent en suspens pour le moment sur
un sujet sensible mais essentiel, la législation et les
droits d’auteurs face à l’utilisation de l’IA.
En analysant les différences et la complémentarité

entre les designers et l’intelligence artificielle, l’ob-
jectif était de se demander si l’IA pourrait rempla-
cer les designers graphiques.
Nous avons vu que l’IA générative est capable de

produire des visuels, textes et vidéos, mais que
l’intervention humaine reste primordiale pour la
conception de concepts et d’idées. Elle ouvre de
nouvelles portes pour la créativité humaine, mais
permet également d’augmenter l’efficience en se
libérant des tâches chronophages et redondantes.
Cependant, l’intelligence artificielle comporte des
limites techniques, ainsi qu’un manque d’huma-
nité comme l’absence d’émotions et un manque
d’initiatives.
[ 70 ]
>> 01>>
.Etat
Conclusion
des lieux
Pour répondre à la question, le métier en

lui-même n’est pas voué à disparaître, mais une
partie des designers sera probablement amenée à
être remplacée. En effet, ceux qui n’apportent pas
une grande plus-value à leurs clients vont souffrir
de ces changements. Pourtant, l’IA ne devrait pas
être considérée comme une menace, mais plutôt
comme un outil complémentaire pour aider les
designers à produire des visuels plus efficaces et
plus créatifs.
Le métier va évoluer face à la technologie,

comme il a pu le faire par le passé. De nouveaux
rapports avec les clients vont émerger, la profes-
sion va s’orienter davantage vers du conseil et de
l’accompagnement graphique pour laisser de plus
en plus de côté l’exécution.
Cependant, il est important de prendre en

compte plusieurs points de vigilance liés à l’uti-
lisation de l’intelligence artificielle, tels que la
nécessité d’encadrer le domaine et la responsabi-
lité des designers sur la transparence des créa-
tions. Enfin, l’intégration de l’IA dans le processus
de création des designers est inévitable à long
terme. Pour rester compétitif sur le marché, il est
important pour les designers d’apprendre à utili-
ser ces outils, et ce dès leur formation.
En parallèle de cette évolution technologique, les

préoccupations environnementales et éthiques
gagnent également du terrain dans le domaine du
design graphique. Pourtant, l’impact environne-
mental de l’utilisation d’intelligence artificielle est
un sujet de plus en plus préoccupant. Ainsi, nous
pouvons nous demander si l’IA est compatible
avec un design plus responsable et éthique ?
[ 71 ]
>> Sources
SOURCES
Images
Les images ne comportant pas de légendes ont été générées par l’IA Midjourney.
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entreprises-de-creer-leurs-propres-modeles-d-ia-generative.N2113346
[ 74 ]
>> Annexes
ANNEXES
Annexe 1 : Questionnaire mené dans le cadre du mémoire sur un pannel
de 84 profils «créatifs», du 19 janvier au 24 février 2023
[ 75 ]
>> Annexes
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>> Annexes
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Marion OBERLÉ
Médiaschool - 2023
[ 78 ]

L IA Va T Elle Remplacer Les Designers Graphiques 1689178593

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