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Histoire du peuple Basque

1. Les origines des Basques :

À la lumière des données de l'anthropologie moléculaire, il semblerait que les Basques se


soient installés en Europe en même temps que les premiers Homo Sapiens et qu'ils auraient
cohabité avec les Hommes de Néanderthal. Nous serions ainsi les descendants les plus
directs des artistes de l'âge de pierre qui, il y a une vingtaine de milliers d'années, ont orné
les parois des grottes de Lascaux et Altamira : les Basques formeraient donc la population la
plus ancienne d'Europe de l'Ouest. Nos traditions (solidarité ethnique, permanence de
cellules familiales, transmission de biens à un seul héritier) nous auraient permis de
conserver une grande partie du capital génétique ancestral et auraient ralenti la pénétration
de gènes provenant de l'extérieur. Vers 8500 av JC, différents groupes humains quittèrent la
Mésopotamie à la recherche de nouvelles terres agricoles. Lorsqu'ils arrivèrent sur les
rivages de l'Atlantique vers 4000 av JC, les premiers Basques étaient déjà installés au pied
des Pyrénées, dans une région boisée au climat doux et humide.
Les études génétiques ont montré que les Européens de l'Ouest sont génétiquement proches
les uns des autres, à deux exceptions près : les Lapons, mélange de peuples européens et
mongoloïdes, et les Basques. Une enquête d'anthropologie moléculaire récente portant sur
plusieurs centaines d'hommes a ainsi mis en évidence que les Basques :

- ont des groupes sanguins et des marqueurs de protéines très particuliers, qui se distinguent
de ceux des populations avoisinantes.

- possèdent dans leurs chromosomes une séquence génétique qui ne se retrouve que dans
une minorité de populations voisines de l’Europe Occidentale.

Ces singularités laissent supposer que les Basques sont les plus anciens occupants de
l'Europe Occidentale. Nous aurions ainsi résisté mieux que tout autre peuple aux brassages
génétiques qui ont transformé le continent depuis la "révolution néolithique".
La langue basque, l'Euskara, non indo-européenne, est unique au milieu des langues parlées
dans les environs. Déjà, Stabon et Jules César la décrivaient comme très différente de celle
des Gaulois. Sa syntaxe et sa structure sont très particulières, si bien qu'aucun des efforts
entrepris pour la relier à d'autres groupes linguistiques n'a abouti de façon convaincante.
Sergeï Stratostin a rattaché l'Euskara au groupe linguistique du Caucase du Nord, qui
englobe aussi le Sumérien. On a également supposé que le basque était apparenté à la
langue des anciens Ibères. Mais, en dépit de quelques ressemblances, la maîtrise du basque
ne permet pas de comprendre l'Ibère. L'Euskara a des liens aussi bien avec les langues
caucasiennes qu'avec les langues ouralo-altaïques ainsi qu'avec un vieux substrat péri-
méditerranéen qui s'étend jusqu'aux langues dravidiennes de l'Inde pré-indoeuropéenne.

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2. Les Basques dans l'Antiquité :

Les historiens de l'Antiquité répertorient différents peuples implantés dans le triangle


Pyrénées-Garonne-Atlantique : les Vascons en Navarre, les Varduli en Guipuzcoa et les
Caristii en Biscaye. Dans le dernier millénaire avant JC, la zone d'influence des premiers
basques s'étendait de la Garonne à l'Aragon et à l'actuelle Biscaye : elle correspondrait à la
zone de transhumance des Pyrénéens occidentaux. Les celtes, qui envahirent la Gaule vers
500 av JC, ne parvinrent jamais à conquérir cette zone d'influence. Même si, au tournant de
l'ère chrétienne, une certaine celtisation s'était manifestée par l'introduction de l'agriculture
et du travail du fer en Aquitaine, dans le sud de l'Alava et de la Navarre, ainsi que dans
l'ouest de l'Aragon. Les derniers siècles avant JC sont également marqués par la
construction d'oppidum sur de hautes collines.
En 72 av JC, Sertorius, le chef romain en Ibérie, se soulève, avec le soutien des Vascons et
des Cantabres, contre Rome et Pompée. Ce dernier vient assiéger sa capitale. Après sa
victoire, il occupe la Navarre et l'Alava puis fonde la ville de Pampelune. Les Romains
occupaient alors toute la péninsule ibérique. L'une de leurs plus importante voies, de
Bordeaux à Astorga, traversait le Pays Basque. Ils exploitèrent des gisements de minerais de
fer des Encartaciones (zone la plus occidentale de la Biscaye), ce qui favorisa le
développement des forges dans la zone. Mais les Romains n'ont jamais pu ou jamais voulu
s'installer dans les vallées atlantiques et du Nord de la Navarre, sans doute intimidés par les
montagnes et les défilés bien défendus par les natifs qui y habitaient. C'est dans les zones
romanisées du pays que commença la christianisation et la latinisation du Pays Basque.
Dans sa "Guerre des Gaules", Jules César distingue en Gaule trois zones selon leur langue,
leurs coutumes et leurs lois : les Belges, les Celtes et les Aquitains. Lors des premières
expéditions de César contre les Belges et les Celtes, en 58 av JC, les Aquitains demeurent
simples spectateurs. Mais, en 56 av JC, craignant que César ne vienne les envahir, ils se
préparent à envoyer des renforts aux Armoricains. César envoya alors un de ses lieutenants,
Publius Crassus, soumettre l'Aquitaine : les Basques sont battus sur les bords de la Garonne,
puis de l'Adour. Finalement, en 39-38 av JC, Agrippa, lieutenant d'Octave (le futur empereur
Auguste), guerroya et vainquit les Aquitains. C'est à ce moment là que l'influence basque
dans les plaines d'Aquitaine disparût, les populations se latinisant progressivement à la
faveur de l'urbanisation : le Gascon serait ainsi une version très fortement latinisée de
l'Euskara. Les Romains fondèrent les villes de Lapurdum (Bayonne), Iluro (Oloron), Aquae
Tarbellicae (Dax).
L'un des rares vestiges de l'époque romaine en Euskadi, la "pierre romaine" d'Hasparren
indique que les Basques obtinrent leur autonomie de Rome, grâce aux services rendus à
l'Empire par le gouverneur du pays : la Novempopulanie est créée. La liste de Vérone, un
document daté de 297 et énumérant les provinces de l'Empire, atteste d'une certaine
autonomie de la Novempopulanie.

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3. Le duché de Vasconie :

En 406, les tribus germaniques envahissent la Gaule. Elles ravagent la Novempopulanie en


407. L'empereur Honorius concède aux Wisigoths la Novempopulanie et les régions
voisines, avec Toulouse pour capitale. De religion arienne (hérésie du christiannisme), ils
persécutent les premiers chrétiens qui commencent à s'implanter au Pays Basque, à la faveur
de l'action de San Fermin, le premier évêque de Pampelune. En 472, ils quittent la
Novempopulanie et installent leur capitale à Tolède en 554. Après la conversion du roi
Reccarède, le concile de Tolède de 589 consacre l'hégémonie des Wisigoths et l'unification
religieuse de la péninsule ibérique. Les Vascons, restés à l'écart de la romanisation,
refluèrent vers le Nord-Ouest et la Gascogne française sous la pression des Wisigoths.
Wisigoths au sud et Francs au nord tenteront alors, à tour de rôle et sans y parvenir, de
soumettre les peuples de la Novempopulanie. D'après la chronique de Fégédaire, la tactique
des basques consistait à "former de petits groupes, à harceler l'ennemi par des escarmouches
répétées, à simuler une fuite au moment opportun et à se retrancher sur des points
inaccessibles". Ainsi, en 635, les Basques repoussent les armées du roi Dagobert, dirigées
par le duc Arimbert, dans la vallée de la Soule.
En 670, les Basques élisent Otsoa pour duc, qui fonde le duché d'Aquitaine. Celui-ci
s'étendait alors jusqu'à la Loire et intégrait le duché de Vasconie. En 720, Charles Martel
reconnaît la souveraineté d'Odon (Eudes), le fils d'Otsoa, sur son duché. Et c'est avec son
aide qu'il bat les Sarrazins à Poitiers en 732. Mais, en 760, Charles Martel attaque
l'Aquitaine. En 768, Pépin le Bref, fils de Charles Martel et père de Charlemagne, fait
asssassiner le roi d'Aquitaine. Mais, la Vasconie reste indépendante.
Les Musulmans débarquent sur la péninsule ibérique en 711. Déchirés par les luttes
seigneuriales, les Wisigoths ne pourront s'opposer aux Musulmans : la même année, le roi
Rodrigue est battu à Guadalete. Les Musulmans prennent alors Tolède et envahissent
rapidement la péninsule. C'est le début du royaume d'Al-Andalus. En 722, à Covadonga, la
petite troupe de soldats, envoyés de Cordoue par l'émir Alçama afin de réduire la résistance
chrétienne qui s'est repliée dans les contreforts des Pics d'Europe, est battue. Cette victoire
redonne confiance aux Chrétiens et permet de reconstituer une monarchie chrétienne aux
Asturies.
En 777, après sa victoire contre les Saxons, Charlemagne reçoit une délégation musulmane
d'Espagne conduite par le gouverneur de Barcelone et de Gérone, en rébellion contre son roi
Abd al Rahman I. Il propose de lui livrer certaines villes du Nord de l'Espagne, dont
Saragosse. Au printemps 778, Charlemagne se dirige vers les Pyrénées et arrive au pied de
Saragosse. Mais le maître des lieux a changé et refuse de livrer la ville. Charlemagne lève
alors le siège et reprend le chemin de Pampelune avec des otages musulmans, qui seront
libérés par un coup de main à l'entrée de la Navarre. Par représailles, l'armée de
Charlemagne rase les remparts de Pampelune. Mais, le 15 août 778, au passage des
Pyrénées, dans la région de Ronceveaux, les Basques tendent une embuscade à l'armée de
Charlemagne pour se venger de cette destruction. Ils tuent la plupart des chevaliers de
Charlemagne, parmi lesquels Roland, ce qui démoralisa les troupes qui battirent en retraite.
Cette bataille restera dans les mémoires grâce à la Chanson de Roland, écrite dans le courant
du XIème siècle. En 824, les Basques, alliés aux musulmans, tendent une seconde
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embuscade au même endroit contre Louis II le Pieux, qui revient d'une expédition à
Pampelune.
Les deux victoires de Ronceveaux assurent l'indépendance des Basques. Mais, au nord, la
Vasconie est épuisée par 3 siècles de lutte contre les Francs et le centre de gravité basque se
déplace vers le sud, où naîtra le Royaume de Navarre en 824.

4. Le royaume basque de Pampelune :

La marche à l'unité (824-1004) :

Dans les décennies précédant la constitution du Royaume de Pampelune, la Navarre était


menacée d'un côté par l'émirat de Cordoue (en 781, Abd el Rahman I s'était emparé de
Pampelune) et de l'autre par l'empire caroligien. À la fin du VIIIème siècle, une alliance
politico-familliale s'inaugure entre Inigo Jimenez, le père du premier roi de Pampelune, et
les Banu Qasi, Wisigoths convertis à l'Islam qui disposaient d'un protectorat dans la région
de l'Ebre. En 801, Louis le Pieux, fils de Charlemagne, prend Barcelone à l'émir de
Cordoue. En 806, les Navarrais se mettent sous la protection des Carolingiens afin
d'échapper aux forces de l'émirat de Cordoue, venues réduire les Banu Qasi et leurs alliés
Vascons. Il se crée ainsi, pour un temps, une marche franque en Espagne. Mais, en 812, les
Vascons se révoltent contre les Francs et Louis le Pieux vient à Pampelune rétablir l'ordre.
En 824, les Basques écrasent une seconde fois l'armée franque à Ronceveaux, alors qu'elle
retournait en France après avoir "pacifié" Pampelune.
Après cette victoire, Eneko Arista est couronné roi de Pampelune. Dans le Royaume de
Pampelune, comme dans les autres royaumes de la péninsule à cette époque, les souverains
n'avaient pas une autorité absolue sur leur sujets. La noblesse disposait de privilèges
importants, défendus avec âpreté : ce sont eux qui dans la pratique dominaient les vallées,

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recouvraient des impôts, exploitaient les terres... Les représentants du peuple se réunissaient
en assemblées provinciales (les Cortes), dans lesquelles le souverain venait prêter serment
de respecter les Fors (statuts, franchises et libertés de chaque village).
En 842, l'émir de Cordoue, Abd el Rahman II, bat les Banu Qasi et Eneko Arista. Le
royaume de Pampelune mènera alors, dans le courant du IXème siècle, une politique mêlant
résistance et entente avec les Arabes afin de préserver sa souveraineté.
Au cours du Xème siècle, les rois successifs organisent et renforcent le Royaume, tout en
repoussant les musulmans au Sud et les Vikings au Nord. En 925, le roi de Navarre Garcia
Sanchez I épouse la princesse aragone Andregoto Galindez. Leur fils, Sancho Abarca,
réunira en 970 l'Aragon au royaume de Pampelune. En 998 et 999, l'émir de Cordoue
Almanzor, au zénith de sa puissance, ravage Pampelune. Mais, il meurt à la bataille de
Calatañazor en 1002, vaincu par l'alliance entre la Navarre et la Castille.

L'apogée de la Navarre (1004-1076) :

C'est sous le règne de Sanche le Grand que la Navarre connaît son apogée. Né en 992, il
épouse Munia, la fille du comte de Castille en 1016. Il établit une alliance objective avec le
comte de Barcelone, et prend ainsi contact avec les cultures religieuses françaises. Il étend
également son influence sur la Gascogne et le comté de Toulouse, grâce à ses relations
familliales avec le Roi de Gascogne (la fille du roi de Navarre Garcia Sanchez I, avait
épousé le Roi de Gascogne), qui lui prêtera serment en 1012, après l'avoir refusé à Hugues
Capet. Le 13 mai 1029, le jeune comte de Castille, venu en Léon épouser la fille du comte,
est assassiné. La Castille revient alors à Munia, la femme de Sancho. Le règne de Sanche le
Grand est, pour le royaume de Pampelune, une époque d'expansion politique, économique et
sociale. C'est pendant son règne que le danger arabe quitte définitivement la Navarre, en
partie à cause de la grande guerre civile arabe (1008-1028) qui met fin califat des
Omeyyades.
Lorsque Sancho le Grand meurt en 1035, ses possessions se partagent entre ses fils : l'aîné
Garcia, le seul roi au départ, aura autorité sur les provinces basques, Ferdinand sera comte
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de Castille, et par mariage, de Léon, tandis que Ramiro héritera de l'Aragon.
Progressivement au cours du XIème siècle, la Castille lorgne sur la Navarre. C'est ainsi que
le 1er septembre 1054, les troupes de Ferdinand de Castille tuent Garcia à la bataille
d'Atapuerca. En 1067, avec l'aide du roi d'Aragon, la Navarre repoussent les Castillans à
Viana. Mais, le 4 juin 1076, le roi de Navarre est assassiné et le roi de Castille en profite
pour envahir la Navarre.

Le déclin de la Navarre (1076-1425) :

Les navarrais choisissent alors le Roi d'Aragon comme souverain et ils chassent ensemble
les castillans. À l'issue de la bataille, le royaume de Pampelune passe sous la protection du
Roi d'Aragon, qui nomma un Comte de Navarre. La Rioja est absorbée par la Castille. Et
pendant 58 ans, de 1076 à 1134, la Navarre jouira d'une souveraineté relative et partagée,
sous l'administration de l'Aragon. Pendant cet intermède, les navarrais et les aragonais
prendront successivement Huesca (1096), Tudela (1119) et Saragosse (1118) aux Arabes.

En 1134, le Roi d'Aragon et de Navarre meurt sans descendance à la bataille de Fraga. Il


lègue par testament son royaume aux ordres du Temple, de l'Hôpital et du Saint-Sépulcre.
Refusant le testament, les Cortes de Navarre et d'Aragon choississent chacun leur propre
Roi : l'Aragon et la Navarre se séparent.
En 1200, alors que le roi de Navarre Sanche le Fort est en expédition en Afrique, la Castille
et l'Aragon envahissent la Navarre. À l'issue du conflit, la Castille prend l'Alava, le
Guipuzcoa et la Biscaye, avec le soutien des seigneurs basques. Le roi de Castille devient
seigneur du Guipuzcoa. En échange de leur collaboration, Alava, Guipuzcoa et Biscaye
bénéficieront chacune de Fors très libéraux qui feront d'elles des états associés par le lien
personnel au souverain de Castille, mais pas des provinces de Castille. La Navarre est
réduite à la portion congrue.
L'Alava et la Biscaye, passées sous la coupe de la Castille virent se dynamiser leurs
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économies. Ainsi, Vitoria, fondée en 1181 par Sanche le Sage, deviendra une place
commerciale qui fut pendant des siècles le principal marché basque et le siège d'une
communauté dynamique de commerçants et d'artisans, où la communauté juive joua un rôle
fondamental. Bilbao fut fondé au XIVème siècle par les rois castillans. De part sa situation
géographique privilégiée pour la création d'un port maritime, la ville devint l'accès vers
l'Europe des produits de la Castille. L'essor commercial favorisa l'exportation du fer des
forges biscayennes et dynamisa l'activité maritime des villages côtiers voisins. En revanche,
du fait de leur conditions orographiques, de vastes zones du Guipuzcoa vécurent isolées de
leur milieu. Leur rapports avec l'extérieur se limitant aux zones proches des principales
voies de communication, utilisées pour le commerce et par les pèlerins qui parcouraient le
chemin de Saint Jacques de Compostelle.

Le 14 octobre 1201, à Chinon, la Navarre signe une paix pepétuelle avec l'Angleterre,
devenue maîtresse de la Gascogne après le mariage d'Aliénor d'Aquitaine avec Henri II
d'Angleterre. Cela permit à la Navarre de récupérer, à Bayonne, l'usage d'un port maritime.
Sous l'insistence du pape et malgré leurs différents, la Navarre s'allie à la Castille pour battre
les Arabes à las Navas de Tolosa en 1211. En 1234, à la mort du roi de Navarre, le royaume
échoue à son neveu Thibault IV de Champagne, qui sera un souverain pacifique et
favorisera le développement de l'agriculture en introduisant les techniques de son pays.
Dans les années 1270, des luttes éclatent entre les divers bourgs (navarrais, français, ...) de
Pampelune. Ils atteindront leur paroxysme avec la guerre civile de Pampelune (1274-1276).
En 1284, la reine Jeanne épouse Philippe IV le Bel, roi de France : la Navarre passe alors,
jusqu'en 1328, de la maison de Champagne à celle de France. À la mort de Charles IV en
1328, le parlement de Navarre choisit Jeanne, fille de Louis X le Hutin et mariée au comte
d'Evreux, pour reine. Son fils, Charles le Mauvais (1349-1387) se mêlera beaucoup de
politique française et s'attirera la haine de Jean II le Bon, pour avoir fait assassiner le
connétable de France (1354) afin d'obtenir la dot de sa femme. Le roi de France le fera
emprisonner de 1356 à 1357, mais il finira par s'évader. Il s'alliat alors avec les Anglais qui
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combattaient la France depuis 1337, année où débuta la Guerre de Cent Ans. De 1363 à
1367, les intrigues et les guerres entre Henri de Trastamare, qui voulait s'emparer du trône
de Castille, et les rois de France et d'Aragon d'une part, et les rois de Castille, de Navarre,
d'Angleterre d'autre part, se succèdent. Elles se termineront par la déroute d'Henri de
Trastamare à la bataille de Najera. En 1372, par jugement, le pape attribue l'Alava, le
Guipuzcoa et la Rioja à la Castille et propose le mariage de l'infant de Navarre à la princesse
de Castille pour assurer la paix entre les deux royaumes. Le 31 mai 1379, le roi de Navarre
devra accepter, après l'enlèvement de son fils par Charles V, la paix de Briones où il renonce
aux alliances avec l'Angleterre. Son fils Charles III le Noble finira par rétablir la paix
interne et externe.

La guerre civile (1425-1515) :

Lorsque Charles le Noble meurt, le trône revient à sa fille Jeanne et à son mari Jean
d'Aragon. À sa mort (1441), Jeanne lègue son royaume à son fils le Prince de Viana. Mais
Jean d'Aragon occupe le trône. En 1447, il se remarie avec Juana Enriquez dont il aura un
fils : Ferdinand d'Aragon. Lorsque le 7 septembre 1451, le Prince de Viana met fin, par le
traité de Puente la Reina, à la guerre initiée par son père contre la Castille, celui-ci lui
envoie Juana Enriquez comme régente. La noblesse de Navarre se divise alors en deux : l'un
suit Louis de Beaumont, partisant du Prince de Viana et de l'amitié avec la Castille, l'autre
celui des Gramont, favorable à Jean et à l'Aragon. En 1452, c'est la guerre ouverte. Le 3
décembre 1454, à Barcelone, en présence de leur soeur Leonore et de son mari Gaston IV de
Foix, Jean somme le Prince de Viana et sa soeur Blanche de se soumettre, faute de quoi ils
subiraient un procès destiné à les priver de leurs droits héréditaires au royaume. En avril
1456, ils se soumettent et la Navarre est transférée à Léonore. Gaston de Foix vient, pendant
l'été 1456, en Navarre faire appliquer la décision.
En 1458, à la mort de son frère, Jean hérite de l'Aragon, de Valence et de la Catalogne. Le
Prince Viana et sa soeur Blanche meurent respectivement en 1461 et 1464. Jean d'Aragon
conserve toujours le pouvoir, et malgré les promesses de 1456, Léonor et Gaston IV de Foix
devront attendre leur tour, en 1479. Ils continueront malgré tout à le servir fidèlement. Et
pendant ce temps, les deux factions, Beaumontais et Agramontais, s'entretuent : seule la
Basse Navarre échappe à la guerre civile. François Phoebus, fils d'Eléonor de Navarre et de
Gaston IV de Foix-Béarn est reconnu roi par les deux parties en 1481, mais son pouvoir est
affaibli. La reine-mère et Ferdinand d'Aragon, devenu entre temps roi de Castille et
d'Aragon, finissent par imposer temporairement la paix aux deux parties en partageant entre
eux les charges du royaume. À la mort de François (1483), sa soeur Catherine hérite du
trône et épouse Jean d'Albret, seigneur de Foix, de Comminges et de Béarn. La guerre civile
reprend : elle ne s'achèvera que par l'invasion de la Navarre par la Castille en 1512. Les
souverains de Navarre résideront désormais à Pau, en Béarn.

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La fin du royaume de Navarre :

Le 18 juillet 1512, une armée castillane dirigée par le duc d'Albe franchit la frontière
navarraise. Le 21, elle assiège Pampelune, qui se rend le 25. Une autre armée, en
provenance d'Aragon et commandée par l'évêque de Saragosse, occupe le sud de la Navarre,
qui résistera jusqu'en septembre. Pendant l'été, l'armée du duc d'Albe envahit la Basse
Navarre. Louis XII monte alors une expédition, confiée au dauphin François et à laquelle
participe Jean d'Albret, pour libérer la Navarre. Elle met le siège devant Pampelune le 27
novembre, mais tourne court avec l'arrivée de l'hiver.
En juillet 1515, le Roi Ferdinand annexe officiellement la Navarre à ce qui est devenu le
Royaume d'Espagne, tout en promettant de lui conserver ses Fors et ses coutumes et en lui
assurant une relative autonomie : le roi serait représenté en Navarre par un vice-roi et agirait
par l'intermédiaire d'un Conseil Royal. En 1521, profitant de la révolte des Communéros, le
roi Henri d'Albret, aidé par la France, attaque à nouveau les espagnols. Le 15 mai 1521, ils
s'emparent du château de St Jean Pied de Pord et reprennent le contrôle de la Basse Navarre.
Ils arrivent à Pampelune où la population s'est révoltée contre les espagnols : la ville tombe
le 20 mai. Mais, après avoir vaincu les Communeros, l'armée espagnole se retourne contre
les armées franco-navarraises, qu'elle bat le 30 juin à Noain, dans le bassin de Pampelune.
Elle reprend le contrôle de la Navarre, à l'exception de la Basse Navarre.
En 1531, la jugeant trop difficile à défendre, Charles Quint renonce à ses droits politiques
sur la Basse Navarre. Ce reliquat du royaume de Navarre intègrera finalement celui de
France en 1589 lorsque son roi, Henri III de Navarre, sera couronné roi de France sous le
nom d'Henri IV. Mais, c'est son fils, Louis XIII, qui unira définitivement les deux royaumes
en 1620.

5. Soule et Labourd au Moyen-Âge :

Contrairement aux croyances, ces deux provinces basques n'ont jamais formé d'entité
unique avec les 5 autres : elles ont durant tout le Moyen-Âge fait partie intégrante du duché
d'Aquitaine.
En 843, par le traité de Verdun, l'Empire de Charlemagne est divisé en 3 et l'Aquitaine est
intégrée au royaume franc occidental. Mais ce royaume se disloque avec l'invasion des
Vikings, qui occupent Bayonne en 892. Ils éxécutent Saint-Léon venu évangéliser la région.
Après leur départ, un comté indépendant se forme englobant la Gascogne, dans laquelle se
retrouvent la Soule et le Labourd. En 987, la Gascogne refuse son hommage à Hugues
Capet. Elle rendra hommage au Roi de Navarre, ce qui fera dire à certains que le roi de
Navarre régnait alors sur la Gascogne. Mais, ce duché ne sera jamais intégré au royaume de
Navarre.
En 1137, Aliénor, duchesse d'Aquitaine, se marie avec le Roi de France Louis VII et lui
apporte en dot ses possessions. En 1152, elle divorce et se remarie avec Henri Plantagenet,
qui deviendra roi d'Angleterre en 1154 sous le nom d'Henri II : la Soule et le Labourd, tout
comme le Poitou, la Guyenne et le reste de la Gascogne, passent de la couronne française à
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la couronne anglaise. C'est ainsi qu'en 1174, Richard Coeur de Lion viendra réduire le
vicomte du Labourd Arnaud Bertrand, qui s'était soulevé avec ses barons basques. Les rois
d'Angleterre séparent alors Bayonne du Labourd et s'appuient sur la bourgeoisie gascone
afin d'administrer ce port si utile à leur commerce et à leur flotte de guerre. En 1259, par le
traité de Paris, le roi d'Angleterre Henri III renonce à l'Anjou, au Maine et au Poitou et
reconnaît la suzeraineté du roi de France sur l'Aquitaine (Cf. carte ci-dessous).

En août 1343, le peuple du Labourd se soulève contre le maire de Bayonne, qui avait fait
massacrer 5 chefs labourdins, et assiège la ville. Il s'ensuit une longue guerre civile entre
Bayonne et le Labourd. Le Prince Edouard de Galles, dit aussi Prince Noir, imposera
finalement la paix en avril 1357 et condamnera les notables de Bayonne à dédommager les
Labourdins. En 1360, après sa défaite à Poitiers (1359), le Roi de France Jean II le Bon
abandonne sa suzeraineté sur l'Aquitaine lors du traité de Brétigny.

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Le Pays Basque Nord et ses
environs au XIVème siècle

Pendant la Guerre de Cent Ans, les basques de Labourd et de Soule, sujets britanniques se
battront contre les Français. Ainsi, en 1449, ils résisteront à Gaston de Foix, vicomte de
Béarn. Le Roi de Navarre, suzerain du château de Mauléon et gendre de Gaston de Foix,
parlemente et fait basculer la Soule dans le giron du Béarn. En 1450, Gaston de Foix
s'attaque au Labourd et remporte les combats de Guiche et Saint Pée sur Nivelle. Le
Labourd finit par conclure la paix avec le Roi de France lors du traité d'Ayherre : il intègre
le Royaume de France mais conserve ses Fors. En 1451, Dunois et Gaston de Foix assiègent
Bayonne, qui finit par se rendre en échange de la conservation des franchises municipales.
En 1510, la Soule est rattachée à la Couronne de France.

Le Pays Basque Nord et ses Le Pays Basque Nord et ses Le Pays Basque Nord et ses
environs en 1430. environs après la fin de la Guerre environs au milieu du XVIème
de Cent Ans siècle

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6. Le Pays Basque de la Renaissance à la Guerre d'Espagne :

Au début du 16ème siècle, les provinces basques n'ont plus aucun lien politique entre elles.
Mais elles gardent une relative autonomie interne :

- elles lèvent leurs impôts et ne le versent pas au roi.

- elles organisent leurs propres milices et ne sont pas soumis au devoir militaire au delà
des limites de leur territoire.

- le servage y est inconnu.

- les libertés sont garanties par des coutumes écrites (les Fors) et par les assemblées
populaires locales.

Mais si elles étaient théoriquement libres de se séparer du Roi, le caractère absolu des
monarchies limitait dans la pratique cette liberté.
Lors du traité des Pyrénées (1659), l'Espagne et la France mettent fin à de longues années de
conflit et concluent le mariage de l'infante Marie-Thérèse d'Espagne avec le Roi Louis XIV,
qui aura lieu à Saint Jean de Luz en 1660. Le Roi de France renonce définitivement à ses
droits héréditaires sur le royaume de Navarre et la France reçoit le Roussillon, la Cerdagne,
l'Artois, une partie du Luxembourg et quelques places fortes des Flandres. Ce traité fige
définitivement la frontière entre les deux pays et, depuis lors, l'histoire du Pays Basque se
confond avec celle des états dans lesquels il est intégré.

Le Pays Basque Nord :

En passant de la tutelle anglaise à la tutelle française, Bayonne connaîtra une période de


marasme et de décadence économique dont elle ne sortira lentement qu'à partir de 1580.
Elle ne redeviendra florissante qu'à la fin du XVIIIème siècle. Pendant le XVIIème et le
début du XVIIIème siècle, c'est Saint Jean de Luz qui tiendra le haut du pavé économique :
chaque année, 7000 labourdins s'embarquent pour la pêche à la morue vers Terre-Neuve.
Parmi les évènements marquants du Pays Basque Nord sous l'Ancien régime, on relèvera :

- le procès de sorcellerie de Saint Pée, ouvert en 1609 par un représentant du roi :


plusieurs prêtres et 700 femmes sont envoyés au bûcher.

- l’édit d'union qui rattache en 1620 le royaume de Navarre à la couronne de France,


malgré l'opposion de l'assemblée navarraise. La monnaie navarraise sera supprimée en
1643.
- les fréquentes révoltes, réprimées dans le sang, contre la centralisation monarchique :
en 1641 contre l'installation des Fermiers Généraux, en 1661, en 1685 contre la gabelle
à Saint Jean Pied de Port, puis en 1696, en 1724, en 1726 et en 1748. La dernière a lieu
à Hasparren du 3 au 6 octobre 1784 : plusieurs centaines de femmes tiennent tête à 150
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grenadiers et 5 brigades de la maraîchaussée et protestent contre l'extension de la
gabelle. Seule l'intervention du curé évitera la bataille.
- en 1707, le français devient la seule langue officielle dans les 3 provinces du Nord.

La Révolution française met fin à l'autonomie relative des provinces basques. En 1789, la
Constituante, malgré les protestations des députés basques, supprime l'autonomie de la
Soule et du Labourd et annexe la Navarre à la France. En 1790, le département des Basses
Pyrénées est créé, malgré l'opposition conjointe des représentants basques et béarnais qui
réclament deux département distincts. En 1793, à la mort de Louis XVI, l'Espagne déclare la
guerre à la France révolutionnaire. En 1794, 4000 basques du Labourd sont déportés dans le
Gers et dans les Landes pour avoir refusé de combattre contre les Basques du Sud. En 1795,
le traité de Bâle met fin aux hostilités entre les deux pays : l'Espagne cède à la France la
partie espagnole de l'île de Saint Domingue. La création, en 1800, de l'institution
préfectorale par Bonaparte accélère la centralisation.
Au cours du XIXème siècle, le Pays Basque Nord restera en marge de l'industrialisation, du
fait de son manque de matières premières et de sa situation périphérique. Son économie
demeurera essentiellement agricole et artisanale. La société traditionnelle, aux
connaissances transmises par la tradition orale, fortement structurée sur la maison et la
paroisse, hiérarchisée autour des prêtres et des notables, demeurera longtemps le modèle de
société des basques du Nord. Le transfert, en 1841, de la douane espagnole de l'Ebre aux
Pyrénées détruit la structure économique du Pays Basque Nord. Ses habitants vont alors, à
partir de 1845, massivement émigrer vers les Amériques : 90 000 personnes quitteront le
Pays Basque au cours du XIXème siècle. Cette émigration sera en grande partie compensée
par une forte natalité.
Sous la IIIème République, les Instituteurs chercheront à franciser la société, générant une
impression d'insécurité face à l'intrusion d'une culture véhiculant des modes de pensée
différents de ceux de la société basque traditionnelle. Celle-ci s'isolera et constituera des
barrières autour des instituteurs et des ouvriers venus de l'extérieur, les excluant de la vie
locale.
Le Pays Basque Nord participera à toutes les guerres franco-allemandes en envoyant des
combattants au front. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, les Basques joueront même un
rôle prépondérant dans le passage de la frontière pour les juifs en fuite et les aviateurs alliés
abbatus.

Le Pays Basque Sud :

Les provinces du Sud, et en particulier les zones côtières de Biscaye et de Guipuzcoa,


profitent de la colonisation des Amériques, qui favorise le développement de la navigation,
du commerce et de l'industrie artisanale (en particulier les forges). Les régions basques du
sud ont donc bénéficié de circonstances économiques plus favorables que celles du Nord,
coupées du Canada et de Terre Neuve par les guerres contre les Anglais. Cet essor
économique s'accompagne également d'un essor démographique : les 4 provinces du Sud
voient leur population passer de 350 750 en 1560 à 515 400 en 1800. Ce développement a
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également été permis par un centralisme plus tardif de l'état espagnol. Mais, en dépit des
Fors qu'ils juraient de respecter, les Rois d'Espagne ont également manifesté une volonté
centralisatrice. Au début du XVIIème siècle, ils décrètent ainsi que les membres des
assemblées de Guipuzcoa et de Biscaye doivent maîtriser le castillan et que les notaires
doivent dresser leurs actes officiels en castillan. Le Pays Basque Sud connaîtra aussi ses
révoltes, durement et violemment réprimées : révoltes du sel en 1631 et 1634, révoltes des
paysans en 1718 et en 1804.
En 1700, le roi d'Espagne meurt sans descendance et choisit par testament Philippe d'Anjou,
le petit fils de Louis XIV et oncle du futur Louis XV. La guerre de succession d'Espagne
éclate alors entre la France d'une part et la Grande alliance réunissant l'Angleterre, le Saint
Empire, la Prusse, le Danemark et les Provinces Unies d'autre part. Cette guerre s'achèvera
par le traité d'Utrecht (11 avril 1713) dans lequel Philippe d'Anjou est reconnu souverain
d'Espagne et de ses colonnies. Gibraltar et Minorque sont cédées à l'Angleterre et le tracé de
la frontière franco-espagnole est confirmée. L'Espagne perd également le Luxembourg et les
Flandres, ses possessions en Italie, ainsi que la Sicile et la Sardaigne.
En 1807, Napoléon obtient du roi d'Espagne l'autorisation de faire passer ses troupes sur le
territoire espagnol en direction du Portugal, favorable aux Anglais. Mais l'installation des
troupes françaises au Nord inquiète les habitants et le premier ministre Godoy conseille aux
souverains de se réfugier aux Amériques, comme l'ont fait les souverains portugais. Dans la
nuit du 17 mars 1808, le palais de Godoy à Aranjuez est attaqué par les partisans du prince
héritier Fernando. Carlos IV destitue Godoy en abdiquant en faveur de son fils. En réponse,
Napoléon convoque à Bayonne Fernando et son père et les oblige à renoncer au trône
d'Espagne (5 mai). Il les interne et nomme son frère Joseph roi d'Espagne.
Mais ces négociations et la présence des troupes françaises à Madrid mécontentent le
peuple. La révolte du 2 mai 1808 à Madrid marque le début de la guerre d'indépendance
espagnole. L'armée française commet alors des exactions, qui poussent la Diputacion Forale
de Navarre à déclarer la guerre à Napoléon le 29 août : elle mobilise les hommes de 17 à 40
ans. Cette guerre sera une guerre de guérilla, qui finira par chasser Napoléon avec la
participation des Anglais de Wellington. En 1813, plusieurs colonies américaines profitent
de la guerre pour conquérir leur indépendance : la Plata, Uruguay, Paraguay, Chili,
Colombie. Cette guerre aura des conséquences importantes sur le devenir des provinces
basques : le centralisme français contamine l'Espagne tandis que la dictature et l'irreligiosité
de Napoléon rendent odieuses à la majorité des Basques les idées de la Révolution
Française.
La constitution de Cadix, rédigée par les libéraux en 1812, sous le règne de Joseph
Bonaparte, apparaît aux Basques comme contraire à leur lois (car ils considèrent leurs Fors
comme un don de Dieu) et ils se sentent menacés. En 1814, Fernando VII est libéré par
Napoléon. Revenu au pouvoir, il abrogera cette constitution et règnera en monarque absolu.
Au XIXème siècle, la majorité des Basques prendra partie pour les absolutistes espagnols,
qui veulent conserver la monarchie et les Fors et qui sauront flatter le goût d'indépendance
et le catholicisme des Basques, contre les Libéraux. Mais, en 1820, les Libéraux l'emportent
et menacent les libertés basques, les considérant comme des privilèges provinciaux octroyés
par le souverain espagnol. Don Carlos, prétendant à la succession de son frère Fernando VII,
prend la défense des Fors.
À la mort de Fernando VII, Don Carlos est évincé du trône par sa nièce Isabelle, qui
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représente la tendance libérale. Il lève alors l'étandard de la révolte : c'est le début de la
première guerre carliste. Les bataillons carlistes, essentiellement basques, s'organisent au cri
de "vive les Fors", sous la direction du général en chef Tomas Zumalakarregui. Avec ses
27000 hommes, par une tactique de guérilla et d'embuscades, il tient en échec 105 000
hommes de l'armée espagnole et parvient à prendre plusieurs places fortes du Pays Basque.
Mais, il meurt en 1835 après avoir été blessé par balle en voulant prendre Bilbao. Après la
mort de Zumalakarregui, l'armée carliste subit défaites sur défaites. Elle sera reprise en main
par le général Maroto, qui finira par se rendre au général libéral Espartero lors de "l'abrazo"
de Vergara le 31 août 1839. La guerre fit 270 000 morts. Don Carlos est interné à Bourges
par Louis Philippe. À sa mort en 1860, il transmettra ses droits à son fils, qui les
retransmettra à son propre fils Don Carlos VIII en 1868.
La Navarre est transformée en province et perd son statut de royaume. Les trois autres
provinces basques perdent la plupart de leurs privilèges foraux. En 1841, la douane
espagnole est transferée de l'Ebre aux Pyrénnées et à la Bidassoa. Les 4 provinces
s'espagnolisent progressivement. L'industrialisation de la Biscaye puis du Guipuzcoa
transforme leurs infrastructures. Grâce à la machine à vapeur et aux minerais voisins des
Encartaciones, la métallurgie lourde se développe.
En 1872, les provinces basques se soulèvent en faveur de Don Carlos VIII. La deuxième
guerre carliste se solde par la défaite de Don Carlos VIII en février 1876. Les provinces
basques perdent alors définitivement leurs Fors.
À la fin du XIXème siècle, le nationalisme basque prend une forme nouvelle. Sabino Arana
Goiri dessine l'Ikuriña en 1893, fonde le Parti National Basque (PNB) en 1895 et crée un
hymne national basque. Il est aussi l'auteur d'une abondante littérature politique qui
inspirera les nationalistes basques du XXème siècle. Dans les premières décennies du siècle,
le PNB devient la principale force politique des 4 provinces du sud.
De 1923 à 1931, l'Espagne d'Alphonse XIII vivra sous la dictature des généraux Miguel
Primo de Riveira et Berenguer.

7. Le Pays Basque Sud pendant la Guerre d'Espagne et la


dictature franquiste :

En 1931, les élections municipales espagnoles donnent, dans les villes, une forte majorité
aux républicains. Alphonse XIII s'exile après avoir abdiqué : en juin, la république est
proclamée et une assemblée constituante est élue. Les provinces basques envoient aux
Cortes une majorité de députés issus du PNB, parmi lesquels Aguirre. La consitution
adoptée en décembre autorise l'autonomie des régions à condition que l'autonomie soit
adoptée par 2/3 des maires, approuvée par référendum par au moins 70% des électeurs et
approuvée par les Cortes. La Catalogne et le Pays Basque finiront par réunir ces 3
conditions. Ainsi, dans les 3 provinces d'Alava, de Guipuzcoa et de Biscaye, 80% des
participants au référendum adoptent l'autonomie. En revanche, la Navarre la refusera. La
constitution prononce également des mesures violemment anti-cléricales. En 1933, José
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Antonio Primo de Riveira, fils du dictateur, fonde la Phalange : ce mouvement est hostile à
tout séparatisme local.
En février 1936, le Frente Popular est vainqueur aux élections. Le 13 juillet 1936, le leader
monarchiste Calvo Sotelo est assassiné par les républicains. Pour rétablir l'ordre dans le
pays, les militaires forment alors le "soulèvement national" (18 juillet) mais le
gouvernement proclame la résistance : c'est le début de la Guerre d'Espagne. Les garnisons
se révoltent : celles de Bilbao et de San Sebastian sont maîtrisées par les nationalistes
basques. Le Movimiento, qui s'appuie alors sur l'Église prend bientôt les allures d'une
croisade.
Parti du Maroc sur des bateaux allemands et italiens, le général Franco dirige les opérations
dans le Sud alors que le général Mola, en accord avec Franco, s'est révolté en Navarre.
Ainsi, en octobre, 10% de la population navarraise se retrouvera dans les rangs de l'armée
franquiste. Franco fait sa jonction au mois d'août avec l'armée du Nord près de Madrid. Les
basques sont alors coupés du gouvernement républicain. Après la prise d'Irun par le général
Mola, le 15 septembre, à la suite de combats qui dureront 3 semaines, ils seront coupés du
Pays Basque Nord et les républicains sont empêchés de communiquer par le Nord via la
France. San Sébastien tombe le 13 septembre, puis vient le tour du reste du Guipuzcoa. Le
27 septembre, Bilbao repousse les armées franquistes. Le 1er octobre 1936, à Burgos,
Franco est nommé généralissime et chef de l'état.
C'est alors que le gouvernement républicain espagnol reconnaît l'autonomie des 3 provinces
basques. Le 7 octobre 1936, Aguirre forme à Guernica le premier gouvernement d'Euskadi
et prête serment sous le chêne millénaire. Mais ce gouvernement n'a aucune juridiction sur
la Navarre et les franquistes occupent la majeure partie de l'Alava et du Guipuzcoa. Malgré
tout, il tiendra tête aux armées franquistes pendant près d'un an. Il exerera un pouvoir
démocratique et réorientera l'économie dans l'industrie de guerre. Le 31 mars 1937, les
franquistes attaquent avec l'appui aérien de la légion Condor. Le 26 avril, l'aviation
allemande détruit la ville et la population de Guernica. Bilbao finira par tomber le 19 juin,
après 10 semaines de résistance acharnée.
Après la chute du Pays Basque, les hommes de l'armée d'Euskadi participeront à la défense
de Santander, mais finiront par se rendre aux Italiens. Seuls une petite partie d'entre eux
parviendra à fuir, parmi lesquels Aguirre. Barcelone tombe le 26 janvier 1939, Madrid et
Valence tomberont les 28 et 30 mars, mettant fin à la guerre d'Espagne par la victoire de
Franco.
Pendant la deuxième guerre mondiale, le gouvernement basque se réfugie à New York. La
paix revenue, il s'installe à Paris, dans l'actuelle Maison des Basques de Paris, où Aguirre
meurt en 1960. Pendant la dictature franquiste, les grèves de 1947 et 1951 sont sévèrement
réprimées. Certains nationalistes basques décident alors d'utiliser l'action terrorriste pour
lutter contre Franco et créent l'ETA (Euskadi Ta Askatasuna : Pays Basque et liberté) en
1959. Progressivement, l'ETA s'implante au coeur de la société basque des provinces du Sud
en organisant diverses manifestations politiques hostiles au franquisme. Il assassine un
certain nombre de personnalités ou de membres des forces de police et de l'armée, parmi
lesquelles le général Carrero Blanco, chef du gouvernement de Franco (20 décembre 1973).
L'ETA fera également parler de lui lors du procès de certains de ses membres à Burgos en
décembre 1970, en enlevant le consul allemand de San Sebastien.
Franco meurt en 1975.
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8. Le Pays Basque Sud et la démocratie :

En 1978, une nouvelle constitution entérine le passage de l'Espagne à la démocratie, sous la


forme d'une monarchie parlementaire. Les trois provinces de l'Alava, de Biscaye et de
Guipuzcoa obtiennent en 1979 un statut d'autonomie particulier. Elle dispose d'un parlement
et d'un gouvernement autonomes, ainsi que de ses propres compétences en matière de Santé,
d'Éducation, de Sécurité, de Culture, de Gestion économique, de Justice, ... Chaque province
a également son propre organe de gouvernement, les Diputaciones Forales, qui gèrent au
niveau de chaque territoire, quelques unes des compétences transférées par le gouvernement
central de Madrid au gouvernement basque d'Euskadi. Cette autonomie est garantie par une
indépendance financière puisque l'administration basque est chargée de la perception des
impôts sur son territoire et verse, en contrepartie, une contribution à l'administration centrale
espagnole au titre de participation à l'ensemble des dépenses générales.
Lors des élections législatives de la communauté autonome de 2001, 80% des électeurs
inscrits ont voté. Les nationalistes modérés (le PNV et Eusko Alkartasuna, qui gouvernent
depuis 20 ans) sous la houlette du Lehendakari Ibarretxe, président de la communauté
autonome basque, ont obtenus 33 sièges sur 75. De son côté, Euskal Herritarrok, parti
représentant la fraction la plus déterminée des indépendantiste, a obtenu 7 sièges. Les partis,
dits "espagnolistes" et représentants la tendance de l'ancrage à l'Espagne, se partagent les
sièges restants : 19 pour le parti populaire, 13 pour le PSOE et 3 pour la Gauche Unie.
Suite aux résultats de ces élections, le Lehendakari Ibarretxe, président de la communauté
autonome basque a proposé, lors d'un discours de politique générale, un nouveau pacte pour
l'avenir du Pays Basque, reposant sur une cohabitation axée sur un nouveau statut de libre
association avec l'état espagnol. Son projet repose sur 3 pilliers :

- la reconnaissance de l'identité basque et du patrimoine historique, culturel et social


unique du peuple basque.

- la reconnaissance du droit du peuple basque à l'auto-détermination pour décider de son


avenir.
- le respect par le peuple basque des décisions des citoyens et des citoyennes vivant dans
différentes réalités juridiques et politiques.

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