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Les médecins de l'armée et les soins aux colons en Algérie

(1848-1851)
Claire Fredj
Dans Annales de démographie historique 2007/1 (n° 113), pages 127 à 154
Éditions Belin
ISSN 0066-2062
ISBN 2701147086
DOI 10.3917/adh.113.0127
© Belin | Téléchargé le 21/09/2023 sur www.cairn.info (IP: 41.98.237.25)

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ANNALES DE DÉMOGRAPHIE HISTORIQUE 2007 n° 1 p. 127 à 154

LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX


COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)
par Claire FREDJ

« L’histoire des possessions d’Afrique de villages de colonisation peuplés d’en-


est presque exclusivement médicale » viron 20 000 personnes, sur une popula-
(Antonini, 1841, 51). C’est ce qu’écrit, tion évaluée en 1847 à quelque 110 000
dans un rapport de 1841, le médecin en Européens, cette mesure entraîne donc
chef du corps d’occupation en Algérie une forte augmentation de la population
Antonini. La force avec laquelle les coloniale en zone rurale (voir carte).
maladies déciment le corps expédition- Plusieurs travaux retracent l’histoire
naire et les populations européennes qui de ces colonies de 1848 et tous témoi-
commencent à s’installer dans la colonie gnent des difficultés d’adaptation des
africaine rend cette implantation problé- colons, pour beaucoup des artisans pari-
matique. La question se pose de manière siens1. S’ils relatent le « calvaire » de ces
particulièrement aiguë au milieu du XIXe volontaires, dévorés par les fièvres et
siècle, lorsque la République ouvre, par le décimés par le choléra, rares sont ceux
décret du 19 septembre 1848, un crédit qui mentionnent la présence de méde-
de 50 millions de francs au ministère de la cins à leurs côtés. Le contrôle sanitaire
Guerre sur les exercices 1848-1850, pour des nouveaux villages est en effet essen-
établir 42 colonies agricoles. tiellement effectué par des médecins
Après l’échec de la colonisation libre militaires, qui ont laissé des témoignages
en Algérie, c’est la colonisation officielle sur les débuts douloureux de cette
qui prend le relais, elle-même envisagée opération. Ils offrent également une
de différentes manières. La colonisation perspective originale sur ce mouvement
militaire prônée et tentée par Bugeaud
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d’implantation spécifique, celle d’une
au cours des années 1840 ayant fait long
colonisation qui apparaît largement
feu, s’y substitue la colonisation « avec le
médicalisée, élément essentiel pour la
concours des militaires » (Kateb, 2001,
suite de ce processus.
86), encouragée par Paris qui voit dans
l’Algérie un des moyens de régler la
question sociale. Le projet de septembre LES MÉDECINS MILITAIRES,
1848 prévoit ainsi la venue de 12 000 TÉMOINS DE LA DIFFICILE
colons volontaires, installés aux frais de INSTALLATION
l’État et devant recevoir une concession, DES COLONIES AGRICOLES DE
une maison, des instruments, du bétail, 18482
des semences, des rations journalières de
vivres, pendant les trois premières Au cours de la IIe République, l’armée
années durant lesquelles ils dépen- d’Afrique poursuit la conquête de l’Algérie,
draient de l’autorité militaire. Alors que notamment dans les oasis du Sud-Est et en
l’Algérie ne compte qu’une cinquantaine Kabylie. Sur les territoires antérieurement

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conquis et réputés pacifiés, c’est la mission les nouveaux centres agricoles. Désignés
colonisatrice qui prime (Bertaud et par l’autorité militaire, ils peuvent aussi
Serman, 1998, 289). L’encadrement des être volontaires, à l’instar de l’aide-major
colonies agricoles en est une illustration Labouysse qui « a lui-même demandé cet
exemplaire. emploi [à Ponteba] avec la résolution de
Le 11e convoi de colons prévu par le s’y consacrer en entier3 ». La mission
décret de septembre arrive à Bône le 3 présente des avantages : « C’était la pre-
décembre 1848. Quelques jours plus mière fois que j’étais chargé d’un service
tard, 1 100 d’entre eux se dirigent vers sous ma responsabilité personnelle »
Mondovi, où deux centres de popula- (Boyer, 1851, 8 ; Driard, 1852, 17), note
tion vont être formés. Un bataillon les Boyer à Barral. Quelques-uns soulignent
accompagne et avec lui, le jeune sous- également la possibilité, dans ce cadre, de
aide Boyer, muni d’une « commission suivre des populations diverses, civiles et
provisoire » et de deux cantines renfer- militaires. Boyer, par exemple, raconte
mant les médicaments « que l’autorité comment, pendant deux ans, il soigne
médicale avait jugés les plus indispensa- aussi bien les troupes que des ouvriers
bles » (Boyer, 1851, 6). L’arrêté du civils employés aux constructions et des
17 novembre 1848, qui détaille l’instal- colons (Boyer, 1851, 7).
lation des colons, précise en effet qu’un Outre les soins aux populations colo-
service de santé sera organisé dans niales, les médecins de l’armée cherchent
chaque village. Jusqu’à l’arrivée de à établir une statistique médicale pour
médecins civils, dont l’effectif limité est chacun des centres, selon les prescriptions
alors concentré dans les villes principa- définies par la circulaire du 9 février
les, il sera effectué par des officiers de 1849. Mais la tâche est difficile en raison
santé militaires détachés des hôpitaux de la rapidité avec laquelle les praticiens
militaires ou des corps. Les malades qui se succèdent dans les villages. À La Ferme
ne pourront être traités sur place seront par exemple, « le service de santé a été fait
transportés dans les hôpitaux militaires en premier lieu par MM. les chirurgiens
ou civils selon les localités. Forts d’une sous-aides de l’hôpital d’Orléansville. Ils
expérience de plusieurs années sur le le prenaient à tour de rôle, chacun
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terrain algérien, les médecins de l’armée pendant un mois. Il a été fait ensuite par
semblent parfaitement convenir à cette M. Baradoux, chirurgien aide-major au
mission. Pierre Fontez, sous-aide aux 16e régiment de ligne, puis par MM. les
ambulances de l’armée d’Afrique, est sous-aides de l’hôpital de nouveau, plus
ainsi chargé, « à cause de [s]on ancien- tard par M. Leuret, chirurgien major au
neté en grade, de [s]es bons services et 16e ; il est aujourd’hui confié à M. Vigier,
surtout de [s]on long séjour en Algérie, chirurgien aide-major au même régi-
de recevoir à Cherchell 1 500 colons ment. Il le fait depuis huit jours. Des
destinés à peupler les colonies agricoles mutations aussi fréquentes ne permettent
de Novi, de Zurich et de Marengo, et de pas de suivre dans ses progrès l’acclimate-
protéger leur santé contre les influences ment des colons [et] quel que soit le zèle
d’un sol tout nouveau pour eux » et l’instruction de chacun, [il doute] qu’il
(Fontez, 1852, 5). puisse se former une méthode générale de
Plusieurs jeunes médecins, plus ou traitement. Une chose peu suivie n’est
moins expérimentés, servent ainsi dans jamais prise à cœur4 ».

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

Les inspecteurs médicaux de l’armée, mortalité « excessive » (Fontez, 1852,


lors de leurs tournées, déplorent donc 19) qui s’abat alors sur les colons : dans
souvent que le médecin en charge des la colonie de Castiglione, le médecin
villages n’ait pas trouvé établi, à son arri- Rouis l’évalue à un décès pour 27 habi-
vée, le registre d’inscription des maladies tants soit « un tiers plus considérable
comme à Aïn Tedeles et Souk-el-Mitou, que celui de la France continentale où il
« ce qui l’a mis dans la nécessité de n’y a qu’un décès sur 40 habitants ».
remplir ses états avec des documents Louis Laveran compte un décès sur sept
puisés dans les registres du directeur de habitants à El Afroun8 et Drapier, après
la Colonisation5 », déplore Mialhes. La avoir calculé une moyenne de décès dans
nécessité d’organiser correctement cet la population civile en Algérie de 44 ‰
enregistrement est soulignée, afin de entre 1842 et 1846 pour un taux de
contribuer à la réalisation d’une statis- mortalité en métropole de 23,6 ‰ et
tique nosographique. Michel Lévy pro- relève que la mortalité des colons de
pose, en 1851, la centralisation des 1848 est trois fois plus forte qu’en
rapports concernant le service civil, celui France, malgré l’absence de vieillards
des hôpitaux militaires et des corps de (Drapier, 1850, 11 et 24).
troupe, afin de faire ressortir « par Mortalité et morbidité atteignent donc
trimestre et par année, les résultats géné- des sommets dans les premières années
raux de la maladivité [sic] et de la morta- d’existence des colonies agricoles et abou-
lité en Afrique6 » dans les populations tissent aux baisses d’effectifs rapides cons-
civiles et dans l’armée. tatées dans plusieurs d’entre elles. Cette
Avant même que cette centralisation diminution est également due au nombre
ne soit réalisée, les médecins établissent de « renonciataires » (Fontez, 1852, 9).
leurs propres comptages qui racontent Après six mois de présence, 1 110 colons
pour la plupart la même histoire, celle avaient abandonné l’Algérie, « un grand
d’un désastre sanitaire. En octobre 1851 nombre sans motifs connus, d’autres pour
par exemple, dans le nouveau village de raisons de santé et 3 188 individus avaient
Ponteba, qui comptait 335 habitants en été contraints d’entrer à l’hôpital »
1848, moins de 200 habitants sont re- (Drapier, 1850, 24).
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censés7. Citant le rapport que Louis Une fois les forts taux de mortalité et
Reybaud rédige à l’automne 1849 après de morbidité des colons constatés, les
sa tournée dans les colonies agricoles et médecins s’emploient à les expliquer.
dans lequel il constate la forte morbidité Dans les colonies agricoles, résume le
des colons, Boyer rajoute que l’inspec- médecin Duprat, tout « conspire contre
teur n’avait pas encore connaissance du la santé : alimentation presque toujours
chiffre de la mortalité qui, « pour mauvaise, malpropreté des lieux, des
plusieurs de ces colonies, dépasse 200 habitations et des hommes, boissons
pour chacune d’elles » (Boyer, 1851, 59- frelatées et dangereuses ; empoisonne-
60). En août-septembre 1849, les regis- ment marématique permanent provo-
tres de l’hôpital de Guelma indiquent quant des fièvres, des dysenteries endé-
pour deux mois 400 malades et 132 miques ; eaux très mauvaises » (Duprat,
décès de colons venus fonder les centres 1850, 12). L’emplacement d’un centre
agricoles d’Héliopolis, Millesima et Petit de colonisation, dont l’environnement
(Prieur, 1853). Tous soulignent ainsi la géographique et géologique est souvent

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décrit avec minutie, peut entraîner sa Nif semblent tenir à la position topogra-
mauvaise situation sanitaire. En ces phique du village qui rapproche son
temps de renaissance néo-hippocra- climat de celui de beaucoup de localités
tique, qui doit d’ailleurs beaucoup aux du midi de la France13 ».
travaux des médecins militaires, il est Quelques médecins, cependant, esti-
tenu pour certain que les maladies ment que dans plusieurs villages, « on a
varient selon la nature des terrains trop souvent sacrifié la position hygié-
(Osborne, 1998, 185-204). C’est pour- nique à la position militaire, et [ils] se
quoi, résume Quesnoy, « dans la trouvent placés sur des points aussi irra-
province d’Oran, où le sol est sec, les tionnels que malsains » (Roudet, 1852,
affections, qui tiennent essentiellement 17). Fontez met aussi en garde ceux qui,
au climat, les diarrhées, les dysenteries, s’appuyant sur des données pas toujours
les gastrohépatites sont en majorité ; exactes bâtissent des villages « sur des
dans la province de Bône au contraire, le cartes » sans écouter la science des person-
sol est humide, les marais nombreux et nes compétentes : Novi par exemple « eût
les maladies amenées par le dégagement été incontestablement mieux placé à
des miasmes comme les fièvres de tous 500 m plus loin du rivage ; c’était l’avis du
les types et leurs complications se comp- médecin qui fut consulté à l’époque […]
tent en grand nombre9 ». mais on n’en tint pas compte ». Il en a été
Le choix des localités est donc « la chose de même à Zurich et le village, bâti sur les
la plus importante dans la nouvelle créa- bords de l’Oued-el-hachem, connaît une
tion10 » et, en 1842 déjà, Bugeaud confiait humidité permanente : « Aussi, depuis
au médecin en chef de l’armée, Antonini, 1848, la mort a-t-elle moissonné bon
un travail d’ensemble « qui avait pour but nombre de colons » (Fontez, 1852, 15,
l’installation rationnelle de la population 16, 9). Estimant également que ce n’est
coloniale » (Cabrol, 1863, 1). pas « à distance » qu’il sera donné de
En 1848, la position des nouveaux connaître l’emplacement « le mieux
villages est fixée au ministère d’après les approprié à l’assiette d’un centre agricole »
cartes du Dépôt de la guerre. Dans l’en- au point de vue hygiénique, les médecins
semble, concluent plusieurs officiers de Martin et Foley appellent à ce que de
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santé, « il y a peu à blâmer dans l’empla- telles tâches soient confiées « à des hom-
cement des villages », presque tous placés mes pratiques qu’une longue expérience
sur des terrains élevés permettant un du pays a initiés à sa topographie et à
écoulement facile des eaux. Quelques- l’exacte notion des influences locales
uns malgré tout « empruntent dans les actuellement capables de nuire » (Martin
qualités du sol ou dans l’existence de et Foley, 1851, 258). Pour Prieur par
marais dans leur voisinage des causes de exemple, un bon moyen de choisir un
maladies qu’il n’est peut être pas impossi- emplacement salubre consiste à se fixer
ble de faire disparaître11 ». Ainsi, aux alentours de ruines romaines, « indice
Marengo, situé à 8 km de la mer et à d’une situation plus saine que les autres »
1 500 mètres d’un marais, fournit plus de (Prieur, 1853, 26).
malades que les autres, comme Saint- Si la situation du village peut être incri-
Louis, « situé dans un bas-fond12 ». Au minée dans la production des maladies, le
contraire, la « bénignité et [la] variété travail de colonisation lui-même est
exceptionnelle des maladies de Assi bou présenté comme une cause de morbidité.

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

Plusieurs médecins expliquent ainsi l’im- puissante de l’épidémie d’ophtalmies


portance des fièvres par les grands remue- purulentes contractées sous l’influence des
ments de terres caractérisant les premières courants d’air, de l’abaissement de la
années de l’installation. Ernest Vézien, température et des froides rosées de la
qui a servi dans les colonies agricoles a pu nuit. Que de fièvres, que de diarrhées,
se convaincre, comme d’autres, « des d’engorgement des membres inférieurs,
dangers inséparables de l’établissement qui n’ont pas d’autre origine » (Boyer,
d’une colonie dans ce pays et du défriche- 1851, 38).
ment des sols vierges14 ». Le processus de Ces maisons ne possèdent « nulle part
colonisation agricole porterait donc en ni caves, ni greniers, ni cuisines, ni latrines
germe les limites de la colonisation. [et] des plantations d’arbres autour des
Souvent avancée pour comprendre la habitations seraient d’un immense avan-
situation sanitaire dans les villages, cette tage pour le maintien de la salubrité18 ».
raison n’est cependant pas unanimement De plus, à quelques exceptions près, les
adoptée. Drapier relève en effet que « les logements des colons sont mal tenus et
colons n’ont rien défriché ; les dangers de « beaucoup sont remplis d’animaux
cette opération ont pesé sur [les] soldats domestiques qui ajoutent à leur malprop-
qui, avant l’arrivée des colons, avaient été reté naturelle19 ». Sont ainsi inextricable-
chargés de préparer le sol en payant de ment liées hygiène publique et hygiène
leur santé […] ce travail préalable » individuelle des colons, centre d’intérêt
(Drapier, 1850, 24). des médecins qui en étudient divers
Les médecins jugent également de l’hy- aspects. Alimentation, vêtement, mode de
giène publique. D’après les ordres des vie, rien n’échappe à la plume du méde-
directeurs, chaque colon « doit balayer le cin, qui répercute également les évolu-
devant de son habitation et les immondi- tions pouvant rendre, au cours des années,
ces rassemblés en tas sont ensuite enlevés la vie dans les colonies moins difficiles.
par des préposés ad hoc15 ». Louis Laveran Goze relève par exemple, en 1851, que les
souligne que les eaux d’irrigation dans les choses ont bien changé depuis son inspec-
fossés bordent les rues du village d’El tion deux ans auparavant. À Novi, « l’as-
Afroun et forment de véritables marais pect du village qui est proprement tenu
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artificiels dont il faut se méfier16. L’habitat est satisfaisant ; toutes les rues sont faites
aussi constitue un point essentiel de l’hy- en chaussée et ont été macadamisées par
giène et tous les écrits sur les colonies agri- les colons, avec une forte couche de
coles relèvent les conditions de logement cailloux de rivière20 ». De même, l’alimen-
déplorables qui marquent leurs débuts : tation, d’abord fournie par l’administra-
tentes et mauvais baraquements d’abord, tion est décrite comme très monotone. Ce
des « logis de carton » dont se souvient le régime s’améliore progressivement mais
colon Eugène François (Rasteil, 1930, « ces commodités de la vie n’ont pu venir
55) ; puis se montent des maisons en dur, que tard, et c’est dès le début qu’elles
proposant des logements que l’inspecteur eussent été plus nécessaires » (Boyer,
Loyer dénonce en 1849 comme « trop bas 1851, 23). Quelques médecins se plai-
et trop étroits pour loger de grandes gnent de l’insuffisance de la ration,
familles17 ». Outre l’encombrement, notamment pour les enfants et y voient
Boyer estime que les « vices » de ces loge- « une des causes de [la] dépopulation21 »
ments « sont la cause prédisposante la plus constatée. Cependant, la population des

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colonies commence à croître, une ten- manière particulièrement aiguë la ques-


dance présentée comme le résultat de l’en- tion de la possibilité de l’acclimatement.
voi de nouveaux émigrants, « mieux choi- Le monde médical se demande, dans le
sis » (Prieur, 1853) que ceux de 1848. cadre d’une interrogation plus vaste sur
Une des causes de l’échec initial des l’adaptation de l’homme dans les climats
colonies agricoles tiendrait en effet à la chauds si l’Européen et plus particulière-
composition de leur population. Qu’at- ment le Français peut se naturaliser
tendre d’une population, demande Boyer, comme agriculteur en Algérie. D’un
dont « les deux tiers étaient de constitu- côté, le médecin militaire Boudin est
tion lymphatique, d’une constitution l’un des adversaires les plus convaincus
faible, souvent débilitée et d’un âge où de l’acclimatement et par suite, de la
l’acclimatement est, sinon impossible, du colonisation. En 1848, au moment où
moins fort douteux » ? Qu’attendre aussi l’Assemblée nationale discute du sort de
d’une population qui, « sur 458 individus l’Algérie, il cherche à réduire « à sa juste
dont elle se composait à son arrivée, ne valeur l’opinion qui s’efforce depuis
comptait que 150 chefs de famille ou céli- quelques temps à faire considérer
bataires, presque tous ouvriers d’art. […] comme chose démontrée l’acclimate-
De ce nombre, 10 à peine étaient habitués ment du Français à l’état d’agriculteur
aux rudes travaux des champs » (Boyer, dans la partie basse de l’Algérie »
1851, 29-30) ? Pour remédier à ce (Boudin, 1848, 1). Il proteste contre
problème, la loi du 20 juillet 1850 stipule ceux qui, comme Martin et Foley,
que les colons destinés à compléter les entendent poursuivre la colonisation
villages fondés en 1848 seront désormais d’un pays « qui coûte à la France déjà
choisis par les Conseils de préfecture plus de 1,4 M de francs et plus de
parmi les soldats libérés du service ou 100 000 soldats ; qui lui a coûté, en
ayant servi en Algérie et les cultivateurs 1846, plus de 100 millions de francs et
mariés d’Algérie ou de France22. L’origine plus de 7 000 combattants ; pays sans
géographique du colon a son importance : commer-ce et sans agriculture, dans
les Méridionaux étant censés « s’accli- lequel la mortalité de l’Européen enfant
mate[r] vite dans le nord de l’Afrique » et adulte, militaire et civil, s’élève à un
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(Martin et Foley, 1851, 252), un arrêté chiffre fabuleux ! et vous demandez que
ministériel de 1844 établit déjà que, l’on vous prouve que l’opération est
« dans l’intérêt de la santé des colons, la impossible ! » (Boudin, 1848, 19).
délivrance des permis de passage gratuit Ces arguments, à la fin de la Monar-
serait suspendue du 1er juin au 1er octobre chie de Juillet, auraient déjà « subjugué
pour les habitants des zones septentriona- plusieurs esprits [et] paralys[é] momen-
les de la France et de l’Europe » (Martin et tanément l’impulsion colonisatrice »
Foley, 1851, 256). (Martin et Foley, 1848, 4). Mais Boudin
aurait vu s’élever contre lui à peu près la
LES MÉDECINS, PARTISANS OU totalité des médecins « qui ont observé
en Algérie » (Topin et Jacquot, 1849, 5).
ADVERSAIRES
Pour ses détracteurs, il confondrait l’in-
DE LA COLONISATION ? fluence propre au climat et les causes
La forte mortalité des populations accidentelles, tenant de l’hygiène :
européennes en Algérie pose ainsi de « Sous le rapport de son climat, l’Algérie

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

n’a rien qui soit essentiellement nuisible Quesnoy prescrit notamment aux culti-
à la santé [...] si nous avons eu beaucoup vateurs de l’Algérie des ablutions journa-
de maux à déplorer, ils étaient presque lières et de fréquents bains généraux,
tous dus à des causes accidentelles que la s’appuyant sur le témoignage des
main de l’homme peut atteindre et anciens Romains « et ce qui se passe tous
éteindre23 », assure Quesnoy. Certes, si les jours sous nos yeux chez les
l’on ne s’habitue pas au miasme, il est Arabes25 ». Le médecin a donc un rôle de
néanmoins possible de transformer l’Al- conseil mais les responsabilités du colon
gérie en pays salubre, par « un combat en matière sanitaire, liées à la pérennisa-
qu’il faut livrer à la nature24 ». Le pays, tion du projet colonial, sont aussi régu-
en se transformant, devrait permettre lièrement rappelées.
finalement qu’y prospèrent des popula- Les chiffres officiels, qui indiquent la
tions coloniales. diminution du nombre de malades civils
L’acclimatement est possible, mais il traités dans les hôpitaux civils et militai-
s’agit d’un processus encadré par la res entre 1849 et 1851, sont présentés
médecine, à qui il revient, « sentinelle par les autorités comme la preuve que les
avancée des colonisations européennes travaux de desséchement ont amélioré
dans les pays chauds, d’éclairer la route les conditions sanitaires de la colonie et
et de guider les premiers efforts du légis- que l’acclimatement des populations
lateur », estiment Martin et Foley agricoles est en voie de progrès (minis-
(Martin et Foley, 1848, 4). Pour réussir, tère de la Guerre, 1853, 121), ce que
la colonisation « dépend de l’étroite et continue de récuser Boudin : « Dans les
constante combinaison des efforts de colonies agricoles, la mortalité annuelle
l’administration et des particuliers ». de la population européenne en 1850 et
L’État s’engageant à de lourds sacrifices, 1851 a dépassé 98 décès sur 1 000 hab. ;
les colons ont envers lui « des devoirs de en d’autres termes, la population a été
plus d’un genre à remplir. C’est souvent décimée » (Boudin, 1853, 29). En 1851
pour les avoir oubliés qu’ils se sont cependant, l’inspecteur Rietschel relève
perdus, qu’ils ont compromis en même que l’état sanitaire des colons de Monte-
temps leurs intérêts, leur vie et la cause notte est « meilleur qu’on ne l’espérait
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de la colonisation ». Depuis les débuts d’après l’expérience des maladies éprou-
de la conquête, « ce sont moins les vées par les soldats dans des lieux occu-
influences climatériques que l’omission pés pour la première fois [des résultats
ou l’inobservance de certaines mesures qui] modifieront peut-être les idées
hygiéniques qui ont été la cause des récentes sur l’acclimatement des Fran-
sinistres qu’on a eu à déplorer » car les çais en Algérie26 ». D’après le médecin
colons ont apporté d’Europe, « sans y Marcel Sierzputowski, plusieurs con-
vouloir rien changer, une hygiène qui trées de l’Algérie colonisées seraient en
n’était plus en harmonie avec la latitude 1851 « dans des conditions sanitaires
plus chaude de l’Algérie » (Martin et telles que positivement, elles peuvent
Foley, 1851, 222), alors que l’Européen, s’assimiler à la France27 ». Optimiste, ce
doit « prendre pour modèle les indigè- constat souligne la mise en place
nes ; s’informer de leurs habitudes, de progressive d’un dispositif sanitaire à
leurs mœurs, de leur genre de vie, pour y grande échelle sur le territoire de la colo-
conformer la sienne » (Boyer, 1850, 55). nie en voie d’organisation.

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CLAIRE FREDJ

LE PERSONNEL SOIGNANT, hôpitaux et ambulances militaires se


OUTIL DE LA COLONISATION multiplient ainsi que les effectifs du
service de santé. Au milieu du siècle, il
Les questions d’hygiène sont essentielles dispose d’un personnel médical repré-
parce que, écrit Pierre Fontez, « il y va de sentant à peu près le tiers de l’ensemble
l’avenir de nos colons et de la conserva- des médecins militaires français, 2 000
tion de nos possessions d’Afrique qui est infirmiers et 11 700 lits dans 38 hôpi-
nécessairement liée à celle de leur santé » taux (Bertaud et Serman, 1998, 263)32.
(Fontez, 1852, 7). Les maladies devien- Grâce à cette densité sanitaire, remarque
dront plus rares « si des mesures d’hygiène Barudel, les colons de 1848 « ne furent
sont dictées par des hommes de l’art, si ainsi jamais privés des services de la
aux jours de souffrance, de sains et vastes médecine33 ».
hôpitaux sont ouverts aux malades, si près Le service de santé a d’ailleurs dû satis-
d’eux des médecins instruits, expérimen- faire « à des obligations nouvelles34 »,
tés et dévoués veillent sur la santé de tous, que Joseph Barudel estime « plus diffici-
prodiguant au début les soins nécessaires les, plus pénibles que toutes celles qui
pour arrêter le mal28 ». nous étaient confiées jusqu’à ce jour sur
Le médecin est ainsi vu comme un la terre d’Afrique35 », en soulignant que
outil de la colonisation : il permet le dans les villages, le médecin est égale-
peuplement des colonies non seulement ment chirurgien et pharmacien. Il fait
parce qu’il empêche la population aussi partie du conseil consultatif des
présente de mourir, mais aussi parce colonies mis en place après 1850 et
qu’il évite que les colons ne « rapportent Rouis note enfin en 1851 que « depuis
en France une constitution détériorée et qu’on a cessé d’allouer des vivres en
de plus un découragement profond nature, l’attention du médecin a dû se
qu’ils communiquent à ceux qui les préoccuper d’une surveillance active, à
voient ou entendent leurs rapports29 ». l’égard des nouveaux fournisseurs36 ».
L’aspect psychologique des soins est Ces tâches diverses, parfois nouvelles,
aussi relevé par le docteur Paÿn pour provoquent une désorganisation du
qui « la vue d’un homme mourant sans service militaire, dénoncée par Mialhes.
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soins est bien capable d’effrayer […] la Le personnel des hôpitaux est calculé
population d’un village et de paralyser d’après les besoins du service avant l’ar-
les meilleurs travailleurs ». Il faut donc rivée des colons ; or ces derniers ont
« donner en Afrique, aux colons, dans « augmenté nos besoins et diminué nos
les campagnes, des médecins chargés de ressources. De là résulte que le service
veiller sur la santé30 ». hospitalier n’est jamais assuré d’une
Les soins s’organisent d’abord grâce à manière continue et qu’il est même
un personnel relativement diversifié, toujours sur le point d’être com-
mais majoritairement composé de promis37 ». Plusieurs médecins insistent
médecins de l’armée, du fait de leur sur le coût militaire de la colonisation,
nombre. On compte en effet en 1853, notamment sur « la mesure inique qui
pour 85 praticiens civils, environ 418 fait peser sur l’armée les fatigues et les
officiers de santé militaire (Féry, 1994, dangers du défrichement des terres
22)31. Avec l’accroissement de l’armée destinées à de prétendus colons français
d’Afrique (108 000 hommes en 1846), ou étrangers […]. Il est grand temps que

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

l’armée cesse d’être exploitée », affirme commissionnés par l’administration,


Boudin avec force en 1848 (Boudin, dispensent également leurs soins aux
1848, 20). colons. L’exercice de cette fonction,
La colonisation rurale pèse ainsi lour- instituée au début des années 1840,
dement sur l’armée et son service de suscite chez plusieurs de ses titulaires des
santé. Le service des colonies est donc interrogations quant aux droits et aux
souvent confié à des officiers de santé devoirs qu’elle exige : « Quels villages
militaire du grade de sous-aide ou aide- dois-je visiter ? Comment dois-je faire
major, c’est-à-dire les médecins les plus mon service gratuitement ou autrement,
inexpérimentés puisque en début de à qui dois-je mes soins ? Tout le monde
carrière38. Ce choix est critiqué par la peut-il à son gré dans chaque localité
plupart des inspecteurs. Goze par exem- dépendant de mon service s’arroger le
ple souligne que cette lourde charge est droit de me requérir ?43 », demande en
laissée à « des jeunes gens, très méritants 1849, le docteur Paÿn, qui rédige à l’in-
d’ailleurs, dont les études ne sont pas tention des autorités militaires un texte
terminées, dont la plupart n’ont pas appelant à la Nécessité d’un règlement
encore passé d’examen près des facultés, pour le service de santé dans les villages.
qui ne sont point docteurs enfin, exer- En créant les médecins de colonisation,
cent illégalement la médecine, livrés à écrit le commissaire civil de Sétif, le
eux-mêmes, seuls, sans contrôle médi- ministre de la Guerre « s’est proposé
cal, sans guide, au service de colonies d’alléger les officiers de santé militaire
dans la composition desquelles se trou- qui se trouvaient obligés de donner la
vent des vieillards, des femmes et des majeure partie de leur temps aux
enfants39 ». malades aisés de la population civile, de
C’est pourquoi, plusieurs officiers de mettre à la disposition directe des auto-
santé, comme le médecin chef Lagrave, rités locales des praticiens spéciaux, d’as-
exigent que les médecins des colonies surer enfin le service médical dans les
soient tous docteurs en médecine40. centres agricoles qui se trouvent éloignés
Goze soulève encore le problème des du chef lieu44 ».
sous-aides qui, en travaillant dans les Or il constate qu’à la longue, les
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colonies, cessent d’être sous les ordres de préoccupations que donne cette clien-
leurs supérieurs hiérarchiques et tèle payante empêche le praticien de
demande à ce que ces apprentis méde- s’occuper des indigents de la ville et rend
cins militaires demeurent, pour des illusoire les tournées rurales. Aussi les
raisons de discipline, sous la direction indigents s’adressent-ils à l’hôpital mili-
d’un officier de santé en chef41. Si les taire, augmentant la charge de travail
colonies agricoles doivent continuer à des médecins de l’armée. Dans les villes,
avoir un médecin militaire, écrit Vaillant le médecin militaire peut d’ailleurs
en 1851, il faudrait règlementer l’exécu- cumuler les obligations de son service et
tion de ce service et « le subordonner à les fonctions de médecin civil, comme le
l’officier de santé en chef de l’hôpital fait par exemple Leuret, médecin en chef
militaire par lequel les rapports seraient de l’hôpital militaire de Milianah45.
vérifiés42 ». En zone rurale se met dès lors en place
À côté des médecins militaires, des un dispositif médical dans lequel les
médecins civils dits « de colonisation », populations coloniales sont encadrées

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CLAIRE FREDJ

essentiellement par les médecins de l’ar- qu’il a prise de visiter tous les deux jours
mée. Des médecins civils, engagés dans le chacune des familles49 ».
cadre de la « médecine de colonisation » De même, l’officier de santé civil
lorsqu’ils exercent en zone rurale et dont Duval, à Mahelma « ne paraît pas
la position au sein du monde médical dépourvu de connaissances médicales et
colonial en voie de constitution se définit d’une certaine habitude pratique ».
peu à peu, en font aussi partie, ainsi que Piaget, en revanche, ne « paraît posséder
des médecins civils pratiquant dans les ni l’instruction suffisante, ni l’habileté
villes. Chargés de l’inspection médicale pratique ; il est âgé, usé, sourd. Il ne
de l’armée, les inspecteurs médico-mili- peut inspirer la confiance50 ».
taires jugent également du fonctionne- Michel Lévy, lors de son inspection de
ment du service de santé civil. Leurs 1851, tend d’ailleurs à dévaloriser de
rapports précisent la diversité du person- manière systématique les médecins
nel médical civil exerçant en Algérie au civils, peut-être pour mieux imposer son
milieu du XIXe siècle, composé de méde- idée d’un nécessaire contrôle par les
cins et d’officiers de santé français et médecins militaires de l’organisation des
étrangers (ministère de la Guerre, 1853, soins en Algérie. Ainsi, le médecin de
120)46 et apprécient diversement les apti- l’hôpital de Philippeville lui semble
tudes professionnelles et les manières « peu apte à comprendre les obligations
d’exercer leur service de ces confrères d’ordre, de régularité, des hiérarchies51 »
civils. À La Chiffa et à la Mouzaïa par et à Guelma, il estime que le docteur
exemple, Vergé, un médecin civil qui a Durant n’inspirant pas confiance, « les
exercé plusieurs années à Paris et en vrais malades ne s’adressent qu’aux
province, s’occupe du service médical médecins militaires et surtout au judi-
rural. Il visite tous les deux jours les cieux docteur Puel ». À Sétif encore, il
malades, voire plus souvent « pour des cas propose de supprimer le poste de l’offi-
urgents47 ». Le docteur Martin, « com- cier de santé civil Decœur, qui n’offrirait
missionné par l’administration, réunit pas assez de garantie médicale et de faire
pour remplir ces fonctions les conditions faire son service par des officiers de l’hô-
suffisantes de capacité, d’instruction et de pital militaire de la ville52. Vaillant va
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pratique48 » : il envoie régulièrement ses dans le même sens en rapportant que le
rapports et outre son service en ville, se R. P. Brumauld, installant un orphelinat
rend au moins une fois par semaine aux dans la ville, demande à l’intendant
mines de cuivre. À côté des docteurs- militaire l’assistance d’un médecin de
médecins exercent également des officiers l’armée « pour assurer à sa nouvelle colo-
de santé civils, comme Barbier, au nie les ressources de la médecine qu’il ne
Fondouck, dont l’inspecteur reconnaît la trouve pas à Bouffarick53 ».
valeur. À 62 ans, écrit-il, il « conserve Outre le problème de la qualité profes-
encore assez d’activité pour le service du sionnelle des médecins et officiers de
village. Sans être à la hauteur des connais- santé civils, qui peut refléter les tensions
sances modernes, et sans posséder toute au sein du monde médical, les inspec-
l’instruction théorique désirable, il a de teurs soulignent les difficultés qu’il y a à
bonnes habitudes pratiques et rend des contrôler les diplômes des praticiens non
services réels. On peut en partie attribuer français. Lévy a ainsi trouvé à Bône,
le petit nombre de maladies à la mesure « sous le nom de sous-aides civils des

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

auxiliaires sans titre médical ou pourvus d’une race mélangée de médicastres, de


d’un titre équivoque de provenance charlatans, de réfugiés, d’évadés qui
étrangère, et qui sont inutiles pour l’exé- trafiquent des titres subalternes ou
cution d’un service aussi restreint54 ». Le exotiques59 », sur lesquels l’administra-
service médical rural de la 2e circonscrip- tion ne peut s’appuyer. Il faut donc lais-
tion du Sahel d’Alger est, quant à lui, ser l’exercice médical aux seuls vrais
effectué par un certain Camps, sur lequel praticiens du pays, les médecins militai-
Vaillant n’a « pu obtenir de renseigne- res, au dévouement desquels « il sera
ments précis d’aucune sorte ». D’origine pendant longtemps nécessaire de recou-
mahonnaise, ce médecin « s’exprime rir60 ». Les médecins militaires doivent
d’une manière inintelligible et comprend donc évaluer les ressources médicales de
peu la langue française. Il est douteux la colonie, dans les villes comme dans les
d’ailleurs qu’il possède un titre légal pour campagnes, afin de prévoir jusqu’à quel
l’exercice de la médecine55 ». Les habi- point leur présence est indispensable
tants lui font si peu confiance qu’ils pour donner des soins à une population
préfèrent faire appel à un ancien interne civile dont les besoins détournent le
de Dely-Ibrahim, pratiquant d’ailleurs lui service de santé de ses tâches. La consti-
aussi sans titre légal56. Vaillant estime en tution d’un réseau sanitaire suppose dès
revanche qu’« il y aurait justice à […] lors un personnel que les médecins de
augmenter57 » le médecin de colonisation l’armée s’emploient à gérer : à Novi par
Sierzputkowski. Bien que, depuis le exemple, la suppression de l’officier de
milieu des années 1840, les médecins santé militaire est envisagée : « il suffira
d’Alger commencent à s’organiser, dans le qu’un médecin de Cherchell aille y faire
cadre notamment de la Société de méde- trois visites par semaine61 » tandis qu’à
cine d’Alger approuvée en 1847, André Philippeville, Lévy appelle au remplace-
Agnély, médecin-vaccinateur civil, estime ment du civil Mellet par un sous-aide,
dans son Mémoire sur la situation de la une mesure effectivement prise à El
médecine et de la pharmacie civile en Algé- Arrouch.
rie, que la médecine civile dans les villes De plus, fin 1851, les colons doivent
passer de la colonisation subventionnée
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de l’Algérie, « ne laisse pas moins à désirer
que celle des campagnes58 ». à la colonisation libre62. Les médecins de
l’armée s’intéressent aussi à cette transi-
tion et prévoient la future répartition du
DU PERSONNEL ET DES LIEUX DE personnel soignant. Comme il ne sera
SOINS :
possible, selon Lévy, « de fixer dans ces
UN RÉSEAU SANITAIRE EN VOIE DE
localités lointaines, excentriques, que
CONSTITUTION
des médecins de rebut, nous n’hésitons
Le choix des médecins pour les soins pas à considérer comme fatale la mesure
aux civils en Afrique est ainsi un sujet de qui consistera à introduire les médecins
réflexion fréquent dans les rapports des civils dans les colonies agricoles63 ». Au
médecins militaires. Selon l’inspecteur sujet de deux centres, Vaillant, moins
Lévy, l’absence de clientèle lucrative en radical, précise que « quel que soit le
Algérie exclut la possibilité d’y attirer régime auquel [ils] seront soumis
une élite médicale civile ; c’est pourquoi prochainement, la présence d’un méde-
on observe une « pullulation fâcheuse cin dans l’un ou l’autre est inutile : il

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CLAIRE FREDJ

suffit d’un médecin civil à Médéah pour Le service médical d’El-Afroun est
la ville, le dispensaire et les deux villages ainsi fait par un chirugien aide-major et
de Damiette et Lodi64 ». De même, une sœur de Charité ; à Lodi, une des
« quand les colonies auront entièrement trois sœurs de Saint-Vincent qui s’occu-
cessé d’être sous la direction et la tutelle pent de l’école, donne aussi des soins
de l’autorité militaire, le service de santé aux malades, et à Boutlébi, Louis Caza-
de Montenotte devra être confié au las estime nécessaire « de placer à
médecin civil de Tenez, avec obligation demeure un chirurgien sous aide-major
de visites périodiques au moins trois fois chargé de tout le service de la colonie, en
par semaine65 », pour consultation à lui donnant comme auxiliaire une sœur
heure fixe. Enfin, si la colonie de de charité et un infirmier69 ». Plusieurs
Ponteba entre dans le régime civil et médecins demandent que des sœurs
qu’un médecin civil d’Orléansville se hospitalières soient adjointes au person-
charge du service médical du village, nel des colonies agricoles, avec pour
« dans ce cas seulement où le village mission de préparer les tisanes et agents
serait sans médecin résident, il y aurait médicamenteux ordinaires, de veiller les
utilité à adjoindre aux religieuses qui malades, leur administrer les remèdes,
doivent être chargées de l’école et de faire des pansements simples... Riboulet
l’asile [ainsi qu’] une troisième sœur note en effet à propos de la sœur de
pour l’assistance des malades66 ». Charité, qu’à force d’observer et de
Plusieurs personnels soignants suivre le cours des maladies, « son intel-
complètent en effet le dispositif médical ligence devient médicale, discerne le
dominé par les médecins de l’armée. développement et la marche des phéno-
D’après Paÿn, aucun pharmacien ne mènes morbides et sait rendre à l’officier
tentera de s’établir dans les villages « tant de santé traitant le compte le plus exact
que tous les médicaments seront délivrés des symptômes qui se sont déroulés
gratuitement67 ». Dans son rapport sur pendant son absence70 ». Michel Lévy
le service médical de Castiglione, regrette d’ailleurs que dans les trois hôpi-
l’inspecteur Loyer suggère la nécessité taux civils de la province de Constantine,
« d’attacher à la pharmacie un homme les religieuses « administrent, dépensent,
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intelligent, colon ou autre, pour tenir ce manutentionnent », et soient de ce fait
local et seconder le médecin dans tout ce détournées en partie « de leurs attribu-
qui pourrait lui être confié68 », sans tions essentielles qui les fixent au lit des
préciser toutefois la formation de cet malades71 ». Chaque médecin reconnaît
homme. Il apparaît néanmoins que le ce rôle fondamental et sollicite souvent
véritable auxiliaire du médecin est la la venue d’une de ces auxiliaires
sœur de Charité, dont Olivier Faure a indispensables.
souligné la polyvalence et l’adaptation Le personnel féminin comprend aussi
aux nouveaux besoins médicaux. Arri- des sages-femmes, une profession qui s’or-
vées en Algérie au milieu des années ganise depuis la fin du XVIIIe siècle et dont
1830, ces religieuses voient leur pré-sence la formation exige un savoir médical théo-
progressivement se renforcer (Faure, rique et pratique « réel » (Gélis, 1988,
1999, 53-64 ; Dufourcq, 1993, 246 ; 109-238 ; Beauvalet-Boutouyrie, 1999,
Langlois, 1984, 441-442 ; Hardiman, 157-198). Le médecin en chef Lagrave
2006). demande en 1849 qu’une sage-femme

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

soit attachée à chaque colonie72 mais propose aussi de les affecter aux
l’exercice de cette profession connaît « crèches coloniales » qu’il suggère d’ins-
néanmoins des contraintes nombreuses. tituer78. Le médecin Duprat mentionne
Mialhes relève que dans une des colonies également une femme « infirmière à
du cercle de Mostaganem, il y a « deux l’hôpital colonial de Cherchell »
accoucheuses très capables mais elles ne (Duprat, 1850, 12), sans que l’on en
possèdent point [les] instruments [néces- sache plus sur son statut et Rietschel qui
saires] qu’elles n’ont d’ailleurs pas le droit se propose d’assigner un infirmier à
d’appliquer sans la présence d’un chaque infirmerie estime qu’il serait
docteur73 ». Parfois, comme à Ponteba, « avantageux que ce fût une femme car
« une sage femme sans diplôme a fait elle pourrait donner ses soins aux deux
quelques accouchements pour lesquels sexes79 ».
elle reçoit de l’administration une somme Un personnel relativement diversifié
fixe de 10 fr.74 ». Dans l’ensemble, dans les au sein duquel les figures principales
villages, ce métier encadré et d’une utilité restent, au milieu du XIXe siècle, le
reconnue, est peu rémunérateur. Jean- médecin militaire et la religieuse, s’em-
Louis Rouis relate ainsi « la clientèle de ploie donc à apporter ses soins aux civils
M. Marquès, naguère complète sous tous qui les reçoivent dans plusieurs lieux :
les rapports, a fini par se dégarnir du jour chez eux, mais aussi dans des hôpitaux
où une dame de la colonie, Mme Bourgeois, civils, installés dans les villes principales
a rapporté de Montpellier un brevet de sage- et qui reçoivent les malades pauvres ou
femme. Mme Bourgeois est aujourd’hui encore dans les hôpitaux et ambulances
devenue la providence de ses compagnes militaires qui accueillent les malades
qui, au moment de leurs couches, comme indigents des villes secondaires, des
toutes les femmes possibles, ne se rési- centres de colonisation et des campagnes
gnent qu’à grand’peine à se confier à un (ministère de la Guerre, 1853, 120 ;
médecin. Il est regrettable que l’extrême Hassendorfer, 1958, 78). Une infirmerie
pauvreté des colons rende son assistance est enfin censée être établie dans
extrêmement gratuite75 ». chacune des colonies agricoles de 1848.
C’est pourquoi, à Mahelma, l’inspec- Selon Mialhes, les locaux consacrés aux
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teur Vaillant, ayant recueilli de bons soins sont encore, en 1849, très insuffi-
renseignements sur la dame Sorel qui sants. Les infirmeries, écrit-il, ne sont
donne des soins éclairés aux femmes en souvent « que des salles de secours80 ».
couche, « sans être commissionnée par Les deux termes ne coïncident pas
l’administration76 », propose qu’une toujours : au Fondouck, où l’infirmerie
légère rétribution lui soit accordée. La a été fermée, il serait convenable d’ins-
position de ces auxiliaires se stabilise taller une petite salle de secours de
ainsi progressivement et Dély-Ibrahim quelques lits, compte tenu de l’éloigne-
comme Kouba disposent d’une « sage- ment de tout hôpital81, estime Vaillant.
femme subventionnée » et Sidi-Chami Toutefois, sous la plume de certains
d’un poste de sage-femme « rétribué77 ». médecins, « maison de secours » et
Outre les soins aux malades et l’aide aux « infirmerie » semblent recouvrir la
parturientes, on attend des sœurs de même réalité : sur les treize villages que
Charité et sages-femmes qu’elles incul- Joseph Goedorp inspecte en 1849, un
quent l’hygiène aux jeunes et Rouis seul dispose d’une infirmerie. Les

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maisons de secours à installer dans Cazalas écrit qu’« en raison de son éloi-
chaque point de colonisation sont soit gnement d’Oran, de l’importance qu’il
encore à l’état de projet, soit bâties mais nous semble susceptible d’acquérir et
pas encore meublées82. À Barral, l’infir- du nombre exceptionnel de malades
merie contient six lits et se compose de qu’il faut s’attendre à y voir la première
quatre pièces : « Une pour la pharmacie année, nous croyons très utile de créer
avec une cheminée pour les préparations une infirmerie à Boutlébi au moment
pharmaceutiques, deux pour les malades de l’arrivée de colons88 ». Pour des ques-
et une pour l’infirmier ou garde tions démographiques également,
malade » (Boyer, 1851, 42). Bien aérées, Michel Lévy propose quant à lui d’éle-
les salles sont cependant mal pavées et ver l’infirmerie de Jemmapes au rang de
comme le toit n’est pas encore plafonné, petit hôpital89. Il arrive enfin qu’un
l’eau goutte à l’intérieur. D’autres infir- même village dispose de plus d’un lieu
meries peuvent être plus importantes : de soins, comme à Marengo où le poste
Goze estime nécessaire d’en établir une à médical est tenu par le médecin Guéret
Marengo de 12 à 15 lits83. Dans les trois et la petite infirmerie par des sœurs90.
villages que visite Rietschel en 1849, Dans l’ensemble toutefois, c’est la
une maison entière est affectée à l’infir- suppression de plusieurs infirmeries qui
merie, dans laquelle d’ailleurs, « la sépa- est conseillée et Vaillant estime inutile
ration entre hommes et femmes n’est pas l’agrandissement de l’infirmerie de
assez marquée84 ». Zurich « qui ne sert déjà pas à grand-
Certaines de ces structures ont été établies chose91 ». On viendrait mieux au secours
dans l’urgence. Ainsi, à Montenotte, une des colons en organisant des secours à
infirmerie provisoire a été installée en domicile et, souligne Mialhes, on gagne-
1850 en période d’épidémie, « pour rait un local utilisable pour installer
porter des secours prompts à des l’école92. À Montenotte, la maison de
maladies à marche rapide85 ». Face au l’infirmerie est finalement donnée à un
choléra de 1849, pour édifier plus rapi- colon et une petite pharmacie est orga-
dement un hôpital à Marengo, le Génie nisée dans l’ancienne infirmerie du
aurait utilisé les pierres déjà taillées des Fondouck, « convertie en partie en
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ruines romaines du secteur (Bel, 1997, chapelle et en partie en habitation pour
127). L’utilité de ces locaux, sur laquelle les trois sœurs de Saint-Vincent93 ». S’il
les médecins de l’armée doivent se reste indispensable de réserver dans
prononcer, est cependant « diversement chaque village, comme le propose
appréciée86 ». L’existence d’une infirme- Riboulet, « deux pièces affectées au
rie dépend le plus souvent de la proxi- service de santé ; l’une [qui] sera en
mité d’un hôpital. Vaillant conseille même temps la salle de visite et la phar-
ainsi la suppression de l’infirmerie à macie, l’autre [qui] servira de logement
Lodi, puisque l’hôpital de Médéah est à au médecin94 », les soins à domicile
une courte distance87. Cela ne signifie doivent constituer la base sanitaire des
pas pour autant priver un village de colonies.
soins. Si à Ameur-el-Aïn, les 120 habi- Estimant que les hôpitaux et infirme-
tants n’ont pas d’infirmerie, Laveran ries « ne sont jamais que des asiles
demande néanmoins la présence d’une ouverts au malheur », Rouis juge néces-
sœur de Charité. En revanche, Louis saire de prendre en compte « cet esprit

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

spécial aux gens qui ont appris de bonne que sanitaire : en recommandant aux
heure à se soigner chez eux [qui] contri- médecins de traiter à domicile le plus
bue à éloigner ces habitants des maisons grand nombre de malades, « pour leur
hospitalières ». Il rappelle que c’est éviter les ennuis de l’hôpital et ne pas les
uniquement le défaut d’installation priver de la vue de leurs familles, ils
convenable qui a amené les colons à ignoraient qu’ils [les officiers de santé en
accepter une place à l’hôpital, « et chef ] nous privaient du seul [moyen]
encore, pour les y déterminer, fallait-il qui restait à notre disposition, la peur de
vaincre une foule de répugnances, l’hôpital98 ». Cependant, lorsqu’il est
surtout de la part des femmes et des question de supprimer l’hôpital militaire
enfants95 ». Les réticences à se faire de Koléah, Sierzputowski appelle à la
soigner à l’extérieur sont à mettre sur le création d’un établissement civil car le
compte de la pudeur : dans l’infirmerie district, « devant être augmenté de deux
de Barral, les femmes sont obligées de villages de la commune de Castiglione et
passer par la pièce des hommes. Aussi des deux en voie de création à Chaïba,
une seule est-elle venue s’y faire traiter donnera, outre une nombreuse popula-
« alors qu’il n’y avait personne d’autre » tion flottante, un effectif tel qu’il sera
(Boyer, 1851, 42). Mais les lieux collec- impossible de laisser ce district sans
tifs de soins, particulièrement l’hôpital, hôpital99 ».
provoquent surtout la crainte : un jeune De fait, de nombreux médecins consi-
soldat explique par exemple en 1852 à dèrent que le passage au régime civil
ses parents combien « ces maisons [lui] risque de désorganiser les soins hospita-
font peur : il y a trop de malades et il liers. Selon Michel Lévy, si les colonies
[lui] semble sans cesse au-dessus de ces agricoles sont « dépossédées de la bien-
rangs de lits dans ces longues salles faisante tutelle du ministre de la Guerre,
sombres voir l’oiseau de la mort qui les hôpitaux civils de Bône et de Philip-
plane en silence et attend le moment de peville ne suffiront pas au traitement des
vous enlever » (Michel, 1994, 161). À femmes et des enfants malades ». Pour
Coléah, en 1851, « l’immense majorité l’inspecteur, « les hôpitaux civils en
des malades se refus[e] péremptoirement Algérie ne sont en réalité et ne seront
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à être traités hors de chez eux96 » et l’hô- bien longtemps que des succursales des
pital est réservé aux célibataires et aux hôpitaux militaires [à] la charge du
porteurs de maladies honteuses ou incu- ministère de la Guerre100 ». Vaillant
rables. L’avantage de ce système de soins souligne d’ailleurs que l’hôpital de
à domicile, selon Rouis, permet en outre Douéra, est en fait « l’hôpital militaire,
à l’administration de réaliser des écono- cédé avec tout son matériel à l’adminis-
mies en limitant les entrées à l’hôpital. tration civile101 », où le service médical
Rares sont finalement les médecins s’effectue selon le règlement des hôpi-
favorables à l’hospitalisation, comme taux militaires de 1831. Lévy estime
Laveran qui juge préférable d’envoyer les donc que l’adaptation des hôpitaux
malades à l’hôpital pour les soustraire à civils au traitement des deux sexes ne
« l’influence du miasme » qui les a frap- pourra se faire que lentement et au
pés97. Quant à Barudel, il voit la possibi- moyen de grosses dépenses. Cette situa-
lité d’envoi des malades à l’hôpital tion continuera de morceler encore
comme un moyen coercitif davantage longtemps le traitement des malades

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CLAIRE FREDJ

civils et « d’y faire concourir deux ordres enfants, adultes dans une pièce unique où
de médecins », les uns militaires, les affluent chaque matin les malades107 »,
autres civils102. Aussi propose-t-il d’ap- proteste Barudel.
pliquer aux hôpitaux civils le mode de Après cette séance de consultations, le
gestion et de contrôle des établissements médecin effectue, normalement entre 9
militaires. heures et 10 heures, des visites à domicile
chez ceux dont les parents ont laissé le
nom à la visite du matin, et chez les
LE DÉROULEMENT DES SOINS malades déjà en traitement. En début
Outre la mise en place d’un cadre d’après-midi, de 13 heures à 14 heures, il
matériel et humain, les rapports des offi- se livre à la distribution des médicaments.
ciers de santé précisent la manière dont La fin de la journée est consacrée aux
les médecins organisent leur service contre-visites chez les colons atteints de
médical, la fréquence des visites et la maladies graves. Le service de santé fonc-
manière dont elles se déroulent, éclairant tionne sur ces bases tant qu’il y a peu de
un pan de l’histoire complexe de la médi- malades mais en période de fièvres, souli-
calisation des populations au XIXe siècle gne Lagrave, « ces pérégrinations se
(Faure, 1998, 53-68 ; Rieder, 2003, 260- renouvelant vingt fois par jour, chaque
271). Dans les colonies de la province fois que l’officier de santé était demandé
d’Alger par exemple, « chaque jour avant par un nouveau malade, il en résultait
la distribution des aliments, le tambour pour le malheureux chirurgien un service
bat la visite des malades à 7 h. », visite qui forcé qui dépassait de beaucoup les forces
dure jusqu’à 9 h. Sont invités à s’y rendre humaines108 ».
les colons « dès qu’ils sont atteints de la De façon générale, les rapports médi-
plus légère indisposition103 ». L’affluence caux pointent la pauvreté de l’équipe-
est parfois telle que deux heures ne suffi- ment médical des colonies. Loyer
sent pas toujours pour interroger les demande une boîte pour l’extraction des
malades. Dans l’ensemble, les consulta- dents et Mialhes réclame des instruments
tions ont lieu à l’infirmerie ou dans la de chirurgie, surtout un forceps et un
« maison de secours », parfois dans un spéculum109. Rouis, qui se félicite de les
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autre local, comme à Montenotte, où avoir obtenus, cherche alors à se procurer
elles se déroulent dans la pharmacie104. À une seringue, un clysopompe et une
La Ferme cependant, Rietschel relève baignoire portative110. Les médicaments
qu’aucun local n’est affecté aux consulta- sont fournis gratuitement dans les colo-
tions105. Deux ans plus tard, le même nies et à Montenotte, « une pharmacie
médecin décrivant la même colonie disposée sur des rayons dans l’une des
indique qu’en son centre se trouvent deux chambres [du] logement [du méde-
quatre maisons doubles et deux simples cin] suffit à la plupart des besoins111 ».
affectées à des services publics : église, D’ailleurs, ce que l’inspecteur Riboulet
presbytère, école, mairie, maison du appelle l’art de guérir dans les colonies
docteur106, parfois trop petite. À consiste à « simplifier autant que possible
Marengo, le directeur propose ainsi au la médication [et à] se borner à l’emploi
médecin de s’installer dans une seule de quelques remèdes dont l’action est
pièce de 3m 50, « comme s’il était possi- sûre et sanctionnée par l’expérience112 ».
ble d’interroger et de visiter femmes, Cette réflexion pourrait être l’illustration

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

d’un intérêt moindre pour des patients aussi entrevoir la manière dont se cons-
civils constituant une clientèle non solva- truit la relation entre le médecin et son
ble, ainsi que l’expression d’une méde- patient. Le médecin de colonisation
cine de masse limitée par la faiblesse des Paÿn se plaint notamment des « débats
moyens et des personnels. Face aux incessants entre le colon et le médecin ».
épidémies, ces derniers font de toute Sachant qu’un médecin salarié par le
façon défaut et lors du choléra de 1849, gouvernement doit visiter les malades
« à bout de science et de remèdes, certains du village, « le colon, persuadé qu’il doit
médecins-majors […] ne trouvèrent rien être traité, médicamenté gratuitement,
de mieux que d’ordonner aux habitants pousse l’exagération jusqu’à faire du
[de Barral] de danser » afin que le sang médecin son garde malade, son infir-
circule mieux (Rasteil, 1930, 60). Lors- mier […] ; il abusera tant qu’il pourra
qu’un médicament manque, il est obtenu parce qu’il croit n’avoir rien à payer.
« sur bon » à l’hôpital voisin. Celui de S’armant de la menace d’une plainte, il
Ténès par exemple distribue des sang- exigera deux ou trois visites par jour ;
sues, « toutes les fois qu’il n’a pas été dans chaque village chacun croit avoir
possible de se les procurer sur les lieux, droit au médecin, comme aux médica-
soit au marché arabe, soit directement ments, aux distributions de grains, de
dans quelque ruisseau voisin113 ». bœufs, d’arbres118 ».
Outre les visites et contre-visites, le Cette attitude face au médecin fonc-
médecin tente de vacciner les popula- tionnaire se retrouverait en ville où
tions qui ne le sont pas encore. Avec un même les quelques habitants suffisam-
succès limité : en 1849, Imbert doit ment aisés pour payer des honoraires au
ainsi se procurer du nouveau vaccin médecin s’y résigneraient difficilement
après les premières tentatives d’inocula- « parce qu’ils regardent comme un droit
tion114. Les vaccinations, « pratiquées le traitement gratuit par un médecin
avec des vaccins recueillis sur des stipendié119 ». En même temps, Vaillant
plaques ou dans des tubes » n’ayant remarque qu’à Cherchell, comme à
réussi nulle part, Mialhes recommande Tenes, « un grand nombre d’habitants,
« à tous les médecins des colonies de les pour éviter l’achat de médicaments,
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recommencer avec des vaccins pris de entrent à l’hôpital120 » et Juzanx, dans la
bras à bras115 ». Le médecin militaire colonie de Montenotte, se plaint « des
dispense aussi régulièrement des conseils préjugés en vertu desquels ils deman-
hygiéniques à la population, comme dent trop souvent les premiers secours à
ceux que le Conseil de l’armée rédige en des remèdes spécifiques, de leurs exigen-
1847116. Colman, chargé du service de la ces au sujet des médicaments dont ils
colonie et du camp d’Aïn Regador, voudraient faire provision pour
répand ainsi de sages conseils hygié- plusieurs jours121 ». La demande de
niques, « soit de personne à personne, médicaments ne concerne d’ailleurs pas
lorsqu’il [aperçoit] quelque infraction que les patients européens et, relève
aux règles de la santé, soit par des inter- Sierzputowski, « depuis qu’on n’accorde
ventions écrites et adressées à tous117 ». pas aussi largement par motifs d’écono-
En plus des tâches à accomplir et de mie des médicaments gratuits aux indi-
l’environnement matériel dans lequel gènes, les traitements à domicile [ont]
elles se déroulent, les rapports laissent pour ainsi dire disparu122 ». Vaillant

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CLAIRE FREDJ

remarque aussi la manière dont les Barudel a entretenues avec sa clientèle


musulmans peuvent se révéler réceptifs à forcée, pour des raisons certainement
l’offre médicale quand il écrit que le personnelles mais peut-être aussi liées au
voisinage d’un grand marché arabe met mépris que le militaire, habitué à être obéi
en rapport « le malade indigène avec le dans le cadre d’une médecine de masse,
médecin et les sœurs de Charité du éprouve pour le civil, lui-même peu
Fondouck [offrant] leurs conseils et enclin à supporter « l’arbitraire militaire »
leurs soins, qui sont recherchés et qui qui règnerait dans les colonies (Julien,
ont des résultats utiles123 », sauf pour les 1964, 371, 308). Son récit indique enfin
vaccinations (Turin, 1971). une volonté de sanctionner les contreve-
La demande de soins et des médica- nants sans arriver à « obtenir la plus légère
ments témoigne de ce rapport complexe punition contre ces récalcitrants d’un
qu’entretiennent le médecin et le malade genre tout nouveau », par exemple à obte-
au remède (Faure, 1993, 216-225 ; nir « que les vivres fussent retranchés à
Bonah et Rasmussen, 2005). Les normes ceux qu[’il] traitai[t]128 ». Ces tensions
sanitaires que les médecins cherchent à peuvent témoigner de l’opposition des
introduire révèlent les tensions inhérentes civils à un « régime du sabre » qui étend
au processus de médicalisation, qui s’ajou- alors son influence sur l’ensemble du
tent aux relations souvent difficiles qu’en- territoire algérien mais montrent égale-
tretiennent civils et militaires en Algérie. ment comment le médecin, considéré
Les rapports mentionnent « la négligence comme étant au service d’une population
des colons à observer les règles d’hy- coloniale, essaye parfois d’user de son
giène124 » et Barudel déplore, quant à lui, statut de militaire pour imposer les
l’indiscipline chez des clients qualifiés contraintes liées à l’exercice de son métier.
« d’intraitables » dans tous les sens du Celui-ci se heurte non seulement au civil
terme. Il se plaint de « l’indocilité des mais aussi au militaire, le directeur des
malades […] leurs excès, leurs fraudes, colonies faisant partie de l’armée.
leur indifférence pour les prescriptions
médicales qui leur étaient faites125 » *
amenant des « conséquences fatales ». À Charles-André Julien décrit le « délaisse-
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Montenotte, Juzanx, lors de ses consulta- ment » des colons de 1848 par l’armée et
tions dans les colonies, « fait autant que y pressent une manœuvre des autorités
possible prendre devant lui les remèdes militaires « pour condamner à l’échec,
actifs et désagréables126 » afin de veiller au pour des raisons politiques, la colonisation
respect de ses instructions, tandis que ouvrière » (Julien, 1964, 367-369). Le
Barudel indique les écarts de régime service de Santé aux armées est cependant
alimentaire, voire des « ivresses » alors crédité en 1850 d’avoir « exercé une part
qu’il tente de traiter des dysenteries. D’au- incontestable d’influence sur la mortalité
tres refusent de se rendre à l’hôpital de et les progrès129 » de ces établissements.
Blidah, comme le médecin l’a ordonné. Il Intégrées dans un réseau sanitaire
décrit donc « tout ce qu’il y a d’indocile, composé de plusieurs types de structures
d’inflexible dans quelques-unes de ces et de personnels médicaux, les colonies
natures vicieuses dont la santé nous est agricoles de la IIe République sont un
confiée127 ». Ce vocabulaire souligne les exemple de la manière dont l’armée a pu
relations visiblement déplorables que jouer un rôle majeur dans la colonisation

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

en cherchant à protéger la santé des soucieux des pudeurs et des répugnances


populations coloniales, dont la survie est pouvant exister vis-à-vis des hôpitaux130.
essentielle à la mise en place d’une colo- Diversement acceptée, cette médicali-
nie de peuplement. Dans un contexte de sation montre comment l’armée tente
pénurie relative, de contraintes nombreu- d’affirmer son emprise sur un territoire
ses notamment financières, les rapports et une population par l’imposition de
des médecins de l’armée esquissent le soins curatifs et préventifs, mais égale-
paysage sanitaire en train de naître en ment la façon dont se produit la rencon-
Algérie, au sein duquel domine la méde- tre d’une offre médicale diversifiée et
cine militaire. Cette dernière peut se d’une demande médicale non moins
montrer brutale ; elle est surtout le plus complexe, qui, si elles ne s’accordent pas
souvent impuissante face à la maladie. toujours sur la forme, correspondent sur
Elle propose néanmoins un encadrement le fond.
médical effectif qui cherche, autant que Claire FREDJ
faire se peut, à fournir un service aussi Université François Rabelais
proche que possible de celui qui prévaut Tours
alors dans la société civile, en étant claire.fredj@wanadoo.fr

NOTES
1. Sur cet épisode existent quelques témoignages, Emerit (dir.), La révolution de 1848 en Algérie,
voir Maxime Rasteil, À l’aube de l’Algérie fran- Paris, Larose, 1949 ; Charles-André Julien,
çaise. Le calvaire des colons de 1848, Paris, E. Histoire de l’Algérie contemporaine, t. I, Paris,
Figuière, 1930 ; Louis Reybaud, Rapport présenté PUF, 1964, p. 364-375, Yvette Katan, « Les
au ministre de la Guerre par la commission colons de 1848 en Algérie : mythes et réalités »,
d’inspection des colonies agricoles de l’Algérie, le 16 RHMC, n° XXXI, avril-juin 1984, p. 177-202.
novembre 1849, Paris, Imprimerie nationale, 2. Les colonies créées par la loi du 19 septembre
1849. Plusieurs monographies de villages de 1848 sont : 1) dans le département d’Alger : El
colonisation ont également été publiées, par
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Afroun, Bou-Roumi, Marengo, Zurich, Novi,
exemple : Victor-Élie Dejardins, Cent ans d’effort Castiglione Tefschoun, Lodi, Damiette, Monte-
français à Assi-Bounif, Oran, H. Chazaud, 1948 ; notte, Ponteba, La Ferme ; 2) dans le départe-
Id. , Un siècle de colonisation à Rivoli 1848-1948, ment d’Oran : Aboukir, Rivoli, Aïn Nouissy,
Oran, H. Chazaud ; Paul Garcia, Saint-Louis, Tounin, Karouba, Aïn-Tedeles, Souk-el-Mitou,
village oranien (1848-1948), Oran, Heintz, Saint-Leu, Damesme, Arzew, Mouley-Magoun,
1949 ; S. Fontanilles, Colonies agricoles. Saint- Kléber, Mefessour, Saint-Cloud, Fleurus, Assi-
Cloud, Oran, Fouques et Cie, 1896 ; Hildebert Ammeur, Assi-ben-Fereah, Saint-Louis, Assi-ben-
Isnard et Henri Roseau, Comité départemental Okba, Assi-bou-Nif, Mangin ; 3) dans le départe-
d'Alger pour la célébration du centenaire de la Révo-
ment de Constantine : Jemmapes, Gastonville,
lution de 1848 en Algérie, Alger, A. Joyeux, 1950 ;
Robertville, Heliopolis, Guelma, Millesimo,
Francis Llabador, Nemours, Djemâa-Ghazaouât,
Petit, Mondovi, Barral.
monographie, Alger, J. Carbonel, 1948 ; Robert
Tinthoin, Assi-ben-Okba, un village de Parisiens 3. AVdG 70/34, N.-F.-G. Rietschel, Rapport
de 1848, Oran, Heintz, 1949. Des études généra- médical sur les colonies agricoles de La Ferme,
les sur cette population ont également été réali- Ponteba et Montenotte, inspection de 1849, 4 août
sées, notamment Maurice Bel, Les colonies agrico- 1849, p. 40.
les en 1848, chez l’auteur, Nice, 1997 ; Marcel 4. Ibid., p. 24.

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CLAIRE FREDJ

5. AVdG 70/12, J.-F. Mialhes, Inspection des colo- 21. AVdG 70/11 bis, Les officiers de santé en
nies agricoles de la circonscription de Mostaganem, chef de l’armée, Résumé…, op. cit., p. 9.
1849, p. 7. 22. Loi relative à l’emploi du crédit de 5 M.
6. AVdG 70/38, Michel Levy, Inspection médicale, ouvert par la loi du 19 mai 1849 pour les colonies
service civil, Province de Constantine, Marseille, 14 agricoles de l’Algérie, Bulletin des lois de la
novembre 1851, p. 3. République française, Xe série, tome VI, 2e semes-
7. AVdG 70/35, Antoine-Paul Vaillant, Inspection tre 1850, p. 174.
de la colonie agricole de Ponteba, 20 octobre 1851. 23. AVdG 70/2, Quesnoy, , op. cit., p. 19.
8. AVdG 70/26, Jean-Louis Rouis, Rapport sur 24. AVdG 70/4, Vezien, op. cit.
l’inspection médicale faite dans la colonie de Casti- 25. AVdG 70/2, Quesnoy, op. cit., p. 51.
glione et annexe pour l’année 1851, au Conseil de
26. AVdG 70/34, N.-F.-G. Rietschel, Rapport sur
santé, 13 août 1851, p. 6 ; AVdG 70/30, Louis
l’inspection médicale de la colonie de Montenotte,
Laveran, Rapport sur l’inspection médicale des colo- août 1851, 26 août 1851. À partir de 1880, les
nies et des dépendances agricoles de l’Afroun et de taux de croissance de la population européenne
Marengo, 11 août 1851 ; ce n’est qu’après 1856 que en Algérie supérieurs à ceux de la métropole
la mortalité commence à baisser rapidement dans la amènent René Ricoux à y voir « les preuves non
population européenne, voir Kateb, 2001, 33. équivoques de sa vitalité, de son adaptation sur le
9. AVdG 70/2, Ferdinand Quesnoy, Conseils hygié- sol algérien », René Ricoux, La démographie figu-
niques aux cultivateurs en Algérie, 1849, p. 55. rée de l’Algérie. Étude statistique des populations
10. Ibid., p. 2. européennes qui habitent l’Algérie, Paris, G.
Masson, 1880, p. 219.
11. AVdG 70/11 bis, Les officiers de santé en
chef de l’armée, Résumé des observations des méde- 27. AVdG 70/27, Marcel Sierzputowski, Docu-
cins inspecteurs des colonies agricoles, Alger, le 31 ments statistiques médicaux pour le district de
octobre 1849, p. 2. Koléah depuis l’an 1844 jusqu’au 31 octobre 1851,
complets pour les villages civils, y compris les colonies
12. Ibid, p. 4.
suisses, 10 décembre 1851.
13. AVdG 70/14, Louis Cazalas, Rapport sur
28. AVdG 70/1, A. Payn, Nécessité d’un règlement
l’inspection médicale des colonies agricoles de la
pour le service de santé dans les villages, 1849.
division d’Oran en 1851, 1851, p. 15.
29. AVdG 70/4, Vezien, op. cit.
14. AVdG 70/4, Ernest Vezien, De l’influence des
maladies de l’Algérie sur la colonisation et des 30. AVdG 70/1, Payn, op. cit.
moyens de les combattre, 1856. 31. Les statistiques officielles indiquent ainsi pour
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15. AVdG 70/43, Hippolyte Lagrave, Rapport les praticiens civils 62 docteurs en médecine et 23
adressé à M. l’Intendant militaire de l’Armée officiers de santé. Plus du tiers pratique à Alger. Sur
d’Afrique par M. Lagrave, médecin en chef de l’hô- la répartition des personnels médicaux civils sur le
pital militaire de Philippeville, chargé de l’inspec- territoire de la colonie, cf. Artus Mayeux, Annuaire
tion médicale des colonies agricoles de Jemmapes, de l’Algérie (administratif, militaire, commercial,
Gastonville et de Robertville, 14 août 1849, p. 13. statistique et agricole) pour 1850, Alger, chez
Bernard, 1850 et Jules Duval, Tableau de l’Algérie.
16. AVdG 70/30, Laveran, op. cit. Annuaire descriptif et statistique de la colonie pour
17. AVdG 70/26, Loyer, Inspection médicale des 1854, Paris, Just Rouvier, 1854.
colonies agricoles d’El Afroun et Castiglione, 2 32. Voir aussi Regards sur la France. Le service de
juillet 1849, p. 3. santé des armées en Algérie, 1830-1958, 2e année,
18. AVdG 70/11 bis, Les officiers de santé en n °7, octobre-novembre 1958, p. 75-95, p. 81.
chef de l’armée, Résumé…, op. cit., p. 7. 33. AVdG 70/25, Joseph Barudel, Rapport sur les
19. AVdG 70/26, Loyer, op. cit., p. 5. colonies agricoles de la province d’Alger, adressé au
20. AVdG 70/33, Eugène Goze, Rapport d’inspec- Conseil de santé des armées, 20 juin 1850.
tion médicale des colonies agricoles de Novi et 34. AVdG 70/52, Rapport au ministre sur la situ-
Zurich, 18 août 1851. ation du personnel en Algérie, novembre 1850.

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

35. AVdG 70/25, Barudel, op. cit. 53. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [2 octobre
36. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 9. 1851], op. cit.
37. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 19. 54. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 8.
38. Cadre des médecins de l’Armée (1836-1852). 55. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du
L’année 1852 voit la réorganisation du service de département d’Alger, service médical civil rural, 2e
santé par la fusion des professions de médecins et circonscription du Sahel d’Alger, 30 septembre
de chirurgiens. (voir tableau) 1851.
39. AVdG 70/32, Eugène Goze, Rapport d’inspec- 56. Ibid.
tion médicale des colonies agricoles de Marengo, 57. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du
Zurich et Novi, 30 juillet 1849, p. 7. département d’Alger, service médical civil de
40. AVdG 70/43, Lagrave, , op. cit., p. 50. Coléah, 1er octobre 1851.
41. AVdG 70/32, Goze, Rapport [1849], p. 8. 58. Revue du progrès de l’Algérie, Bulletin officiel
des travaux de la Société de Médecine d’Alger, de la
42. AVdG 70/35, Vaillant, Inspection [20 octobre
Société pour l’extinction du paupérisme par la colo-
1851], op. cit.
nisation de l’Algérie, des Comices agricoles et autres
43. AVdG 70/1, Payn, op. cit. Sur les débuts de la Sociétés scientifiques, théoriques et pratiques de la
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janvier 1853, voir Benjamin Milliot, La médecine p. 13.
de colonisation en Algérie, Bône, imp. du Courrier
59. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 9.
de Bône, 1893.
60. AVdG 70/33, Vaiullant, Inspection médicale
44. AVdG 70/8, s. n., s. d.
de la colonie de Zurich, 26 octobre 1851.
45. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du
61. AVdG 70/32, GOZE, Rapport [1849], p. 17.
département d’Alger, service médical civil de Milia-
nah, 24 octobre 1851. 62. Après le coup d’État, Saint-Arnaud fait accor-
der des crédits aux colonies jusqu’en janvier 1853
46. Le décret du 12 juillet 1851 rend exécutoires
(voir Julien, 1964, 374).
en Algérie les lois sur l’exercice de la médecine et
de la chirurgie. Ainsi, « les médecins et chirur- 63. Ibid., p. 17.
giens gradués par les universités étrangères, les 64. AVdG 70/26, Vaillant, Inspection des colonies
officiers de santé et les sages-femmes reçus par les de Lodi et Damiette, 9 octobre 1851.
jurys médicaux de France ne peuvent exercer en 65. AVdG 70/34, Vaillant, Inspection sur la colo-
Algérie qu’en vertu d’une autorisation spéciale du
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nie agricole de Montenotte, 22 octobre 1851.
ministre de la guerre », ministère de la Guerre,
1853, 120. Voir les listes dressées en application 66. AVdG 70/35, Vaillant, Inspection [20 octobre
de ce texte, AN F/17/4556². 1851].
47. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du 67. AVdG 70/1, Payn, op. cit. ; AVdG 70/37,
département d’Alger, Service médical rural, 7 octo- Vaillant, Inspection [30 septembre 1851], op. cit.
bre 1851. 68. AVdG 70/26, Loyer, op. cit., p. 13.
48. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du 69. AVdG 70/30, Laveran, Rapport, op. cit. ;
département d’Alger, service médical civil de Ténès, AVdG 70/26, Vaillant, Inspection [9 octobre
21 octobre 1851. 1851], op. cit. ; AVdG 70/14, Cazalas, op. cit., p.
49. AVdG 70/29, Vaillant, Inspection médicale du 5.
Fondouck, 30 septembre 1851. 70. AVdG 70/40, Nicolas Riboulet, Rapport sur
50. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale du le service médical et l’état sanitaire des centres agri-
département d’Alger, service médical civil de Bouf- coles de la subdivision de Bône, juillet 1851.
farick, 2 octobre 1851. 71. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 5.
51. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 8. 72. AVdG 70/43, Lagrave, op. cit., p. 50.
52. Ibid., p. 12. 73. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 21.

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CLAIRE FREDJ

74. AVdG 70/35, Vaillant, Inspection [20 octobre 103. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
1851], op. cit. 104. AVdG 70/34, Rietschel Rietschel, Rapport
75. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 6. [1849], op cit., p. 56.
76. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [2 octobre 105. Ibid., p. 24.
1851], op. cit. 106. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op.
77. AVdG 70/11, Circonscriptions du territoire cit.
civil. Indication des villages ayant un médecin civil 107. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
stipendié.
108. AVdG 70/43, Lagrave, op. cit., p. 21.
78. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 20.
109. AVdG 70/26, Loyer, op. cit., p. 10.
79. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op.
cit., p. 8. 110. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 8.
80. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 22. 111. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op.
cit.
81. AVdG 70/29, Vaillant, Inspection [30 septem-
bre 1851], op. cit. 112. AVdG 70/40, Riboulet, op. cit.
82. AVdG 70/13, Joseph Goedorp, Rapport d’in- 113. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op.
spection, 1849, p. 7. cit. Dans les villes, les médicaments sont donnés
gratuitement aux indigents inscrits et délivrés sur
83. AVdG 70/32, Goze, Rapport [1849], op. cit.,
bons signés du commissaire civil, par un pharma-
p. 17.
cien adjudicataire qui exécute les prescriptions.
84. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1849], op.
114. AVdG 70/12, Imbert, Colonie agricole de
cit., p. 7.
Kharouba, Registre d’inspection des malades, 7 juillet
85. AVdG 70/34, Vaillant, Inspection [22 octobre 1849.
1851], op. cit.
115. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 23.
86. AVdG 70/13, Goedorp, op. cit., p. 7.
116. AVdG 70/47, Note pour le Conseil de santé des
87. AVdG 70/26, Vaillant, Inspection [9 octobre armées, Instruction hygiénique pour les colons récem-
1851], op. cit. ment arrivés en Algérie, Paris, le 9 janvier 1847.
88. AVdG 70/14, Cazalas, op. cit., p. 5. 117. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1849],
89. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 18. op. cit., p. 57.
90. AVdG 70/30, Laveran, op. cit. 118. AVdG 70/1, Payn, op. cit.
91. AVdG 70/33, Vaillant, Inspection [26 octobre 119. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [21 octobre
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1851], op. cit. 1851], op. cit..
92. AVdG 70/12, Mialhes, op. cit., p. 22. 120. AVdG 70/37, Vaillant, Inspection médicale
93. AVdG 70/34, Rietschel Rapport [1851], op. du département d’Alger, service médical civil de
cit. ; AVdG 70/29, Vaillant, VAILLANT, Inspec- Cherchell, 28 octobre 1851.
tion [30 septembre 1851]. 121. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit.
94. AVdG 70/40, Riboulet, op. cit. 122. AVdG 70/27, Sierzputowski, op. cit.
95. AVdG 70/26, Rouis, op. cit., p. 12. 123. AVdG 70/29, Vaillant, Inspection [30 septem-
96. Ibid., p. 7. bre 1851], op. cit.
97. AVdG 70/30, Laveran, op. cit. 124. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit.
98. AVdG 70/25, Barudel, op. cit. 125. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
99. AVdG 70/27, Sierzputowski, op. cit. 126. AVdG 70/34, Rietschel, Rapport [1851], op. cit.
100. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 5-6. 127. AVdG 70/25, Barudel, op. cit.
101 AVdG 70/37, Vaillant, Inspection [30 septem- 128. Ibid.
bre 1851], op. cit. 129. AVdG 70/52, Rapport au ministre sur la
102. AVdG 70/38, Levy, op. cit., p. 5. situation du personnel en Algérie, novembre 1850.

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

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RÉSUMÉ
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Dans les premières décennies de la conquête nouvelles conditions d’existence. Ces difficul-
en Algérie en 1830 se pose la question de la tés posent la question de l’acclimatement,
possibilité d’y installer une population euro- diversement appréciée par les médecins. Les
péenne. La force avec laquelle les maladies rapports des médecins de l’armée esquissent le
déciment le corps expéditionnaire et les paysage sanitaire en train de naître en Algérie.
colons rend en effet cette implantation Y domine, particulièrement dans les campa-
problématique, surtout au milieu du XIXe gnes, le médecin militaire, aux côtés duquel
siècle, quand la République, en 1848, orga- travaillent aussi des médecins civils, des sœurs
nise la venue de 12 000 colons, qui viennent de charité et des sages-femmes. Outre la mise
compléter une population rurale française en place d’un cadre matériel et humain, les
d’environ 20 000 personnes. rapports des officiers de santé précisent la
Le contrôle sanitaire de ces nouveaux villages manière dont les médecins organisent leur
est essentiellement effectué par des médecins service médical, la fréquence des visites et la
militaires. Ils sont les témoins de leurs diffici- manière dont elles se déroulent, éclairant un
les débuts et notamment de la forte mortalité pan de l’histoire de la médicalisation au XIXe
de populations urbaines peu habituées à leurs siècle

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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

SUMMARY
During the first decades of the conquest of who were ill-prepared for their new environ-
Algeria in 1830 there was great speculation ment. The change of climate adjustment to the
over the possibility of European populations the new environment seems to be a major
settling there permanently.The fatal diseases factor which was not always addressed by
which decimated marching troops and settlers doctors. The army surgeons' reports give a clear
alike rendered any permanent settling highly overview of hygiene conditions shaping up in
problematic especially when in the middle of Algeria at the time. In rural areas especially the
the XIXth century the new Republic in 1848 army surgeon has a key-role working alongside
decided to send over 12 000 settlers to join civilian surgeons, benevolent nuns and midwi-
the existing French rural colonial population ves. Beyond the human and material interest
the surgeons' reports provide a very detailed
estimated at 20 000.
insight into the ways the doctors organised
Healthcare in those new villages is mainly their medical service, they tell us how
administered by army surgeons. They provide frequently they visited patients and what
invaluable first-hand accounts of their early happened during those visits. They unfold for
struggles as well as evidence of high mortality us new aspects of the history of medicalisation
amongst the originally mostly urban populations in the nineteenth century.
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Effectifs du Service de santé des Armées

152
Médecin et
Médecin Médecin Chirurgien
chirurgien Chirurgien Total
16/07/2007

et ordinaire re Médecin aide-major Sous-


Année principal de re e major de 1 re e (y compris les
chirurgien re e de 1 et 2 e adjoint de 1 et 2 aide
1 et 2 et 2 classe pharmaciens)
inspecteur classe classe
classe
15:58

1836 4 21 53 233 24 374 410 1213


1841 4 (2+2) 38 (14+24) 46 249 45 402 460 1377
Aide-
Page 152

Principal de re Total (y
Médecin re Principal Major de 1 Major de Aide-major major
1 e e re e compris les
inspecteur de 2 classe classe 2 classe de 1 classe de 2
classe pharmaciens)
classe
1852 7 40 40 100 200 340 340 1226
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LES MÉDECINS DE L’ARMÉE ET LES SOINS AUX COLONS EN ALGÉRIE (1848-1851)

Carte 1 Carte générale de l’Algérie

Carte 2 Département d’Oran


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Les points les plus gros : villes principales citées dans le texte
Les points plus petits avec les noms soulignés : colonies agricoles fondées en 1848 ; les noms non souli-
gnés : autres points de colonisation.

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Carte 3 Département d’Alger

Carte 4 Département de Constantine


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Les points les plus gros : villes principales citées dans le texte
Les points plus petits avec les noms soulignés : colonies agricoles fondées en 1848 ; les noms non souli-
gnés : autres points de colonisation.

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