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Histoire de la parenté ou anthropologie historique de la

parenté ? Autour de Kinship in Europe.


François-Joseph Ruggiu
Dans Annales de démographie historique 2010/1 (n° 119), pages 223 à 256
Éditions Belin
ISSN 0066-2062
ISBN 9782701158150
DOI 10.3917/adh.119.0223
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ANNALES DE DÉMOGRAPHIE HISTORIQUE 2010 n° 1 p. 223 à 256

NOTE CRITIQUE
HISTOIRE DE LA PARENTÉ OU ANTHROPOLOGIE HISTORIQUE
DE LA PARENTÉ ?
AUTOUR DE KINSHIP IN EUROPEI.
par François-Joseph RUGGIU

L’ouvrage collectif dirigé par David W. chronologique, par la diversité des théma-
Sabean, Jon Mathieu et Simon Teuscher, tiques qu’il aborde et par la force des
Kinship in Europe Approaches to Long- problématiques d’ensemble qu’il offre à la
Term Development (1300-1900), est sans discussion collective. Il part de l’idée que
conteste un des plus stimulants qui aient les divisions traditionnelles entre les diffé-
été récemment publiés dans le champ de rentes sciences humaines ont eu des effets
l’histoire de la famille et de la parenté2. Il majeurs dans le domaine de l’étude de la
paraît à un moment crucial où cette famille et l’étude de la parenté qu’il est
dernière est justement en train de s’auto- peut-être temps de dépasser. Elles remon-
nomiser par rapport aux champs qui lui tent, en effet, à la seconde moitié du XIXe
sont proches comme la démographie siècle, lorsque la sociologie, l’ethnologie
historique. Elle est également en train et l’anthropologie se sont constituées en
d’attirer à elle de plus en plus de cher- tant que sciences au prix de violents
cheurs venus d’horizons différents : les combats épistémologiques qu’elles ont
anthropologues naturellement ; les menées aussi bien les unes contre les
historiens du droit, dont l’apport est autres que contre les humanités clas-
essentiel aussi bien en ce qui concerne siques, en particulier l’histoire (Simiand,
l’étude de la norme que des pratiques 1903). Comme le note Sylvia Yanagisako
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qui s’articulent autour d’elles (Bonfield (p. 33-45)3, la parenté est alors devenue
dans Kertzer et Barbagli, 2001) ; les l’objet central de l’anthropologie, qui a
historiens de la société et des groupes pris en charge les sociétés dites primitives,
sociaux ; les spécialistes de littérature ou « froides », alors qu’elle a toujours
(voir, entre autres, Tadmor, 1992 ; Perry, occupé une place marginale dans la socio-
2004) ; ou encore, les spécialistes d’une logie et dans l’histoire qui s’intéressaient
business history attentive aux rôles des aux sociétés « chaudes ». Les grandes
cycles familiaux dans le développement interprétations générales de l’évolution
des entreprises et des secteurs écono- des sociétés occidentales construites par
miques (Casson et Rose, 1997 ; Owens, les sociologues, comme Max Weber ou
2002 ; Alfani, 2007a ; Cavaciocchi, Talcott Parsons, ou par les historiens, ont
2009 ; Alfani et Gourdon, 2010). donc tendu à minorer le rôle de la
Le volume édité par David W. Sabean, parenté. Jusque dans les années 1970, la
Jon Mathieu et Simon Teuscher est une plupart des chercheurs étaient persuadés
étape importante dans ce processus d’au- que les processus de modernisation des
tonomisation, à la fois par son ampleur sociétés européennes, fondés, à partir de

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FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

la Renaissance, sur l’essor de l’État et des 1986, l’historien britannique David


institutions impersonnelles ou sur le Cressy appelait ainsi à sortir de l’étude de
développement de l’économie de marché, la famille nucléaire pour envisager les
passaient nécessairement par l’effacement interactions des individus avec leur
progressif de la place de la parenté dans la parenté (Cressy, 1986). Il insistait, en
vie de l’individu autonome. La famille particulier, sur les formes de solidarité qui
conjugale, formée par les parents (le père pouvait les unir. Tamara Hareven a ainsi
et la mère) et les enfants, avec une action montré que la famille n’a jamais été l’ob-
éventuelle des grands-parents et des colla- jet passif des transformations industrielles
téraux immédiats (oncles, tantes, cousins du XIXe siècle mais qu’elle en a partielle-
germains) pouvait seule conserver une ment façonné les modalités tout en
action efficace sur l’individu et donc rete- s’adaptant à elles (Hareven, 1991, 2000).
nir l’attention des chercheurs. Les travaux Et l’histoire sociale française, de l’époque
de Peter Laslett, qui s’intéressait plus médiévale (Guerreau-Jalabert et al., 2002)
précisément au ménage conçu comme comme de l’époque moderne (Nassiet,
une unité de résidence, d’Edward Shor- 2000; Marraud, 2009; Chatelain, 2008 ;
ter, de Lawrence Stone ou de Ronald Haddad, 2009), tend actuellement à
Trumbach se sont inscrits, à des degrés intégrer les acquis de l’anthropologie de
divers, dans cette perspective. la parenté.
Les éditeurs de Kinship in Europe esti- Mais les éditeurs de Kinship in Europe
ment, au contraire, que la parenté est une sont sans doute les premiers à le faire
dimension fondamentale des sociétés aussi systématiquement et avec une
occidentales des époques médiévales, ambition aussi large, alors que les grandes
modernes et également contemporaines, thèses d’histoire démographique avaient,
c’est-à-dire de ces sociétés que les anthro- jusque dans les années 1980, laissé la
pologues qualifient de « complexes » où le question de la parenté dans l’ombre. Il est
choix du conjoint n’est pas prescrit par vrai que les reconstitutions de popula-
des règles mais seulement encadré par tions, qui ont été menées jusque dans les
une série d’interdits (Barry, 2008). Ces années 1980 dans la perspective de l’his-
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sociétés doivent donc être étudiées, selon toire sérielle ouverte par Louis Henry,
eux, à travers le prisme des éléments anonymisaient les données lorsqu’elles les
fondamentaux de l’anthropologie que agrégeaient, et ne permettaient donc pas
sont l’alliance, la filiation et la parenté les croisements nécessaires à la mesure des
spirituelle. Embrassant une période allant liens de parenté entre les individus obser-
de la fin du XIe siècle jusqu’au début du vés. Le passage de l’histoire sérielle à l’his-
XXe siècle, ils affirment également que la toire nominale, qui est la grande muta-
parenté est présente, à des degrés divers, tion paradigmatique des années 1990, a
dans un ensemble de relations sociales ouvert la voie pour une meilleure appré-
que les historiens ont eu jusqu’à présent hension de la parenté (Ruggiu, 2009a).
tendance à aborder sous d’autres angles Cependant, la contrepartie de cette
comme, par exemple, les relations de évolution semble être une moindre prise
crédit, la circulation du capital et de la en compte, assumée dans Kinship in
propriété, ou encore l’exercice des offices Europe (113-114), de l’évolution démo-
et des charges. Ils ne sont pas les premiers graphique générale et locale des popula-
ni les seuls à être allés en ce sens. Dès tions et de ses conséquences sur les

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NOTE CRITIQUE

familles et les parentés, ce qui n’est pas Fontaine, qui rappelle l’importance des
sans poser problème. relations de parenté dans les processus de
L’ouvrage est composé de quinze chapi- migration, ou Giulia Calvi qui évoque la
tres dont une introduction signée de place des femmes dans la société toscane
David Sabean et de Simon Teuscher de la période moderne.
(« Kinship in Europe : A New Approach La plupart des auteurs réunis ici pour-
to Long-Term Development ») et une suivent un dialogue fructueux depuis de
conclusion rédigée par David Sabean nombreuses années. Dans la plupart des
(« Kinship and Class Dynamics in Nine- cas, les travaux qu’ils présentent ne sont
teenth-Century Europe »). Après la pas inédits mais ils ont, au contraire,
contribution de Sylvia Yanagisako, les cherché à inscrire des recherches qu’ils
douze autres textes sont répartis en deux mènent depuis longtemps, et dont ils
parties qui correspondent aux deux pério- ont souvent été les pionniers, au sein de
des principalement évoquées : la période l’évolution générale des relations de
tardo-médiévale et moderne d’un côté et parenté esquissée par les éditeurs du
de l’autre, le XIXe siècle. Chaque partie est volume. Ils ont alors été naturellement
introduite par un commentaire qui relie amenés à réemployer, en les resserrant,
les contributions à la problématique les résultats des travaux qu’ils ont réalisés
d’ensemble. Une partie de ces textes sont précédemment comme David Sabean
directement en prise avec la probléma- sur Neckarhausen, Gérard Delille sur le
tique générale du volume, soit qu’ils lui royaume de Naples ou encore Bernard
fournissent des éléments généraux Derouet, au fil d’une belle série d’arti-
comme les contributions de Bernard cles. Kinship in Europe est donc un livre
Derouet (« Political Power, Inheritance, qui récapitule les résultats de plus trente
and Kinship Relations… ») ou d’Elisa- années de recherche et qui leur donne
beth Joris (« Kinship and Gender : une cohérence par la construction d’un
Property, Entreprise and Politics »), soit récit historique destiné à remplacer celui
qu’ils l’illustrent par des exemples comme du déclin de la parenté dans les sociétés
celles de Jon Mathieu (« Kin Marriages : occidentales. Ce n’est pas la moindre de
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Trends and Interpretation from the Swiss ses nombreuses qualités. Dans cette note
Example ») ou de Christopher Johnson de lecture, nous avons donc voulu aller
(« Kinship, Civil Society and Power in au-delà d’une recension traditionnelle
Nineteenth-Century Vannes»). La plupart afin de mettre en perspective le schéma
des autres articles apportent un éclairage proposé au fil de l’ouvrage, sans cher-
pour une région et pour un groupe social cher à rendre compte de l’ensemble des
comme Karl-Heinz Spiess et Christophe contributions, forcément hétérogènes,
Duhamelle, pour différents segments de qu’il réunit, et des domaines qu’il
l’aristocratie allemande, Simon Teuscher, aborde. Nous avons cherché à présenter
pour la bourgeoisie bernoise au Moyen les grandes lignes de l’argumentation en
Âge, Michaela Hohkamp, à propos des essayant de repérer les propositions qui
familles princières européennes à l’époque tendent à construire un modèle d’évolu-
moderne, ou encore Gábor Gyáni, pour la tion de la place de la parenté dans les
classe moyenne hongroise au XIXe siècle. relations sociales en Europe de la fin du
Certains explorent une dimension spéci- Moyen Âge au début du XXe siècle, et de
fique de la question comme Laurence les confronter aux autres voies d’étude

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FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

de la parenté qui ont été explorées par parenté sur les relations sociales mais
les chercheurs dans les dernières années, aussi par une influence accrue par
et par lesquelles l’évolution esquissée rapport à la période précédente. Cette
dans cet ouvrage pourrait être confirmée influence prendrait cependant une forme
ou infirmée4. plus horizontale avec une insistance plus
grande sur l’alliance et sur l’affinité que
sur la filiation. Pour les éditeurs de Kins-
RÉFLEXIONS SUR LES SYSTÈMES hip in Europe, la société du XIXe siècle
DE PARENTÉ
serait une « kinship-hot society » et le
Les éditeurs de l’ouvrage distinguent serait davantage que les périodes précé-
dans l’histoire de l’Occident deux pério- dentes. C’est une position forte qui va
des durant lesquelles les relations au sein donc à l’encontre d’une grande partie de
de la parenté ont tendu à s’organiser de l’enseignement actuel de l’histoire de la
manière différente. La première période famille et de la parenté.
commence à la fin du Moyen Âge et La seconde moitié du XIXe siècle ainsi
s’étend jusque dans la seconde moitié du que la période de la Révolution fran-
XVIIIe siècle. Elle est marquée par l’efface- çaise, et de ses extensions en Europe,
ment de l’organisation plutôt horizon- apparaissent ici cruciale. Les formes de
tale des relations de parenté qui préva- désignation des élites ont été boulever-
laient aux siècles précédents et par la sées et le mérite, ainsi que le travail, ont
mise en place progressive d’une organisa- commencé à prendre le pas sur la nais-
tion verticale qui privilégie la filiation. sance. Il a été également mis un terme à
Cette période voit également l’appari- un vaste ensemble d’appropriations
tion de systèmes de dévolution de l’héri- familiales des ressources publiques, au
tage d’inspiration patrilinéaire et qui premier rang desquelles les charges et les
cherchaient donc à faire demeurer les offices, comme les offices de justice en
biens d’une famille dans sa ligne mascu- France, par exemple, ou bien les places
line. Ils favorisent donc l’héritage par les dans les gouvernements municipaux en
hommes et, plus exactement, dans Espagne, qui pouvaient jusqu’alors être
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certains cas, par le fils aîné5. Dans ce transmises au sein d’une lignée de la
contexte, les unions se faisaient alors, la même manière que les biens privés.
plupart du temps, avec des gens qui Enfin, les règles de la dévolution des
n’étaient pas des parents (p. 3) même si biens privés ont été transformées dans le
elles pouvaient être insérées dans le cadre sens d’une plus grande égalité entre les
d’échanges entre patrons et clients héritiers. Une telle réorientation de l’hé-
(p. 12-13). La seconde période com- ritage au sein d’une même génération a
mence dans la seconde moitié du XVIIIe entraîné, selon les éditeurs de l’ouvrage,
siècle et s’étend jusqu’à la fin du XIXe un affaiblissement de l’organisation
siècle. Malgré la croissance des États verticale des relations de parenté au
bureaucratique, malgré les évolutions du profit d’une organisation plus horizon-
droit qu’a déclenchées dans presque tale. Mais elle n’a pas entraîné une
toute l’Europe la Révolution française, et disparition des relations de parenté,
malgré les révolutions industrielles contrairement à ce qu’avancent les
successives, elle se caractériserait non conceptions traditionnelles de la moder-
seulement par une forte influence de la nisation de la société (p. 20).

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NOTE CRITIQUE

Le mécanisme qui est au cœur de cette Owens, 2003). Élisabeth Joris a, d’ail-
évolution est le mariage. Il a tendu à deve- leurs, centré son texte sur le rôle des
nir de plus en plus endogamique à la fois femmes dans le contrôle et la transmis-
en termes de classes, de « milieux » et de sion du capital dans la Suisse du long
consanguinité (p. 187). Les familles déjà XIXe siècle (p. 231-257).
alliées ont, en effet, tendu à multiplier les
alliances, soit sur une génération (maria-
ges de frères et de sœurs), soit sur
LES RENCHAÎNEMENTS
D'ALLIANCE, UN ÉLÉMENT
plusieurs générations (mariages répétés de
cousins à différents degrés). Elles ont STRUCTURANT DES SYSTÈMES DE
également cherché à croiser toutes les PARENTÉ EUROPÉENS ?
formes possibles de relations familiales Une difficulté que présente Kinship in
comme le parrainage, la tutelle des Europe, d’ailleurs reconnue par les
mineurs ou encore la présence à la signa- éditeurs scientifiques, est que toutes les
ture d’un acte de mariage ou d’un testa- contributions n’entrent pas à égalité dans
ment (entre autres, Alfani, 2007b, 2008, la trame narrative qu’ils ont construite.
2009 ; Perrier, 1998 ; Beauvalet et Gour- Les analyses de Gérard Delille (« Kins-
don, 1998 ; Jahan, 1999 ; Viret, 2004). hip, Marriage, and Politics »), qui
Les éditeurs de l’ouvrage avancent, enfin, portent sur la première période, de la fin
que le mouvement qu’ils dessinent, en du Moyen Âge au XVIIIe siècle, s’en
particulier la centralité du mariage entre distinguent, en effet, nettement. Il se
premiers cousins, n’est pas contradictoire situe dans le droit fil des études de
avec le fait que les relations personnelles Claude Lévi-Strauss et de Françoise
entre les époux ont pris, à la fin du XVIIIe Héritier qui considèrent que c’est l’al-
siècle, une tournure de plus en plus liance, plutôt que la filiation, qui est
« romantique », qui a posé l’harmonie des située au cœur des relations de parenté et
sentiments et la similitude des personna- qu’elle ne peut suivre qu’un nombre fini
lités comme les fondements d’une union « de figures de base » (Héritier, 1981,
réussie (p. 188). Ils s’appuient là sur une 161). Le point de départ de la réflexion
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indiscutable érotisation de la figure du qui a conduit Gérard Delille à modéliser
cousin ou de la cousine très sensible dans un système de parenté européen (Delille,
le discours (Anderson, 1986 ; Burguière, 2001, 2007) est la reconstitution qu’il a
1997). Il ou elle devient un partenaire faite des généalogies, sur plusieurs siècles,
d’autant plus désirable que le frère et la des familles de Manduria, une petite ville
sœur demeuraient interdits alors qu’ils de l’actuelle province de Tarente, dans le
ont été inscrits dans le même processus sud de l’Italie (Delille, 1985). Elle lui a
d’érotisation mais sur un mode mineur permis de mettre à jour un mécanisme
(Poumarède, 1987, 215 ; Saurer, 1998, d’échange entre lignées alternées. Les
67-68 ; Adams, 2000). La cousine est différentes branches des familles Pasanisa
d’ailleurs un parti d’autant plus intéres- et Giustiniani, qui se sont rapprochées
sant que les femmes ont tendu au cours pour des raisons politiques à la fin du
des XVIIIe et XIXe siècles, sinon à contrôler XVIe siècle, ont, par exemple, régulière-
entièrement, au moins à posséder un ment conclu des mariages au fil des
patrimoine croissant (voir, pour l’Angle- générations qui ont suivi. Lorsqu’elles
terre, Berg, 1993 ; Lane, 2000 ; Green et concernaient des branches déjà alliées,

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FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

les bouclages de l’alliance sont survenus ce système est, selon lui, la forte
dès que l’interdit de consanguinité fixé inflexion patrilinéaire des sociétés de
par le concile de Latran s’est effacé, c’est- l’époque moderne, ce qui va à l’encontre
à-dire à partir du 4e-5e degré de consan- d’autres chercheurs qui valorisent leur
guinité. Gérard Delille indique que ce dimension bilatérale ou cognatique.
comportement peut être repéré chez Plusieurs critiques peuvent être faites
d’autres familles de Manduria. Il relie ces à l’argumentation de Gérard Delille. La
bouclages d’alliance, par lesquels les première est avancée par Jon Mathieu
descendants de deux couples d’ancêtres dans sa contribution à Kinship in
échangent des conjoints sur plusieurs Europe (p. 211-230), où il note qu’il est
générations, à une autre forme d’intensi- difficile de prouver que les acteurs
fication des liens entre deux familles. Elle étudiés avaient une mémoire aussi éten-
est, cette fois-ci, horizontale (ou entre due de la parenté, surtout en dehors des
des gens de la même génération) et non familles de l’élite et qu’ils étaient donc
plus verticale (ou au fil des générations). capables de mener les calculs généalo-
Il s’agit des mariages dits « remarqua- giques que requiert l’échange entre les
bles », c’est-à-dire des mariages de deux lignées alternées (Delille, 2007, 155).
frères avec deux sœurs, ou bien d’un Comme l’avait déjà perçu Jean-Louis
frère et d’une sœur avec un frère et une Flandrin, les écrits du for privé, comme
sœur ou encore d’un cousin avec une les livres de famille, les diaires, les
cousine. Mémoires, les journaux, les autobiogra-
Au fil de ses articles, Gérard Delille a phies, ou les correspondances, forment
donné bien d’autres exemples de ici un ensemble documentaire fonda-
l’échange entre lignées alternées, chez les mental (Flandrin, 1976). Ils montrent
tailleurs de pierre de Fiesole en Toscane, une réelle profondeur généalogique de
chez les bouchers de Limoges, où il a la plupart des scripteurs, y compris chez
repéré des mariages internes aux lignées ceux qui appartiennent aux groupes
entre le 5e-6e degré et le 6e-7e degré de moyens ou inférieurs de la société, mais
consanguinité, ou encore dans les qui, la plupart du temps, ne remonte
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familles nobles d’Alicante et de Cáceres pas au-delà de trois générations au-
en Espagne (Delille, 2000). Et, dans sa dessus d’eux. Jon Mathieu a ainsi
contribution à Kinship in Europe, il travaillé sur la chronique d’un habitant
développe plus précisément le cas des des Grisons en montrant la manière
familles de la noblesse arlésienne. Enfin, dont la conscience de la parenté s’affai-
il précise que ces unions renchaînées ou blissait au fur et à mesure où l’on s’éloi-
remarquables cessent progressivement gne d’ego7. La plupart des études sur la
au fil du XVIIIe siècle pour faire place à transmission mémorielle au sein des
un système matrimonial qu’il estime familles de l’époque moderne confir-
plus ouvert parce que centré sur les indi- ment qu’elle dépasse rarement les trois
vidus6. Se fondant sur la variété de ces générations comme le note, dans son
exemples, Gérard Delille a donc inclus étude sur la Haute-Provence, Alain
le bouclage des alliances dans son Collomp : « On est d’ailleurs autorisé à
« système » de la parenté dans les sociétés se demander si certaines parentés,
occidentales à l’époque moderne. La notamment par les femmes, au 4e degré,
seconde caractéristique fondamentale de ce qui fait cinq générations pour

228
NOTE CRITIQUE

remonter à l’ancêtre commun, n’échap- échanges observés. Or, les études actuelles
pent pas aux intéressés eux-mêmes » convergent pour mettre en avant le fort
(Collomp, 1977). Les autobiographies taux d’extinction biologique des familles
populaires du XIXe siècle comme les et la réelle mobilité de ces populations en
enquêtes sociologiques plus récentes particulier en milieu urbain (Bardet,
vont d’ailleurs dans le même sens 1983, 210-217). Le nombre de familles
(Gourdon, 2001 ; Le Wita, 1988). stables sur plus de trois générations dans
Jean-Marie Gouesse a récemment une même ville ou dans un même village
montré que les villageois du diocèse de apparaît donc réduit8. Quelle place le
Coutances, en Normandie, semblaient système de parenté européen, évoqué par
avoir, au XVIIe siècle, une doctrine à eux Gérard Delille, fait-il alors à ces familles
sur les empêchements au mariage, qu’ils dont la mobilité empêche le bouclage des
avaient bricolée à partir d’éléments alliances ? Une troisième remarque
disparates issus de pratiques anciennes et concerne le matériel utilisé par l’historien
de la coutume normande (Gouesse, qui s’appuie le plus souvent, sur la lecture
2008). Ils prêtaient ainsi une attention de généalogies reconstituées soit par les
moindre à la parenté féminine qu’à la intéressés, soit par les généalogistes de
parenté masculine ; ils ne reconnaissaient l’époque moderne et les érudits du XIXe
pas les empêchements d’affinité ; et siècle, soit, enfin, par lui-même. Il s’agit
surtout, ils pensaient avoir le droit de presque toujours de généalogies incomplè-
s’épouser « du tiers au quart », c’est-à-dire tes qui excluent une partie des mariages,
du troisième au quatrième degré de comme ceux conclus par les individus qui
parenté, ce qui dénote, là encore, une n’ont pas été essentiels pour la transmis-
faible profondeur du système de parenté. sion effective des biens. Gérard Delille
Les paysans normands ont ensuite été intègre, d’ailleurs, ce fait à sa réflexion
vigoureusement initiés au respect des pour estimer que ces généalogies, à
principes du concile de Trente par les l’image de celles dressées par le père
missions religieuses et les évêques réfor- Anselme pour la noblesse française à
mateurs. Guy Tassin a, également, noté partir des enquêtes des années 1660,
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qu’entre 1701 et 1793, à Havely, sur 53 trahissent la nature finalement patrili-
mariages dont la reconstitution généalo- néaire du système de parenté puisqu’elles
gique montre qu’ils auraient nécessité ne prennent en compte que les lignées
une dispense, un tiers des couples ne d’héritiers essentiellement en ligne pater-
l’avait pas demandée (Tassin, 2007, 124). nelle. Mais il n’en demeure pas moins que
Il est vrai que, dans d’autres parties de l’historien décontextualise les mariages en
l’Europe, comme en Italie, le contrôle ne les abordant que sous le seul angle du
pouvait être bien plus strict, et que d’aut- rôle de la parenté dans le choix du
res acteurs pouvaient remonter les généa- conjoint, figeant ainsi l’histoire des
logies, en particulier les anciens du village familles. Il écarte les autres logiques géné-
(Merzario, 1981 ; Trévisi, 2003). ralement réputées à l’œuvre dans les
Une seconde critique est que les unions et souvent explicitées par les
familles étudiées par Gérard Delille sont, acteurs eux-mêmes comme, par exemple,
par nature, des familles qui se sont main- les liens économiques qui peuvent exister
tenues sur place pendant plusieurs géné- entre la profession du marié et celle de
rations et une telle stabilité a permis les son beau-père (Dolan, 1989).

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FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

En s’éloignant des familles réelles, appris à penser en termes d’explications


pour s’en tenir aux régularités observa- multivariées, qu’il s’agisse d’une lecture
bles sur les arbres généalogiques, l’histo- du mariage anthropologique (l’union de
rien tend également à négliger l’impact deux familles et parentés), économique
des conflits qui reconfiguraient, parfois (la mise en commun des ressources ; la
très rapidement, l’ensemble des relations circulation des biens matériels) ou
au sein d’une famille et de ses différentes culturelle (l’union de deux êtres ; l’accès
branches. Il oublie, également, que bien à la sexualité légitime ; la circulation des
des travaux ont montré que les circons- biens immatériels). À la suite de tous les
tances précises, en particulier démogra- chercheurs qui ont travaillé sur la
phiques, de la conclusion d’un acte, par conclusion d’unions réelles (Fillon,
exemple la rédaction d’un testament, 1989 ; King, 1999), nous devons accep-
étaient tout aussi essentielles pour en ter que les Européens de l’époque
comprendre le sens précis que les systè- moderne se mariaient « for their own
mes généraux dans lequel il est inscrit reasons » (Levine, 1982), parfois après
(Dolan, 1998 ; Ruggiu, 2009b). Enfin, avoir recherché le consentement de
il est clair que les conditions démogra- toutes les parties (Ingram, 1987, 136),
phiques, politiques, socioéconomiques mais vraisemblablement pas pour
et culturelles du mariage n’ont cessé de répondre à un schéma de parenté fondé
changer tout au long de la période envi- sur une norme de consanguinité.
sagée. Le décret Tamesti, rédigé à la fin Il est donc difficile de considérer que
du concile de Trente, qui a fixé la le bouclage des alliances au-delà du
manière de célébrer une union pour quatrième degré de consanguinité cons-
qu’elle soit canoniquement valide a eu titue une caractéristique du mariage
un effet majeur sur la conclusion des européen sur le long terme. Cela n’ex-
mariages dans tous les pays catholiques, clut pas que cela puisse être le fruit
qu’ils aient ou non intégré directement d’une tactique conjoncturelle, comme le
dans leur droit les décrets du concile note, d’ailleurs, Gérard Delille qui a
(Bossy, 1985 ; Lombardi, 2008). Dans évoque, lui aussi, l’idée de cycle court
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certaines régions, l’État s’est, lui aussi, (p. 168). Les mariages remarquables,
arrogé un droit de regard sur la conclu- conclus sur une ou deux générations,
sion de certaines unions (Head-König, sont, en ce sens, bien différents des
1993, 456) et il a pu, ailleurs, considéra- échanges entre lignées alternées. Cela
blement modifier l’équilibre entre les n’exclut pas non plus, comme nous le
rôles de chacune des parties prenantes verrons, l’existence de lignées patrili-
dans la conclusion d’un mariage néaires, actives dans certaines circons-
(Hanley, 1989). Quel sens peut alors tances, ou de parentèles bilatérales,
avoir le bouclage au XVIIIe siècle d’une constellations familiales plus ou moins
alliance conclue au XVIe siècle ? denses, où la pratique de l’intermariage
Il est bien sûr périlleux de poser la est attestée, voire recherchée. Mais il est
question du mariage en termes de difficile de faire de l’échange des femmes
« motivations », comme s’il était possible entre les lignées alternées la base d’un
aux historiens de sonder les reins et les « modèle » de mariage européen puisque
cœurs, et de comprendre les « raisons » l’idée de « modèle » implique l’idée
d’une union. Mais ces derniers ont d’une répétition consciente visant à se

230
NOTE CRITIQUE

conformer à un comportement consi- personne consanguine au quatrième


déré comme normatif et qu’elle suppose degré ce qui étendait la prohibition
une diffusion sinon majoritaire au jusqu’aux arrière-petits-enfants de deux
moins significative dans la population. frères ou sœurs. Il était aussi interdit
Et, quoiqu’il en soit, l’idée d’une dispa- d’épouser une personne affine au
rition de ce modèle dans la seconde quatrième degré, en raison de l’unita
moitié du XVIIIe siècle au profit de carnis, ainsi qu’une personne avec
mariages plus ouverts s’accorde assez laquelle avaient été tissés des liens de
mal avec la problématique générale de parenté spirituelle (ou compérage). Les
Kinship in Europe. mariages entre parents du premier degré
(oncle-nièce ; tante-neveu ; frère ou sœur
du conjoint décédé) et au deuxième
MARIAGE, degré (cousins germains ; neveu ou nièce
INTERDITS DE CONSANGUINITÉ
ou cousins germains du conjoint
ET PARENTÉ SPIRITUELLE décédé) constituaient les empêchements
Car la question du mariage dans la majeurs alors que les mariages entre
parenté et, plus précisément, entre parents aux troisième et quatrième
cousins germains d’une part, et avec le degrés (seconds et troisièmes cousins)
frère ou la sœur du conjoint décédé, formaient les empêchements mineurs.
d’autre part, est bien au cœur de la Le pape pour les degrés les plus proches
grande évolution historique brossée par et, progressivement, les évêques pour les
les éditeurs de Kinship in Europe. Selon degrés les plus éloignés, avaient la possi-
eux, les mariages dans les sociétés euro- bilité d’accorder des dispenses qui rele-
péennes avant la seconde moitié du vaient les futurs époux des interdictions
XVIIIe siècle se faisaient, généralement, de mariage y compris du premier degré
entre « étrangers », c’est-à-dire entre d’affinité. Bien qu’il ait débattu longue-
personnes non apparentées. Ils ne font ment de la question, le concile de Trente
donc pas intervenir la notion d’échange n’a pratiquement rien changé en la
entre lignes alternées évoquée avec force matière sauf pour réduire la portée des
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pour l’époque moderne par Gérard empêchements pour cause de parenté
Delille. À partir de la seconde moitié du spirituelle (Alfani, 2007b). Il est vrai
XVIIIe siècle, ils avancent que les mariages que les pères du concile ont appelé les
ont de plus en plus souvent tendu à être clercs à être très vigilants sur ces ques-
conclus entre parents proches dans la tions et, donc, sur l’émission de ces
consanguinité comme dans l’affinité. dispenses. Les autorités ecclésiastiques
Le premier faisceau de preuves qu’ils ont cependant tendu à devenir au fil du
avancent est que les lois prohibant le temps de plus en plus laxistes sur ce
mariage entre les proches parents ont point, en particulier en France
progressivement été allégées dans toute (Gouesse, 1982), même si les politiques
l’Europe9. Les interdits canoniques locales ont pu varier selon les époques et
catholiques ont, en fait, peu varié du selon les diocèses, même proches
XIIIe siècle au début du XXe siècle, lorsque (Lanzinger, 2008).
a été promulgué le Codex juris canonicis. Au XVIe siècle, les États protestants ont
Depuis le concile de Latran IV, en 1215, pris en charge la gestion du mariage,
il était interdit de se marier avec une qu’ils ne considéraient plus comme un

231
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

sacrement (Bossy, 1985 ; Goody, 1986 ; autorisés avec une dispense accordée par
Harrington, 1995 ; Watt dans Kertzer et le conseil royal jusqu’en 1844, date à
Barbagli, 2001). Sur la question des laquelle ils sont devenus libres. Les
empêchements, les Réformateurs pen- mariages entre seconds et troisièmes
chaient pour une suppression des prohi- cousins semblent, quant à eux, n’avoir
bitions liées à la parenté spirituelle et plus été interdits à partir de la Réforme
pour un allégement de celles liées à la (Egerbladh et Bittles, 2008, 206-207).
consanguinité et à l’affinité même s’ils En Angleterre, les cours ecclésiastiques
n’ont pas été d’accord entre eux sur ce ont continué, dans bien des domaines, à
point. Alors que Luther était partisan de appliquer les règles de l’Église médiévale
s’en tenir aux seules relations mention- même après l’adoption en 1559-1563
nées dans le Lévitique (18, 7-18), Calvin d’une confession de foi protestante. Mais,
fut un peu plus restrictif et incluait tous en ce qui concerne le mariage, l’arche-
les parents du même degré que ceux vêque de Canterbury a promulgué, en
explicitement mentionnés dans le Lévi- 1560 puis en 1563, une « table of kindred
tique (Ottenheimer, 1996, 68-69). Les and affinity » qui précisait quels étaient
autorités civiles, qui décidaient en ces les trente parents qu’un homme ou une
matières, n’ont, de toute façon, pas femme ne pouvait épouser (c’est-à-dire,
toujours suivi leurs avis. Jon Mathieu a pour nous en tenir à un seul exemple,
ainsi étudié la politique matrimoniale pour un homme, sa grand-mère, sa tante,
des cantons suisses passés à la Réforme sa mère, sa sœur, sa fille, sa petite-fille, sa
zwinglienne. Les autorités ont décidé, en nièce ainsi que les parents de ces mêmes
1533, de prohiber seulement les maria- degrés de sa femme décédée). Dans les
ges au troisième degré et en deçà, puis, années 1660, les juges de la common law
malgré les vœux de leurs pasteurs, elles ont alors confirmé la légalité du mariage
sont devenues de plus en plus laxistes. entre premiers cousins mais ont main-
Au tournant des XVIe et XVIIe siècles, elles tenu l’interdiction du mariage entre un
ont donc introduit l’usage de dispenses homme et la sœur de sa femme décédée
pour les mariages entre parents du troi- (Trumbach, 1978, 18-33)10.
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sième degré et, au XVIIIe siècle, entre un Dans le monde catholique, les
parent du deuxième degré avec un parent tensions entre les autorités civiles et
du troisième degré. En 1766, les maria- ecclésiastiques ont également été vives.
ges entre parents du deuxième degré (ou Mais elles n’ont pas porté prioritaire-
premiers cousins) sont devenus éligibles ment sur la question des empêche-
pour les dispenses. Dans la Genève calvi- ments canoniques au mariage car elles
niste, les autorités ont également aboli, ont surtout concerné le contrôle des
dès 1713, les interdictions de mariage parents sur le mariage des enfants
entre premiers cousins puisque « le mineurs qui était au cœur des
mariage, dans ce degré de parentage, réflexions des théologiens, des légistes,
n’est point défendu par la Loi Divine » des auteurs et, sans doute, aussi de bien
(p. 214). Il est facile de prolonger sur ce des parents et de bien des enfants.
point la réflexion des éditeurs de Kinship Précédant le concile, la monarchie fran-
in Europe. En Suède, par exemple, les çaise a rendu indispensable le consente-
mariages entre les premiers cousins ont été ment des parents au mariage de leurs
interdits jusqu’en 1680 puis ils ont été enfants mineurs par l’édit de février

232
NOTE CRITIQUE

1556 ainsi que par l’ordonnance de tante et le neveu consanguins étaient


Blois de 1579 (Hanley, 1989). L’enca- interdits ; enfin, dans l’affinité, il n’était
drement des mariages par les parents a toujours pas possible d’épouser son
encore été renforcé par la suite et la beau-frère ou sa belle-sœur (Gouesse,
France n’a pas reconnu sur ce point le 1986). Tous les autres mariages, en
concile de Trente, qui, s’il insistait lui particulier entre cousins devenaient
aussi sur la nécessité du consentement alors licites. La papauté elle-même
parental, continuait à considérer semble avoir évolué sur ces questions
comme valides les unions conclues sans comme le montre, sous le pontificat de
leur accord. Dans les autres pays catho- Pie VI, la nette augmentation du
liques, le tournant a été pris à la fin du nombre de dispenses accordées à un
XVIII e siècle, en Italie, à Modène et à conjoint pour épouser le frère ou la sœur
Naples, en 1771, en Savoie-Piémont, de son conjoint décédé, même si les
en 1782 ou en Lombardie, en 1784, au valeurs absolues restent très faibles
Portugal, en 1775 (Lombardi, 2008, (Gouesse, 1982).
142-153) ou, encore, en Espagne, par La place manque ici pour explorer plus
la Pragmática sanción de matrimonios avant les interdits de parenté en Europe
promulguée, en 1776, par Charles III et leurs évolutions de l’époque médiévale
et étendue, en 1778, à l’empire espa- à nos jours et il est dommage qu’il n’y ait
gnol (Saether, 2003 ; Ghirardi et pas encore eu de synthèse à ce sujet. Mais
Irigoyen, 2009). l’étude des différentes législations semble
À la même époque, les lois civiles ont aller dans le sens indiqué par les éditeurs
tendu de plus en plus à alléger les de Kinship in Europe. La question est
anciennes prohibitions. En Autriche, la alors de mesurer correctement l’ampleur
loi sur le mariage de 1783 n’a plus inter- et l’évolution des mariages entre parents
dit que les mariages dans la ligne directe dont ces derniers affirment qu’ils
et, en ligne collatérale, que les mariages augmentent nettement à partir de la
aux premier et deuxième degrés de première moitié du XVIIIe siècle. La
parenté et d’alliance (Saurer, 1998). En démonstration en a été apportée pour
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France, l’œuvre laïcisatrice de la Révolu- Neckarhausen par David Sabean à partir
tion a entraîné une disparition de la d’une reconstitution intégrale des
notion de parenté spirituelle et une familles de ce village du Württemberg
redéfinition des interdits matrimoniaux sur plusieurs générations (Sabean, 1998,
liés à la consanguinité et à l’affinité, 430). Il a également réuni un dossier de
d’abord par la loi du 20 septembre 1792 données démographiques concordantes
puis par le Code civil de 1804 qui a été qui portent essentiellement sur la fin du
un peu plus restrictif. Le nombre de XIXe siècle et le XXe siècle (Sabean, 1998,
mariages entre parents qu’il interdisait 428-448). Mais la voie la plus fréquente
était néanmoins bien plus faible que pour travailler sur cette question est
sous l’Ancien Régime. En ligne directe, l’étude des dispenses de mariage11. Jon
les pères et les mères (et les beaux- Mathieu est ainsi parti des dispenses
parents) ne pouvaient épouser leurs consenties dans une série de localités
enfants et petits-enfants ; en ligne colla- catholiques des Grisons, de Soleure
térale, les unions entre les frères et sœurs (Solothurn), de Schwyz, du Tessin, d’Uri
ainsi qu’entre l’oncle et la nièce ou la et du Valais entre le début du XVIIe et la

233
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

fin du XIXe siècle. Il note une nette 1200 et 1300 couples bénéficièrent de
augmentation du nombre de dispenses ces dispenses dans les années 1880, ce
au cours de la période accompagné d’une qui signifie que sur cent remariages, il y
augmentation du nombre de mariages avait alors environ 3 remariages entre un
entre parents proches, y compris les beau-frère et une belle-sœur.
premiers cousins. Pour ne donner qu’un Bien d’autres travaux attestent une
exemple, à Simplon-Dorf, dans le Valais, augmentation du nombre de mariages
le nombre de dispenses demandées est de entre parents proches à la fin de la
zéro dans la première moitié du XVIIe période moderne et au XIXe siècle.
siècle ; il est de 36 pour la seconde moitié L’étude de cinq villages de la Valserine
du XVIIIe siècle dont 4 entre parents montre que le nombre des unions qui
proches et de 45 dans la seconde moitié ont réclamé une dispense de consangui-
du XIXe siècle dont 14 entre parents nité est de 7,3 % entre 1750 et 1799,
proches12. qu’il atteint un maximum de 9,5 %
Dans son étude pionnière sur la ques- entre 1800 et 1850 et qu’il redescend à
tion, Jean-Marie Gouesse avait pris une 7,7 % entre 1850 et 1899 (Bideau et al.,
autre perspective en travaillant non à 1994). Les auteurs notent, d’une part,
l’échelle d’un village ou d’une paroisse que les valeurs sont plus élevées dans les
mais à celle des États à partir des dispen- villages de la haute vallée et que dans les
ses accordées par la Curie romaine au villages plus faciles d’accès et, d’autre
XVIIIe siècle (Gouesse, 1986). Il a montré part, qu’il s’agit là d’un niveau relative-
que l’endogamie familiale proche était ment modéré par rapport à d’autres
marginale au XVIIIe siècle en France (prise villages des hautes vallées savoyardes, ce
dans ses limites de 1861) : 1,5 ‰ des qu’ils expliquent par un enregistrement
mariages en 1753 ; de l’ordre de 2 ‰ minimal des dispenses. Si l’ordre de
vers 1766-1768 ; 3,1 ‰ en 1787, soit un grandeur n’est donc pas tout à fait exact,
doublement qui est, en lui-même, le mouvement d’augmentation dans la
remarquable. Au XIXe siècle, les mariages première moitié du XIXe siècle peut être,
entre proches parents semblent s’être en revanche, considéré comme valide.
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multipliés et l’auteur utilise, pour les Mais certaines études vont dans un
décrire, les images de la « boule de neige » sens différent. À Castell de Guadelest,
ou du « fleuve en crue ». Décalant son une paroisse d’une zone montagneuse
observation sur les sources administrati- du royaume de Valence, le nombre de
ves de l’État, il estime que le taux de demandes de dispenses de consanguinité
proche endogamie est passé à 17 ‰ dans a augmenté fortement dans le dernier
les années 1866-1868. L’augmentation tiers du XVIIe siècle pour atteindre un
est particulièrement sensible en ce qui palier élevé, entre 40 % et 50 %, des
concerne les remariages entre un veuf et années 1700 et aux années 1750 (Pla
sa belle-sœur, c’est-à-dire la sœur de son Alberola, 1987). Il connaît ensuite un
épouse défunte qui était une union net reflux dans la seconde moitié du
affine proscrite par l’Église, autorisée XVIIIe siècle pour se stabiliser aux alen-
sous la Révolution, à nouveau défendue tours de 15 % dans les années 1790 et
par le Code civil, mais pour laquelle la 1800. L’auteur explique l’augmentation
chancellerie royale fut autorisée à délivrer sensible à partir des années 1660 par la
des dispenses à partir de 1832. Entre stabilisation de la population arrivée au

234
NOTE CRITIQUE

début du XVIIe siècle pour prendre la comportement démographique spéci-


place des Morisques et il lie le reflux à fique, souvent marqué par une forte
l’augmentation de la population à la fin migration, qui laissait sur place une
du XVIIIe siècle qui élargit le marché partie seulement de la population en
matrimonial. Il nous rappelle ainsi le âge de se marier, composée de gens
poids des contraintes démographiques particulièrement stables et donc, peut-
conjoncturelles sur les comportements être, plus susceptibles que les migrants
que nous étudions. Mais il constate qu’il d’être pris dans des unions consangui-
n’est pas possible d’expliquer le resserre- nes. Dans cette série d’exemples, le
ment matrimonial de la période diocèse de Paris est ici une exception
médiane par l’isolement du village puis- puisque sur les 4 611 dossiers présentés
qu’il existait d’autres agglomérations devant l’officialité entre 1729 et 1790,
importantes à proximité. Il avance une légère majorité vient de la ville
plutôt le rôle des stratégies patrimonia- (Burguière, 1997). Dans le contexte
les ce qu’il corrobore par le fort taux de d’une population importante et parti-
mariages doubles, croisés ou parallèles, culièrement mobile, le phénomène
qui représentent plus de 20 % des représente moins de 1 % des mariages.
unions à cette période. Finalement, les résultats de J.-M.
La plupart de ces monographies, et Gouesse, 1,7 % au milieu du XIXe siècle,
c’est une de leurs limites, concernent n’étaient guère éloignés et ils demeu-
des villages relativement isolés. Lorsque rent faibles pour un phénomène
des zones plus étendues ont été présenté comme structurant pour les
étudiées, comme c’est le cas pour le populations européennes et qui, de
diocèse de Côme, il apparaît que les surcroît, ne peuvent être rapportés à
zones reculées, les « angoli morti », l’ensemble des couches sociales. L’âge
restent les plus grandes demandeuses tardif au mariage des femmes ou encore
de dispenses : 56,6 % des 963 dispenses la néolocalité, dont John Hajnal avait
accordées entre 1561 et 1655 viennent fait les piliers d’un premier modèle
des vallées et 1,7 % seulement de la familial européen, étaient bien plus
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ville de Côme (Merzario, 1981). Abel répandus.
Poitrineau, à partir de sondages fait Les données observées à partir des
dans 4 600 dossiers de dispenses pour le dispenses restent donc fragiles d’autant
diocèse de Clermont à la fin du XVIIe plus que les politiques des institutions
siècle et au XVIIIe siècle a, lui aussi, dans ces domaines variaient considéra-
remarqué que c’étaient les communau- blement selon les lieux et les époques
tés de parsonniers des montagnes bour- (Gouesse, 1986 ; Trévisi, 2008, 489). La
bonnaises et thiernoises ou les métayers hausse observée résulte-t-elle d’un
du nord de la Limagne qui avaient comportement différent des populations
tendance à pratiquer le mariage ou d’une plus grande efficacité du
consanguin. Les chiffres qu’il donne contrôle social ? Il faudrait corroborer
pour la période 1750-1790 s’échelon- ces résultats en utilisant les grandes bases
nent entre 7,3 % des mariages à Chap- de données qui reconstituent les familles
tuzat et 19,1 % à Saint-Rémy (Poitri- pour un vaste espace et non plus seule-
neau, 1980). Le problème est ici que ment pour une communauté réduite ou
ces « angles morts » avaient un isolée. Or, ces bases de données sont

235
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

relativement rares et, souvent, elles n’ont pouvoir s’y arrêter longuement,
pas été construites pour permettre une telle quelques-unes des voies possibles. Un des
analyse. Nous disposons cependant de indicateurs qui intéressent le plus actuel-
chiffres pour une région située autour de la lement la communauté scientifique est le
ville de Skelleftea, dans le Västerbotten, au choix d’un parrain ou d’une marraine
nord de la Suède entre 1720 et 1899 (Alfani, 2007b). La parenté spirituelle
(Egerbladh et Bittles, 2008). La progres- n’est pas réellement un lien social faible
sion des mariages au sein de la parenté y dans les sociétés occidentales même si elle
est réelle puisque les mariages entre les n’est clairement pas un lien aussi fort que
premiers, deuxièmes et troisièmes la parenté proche consanguine ou affine.
cousins passent de 2,34 % des 979 Le fait d’être parrain ou marraine
mariages recensés entre 1780 et 1799 à suppose, d’abord, une présence très
7,19 % des 1655 mariages contractés symbolique de la ou des personnes choi-
entre 1820 et 1839 et à 8,75 % des sies à un moment décisif de la vie d’un
unions conclues entre 1880 et 1899. Les chrétien, celui de son entrée dans la
chiffres pour les seuls mariages entre communauté des croyants et du don de la
premiers cousins, dont le régime a promesse de salut portée par la religion
changé au cours de la période, comme chrétienne. Le rite est spirituellement
nous l’avons vu, sont respectivement de puissant et l’engagement pris par le
0,5 %, 1,45 % et 2,9 %. Nous retrou- parrain et la marraine ne peut être réduit
vons donc ici la nette augmentation des à sa dimension conjoncturelle car il
mariages entre cousins repérée à partir entraîne, au moins en principe, leur
des dispenses et, peut-être, aussi le palier implication dans la vie de leur filleul.
représenté par le premier XIXe siècle, qui Selon Guido Alfani, la principale rupture
a été déjà observé et qui semble un point est survenue dans ce domaine au cours
à explorer davantage (Segalen, 1985, du XVIe siècle, lorsque les Réformateurs,
127). Mais la recherche doit être appro- même s’ils ont maintenu cette institu-
fondie avant de conclure d’une manière tion, l’ont privée de toute dimension
définitive d’autant plus qu’il ne faut pas spirituelle, et surtout lorsque le concile de
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oublier que les transformations législati- Trente a réduit le nombre des parrains et
ves que nous avons évoquées sont loin des marraines à un de chaque sexe. Il
d’avoir été indolores. Elles ont, au estime que les familles catholiques
contraire, suscité des débats acharnés auraient alors cherché à choisir préféren-
dans les cénacles politiques et dans le tiellement un parrain parmi leurs supé-
public, comme, par exemple, en Angle- rieurs sociaux dans une logique sociale
terre où est apparue une véritable verticale et les données qu’il a recueillies à
anxiété sociale autour de l’inceste, sensi- Ivréa, en Italie du Nord, montrent, en
ble dans les débats autour des lois sur le effet, une absence presque complète de
mariage en 1835 ou encore en 1907 parents parmi les parrains et les marraines
(Anderson, 1986 ; Ottenheimer, 1996). à la fin du XVIe siècle. Guido Alfani
La vérification des hypothèses avancées estime qu’au XIXe siècle, cette logique
par les éditeurs scientifiques de Kinship in verticale aurait été progressivement
Europe, peut aussi passer par l’utilisation remplacée par une logique plus horizon-
d’autres indicateurs et nous aimerions à tale qui aurait amené les géniteurs à se
présent explorer, malheureusement sans tourner vers des membres de leur famille.

236
NOTE CRITIQUE

Cristina Munno a ainsi démontré, à cérémonie religieuse des cérémonies


propos de Follina, un bourg industriel de civiles qui les ont accompagnées ou les
Vénétie, étudié dans les décennies média- ont remplacées au cours du XIXe siècle.
nes du XIXe siècle, que « plus une famille Là encore, les éléments que nous
est choisie par les autres, donc dispose pouvons réunir accréditent l’idée d’une
d’un certain prestige au sein de la intensification de la dimension familiale
communauté villageoise, plus elle tend à de l’événement social qu’est un mariage,
choisir un parrain dans le cercle des au sens de wedding sans, cependant,
parents » (Munno, 2005). Dans d’autres qu’une interprétation définitive puisse
régions, cependant, le choix familial est encore être avancée. Une étude sur la
bien plus précoce. Ainsi, dès le XVIIIe Flandre a ainsi montré que le nombre
siècle, les familles stables de Bouaffles, un des témoins, qui devaient être au
village de la région de Vernon-sur-Seine, nombre de quatre par union, liés fami-
recourait presque systématiquement aux lialement à l’un ou l’autre des conjoints
parents. Exactement 70 % des enfants a augmenté au cours du XIXe siècle
baptisés entre 1720 et 1792 à Bouafles, et (Matthij, 2003). Cette augmentation a
qui descendaient de parents nés d’un affecté aussi bien le groom’s side que le
couple uni dans la région de Vernon-sur- bride’s side. Au milieu du XIXe siècle, un
Seine, avait un parent pour parrain ou ou deux témoins seulement étaient
marraine et la possibilité d’un recours à apparentés à l’un ou l’autre des
un étranger augmentait sensiblement conjoints alors qu’à la fin du XIXe siècle,
selon le rang de naissance (Bardet, 2009). trois voire les quatre témoins étaient
Travaillant sur Paris au XIXe siècle, à partir dans ce cas14. Au début du XXe siècle, les
de quatre paroisses représentant des espa- quatre témoins étaient presque systéma-
ces sociaux différents, Vincent Gourdon tiquement choisis parmi les membres de
a montré que les parents proches repré- la famille des mariés. L’auteur interprète
sentaient au minimum entre un quart et cette évolution comme un signe de
un tiers des témoins au baptême et qu’il y privatisation du mariage mais nous
a eu une certaine hausse des choix intra- pouvons le resituer dans le cadre de la
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familiaux dans la seconde moitié du XIXe « parentisation » des relations domes-
siècle (Gourdon, 2008b). Les travaux en tiques qui est au cœur de Kinship in
cours, en particulier menés dans le cadre Europe.
du réseau Patrinus13, permettront de D’autres études vont dans le même
compléter à l’échelle européenne des sens, sur La Haye par exemple, où la
données encore éparses (voir également proportion de mariages civils sans
Munno, 2010). parents parmi les témoins est passée de
La relation qui unit les mariés aux 43,7 % entre 1858 et 1869 à 26,1 %
témoins à leur mariage, dont la présence entre 1890 et 1902 (Van Poppel et
a été progressivement rendue obligatoire Schoonheim, 2005, 182). Mais, là
par les Églises et les États, est, bien, en encore, certaines données du XVIIIe siècle
revanche, un lien faible car il s’agit d’une montrent que les choses sont plus
présence ponctuelle qui témoigne d’une complexes qu’une simple évolution
relation intense mais dont les effets dans chronologique. À La Roche Guyon,
le temps sont réduits. Dans les pays dans le Bassin parisien, les personnes
catholiques, il convient de distinguer la identifiées comme des amis du couple

237
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

ne représentaient que 16,64 % (175 sur tous les éléments qui évoquent bien au
871) des témoins mentionnés dans les XIXe une « familialisation » des relations
actes de mariage passés entre 1727 et sociales mais il convient néanmoins
1768 (Trévisi, 2008, 183-184). Si on d’être prudent. Par ailleurs, Vincent
leur ajoute les indéterminés, qui ne Gourdon a attiré, dans ses articles, l’at-
devaient pas être, pour la plupart d’entre tention sur l’existence au XIXe siècle
eux, des parents, la proportion ne monte d’un « entre-deux » parisien et, de
qu’à 25,25 % (220 sur 871) ce qui signi- manière générale, d’un « entre-deux »
fie qu’à peu près 75 % des témoins du urbain, qui est valable aussi bien pour le
mariage à l’église étaient des parents. À choix des parrains et des marraines que
Amiens, en Picardie, entre 1776 et pour celui des témoins au mariage reli-
1783, les parents formaient également gieux ou civil. C’est vrai également au
92,1 % des témoins à la signature des XVIIIe siècle car Marion Trévisi a montré
contrats de mariage passés chez le que les témoins familiaux au contrat de
notaire et qui constituaient un acte civil mariage étaient beaucoup moins nom-
réglant les relations économiques entre breux à Paris qu’ailleurs : 63,5 % en
les époux (Trévisi, 2008, 195). 1725, 48,6 % en 1749-1750 et 54,8 %
Le problème ici est que les cérémonies en 1775 (Trévisi, 2008, 188). Dans les
et les actions liées au mariage ou au grandes villes, les tendances sont donc
baptême pouvaient avoir des sens cultu- plus difficiles à identifier et surtout à
rels différents selon les circonstances et
expliquer d’une manière univoque, ce
selon les individus qui étaient, en effet,
qui ramène à un des problèmes que
pris dans des déterminations sociales et
posent la plupart des analyses évoquées.
religieuses variées et parfois contradic-
Elles concernent, en effet, pour l’essen-
toires. Vincent Gourdon l’a clairement
démontré pour le témoignage au tiel les campagnes, ce qui est parfaite-
mariage civil au XIXe siècle (Gourdon, ment recevable puisqu’elles abritent la
2008a) ainsi que pour le parrainage à grande majorité de la population de
Paris à la même époque (Gourdon, l’Europe à l’époque moderne et encore
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2008b). Il a alors appelé à bien tenir une partie importante au XIXe siècle.
compte du rapport propre que les indi- Mais les villes, où réside une partie
vidus, selon leur religion, selon leurs croissante de la population, sont traver-
classes sociales et selon leur culture, sées par de puissants courants à la fois
pouvaient avoir avec le rite étudié. Nous d’immigration et d’émigration qui limi-
retrouvons ici la question posée à tent l’enracinement sur place des
propos de la hausse des dispenses : familles, surtout dans les milieux popu-
mesurons-nous bien une intensification laires, et donc les possibilités de dispo-
des relations familiales ou simplement ser sur place de parents proches, avec
un changement de la valeur attribuée à lesquels redoubler les alliances ou
une action ou à un rite, et qui amène- auxquels faire appel pour lors des céré-
rait par nécessité ou par défaut à choisir monies de mariage ou de baptêmes.
des parents ? En d’autres termes, la Nous sommes renvoyés ici, encore une
transformation porte-t-elle sur le rite ou fois, aux logiques migratoires et donc
l’action ou bien sur la famille ? Il n’est démographiques, qui ne doivent jamais
naturellement pas possible d’écarter être oubliées.

238
NOTE CRITIQUE

PARENTÉ Kinship in Europe (p.105-124), sur les


ET STABILISATION SOCIALE structures politiques des bourgs du sud
de la France sous l’Ancien Régime,
Une des grandes forces de Kinship in cherche d’ailleurs à approfondir ce lien.
Europe est qu’il inverse la perspective Dans son travail sur les familles de
de la plupart des recherches entreprises patrons du textile lillois à la fin du XVIIIe
depuis une quarantaine d’années en siècle et au XIXe siècle, Jean-Pierre Hirsch
histoire sociale. Ses éditeurs partent, en avait déjà montré que le mariage
effet, de la famille et de la parenté et consanguin était le moyen qu’elles
cherchent à inscrire en son sein la avaient choisi pour « conserver et
plupart des évolutions de l’Europe du condenser le patrimoine ». Dans un
Moyen Âge au XIXe siècle alors qu’ordi- passage intitulé « Bonjour ma cousine »,
nairement les chercheurs s’intéressaient il emploie une image saisissante pour
à un autre objet, comme les transfor- décrire les familles qu’il étudie : « À tel
mations des campagnes, le développe- point que, pour l’observateur étranger
ment des villes ou l’essor de l’économie ou pour l’historien, ces quelques villes
de marché, qu’il finissaient par inscrire [Lille, Roubaix, Tourcoing] évoquent un
dans le cadre familial mais souvent de peu les îles coupées du monde où le
manière allusive ou insuffisamment navigateur découvre d’hallucinantes
développée. Les analyses de David consanguinités, Pitcairn peuplée des
Sabean et de ses co-auteurs rejoignent seules amours des révoltés de la Bounty »
particulièrement celles menées par (Hirsch, 1991, 303). Il se contente,
deux autres groupes de chercheurs : les cependant, d’illustrer les formes de
spécialistes des pouvoirs municipaux à redoublement d’alliances, par exemple le
l’époque médiévale et moderne et les mariage de cousins germains ou celui de
spécialistes d’histoire des entreprises ou deux frères avec deux sœurs, sans les
des sociétés du XIX e siècle. Ces cher- rapporter à la masse des mariages passés
cheurs ne s’intéressaient pas, à l’ori- dans le groupe qu’il étudie. Mais il
gine, à l’histoire de la famille, mais ils prolonge ses observations sur les unions
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s’attachaient à étudier les manifesta- entre parents proches par une réflexion
tions et le devenir d’un capital, poli- sur le contrat de société dont il fait
tique, dans le premier cas, sous la l’arme de ceux qui ne pouvaient pas
forme, le plus souvent, d’une place s’unir par le contrat de mariage, c’est-à-
dans les différents conseils municipaux dire les pères et les mères à leurs fils ou à
d’une ville ; économique, dans le leur filles, les beaux-frères et les belles-
second cas, sous la forme d’une partici- sœurs entre eux ainsi que les frères et les
pation à une société marchande, indus- sœurs (Hirsch, 1991, 313). En 1866,
trielle et/ou à une banque. Ils ont alors sur 163 contrats de société retrouvés,
toujours noté que les individus qui pas moins de 53 faisaient apparaître une
participaient à ces différentes formes parenté entre tout ou partie des associés.
de capital étaient inscrits dans des Le contrat prolongeait donc, en partie
familles qui, le plus souvent, étaient au moins, la parenté.
liées par le mariage et, parfois, d’une Étudiant les banquiers londoniens
manière relativement étroite. La dans la seconde moitié du XIXe siècle,
contribution de Bernard Derouet à Youssef Cassis a, lui aussi, consacré un

239
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

chapitre à l’inscription des relations d’af- de parenté simultanés. Mais ce comporte-


faires dans les réseaux de parenté. Il a noté ment n’est pas propre aux XVIIe et XVIIIe
la force de l’intermariage dans la constitu- siècles car J.-M. Moriceau, en l’absence de
tion des merchant banks et des banques registres paroissiaux fiables pour le XVIe
privées, en particulier lors de la fusion de siècle, a néanmoins pu observer la
1896, qui a amalgamé une vingtaine fréquence des mariages remarquables à
d’établissements financiers au sein de la cette période : sur 403 mariages de
banque Barclay. Il démontre qu’elle a été fermiers observés entre 1480 et 1579, 72,
préparée par des mariages entre les Barclay soit 18 %, font apparaître un renchaîne-
et les quatre autres grandes familles inté- ment d’alliance. Et la proportion
ressées par la fusion : les Gurney, les augmente sur la fin de la période, puisque
Backhouse, les Birkbeck et les Buxton. Il pour les seuls 216 mariages conclus entre
a également noté que « le nombre de 1550 et 1579, elle est de 22% (Moriceau,
frères, cousins ou amis qui ont épousé 1994, 159-160).
deux sœurs est étonnant » (Cassis, 1984, Une telle constatation n’invalide bien
251, 264). Les éléments rassemblés ici, et sûr pas les propositions faites par les
d’autres15, vont donc dans le sens des éditeurs de Kinship in Europe. Elle
éditeurs de Kinship in Europe. Mais sont- indique juste que les comportements
ils nouveaux ? qu’ils ont observés au XIXe siècle
Dans le milieu des fermiers-laboureurs pouvaient se produire au XVIe siècle dans
de l’Île-de-France, où les familles se trans- un milieu aisé et articulé autour du capi-
mettaient de génération en génération les tal socioéconomique que représentait le
lucratifs baux des vastes domaines céréa- bail d’une vaste ferme. Et la prégnance de
liers possédés par les grandes maisons reli- ces mariages « remarquables » est égale-
gieuses parisiennes, les mariages consan- ment attestée pour un groupe situé un
guins étaient, en effet, une caractéristique peu plus bas dans l’échelle sociale, les
ancienne. En 1650-1699, sur 148 maria- paysans et les artisans des campagnes au
ges recensés, 18 soit 12,2 % concernent nord de Paris, et à une période très diffé-
des parents proches (de 2-2 à 4-4) et la rente, le XVIIe siècle, marquée par une
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proportion augmente finalement peu par crise économique latente et un ralentisse-
la suite puisqu’elle passe à 13,9% de 1700 ment progressif de la mobilité sociale.
à 1749 (24 sur 173) (Moriceau, 1994, Jérôme Viret a, en effet, attiré l’attention
714). Les familles qui occupaient le sur l’existence dans le village d’Écouen de
sommet de la hiérarchie paysanne, et qui « bassins d’alliances » c’est-à-dire de
étaient même en voie d’anoblissement au familles, qui partagent généralement une
XVIIIe siècle, pratiquaient de façon même activité économique, comme, par
courante le mariage entre cousins exemple, les vignerons et les marchands
germains, depuis 1649, par exemple, pour de fruits, les laboureurs moyens ou
la famille Navarre. Tous les hommes de encore les artisans qualifiés, qui tendent à
cette famille ont, ensuite, épousé une s’unir préférentiellement entre elles – sans
cousine et les femmes ne sont plus sorties cependant que la consanguinité soit exac-
du lignage à partir de 1696. Au mariage tement mesurée (Viret, 2004, 334-348).
de Jean-Louis Navarre avec sa cousine Entre 40 % et 45 % des enfants issus de
germaine en 1726, le bref pontifical a couples appartenant à un de ces bassins se
donc dû les relever de cinq empêchements marient à l’intérieur du bassin alors

240
NOTE CRITIQUE

qu’une distribution aléatoire devrait semblablement nécessaire, dans ce type


donner un pourcentage allant de 17 % à d’études, de mieux distinguer les premiers
30 %. L’auteur va plus loin en observant mariages des remariages qui ressortissent à
l’apparition de ce qu’il appelle les « pools des configurations et à des tactiques relati-
familiaux » c’est-à-dire de « coalition » vement différentes.
formées « par le moyen de mariages Les comportements mis en avant dans
redoublés entre quelques familles » qui Kinship in Europe ne sont donc peut-être
ont un caractère professionnel très pas autant le résultat d’une évolution
marqué et qui par ailleurs, ce qui est assez temporelle que celui d’une sélection
naturel, suivent les lignes de fractures reli- sociale: ils concernent essentiellement les
gieuses du village. Il décrit ainsi un de ces élites, rejoints peut-être, au cours du XIXe
pools, qui sont d’ailleurs de courte durée : siècle, par les classes moyennes en voie de
il est constitué autour de six chefs de structuration. Mais les XVIe, XVIIe et XVIIIe
famille dont tous les enfants épousent, à siècles paraissent avoir été aussi bien des
peu d’intervalle, entre 1653 et 1665, un « kinship-hot societies », en employant
enfant d’un chef de famille du pool. alors le terme de « société » au sens de
Nous pourrions poursuivre les observa- l’époque moderne de petits regroupe-
tions de ce type en particulier en nous ments d’individus et de familles faisant
tournant vers les historiens des pouvoirs société ensemble et se fréquentant ordi-
municipaux16. Il en ressortirait, nous nairement. Ces petites « sociétés » de
semble-t-il, que le mariage entre parents
familles stabilisées étaient déjà largement
proches apparaît, à des périodes très diffé-
constituées autour de la parenté et de
rentes, comme une solution pragmatique
biens autour desquels elles s’organisaient,
que les familles stables ont tendance à
au premier rang desquels venaient les
adopter en particulier, mais pas seule-
ment, pour éviter le morcellement du seigneuries, les charges, les offices, pour
patrimoine familial. Nous préférons, les familles les plus importantes (Chate-
d’ailleurs, parler de familles « stabilisées » lain, 2008 ; Haddad, 2009) ou encore le
car le phénomène peut durer peu de capital économique, les terres ou l’outil de
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temps, comme pour les pools d’Écouen production, voire, peut-être, les savoirs
ou de Villiers-le-Bel, ou, au contraire, techniques pour les familles de la
s’étendre sur plusieurs générations, marchandise ou de l’artisanat. Le grand
comme pour les familles étudiées par intérêt de Kinship in Europe est de nous
Gérard Delille. Cette solution prend les amener à réfléchir à la manière dont la
formes que la configuration démogra- stabilisation s’accompagnait d’une fami-
phique de la famille autorise au moment lialisation des relations sociales alors que
où l’union est souhaitable. Cela explique les lois sur l’héritage, dans certains cas, et,
d’ailleurs pourquoi un bon nombre surtout, le contexte culturel dans lequel se
d’unions remarquables sont, en fait, concluaient les unions, subissaient une
souvent liés à des remariages, celui d’un transformation rapide. L’étude de la
veuf ou d’une veuve à un proche parent parenté dans les sociétés qui se dévelop-
du conjoint décédé. Cela explique aussi pent dans les colonies européennes aussi
que le remariage d’un veuf et d’une veuve bien en Amérique, qu’en Asie ou en
s’accompagne parfois de l’union de leurs Afrique, à partir du XVIe siècle a, sans
enfants respectifs18. Il serait d’ailleurs vrai- doute, beaucoup à nous apporter.

241
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

LES ANAMORPHOSES romain germanique, de l’espace suisse


DE LA PARENTÉ ou de la péninsule italienne, et le lien
fondamental entre l’organisation de la
Kinship in Europe fait donc à la famille et l’État a été souligné à de
communauté scientifique une série de nombreuses reprises. Il s’agit également
propositions fortes qu’elle doit impérati- de zones où l’évolution des systèmes
vement prendre en compte. Nous économiques a été différente de celui de
voudrions, dans le dernier temps de l’Europe médiane et il conviendrait
notre analyse, esquisser des pistes par donc d’étendre les analyses faites ici à ces
lesquelles nous pourrions prolonger ces autres Europes. Nous ne devons pas
réflexions. Un des grands acquis de ce sous-estimer, cependant, les effets d’une
volume est, d’abord, qu’il affirme coura- certaine « uniformisation » de l’Europe à
geusement que la parenté est un objet partir de la fin du XVIIIe siècle, dont celle
d’étude qui doit être saisi à l’échelle qu’a connue la France du Code civil
européenne (avec, éventuellement, ses (avec, cependant, des adaptations qui
extensions coloniales qui ne sont pas ont permis dans certaines régions la
envisagées ici) et non pas seulement à survivance d’anciennes pratiques) est
l’échelle « nationale », si tant est qu’elle une forme réduite. Elle est passée par la
ait un sens pour les périodes auxquelles diffusion du modèle politique de l’État
nous nous situons, ou même local qui nation aux dépens de tous les autres (en
est, en fait, le cadre d’analyse le plus particulier de la monarchie compo-
souvent retenue. L’Europe qui est ici site) ainsi que de la révolution indus-
étudiée est, de fait, une Europe lotharin- trielle et des nouvelles formes de capital
gienne, en quelque sorte, essentielle- qu’elle véhicule ; et par l’homogénéisa-
ment composée des principautés alle- tion des comportements élitaires en
mandes, des cantons suisses, ainsi que raison de la circulation des individus et
des États italiens. Et encore cet espace de l’information. Mais la prépondérance
connaît-il des situations qui pouvaient croissante des lois civiles sur la loi des
être très diverses et ne pas entrer dans le Églises en matière matrimoniale est un
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modèle de la « kinship-hot society » élément qui va dans le sens opposé.
(Lanzinger, 2008, 308). La France appa- En second lieu, les éditeurs de l’ou-
raît mais seulement sous la forme vrage contredisent de façon convain-
d’exemples ponctuels alors qu’elle cante l’idée prégnante des années 1960
connaissait une très grande variété des et 1970 selon laquelle les transforma-
situations que n’ont pas forcément tions économiques et sociales de
éliminé la Révolution et le Code civil l’époque moderne avaient considérable-
(Bruguière, 1993). Les populations ment érodé les liens que pouvait mainte-
vivant dans les Espagnes (castillane, nir un individu avec les membres de sa
catalane, valencienne, galicienne…), au famille et de sa parenté, en particulier,
Portugal, dans les différents royaumes avec les cousins éloignés, ou même avec
des îles Britanniques, ou encore dans les les cousins proches. Comme nous
royaumes du Nord, n’apparaissent pas l’avons rappelé, les historiens de cette
ou peu. Or, il s’agit de populations période situaient cette évolution dans le
placées sous des systèmes politiques bien cadre de l’essor de l’individualisme qui
différents de ceux du Saint-Empire aurait caractérisé la société postérieure

242
NOTE CRITIQUE

à la Réformation et qui aurait vu le diaire, désigne ainsi, dans son testament,


déclin des solidarités familiales au profit Adrien Delor, qui est le fils de son
d’attitudes plus égocentrées. Les auteurs cousin germain paternel, sous la jolie
anglophones, en particulier, y voyaient expression de « second neveu ». En
la racine de l’individualisme anglais et la retour, Adrien, dans son propre livre de
matrice d’un processus de transfert, raison, le désigne comme son « oncle »,
d’ailleurs incomplet comme le montrent parce que son père et lui étaient liés par
toutes les études notamment en temps « une amitié fraternelle qui remontait
de crise, d’un certain nombre de respon- aux premières années de leur enfance »,
sabilités, en particulier de protection, et parce que Hippolyte jouait un rôle
assumées par la famille à l’État, qui fondamental dans l’illustration sociale
caractérise nos sociétés modernes de la famille18. De même, une tante « à la
(Macfarlane, 1970 ; Stone, 1977). En ce mode de Bretagne » recevait, avec cette
sens, Kinship in Europe couronne appellation dont c’était bien le sens, le
brillamment un long et indispensable statut d’une parente proche.
travail de remise en cause de cette inter- Les correspondances ou les écrits du for
prétation et devrait déboucher sur la privé abondent de ces exemples de recon-
réconciliation, dans l’historiographie, de figuration conjoncturelle de la parenté où
l’individu et de la famille. les degrés se distordent sous l’effet de l’af-
Cependant, les distinctions faites fection et de l’intérêt mélangés et elles
entre les degrés et les lignées de parenté existaient aussi bien au XIXe siècle qu’aux
qui séparent ego de ses père et mère, de périodes antérieures. Dans son étude sur
ses collatéraux immédiats et de ses diffé- la famille Miron aux XVIe et XVIIe siècles,
rents types de cousins (premiers, Claire Chatelain évoque le mariage de
seconds ou troisièmes ; paternels ou Philippe Hurault de Cheverny, facilité
maternels ; parallèles ou croisés), dont par une parente, Marguerite Poncher
l’observation des interventions différen- « laquelle était ma cousine germaine, et
tielles dans la vie d’ego est l’essence de plus par dispense, ma belle-sœur […]
même de l’anthropologie de la parenté, dont j’ai reçu dès mon enfance toutes les
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doivent être davantage interrogées. Le marques d’amitié […] non seulement
redoublement et l’enchevêtrement des que j’eusse pu espérer d’une très bonne
parentés qui caractérisent certains des sœur et cousine, mais d’une parfaite
individus évoqués dans Kinship in amitié de propre mère, si j’eusse pu en
Europe, ne conduisent-il pas à une aboli- avoir deux » (Chatelain, 2008, 258). Un
tion, ou au moins à une perte de signifi- siècle plus tard, un gentilhomme proven-
cation, des distances parentales ? Que çal appauvri, Jean-Baptiste de Grille,
sont donc dans l’ordre de la parenté ces décrit dans les mêmes termes sa relation
cousins germains qui étaient aussi des avec Marie d’Estoublon : « Elle était fille
beaux-frères ? Au sein d’une famille, un du frère de mon père, et je la regardais
cousin éloigné pouvait parfaitement être depuis mon enfance comme une tendre
appelé « mon oncle » simplement parce sœur, et depuis la mort de mon oncle,
qu’il en remplissait les « fonctions ». En dont j’étais particulièrement aimé, j’avais
1886, l’abbé Hippolyte Delor, membre pour elle les sentiments d’un fils »
d’une grande famille bourgeoise de (Domergue, 2010, 98). Ces cousines-
Limoges, et auteur d’un volumineux sœurs-mères tendrement aimées avaient

243
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

pour point commun d’être sans enfant considéré longtemps comme caractéris-
et donc disponibles pour ces saisissan- tique des XIXe et XXe siècles. L’amour entre
tes anamorphoses de la parenté. Nous cousins est censé, par ailleurs, naître entre
pourrions également rapprocher l’ana- des êtres qui se fréquentent depuis long-
lyse que fait Simon Teuscher des formes temps de la même manière que l’affection
de coopérations quotidiennes au sein au sein des couples de la première moder-
de l’élite bernoise de la fin du Moyen nité devait surgir de la relation instaurée
Âge, où les individus « tended to coope- par le mariage et n’en était donc pas un
rate with individuals that they picked préalable à la différence des mariages
selectively and for rather short period « romantiques ». L’union avec le cousin ou
of time from a wide range of remote la cousine, était, dans ce sens, le fruit d’un
kin as well as from among other certain conservatisme relationnel propre
acquaintances » (p. 79), avec les obser- aux élites.
vations que nous avons nous-mêmes pu
faire sur les élites carolopolitaines et
amiénoises dans la seconde moitié du
GROUPES SOCIAUX
ET CULTURES FAMILIALES
XVIIIe siècle, au sein desquelles les indivi-
dus tendaient à élire au sein de leur Justement, les éléments réunis sur le
parenté des parents préférés avec lesquels mariage dans Kinship in Europe concer-
ils entretenaient des liens plus intenses nent essentiellement les élites voire les
qu’avec les autres (Ruggiu, 2007). familles royales et princières pour
Dans cette perspective, où la parenté est lesquelles les règles de parenté ont
importante mais où l’élection en son sein toujours été différentes de celles des autres
l’est tout autant, le mariage entre cousins groupes de la société (Bély, 1999). Pour
ne serait-il donc pas désirable, surtout au les familles situées depuis un certain
XIXe siècle, avant tout parce qu’il est un temps au sommet de leur échelle sociale,
mariage avec un « semblable » ? Le terme les égaux épousables ou que l’on peut
de « semblable », dans lequel nous englo- choisir comme parrains ou marraines
bons les gens qui sont extérieurs à la pour ses enfants, sont souvent aussi des
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parenté mais qui en partagent les caracté- parents. Même s’il est vrai que les mêmes
ristiques, comme le fils ou le neveu d’un comportements se trouvent chez les
associé paternel, par exemple, nous familles stabilisées des classes moyennes,
semble parfois plus adéquat pour désigner ce sont également les élites qui sont allées
cette relation qu’une inscription dans le le plus loin dans l’adoption de systèmes
vocabulaire de la parenté. Le mariage d’héritages patrilinéaires symbolisés, par
entre cousins, proches ou éloignés, ne exemple, par le mayorazgo en Espagne, le
serait pas alors le signe d’une permanence strict settlement en Angleterre ou l’exis-
de la présence de la parenté dans les rela- tence de règles successorales propres à la
tions sociales mais une conséquence colla- noblesse en France. Les éditeurs du
térale d’un resserrement sur le noyau volume ont naturellement conscience du
familial proche voire sur un groupe d’élec- biais social des contributions qu’ils ont
tion fondé sur une identité de statut réunies. Est-il possible à ce moment-là de
socio-économique et de culture. Un tel faire du mariage entre proches parents
mouvement ne serait alors plus contradic- (par l’affinité ou par l’alliance) une carac-
toire avec le processus d’individualisation téristique du mariage européen, s’il n’est

244
NOTE CRITIQUE

pas prouvé qu’il concerne également les intériorisée par ses acteurs, dessine « natu-
groupes moyens de la société ou encore les rellement » pour eux des chemins qu’ils
masses rurales et, de plus en plus, urbaines doivent emprunter dans le cadre, bien
de la population? La question de l’urbani- sûr, à l’échelle de la communauté
sation, d’ailleurs, et des transformations auxquelles ses familles appartiennent, de
qu’elle induit, apparaît d’ailleurs peu prise systèmes plus larges de contraintes
en compte dans le volume alors que d’au- normatives ou pratiques.
tres évolutions fondamentales de la La transmission des vocations religieuses
société des XVIIIe et XIXe siècles, comme la au sein de certaines familles est ainsi un
progression de l’économie capitaliste, le phénomène très intrigant. Les historiens
sont bien davantage. avancent souvent que les familles nobles
Mais nous aimerions avancer ici une ou bourgeoises faisaient entrer un cadet
autre direction de recherche que les diffé- dans les ordres pour recueillir un béné-
rentiations de comportement selon les fice familial ou bien envoyaient les cadets
classes sociales. Il nous semble, en effet, et les cadettes en surnombre au couvent
qu’une partie des comportements obser- pour éviter de morceler le patrimoine.
vés ne ressortissent pas à la volonté de Christophe Duhamelle a ainsi magistra-
groupes sociaux de se conformer à des lement montré la manière dont les ligna-
normes légales, civiles ou religieuses, ni à ges des chevaliers d’Empire se sont cris-
l’incorporation, et à la restitution, de tallisés autour de la transmission au sein
modèles mais bien plutôt à l’élaboration des familles des plus prestigieux canoni-
au sein des familles d’une culture spéci- cats allemands (Duhamelle, 1998). Mais
fique, nourrie des expériences partagées il est aussi démontré que cette explica-
par un ensemble restreint d’individus et tion traditionnelle ne valait pas pour
qui est reproduite, voire radicalisée, au fil certaines familles de la noblesse ou de la
des générations19. La culture familiale, bourgeoisie urbaine française. Elles
transmise par l’observation des compor- formaient dans les villes un milieu
tements de la génération précédente ou « dévot », dont les familles étaient généra-
des collatéraux ainsi que par l’éducation lement liées les unes aux autres, et qui
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domestique, médiatise les normes et les tendait à peupler les cures et les maisons
modèles et rend de ce fait acceptables ou religieuses locales en n’hésitant pas à y
inacceptables pour l’entité familiale, plus laisser entrer un aîné ou bien en y
ou moins élargie, une gamme différenciée envoyant un nombre important, voire
d’attitudes. Elle explique les variations de démesuré, de membres (Dinet, 1988,
comportements parfois très sensibles au 2001 ; Collette, 2001). Certaines d’entre
sein de milieux économiques, sociaux et elles ont pu alors s’éteindre après la mort
culturels extrêmement proches qui ne imprévue d’un fils qui était le seul de sa
relèvent pas alors seulement de l’affirma- fratrie demeuré dans le monde. L’imita-
tion d’une ou de plusieurs individualités. tion d’un oncle ou d’une tante, d’un
L’existence d’une culture familiale peut frère ou d’une sœur, par contagion au
être mise en valeur à travers une série sein d’un petit cercle, a pu jouer, dans ces
d’observations comme la transmission destins familiaux, un rôle essentiel.
des vocations religieuses, le choix d’une Nous formulons donc ici l’hypothèse
profession et, naturellement, le choix du que le mariage au plus proche fait partie
conjoint. L’expérience de la famille, de ces éléments d’une culture familiale

245
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

qui finissent par produire un spectaculaire l’avait déjà noté, à propos des lignées de
effet d’entraînement mais limité à un petit paysans bas-bretons qu’elle a reconsti-
nombre d’individus. Le cas exemplaire de tuées : « Renchaînements et mariages
la famille Le Pas de Sécheval et de la consanguins se cumulent dans les bran-
famille Pirson, qui résidaient à Verviers ches où patrimoine et prestige sont à
au début du XVIIe siècle, et dont prati- conserver, mais ils ne sont ni aussi systé-
quement tous les membres d’une famille matiques, ni de même densité dès lors
ont épousé un membre de l’autre, dans le que des différentiations sociales et écono-
cadre de mariages pour la plupart oncle- miques s’instaurent au sein des lignées. »
tante/nièce-neveu, relève de ce phéno- (Segalen, 1985, 156). Ce phénomène a,
mène (Delille, 2000, 227). Claire Chate- également, été récemment mis en valeur
lain a également montré la manière dont par Mathieu Marraud dans sa puissante
la famille Miron est (trop) longtemps étude de la grande bourgeoisie mar-
demeurée fidèle à un mode particulier chande parisienne de la fin du XVIIe siècle
d’alliances passant par l’hypogamie des et du XVIIIe siècle (Marraud, 2009). Il y a
filles, alors même qu’il n’était plus prati- repéré une vaste constellation familiale
qué dans le milieu auquel elle apparte- porteuse d’une culture inclusive qui a pu
nait et dans lequel elle était de plus en imposer, sur la longue durée, à ses
plus en difficulté (Chatelain, 2008)20. La membres un mariage endogame pour
notion de « cultures familiales » semble éviter le morcellement du patrimoine et,
relativement souple pour rendre compte surtout, le déclin des sociétés marchan-
d’un dernier problème que pose l’identi- des qui en constituaient le cœur. Mais les
fication du mariage entre proches familles qui la composaient ont su orien-
parents comme un élément fondamental ter à nouveau leurs unions vers l’exté-
du comportement des élites bourgeoises rieur de la constellation afin, d’une part,
du XIXe siècle. Il est, en effet, contradic- d’écarter les rameaux en déclin, même si
toire avec une autre tendance majeure de elles continuaient à exercer envers elles
ces élites, qui est justement la visée des formes de solidarité et, d’autre part,
hypergamique, en particulier pour les de permettre à certains de leurs mem-
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filles. L’ascension sociale, dont l’historio- bres, surtout aux filles, d’entrer dans la
graphie de l’époque moderne a pris cons- haute noblesse.
cience qu’elle n’était sans doute pas une
visée universelle qui expliquerait en tous
temps et en tous lieux les comporte-
CONCLUSION
ments des individus, en particulier leurs Il faudra beaucoup de temps avant de
unions, demeure néanmoins une réalité réussir à développer l’ambitieux et stimu-
et elle passe forcément par la conclusion lant programme de travail dessiné par les
d’alliances en dehors de la famille. Lors- éditeurs de Kinship in Europe. Ils nous
qu’une branche connaît une ascension invitent, en particulier, à multiplier les
sociale conséquente, ses membres études en amont et en aval de la rupture
tendent à ne plus se marier avec les du milieu du XVIIIe siècle qu’ils ont iden-
cousins et cousines demeurés en arrière tifiée. L’idée même d’une rupture à cette
mais, au contraire, à consolider son période est indiscutablement séduisante
avance en se mariant dans des familles car elle semble rejoindre beaucoup
situées au-dessus d’elle. Martine Segalen d’autres courants qui ont traversé à ce

246
NOTE CRITIQUE

moment là les sociétés occidentales, en aux élites mais elles avaient surtout un
particulier la société française. David D. point commun qui est d’avoir réussi à se
Bien a ainsi montré que les projets de stabiliser pour un temps donné et dans un
réforme de l’armée française dans les lieu donné. L’étude de ces mécanismes de
années 1760 et 1770 accordaient un rôle stabilisation des individus et des familles
de plus en plus fondamental à la famille, dans l’espace social, en particulier urbain,
conçue comme le creuset où les vertus sera un des grands champs pionniers de
militaires devaient se transmettre de père l’histoire sociale des prochaines années et
en fils. La nécessité d’une « préférence les historiens de la famille et de la parenté
familiale » devint sous-jacente dans la en seront parmi les acteurs essentiels (de
plupart des réformes qui furent adoptées Putte, Neven et Oris, 2007). L’organisa-
alors. Le rapport rédigé en 1787 par le tion de la circulation des biens, récem-
comte de Guibert pour le conseil de la ment explorée pour la noblesse française
Guerre évoque ainsi sans détours « cette (Haddad, 2009) ainsi que pour les élites
classe précieuse des fils ou frères des parisiennes (Chatelain, 2008 ; Marraud,
anciens officiers des régiments, espèce à 2009), est ici un instrument fondamental.
laquelle il est si essentiel d’assurer des La notion de « cultures familiales », qui
emplois parce qu’elle fournit de bons offi- désigne les mécanismes par lesquels les
ciers, que c’est elle qui met dans les corps familles stabilisées constituent et se trans-
l’esprit de famille et qui attache au service mettent leurs propres règles de fonction-
du Roi les pères par les enfants et les nement et leur propre mé-moire, nous
enfants par les pères » (Bien, 1974, 523). semble être un autre outil par lequel les
La redéfinition des rôles parentaux et individus médiatisent les valeurs générales
l’émergence d’une nouvelle figure grand- des groupes sociaux.
parentale forment une autre de ces trans- Au-delà, l’ouvrage nous fait réfléchir
formations des années 1750 et 1760 sur l’impact de l’anthropologisation des
(Gourdon, 2001). Nous pourrions aussi études sur la parenté à l’époque moderne
évoquer ici la virilisation des rapports et au XIXe siècle qui nous semble plus
sociaux, qui est sensible dans la dégrada- poussée en France que, par exemple, dans
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tion du sort réservé aux filles mères dans les pays anglophones. Il nous semble qu’il
les villages français (Fillon, 1989) aussi n’est pas encore pleinement démontré
bien que dans le développement de la que les figures de l’alliance que dessinent
culture patriotique et de l’esthétique néo- les reconstitutions des arbres généalo-
classique qui exaltaient les valeurs et les giques soient bien la conséquence de l’in-
vertus masculines. sertion des individus dans une structure
Nous avons pourtant cherché à nuancer de parenté ou dans des règles d’organisa-
la place prise par le mariage consanguin tion générale qui gouverneraient les
dans ce « tournant parental » de la fin du comportements matrimoniaux ou poli-
XVIIIe et du XIXe siècle. Nous avons essayé tiques. Nous ne pouvons écarter qu’elles
de montrer, d’une part, que certaines de soient, simplement, le résultat de répon-
ces caractéristiques se re-trouvent aux ses pragmatiques à des situations données
époques antérieures et que, d’autre part, façonnées, en grande partie, par les aléas
en l’état actuel de nos connaissances, elles de la démographie, cette « loterie » qui,
ne concernaient qu’une minorité de jusqu’au XXe siècle, a défié les schémas les
familles. Elles appartenaient généralement mieux pensés. Le pragmatisme de ces

247
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

réponses joint à l’existence de cultures parenté apparaissent alors comme des


familiales, explique les oscillations qui constructions sociales21, éminemment
peuvent être repérées, selon les cas, entre adaptables et inventives, comme l’a souli-
les inflexions patrilinéaires et les gné, en particulier, Christophe Duha-
inflexions bilatérales. Il nous paraît donc melle (p. 139), plutôt que comme des
préférable de continuer à travailler sur la entités pluriséculaires orientées autour de
parenté aux époques moderne et contem- la reproduction d’un système d’alliance.
poraine d’une manière qui soit informée Il nous semble justement qu’un des
par les problématiques de la démographie grands intérêts de Kinship in Europe est
historique ou de l’histoire sociale plutôt de jeter les bases d’une telle histoire tout
que par celles de l’anthropologie histo- en reconnaissant, en son sein, l’impor-
rique en tous cas dans sa variante structu- tance de l’apport de l’anthropologie.
raliste. Elles nous permettent, en effet, de
François-Joseph RUGGIU
mieux faire varier la focale entre les diffé-
rents acteurs que sont l’individu, la Centre Roland Mousnier (UMR 8596),
famille proche, le lignage et la parentèle, Université de Paris-Sorbonne-CNRS,
francois-joseph.ruggiu@paris-sorbonne.fr
dont les besoins et les intérêts peuvent se
rejoindre ou diverger. La famille et la

NOTES

1. Les premières versions de cet article ont été 3. Dans le cours de l’article, les numéros entre
présentées en 2008 au Séminaire d’histoire de la parenthèses renvoient aux pages du volume.
démographie et de la famille de l’université de 4. Nous appelons « mariages entre parents
Paris-Sorbonne (Centre Roland Mousnier) et, en proches » les mariages impliquant des parents
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2009, au Séminaire avancé de recherche du inclus dans les degrés interdits par l’Église au
Département d’histoire économique de l’univer- concile de Latran IV de 1215. Ils concernaient
sité de Genève, à l’invitation de Michel Oris. essentiellement les troisièmes cousins (ou cousins
Nous remercions tous les participants des obser- deux fois germains ou 4-4), les deuxièmes cousins
vations qu’ils nous ont adressées lors de ces séan- (cousins issus de germain ou 3-3) et les premiers
ces. Par la suite, Guido Alfani, Vincent Gourdon, cousins (cousins germains ou 2-2).
Élie Haddad et Jérôme Viret ont relu cet article et 5. Les éditeurs de Kinship in Europe évoquent ici
nous ont aimablement fait part de leurs le passage à des systèmes de partage inégalitaire
remarques, de leurs critiques et, parfois, de leurs où les filles (mais aussi les fils cadets) sont dotés et
désaccords constructifs. Nous souhaitons qu’ils donc exclus de la succession aux biens matériels
trouvent ici, comme les relecteurs anonymes des (terres, charges) et symboliques (titres). Nous ne
Annales de Démographie Historique, l’expression pouvons discuter ici, faute de place, le fait de
de notre plus profonde reconnaissance. savoir si l’octroi d’une dot exclut réellement un
2. New York, Oxford, Berghahn Book, 2007. enfant de la succession car une telle conception
L’ouvrage est issu d’un colloque intitulé “Kinship réduit la succession à un événement ponctuel qui
in Europe: The Long Run 1300-1900”, qui s’est survient à la mort des parents. Si nous définissons
tenu à Monte Verita (Ascona), en Suisse, du 15 la succession comme la transmission des biens
au 20 septembre 2002. d’une famille d’une génération à une autre, elle se

248
NOTE CRITIQUE

déroule alors à toutes les étapes de la vie des a étudiés, ce qui empêche d’apprécier l’ampleur
parents et une fille dotée reçoit bien une part de du mouvement.
l’héritage parental même si elle est plus faible que 13. http://historicaldemography.net/
celle qu’elle aurait été, en cas de partage égalitaire documents/program_patrinus_fr.pdf
à la mort des parents, des biens de la génération
14. L’étude porte sur 17 000 certificats de
précédente. Elle n’en est donc pas exclue.
mariage pour les trois communes de Leuwen,
6. Gérard Delille et David Sabean s’accordent Aalst et Bierbeck de 1800 à 1913.
cependant pour faire de la seconde moitié du
15. Cyril Grange a ainsi travaillé sur 114 généalogies
XVIIIe siècle la période de transition. Le premier y
descendantes de familles de la haute bourgeoisie
repère l’effacement du système d’échange entre
juive française. Il a observé l’importance de l’inter-
lignées alternées et l’essor des mariages conclus
connexion entre ces familles : 85 d’entre elles
entre individus apparentés ou non. Comme nous
entretiennent des liens d’alliance dans la période
le verrons plus bas, le second date de cette
1850-1899. Il a également relevé 42 mariages
période l’explosion des mariages consanguins.
renchaînés sur 355 pour la période 1800-1959
7. Voir également la contribution de Simon (11,8 %) avec une décroissance régulière à partir
Teuscher qui utilise la chronique de Ludwig von des années 1880 (Grange, 2005, 145).
Diesbach (p. 83-85).
16. En France, où les charges municipales sont, à
8. Voir, là encore, Alain Collomp, 1977 : « Cette l’époque moderne, électives ou cooptatives, les
dernière reconstitution, génération après généra- chercheurs ont tous souligné, sans pour autant le
tion, bute assez souvent au bord d’un vide ou quantifier systématiquement, le haut degré d’in-
d’une cassure : la famille-souche s’arrête par termariage dans les lignages d’édiles municipaux
défaut de descendants, ou bien est partie faire (Guignet, 1990 ; Saupin, 1996 ; Mouysset, 2000 ;
souche ailleurs. » Coste, 2006, 2007 ; Junot, 2009). Ne travaillant
9. La bibliographie sur le mariage en Europe aux généralement pas sur les généalogies ascendantes
époques médiévale, moderne et contemporaine ou descendantes des édiles, ils ont cependant
est imposante mais la question des interdits au rarement étudié les renchaînements d’alliances ou
mariage est rarement abordée pour elle-même les mariages remarquables. Les analyses sont à
(Trévisi, 2008, 486-491). peu près identiques pour l’Angleterre (Ruggiu,
10. En Angleterre, la forme d’un mariage valide 2002) mais la situation est très différente en
Espagne ou en Italie où les charges municipales
n’a pas été définie avant le Clandestine Marriage
étaient souvent héréditaires (Delille, 2003).
Act (ou Hardwicke’s Marriage Act) de 1753. Une
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partie importante des unions de fidèles de l’Église 17. Les deux mariages ont lieu parfois le même jour
d’Angleterre – jusqu’à la moitié des mariages à et parfois quelques années plus tard lorsque les
Londres dans la première moitié du XVIIIe siècle – enfants ont atteint « l’âge compétent » (Collomp,
étaient jusqu’alors « clandestines » ou, plutôt, 1977, 462 ; Bruguière, 1997, 1345).
« informelles » ou « non conformes » aux usages de 18. Nous devons ces informations au professeur
l’Église. Mais, comme l’édit de 1556 pour la Paul d’Hollander, de l’université de Limoges, qui
France, la loi de 1753 précise les conditions de achève une étude du diaire d’Hippolyte Delor.
validité (publication des bans ; déroulement de la Nous le remercions très vivement d’avoir eu
célébration ; définition de la minorité à 21 ans) et l’amabilité de nous permettre de les utiliser ici.
ne s’intéresse pas aux interdits matrimoniaux 19. Nous nous inspirons ici partiellement de
(Gillis, 1985 ; Lemmings, 1996 ; Probert et travaux de sociologie politique en particulier
d’Arcy Brown, 2008). Percheron, 1993, 131-143. L’étude des écrits du
11. Les mariages au-delà du quatrième degré (4- for privé est une clef essentielle pour entrer dans
5, 5-5, etc.), qui ne nécessitent pas de dispenses, ces cultures familiales (Mouysset, 2007).
demeurent des mariages entre parents jusqu’à une 20. David Sabean approche l’idée de « cultures
limite mal définie. familiales », telle que nous l’entendons, lorsqu’il
12. L’auteur ne donne malheureusement pas le développe la notion de « milieux » à partir de la
nombre de mariages réalisés dans les villages qu’il contribution de Christopher Johnson sur Vannes

249
FRANÇOIS-JOSEPH RUGGIU

au XIXe siècle. Mais il reste en grande partie fidèle di discendenza unilineare, o quello dell’identità tra
à la tradition historiographique d’où elle lignaggio e cognome, né tanto meno ad una cate-
provient, qui est celle de l’étude des sociabilités goria normativa fondata sui criteri della consangui-
telle que l’a initiée Maurice Agulhon, en France. nità » (Raggio, 1997, 39). Voir également Sandro
21. Nous rejoignons également ici les analyses Lombardini : “In our case, I think we have been
d’Osvaldo Raggio : « Da questi processi la parentela able to perceive how kin group in and around
emerge come una costruzione sociale fondata sulle Mondovì may more fruitfully be conceived of as
interconnessioni (e manipolazioni) tra fatti biolo- socially constructed networks of exchange than as
gici, fatti culturali et fatti politici. [...] Per questo la the outcome of a norm of consanguinity.”
categoria di parentela non può essere ridotta ad un (Lombardini, 1996, 244).
unico concetto, come ad esempio quello di gruppo

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