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On admet habituellement que la pratique d’une APS régulière et modérée est bénéfique à la santé. On
tend notamment à lui associer un bien-être physique, un entretien de la condition physique et un rôle
protecteur vis-à-vis de la plupart des pathologies dégénératives (le cancer, les maladies
cardiovasculaires, les diabètes, les maladies neurodégénératives, les maladies inflammatoires).
Le monde dans lequel nous vivons nous impose toutefois d’être le plus performant dans tous les
domaines. Ceci se répercute malheureusement au niveau de la pratique sportive si bien que beaucoup
de sportifs amateurs s’astreignent à des entraînements de plus en plus exigeants ou se lancent dans
des épreuves de longue haleine comme des marathons.
Une activité physique intense et/ou mal gérée s’apparente alors à un véritable « stress » ayant des
conséquences multiples pour le pratiquant (dégâts musculaires, crampes, augmentation de la fatigue
et mauvaise récupération).
Bien que nécessaire pour tous les organismes aérobies, l’oxygène peut également se révéler toxique.
Cette toxicité porte un nom : le stress oxydant. La toxicité de l’oxygène est due à la formation de
radicaux libres.
Rappelons que notre air ambiant est actuellement composé de 21 % d’O2 (FIO2 = 21%). Nous sommes
ainsi devenus des êtres aérobies. Toutefois, il y a de nombreuses formes de vie primitive qui vivent
en anaérobie et meurent en présence d’oxygène (par exemple, les bactéries dites « anaérobies »). Ceci
est également vrai pour nombreuses espèces animales lorsqu’elles sont exposées à des FIO2
supérieures à 21%. Il existe donc une toxicité à l’O2.
Il est aujourd’hui admis que l’exercice physique se caractérise par une augmentation du volume
d’oxygène consommé. Ce volume élevé d’oxygène consommé va engendrer une augmentation
concomitante de la production de radicaux libres (RL). Lorsque cette production de RL dépasse les
capacités de défenses antioxydantes de l’organisme, cette rupture d’équilibre correspond à l’état dit
de « stress oxydant ».
Le but de ce cours est de passer brièvement en revue l’évidence de la production des radicaux libres
lors de l’activité physique intense créant un stress oxydant et de montrer l’implication d’une
complémentation en antioxydants avant un exercice.
Le « stress oxydant métabolique » est défini comme un état tissulaire particulier qui perturbe
l’homéostasie de nos cellules qui se caractérise par un déséquilibre entre la production des radicaux
libres (RL) et les capacités antioxydantes de l’organisme. Classiquement on le définit comme
l’altération de la balance oxydants/ antioxydants en faveur des oxydants. Cette rupture d’harmonie peut
être provoquée par des conditions environnementales climatiques ou industrielles (ce n’est pas notre
propos ici) ou par le fonctionnement excessif de nos réactions tissulaires dans les conditions
théoriquement acceptables tel que l’exercice intensif. Lors d’un excès d’O2 et en l’absence
d’antioxydants adéquats, la formation de RL génère des lésions tissulaires. De même, la rupture de
l’homéostasie cellulaire engendre l’activation d’un ensemble de « protéines de stress » qui tentent de
combattre cette perturbation. Le stress oxydant est impliqué dans la pathogénie de nombreuses
maladies chroniques inflammatoires, dans le processus de vieillissement etc.
Un radical libre est un atome ou molécule ayant un ou plusieurs électrons non appariés (électrons
célibataires) sur son orbitale externe (couche de valence). Cette absence d’appariement lui confère une
grande réactivité et donc une durée de vie très courte de l’ordre de 10-3 à 10-6 secondes. En effet, un
radical libre aura toujours tendance à remplir son orbitale en captant un électron pour devenir plus
stable : il va donc se réduire en oxydant un autre composé (lipides, protéines, ADN...).
À l’état naturel, l’oxygène, qui comporte naturellement deux électrons célibataires sur la couche
périphérique, est très instable avec une très forte tendance à « oxyder » les composés qu’il rencontre
en leur arrachant un électron pour l’apparier à l’un de ses électrons célibataires. Ces composés
deviennent à leur tour instables, initiant une véritable chaîne de peroxydation. La majorité de l’O2 capté
par nos cellules est réduite en H2O grâce à l’action des mitochondries. Cette opération requiert 4
électrons par molécule d’O2 :
O2 + 4 H+ + 4e → 2H2O
Il existe toutefois des réactions intermédiaires dans la réduction de l’O2 en eau. Par ajout de 1, 2, 3
électrons, on obtient respectivement le radical libre « l’anion superoxyde », le « peroxyde d’hydrogène
», et le « radical hydroxyle ».
Cependant, derrière ce véritable danger mortel se cache un avantage décisif car, pour certains d’entre
eux, ces transferts d’électrons libèrent une énergie considérable qui est indissolublement liée à toutes
les formes de vies aérobies, à travers un rôle spécifique dans l’homéostasie énergétique cellulaire. En
effet, la synthèse d’adénosine triphosphate (ATP) est directement en rapport avec le « désappariement
d’électrons » au sein de certains complexes de la chaîne respiratoire mitochondriale.
Afin de contrecarrer l’action des RL, notre organisme dispose d’un système de défense : les
antioxydants enzymatiques et non enzymatiques. Un antioxydant est une substance qui retarde ou
empêche l’oxydation d’un substrat oxydable : protéines, hydrates de carbones, acides gras.
1.2 - Les Radicaux libres du stress oxydant ou Espèces oxygénées actives (EOA)
O2•- : radical superoxyde (radical peu réactif mais toxique, oxyde les catécholamines ; peut former
●OH)
H2O2 : Peroxyde d’hydrogène (non radical, stable, faiblement toxique, diffusible, antiseptique, peut
former °OH)
OH● : Radical hydroxyle (considéré comme l’un des radicaux libres les plus toxiques et les plus
agressifs. Très réactif, peu diffusible, initiateur principal de la lipoperoxydation, altère les protéines et
l’ADN)
1O ● : Oxygène singulet (non radical, très réactif, peut initier la lipoperoxydation)
2
RO2● : radical peroxyle (radical formé au cours de l’oxydation des lipides)
Etc.
D’autres mécanismes sont impliqués comme l’oxydation spontanée de l’épinéphrine (adrénaline), des
catécholamines ou de l’acide lactique dont les concentrations plasmatiques sont augmentées lors d’un
effort.
3.1.1- La mitochondrie
En réponse à un exercice notamment de longue durée, la consommation d’oxygène peut augmenter
de10 à 20 fois par rapport au niveau de repos. La conséquence directe est un flux d’oxygène au niveau
musculaire qui peut être 100 à 200 fois supérieur à celui de repos et il en résulte une augmentation
subséquente du flux d’électrons au niveau de la mitochondrie. Au niveau du muscle squelettique, la
mitochondrie va donc être un site potentiel de la formation des RLO en réponse à l’exercice. Par
conséquent, l’augmentation de la concentration des transporteurs d’électrons de la chaîne respiratoire
mitochondriale et l’augmentation soudaine du débit d’oxygène consommé vont conduire à
l’augmentation des concentrations d’H2O2 en conditions d’exercice. Cette augmentation considérable
du débit des phosphorylations oxydatives mitochondriales est liée à l’intensité et à la durée de
l’exercice et provoque une élévation proportionnelle du débit des RLO et de leur fuite vers le cytosol.
Ces modifications du taux d’oxygène vont influer la production de RLO et vont être au cœur du
phénomène d’ischémie-reperfusion.
La vie se caractérise également par la mort cellulaire (apoptose) au cours du développement normal
d’un organisme en parfaite santé. C’est suicide nécessaire pour éliminer des cellules atteintes de
malformations ou potentiellement dangereuse. L’apoptose se distingue de la nécrose. La première est
génétiquement programmée, la seconde résulte d’une inflammation et d’une rupture cellulaire (par
exemple lors d’exercices excentriques.
Plusieurs travaux suggèrent que le stress oxydant s’accompagne d’un phénomène d’apoptose chez
l’animal et chez l’homme. Cette mort cellulaire de cellules apparemment saines s’observe parmi les
lymphocytes et les muscles squelettiques. La production excessive de radicaux libres semble être le
mécanisme qui déclenche l’apoptose lors de l’exercice intensif, et plus particulièrement les
contractions excentriques. La libération de cytochrome c de la mitochondrie vers le cytosol activerait
des enzymes protéolytiques (la calpaîne, les capsases) provoquant la destruction cellulaire.
Glutathion peroxydase
La GPX est une enzyme séléno-dépendante, dont il existe plusieurs isoformes, réparties différemment
dans la cellule. Elle catalyse la réaction de transformation des H2O2.
Catalase
La catalase est également responsable de l'élimination d'H2O2 par une transformation en H2O et O2.
Contrairement à la GPX, l'affinité de la catalase pour l'H2O2 est élevée seulement lorsque la teneur en
peroxyde d'hydrogène est élevée. Cette enzyme est abondante dans le foie et les globules rouges. Elle
se retrouve préférentiellement dans les peroxysomes et en plus faible quantité dans le cytosol.
Les investigations réalisables en pratique clinique reposent sur trois types de méthodes :
la détermination biochimique des réserves en certains constituants vitaminiques (vitamine C, E
et rétinol) ou minéraux (sélénium, zinc par exemple) ou de composés endogènes (glutathion) ;
la détermination d’activités enzymatiques impliquées dans les défenses antioxydantes (SOD,
catalase, glutathion peroxydase [GPX], glutathion réductase [GR]) dans les plasmas, les
globules rouges ou d’autres cellules ;
l’estimation des conséquences tissulaires d’une peroxydation (Malondialdéhyde [MDA],
isoprostanes, dérivés des acides nucléiques après peroxydation, test comète, etc.).
Chez l’homme, beaucoup d’études ont mis en évidence qu’un apport complémentaire en antioxydants
pouvait diminuer le processus de peroxydation lipidique à l’issue d’épreuves physiques réalisées en
laboratoire sur bicyclette ergométrique ou sur tapis roulant.
Plusieurs études ont examiné les effets d’une complémentation nutritionnelle en antioxydant sur les
dommages musculaires. Ces études montrent qu’un complexe de vitamine E (15 mg) et de vitamine C
(200 mg) pendant quatre semaines chez des sujets entraînés a réduit la diminution de créatine kinase
après un marathon. Une combinaison de vitamine E, C et de ß-carotène de six semaines réduit les taux
de repos et à l’exercice de MDA et de pentane expiré.
Tableau 1 : Mise en évidence d’un stress oxydant chez des sujets entraînés ayant participé à une
randonnée de 20 jours dans l’Himalaya (groupe placebo). Effet positif d’un apport complémentaire
journalier en antioxydants (90mg de vitamine C, 15mg de vitamine E, 800μg de vitamine A, 100μg de
sélénium et 15mg de zinc) sur le stress oxydant (groupe traité).
Placebo Antioxydant
Marqueurs Avant après avant après
VitC (μg/mL) 10,42 ± 3,54 7,36 ± 4,42 9,98 ± 1,89 9,43 ± 1,69
VitE (μg/mL) 9,51 ± 1,59 7,55 ± 0,13 9,20 ± 2,75 9,00 ± 3,73
VitE/CHL (mg/g) 5,56 ± 0,53 4,88 ± 1,79 4,36 ± 1,13 4,33 ± 1,03
Sélénium (μg/L) 105,25 ± 7,80 95,25 ± 4,79 106,40 ± 10,11 114,0 ± 9,63
SOD (UI/g Hb) 611 ± 25 738 ± 82 649 ± 86 806 ± 88
GPx (UI/g Hb) 71,20 ± 20,22 88,50 ± 28,74 77,00 ± 13,04 94,00 ± 15,00
PL (μmol/L) 273,25 ± 53,56 476,33 ± 251,00 206,8 ± 34,02 237,00 ± 54,96
PL : peroxydes lipidiques
Vit C : vitamine C
Vit E : vitamine E
GPx : gluthation peroxydase.
Une alimentation équilibrée et variée devrait suffire à équilibrer les pertes en zinc. Comme pour
d’autres minéraux, l’attention doit être attirée par les restrictions volontaires d’apport qui sont très
souvent associées à un déficit en zinc. Les normes exactes des apports minimaux recommandés pour
la population sportive restent à affiner en fonction de la nature et de l’intensité des exercices.
Le sélénium est un oligoélément essentiel afin d’assurer les défenses naturelles contre les effets des
radicaux libres. Une carence en sélénium effondre l’activité spécifique de la GPx, mais sans que les
performances physiques semblent être notablement affectées. En dehors de la correction d’une
éventuelle carence, la supplémentation en sélénium n’induit aucune protection supplémentaire contre
les effets des radicaux libres, ni aucune amélioration des performances sportives.