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Joane DUVAL

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L'opinion publique durant l'Affaire Dreyfus

En septembre 1894, une lettre adressée à l'attaché militaire


allemand est retrouvée à l'ambassade d'Allemagne, laissant
entendre qu'un officier français lui livre des renseignements.
Sous prétexte qu’il sache parler allemand mais en réalité
principalement à cause de sa religion, Alfred Dreyfus,
polytechnicien et artilleur de confession juive, est accusé d’en
être l’auteur.
Malgré l’identification du réel coupable, le commandant
Ferdinand Walsin Esterhazy, celui-ci est acquitté par un tribunal
militaire voulant étouffer l’affaire.
Condamné à deux reprises en 1894 et en 1899 au bagne, à la
dégradation militaire puis à la prison, Dreyfus bénéficie
finalement de la grâce présidentielle, mais n’est réhabilité
définitivement qu'en 1906.

Durant toute cette période, la France se fracture en deux camps : les dreyfusards et les anti-
dreyfusards autour de cette affaire qui a constitué le premier évènement surmédiatisé en France.
Une presse libre se développe, grâce notamment, à la loi de 1881 sur la presse. Elle pèse très
directement sur le déroulement de l'affaire Dreyfus au travers de campagnes parfois violentes et
d'articles souvent sensationnels laissant poindre un antisémitisme à peine masqué.

Nous pouvons dès lors nous demander si la presse a fait ou si elle a suivi l’opinion durant cette
affaire.

Tout d’abord nous allons expliquer en quoi à cette époque, la presse a plus fait l’opinion qu’elle
ne l’a suivie et ensuite nous étudierons les conséquences de cette façon de faire.

A cette époque la presse a un rôle très important dans le


quotidien des français. Elle a pour rôle d’informer, de transmettre,
d’expliquer et de commenter des informations vérifiées.
Cependant à cette période la presse est très tourmentée.
Dans un premier temps quasiment tous les journaux sont
antidreyfusards, malgré le manque de preuve à son encontre. Si
certains articles proclament la nécessité de respecter la présomption
d’innocence, ils ne défendent pas Dreyfus pour autant. La population
fait donc face à une certaine forme de « bourrage de crâne » en faveur
de la culpabilité de Dreyfus, et de façon à peine voilée en faveur des
thèses antisémites. Certains journaux tentent de mobiliser l’opinion
publique en utilisant l’antijudaïsme, par exemple « La libre parole » qui compare Dreyfus à Judas
ou « L’Antijuifs » qui prône l’antisémitisme.
Cependant, Emile Zola, un écrivain au sommet de sa gloire, va utiliser sa popularité pour
défendre Dreyfus. Il dénonce notamment l’utilisation de la presse pour accabler le capitaine. En
janvier 1898, il publie une tribune à la une du journal « L’Aurore »
intitulée « J’accuse… ! ». Il s’agit une lettre ouverte adressée au
président de la République, Félix Faure, dans laquelle il met en
cause l’état-major de l’armée et proclame l’innocence de Dreyfus.
Il dénonce d’abord l’utilisation de la presse pour accuser celui-ci,
comme par exemple sur la une du « Petit Journal » de janvier 1895
représentant « le traitre Dreyfus » dégradé dans la cour de l’Ecole
militaire avant d’être envoyé au bagne à Cayenne.
Il met ensuite en avant le fait que l’armée se serve de la presse pour
accuser Dreyfus dans les termes suivants : « C’est un crime
d’égarer l’opinion, d’utiliser pour une besogne de mort cette
opinion qu’on a perverti jusqu’à le faire délirer ».
Ce numéro de journal est tiré à 300 000 exemplaires, soit dix fois
plus que leur tirage habituel. Ainsi, il bouleverse totalement la
presse en essayant de changer l’opinion publique.
C’est pourquoi, à cette époque, la presse ne se contente pas de suivre l’opinion mais la façonne en
essayant de changer la vision des gens sur cette affaire et en tentant de mettre l’opinion publique
en défaveur de Dreyfus, que ne la suit.
Ce procédé a donc des conséquences sur l’opinion publique que nous allons aborder en deuxième
partie.

Les dérives de la presse à cette époque ont produit de graves conséquences.

La presse est tout d’abord apparu comme un objet commercial


plutôt qu’un moyen de communication répondant à des règles
éthiques.
Ainsi, en 1897, Zola publie dans « Le Figaro » trois articles dans
lesquels il dénonce l’antisémitisme de la presse. De nombreux
lecteurs sont outrés par cette publication et menacent de se
désabonner du journal, ce qui oblige le journal à être plus nuancé et
à ne plus accepter d’articles de Zola. Ainsi, cet événement prouve
que la nécessité de vendre et de satisfaire son public peut parfois
orienter les contenus éditoriaux et en faire ainsi un objet
commercial.

De plus, ces évènements ont produit d’importantes conséquences


politiques.
Ainsi, après la publication de « J’accuse… ! » par Emile Zola, les antidreyfusards perdent du
terrain : ils passent de 87% en février 1898 à uniquement 53% sept mois plus tard. Cette
évolution prouve donc que les nouvelles informations collectées par la presse modifient en
profondeur l’opinion publique.
Par ailleurs, ces évènements ont établi que les médias pouvaient être un vecteur de haine et de
fracture sociale. Ils ont éveillé les esprits sur l’importance des médias comme constituant un
véritable contre-pouvoir face à des institutions d’autorités telles que le gouvernement, l’armée ou
encore l’Eglise.

En conséquence, l’affaire Dreyfus est intimement liée à la question de la place des médias dans
notre société, de leur pouvoir et de la nécessité pour eux de respecter des règles déontologiques
afin d’asseoir leur légitimité. Avec cette affaire judiciaire, la liberté de la presse proclamée par la
loi de 1881 a trouvé quelques années après sa publication certaines limites.
Cette affaire souligne également la responsabilité de chacun dans l’analyse de l’information.
Il est ainsi essentiel de s’informer mais aussi d’avoir conscience des limites de la presse et des
risques de désinformation. Il est du devoir de chacun de rester prudent et de ne pas sombrer dans
les travers qu’ont connu nos pairs à la Belle Epoque.

Oppositions des deux points de vue en 1898

Bibliographie :
- Ministère de la Justice, « L’affaire Dreyfus » , In Ministère de la Justice [en ligne]. Publié le 23
août 2011 [consulté le 11 octobre 2023], disponible à l’adresse :
https://www.justice.gouv.fr/actualites/actualite/laffaire-dreyfus

- Karambolage en français – ARTE, « L’Affaire Dreyfus – Karambolage – ARTE » , In YouTube [en


ligne]. Publié en 2017 [consulté le 11 octobre 2023], disponible à l’adresse :
https://www.youtube.com/watch?v=OMvo2PX4_l0&ab_channel=Karambolageenfran
%C3%A7ais-ARTE

- Histoire-Géographie, Géopolitique, Sciences Politiques . Nathan, mai 2019. Liberté ou contrôle


de l’information : un débat politique fondamental, p. 312-313.

- « Liberté ou contrôle de l’information : un débat politique », In Kartable [en ligne]. Consulté le


11/10/2023, disponible à l’adresse :
https://www.kartable.fr/ressources/geopolitique/cours/liberte-ou-controle-de-
linformation-un-debat-politique/52016

- « Presse et édition dans l’affaire Dreyfus », In Wikipédia [en ligne]. Consulté le 11/10/2023,
disponible à l’adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Presse_et_%C3%A9dition_dans_l
%27affaire_Dreyfus#:~:text=Le%20r%C3%B4le%20central%20jou%C3%A9%20par,
%C2%AB%20fait%20%C2%BB%20l'opinion.

https://www.justice.gouv.fr/actualites/actualite/laffaire-dreyfus

https://www.youtube.com/watch?v=OMvo2PX4_l0&ab_channel=Karambolageenfran%C3%A7ais-ARTE

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