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À la France du 17 novembre 2018…
Malaise électoral
Économie 39 %
Sanitaire 36 %
Environnement 28 %
Éducation 21 %
Démocratie 14 %
Identité nationale 12 %
Médias-Information 2%
1. La première étude de l’Ifop n’a pas été publiée mais elle portait en octobre
1938 sur l’avis des Français au sujet des accords de Munich, que le chef du
gouvernement Daladier (et Chamberlain pour le Royaume-Uni) venait de signer
avec Hitler.
2. Les indicateurs ont montré toutefois que le chômage longue durée a
fortement augmenté, démontrant que la crise a aggravé la situation de ceux qui
étaient déjà éloignés de l’emploi.
3. Le total des citations est supérieur à 100 car les interviewés pouvaient
donner deux réponses : thème n° 1 et thème n° 2.
4. Nous avons choisi de traiter en conclusion la question des médias et de
l’information, qui n’est pas apparue comme un enjeu politique important pour
les Français.
1.
54 % (dont 27 %
Le terrorisme islamiste
de citations en premier)
La délinquance 54 % (dont 22 %
du quotidien de citations en premier)
38 % (dont 12 %
Les violences conjugales et intrafamiliales
de citations en premier)
38 % (dont 9 %
Le trafic de drogue
de citations en premier)
Les crimes 34 %
La cybersécurité 24 %
La délinquance financière des cols blancs 18 %
Le trafic d’armes 14 %
La sécurité routière 11 %
L’apologie du terrorisme 39 %
Le trafic de stupéfiants 23 %
La délinquance des mineurs 22 %
Le harcèlement scolaire 21 %
20 % (dont 6 % de
Les incivilités du quotidien
citations en premier)
Les policiers auteurs de violences non justifiées 20 % (dont 4 % de
citations en premier)
Les
inégalités 83 % 44 % 39 % 17 % 14 % 3%
économiques
Les inégalités
entre les actifs
d’emplois
78 % 33 % 45 % 22 % 19 % 3%
qualifiés et les
actifs d’emplois
non qualifiés
Les inégalités
entre territoires
(exemples :
ville/campagne ; 77 % 34 % 43 % 23 % 20 % 3%
métropole/ville
moyenne ; centre-
ville/banlieue)
Les inégalités
selon les origines
ethniques et/ou 68 % 29 % 39 % 32 % 25 % 7%
religieuses réelles
ou supposées
Les inégalités
salariales 50 % 18 % 32 % 50 % 44 % 6%
hommes-femmes
Santé 77 % 6% 17 %
Éducation 73 % 7% 20 %
Recherche et
65 % 8% 27 %
développement
Police 65 % 10 % 25 %
Justice 63 % 9% 28 %
Transition écologique 57 % 12 % 31 %
Protection sociale 47 % 19 % 34 %
Industrie 38 % 20 % 42 %
Armée 37 % 23 % 40 %
Culture 33 % 17 % 50 %
Réduire les aides publiques aux chômeurs pour reporter ces aides
24 %
vers l’emploi
Réorienter le développement 23 %
économique vers les activités liées
à la transition écologique
L’État providence
Les Français sont majoritaires à penser qu’il n’est pas bon
de limiter le rôle de l’État dans l’économie. Si seuls 13 %
d’entre eux estiment que la puissance publique devrait être
la moins interventionniste possible, 87 % plébiscitent donc
un interventionnisme étatique dans ce domaine, les
sympathisants Insoumis (84 %) et le Rassemblement
national (83 %) y étant les plus enclins. À n’en pas douter,
on peut lire dans ces chiffres non seulement l’attachement
des Français au concept d’État stratège, mais également
comme un effet de la crise du Covid où l’État providence
s’est transformé en État tout-puissant, garant de la survie
des entreprises privées au prix d’un endettement public
sans précédent, dont on tente de faire croire qu’il ne
coûtera rien. Il est probable que la démonstration d’un État
dépensier, arrosant tous les secteurs sans distinction de
millions d’euros publics, aura renforcé les représentations
françaises déjà ancrées par notre histoire centralisatrice et
monarchique, selon lesquelles l’État peut tout, l’État doit
tout faire et, quand ça tourne mal, l’État est responsable de
tout. Les Français semblent oublier parfois que, en
démocratie et en république, « l’État, c’est eux ». Une
élection présidentielle est d’ailleurs le meilleur moment
pour s’en souvenir.
Bien sûr, l’évolution de l’opinion sur l’économie dépend
davantage des fluctuations de la conjoncture que de la
longue durée. Quand l’économie se porte bien, la pensée
libérale reprend des couleurs ; en temps de crise, on en
appelle à l’État. Des enquêtes françaises et internationales
ont montré que, à la fin des années 2000, les opinions
favorables au libéralisme étaient devenues minoritaires,
alors qu’elles étaient majoritaires dans les années 1990,
époque des grandes illusions encouragées par les élites
occidentales : la fin de l’Histoire prophétisée par Francis
Fukuyama, la mondialisation heureuse, la victoire définitive
du capitalisme et du libre-échange, la société de
consommation et son progrès indéfini… Après trois
décennies, une majorité de Français constatent que cette
mondialisation débridée a amputé l’Hexagone d’une large
part de sa souveraineté économique, créant une
dépendance dans nombre de domaines stratégiques, que le
chômage structurel41 a été aggravé par l’accélération du
libre-échange et l’intégration européenne, que la crise
environnementale est directement liée aux modes de
production et de consommation induits par le capitalisme
financier prédateur, instauré depuis la fin des années 1980
devenu hégémonique au cours des années 1990.
Les Français n’ont pas eu besoin de lire des centaines
de pages d’experts pour comprendre que, d’ici à 2030, le
monde allait connaître des transformations majeures sur
le plan environnemental, démographique, économique et
technologique, induisant des changements profonds de
modes de vie et de production. Ils savent que le temps de la
croissance illimitée est derrière nous et que la technologie
n’est pas la solution pour relancer le fantasme du progrès
sans fin. La nécessité de politiques plus protectionnistes
afin de se protéger des crises financières, économiques,
sanitaires et politiques fait désormais consensus, surtout
dans le contexte d’un affaiblissement de l’Union
européenne et d’une aspiration des peuples à davantage de
souveraineté nationale. La productivité et la recherche du
profit comme fondement du système économique
capitaliste actuel sont rejetées par des pans de plus en plus
importants de la population, en particulier une jeunesse
militante qui aspire à une économie fondée sur les
équilibres et la réduction des inégalités. La ligne de crête
sera difficile pour les dirigeants à venir, soumis à des
attentes paradoxales où se mêlent intérêt individuel et
intérêt collectif : accroître le pouvoir d’achat, maîtriser la
dette publique sans réduire les dépenses, baisser les
charges sur les entreprises, protéger l’environnement,
réduire le temps de travail, partir le plus tôt possible à la
retraite, restaurer la place de la France dans le concert des
nations…
Il est difficile de dire quelles seront les causes et
conséquences des crises françaises dans le domaine
financier ou économique, d’autant qu’elles sont insérées
dans le système mondialisé. L’économie française apparaît
mal préparée pour affronter ces crises, et celle du Covid-19
l’a montré de façon plus éclatante que celles qui se jouaient
dans les salles de marchés. Que ce soit en 2008 ou en
2020, c’est par de l’endettement public que l’État a
soutenu l’économie et a évité des conséquences sociales
terribles à court terme. Pour autant, de façon structurelle,
la France apparaît comme un pays perpétuellement sous
tension sociale et économique, malgré les économistes ou
experts qui nous répètent que « la France va bien » ou que
les Français sont « des enfants gâtés qui s’ignorent ».
Il s’avère que l’État pompier se transforme rarement en
État régulateur. Les Français se croient sauvés sur
l’instant, mais sont vite confrontés aux mêmes blocages.
Les études prospectives ont plutôt tendance à proposer des
scénarios sombres pour la décennie à venir, sur fond de
croissance faible et d’inflation haute, de chômage élevé
endémique avec une stagnation des revenus qui rendent
l’emploi peu attractif dans un pays très protecteur, des
tensions sociales, de l’endettement et du déficit public,
sans parler d’une aggravation du déficit de notre commerce
extérieur, des hausses constantes du coût de l’énergie dans
une période où la transition écologique s’impose.
Tout cela ne saurait rendre les Français insouciants, et
leur reprocher leur lucidité en les taxant de pessimistes ou
de déclinistes paraît empreint de mauvaise foi, d’une forme
de cynisme élitaire. Les catégories les plus aisées ont, il est
vrai, assez de ressources financières, patrimoniales,
sociales et culturelles pour s’en sortir le mieux possible. On
l’a vu pendant la crise du Covid de façon parfois
caricaturale, puisque les grandes fortunes françaises sont
désormais plus nombreuses qu’avant (109 en 2021 contre
95 en 2019 et 51 en 2011) et leur patrimoine a augmenté
en moyenne de 30 %, selon le magazine Challenges qui
n’est pas connu pour être un journal anticapitaliste42. En
revanche, les catégories populaires et les classes
moyennes, largement plus nombreuses et productives dans
la population générale, sont celles qui subissent à chaque
sortie de crise davantage de déclassement, des
perspectives d’ascension sociale encore repoussées aux
calendes grecques.
Nous revenons donc ainsi à notre constat unanime de
départ : la France est un pays socialement et
économiquement fracturé, qui se ressent comme déclinant
où des catégories sociales ne se côtoient plus43, ne
partagent plus de vision commune. Cette fracture liée aux
inégalités (scolaires, sociales, économiques et salariales),
un peuple comme le peuple français ne peut le tolérer du
fait de son attachement singulier à la notion d’égalité, voire
d’égalitarisme, fondée sur l’idée de mérite, même si la
méritocratie est considérée par beaucoup comme un mythe
républicain. Depuis la fin des années 1980, il est devenu
clair que, d’une génération à l’autre, les possibilités
d’ascension sociale se sont réduites alors que
paradoxalement le niveau d’étude a progressé. Les classes
moyennes et populaires sont particulièrement frappées par
cette immobilité sociale. En dépit des efforts que parents et
enfants peuvent consentir misant tout sur la scolarité.
Lorsqu’un pays à l’imaginaire profondément égalitaire
comme la France ne parvient plus à faire communiquer les
classes populaires avec les classes supérieures et ne sait
plus offrir aux classes moyennes, sur qui pèse l’essentiel
des coûts, de vraies perspectives d’ascension, le sentiment
collectif d’une impasse peut sembler justifié.
29. Ce qui est un aveu cinglant pour LaREM, prouvant que la théorie du
ruissellement est un leurre et que la promesse macronienne de 2017 de réduire
les inégalités n’a pas été tenue sur ce quinquennat.
30. Soit un revenu mensuel inférieur à 1 063 euros (Insee, 2018).
31. Avec plus de 50 000 ronds-points extrêmement coûteux à travers le pays,
la France détient un record mondial.
32. La constance de cette opinion sera vérifiée par un sondage Opinion Way
en septembre 2021 : 58 % des Français jugeaient négativement l’action
économique d’Emmanuel Macron depuis 2017, avec le sentiment pour 56 %
d’entre eux que leur pouvoir d’achat avait plutôt diminué. Enfin, selon 50 % des
personnes interrogées, les actions économiques du gouvernement depuis cinq
ans ont eu un impact positif principalement pour les catégories les plus aisées
de la population.
33. Seuls les sympathisants Insoumis expriment un avis favorable à cette
mesure sous le seuil des 50 % (40 %).
34. La santé (notamment les biomédicaments), l’électronique, l’industrie
agroalimentaire, les intrants industriels et les télécoms. Bruno Le Maire se
refusant à « relocaliser des biens à faible valeur ajoutée ».
35. À part sans doute au Royaume-Uni, lancé également dans une grande
politique de désindustrialisation par Margaret Thatcher au profit du
capitalisme financier.
36. L’Insee avait montré dans une étude sur l’économie française datant de
2006 que, entre 1995 et 2001, le nombre d’emplois délocalisés était d’environ
13 500 par an en moyenne. En 2010, une nouvelle étude avait évalué à 36 000
le nombre d’emplois détruits en moyenne chaque année par les délocalisations.
37. LaREM, avec 30 %, a le plus haut taux d’avis favorables pour la
promotion de la flexibilité du marché du travail.
38. Étonnamment, ce sont les écologistes (29 %) qui sont les moins hostiles
au libre-échange afin d’ouvrir de nouveaux marchés aux entreprises françaises.
39. Les sympathisants Insoumis (31 %) et écologistes (29 %) sont les plus
favorables au développement de l’entrepreneuriat individuel, contre 6 % des
sympathisants socialistes !
40. Les Insoumis sont 31 % à réclamer une nationalisation des entreprises en
difficulté, contre 6 % pour LaREM et LR.
41. Même à 8 % de chômage, la France reste un pays « riche » marqué par
un chômage structurel, avec trop de jeunes mal formés qui entrent
difficilement dans le marché du travail, et des actifs de plus de 50-55 ans qu’on
licencie ou qu’on place en préretraite.
42. Selon une étude de la banque suisse UBS en septembre 2020, les
milliardaires ne se sont jamais aussi bien portés qu’avec la crise du Covid-19,
avec une hausse de plus d’un quart de leurs revenus au plus haut de la crise,
grâce, notamment, à la reprise des marchés boursiers. Ainsi les « super
riches » détiennent-ils aujourd’hui la plus grande concentration de richesse
jamais vue dans l’histoire. Les activités philanthropiques de certains,
habilement mises à la une des médias, auront-elles durablement permis de
faire passer la pilule ?
43. Depuis l’école jusqu’à l’entreprise, trop de Français vivent dans des
mondes parallèles, selon la catégorie sociale à laquelle ils appartiennent.
3.
Développer la télémédecine 12 %
Augmenter le parc hospitalier privé 11 %
Les entreprises
privées en charge des questions de santé 34 % 18 % 48 %
(laboratoires privés, plateformes type Doctolib)
68 % 32 %
Augmenter la part du remboursement par les mutuelles
et complémentaires santé
Développer davantage de
dispositifs d’intéressement pour les médecins libéraux 56 % 44 %
et les pharmaciens
Échelle internationale 45 %
Échelle nationale 29 %
Échelle régionale 9%
Échelle individuelle 8%
pour préserver la
51 % 10 % 41 % 49 % 35 % 14 %
qualité de l’eau
pour l’éducation à la
protection de 40 % 6% 34 % 60 % 44 % 16 %
l’environnement
pour préserver la
37 % 5% 32 % 63 % 46 % 17 %
qualité de l’air
Ces propositions trouvent un écho parmi les Français : plus d’1 sur
2 mentionne comme mesures parmi les plus urgentes l’interdiction
des pesticides et le primat accordé à l’agriculture raisonnée (52 %)
ou le fait d’acheter local et de saison (50 %). Et si l’interdiction des
pesticides est tout spécialement citée parmi les sympathisants EELV
(64 %), la mesure fait a minima partie des trois principales priorités
environnementales des Français, quelles que soient leurs orientations
partisanes.
Se fait pour autant jour un hiatus : en dépit de l’intensité de ces attentes,
la population se montre peu convaincue par l’efficacité des
politiques publiques actuelles en matière environnementale. Les plus
sceptiques se révèlent les sympathisants des partis de gauche, tandis que
la plus grande bienveillance est mesurée, sans trop de surprise, parmi les
proches de l’actuelle majorité présidentielle.
Si l’urgence environnementale est devenue un quasi-consensus
impliquant des prises de position de la grande majorité des
candidats, la thématique est traditionnellement particulièrement
attendue et investie à gauche du spectre politique (Yannick Jadot,
Anne Hidalgo).
Égalité ou équité ?
Davantage qu’au nom de l’émancipation de tous par
l’instruction, c’est au nom de l’égalitarisme que les
politiques éducatives des dernières décennies ont mis en
place un enseignement différencié d’abord en fonction de
l’appartenance sociale : les enfants des classes populaires,
et plus encore ceux issus de l’immigration, n’auraient pas
les capacités « naturelles » pour être instruits avec le
même référentiel culturel et scientifique que les enfants
des classes moyennes supérieures. En toute logique, de
cette forme de ségrégation culturelle découlèrent la
séparation et la non-mixité sociale. Enfants d’ouvriers et
enfants de cadres sup’ ne se fréquentent plus dans les
mêmes écoles. Cela fait vingt ans que l’évitement de la
carte scolaire est devenu un sport national, et depuis peu
certains ménages des classes populaires s’y adonnent,
sacrifiant une part du maigre budget du ménage pour
scolariser leurs enfants dans l’enseignement privé croyant
y trouver davantage de discipline et d’exigence. Notre
enquête montre d’ailleurs que seuls 27 % des Français
interrogés aspirent à un renforcement de la carte scolaire
pour obliger parents et représentants de l’institution à la
mixité sociale. Si 43 % des sympathisants Insoumis et
socialistes approuveraient ce type de contrainte, ce n’est
pas le cas des autres formations politiques93. Les Français
sont conscients de la situation paradoxale dans laquelle ils
se trouvent : on veut plus d’égalité et de mixité sociale, tout
en pratiquant le repli quand il s’agit de nos propres
enfants. C’est peut-être pour dépasser ce paradoxe que
l’égalité reste, aux yeux d’une majorité de Français, le
principe fondateur de notre école républicaine, comme en
témoignent les deux priorités qu’ils ont placées en tête
dans notre enquête : instruire tous les élèves avec le même
niveau d’exigence (35 % des personnes interrogées) et
réduire les inégalités sociales (14 %).
Valoriser l’excellence 12 %
Non,
Oui, plutôt
plutôt pas
Professionnaliser l’enseignement
30 %
dès 14 ans
27 % (dont
Instaurer le baccalauréat intégralement en contrôle continu
7%
ouvrant à des
de citations
examens de sélection pour l’entrée à l’université
en premier)
27 % (dont
Renforcer la carte scolaire pour contraindre les
5%
établissements publics
de citations
à la mixité sociale
en premier)
Intégrer davantage les parents dans
20 %
l’administration scolaire
89. Réduction des effectifs de classes de CP-CE1 dans les zones d’éducation
prioritaire, accompagnement après la classe, stages de remise à niveau en
primaire et au collège.
90. Favoriser l’autonomie des chefs d’établissement, ouvrir encore davantage
l’école aux parents et aux intervenants extérieurs du monde associatif ou de
l’entreprise.
91. Il a été recteur de l’académie de Créteil, directeur général de
l’enseignement scolaire au ministère, avant d’être directeur général du groupe
ESSEC.
92. Baromètre Ifop-SOS Éducation, septembre 2021.
93. 26 % d’approbation pour les sympathisants LaREM, 20 % pour le RN et
18 % pour les Républicains.
94. Seuls les sympathisants Insoumis (44 %) ont un taux de réponse
supérieur à 25 % (la moyenne de tous les autres groupes partisans de
l’échantillon).
95. Collège-lycée classique (Gymnasium) ; Realschule, voie technologique
jusqu’à 15-16 ans, et Hauptschule professionnelle jusqu’à 15 ans, ces deux
dernières voies étant les filières professionnelles formant à des métiers précis.
96. « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité
de genre en milieu scolaire », circulaire du 29 septembre 2021.
97. Mais 18 % chez les Républicains.
98. Une attente particulièrement forte chez les sympathisants Insoumis à
84 % et socialistes à 66 %.
99. Pour le personnel administratif de l’Éducation nationale, la hausse est
encore plus spectaculaire avec plus 90 % d’embauches contractuelles sur
dix ans.
6.
Être citoyen
Les Français ont une exigence légaliste simple : un
citoyen français doit respecter et obéir à la loi pour 87 %
des personnes interrogées. Ce niveau d’exigence atteint
99 % chez les sympathisants En Marche ! et les
Républicains, mais « seulement » 78 % chez les Insoumis.
L’image souvent caricaturale du citoyen français rebelle
sinon réfractaire, qui préfère griller le feu orange, a été
démentie tout au long de la crise sanitaire, au cours de
laquelle les Français se sont facilement soumis à toutes les
restrictions de leurs libertés, obéissant à des mesures
d’exception dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire,
dont la durée n’a cessé d’être allongée sans grand débat
public. De nombreux ouvrages et articles ont été publiés au
fil des ans pour dénoncer l’addiction française à
la production de réglementations et de circulaires :
nous en sommes les champions du monde, avec nos
400 000 normes, 11 500 lois et près de 130 000
décrets101. On connaît la phrase de Georges Pompidou à
Jacques Chirac, alors jeune conseiller, en 1966 : « Mais
arrêtez donc d’emmerder les Français ! Il y a trop de lois,
trop de textes, trop de règlements dans ce pays ! On en
crève ! »… On constate toutefois l’attachement des
Français à la loi, qu’ils s’autorisent parfois à transgresser ;
obéissance à la loi et transgression à cette même loi vont
de pair dans la plupart des sociétés humaines. Si les
Français ont donc majoritairement le souci de respecter la
loi, sans s’imposer une obéissance absolue, ils adhérent
peu, sinon pas, à la notion de désobéissance civile, dont
l’objectif est la délégitimation de la loi. On comprend dès
lors l’exigence sociale qui s’exprime depuis plusieurs
années à l’encontre de ceux qui contreviennent à la loi, par
la parole ou par les actes. Cet attachement français au
respect de la loi ne signifie pas pour autant un blanc-seing
pour les gouvernants puisque seuls 62 % des personnes
interrogées considèrent que le citoyen doit se conformer
aux décisions de ses dirigeants. L’écart d’adhésion à cette
affirmation est ici important entre la majorité présidentielle
et les Républicains d’une part (87 %), et la gauche (54 %)
et le Rassemblement national (51 %) d’autre part.
La gouvernance de la France :
une défiance à tous les niveaux
Notre enquête vient confirmer ce que toutes les analyses
d’opinion et autres baromètres indiquent depuis plusieurs
années : les citoyens sont particulièrement sévères sur la
gouvernance politique et institutionnelle de la nation au
cours de la décennie écoulée, voire plus. Cette sévérité,
alimentée par un fort sentiment d’abandon chez les
catégories populaires et moyennes en voie de
déclassement, tourne désormais facilement à la colère. Les
scores de défiance et de réprobation sont spectaculaires,
en particulier à l’issue d’un quinquennat qui s’était donné
pour objectif de réconcilier les Français et d’opérer un
« choc de confiance » sur fond de « révolution
démocratique ». Bruno Cautrès, dans sa note de janvier
2019 du Baromètre de la confiance politique, parlait d’une
« défiance politique qui atteint un seuil d’alerte critique »
car les indicateurs du baromètre Sciences Po-Cevipof
n’avaient « jamais été aussi négatifs depuis dix ans quant
au rapport des Français à leurs dirigeants et plus
généralement aux responsables politiques ».
Pas
D’accord
d’accord
L’enjeu du vote
Pourtant, ils demeurent attachés à l’exercice du suffrage
universel acquis en 1848 puisque 75 % des Français de
notre échantillon pensent que c’est le moyen le plus utile
pour faire entendre leur voix. Cette conviction que le vote
est le principal outil d’exercice de notre souveraineté dans
une démocratie s’analyse en miroir des progrès de
l’abstentionnisme comme pratique civique de contestation.
Ce retrait de la vie démocratique est donc bien un signal,
presque un S.O.S., envoyé aux élites dirigeantes qui, depuis
deux décennies, observent la tendance, s’en désolent, mais
ne font rien pour répondre aux critiques de fond suscitant
cette attitude. À croire que l’abstention serait utile à
certains pour être réélu…
Si l’on observe les régionales, l’abstention, de 22 % en
1986, est passée à 66 % en 2021, et si l’on considère ce
chiffre faussé par l’épidémie de Covid-19, on peut retenir
qu’en 2015 50 % de Français ne s’étaient pas déplacés
pour voter aux régionales. Les élections législatives
connaissent le même phénomène puisque, au premier tour
du scrutin de 2017, 51 % des Français ne s’étaient pas
déplacés, alors qu’ils n’étaient que 20 % d’abstentionnistes
au début des années 1980. Depuis 1993, l’abstention aux
législatives n’a cessé de progresser pour atteindre un seuil
de désaffection inédit en 2017. Ces 51 % d’abstention
illustrent le faible enthousiasme suscité par l’élection
d’Emmanuel Macron dès le printemps 2017, ainsi que les
limites de légitimité démocratique de cette majorité qui a
pourtant agi comme si elle avait été portée au pouvoir par
une large part de citoyens tous acquis au programme du
candidat Macron. L’élection présidentielle demeure le
suffrage roi, et pour cause, il s’agit d’élire notre monarque
républicain ! Hormis l’élection de 2002 où l’abstention était
montée à 28 % au premier tour, la moyenne du taux de
participation s’établit à 80 %.
La réforme du quinquennat avec l’alignement du
calendrier électoral entre présidentielles et législatives a
considérablement réduit l’enjeu du vote aux yeux des
citoyens et renforcé le suffrage pour la présidentielle.
L’alternance est un pilier de la démocratie vivante, or 68 %
des Français interrogés estiment que l’alternance politique
ne fonctionne pas correctement dans notre pays, les
sympathisants de la majorité présidentielle étant
logiquement les moins nombreux à adhérer à
cette affirmation (52 %). Les sympathisants écologistes
(77 %) et du Rassemblement national (81 %) pensent au
contraire que le plafond de verre continue de bloquer leur
accession au pouvoir. L’alternance en cours de mandat
ouvrant sur une cohabitation est désormais impossible dans
le cadre du quinquennat, la seule alternance possible à
l’échelle nationale s’exprime lors du scrutin présidentiel, ce
qui explique que nos compatriotes se déplacent davantage
pour cette élection, en dépit de leur défiance massive. On
mesure d’ailleurs le poids de cette élection puisque le
président de la République ne paraît pas affaibli lorsque sa
formation politique perd toutes les élections intermédiaires
durant son mandat (élections européennes,
départementales, régionales, municipales), comme ce fut le
cas d’Emmanuel Macron avec LaREM. Dans le contexte
d’une recomposition politique débutée en 2017 et toujours
inachevée, avec un parti majoritaire sans enracinement
territorial, un Parti socialiste moribond et les Républicains
à la peine, on peut se demander si cela n’ajoute pas de la
confusion au sein d’une part importante de l’électorat qui
pourrait choisir l’abstention pour la première fois à la
présidentielle. En effet, la profonde défiance des Français à
l’égard des partis politiques est établie : ils considèrent à
77 % qu’ils ne relaient pas correctement leurs attentes. Ce
taux grimpe à 83 % chez les sympathisants du
Rassemblement national, il est aussi davantage marqué
chez les plus de 50 ans (86 %) et chez les retraités (84 %).
Accentuer la décentralisation en
30 %
déléguant des pouvoirs régaliens aux présidents de région
Non,
Oui,
plutôt
plutôt
pas
Parler français 90 % 10 %
Nos sportifs 61 % 39 %
Total de
citations
Le journal télévisé de 20 heures 61 %