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Élisabeth L.

KANGAMBEGA
AVOCAT
MAITRE ASSISTANT
UFR/Sciences Juridiques et Politiques
(UFR/SJP)
Université de Ouagadougou

PRÉCIS DE DROIT
PÉNAL GÉNÉRAL
Précis De Droit Pénal Général

SOMMAIRE
PRÉFACE ............................................................................................... 4
ABRÉVIATIONS ..................................................................................... 6
PRÉLIMINAIRES .................................................................................... 10
§1 – L’objet du droit penal ...................................................................... 11
§2 – La structure du DROIT PÉNAL.............................................. 21
§3 - L’ÉVOLUTION DU DROIT PÉNAL ............................................. 41
PARTIE I – L'INFRACTION................................................................ 72
ET LA RESPONSABILITÉ PÉNALE.................................................... 72
Titre I– Les principes du droit pénal .................................................... 75
Chapitre I – La légalité pénale............................................................. 77
Section I – Les sources du droit pÉnal .................................................... 78
Section II – Les implications du principe de la lÉgalitÉ ......................... 90
Section III - Le domaine d'APPLICATION de la loi pÉnale .................. 96
Chapitre II - Les classifications des infractions ................................ 106
Section I – La Classification lÉgale des infractions .............................. 106
Section II – Autres Classifications ........................................................ 108
Chapitre I – L'ÈLÉMENT matériel .................................................... 125
Section I - La nÉcessité d'un acte d’exécution ...................................... 125
Section II – L’élément matériel de l'infraction en cas de pluralitÉ de
participants ............................................................................................ 135
Chapitre II – L'ÉlÉment psychologique ou moral ............................. 150
Section I – L'intention criminelLE ou dol criminel............................... 150
Section II – La faute pÉnale .................................................................. 155
Titre III – la responsabilité pÉnale .................................................... 161
Chapitre - I -Les causes de non imputabilitÉ ou de non responsabilitÉ163
Section I– Le trouble psychique et neuropsychique (L’absence du libre arbitre)
............................................................................................................... 164
Section II - La contrainte (absence de libertÉ) ...................................... 168
Section III - L'ERREUR (l’absence de connaissance) .......................... 171
Chapitre II – Les faits justificatifs ...................................................... 176
Section I – Le commandement de l'autoritÉ légitime ou la permission de la loi
............................................................................................................... 176
Section II - La lÉgitime dÉfense ........................................................... 179
Section III - L'État de nécessitÉ ............................................................ 183
Section IV- Le consentement de la victime .......................................... 187
Chapitre III – Les rÉgles de responsabilitÉ pÉnale liÉes Á la catÉgorie de
la personne ......................................................................................... 189
Section I - la personne Morale ............................................................. 189
Section II – Les personnes physiques ................................................... 193
PARTIE II  LA SANCTION .............................................................. 195
Titre I – LA SANCTION EN GÉNÉRAL............................................. 198
Chapitre I - Les formes de LA sanction.............................................. 200

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Précis De Droit Pénal Général

Section I – Les peines............................................................................ 200


Section III - Les rapports entre la mesure de sûretÉ et la peine ............ 207
Chapitre- II- Les Classifications des sanctions pÉnales.................... 210
Section I – Les peines............................................................................ 210
Section II – Les mesures de sÛretÉ ...................................................... 225
TITRE II – LA sanction individuelle .................................................. 230
Chapitre I – La mesure de la sanction ............................................... 232
Section I - La dÉtermination de la sanction en cas d'unitÉ d'infraction 232
Section II - La dĖtermination de la peine en cas de pluralitÉ d'Infractions239
CHAPITRE II – SUSPENSION et EXÉCUTION DE LA SANCTION
PÉNALE ............................................................................................. 246
Section I – La suspension de l'exécution de la sanction........................ 246
Section II– L'exÉcution de la peine....................................................... 253
CHAPITRE III – L’EXTINCTION de la sanction pÉnale.................. 270
Section I – L'extinction affectÉe d’une subsistance de la condamnation270
Section II – L'extinction résultant de la neutralisation de la condamnation
............................................................................................................... 278
ANNEXES ................................................................................................ 287
bibliographie SOMMAIRE ................................................................ 354

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Précis De Droit Pénal Général

PRÉFACE
C’est toujours un grand plaisir pour un professeur de préfacer
l’ouvrage d’une personne qui fut son étudiante. Tel est le cas
de Madame Elisabeth KANGAMBEGA qui, en juillet 1997,
avait soutenu une thèse sur le sujet « Les procédures pénales
dérogatoires au droit commun. Etude comparée de droits
français et de quelques droits d’Afrique noire ».

Ce travail, qui avait été sanctionné par la mention « Très


honorable », révélait déjà la tendance de l’auteur à s’attacher
du moins en partie, au droit de son pays et plus généralement
au droit des pays d’Afrique noire francophone.

Aujourd’hui, Madame Elisabeth KANGAMBEGA, devenue


enseignante-chercheur à l’Université de Ouagadougou,
capitale de ce jeune Etat qu’est le Burkina Faso, offre au
public de son pays un Précis de droit pénal général.

La tâche était à la vérité redoutable. Elle l’était d’abord à


cause de la nature assez abstraite et subtile de cette discipline.
Faut-il rappeler à quel point les doctrines pénales en
Allemagne, en Italie ou en France notamment ont rivalisé de
précision sur le délit impossible, la faute pénale, la
responsabilité pénale des personnes morales ou les faits
justificatifs ? Il faut ajouter que l’objectif de Madame
KANGAMBEGA était non pas d’ajouter aux innombrables
traités et manuels français un ouvrage supplémentaire, mais
d’écrire un manuel burkinabé puisque le Burkina-Faso s’est
doté en 1996 d’un Code pénal propre et qu’aucun auteur de ce
pays n’avait encore entrepris la tâche d’en tirer un travail de

4
Précis De Droit Pénal Général

synthèse. Sans doute le Code de 1996 n’est-il pas


fondamentalement différent du Code français de 1994, et
pourrait-on ajouter, des Codes des autres pays de l’Afrique
noire francophone. Mais il importe peu car tout chercheur,
dans le cas présent, devait faire un effort de transposition des
normes françaises.

Or, Madame KANGAMBEGA a fort bien réussi son pari. Son


ouvrage est de très bonne facture. Après une introduction où
sont rappelées des généralités sur le droit pénal général et sur
celui du Burkina-Faso, elle présente tour à tour « L’infraction
et la responsabilité pénale » et « la sanction ». Le lecteur suit
aisément les développements et passe sans peine du droit
français au droit burkinabé. Ce dernier, pour un Européen,
respecte d’ailleurs parfaitement les canons des législateurs
européens, comme la légalité criminelle, la responsabilité
subjective et l’économie de sanctions. Une certaine
harmonisation des législations pénales se manifeste ainsi
aujourd’hui même d’un continent à l’autre.

Le beau travail de Madame KANGAMBEGA y contribue à sa


façon. Il faut l’en féliciter et lui souhaiter une belle carrière
universitaire qui est déjà prometteuse.

Jean PRADEL
Professeur émérite
de l’Université de Poitiers

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Précis De Droit Pénal Général

ABRÉVIATIONS

Art. Article
Bull. Crim. Bulletin Criminel de la Cour de Cassation
française.
C.A. Cour d’appel
Cass. crim. fr. Cour de cassation française
Cass. crim. Cour de cassation
CEDEAO Communauté Economique des Etats de
l’Afrique de l’Ouest
CEDH Cour Européenne des Droits de
l’Homme
CEMAC Communauté Economique de l’Afrique
Centrale
Cf confère
Chr Chronique
CIMA Conférence Interafricaine des
Marchés d’Assurances
CJM Code de justice militaire
Comm. Commentaires
CP Code pénal
CPF Code pénal français
CPI Cour pénale Internationale
CPP Code de procédure pénale
D. Recueil Dalloz
D.P. Dalloz Périodique
Edit. édition(s)

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Précis De Droit Pénal Général

Ex. exemple(s)
Gaz. Pal. La Gazette du Palais
Ibid ibidem (même référence)
IR Informations rapides (Revue Dalloz)
JCP Jurisclasseur périodique, Semaine Juridique,
Edition Générale
JDI Journal du Droit International
JOBF Journal Officiel du Burkina
Faso
JOHV Journal Officiel de la
République de Haute Volta
Kiti Décret (sous le régime de la Révolution)
LGDJ Librairie générale de droit et de
jurisprudence
LITEC Librairie technique
N° numéro
Obs. Observations
OHADA Organisation pour l’harmonisation en Afrique
du droit des affaires
Op. cit. Opere citato ou opus citatum
(ouvrage cité)
Ord. Ordonnance
OUA Organisation de l’Unité
Africaine
P. ou p. page(s)
Penant Recueil Penant, (revue
trimestrielle de droit africain)
PUF Presses Universitaires de France
RBD Revue Burkinabè de Droit

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Précis De Droit Pénal Général

RDPC Revue de Droit Pénal et de


Criminologie
RICPT Revue Internationale de
Criminologie et de Police Technique
RIDP Revue Internationale de Droit
Pénal
RIPC Revue Internationale de Police
Criminelle
RPDP Revue Pénitentiaire et de Droit
Pénal
RSC Revue de Science Criminelle et de Droit Pénal
Comparé
S. Sirey
Somm. Sommaire
SS. suivant(s)
t. tome
TGI Tribunal de grande instance
TPI Tribunal pénal international
UA Union Africaine
UEMOA Union Économique et Monétaire Ouest
Africaine
V. Voir
Zatu Ordonnance ou loi (sous le régime de la
Révolution)

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Précis De Droit Pénal Général

« Chaque crime est le fruit d’une nébuleuse de circonstances particulières »1.

1.
1. 1
V. Denis SZABO, " Déviance et criminalité", Ed. Librairie Armand Colin, 1970, p. 118

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Précis De Droit Pénal Général

PRÉLIMINAIRES

1. Le droit pénal général, ensemble des règles relatives à


ce crime, est l’une des répliques fondamentales de cet
acte ou comportement inhérent à toute société et portant
atteinte à ses valeurs et à ses normes de conduite. Ces
atteintes sont de plus en plus enclines à instaurer la peur
sociale dans la plupart des sociétés contemporaines
(celles des pays développés et en développement) : il
s’agit de la peur du crime. Ce qui conduit d’ailleurs à se
poser une multitude de questions quant à l’auteur ou au
présumé auteur du crime. Le délinquant a-t-il des
prédispositions particulières pour avoir cette qualité ?
Est-il un homme différent des autres (probes ou non
délinquants)? Comment devient-on délinquant ou
comment adopte-t-on un comportement criminel ? Ces
interrogations ont trotté dans les têtes de plusieurs
auteurs intéressés par la matière. Ainsi, ceux-ci ont tenté,
à travers des recherches et des expériences, d’y répondre
comme l’on pourrait le constater dans les différents
développements de cet ouvrage.

Le crime, en tant qu’acte portant atteinte aux valeurs et


aux normes sociales, apparaît comme un phénomène au
faciès divers. Il concerne la société et le délinquant.
C’est une gangrène sociale mettant dans une situation de
conflit, le criminel et la société (celle au sein de la
quelle, il vit). Ce qui rend le crime complexe. Mais, ni sa

10
Précis De Droit Pénal Général

complexité, ni la diversité de ses caractéristiques ne


constituent un frein à la recherche d’un remède efficace à
ce fléau. Un nombre non négligeable de sciences se
consacre à cette recherche. Le droit pénal, une branche
des sciences juridiques, apparaît comme celle qui coiffe
l’ensemble des sciences concourant à l’étude du crime et
comme un des meilleurs instruments de lutte contre la
criminalité. Cette prééminence témoigne de son
importance qui se révèle à travers son objet (§1), sa
structure (§2) et son évolution (§3).

§1 – L’OBJET DU DROIT PENAL

Pour cerner l’objet du droit pénal, il convient de


procéder d’abord à l’examen de la notion de crime (A)
et, ensuite, analyser les divers facteurs du crime, acte
humain (B).

A - LA NOTION DE CRIME

2. Le crime1 est un acte commis par un individu


(nommé délinquant), troublant l'ordre social et contre
lequel la société réagit par une sanction pénale. Il
s’agit d’une violation de règles communes instituées
pour réguler les relations entre les membres d’une
société. C’est un acte qui traduit, chez l’individu, le refus
de réagir favorablement au respect de la loi. Emile
1.
2. 1
V PINATEL, "La définition criminologique du crime et le caractère scientifique de la criminologie",
RSC, 1957, p.192.

11
Précis De Droit Pénal Général

Durkheim considère le crime comme un acte heurtant les


états forts de la conscience sociale. C’est à ce titre qu’il
le définit ainsi, « Nous constatons l’existence d’un
certain nombre d’actes qui présentent tous ce caractère
extérieur que, une fois accomplis, ils déterminent de la
part de la société cette réaction particulière qu’on
nomme la peine. Nous en faisons un groupe sui generis,
auquel nous imposons une rubrique commune : nous
appelons crime tout acte puni … »1. Quant à Gabriel
TARDE, il appréhende le crime comme « …un
excrément social »2.

Si les définitions du crime du point de vue


sociologique semblent se rapprocher quelles que soient
les tendances doctrinales, elles varient, plus, du point
de vue légale. Cette variation est particulièrement
perceptible quand on envisage le crime à travers l’acte
lui-même. Un acte peut être réprimé dans une législation
donnée et être dépourvu du caractère infractionnel dans
une autre. L’exemple de la sorcellerie est patent car
considérée comme une infraction ou un acte criminel en
Côte-d’Ivoire et au Cameroun, elle n’est pas un acte
légalement répréhensible au Burkina faso. Aussi les
mutilations génitales féminines non réprimées, en droit
burkinabé, jusqu’à une période récente sont-elles
devenues des actes criminels punis comme tels. Les
mutilations génitales étaient effectivement considérées
par certains groupes sociaux burkinabé comme une
1.
3. 1
E. DURKHEIM, "Les règles de la méthode sociologique", 13ème édition, 1956, p. 33.
4. 2
G. TARDE, "Philosophie pénale", 4ème édition, Cujas, p. 224.

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Précis De Droit Pénal Général

pratique coutumière normale. Il en est de même


concernant la castration des hommes appelés à certaines
fonctions précises au sein d’une cour royale. Cette
pratique (rituelle) constitue maintenant une infraction.
On peut aussi citer le cas des scarifications rituelles (du
visage en général) qui ne sont pas spécialement
incriminées, mais peuvent être sanctionnées sur le
fondement des coups et blessures volontaires. Cette
dernière pratique rituelle n’est pas nuisible a priori : il
peut être perçu comme une forme de tatouage. Mais,
c’est une pratique qui peut concerner les enfants.
Effectivement, ces derniers sont, quelquefois, scarifiés,
très jeunes, contre leur volonté, tout comme dans le cas
de l’excision.

La définition légale du crime est donc fonction du temps


et de l’espace1. Toutefois, si on envisage cette définition
en se référant au concept (de crime) lui-même de façon
abstraite, elle peut être valable dans tout système de
droit. Dans cette hypothèse, le crime peut, aussi, être
défini comme un comportement ou un fait légalement
réprimé par une sanction pénale.

3. L'acte criminel, même lorsqu'il touche les intérêts


d'un individu, atteint ceux de la société qui se traduit par
l'émotion, le choc moral (vol à main armée, délits
sexuels, assassinat, publicité mensongère, trahison,
tricherie, offenses contre les convenances, fourberie…).
1.
5. 1
V. J. PRADEL, "Droit pénal général", Editions Cujas, 2002, n°8 à 10.

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Précis De Droit Pénal Général

Dans ce sens Albert COHEN ne dit-il pas que, « Toutes


les sociétés et tous les groupes sociaux — que ce soient
un Etat, une entreprise industrielle, votre famille ou la
mienne — ont des normes, des règles de conduite, dont
la violation suscite des manifestations de
désapprobation, de colère ou d’indignation » 1? Lorsque
l’agent viole les droits d'un individu, cet acte viole, par la
même occasion, les règles établies par la société. Ces
règles sont créées par la société dans le but de faire
respecter et de garantir les droits de ses membres.
D’ailleurs, GARAFALO fait une distinction entre le
crime naturel et le crime conventionnel2. Le crime
naturel vise les actes qui sont criminels en eux-mêmes
ou ceux qui violent des valeurs morales (atteintes à
l’intégrité physique, morale, à la propriété,…) défendues
par la société ou choquant les sentiments du corps social.
L’infraction naturelle est donc le comportement que la
conscience collective réprouve. L’assassinat, le meurtre,
le vol, le faux témoignage, considérés également, du
point de vue religieux (selon les prescriptions bibliques
ou coraniques), comme des « infractions » ou plus
précisément des péchés violant les lois divines,
constituent des exemples de crime naturel3. Le crime
conventionnel est celui qui a été créé et concerne, en
général, une société donnée (Etat). Il s’agit notamment
des atteintes à la sûreté de l’Etat et de certaines

1.
6. 1
V. Albert COHEN, "La déviance", Edit. J. DUCULOT, Gembloux, 1971, p. 13.
7. 2
GAROFALO, "La criminologie", 5ème édition, Alcan, p. 1 & SS.
8. 3
Dans l’histoire de la religion chrétienne, ces actes, en tant qu’interdits relèvent des "dix
commandements" énonçant les devoirs du chrétien

14
Précis De Droit Pénal Général

contraventions (violation des règles relatives à la faune


et à la flore par exemple).

La prise en compte du phénomène criminel par la loi


permet de percevoir un souci de protection de l'individu
contre l'arbitraire et de garantir la défense de la société et
ses intérêts. Cette société s’entend par l’ensemble des
personnes vivant dans une aire géographique rattachées
au même pays, soumises aux mêmes normes et
partageant des valeurs communes. L’Etat a la charge de
développer et d’assurer ces intérêts et ces valeurs
communs par la formulation de normes de conduite
auxquelles doit se conformer tout individu. Celui qui
adopte un comportement en contradiction avec ces règles
de conduite peut subir une sanction formulée également
par les organes compétents de l’Etat.

Il s’ensuit que tout acte anti-social ne peut être puni que


s'il est prévu par la loi. Le législateur édicte donc les
conditions d'existence du crime et fixe la sanction
appropriée. La sanction est, en principe, la même pour
tous ceux qui ont commis le même acte. C'est l'égalité de
la répression, quels que soient les mobiles et le danger
encouru par la société. Aussi, les incriminations et les
sanctions pénales varient-elles dans le temps et dans
l’espace. La gravité de ces actes prohibés fluctue
également d’une législation à une autre. Il n’en demeure
pas moins que les crimes ont, quelle que soit la
législation, un caractère commun : « …tous les actes

15
Précis De Droit Pénal Général

incriminés sont par hypothèse socialement intolérables,


ou en tout cas intolérés à un moment donné dans un pays
donné, puisqu’ils sont frappés avec plus ou moins
d’intensité des sanctions qui occupent partout le rang le
plus élevé dans la hiérarchie des sanctions juridiques, les
sanctions pénales »1.

Mais, du point de vue réaliste, le crime est perçu comme


un comportement anti-social qui porte atteinte à l'ordre
social. L'individu s'écarte des règles du groupe social
auquel il appartient, il transgresse les normes du groupe
ou de la nation. C’est un fait humain et social. D’ailleurs,
la vision populaire appréhende l’auteur de l’acte comme
un malfaiteur, un « agresseur » des autres membres de la
société ou de leurs biens. La répression des auteurs d’un
tel comportement comme moyen de lutte contre la
criminalité nécessite une maîtrise des conditions
d’existence du phénomène. Ce qui interpelle quant à
l'origine de cette déviance de la part d'un ou de plusieurs
membres de la nation (au sens de groupe social).

B – LES FACTEURS DU CRIME

4. Ces facteurs doivent être recherchés non seulement


par rapport à l'individu lui même (causes endogènes)
mais aussi par rapport à son environnement (causes
exogènes). Tout comportement criminel se réalise au
sein d’une société et par rapport aux valeurs normatives
1.
9. 1
R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", tome 1, 7 ème édition, Cujas, 1997, n°5.

16
Précis De Droit Pénal Général

et culturelles de celle-ci. C’est dans cette logique que


s’inscrit les propos d’Emile DURKHEIM : « lorsqu’un
acte blesse l’un des états forts et définis de la conscience
collective, il atteint le seuil à partir duquel il déclenche
une charge émotionnelle suffisamment intense pour
provoquer une réaction sociale »1. Il en ressort que les
causes du phénomène criminel sont donc liées à la réalité
humaine et sociale.

Les caractères de naissance de l'individu, c'est-à-dire


ses caractères innés (sexe, mental, caractère
héréditaire…), et les caractères acquis volontairement
(alcoolique, toxicomane…) ou involontairement
(transformation physiologique, passage d'un âge à un
autre, la puberté, sénescence, démence.) peuvent
constituer des causes intérieures du phénomène criminel.
C’est le cas de la cleptomanie dont les facteurs doivent
avant tout être recherchés dans la personne elle-même.
D’une manière générale, certaines affections mentales
non congénitales telle que la paranoïa (délire de
persécution, crise de jalousie, …), la manie (excitation
psychomotrice, euphorie pathologique…), la névrose
(panique, anxiété généralisée, phobies ou obsessions…),
la psychopathie (des troubles des fonctions
intellectuelles) peuvent conduire à des comportements
délinquants (coups et blessures volontaires, meurtre, vol,
incendie volontaire, violences sexuelles, tortures).

1.
10. 1
V., R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", tome 1, 7 ème édition, op. cit., n°7.

17
Précis De Droit Pénal Général

En somme, la personnalité de l’individu tient une place


non négligeable dans l’existence du phénomène
criminel. Plusieurs recherches notamment celles visant
les aspects biologiques (anatomie, génétiques,
biochimie…) ont démontré que la personnalité
(humaine) n’est pas sans incidence sur les tendances
criminelles. Le comportement criminel exprime
quelquefois les besoins de l’individu pour lesquels
l’environnement peut être à l’origine de leur naissance.

5. Les milieux géographique, familial, économique,


social et culturel constituent des facteurs extérieurs qui
sont également sources d'influence quant au
comportement de l'individu. En d’autres termes,
l’environnement social ou les structures sociales peuvent
générer des conduites non conformes aux modèles
prescrits par la loi. La vie en milieu urbain (situation
géographique), la vie maritale, celle de célibataire, le
statut de parent monoparental (milieu familial) sont des
exemples de situations qui peuvent avoir une influence
sur la conduite de l’individu. Les situations de pénurie,
de chômage, celle de la mauvaise répartition des
richesses, certaines fréquentations (milieu socio-
économique), certaines pratiques religieuses ou
traditionnelles notamment, l’interdiction de se faire
transfuser, le mariage forcé, l’endogamie, l’excision
(milieu culturel) sont également des facteurs susceptibles
d’avoir un impact sur le comportement de la personne.
Ainsi, même une situation positive peut être source de
délinquance. C’est ainsi qu’avoir une situation sociale et
18
Précis De Droit Pénal Général

un niveau intellectuel élevés peut être à l’origine d’un


comportement anti-social. C’est l’exemple de ce que
SUTHERLAND dénomme la délinquance "en col blanc"
et que d’autres auteurs ont qualifié de « déviations
professionnelles »1. Le "criminel en col blanc" est défini
comme une personne de niveau socio-économique élevé
qui mène des activités illicites en rapport avec celles
qu’il exerce normalement (dans le monde des affaires).

Pour certains auteurs, appartenant au courant de la


criminologie sociale notamment SUTHERLAND et
CRESSEY, l’individu devient criminel par
l’apprentissage grâce aux relations personnelles qu’il a
avec d’autres personnes. Mais, il n’acquiert cette qualité
de délinquant que si le groupe2 avec lequel il
communique est plus enclin à violer la loi qu’à la
respecter. C’est la théorie de l’association
différentielle3. Par contre, pour d’autres, relevant de la
doctrine interactionniste comme Howard BECKER4, les
pouvoirs publics, le législateur et la société étiquettent
ou stigmatisent certains individus si bien qu’ils
n’arrivent pratiquement pas à respecter les normes
sociales établies. Il s’agit de la "labelling theory". On en
déduit que des rôles sont répartis (par les pouvoirs
1.
11. V. E. SUTHERLAND, "White collar criminality", Américain Sociological Review, 1940, p. 1;
1

NORMANDEAU, "Les déviations en affaires et le crime en col blanc, RICPT, 1965, p. 247.
12. 2 M. ESTERLE-HEDIBEL, "Virées, incendies et vols de voiture: motivations aux vols et aux
dégradations de voitures dans les bandes jeunes de milieu populaire", Déviance et Société, 1996, vol.
20, n° 2 p. 119 & SS ; O. KOUDOU, "Intolérance sociale, continuation du comportement délinquant
chez l’adolescent et stratégie préventive" Déviance et Société, 1996, vol. 20, n° 2 p. 1141 & SS.
13. 3 V. E. SUTHERLAND et CRESSEY (américains), "Principes de criminologie", version française,
Cujas, 1966.
14. 4 V. H. S. BECKER, "Outsiders. Studies in the sociology of deviance", New York, 1963, version
française, 1985.

19
Précis De Droit Pénal Général

publics, le législateur et la société) aux individus dans


une société donnée et chacun doit jouer son rôle sur la
scène sociale : si l’individu a comme rôle celui d’un
voleur ou celui d’un citoyen honnête, honorable, il doit
le jouer. Cependant, il est reproché aux doctrines
expliquant la délinquance par la voie des facteurs
sociaux que, malgré tout, « deux individus placés dans le
même contexte social criminogène ne seront pas pour
autant nécessairement des délinquants l’un et l’autre »1.
En effet, les facteurs sociaux pris isolement ne suffisent
pas à déterminer ceux qui sont prédisposés à devenir
délinquants. En outre, la combinaison de toutes les
catégories de facteurs (psychologiques, sociologiques,
ceux liés à la morphologie de l’individu) ne peuvent pas
permettre de façon incontestable et certaine de prédire
"l’avenir criminel" d’un individu.

Des recherches ont aussi été faites sur les relations


entre le sexe et la criminalité2. Il apparaît dans la
plupart des sociétés que, du point de vue statistique, il y
a moins de femmes délinquantes que d’hommes.
Cependant, quelques auteurs estiment que ce constat se
limite à l’apparence. La non incrimination de certains
actes comme la prostitution (par la plupart des systèmes)
et les rôles non visibles que jouent les femmes dans la
commission des infractions (rôle d’instigatrice par
exemple,…), notamment, expliquent ces chiffres
1.
15. 1
V. J. PRADEL, "Droit pénal général », Editions Cujas, 2002, n°40.
16. 2
C. LOMBROSO et G. FERRERO, "La femme criminelle et la prostituée", 1906 ; GALET,
"Introduction à l’étude de la femme criminelle en Belgique", RDPC, 1923, p. 97 & SS. ; LEVY,
Femmes et délinquance : la situation aux Etats-Unis, Déviance et Société 2000, p. 69 & SS.

20
Précis De Droit Pénal Général

apparents1. Toutefois, pour la plupart des auteurs, ces


différences statistiques sont réelles2 et s’expliquent
notamment par les prédispositions biopsychiques qui
sont de nature à éloigner la femme de la violence et à
l’adapter aux difficultés de l’existence. Pour le
Professeur PRADEL, « la moindre criminalité des
femmes s’explique par "l’enfermement social",…C’est
le statut social de la femme, c’est sa mise à l’écart des
lieux où s’exerce le pouvoir qui explique sa sous-
criminalité… Chargées des missions domestiques, elles
sont moins disponibles pour s’adonner à une carrière
criminelle »3. Cette dernière explication, d’ordre social,
peut être vérifiée dans plusieurs systèmes africains dont
celui du Burkina Faso.

La lutte contre le phénomène criminel par l'Etat passe


par une réaction organisée et réglementée par les
pouvoirs publics. Le droit pénal apparaît, à ce titre,
comme une des armes de lutte contre l'activité
criminelle.

§2 – LA STRUCTURE DU DROIT PÉNAL

1.
17. Une distinction est faite entre la criminalité légale, apparente et réelle. La criminalité légale est
1

constituée de l’ensemble des condamnations prononcées par les cours et tribunaux (statistiques de la
justice ou des juridictions). Quant à la criminalité apparente, elle désigne les statistiques (des faits
criminels) portées à la connaissance des autorités policières (statistiques de la police). Enfin la
criminalité réelle, elle désigne l’ensemble des infractions effectivement commises. La différence entre
la criminalité connue (apparente) et celle réelle donne le chiffre noir ou criminalité cachée (darknumber
en anglais).
18. 2 R. CARIO, "Femmes et criminelles", Edit. Erès, 1992, p. 39 & SS.
19. 3 V. J. PRADEL, "Droit pénal général", op. cit., n°23.

21
Précis De Droit Pénal Général

6. Toute société, en particulier la contemporaine, ne peut


se passer du droit pénal qui demeure un des outils
précieux nécessaires à la lutte contre la criminalité dans
toutes ses formes et au respect de certains droits
individuels. C’est un droit plus que nécessaire dans une
société contemporaine où le crime est de plus en plus
organisé, modernisé voire professionnalisé1. A cheval
entre le droit public et le droit privé2, le droit pénal
protège à la fois l’intérêt général et les intérêts
particuliers, d’où la protection d’intérêts divers. Le
respect des libertés individuelles, la protection contre
l’arbitraire des pouvoirs publics, les rapports entre
l’individu et l’État sont essentiellement assurés par lui. Il
produit les normes de conduite et édicte les garanties de
respect de celles-ci. Cette garantie n’est autre que la
sanction.

Le droit pénal se présente, en somme, comme une


discipline destinée, essentiellement, à défendre, à
protéger, à assurer la sécurité de la société contre des
actes qu’elle réprouve et pour cela, les érige en interdits.
Droit jouissant d’une certaine autonomie, son
1.
20. V. Yves MAYAUD, "Le crime organisé, une notion à préciser", in « Le nouveau code pénal : enjeux
1

et perspectives », Colloque organisé par le Ministère de la Justice française, sous la présidence de M.


Pierre MEGNERIE, Edit. Dalloz, 1994, P. 60.
21. 1 V. Gaston STEFANI, Georges LEVASSEUR, Bernard BOULOC, " Droit pénal général ", Dalloz,
15ème édition, Paris, 1995
22. 2 S’agissant de la position du droit pénal par rapport au droit privé et au droit public LARROUMET
affirme que « le droit pénal constitue une branche du droit public, car il établit un rapport entre l’auteur
de l’infraction, le délinquant, et à la société toute entière qui a été lésée par l’infraction et qui est
représentée au procès, dont l’objet est la poursuite et la condamnation du délinquant, par le ministère
public, titulaire du droit de poursuivre au moyen d’une action en justice que l’on appelle l’action
publique on dit encore l’action pénale…Cependant il y a dans le droit pénal une très forte influence
du droit privé.» (voir Ch. LARROUMET, "Droit civil – Introduction à l’étude du droit privé", Tome 1,
3ème édition, Edit. Economica, 1998, n°95).

22
Précis De Droit Pénal Général

importance est telle qu’il se subdivise en plusieurs


branches qui sont pour la plupart des disciplines
classiques (A) et s’appuie sur d’autres sciences pour
renforcer sa place au sein des sciences juridiques (B).

A - LE DROIT PÉNAL ET SES DIFFÉRENTS


DÉMEMBREMENTS

7. Le Droit pénal (ou droit criminel comme le désigne


certains) peut être défini comme une branche des
sciences juridiques dont l'objet est l'étude de
l'incrimination et de la répression par l'État des
comportements tendant à troubler l'ordre public et
l'organisation sociale. Le droit pénal selon certains
auteurs « ne cherche prosaïquement que le maintien de
l’ordre extérieur et l’organisation pacifique des rapports
entre les hommes »1. Pour Jacques-Henri ROBERT, « Le
droit pénal est l’ensemble des normes juridiques qui
réglemente le recours de l’Etat à la sanction pénale. Le
droit pénal est un ensemble dont les contours débordent
très largement le code pénal et qui est extraordinairement
diffus »2.

8. Le droit pénal jouit d’une certaine autonomie par


rapport au droit civil au sens large (droit commercial,
droit social, droit des personnes et de la famille, droit
civil strictement considéré) et au droit administratif3. A
1.

23. 2
J.H. ROBERT, "Droit pénal général", 6ème édition, PUF, 2005, p. 51.
24. 3
V. GOUTAL, "L’autonomie du droit pénal : reflux et métamorphose, RSC, 1980, p. 911.

23
Précis De Droit Pénal Général

cheval entre le droit public et le droit privé, le droit pénal


est présent dans plusieurs disciplines (constitutionnel,
social, économique, administratif, fiscal…) quand il
s’agit du fonctionnement d’un système juridique. Dans
ce sens, le droit pénal est une science juridique
omniprésente voire " un droit omnibus". Il existe, par
exemple, le droit pénal des affaires, le droit pénal
économique et le droit pénal du travail. Quant à son
caractère autonome, il est commandé par la singularité
de son objet, de sa structure et de sa fonction1. Cette
autonomie se constate notamment à travers
l’interprétation des concepts extra-pénaux dans
l’application des lois pénales. Le juge pénal donne,
quelquefois, aux concepts non pénaux, des définitions
différentes de celles données par la loi d’origine (civile,
administrative…)2. C’est le cas de la notion de
"domicile". Selon la loi civile, « toute personne est
domiciliée au lieu de sa résidence habituelle » et « les
personnes morales…ont leur domicile au lieu où existe
le siège principal de leurs opérations » (art. 49 & 51 du
Code des Personnes et de la famille). Or, en procédure
pénale, les visites domiciliaires visent des lieux où
l’individu soupçonné a pu commettre l’infraction ou les
actes tendant à la consommation de celle-ci ou encore
des endroits où les enquêteurs (police judiciaire
notamment) peuvent collecter ou découvrir des preuves
de commission de l’infraction. C’est ainsi qu’en matière
1.
25. 1
V. ALT-MAES, "L’autonomie du droit pénal, mythe ou réalité ?", RSC, 1987, p. 347.
26. 2
C’est ainsi que la notion de "fonctionnaire public" est plus étroite en droit public et plus large en droit
pénal. En effet la Chambre criminelle a étendu cette qualité aux notaires et au conseiller municipal dans
une décision (Cass. crim. 24 février 1893, DP., 1893, I, 393.

24
Précis De Droit Pénal Général

de recherche et de constatation d’infractions aux bonnes


mœurs, le domicile vise notamment les lieux de
divertissement nocturne, les dancings, les cercles et tout
lieu ouvert au public ou utilisé par le public (bus
aménagé en cafétéria ou en "sandwicherie", jardin
public, toilettes publiques)1. Le domicile est, dans cette
dernière hypothèse, largement entendu et peut viser une
multitude de lieux qui ne sont pas pris en considération
par la loi civile (peu importe si ce n’est pas
l’établissement principal ou le lieu où réside le ou les
auteurs suspectés. Aussi, un acte peut être déclaré nul
par le juge civil sans que cette nullité n’ait une incidence
sur la constitution d’une infraction2. Ainsi, l’abus de
confiance peut être établi malgré la nullité ou l’illicéité
du contrat civil constituant un des éléments constitutifs
de cette infraction (abus de confiance)3.

Il y a donc une certaine indifférence quant au caractère


nul, non valide ou inexistant d’un acte extra-pénal
lorsqu’on se place sur le champ pénal. En somme, le
juge pénal se réfère surtout à cette intention criminelle
qu’a l’individu4. A ce titre, le Professeur PRADEL ne
dit-il pas que « dès lors que l’intention criminelle est
1.
27. Ainsi, aux termes de l’article 58 du CPP, « Sauf réclamation faite de l’intérieur de la maison ou
1

exceptions prévues par la loi, les perquisitions et les visites domiciliaires ne peuvent être commencées
avant six heures...Toutefois, des visites, perquisitions et saisies pourront être opérées à toute heure du
jour et de la nuit en vue d’y constater toutes infractions aux bonnes mœurs à l’intérieur de tout hôtel,
maison meublée, pension, débit de boissons, club, cercle, dancing, lieu de spectacles et leurs annexes et
en tout autre lieu ouvert au public ou utilisé par le public lorsqu’il sera constaté que des personnes se
livrant à la prostitution y sont reçues habituellement ».
28. 2 V. Cass. Crim. 25 janvier 1950, Bull. Crim. 1950, n° 27. En matière, d’infraction portant sur les
chèques, le délit peut exister même si les juges civils ont déclaré l’inexistence du titre (du chèque).
29. 3 V. Cass. crim. 25 mai 1927, S., 1929, I, 153, note J.A. ROUX.
30. 4 M. VASSEUR, "Les effets en droit pénal des actes nuls ou illégaux d’après d’autres disciplines", RSC
1951, p ; 1 & SS.

25
Précis De Droit Pénal Général

nettement établie, le juge répressif a le droit et le devoir


de condamner l’auteur d’une infraction, même s’il a été
assez habile pour s’assurer la protection de la loi civile,
commerciale ou administrative »1. En effet, il convient
d’adopter une attitude autonome sur le plan pénal vis-à-
vis de certaines situations juridiques extra-pénales pour
notamment réduire les champs de l’impunité et de
l’insécurité. On ne saurait permettre au délinquant
invétéré de narguer les institutions de la république (ex. :
la justice) en exploitant astucieusement ou
intentionnellement des prescriptions d’autres disciplines
juridiques favorables à celui-ci.

9. Quant au droit pénal général (branche du droit pénal


de fond), objet du présent ouvrage, il consacre l'étude
abstraite des principes généraux des diverses infractions,
celle des responsabilités pénales et des sanctions pénales.
En somme, il présente de façon synthétique les questions
relatives aux infractions. Le droit pénal général est
étroitement lié au droit pénal spécial et permet de mieux
comprendre les règles relevant du domaine droit pénal
spécial.

10.Le droit pénal spécial (élément du droit pénal de


fond), la branche la plus ancienne du droit pénal, traite
de l'application de ces principes généraux et de ces
règles. Il détermine les actes punissables et leurs
sanctions. Le droit pénal spécial analyse les infractions,
1.
31. 1
V. J. PRADEL, "Droit pénal général », Cujas, 2002, n°201.

26
Précis De Droit Pénal Général

les conditions de leur constitution et les sanctions


afférentes. Il précise, au besoin, les particularités de la
répression. Le droit pénal spécial est « une branche du
droit criminel consistant en un catalogue des diverses
infractions »1. Pour Michel VERON, c’est «la branche
du droit pénal qui traite des infractions et donne, pour
chacune d’entre elles, les éléments constitutifs, les
peines et, le cas échéant, les particularités de la
répression »2. Les principes ou les règles générales
dégagées par le droit pénal général facilitent
l’application du droit pénal spécial. Le droit pénal
spécial comporte des branches spéciales. Il s’agit
notamment du droit pénal des affaires, du droit pénal du
travail et du droit pénal économique.

11.Le droit pénal des affaires est assez vaste et vise


surtout les infractions commises dans le domaine
commercial et économique3. Pour certains, le droit pénal
des affaires est « la branche du droit qui sanctionne,
d’une part, les atteintes à l’ordre financier, économique,
social et écologique ; d’autre part, les atteintes à la
propriété, confiance, intégrité physique des personnes,
lorsque l’auteur a agi dans le cadre d’une entreprise, soit
pour le compte de celle-ci, soit pour son propre compte
si le mécanisme de l’infraction est lié à l’existence de
pouvoirs de décision essentiels à la vie de l’entreprise »4.
1.
32. 1
V. Jean PRADEL & Michel DANTI-JUAN, "Droit pénal spécial", Edit. CUJAS, 1995, p. 11.
33. 2
V. Michel VERON, " Droit pénal spécial " 9ème édition, Armand Colin, 2002, n°1.
34. 3
V. W. JEANDIDIER, " Droit pénal des affaires ", Edit. Dalloz, 1991.
35. 4
V. M. DELMAS-MARTY & G. GIUDICELLI-DELAGE, "Droit pénal des affaires ", 4ème édition,
PUF, 2000, p. 13.

27
Précis De Droit Pénal Général

12.Quant au droit pénal du travail, il traite des


infractions et des sanctions en rapport avec la
réglementation du travail1. Il se consacre aux aspects
pénaux des relations nées du contrat de travail2. Il vise
notamment la protection des travailleurs (hommes,
femmes, enfants)3, l’organisation des relations
individuelles et collectives du travail4.

13. La procédure pénale (droit pénal de forme), selon un


auteur, « comporte un aspect organique, qui décrit
l’organisation et la compétence des différentes autorités
publiques chargées de la répression des infractions, et un
aspect fonctionnel, qui étudie la démarche suivie depuis
la constatation de l’infraction jusqu’au prononcé de la
condamnation définitive »5. Elle pourrait simplement
être définie comme l'ensemble des formalités à suivre
pour résoudre un contentieux à caractère pénal6. Pour
Michèle Laure RASAT, « La procédure pénale comporte
un aspect organique, qui décrit l’organisation et la
compétence des différentes autorités publiques chargées
de la répression des infractions, et un aspect fonctionnel,
qui étudie la démarche suivie depuis la constatation de
l’infraction jusqu’au prononcé de la condamnation
1.
36. 1
A. CERF-HOLLENDER, "Recevabilité de l’action civile d’un syndicat…pour le délit de dénonciation
calomnieuse…(Cass. crim. 11 mars 2003…) ", RSC, 2004, Chr., p. 361 & SS.
37. 2
Voir notamment les articles 47 (infraction de harcèlement sexuel), 387 (contraventions de simple
police) 388 à 394 (délits) du code du travail.
38. 3
E. MONTEIRO, "Le concept de harcèlement moral dans le code pénal et le code du travail", RSC
2003, p. 277 & SS.
39. 4
V. A. CŒURET & E. FORTIS, "Droit pénal du travail", Edit. Litec, 1998 ; O. GODARD, "Droit
pénal du travail ", Edit. Masson, 1980.
40. 5
V. Michèle-Laure RASSAT, " Manuel de procédure pénale", PUF, 1ére édition, Paris, 2002, p. 7.
41. 6
V. Jean PRADEL, "Procédure Pénale", Edit. CUJAS, 1993, p. 13.

28
Précis De Droit Pénal Général

définitive »1. Elle vise la mise en œuvre des règles du


droit pénal (règles de fonds). Ce dernier s’exprime à
travers la procédure pénale qui relie l’incrimination et la
sanction. La sanction ne peut être appliquée sans
l’intervention de la procédure pénale. En revanche, si le
droit pénal présente de façon abstraite les infractions et
les sanctions (sans se référer à des situations concrètes),
la procédure pénale, elle, applique les règles abstraites
édictées par le droit pénal. C’est pourquoi certains
auteurs qualifient le droit pénal de droit "statique" et la
procédure pénale de droit "dynamique". Ceux-ci
estiment que « la règle de procédure pénale a… une
allure dynamique et, parce qu’elle incarne la répression
en marche, elle augmente l’effet de répression générale
contenu dans la loi, elle rétablit l’ordre troublé par
l’infraction et renforce chez les citoyens le sentiment de
l’autorité du droit »2.

La procédure pénale est en conséquence, constituée des


règles d’organisation, de compétence et des normes
processuelles. Les règles d’organisation concernent la
structure des organes répressifs. Les normes de
compétence déterminent les domaines d’intervention ou
les pouvoirs des autorités et des juridictions répressives.
Enfin, les normes processuelles réglementent notamment
l’activité des organes répressifs, les formes des actes et
les délais.

1.
42. 1
V. M-L. RASSAT, « Manuel de procédure pénale », PUF, 2002, n°1.
43. 2
V. R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel ", Edit. Cujas, 1997, n° 189.

29
Précis De Droit Pénal Général

14.Les sciences pénitentiaires ou pénologie traite des


questions relatives à l'exécution des peines devenues
définitives et à leur efficacité. Considérée également
comme un démembrement des sciences criminelles, la
pénologie « étudie les fonctions des sanctions pénales,
les règles de leur exécution et les méthodes utilisées dans
leur application »1.

15.A l’origine, le droit pénal s’est d’abord construit sur


la base des comportements et des besoins internes ou
nationaux. Mais, le développement ou l’évolution des
sociétés a eu pour corollaire le développement de la
criminalité qui a atteint des dimensions internationales.
Face à une telle amplification, il va sans dire que le droit
pénal national ne suffit pas pour réagir efficacement
contre ce phénomène. Ainsi, il fallait, suivant le
contexte, "communautariser" ou internationaliser le droit
pénal. Le droit pénal de caractère international est donc
l’un des éclatements du droit pénal destiné à résoudre
ces catégories de questions. Egalement, le droit pénal de
caractère communautaire, qui fait partie de la famille du
droit international2, répond à ces nécessités. Toutefois, le
droit pénal africain est encore à l’état embryonnaire. Il
n’y a pas un véritable droit pénal africain harmonisé ou
uniformisé voire autonome. Des dispositions pénales
éparses tantôt "harmonisées" (harmonisation de quelques
principes) tantôt semi uniformisées (unification partielle
1.
44. 1
V. Raymond GASSIN, "Criminologie", 5ème édition, Dalloz, Paris 2003, n°25.
45. 2
D’une manière générale, le droit international est constitué de règles régissant les rapports d’ordre
international.

30
Précis De Droit Pénal Général

de quelques règles notamment l’incrimination de certains


faits dans les Actes uniformes OHADA) sont contenues
dans des conventions (OHADA, CIMA, etc.).
Néanmoins, en matière de procédure (pénale) quelques
conventions de type régional régissent l’entraide
judicaire. Il s’agit notamment de la convention du 1er
juillet 1992 de la Communauté Economique des Etats de
l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) relative à ce type
d’entraide. La convention relative à la coopération en
matière judiciaire entre les Etats membres de l’Accord
de non agression et d’assistance1.

Le droit pénal international que l’on distingue du droit


international pénal s'intéresse aux conflits de lois et de
juridictions entre États, aux effets internationaux des
décisions rendues par le juge répressif et à la coopération
policière et judiciaire entre les Etats (extradition,..). La
croissance de la criminalité transfrontalière et la montée
des relations internationales ou inter-étatiques ont rendu
cette branche du droit pénal considérablement
importante2. Ce droit est en général régi par des
conventions (multilatérales, bilatérales voire
communautaires)3. Le droit pénal international se
1.
46. Il de la convention de Nouakchott le 21 avril 1987 ratifié par le kiti 289 du 2 mai 1991, JOBF du 2
1

mai 1991, p. 605.


47. 2 C’est l’exemple de la convention de New York du 20 juin 1956 relative au recouvrement des aliments
à l’étranger et ratifiée par le Burkina Faso par le décret 62-290 du 17 juillet 1962 (JOHV du 21 juillet
1962, p. 678). C’est l’exemple également de la convention A/P du 1er juillet 1992 de Dakar relative à
l’entraide judiciaire en matière pénale de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de
l’Ouest, ratifiée par le Burkina Faso et promulguée par le décret 97-187 du 17 avril 1997 (JOBF du 1er
mai 1997, p. 1009). On peut aussi citer la convention relative à la coopération en matière judiciaire
entre les Etats membres de l’Accord de Non Agression et d’Assistance en matière de Défense, signée à
Nouakchott le 21 avril 1987 et ratifiée par le kiti 289 du 2 mai 1991 (JOBF du 2 mai 1991, p. 605).
48. 3 Le droit communautaire, démembrement du droit international public (ensemble des règles applicables
aux relations entre les Etats), est l’ensemble des règles de droit élaborées par un ensemble donné d’Etats

31
Précis De Droit Pénal Général

rapproche du droit international privé (il règle les


situations juridiques ou les rapports entre personnes
privées comportant un élément d’extranéité) en ce qu’il
s’intéresse notamment aux conflits d’autorité et de lois.

Le droit international pénal est une branche du droit


pénal traitant de la répression des infractions commises
notamment lors des confits entre Etats ou de ceux qui ont
lieu à l’intérieur d’un Etat. Il traite généralement des
infractions imputables aux dirigeants des Etats ou aux
Etats eux-mêmes. Il concerne surtout la répression de
certains actes criminels (crimes de guerre, génocide,
usage de gaz ou d’armes bactériologiques en vue de
décimer des populations civiles ou un groupe
minoritaires de personnes …) par les juridictions pénales
internationales tels que le tribunal militaire de
Nuremberg qui avait été institué par l’accord de Londres
du 8 août 1945, après la seconde guerre mondiale, pour
juger les criminels nazis et le tribunal pénal international
de la Haye (dans le cadre des crimes commis en Ex-
yougoslavie)1. Ces tribunaux pénaux et le TPI pour le
Rwanda (établi le 8 novembre 1994 pour réprimer
notamment les responsables d’actes de génocide) sont
des juridictions ad hoc à la différence de la cour pénale
3.
(UEMOA, CEMAC et Union européenne par exemple) et les organes de cet ensemble (la communauté).
Ce droit régit d’une part les rapports entre les Etats membres et d’autre part les relations entre un Etat
membre et des personnes privées ressortissant des Etats des membres. Il concerne également les
rapports entre les personnes privées des Etats membres de la communauté.
49. 1V. André DECOCQ, "Les crimes contre l’humanité ", in " Le nouveau code pénal : enjeux et
perspectives ", op. cit., P. 99. Le tribunal pénal international (TPI) pour l’ex- Yougoslavie a été créé
par la résolution n°827 du 25 mai 1993 du Conseil de sécurité des Nations Unies pour juger les auteurs
présumés de violations graves du droit international humanitaire. La compétence de cette juridiction
couvre les infractions commises depuis le 1er janvier 1991.

32
Précis De Droit Pénal Général

internationale (statut de Rome du 17 juillet 1998, adopté


le 1er juillet 2002)1 qui est permanente2. Le Burkina Faso
a ratifié le statut de Rome3.

A propos de cette ramification du droit pénal, la Cour de


cassation française a apporté quelques précisions quant
à sa portée dans un arrêt relatif à l’affaire Barbie : « en
raison de leur nature les crimes contre l’humanité ne
révèlent pas seulement du droit pénal interne français,
mais encore d’un ordre répressif international,
régulièrement intégré à l’ordre interne… »4.

Le droit international pénal, par ailleurs, se consacre à la


protection d’intérêts supra nationaux et vise tous les
peuples ou l’humanité5. En rapport avec le champ
d’application de cette branche du droit pénal, Bruno
OPPETIT affirme fort à propos que, « l’humanité …
exprime juridiquement le genre humain tout entier :
l’espace de l’humanité, par définition, est affranchi de
toute dimension territoriale, soit individuelle, soit
étatique : il rassemble tous les peuples, originairement,
en une communauté de sol dans un perpétuel rapport de
chacun à tous les autres. L’humanité est méta étatique et

1.
50. 1
La convention portant le statut de Rome instituant la Cour pénale Internationale a été signée par 120
Etats.
51. 2
V. A. HUET & R. KOERING-JOULIN, " Droit pénal International ", PUF, 2ème édition, Paris, 2001,
p. 28.
52. 3
S. MANACORDA & G. WERLE,"L’adaptation des systèmes pénaux nationaux au Statut de Rome",
RSC, 2003, p. 50 &SS.
53. 4
Cass. crim. fr., 6 octobre 1986, Journal du Droit International (JDI) 1983, p. 789.
54. 5
A. CASSESE, "Peut-on poursuivre des hauts dirigeants des Etats pour des crimes internationaux ? A
propos de l’affaire Congo c/ Belgique (C.I.J.)", RSC 2002, p. 479 & SS.

33
Précis De Droit Pénal Général

est étrangère à la notion de souveraineté et de


frontières »1.

16. Parmi les démembrements du droit pénal, il convient


de citer une matière qui est peu développée et qui reste
quand même importante à plusieurs titres. Il s’agit du
droit pénal comparé2 se consacrant à la confrontation
de divers systèmes pénaux (système anglo-américain ou
common law, système de droit continental ou droit
romano-germanique, droit musulman, droit
canonique…). Il traite donc des éléments rapprochant les
systèmes comparés et de ceux qui les différencient (il
dégage les traits caractéristiques des systèmes étudiés).
Autrement dit, il se consacre à l’étude et à la
comparaison de plusieurs systèmes de droits et des
institutions que ces systèmes ont mis en place. Il
rapproche, en matière pénale, les législations, les
principes et les pratiques de plusieurs Etats. A une
époque où les relations internationales et la criminalité
trans-nationale connaissent un développement fulgurant,
il est nécessaire d’accorder une place privilégiée à cette
discipline. Cette dernière peut permettre de mettre en
place des moyens juridiques efficaces de lutte contre la
criminalité transnationale et de dégager des règles
pouvant améliorer la qualité des législations pénales
nationales et internationales.

1.
55. 1
V. B. OPPETIT, "Philosophie du droit", Dalloz, 1999, n°127
56. 2
V. J. PRADEL, "Droit pénal comparé", Edit. Dalloz, 1995.

34
Précis De Droit Pénal Général

La particularité de la délinquance juvénile est telle qu’un


droit pénal est consacré aux enfants (personnes âgées de
moins de 18 ans)1. Il s’agit du droit pénal des mineurs
ou de l’enfance qui voue le droit pénal de forme et de
fond aux mineurs2. Les procédures concernant les
mineurs, la responsabilité pénale des mineurs et les
juridictions pénales spéciales pour les enfants sont
traitées par le droit pénal des mineurs3.

A côté du droit pénal, on note l'existence de sciences


dites parfois sciences auxiliaires de celui-ci. Il s'agit
particulièrement des sciences criminelles et d'autres
sciences. Ces sciences ont joué et continuent de jouer un
rôle qui va au-delà de la qualité "d’auxiliaires". Le droit
pénal et ces sciences s’imbriquent.

B- LE DROIT PÉNAL ET D’AUTRES SCIENCES

17.Les sciences criminelles et d'autres sciences


notamment les sciences de l'homme, sciences sociales
permettent l'élaboration et l'application du droit pénal.
Elles s'intéressent à l'homme, sa nature, son
comportement, sa personnalité, à la société et à son
évolution.

1.
57. J. BOURQUIN, "Approche historique du mineur criminel, Droit de l’Enfance et de la Famille, 1994,
1

n° 38, p. 89 & SS.


58. 2 V. AUGER, "Statut du mineur délinquant", Gaz. Pal., 200, doct., p. 661 ; RENUCI, "Passé et avenir
du droit pénal des mineurs, RSC, 2000, 79 ; SALAS, "Justice pénale des mineurs", RSC, 1993, 238.
59. 3 V. Ministère de la Promotion des Droits Humains, "Code de protection de l’enfance (Recueil des
textes)", mars 2006.

35
Précis De Droit Pénal Général

Les sciences criminelles ont pour objet l'observation du


phénomène criminel. Elles comprennent principalement
deux branches dont les sciences criminalistiques et les
sciences criminologiques ou criminologie.

18.Les sciences criminalistiques sont réservées à la


recherche des infractions, des preuves et à l'identification
de leurs auteurs (déroulement de la procédure). Elles
permettent d’élucider certaines affaires pénales et par la
même occasion de faire baisser le nombre de criminels
"X" ou inconnus. Elles contribuent à améliorer les
conditions de la recherche de la preuve et à réduire la
proportion d’impunité. Pour GASSIN, les sciences
criminalistiques sont constituées de « l’ensemble des
sciences et des techniques utilisées en justice pour établir
les faits matériels constitutifs de l’acte délictueux et la
culpabilité de la personne qui l’a commis »1. Pour A.
BUQUET, « la criminalistique s’intègre à la
criminologie, elle constitue une science jumelle bien
distincte et complémentaire à l’étude doctrinale et
appliquée au phénomène appelé "crime" pris dans le sens
large du terme, c’est-à-dire toute agression dirigée contre
les valeurs morales ou sociales légalement définies ou
pénalement protégées »2.

A ce titre, le recours à des sciences ou techniques telles


que la médecine légale (renseigne sur les causes et les
circonstances d'un décès, les circonstances d’une
1.
60. 1 1
V. R. GASSIN, "Criminologie ", 5ème édition, Dalloz, 2003, n° 24.
61. 2
V. A. BUQUET, "Manuel de criminalistique moderne", Edit. PUF, 2ème édition, 2003, p. 18.

36
Précis De Droit Pénal Général

blessure, d’un viol…), la toxicologie (renseigne sur la


présence et la nature d'un poison), la chimie (notamment
renseigne sur les fraudes alimentaires, faux en écriture),
la balistique (donne notamment des informations sur
l'arme utilisée), l’anthropométrie1 (permet de relever les
dimensions du corps, certains signes particularisant
l’individu tels que la couleur des cheveux, des yeux, la
forme du visage, l'emplacement de cicatrices, de
photographier,…)2 la dactyloscopie (relève les
empreintes digitales)3 s’est avéré nécessaire. D’autres
techniques contestables sont utilisées par certains
systèmes de droit. Il s’agit notamment de l’usage du
"détecteur de mensonge"ou du "sérum de vérité" qui
conduit, souvent, à exercer une pression physique ou
morale à l’encontre de l’individu. De telles techniques
restent douteuses quand le corps ou la psychologie de
l’individu est manipulée (usage de produits narcotiques
ou de penthotal pour provoquer un sommeil partiel de
l’individu ou pour l’hypnotiser, etc.)4.

19.Les sciences criminologiques (ou criminologie)5, se


préoccupent particulièrement du phénomène criminel à
travers l'étude des délinquants et de la délinquance. Elles
ont pour objectif la recherche des causes, du processus,
des conséquences et des remèdes du phénomène
criminel. La criminologie a fait l’objet de plusieurs
1.
62. V. A. BUQUET, "Manuel de criminalistique moderne", op. cit., p. 161 & SS.
1

63. V. P. K. BANERJEE, "L’identification à partir des caractères visibles du crâne", RIPC, n° 435, 1992.
2

64. 3
Elle a été inventée par BERTILLON. Relativement aux empreintes, voir A. BUQUET, "Manuel de
criminalistique moderne", op. cit., p. 78 & SS.
65. 4 . V. A. BUQUET, "Manuel de criminalistique moderne", op. cit., p. 239 & SS
66. 5 V. R. GASSIN, "Criminologie ", 5ème édition, Dalloz, 2003, p. 3 & SS.

37
Précis De Droit Pénal Général

définitions doctrinales. SUTHERLAND (de l’école


américaine classique) conçoit cette science comme celle
« qui étudie l’infraction en tant que phénomène
social »1. Selon DURKHEIM, « Nous constatons
l’existence d’un certain nombre d’actes qui présentent
tous ce caractère extérieur que, une fois accomplis, ils
déterminent de la part de la société, cette réaction
particulière qu’on nomme la peine. Nous en faisons un
groupe sui generis, auquel, nous imposons une rubrique
commune : nous appelons crime tout acte puni et nous
faisons du crime ainsi défini, l’objet d’une science
spéciale, la criminologie »2. Jean LARGUIER perçoit la
criminologie comme il suit « la criminologie est l’étude
du crime, acte humain : elle recherche les causes et
examine, les manifestations de la délinquance ; elle
étudie, le criminel, l’acte criminel et la réaction sociale
contre le crime : tout cela devrait permettre de mieux
lutter contre le crime »3.

Aussi l’école américaine classique, par la voix de


SUTHERLAND, définit-elle la criminologie comme la
science étudiant « les processus d’élaboration des lois,
de l’infraction aux lois et des réactions et des réactions
provoquées par l’infraction aux lois »4.

1.
67. V. SUTHERLAND-CRESSEY, cité par R. GASSIN, "Principes de criminologie ", p. 11-32.
1

68. V. Emile DURKHEIM, "Les règles de la méthode sociologique", 13 ème édition, PUF, Paris, 1956, p.
2

33.
69. 3 J. LARGUIER, « Criminologie et science pénitentiaire », 9ème édition, Dalloz, p. 3.
70. 4 V. SUTHERLAND-CRESSEY, "Principes de criminologie ", p. 11 & SS.

38
Précis De Droit Pénal Général

La criminologie a donc recours, elle aussi, à d'autres


sciences dont les sciences médicales et les sciences
sociales.

20. Les sciences médicales étudient les causes endogènes


de la criminalité c'est-à-dire les causes intérieures à
l'individu (anatomie de l'individu). Ainsi,
l'anthropologie criminelle, œuvre de Cesare
LOMBROSO, consistait à rechercher les causes de la
criminalité dans la constitution anatomique de l'individu
et la personnalité physique de l’individu. En somme,
Lombroso s’est particulièrement penché sur la
morphologie de celui-ci. Il a établi des liens ou des
rapports entre le physique de l’individu et son
comportement. Ces recherches ont été consignées dans
un ouvrage, publié en 1874, intitulé, "L'homme
criminel". Toutefois ses conclusions ont été, par la suite,
contestées par certains, notamment LACASSAGNE (en
France) et GORING (en Angleterre). En outre, les
théories de Lombroso ont été corrigées ou ajustées par la
doctrine italienne, elle-même. Cette dernière a
finalement admis que les stigmates anatomiques ne
suffisent pas pour conclure que l’individu a des
prédispositions délinquantes.

En revanche, les sciences sociales sont orientées vers


l'étude des causes exogènes de la criminalité c'est-à-dire
les causes extérieures à l'individu.

39
Précis De Droit Pénal Général

21. A ce titre, on peut citer la sociologie criminelle, dont


Enrico FERRI (1857- 1929) est un des fondateurs. C’est
un démembrement des sciences sociales qui s’intéresse à
l'environnement de l'individu (influence du milieu social,
physique, professionnel, géographique sur son
comportement). Les causes du crime sont recherchées en
dehors de l’individu. Ces causes ont essentiellement pour
origine le milieu social au sein duquel vit l’individu. Ce
milieu constitue un « bouillon de culture où se développe
le microbe, lui-même impuissant en milieu stérile »1. La
sociologie criminelle étudie l’action criminelle sous son
aspect sociologique : l’étude du crime est envisagée en
tant que phénomène social. Le rôle de l’apprentissage,
l’impact des facteurs sociologiques par rapport au
comportement de l’individu, les conflits de culture (choc
né de la rencontre de plusieurs normes de conduite dans
une même société : les valeurs culturelles en présence
diffèrent de celles du milieu social au sein duquel
l’individu a évolué) notamment sont concernés par la
sociologie criminelle2.

Enfin, la sociologie pénale3 (composée de la sociologie


du droit pénal, de la sociologie du procès pénal et de la
sociologie de la peine) est-elle une des branches des
sciences sociales qui se consacre à l’étude de la réaction
sociale contre le crime sous l’angle sociologique.
1.
71. G. STEFANI, G. LEVASSEUR, B. BOULOC, "Droit pénal général», 18 ème édition, Dalloz, 2003, n°
1

47.
72. 2 Tarde, Lacassagne, Quételet, Guerry, Cohen figurent parmi les personnes qui ont mené des recherches
dans le domaine de la criminologie sociale.
73. 3 La sociologie pénale est synonyme de la sociologie du droit pénal et de la justice pénale.

40
Précis De Droit Pénal Général

Toutes ces sciences, concourant au renforcement du


droit pénal, témoignent de l'évolution de celui-ci.

§3 - L’ÉVOLUTION DU DROIT PÉNAL

Le droit pénal burkinabé (B), construit essentiellement


à partir du droit pénal français (A), a évolué.

A – LE DROIT PÉNAL FRANÇAIS

22.Le droit pénal a connu incontestablement une longue


et complexe évolution. Cette évolution a été, en
particulier, constatée dans le système français qui
constitue la source d'inspiration ou d'imitation pour la
plupart des anciennes colonies françaises comme le
Burkina Faso.
Plusieurs étapes ont émaillé le droit pénal français.
Parmi ces étapes, on peut essentiellement retenir : la
période de la vengeance, de la justice privée, de l’ancien
droit, celles de la légalité et des codes napoléoniens.

23.La période de la vengeance - La justice était d'ordre


familial ou d'ordre clanique. Dans les sociétés primitives,
la vengeance était un droit pour la victime et sa famille.
Elle constitue une réparation du préjudice subi par la
victime. Elle exprime la solidarité familiale. Elle
constituait même un devoir. Toute atteinte à un individu,
à ces biens méritait une punition infligée souvent avec

41
Précis De Droit Pénal Général

violence. L’individu rend le mal à son agresseur. « Se


venger, c’est frapper l’adversaire pour le tuer ou léser
son intégrité corporelle…La vengeance s’exécute
toujours avec un raffinement de cruauté, avec la joie de
faire souffrir et de torturer »1. En effet, il arrivait que
l’agresseur ait sa langue, ses pieds et ses mains coupés,
la peau de la tête arrachée et lui-même jeté au feu. Les
règlements de compte par la voie de la guerre étaient
d'usage dans les clans. En général, le chef de famille ou
le chef de clan était investi des pouvoirs nécessaires pour
rendre cette justice ou pour faire régner l'ordre.
Lorsqu’un tort est créé à un membre du groupe (village,
clan, caste,…) ce tort touche tout le groupe. Il s’agit
d’une répression vindicative. Néanmoins, les sociétés ont
progressivement évolué si bien que les règles de la
vengeance vont être remplacées par d'autres règles plus
modérées.

La période de la justice privée - A ce stade, la société


va tenter d’assouplir voire de faire disparaître
progressivement le droit de vengeance en imposant
quelques règles en adéquation avec la volonté sociale de
rendre une bonne justice. Cette étape était caractérisée
par les règles de la loi de talion2, l'abandon noxal3, la
composition volontaire (la victime compose de façon
libre avec l’agresseur au lieu de faire usage de son droit
1.
74. V. J. MARQUISET, "Les droits naturels", PUF 1961, « QUE-SAIS –JE » n°920, p. 70.
1

75. Il s’agit de la règle" Œil pour œil, dent pour dent". La sanction est déterminée en se fondant sur
2

l’importance du tort créée.


76. 3Il est question d’abandon noxal lorsque le coupable d'une offense injustifiée est abandonné à la partie
offensée et quand seul celui-ci est soumis à la vengeance (sa famille n’est pas concernée).

42
Précis De Droit Pénal Général

de vengeance)1, les cojureurs2, et le combat judiciaire


(simple combat). L’étape de la justice privée s'est donc
singularisée essentiellement par le désir de modérer ou
de limiter les excès de la vengeance.

La période de l’Ancien Régime ou ancien droit3 – Au


cours de cette période, la justice privée se transforme
progressivement en justice publique. Le régime de la
responsabilité pénale est fortement influencé par celui du
droit canonique (la peine a une fonction rétributive, elle
permet de sanctionner l’individu proportionnellement
au(x) péché(s) qu’il a commis). Au cours de cette
période, l’on s’intéresse particulièrement au délinquant,
lui-même, pour déterminer la peine. Le dommage ou le
crime ne constitue plus le fondement de la peine. La
protection de l’ordre public en est plutôt le fondement.
Les perturbateurs méritent un châtiment : il faut les
sacrifier à l’intérêt collectif. Cette période est également
marquée par l’application de la règle selon laquelle toute
justice est l'émanation du roi. Ce dernier organisait les
règles de la justice suivant ses humeurs et sa volonté et
faisait appel à des officiers pour rendre la justice. La
répression était arbitraire, très sévère et atroce (fouet,
mutilation, mort par le feu, galère). L'aveu, moyen de
1.
77. La composition volontaire permet de réparer le tort par le versement d’une indemnité. Dans cette
1

hypothèse la partie offensée dédommagée perd son droit de vengeance. Il est donc procédé à la
tarification des atteintes. Le coupable est le débiteur de la victime
78. 2 Les cojureurs désignent, ici, les membres de la famille de la victime ou ses proches qui
l’accompagnent et le soutiennent en jurant chacun devant l’instance de jugement. Le fait de cojurer,
d’une manière générale, apparaît comme un mode de preuve qui consiste à appuyer les déclarations
d’une personne faites sous serment.
79. 3 V. André LAINGUI & Arlette LEBIGRE, "Histoire du droit pénal", II, "La procédure Criminelle,"
Edit. Cujas, Paris, p. 23.

43
Précis De Droit Pénal Général

preuve obtenu sous diverses formes de tortures, a aussi


marqué cette période : l’individu est « sanctionné dans sa
chair ». Les ordalies (autre moyen probatoire) ont fait
l’objet d’ascension à cette époque. Elles consistaient à
appréhender le fer rouge avec la main nue ou à plonger
la main dans de l’eau bouillante. La main était, trois
jours après cette épreuve, examinée. Si l’examen révèle
que la main est sur le point de guérir, l’individu est
déclaré innocent. Dans le cas contraire, c’est une preuve
de culpabilité.

En outre, au moyen âge, le droit français incriminait des


actes comme la sorcellerie, le blasphème, l’hérésie, le
suicide, le sacrilège, l’homosexualité. Cette étape va
s'éteindre peu à peu pour faire place à une étape dominée
par le légalisme.

La période de la légalité – Qualifiée d’intermédiaire, la


période de la légalité se démarque par le remplacement
progressif de l'arbitraire par l'égalité et la rigueur, de la
sévérité par la modération. Les travaux et critiques de
certains philosophes et juristes tels que Cesare
BECCARIA1, Jean-Jacques ROUSSEAU2 ont
considérablement contribué à ce changement. La
déclaration des droits de l'homme de 1789 a aussi
contribué à la légalisation de la répression. Elle a permis
la suppression de l’arbitraire. Le caractère légal de la
1.
80. Il est l’auteur de l’ouvrage intitulé "Traité des délits et des peines", publié en 1764. Il luttait pour la
1

mise en place de sanctions pénales modérées et prônait la suppression de la peine de mort et le non
recours à la torture.
81. 2 "Le contrat social" constitue une de ses œuvres.

44
Précis De Droit Pénal Général

répression a été renforcé par le code pénal de 1791, par


la Constituante, et le code 3 brumaire an IV de la
Convention. Le code de 1791 contenait essentiellement
deux lois adoptées par la Constituante unifiant le droit
criminel. Ces lois supprimèrent les peines cruelles, le
pouvoir de fixation de la peine par le juge, le droit de
grâce reconnu au monarque. Elles instaurèrent un
système de peines fixes et des règles de procédure
criminelle.

Le Code de la Convention modifiera ces règles de


procédure, en mettant en place une procédure accusatoire
et en permettant le recours au jury. La procédure
accusatoire permet d’établir un équilibre entre
l’accusation et la défense. Elle suppose l’existence d’une
égalité entre les deux parties. Les poursuites sont
exclusivement engagées par l’accusateur qui peut être la
victime ou ses parents. Il en ressort qu’en absence de
plainte, il n’y a pas de jugement. Le juge a pour fonction,
dans la procédure accusatoire, de diriger et d’éviter les
dérives. Il a donc un rôle passif tandis que l’accusateur
joue un rôle actif. Il statue en se fondant sur les débats et
les preuves discutées par les parties. Ce sont les pairs de
l’accusé et la partie accusatrice qui mènent les débats
(oralement et contradictoirement) et rapportent ou
discutent les preuves publiquement. La procédure
accusatoire n’est pas à confondre avec la procédure
inquisitoire. Le juge est actif, s’agissant de cette
dernière procédure (inquisitoire) : le pouvoir de mise en
mouvement de l’action publique est du ressort du juge
45
Précis De Droit Pénal Général

(représentant du ministère public). La procédure


"dirigée" par le juge est de caractère écrit, secret et non
contradictoire durant la phase d’instruction
préparatoire. C’est également lui qui se charge de la
recherche des éléments de preuve.

Ces différentes étapes ont conduit aux codes


napoléoniens dont le code d'instruction criminel de 1808
et le code pénal de 18101. Le dernier code a conduit au
retour à la sévérité dans la répression (marque au fer
rouge, amputation du poing du parricide) tout en
conservant le principe de légalité des infractions et des
peines. Le code pénal a pris en compte des idéologies
d'auteurs comme KANT2 et particulièrement
BENTHAM3.

Les codes napoléoniens - Ils ont marqué une certaine


continuité des codes de 1791 et du 3 brumaire an IV. Le
législateur français s'est appuyé particulièrement sur
ceux-ci pour améliorer les codes de 1808 et de 1810.

Le Code d'Instruction criminelle était caractérisé par la


prise en compte de la procédure mixte (inquisitoriale au
stade de procédure de recherche des preuves c’est-à-dire
en instruction et accusatoire au stade de la procédure
1.
82. Ces deux codes sont entrés en vigueur le 1er janvier 1911.
1

83. 2
KANT estimait que l’auteur d’une infraction mérite un châtiment qui constitue une forme de
réparation du mal causé.
84. 3 Jeremy BENTHAM, philosophe anglais, est le fondateur de la doctrine de l’utilitarisme et s’intéressait
au droit pénal. Cet intérêt l’a conduit à écrire un livre intitulé "Traité de législation civile et pénale" et
publié en 1807 en ce qui concerne la version française.

46
Précis De Droit Pénal Général

d’audience c’est-à-dire au cours du jugement)1 et


l'intervention du simple citoyen comme juge en matière
criminelle, en l'occurrence le système de jury. Il
prévoyait la séparation des missions des juges en matière
de procédure : poursuites, instruction et jugement.

Concernant le Code pénal de 1810, l'on remarque le


maintien de la légalité et de l'égalité dans la répression.
Néanmoins, des changements ont été opérés. Ainsi, on
note un passage du caractère fixe de la peine au caractère
modulable de celle-ci. Le juge doit décider de la peine à
prononcer en respectant un minimum et un maximum
fixés légalement. Les circonstances aggravantes sont
devenues plus nombreuses tandis que les circonstances
atténuantes ont été strictement limitées.

Les codes napoléoniens ont subi de nombreuses et


profondes modifications, en particulier le Code pénal de
1810 qui sera remplacé par le nouveau code pénal entré
en vigueur le 1er mars 1994. Le Code d'Instruction
Criminelle a été remplacé, plus tôt, par le code de
procédure pénale, le 2 mars 1959.
L'évolution du Droit pénal à partir des codes
napoléoniens ne s'est pas faite sans l'influence de la
doctrine qui a contribué à la modernisation de ce
domaine du droit.

1.
85. 1
La procédure mixte combine celle de type inquisitoire qui se traduit par une instruction écrite et
secrète et celle d’ordre accusatoire qui est de caractère public, oral et contradictoire (au cours des débats
à l’audience).

47
Précis De Droit Pénal Général

2 – L’INFLUENCE DU DROIT PÉNAL PAR LA


DOCTRINE A PARTIR DE L’ÉPOQUE DES CODES
NAPOLÉONIENS

24. Plusieurs courants idéologiques ont été d’un apport


considérable quant à l’évolution du droit pénal. Ainsi, à
l’époque du régime de la Restauration, les idées de
KANT ont constitué une des sources d’inspiration
concernant la répression (cas de l’exemplarité). Certes,
un nombre significatif a contribué à cette évolution mais,
principalement, trois écoles ont marqué de leurs
empreintes le droit pénal. Il s'agit de l'école néoclassique
(a), de l'école positiviste (b) et de celle de la défense
sociale nouvelle (c).

a - L'école néo-classique

25. La doctrine de cette école a été prise en considération


entre 1830 et 1870 (surtout), par le législateur français.
Elle est principalement représentée par GUIZOT,
ORTOLAN, ROSSI et LUCAS. Sa doctrine consistait à
prôner la juste et utile punition. Cette utilité suppose
l’intimidation du coupable et son amendement. La
répression doit être équilibrée, modérée. Mais, il était
reproché à ce courant, le fait d’accorder une place plus
importante à l’étude de l’infraction au détriment de celle
du délinquant. La doctrine néo-classique préconisait,
également, la prise en compte du degré de responsabilité

48
Précis De Droit Pénal Général

morale du délinquant car elle estime que les individus


n'ont pas la même compréhension des situations.

Par ailleurs, selon cette doctrine, les juges doivent être


plus indulgents à l'égard du délinquant politique car son
mobile est honorable. Le reclassement du délinquant,
l'emprisonnement cellulaire, les travaux forcés et la
déportation dans les colonies ont constitué d'autres
préoccupations de la doctrine néo-classique. Par ailleurs,
la doctrine néoclassique contemporaine, tout en prônant
le caractère rétributif de la condamnation pénale, a
préconisé que le traitement pénitentiaire du délinquant
soit axé sur sa personnalité.

Les idées de cette l’école néo-classique ont été prises en


compte en France au XIXème siècle. Cette prise en
compte s'est traduite notamment par l'adoucissement des
peines (par des lois en 1832 et en 1863), l'élargissement
du champ d'application des circonstances atténuantes,
l'abolition de la peine de mort en matière politique
(1848), la suppression de la mort civile, l'exécution de
certaines peines (travaux forcés) en Outre Mer. Les
travaux forcés, se traduisant par le travail de la terre,
étaient considérés comme un régime pénitentiaire
efficace pour la réinsertion sociale du délinquant.

Certes l'influence de cette doctrine a été positive en ce


que l'intimidation excessive a été écartée par le
législateur mais, elle s'est révélée négative en ce qu'elle a

49
Précis De Droit Pénal Général

entraîné la croissance considérable de la criminalité, la


multiplication du nombre de récidivistes, l'inefficacité de
la modération de peine.
Ce résultat nécessitait une révision des aspects pris en
compte par le législateur. L'école positiviste avait
d'autres idées à proposer à ce titre.

b - L'école positiviste

26. LOMBROSO1, FERRI, professeur (1856-1928), et


GAROFALO, magistrat (1852-194), constituent les
principaux fondateurs de cette doctrine qui repose, en
partie, sur le déterminisme (le comportement criminel est
déterminé par un certain nombre de facteurs)2. Chaque
individu a son destin prédéterminé selon ce courant
idéologique et par conséquent les actes sont
indépendants de sa volonté et ne sont pas le résultat de
la liberté. L’école positiviste refuse donc de croire à
l'existence du libre arbitre. La perception de Lombroso,
suite à son étude rationnelle, est telle que le criminel agit
pratiquement comme l’animal qui reste son ancêtre. Le
criminel se rapproche donc de l’animal ou du primitif. Il
y a en lui une réapparition de l’état primitif. Ses
agissements sont de caractère bestial ou sauvage. Le
phénomène criminel n’est pas spécifique à l’être humain,
il existe chez les animaux et les plantes. Certains
1.
86. Médecin et criminologue italien (1835 – 1909), il est l’auteur de l’ouvrage intitulé "L'homme
1

criminel" paru en 1876. Il a fait des recherches sur l’anatomie des individus. Il est, également, auteur de
l’ouvrage : "Crime, causes et remèdes", publié en 1899.
87. 2 La thèse du déterminisme était fortement soutenue par LOMBROSO.

50
Précis De Droit Pénal Général

animaux tuent les autres pour se nourrir, d’autres par


jalousie. Pour Lombroso, le délinquant doit être traité,
surtout, en tant que malade. Il faut accorder moins
d’importance à sa qualité de coupable.

Selon la logique de cette doctrine, il faut s'intéresser à la


personnalité du délinquant pour réprimer (anthropologie
criminelle…). Les fondateurs de celle-ci se sont investis
dans des recherches scientifiques d’ordre criminologique
(constitution organique et psychique du criminel,
caractères personnels, …) et celles de nature
sociologique (milieu physique, social,…) pour permettre
sa mise en pratique.

Ainsi, Lombroso a fait des recherches dites scientifiques


(criminologie scientifique) portant sur l'anatomie de
l'individu. Les squelettes, les cadavres, les organes du
criminel vivant relèvent de son champ de recherches.
L’état corporel et psychique intervient, en conséquence,
dans le processus de cristallisation de l’état de criminel.
Il est ressorti de ces recherches que le criminel est
victime d’un certain nombre d’anomalies anatomiques
qui présage cette qualité de délinquant. Ces anomalies
affectent particulièrement son crâne. Ce qui donne lieu à
des caractères anormaux notamment une proéminence
des arcades sourcilières, une diminution du crâne, un
front fuyant, un cerveau lourd, des oreilles et une
mâchoire hors normalité, une croissance anormale des
dents de sagesse. Pour Lombroso, ces tares anatomiques

51
Précis De Droit Pénal Général

ou la morphologie de l’individu constitue, en général,


des signes (extérieurs) d’identification d’un criminel. Ce
qui signifie que le délinquant est porteur de stigmates
anatomiques et physiologiques qui permettent de le
distinguer des non délinquants. Allant plus loin dans ses
recherches, il précise par exemple que le criminel, dont
les activités sont orientées vers le viol, a notamment de
longues oreilles, les yeux obliques et rapprochés, un
crâne étroit, un nez écrasé, un long menton, une
mâchoire saillante. Le voleur a, lui, le front fuyant, les
yeux permanemment en mouvement et est en général
gaucher. Le délinquant a donc une prédisposition
criminelle congénitale.

27. Ces recherches l’ont aussi conduit à distinguer


l'existence de différents types de criminels notamment, le
criminel-né assimilé à un « fou moral », le criminel
aliéné, le criminel d'habitude, le criminel d'occasion ou
"criminaloïde", le criminel passionnel. Le criminel-né
présente des stigmates ou des caractéristiques criminels
et est voué au crime : il a des prédispositions au crime.
Le criminel aliéné est un délinquant affecté d’une
sérieuse anomalie mentale. Quant au criminel
d’occasion, en général, il passe à l’acte criminel car
l’occasion s’est présentée à lui : « l’occasion fait le
larron ». Ce sont des comportements souvent isolés. Le
criminel passionnel ressemble au criminel occasionnel
et est victime d’un excès d’émotion qui agit sur sa
conscience. Cet état conduit souvent à des actes animés
par la haine, la vengeance, la jalousie, la déception
52
Précis De Droit Pénal Général

amoureuse, la colère1. Le criminel d’habitude est défini


par Tarde comme celui qui s’imite par lui-même. Il
résiste difficilement au mal et a tendance à se conduire
comme il le faisait antérieurement.

Les recherches de Ferri2 l'amènent à conclure que


l'homme est influencé par son milieu et les facteurs
déterminants de ce milieu. Le milieu familial,
économique, le système éducatif, le climat, la densité de
la population et d’autres facteurs sociaux sont, en partie,
responsable du comportement déviant de l’individu.
Selon Ferri, le délinquant n’a pas choisi librement
d’offenser les valeurs sociales ; les contraintes sociales
sont à l’origine de ce comportement : il n’est donc pas
coupable. La société ne doit donc pas le rejeter.

28. Les positivistes italiens marquent leur différence en


accordant une place prépondérante à la prévention et aux
mesures de sûreté plutôt qu'aux peines. Ils enseignent
que l’individu, dont l'état dangereux est scientifiquement
établi, doit faire l’objet de mesures de sûreté. Il doit lui
être appliqué une mesure correspondant au degré de sa
dangerosité, si possible, avant même qu'il ne commette
l'infraction (mesure préventive). Le degré de dangerosité
de l'individu est déterminable en recourant à la science
moderne. Les positivistes proposent une sanction
impitoyable comme remède à l’égard des criminels-nés
et des criminels d’habitude incorrigibles. Ainsi, Ferri,
1.
88. 1
V. J. GUILLOIS, "Emergence du crime passionnel au XIXème siècle", RSC 1985, p. 549.
89. 2
Ferri est auteur d’un ouvrage intitulé "Sociologie criminelle" publié en 1881.

53
Précis De Droit Pénal Général

propose l’élimination (déportation ou réclusion ou


internement à vie) comme sanction à infliger au
criminel-né. Quant au criminel aliéné, suivant les
circonstances, il convient de le soigner ou de l’interner
(asile). Le criminel d’habitude, lui, devrait être placé en
milieu colonial et y être réadapté par le travail. Enfin,
pour les délinquants occasionnels et passionnels, Ferri
propose qu’il leur soit infligé une peine
d’emprisonnement (ferme ou avec sursis ou la réparation
du préjudice). Il pense que ces deux catégories de
criminels demeurent de loin les moins dangereuses. Elles
méritent une sanction symbolique, une mesure bénigne
permettant de leur éviter la répétition de ces
comportements anti-sociaux. En somme, la conjugaison
des mesures individualisées et de la prévention (c’est-à-
dire "soigner le mal à la racine") est fortement
recommandée par cette doctrine. C’est ainsi qu’elle
propose notamment l’éclairage des rues pour éviter les
vols nocturnes et l’aide des personnes démunies pour
prévenir la mendicité ou l’escroquerie.

La doctrine positiviste a influencé plusieurs systèmes


pénaux notamment celui de la France. En effet, le
législateur français a, relativement à la répression, retenu
certaines solutions préconisées par celle-ci. La relégation
instituée en 1885 afin de réprimer les grands criminels
récidivistes, incorrigibles est presqu’une réplique d’une
des sanctions proposées par les positivistes. Elle
consistait à envoyer le délinquant en Outre Mer pour le
reste de sa vie. Aussi, l’interdiction de séjour, le sursis à
54
Précis De Droit Pénal Général

exécution (institué en 1891 pour les délinquants


primaires, constituent-t-ils une réplique de la
condamnation conditionnelle), les mesures éducatives
(mises en place en 1912 au profit des mineurs illustrent-
ils l’impact de la doctrine positiviste sur le droit pénal
français. D’une manière générale, le législateur français,
sans écarter totalement la répression traditionnelle, tient
donc compte de la doctrine positiviste pour instituer
certaines catégories de sanctions.
En outre, le système pénal français n'a pas pu résister à
d'autres influences doctrinales telle que celle de l'école
de la défense sociale nouvelle.

c - L'école de la défense sociale

L’école de la défense sociale qui, à l’origine, s’est


inspirée de certaines idées de l’école positiviste
comporte essentiellement deux courants. Il s’agit du
courant italien avec Fellipo GRAMATICA en tête et le
courant français, l’école sociale nouvelle, dont Marc
ANCEL (qui a été président de la Chambre criminelle de
la Cour de Cassation française) est le principal
fondateur.

29.Fellipo GRAMATICA, auteur d’un ouvrage intitulé


"Principes de défense sociale" (publié en 1960) s’est
55
Précis De Droit Pénal Général

particulièrement intéressé à l’amélioration des


conditions du délinquant et à sa réadaptation sociale.
Il estime que le concept de "droit pénal" doit viser
l’appréciation du sujet : c’est de la subjectivisation. Il
juge, en conséquence, que le concept de responsabilité
pénale doit être remplacé par celui "d’antisocialité" et le
concept "d’infraction" par celui "d’indice anti-social". Il
pense également que le mot "délinquant" devrait être
remplacé par le mot "déviant". L’école de la défense
sociale de Fellipo GRAMATICA a conclu que l’état
dangereux de l’individu justifie suffisamment la réaction
sociale. Il n’est donc pas nécessaire de rechercher le
responsable. Il convient d’ordonner des mesures à
l’égard du déviant. Il ne faut pas lui infliger une peine :
cette catégorie de sanction doit être bannie.

30.Marc ANCEL, a publié un ouvrage intitulé "la


défense sociale nouvelle" contenant l'essentiel de cette
doctrine1. Cette dernière met l'accent sur la nécessité
d'une politique criminelle humaniste (liberté individuelle
et dignité humaine) qui tienne compte de l'homme et de
la défense sociale.

L’école de la défense sociale nouvelle, à l'instar de la


doctrine positiviste, accorde une grande importance à la
prévention. Elle souscrit également au fait qu'il faut se
pencher sur la personnalité du délinquant en faisant
appel à des médecins, sociologues, psychologues. Elle
1.
90. 1
V. Marc ANCEL, " La défense sociale nouvelle," 1ère édition, Ed. Cujas, 1954.

56
Précis De Droit Pénal Général

préconise des sanctions prenant en compte l'avenir de


l’individu (éviter par exemple sa rechute). Il faut donc
une connaissance parfaite de sa personnalité pour
pouvoir déterminer des mesures idoines. Les sanctions
(peine ou mesures de sûreté) doivent donc tenir compte
de la personnalité de l’individu et non de sa
responsabilité morale. Toutefois, la défense sociale
nouvelle refuse d'admettre le principe du déterminisme.
L'individu doit être traité de sorte qu'il soit réinséré dans
la société.
Cette doctrine préconise également l'élargissement des
pouvoirs du juge en ce qui concerne notamment, la
fixation des peines et leur exécution. Les pouvoirs du
juge doivent lui permettre de garantir les droits de la
défense et la bonne application de la loi.

L'influence de cette doctrine s'est révélée, en droit


français, par la mise en place de mesures de protection et
d'éducation au profit des mineurs. Elle s'est aussi traduite
par l'abolition de la relégation, l'assouplissement de
certaines peines favorisant la réinsertion sociale du
délinquant.

Les idées de l’école de la défense sociale ont permis


l’institution de diverses autres mesures et sanctions. En
somme, tous les différents courants idéologiques ont
contribué considérablement et incontestablement à
l'évolution du droit pénal français. Qu’en est-il du droit
pénal burkinabé, inspiré du système français.

57
Précis De Droit Pénal Général

B – LE DROIT PÉNAL BURKINABÉ

Le droit positif (burkinabé) (c), comme ceux de


nombreuses anciennes colonies françaises, a été bâti en
prenant appui sur le système de droit français. Toutefois,
cela ne signifie pas que le droit pénal était un domaine
inconnu du Burkina Faso avant la période de la
colonisation (a). Rappelons que cette période (b) a été
marquée par les razzias, les déportations qui n’étaient
autre que les actes de « commerce » qui sous-tendaient
l’esclavage. La plupart des pays Ouest africains (Gorée,
Ouidah, Loango, …) n’ont pas échappé à cette
« institutionnalisation » morbide.

a - Le droit pénal burkinabé avant l’époque coloniale :


époque de l’application du droit traditionnel ou
coutumier

31.Avant la période de l’occupation coloniale un type


unique de droit s’appliquait : il s’agit du droit de
caractère coutumier. A cette époque, la procédure
pénale et le droit pénal existaient au Burkina Faso.
Mais, le système de droit coutumier étant caractérisé par
son oralité, il va sans dire que ces matières avaient le
même caractère.

La justice de cette période peut être qualifiée de privée


parce rendue par un individu ou un groupe d’individus

58
Précis De Droit Pénal Général

en réponse au comportement violant des intérêts


particuliers (victime, famille, clan). Sous le régime
coutumier, la justice était, suivant les sociétés,
administrée par des personnes jouissant d’une certaine
notoriété ou d’un certain charisme ou encore par des
nobles. Il s’agit notamment du sage, des notables, du
conseil des sages, du roi, du chef de village, du chef de
clan, du chef de famille. Dans certaines sociétés
monarchiques burkinabé, le pouvoir judiciaire et le
pouvoir politique étaient confondus et l’administration
de la justice relevait de la compétence des chefs de
province et du roi1.

Les sanctions étaient de diverses formes. Deux grandes


catégories de sanction existaient en matière pénale : les
sanctions édictées par les hommes et celles d'ordre divin.
Celles prononcées par les hommes pouvaient être d'ordre
pécuniaire ou d’ordre physique tels que les coups de
fouet, les bastonnades, les coups et blessures, la torture.
Ces derniers types de sanction étaient d’ailleurs infligés
aux esclaves par les pratiquants de l’esclavage. Ainsi,
l’article 18 du code noir de mars 1685
prescrit : « Défendons aux esclaves de vendre des cannes
de sucre pour quelque cause et occasion que ce soit,
même avec la permission de leurs maîtres, à peine de
fouet contre les esclaves… ». Il était également prévu de
telles punitions à l’article 29 du Code noir de décembre

1.
91. 1
V. Pierre MEYER, "Introduction à l’étude du droit burkinabé", André Aboland, Namur, 1988, p. 65.

59
Précis De Droit Pénal Général

17231: « Les vols de moutons, chèvres, cochons,


volailles, grains, fourrages, pois, fanes ou autres légumes
et denrées, faits par les esclaves, seront punis, selon la
qualité du vol, par les juges qui pourront, s’il y échoit,
les condamner d’être battus de verges par l’exécuteur de
la haute justice et marqués d’une fleur de lys ». Ce qui
signifie que certaines punitions légales coloniales étaient
presqu’identiques à celles appliquées avant la période
coloniale, dans quelques sociétés « traditionalistes »
africaines. Certains torts créés pouvaient se réparer en
nature. A ce titre, on peut citer les travaux champêtres ou
d'autres types de corvée accomplis en réparation du
préjudice causé à la victime ou à sa famille.

En revanche, d'autres sanctions étaient semble-t-il


édictées par les Dieux. La commission de certaines
infractions comme le vol et la sorcellerie pouvait
conduire à un recours aux sanctions divines. Les Dieux,
les ancêtres étaient implorés pour l’application d’une
sanction pénale comme la peine capitale. Souvent, le
recours à ceux-ci est rendu nécessaire par la gravité de
l’acte commis. La réponse à cet appel était concrétisée
par l'intercession de forces surnaturelles. Ainsi,
l’application et l'exécution de la peine capitale pouvaient
se traduire par une intervention de la foudre qui est
ordonnée par les Dieux et qui doit abattre le coupable.

1.
92. 1
Il s’agit du Code noir de décembre 1723, édit du roi sur les esclaves, concernant notamment l’Île
Maurice et l’Île de la Réunion.

60
Précis De Droit Pénal Général

En somme, les règles pénales coutumières étaient, en


général, instituées sur la base des croyances et des
réalités socio-culturelles1. Mais, la colonisation a
entraîné un changement. Le droit pénal africain et
burkinabé en particulier va connaître deux grands types
de régimes, d'où la naissance de la dualité.

b – Le droit pénal burkinabé à partir de la


colonisation : dualité puis unicité

32.L'intervention des pays colonisateurs comme la


France, la Belgique, l'Angleterre en Afrique Noire a, au
départ, conduit à la coexistence de deux types régimes
dans les pays africains. "Le droit colonial" est venu se
superposer aux droits des sociétés traditionnelles (droit
africain). Par ailleurs, en France, avant l’unification du
droit pénal effectué par décret du 30 avril 1946, des
règles pénales étaient appliquées aux noirs en tant
qu’esclaves. Certaines règles avaient été rédigées sous le
règne de Louis XIV, et, sous l’empire d’autres
souverains ou autorités françaises, pour régir le quotidien
et la vie des esclaves dans les plantations. Il s’agit
notamment des « codes noirs »2. Ce qui explique, en
partie, l’existence des dispositions pénales applicables
particulièrement aux noirs (esclaves). L’article 32 du
Code Noir de mars 16853 en est une illustration,
« Pourront les esclaves être poursuivis criminellement,
1.
93. 1
V. Robert JACKSON, "Les mystères de la sorcellerie et de l’occulte", édit. Edimages, 1992, p. 10.
94. 2
V. André CASTALDO, "Codes noirs de l’esclavage aux abolitions", Dalloz, 2006, p. 1 & SS.
95. 3
V. Code noir de mars 1685, édit du Roi sur les esclaves des Iles de l’Amérique.

61
Précis De Droit Pénal Général

sans qu’il soit besoin de rendre leurs maîtres partie,


(sinon) en cas de complicité : et seront les esclaves
accusés, jugés en première instance par les juges
ordinaires et par appel au Conseil souverain, sur la même
instruction et avec les mêmes formalités que les
personnes libres ». L’article 33 du même code en
constitue aussi un exemple : « L’esclave qui aura frappé
son maître, sa maîtresse ou le mari de sa maîtresse, ou
les enfants avec contusion ou effusion de sang, ou au
visage, sera puni de mort ».

33.Le droit pénal burkinabé n'a pas échappé à cette


situation de dualité. On va assister à l’application, sur le
même territoire, de deux catégories de droit, en
l’occurrence le droit coutumier ou droit oral et le droit
écrit français. Dans le dernier cas, on peut citer
l’exemple de l’article 3 de l’arrêté du 7 novembre
18051 : « Les lois du code civil relatives au mariage, à
l’adoption , à la reconnaissance des enfants naturels, aux
droits des enfants dans la succession de leurs père et
mère, aux libéralités faites par testaments ou donations,
aux tutelles officieuses ou datives, ne seront exécutées
dans la colonie que des blancs aux blancs entre eux, et
des affranchis ou des descendants d’affranchis entre eux,
sans que par aucune voie directe ou indirecte aucune des
dites dispositions puisse avoir lieu d’une classe à
l’autre ».

1.
96. 1
Arrêté du 7 novembre 1805, 16 brumaire an XIV portant promulgation (par Naopoléon 1er) du Code
civil aux colonies.

62
Précis De Droit Pénal Général

En outre, le pouvoir colonial distinguait plusieurs types


de statut quant aux relations juridiques. C’est ainsi que
l’article 1er de l’arrêté Richepance du 17 juillet 18021,
notamment, prescrivait : « Jusqu’à ce qu’il en soit
autrement ordonné, le titre de citoyen français ne sera
porté, dans l’étendue de cette colonie et dépendances,
que par les blancs. Aucun autre individu ne pourra
prendre ce titre, ni exercer les fonctions ou emplois qui y
sont exercés ».

En tout état de cause certaines personnes restaient


soumises au droit local (personnes à statut civil
particulier) tandis que d’autres relevaient du droit
colonial suivant des critères déterminés par le
colonisateur. Cependant, en cas d’absence ou
d’imprécision du statut de l’individu, il peut être fait
application du droit français. Ainsi, la Cour Suprême a
acquiescé à l’application du droit français dans un cas où
le statut était flou : « Attendu qu’en excipant en cause
d’appel d’une coutume "togolaise" ou "africaine" dont le
vague confine à l’inexistante …les juges du fond furent
valablement habilités à adopter une solution du droit
civil moderne pris comme raison écrite et à retenir, en
l’absence d’un contrat rédigé.. »2.

Par ailleurs, le droit coutumier a connu, au Burkina Faso,


une application effective jusqu’à une période
1.
97. 1
Arrêté Richepance du 17 juillet 1802, 28 messidor an X, rétablissant l’esclavage.
98. 2
Cour Suprême, 11 février 1972, arrêt n°9/COUT/72, Bulletin de la Cour Suprême de Haute Volta, 1 er
semestre 1978, p. 35.

63
Précis De Droit Pénal Général

relativement récente, particulièrement en matière civile


(questions foncières, famille). Malgré son caractère oral,
ce droit a fait l’objet d’une application constante devant
les juridictions coutumières. Les décisions de ces
juridictions laissaient d’ailleurs apparaître le caractère
hétéroclite des coutumes au Burkina Faso. A ce sujet, la
Cour Suprême a rappelé dans une décision qu’il est
nécessaire de préciser la coutume des assesseurs :
« Attendu que l’article 85 du décret du 3 décembre 19311
stipule que les jugements des juridictions de droit local
doivent mentionner la coutume des membres du tribunal
qui sont citoyens de statut personnel particulier. … de
jurisprudence établie, l’omission de l’indication de la
coutume des notables siégeant au tribunal est considérée
comme cause de nullité à l’égard des tribunaux des 1er et
2ème degré»2. Cette décision traduit la prise en compte et
l’application des diverses coutumes devant les
juridictions de type coutumier. Si l’absence de précision
de la coutume des membres du tribunal peut entraîner la
nullité de la décision, on peut en déduire que les
assesseurs ont l’obligation de connaître ou de maîtriser la
coutume concernée par le litige3. Elle démontre
également que le caractère oral et complexe, la pluralité
1.
99. 1 Le décret du 3 décembre 1931 est relatif à l’organisation des juridictions de droit local.
100. 2 Cour Suprême, 13 février 1970, arrêt n°2/COUT/70, Bulletin de la Cour Suprême de Haute Volta, 1er
semestre 1978, p. 28.
101. 3 D’ailleurs, le décret du 3 décembre 1931 prévoit l’application de la coutume des parties en conflit et le
choix d’assesseurs représentant la coutume de celles-ci. C’est ainsi que la Cour Suprême a cassé une
décision de la juridiction de fond pour défaut de représentation de la coutume des parties :"Attendu
qu’il appert de l’expédition du jugement attaqué que les deux assesseurs ayant siégé à l’audience du 3
juillet 1973 sont de coutume mossi et gourounsi alors que les parties sont de coutumes dioula et peulh ;
qu’en statuant avec ses assesseurs dont aucun ne représente la coutume des parties, le tribunal viola les
dispositions impératives de l’article 6 du décret sus-visé et ne donna pas de base légale à sa décision" ,
voir Cour Suprême, 22 novembre 1974, arrêt n°213/COUT/74, Bulletin de la Cour Suprême de Haute
Volta, 2eème semestre 1978, p. 21

64
Précis De Droit Pénal Général

des coutumes ne constituent pas un obstacle à


l’administration d’une bonne justice et à la prise en
compte de certaines évolutions individuelles et sociales
(dans le système coutumier). C’est ce que la Cour
Suprême semble affirmer en ces termes : «…à l’opposé
de la loi, valable pour tous telle quelle tant que non
abrogée ou modifiée par un nouveau texte, la coutume
peut varier dans le temps et dans l’espace, ainsi que
selon les personnes auxquelles on la doit appliquer, qu’il
lui est loisible de différer selon qu’elle concerne des
assujettis de milieux ruraux traditionnels, encore attachés
à l’intégralité et à la rigueur des conceptions originelles,
ou des gens d’avantage affectés par les courants de la vie
moderne pour résider dans les principales localités ou
avoir embrassé une religion non animiste, que les
juridictions le doivent admettre et ne pas imposer
indifféremment à tous des solutions que certains
n’acceptent plus…que les juges du fond ignorèrent cette
évolution et, par voie de conséquence, apprécièrent de
façon erronée les règles coutumières dont ils devaient
s’inspirer »1.

Le passage du régime unique à celui de la dualité a


entraîné des effets négatifs vis-à-vis du phénomène
criminel en Afrique Noire. Au Burkina Faso comme
ailleurs en Afrique, la diversité des infractions était
limitée. Mais, les démarches civilisatrices des

1.
102. 1 Cour Suprême, 11 février 1974, arrêt n°1/COUT/73, Bulletin de la Cour Suprême de Haute Volta, 1er
semestre 1978, p. 31. Il s’agit d’une décision relative au droit de la famille (divorce, garde des enfants).

65
Précis De Droit Pénal Général

occidentaux1 et l'exploitation des ressources humaines et


naturelles entreprises par les colonisateurs2 ont conduit à
la prolifération du phénomène criminel et à la
diversification des infractions (bigamie, attentat à la
pudeur, vol à main armée,..). Une des conséquences de
cette situation est l'augmentation de la criminalité. La
criminalité déjà existante et de celle qui a été importée
ne pouvait que changer les données statistiques en
matière de délinquance. Aussi, l'intervention d'un décret
en 1946 a-t-elle permis d’aboutir à une certaine unicité.

34.Le décret n°46-877 du 30 avril 1946 édicte


l'unification du droit pénal et des juridictions répressives.
Ce décret a mis fin aux différents régimes pénaux. Il a
rendu les règles du Code pénal et du Code d'instruction
criminelle applicables aux pays colonisés sans toutefois
résoudre la question des réalités africaines vis-à-vis de
ces règles. Ces règles ont, pour la plupart, été
« transférées » telles qu'elles s'appliquaient aux français
et ne répondaient pas souvent aux données politico-
sociales des pays bénéficiaires.

1.
103. 1 A titre d’exemple on peut citer les démarches qui sous-tendaient la civilisation des noirs par le
catholicisme. A ce titre l’article 2 du Code noir de mars 1685 était clairement énoncé : « Tous les
esclaves qui seront dans nos Îles seront baptisés et instruits dans la religion catholique, apostolique et
romaine » et l’article 3 du même texte prévoyait les sanctions contre les contrevenants : « Interdisons
tout exercice public d’autre religion que la religion catholique,…Voulons que les contrevenants soient
punis comme rebelles et désobéissants à nos commandements ».
104. 2 Aux termes du préambule de l’arrêté du 17 juillet 1802 rétablissant l’esclavage, "…les colonies ne
sont autre chose que des établissements formés par les Européens, qui y ont amené des noirs comme les
seuls individus propres à l’exploitation de ces pays ; qu’entre ces deux classes fondamentales des colons
et de leurs noirs, se sont formés de sang-mêlé toujours distinctes des blancs…", in "Codes Noirs de
l’esclavage aux abolitions", op. cit., p. 73.

66
Précis De Droit Pénal Général

Le Burkina Faso à l'instar des autres pays africains


concernés par la colonisation française, va donc être
soumis pleinement au droit pénal français à partir de
1946. Néanmoins, il a été remarqué que dans les zones
rurales et particulièrement les zones forestières, il y a eu
des résistances quant à l’application de ces règles
unifiées. La plupart de ceux qui habitaient loin des
grandes zones urbaines ou dans les forêts ont continué à
observer leurs règles coutumières.
Le droit pénal burkinabé, après l'indépendance, est
longtemps resté sans subir un changement significatif.

C – Le droit pénal burkinabé après la colonisation

35. Les premières années qui ont suivi l’avènement de


l’indépendance ont surtout été marquées par une
certaine continuité quant à l’application du droit pénal
français au Burkina Faso. Les réformes en la matière
n’ont pas été immédiates. Si la procédure pénale a fait
l’objet d’une réforme globale en 1968,1 plus d’une
vingtaine d’années se sont écoulées avant qu’il n’y ait eu
la mise en place de règles pénales.

L'accession à l’indépendance africaine n'a pas été d'une


grande influence sur les droits pénaux africains. Cet
avènement n'a pas non plus suscité de grands efforts de
changement quant aux législations. Les grands principes
du droit pénal français ont été maintenus dans les
1.
105. 1 Ordonnance 68-7 du 21 février 1968 portant instituant un code de procédure pénale.

67
Précis De Droit Pénal Général

systèmes africains. Ainsi, le droit pénal burkinabé est,


essentiellement, une projection du droit pénal français,
comme atteste le contenu du nouveau code pénal
burkinabé1. Certaines règles pénales sont restées sans
modification aucune, malgré l'évolution du droit pénal
français.

Toutefois, il est important de noter que quelques


changements significatifs sont en train de s'opérer. Ainsi,
le code pénal de 1996 comporte quelques aspects qui
tiennent compte des réalités burkinabé. A titre
d'exemple, on peut citer quelques infractions telles que le
mariage forcé, les mutilations sexuelles féminines, la
castration, le vol de produits agricoles (récoltes), de bois,
le vol d’animaux (bête de somme ou de charge,…),
d’instruments agricoles, l’usage de véhicule motorisé à
l’insu du propriétaire et la dote.

36. Il convient de noter qu’avec le développement des


droits de type communautaire2 tendant à l’unification ou
à l’harmonisation juridique (régionale ou sous-régionale)
d’un certain nombre de domaine en Afrique, le
législateur burkinabé est de plus en plus contraint
d’adopter d’autres règles pénales pour étoffer celles déjà
existantes3. Le Burkina Faso est en effet membre de la
Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
1.
106. 1 Loi 43 ADP du 13 novembre 1996 portant code pénal et décret 96-451 du 18 décembre 1996.
107. 2 V. J. Y. TOE & V. ZAKANE, "Droit commercial international", Collection Précis de droit burkinabè,
2005, Université de Ouagadougou /UFR de Sciences Juridiques et Politiques, p. 16 & SS.
108. 3 Il va sans dire que cette prise en compte s’étend aux règles pénales produites au titre des conventions
internationales (cas de la convention internationale du 10 décembre 1984 contre la torture et autres
traitements cruels, inhumains ou dégradants)..

68
Précis De Droit Pénal Général

l'Ouest (CEDEAO) née du traité signé à Lagos le 28


mai 1975 et révisé à Cotonou le 24 juillet 1993. Le
droit dérivé1 de ce traité ou les conventions liées à celui-
ci (traité CEDEAO) génèrent, quelques fois, des règles
de type pénal qui sont applicables aux pays membres (à
leurs ressortissants). La convention de la CEDEAO A/P
du 1er juillet 1992 relative à l’entraide judiciaire en
matière pénale en constitue un exemple2. Cette
convention vise à faciliter la lutte contre les crimes sous
toutes ses formes et sous toutes ses dimensions dans un
élan communautaire. Au titre de la CEDEAO, on peut
également mentionner la convention d’extradition A/P
du 1er août 1994 signée à Abuja le 6 août 1994, qui dans
la même perspective que la précédente convention, vise
à favoriser la lutte contre la criminalité dans la sous-
région3.

37. Le Burkina Faso est également partie au traité de


l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine
(l'UEMOA) du 10 janvier 1994. Les organes de
l’UEMOA édictent des règlements et des directives qui
peuvent concerner le domaine pénal. C’est le cas de la
réglementation en matière douanière, qui a été adoptée
par l’UEMOA, dont des dispositions peuvent relever du
domaine pénal. Il s’agit particulièrement du règlement
1.
109. 1 Le droit dérivé est l’ensemble des actes produits par les institutions communautaires, sur la base des
traités constitutifs (le traité constitutif relève de la classe du droit originaire).
110. 2 Cette convention a été ratifiée (ratification autorisée par la loi 1-97/AN du 26 mars 1997) par le
Burkina Faso (voir décret 97-187 du 17 avril 1997, JOBF du 1er mai 1997, p. 1009).
111. 3 Le Burkina Faso a, également, ratifiée cette convention (ratification autorisée par la loi 2/97/AN du 26
mars 1997) qui a été promulguée par le décret 97-188 du 17 avril 1997. (voir JO de la CEDEAO, juillet-
août 1994, p. 11).

69
Précis De Droit Pénal Général

n°9/2001/CMUEMOA du 26 novembre 2001 portant


adoption d’un code des douanes de l’UEMOA1.

38.A cette liste de droit de type de droit communautaire


concerné par le droit pénal burkinabé, il faut ajouter le
traité relatif à la Conférence Interafricaine des Marchés
d’Assurances (CIMA)2. Les dispositions notamment des
articles 333 à 333-14 et 545 du code CIMA concernent
des sanctions pénales (voir annexes)3.

Il convient de citer aussi le traité du 15 octobre 1993


relatif à l'Organisation pour l'harmonisation en
Afrique du Droit des Affaires (OHADA) régissant le
domaine commercial. Certains Actes uniformes (droit
dérivé OHADA) contiennent des dispositions pénales
automatiquement applicables aux ressortissants des Etats
membres (dont le Burkina Faso). Les articles 886 à 905
de l’Acte Uniforme relatif aux sociétés commerciales et
au groupement d’intérêt économique traitent
d’infractions pouvant être dans le domaine des sociétés
commerciales4.

1.
112. 1 V. Bulletin Officiel de l’UEMOA n°24, 4éme trimestre 2001, p. 13 & SS.
113. 2 Par décision n° 55 MFPCI/SE/CAB/DPCI du 6 février 1995, le code CIMA est entré en vigueur sur le
territoire des Etats membres ayant déjà ratifié le traité pour compter du 15 février 1995. En ce qui
concerne les Etats n’ayant pas encore procédé à la ratification de ce traité, il entre en vigueur 15 jours
après le dépôt des instruments de ratification. (J.O.BF. spécial n° 1 du 27 juin 1995, p. 2)V. également
l’arrêté conjoint 95-110 MEFP/MD/MJ/MAT/MIC/MT du 27 septembre 1995 qui entérine cette date
d’entrée en vigueur (J.O.BF. du 26 octobre 1995, p. 2984).
114. 3 V. K. NIKIEMA, "Un nouveau droit des accidents de la circulation au Burkina Faso", RBD, n°27,
janvier 1995, p. 39 & SS.
115. 4 V. JURISCOPE, "OHADA Traité et actes uniformes commentés et annotés", 2 ème édition, 2002, p. 536
& SS. ; F. ANOUKAHA, A. CISSE, N. DIOUF, J. N. TOUKAM, P-G. POUGOUE & M. SAMB,
"OHADA Sociétés commerciales et G.I.E", Edit. Bruylant, 2002, p. 159 & SS.

70
Précis De Droit Pénal Général

Enfin, dans le cadre des conventions, certaines règles


pénales burkinabé sont issues des conventions
bilatérales. C’est l’exemple de la convention bilatérale
du 25 juin 2004 signée à Ouagadougou par le Burkina et
le mali pour lutter contre le trafic des enfants (elle est
immédiatement entrée en vigueur).

Pour s’en tenir cependant au droit pénal général, on en


examinera deux pièces essentielles : l'infraction et la
responsabilité pénale (Partie I) d’une part la sanction
(Partie II) d’autre part.

71
Précis De Droit Pénal Général

PARTIE I – L'INFRACTION
ET LA RESPONSABILITÉ PÉNALE

72
Précis De Droit Pénal Général

Le droit pénal concerne à la fois des rapports entre le


citoyen et l’Etat et des individus entre eux. Aussi, le
droit pénal joue-t-il un rôle non négligeable dans le
fonctionnement général d’un système juridique. C’est ce
qui a amené certains auteurs à affirmer que « le droit
criminel se présente sous les traits plus singuliers d’un
droit sanctionnateur qui prête son appui à toutes les
disciplines du droit public et du droit privé »1. Il existe,
en effet, des dispositions pénales notamment dans les
législations fiscales, économiques, commerciales,
sociales, celles relatives à la santé et à l’environnement.
Ces dispositions favorisent le respect de ces différentes
règles. Mais, dans son rôle de sanctionnateur, le droit
pénal « produit » des règles dont certaines se traduisent
par la prescription de conduite à avoir dans telles ou
telles situations. Le non respect du comportement
prescrit donne lieu à une infraction dont l’existence
répond à des règles précises et incontournables.

L'infraction renvoie juridiquement à l'idée d'acte


contraire à la loi et le responsable à celle de l'auteur par
rapport à cet acte. La responsabilité pénale est la
conséquence du comportement violant les valeurs
protégées par la société et plus particulièrement par la
loi. Cette loi se présente sous plusieurs formes et
constituent des règles de droit pénal.
La constitution de l’infraction (TITRE II) et la sanction
de son auteur sont régies par des principes d’ordre pénal
1.
116. 1 V. R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", tome 1, 7 ème édition, op. cit., p. 216.

73
Précis De Droit Pénal Général

(TITRE I). Ces principes peuvent être considérés


comme l’essence du droit pénal.

74
Précis De Droit Pénal Général

TITRE I– LES PRINCIPES DU DROIT PÉNAL

75
Précis De Droit Pénal Général

Plusieurs principes sous-tendent le droit pénal. La


sanction de l'auteur d'une infraction suppose que ce
comportement est incriminé et puni par la loi d'où la
légalité pénale. Il va sans dire que l’application de cette
loi (votée par le parlement ou décidée par l’autorité
compétente) à l’individu est subordonnée à son entrée en
vigueur (promulgation, publication). Des conditions de
constitution de l’infraction (CHAPITRE II) doivent être
réunies pour prétendre à la sanction du responsable de
cette entorse à la loi. Le principe de la légalité
(CHAPITRE I) qui suppose une conformité aux règles
de droit afférentes (autorité compétente, procédures
prescrites) est classé au premier rang des conditions
requises. Il s’ensuit que l’application de toute loi
nécessite l’intervention de plusieurs étapes : la
détermination des dispositions applicables, leur
interprétation et la vérification de leur applicabilité à la
situation incriminée.

76
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE I – LA LÉGALITÉ PÉNALE

39. La question de la légalité n’est pas spécifique au droit


pénal. Elle se pose dans la plupart des démembrements
du droit. Toutefois, elle est d’une importance particulière
en matière pénale dans la mesure où il s’agit d’une
branche du droit dont l’application peut heurter des
libertés individuelles ou des droits fondamentaux
garantis. C’est pourquoi, certains auteurs estiment que :
« il ne suffit pas d’enfermer le droit pénal dans un
"corset de légalité". Il faut encore veiller à ce que le
législateur n’abuse pas de son pouvoir répressif au-delà
de la finalité que lui assigne le contrat social. Le droit de
punir n’est que le droit de défense cédé par chaque
individu à l’Etat »1. L’importance de cette légalité est
telle qu’elle est consacrée par des textes nationaux et
internationaux. A ce titre, CHAPU n’affirme-t-il pas que
« la légalité est faite d’un ensemble hiérarchisé et
complexe de normes constitutionnelles, législatives,
jurisprudentielles, réglementaires, auxquelles s’ajoutent
diverses normes procédant de conventions
internationales »2? Cette légalité est énoncée par la
Déclaration universelle des droits de l’homme3, la Charte

1.
117. 1 R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", tome 1, 7 ème édition, op. cit., n° 61.
118. 2 V. R. CHAPUS, "Droit administratif général", tome 1, 12ème édition, Montchrestien, 1998, n° 1200.
119. 3 L’articles 11 §2 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 prescrit cette légalité en
ces termes : « Nul ne sera condamné pour des actions ou omissions qui, au moment où elles ont été
commises, ne constituaient pas un acte délictueux d’après le droit national ou international. De même, il
ne sera infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l’acte délictueux a
été commis ».

77
Précis De Droit Pénal Général

africaine des droits de l’homme et des peuples1 et la


Constitution2. La protection de société, la sanction de
l’individu fautif et sa réinsertion sont essentiellement
garanties par le principe de la légalité.

La légalité pénale renvoie à la question du principe de la


légalité des infractions et des peines (SECTION II).
Cette légalité s’étend aux règles de procédure. Il en
ressort que la légitimité des infractions et des peines a
pour origine ou pour source les textes légaux. Ce qui
exclut, en principe, la coutume définie comme une
pratique érigée en règle non écrite en raison de l’usage.
L’élément de l’infraction est donc fondé sur ces textes.
Quelles sont donc les sources du droit pénal (SECTION
I)?

SECTION I – LES SOURCES DU DROIT PÉNAL

Parmi les sources du droit pénal, on peut citer les


principes généraux émanant du Conseil constitutionnel,
ceux de la Cour de cassation et ceux de la Chambre
criminelle (jurisprudence). Cependant, on peut
s’interroger sur la possibilité d’ajouter la coutume à cette
1.
120. 1 Aux termes de l’article 7 §2 de la Charte Africaine des droits de l’Homme et des peuples (adoptée en
juin 1981 Nairobi), ratifiée par le Burkina Faso par le décret 84-253 du juillet 1984, « Nul ne peut être
condamné pour une action ou omission qui ne constituait pas, au moment où elle a eu lieu, une
infraction légalement punissable. Aucune peine ne peut être infligée si elle n’a pas été prévue au
moment où l’infraction a été commise. La peine est personnelle et ne peut frapper que le délinquant»
121. 2 Aux termes de l’article 3 de la Constitution burkinabé, « Nul ne peut être privé de sa liberté s’il n’est
poursuivi pour des faits prévus et punis par la loi. Nul ne peut être arrêté, gardé ou exilé qu’en vertu de
la loi». En outre, l’article 5 de cette constitution prescrit que, « Tout ce qui n’est pas défendu par la loi
ne peut être empêché et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas ».

78
Précis De Droit Pénal Général

liste. La coutume1, définie comme une pratique


collective devenue une règle non écrite, n’est pas
généralement citée parmi les sources car elle occupe une
place marginale en droit pénal (contrairement en droit
civil). Cette marginalité est percutante en droit pénal de
fond dans la mesure où celle-ci s’accommode peu avec
le principe de légalité. Toutefois, il arrive que le juge
fasse recours à la coutume pour définir un concept ou
interpréter un texte dans le silence de la loi2. Ainsi, la
jurisprudence française a dû se référer aux « usages
loyaux et constants du commerce », dans une affaire
pour laquelle un commerçant a été poursuivi pour
fraude3. Elle s’est également fondée sur la coutume pour
admettre les corrections (corporelles) légères infligées,
par les parents, à leurs enfants indisciplinés. Elle a
estimé que les violences légères de cette nature
constituent une coutume faisant partie des règles de
l’éducation4. Dans ce dernier cas, cette coutume (« droit
de correction » dans l’éducation) est de moins en moins
admise par les juges5. En revanche, malgré la protection
juridique des animaux contre les traitements de cruauté,
(en droit français) les combats et les courses d’animaux
(taureaux, de coqs…) ont été également admis sur la
base de la coutume6.

1.
122. 1 Selon J-L. AUBERT, la coutume est une "pratique de la vie juridique qui présente un caractère
habituel et qui, de ce fait, tend à se poser en règle de droit. Le mot coutume a une connotation plus
directement juridique et désigne ordinairement une règle de droit « d’origine non étatique »" (voir : J-L.
AUBERT "Introduction au droit", Edit. Armand Colin, 9ème édition, 2002, n° 116.
123. 2 V. Nîmes (France), 28 mai 1966, JCP, 1967, II, 15311 ; Cass. crim. fr. 4 février 1970, 289.
124. 3 Cass crim. fr., 5 octobre 1967, Bull. Crim. 1967, n° 42.
125. 4 Cass crim. fr., 21 février 1990, Droit pénal 1990, n° 216.
126. 5 Cass crim. fr., 31 janvier 1995, RSC, 1995, p. 814.
127. 6 Cass crim. fr. 8 juin 1994, Bull. Crim. 1994, n° 225.

79
Précis De Droit Pénal Général

En matière de procédure pénale, la coutume a connu


un usage sous l’empire du code d’instruction criminelle.
Il s’agit en l’occurrence de la pratique de l’enquête
officieuse face à l’insuffisance ou à l’absence de texte en
la matière. La correctionnalisation qui permet aux
tribunaux correctionnels de se saisir d’une infraction
qualifiée crime (qui est en principe de la compétence des
juridictions criminelles) est une pratique coutumière des
juges.

A côté de ces sources, il existe des sources


fondamentales. Les lois (§1), les actes de l'exécutif (§2),
les traités internationaux (§3), constituent les sources
essentielles du droit pénal. Ces sources représentent du
droit écrit. Il va sans dire que la Constitution peut être
considérée comme la « mère » des sources dans la
mesure où c’est elle qui détermine, en général, les
domaines des lois et règlements. La Constitution édicte
notamment les matières réservées exclusivement à la loi
ou au règlement et celles qui ne le sont pas. En outre, les
textes pénaux doivent être conformes au bloc
constitutionnel (la constitution proprement dite, son
préambule, les déclarations qu’elle prend en compte et
les principes fondamentaux légalement reconnus). Le
droit pénal ne semble pas accordé une place
prépondérante à la jurisprudence en ce qui concerne ses
sources (§4).

80
Précis De Droit Pénal Général

§1- LES LOIS (FORMELLES)

40.La loi au sens strict est définie par Maurice Duverger


comme " tout acte accompli par le parlement dans les
formes législatives, quel que soit son contenu". C’est une
disposition générale et abstraite émanant du parlement.
Les lois au sens strict (formelles) constituent la
principale base du droit pénal. Il s’agit d’une « norme
générale et impersonnelle adoptée, en démocratie par le
peuple ou par ses représentants librement et
régulièrement élus »1. Dans le cas du Burkina, on peut
cité, par exemple, les lois formelles, contenues dans code
pénal de 1996, composées de dispositions générales et de
dispositions concernant les délits et les crimes. La loi
pénale a la particularité d’être autonome dans la mesure
où c’est elle qui définit les actes à sanctionner, détermine
les sanctions et les principes. Elle produit tous les outils
juridiques nécessaires à son application.

Aux termes de l'article 101 de la Constitution burkinabé,


la loi fixe les règles relatives à la détermination des
crimes, des délits, des peines applicables (incriminations
et sanctions)2, de la procédure pénale et de l'amnistie.
Les lois formelles ne peuvent pas être en principe
remises en cause devant le juge pénal. Leur conformité
par rapport à la Constitution est contrôlée par le Conseil
constitutionnel (art.152 de la Constitution burkinabé). La
1.
128. 1 V. M. A. COHENDET, "Droit constitutionnel", Montchrestien, 2 ème édition, 2002, n° 43-1.
129. 2 V. BÜCK, "Constitution et limite au pouvoir d’incrimination", RSC 2003, p. 616.

81
Précis De Droit Pénal Général

loi, une fois votée et promulguée, s’impose à tous et


reste une norme supérieure au règlement. Dans ces
conditions, elle n’est susceptible, de modification,
d’abrogation ou d’annulation que par l’institution qui l’a
créée (le parlement). Il n’est donc pas possible de
soulever une exception d’illégalité ou
d’inconstitutionnalité devant le juge répressif. On
distingue plusieurs catégories de lois. Il s’agit
principalement de :
- - la loi constitutionnelle a une valeur
constitutionnelle et est classée hiérarchiquement
au dessus des autres lois ;
- - la loi référendaire, adoptée par le peuple par voie
de référendum, qui vise l’adoption d’une
Constitution ou la révision de celle-ci : elle a une
valeur de loi ;
- - la loi organique visant l’organisation ou le
fonctionnement des institutions (la procédure
d’adoption est différente de celle de la loi
ordinaire) complète la Constitution et a une
valeur supra-législative ;
- - La lois spéciale ou particulière régit des
situations particulières (ex : des catégories de
personnes notamment les mineurs les militaires,
une province) ;
- - la loi ordinaire régit les situations habituelles de
la vie nationale, elle vise le droit commun ; il
s’agit notamment de la loi de finances (relative
au budget annuel de l’Etat), les lois programmes

82
Précis De Droit Pénal Général

(fixent les objectifs de l’action économique et


sociale de l’état) et les lois d’orientation (tracent
les grands axes dans un domaine donné, elles
sont de caractère prévisionnel).
- - la loi d’exception permet de régler une situation
temporaire en période de trouble.

Le contenu de la loi en tant que règle de droit pénal peut


se présenter sous des formes diverses. Dans ce sens on
peut distinguer : les lois d’incrimination, les lois
directives, les lois interprétatives, les lois de conflits, les
lois spéciales et les lois d’exception.
- Les lois d’incrimination sont celles qui prescrivent
les actes permis ou interdits. Il s’agit de celles qui
contiennent l’obligation de faire ou de ne pas faire et
la sanction accompagnant ce commandement.
- Les lois interprétatives précisent ou déterminent la
compréhension d’une règle du droit pénal. Elles
orientent vers le sens à donner à la règle de droit pénal
(ex : définition du mariage forcé, de l’effraction).
- les lois directives formulent les principes généraux
qui surplombent ou coiffent le droit pénal (la non
rétroactivité des lois, la légalité des sanctions)
- Les lois d’exécution s’intéressent aux dates d’entrée
en vigueur des règles pénales.
- Les lois de conflits sont destinées à trancher les
conflits de règles dans le temps et dans l’espace
(conflits de règles applicables dans des cas
d’infraction de type transcriminel, etc.).

83
Précis De Droit Pénal Général

La loi criminelle est soumise aux mêmes principes et


règles que les lois d’autre nature : elle répond aux
mêmes règles de promulgation, de publication,
d’abrogation. Pour s’imposer à tous les citoyens, la loi
criminelle doit être régulièrement promulguée et publiée
en principe par la voie du journal officiel. Généralement,
l’application des lois criminelles est subordonnée à la
prise d’un décret. Leur abrogation respecte le
parallélisme des formes : le pouvoir législatif reste
compétent pour cette opération.

Le contrôle de constitutionalité des lois et des


ordonnances est assuré par le juge constitutionnel. Cette
compétence est prévue par l’article 152 de la
Constitution : « Le Conseil constitutionnel est
l’institution compétente en matière constitutionnelle et
électorale. Il est chargé de statuer sur la
constitutionnalité des lois, des ordonnances ainsi que la
conformité des traités et accords internationaux avec la
Constitution. Il interprète les dispositions de la
Constitution. Il contrôle la régularité, la transparence et
la sincérité du référendum, des élections présidentielles,
législatives et est juge du contentieux électoral… »
Une autre source du droit pénal est constituée par les
actes du pouvoir exécutif

§2 – LES ACTES DU POUVOIR EXÉCUTIF

84
Précis De Droit Pénal Général

41.Ce sont des actes qui émanent du pouvoir exécutif. Il


s’agit, généralement, des règlements tels les décrets1 et
les arrêtés (ministériels, préfectoraux, municipaux…).
Les auteurs de ces textes n’ont pas forcement la même
qualité. On peut distinguer deux catégories de
règlements : les règlements d’application et les
règlements autonomes. La première catégorie précise une
loi ou un règlement (modalités d’application ou conditions de mise en oeuvre, détails
techniques). Dans, ce cas c’est en général le législateur qui renvoie au pouvoir exécutif pour
ces précisions. Les règlements autonomes sont ceux pris en application de l’article 108 de la
Constitution.

Sont également considérés comme des actes du pouvoir exécutif les ordonnances prises en
période non stable ou en situation de régime exceptionnelle (le pouvoir exécutif et le pouvoir
législatif sont confondus). Les ordonnances prises par le Président de la République en vertu de
l’article 59 de la Constitution sont équivalentes à une loi et échappent, en conséquence, au
contrôle des juridictions. S’agissant des ordonnances prises par le gouvernement
conformément à une autorisation du parlement, (art. 107 de la Constitution), elles ont valeur de
loi quand elles sont par la suite ratifiées par le parlement conformément aux formes et délais
prévus. En revanche, non ratifiées, les dispositions de l’ordonnance qui sont du domaine
réglementaire ont la valeur d’un règlement (107 al.4 de la Constitution) et sont susceptibles de
censure par le conseil d’Etat (pour excès de pouvoir).

Les décrets peuvent émanés soit du président de la République soit du conseil des ministres,
soit du Premier ministre. Les arrêtés relèvent notamment de la compétence des ministres, des
gouverneurs, des présidents des conseils régionaux, des hauts commissaires, des préfets, des
maires, des autorités administratives indépendantes, des présidents des établissements publics
(pour l’organisation interne : cas de l’université ). En dehors des arrêtés ministériels, les autres
concernent généralement la police générale (applicable à la localité, etc.). Les arrêtés du maire
se rapportent notamment au maintien de l’ordre, à la sécurité et à la salubrité publique.

Les règlements portent sur des prescriptions générales et impersonnelles (différence avec les
actes administratifs non réglementaires) et constituent une variante d'actes administratifs.
S’agissant des infractions, certains règlements fixent, en même temps, les sanctions pénales
idoines. La légalité des règlements peut, en général, être contrôlé par le juge administratif.
Toutefois, un contrôle par voie d’exception est possible devant le juge répressif. Effectivement,
l’individu poursuivi peut soulever « l’exception d’illégalité » devant le juge répressif afin qu’il
apprécie la régularité du règlement, sans qu’il n’ait à surseoir à statuer. Ces actes sont
également une source du droit pénal. La loi pénale peut, dans certaines conditions, renvoyer
aux règlements (adoucissement par exemple des conditions d'exécution d'une peine).

1.
130. 1 Voir, en ce qui concerne les ordonnances et décrets, les articles 99 & 100 de la Constitution.

85
Précis De Droit Pénal Général

Les contraventions sont définies et sanctionnées, au Burkina Faso, par voie réglementaire et
particulièrement par un décret1. Les actes réglementaires sont inférieurs aux lois. Ces actes, à
l'instar des lois, sont également inférieurs aux traités et accords internationaux sous certaines
conditions. Les règlements doivent être conformes au bloc constitutionnel, aux lois et aux
conventions internationales ratifiées. Ce n’est qu’à cette condition qu’ils sont valables sinon ils
sont illégaux. Les règlements entre eux-mêmes doivent obéir à une conformité fondée sur leur
hiérarchie. Un arrêté ministériel doit être conforme à un décret par exemple. Il va sans dire
l’autorité de cette catégorie de textes est moindre par comparaison à celle de la loi.

Le juge répressif peut contrôler la constitutionnalité et la légalité de certains règlements 2. En


effet, aux termes de l’article 384 du CPP, la chambre correctionnelle « saisie de l’action
publique est compétente pour statuer sur toutes exceptions proposées par le prévenu pour sa
défense, à moins que la loi n’en dispose autrement ou que le prévenu n’excipe d’un droit réel
immobilier ».

§3 - LES TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX

42. Régionalisation, internationalisation, mondialisation, globalisation, tels sont les mots


d’actualité et d’actualisation du millénaire, traduisant une volonté de plus en plus accrue de
rapprochement, de collaboration, de complicité des peuples à travers les nations par des actes et
des actions divers. Dans le domaine juridique, les expressions telles que « droit
communautaire », « droit uniforme », « droit unitaire », « pénalisation internationale »,
« uniformisation des droits » traduisent cette volonté. Les traités ou accords constituent les
moyens de matérialisation et de pérennisation de celle-ci. La trans-criminalité ou criminalité
transnationale3 (ou transfrontalière), phénomène planétaire, illustre la nécessité d’un droit pénal
de caractère international (communautaire, bilatéral, etc.) dans une perspective de lutte
efficiente contre ce phénomène. Le Burkina Faso, dans le cadre de cette lutte, a souscrit, à un
nombre non négligeable d’instruments juridiques qui se concrétisent par des traités ou des
accords internationaux. Cette souscription concerne aussi bien certaines conventions des
Nations Unies, des conventions de type communautaire ou régional et des accords bilatéraux
ou multilatéraux4. Les trafics d’armes et de stupéfiants, le proxénétisme, le trafic ou la traite
d’enfants, de femmes, de migrants, la corruption, le blanchiment de capitaux, la participation à
un groupe criminel organisé et le terrorisme constituent des exemples de crimes à caractère
transnational qui font l’objet de conventions internationales auxquelles le Burkina Faso a
souscrit. Ce qui signifie que les traités et accords internationaux s’illustrent comme des sources
du droit pénal, en général, et du droit pénal burkinabé, en particulier.

43. Le traité ou l’accord international vise ici toute convention internationale. La convention
internationale se définit comme tout accord conclu entre deux ou plusieurs sujets de droit
1.
131. 1 V décret 97-84 du 28 février 1997, portant définition et sanction des contraventions, J.O. du 27 mars
1997, P. 721 et décret 2004-418 du 12 août 2004 relatif à la répression de contravention en matière de
circulation routière in JOBF du 11 mars 2004, p. 376.
132. 2 V. Tribunal de conflit (TC), 5 juillet 1951, Avranches et Desmarets, S., 1952, p. 3, note J-M. AUBY ;
JCP 1951, II, 6623 ; Paris (France), 17 décembre 1996, Droit Pénal 1997, commentaire VERON, n°46.
133. 3 Le crime transnational étant entendu comme une infraction présentant « un élément d’extranéité » ou
une infraction dont la commission implique plusieurs Etat.
134. 4 V. TGI Ouagadougou, 13 juin 2001, RBD, 2002, n°41, 1er semestre, p. 61 & SS. Cette affaire relative
à l’exequatur d’une sentence arbitrale pose aussi la question d’application des conventions
internationales (multilatérales, régionales, bilatérales…)

86
Précis De Droit Pénal Général

international (notamment entre des Etats) et ayant pour conséquence la naissance


d’engagements juridiques à la charge des parties (de ces sujets). Elle a, en général, pour
objectif la mise en place d’un ensemble de règles de droit. Les traités et accords internationaux
ont une autorité supérieure aux normes légales internes. Ils sont assimilés dans leur application
à une loi. Toutefois, dans les droits internes, cette application est souvent soumise à des règles
internes. L'article 151 de la Constitution burkinabé, par exemple, édicte la supériorité de ceux-
ci dès leur publication à condition que l'autre partie applique l'accord ou le traité. La loi
burkinabé rappelle d’ailleurs cette supériorité par l’intersession de l’article 5 du CP qui prescrit
que « Les traités, accords ou conventions dûment ratifiés et publiés s’imposent aux dispositions
pénales internes ». La ratification (approbation des règles issues d’un accord international)1 est
une des conditions nécessaires à la validité du traité vis-à-vis des différentes Parties à la
convention (sur le plan interne et sur le plan international). La publication est synonyme de
l’intégration du traité dans l’ordonnancement pénal interne et entraîne son application dans
l’ordre interne2.

Lorsqu'un traité ou un accord de type international renvoie à la loi interne pour les conditions
d'incrimination ou pour la fixation des peines, son application, concernant ces points ne peut
intervenir qu'après la promulgation des règles du droit pénal interne. Mais, ces règles peuvent
déjà exister dans le système pénal interne et s'appliquer tant qu'elles ne sont pas en
contradiction avec le traité ou tant que leur application n'est pas expressément écartée par
celui-ci. Le traité du 17 octobre 1993 relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique
(OHADA)3, en particulier son article 5, peut illustrer cette situation4. Dans le cas du traité
OHADA, les règles édictées notamment les « Actes uniformes»5, par celui-ci sont
d’applicabilité directe (self-executing), ce qui signifie que le traité génère directement des
droits et obligations à l’égard des citoyens des Etats parties. Dans ce sens, la Cour d’appel de
Cotonou a rappelé que, « aux termes des dispositions de l’article 10 du traité du 17 octobre
1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, "les Actes uniformes sont
directement applicables et obligatoires dans les Etats Parties nonobstant toute disposition
contraire de droit interne, antérieure ou postérieure" ;…l’article 9 du même traité dispose: "les
Actes uniformes entrent en vigueur 90 jours après leur adoption…Ils sont opposables 30 jours
francs après leur publication au journal officiel de l’OHADA. Ils sont également publiés au
journal officiel des Etats Parties ou par tout autre moyen approprié"; il en résulte que …les
Actes uniformes sont applicables, obligatoires et opposables dans tous les Etats Parties »6.

1.
135. 1 La ratification exprime l’engagement ferme, définitif de l’Etat à se soumettre aux règles établies (par
le droit conventionnel).
136. 2 B. AUBERT, "Application du droit communautaire par les juridictions internes", RSC 2004, Chr., p.
464 & SS.
137. 3 Le traité OHADA, signé à Port Louis le 17 octobre 1993 et entré en vigueur en 1995, a été ratifié par
plus d’une douzaine d’Etats africains dont le Burkina Faso. Son objet est l’harmonisation du droit des
affaires dans les Etats Parties (art. 1er du traité). Cette harmonisation passe par l’adoption de règles
communes en adéquation avec les économies des Hautes Parties.
4
V. E.L. KANGAMBEGA, "Observations sur les aspects pénaux de l'OHADA", in Penant n°834,
septembre –décembre 2000, p. 304 & SS.
138. 5 Aux termes de l’article 5 du traité OHADA, "Les actes pris pour l’adoption des règles communes
prévues à l’article premier du présent traité sont qualifiés « Actes uniformes »
139. Les Actes uniformes peuvent inclure des dispositions d’incrimination pénale. Les Etats Parties
s’engagent à déterminer les sanctions pénales encourues".
140. 6 Cour d’Appel Cotonou, 27 janvier 2000, arrêt n°21/2000, in "OHADA Jurisprudences nationales",
n°1, décembre 2004, p. 6.

87
Précis De Droit Pénal Général

44. Le droit "communautaire" OHADA est une des sources internationales (externes) du droit
pénal burkinabé1. En effet, le droit OHADA contient des aspects pénaux. En rappel, l’alinéa 2
de l’article 5 du traité OHADA, prescrit : « les Actes uniformes peuvent inclure des
dispositions d’incrimination pénale. Les Etats Parties s’engagent à déterminer les sanctions
pénales encourues ». Ces prescriptions, en matière pénale, engendre un problème non moins
important: celui de l’inégalité des ressortissants des Etats membres de l’OHADA devant la loi
pénale. Le renvoi aux Etats2 pour la fixation des sanctions peut entraîner des disparités de
sanctions pénales engendrant des "paradis pénaux". Cette compétence revenant aux Etats, pour
une même infraction, certains pays vont prévoir des sanctions pénales sévères (peines, mesures
de sûreté) tandis que d’autres vont fixer un régime de sanctions moins draconien ou doux. Il en
ressort que l’uniformisation de la législation pénale n’est pas parfaite. Conformément aux
prescriptions de l’article 5 du traité, certains Actes uniformes contiennent des incriminations
qui renvoient implicitement aux droits nationaux pour la détermination de la sanction. C’est
l’exemple des articles 897 à 905 de l’Acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et au
groupement d’intérêt économique3. Ainsi aux termes de l’article 899 dudit Acte, « encourt une
sanction pénale, tout commissaires aux comptes qui, soit en son nom personnel, soit à titre
d’associé d’une société de commissaires aux comptes, aura sciemment donné ou confirmé des
informations mensongères sur la situation de la société ou qui n’aura pas revélé au ministère
public les faits délictueux dont il aura eu connaissance ».

D’une manière générale, le Burkina Faso a souscrit à la plupart des conventions internationales
de lutte contre la criminalité transnationale. Concernant l’ONU, le Burkina a, par exemple,
ratifié, la convention adoptée le 15 novembre 2000, entrée en vigueur le 29 septembre 2003 et
destinée à la lutte contre la criminalité transnationale organisée4. Cette convention est surtout
axée sur la coopération judiciaire, la lutte contre le terrorisme, le blanchiment des produits du
crime et la corruption.

Sur le plan régional, on peut citer la convention A/P1/7/92, signée à Dakar le 1er juillet 1992,
de la Communauté Économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dont le Burkina
Faso est membre5. Cette convention de Dakar constitue un cadre juridique de coopération ou
d’entraide judiciaire pour le renforcement et la facilitation de la lutte contre les infractions
pénales. Elle offre aux Etats de la communauté un support juridique opérationnel de recherches
des auteurs d’infraction et facilite leur poursuite pénale à travers l’espace communautaire.
Ayant fait l’objet d’une promulgation, elle est rendue applicable sur le territoire burkinabé.

1.
141. 1V. G. KENFACK DOUAJNI, "L’abandon de souveraineté dans le traité OHADA", Penant, 1999, p.
125 & SS.
142. 2 Il existe une Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA) qui fait office de cour cassation pour les
litiges relatifs à l’application du droit OHADA mais en matière pénale une exception est prévue :
"Saisie par la voie du recours en cassation, la cour se prononce sur les décisions rendues par les
juridictions d’appel des Etats Parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à
l’application des Actes uniformes et des règlements prévus au présent Traité à l’exception des décisions
appliquant des sanctions pénales" (art. 14, al.3 du traité OHADA).
143. 3 Voir annexes
144. 4 La ratification de cette convention s’est faite par le décret 2002-61 du 19 juin février 2002, JOBF du
28 février 2002 p. 307.
145. 5 Le Burkina Faso après ratification, l’a promulguée par le décret 97-187 du 17 avril 1997, JOBF du 1er
mai 1997, p. 1009.

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Précis De Droit Pénal Général

Enfin relativement aux accords bilatéraux ou multilatéraux, l’accord conclu entre le Mali et le
Burkina Faso le 25 juin 2004 à Ouagadougou peut être cité. Cet accord bilatéral est destiné à
renforcer la répression du trafic transfrontalier d’enfants.

§4 – LA JURISPRUDENCE : SOURCE DE DROIT PÉNAL OU NON ?

45. Le juge civil (en droit civil) peut jouer le rôle de créateur de normes à la différence du
juge pénal qui, en principe, n’est pas admis à avoir ces compétences. Cependant, il n’est pas
exclu que la mise en œuvre d'une loi pénale puisse prendre en compte une jurisprudence. Dans
certains cas, l'imprécision de la loi pénale peut amener le juge pénal à apprécier ou à préciser
certains points. Le juge répressif, dans cette hypothèse, dégage les éléments constitutifs de
l’infraction ou précise les termes. C’est l’exemple de l’infraction de mariage forcé (art. 376 du
CP). Le législateur n’a pas précisé le sens du terme "mariage". Si on se réfère au Code des
Personnes et de la famille, le sens donné au terme mariage (célébré par l’officier de l’état civil,
le mariage est une cérémonie au cours de laquelle un homme et une femme s'unissent dans le
but de fonder une famille)1 ne correspond pas à l’objectif visé par le législateur pénal 2. En
conséquence, cette définition (civile) ne permet pas d’atteindre le but fixé. En effet,
l’incrimination du mariage forcé vise à éviter certains mariages de type coutumier tendant à
obliger particulièrement les veuves ou les filles (mineures surtout) à épouser une personne (un
homme) du choix de leurs parents ou de leur famille au sens large (oncle, grand-père, grand-
mère, cousin…).

Or, lorsque le juge répressif se réfère à la définition (d’ordre civil) du mariage, il est
impossible de considérer le mariage coutumier et le mariage religieux comme des mariages
légaux. Légalement, ces catégories de mariage sont considérées comme inexistantes. En effet
aux termes de l’article 233 du Code des personnes et de la famille, « aucun effet juridique
n’est attaché aux formes d’unions autres que celles prévues par le présent code notamment les
mariages coutumiers et les mariages religieux ». Pourtant, l’infraction de mariage forcé ne
peut être constituée dans une situation où le mariage n’existe pas. C’est ainsi que dans une
décision, le juge a conclu à l’inexistence d’un mariage forcé car un des éléments constitutifs
de l’infraction faisait défaut : il fallait qu’il ait eu un mariage légal. En l’espèce, il y a eu un
mariage coutumier, lequel mariage est non valide légalement. Or, en réalité, il y a eu un
mariage forcé.

1.
146. 1 Article 234 Code des Personnes et de la Famille : " Le mariage résulte de la volonté libre et consciente
de l’homme et de la femme, de se prendre pour époux. En conséquence sont interdits :
les mariages forcés, particulièrement les mariages imposés par les familles et ceux résultant des règles
coutumières qui font obligation au conjoint survivant d’épouser l’un des parents du défunt …"; article 237 :
« le mariage est la célébration d’une union entre un homme et une femme, régie par les dispositions du
présent code" ; art. 240 du Code des Personnes et de la Famille : "Il n’y a point de mariage sans le
consentement des futurs époux exprimé au moment de la célébration du mariage" ; article 277 du même
code : "Nul ne peut réclamer les effets civils du mariage s’il ne représente l’acte de célébration ou à défaut
un jugement supplétif établi conformément aux dispositions relatives à l’état civil "
147. 2 Article 376 du CP : "Est puni d’un emprisonnement de six mois à deux ans, quiconque contrait une
personne au mariage.
La peine est un emprisonnement de un à trois ans si la victime est mineure.
Le maximum de la peine est encouru si la victime est une fille mineure de moins de treize ans.
Quiconque contracte ou favorise un mariage dans de telles conditions est considéré comme complice".

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Précis De Droit Pénal Général

Le juge, en se référant aux textes, a jugé que, « pour que l’infraction de mariage forcé soit
constituée, il faut établir, non seulement qu’il y a eu une contrainte exercée par une personne
sur une autre, mais aussi que cette contrainte visait le mariage ». Le mariage est la célébration
d’une union entre un homme et une femme…l’article 233 du même code précise …qu’aucun
effet juridique n’est attaché aux formes d’unions autres…en l’espèce l’union entre K.Y. et
Z.A. a été faite conformément à la coutume et non suivant les règles du code des
personnes et de la famille…il y a lieu de l’exclure du champ de définition légale du
mariage…Relaxe K.Y. et Z.L. pour infraction non constituée1. Il est préférable, dans un tel
cas, que le juge répressif évite de se réfère à la définition civile du mariage (celle donnée par
le Code des personnes et de la famille). Il doit plutôt donner une définition autonome au terme
"mariage" (le droit pénal jouissant d’une certaine autonomie, il y a peu de difficultés à ce
niveau). La définition du mariage, sur le plan pénal, devrait se faire au sens large. Cela permet
de prendre en compte le mariage religieux ou coutumier et de considérer le mariage comme
toute forme d’union entre un homme et une femme en vue de former une famille ou de fonder
un foyer et célébrée légalement ou de façon religieuse (chrétienne, musulmane,
bouddhique…) ou animiste (coutumière ou traditionnelle, etc.). Il pourrait aussi être défini par
énumération en ces termes : "le terme mariage, au sens des présentes dispositions, vise le
mariage légal et toutes les formes de mariage non légal (fondé sur une religion, une coutume
ou une tradition)".

La quasi-absence de la jurisprudence parmi les sources du droit pénal peut s'expliquer par le
fait que les infractions et les peines sont soumises au principe de la légalité.

SECTION II – LES IMPLICATIONS DU PRINCIPE DE LA LÉGALITÉ

Il n'y a ni infraction ni sanction pénales sans texte légal. C’est ce qu’énonce l’adage « nullum
crimen sine lege, nulla poena sine lege ». Cela sous-entend que personne ne peut être
contrainte à accomplir un acte ou à avoir un comportement non prévu par la loi. Des lois et des
règlements doivent en conséquence prévoir les infractions et les sanctions applicables. Le
comportement prohibé c’est-à-dire l’infraction (§1) doit donc être explicitement prédéterminé
par la loi. Le citoyen doit donc être « averti » légalement. Un tel principe n’est pas sans
implications (§2).

§1 - LA NOTION D'INFRACTION

46. D'un point de vue sociologique, commettre une infraction, c'est commettre un acte qui
reste contraire à l'ordre social du groupe auquel appartient son auteur.
D'un point de vue juridique, une infraction est un acte en contradiction avec la loi. Elle porte
atteinte à l'ordre social. C'est un comportement ou un fait prévu et puni par la loi. Pour certains
auteurs, l’infraction est « le fait prévu et puni par la loi pénale à raison du trouble qu’il cause à
l’ordre social »2. D’autres auteurs notamment, Jean-Claude SOYER définit l’infraction comme
« …un fait puni par la loi et pouvant être imputé (c’est-à-dire reproché) à son auteur… »3.
1.
148. 1 TGI de Kaya, 25 janvier 2001, RBD, n° 42, 2002, 2éme semestre, p. 147 & SS.
149. 2 V. Gaston STEFANI, Georges LEVASSEUR & Bernard BOULOC, « Droit pénal général », 15ème
édition, Dalloz, 1995, p.4.
150. 3 V. Jean-Claude SOYER, « Droit pénal et procédure pénale », 15ème édition, LGDJ, 2000, P.42.

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Précis De Droit Pénal Général

Quant à Yves MAYAUD, il estime que « l’infraction est une rupture, une cassure. Elle revient
à briser (…), le pacte social, en ne respectant pas les obligations qui en découlent. Elle est un
acte de transgression de la loi et se présente comme le signe d’un dysfonctionnement »1. Enfin
pour certains, « l’infraction est une action ou une omission définie et punie par la loi pénale,
imputable à son auteur et ne justifiant pas l’exercice d’un droit »2.

47. Le législateur burkinabé ne donne pas une définition de l’infraction alors que d’autres
législateurs africains le font. C’est l’exemple du législateur ivoirien pour qui, « constitue une
infraction tout fait, action ou omission qui trouble ou est susceptible de troubler l’ordre ou la
paix publique en portant atteinte aux droits légitimes, soit des particuliers, soit des collectivités
publiques ou privées et qui, comme tel, est légalement sanctionné »3.

48. L’infraction pénale est à distinguer du délit civil qui peut être défini comme un fait fautif
ayant causé un dommage à autrui. Le délit civil n'est pas formellement prédéterminé ni limité
par la loi. Il y a donc une différence de source. L'existence de ce délit est subordonnée à
l'existence d'un dommage. Or, une infraction pénale peut être constituée et son auteur poursuivi
sans qu'elle ait causé un dommage (exemple : le port illégal d'arme, l'excès de vitesse). Ainsi,
aux termes de l’article 1383 du Code civil, « Chacun est responsable du dommage qu’il a causé
non seulement par son fait, mais encore par sa négligence et son imprudence ».

La sanction du délit civil, qui est la réparation du préjudice, causé bénéficie à la victime. Quant
à la sanction de l'infraction pénale, elle répare le préjudice subi par la société (action publique
et peine). Toutefois, la faute civile et la faute pénale peuvent se confondre (exemple des coups
et blessures volontaires)4.

49. L'infraction pénale est aussi à différencier du délit disciplinaire. Le délit disciplinaire est
interne à un groupe social déterminé et vise à assurer l'ordre dans le groupe. Le groupe peut
être constitué des membres d'une profession, d'une école, d'une famille, etc.

Le délit disciplinaire est un manquement portant atteinte aux intérêts du groupe et n’est pas
soumis au principe de la légalité des infractions et des peines. Il s’agit souvent d’un
comportement portant atteinte à la dignité, à l’honneur, à la probité ou portant atteinte au corps
professionnel auquel appartient l’individu fautif. C'est la violation des règles internes au
groupe. Ainsi, le médecin, qui procède à une interruption volontaire de grossesse, viole la
déontologie médicale. Toutefois, dans cette hypothèse, il y a une coïncidence entre le
manquement déontologique et l’infraction pénale. En effet, l’acte du médecin constitue une
infraction pénale prévue et punie par la loi pénale (art. 383 du CP). On peut aussi citer le cas
d’un agent de l’Etat (infirmier) contre lequel, une action disciplinaire a été engagée après qu’il
ait fait l’objet de poursuites pénales et de condamnation pour non assistance à personne en
danger. Cette condamnation pénale, d’une durée de 18 mois, a été prononcée par le 21
septembre 1962 par le Tribunal Supérieur d’Appel de Haute Volta. L’agent qui s’était opposé à
1.
151. 1 V. Yves MAYAUD, "Droit pénal général", Presses Universitaires de France (PUF), 2004, p.129.
152. 2 B. BOULOC & H. MATSOPOULOU, "Droit pénal général et procédure pénale ", 15ème édition, 2004,
Sirey, n°44.
153. 3 Article 2 du Code Pénal Ivoirien : "Constitue une infraction tout fait, action ou omission qui trouble ou
est susceptible de troubler l’ordre ou la paix publique en portant atteinte aux droits légitimes, soit des
particuliers, soit des collectivités publiques ou privées et qui, comme tel, est légalement sanctionné."
154. 4 Cass. Crim. 23 avril 1955, D. 1955, 524.

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Précis De Droit Pénal Général

l’évacuation d’un malade, victime d’une morsure de serpent ayant entraîné son décès, en
arguant une atteinte « à son amour-propre », s’est vu accusé de manquement à un devoir
professionnel sur le plan disciplinaire. C’est ainsi que la Cour Suprême de Haute Volta a
estimé que, « tels agissements constituent un manquement au devoir professionnel et une faute
de service d’exceptionnelle gravité justifiant la révocation, que l’arrêt de réhabilitation ne
saurait importer, la répression disciplinaire administrative étant indépendante de l’instance
pénale pour ce qui ne touche pas à la matérialité des faits »1.
Il en ressort que le délit disciplinaire trouble un ordre juridique particulier. Or, le délit pénal
trouble un ordre juridique général.

A la différence des fautes pénales, les fautes disciplinaires ne sont pas cataloguées. La sanction
du délit disciplinaire est moins sévère que celle du délit pénal. L'exclusion du groupe est
l'extrême sanction de la faute disciplinaire alors que la privation de liberté d'aller et venir à
perpétuité ou, dans certains cas, la peine capitale constitue la sanction extrême de la faute
pénale. Concernant les sanctions disciplinaires, la Cour Suprême a rappelé, à travers une
décision, celles pouvant être infligées à un agent de la Fonction Publique : « considérant que
s’il est loisible au Conseil des Ministres, d’apprécier la gravité de la faute et de décider de la
sanction appropriée, l’administration républicaine est soumise au respect de la légalité ; que
statuant en matière disciplinaire, le Conseil se devait de décider à l’intérieur de l’échelle des
peines disciplinaires limitativement citées à l’article 153 de la Zatu…du 26 octobre 1988 ainsi
conçue « les sanctions disciplinaires sont par ordre croissant de gravité : l’avertissement ; le
blâme ; la mise à pied quinze (15) jours au maximum ; le déplacement d’office avec ou sans
changement de résidence ; l’exclusion temporaire de fonction d’un (1) mois au maximum ;
l’abaissement d’échelon ; l’exclusion temporaire de fonction de six (6) mois au maximum ; la
rétrogradation ; la mise à la retraite d’office ; la révocation sans suspension de droits à
pension ; la révocation avec suppression de droits à pension »2. Il s’agit d’un agent de l’Etat à
qui, il est reproché, sur le plan disciplinaire, « des manquements à ses devoirs dans le cadre de
ses fonctions » (détournements, fraude,…). Certains de ces manquements (fautes
disciplinaires) constituent, d’ailleurs, des infractions (détournement de vivres et de fonds,
recrutement frauduleux…). L’agent est donc passible de sanctions pénales (comme le prévoit
la Zatu du 26 octobre 1988). On peut, dans tous les cas, remarquer que les sanctions
disciplinaires énumérées par la Cour Suprême ne contiennent aucune mesure privative de la
liberté d’aller et venir alors que sur le plan pénal, l’agent risque une peine d’emprisonnement
(aussi bien pour l’infraction de détournement que pour celle de fraude).

50. Le droit pénal n’est pas non plus à confondre avec la morale qui est définie comme un
ensemble de règles de conduite vertueuse et de bonnes mœurs devant être appliquées en
société. Cela fait dire à un auteur que «La morale est de toutes les manifestations de la vie
collective celle qui a le plus tardé à sortir de l’ère théologique et métaphysique. Même
lorsqu’on lui applique le critérium rationaliste, le devoir a toujours été invariablement
considéré comme un impératif transcendant et absolu »3. La règle morale vise essentiellement
la perfection de l’individu (dans ses rapports avec les autres membres de la société). Or, la
règle pénale vise un bon fonctionnement de la vie en société ou un maintien de l’ordre public
ou de la paix sociale par l’incrimination et la sanction de certains comportements. La règle
1.
155. 1 Cour Suprême de Haute Volta (Burkina Faso), Chambre Administrative, SAWADOGO
Christophe contre République de Haute Volta, arrêt n° 29 du 27 décembre 1968, Bulletin de la Cour
Suprême de Haute-Volta, 1976, p. 45 (arrêt n° 26).
156. 2 Cour Suprême 13 juin 2000, RBD, 2004, n°45, 1 er semestre, p. 100.
157. 3 V. M. H. CORNEJO, "Sociologie générale", Edit. V. Giard & E. BRIERE, 1911, p. 307.

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Précis De Droit Pénal Général

pénale et la sanction d’un comportement contraire à la norme pénale sont édictées par les
pouvoirs étatiques. En revanche, la règle morale est édictée par la conscience. La violation de
la règle morale est sanctionnée par la conscience individuelle. Cette dernière catégorie de
sanction affecte essentiellement l’état d’esprit de l’individu : elle est donc psychologique,
interne tandis que la sanction pénale est externe. Il peut y avoir une contradiction entre une
règle de droit (en général) et une règle morale : c’est le cas de la prescription. La règle
juridique enseigne que lorsqu’un droit fait l’objet d’une prescription, on ne peut plus s’en
prévaloir malgré le caractère légitime de ce droit. Néanmoins, une faute pénale peut coïncider
avec une faute morale. Le meurtre constitue à la fois une infraction prévue et punie par la loi
pénale et une faute morale punie par la conscience.

51. Il convient de distinguer également le droit pénal de l’éthique qui est pratiquement
synonyme de la déontologie. L’éthique est une ligne de conduite (humaine) devant être
respectée. Elle peut être perçue comme une forme de « code de conduite ». Pour certains, c’est
la science de la morale (sens ancien). L’éthique est « la règle morale propre à une organisation
ou à une profession. Il existe une éthique de la route, du sport, de l’enseignement, de la
recherche scientifique… » (sens moderne)1. Dans ce sens, la norme éthique est interne au
domaine (au corps) qu’elle règle. Les sanctions d’ordre éthique s’adressent donc à ceux qui
sont régis par la règle éthique, à la différence de la norme pénale qui n’est pas nette ou précise
et est de portée générale. L’on peut relever que dans le domaine des affaires, « la morale des
affaires est changeante, nuancée parfois impalpable. Nulle loi ne pourra dire ce qu’est la bonne
conduite pour un chef d’entreprise »2. L’éthique y est donc évolutive.

Ces distinctions confortent le principe de légalité des infractions et des peines qui n’est pas
sans conséquence.

§2 - LES CONSÉQUENCES DU PRINCIPE DE LA LÉGALITÉ

52. La légalité nécessite l'existence de textes qui incriminent et sanctionnent. Ces textes
doivent être interprétés de façon stricte (ce qui n’est pas, en principe, synonyme
d’interprétation restrictive) notamment par le juge. L’interprétation stricte, selon un auteur,
« consiste à restreindre son domaine d’application aux strictes limites qu’il implique. Cette
limitation peut être rationnelle, c’est-à-dire à la ratio legis »3. Le juge ne doit donc pas se livrer
à des extrapolations ou à des extensions qui peuvent l’amener à punir des actes ou
comportements non prévus ou non défendus par le législateur. Il importe de se référer aux
termes de la loi pour en trouver l’interprétation juste ou conforme à l’esprit de celle-ci.
L'infraction doit en conséquence être juridiquement définie et la peine juridiquement
déterminée. Il existe plusieurs types d’interprétation4.

53. L’interprétation littérale: le texte est interprété en évitant de s’éloigner des termes de
celui-ci (c’est une méthode qui permet de réduire considérablement les risques d’interprétation

1.
158. 1 A. ROGER, "Ethique des affaires et droit pénal", Mélanges en l’honneur d’André VITU, Edit. Cujas,
1989, p. 262.
159. 2 A. ROGER, "Ethique des affaires et droit pénal", op. cit. , p. 265.
160. 3 J-L. BERGEL, "Méthodologie juridique", Edit. PUF, 2001, p. 245.
161. 4 J-L. BERGEL, "Méthodologie juridique", op. cit. , p. 231 & SS. .

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Précis De Droit Pénal Général

non conforme ou de mauvaise interprétation). Ce type d’interprétation nécessite une attentive


lecture du texte à interpréter (en faisant attention à la disposition des mots, de la ponctuation et
au sens voulu par son auteur) la place des mots. Elle a l’avantage de se conformer ou de se
rapprocher étroitement de la pensée du législateur (en supposant que celui-ci a choisi les termes
adéquats pour l’exprimer).

54. L’interprétation analogique (ou par analogie) : elle consiste à rechercher le sens du
texte de sorte à pouvoir l’étendre à d’autres comportements ou situations voisines. Le
raisonnement par analogie intervient, souvent, dans le cas où le législateur observe le silence
pour une situation donnée alors qu’il prévoit des règles pour une autre situation ressemblant à
la première. Cette interprétation peut, aussi, intervenir pour des situations non prévues par le
législateur en raison du fait qu’elles sont nées de l’évolution ou des progrès techniques ou
scientifiques. Cette méthode a l’inconvénient de s’éloigner voire d’être contraire au principe
de l’interprétation stricte de la loi pénale. Elle a cependant l’avantage de trouver une solution à
une situation non prévue par la loi. La similitude des situations permet d’étendre le régime de
la situation prévue par la loi à celle qui ne l’est pas. Il s’agit donc d’une interprétation extensive
(le raisonnement "a fortiori" est également extensif)1.
55. L’interprétation téléologique : le texte est interprété en se référant au but poursuivi par
le législateur (en créant la loi interprétée), au contexte historique, social et économique (en
général, on se réfère aux travaux préparatoires dans ce cette hypothèse). cette hypothèse
intervient souvent lorsque le texte manque de clarté ou présente un caractère obscur 2. La
référence aux travaux préparatoires du parlement (exposés des motifs, débats parlementaires,
rapports) est d’un apport considérable à la bonne interprétation des textes peu clairs3.

Lorsque la loi est rédigée dans des termes clairs et non équivoques, les risques de mauvaise
interprétation sont minimes. Lorsqu’un texte est obscur, le juge ne devra pas l’appliquer de
façon arbitraire. Il est préférable que cette obscurité profite à l’accusé tout comme le « doute
profite à l’accusé ».

56. Le principe de la légalité suppose la préexistence de la norme par rapport à la


commission de l’infraction. La légalité renvoie inévitablement à la nécessité d'un texte qui
définit de façon générale et impersonnelle les valeurs protégées ou l'acte prohibé et ses limites.
L'article 1 du CP, dans ce sens, dispose que "Nulle infraction ne peut être punie et nulle peine
ne peut être prononcée si elles ne sont légalement prévues". En conséquence, le législateur doit
prévenir avant de sanctionner. Ce qui permet au citoyen d’être informé quant aux
comportements ou actes permis et non permis. Il en résulte que le juge pénal n'est pas

1.
162. 1 Comme le définit J-L. BERGEL, "le raisonnement « a fortiori » est celui selon lequel s’applique « à
plus forte raison » à des situations qu’elle ne prévoit pas expressément, lorsque la ratio legis paraît
encore plus adaptée à ces situations. Fondée sur l’intention tacite du législateur, cette interprétation
…rejoint l’adage… « qui peut le plus, peut le moins ». Une sanction prévue pour une faute légère se
justifie a fortiori pour une faute grave que la loi ne sanctionnerait pas expressément" (voir : J-L.
BERGEL, "Méthodologie juridique", op. cit., p. 245).
163. 2 V. Cass. crim. 8 mars 1930, D. 1930, 1, 101, note R. VOUIN. Il s’agit d’un voyageur qui était
poursuivi pour être descendu du train en dehors des lieux et du moment prévus par la loi : il était interdit
de descendre "ailleurs que dans les gares et lorsque le train est complètement arrêté". Le moment d’arrêt
du train n’est pas clairement déterminé dans ce texte : à quel moment un train est–il complètement
arrêté ?
164. 3 V. H. CAPITANT, "L’interprétation des lois d’après les travaux préparatoires", D. 1935, I, p. 77 &
SS.

94
Précis De Droit Pénal Général

autorisé à poursuivre encore moins à sanctionner un acte non prohibé, ni puni par la loi
(il ne peut pas, par exemple, punir la pratique de la prostitution qui ne constitue pas une
infraction, il en est de même pour la sorcellerie et l’homosexualité). Il n’est pas non plus
autorisé à faire rétroagir une loi pénale en violation des règles prévues à cet effet (exemple :
punir une dame qui a eu à pratiquer massivement l’excision en 1980). En somme, il n'a donc
pas le droit de créer des normes pénales, ce qui évite l’arbitraire et garantit le principe de la
séparation des pouvoirs1. Il doit se référer au texte applicable aux faits qui sont soumis à son
appréciation. Il faut, en conséquence, une qualification exacte des actes en cause. Ainsi, il ne
peut pas assimiler un vol à une escroquerie et vis versa.

Le législateur reste, principalement, compétent pour déterminer les actes interdits pour le
compte de la société. Ce qui suppose l’interprétation stricte de la loi pénale2. A cet effet, le
législateur a implicitement le devoir de créer des normes claires, nettes et non équivoques. Il
convient d’éviter les formulations vagues ou ouvertes qui sont de nature à pratiquement tout
englober ou viser (exemple : « tout acte portant atteinte à l’ordre public est puni de.. »).
Néanmoins, il convient de relever que le législateur ne peut pas formuler des textes
indiscutablement parfaits. Cette difficulté est liée notamment à l’évolution de la société voire
des situations incriminées et à la quasi-impossibilité d’édicter des textes pour régler des
situations imprévisibles ou exceptionnelles. Il n’en demeure pas moins que le principe de la
légalité permet de défendre les intérêts de la société et de sauvegarder les libertés individuelles.

Le caractère légal est, en somme, rempli lorsque l'infraction et la sanction sont prévues soit par
une loi au sens strict soit par un règlement soit enfin par un traité ou une convention
internationale intégrée dans l'ordre interne. Toutes les catégories d’infractions (contravention,
délit, crime), la détermination des sanctions et leur exécution, la procédure pénale sont
concernées par le principe de la légalité. Par ailleurs, différentes techniques sont utilisées
élaborer les règles légales3. A ce titre, on peut distinguer plusieurs techniques de législation.

- La pénalité par référence consiste à renvoyer, en ce qui concerne les sanctions encourues,
aux sanctions pénales prévues par un autre texte d’incrimination.
- L’incrimination par renvoi consiste à édicter la sanction et à renvoyer à un autre texte
pour les éléments constitutifs de l’infraction (matériel et moral). Le texte auquel la loi
renvoie peut être contenu dans la même loi (mais des dispositions différentes de celles qui
prévoient les sanctions pénales). Ces éléments peuvent aussi être prévus par un autre texte
légal (externe).
- L’incrimination "peu détaillée" consiste à décrire l’infraction en omettant certaines
précisions (certains éléments spéciaux). Il revient implicitement au juge d’apporter ces
précisions. C’est le cas de l’infraction de mariage forcé (art. 376 du CP) : la définition du
mariage n’est pas précisé.
D’autres techniques (nouveaux concepts, etc.) peuvent être également utilisées.

La question de la légalité pénale appelle celle du domaine d'application de la loi pénale.

1.
165. 1 V. G. BOLARD, "L’arbitraire du juge", in « Le juge entre deux millénaires », Mélanges offerts à
Pierre Drai, Edit. Dalloz, 2000, p. 225 & SS.
166. 2 V. Y. MAYAUD, "Stricte interprétation et triste destin pour l’enfant en voie de naître…", RSC 2003,
p. 95.
167. 3 V. J. LEROY, "Droit pénal général", LGDJ. 2003 n°178.

95
Précis De Droit Pénal Général

SECTION III - LE DOMAINE D'APPLICATION DE LA LOI PÉNALE

La question d'application de la loi pénale pose, essentiellement, le problème d’application dans


de temps (§1) et celui d’application dans l'espace (§2).

§1 - L'APPLICATION DE LA LOI PÉNALE DANS LE TEMPS

57. L’application de la loi pénale dans le temps suppose que cette loi régit les situations nées
après son entrée en vigueur. Le principe de la légalité s'oppose, en principe, à l'application
d'une loi nouvelle à des faits antérieurs à sa promulgation ou à sa date de promulgation. A ce
titre, l’article 5 de la Constitution burkinabé mentionne clairement que, «La loi pénale n’a pas
d’effet rétroactif. Nul ne peut être jugé et puni qu’en vertu d’une loi promulguée et publiée
antérieurement au fait punissable ». La loi (article 2, alinéa 1 du CP) ajoute: « Sont punissables
les faits constitutifs d’une infraction à la date à laquelle ils ont été commis ». Mais, il faut
distinguer selon que la loi pénale est de fond (1) ou selon qu’elle est de forme (2).

1– L’application des lois pénales de fond dans le temps

Selon l'article 2 alinéa 4 du CP, "La loi qui rend un fait punissable ou qui aggrave une peine n'a
point d'effet rétroactif" La non rétroactivité des lois pénales est la règle (a) et la rétroactivité
l'exception (b).

a. – La non- rétroactivité des lois pénales de fond

58. Le sens du principe de la non rétroactivité des lois est donné par un auteur en ces
termes : « Il est interdit de revenir non seulement sur la constitution d’une situation juridique
donnée, antérieure à la loi nouvelle, mais encore sur les effets passés d’une situation juridique
antérieurement constituée, peu importe que cette situation soit légale ou contractuelle »1. Cette
définition est valable en matière pénale et constitue le principe. La non rétroactivité suppose
qu’une personne ne peut être poursuivie ou condamnée pour des faits qui n’étaient pas érigés
en infraction au moment où elle commettait ces actes. Ce principe est à l’avantage de l’individu
en cause dans la mesure où il est protégé contre des nouvelles lois plus rigoureuses. Mais, en
cas d’infraction continue, si l’acte en cause est perpétré avant son incrimination et se poursuit
après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, celle-ci s’applique. On peut se demander si cette
règle est valable dans l’hypothèse où il s’agit d’une infraction d’habitude pour laquelle le
premier acte a été accompli avant l’existence de la nouvelle loi et la répétition (le second voire
le troisième) a été effectuée après l’entrée en vigueur. Logiquement, l’acte perpétré doit être
soumis à la loi nouvelle.

1.
168. 1 V. Jean Luc AUBERT, "Introduction au droit", 9ème édition, Armand Colin, 2002, P. 95.

96
Précis De Droit Pénal Général

Il en ressort qu’en principe, les lois pénales de fond ne rétroagissent pas, c’est-à-dire qu’elles
ne s’appliquent pas aux actes commis antérieurement à leur entrée en vigueur. Elles régissent
ceux qui ont été commis après son entrée en vigueur1. La loi entre, en principe, en vigueur
lorsqu’elle est publiée dans le journal officiel2. Cette publicité officielle, par la voie du journal
officiel, concerne surtout les lois et les décrets. Mais certains textes, en particulier, ceux de
caractère réglementaire sont rendus applicables (opposables aux administrés et invocables par
ceux-ci) par d’autres moyens de publication3. Toutefois, dans le système burkinabé, il arrive
que des textes ne soient pas publiés dans le journal officiel mais reçoivent application. La date
de consommation de l’infraction est, en général, celle de consommation des actes.

59. Les lois pénales de fond s'entendent par celles qui déterminent une infraction (les
incriminations) ou une peine applicable à l'auteur de l'infraction (les sanctions). La Cour
Suprême a, d’ailleurs, rappelé ce principe dans une décision en ces termes : « lorsqu’un
fonctionnaire fait l’objet de poursuites devant un tribunal répressif , il est obligatoirement
suspendu de ses fonctions … et la situation du fonctionnaire n’est définitivement réglée
qu’après que la décision rendue par la juridiction saisie est devenue définitive » ; que l’article
145 alinéa 1er de la loi n°013/98/AN du 28 avril 1998, portant régime juridique applicable aux
emplois et aux agents de la Fonction Publique, clarifie la situation du fonctionnaire innocenté
en ces termes : « En cas d’acquittement du fonctionnaire poursuivi dans les conditions
précisées à l’article ci-dessus, il est replacé en activité avec versement d’une somme équivalent
aux retenues opérées sur son traitement et reconstitution éventuelle de sa carrière
administrative » ; que ces dispositions favorables de la loi nouvelle, en vertu du principe
fondamental de non-retroactivité de la loi, ne peuvent être appliquées à la situation de
Monsieur B.B.A., ladite situation ayant existé avant l’adoption de cette loi »4.

Les lois étendant le domaine d'application d'une incrimination par une redéfinition de
l’infraction et celles qui crée une infraction relèvent du domaine des lois pénales de fond. Les
lois modifiant les règles de récidive, celles concernant le cumul des peines, celles allongeant la
liste des peines complémentaires et celles supprimant les causes d'atténuation d’une peine
appartiennent aussi au groupe des lois de fond. Les lois renforçant ou aggravant une peine déjà
existante et celles supprimant une pénalité sont également considérées comme des lois pénales
de fond. Toutefois, l’application du principe n’est pas évidente lorsqu’il s’agit d’une loi
nouvelle créant des mesures à caractère pénal, surtout quand elle concerne des mesures de
sûreté. Les lois nouvelles instituant des mesures de sûreté peuvent viser la lutte contre l’état
dangereux de l’individu. Dans cette hypothèse, la nouvelle loi apparaît comme une mesure qui
n’a pas réellement le caractère pénal (il ne s’agit pas d’une véritable peine) et dans ce cas la
tendance est à l’application immédiate du nouveau texte, même aux faits antérieurs à son
institution (de la nouvelle loi)5. C’est l’exemple des lois instituant des mesures éducatives en

1.
169. 1 V. R. CHAPUS, "Droit administratif général", tome 1, 12 ème édition, Montchrestien, 1998, p. 1054 &
SS.
170. 2 V. Conseil d’Etat français (C. E. fr), 18 novembre 1966, Revue Administrative 1967, p.140.
171. 3 V. CE fr. 25 janvier 1974, JCP 1974, 17713.
172. 4 Cour Suprême (actuelle Cour de cassation), Chambre administrative, arrêt n°040/1999-2000 du 30 juin
2000. Cette décision a été publiée sur le site web JURIBURKINA.
173. 5 V. Cass. crim., 11 juin 1953, arrêt Merbouche, JCP 1953, II, 7708 ; J. PRADEL & A. VARINARTD,
"Les grands arrêts du droit pénal général", op. cit. n°10 ; Cass crim, 12 mai 1960, D. 1960, p. 706, note
J.M.R. ; CEDH, 8 juin 1995, RSC 1995, p. 855, obs. L. E. PETITI ; RSC 1996, p. 471, obs. R.
KORING-JULIN.

97
Précis De Droit Pénal Général

matière de droit pénal des mineurs. Certaines interdictions professionnelles sont considérées
par la jurisprudence française comme des pures mesures de sûreté et non comme des peines
complémentaires (interdiction d’exercer la profession d’agent immobilier, celle
d’administrateur de biens…)1. Mais, quand la loi a un caractère réellement pénal et apparaît
plus sévère, la tendance est à l’application du principe de non-retroactivité2.

60. Le principe de la non rétroactivité s'accorde avec celui de la légalité des infractions et des
peines dans la mesure où l'on ne peut poursuivre ni punir l’auteur d’un acte qui n'était pas
prévu par la loi lors de sa commission. Ainsi, les auteurs de mutilations sexuelles féminines ne
pouvaient voir leur responsabilité pénale engagée avant la promulgation de la loi 43-96 ADP
du 13 novembre 1996 portant Code Pénal. Il en est de même, en matière de relations de travail,
concernant le harcèlement sexuel qui a été érigé en infraction et qui n’était pas un acte illicite
avant l’intervention de la loi 033/2004/AN du 14 septembre 2004 portant Code du travail3.
En principe, les lois pénales plus sévères ne s'appliquent pas aux faits postérieurs à l'entrée en
vigueur de celles-ci. Cependant; il y a des exceptions à la non rétroactivité

b – L'exception de rétroactivité des lois pénales de fond

61. Certaines lois pénales de fond sont plus douces ou moins sévères et sont favorables à la
personne mise en cause. Dans ce cas, la loi pénale rétroagit. Il s’agit de la rétroactivité in mitius
(mitius : doux)4. Une telle règle conduit à comparer et à évaluer les effets des lois en conflit
(c’est-à-dire la nouvelle et l’ancienne lois). C’est peut-être cette difficulté qui a amené le
législateur à donner quelques précisions quant à la loi sur laquelle il faut se fonder, dans une
situation de conflit. On invoque, pour justifier ce principe, le fait que si la société a estimé que
l’ancienne loi est sévère au point de la modifier ou de la réviser pour la rendre plus clémente,
elle n’a aucun intérêt à ce que l’ancienne soit appliquée. La société estime donc que l’ordre
social a cessé d’être troublé.

Le législateur burkinabé prévoit l’exception de rétroactivité des lois pénales. Cette dérogation
est prévue aux alinéas 2 et 3 de l'article 2 du CP, en ces termes "La loi qui efface la nature
punissable d'un fait ou qui allège une peine a un effet rétroactif. Elle arrête toute poursuite en
cours ainsi que l'exécution de la peine prononcée".
"La loi qui allège une peine s'applique aux infractions commises avant son entrée en vigueur et
qui n'ont pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée".

1.
174. 1 Cass. crim fr., 26 novembre 1997, RSC 1998, obs. B. BOULOC ; D. 1998, 495, note D. REBUT.
175. 2 V. CEDH, 8 juin 1995, affaire Jamil, RSC 1995, op. cit.
176. 3 Article 46 du code du travail : "L’employeur doit…traiter le travailleur avec dignité et veiller au
maintien des bonnes mœurs et l’observation de la décence publique et interdire toute forme de violence
physique ou psychique ou tout autre abus en raison des relations de travail, notamment le harcèlement
sexuel" ;
Article 47 du code du travail, "Le harcèlement sexuel dans le cadre du travail à l’effet d’obtenir d’autrui
par ordre, parole, intimidation, acte, geste, menace ou contrainte, des faveurs de nature sexuelle est
interdit. Est également interdit le harcèlement sexuel entre collègues ainsi que celui exercé par des
personnes rencontrées dans le cadre du travail qui ne sont pas employées par l’employeur de la victime
tels que des fournisseurs ou des clients". L’article 388 du code du travail prévoit les peines applicables à
la violation des dispositions des deux articles.
177. 4 V. Cass. crim. fr. 4 février 1981, JCP 1982, 19722, note CHAMBON

98
Précis De Droit Pénal Général

62. La loi nouvelle moins sévère peut donc s'appliquer à une situation pour laquelle
l'infraction a été commise avant son entrée en vigueur sous certaines conditions. L'infraction
commise ne doit pas avoir fait l'objet d'une condamnation irrévocable ou passée en force de
chose jugée (affaire définitivement jugée). En conséquence, une loi pénale nouvelle plus douce
qui intervient, en cours de procédure ou de procès, peut profiter à la personne mise en cause,
peu importe qu’elle soit intervenue au cours d’une procédure engagée devant une juridiction du
premier degré ou déclenchée devant celle de second degré. Cependant, cette indifférence est
difficilement concevable devant une juridiction de cassation dans la mesure où le juge de
cassation ne tranche qu’en droit. En principe, il n’est pas possible d’invoquer pour la première
fois l’exception de rétroactivité de la loi nouvelle devant ce juge.

S’agissant de la loi interprétative elle est soumise au même principe que celui applicable à la
loi interprétée. Une loi nouvelle d'interprétation rétroagit dans la mesure où elle ne fait que
préciser une ancienne loi. La nouvelle loi ne fait qu’apporter une certaine clarté à l’ancienne de
caractère obscur, ambiguë ou équivoque. Ce qui sous-entend qu’une personne contre laquelle
une action publique a été engagée sous l’ancienne loi peut se voir appliquer la nouvelle (loi
d’interprétation) tant que le procès est en cours.

63. Les lois supprimant une incrimination, celle faisant disparaître une circonstance
aggravante, celle créant un fait justificatif ou une cause de non imputabilité ou encore une
circonstance atténuante, celle modifiant les caractères d'une infraction en atténuant sa gravité
sont soumises au régime des lois nouvelles plus douces. La correctionnalisation d’un crime, la
transformation d’un délit en contravention (contraventionnalisation), la loi écartant
l’incrimination d’une tentative constituent des illustrations de l’hypothèse d’atténuation de la
gravité de l’infraction. Au titre de la correctionnalisation, la Cour de Cassation française a
considéré que la transformation, par une loi, du caractère criminel de l’infanticide en caractère
délictuel constitue un adoucissement de la nouvelle loi1. Elle a estimé que cette loi est plus
douce bien qu’elle ait supprimé, par la même occasion, les circonstances atténuantes prévues
par l’ancienne loi.

Cette jurisprudence pose, en outre, la question d’appréciation du caractère « doux » d’une loi
pénale, particulièrement lorsque la loi contient à la fois des dispositions plus clémentes et des
dispositions moins douces. La Cour de cassation, tenant compte de l’indivisibilité des
dispositions d’une loi, semble avoir considéré, la loi nouvelle comme plus favorable, dans son
ensemble, au délinquant. Cette interprétation se fonde, peut-être, sur le fait que le caractère
« plus doux » (correctionnalisation du crime) est dominant par rapport au caractère « moins
doux » (suppression des circonstances atténuantes). Le caractère le plus dominant l’emporte
sur le moins dominant. Généralement, ces situations se présentent lorsque la loi nouvelle est de
caractère complexe. L’appréciation du caractère doux ou sévère de la loi nouvelle se fait par
comparaison des deux textes (les anciennes dispositions et les nouvelles dispositions).

Les lois pénales assouplissant ou supprimant les sanctions relèvent aussi de ce régime. Ainsi,
la loi qui réduit la durée d’une peine, celle qui supprime une peine complémentaire ou la
modifie dans le sens de son allégement (exemple : substituer à la peine de fermeture définitive
d’une entreprise celle d’une fermeture temporaire) constituent des lois plus douces par
référence à l’ancienne.

1.
178. 1 V. Cass. Crim 6 mai 1942, in Gaz. Pal. 1942, 2, 87.

99
Précis De Droit Pénal Général

64. Cependant, l’on est fondé à s’interroger sur l’application de la loi nouvelle en présence
des lois dites « de circonstances » qui interviennent en matière économique, voire dans le
domaine fiscal ou douanier. Elles sont généralement destinées à la réglementation d’une
situation qui peut évoluer et entraîner la disparition de l’ancienne loi par l’intervention d’une
nouvelle. Elles sont de courte durée et visent parfois la régulation de l’économie. Ces lois
peuvent contenir des dispositions pénales. Une loi peut, par exemple, prévoir un régime
tarifaire qui, compte tenu de l’évolution de la situation, est abrogée par une nouvelle
(remplaçant en même temps l’ancienne) loi, plus souple, régissant les prix. Faut-il dans cette
hypothèse appliquer la nouvelle loi à l’individu contre lequel des poursuites ont été engagées
sur la base de l’ancienne loi. En principe, la loi nouvelle étant plus douce, elle lui est
applicable. Mais, par le passé, la jurisprudence avait estimé que les textes réglementaires de
caractère économique et fiscal ne rétroagissent (même s’ils sont plus doux), sauf dans le cas où
la loi en dispose autrement1. Heureusement, cette jurisprudence a évolué : elle applique de plus
en plus le principe de la rétroactivité des lois pénales moins sévères2. La loi burkinabé (art.2, al.
3 du CP) est, a priori, favorable à cette évolution (art.2 du CP).

Si les principes de non rétroactivité et de rétroactivité concernent les lois pénales de fond, il
n'en est pas de même pour les lois pénales de forme.
2– L’application des lois pénales de forme dans le temps

65. Les lois nouvelles de forme sont essentiellement consacrées à la procédure. Elles sont, en
principe, applicables immédiatement dès leur entrée en vigueur ou leur promulgation. Ces
lois ne concernent ni l’incrimination ni la sanction. On estime que cette catégorie de loi ne
remet pratiquement pas en cause les intérêts du délinquant. Ce dernier constat n’est pas absolu
car certaines lois de forme peuvent nuire aux intérêts du délinquant. C’est le cas lorsqu’il s’agit
d’une loi supprimant des voies de recours ou rendant une infraction prescriptible en une
infraction imprescriptible. Lorsque que la loi nouvelle porte sur la prescription (action publique
ou peine), il est, en général, tenu compte de la nature des conséquences de la nouvelle loi : si
elle aggrave la situation de l’auteur de l’infraction, le principe de l’application immédiate est
écarté.

66. Sont soumises à la règle d’application immédiate, les lois nouvelles relatives à la
constatation, aux poursuites (modalités de poursuites, etc.), au jugement des infractions, à la
compétence. Les lois portant sur la prescription des peines, le régime d'exécution, d’application
de ces dernières, celles concernant les voies de recours (nature du recours, conditions
d’ouverture du recours, délais…) relèvent également du même régime. Il en est de même pour
les lois d’organisation judiciaire. Relativement aux voies de recours, en droit français (art. 112-
3 du CPF), la loi nouvelle est applicable aux décisions rendues après son entrée en vigueur
(l’ancienne loi survit ou s’applique donc dans le cas contraire). En revanche, la loi nouvelle est
d’application immédiate quand elle porte sur la forme du recours (toujours en droit français).
La loi burkinabé est silencieuse sur ce point. Concernant les lois intervenant pour fixer le
régime d’exécution ou celui de l’application des peines (libération conditionnelle, sursis…),

1.
179. 1 V. Cass. Crim 11 mai 1958, Gaz. Pal., II, 218 ; Cass. Crim fr. 10 novembre 1970, Bull. Crim. 1970,
n°293.
180. 2 V. Cass. Crim fr. 16 février 1987, D. 188, 39 ; RSC 1987, 715, Obs. J. PRADEL.

100
Précis De Droit Pénal Général

certains auteurs les classent dans la catégorie des lois de fond1. Un tel classement suppose que
si la nouvelle loi est plus douce, elle rétroagit (étant une loi de fond).

Toutefois, la loi nouvelle ne s'applique pas aux situations de droit acquis (exemple d'un
délinquant ayant déjà fait l'objet d'une poursuite et d'une condamnation). Il s’agit notamment
du cas où une décision sur le fond a déjà été rendue à la date d’entrée en vigueur de la
nouvelle loi. Dans cette hypothèse, il y a survivance de l’ancienne loi en vue d’évite le
bouleversement de l’ordonnancement du procès engagé. A ce sujet, la législation burkinabé
n’est pas expressive alors que celle de la France a apporté quelques précisions2.
La loi pénale non seulement s'applique dans le temps mais aussi dans l'espace.

§2 - L'APPLICATION DE LA LOI PÉNALE DANS L'ESPACE

L’application de la loi pénale dans l’espace soulève une question de droit international lorsque
cette application doit franchir les frontières nationales. Elle peut également poser des questions
de conflits de lois en raison de la prolifération de la criminalité transnationale, du
développement des divers moyens de communications et de l’internationalisation de plus en
plus croissante des échanges commerciaux et culturels. C’est pourquoi cette application
nécessite une distinction entre l'infraction commise sur le territoire national (1) et celle
commise hors du territoire national (2).

1– Les infractions commises à l'intérieur du territoire national

67. Il importe de noter que le territoire s'entend aussi bien par l'espace terrestre qu'aux espaces
aérien, fluvial et maritime liés au territoire. Il s’agit de l’ensemble des espaces sur lesquelles le
Burkina Faso exerce sa souveraineté.

68. Aux termes de l’alinéa 1 de l'article 4 du CP, "La loi pénale s'applique à toute infraction
commise sur le territoire national quelle que soit la nationalité de son auteur." Il s’agit du
principe de la territorialité de la loi pénale. Ce principe renvoie au lieu de commission ou
réalisation matérielle de l’infraction. Le rattachement de l’infraction au territoire suffit donc à
désigner la loi burkinabé comme celle qui s’applique et à reconnaître la compétence des
juridictions burkinabé pour les poursuites pénales.

La loi pénale nationale s'applique donc à toute personne ayant commis une infraction sur le
territoire national y compris ses extensions (eaux territoriaux, espace aérien...). Peu importe
que l’individu soit résidant ou non résident. Elle s’applique donc indifféremment à tout
national (de nationalité burkinabé) ou étranger ayant commis l’infraction sur le territoire
burkinabé. Il s’agit du principe de la territorialité. Ce principe est le même dans la plupart des

1.
181. 1 V. Jacques LEROY, « Droit pénal général », LGDJ, 2003, p. 134 & 139;
182. 2 Article 122-2 du CPF: "Sont applicables immédiatement à la répression des infractions commises
avant leur entrée en vigueur : 1° les lois de compétence et d’organisation judiciaire, tant q’un jugement
au fond n’a pas été rendu en premier ressort".

101
Précis De Droit Pénal Général

systèmes pénaux d'Afrique francophone (cas de la Côte d’Ivoire, du Togo, du Niger…) et en


droit français.

L'infraction commise sur le territoire national signifie, en principe, que les actes la constituant
(tous les éléments constitutifs de l’infraction) ont été intégralement accomplis à l’intérieur du
territoire national (critère géographique). Mais, le principe énoncé à l’article 4 du CP qui
suppose que la loi burkinabé s’applique quand tous les éléments constitutifs ont été accomplis
au Burkina Faso, est complété par les dispositions de l’article 674 du CPP1. Il ressort de cet
article que l’infraction dont un des éléments constitutifs a été accompli sur le territoire est
assimilée à celle dont tous les actes ont été exécutés sur le territoire national. Certains systèmes
comme ceux du Togo et de la France admettent aussi que l'infraction dont un des éléments
constitutifs y a été accompli est réputée commise sur leur territoire.

Il en ressort que dans certains cas, généralement, précisés par la loi burkinabé, il n’est pas
nécessaire que tous les actes constitutifs de l’infraction soient entièrement commis sur le
territoire national. C’est le cas en matière d’environnement. Ainsi aux termes de l’article 88,
alinéa 1 du code de l’environnement burkinabé2, « Les peines prévues à l’article 87 ci-dessus
sont prononcées même si les divers actes qui constituent les éléments de l’infraction sont
accomplis dans des pays différents, nonobstant les dispositions du code pénal relatives
aux crimes et délits commis à l’étranger »3. C’est, en conséquence, une dérogation aux
dispositions de l’article 4 du CP relatives aux conditions d’application de la loi pénale. C’est
aussi l’exemple, en matière de violation de la réglementation relative aux stupéfiants et aux
substances psychotropes, qui est plus expressif car dérogeant à plusieurs règles de droit
commun. Effectivement, aux termes de l’article 76 du code des drogues, « Les juridictions
nationales sont compétentes pour connaître des infractions prévues au titre III4 de la présente
loi lorsque :
l’infraction a été commise au Burkina Faso, ou que l’un des actes constitutifs de
l’infraction est accompli au Burkina Faso ;
l’infraction a été commise par un burkinabé ou par une personne résidant habituellement
au Burkina Faso ;
l’auteur de l’infraction se trouve au Burkina Faso et qu’il n’est pas extradé ;
l’infraction a été commise à bord d’un aéronef immatriculé au Burkina Faso ou d’un
navire battant pavillon burkinabé ;
l’infraction a été commise à bord d’un navire que l’État du pavillon autorise à
arraisonner, à visiter et en cas de découverte de preuve de participation à un trafic illicite,
à prendre des mesures appropriées à l’égard du navire et des personnes se trouvant à
bord, sous réserve des accords et arrangements bilatéraux ou multilatéraux».

1.
183. 1 Article 674 du CPP : "Est réputée commise sur le territoire…toute infraction dont un acte caractérisant
un de ses éléments constitutifs a été accompli au Burkina Faso".
184. 2 V. loi 5-97 du 30 janvier 1997 portant code de l’environnement au Burkina Faso, promulguée par le
décret 97-110 du 17 mars 1997, JOBF n° 4 spécial du 25 avril 1997, p. 2.
185. 3 Article 87 du code de l’environnement burkinabé, " Est puni d’une peine de dix à vingt ans et d’une
amende de un milliard à cinq milliard de francs…ou de l’une de ces deux peines seulement, quiconque
se livre à la manipulation des déchets dangereux, en violation des dispositions… "
186. 4 Le titre III concerne la répression de la production et du trafic illicite des stupéfiants, de l’abus des
stupéfiants et des substances psychotropes.

102
Précis De Droit Pénal Général

Concernant les infractions relatives aux drogues, il est possible d’appliquer la loi pénale
burkinabé même si les éléments constitutifs ont été accomplis dans différents pays (art. 291 du
Code de la Santé)1.

Relativement aux espaces maritimes ou aériens, des systèmes soumettent à la loi pénale
nationale, les infractions commises à bord des navires et aéronefs battant pavillon national ou à
l'encontre de tels navires ou aéronefs en quelque lieu qu'ils se situent. Dans cette hypothèse les
navires et les aéronefs sont assimilés au territoire. Des lois précisent ces cas en droit burkinabé.
Ainsi, les juridictions burkinabé, en matière d’infraction à la législation relative aux drogues,
sont compétentes pour connaître notamment des infractions commises à bord d’un aéronef
immatriculé au Burkina Faso et ayant atterri au Burkina Faso ou à bord d’un navire battant
pavillon burkinabé et ayant accosté au Burkina. Aussi, si aucune juridiction n’est compétente,
la juridiction de Ouagadougou est compétente (art. 77 du code des Drogues) 2. Ce qui signifie,
dans cette dernière hypothèse, qu’au cas où l’avion n’aurait pas atterri au Burkina ou dans
l’hypothèse où le navire n’y aurait pas accosté, les juridictions burkinabé restent compétentes
nonobstant le fait qu’aucun des actes constitutifs de l’infraction n’ait été commis sur le
territoire national. La nationalité burkinabé (l’immatriculation) reste, dans ces conditions, le
seul critère de compétence. La loi française prescrit une compétence nationale exclusive
lorsqu'il s'agit de la marine et cela en quelque lieu qu’elle se trouve.

Dans d’autres cas, la législation pénale burkinabé peut être appliquée à des infractions
commises à bord d’un aéronef sans qu’aucun de ses éléments constitutifs ne soit commis sur le
territoire national. Cette application est prévue par quelques conventions internationales. La
convention de Tokyo du 14 septembre 1963 relatives aux infractions et à certains actes commis
à bord d’un aéronef en constitue une illustration3. En effet, l’article 1§24 et l’article 4 de cette
convention, ratifiée par le Burkina Faso, prévoient cette compétence nationale sous certaines
conditions5.

1.
187. 1 Article 291 du Code de la Santé : "Seront punis d’un emprisonnement de un à cinq ans et d’une
amende de cinq millions…ceux qui auront contrevenu aux dispositions des règlements internationaux
concernant les substances de la liste des stupéfiants…Les peines prévues aux alinéas précédents
pourrant être prononcées alors même que divers actes qui constituent les éléments de l’infraction
auraient été accomplis dans des pays différents ».
188. 2 Article 77 du Code des Drogues : "Dans les cas ci-dessous énumérés, les juridictions suivantes sont
compétentes :
la juridiction du lieu d’atterrissage de l’aéronef ou de l’accostage du navire, lorsque l’infraction a été
commise à bord d’un aéronef immatriculé au Burkina Faso, ou d’un navire battant pavillon burkinabè ;
la juridiction du lieu de débarquement de l’auteur présumé sur le territoire national lorsque l’Etat du
pavillon a autorisé le Burkina Faso à arraisonner un de ses navires suspectés de participation à un trafic
de drogues .
A défaut de toute autre juridiction compétente, celle de Ouagadougou sera déclarée compétente."
189. 3 V. Convention du 14 septembre 1963 portant sur les infractions et sur certains actes survenant à bord
des aéronefs, ratifiée par le Burkina Faso par le décret 63-644 du 16 décembre 1963 in Journal Officiel
de Haute Volta (JOHV) du 21 décembre 1963, p. 808.

190. 4 Article 1§2 de la convention : "… la présente convention s’applique aux infractions commises ou actes
accomplis par une personne à bord d’un aéronef immatriculé dans un État contractant pendant que cet
aéronef se trouve, soit en vol, soit à la surface de la haute mer ou d’une région ne faisant partie du
territoire d’aucun État…"
191. 5 Article 4 de la convention, "Un État contractant qui n’est pas l’État d’immatriculation ne peut gêner
l’exploitation d’un aéronef en vol en vue d’exercer sa compétence pénale à l’égard d’une infraction
commise à bord que dans les cas suivants :
- cette infraction a produit effet sur le territoire dudit État ;

103
Précis De Droit Pénal Général

2– Les infractions commises hors du territoire national

69. Le principe quant à ces infractions demeure l’incompétence de la loi nationale. Ce


principe peut faire l’objet de dérogations.
Hormis le critère purement territorial, il existe d’autres critères d'application de la loi pénale
nationale dans l'espace. Il s'agit notamment du critère de la nationalité et du critère d’intérêt.
Toute infraction commise par un national (auteur, coupable) ou à l'encontre de celui-ci
(victime), hors du territoire national est soumise à la loi nationale en particulier à celle du
Burkina (art.4 alinéa 2 du CP)1. La qualité de "victime burkinabé" (système de la personnalité
passive) et celle "d’auteur burkinabé" (système de la personnalité active) constituent des
critères de compétence. Il s’agit de la règle de compétence dite personnelle. Mais,
l'application de la loi nationale n'est possible dans ces hypothèses qu’à deux conditions (tenant
à la personne et à l’infraction):

- les faits doivent être punis par le pays à l’intérieur duquel l'infraction a été commise ;
- les poursuites sont subordonnées à une plainte préalable de la victime ou à une dénonciation
officielle du pays de commission de l'infraction.

Toutefois, même si ces conditions sont remplies, la loi pénale burkinabé ne peut être
appliquée si l’auteur de l’infraction a déjà fait l’objet d’un jugement définitif à l’étranger pour
les faits commis (la règle non bis in idem s’impose) ou s’il a déjà purgé sa peine (article 4,
dernier alinéa du CP). La non application s’étend à hypothèse de la peine prescrite. La
compétence dite personnelle ne concerne que deux catégories d’infractions : les délits et les
crimes. Les contraventions commises à l’étranger sont exclues de cette compétence. Aussi, un
burkinabé, auteur de délits et de contraventions, dans le domaine forestier, rural, douanier,
commis sur l’un des Etats limitrophes, peut être poursuivi au Burkina. Mais cette possibilité
est subordonnée à une condition : cet Etat doit permettre les mêmes poursuites à l’encontre de
son national sur son territoire (condition de réciprocité). Cette compétence est valable, sous
les mêmes conditions, pour les infractions relatives à la pêche et aux contributions indirectes
(art. 676 du CPP).

70. Le critère d’intérêt de la nation ou de l’État est implicitement prévu par la loi burkinabé,
dans le cadre de l’application de la loi pénale aux infractions commises hors du territoire
national. En effet, la loi burkinabé est susceptible d’être appliquée, lorsqu’un étranger commet
hors du territoire burkinabé, un crime ou un délit attentatoire à la sûreté de l’Etat. Il en est de

3.
- cette infraction a été commise par …une personne y ayant sa résidence permanente ;
- cette infraction compromet la sécurité dudit État ;
- cette infraction constitue une violation des règles ou règlements relatifs au vol où à la manœuvre des
aéronefs en vigueur dans ledit État ;
- l’exercice de cette compétence est nécessaire pour assurer le respect d’une obligation qui incombe
audit État en vertu d’un accord multilatéral."
192. 1 Article 4, alinéa 3 & 4 du CPB " La loi pénale s’applique également aux infractions commises par un
national ou contre un national hors du territoire national lorsque les faits sont punis par la législation du
pays où ils ont été commis. La poursuite dans ce cas doit être précédée par une plainte de la victime ou
une dénonciation officielle de l’autorité du pays où les faits ont été commis.
La poursuite cesse dans le cas où la personne justifie avoir été jugée définitivement à l’étranger pour les
mêmes faits, et en cas de condamnation, que la peine a été subie ou prescrite".

104
Précis De Droit Pénal Général

même, quand il est auteur ou complice de contrefaçon du sceau de l’Etat ou de monnaies


nationales ayant cours au Burkina Faso. Toutefois, la compétence des juridictions nationales
n’est possible que si l’auteur ou le complice a été arrêté au Burkina Faso ou si le gouvernement
burkinabé obtient son extradition (art. 675 du CPP). Ce critère est également retenu par le
législateur français qui consacre la compétence des juridictions françaises quant aux infractions
commises à l’étranger et portant atteinte aux intérêts de l’État français1.
En somme, les critères d'application de la loi pénale dans l'espace varient d'une législation à un
autre à l'instar de ceux concernant l'application dans le temps.
La classification des infractions joue un rôle important quant à l'application de la loi.

1.
193. 1 En effet, l’article 113-10 du Code Pénal français (CPF), prévoit l’application de la loi pénale française
dans le cas où un délit ou un crime porte atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation. Il en est de
même lorsque ces catégories d’infraction sont dirigées contre les locaux ou les agents diplomatiques ou
consulaires situés hors du territoire national. Enfin, l’application de la loi pénale française s’étend aux
infractions de falsification et de contrefaçon du sceau de l’État commises à l’étranger.

105
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE II - LES CLASSIFICATIONS DES INFRACTIONS

Plusieurs critères permettent de procéder à la classification des infractions. Le législateur a


ainsi procédé à une classification qui se fonde sur la gravité de l’infraction. Outre cette
classification légale (section I), d’autres types de classification (section II) s’appuyant sur
d’autres critères peuvent être retenus.

SECTION I – LA CLASSIFICATION LÉGALE DES INFRACTIONS

La classification légale est essentiellement fondée sur la gravité des actes commis (§1). Elle
présente un intérêt (§2) dans le cadre de l’application de la loi pénale.

§ 1 – LA CLASSIFICATION FONDÉE SUR LA GRAVITÉ DES ACTES

La loi burkinabé distingue (1) quelques catégories d’infraction en retenant implicitement pour
critère de classification, la gravité de l’infraction (2). La détermination de la gravité se fonde
souvent sur les intérêts protégés qui peuvent être ceux de la personne (humaine), de la Nation
et du patrimoine. Le degré de gravité de l’infraction commande la sévérité de la peine (un
assassinat peut donner lieu à une peine capitale).

1- Les catégories d’incrimination dégagées du critère de gravité

71. Les dispositions de l’article 2 du Code de procédure Pénale burkinabé (CP) permettent, en
effet, d’affirmer que la loi retient trois types d’infraction : « L’action civile en réparation du
dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont
personnellement souffert du dommage… ». Cette classification tripartite peut, également, être
dégagée à partir des dispositions des articles 8 à 12 du CP relatives aux sanctions pénales
prévues pour chaque catégorie d’infraction.

Les crimes appartiennent à la catégorie des infractions les plus graves. Aux termes de l’article
8 du CP, « Les peines en matière criminelle sont afflictives et infamantes ou seulement
infamantes. Les articles 9 et 10 du même code précisent que la mort, l’emprisonnement à vie,
l’emprisonnement à temps et la dégradation civique constituent les sanctions possibles pour les
infractions de type criminel.

Les dispositions de l’article 11 du CP déterminent implicitement la seconde catégorie


d’infractions, en l’occurrence les délits qui sont des actes moins graves que les crimes. Ce qui
justifie les sanctions prescrites en la matière (art. 11) : « Les peines en matière correctionnelle
sont :
- l’emprisonnement à temps ;
- l’interdiction à temps de certains droits civiques, civils ou de famille ».

Enfin, la loi burkinabé (art. 12 du CP) dispose que les contraventions sont punies d’une
amende. Il s’ensuit que la contravention, troisième catégorie d’infraction, demeure la moins
grave des trois dans la mesure où sa commission n’est susceptible d’aucune sanction pénale

106
Précis De Droit Pénal Général

privative de liberté. On peut d’ailleurs remarquer que la gravité de cette catégorie est si minime
que ces infractions sont déterminées par un règlement contrairement aux délits et crimes qui
sont prévus par la loi au sens strict.

2 - L’évaluation de la gravité de l’infraction

72. Le degré de gravité de l’infraction s’apprécie essentiellement en se fondant sur la peine


(nature ou maximum de la peine) abstraitement fixée par la loi. Ainsi, la peine de mort ou
l’emprisonnement à vie (à perpétuité) n’est, en principe, prévue que pour punir l’auteur d’un
crime. Or, l’interdiction de séjour peut concerner aussi bien l’auteur d’un crime que celui d’un
délit. Les dispositions de l’article 35 du CP précisent la fourchette de peine en matière
correctionnelle : « La durée de la peine d’emprisonnement sera au moins de onze jours, et de
cinq années au plus, sauf les cas où la loi aura déterminé d’autres limites » Il s’agit
généralement de la peine principale prévue pour les personnes physiques. En effet il est
difficile de se référer à ces peines lorsqu’il s’agit de déterminer la gravité d’une infraction car
certaines sanctions ne sont pas applicables à la personne morale, même en cas de crime. C’est
le cas de la peine capitale.

Les peines complémentaires et accessoires ne peuvent pas servir de référence d’identification


de la gravité d’une infraction dans la mesure où elles peuvent être indifféremment appliquées à
un auteur de crime ou à celui d’un délit. L’interdiction de séjour (art. 42 du CP) qui peut être
prononcée par le juge en cas de crime ou de délit en est une illustration.

§2 – LA PORTÉE DE LA CLASSIFICATION LÉGALE DES


INFRACTIONS
La classification légale fondée sur la gravité des infractions présente des intérêts non
négligeables. La distinction entre les infractions criminelles, délictuelles et contraventionnelles
est importante car le législateur en tient considérablement compte pour l’élaboration des règles
procédurales (2) et celles de fond (1).

1- L’intérêt de la distinction quant aux règles de fond

73. La distinction présente un intérêt en ce qui concerne l’incrimination (l’élément matériel).


Le législateur incrimine et sanctionne toujours la tentative d’une infraction de caractère
criminel. En revanche, la tentative n’est punissable en matière délictuelle que dans le cas où la
loi le prévoit. Elle ne l’est pas, en cas de contravention (art. 60 du CP).
Aussi, la complicité est-elle punissable en cas de crime ou de délit tandis qu’elle n’emporte
aucune sanction pénale en cas de contravention (art. 65 du CP).
La plupart des crimes sont des infractions intentionnelles1. L’intention criminelle est donc un
des éléments (élément moral) exigée pour la constitution de l’infraction.

1.
194. 1 Il ne s’agit pas de toutes les infractions dans la mesure où certaines ne sont pas originellement de
nature criminelle, elles le deviennent en raison des circonstances aggravantes qui ont ponctuées la
commission de l’infraction.

107
Précis De Droit Pénal Général

2- L’intérêt de la distinction quant aux règles procédurales

74. La distinction tripartite permet de déterminer la procédure applicable et la compétence


juridictionnelle.
Les règles de procédure applicables diffèrent, en effet, suivant la catégorie d'infraction. C’est
ainsi que la procédure d'infraction flagrante est réservée aux délits et aux crimes. Elle ne
concerne pas les infractions de catégorie contraventionnelle. Celle de citation directe ne
s'applique pas aux crimes. L'instruction est facultative en cas de délit et obligatoire en cas de
crime et exclue en cas de contravention. Toutefois, concernant les délits, les règles de
l’instruction diffèrent quand l’agent poursuivi a la qualité de mineur.

En matière de compétence1, les crimes relèvent de la chambre criminelle de la Cour d'appel


(équivalent de la Cour d'Assises en droit français). La compétence revient à la chambre
correctionnelle du Tribunal de Grande Instance (TGI), s'agissant des délits, en droit pénal
burkinabé2. Les contraventions sont de la compétence du tribunal d’instance (en procédure
française elles sont de la compétence du tribunal de police).Toutefois, dans certaines
circonstances, la chambre correctionnelle peut connaître des contraventions. L’article 382,
alinéa 3 du CPP prévoit cette hypothèse : « La compétence de la chambre correctionnelle du
tribunal de grande instance s’étend aux délits et contraventions qui forment avec l’infraction
déférée à la chambre correctionnelle un ensemble indivisible ; elle peut aussi s’étendre aux
délits et contraventions connexes au sens de l’article 203 ».

75. La distinction permet également de déterminer les délais de prescription de l'action


publique et de l’exécution de la peine. Les contraventions se prescrivent par un an, les délits
par trois ans et les crimes par dix ans (art. 7, 8 & 9 du CP). Toutefois, des exceptions telles que
l’imprescriptibilité d’une infraction (génocide par exemple…) peuvent être prévues par la loi.
L'exécution d'une peine se prescrit par deux ans pour une contravention, par cinq ans pour un
délit et par vingt ans en cas de crime (art.719 à 721 du CP).

D’une manière générale, l’importance des garanties procédurales quant au respect des droits et
libertés fondamentaux dépend du degré de gravité de l’infraction : les infractions les plus
graves (crimes) font souvent l’objet de procédures complexes. Les contraventions, par exemple
sont, soumises à des procédures simplifiées voire rapides.

SECTION II – AUTRES CLASSIFICATIONS

D’autres critères de classification existent. Il s’agit essentiellement de la classification faite


suivant la nature de l’infraction (§1) et de celle qui est fondée sur les éléments constitutifs de
l’infraction (§2).

1.
195. 1 V. Lois n°10/93/ADP et n°28 –2004/AN du 8 septembre 2004 relatives à l’organisation judiciaire au
Burkina Faso.
196. 2 Aux termes de l’article 381 du CPP "La chambre correctionnelle du tribunal de grande Instance
connaît des délits. Sont des délits les infractions que la loi punit d’une peine de plus d’un mois
d’emprisonnement ou 50 000 francs d’amende. "

108
Précis De Droit Pénal Général

§1 - CLASSIFICATION FONDÉE SUR LA NATURE DE L’INFRACTION

76. La classification se fondant sur la nature de l’infraction peut être établie de façon
tripartite. Une distinction est faite entre les infractions de droit commun (1), les infractions
politiques (2) et les infractions militaires (3). Les infractions de droit commun constituent la
catégorie comportant un nombre considérable de sous-classes. En se référant à la quantité, les
infractions de droit commun demeurent la catégorie dominante dans le code pénal (dans la
partie consacrée au « droit pénal spécial »). Leurs régimes varient : ils peuvent être liés soit à
l’état de dangerosité de l’individu (génocide, terrorisme…), soit à la situation de faiblesse de la
victime (viol, proxénétisme, violences conjugales…), soit à d’autres situations. Le caractère
hétérogène de cette catégorie d’infractions (celle de droit commun) fait qu’il est plus
intéressant de l’opposer à d’autres catégories. Cette comparaison permet de mieux appréhender
les autres types d’infractions.

1 - Les infractions politiques et les infractions de droit commun

La distinction entre l’infraction de droit commun qui est commise par le délinquant ordinaire et
celle de caractère politique commise par un délinquant qualifié de politique (a).revêt un intérêt
d’une importance non négligeable (b). Malgré l’importance de cette classification, il n’en
demeure pas moins que la distinction entre ces deux types d’infractions reste difficile.

a- Distinction entre l’infraction de droit commun et l’infraction politique

77. Si l’infraction de droit commun s’analyse comme une infraction ordinaire soumise à un
régime s’appliquant en principe à tout délinquant, il en est autrement quand il s’agit d’une
infraction politique. Les infractions de droit commun sont les plus nombreuses et, en général,
ne font pas l’objet de règles particulières de répression. L’infraction politique, généralement,
porte atteinte à l’intégrité physique ou morale et à une entité (Etat…). Elle menace donc les
institutions politiques de la Nation. Le délinquant politique, dans la plupart des cas, cherche à
atteindre plus un objectif idéaliste qu’un but crapuleux. Les difficultés de distinction entre ces
deux types d’infraction ont amené la doctrine à retenir des critères de définition de l’infraction
politique. Certains auteurs se fondent sur un critère dit objectif pour la définir et d'autres
s'appuient plutôt sur un critère dit subjectif.

78. Les infractions politiques, d'après la conception objective, sont celles qui visent un objet
politique. Cette conception s’appuie sur la nature du résultat de l’infraction. Il en ressort que
l’infraction politique, envisagée sous cet angle, est celle qui porte atteinte à la sécurité de l’État
ou à l’organisation et au fonctionnement des pouvoirs publics. C’est, aussi, l’infraction qui
viole des intérêts politiques de l’État ou un droit politique fondamental reconnu au citoyen. Les
complots en vue de changer le régime politique, les atteintes à la sûreté de l'Etat, les fraudes
électorales, les atteintes à la liberté d’association en constituent des illustrations.

Les infractions politiques selon la conception subjective, sont définies comme celles de droit
commun mais dont le mobile est d'ordre politique. C’est le mobile du délinquant qui importe
dans cette conception. Le caractère politique de l’infraction est déterminé, en tenant compte de
la raison pour laquelle l’acte prohibé a été commis. Il faut se référer à la raison qui a suscité

109
Précis De Droit Pénal Général

l’acte pour pouvoir apprécier le caractère politique ou non de l’infraction. L’assassinat d'un
Chef d'Etat pour des raisons politiques en constitue un exemple.

Légalement, aucune définition précise de l’infraction politique n’est donnée. Le législateur


procède souvent à une énumération des infractions politiques les plus courantes sans préciser
leur nature politique. Néanmoins, l’appréciation de ce caractère peut, dans certains cas, se faire
par référence à des indices ou à certains éléments constitutifs de l’infraction. Quelques
infractions politiques ne peuvent être commises que par des nationaux. L’analyse des articles
88 et 89 du CP permet de conclure que la trahison, infraction politique, ne peut être commise
que par un individu ayant la nationalité burkinabé1. En revanche, l’infraction d’espionnage
(également de caractère politique) prévue à l’article 90 du même code ne peut être commise
que par un individu de nationalité étrangère ou un apatride. La présentation légale des
infractions politiques conduit à conclure que le législateur se fonde implicitement sur le critère
objectif pour déterminer cette catégorie d’infractions.

En outre, certaines sanctions, sans être spécifiques aux infractions politiques, sont souvent
prévues pour réprimer les auteurs de ces infractions. C’est le cas de la prison à vie qui est
prévue pour certaines infractions contre la sûreté de l’Etat2.

Certes, l’infraction politique est difficilement définissable mais, on remarque qu’il s’agit d’une
catégorie d’infraction qui peut porter atteinte à un individu et particulièrement à une nation ou
à une institution, un État ou encore à une entité.

b – Intérêt de la distinction

79. En principe, sur le plan du droit international, l’auteur d’une infraction politique ne peut
pas faire l’objet d’une extradition. Généralement, l’asile politique n’est pas accordé au
délinquant politique (il est plutôt accordé à ceux qui sont persécutés parce qu’ils mènent une
lutte en faveur de la liberté). Les infractions politiques portant atteinte à la sûreté de l’Etat
étaient soumises à une procédure particulière dans la plupart des systèmes d’Afrique Noire
francophone à l’instar de la France3. C’est ainsi que ces États avaient institué soit des cours
martiales soit des cours de sûreté, compétentes pour connaître de ces infractions politiques.
Ainsi, une Cour de Sûreté avait été créée en Haute Volta, en 19634. Au Niger, c’est la loi n°64-
002 du 14 janvier 1964 qui a institué cette juridiction. Au Togo, cette Cour a été mise en place
en 19705. Cependant, la tendance actuelle consiste à soumettre les auteurs de ces infractions à
la procédure de poursuite de droit commun tout en la ponctuant de quelques exceptions
(exemple : la garde-à-vue est d’une durée plus longue). Mais, si l’auteur est le Président de la
1.
197. 1 Article 88 du CP : « Est coupable de trahison et puni de l’emprisonnement à vie, tout burkinabè
qui :… » ; article 89 du CPB: "Est coupable d’espionnage et puni de l’emprisonnement à vie, tout
étranger ou apatride qui commet l’un des actes prévus aux articles 88 et 90…"
198. 2 V. les articles 88 & SS du CP.
199. 3 V. E. L. KANGAMBEGA, "Les procédures pénales dérogatoires au droit commun. Étude comparée
de droit français et de quelques droits d'Afrique noire francophone (Burkina, Côte d'Ivoire, Niger,
Togo)", thèse, Université de Poitiers, Faculté de Droit et de Sciences Sociales, juillet 1997.
200. 4 V. loi n° 5-63 du 29 janvier 1963, JORHV. du 9 février 1963, P. 104. Cette loi a été abrogée et
réinstituée par l'ordonnance n° 79-19 du 18 avril 1975 ; voir également l'ordonnance n° 75- PRES-J du
18 avril 1975, JORHV. du 24 avril 1975 p. 289 - 291 relative à l’organisation de cette Cour.
201. 5 Cf. l'ordonnance n°18 du 12 décembre 1970 créant et organisant une cour de sûreté, Journal Officiel
de la République Togolaise (JORT), numéro spécial du 14 septembre 1970 p. 1-3.

110
Précis De Droit Pénal Général

République ou un membre du gouvernement, la compétence peut revenir à la Haute Cour de


Justice1. L’infraction politique n’expose pas son auteur à une interdiction ou à une déchéance
professionnelle.

Généralement, les infractions politiques ne peuvent pas faire l’objet d’une procédure de
citation directe même si l’infraction constitue un délit.

Le régime d’exécution des sanctions pénales est, en principe, celui de droit commun mais,
dans la pratique, on constate que, dans les établissements pénitentiaires, un traitement plus
clément est réservé aux délinquants politiques. En général, il n’est pas traité dans les mêmes
conditions qu’un crapuleux criminel ou un « vulgaire » délinquant. Il peut être dispensé du
travail pénitentiaire. La sanction elle-même est souvent sévère. Ainsi, il peut être infligé à
l’auteur d’une infraction politique telle que la trahison une peine d’emprisonnement à vie ou
une peine capitale (art. 88 et 89 du CP).

2 - Les infractions militaires et les infractions de droit commun

Le régime juridique de l’infraction militaire est tel que la distinction (a) entre l’infraction de
droit et celle de caractère militaire s’avère nécessaire et intéressante (b).

a - Distinction

80. L’infraction militaire est un manquement aux devoirs militaires. L’infraction militaire
est inhérente à la vie militaire. Elle est liée à la discipline, aux obligations militaires et
constitue à ce titre une faute disciplinaire. La sanction de l’infraction militaire est de caractère
répressif. L’insoumission2, la désertion3, la capitulation4, l’insubordination (art. 208 - 212 du
CJM)5, la désobéissance (art. 213 du CJM)1 constituent des exemples d’infraction militaire.

1.
202. 1 Aux termes de l’article 138, alinéa 1 de la loi n°003-2000/AN du 11 avril 2000, "La Haute Cour de
Justice est compétente pour connaître des actes commis par le Président du Faso dans l’exercice de ses
fonctions et constitutifs de haute trahison, d’attentat à la Constitution…"
203. 2 Article 165 du Code de Justice Militaire (CJM) : " Tout individu coupable d’insoumission aux termes
des lois sur le recrutement des armées de terre et de l’air, est puni, en temps de paix, d’un
emprisonnement de deux mois à un an…, "
204. 3 Article 166 du CPM : « Est considéré comme déserteur à l’intérieur en temps de paix :
1°/ six jours après celui de l’absence constatée, tout militaire qui s’absente sans autorisation de son
corps ou détachement, de sa base ou formation, d’un hôpital militaire ou civil, où il était en traitement
ou qui s’évade d’un établissement pénitentiaire où il était détenu préventivement ;…"
205. 4 Article 187 du CJM : "Est puni de mort, tout commandant de formation, d’une force aérienne, d’un
aéronef ou d’un navire militaire, qui, mis en jugement après enquête, est reconnu coupable d’avoir
capitulé devant l’ennemi, ou ordonné de cesser le combat sans avoir épuisé tous les moyens de
défense…"
5
L’infraction d’insubordination prend en compte notamment la révolte et la rébellion. "Sont en état de
révolte :
1)- les militaires sous les armes, les individus embarqués qui, réunis au nombre de quatre au moins
agissant de concert, refusent à la première sommation d’obéir aux ordres de leurs chefs ;
2)- les militaires, les individus embarqués qui, au nombre de quatre au moins et dans les mêmes
conditions, prennent les armes sans autorisation et agissent contre les ordres de leurs chefs ;
3)- les militaires sous les armes, les individus embarqués qui, réunis au nombre de six au moins et dans
les mêmes conditions, se livrent à des violences en faisant usage d’armes, et refusent, à la voix de
l’autorité qualifiée, de se disperser et de rentrer dans l’ordre" (art. 208 du CJM). La sanction de cette

111
Précis De Droit Pénal Général

Certaines infractions militaires ne peuvent être commises que dans le cadre militaire ou
par des militaires. Elles sont susceptibles d’avoir le caractère d'infraction impossible hors de
ce cadre. Dans cette hypothèse ces infractions sont dites purement militaires et n’ont,
souvent, pas d’équivalent en droit commun. Certaines d’entre elles tendent à soustraire le
militaire de l’accomplissement de ses obligations professionnelles ou à violer les règles
disciplinaires (désertion, insoumission, insubordination…). D’autres portent atteinte à
l’honneur ou aux intérêts fondamentaux de la Nation (capitulation, outrage au drapeau,
complot).

En revanche, d'autres peuvent se commettre aussi bien dans ce cadre qu'en dehors de celui-ci :
il s’agit des infractions de droit commun. Dans cette hypothèse, les infractions sont dites
mixtes (vol, escroquerie, coups et blessures volontaires, viol...). L’infraction mixte est donc
celle qui peut être commise aussi bien par un militaire que par un non militaire. Dans certaines
circonstances, une infraction mixte commise par un militaire peut être caractérisée d’infraction
militaire en raison de la qualité de son auteur. C’est l’exemple de l’infraction de faux et usage
de faux (infraction mixte)2. Cette infraction est classée parmi les infractions militaires, par le
Code de justice Militaire (voir l’intitulé du Titre II du livre III de ce code). Ainsi, aux termes de
l’article 200 du CJM, « Tout militaire chargé de la tenue d’une comptabilité, deniers ou
matières qui a commis un faux dans ses comptes ou qui a fait usage des actes faux est puni
d’un emprisonnement de 5 à 10 ans ». Dans d’autres circonstances, l’infraction mixte peut être
assimilée à une infraction militaire, même si elle a été commise par un civil. Le pillage
(infraction mixte)3 commis, dans « une zone d’opérations », par un individu n’ayant pas la
qualité de militaire peut être assimilé à une infraction militaire. C’est ainsi qu’aux termes de
l’article 194 du CMJ, « Tout individu, militaire ou non, qui dans la zone d’opérations d’une
force ou formation :
- dépouille un blessé, malade, naufragé ou mort, est puni de l’emprisonnement de 10 à 20ans ;
- en vue de dépouiller, exerce sur un blessé, malade ou naufragé des violences aggravant son
état est puni de mort.

Dans l’hypothèse où l'infraction mixte est expressément prévue par le Code de Justice
militaire, elle prend souvent un caractère particulier lié à la discipline militaire. C’est l’exemple

3.
infraction militaire est également une peine de caractère militaire. Ainsi, Aux termes de l’article 209,
"la révolte est punie :
1)- dans les circonstances prévues au point 1 de l’article 208, de 3 à 5 ans d’emprisonnement ;
2)- dans les circonstances prévues au point 2 du même article, de 5 à 10 ans d’emprisonnement ;
3)- dans les circonstances prévues au point 3 dudit article, de10 à 20 ans d’emprisonnement.
L’emprisonnement à vie peut être appliqué aux coupables les plus élevés en grade et aux instigateurs de
la révolte".
Quant à l’infraction de rébellion, elle se définit comme "toute attaque, toute résistance avec violences
et voies de fait commise par un militaire, ou in individu embarqué envers la force armée ou les agents
de l’autorité est punie de 2 mois à un an d’emprisonnement ; si la rébellion a lieu avec armes, elle est
punie de un an à 3 ans d’emprisonnement" (art. 211 du CJM).
206. 1 Article 213 : "Est puni d’un emprisonnement de 1 à 2 ans, tout militaire ou tout individu embarqué qui
refuse d’obéir ou qui, hors le cas de force majeure, n’exécute pas les ordres reçus.
L’emprisonnement peut être porté à 5 ans si le fait a lieu en temps de guerre ou en temps d’état de siège
ou d’urgence, ou à bord ou d’un navire militaire "
207. 2 V. les articles 278 à 286 du CPB relatifs au faux et usage de faux.
208. 3 L’infraction de pillage est prévue par les articles 524, 525 & 526 du CPB pour le droit commun et par
les articles 193 et 194 du CJM en ce qui concerne le droit pénal militaire.

112
Précis De Droit Pénal Général

de l’infraction de rébellion qui, commise dans un cadre militaire, est considérée comme une
infraction contre la discipline1.

b - Intérêt de la distinction

81. L'infraction militaire est soumise à une procédure particulière, déterminée par les règles
de la procédure pénale militaire (voir loi 24/94 ADP du 24 mai 1994 promulguée par décret 94-
221 du 13 juin 1994 instituant le code de Justice militaire)2. En principe, les sanctions pénales
applicables aux infractions relevant de la compétence des juridictions militaires sont celles de
droit commun3. Cependant, il existe des sanctions purement militaires telles que la perte de
grade et la destitution4.

En temps de paix, les juridictions militaires sont généralement compétentes pour connaître des
infractions commises par les militaires et des infractions militaires ou assimilées5. En effet, aux
termes de l'article 34 du CJM, "Les juridictions militaires sont compétentes pour instruire et
juger les infractions de droit commun commises par les militaires ou assimilés dans le service
ou dans les établissements militaires ou chez l'hôte ainsi que les infractions militaires prévues
par le présent code". Toutefois, ces juridictions ne sont pas compétentes pour connaître des
infractions de droit commun commises par les gendarmes dans le cadre de l’exercice de leurs
fonctions de police judiciaire ou de police administrative (art. 41 du CJM).

82. En temps de guerre, sa compétence peut s'étendre à des infractions non militaires ou
commises par des non militaires telles que celles de nature politique, celles relatives à la
législation sur les armes et les munitions. Elle peut également s’étendre aux actes incriminés et
punis par une loi organique instituant le régime d’état d’urgence ou par la législation sur l’état
de siège (art. 46 du CPM).

La distinction a également un intérêt car, selon que l’infraction est de nature militaire ou non,
les règles d’application du sursis et celles de la récidive diffèrent. Les infractions purement
militaires ne sont pas prises en compte pour décider de l’existence ou non d’une récidive, en
cas de poursuites pour une infraction de droit commun (art. 151 du CJM). Aussi, la
condamnation pour une infraction militaire n'empêche-t-elle pas ultérieurement le bénéfice

1.
209. 1 Article 225 du CPB : "Toute attaque ou toute résistance pratiquée avec violence ou voies de fait
envers les fonctionnaires ou les représentants de l’autorité publique agissant pour l’exécution des ordres
ou ordonnances émanant de cette autorité ou des lois, règlements, décisions judiciaires ou mandats de
justice constitue la rébellion " ; article 211 du CJM : " Toute attaque ou toute résistance pratiquée avec
violence et voies de fait commise par un militaire ou un individu embarqué envers la forme armée ou
les agents de l’autorité est punie de 2 mois à 1 an d’emprisonnement ;… "
210. 2 V. A. DE ANDRADE, "Une particularité de la procédure pénale applicable aux militaires : l’avis du
ministre de la défense", RSC, 2002, p. 71 & SS.
211. 3 Article 155 du CJM : "Sous réserve des dispositions du présent code ou des lois spéciales, les
juridictions des forces armées prononcent les mêmes peines que les juridictions de droit commun…
212. Toute peine criminelle, prononcée contre un militaire entraînera notamment l’exclusion de l’armée ainsi
que la privation du grade et du droit "
213. 4 Article 156, "Les juridictions des forces armées peuvent également prononcer les peines militaires de
la destitution et de la perte de grade…"
214. 5 V. Tribunal Militaire de Ouagadougou, 17 avril 2004, Revue Burkinabè de Droit (RBD), 2004, n°45,
p.133 & SS. Cette affaire concerne 13 personnes (des militaires essentiellement) accusés de complot, de
trahison, et d’attentat à la sûreté de l’Etat (art. 88, 109 et 110 du CPB).

113
Précis De Droit Pénal Général

d'un sursis simple, en cas de condamnation pour une infraction de droit commun (art. 150 du
CJM). Elle ne remet pas non plus en cause un sursis antérieurement acquis sur le fondement
des règles de droit commun. Aussi, comme en matière politique, l'infraction militaire exclut-
elle l'application de l'extradition.

§2 - LA CLASSIFICATION FONDÉE SUR LES ÉLÉMENTS


CONSTITUTIFS DE L’INFRACTION

La classification dans cette hypothèse se fait suivant deux grands sous critères : la classification
basée sur l’élément matériel (1) et celle basée sur l’élément psychologique (2) de l’infraction.

1 – Les distinctions issues de la matérialité de l'infraction

83. Plusieurs catégories d’infractions peuvent être rangées dans la classe des infractions
fondée sur ce critère (élément matériel). Une distinction peut d’abord être faite entre infraction
matérielle et infraction formelle (a). On peut ensuite établir quatre séries de différenciations en
se fondant sur l’élément matériel constitutif. Une première série est fondée sur les modalités du
comportement, une seconde est basée sur la durée de l’élément matériel et une troisième sur la
complexité de l’élément matériel. Dans la première série on peut classer les infractions d’action
et les infractions d’omission (b). Les infractions instantanées et les infractions continues
peuvent être rangées dans la seconde série (c). Les infractions simples et celles de caractères
complexes peuvent relever de la troisième (d). Enfin, une quatrième distinction peut être faite
entre les infractions flagrantes et les infractions non flagrantes (e).

a – L’infraction matérielle et l’infraction formelle

84. Une infraction est dite matérielle lorsque le résultat fait partie des éléments constitutifs de
l'infraction. C’est une transgression concrète (effective) de la valeur protégée. Elle est
caractérisée par la prise en compte, dans sa constitution, du résultat issu des actes prohibés par
le législateur. L'infraction n'est consommée que si le dommage ou l’atteinte est effective. Ainsi,
il n' y a meurtre que si la victime meurt et le vol n’existe que si l'objet est soustrait.

85. Contrairement à l'infraction matérielle, celle de caractère formel1 est réalisée même si le
résultat juridique de l'agissement n'est pas atteint. Il y a une indifférence quant au résultat. Elle
est donc indépendante de tout résultat. Le comportement destiné à produire ultérieurement le
résultat juridique est lui même incriminé. C’est une infraction pour laquelle la seule réalisation
du comportement prohibé constitue une consommation de celui-ci2. C’est l’exemple de
l'empoisonnement3 qui est consommé même si l'administration de substances nuisibles n'a pas
entraîné la mort. Il en est de même, lorsqu’on jette du poison dans un puits4. La fabrication de
1.
215. 1 V.P. SPITERI, "L’infraction formelle", RSC 1966, p. 497.
216. 2 V. J.-P. DELMAS SAINT-HILAIRE, "Infraction continue. Infraction formelle. Infraction matérielle",
RSC 2002, p.111 & SS.
217. 3 V. V. MALABAT, "Le droit pénal général malade du sang contaminé", Droit Pénal 2004, chronique
(chr), p. 4 & SS.
218. 4 V. Cass. crim. 5 février 1958, Bull. Crim. 1958, n°126.

114
Précis De Droit Pénal Général

fausses monnaies (art. 250 du CP) est également consommée même s’il y absence d'émission et
de circulation et même en cas de repentir actif. La publicité mensongère constitue un troisième
exemple dans la mesure où celle-ci est réalisée sans qu’il soit nécessaire de prouver que le
consommateur a personnellement été trompé: le caractère mensonger du message publicitaire
suffit. La subornation de témoin fait aussi partie de cette catégorie d’infraction. Selon les
prescriptions légales (art. 293 du CP), la subornation est caractérisée et reste punissable même
si elle n’est pas suivie d’effet : « Commet le délit de subornation de témoin et est puni d’un
emprisonnement de un à trois ans …quiconque en toute matière ou en tout état de procédure ou
en vue d’une demande ou d’une défense en justice, use de promesses, offres ou présents…pour
déterminer autrui à faire ou à délivrer une déposition, …que la subornation ait ou non produit
effet… ».

86. L’infraction formelle peut être rapprochée de l’infraction obstacle qui est l’acte
incriminé pour éviter ou prévenir la commission d’une infraction. Néanmoins, ces deux
infractions ne se confondent pas. Les infractions obstacles sont des comportements incriminés
à titre préventif. Bien que l’un des objectifs de l’incrimination d’un acte dangereux pour l’ordre
social soit la prévention, on peut dire que l’infraction obstacle est une « infraction préventive »
assez particulière. S’agissant de cette catégorie d’infraction, l’extériorisation de la volonté
délictueuse et l’acte préparatoire sont incriminés. Les actes éventuels sont incriminés. Ces
incriminations s’appliquent donc à des phases lointaines par rapport à celle de la réalisation de
l’infraction. Les infractions obstacles sont, à ce titre, qualifiées de : «ouvrages avancés de la
répression ». La répression est ici anticipée ou précoce, ce qui semble correspondre à l’adage
suivant : « mettre la charrue avant les bœufs ». La conduite en état d’ivresse1, les menaces, la
divagation d’animaux2 , le complot, constituent quelques exemples d’infraction obstacle.

87. Si en matière d’infraction formelle la survenance du résultat projeté importe peu, ce n’est
pas le cas pour l’infraction obstacle. L’atteinte du résultat peut conduire à la transformation de
l’infraction obstacle en circonstance aggravante. Cas d’une conduite, dans une situation
d’excès de vitesse, ayant occasionné des coups et blessures involontaires. La responsabilité
pénale de l’agent peut être engagée sur la base de coups et blessures involontaires (art. 354 du
CP), infraction que le législateur a voulu éviter en instituant l’infraction obstacle (dépassement
de vitesse autorisée). Les coups et blessures involontaires constituent « l’infraction souche » et
la conduite en état de vitesse, la circonstance aggravante. La survenance du résultat peut aussi
engendrer l’existence d’une autre infraction dans laquelle se « fond » l’infraction obstacle.
Dans cette hypothèse, l’infraction obstacle est absorbée par la nouvelle infraction. C’est
l’exemple d’un complot qui a été absorbé par un attentat (art. 110 du CP : « Le complot suivi
d’un acte commis ou commencé pour en préparer l’exécution est un attentat puni d’un
emprisonnement de dix à vingt ans »).

88. L'intérêt de cette distinction se situe au niveau de la tentative. Dans le cas des infractions
matérielles, lorsque l'auteur renonce à son action et se rétracte volontairement avant la
commission de l'infraction (désistement volontaire), la simple tentative n'est pas en principe
punissable. Toutefois, l’impunité de la tentative est surtout valable, en cas de contravention et
de délit (sauf les délits pour lesquels la loi en décide autrement). Le désistement dénude la
tentative de l’acte illicite de son caractère prohibé ou illicite. En revanche, s'agissant d'une
1.
219. 1 L’ivresse manifeste dans un lieu public est prévue et punie par le décret 97- 84 du 28 février 1997
(art.4) relatif aux contraventions.
220. 2 Article 7 du décret 97- 84 du 28 février 1997 (art.4) relatif aux contraventions.

115
Précis De Droit Pénal Général

infraction formelle, la tentative est pratiquement inséparable de la consommation de


l’infraction punissable. L’infraction (formelle) qui a été tentée mais n’a pas atteint son résultat
juridique équivaut à une infraction consommée et expose son auteur aux mêmes sanctions que
celle réalisée complètement. Ainsi, l'empoisonneur qui administre un antidote à la victime,
pour éviter son empoisonnement effectif reste coupable et punissable. Certes, il peut bénéficier
de l'indulgence des juges mais le crime reste totalement consommé dans la mesure où le seul
accomplissement des actes constitutifs de l’infraction emporte sa consommation. C’est aussi
l’exemple de la fabrication de fausse monnaie qui ne trouble pas l’ordre public tant que cette
monnaie n’a pas été introduite dans le circuit économique. Or, la seule fabrication, qui peut être
considérée comme une tentative, suffit à conclure la constitution effective de l’infraction. Il
s’ensuit que, dans le cas des infractions formelles, il y a presqu’une confusion entre la tentative
de l’acte prohibé et sa consommation effective.

b – L’infraction d’action et l’infraction d’omission

89. L’infraction d'action consiste à accomplir un acte positif dont l’exécution est prohibée
par la loi (exemple: voler, donner des coups et blessures volontaires). L’agent agit positivement
alors que la loi lui commande de s’abstenir. Il y a la réalisation d’un acte interdit. Les
infractions d’action sont en général plus nombreuses que celles d’omission.

90. L’infraction d'omission est celle qui consiste à l'abstention d'action alors que la loi
commande son accomplissement. C'est la non exécution d'un acte commandé par la loi.
L’agent a ici l’obligation d’agir mais il ne le fait pas. Ainsi, l’omission de porter secours à une
personne constitue une infraction. En effet, aux termes de l’article 352 du CP, « Est puni d’un
emprisonnement de trois mois à trois ans…quiconque sans risque pour lui ou pour les tiers,
peut empêcher par son action personnelle soit un fait qualifié de crime, soit un délit contre
l’intégrité corporelle d’une personne, s’abstient volontairement de le faire. Est puni des mêmes
peines quiconque s’abstient volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que,
sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle soit en
provoquant un secours »1. La non dénonciation d'un crime, le délaissement d’un mineur ou
d’un incapable (art. 391 du CP), l’abandon de famille résultant du non versement volontaire
d’une pension alimentaire ordonnée par voie judiciaire (art. 407 du CP), la non représentation
d’enfant constituent des délits d’omission.

91. La distinction permet d’éviter l’interprétation par analogie qui n’est d’ailleurs pas
admise en droit pénal. Ainsi, on ne saurait assimiler un simple acte négatif ou une simple
abstention à un acte positif incriminé. C’est pourquoi, celui qui laisse mourir une personne
(délit de commission par omission) ne saurait être considéré au même titre que le meurtrier qui
tue une personne d’un coup de poignard. Certes, dans les deux cas, on aboutit au même résultat
(la mort) mais la simple abstention ne peut pas être assimilée à la commission d’un meurtre.
Dans tous les cas, il est difficile de lier directement (cause immédiate) une attitude négative à
un dommage (le lien de causalité reste difficile à établir)2.

1.
221. 1 V. Note Monique ILBOUDO sous Cour d’Appel (CA) Ouagadougou, 25 mars 1994, in Revue
Burkinabè de Droit (RBD), 1er semestre 1996, p. 140
222. 2 Dans l’affaire dite "la séquestrée de Poitiers ", la Cour d’Appel de Poitiers a refusé de condamner une
personne qui a laissé durant plusieurs années sa sœur aliénée sans soins pour délit de violences ou voies
de fait. La cour a estimé que ce délit ne pouvait être constitué sans violence. Elle a considéré que "les
faits de la cause ne peuvent tomber sous le coup d’une disposition pénale.. " (voir, CA Potiers 20

116
Précis De Droit Pénal Général

c – L’infraction instantanée et l’infraction continue

92. Une infraction est dite instantanée lorsque qu'elle s'exécute en un instant plus ou
moins long (quelques heures ou quelques jours). Elle s’exécute de façon immédiate ou
ponctuelle. L’acte est unique et immédiat. La volonté délictueuse s’épuise en un instant.
Cette catégorie d’infraction ne nécessite pas en général une longue préparation : sa
consommation est rapidement effective. C'est le cas du vol qui se réalise en un temps
relativement court par la soustraction frauduleuse d’un bien. L’acte de soustraction peut
s’accomplir en quelques minutes ou en quelques heures. La corruption est également une
infraction instantanée qui se consomme dès la conclusion du pacte entre le corrupteur et le
corrompu. Le meurtre, l'escroquerie, l’abus de confiance, le viol, constituent d’autres exemples
d’infraction instantanée. En général, l’écart de temps entre le commencement de l’acte et la fin
de l’acte est bref. La durée est négligeable dans le sens où elle n'a pas de répercussions
(indifférente) sur la réalisation de l'infraction. L’instantanéité n’est pas retenue comme critère
d’appréciation de la constitution du comportement prohibé. L’exécution de l’acte est
instantanée et la durabilité du résultat juridique importe peu.

93. En revanche, l’infraction est dite continue (ou successive) lorsque que son exécution
s'étale ou se prolonge dans le temps par une réitération de la volonté coupable (après l'acte de
départ). Il y a une persistance ou une continuité du comportement interdit. La matérialité de
l’infraction s’étend sur une durée relativement significative. L'effet persiste par la volonté
coupable réitérée. On peut citer la séquestration arbitraire, le port illégal de décoration, le vol
d'électricité, le recel, le proxénétisme, la non représentation d’enfant.

94. L'infraction continue diffère de l'infraction permanente en ce que cette dernière s'étale
dans le temps par son effet mais sans réitération de volonté de coupable (exemples : la
polygamie, la construction d’un immeuble en violation des règles en la matière). Le caractère
délictieux de l’acte persiste malgré l’absence de renouvellement l’intention coupable. Il s’agit
en réalité d’une infraction instantanée dont l’effet est permanent. Cette catégorie d’infraction
reste doctrinale et ne connaît pratiquement pas d’application jurisprudentielle.

95. Une infraction continuée n’est pas non plus à confondre avec une infraction continue.
L’infraction continuée est une infraction intermédiaire (située entre l’infraction instantanée et
l’infraction continue).S’agissant de l’infraction continuée, la continuité réside dans l’intention
criminelle qui est caractérisée par son unicité. Le dessein criminel reste unique mais l’agent
accomplit plusieurs actes pour aboutir à la même infraction. Plusieurs actes concourent à
satisfaire le même résultat délictuel ou une opération délictueuse d’ensemble. C’est une suite
d’infractions occasionnelles identiques réalisée dans le même dessein. En d’autres termes, l’on
est dans une situation où une série d’infractions instantanées de même nature est réitérée,
l’intention restant unique. Il ne s’agit pas non plus d’une infraction complexe, même si
l’infraction continuée comporte plusieurs actes matériels car, dans le cas de cette dernière les
différents actes réitérés sont identiques. C’est le cas d’un même vol de bétail dans un champ
(art. 461 du CP) commis en plusieurs voyages. Les actes de soustraction sont répétés mais le
but reste le même : soustraire frauduleusement l’ensemble des animaux. Dans ce cas, un seul

3.
novembre 1901, DP 1902, 291, note G. Le POITEVIN ; J.M. AUGUSTIN, "Les grandes affaires
criminelles de Poitiers", Gestes Editions, 1995, P. 175

117
Précis De Droit Pénal Général

voyage ne lui permet par d’atteindre son objectif qui est celui de voler l’ensemble. Il y parvient
en répétant l’acte de soustraction. La finalité reste la même : voler. C’est aussi le cas d’un
faussaire qui fabrique des millions de faux billets de banque mais qui reste l’auteur d’une seule
infraction : fabrication de faux billets (art. 252 du CP)1.

96. La pluralité de biens ou de victimes n’entame pas le caractère unique du dessein. La


répétition de l’acte incriminé se produit, en général, au cours d’une même action (cas d’un
cambriolage réunissant plusieurs vols effectués le même jour entre 23 h 30 & 24 h). Mais, elle
peut se réaliser dans un laps de temps plus ou moins long. Dans la seconde hypothèse, la
question de pluralité d’infractions est susceptible de se poser car elle peut conduire à une
situation dans laquelle il y aurait autant d’infractions que d’opérations menées. Ainsi, on peut
considérer qu’un cambriolage effectué par le même agent, au préjudice de trois locataires de
villas distinctes (chacun est locataire d’une villa) et voisines, effectué le même jour, dans des
intervalles de temps plus ou moins long constitue trois infractions indépendantes : le vol dans
la première villa a eu lieu à 21 h, dans la seconde à minuit et dans la troisième à 4 h. En effet,
dans cet exemple, on peut estimer que l’individu a commis trois fois l’infraction de vol.

97. Le juge, dans le cas d’une infraction collective par unité de but, ne peut pas faire
plusieurs déclarations de culpabilité pour la même infraction, même s’il y a eu plusieurs actes
concourant à la commission d’une infraction unique (cas de plusieurs opérations de
soustraction au cours du même vol de bétail). Il ne peut pas non plus prononcer plusieurs
peines pour une infraction unique (vol de bétail).

98. La distinction entre infraction instantanée et infraction continue permet le calcul du


délai de prescription. Le délai de prescription de l'infraction instantanée court, en principe,
dès la réalisation de l'infraction2 alors que celui de l'infraction continue commence à courir à
partir de la fin ou cessation de l’activité délictueuse. En cas de recel (consiste à détenir
sciemment une chose, produit d’une infraction), par exemple, le délai de prescription de
l’action publique commence à courir le jour où le receleur s’est débarrassé ou s’est dépossédé
de l’objet.

La distinction permet également de faire application ou non de la loi nouvelle plus sévère.
Le principe de non rétroactivité ne s'applique pas aux infractions continues même si les
faits sont antérieurs à l'entrée en vigueur de loi nouvelle, toutes les fois que les actes prohibés
persistent postérieurement à l’application de cette nouvelle loi. Cette application peut se
justifier par le fait que l’action a commencé sous le régime de l’ancienne loi et a continué sous
celui de la nouvelle loi. En revanche, la loi nouvelle plus sévère ne s'applique pas aux
infractions instantanées commises antérieurement à son entrée en vigueur. En outre, l’auteur de
l’infraction continue peut faire l’objet de nouvelles poursuites après une première
condamnation, si l’activité criminelle persiste. Malgré le bénéfice d’une loi d’amnistie l’auteur
de l’infraction continue peut, également, être réprimé dans le cas où le comportement
délictieux subsiste après l’intervention de ladite loi.

1.
223. 1 Relativement à la fabrication de faux billets, voir C.A. de Bobo-Dioulasso, 16 février 1987, RBD,
n°16, juillet 1989, p. 263.
224. 2 Concernant la date du point de départ de la prescription de l’action publique, il convient de noter que,
souvent, la Cour de cassation française, considère que de la prescription de l’infraction instantanée court
le jour où l’infraction a été découverte (voir Cass crim. 5 juin 1996, in Bull. crim. 1996, n° 239 & Cass
crim. 4mars 1997, Bull. crim. 1997, n°83).

118
Précis De Droit Pénal Général

99. La distinction permet enfin de déterminer la compétence ratione loci. L'infraction


instantanée relève de la juridiction d'un seul lieu de commission : le lieu de son exécution.
Quant à l'infraction continue, les juridictions des différents lieux de commission peuvent être
compétentes.

d – L’infraction simple et l’infraction complexe

100. Une infraction simple ou d'occasion consiste à l'accomplissement d'un seul acte
délictieux. L’infraction est constituée d’un seul élément matériel et se réalise instantanément.
Il y a une opération matérielle (exemple du vol: soustraction frauduleuse de la chose d'autrui ).
Elle est complexe dans le cas où elle donne lieu à plusieurs actes matériels (pluralité d'actes).
On peut procéder à un autre classement à partir de la catégorie des infractions complexes.
Ainsi, une distinction est faite entre infraction isolée et infraction d'habitude.

L'infraction isolée est celle qui se consomme par un seul acte délictueux. L’infraction
instantanée et l’infraction continue sont des infractions isolées car un seul acte suffit pour
constituer l’infraction.

101. L'infraction d'habitude se commet par l'accomplissement de plusieurs actes semblables


(l'exercice illégal de la médecine) et chaque acte isolé ne suffit pas à constituer l'infraction1.
L’acte incriminé doit matériellement se réaliser plusieurs fois. C’est la répétition des actes
constitutifs semblables qui constitue l’infraction. Dans le cas de l’exercice illégal de la
médecine qui consiste à exercer cette profession sans le diplôme requis, l’habitude n’est
constituée qu’à partir de la réalisation d’un second acte illicite, identique à un premier qui a été
antérieurement commis2. Ce qui signifie que l’agent établit habituellement un diagnostic ou
traite habituellement une maladie. La menace verbale de commettre un crime ou un délit contre
un individu est parfois considérée comme une infraction d’habitude et dans cette hypothèse,
elle n’est constituée que lorsque la même menace est proférée plusieurs fois. L’habitude est, en
général, caractérisée dès la première répétition de l’acte incriminé, c’est-à-dire lorsque l’acte
est consommé pour la seconde fois, dans le cas où la loi ne précise pas le nombre d’actes
requis. L’infraction d’habitude n’est pas à confondre à la situation où la loi considère
l’habitude comme une circonstance aggravante. Ainsi, le fait de voler habituellement (trois fois
par mois) ne suffit pas à caractériser le vol d’infraction d’habitude mais peut constituer un cas
de récidive dans l’hypothèse de plusieurs condamnations pénales.

102. La distinction entre infraction isolée et infraction d’habitude est intéressante à plus
d’un titre. Elle permet de déterminer le point de départ du délai de prescription de l'action
publique. S’il s’agit d’une l'infraction d'habitude le délai de prescription commence à
courir, le jour où le dernier acte constitutif, c’est-à-dire celui qui a réalisé l'infraction, a été
consommé.

1.
225. 1 Le Tribunal d’Aix-en-Provence a estimé qu’un seul avortement effectué par une personne n’ayant pas
la qualité de médecin reste insuffisant pour constituer l’exercice illégal de la médecine (Trib. d’Aix-en-
Provence, 10 mars 1977, JCP 1978, II, 18831, note Remplon).
226. 2 V. Tribunal Correctionnel Orléans, 29 novembre 1950, JCP, 1951, II, 6195, note LARGUIER.

119
Précis De Droit Pénal Général

Elle permet également de savoir à quel moment l'action civile peut être exercée devant le
juge répressif puisque celle-ci n'est possible que lorsque l'infraction est pleinement réalisée1.

Enfin, l'intérêt de cette distinction réside également dans le fait que la loi pénale nouvelle
même rigoureuse s'applique à l'infraction d'habitude toutes les fois que le dernier acte la
réalisant intervient postérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi.

d - L’infraction simple et l’infraction complexe proprement dite

103. L'infraction complexe consiste à l'accomplissement de plusieurs actes matériels distincts


s'enchaînant et permettant d'aboutir à un acte unique qui constitue l'infraction. Différents faits
sont accomplis et concourent à un objectif unique. L’élément matériel est composé de plusieurs
actes. C'est l'exemple de l'escroquerie (art. 477 du CP) qui comporte plusieurs faits pluri-
caractériels. Sa constitution nécessite l'enchaînement d'actes frauduleux. Certains actes
émanent de l’escroc en l’occurrence les manœuvres frauduleuses tendant à obtenir un avantage
de la part de la personne trompée. Cette dernière, la victime, agit également en accordant
l’avantage attendu par l’escroc (par la remise d’une chose par exemple). L’abus de confiance
(art. 487 du CP) peut également être considéré comme une infraction de nature complexe
même si certains auteurs le classe parmi la catégorie des infractions simples. Il nécessite
l’intervention de plusieurs actes, les uns émanant de la victime notamment la remise d’une
chose et les autres émanant de l’auteur de l’infraction notamment le détournement ou la
dissipation du bien remis. En somme, l’infraction complexe peut être comparée à un puzzle
qui, pour former l’image, nécessite l’assemblage de toutes les pièces la constituant.

104. La distinction entre l’infraction simple et l'infraction complexe permet de repérer le point
de départ de la prescription de l'action. Le délai de prescription court lorsque le dernier acte
conduisant à la réalisation complète de l'infraction a été accompli dans le cas de l’infraction
complexe. En outre, le caractère plural des actes constituant l’infraction fait que le
commencement d’exécution est retardé par rapport à l’infraction simple qui nécessite
l’accomplissement d’un acte unique. Dans le cas de l’escroquerie, l’usage d’un moyen
frauduleux constitue un simple acte préparatoire, l’acte de la victime étant nécessaire pour
dépasser ce stade et aboutir au commencement d’exécution de l’escroquerie.

105. En droit interne comme en droit international, elle permet de déterminer la compétence
territoriale. Dans certains systèmes pénaux, l'accomplissement d'un ou de plusieurs actes
constitutifs d'une infraction sur le territoire national entraîne l'application de la loi pénale
nationale2, peu importe si les autres actes ont été effectués hors de ce territoire. Le législateur
burkinabé prévoit, dans certains domaines cette compétence. C’est l’exemple de certaines
infractions transnationales liées à la législation des drogues. En effet, les juridictions burkinabé
sont compétentes pour examiner une affaire portant sur le trafic illicite de stupéfiants lorsque
l’un des actes constitutifs de l’infraction a été accompli sur le territoire national (art. 76, al.1 du
Code des drogues).

1.
227. 1 V. Cass., Chambres réunies, 4 novembre 1839, S. 1854, I, 404.
228. 2 V. Cass. crim. 6 janvier 1972, Dalloz Périodique (D. P.), 1972, I, 142,

120
Précis De Droit Pénal Général

e - L’infraction flagrante et l’infraction non flagrante

106. Une infraction est flagrante lorsqu’elle est en train de se commettre ou vient de se
commettre (ex. : "prendre quelqu’un la main dans le sac ", dans un cas de vol). Il y a
également une infraction flagrante quand l’auteur présumé fait l’objet de poursuite par la
clameur publique ou est trouvé en possession du fruit de l’infraction. Il en est de même lorsque
cet auteur présente des indices ou des traces permettant de soupçonner sa participation à la
commission de l’infraction. Enfin, l’infraction est considérée comme flagrante lorsqu’elle a été
« commise dans une maison dont le chef requiert le Procureur ou un officier de police
judiciaire » en vue de la constatation de celle-ci (art. 52 du CPP). En revanche, l’infraction
non flagrante est celle qui a été commise depuis un certain temps (en général, ce temps est
plus long par comparaison au temps de l’infraction flagrante).

107. La distinction permet de déterminer le type de procédure applicable. En principe c’est


la procédure de "flagrant délit"qui est applicable en cas d’infraction flagrante. La poursuite,
l’instruction et le jugement sont rapides en cas d’application de la procédure "d’infraction
flagrante". Dans cette hypothèse les conditions, notamment de garde à vue et de perquisition
dérogent aux règles d’enquête préliminaire (art 53 à 72 et art 393 du CPP). En cas d’infraction
flagrante, l’inviolabilité parlementaire est écartée : les poursuites peuvent être engagées contre
le député soupçonné. En effet, aux termes de l’art. 96 de la Constitution, « sauf cas de flagrant
délit, aucun député ne peut être poursuivi ou arrêté en matière correctionnelle ou criminelle
qu’avec l’autorisation d’au moins un tiers des membres de l’Assemblée pendant les sessions ou
du bureau de l’Assemblée en dehors des sessions ». Néanmoins certaines catégories
d’infraction bien qu’ayant le caractère flagrant ne sont pas soumises à la procédure d’infraction
flagrante (cas de la diffamation).

2 – La distinction issue de l’élément moral de l'infraction

108. Ce critère se réfère à l’état d’esprit de l’individu. C’est un critère qui permet de faire la
distinction entre les infractions intentionnelles et les infractions non intentionnelles.

Une infraction est classée dans la catégorie de celles de caractère intentionnel, quand sa
réalisation nécessite, chez l'agent, une intention de commettre un acte illicite (exemple :
homicide volontaire, il faut qu'il ait voulu tuer). Il est exigé une intention coupable. L’agent
désire atteindre le résultat illicite. Dans le cas d’un vol (art. 449 du CP), l’agent a délibérément
voulu s’approprier frauduleusement un bien appartenant à autrui.

En revanche, l'infraction non intentionnelle n'est pas soumise à l'intervention d'une volonté
coupable. Elle est réputée commise dès lors que tous les éléments constitutifs sont réunis,
même si l'agent n'avait aucune intention d'enfreindre aux prescriptions légales. La bonne foi ne
joue pas dans ce cas. C’est l’exemple d’un stationnement irrégulier : même si l'auteur n'a pas
pu voir le panneau indiquant l'interdiction et a stationné de bonne foi, le stationnement
irrégulier est consommé.

109. Cette distinction est, à plus d’un titre, intéressante. La preuve est établie par la seule
présence du résultat illicite, dans l’hypothèse d’une infraction non intentionnelle, ce qui n’est
pas le cas concernant l’infraction de type intentionnel.

121
Précis De Droit Pénal Général

La jurisprudence n’admet l’exonération de responsabilité pénale que dans l’hypothèse où la


personne accusée d’infraction non intentionnelle parvient à démonter un cas de force majeure1.

L’erreur de fait n’a pas d’influence sur la constance d’une infraction non intentionnelle. Or,
elle peut permettre la conversion d’une infraction intentionnelle en une infraction non
intentionnelle. C’est l’exemple du chasseur qui tue (meurtre) par erreur un autre chasseur en
croyant tirer sur un buffle. Il est coupable d’un homicide involontaire (délit par imprudence).
L’erreur supprime, ici, l’intention coupable.
La jurisprudence française n’admet pas la légitime défense, en cas d’infraction non
intentionnelle commise par l’agresseur2.

Enfin la tentative est toujours punissable en matière de crime intentionnel alors qu’elle ne l’est
pas, en principe, dans les hypothèses de délit d’imprudence et de contravention.

1.
229. 1 Cass. crim. 31 juillet 1937, DH 1937, 523.
230. 2 Cass. crim fr.16 février 1967, JCP 1967, II, 15034, note COMBALDIEU ; Cass crim. Française, 28
novembre 1991, Bull. Crim, RSC, 1992, 751, obs. LEVASSEUR ; Cass crim. Française 21 février
1996, D. 1997, 234, note PAULIN.

122
Précis De Droit Pénal Général

TITRE II– LES COMPOSANTS DE L’INFRACTION

123
Précis De Droit Pénal Général

La loi définit ce qui est matériellement interdit tout en précisant de façon plus ou moins
implicite si l'intervention de la volonté est nécessaire pour aboutir à une constitution effective
de l'infraction. Face à un acte commis, il est nécessaire de vérifier le texte d’incrimination afin
de s’assurer que ces faits correspondent au comportement ou aux actes incriminés (par la loi).
La vérification de la conformité du comportement en cause au texte d’incrimination ne suffit
pas à conclure à la culpabilité de l’individu. Il faut, en outre s’interroger l’état de conscience de
l’individu au moment où il accomplissait l’acte c’est-à-dire la volonté coupable (mens rea). De
façon générale, la constitution d'une infraction nécessite la réunion d'un élément matériel,
manifestation extérieure de la volonté (Chapitre I) et d'un élément moral ou psychologique
(Chapitre II), état d’esprit au moment de la commission de l’acte illicite (attitude
intellectuelle).

Quelques auteurs distinguent trois éléments constitutifs de l’infraction au lieu de deux :


l’élément légal, l’élément matériel et l’élément moral. Or, l’élément légal et l’élément
matériel peuvent être confondus pour former l’élément matériel dans la mesure où les deux
éléments concernent le comportement physique de l’individu1. L’élément moral vise le
comportement psychologique de l’individu.

1.
231. 1 J-H. ROBERT, « Droit pénal général », 6éme édition, PUF, 2005, p.103 & 104.

124
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE I – L'ÈLÉMENT MATÉRIEL

La commission d’une infraction nécessite une activité matérielle. Un comportement n’est


punissable que s’il correspond à la description légale. L'élément matériel suppose un fait
négatif ou un fait positif. Il est déduit du texte qui incrimine abstraitement l'acte,
l’incrimination étant la description du comportement ou de l’acte prohibé. Les incriminations
sont produites ou rédigées soit par le législateur soit par l’exécutif. Pour les infractions donnant
lieu à une sanction criminelle ou délictuelle, la rédaction relève, en principe, de la compétence
du législateur. Les incriminations relatives à des sanctions contraventionnelles sont, en
principe, rédigées par l’exécutif.

Un acte s'avère donc nécessaire (Section I). L'infraction peut être commise par plusieurs
personnes et dans cette hypothèse l'on est en droit de se demander comment déterminer
l'élément matériel (Section II).

SECTION I - LA NÉCESSITÉ D'UN ACTE D’EXÉCUTION

110. L’acte matériel d’exécution permet de déterminer les opérations aboutissant à la


commission de l’infraction. L'élément matériel peut résulter d'un acte positif (commission par
action) ou d'un acte négatif (commission par omission) (§1). Ces actes ne sont pas
nécessairement achevés, ils peuvent présenter un caractère incomplet (§2), interpellant (dans ce
cas) sur la constance de l’infraction. Dans tous les cas, il faut un comportement actif.

§ 1- L’ACTE DE COMMISSION (INFRACTION D’ACTION) ET L'ACTE


D’OMISSION

111. L'élément matériel peut consister à faire ce qui est interdit par la loi. Il s’agit dans ce cas
d’un acte positif. C’est aussi une obligation de ne pas faire pénalement sanctionnée. Ainsi,
voler c’est soustraire une chose appartenant à autrui (art. 449 du CP); l’escroquerie consiste en
un mensonge, en une tromperie déterminant la remise ou l’obtention d’une chose (art. 477 du
CP); le meurtre c’est la suppression volontaire de la vie d'un être humain (art. 318 du CP).
L'infraction est, dans ces exemples, commise par action. L’acte positif se traduit par une
activité physique de l’agent notamment des gestes, des paroles, des écrits, des dessins. Les
actes positifs sont plus nombreux et divers.

La loi pénale non seulement édicte des interdictions de faire mais édicte aussi des obligations
de faire. Dans la dernière hypothèse l’inertie de l’agent constitue une infraction. L'acte négatif
qui consiste à s'abstenir de faire ou en une omission peut donc constituer l'élément matériel
(non déclaration de naissance, non assistance à personne en danger, non déclaration des
travailleurs engagés…). C’est la passivité de l’agent qui lui est reprochée. L’abstention de
l’individu, dans le cas de l’obligation pénale de faire, l’expose à des poursuites pénales. Cette
situation correspond à une règle de l’ancien droit : « Qui peut et n’empêche, pèche ».

125
Précis De Droit Pénal Général

112. Il va sans dire qu’il est nécessaire qu’il y ait un lien de causalité entre l’acte commis et le
résultat (l’infraction concernée)1. Cela signifie que l’infraction commise est la résultante du
comportement de l’agent.
On peut se demander dans ces conditions si l'infraction inachevée peut constituer un acte
matériel.

§ 2- L'ACTE INACHEVÉ

La commission d'une infraction comporte des étapes. En principe, la commission est parfaite
lorsque l'acte incriminé a connu un accomplissement complet. Mais, certains actes peuvent
s'avérer soit incomplets soit impossibles. Dans le premier cas, il peut s'agir d'une tentative de
commission (1) et dans le second d'une infraction impossible (2).

1 - La tentative

113. La tentative peut se définir comme l’acte qui n’a pas pu être achevé dans la mesure où
son auteur n’a pas atteint le résultat escompté qui est la consommation de l’infraction.
L’infraction tentée est donc une entreprise illicite non terminée. La loi en donne la
définition suivante : « La tentative consiste dans l’entreprise de commettre un crime, un délit,
manifestée par des actes non équivoques… » (art. 59 du CP). L’agent peut, en effet, se trouver
dans une situation qui ne lui a pas permis d’avoir le temps nécessaire pour réaliser son projet
délictueux. Les opérations engagées en vue de commettre l’acte prohibé peuvent également
être interrompues : c’est une tentative interrompue. L’agent peut aussi accomplir vainement
(cas d’échec) les opérations nécessaires à la consommation de l’infraction : c’est une tentative
infructueuse. Or, certains actes bien qu’ils soient partiellement accomplis sont soumis aux
mêmes conditions de sanction que les mêmes actes achevés (art.59 à 62 du CP). Ces
hypothèses interpellent donc sur la possibilité de sanction des actes inachevés.

D'une manière générale, l'infraction, en particulier le crime, connaît plusieurs phases avant
d'aboutir à la réalisation. Il s'agit de la résolution criminelle, de la préparation de l'infraction et
du commencement de son exécution. Ces actes constituent des éléments de l’iter criminis (le
processus criminel) c’est-à-dire le chemin du crime (du projet à l’exécution). Il en résulte que
les actes n’acquièrent la qualité d’infraction qu’après la succession et la matérialisation d’un
certain nombre d’actes. Ce qui conduit à se demander si les actes accomplis à n’importe quelle
stade sont susceptibles de sanction.

114. La formation de la résolution illicite (pensée criminelle) ou la représentation


psychologique de l'acte constitue la résolution. A cette phase, l'agent pense simplement à l'acte.
Il le projette sans pour autant agir : l’idée est en train de germer. La pensée coupable, à cette
étape, n’est pas, en général, extériorisée. Certains agents s'arrêtent à cette phase. En principe,
les actes constituant la phase de la pensée criminelle ne sont pas punissables sauf dans le cas où
la loi en décide autrement. Une telle impunité peut s’expliquer par le fait qu’à ce stade la
société n’est pas troublée. En outre, il s’agit d’une étape où les actes peuvent revêtir un

1.
232. 1 V. Y. MAYAUD, "Quelle certitude pour le lien de causalité dans la théorie de la responsabilité
pénale ?", in Mélanges A. Decocq, Litec 2004, p. 475.

126
Précis De Droit Pénal Général

caractère équivoque. L’impunité à ce stade permet de respecter la liberté de penser et de


« récompenser » le repentir (actif).

Toutefois, en droit burkinabé, la résolution est punissable, dans quelques cas. Il en est ainsi
dans le cas d’une infraction d’association de malfaiteurs. La loi (art. 222 du CP) burkinabé
prescrit expressément l’existence de cette infraction dès la phase de la résolution en ces
termes : « Toute association ou entente quels que soient sa durée et le nombre de ses membres,
formée ou établie dans le but de préparer ou de commettre des crimes contre les personnes ou
les propriétés, constitue le crime d’association de malfaiteurs qui existe par le seul fait de la
résolution d’agir arrêtée en commun ». Tout agent se trouvant donc dans la situation décrite est
punissable conformément aux prescriptions de l’article 223 du CP: «Est puni d’un
emprisonnement de cinq à dix ans, tout individu faisant partie de l’association ou entente
définie à l’article 222… ». Le complot illustre également cette situation. La loi prescrit : « il y a
complot dès que la résolution d’agir est concertée et arrêtée entre deux ou plusieurs personne
en vue …»

Après la formation de la résolution peut intervenir la résolution criminelle proprement dite qui
consiste à décider de commettre l’infraction. Dans ce cas l’agent ne s’arrête pas à la simple
pensée : il prend la décision de passer à l’acte.

115. La préparation consiste en l'accomplissement de simples actes préparatoires non


punissables sauf si l'acte préparatoire constitue lui-même une infraction (exemples : du port
illégal d'arme, port d’arme prohibé) ou si la loi en dispose autrement. Les actes sont
extériorisés dans cette hypothèse. Cette phase est celle de la recherche et de la réunion des
moyens et des instruments nécessaires à la commission de l’infraction. L’agent prépare
l’exécution des actes constitutifs de l’infraction. A cette étape, il a encore la possibilité de
renoncer au passage à l’acte. Certains auteurs, (notamment LABORDE et CHAMBON),
estiment que l’acte préparatoire a un caractère équivoque1. Il est difficile, par exemple,
d’établir que l’achat d’une arme constitue un acte entrant dans la préparation d’un meurtre ou
d’un vol à main armée. Cette difficulté se présente également lorsqu’un individu est trouvé en
possession d’une binette avec laquelle, il entend forcer une porte pour voler. A ce stade, il n’y a
pas véritablement atteinte à l’ordre public : l’ordre social n’est pas sérieusement troublé. En
principe, l’acte préparatoire n’est pas punissable : « l’acte préparatoire ne constitue pas une
infraction sauf dispositions légales contraires » (art. 61 du CP).

116. Quant au commencement d'exécution, il dénote souvent une certaine volonté de l'auteur
d'atteindre son but. C’est la dernière étape de la commission de l’infraction même si la
frontière entre la phase préparatoire et celle-ci reste étroite. L’individu a un comportement qui
lui permet de violer la loi pénale. Selon la Cour de cassation française (chambre criminelle),
"Le commencement d'exécution est caractérisé par des actes qui tendent directement à
l'infraction avec l'intention de la commettre"2. Le commencement d’exécution est appréhendé
sous plusieurs angles. Sa définition dépend du courant doctrinal : conceptions objectiviste,
subjectiviste et mixte.

1.
233. 1 V. CHAMBON, note, sous Cass. Crim., 28 octobre 1959, JCP, 1959, 11343.
234. 2 V. Cass. crim. fr., 29 décembre 1970, JCP 1971, II, 16770.

127
Précis De Droit Pénal Général

117. La conception dite objective retient l’exécution matérielle de l’acte comme critère
essentiel de définition. Elle exige la réalisation d’au moins un acte tendant vers la constitution
de l’infraction. Elle écarte de cette notion, les actes non encore extériorisés, conduisant à une
interprétation de l’état psychologique de l’agent. Pour certains partisans de cette doctrine, le
commencement d’exécution n’est effectif que si l’agent a accompli un acte matériel relevant
des éléments constitutifs de l’infraction. Ainsi, appréhender l'objet à voler est un
commencement d'exécution tandis que tendre le bras vers celui-ci pour s'en saisir n'est pas un
commencement d'exécution. L’accomplissement d’un acte constitutif de circonstances
aggravantes est également retenu comme un commencement d’exécution. C’est le cas d’une
personne qui arrache nuitamment la toiture d’une maison pour pouvoir s’y introduire afin de
cambrioler.

Cette doctrine, défendue notamment par ORTOLAN1 et HELIE2, considère que l'acte
préparatoire de l'infraction ne doit pas être pris en compte dans la constitution de la tentative
tandis que le commencement d'exécution doit l'être. Selon cette conception, si les actes en
cause n’ont pas le caractère d’éléments constitutifs d’une infraction ou d’une circonstance
aggravante (escalader un mur ou forcer une porte dans le cas du vol), ils doivent être classés
dans la catégorie des actes préparatoires qui ne sont pas punissables. Ainsi, celui qui pénètre
dans une maison par effraction peut être poursuivi pour tentative de vol alors qu’il est
pratiquement impossible de le punir pour tentative de meurtre. Dans le cas des circonstances
aggravantes, la tentative de certaines infractions échappe facilement à la punition. Les actes
considérés comme circonstances aggravantes ne permettent pas d’établir clairement que l’agent
entame l’exécution d’un meurtre même si c’est le but poursuivi.

D’autres partisans de cette doctrine estiment que le comportement de l’individu doit être
tel qu’on peut clairement établir qu’il entame l’exécution de l’acte prohibé. La Cour de
cassation française a implicitement estimé que, le fait pour un client de modifier les prix des
marchandises indiqués sur les étiquettes avant de se présenter à la caisse du supermarché pour
le règlement des produits achetés, constitue un comportement univoque3. La chambre
criminelle a jugé que de tels agissements sont constitutifs d’une tentative d’escroquerie.

Cette conception a l’inconvénient de permettre à certains actes (notamment ceux qui révèlent
une intention criminelle manifeste) d'échapper à une sanction. Dans cette hypothèse, les
agissements précédant la phase du commencement ne sont pas considérés comme une tentative
punissable. En revanche, ce critère est d’application facile dans la mesure où il renvoie aux
éléments matériels constitutifs de l’infraction ou constitutifs de circonstances aggravantes
prescrites par la loi. Il permet d’amoindrir les erreurs.

118. Quant à la seconde conception, dite subjective, elle considère que la formation
psychologique définitive est un commencement d'exécution. Cette thèse soutenue notamment
par Donnedieu de VABRES, VIDAL, MAGNOL, se réfère à l’état d’esprit de l’agent. C’est
ainsi que les deux derniers auteurs affirment qu’il y a commencement d’exécution « quand
l’agent s’est montré décidé à courir les risques de l’entreprise, quand il a entendu couper les
ponts derrière lui ». L’individu persiste donc dans son entreprise illicite et a emprunté un
« chemin de non retour ». Il est fermement décidé à atteindre le résultat illicite. Selon cette
1.
235. 1 J. ORTOLAN, "Eléments de droit pénal ", I, 4ème édit., 1875, n°1012.
236. 2 V. A. CHAVEAU & F. HELIE, "Théorie du code pénal", 5ème édit. , 1877, n° 253.
237. 3 V. Cass. crim. fr., 9 mars 1983 , JCP 1983, p. 162

128
Précis De Droit Pénal Général

thèse, la tentative est punissable quand le dessein criminel (intention de commettre l’infraction)
est irrévocable. Dans cette hypothèse, la volonté d’accomplir l’acte illicite est nettement,
clairement établie. Certains auteurs estiment qu’en ce moment, l'acte a un caractère univoque.
L’acte est univoque1 quand il se présente de telle sorte que la volonté d’accomplir est
définitivement arrêtée et tend étroitement vers le but à atteindre. Selon cette thèse, dès lors que
l'intention est étroitement liée à l'acte final ou en est très proche ou encore est en rapport direct
avec le but à atteindre, le commencement d'exécution est constant. Ainsi, la Cour de cassation
française a jugé, dans une décision, que le fait, pour deux individus de s’approcher d’un bureau
de poste portant chacun une cagoule et pour un troisième individu de détenir une arme, doit
être considéré comme une tentative punissable2. En d’autres termes, les comportements des
trois individus sont de nature à conclure à un commencement d’exécution. Cette Cour a
également admis comme commencement d’exécution de l’infraction de proxénétisme, le fait de
séquestrer une femme pendant deux semaines en lui proposant des relations sexuelles
rémunérées avec des hommes3.

Cette conception a l’avantage d’élargir le champ d’application de la tentative punissable.


Elle favorise la sanction du délinquant avant la consommation totale de l’acte (la sanction
intervient assez tôt : quand la résolution est devenue définitive). Elle permet, par la même
occasion, d’amoindrir la gravité du tort subséquent, dans la mesure où, à ce stade du chemin du
crime, peu d’actes nécessaires à l’accomplissement de l’infraction sont accomplis. Cette
conception est susceptible d’engendrer des problèmes de preuve. Il reste difficile de démontrer
que l’agent a emprunté le « chemin du non retour ». C’est ainsi que la Cour de Cassation
française a refusé de retenir comme commencement d’exécution d’un meurtre, le fait de donner
des instructions à un individu et de lui remettre de l’argent pour commettre le meurtre. Ces
actes ne sont pas directement liables à la phase d’exécution de l’infraction d’homicide
volontaire4. Par contre, cette même juridiction a jugé qu’il y a tentative d’agression sexuelle car
l’auteur présumé a porté un préservatif et a caressé la poitrine de la victime5. Aussi, s’asseoir
en état d’ébriété dans un véhicule et essayer de le démarrer constituent-ils des actes
caractérisant un début d’exécution du délit de conduite en état d’ébriété6.

119. Enfin, un autre courant a opté pour la mixité de la conception du commencement


d’exécution. Il s’agit de la conception mixte. Ce courant tente de concilier les deux
conceptions afin d’éviter les risques d’arbitraire. Pour les partisans de cette conception, le
début d’exécution est constant lorsqu’un acte matériel a été accompli (thèse objective) et que
cet acte ne peut être expliqué que par l’intention de réaliser l’infraction (thèse subjective). Le
commencement d’exécution ne peut donc être effectif que si l’agent a un comportement
tendant directement et immédiatement à concrétiser l’acte illicite. Les actes équivoques ou les
comportements douteux ne sont donc pas admis par cette doctrine. Un lien direct ou étroit et
clair doit exister entre l’acte de l’individu et l’infraction à commettre. Il faut donc qu’il y ait
une proximité. La jurisprudence française a estimé, à ce titre, qu’il n’existe pas de lien clair, ni

1.
238. 1 La théorie de l’acte univoque est l’œuvre d’un auteur italien du XIX ème siècle : F. CARRARA.
239. 2 Cass. crim. fr., 19 juin 1979, Bull. Crim. 1979, n°219.
240. 3 V. Cass. Crim. fr. 22 janvier 1963, D. 1963, 389.
241. 4 V. Cass. Crim. fr. 25 octobre 1962, JCP 1963, II., 12985, note VOUIN.
242. 5 V. Cass. Crim. fr. 10 janvier 1996, Bull. Crim., 1996, n°14.
243. 6 V. Cass. Crim. fr. 2 février 1960, Bull. Crim., 1960, n°71. La chambre criminelle (française) a
également conclu à l’existence d’un début d’exécution relativement au fait qu’un faux médecin ait
demandé à une dame de se déshabiller pour un examen médical en vue d’une embauche. La Cour a
estimé qu’il y a eu une tentative d’agression sexuelle (cass. crim. 19 juin 1995, RSC 1996, p. 365).

129
Précis De Droit Pénal Général

direct entre la remise de fonds à un tueur qui a, par la suite, renoncé à la concrétisation (de
l’acte prohibé) et l’infraction. La chambre criminelle française a jugé que la destruction d’un
bien assuré n’a pas eu pour conséquence directe et immédiate le début d’exécution de
l’infraction d’escroquerie à l’assurance, en raison du fait que l’individu n’a pas adressé une
demande de remboursement à l’assurance1.

120. La loi burkinabé (art. 59, al.1 du CP) définit, en effet, la tentative en ces termes : « La
tentative consiste dans l’entreprise de commettre un crime ou un délit, manifestée par des
actes non équivoques tendant à son exécution, si ceux-ci n’ont été suspendus ou n’ont manqué
leur effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de leur auteur … ». Ces
dispositions sous-entendent le fait que les actes ne peuvent faire l’objet d’une sanction que
lorsque le projet criminel est extériorisé : l’agent enclenche l’action d’exécution. La définition
de la tentative donnée par le législateur burkinabé tient compte à la fois des aspects objectifs et
des aspects subjectifs. Elle peut donc être rapprochée de la conception mixte car elle exige un
acte univoque tendant à la réalisation de l’infraction. Dans tous les cas, pour la répression de la
tentative, le législateur part de la phase de commencement d’exécution et prévoit des cas
d’exonération de sanction.

Toutes ces phases précédant l'accomplissement parfait de l'acte posent donc le problème de
sanction de la tentative d'une infraction. Le commencement d'exécution ne suffit pas à
constituer une tentative. Celle-ci ne sera pleinement constituée que dans le cas où l'agent
persisterait dans son entreprise coupable. Lorsqu’il se désiste de son acte fautif de façon libre et
volontaire, la tentative n'est pas punissable. Le législateur tend, dans ces conditions, à
encourager l’individu à s’écarter de son projet criminel.
En revanche, lorsque la suspension de l'exécution ou le désistement est dû à une cause
extérieure, indépendante de la volonté de l'agent, la tentative est punissable. Le désistement
exonère l'agent donc de la sanction. En somme, la tentative échappe à la punition ou disculpe à
deux conditions : un désistement volontaire circonscrit dans un temps donné.

121. Il faut un désistement volontaire, spontané de la part de l'agent pour bénéficier de


l’impunité (quant à un acte tenté). Le désistement volontaire consiste à renoncer ou à
abandonner volontairement le projet criminel engagé. Le désistement ou l’interruption du
processus criminel doit résulter de la volonté de l'agent et non de la conséquence d’un
événement extérieur. L'acte ne doit donc être arrêté, suspendu ou manqué sous aucune
contrainte extérieure ou sous l’intervention de circonstance extérieure. Ainsi concernant
l’infraction d’attroupement armé, l’acte est punissable s’il est abandonné après sommation :
« est puni d’un emprisonnement de quinze jours à deux mois quiconque faisant partie d’un
attroupement ne l’abandonne qu’après sommation » (art. 127 du CP). Ici le désistement n’est
pas volontaire car l’acte est arrêté grâce à la sommation. Pour caractériser le désistement de
volontaire, la volonté de se désister doit être déterminante et non déterminée par un évènement
extérieur. Le manque de coordination, l’arrivée d’une tierce personne sont donc inopérants.
Ainsi, un assassin qui s'apprête à tuer sa victime et est arrêté par le déclenchement d'une alarme
ne peut bénéficier d’une exonération de responsabilité. Le désistement n’est pas non plus
volontaire dans le cas d’un individu qui était sur le point de consommer des relations sexuelles
et qui a été arrêté par une déficience physique2. En revanche, celui qui s'apprête à abattre sa
victime d'un coup de revolver et interrompt son acte par pitié échappe à la sanction. Le motif
1.
244. 1 Cass. crim. fr., 22 mai 1984, D. 1984, 602, note ROBERT.
245. 2 V. Cass. crim.. fr. 10 janvier 1996, Bull. Crim. 1996, n°14.

130
Précis De Droit Pénal Général

du désistement importe peu : pitié, peur, remords, crainte d'être sanctionné. Une cour d’appel
française a jugé qu’un détenu a désisté volontairement car, il avait commencé à desceller les
barreaux de sa cellule quand, il tint informé le surveillant de la « bêtise » commise1.

La Cour de cassation française a également reconnu l’existence d’un désistement volontaire


en faveur d’un agent qui a pris la résolution de cambrioler un bureau de tabac et qui a, par la
suite, abandonné son projet sur les conseils de son ami2. Dans ce dernier cas d’espèce,
l’intervention d’un tiers avant la consommation de l’infraction a permis de caractériser le
désistement de volontaire même si dans ce cas le renoncement n’a pas été spontané. Le
Tribunal de Fort-de-France a eu la même conclusion par rapport à un pilleur de sépulture qui
a interrompu son acte, en raison de l’horreur éprouvée au cours de son entreprise3.

L’appréciation du désistement volontaire est sujette à quelques difficultés lorsque interviennent


à la fois le renoncement volontaire et une circonstance extérieure. Il s’agit d’une situation
intermédiaire car le désistement n’est pas parfaitement libre. C’est le cas de l’individu qui
s’arrête parce qu’il a entendu tout simplement du bruit et a eu peur. La doctrine propose, dans
ce cas, la prise en compte de la cause prépondérante de l’abandon. En effet, MERLE et VITU
préconisent la détermination de « la cause prépondérante du renoncement : la cause externe ou
la cause interne ? »4. La position de la jurisprudence est souvent différente. En effet, dans la
plupart des cas elle estime que le désistement n’a pas un caractère volontaire5.

Le désistement volontaire n’est valable que s’il remplit des conditions de temps. Le moment
du désistement est déterminant par rapport à la caractérisation du désistement. Le désistement
doit intervenir antérieurement à la consommation complète de l'acte. Il est donc situé à la
phase de commencement d’exécution de l’infraction. Celui qui, par exemple, donne un antidote
à la victime après lui avoir administré du poison ne peut bénéficier de l'impunité. Il s'agit d'un
repentir actif6 qui peut permettre à l'auteur de bénéficier de circonstances atténuantes ou d'une
modération de la sanction. Le repentir actif peut, dans certains cas, amener le ministère public à
classer l’affaire.

Une distinction doit être faite entre désistement volontaire et repentir actif. Le désistement
intervient avant la consommation de l’acte illicite (exemple de celui qui s’apprête à voler un
objet et décide avant le passage à l’acte de ne pas le faire) tandis que, dans le cas du repentir, la
réaction de l’agent est postérieure à la consommation de l’acte (exemple de celui qui vole
l’objet et le restitue à son propriétaire car il a été pris de remords). Le repentir actif n’a pas
d’effet sur le caractère délictueux de l’acte : l’individu s’expose aux poursuites. L’agent, qui
dans un cas d’abus de confiance, indemnise l’individu ou restitue le bien, ne peut s’attendre à

1.
246. 1 V. Observations de VERON sous Cour d’Appel Douai, 6 mai 2003, Droit Pénal, 2003, n° 122.
247. 2 Cass. crim. fr. 20 mars 1974, in RSC., 1974, 575.
248. 3 Tribunal de Fort-de-France, 22 septembre 1967, JCP, 1968, II, 15583, note P.G. BISWANG.
249. 4 V. R. MERLE et A. VITU, op. cit. , n°503.
250. 5 V. Cass. crim. fr. , 29 mai 1902, D. 1904, I, 31 ( cas d’un désistement par crainte d’être dénoncé par un
témoin) ; Cass. crim., 15 mai 1946, Gaz. Pal., 1946, I, 255 (arrêt d’un avortement à cause de la douleur
ressentie par la patiente) ;
251. V. 6 P. SAVEY-CASARD, "Le repentir actif en droit pénal français", RSC, 1972, 515.

131
Précis De Droit Pénal Général

la disparition de l’infraction1. En matière d’urbanisme par exemple, le défaut de permis de


construire est constant même si l’individu l’a obtenu après la construction2.

122. En droit pénal burkinabé, la tentative est punissable en matière de crime. C’est l’exemple
de la participation à un mouvement insurrectionnel, infraction pour laquelle la loi prévoit, sans
équivoque, la sanction de la tentative en ces termes : « Sont punis d’un emprisonnement de dix
à vingt ans, ceux qui, dans un mouvement insurrectionnel :...occupent ou tentent d’occuper des
édifices ou des propriétés privées ;… » (art. 115 du CP). Malgré le fait que la tentative soit
systématiquement punissable, en matière de crime, le législateur prévoit expressément la
répression dans cet exemple.

La tentative peut être punie quand il s'agit d'un délit. Dans cette dernière hypothèse, elle n’est
punissable que si la loi le prévoit expressément. C’est ainsi que, en matière d’atteinte à la
défense nationale (art. 96 à 107 du CP), il est expressément prévu la sanction de la tentative des
délits. L’article 108 du CP prescrit, en effet, que « la tentative des délits prévus par la présente
section est punissable ». La répression de la tentative en matière de drogue est également
prévue : « La tentative des délits en matière de stupéfiants est punissable » (art. 447 du CP).

Elle n’est pas susceptible de sanction en cas de contravention c’est-à-dire pour les infractions
les moins graves. Il s’agit, en général, d’infractions qui sont commises par imprudence ou par
négligence. Le résultat n’est donc pas voulu par l’auteur de l’acte illicite.

Dans tous les cas, la loi (art. 60 du CP) détermine les circonstances de sanction en ces
termes : « La tentative de crime est toujours punissable.
La tentative de délit n’est punissable que dans les cas prévus par la loi.
La tentative de contravention n’est pas punissable ».
En principe, la tentative lorsqu’elle est punissable obéit aux mêmes règles que celles prévues
pour l’infraction consommée. En d’autres termes, celui qui est reconnu auteur d’une tentative
d’infraction subi, en principe, les mêmes sanctions pénales que celles applicables à l’auteur de
l’infraction complètement accomplie. L’infraction de mutilations génitales féminines en est un
exemple. Tout individu qui tente de porter atteinte à l’intégrité de l’organe génital d’une
personne de sexe féminin est aussi punissable que celui qui a porté atteinte a cette intégrité. La
loi (art. 380 du CP) punit, effectivement, « …d’un emprisonnement de six mois à trois ans et
d’une amende de 150 000 à 900 000 francs ou de l’une de ces deux peines seulement,
quiconque porte ou tente de porter atteinte à l’intégrité de l’organe génital de la femme par
ablation totale, par excision, par infibulation par insensibilisation ou par tout autre moyen… ».

2 - L'infraction impossible

123. L’infraction impossible3 est la situation pour laquelle l’agent n’a obtenu aucun résultat
soit en raison de l’absence de l’objet de l’infraction, soit en raison de l’inadéquation
(emploi d’un pistolet à eau pour tuer) ou de l’inefficacité des moyens employés. Le résultat
1.
252. 1 V. Cass. crim. fr. 18 janvier 1972, Bull. Crim. 1972, n° 26. ; Cass. crim 27 octobre 1916, D. 1920, I,
92.
253. 2 V. Cass. crim. fr. 19 mars 1992, Bull. Crim. 1992, n° 121.
254. 3 V. J. LARGUIER, "La tentative d’escroquerie impossible", RSC 1981, p. 361 ; VARINARD, "La
théorie de l’infraction impossible : vers la disparition d’un mythe doctrinal", in Mélanges Chavanne,
1990, p. 165.

132
Précis De Droit Pénal Général

est, dès le départ, hors d’atteinte. C’est le cas de celui qui égorge un cadavre ou de celui qui
procède à l'avortement d'une femme qui n'est pas en état de grossesse (ici l’objet fait défaut).
C’est aussi le cas de l’usage de produits ne pouvant pas provoquer un avortement
(inadéquation ou inefficacité des moyens). Cette situation conduit à la question de savoir si ces
actes sont punissables, d'où une autre interrogation : l'impossible peut-il être tenté?

124. Il convient de noter que le délit impossible se rapproche du délit manqué qui suppose que
l’agent a mis tous les moyens nécessaires en œuvre pour atteindre le résultat sans succès. Dans
les deux cas, tous les actes constitutifs de l'infraction sont pleinement accomplis et la volonté
criminelle est constante. C’est l’exemple de l'agent qui n'a pas pu commettre le meurtre parce
qu'il s'y est mal pris au cours du tir (infraction manquée). Dans les deux hypothèses la tentative
est infructueuse. Toutefois dans le cas de l'infraction manquée, le résultat aurait pu être atteint
en absence de circonstance indépendante de la volonté de l'agent ou en absence d’obstacle.
L’insuccès est dû soit à une maladresse de l’agent (mauvais tireur) soit à l’intervention d’une
circonstance extérieure (la personne visée a pu quitter la trajectoire de la balle à temps). Or,
dans le cas de l'infraction impossible, le résultat ne peut être objectivement atteint quelles que
soient les circonstances. Ce qui est nécessaire à l’accomplissement de l’acte a été fait par
l’agent mais le résultat est objectivement irréalisable. Dans de telles conditions peut-on pas
assimiler l'infraction impossible à l'infraction tentée?

125. Plusieurs thèses sous-tendent cette question. Une de ces thèses privilégie l’impunité de
l’infraction impossible. En revanche, une seconde tend à favoriser sa répression. La thèse de
l’impossibilité absolue de punition a été développée en 1808, notamment par FUERBACH
(allemand). Les défenseurs de cette thèse s’opposent à l’assimilation du délit impossible au
délit tenté. Ils estiment qu’il est impossible dans une telle situation de commencer l’exécution
de l’acte illicite. En outre, pour ceux-ci, il n’ y a pas de trouble causé à l’ordre social dans
cette hypothèse.

Pour le courant défendant la répression de l’infraction impossible, l’agent auteur d’actes


caractérisant une infraction impossible présente un état dangereux pour la société
contrairement à ce que pense le courant favorable à la non répression. Il ne fait pas de
différence entre la situation de l’auteur d’une infraction interrompue (par un obstacle) et celle
de l’auteur d’une infraction infructueuse. Cette assimilation part du postulat que la répression
du délit tenté est fondée sur l’existence de l’intention réelle de l’auteur de la tentative et non
sur celle du résultat. Or, l’infraction impossible suppose également une intention coupable
(dont la concrétisation est impossible). Mieux, l’infraction impossible renvoie à une situation
où tous les actes constitutifs de l’infraction ont été accomplis.

126. Certains auteurs proposent une solution intermédiaire qui dépend des circonstances :
suivant l’acuité de l’impossibilité de réalisation de l’infraction. Ceux-ci soutiennent une thèse
transactionnelle. Ils distinguent l'impossibilité absolue de l’impossibilité relative.

Il y a impossibilité absolue en cas d'inexistence de l'objet (élément essentiel) de l'infraction


(essayer de tuer la victime antérieurement décédée, vol manqué car absence d'objet à voler) ou
en cas d'inefficacité des moyens (empoisonner une personne en lui administrant une substance
non toxique,..). L’impunité est la solution dans cette hypothèse.

133
Précis De Droit Pénal Général

L'impossibilité est relative dans le cas où l'objet de l'infraction existe mais l'impossibilité de
celle-ci est due aux moyens utilisés (maladresse ou étourderie lors de l'utilisation des moyens :
mal viser la victime ou tirer sur une personne avec une arme non chargée de balle). Selon la
conception transactionnelle, l’infraction impossible se rapproche plus d’une infraction
manquée et à ce titre doit être réprimée.

D'autres auteurs, notamment GARAUD1 et ROUX2 qualifient l'impossibilité absolue


d'impossibilité de droit et celle de caractère relatif d'impossibilité de fait. La première
catégorie d’infraction impossible, selon ces acteurs, résultant de l’absence d’un élément
essentiel de l’infraction ou de l’absence d’un élément de la définition légale de l’infraction
(exemple de l’absence d’une grossesse dans le cas d’un avortement ou encore de celui de
l’absence de substance toxique pour l’empoisonnement) exclut la répression. L’impossibilité
de droit conduit à un défaut d’élément de qualification. C’est ainsi que le meurtre sur un
cadavre déjà décédé est impossible. Pour qu’il ait meurtre, il faut que la victime soit vivante au
moment de la perpétration du crime c’est-à-dire au moment de l’exécution des actes mortels.
Or, la seconde catégorie (impossibilité de fait) est liée aux moyens utilisés ou à l’emplacement
de l’objet visé et mérite une répression (essayer de voler de l’argent alors que les poches sont
momentanément vides). Les thèses transactionnelles ont l’inconvénient de ne pas tenir compte
de l’intention criminelle.

D'une manière générale, l'infraction impossible peut être assimilée à l'infraction tentée puisqu'il
y a un commencement d'exécution, arrêté involontairement. Le résultat n'est pas atteint
indépendamment de la volonté de l'agent. Ainsi, dans l’affaire dite Perdereau, l’intention de
donner la mort est évidente : il y a eu une tentative d’homicide3.

Mais, l'infraction impossible est impunissable en cas d'absence d'intention coupable. C’est
l’exemple de celui qui utilise un pistolet à eau, jouet pour tirer, tout en sachant que cette arme
ne peut point donner la mort. L’impunité s’impose également quand l’acte n’a aucun lien réel
avec le résultat. Ainsi, celui qui tente de tuer en usant de moyens surnaturels, notamment
l’envoûtement, la sorcellerie ("manger l’âme" de quelqu’un à distance), les sortilèges,
l’envoûtement échappe-t-il à la répression. D’ailleurs, la loi burkinabé ne réprime pas la
sorcellerie contrairement aux lois ivoirienne et camerounaise. Ces moyens remplacent l’arme
physique du crime (revolver, poison, couteau, hache…).

En cas d’infraction putative, l’infraction impossible n’est pas non plus punissable car un
élément essentiel constitutif de l’infraction exigé fait défaut. L’infraction est dite putative
lorsqu’elle n’existe que dans l’esprit de l’agent. La tentative de recel (encore moins le recel),
par exemple, est inexistante quand l’agent conserve un bien qu’il croit provenir d’une
infraction alors qu’en réalité, il ne s’agit pas du fruit d’un crime. Il n’y a pas non plus tentative
de polygamie pour celui qui croyait accomplir pour une seconde fois les formalités

1.
255. 1 V. R. GARRAUD, "Traité théorique et pratique de droit pénal", 3ème édit., p. 515 ; Cass. Crim 4
janvier 1895, S. 1896, I, 21, note GARRAUD.
256. 2 V. J.A. ROUX "Cours "de droit criminel français, t. 1, 2 ème édit., 1927 p. 11 & SS.
257. 3 V. arrêt Perdereau, 16 janv.1986, Bull. crim. n°25. Il s’agit d’un cas où un individu a donné des coups
violents à une victime déjà décédée, dans l'objectif de lui donner la mort. La tentative d'homicide
volontaire a été retenue par la Chambre criminelle de la Cour de cassation française qui a jugé qu’il y a
eu début d’exécution de l’infraction de meurtre.

134
Précis De Droit Pénal Général

administratives pour un second mariage (avec Fanta) alors que le premier (contracté avec
Simone) est de caractère religieux et non légal.

SECTION II - L'ÉLÉMENT MATERIEL DE L'INFRACTION EN CAS DE


PLURALITÉ DE PARTICIPANTS

L’infraction n’est pas forcément l’œuvre d’un seul individu. Elle peut être le fruit d’une
participation à un fait collectif, posant le problème de la responsabilité collective1. Plusieurs
individus peuvent prendre part à l’action nécessaire à la réalisation de l’infraction. Elle peut
donc être commise grâce à une concertation plurale (commission collective de l’infraction).
Ainsi, les agents peuvent appartenir à un groupe organisé ou non. En cas de pluralité d'auteurs,
il peut s'agir d'une complicité (§1). Une personne peut être à l’origine de la commission
matérielle de l’infraction et peut avoir à répondre pénalement de cet acte (§2). Il s’agit
d’imputer l’infraction à certains membres d’un groupe.

§1 - LA COMPLICITÉ

La définition de la complicité2 nous permet de la distinguer de la coaction (art 64 et 65 du CP)


(1). La complicité n'est effective et n’est punie (3) que sous certaines conditions (2).

1 - La notion de complicité

127. La complicité suppose, la participation d’au moins une personne à l'accomplissement


d'une infraction commise par un ou plusieurs individus. Il y a donc unicité d’infraction et
pluralité de participants quant à l’accomplissement des actes nécessaires à sa commission.
Cette participation peut consister à coopérer, à assister, à aider l'auteur ou les coauteurs soit
dans la préparation de l'acte soit dans l'exécution matérielle de celui-ci (exemple: celui qui
surveille, pour éviter toute surprise par un tiers, pendant qu'un autre est en train de voler est un
complice). Le complice s'associe à l'auteur de façon incidence ou accessoire au cours de la
commission de l'infraction. Il coopère et facilite la consommation de l'infraction. Il prend part,
de façon indirecte, à la réalisation de l’infraction. Le complice joue le second rôle (socii in
crimine) et en cela, on peut dire qu’il est un participant accessoire3. Il apporte son concours ou
contribue délibérément à l’accomplissement de l’acte défendu. Les actes du complice
constituent des faits accessoires qui favorisent l’accomplissement, par autrui, d’un acte
délictueux. L’individu apporte son aide en vue de contribuer à commettre un acte délictueux.
C’est "un apport en actes" en vue de la constitution d’une infraction.

128. La complicité a conduit certains auteurs à défendre la théorie de la criminalité


d’emprunt. Selon cette théorie, l’acte réalisé par le complice emprunte (tire) sa criminalité
(c’est-à-dire le caractère criminel) de celui accompli par l’auteur ou le coauteur. Pour ces
auteurs, généralement les actes matériels de complicité pris isolement sont dépourvus du
1.
258. 1 V. R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", tome1, 7ème édition, 1997, p. 672 & SS.
259. 2 A. FOURNIER, "La répression de la complicité et ses avatars en droit pénal international", RSC,
2003, p. 13 & SS.
260. 3 V. J.H. ROBERT, "Imputation et complicité", JCP, 1975, I, 2720.

135
Précis De Droit Pénal Général

caractère criminel ou délictueux. Ainsi, la fourniture de l’arme du crime et la surveillance des


lieux du crime ne constituent véritablement des actes pénalement répréhensibles que lorsqu’ils
sont liés à l’infraction commise par l’auteur ou le coauteur. Dans l’esprit du complice, il
accomplit des actes "d’appui" par rapport aux actes prohibés commis par l’auteur. L’acte du
complice qui, en lui-même, peut être dépourvu du caractère infractionnel en se rattachant à
celui de l’auteur est contaminé et prend ce caractère. Le complice ne commet donc pas
personnellement une infraction autonome. Il a favorisé la réalisation de l’acte délictueux de
l’auteur. Ce qui amène à penser que la théorie de l’emprunt de criminalité dans ces conditions
est conforme à la théorie (en droit civil) selon laquelle "l’accessoire suit le principal". Le
régime de l’acte accessoire est identique à celui de l’acte principal. L’acte du complice dépend
étroitement de l’acte de l’auteur ou du coauteur. En somme le complice et l’auteur sont punis
sur la base de la même infraction (unité d’infraction). Le complice a donc délibérément choisi
de lier son sort personnel à celui de l’auteur.

129. A l’analyse de certaines circonstances de commission de l’infraction, il est permis de


penser que la théorie d’emprunt de criminalité n’est pas valable pour tous les cas de complicité.
En effet, dans l’hypothèse d’une complicité pour recel de choses, l’acte du complice peut
s’apprécier de façon autonome. Le recel doit son existence à l’existence d’une autre infraction
c’est-à-dire que son existence est subordonnée à la commission préalable d’une infraction.
Cependant, le juge a la possibilité de ne pas sanctionner l’auteur du recel sur la base de
l’infraction à partir de laquelle, cet acte est né. Malgré le fait que le recel soit conditionné par
l’infraction principal, son auteur peut être poursuivi pour infraction de recel et non pour
complicité. Dans ce cas, le caractère délictueux s’apprécie de façon autonome dans la mesure
où la loi incrimine le recel de choses sous une qualification autonome et permet de punir le
complice non pas sur la base de cette qualité mais sur celle d’auteur.

130. Le complice n'est pas à confondre avec l'auteur ou le coauteur (socii criminis) qui prend
part principalement et directement à l'exécution matérielle de l'acte1. Ces deux derniers jouent
les premiers rôles (ils occupent un rang ex æquo). L’auteur est celui dont le comportement est
à l’origine du trouble social alors que le complice est celui qui a joué un rôle secondaire dans
son accomplissement. La paternité du fait principal est attribuée à l’auteur, lequel a accompli
personnellement tous les actes nécessaires à la réalisation de l’infraction (c’est celui qui
accomplit les actes constitutifs de l’infraction). L’auteur (principal) et le complice n’ont pas les
mêmes intentions. La participation peut être l'œuvre d'une entente préalable (association de
malfaiteurs) comme elle peut intervenir sans cette entente (pillage, fraude douanière). Le
coauteur est un auteur dont les actes se juxtaposent à ceux de l’autre ou des autres participants
à titre principal2. Il y a une conjugaison des fautes de ces participants qui ont volontairement et
principalement pris part à la commission de l’infraction3.

131. Le législateur (art. 65 du CP) sans réellement donner une définition de la complicité
énumère un nombre important d’actes caractérisant la complicité : «Sont complices d’une
action qualifiée crime ou délit :
1.
261. 1 B. BOULOC, "Complicité et relaxe de l’auteur (Cass. crim 8 janvier 2003…)", Chr., 2003, p. 553 &
SS.
262. 2 V. Cass. crim, 14 janvier 1921, S. 1922, 1, 235.
263. 3 La théorie des "fautes conjuguées" signifie que les participants à une même action (dangereuse) ont
joué un rôle qui est la cause du dommage. Les effets de leurs comportements constituent la cause de
l’infraction, ce qui rend chacun pénalement responsable (cass. crim fr. 14 décembre 1967, Bull. Crim.
1967, n° 326).

136
Précis De Droit Pénal Général

- ceux qui auront procuré des armes, des instruments ou tous autres moyens qui auront
servi à l’action sachant qu’ils devaient y servir ;
- ceux qui auront avec connaissance, aidé ou assisté l’auteur ou les auteurs de l’action
dans les faits, qui l’auront préparée, facilitée ou consommée ;
- ceux qui connaissant la conduite criminelle de malfaiteurs exerçant les actes de
brigandage ou des violences contre la sûreté de l’Etat, la paix publique, les personnes ou
les propriétés fournissent habituellement logement, lieu de retraite ou de réunion ;
- ceux qui, en dehors des cas ci-dessus, auront sciemment recelé une personne qu’ils
savaient avoir commis un crime ou un délit et qu’ils savaient de ce fait recherchée par la
justice, ou qui auront soustrait ou tenté de soustraire cette personne aux recherches ou à
l’arrestation, ou l’auront aidée à se cacher ou à prendre la fuite ;
- ceux qui, ayant connaissance d’un crime ou d’un délit déjà tenté ou consommé, n’auront
pas, alors qu’il était encore possible d’en prévenir ou limiter les effets ou qu’on pouvait
penser que les coupables ou l’un d’eux commettraient de nouveaux crimes qu’une
dénonciation pourrait prévenir, averti aussitôt les autorités administratives ou judiciaires.
Sont exclus de ces deux derniers cas, le conjoint, les parents ou alliés du criminel ou de
l’auteur du délit jusqu’au quatrième degré inclus ».

La répression de la complicité quelles que soient les circonstances, doit se faire dans le respect
de certaines conditions (les faits constitutifs de la complicité).

2 – Les conditions de la complicité punissable

L’auteur et le complice bien qu’ayant, tous les deux, pris part activement à la commission de
l’infraction ne sont pas soumis aux mêmes conditions (même s’ils sont punis sous la même
qualification d’infraction : infraction unique). Les règles qui permettent d’imputer l’infraction
au complice et à l’auteur sont différentes. La sanction de la complicité dépend de l’existence
d’un certain nombre de données. La complicité qui est une forme de participation à la
commission d’une infraction suppose l'existence d'un acte principal punissable (a), d'un acte
matériel (b) et d'un élément moral de complicité (c).

a - L'exigence d'un fait principal punissable

132. La complicité est nécessairement liée à un fait ou un acte principal punissable. Elle se
greffe au fait principal et reste accessoire. Il faut donc une infraction commise à titre principal
par un individu (auteur) différent du ou des complices. Le fait principal doit donc être soumis
au principe de légalité des infractions, dans le cas contraire, la complicité n'est pas punissable.
Celui qui, par exemple, a aidé un individu à se suicider, en lui apportant une corde n'est pas, en
principe, punissable (à titre de complice) puisque le suicide ne constitue pas une infraction.
Toutefois, l’aide au suicide constitue une infraction autonome1. A l’article 336 du CP, il est
prévu la répression de l’aide au suicide : « Est puni d’un emprisonnement de un à cinq ans,
quiconque aide sciemment par quelque moyen que ce soit une personne à se suicider ». En
revanche, la jurisprudence française a considéré comme complice, un amant qui a assisté à

1.
264. 1 La provocation au suicide, constitue une infraction en droit pénal français (art. 223-13 du code pénal).

137
Précis De Droit Pénal Général

l'avortement de sa maîtresse car il a apporté un soutien moral à l'auteur de l'avortement par sa


présence1. L’avortement est prévu et puni par la loi2.

Il en ressort que le fait principal doit comporter tous les éléments constitutifs de l’acte
incriminé permettant de le qualifier d’infraction. Le fait principal peut être aussi bien une
infraction complètement exécutée qu’une infraction tentée voire impossible3. Dans les deux
dernières hypothèses, l’infraction doit être punissable. On peut citer, l’exemple de l’article 65,
al. 4 du CP qui prévoit la complicité dans le cas d’une infraction tentée : «ceux qui, ayant
connaissance d’un crime ou d’un délit déjà tenté ou consommé, n’auront pas, alors qu’il était
encore possible d’en prévenir ou limiter les effets … »4.

Le fait principal est, en principe, de nature criminelle ou délictuelle comme le précise la


loi. Mais, il apparaît que le législateur use d’une autre stratégie pour punir des actes qui
répondent à la définition de complicité en matière contraventionnelle. En effet, dans certains
cas d’aide ou d’assistance à la commission d’une contravention, le législateur prévoit une
infraction autonome (de nature contraventionnelle). C’est le cas, en matière de tapage
nocturne5 : « Sont punis de peine de contravention de troisième classe : ...les auteurs ou
complices de bruits, tapages ou attroupements injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité
des habitants ;… » (art. 7 du décret du 28 février 1997 relatif aux contraventions)6.

Le fait principal, dans tous les cas, doit être punissable sinon, il reste impossible de réprimer la
complicité. En conséquence, la prescription du fait principal, le bénéfice d’une immunité (cas
du délit de vol entre époux : art. 515 du CP) ou celui d’une amnistie, le fait qu’il réponde aux
critères d’un fait justificatif (légitime défense, commandement de la loi…) entraînent
l’impunité de la complicité. Il en est de même pour la résolution criminelle ou les actes
préparatoires non punissables. Cependant, la non poursuite de l’auteur principal pour certaines
raisons (de fait ou de droit) n’est pas forcement une cause exonératoire de poursuites au profit
du complice7. Ainsi, si l’auteur principal n’a pas pu être poursuivi parce qu’il a fui ou est
décédé, le complice peut être poursuivi. C’est aussi le cas, s’il a bénéficié d’une amnistie à titre
personnelle, d’une exonération de sanction pour raison d’âge (il est mineur de moins de 13 ans
par exemple) ou pour raison de démence (état d’aliénation mentale)8. Par contre, une décision
de non lieu, non fondée sur les raisons évoquées dans la dernière hypothèse mais sur
l’inexistence du fait principal peut, a priori, engendrer l’impunité du complice9.

133. Des difficultés peuvent intervenir lorsqu’on est en présence d’une infraction non
intentionnelle (inexistence de l’intention de nuire chez l’agent), concernant l’existence de la
complicité. Il reste, effectivement, mal aisé, d’affirmer ou de démontrer que le complice a
contribué volontairement à la commission d’une infraction dans le cas de certaines infractions
commises par imprudence. L’auteur principal ne peut solliciter ou accepter l’aide d’autrui pour
1.
265. 1 Cass. crim. fr., 27 octobre 1971, Bull. Crim. n°284.
266. 2 Article 383 du CPB ; art. 223-10 à 223-12. du Code Pénal Français (CPF).
267. 3 V. Alger, 20 octobre 1965, Gaz. Pal. 1966, I, 133.
268. 4 V. Cass. crim. fr. 4 juin1998, Droit Pénal, 1998, comm. n°142.
269. 5 La contravention de troisième classe est celle qui est punie d’une amende de 10 001 à 15 000 FCFA.
270. 6 V. Cass. crim., 24 juin 1922, S. 1923, I, 41.
271. 7V. Cass. Crim. fr., 31 janvier 1996 , Bull. Crim. 1996, n° 56.
272. 8 Cass. crim. fr., 21 mai 1990, Bull. Crim. 1990, n°2003.
273. 9 V. J. PRADEL, "Droit pénal général ", Edit. Cujas, 2002, p. 385 ; Cass. crim. fr., Cass. Crim. 9 février
1956, JCP 1956, II, 9574, note J. LARGUIER.

138
Précis De Droit Pénal Général

commettre un acte qui l’a "surpris" ou qu’il n’a pas pensé ou construit dans son esprit. Dans le
cas d’un homicide involontaire dû à un accident de la circulation routière, on ne peut
pratiquement pas prouver que le "complice" savait que l’auteur allait accomplir un meurtre
involontaire. Dans une telle situation, comment peut-on proposer ou offrir ses services pour
faciliter un homicide par imprudence ? Cela s’avère utopique. C’est à juste titre que, dans un
cas de blessures involontaires, des donneurs d’ordre (un employeur et un chef de service) ont
soutenu devant la Cour de Cassation française « que la notion de complicité ne peut exister
dans le cas d’infractions d’imprudence, la notion d’imprudence étant inconciliable avec toute
idée d’accord, de volonté préalable ou d’intention indispensable pour qu’il puisse y avoir
complicité ». Il s’agit d’une infraction commise par imprudence, par un chauffeur de camion,
sur ordre de ces deux personnes reconnues coupables de complicité par les premiers (ceux du
premier degré) et les seconds juges (en appel). Certes, leur action en cassation n’a pas abouti
mais la cour de cassation a implicitement estimé qu’il n’y a pas de complicité. Elle a plutôt
estimé que la peine prononcée par la Cour d’appel contre les deux personnes est justifiée car ils
sont coupables à titre d’auteur. Selon la Cour, « Les ordres…sont eux-mêmes constitutifs d’une
faute dont la conséquence a été les blessures…ils font apparaître que les sus-nommés sont
coauteurs du délit »1. La cour a écarté la complicité pour la remplacer par la coaction.

b - La nécessité d'un acte matériel de complicité

134. La complicité nécessite également un acte matériel. Le fait d'être un simple spectateur ne
suffit pas à condamner l’individu sur la base de la complicité. En principe, il faut un acte
concomitant à l'infraction ou un acte antérieur à celle-ci. Cependant l'acte postérieur à
l'infraction peut dans certains cas être qualifié d'acte de complicité.

L'acte peut être concomitant à l'infraction. La complicité peut donc se matérialiser par la
collaboration d'un individu. C'est le cas de celui qui aide ou assiste2 l'auteur au moment de la
préparation ou de l'exécution matérielle de l'acte (exemple: jouer le rôle de guetteur pour
permettre à un cambrioleur de cambrioler en toute quiétude).

135. L’instigation peut aussi constituer un acte matériel de complicité c'est la complicité par
instigation. La provocation3 à commettre certaines infractions (recrutement d’un tueur à gage,
fourniture de l’arme du crime…) et le fait de fournir ou de donner des instructions quant au
passage à l'acte (donner le mode d'emploi à l'auteur d'une fraude informatique par exemple)
peuvent tomber sous le coup de la complicité. Les instructions constituent des moyens
intellectuels c’est-à-dire des renseignements importants (indications précises) qui sont de
nature à permettre la commission de l’infraction (indication d’une adresse, description d’un
lieu ou de la victime, consignes sur l’attitude à avoir avant le passage à l’acte) 4. Logiquement,
le complice instigateur (le provocateur ou le fournisseur) n'est pas punissable en cas de non
passage à l'acte (par celui qui occupe le rang d’auteur) dans la mesure où dans cette hypothèse,
il y a absence d'acte principal punissable. C'est une tentative de complicité.

1.
274. 1 V. Cass. crim. 24 octobre 1956, Bull. Crim. 1956, n°675.
275. 2 V. Cass. crim. 21 novembre 1930, Bull. Crim. 1930, n°274; Cass. crim. fr. 6 décembre 1967, Bull.
Crim. 1967, n° 31 ; Cass. crim. 12 décembre 1956, Bull. Crim. 1948, n°830
276. 3 V. F. DEFFERRARD, "La provocation », RSC. 2002, p. 233 & SS.
277. 4 V. Cass. crim. fr. 13 mars 1995, Bull. Crim 1995, n° 100.

139
Précis De Droit Pénal Général

136. Cependant, le législateur burkinabé analyse cette situation autrement. Il sanctionne celui
qui incite un individu à commettre un délit ou un crime, même si l’auteur principal s’est
abstenu d’exécuter l’acte répréhensible. La loi est claire à cet effet : « Celui qui incite à la
commission d’un crime ou d’un délit est puni des peines prévues pour l’infraction quand bien
même celle-ci n’aurait pas été commise en raison de l’abstention volontaire de celui qui devait
la commettre » (art. 69 du CP). Aussi, celui qui amène une personne non susceptible de
sanction pénale à commettre un acte répréhensible est-il punissable. A ce titre, la loi (art. 68 du
CP) prescrit que, « Celui qui détermine une personne non punissable à commettre une
infraction est passible des peines de l’infraction commise ». On peut citer, l’exemple d’un
individu majeur qui incite un mineur de douze ans ou un adulte affecté d’une démence à mener
des activités de trafic illicite de stupéfiants (art. (439 du CP). Or, les articles 73 et 74 du CP
permettent de classer le fait d’être âgé de moins de 13 ans et l’état de démence parmi les causes
de non imputabilité. En d’autres termes, le mineur de moins de 13 ans et toute personne en état
de démence jouissent d’une irresponsabilité pénale. En outre, cette détermination à la
réalisation d’un acte prohibé, concerne aussi bien les crimes, les délits que les contraventions
dans la mesure où la loi vise toute infraction. Aussi, pour certaines infractions, notamment les
rixes, la rébellion, les réunions séditieuses ayant entraîné un homicide involontaire (art. 333 &
334 du CP) le législateur sanctionne-t-il les instigateurs et les provocateurs. En effet, aux
termes de l’article 335 du CP, «Dans les cas prévus à l’article 333 et 334, les chefs, auteurs,
instigateurs et provocateurs de la rixe, rébellion ou réunion séditieuse sont punis comme s’ils
avaient personnellement commis lesdites violences ». En matière de trahison et d’espionnage,
« est punie, comme un crime, la provocation à commettre ou l’offre de commettre l’un des
crimes visés… » (art. 92 du CP).

L'acte de complicité peut être antérieur (chronologique) à l'infraction (héberger des


malfaiteurs afin qu'il puisse commettre l'infraction, accomplir des actes contributifs avant la
commission ou la tentative de commission). Ainsi, la conjointe qui aide son époux afin qu’il
puisse échapper à une condamnation pécuniaire, par prête-nom (pour dissimuler les biens et
ressources de son mari) est coupable de complicité1. D’ailleurs, parmi les faits constitutifs de
complicité énumérés par la loi, certains interviennent avant la consommation de l’infraction
(cas de « ceux qui auront procuré des armes, des instruments ou tous autres moyens qui auront
servi à l’action sachant qu’ils devaient y servir »).

137. Cependant, le concours apporté à un complice ne constitue pas, en principe, un acte


punissable compte tenu du fait que le législateur est silencieux, à ce sujet. Le complice du
complice, en général, ne risque pas une sanction pénale (exemple : donner des conseils au
guetteur afin qu'il puisse mieux couvrir le cambrioleur). Mais, la jurisprudence française a
démontré plus d'une fois que ce principe est franchissable2. Elle a, en effet, considéré que le fait
de donner de simples instructions peut constituer une complicité punissable. C'est le cas d'une
personne qui donne des instructions à un recruteur de" tueurs à gage"3. Cette jurisprudence se
fonde, en somme sur la conscience de l’individu, au moment des faits, pour décider de la
répression du complice du complice. Si celui-ci a connaissance du fait que l’aide apportée

1.
278. 1 V. Cass. crim. fr. 11 décembre 1989, Bull. Crim 1989, n° 471.
279. 2 V. Cass. crim. fr. 30 mai 1989, Bull. Crim 1989, n° 222.
280. 3 V. Cass. crim. fr. 10 octobre 1988, Gaz. Pal., 1989, 1, 189, note DOUCET & Cass. crim. fr. 30 mai
1989, RSC, 1990, p. 325 (la loi "n'exige pas que les instructions soient données directement par leur
auteur pour que la complicité de celui-ci soit légalement constituée").

140
Précis De Droit Pénal Général

servira au complice « titulaire » à contribuer à l’exécution d’un acte illicite, il, est punissable. Il
ne l’est pas, dans le cas contraire1.

138. Certains actes postérieurs à l'infraction peuvent faire l'objet d'une complicité. L'acte
postérieur à l'infraction, en principe, ne constitue pas une complicité puisqu'elle ne répond pas
à la définition de celle-ci. L'acte postérieur ne contribue pas ou ne facilite pas la commission de
l'infraction. L'auteur de l'acte postérieur agit après l'accomplissement parfait de l'infraction.
Mais, certaines législations et jurisprudences considèrent quelques actes postérieurs comme des
actes de complicité. L’acte postérieur peut, en effet, avoir des liens avec l’infraction commise.
C'est ainsi que la loi (art. 65 du CP) burkinabé qualifie de complice celui qui facilite la fuite
d'un voleur, tout en étant conscient que ce dernier a commis un acte contraire à la loi. La même
règle s’applique à celui qui aide ou qui cache l'auteur d'une infraction ou qui transporte le fruit
d'un vol ou d’un détournement. Elle s’étend, également, à l’individu qui recèle sciemment
l’auteur d’une infraction. La jurisprudence française sanctionne, en tant que complice, celui qui
protège ou facilite la fuite d'un voleur, en particulier lorsque cette aide est le résultat d'un
accord passé avant la commission de l'acte principal punissable2.

c - L'élément moral de la complicité

139. La complicité requiert l'existence d'une intention personnelle de s'associer à la


réalisation d'une infraction pénale. Le complice doit sciemment jouer le rôle de complice. Il
faut donc une faute intentionnelle. En conséquence, s’il s’agit d’une faute non intentionnelle
c’est-à-dire par imprudence ou négligence, l’élément moral, en principe, n’existe pas. Cette
absence vaut également pour l’accomplissement d'un acte de complicité par naïveté. La
participation à la commission de l'infraction doit être volontaire, intentionnelle. Au moment de
l'action, l'agent doit savoir que son acte va favoriser ou contribuer à la réalisation de l'acte
principal prohibé. Ainsi, au moment de fournir les moyens ou de donner les instructions,
l’agent doit être conscient qu’il participe à la réalisation d’un acte délictueux. C’est ainsi que la
Cour Suprême a conclu à l’existence de l’élément moral de la complicité en se fondant sur la
fourniture directe des moyens nécessaires à la commission de l’infraction. La Cour a, à cet
effet, fait observer que, « l’intention découle suffisamment des circonstances régulièrement
constatées…l’on doit déduire…que la fourniture directe aux charlatans et sorciers de
moyens pour la pratique de leur art coupable établit sans équivoque la preuve de l’élément
intentionnel »3. L'élément moral de la complicité diffère donc de celui requis vis-à-vis de
l'auteur de l'infraction principale. Il revient, en principe, au ministère public de rapporter la
preuve de l’existence de l’intention délictueuse de complicité.

140. Lorsque l'intention de participer à l'acte fautif n'est pas concomitante à l'infraction en
cause mais à une autre, la complicité n'existe pas pour l'infraction visée4. C'est l'exemple d'un
individu qui prête son véhicule à un ami pour cambrioler son voisin et cet ami utilise cet engin
pour se débarrasser du corps de son ennemi de longue date qu'il a tué5. Toutefois, lorsque la
1.
281. 1 Cass. crim. fr. 1er septembre 1987, Bull. Crim 1987, n° 308.
282. 2 Cass. crim. 8 nov. 1972, D. 1973, somm., 17.
283. 3 Cour Suprême, 26 décembre 1969, arrêt n°8/PE/69, Bulletin de la Cour Suprême de Haute-Volta, p.
51. Le pourvoi en cassation était dirigé contre un arrêt (n°96) de la Cour d’Assises de Haute Volta du
11 novembre1966.
284. 4 V. Cass. crim. fr. 10 mars 1977, RSC 1979, p. 75.
285. 5 V. Cass. crim. 13 janvier 1955, D. 1955, p. 291, note CHANNE

141
Précis De Droit Pénal Général

discordance n'est que partielle la complicité peut être retenue dans la mesure où il y a
simplement changement de moyens1. D’autres moyens ont été utilisés pour parvenir au même
résultat (exemple : Noiga remet un couteau à Zaka pour tuer Yamba qui est plutôt tué à l'aide
d'un fusil).

2 – La sanction de la complicité

141. La sanction de la complicité est la même que celle qui s’applique à l’auteur principal
même si les caractères de l’élément moral requis pour chacune de ces deux catégories de
personnes sont de nature différente2. S’agissant de la sanction applicable, le complice n’est
donc pas puni de façon autonome, il est identifié à l’auteur. Un auteur n’affirme-t-il pas à ce
titre que, « si l’auteur principal est condamné pour une infraction donnée, le meurtre par
exemple, son comparse sera considéré comme complice du même crime, non d’assassinat ou
de coups volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner »3? Il va sans dire que
les peines accessoires, les peines complémentaires, les circonstances aggravantes objectives ou
réelles (vol avec effraction par exemple) prévues, pour la répression de l’infraction visée,
s’appliquent. Le complice, du point de vue de la sanction, est traité de la même façon que
l’auteur principal4. Pourtant, les actes commis par le complice peuvent être de moindre gravité
ou de caractère négligeable par rapport à ceux commis par l’auteur. Le complice peut aussi
ignorer l’accomplissement, par l’auteur principal, d’actes constitutifs de circonstances
aggravantes : sa connaissance des circonstances de réalisation de l’infraction peut être limitée
ou vague5. Malheureusement le législateur ne tient pas compte du degré de conscience du
complice quant à la gravité de l’infraction. Toutefois, la loi peut, en disposer autrement (art. 66
du CP). Ce qui signifie que dans certaines situations, il est possible, pour le législateur de
prévoir des sanctions différentes de celles qui sont applicables à l’auteur principal.

En outre, dans la pratique, il arrive que les juges tiennent compte du rang (secondaire) occupé
par le complice pour adoucir la peine. Cependant, il n’est pas exclut que le juge décide, suivant
les circonstances, d’infliger une peine sévère au complice et d’alléger celle de l’auteur, en
tenant compte des circonstances (circonstances supprimant ou réduisant la responsabilité
pénale de l’auteur). Cas de l’auteur principal qui était mineur au moment de la commission de
l’infraction : il bénéficie seul de l’excuse de minorité, si le complice est majeur. C’est,
également, l’exemple de deux personnes majeures (l’auteur et le complice) parmi lesquelles
l’un, l’auteur principal bénéficie d’une amnistie personnelle (circonstances liées à l’individu et
non à l’infraction). Dans certains cas, pour sanctionner sévèrement le complice, le juge se
fonde sur une infraction autonome permettant de le qualifier auteur et non complice. Cette
hypothèse intervient, surtout, en cas de recel. En effet, la répression autonome de cette
infraction est prévue : « Est puni d’un emprisonnement de un à cinq ans et d’une
amende…quiconque recèle sciemment des objets d’origine frauduleuse » (art. 473 du CP). Il
peut également tenir compte de certaines circonstances personnelles pour aggraver la peine de
l’auteur uniquement. Cas d’un auteur récidiviste. Le récidivisme est une circonstance
aggravante de caractère personnel.
1.
286. 1 V. Cass. crim. fr. 17 mai 1962, D. 1962, p. 473 ; Cass. crim. fr. 31 janvier 1974, JCP, 1975, II, 17984,
note MAYER-JACK ;
287. 2 Article 66 du CPB : "Les complices d’un crime ou d’un délit sont punis comme les auteurs mêmes de
ce crime ou de ce délit sauf si la loi en dispose autrement ".
288. 3 J.H. ROBERT, "Droit pénal général", op. cit., p. 351.
289. 4 V. Cass. crim. fr. 21 novembre, 1990, Bull. crim., 1990, n°397.
290. 5 Cass. crim.. 23 avril 1959, D. 1959, p. 338.

142
Précis De Droit Pénal Général

L’assimilation du complice à l’auteur quant à la sanction vaut pour le complice, personne


morale. La loi ne donne aucune précision et ne fait aucune différence entre ce dernier et le
complice, personne physique. Elle se contente de préciser laconiquement que : « est aussi
auteur ou coauteur, toute personne morale à objet civil, commercial, industriel ou financier au
nom et dans l’intérêt de laquelle des faits d’exécution ou d’abstention constitutifs d’une
infraction ont été accomplis par la volonté délibérée de ses organes » (art. 64, al.4 du CP°).

142. La soumission de l’auteur et du complice à la même sanction amène à s’interroger sur


l’intérêt de distinguer ces deux personnes. En principe, on ne peut pas avoir simultanément la
qualité d’auteur et de complice pour la même action : on est soit auteur soit complice1. La
distinction est pourtant nécessaire, surtout en ce que concerne la "personnalisation" de la
sanction. Si à l’infraction commise se greffe des circonstances aggravantes liées à la personne
(circonstances personnelles aggravantes) du participant, il va sans dire que certains participants
ne feront pas l’objet de la même "mesure," s’agissant des sanctions. L’exemple de l’infraction
de mutilations génitales féminines (art.380 du CP) est patent. En effet, lorsque l’auteur de
ladite infraction est un professionnel du corps médical, il encourt le maximum des peines
prévues (art. 381 du CP). Dans ce cas, si le complice n’appartient pas à ce corps, il lui est
appliqué les peines simples prévues (c’est-à-dire celles énoncées à l’article 380 du CP). Il en
est de même en cas de parricide (art.321du CP): le complice (n’ayant pas un lien de parenté
avec la victime) ne subit pas, en principe, la même mesure de sanction que l’auteur (descendant
de la victime). Toutefois, par le passé, la jurisprudence a eu à appliquer la "théorie de la
complicité corespective" qui permet de condamner la même personne sous les qualités d’auteur
et de complice, pour la même infraction. Il s’agit notamment de l’arrêt Igneux pour lequel, la
Cour a considéré que « le coauteur d’un crime aide nécessairement l’autre coupable dans les
faits qui consomment l’action et devient, par la force des choses légalement son complice »2.
Ce raisonnent a permis à la Cour, d’appliquer au coauteur d’une infraction de parricide, des
circonstances aggravantes liées à la qualité de complice et non de coauteur. En conférant la
double qualité de coauteur et de complice au coauteur du parricide, l’application des
circonstances aggravantes prévues exclusivement pour celui qui a la qualité de complice
s’étend au non ascendant de la victime. L’application de "la théorie de la complicité
corespective" peut intervenir, de nos jours (en droit français), surtout en cas de violence
collective (grave) commise à l’encontre d’une victime. Mais, dans cette dernière hypothèse,
ladite théorie est susceptible d’être appliquée quand on ignore qui, au sein du groupe, a
occasionné les blessures3.

§2 - LA RESPONSABILITÉ PÉNALE "DU FAIT D'AUTRUI"

1.
291. 1 Cass. crim. 5 janvier 1922, Bull. Crim. 1922, n° 3
292. 2 V. Cass. crim. 9 juin 1848, S. 1848, 1, 127. Le coauteur, devenu complice en même temps, est ici un
tiers ayant apporté son concours à une fille qui a porté des coups mortels à son père. En tant que
coauteur, il encourrait une sanction moins sévère que celle prévue pour l’ascendant (l’auteur) ou le
complice qui a été traité comme celui-ci (il emprunte les circonstances aggravantes personnelles de
l’auteur).
293. 3 V. Cass. crim. fr., 25 février 1975, Bull. Crim. 1975, n°65.

143
Précis De Droit Pénal Général

La responsabilité pénale du fait d’autrui, notion proche de la responsabilité civile du fait


d’autrui en matière civile, concerne des domaines déterminés (1). En outre, la mise en œuvre
de cette responsabilité pénale est soumise à des conditions précises (2). Cette responsabilité
vise, surtout, à amener, notamment, les dirigeant ou les responsables d’entreprise à respecter
les règles qui régissent leurs activités.

1 – Notion et domaine de la responsabilité pénale du fait d’autrui

143. La responsabilité pénale "du fait d’autrui" s’entend de l’engagement de la responsabilité


pénale d’une personne, pour un acte dont l’auteur est une autre personne1. Elle consiste à
condamner une personne à une sanction pénale pour un acte commis par une autre personne.
En principe, l'on n'est punissable que de son fait personnel. Ce principe a été rappelée par la
Cour de cassation française dans une décision en ces termes : «… nul n’est pénalement
responsable que de son propre fait ; la société A.C. ne pouvait être déclarée coupable ni
condamnée pour des faits commis par la société P.A. qui avait perdu son existence juridique
par suite d’une fusion »2.

144. Mais, exceptionnellement, on peut sanctionner une personne en raison d’une faute pénale
commise par autrui. La possibilité de sanctionner un individu du "fait d’autrui" déroge au
principe de la responsabilité pénale individuelle et à celle de la personnalité des peines. Cette
situation se rencontre dans les entreprises ou les professions réglementées (pharmacie, débits
de boissons, entreprises industrielles et commerciales…) et concerne, souvent, le chef
d’entreprise (au sens large). Elle concerne, en général, les structures ou entreprises soumises à
la législation du travail, à celle de la sécurité sociale ou à la réglementation en matière
d’hygiène. C’est ainsi qu’aux termes de l’article 16 de l’ordonnance 71-10 du 23 janvier 1971
réprimant certaines infractions dans le domaine de la circulation routière, « Le conducteur d’un
véhicule est pénalement responsable des infractions qu’il commet dans la conduite ou à
l’occasion de la conduite de ce véhicule ». « Toutefois, lorsque le conducteur agit en qualité de
préposé, le tribunal peut, compte tenu des circonstances de fait et des conditions de travail de
l’intéressé, décider que le paiement des amendes en répression de contraventions à la
réglementation relatives à la circulation routière, ainsi que les frais de justice qui peuvent
s’ajouter à ces amendes, seront en totalité ou en partie à la charge du commettant appelé en
cause et déclaré civilement responsable ».

Certains auteurs ont tenté d’expliquer la responsabilité du fait d’autrui 3 par la "théorie du
risque"4. Dans cette hypothèse, la responsabilité du commettant (l’employeur ou le chef
d’entreprise) est fondé sur le fait que celui-ci tirant un avantage (économique) de son

1.
294. 1 V. COSTES, "Quelques considérations sur la responsabilité pénale du fait d’autrui", RSC, 1939, p.
628 ; M. DELMAS-MARTYR, "Le droit pénal, l’individu et l’entreprise, culpabilité du fait d’autrui ou
du décideur", JCP 1985, I, 3218.
295. 2 V. Cass. crim. fr., 14 octobre 2003, Droit Pénal 2004, commentaire, n°20.
296. 3 B. de BERTIER-LESTEADE, "Des fautes sans responsabilité," Petites Affiches, 25 janvier 2005,
n°17, p. 5 & ss.
297. 4 La théorie du risque en matière civile (responsabilité) signifie que le responsable doit supporter les
conséquences dommageables pour les autres nées des activités profitables qu’il mène.
Economiquement, il tire un avantage ou un profit de ces activités qui font courir des risques aux autres
personnes. Cette théorie, en matière de responsabilité civile, sous entend l’engagement de la
responsabilité de façon automatique dès lors qu’il y a une participation causale (implication). La faute
dans cette hypothèse n’est pas admise comme condition d’existence de la responsabilité.

144
Précis De Droit Pénal Général

activité, il est normal qu’il en supporte aussi les inconvénients. D’autres ont plutôt fondé
l’existence de cette responsabilité sur la faute. Ils estiment que la responsabilité pénale du
commettant est engagée parce qu’il mène des activités « réglementées" qui ont fait à l’origine
l’objet de violation par lui-même. Enfin, un troisième courant fonde la responsabilité pénale du
chef d’entreprise sur la théorie du pouvoir. Selon cette troisième théorie, le commettant est
responsable parce qu’il dispose d’un ensemble de prérogatives qui lui permettent d’avoir
la maîtrise des personnes et des choses dans le cadre de ces activités.1

Néanmoins, la responsabilité du fait d’autrui en matière civile 2 doit être distinguée de celle
d’ordre pénal3. Certes, ces deux notions ont des points communs mais des différences
interviennent surtout concernant leur mise en œuvre. En matière civile4 cette responsabilité
signifie que la personne débitrice de la réparation du dommage est étrangère à sa réalisation.
C’est à ce titre que des parents peuvent répondre des fautes de leurs enfants, des commettants
de celles de leurs préposés, des instituteurs et des artisans du fait de leurs élèves ou apprentis.
En outre, le simple fait d’avoir une obligation générale de surveillance (notamment garder ou
surveiller un enfant, des élèves…) peut être source de responsabilité du fait d’autrui. Le
responsable civil ne commet pas de faute et il ne participe pas matériellement à la commission
de l’acte dommageable. Il doit indemniser celui qui a subi le préjudice. Or, en matière pénale,
le responsable du fait d’autrui doit avoir commis une faute. Cette faute existe grâce aux
pouvoirs ou à l’autorité qu’exerce le commettant sur le préposé, auteur matériel de la faute
(infraction). L’infraction commise par le préposé est rattachée à un agissement fautif de la part
du commettant qui a réellement permis la réalisation de l’acte prohibé. Cette situation amène
certains auteurs à affirmer que si le chef d’entreprise « est condamné pour des faits délictueux
accomplis par un autre que lui-même c’est parce que ces faits ne seraient pas survenus sans sa
propre faute d’abstention. L’acte du préposé ne saurait donc constituer la cause réelle de
l’infraction, mais seulement l’occasion qui lui a permis d’intervenir…le comportement de
l’auteur immédiat n’a fait qu’actualiser la responsabilité jusque là demeurée virtuelle du chef
d’entreprise »5.

145. La commission de l’infraction est, en général, rendue possible par la faute du chef
d’entreprise. En effet, si ce dernier ne prend pas les mesures nécessaires au respect de ces
règles, il peut se rendre coupable d'une infraction, même dans le cas où celle-ci a été

1.
298. 1 V. M. DELMAS-MARTY & G. GIUDICELLI-DELAGE, "Droit pénal des affaires ", 4ème édition, op.
cit., p. 57.
299. 2 Cour d’Appel (C.A.) de Ouagadougou 21 mai 1988, RBD, n°36, 2ème semestre, p. 269 ; C.A.
Ouagadougou 9 septembre 1988, RBD, n° 16, juillet 1989, p. 271, note H. DELEZENNE-
NUYTINCK ; C.A. Ouagadougou 25 juillet 1997, RBD, n° 35, 1er semestre, p.107, note K. NIKIEMA.
300. 2Aux termes de l’article 1384 du code civil, "On est responsable non seulement du dommage que l’on
cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit
répondre...Les pères et mères sont responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant
avec eux. Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les
fonctions auxquelles ils les ont employés ; les instituteurs et les artisans du dommage causé par leurs
élèves et apprentis pendant le temps qu’ils sont sous leur surveillance".
301. 3 V. H. MAZEAUD, J. MAZEAUD, F. CHABAS, "Leçons de droit civil " tome 2/ premier volume,
Edit. Montchrestien, 1991, n° 471 & SS.
302. 3 V. P. VOIRIN & G. GOUBEAUX, « Droit civil », tome1, 29ème édition, Edit. L.G.D.J., 2003, n° 971
& SS.

303. 5 V. M. DELMAS-MARTY & G. GIUDICELLI-DELAGE, "Droit pénal des affaires ", 4ème édition, op.
cit., p. 58.

145
Précis De Droit Pénal Général

matériellement commise par un employé1. Il a l’obligation de veiller au respect de la


réglementation2. L'infraction est commise, dans sa matérialité, par une autre personne
notamment le préposé ou l’employé. Le responsable n'accomplit pas lui-même l'acte. C’est
pourquoi, on dit qu’il emprunte l’élément matériel (de l’acte) de son auteur. C'est l'exemple des
règles d'hygiène à observer dans le secteur de l'industrie alimentaire (des conditions
d'exploitation sont imposées)3. L’acte illicite est effectivement accompli car le préposé du
dirigeant de l’entreprise n’a pas observé une règle d’hygiène ou de sécurité4. On peut prendre
l’exemple d'un restaurant dans lequel, il est fait usage de produits alimentaires périmés
(matières premières par exemple). La responsabilité pénale du restaurateur (le chef
d’entreprise) peut être engagée, même si l'usage effectif des produits est fait par le personnel
cuisinier5. La responsabilité patronale peut également être engagée dans le cas où le serveur
d’un café sert une boisson alcoolisée à une personne déjà ivre6. Il participe indirectement à la
commission de l’infraction. L’employé qui fabrique le sirop de gingembre ou l’huile
d’arachide, suivant la recette donnée par le chef d’entreprise, n’est pas obligé de s’assurer que
la réglementation, en la matière, a été respectée.

Le chef d’entreprise a, en somme, un devoir de garantie quant au respect de la législation. Il a


donc l’obligation de veiller à la conformité des actes et comportements au sein de l’entreprise
par rapport à la réglementation en vigueur. La responsabilité du fait d’une autre personne
concerne, souvent, les infractions de caractère non intentionnel (imprudence, négligence).

2 – Les conditions d’engagement de la responsabilité pénale du fait d’autrui

146. La responsabilité du chef d’entreprise ne peut être engagée qu’à deux principales
conditions : la commission d’une infraction par le préposé et la faute du commettant (chef
d’entreprise).

Il faut l’existence d’une infraction commise par le préposé. L’exécution matérielle de


l’infraction est assurée par le préposé. La constitution matérielle de l’infraction est donc rendue
possible par la violation des prescriptions légales ou réglementaires. Mais cette infraction ne
1.
304. 1 V. Paris, 30 septembre 1955, D., 1956, p. 54. Les moniteurs d’auto-école sont responsables des
dommages corporels occasionnés par les élèves au cours de l’apprentissage (de la leçon). Le chef de
gare subit le même sort en cas d’erreur d’aiguillage par les aiguilleurs (cass. crim. 26 juillet 1872, D.,
1872, I, 285).
305. 2 V. Cass. crim, 28 février 1956, JCP, 1956, II, 9304. Cet arrêt de principe porte sur la pollution d’une
rivière suite au déversement d’eaux résiduaires (issues de l’égout d’une papeterie). Dans le cas
d’espèce, le préposé a agi intentionnellement et en l’absence du chef de l’entreprise. Pour la Cour, "si
en principe, nul n’est passible de peines qu’à raison de son fait personnel, la responsabilité pénale peut
cependant naître du fait d’autrui dans des cas exceptionnels où certaines obligations légales imposent le
devoir d’exercer une action directe sur les faits d’un auxiliaire ou d’un subordonné ".
306. 3 V. Cass. crim., 30 décembre 1892, S., 1894, I, 201, note VILLEY. Selon la Cour, "en matière
d’industries réglementées, notamment celle des entreprises de démolition, il y a nécessité de faire
remonter la responsabilité pénale aux chefs d’entreprise, parce que les conditions et le mode d’exercice
de ces industries leur sont personnellement imposées, et qu’ils sont tenus d’assurer l’exécution des
règlements
307. 4 V. Cass. crim. fr. 10 juin 1980, Bull. Crim. 1980, n° 184.
308. 5 V. Cass. crim. 16 décembre 1956, Bull. Crim. 1956, n° 1481. La cour a estimé dans cette affaire
relative à la fabrication de glaces que le préposé n’a pas l’obligation de s’assurer que la recette indiquée
par son patron est conforme à la réglementation sanitaire.
309. 6 V. Cass. crim 7 novembre 1873, D., 1874, I, 92. Le responsable du débit de boissons a été rendu
responsable du fait du garçon de café.

146
Précis De Droit Pénal Général

doit pas résulter d’une faute strictement personnelle (vis-à-vis de celui-ci). Par ailleurs, s’il
s’agit d’une faute intentionnelle de la part du préposé le commettant est, en principe, dégagé de
toute responsabilité pénale (même si, par le passé, la Cour de cassation a décidé, au contraire,
par un arrêt du 28 février 1956, d’engager la responsabilité du commettant).

Une faute imputable au commettant (chef d’entreprise, gérant, directeur d’établissement…)


est nécessaire1. En principe, l’absence de faute de la part du commettant entraîne
l’impossibilité d’engager des poursuites pénales contre lui. La faute (imputable au commettant)
résulte, en général, d’une négligence ou d’une imprudence de la part du chef d’entreprise se
traduisant par le non respect d’une réglementation à laquelle son entreprise est soumise2. Le
commettant n’a pas pris les mesures nécessaires ou n’a pas accompli toutes le diligences
requises pour empêcher la violation de la loi3. La Cour de Cassation estime que la faute du
commettant est présumée dans la mesure où tout dysfonctionnement de ses services implique
une « participation directe et permanente à tous les actes de son établissement »4.

Toutefois, le chef d’entreprise peut se dégager de cette responsabilité en prouvant une absence
de faute de sa part5. Il peut, également, apporter la preuve qu'il a transféré son autorité à une
autre personne pour veiller au respect des mesures6. Il s’agit de la délégation de pouvoirs 7qui
permet un "transfert de la responsabilité pénale" du chef sur le préposé8. La délégation de
pouvoirs peut être nécessaire pour des raisons diverses. Elle peut, notamment, intervenir parce
que le chef d’entreprise à une mission à accomplir loin de sa structure, ou parce qu’il se trouve
dans une situation où il a un groupe d’entreprises à gérer simultanément (filiales, succursales..).
En principe, la délégation de pouvoirs ne vaut que pour l’activité qui fait l’objet de la
délégation et concerne les cas où la délégation de pouvoirs est possible (hygiène, sécurité dans
le domaine du travail…)9. Une délégation de caractère général ou permanent est déconseillée.
Il en est de même pour le cumul de plusieurs délégations10. La délégation permanente peut
d’ailleurs être interprétée comme une démission du chef d’entreprise face à ses responsabilités.

En cas de délégation, le chef s’assure que le délégataire est compétent pour exécuter les tâches
qui lui seront confiées. Il doit également mettre à sa disposition les moyens nécessaires au bon
déroulement de sa mission ou à l’exercice des pouvoirs délégués11. La loi burkinabé ne
consacre pas de texte spécifique à la délégation de pouvoirs en matière pénale. Toutefois, dans
une situation de délégation de pouvoirs, le délégant gagnerait à consigner cette délégation dans
1.
310. 1 V. Ph. CONTE, "Le lampiste et la mort", Droit Pénal, 2001, Chr., 2.
311. 2 La législation française a complété le texte relatif à la responsabilité du commettant en apportant
quelques précisions (loi du 10 juillet 2000) : "Ceux qui n’ont pas causé directement le dommage mais
qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas
pris les mesures permettant de l’éviter sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont soit violé
de façon manifestement délibéré une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi
ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière
gravité qu’elles ne pouvaient ignorer" (art. 121-3 du Code Pénal Français (CPF)).
312. 3V. Cass. crim. fr. 22 mai1973, Bull. Crim. 1973, n° 230.
313. 4 V. Cass. crim. 10 avril 1959, Bull. Crim. 1959, n° 198.
314. 5 V. C. MASCALA, "La responsabilité pénale du chef d’entreprise", Petites Affiches, 1996, n°87.
315. 6 V. Cass. crim. fr. 4 novembre 1964, Gaz. Pal. 1965, 1, 80, n° 184.
316. 7 J-F. RENUCCI, "La délégation de pouvoirs : question d’actualité, RJDA, 1998, p. 679.
317. 8 V. Cass. crim. fr, 19 décembre 1977, JCP 1979, II, 19227, note J.H. ROBERT ; Cass. crim. fr, 7
décembre 1981, Bull. Crim. 1981, n° 325.
318. 9 V. Cass. crim. fr., 11 mars 1993, Bull. Crim. 1993, n° 112.
319. 10 Cass. crim. fr. 23 juillet 1996, Bull. Crim. 1996, n° 301
320. 11 Cass. crim. fr., 31 mai 1976, Bull. Crim. 1976, n°191.

147
Précis De Droit Pénal Général

un document, ce qui permet d’avoir une preuve parfaite. Il doit éviter de morceler la
délégation, c’est-à-dire éviter de déléguer ses pouvoirs à plusieurs personnes pour la même
mission. En outre, il est supposé occuper un poste de responsabilité lui permettant d’avoir une
autorité sur le personnel ou quelques uns des membres.

Le délégataire quant à lui doit avoir les compétences requises (qualité professionnelle
nécessaire) et l’autorité nécessaire (pouvoir de direction et pouvoir disciplinaire). Le
délégataire doit jouir d’une certaine autonomie dans l’exercice des pouvoirs à lui conférés
temporairement. Il en résulte que le délégant ne doit pas s’ingérer dans "la gestion de ce
pouvoir" sinon, le transfert de responsabilité peut être remis en cause. Dans ces conditions, il
demeure difficile d’engager la responsabilité pénale exclusive du délégant car le délégataire a
un comportement susceptible de l’impliquer dans la réalisation de l’infraction.

Certaines situations sont telles que la délégation n’est pas possible. Le chef d’entreprise ne peut
pas, en effet, déléguer ses pouvoirs lorsqu’il s’agit notamment d’une obligation qui doit être
assurée personnellement.

147. En tout état de cause, il y a une participation du commettant (l'employeur ou du chef


d’entreprise qui est d’une certaine façon l’auteur moral) dans la commission de l’infraction. Il
peut être qualifié de complice par instigation. Cette responsabilité pénale indirecte est, en
général, prévue expressément par la loi. C’est l’exemple du directeur de publication ou de
l’éditeur qui est présumé responsable, par le législateur, en matière des délits et des crimes
commis par voie de presse1. Aux termes de l’article 117 du code de l’information2, « Seront
passibles, comme auteurs principaux, des peines qui constituent la répression des crimes et
délits commis par voie de médias dans l’ordre ci-après :
1) - les directeurs de publications ou éditeurs quelle que soit leur profession ou leur
dénomination, …
2) - à leur défaut, les auteurs ;… ».

La loi (art. 64, al. 1 du CP) prévoit également la sanction de toute personne qui est à l’origine
de la commission d’une infraction : « Est auteur ou coauteur toute personne physique qui,
personnellement et de façon principale, accomplit les éléments constitutifs d’une infraction par
commission ou par omission ou qui est à l’origine de tels faits ». Il s’ensuit que la
responsabilité pénale du chef d’entreprise (du fait de son préposé) peut être fondée sur ce texte.
Il est, en effet, à l’origine des faits. S’il avait, par exemple, respecté les règles sanitaires ou
d’hygiène auxquelles son entreprise est soumise, le repas servi par le préposé n’aurait pas
entraîné l’intoxication et le décès du client (homicide involontaire).

La responsabilité indirecte du chef d’entreprise ne constitue pas un obstacle à ce que la


responsabilité personnelle du préposé soit engagée si toutes les conditions requises sont

1.
321. 1 Relativement aux infractions commises par voie de presse, voir G. TEBOUL, "Abus de liberté
d’expression par voie radiophonique", Petites Affiches, 24 mai 2005, n°102, p. 3 & SS. L’auteur
commente un arrêt de la CEDH du 30 mars 2004 relatif à un cas de diffamation (Radio France/France).
322. 2 Loi 56-93 ADP du 30 décembre 1993 instituant un code de l’information au Burkina Faso,
promulguée par décret 94-42 du 28 janvier 1994, JOBF du 13 février 1994, p. 118.

148
Précis De Droit Pénal Général

remplies1. Outre, l'élément matériel, il faut un élément moral pour la constitution d'une
infraction.

1.
323. 1 Cass. crim., 27 janvier 1859, S. 1859, I, 364.

149
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE II – L'ÉLÉMENT PSYCHOLOGIQUE OU MORAL

L’élément moral (intellectuel) nous interroge sur l’état d’esprit de l’individu au moment de la
commission de l’infraction. L'acte matériel doit être lié à la volonté de son auteur, peu importe
le moment où intervient cette volonté au cours de la formation de l'infraction. L'auteur de
l'infraction est conscient du fait que l'acte qu'il est en train de commettre est interdit par la loi.
Cette conscience peut être orientée vers un résultat donné ou être « mal maîtrisée » (cas des
infractions non intentionnelles).

L'intention criminelle est donc une des conditions nécessaires à la constitution de l'infraction
(section I). Cependant cette intention se présente sous une autre forme lorsqu'il s'agit de
certaines fautes pénales (section II).

SECTION I – L'INTENTION CRIMINELLE OU DOL CRIMINEL

148. L’intention criminelle est un des éléments essentiels exigés par la loi quant à l’existence
d’une infraction. Mais, le législateur burkinabé, contrairement à celui de la France 1, ne le
précise pas expressément. Il se contente de prescrire que, « Sont seuls punissables les faits
constitutifs d’une infraction à la date à laquelle ils ont été commis » (art. 2, al.1 du CP) et que
« Nul ne peut être déclaré pénalement responsable et encourir de ce fait une sanction s’il ne
s’est rendu coupable d’une infraction » (art. 3, al.1 du CP). Mais, ce silence ne décharge pas le
juge (le procureur en particulier) de son devoir de constater l’existence de l’intention
délictueuse. En outre, l’exigence de cette intention est prescrite indirectement par la loi, à
travers les dispositions légales exonérant l’individu dément, le mineur de moins de treize ans et
ceux de treize à dix huit ans dépourvus de discernement. Cette exemption est fondée sur le fait
que ces catégories de personnes ne distinguent pas le bien et le mal ou ne jouissent pas de leur
libre arbitre. C’est donc sur le défaut de conscience ou de liberté d’esprit que s’appuie le
législateur pour écarter l’existence de l’infraction. Ce qui signifie qu’il exige, d’une manière ou
d’une autre, que l’agent soit conscient de ses agissements contraires à loi.

Ainsi, l'intention (intendere) criminelle peut se définir comme la volonté d’accomplir un acte
en contradiction avec la loi ou de s'abstenir de faire un acte commandé par celle-ci. Certains
auteurs définissent l'intention criminelle ou délictuelle comme "la volonté qui se tend vers un
but illicite, la commission de l'infraction". L'agent agit de son plein gré. Néanmoins, une
distinction est faite entre l'intention coupable et le mobile (§1). L'intention constitue plutôt ce
qu’on qualifie de dol (§2).

§1 – L'INTENTION ET LE MOBILE

149. Avoir une intention c'est avoir une pensée qui tend vers un but. C'est aussi avoir une
volonté visant quelque chose. L'intention coupable exclut donc toute contrainte. L'intention
coupable qui est le dessein de faire ou de ne pas faire quelque chose diffère du mobile.
L'intention est une volonté abstraite et a un caractère général (tous les assassins ont, tous, la

1.
324. 1 Article 121-3 du CPF : "Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre".

150
Précis De Droit Pénal Général

même la volonté : celle de tuer) tandis que les mobiles sont nombreux et divers pour une
même incrimination.

150. Le mobile c'est l'intérêt qui a déterminé l'accomplissement de l'acte (tuer par jalousie,
donner des coups et blessures par colère, par exemple.). C’est la raison personnelle qui a
conduit l’agent à commettre l’infraction. En d'autres termes, c'est la cause ou le « pourquoi »
de l'action. Selon certains, "c'est la cause impulsive et déterminante de l'acte criminel". Le
mobile est en principe indifférent quant à la constitution de l'infraction qui est caractérisée,
lorsque l'élément matériel et l'élément moral existent1. Il n'intervient pas non plus dans la
détermination de la peine. En principe, il ne constitue ni un élément intentionnel, ni un fait
justificatif.

Cependant, il est exceptionnellement tenu compte du mobile dans certains cas.


Effectivement, le mobile peut influer sur la sanction applicable (circonstances atténuantes) ou
constituer un élément entrant dans la définition d’une infraction. Le motif est, en effet, pris en
considération en cas d'état de nécessité, de légitime défense et en cas de commandement de
l'autorité légitime. Il en est de même, concernant la commission de certaines infractions
notamment l'organisation de sa propre insolvabilité. En droit burkinabé, l’article 333-10 du
Code CIMA (relatif aux règles de fonctionnement des assurances) illustre également cette
situation : « Seront punis d’un emprisonnement de un à cinq ans … les directeurs généraux des
entreprises… qui : sciemment, auront publié ou présenté à l’assemblée générale un bilan
inexact en vue de dissimuler la véritable situation de l’entreprise ». L’individu est
conscient du fait qu’il publie ou présente un bilan inexact : c’est le dol général. Son objectif est
la dissimilation de la situation réelle de l’entreprise : c’est le mobile qui constitue, en même
temps, le dol spécial. Il peut aussi être tenu compte du mobile en matière de procédure pour
joindre plusieurs affaires pénales (infractions commises au même endroit, au même moment et
pour le même motif). On peut citer également le terrorisme, en droit français. Le terrorisme y
est défini comme des actes "en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant
pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur" (art. 421-1 du
CPF). Dans ce dernier exemple, le mobile est un élément entrant dans la constitution de
l'infraction.

Il faut dans tous les cas, distinguer plusieurs type de dol car les modalités et les degrés
d'intention coupable peuvent diverger (§2).

1.
325. 1 V Cass. crim. fr., 8 février 1977, Bull. Crim. 1977, n°52 ; V Cass. Crim. fr., 19 mai 1983, Bull. Crim.
1983, n°150.

151
Précis De Droit Pénal Général

§2 – L'INTENTION

L’intention1 renvoie à la connaissance de ce qui contribue à la consommation. Il importe de


distinguer le dol général et le dol spécial (1); le dol simple et le dol aggravé (2); le dol
déterminé et le dol indéterminé (3).

1 - Le dol général et le dol spécial

151. Le dol général consiste en la volonté consciente de violer un interdit légal (j'incendie
le bois classé tout en sachant que c'est interdit, par exemple)2. Il s'agit simplement du fait que
l’individu est conscient qu’il viole une prescription légale. C'est la volonté de commettre une
infraction. Le dol général est composé de deux éléments : la conscience de commettre un acte
interdit et la volonté, malgré cette connaissance, de passer outre. Il s'agit simplement de
l'intention délictueuse ou criminelle. L’individu doit être conscient du fait que la réalisation
matérielle de l’acte et le résultat constituent l’infraction prévue par la loi (si je soustrais un bien
croyant qu’il m’appartient, la volonté de voler fait défaut). En conséquence, il doit comprendre
la portée de ses actes. Dans le cas d’un empoisonnement, l’existence du dol général, suppose
que l’agent est conscient du caractère toxique ou mortifère de la substance qu’il administre3. Le
dol général est la condition minimum exigée par la loi pour imputer l’infraction à l’agent. Mais
ce dol est, parfois, insuffisant pour conclure à la constitution d'une infraction. Sa constitution
exige, en général, un mobile particulier (précis) c'est-à-dire un dol spécial.

152. Le dol spécial va au-delà du dol général car non seulement l’agent a réellement la
volonté de violer l’interdit mais aussi, il vise un résultat précis (il poursuit un but précis).
Le dol général et le dol spécial diffèrent par le caractère de l’élément intentionnel. Comme le
définissent DESPORTES et LE GUNEHEC, « L’infraction intentionnelle suppose un élément
intellectuel plus caractérisé que la simple volonté de commettre, en sachant qu’il est
interdit…Cette intention particulière, que l’on appelle le dol spécial, c’est l’intention
d’atteindre un certain résultat prohibé par la loi pénale »4. Le dol spécial, pour DANA,"consiste
dans la volonté utilisée, dans le but de nuire à une valeur sociale déterminée; le comportement
de l'agent est une réaction d'hostilité et non de simple indifférence"5. Le mépris (l’hostilité) est
orienté vers des valeurs sociales protégées. La volonté de nuire est dirigée vers un but précis.
(exemple : dans le cas d’un meurtre, il y a l’intention de donner la mort; pour les coups et
blessures volontaires, l’intention visée est celle de porter des coups à quelqu'un; dans
l’exemple de la diffamation, on dénote une intention de porter atteinte à la considération ou à
l'honneur de quelqu'un). Il y a un désir d’atteindre le résultat prohibé.

Dans le dol spécial, il y a une intégration du mobile ou une prise en compte de celui-ci. Le
mobile est érigé en élément intentionnel. Ainsi, dans le cas de l’abus des besoins ou des
faiblesses d’un mineur ou d’un majeur incapable, l’agent abuse de la situation de faiblesse, de
1.
326. 1 V. I. MOINE-DUPUIS, "L’intention en droit pénal, une notion introuvable ?", D. 2001, chr., p. 2144
327. 2 J. PRADEL & A. VARINARD, "Les grands arrêts du droit pénal général", 4 ème édition, Dalloz, 2003,
n°39.
328. 3 V. Cass. Crim. fr. 18 juin 2004 (affaire du sang contaminé), JCP, 2003, II, 10121, note M.L. RASSAT
329. 4 V. F. DESPORTES & F. LE GUHENEC, "Droit pénal général", 11 ème édition, Economica, 2004,
n°474.
330. 5 V. A. DANA, "La notion d’infraction pénale", LGDJ, 1982, n° 454 et SS.

152
Précis De Droit Pénal Général

non maturité d’esprit de la victime pour lui faire notamment souscrire, en sa défaveur, une
obligation, une décharge afin d’obtenir frauduleusement un prêt d’argent ou de mobiliers ou
encore d’autres avantages (art. 489 du CP)1. L’agent abuse de la faiblesse dans le but de
satisfaire de façon frauduleuse des intérêts personnels (avoir un prêt, obtenir des effets de
commerce…)2. L’exemple de la grivèlerie est, également, patent. L’individu sait qu’il n’est pas
en mesure de payer les aliments ou les boissons payantes qu’il va consommer et il tient à le
faire quand même, son objectif étant de les consommer gratuitement au préjudice du
restaurateur (art. 470 du CP).

2 - Le dol simple et le dol aggravé

153. Le dol simple et le dol aggravé se distinguent par les circonstances psychologiques dans
lesquelles l’infraction a été commise. Le meurtre illustre une situation de dol simple car
l’individu veut simplement parvenir au résultat prohibé par la loi. Or, dans le cas d’un
assassinat, l’agent dépasse le seuil de la simple volonté de tuer : il s’agit d’un dol aggravé.
Dans cette dernière hypothèse, il nourrit soit des intentions de vengeance, soit d’autres
"intentions fortes" de satisfaction morale (xénophobie, racisme, fanatisme, pratiques occultes
…). Il y a une certaine " ex-croissance " d’intentions. Le Professeur PRADEL qualifie le dol
aggravé, d’un dol qui « au lieu d’être instantané, …s’étire dans le temps »3 . Le mobile peut
donc constituer un critère de qualification du dol aggravé. Suivant le degré ou l'intensité du dol,
la qualification de l'infraction et le quantum (ou la gravité) de la peine varient.

Le dol simple est sujet à une peine ordinaire alors que le dol aggravé entraîne l'application
d'une peine répondant à cette gravité. Le meurtre simple, le meurtre à but anthropophagique
d’une part et le vol simple, le vol avec port illégal d’uniforme d’autre part, sont suffisamment
illustratifs. Le meurtre qui est un homicide volontaire (art. 318 du CP), est passible de la peine
d’emprisonnement à vie (art. 326, al.3 du CP) tandis que le meurtre à but anthropophagique
emporte la peine de mort (art. art. 324, al.2 du CP). La seconde catégorie de meurtre, comme
on peut le constater, vise un résultat aussi grave que le simple meurtre. L’intention est
doublement grave. L’agent a la volonté de tuer (dol simple) pour consommer la chaire humaine
(dol aggravé), acte également proscrit par la loi. Quant au vol simple (art. 449 du CP), il est
puni d’une peine d’emprisonnement variant entre un (1) an et cinq (5) ans et/ou d’une amende
(art. art. 450 du CP). En revanche, le vol exécuté avec le port illégal d’uniforme (port de tenue
vestimentaire militaire sans autorisation, par exemple) est passible d’une peine
d’emprisonnement de dix (10) à vingt (20) ans (art. 452 du CP). L’agent est gravement
conscient de la portée de son comportement : non seulement, il entend atteindre le résultat
prohibé mais aussi, il a la volonté de l’atteindre « efficacement », sans échec. Il porte
l’uniforme militaire, par exemple, pour créer la confusion ou pour désorienter les éventuels
témoins ou encore pour faire naître la crainte (la peur du gendarme) autour de lui afin de
parvenir à ses fins (illicites).

1.
331. 1 Article 489, al. 1, du CPB, "Est puni d’un emprisonnement de deux à cinq ans …quiconque abuse des
besoins, des faiblesses ou des passions d’un mineur ou d’un incapable majeur, pour lui faire souscrire, à
son préjudice, des obligations, quittances ou décharges, pour prêt d’argent ou de choses mobilières ou
d’effets de commerce ou de tous autres effets obligatoires, sous quelque forme que cette négociation ait
été faite ou déguisée."
332. 2 V. M. VERON, "Extorsion ou abus de faiblesse : le choix délicat", Droit Pénal, février 2006,
commentaires, p. 21.
333. 3 V. J. PRADEL, "Droit pénal général", 14ème édit., op. cit., n°506.

153
Précis De Droit Pénal Général

154. La préméditation qui consiste à former un dessein avant le passage à l'acte délictueux ou
criminel constitue un dol aggravé1. La préméditation, en tant qu’intention criminelle (réfléchie)
manifestée avant la réalisation de l’acte, est, en général, considérée comme une circonstance
aggravante en matière d'homicide volontaire, c'est le cas de l'assassinat. Le législateur en donne
une définition. En effet, aux termes de l’article 319 du CP, «La préméditation consiste dans le
dessein formé avant l’action d’attenter à la personne d’un individu déterminé ou même de celui
qui sera trouvé ou rencontré, quand bien même ce dessein serait dépendant de quelque
circonstance ou de quelque condition ». Il fait la différence entre la préméditation et le guet-
apens qui constitue aussi une circonstance d’aggravation de la peine et « consiste à attendre,
pendant un certain temps dans un ou divers lieux, un individu soit pour lui donner la mort, soit
pour exercer sur lui des actes de violence » (art. 320 du CP). Mais, dans tous les cas, le meurtre
commis par la voie du guet-apens ou réalisé avec préméditation constitue un assassinat (art.
318 du CP). En outre, dans les deux cas de figure, l’exécution de l’infraction a été planifiée.

3 - Le dol déterminé et le dol indéterminé

155. La distinction entre ces deux catégories de dol est axée sur le résultat visé par l'intention.
La détermination du dol dépend de l'étendu de l'intention. Ainsi, le dol est déterminé lorsque
le résultat est visé de façon précise. L'agent désire précisément commettre telle infraction à
l'encontre d'une personne déterminée ou non (l'agent ZIGA a l'intention de donner des coups à
sa voisine XATA, dans le cas de coups et blessures volontaires).

Par contre, quand le résultat à atteindre n'a pas précisément été visé, il s'agit d'un dol
indéterminé L'agent n'a pas, dans cette hypothèse, voulu commettre l'acte d'une façon précise
quant à la gravité du résultat ou à l'identité de la victime. L’indétermination peut porter sur la
survenance du résultat ou sur la gravité du résultat. L’acte est commis volontairement sans se
soucier du résultat qui est abstraitement prévisible. Le résultat définitif obtenu n’est pas
attendu, il a concrètement été imprévisible. Il accepte la probabilité que le résultat se produise
C'est l'exemple du pyromane qui veut incendier une case sans penser aux conséquences
(victime a été atteinte d’une incapacité permanente, dommages, décès). C'est aussi le cas de la
cleptomane qui désire voler un bien (des mangues, des pagnes, des bijoux), peu importe
l'identité du propriétaire ou le dommage que causera ce vol, pourvu qu’elle puisse commettre
son acte. Celui qui projette des morceaux de plomb à l’aide d’un lance-pierres (fronde) dans
l’obscurité sans se soucier de la trajectoire de ceux-ci, ni de leur destination est également dans
une situation de dol indéterminé. Toutefois, quel que soit le résultat, l’agent est punissable car
le dol indéterminé est assimilé au dol déterminé.

4 - L'infraction praeter-intentionnelle et le dol éventuel

156. L'infraction praeter-intentionnelle (praeter intentionem, en latin, signifie au-delà de


l'intention) suppose que le résultat atteint a été visé mais de façon partielle même si celui-ci
était abstraitement prévisible. Le résultat dépasse les prévisions de l’agent. C’est pourquoi
certains auteurs qualifient cette situation de dol dépassé2. Il a atteint un seuil non voulu par

1.
334. 1 J-F. SEUVIC, "Circonstance aggravante liée à la raison de commission de certaines infractions", RSC
2003, p. 367 & SS.
335. 2 V. J. PRADEL, "Traité de droit pénal général et de science criminelle comparée", 12 ème édit., 1999, n°
507 ; F. DESPORTES & F. LE GUHENEC, "Droit pénal général", op. cit. n° 482.

154
Précis De Droit Pénal Général

l'agent et souvent est de caractère plus grave. L'intention n'a donc pas porté que sur un résultat
moins grave par rapport au résultat finalement produit. En se référant à l’exemple des coups et
blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner, on se rend compte que
l'agent n'a pas voulu tuer mais les coups ont été de caractère mortel. Concrètement, pendant
qu’il donnait les coups, il ne pouvait pas doser la force de ceux-ci afin qu’ils entraînent
uniquement la douleur physique (résultat voulu) à l’endroit de la victime. Dans cette situation
la loi (art. 332, dernier alinéa du CP) tient compte du caractère partiel du résultat : «Si les
violences ou privations pratiquées ont entraîné la mort sans intention de la donner, les auteurs
sont punis de l’emprisonnement à vie ». Or, « Si les violences ou privations sont pratiquées
avec l’intention de provoquer la mort, les auteurs sont punis comme coupables d’assassinat »
(art. 332, avant-dernier alinéa du CP), c’est-à-dire de la peine capitale.

157. S'agissant du dol éventuel l'agent n'a aucunement voulu le résultat. Il l'envisage tout
simplement comme pouvant se produire. L’acte est commis délibérément mais l'agent
n'accepte, ni ne recherche le résultat survenu. C’est l’exemple d’un avortement entraîné par des
coups donné à une épouse en état de grossesse. L'agent, battant habituellement son épouse
(homme violant), n'avait aucune intention de commettre un acte d'avortement, ce résultat est
intervenu par simple imprudence). Il avait l’intention d’infliger une « correction corporelle » à
sa conjointe. Le dol éventuel peut être rapproché de l’imprévoyance consciente qui signifie
que l’agent a librement commis un acte par imprudence ou a pris des risques, en prévoyant que
les conséquences probables (résultat illicite) ne vont pas se concrétiser. C’est le cas du
conducteur qui ne ralentit pas, à la vue d’un panneau de danger indiquant la présence d’une
école à proximité de la voie empruntée parce qu’il compte sur sa capacité de réaction rapide
pour éviter un accident qui survient quand même. Selon ses prévisions, l’accident est probable
mais ne se réalisera pas. Il ne l’a donc pas souhaité.

En principe, le dol éventuel ne donne pas lieu à une punition, l'intention de commettre l'acte
étant absente. Mais, dans certains cas, la loi peut en disposer autrement.
L'infraction praeter-intentionnelle et le dol éventuel apparaissent comme une catégorie
intermédiaire entre l'intention délictuelle ou criminelle et la faute.

SECTION II – LA FAUTE PÉNALE

La constitution des infractions non intentionnelles (fruit d’une volonté maladroitement


maîtrisée) ne nécessite pas un élément moral au sens de celui requis pour les infractions
intentionnelles (fruit d’une volonté maîtrisée, contrôlée, dirigée vers un résultat). La faute
réunit les éléments requis pour les infractions non intentionnelles (§1). Il en est de même
concernant les contraventions (§2).

§1 – LA FAUTE DANS LES INFRACTIONS NON INTENTIONNELLES

158. Les infractions non intentionnelles tels les délits d'imprudence ou involontaires n'exigent
pas une intention coupable. L'existence d'une faute suffit, la faute étant définie comme la
violation d’une obligation préexistante. Mais, il convient de relever que l’infraction non
intentionnelle n’est pas forcement synonyme de comportement non voulu ou d’absence réelle

155
Précis De Droit Pénal Général

d’intention. L’agent qui fait de l’excès de vitesse l’a bien voulu. Toutefois, l’accident de la
circulation que cela a occasionné (entraînant un homicide involontaire) ne fait pas partie de
cette volonté. Il n’a pas souhaité ce résultat, c’est-à-dire l’accident, et encore moins le décès de
la victime. Les infractions non intentionnelles1 concernent, surtout, les fautes pénales
d’imprudence ou involontaires (coups et blessures involontaires, homicides involontaires…).

La faute pénale est tout fait de l'homme qui viole une norme légale. Elle existe aussi bien en
matière de délits non intentionnels que dans le domaine des contraventions. Certains auteurs,
notamment PRADEL, F. DESPORTES et F. LE GUHENEC, qualifient cette faute d’ordinaire2
par rapport à des fautes qui sont issues de l’évolution de la législation pénale française (la mise
en danger délibérée : infraction née des lois de juillet 1992 ; la faute caractérisée née de la loi
n° 2000-647 du 10 juillet 2000)3. Les deux derniers auteurs font une distinction entre la faute
pénale ordinaire et les faute d’imprudence qualifiée (mise en danger délibérée, faute
d’imprudence caractérisée)4. Selon ceux-ci, « la faute pénale ordinaire « suppose une
imprévoyance et une indiscipline » Ils estiment que, « …entre l’individu qui viole
intentionnellement la loi pénale, avec le plus souvent la volonté de parvenir à un résultat
certain, et celui qui cause un dommage sans en avoir eu conscience par pure imprudence ou
négligence, il existe une hypothèse intermédiaire : celle la de personne qui prend un risque de
façon délibérée, toute en espérant que ce risque ne provoquera aucun dommage ». Il s’agit de la
mise en danger d’autrui. Quant à la faute d’imprudence caractérisée, pour eux, « …il s’agit
d’une faute caractérisée ; cette faute expose autrui à un risque grave ; ce risque ne peut être
ignoré de la personne ». La faute est caractérisée5 lorsqu’elle est affectée d’une exceptionnelle
gravité. La mise en danger d’autrui peut être classée comme un dol éventuel6. Le législateur
burkinabé ne fait pas, expressément, ces distinctions.

La faute pénale peut être la conséquence d'un acte commis par maladresse, par imprudence,
par négligence ou par inattention (faute pénale d’imprudence). C’est sur ces fondements
qu’un tribunal français a condamné un maire, suite à une avalanche qui a causé le décès d’une
douzaine de personnes. Selon le tribunal, «il est prévenu d’avoir…par maladresse, imprudence
inattention ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou

1.
336. 1 A. CHAVANNE & M. C. FAYARD, "Les délits d’imprudence", RSC, 1975, p. 1 & SS.
337. 2 V. J. PRADEL, "Traité de droit pénal général et de science criminel comparée", op. cit., n° 509 ; F.
DESPORTES & F. LE GUHENEC, "Droit pénal général", 11 ème édition, Economica, 2004, p. 439 &
SS.
338. 3 V. article 121-3 du CPF : "Il n’ y a de cime ou de lit sans intention de la commettre.
Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit de mise en danger délibérée de la personne d’autrui
Il y a également délit lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de
manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi
que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature
de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il
disposait.
Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le
dommage, mais qui ont crée ou ont contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du
dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est
établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence
ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et exposait autrui à
un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer".
339. 4 V. F. DESPORTES & F. LE GUHENEC, "Droit pénal général", op. cit., p. 453 & SS .
340. 5 V. A. PONSEILLE, "La faute caractérisée en droit pénal", RSC, 2003, P. 7 & SS.
341. 6 V. Cass. crim. fr. 11 mars 1998, JCP, 1999, II, 10064 ; Cass. crim. fr. 11 février 1998, JCP, 1998, II,
10084 . Voir également B. BOULOC, "responsabilité pénale", RSC 2003, p. 92.

156
Précis De Droit Pénal Général

les règlements, en l’espèce en commettant notamment les négligences suivantes : - le maire


disposait incontestablement du pouvoir et des moyens d’ordonner aux résidents de sa
commune l’évacuation de leur domicile…Et ainsi involontairement a causé la mort de… »1.
Le Tribunal a estimé que le décideur public connaissait les risques auxquels était exposée la
population et n’a pas pris les mesures de prévention nécessaires bien qu’il en avait les moyens.
Il a donc commis involontairement un homicide involontaire par négligence (ce qui lui a valu
une condamnation de trois (3) mois avec sursis.

Elle peut également être commise suite à un défaut d’entretien. La doctrine définit souvent
l’imprudence comme l’acte ou le comportement que n’aurait pas eu un bon père de famille
(personne avisée) se trouvant dans les mêmes conditions que l’agent. L’imprudence renvoie à
l’agent inconscient du résultat illicite. La faute est aussi un manquement à une obligation légale
de prudence ou de sécurité. Ainsi, certains auteurs définissent la faute pénale comme celle qui
« … consiste …soit à ne pas prévoir les conséquences dommageables de l’acte que l’on
accomplit — ou à ne pas croire qu’elles pourront se produire — soit à ne pas prendre les
précautions nécessaires pour les empêcher de survenir. Le résultat n’est pas imputable à la
volonté positive de l’agent, mais plutôt à une faute d’intelligence ou à une inertie de la
volonté »2. Dans le cas de l’imprudence, la faute pénale est constante quand l’acte aboutit à un
résultat illicite. Ainsi, aux termes de l’article 42 du décret 976316 du 29 juillet 1997 relatif aux
règles générales contre l’incendie et la panique dans les établissements recevant du public,
« Tout manquement aux dispositions du présent décret et du règlement de sécurité prévu à
l’article 12 …et qui entraînerait une atteinte à l’intégrité physique des personnes constitue une
infraction punie conformément au code pénal »3

La faute pénale (faute ordinaire) se rapproche de la faute civile4 en ce qu’elle s’apparente à la


faute civile de l’article 1383 (faute d’imprudence ou de négligence) du code civil 5. En droit
civil, il s’agit d’une faute quasi-délictuelle. Toutefois, le domaine de la faute civile est plus
vaste6. Le rapprochement peut également être fait entre la faute pénale et la faute
administrative7 lorsqu’il s’agit d’une faute pénale (faute personnelle), détachable de la
fonction, commise par un agent public8. Concernant la comparaison entre la faute pénale et la
faute civile, il convient de rappeler que les deux catégories de fautes ne visent pas le même but
et n’engendrent pas les mêmes conséquences. En effet, la faute civile renvoie à la
responsabilité civile qui suppose un dommage privé susceptible de réparation. Or, la faute
pénale renvoie à la responsabilité pénale qui suppose un préjudice, un trouble social susceptible
de sanction (punition). La réparation est évaluée par rapport à l’importance du dommage causé

1.
342. 1 V. Trib. Corr. (fr.) de Bonneville 17 juillet 2003, Petites Affiches, 2005, n° 93, p. 13 & SS.
343. 2 V. R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", tome 1, 7 ème édit., op. cit , p. 757.
344. 3V. JOBF du 7 août 1997, p. 2022.
345. 4 V. F. TERRE, Ph. SIMLER & Y. LEQUETTE, "Les obligations", 8 ème édition, Dalloz, p. 655 & SS.
346. 5 Aux termes de l’article 1383, "Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par
son fait, mais encore par sa négligence ou son imprudence" ; voir Cass. Crim. 23 avril 1955, D. 1955,
524.
347. 6 M.-A. CHARDEAUX, "Le faible rationnement de l’adage nemo auditur en droit des obligations",
Petites Affiches, 22 juin 2005, n°123, p. 17 & SS (commentaire d’un arrêt de la cour de cassation civile
française du 22 juin 2004).
348. 7 Y. MAYAUD, "Faute pénale et faute de service : application à un médecin du SAMU (Cass. crim. 2
déc. 2003…)", RSC, 2004, Chr., p. 344.
349. 8 V. Arrêt Thépaz, Tribunal des Conflits (TC), 14 janvier 1935, S., 1935, 317, note Alibert.

157
Précis De Droit Pénal Général

tandis que la sanction est proportionnée à la culpabilité de l’auteur1. Mais, lorsqu’il y a une
coïncidence ou une identité entre les deux types de fautes, le rapprochement est intéressent du
point de vue de la procédure2. Cette procédure concerne notamment le principe de l’autorité du
pénal sur le civil (« le criminel tient le civil »). La loi (art. 4 du CPP) prescrit effectivement
que, « L’action civile peut être aussi exercée séparément de l’action publique. Toutefois, il est
sursis au jugement de cette action exercée devant la juridiction civile tant qu’il n’a pas été
prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ».

En outre, la victime peut adresser la demande de réparation à la juridiction pénale au lieu


d’engager une action civile devant la juridiction civile3. Néanmoins, des difficultés de
réparation civile peuvent se poser, pour la partie civile, notamment, lorsqu’il y a relaxe ou
acquittement de la personne poursuivie pénalement. On peut, a priori, craindre les risques de
refus de la réparation demandée, malgré l’existence d’un lien direct de causalité entre la faute
pénale et le dommage subi4. La faute légère en matière pénale n’a pas forcément ce caractère
en matière civile (elle peut être plus grave). Mais, ces craintes peuvent être dissipées si, l’on se
fonde sur l’article 10, al. 3 du CPP qui permet de soumettre ces aspects aux règles du droit civil
(notamment las articles 1382 à 1384 du code civil).

Par ailleurs, la faute ordinaire (non présumée) est à distinguer de la faute intentionnelle pour
laquelle l’agent vise forcément un résultat. A ce sujet PRADEL ne définit-il pas la faute
« …comme la violation d’un devoir (élément d’illicéité), réalisée par un acte positif ou par une
abstention (élément matériel) et de façon plus ou moins consciente (élément psychologique)5.

159. L'élément moral par rapport aux infractions non intentionnelles est, en quelque sorte,
déduit de la faute pénale. Ces infractions sont purement matérielles. L'élément psychologique
est la volonté prise en elle-même, indépendamment d'un objectif à atteindre. L'élément moral
est constitué lorsque l'agent agit librement, de son propre gré, sans contrainte. Il en ressort que
l'élément moral est réputé constitué dès lors que, l'auteur des actes a agi avec volonté, c'est-à-
dire de façon libre, consciente (c’est le cas d’un homicide involontaire intervenu, suite à un
accident survenu pour excès de vitesse). Certes, il y a une erreur de fait (erreur de conduite
abstraite en droit civil) de la part de l’agent, étant donné qu ‘il se trompe sur la situation dans
laquelle ou sur les conséquences de son comportement.

En somme, l'élément matériel et l'élément moral (mens rea) se dégagent de la commission de


l'acte matériel (actus reus) ou de la violation des règles légales. L'exemple de certaines

1.
350. 1 V. F. CHABAS & M. DEJUGLART, "Obligations – Théorie générale", t.2, vol.1, Montchrestien,
1991, n°378.
351. 2 V. Ph. MALAURIE & L. AYNES, " Obligations – Contrats et quasi-contrats", vol. II, 11ème édition,
Cujas, 2001, n°621.
352. 3 Aux termes de l’article 3 du CPP, « L’action civile eut être exercée en même temps que l’action
publique et devant la même juridiction.
Elle est recevable pour tous les chefs de dommages, aussi bien matériels que corporels ou moraux qui
découleront des faits, objets de la poursuite ; elle est également recevable pour les dommages matériels
découlant de la même action, même si aucune contravention connexe, génératrice des dommages
matériels, n’a été retenue par le titre de la poursuite".
353. 4 En effet, par rapport au lien de causalité, la loi (art. 2 du CPP) prévoit que : "L’action civile en
réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont
personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction…"
354. 5 V. J. PRADEL, "Droit pénal général," 14ème édition, op. cit., n° 514.

158
Précis De Droit Pénal Général

infractions dans les domaines du travail, de la chasse, de l'urbanisme, de la douane, de


l’économie, de environnement peut illustrer cette situation.
Qu'en est-il de l'élément moral relativement aux contraventions ?

§2 – L'ÉLÉMENT MORAL DANS LES CONTRAVENTIONS

160. Les contraventions sont définies par les textes légaux, en particulier les règlements,
notamment le décret 97-84 du 28 février 1997. Selon l’article 2 du CPP, « Les contraventions
sont reparties selon leur gravité en quatre classes… ». En principe, elle est punie d’une peine
d’amende uniquement (art. 12 du CP). La contravention est une infraction matérielle compte
tenu du fait que la faute se fond dans l’infraction.

La faute contraventionnelle (faute présumée) est aussi considérée comme une infraction non
intentionnelle en ce que son imputation à l’auteur ne tient pas compte de l’existence ou non
d’une intention (de nuire). La violation de la loi suffit à conclure l’existence de l’élément
matériel et de l’élément moral. Elle est la conséquence de la violation d’une loi ou d’un
règlement. La faute est présumée et son existence se traduit par la commission de l’acte
prohibé. Pour LEROY, « Les incriminations …impliquent pour les citoyens des obligations
plus contraignantes. Ils doivent tout particulièrement être attentifs. Dans ce cas, la faute n’est
autre chose que cette absence de diligence suffisante…Il s’agit d’une faute normative »1.

La contravention est souvent caractérisée par la violation d'une règle visant le maintien de
l'ordre public ou la sécurité (hygiène, travail, circulation routière, urbanisme, faune et flore,
transport…). C'est aussi le cas de la non observation d'une règle de police permettant de
prévenir ou d'éviter un dommage. Elle permet de « prévenir des situations dangereuses de la
vie courante : obligation d’entretenir … de nettoyer et d’éclairer les rues, de réparer les édifices
menaçant ruine etc. ». Pour certains auteurs : "la contravention n'est que la lésion d'intérêts
administratifs"2. D'autres auteurs se joignent aux italiens pour qualifier les contraventions de
"droit de bagatelle". En d'autres termes, ce sont des infractions d'une gravité minime. L'agent
qui désobéit de façon libre, consciente par rapport aux prescriptions légales ou réglementaires
peut être sanctionné suivant les règles contraventionnelles. En conséquence, l'agent qui manque
de volonté ou qui ne jouit pas de ces facultés mentales lors de la violation de l'interdit n'est pas
punissable. La répression dans ces conditions est pratiquement automatique et peu importe, si
l'agent a agi exprès ou non.

Il en ressort que l'acte contraventionnel non accompli librement (cas de contrainte irrésistible
ou de force majeure) est exempt de sanction. Il en est de même pour l'acte commis dans une
situation d'état mental altéré (absence de conscience). Les infractions non intentionnelles
posent d'une manière générale la question de preuve. L'accusation, c'est-à-dire le ministère
public, est dispensée de preuve. Il peut se limiter, simplement, à prouver l'acte matériellement
accompli. Il y a en quelque sorte une présomption de la volonté voire de la culpabilité3. La
charge de la preuve revient implicitement, dans ces conditions, à la défense.
1.
355. 1 V. J. LEROY, " Droit pénal général", Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence (LGDJ), 2003,
n°400.
356. 2 V. X. PIN, « Droit pénal général », Dalloz, 2005, n°35.
357. 3 V. Cass. crim., 27 mai 1959, Bull. Crim. 1959, n°279.

159
Précis De Droit Pénal Général

Il peut exister quelques différences entre le délit non intentionnel (la faute pénale
d’imprudence) et la faute contraventionnelle. L’existence de la faute contraventionnelle
n’exige pas nécessairement l’existence d’un dommage tandis que, dans la plupart des cas, le
délit d’imprudence nécessite l’existence d’un préjudice. Ainsi, dans l’hypothèse d’une
contravention, le non respect du stationnement interdit (art. 4 & 52 du décret du 12 août 2004
relatif à la circulation routière)1 ou le non respect du panneau de signalisation « STOP » ou du
feu tricolore (passé à la couleur rouge) qui exige un arrêt obligatoire (art. 49 du décret du 12
août 2004 relatif à la circulation routière) n’engendre pas forcément un résultat dommageable.
Elle existe par le seul fait de l’exécution de l’acte contraventionnel. En revanche, en cas
d’homicide involontaire (art. 353 du CP), on aboutit toujours à un dommage qui permet
d’engager la responsabilité pénale. Il en découle que le préjudice fait généralement partie des
éléments constitutifs du délit non intentionnel. Les coups et blessures involontaires en
constituent également une illustration (art. 354 du CP).

1.
358. 1 V. décret 2004-418 du 12 août 2004 définissant et réprimant les contraventions en matière de
circulation routière, JOBF du 11 mars 2004, p. 376.

160
Précis De Droit Pénal Général

TITRE III – LA RESPONSABILITÉ PÉNALE

161
Précis De Droit Pénal Général

Toute personne, auteur d'une infraction, en est en principe pénalement responsable. Cependant,
ce principe ne s'applique que sous certaines conditions. La commission d'une infraction
n'engage donc pas systématiquement la responsabilité pénale de son auteur. La loi précise les
situations dans lesquelles la faute pénale n’est pas imputable à l’agent (Chapitre I). En outre,
elle énumère les circonstances dans lesquelles, certains faits ou actes font disparaître
l'infraction. Il s’agit des faits justificatifs (Chapitre II).

162
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE - I -LES CAUSES DE NON IMPUTABILITÉ OU


DE NON RESPONSABILITÉ

La responsabilité pénale est la conséquence juridique de l'acte commis (l’infraction qui a


généré celle-ci). L'obligation de répondre de cette conséquence constitue la responsabilité.

161. La culpabilité consiste en l’agissement de l’individu au mépris des prescriptions légales.


Elle renvoie à la commission d'un acte défendu légalement ou à celle d'une faute (culpa). A ce
sujet, certains auteurs pense que, « le "chaudron de sorcière"1 qui bouillonne dans le crâne d’un
délinquant mijote sous les méninges d’un homme ou d’une femme qui contracte mariage, de
l’acquéreur ou du vendeur d’un immeuble ou d’un fonds de commerce, d’un commerçant qui
accepte une chaîne de traite, d’un père famille qui donne ses biens à ses enfants… Car les
décisions prises dans la vie juridique ne sont pas toujours mieux délibérées que les actions
criminels »2. Le coupable est l’auteur matériel de l’acte prohibé. La culpabilité n'est donc
effective que dans le cas où l'infraction a été commise. C'est le lien entre l'agent et son
comportement. Selon MERLE & VITU, « La culpabilité est …une notion complexe, qui
comporte un aspect matériel (participation physique à l’infraction) et un aspect moral
(participation fautive, conscience de violer la loi)3. La culpabilité suppose donc qu’il n’y a pas
d’infraction sans faute.

162. Enfin, l'imputabilité c'est le fait d'attribuer la "paternité" de la faute à quelqu'un ou de


mettre sur le compte d’une personne (en latin : imputare). Selon Jean PRADEL,
« l’imputabilité apparaît comme le noyau dur, irréductible sans lequel il n’y a pas de faute et
donc pas de responsabilité »4. Elle permet de désigner son auteur. L’imputabilité suppose un
état psychologique libre et conscient de l'agent ou une capacité de discernement. Cependant, on
peut noter que dans le passé, en droit français, la responsabilité pénale des animaux pouvait
être engagée5.

Quoiqu’il en soit, la commission d'une infraction ne conduit pas nécessairement à


l'application d'une sanction à l'encontre de son auteur. Il est tenu compte de quelques
situations pour atténuer la responsabilité pénale d'une personne ou pour exclure sa
responsabilité. Le trouble psychique et neuropsychique (Section I), la contrainte et l'erreur
(Section II) de droit figurent parmi ces situations6. Par ailleurs quelques règles de

1.
359. 1 C’est en évoquant la divergence (relativement à la notion de culpabilité) entre le droit et les sciences
de l’homme que les auteurs ont fait référence à cette expression en déclarant : "Beaucoup de
criminologues critiquent cette conception classique de la culpabilité qui assimile le délinquant à une
sorte de disciple corrompu de Descartes dont les actions sont solidement délibérées et clairement
perçues comme blâmables. Un délinquant de cette espèce serait, assure-t-on, rarement observé en
criminologie, car habituellement, le cerveau d’un criminel ressemble plutôt à un « chaudron de
sorcière » qu’à une centrale électronique (voir R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", Tome
1, 7éme édition, Cujas, 1997, n°574).
360. 2 R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", t. 1, op. cit., p. 723.
361. 3 R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", t.1, op. cit., P. 658.
362. 4 J. PRADEL, "Droit pénal général », op. cit., n° 462.
363. 5 R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", t.1, op. cit., p. 773.
364. 6 Voir à ce titre les articles 70 à 75 du CP (voir annexes).

163
Précis De Droit Pénal Général

responsabilité pénale tiennent compte de la catégorie ou de la qualité de la personne


concernée (Section III).

SECTION I– LE TROUBLE PSYCHIQUE ET NEUROPSYCHIQUE


(L’ABSENCE DU LIBRE ARBITRE)

163. L’affection mentale constitue une des causes susceptibles de rendre irresponsable ou
d’alléger la peine du délinquant. Une telle situation est justifiée, en raison de l’élément moral
de l’infraction qui renvoie à l’état mental de l’individu en cause. Celui qui pose l’acte prohibé
doit être en mesure de comprendre son geste. Ainsi, le législateur rend irresponsable l’auteur
d’une infraction commise en état de non lucidité (§1). Mais, le bénéfice de cette
irresponsabilité nécessite l’existence d’un certain nombre d’éléments (§2).

§1 – L’ÉTAT MENTAL

La démence (1) et l’état de maturité intellectuel (2) peuvent constituer des causes de non
imputabilité. En principe, celui qui ne jouit pas de ces facultés mentales ne peut faire l’objet de
sanctions pénales1.

1 - La démence (cause subjective de non imputabilité)

164. Aux termes de l'article 73 du CP, « Il n’y a ni crime, ni délit, ni contravention, lorsque
l’auteur était en état de démence au temps de l’action… ». L'infraction est donc inexistante
lorsqu'elle est commise en état de démence. Le législateur ne donne aucune définition de la
démence mais, elle peut être appréhendée comme une maladie mentale affectant l’individu et
entraînant un défaut du libre arbitre. C’est une affection mentale qui supprime la faculté de
discerner. Il s’agit donc de troubles d’origine pathologique. Médicalement, la démence est un
« affaiblissement progressif de l’ensemble des fonctions intellectuelles, dû à une lésion des
cellules nerveuses cérébrales »2. L’aliéné criminel n’est donc pas passible de sanctions pénales
tant qu’il a agi sous l’emprise d’un trouble mental.

Il y a une nette évolution, dans ce sens en droit français, car dans l'ancien droit, l'aliéné était
punissable3. L’état de l’aliéné était défini comme une situation dans laquelle l’individu est
possédé par le démon. Le législateur français, à la différence de celui du Burkina, ne se limite
plus à la démence au sens strict, concernant l'irresponsabilité. En effet, l'article 122-1 du CPF
permet une large extension du trouble mental : « n'est pas pénalement responsable la personne
qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli
son discernement ou le contrôle de ses actes. La personne qui était atteinte au moment des faits
d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle

1.
365. 1 V. arrêt Laboube, Cass. Crim 13 décembre 1956, D. 1957, Jurisprudence (Jurisp), p. 349. La Cour a
estimé que, "toute infraction, même non intentionnelle suppose que son auteur ait agi avec intelligence
et volonté".
366. 2 Définition donnée par le dictionnaire LAROUSSE
367. 3 V. M. FOUCAULT, "Histoire de la folie à l’âge classique", Plon, 1961.

164
Précis De Droit Pénal Général

de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance
lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le régime ».

Il ressort de ces dispositions qu'il y a une large prise en compte du trouble psychique et de
quelques troubles voisins de la démence. Le terme « démence » est remplacé par les termes
« troubles psychiques et neuropsychologiques », ces termes permettant d’élargir le champ
d’application de l’irresponsabilité pénale et de la réduction des peines. Les différentes
affections mentales telles que celles de l'intelligence, celles de nature congénitale (crétin,
imbécile, idiot), celles acquises par l'effet d’une maladie (exemple de l’épilepsie qui est une
affection qui se caractérise par la répétition de décharges des cellules nerveuses du cortex
cérébral) doivent être prises en compte quand elles altèrent le discernement ou entravent la
maîtrise ou le contrôle des actes1. Cependant, les juges peuvent ne pas tenir compte de
certains troubles pour prononcer la sanction pénale (notamment dans certains cas d’altération
du discernement)2.

En somme, le législateur français tenant compte de l'évolution scientifique prend en


considération aussi bien la folie générale que la folie localisée ou spécialisée (exemple de la
folie de persécution qui consiste à se croire persécuté et qui peut conduire à un meurtre). Mais,
on peut se demander si cette extension n'est pas source d'abus. Il n'en demeure pas moins que
tous ces états n'entraînent pas forcement une irresponsabilité totale.

165. Quant à la démence proprement dite, perçue comme une altération des facultés mentales,
elle abolit la faculté de discernement et la conscience (les fonctions de l’intelligence sont
atteintes). Elle supprime le libre arbitre et anéantit la capacité, pour l'individu atteint, de
contrôler les actes. Il est dans l'incapacité de choisir ou de décider. Le trouble mental n'est pas
présumé. Elle demeure une cause subjective d'irresponsabilité pénale. Mais, cette
irresponsabilité profite à la personne mise en cause à deux conditions. Il est exigé une
concomitance des faits (a) et le trouble mental doit affecter le discernement (b), quelque soit le
caractère de ce trouble (passager, durable).

a - La concomitance des faits

166. Le trouble mental doit être contemporain de l'acte prohibé c'est-à-dire que l'agent doit
souffrir du délabrement mental au moment de la commission (appréciation in situ) de l'acte
prohibé3. La lucidité doit lui faire défaut dans cet intervalle de temps 4. Il s'ensuit que si l'état de
démence intervient antérieurement ou postérieurement à l'acte incriminé, la responsabilité
pénale ne peut être écartée. L'antériorité ou la postériorité de la démence par rapport à la
commission de l'infraction suppose un état de lucidité au cours de l’exécution de l’acte. Une
démence antérieure qui s’estompe au moment de la commission de l’acte délictueux n’entraîne
donc pas une exonération de responsabilité mais le juge peut en tenir compte pour modérer la
sanction. Aussi, lorsqu’elle intervient postérieurement à la commission de l’infraction, peut-
elle influer sur la procédure, en ce qui concerne le dément. Les actes d’instruction, notamment
les interrogatoires à son égard doivent être arrêtés même si l’instruction peut continuer de

1.
368. 1 V. Cass. crim. fr., 18 février 1998, Bull. Crim. n°66, (cas de psychose affectant le mental).
369. 2V. Cass. crim. fr., 5 septembre 1995, Bull. Crim. 1995, n°270.
370. 3 V. Cass. crim. 28 février 1952, D. 1952, 341.
371. 4 V. Cass. crim 7 octobre 1992, Bull. crim. 1992, n°317.

165
Précis De Droit Pénal Général

suivre son cours (instruction faite sans lui).1 Il ne peut pas non plus être jugé dans un tel
contexte. Une affection mentale, intervenue après le procès, empêche l’exécution d’une peine
privative de liberté (emprisonnement) mais non celles qui sont privatives de droits (dégradation
civique ;..), ni celles qui sont d’ordre pécuniaire (amende).

b - Le trouble mental doit affecter le discernement

167. Le trouble doit affecter effectivement les facultés mentales de l'individu. En conséquence,
au moment des faits, il ne doit pas être en état d’apprécier le bien et le mal. La lucidité doit lui
faire défaut à cet instant précis c’est-à-dire qu’il ne doit pas avoir la capacité intellectuelle
d’apprécier une quelconque situation. L’agent doit être privé de ses facultés de discernement au
point de n’avoir, aucunement, conscience de mal agir. La kleptomanie2 (manie du vol), la
pyromanie3 (manie de l’incendie) ne sont pas, en principe, admises par le législateur comme
des maladies affectant l’intelligence ou le raisonnement. L’état de démence est apprécié par le
juge qui fait, généralement, recours à l’expert c’est-à-dire à un médecin spécialisé en la
matière4.

168. Il existe des états mentaux intermédiaires qui n'abolissent pas complètement la capacité de
discernement ou celle de contrôle des actes. Il s'agit notamment des épileptiques, des demi-
fous, des déficients mentaux, des hystériques, du somnambule naturel (différent du
somnambulisme provoqué par hypnotise). En général, les troubles d’ordre toxicologique ne
sont pas pris en considération par le législateur pour atténuer ou écarter la responsabilité pénale
mais plutôt pour l’aggraver. Ainsi, l'alcoolique (dû à une absorption d’alcool), le drogué (dû à
l’administration de médicaments ou à la consommation de stupéfiants), même s'ils commettent
une infraction en état de non lucidité, ne sont classés ni parmi ceux qui souffrent de trouble
mental parfait, ni parmi ceux qui en souffrent partiellement. Au contraire, leur état peut
constituer une cause d’aggravation de la sanction5. Ainsi, quand une personne en état ébriété
commet un homicide ou des coups et blessures involontaires, elle est passible du double des
peines prévues pour ces infractions (art. 355 du CP). Cela peut s’expliquer par le fait que, en
général, la consommation d’alcool ou de drogue se fait de façon volontaire ou consciente.
L’agent consomme délibérément de la drogue, par exemple, pour avoir des sensations.
L’accoutumance aux stupéfiants part d’une volonté individuelle. En revanche, la Cour de
cassation française a considéré que dans certaines circonstances, l’état d’ivresse ou l’emprise
de stupéfiants peut donner lieu à une atténuation de la responsabilité6. C’est ainsi qu’elle a jugé

1.
372. 1 V. Cass. crim. fr. 18 mars 1976, JCP, 1976, II, 18478, note CHAMBON.
373. 2 La kleptomanie est définie comme "une impulsion maladive poussant à commettre des vols. La
kleptomanie est souvent proche de la névrose obsessionnelle…Plus fréquente chez les femmes, elle se
caractérise par un désir obsédant de voler, une lutte contre ce désir est un soulagement lors du passage à
l’acte, suivi de remords. Les vols kleptomaniques n’ont jamais un caractère utilitaire et s’apparentent à
d’autres conduites compulsives (passion pathologique pour les jeux du hasard par exemple)", définition
donnée par le dictionnaire LARROUSSE médicale, édition 2000.
374. 3 Selon la définition du dictionnaire LARROUSSE médicale (édit. 2000), la pyromanie est une
"impulsion obsédante qui pousse certaines personnes à allumer des incendies. La pyromanie véritable
est à distinguer des autres conduites incendiaires, criminelles (intérêt, vengeance) ou consécutives à
d’autres pathologies (perversité, délire passionnel, arriération, etc.). Elle s’inscrit sur un fond mental
particulier comportant des phobies et des obsessions, des troubles sexuels et dépressifs avec, parfois,
une tendance suicidaire".
375. 4 Cass. crim. fr. 6 juin1979, Bull. Crim. 1979 n°194.
376. 5 Cass. crim. 14 novembre 1924, Bull. Crim. 1924, n°381.
377. 6 Cass. Crim. 5 février 1957, Bull. Crim., 1957, n° 232.

166
Précis De Droit Pénal Général

que « l’ivresse qui diminue l’intelligence et la responsabilité de l’agent, doit être considérée
comme une circonstance atténuante et non une circonstance aggravante ». La Cour justifie cette
décision par le fait que l’agent s’est enivré ou s’est drogué involontairement.

169. La démence parfaite (proprement dite) au moment de l'action fait disparaître la


responsabilité pénale de l'agent. Mais, sa responsabilité civile peut être engagée. Ainsi, il est
prescrit (article 75 du CP) que, « Dans les cas de non imputabilité, les juridictions saisies
peuvent ordonner toutes restitutions et prononcer toutes réparations conformément aux
dispositions du code civil ». Le juge peut également ordonner son internement dans un centre
spécialisé notamment un centre psychiatrique (art. 75 du CP), s’il estime qu’il présente un
danger pour l’ordre public ou la sécurité. Si l’existence du trouble mental pathologique est
prouvée en cours d’information, le juge rend une décision de non lieu. Dans le cas où cette
maladie est avérée au cours du procès, le juge rend une décision de relaxe ou d’acquittement.

La démence étant une cause subjective d’irresponsabilité, le complice, le coauteur ne profitent


pas de cette exonération de responsabilité lorsque l’infraction est constituée.

2 – L’absence de maturité

170. L’incapacité de discernement n’est pas uniquement liée à la maladie mentale, elle peut
être due au non développement des fonctions de discernement de l’individu ou à l’immaturité
de sa mentalité. Cette hypothèse concerne particulièrement les enfants à cause de leur jeune
âge.1 Cette catégorie de personne est soumise à un régime particulier, en ce qui concerne leur
responsabilité pénale. L’article 74 du CP énonce ce régime : « Il n’y a ni crime, ni délit, ni
contravention lorsque l’auteur de l’infraction était âgé de moins de treize ans, à la date de la
commission des faits. Le mineur de moins de 13 ans, ainsi que celui de 13 à 18 ans qui a agi
sans discernement, ne peut faire que l’objet de mesures éducatives et de sûreté ».

Le législateur exonère le mineur de moins de treize (13) ans de toute responsabilité pénale en
raison de son très jeune âge qui ne lui permet pas, à ce stade, de discerner le bien et le mal. Il
est incapable de comprendre la portée de son acte. Son âge ne lui permet pas de savoir si
l’acte commis est répréhensible ou non. C’est pourquoi, il bénéficie d’une excuse de
minorité. L’infans (nourrisson), par exemple, est dépourvu de toute capacité de raisonnement.
Certes, la loi n’indique pas expressément que le mineur de moins de 13 ans est dépourvu de la
capacité de discernement mais, on peut constater que le bénéfice de cette irresponsabilité est
fondé sur cette absence de discernement.

171. Cette exemption de responsabilité couvre partiellement le mineur de treize (13) à dix-huit
(18) ans dépourvu de discernement2. Elle n’est pas totale car le juge peut prendre, à l’égard de
ce mineur, des mesures éducatives et des mesures de sûreté (destinées surtout à assurer sa
protection). Le mineur, dans ces conditions, peut faire l’objet de sanctions pénales si l’on

1.
378. 1 V. D. GONIN & L. DALIGAND (psychiatres), "L’expertise psychiatrique comme témoignage de ce
qui parle au corps du mineur criminel", Droit de l’Enfance et de la Famille (DEF), 1994 /3, n°38
(spécial), p. 71 & SS.
379. 2 V. arrêt Laboube, Cass. Crim. 13 décembre 1956, in J. PADEL & A. VARINARD, "Les grands arrêts
du droit pénal général " op. cit., n° 42,

167
Précis De Droit Pénal Général

exclut les sanctions de type peine. Ces sanctions ont un caractère spécifique en raison du fait
qu’elles sont positives pour celui qui doit les subir.

Certes, la démence proprement dite et le non développement des fonctions du discernement


peuvent être libérateurs de responsabilité pénale, mais peut-on en dire autant, en cas de
contrainte?

SECTION II - LA CONTRAINTE (ABSENCE DE LIBERTÉ)

La contrainte suppose un acte commis sous l'empire d'une force ou d'une pression à laquelle
l'agent ne peut résister. L’intervention de cette force prive l’individu de sa liberté (d’agir) ou de
son libre arbitre. L'acte n'est pas commis librement. Il ne peut faire autrement car, il est
empêché par une circonstance irrésistible1. La contrainte se rapproche de la force majeure en
droit civil qui est définie comme un événement imprévisible et irrésistible s’imposant à
l’individu2. La loi (art. 73 du CP) prévoit une exemption de responsabilité en faveur de
l’individu se trouvant dans une telle situation : « Il n’ y a ni crime ni délit, ni contravention
lorsque l’auteur…a été contraint par une force à laquelle il n’a pu résister… ». Concrètement, il
existe différents types de contrainte (§1). La contrainte n'est admise comme libératrice ou
réductrice de responsabilité que sous certaines conditions (§2).

§1- LES FORMES DE CONTRAINTE

On distingue deux principaux types de contrainte : la contrainte physique et la contrainte


morale.

a – La contrainte physique

172. Toute pression matérielle par laquelle une personne est conduite contre sa volonté à
commettre un acte prohibé est une contrainte physique. La pression est exercée sur le corps
de l’individu qui constitue l’instrument de réalisation de l’infraction. Cette contrainte abolit sa
liberté de mouvement. Une telle catégorie de contrainte revêt deux formes : elle peut être
externe ou interne.

La contrainte physique est externe quand elle émane d’une force étrangère ou naturelle
s’imposant à l’individu (exemple d’un événement naturel : cas d'une personne qui viole les
règles de la circulation à cause d'une inondation). Elle peut être le fait d'un tiers ou d'une
circonstance externe (exemple : un soldat est déserteur, malgré lui, car séquestré par des
bandits).

La contrainte physique est interne quand elle n’est pas détachable de l’individu lui-même,
c’est à dire qu’elle provient d'une circonstance physique interne (cas d'une personne qui
provoque un accident de la circulation parce qu'il a perdu le contrôle de son véhicule suite à
1.
380. 1 V. Cass. Crim. fr. 10 février 1960, Bull. Crim. 1960, n° 79.
381. 2 V. P. VOIRIN & G. GOUBEAUX, "Droit civil", tome 1, 29ème édition, L.G.D.J., 2003, n°852 ; Cass.
crim 26 novembre 1953, Bull. Crim. 1953, n°315.

168
Précis De Droit Pénal Général

l'intervention d'une crise d'épilepsie qui est un malaise auquel, elle ne peut pas résister). Le
sommeil dû à une grande fatigue et ayant conduit un voyageur à effectuer un voyage sans titre
de transport a été considéré par une Cour comme une contrainte physique interne. Le sommeil
a été à l’origine du dépassement du lieu de destination prévu sur le titre de transport (le prix
payé ne couvre pas le trajet effectué en train)1.

b – La contrainte morale

173. La contrainte est morale quand la pression est exercée sur la volonté de l’individu. Elle
peut être l'œuvre d'une circonstance morale externe (fait d'un tiers) ou interne (émotion ou
passion).

La contrainte morale externe se caractérise par le fait que l'individu commet une infraction
soit parce qu'il a été menacé, soit parce qu’il a fait l’objet d’une provocation émanant d'un tiers
(cas d'un terroriste qui, par une menace de mort, force une personne prise en otage dans un
avion à séquestrer le pilote dans les toilettes)2. Il a été admis qu’un soldat allemand ayant agi
sur les ordres de ses supérieurs hiérarchiques pouvait se prévaloir de l’existence d’une
contrainte compte tenu du fait qu’il n’avait aucune liberté d’action. 3

Relativement à la provocation qui consiste à inciter l’individu à commettre l’infraction, elle


doit être déterminante, par rapport aux agissements de l'agent, pour conduire à une exonération
de responsabilité. D’une manière générale, elle aboutit rarement à une non imputabilité dans la
mesure où elle constitue, souvent, un élément constitutif de complicité. L’article 92 du CP
relatif aux infractions de trahison et d’espionnage confirme cette situation en ces termes : « Est
punie, comme un crime, la provocation à commettre ou l’offre de commettre l’un des crimes
visés… ».

En outre, dans certains systèmes de droit notamment en droit canadien, français 4, la


provocation policière pour des nécessités d’investigations (en matière de trafic de drogue ou de
blanchiment d’argent par exemple) n'est pas toujours considérée comme une contrainte
morale5. Cette provocation est un subterfuge nécessaire au démantèlement de réseaux de
trafiquants de drogue ou à la répression des auteurs d’autres infractions. Ainsi, la jurisprudence
française a refusé d’admettre une infiltration policière comme une provocation donnant lieu à
une exemption de responsabilité pénale6. Il s’agit, dans ces conditions, d’une simple
provocation en vue de la constatation d’une infraction et non d’une provocation déterminant la
commission de celle-ci.

174. Concernant les menaces, elles doivent être illégitimes et exposer l’individu à un danger
imminent. Elles supposent un danger réel et imminent. C’est ainsi que les juges ont estimé que
1.
382. 1 Cass. crim. 19 octobre 1922, Dalloz Périodique (DP), 1922, 1, 233.
383. 2 Cass. crim. 26 février 1959, Bull. Crim. 1948 n°139 (cas d’un recel de malfaiteurs).
384. 3 Cass. crim. 29 décembre 1948, Bull. Crim. 1948 n°299.
385. 4 V. article 706-81 à 706-87 du CPPF.
386. 5 Cass. crim. 27 janvier 1944, Bull. Crim. 1944 n°31 (cas de trafic d’or).
387. 6 V. Cass. crim fr. 16 mars 1972, Bull. Crim. 1972, n° 108. Selon cette Cour, "la provocation au délit
par agent de l’autorité ne saurait être de nature à exonérer un prévenu de toute responsabilité pénale, dès
lors qu’elle n’a pas été déterminante de l’action délictueuse du prévenu et qu’elle n’a pas annihilé sa
liberté de décision".

169
Précis De Droit Pénal Général

le fait pour des étrangers et des israélites de faire usage de faux documents pour échapper à la
chasse à l’homme engagée par les allemands nazis constitue une contrainte morale (menace)
exonératoire de responsabilité pénale1.

Aussi, la simple crainte révérencielle ou l’obéissance reste-t-elle insuffisante pour constituer


une cause de non responsabilité pénale2. Les craintes de l'enfant vis-à-vis de ses parents, de
l'employé à l'égard de son employeur (lien de subordination)3, de l'épouse à l'égard de son
époux et vis versa ne constituent pas une contrainte morale externe, en cas de commission
d'infraction. Ces facteurs ne permettent donc pas d’écarter la responsabilité pénale de l’agent.

En somme, la contrainte morale interne n'est prise en compte que lorsqu'elle a entraîné une
pression sur la volonté de l'individu, si bien qu'il se trouve dans l'impossibilité d'agir librement.
L’agent de banque, qui, sous la menace de mort (pistolet dirigé vers sa tempe) proférée par le
braqueur, ouvre le coffre fort, est victime d’une contrainte morale réelle qui peut constituer une
cause d’irresponsabilité.

175. La contrainte morale interne peut provenir d'une émotion, d'une passion ou de
convictions. Il s’agit donc d’un état d’âme tel que la colère, la jalousie, la haine ou les
convictions (religieuses, politiques, philosophiques). C’est le cas d’un fidèle des témoins de
jéovah qui refuse de se soumettre au service militaire obligatoire, en raison de ses convictions
religieuses (cas de convictions). C’est aussi l’exemple d’un époux qui refuse de faire enterrer
son épouse parce qu’il l’aime et n’entend pas se séparer d’elle (cas de passion). L’excision
pratiquée sous le sceau d’une coutume burkinabé en est, également, une illustration. C’est,
enfin, l’exemple d'une personne hyper émotive qui adresse des injures graves aux magistrats au
cours d'une audience (cas d’une émotion ou d’une pulsion)4. L'acte de l'individu est provoqué
par son état (émotionnel, passionnel ou par ses convictions).

La contrainte morale interne est prise en compte, surtout, quand l'état d’esprit de l'individu est
si grave qu'il altère les facultés mentales. La contrainte morale interne aboutit difficilement à
une non culpabilité de l'auteur de l'infraction.

§2 - LA CARACTÉRISTIQUE DE LA CONTRAINTE, CAUSE


D'IRRESPONSABILITÉ TOTALE OU PARTIELLE

L’irrésistibilité5 (1) et l’imprévisibilité6 (2) ponctuent la contrainte, cause d’irresponsabilité


pénale tout comme en cas de force majeure en droit civil. En effet, en matière civile, la force
1.
388. 1 Paris 6 octobre 1944, D. 1945, jurisp., p. 115.
389. 2 V. Cass. Crim. 20 septembre 1894, DP 1899, 1, 350.
390. 3 Cass. crim. 21 décembre 1901, Bull. Crim. 1901 n°332.
391. 4 V. Cass. Crim 11 avril 1908, DP 1908, 1, 291.
392. 5 V. Affaire Rozoff, Cass. crim. 8 février 1936, in J. PRADEL, A. VARINARD, "Les grands arrêts du
droit pénal général", 5ème édition, op. cit. n°44.
393. 6 V. Affaire Trémintin , Cass. crim. 29 janvier 1921, in J. PRADEL, A. VARINARD, "Les grands arrêts
du droit pénal général", 5ème édition, op. cit. n°44, S. 1922, 1, 185, note Roux. Il s’agit d’une affaire
pour laquelle, les juges ont estimé qu’un marin poursuivi pour désertion ne peut justifier valablement la
commission de cette infraction par le fait qu’il a été conduit au poste de police (ce qui l’a empêché de

170
Précis De Droit Pénal Général

majeure ne peut être invoquée valablement que lorsque ces conditions sont remplies1 : « Il n’y
a lieu à aucuns dommages et intérêts, lorsque, par suite d’une force majeure ou d’un cas
fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui
lui était interdit » (art. 1148 du code civil).

1 - Le caractère irrésistible de la contrainte

176. Les circonstances de commission de l'infraction doivent se présenter de telle sorte que
l'agent se trouve dans l'impossibilité absolue d'agir autrement ou de se conformer aux
exigences de la loi. La contrainte doit supprimer le libre arbitre ou ôter toute liberté
d’appréciation ou de jugement2. L’individu doit être confronté à une situation à laquelle, il ne
peut résister: sa volonté est tétanisée. La liberté d’action fait défaut et constitue une
conséquence de la contrainte

2 - Le caractère imprévisible de la contrainte

177. La contrainte ne doit pas être telle que l’individu aurait pu l’éviter. Elle est imprévisible
lorsqu’elle est causée par un événement indépendant de la volonté. La contrainte doit être
exempte de toute faute génératrice. Elle ne doit pas être le résultat d'une faute antérieure. Celui
qui stationne son véhicule dans un parking payant au delà des limites horaires prévues parce
qu'il a été retardé par la police en raison d'un contrôle d'identité pour injures graves à l'encontre
de celle-ci ne peut se prévaloir de la contrainte pour se disculper. Dans le cas du marin
interpellé (affaire Trémintin), la contrainte était prévisible car, c’est la faute antérieure
commise (s’enivrer) par celui-ci qui aengendré la contrainte.

SECTION III - L'ERREUR (L’ABSENCE DE CONNAISSANCE)

L'erreur peut être définie comme une fausse représentation de la réalité. Elle consiste à se
tromper. C’est une mauvaise approche de la réalité. Elle se présente sous deux formes : l'erreur
de fait ou error facti (§1) et de l'erreur de droit ou error juris (§2)3. A la différence du
législateur français4, le législateur bukinabè ne retient pas l’erreur comme une cause de non
imputabilité ou comme un fait justificatif.

3.
rejoindre la compagnie à temps). C’est son état d’ivresse qui est à l’origine de son placement dans une
cellule de dégrisement. Il pouvait éviter sa conduite à la police en ne s’enivrant pas
394. 1 V. F. TERRE, Ph. SIMLER & Y. LEQUETTE, "Droit civil – Les obligations", 8ème édition, Dalloz,
2002, p. 558 & SS.
395. 2 . Affaire Genty, Cass. crim. 20 avril 1934, S. 1935, 1, 138.
396. 3 V. H. & L. MAZEAUD, J. MAZEAUD, F. CHABAS, "Leçons de droit civil", tome 1, 8éme édition,
Montchrestien, 1991, n°172.
397. 4 Aux termes de l’article 123-3 du CPF, "N’est pas pénalement responsable la personne qui justifie
avoir cru, par une erreur sur le droit qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement
accomplir l’acte".

171
Précis De Droit Pénal Général

§1- L'ERREUR DE FAIT

178. L'erreur de fait consiste à se tromper sur la matérialité de l’acte illicite. Elle porte
donc sur des circonstances de l'infraction. Ainsi, celui qui n’ignore pas l’existence d’une
incrimination mais croit que l’acte qu’il commet n’entre pas dans le champ d’application de
cette infraction (alors qu’il en fait partie) commet une erreur de fait. L’individu commet un acte
défendu tout en croyant qu’il n’est pas interdit (par la loi) ou est licite. Il s’agit, souvent, des
conséquences d’une négligence ou d’une imprudence. Celui qui confond la pédale de
l’accélérateur avec celle du frein n’est-il pas imprudent ? N’est-ce pas, par négligence ou par
inattention que le chasseur a tiré sur une personne croyant qu'il s'agit d'un animal ?

L'erreur de fait peut atténuer la gravité de l'infraction comme elle peut faire disparaître
l'infraction visée à l’origine. Elle peut donc entraîner la non constitution de l'infraction ou
permettre l'atténuation de la responsabilité de l'agent. Un changement de qualification (une
infraction intentionnelle peut devenir une infraction non intentionnelle) peut résulter d’une
erreur de fait. Celui qui, par erreur, s'empare d'un téléphone portable ne lui appartenant pas, ne
peut pas être qualifié de voleur s'il n'avait aucune intention de le voler. Le médecin, qui
inocule, par erreur, un poison à un malade engendrant sa mort, ne peut être considéré comme
un empoisonneur. Il sera poursuivi pour homicide involontaire. Un individu ne peut non plus
être accusé de viol alors qu'il croyait, par les attitudes de la victime, qu'elle était consentante.

L’erreur de fait « porte non pas sur une règle de droit mais sur la matérialité de l’infraction »1.
Une des conséquences de l’erreur peut être la disparition de l’intention, en présence d’une
infraction intentionnelle. L’intention délictueuse est absente surtout quand cette erreur porte sur
un élément substantiel de l’infraction. L’erreur peut donc conduire à la requalification de
l’infraction (une infraction volontaire peut devenir une infraction involontaire, un crime
aggravé peut se transformer en un crime simple…). Ainsi, l’agent qui, suite à une erreur sur la
personne, croyait tuer un voleur (la nuit), assomme mortellement son père ne peut être
poursuivi sur le fondement d’un parricide mais sur celui d’un meurtre. En outre, dans cet
exemple, la circonstance aggravante disparaît. Il en résulte que la sanction sera moins sévère.

§2 - L'ERREUR DE DROIT

Elle consiste à se tromper sur ce que dicte la loi (au sens large). Elle consiste soit à
méconnaître ou à ignorer la loi (1) soit à ne pas la comprendre ou à en faire une mauvaise
interprétation (2). Autrement dit, il s’agit d’une méconnaissance du droit applicable. En
principe, lorsque l’erreur de droit est admise comme une cause de disculpation l’agent est le
seul à bénéficier des effets. L’erreur est considérée comme une cause subjective
d’irresponsabilité pénale.

1 - L'ignorance de la loi

1.
398. 1 V. J. LEROY, "Droit pénal général", op. cit., n°510. Cet auteur rappelle que d’autres auteurs font
plutôt une distinction entre l’erreur sur l’illéceité de l’acte (erreur de droit) et l’erreur sur l’acte illicite.

172
Précis De Droit Pénal Général

179. L’erreur de droit porte dans ce cas, sur l’existence de l’infraction (ignorance de son
existence). Pourtant, nul n'est censé ignoré la loi (nemo Laure ignorare legem). Cette règle
s'applique aussi bien en matière civile qu'en matière pénale. Dans le dernier cas, l'application
s'avère plus rigoureuse. Aucun citoyen ne peut donc se prévaloir de cette ignorance pour
échapper à une sanction. Elle n'a, en conséquence, aucun effet sur la responsabilité pénale de
l'agent, auteur de l'infraction. Or, au Burkina Faso, le nombre de citoyens illettrés est non
négligeable.

Les victimes de l’illettrisme sont également victimes de cette règle qui, dans la pratique,
engendre de réelles difficultés d’application. La plupart des citoyens qui ne savent ni lire, ni
écrire, ne distinguent pas l’interdit et le « permis » (par la loi). Ce problème est,
particulièrement, sérieux lorsque le citoyen illettré est fortement attaché aux pratiques
traditionnelles ou coutumières. Il éprouve des difficultés à comprendre le fait que des pratiques
d’origine ancestrale ou divine soient érigées en interdits. Il admet difficilement le fait que, ce
qui était permis hier soit interdit aujourd’hui : une certaine confusion affecte son esprit et il
perd ses repères. Alors, faut-il strictement appliquer cette règle, en ignorant ces réalités
burkinabé voire africaines? N’est-il pas judicieux de revoir cette règle, dans le sens de son
assouplissement ou de rechercher d’autres solutions prenant en compte la question d’illettrisme
ou de niveau d’instruction?

Fort heureusement, dans la pratique, il arrive que les juges n’appliquent pas strictement cette
règle. Ayant la possibilité de tenir compte des circonstances personnelles, pour écarter la
responsabilité ou réduire la sanction (art. 76 du CP), les juges usent, quelques fois, de cette
faculté pour prendre en compte l’ignorance de la loi par l’individu illettré (de bonne foi). Cette
prise en compte a l’avantage d’agir sur la sanction pénale à prononcer ou d’une manière
générale sur la responsabilité pénale.

L’ignorance de la loi peut aussi être liée au fait que la commission de l’infraction a eu lieu à un
moment où la loi a été effectivement promulguée mais, avant la fin du délai de huit jours (après
la publication) prévu pour son entrée en vigueur1. En effet, l’ordonnance 75-23 du 6 mai 1975
(art. 2) prescrit que, « Les lois et ordonnances, ainsi que les actes réglementaires deviennent
exécutoires sur tout le territoire du [Faso], huit jours francs, après leur publication au journal
officiel ». « Le délai prévu à l’alinéa précédent court à compter du jour de parution du numéro
du journal officiel ;… ».

La question de publication des textes légaux, dans le système burkinabé, pose quelques
problèmes compte tenu du fait que, dans la pratique, certains sont appliqués sans pour autant
qu’ils aient fait l’objet d’une publication officielle. Une telle pratique ne peut qu’aggraver les
difficultés, lorsqu’on ignore l’existence de l’infraction. Certes, cette question ne s’est pas
encore posée mais quelle sera la réaction des juges lorsqu’elle le sera ? Logiquement, la
responsabilité pénale de l’individu ne doit pas être retenue, si les autorités compétentes n’ont
pas permis au citoyen d’être informé sur l’existence de la loi pénale (motif : défaut de
publication du texte). La même logique peut être appliquée à l’agent qui a commis l’infraction
avant l’expiration des huit jours francs fixés, pour l’entrée en vigueur de la loi. Les juges, face
1.
399. 1 Aux termes de l’ordonnance 75-23 du 6 mai 1975 relatives à l’application des lois et des textes
réglementaires, "Les lois et ordonnances, ainsi que les actes réglementaires deviennent applicables sur
le territoire du [Faso], après avoir été portés à la connaissance du public, soit par voie de publication au
journal officiel, soit selon la procédure d’urgence …", voir JOHV du 29 mai 1975, p. 386.

173
Précis De Droit Pénal Général

à cette dernière hypothèse, s’accommoderont-ils à cette logique ? La question reste posée en


absence de jurisprudence afférente.

2 - L'erreur invincible

180. L’erreur est invincible quand elle est insurmontable. L’agent commet l’infraction parce
qu’il se trouve dans l’impossibilité absolue d’agir autrement malgré les efforts fournis
(recherche d’information) dans ce sens. L’erreur invincible est parfois assimilée à la contrainte.
C’est, souvent, la loi qui est mal interprétée (cas d’information erronée). Cette mauvaise
interprétation peut provenir de l'Administration. Dans ces conditions, un usager peut
commettre une infraction en se conformant aux instructions d'un agent de l'Administration
consultée ou en s’informant auprès des autorités compétentes (exemple d’un inspecteur des
impôts qui informe un contribuable, de façon erronée : il a fait une mauvaise interprétation de
la loi)1. Dans ce cas, le juge peut estimer qu'il n’y a pas lieu de sanctionner l'agent puisqu’il
s’est adressé à un spécialiste de l’Administration afin d’obtenir des renseignements exacts.
L’erreur a été, dans cette hypothèse, occasionnée par l’autorité administrative qui a fourni à
l’individu des informations erronées. L’agent, dans ce cas, a pris toutes les dispositions
nécessaires (notamment s’informer auprès des autorités ou des services compétents) pour
s’assurer de la légitimité de son acte. L’individu croit en la légitimité de l’acte commis.
Cependant, la Cour de cassation française a estimé qu’une erreur sur la durée légale du travail
n’est pas insurmontable dès lors que l’individu a la possibilité de s’adresser à l’inspection du
travail pour cerner la portée des textes dans ce sens2.

L'agent peut aussi se trouver dans un autre cas de figure pour lequel l'erreur de droit est
invincible (cas de défaut de publicité). C'est l'exemple d'un conducteur étranger qui emprunte
une voie à sens interdit ne faisant l'objet d'aucune signalisation. Les panneaux ont été arrachés
par des vandales. Il revient aux autorités publiques compétentes (notamment le maire) de
procéder à la remise en place de la signalisation vandalisée.

181. D'une façon générale, de nombreuses législations ne prévoient pas d'exemption de


responsabilité dans les cas d'erreur de droit. C'est le cas du Burkina qui écarte implicitement
cette possibilité tant qu'une disposition expresse ne la prévoit pas : « Nul crime ou délit ne peut
être excusé, ni la peine mitigée, que dans les cas et dans les circonstances où la loi déclare le
fait excusable ou permet de lui appliquer une peine moins rigoureuse » (art. 78 du CP).
Quelques lois spéciales, en effet, prévoient des cas d’erreur de droit, notamment des cas
d’erreur invincible. En cas de fraude, dans le domaine douanier par exemple, la responsabilité
pénale de certaines personnes qualifiées d’intéressées n’est pas en cause, s’il y a une erreur
invincible. L’article 247-3° du CD l’exprime en prescrivant que, « L’intérêt à la fraude ne peut
être imputé à celui qui a agi en cas de nécessité ou par suite d’erreur invincible ». Or, en
principe tout intéressé ayant participé à la fraude est sanctionné au même titre que le complice
et le coauteur (art. 247-1° du CD). Il en ressort que l’intéressé est assimilé à ces derniers, en
cas de participation au délit de contrebande ou au délit d’importation ou d’exportation sans
déclaration3. Aussi, la jurisprudence peut-elle, en cas d’erreur de droit, en tenir compte pour
1.
400. 1 COUTURIER, "L’erreur de droit invincible en matière pénale », RSC, 1968, p. 547.
401. 2 Cass crim. fr. 5 mars 1997, Bull. Crim. 1997, n° 84.
402. 3 Article 247-2° du CD : "Sont réputés intéressés :
-les entrepreneurs, membres d’entreprises, assureurs, assurés, bailleurs de fonds, propriétaires des
marchandises et, en général, ceux qui ont un intérêt direct à la fraude ;

174
Précis De Droit Pénal Général

écarter ou atténuer la responsabilité pénale de l'agent. En effet, lorsque les actes de mutilations
sexuelles féminines1 ont été incriminés, certains juges, pour les premières affaires s’y
rapportant, tenaient compte de l’ignorance de la loi par l’exciseuse pour modérer la sanction.

182. La législation française a fini par admettre l'erreur de droit invincible comme une excuse.
En effet, rappelons qu’aux termes de l'article 122-3 du CPF, "N'est pas pénalement responsable
la personne qui justifie avoir cru, par une erreur sur le droit qu'elle n'était pas en mesure
d'éviter, pouvoir légitimement accomplir l'acte". On remarque que l'agent doit, ici, prouver
l'erreur invincible c'est-à-dire prouver ce qui l'a conduit à croire qu'il pouvait agir comme il l'a
fait. En d’autres termes, il doit prouver qu’il croyait à la légitimité de l’acte accompli. En outre,
l’erreur doit porter sur une règle de droit et elle doit être insurmontable. Ainsi, la Cour d’appel
de Paris a relaxé un inventeur accusé du vol d’un trésor au motif qu’il ignorait l’article 716 du
code civil réglant la question de propriété de trésor trouvé2. Il s’est approprié la totalité du
trésor trouvé, sans savoir que dans une telle situation la loi prévoit un mode de partage du bien
trouvé. En revanche, malgré la réponse implicitement favorable, donnée à une demande d’avis
par un ministère, la Cour de cassation a estimé que l’erreur n’était pas insurmontable 3. Certes,
le ministère a donné des informations erronées mais, la Cour a jugé que la taille économique de
la Société dont la responsabilité pénale est engagée est telle qu’elle disposait de spécialistes
(juristes) pour lui donner des renseignements exacts. La société pouvait donc éviter l’erreur.

Il n'en demeure pas moins que la loi peut prévoir des faits dits justificatifs influant sur la
responsabilité de l'agent.

3.
-ceux qui ont coopéré d’une manière quelconque à un ensemble d’actes accomplis par un certain nombre
d’individus agissant de concert, d’après un plan de fraude arrêté pour assurer le résultat poursuivi en
commun ;
-ceux qui ont sciemment, soit couvert les agissements des fraudeurs ou tenté de leur procurer l’immunité,
soit acheté ou détenu, des marchandises provenant d’un délit de contrebande ou d’importation sans
déclaration".
403. 1 V. M. ILBOUDO, "L’infraction d’excision ", RBD, n° 36, 1999, 2ème semestre, p. 163 & SS.
404. 2 Cour d’Appel (C.A.) Paris 2 décembre 1924, Recueil de Droit Commercial, 1925, 2, 359.
405. 3 V. Cass. crim. fr., 19 mars 1997, Bull. Crim.1997, n° 117. La société commerciale (groupe
d’hypermarchés) voulait étendre sa surface de vente et c’est à cet effet qu’elle a demandé l’avis du
ministère quant à la nécessité d’une autorisation administrative. Le ministère a répondu qu’elle n’est pas
nécessaire.

175
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE II – LES FAITS JUSTIFICATIFS

183. Les faits justificatifs peuvent être définis comme les circonstances dans lesquelles
l’infraction a été commise, lesquelles circonstances sont de nature à rendre l’agent pénalement
irresponsable. Ces faits ne font pas perdre à l’acte commis son caractère d’infraction mais
permettent l’impunité de son auteur. L’acte commis est justifié car, il incarne un intérêt
supérieur à celui que protège la loi par la voie de l’incrimination (les valeurs protégées à
travers l’infraction). C’est le sacrifice d’une valeur au profit d’une autre, les deux étant dans
une situation conflictuelle. Pour R. MERLE et A. VITU ces faits « sont des circonstances
objectives, qui désarment la réaction sociale contre l’infraction pénale, et qui imposent des
dérogations spéciales à l’application des textes répressifs généraux »1.

D’une manière générale, les faits justificatifs sont prévus par la loi et ils ne rendent légitime un
comportement fautif que dans le cas où cet acte illicite est absolument nécessaire et est commis
dans le respect d’une certaine limite. Le commandement de l'autorité ou l'ordre de la loi
(Section I), la légitime défense (Section II), l'état de nécessité (Section III) et le consentement
de la victime (Section IV) sont, souvent, retenus par les légalisations comme constituant des
faits justificatifs ou des causes justificatives de l’acte illicite commis. D'aucuns considèrent ces
faits justificatifs comme des causes objectives d'irresponsabilité pénale.

SECTION I – LE COMMANDEMENT DE L'AUTORITÉ LEGITIME OU LA


PERMISSION DE LA LOI

Cette catégorie de faits justificatifs renvoie à l’accomplissement d’un devoir, d’une obligation
ou à l’exercice d’un droit. Le commandement de l’autorité légitime (§2) et l’ordre de la loi (§1)
ne sont constitutifs de faits justificatifs que sous certaines conditions.

§1 – L'AUTORISATION OU LA PRESCRIPTION DE LA LOI

184. L'article 70, alinéa 1 du CP prescrit : "N'est pas pénalement responsable la personne qui
accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires".

La loi est considérée dans son sens large. Elle englobe, en conséquence, les dispositions
législatives et les dispositions réglementaires. Il s’agit, souvent, de normes écrites. L’origine
civile ou pénale de la loi n’influe pas sur le fait justificatif.
La coutume peut être admise comme une permission de la loi. C’est l’exemple de la correction
corporelle (infligée à l’enfant par ses parents) acceptée, quelques fois, comme une coutume
générée par une permission implicite de la loi civile. Cette correction n’est justifiée que si, elle
ne va pas au-delà du droit de correction2. Elle ne doit pas donner lieu à un traitement dégradant,
violant les droits de l’homme d’une manière générale et les droits de l’enfant en particulier. Les
violences médicales (piqûres, opérations chirurgicales, amputations) et sportives (arts martiaux,
1.
406. 1 V. R. MERLE & A. VITU, « Traité de droit criminel », t. 1, op. cit., n° 431.
407. 2 V. Cass. crim. fr. 21 février 1990, Droit Pénal, 1990, Commentaire, 83.

176
Précis De Droit Pénal Général

tacle ayant entraînant des coups et blessures en matière de football …) respectant les règles de
l’art ou celles du jeu sont également permises.

185. En revanche, sont exclues du champ d’application de la permission de la loi les tolérances
et certaines autorisations administratives. Concernant l’autorisation administrative, la loi peut
sanctionner un comportement commis sans autorisation, si l’accomplissement de l’acte est
subordonné à l’obtention de l’autorisation. La construction sans permis de construire ou la
commercialisation de stupéfiant sans autorisation en constitue une illustration. La loi peut aussi
sanctionner des comportements indépendamment d’une autorisation administrative. C’est ainsi
que la jurisprudence française a jugé que malgré l’existence d’une autorisation d’exploitation
de films pornographiques, il y a eu outrage aux bonnes mœurs1. Quant aux actes tolérés de
façon complaisante par l’administration, ils ne sauraient couvrir l’auteur d’un acte illicite2.

L’article 70 du CP rend irresponsable, pénalement, l’agent qui a agi conformément aux


prescriptions légales. C’est une dérogation aux règles de droit commun. Il s’ensuit qu’un acte
constituant, normalement, des coups et blessures ne l’est pas grâce à la dérogation. Son acte est
couvert par la permission ou l’ordre de la loi. Mais, on ne peut se prévaloir de la prescription
de la loi que, si les conditions d’application de cette loi justificative sont respectées. Le
bénéficiaire de cette protection ne doit pas agir au-delà des limites de la norme permettant ou
autorisant la commission de l’infraction. L’agent, qui dépasse donc ces limites, peut perdre le
bénéfice de la protection : sa responsabilité pénale peut être engagée3.

186. La loi doit permettre, directement, à l'agent l’accomplissement de l'acte. Ainsi, l'officier
de police judiciaire qui arrête un suspect, en flagrant délit, et le conduit directement à la
Maison d’Arrêt et de Correction de Ouagadougou (MACO) pour le faire enfermer, sans mandat
de dépôt, commet une détention arbitraire et cela, même si l'arrestation est légale. Mais, le
boxeur qui démonte la mâchoire de son adversaire par un uppercut ne risque pas des poursuites
pénales pour coups et blessures volontaires si son coup a été donné dans le respect des règles
de ce sport. Dans ces conditions, la violence est légitime. L’Officier de Police Judiciaire (OPJ),
muni d'un mandat de perquisition, qui procède à une perquisition n'est pas, non plus, coupable
de violation de domicile. Le médecin qui informe les autorités de la santé de l’existence des cas
de maladies vénériennes, par exemple, ne viole pas le secret professionnel auquel il est tenu.

§2- LE COMMANDEMENT DE L'AUTORITÉ LÉGITIME

Le commandement concerne des relations (professionnelles) entre une autorité publique et des
personnes soumises à cette autorité. Cette circonstance ne peut justifier l’accomplissement de
l’acte délictueux que sous certaines conditions (1). Parmi ces conditions, la question de
l’absence du caractère manifestement illégal du commandement engendre de sérieuses
difficultés dans certains cas (2).

1.
408. 1 V. Cass. crim. fr. 26 avril 1983, Gaz. Pal. 1984, 1, sommaire, 2.
409. 2 V. Cass. crim. 24. 1955, Bull. Crim. 1955 n°522.
410. 3 V. Cassation crim. 19 octobre 1994, Droit Pénal 1995, Commentaire, n°36.

177
Précis De Droit Pénal Général

1- Le commandement justificatif

187. Aux termes de l'art.70, alinéa 2 du CP : "N'est pas pénalement responsable la personne qui
accomplit un acte commandé par l'autorité légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal ».
L'autorité légitime s'entend par toute autorité publique, civile, militaire pourvu qu'elle soit
légitime. Elle doit émaner des règles républicaines (constitution…). Cette autorité jouit, en
principe, d’un pouvoir de commandement, c’est-à-dire d’un pouvoir de donner l’ordre
concerné, et agit dans le cadre de ses fonctions. L'autorité privée (celle du père, de la mère, de
l'employeur), est exclue, même si elle engendre des questions de contrainte morale ou de bonne
foi. Il convient de noter que la question d’autorité légitime s’est posée, en France, dans le cadre
des affaires pénales liées au régime de Vichy1.

Lorsqu'un acte est commis, en exécution d'un ordre provenant d'une autorité légitime, en
principe, même si cet acte constitue une infraction, elle perd ce caractère. L’ordre d’exécuter le
fait délictueux est donné par l’autorité investie du pouvoir de commander, conformément à ce
que la loi prévoit (par rapport à ce pouvoir d’ordonner l’exécution de l’acte et ses limites).
L’acte exécuté ne doit pas émaner d’une initiative de son exécutant2.
Mais, si l'acte est manifestement illégal, l'infraction est consommée. Il en ressort que l’acte ne
doit pas souffrir d’un caractère illégal.

2 – Le caractère légal de l’ordre reçu

188. Des difficultés d'appréciation interviennent quant à l'interprétation de l'acte manifestement


illégal. L'on est en droit de se demander si le commandement de l'autorité légitime suffit pour
se disculper. La qualité d’autorité légitime ne peut pas, en principe, justifier la commission
d’un acte contraire à la loi, par une personne, sous le prétexte que celle-ci ne fait que respecter
les ordres de son supérieur hiérarchique. Ni le principe de la séparation des pouvoirs, ni la
légalité des infractions et des peines ne permettent à un individu d’exécuter des actes
notoirement contraires à la loi3. Il en ressort que l’exécutant dans cette situation se trouve
confronter à une question de devoir d’obéissance vis-à-vis de son supérieur hiérarchique et au
problème de l’illégalité de l’ordre reçu (non conforme à la loi). La doctrine propose trois
théories pour la résolution de cette difficulté. Il s’agit de la théorie de l’obéissance passive, de
celle la baïonnette intelligente et de celle de l’illégalité manifeste.
1.
411. 1 En effet, un texte (ord. du 28 août 1944) prévoyant la répression des crimes de guerre, n’admettait pas
le gouvernement de Vichy comme une autorité légitime. Ainsi, les fonctionnaires ayant exécuté les
ordres de ce gouvernement, considéré comme un gouvernement de fait (illégitime), ne pouvaient pas
invoquer le commandement de l’autorité légitime pour justifier leur comportement. Toutefois, un
second texte (ord. du 28 novembre 1944) est intervenu pour modifier la première afin que les agents (de
bonne foi) du gouvernement de Vichy puissent justifier leurs actes par les ordres de ce gouvernement.
Mais, ceux qui ont participé à la commission de ces actes (notamment ceux qualifiés de
«collaborateurs ») de façon délibérée, c’est-à-dire volontairement, ne pouvaient pas bénéficier de cette
faveur.
412. 2 La Cour de cassation française, dans une décision du 19 octobre 1994, a estimé qu’un policier à qui, il
a été ordonné d’interpeller un individu et de le conduire à la police ne peut se prévaloir de cet ordre
pour justifier des coups portés à l’individu.
413. 3 V. Cass. Crim, 22 mai 1959, Bull. Crim., 1959, n°264. Il s’agit d’un détournement de courriers
ordonné par le préfet.

178
Précis De Droit Pénal Général

189. La théorie de l’obéissance passive - Pour certains l'ordre d'une autorité supérieure doit
s'exécuter sans se poser des questions (pas d'appréciation ni de disculpation). Le subordonné
doit exécuter systématiquement l'ordre même s'il s'avère illégal. Il est tenu de se conformer aux
instructions de l'autorité, sans les discuter. Les défenseurs de cette théorie estiment que
l’exécutant est débiteur d’un devoir d’obéissance auquel il ne peut se soustraire.

190. La théorie des "baïonnette intelligentes" - D'aucuns pensent que l'exécutant de l'ordre
doit apprécier le caractère de l'acte avant de passer à son exécution même si l'ordre émane de
son supérieur hiérarchique. Le subordonné doit examiner sérieusement l’ordre reçu. Cette
solution, comme on peut s'en douter, est difficilement applicable dans l'armée où l'autorité et la
discipline sont de rigueur. L'agent risque de commettre des actes de désobéissance.

191. La théorie de l’illégalité manifeste - D'autres préfèrent distinguer entre l'ordre


d'apparence légal et celui qui est manifestement illégal. Il s’agit d’une solution intermédiaire.
Lorsque l'agent exécute un acte qui, de toute apparence, n'est pas illégal, il peut être disculpé.
L’agent doit être attentif à l’ordre reçu afin de s’assurer qu’il n’est pas indéniablement illégal.
Cette dernière solution est souvent adoptée par la plupart des législations. Des gendarmes,
officiers de police judiciaire, qui, dans le cadre d’une enquête, passent un suspect sur des
flammes et le font marcher sur des braises sous le prétexte que leur supérieur hiérarchique leur
a demandé de le faire (afin qu'il fasse des aveux), ne peuvent prétendre bénéficier d'une cause
de non responsabilité. Ce traitement ordonné par le supérieur hiérarchique est de toute évidence
illégal. En revanche, un garde pénitentiaire qui incarcère un individu, en observation d’un
mandat de dépôt délivré par le magistrat instructeur, ne doit pas faire l’objet de poursuites
pénales pour séquestration au motif que le mandat de dépôt s’est révélé nul, par la suite. Dans
cette hypothèse l’agent n’est pas en mesure de juger de l’illégalité de l’ordre car le mandat est
apparemment conforme à l’article 8 du Kiti an VI 103 du 1er décembre 1988.

192. L'acte manifestement illégal étant parfois difficile à déterminer, des législations précisent
expressément, quelques actes pour lesquels, l'ordre de l'autorité ne constitue pas un fait
justificatif. Ainsi, en droit français, cette excuse n'est pas admise en matière de crime contre
l'humanité (art.213-4 du CPF)1. Néanmoins, cette circonstance peut, dans certains cas influer
sur la détermination de la peine (réduction de celle-ci). Si l'agent, parvient à démontrer ou à
convaincre de l'existence d'une contrainte morale, cause de non imputabilité (volonté détruite
par celle de son supérieur), il peut être dégagé de toute responsabilité.
D'autres actes sont, également, permis par la loi et justifie l'impunité de leurs auteurs.

SECTION II - LA LÉGITIME DÉFENSE

Ce fait justificatif apparaît comme le plus fréquent, si bien qu’il est parfois confondu avec
l’auto-défense par certains citoyens. L’auto-défence n’est pas une réaction spontanée, elle
s’apparente plutôt à une vengeance intervenant, généralement, après une agression. Or, un
certain nombre de conditions est requis pour que la légitime défense soit constituée (§2). La
1.
414. 1 Article 213-4 du CPF : "L’auteur ou le complice visé par le présent titre ne peut être exonéré de sa
responsabilité du seul fait qu’il a accompli un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives
ou réglementaire ou un acte commandé par l’autorité légitime. Toutefois, la juridiction tient compte de
cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le montant."

179
Précis De Droit Pénal Général

légitime défense n’est pas définie par le législateur mais a un fondement qui ne sort pas du
cadre juridique (§1).

§1 – LA NOTION ET LE FONDEMENT DE LA LÉGITIME DÉFENSE

193. La légitime défense consiste à se défendre ou à défendre autrui contre une agression
injuste. Elle apparaît comme "un droit de commettre une infraction" pour écarter une autre. Il
s’agit d’un droit de se défendre. La loi permet donc à l’individu d’exercer un "droit de défense
physique" dans certaines circonstances (cas d’urgence…). Aux termes de l'article 71, al. 1 du
CP, « Il n' y a ni crime ni délit, ni contravention lorsque l'homicide, les blessures, violences et
voies de faits, étaient commandés par la nécessité actuelle de la défense légitime de soi-même
ou d'autrui, à condition que cette défense soit proportionnée à la gravité de l'attaque ».

194. Certains auteurs considèrent que la légitime défense consiste à exercer un droit et à
accomplir un devoir de justice. L'explication étant que l'agent combat au profit du droit et
participe à cette occasion à la défense de la société face à une situation (notamment un danger
imminent), qui ne permet pas à la Justice d’assurer la sécurité. Il rétablit l'ordre social menacé
face à la défaillance temporaire de l’Etat. C’est ainsi que, pour HEGEL "l'attaque est la
négation du droit; la défense est la négation de cette négation, donc l'application du droit."
Quant à J.J. ROUSSEAU, il considère que "la nécessité de défense rétablit l’homme dans l’Etat
de nature où chacun a droit de se faire justice". Enfin, pour Ph. CONTE et Patrick MAISTRE
Du CHAMBON, "L’individu qui commet un acte ordinairement incriminé en réponse à une
agression injuste exécute une infraction justifiée car, par son comportement, il contribue au
maintien de l’ordre public… »1.
Toutes les situations de défense ne peuvent pas être qualifiées de légitime défense. Elle ne peut
être établie que sous certaines conditions.

§2 – LES CONDITIONS D’EXISTENCE DE LA LÉGITIME DÉFENSE

La légitime défense suppose l’existence d’une agression (1) et d’une défense répondant (2) à
des caractères déterminés.

1 - Les caractères de l’agression justificative

L’individu qui invoque la légitime défense doit être dans une situation telle qu’il est exposé de
façon incontestable à un péril qui est sur le point de se réaliser. Son existence suppose des
circonstances caractérisées par une agression injuste (a), actuelle ou imminente (b) nécessitant
une riposte proportionnée.

a – L’injustice de l’atteinte

1.
415. 1 V. Ph. CONTE et Patrick MAISTRE Du CHAMBON, "Droit pénal général", 6 ème édition , 2002,
Armand Colin, n°257.

180
Précis De Droit Pénal Général

195. L'attaque ou l’agression dont est victime l’individu doit être sans fondement juridique
(dénuée de base légale). L'agression doit, en conséquence, être injustifiée. L’agresseur a un
comportement fautif engendrant la riposte. Selon la jurisprudence française, le comportement
de l’agresseur ne constitue pas forcement une infraction prévue et punie par la loi 1. En effet, un
tribunal français a jugé qu’il y a légitime défense en faveur d’une mère qui administre une gifle
à une jeune fille de 18 ans de mœurs légères impliquant son fils de 16 ans et risquant de
compromettre l’avenir de celui-ci (études…). Le péril menaçant le jeune garçon est, dans cette
hypothèse, d’ordre moral (agression morale) et non physique. Il n’est pas nécessaire que
l’agression atteigne une certaine gravité pour que l’injustice de l’atteinte soit caractérisée 2. Le
degré de gravité importe peu. Les atteintes légales ou autorisées sont donc exclues du champ
d’application de la légitime défense3. Un voleur, en état d'arrestation, qui agresse un policier ne
peut se prévaloir de l’exception de légitime défense. Le policier agit en toute légalité, il jouit
d’un droit d’arrestation (agression licite). Il en est de même pour le bourreau qui est sur le point
d’exécuter le condamné à mort. L’atteinte à la vie est, dans ce cas, autorisée par la loi et reste
régulière.
Les agressions venant d’une personne souffrant de démence ou d’un mineur de moins de treize
(tous bénéficiaires d’exemption de peine) ne sont pas exemptes de riposte.

b – L’actualité ou l’imminence de l’atteinte

196. L’acte de défense doit être la réplique d’une atteinte actuelle ou imminente. L’atteinte doit
être en cours d’exécution au moment de la riposte ou sur le point d’être réalisée. L’individu
agit pour repousser un danger actuel car il est dans une situation ne lui permettant pas de
recourir à la force publique ou de solliciter le secours d’une tierce personne. L'attaque ou la
menace ne doit pas être imaginaire ou future encore moins éventuelle. Lorsque l’agression
n’existe que dans l’esprit de celui qui riposte, il s’agit d’une légitime défense putative dénuée
du caractère justificatif. Les actes doivent s'enchaîner en même temps. La nécessité de cette
simultanéité est d’ailleurs confirmée par la cour de cassation. En effet, la Cour Suprême a
estimé qu’il y avait simultanéité car, « …la dame S. G…avait la première, sans provocation
adverse démontrée, porté un coup de bâton à A. R. qui, légèrement blessé, la jeta au sol pour
répondre à ses violences et dans le seul but de se défendre »4. Il y a donc eu une attaque
injustifiée de la part de la dame, ce qui a emmené Monsieur A. R. à répliquer sur le champ.
Certes, il apparaît que la simultanéité des actes n’est pas parfaite mais le temps séparant la
réalisation de l’atteinte (par l’agresseur) et la réaction de l’agressé reste très insignifiant.

En revanche, celui qui agresse l'agresseur trente minutes ou deux jours, après
l'accomplissement de l'acte prohibé, commet un acte de vengeance et non un acte de légitime
défense. Celle qui agresse un tiers, en prévision d'une éventuelle ou d'une future agression,
commet une infraction : sa défense est prématurée. L’agressé qui, suite à une agression, court
1.
416. 1 V. Tribunal de police Valence, 19 mai 1960, S. 1960, 270, note HUGUENEY.
417. 2 V. Cass. crim. 22 mai 1959, JCP 1959, II, 11161.
418. 3 V . Tribunal de Grande Instance d'Agen, 18 février 1998, in Gaz Pal., mai 1998, jurisprudence, p. 259
& SS. Un tribunal français a estimé que n'est pas un cas de légitime défense la destruction de maïs
(semences, sacs de maïs…), transgéniques (le maïs subit un certain nombre de modifications, insertion
par exemple de bactéries pathogènes, de gène cloné…..°) sous prétexte qu'ils risquaient d'influencer
négativement et de façon irréversible les autres cultures (maïs traditionnel, tournesol,….). Il ressort des
motivations du tribunal que l'usine (Novartis) propriétaire des semences détruites les détient légalement
(il est autorisé à les détenir).
419. 4 Cour Suprême, Formation pénale, 25 août 1967, arrêt n°2/PE/72, p. 43.

181
Précis De Droit Pénal Général

chercher une pioche dans le débarras pour abattre l’agresseur, sort des limites de temps de la
légitime défense.

2- Les caractères de la défense justificative

La riposte à l’agression injustifiée doit être nécessaire (a) et proportionnée (b).

a – La nécessité de la défense

197. L'acte ou la répartie doit être le seul moyen de défense contre l'agression. L'agression
initiale doit être telle que la victime court un danger immédiat ne lui permettant pas d'avoir du
secours ou de s'enfuir. Le seul moyen ou la seule issue s'offrant à lui étant la défense.
L'urgence lui impose une riposte immédiate. La riposte n’est donc valable que lorsqu’elle est
nécessaire. Elle n’est pas nécessaire lorsque, par exemple, l’agresseur effrayé se rend
docilement. Il en est de même quand l’individu pouvait s’enfuir sans aucun danger. Par
ailleurs, l’acte de défense, selon la jurisprudence française, doit être accompli de façon
volontaire dans la mesure où pour déterminer la proportionnalité de la riposte (par rapport à
l’agression) la victime doit être maître de son acte "d’agression-réplique"1 dans la mesure où
l’agressé peut aboutir à un résultat non voulu).

198. S'agissant de la défense des biens, elle doit être strictement nécessaire à la protection des
biens ou nécessaire au but poursuivi. On ne peut, par exemple, admettre la suppression d’une
vie humaine pour éviter l'atteinte d'un bien. Celui qui tire sur un adolescent et le tue, parce qu'il
est en train de voler quelques pieds de carottes dans son jardin potager, ne peut se prévaloir
d’une légitime défense en faveur de ses biens. D’ailleurs, contrairement à la législation
française, la législation burkinabé ne prévoit pas expressément la protection des biens par la
voie de la légitime défense. Elle en fait allusion, par une énumération non exhaustive de cas de
défense de biens couverts par la légitime défense. En effet, aux termes de l'article 71, al. 2 du
CP, "Sont notamment commandés par la nécessité immédiate de la légitime défense les actes
commis en repoussant de nuit l'escalade ou l'effraction d'une maison ou d'un appartement
habité ou de leurs dépendances ou en se défendant contre les auteurs de vol ou de pillages
exécutés avec violences".

L'intrusion nocturne dans une habitation ou ses dépendances, les vols ou pillages commis
avec violence sont donc présumés fonder une réaction défensive de la part de la victime. Dans
ces cas, il s’agit d’une légitime défense et implicitement d’une défense de biens ou d’intérêts
patrimoniaux. La démonstration de la preuve contraire peut être faite et rendre le moyen de la
légitime défense inopérant. En revanche, le mari qui, connaissant l’identité de l’agressé
(l’amant de son épouse) l’abat au moment où, nuitamment et par escalade, il est en train de
rejoindre sa maîtresse dans la maison conjugale, ne saurait invoquer la légitime défense pour se
couvrir2.

b) – La proportionnalité de la défense

1.
420. 1 V. Cass. crim. fr., 16 février 1967, JCP 1967, II, 15034, note Combaldieu.
421. 2 V. Cass. crim. fr., 12 octobre 1993, Droit Pénal, Commentaire, n°35.

182
Précis De Droit Pénal Général

199. Les moyens de défense employés doivent être proportionnels à la gravité de l'agression 1.
La disproportion entre la riposte et l’agression annihile le caractère justificatif de la défense. La
réplique ne doit pas être excessive par rapport à l’agression initiale. L’abus du droit à la
légitime défense n’est pas admis. La dame qui frappe dans l’œil de son agresseur avec le bout
de sa chaussure à talon, en guise de riposte à une simple bousculade de la part de celui-ci, a
exagéré quant à la proportionnalité entre l’agression et la réplique. Aussi, l’homme qui dégaine
son poignard et tue sa voisine qui l’a terrassé ne peut-il se prévaloir d’une situation de légitime
défense. La riposte n'est pas proportionnelle à l'attaque. Jeter un individu à terre ne suffit pas
pour répondre par la suppression de la vie du "projecteur" : il y a meurtre. Il aurait pu tenter de
repousser la dame en employant uniquement la force physique.

200. Il ressort de la législation en vigueur que la légitime défense ne s'applique pas à tous les
domaines. Comme l'on peut le remarquer, elle s'applique particulièrement en cas d'agression
contre l'intégrité physique et d'atteinte aux biens. La légitime défense lorsqu'elle est établie
permet d'écarter toute responsabilité pénale. Il n’y a pas d'infraction dans ces conditions. La
légitime défense n'engage pas non plus la responsabilité civile de l'auteur de la riposte.

SECTION III - L'ÉTAT DE NECESSITÉ

L’état de nécessité qui, à l’origine, était d’ordre jurisprudentiel en droit français, a fini par être
intégré dans la législation. Le système burkinabé l’a également intégré. La consécration de
l’état de nécessité s’est d’abord faite par un certain nombre de décisions notamment celle
relative à l’affaire Ménard jugée le 4 mars 1898 par le Tribunal correctionnel de Château-
Thierry (laquelle décision a fait l’objet d’un appel devant la Cour d’appel d’Amiens le 22 avril
1898, confirmant ce jugement)2. L’état de nécessité n’était pas légalement généralisé en droit
français : le délit nécessaire ne concernait que quelques domaines notamment l’avortement
thérapeutique. Le code pénal de 1810 ne contenait donc pas des dispositions d’ordre général en
la matière. C’est un fait justificatif qui interpelle sur sa définition, son fondement (§1) et sa
caractérisation (§2).

§1 – LA NOTION ET LE FONDEMENT DE L’ÉTAT DE NÉCESSITÉ

201. L'article 72 du CP traite de l'état de nécessité en ces termes : "N'est pas pénalement
responsable la personne qui se trouve dans la nécessité de commettre une infraction en vue
d'éviter un péril plus grave et imminent pour elle-même ou pour autrui, sauf s'il y a
disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace". L’état de nécessité
engendre une situation de conflit d’intérêts (l’intérêt menacé par le péril et celui qui est protégé
par la loi).

L'état de nécessité fait donc partie des cas où la loi permet l'accomplissement d'un acte prohibé
(par la loi). Il se rapproche de la légitime défense car, dans les deux situations la commission
de l’infraction est nécessaire. Certains auteurs les distinguent en ces termes : « …celui qui

1.
422. 1 V. Cass. crim. fr., 21 novembre 1961, in J. PRADEL & A. VARINARD, "Les grands arrêts du droit
pénal général", op. cit. , n°22.
423. 2 V. Tribunal Correctionnelle de Château-Thierry, 4 mars 1898, S. 1899, 2, 1.

183
Précis De Droit Pénal Général

invoque la légitime défense est une victime, tandis que celui qui s’abrite derrière l’état de
nécessité est un agresseur »1. Selon RENOUT, « L’état de nécessité est la situation dans
laquelle se trouve une personne qui, pour sauvegarder un intérêt supérieur menacé par un
danger actuel ou imminent, est amené à commettre une infraction »2.

L'état de nécessité suppose une situation où une personne ne peut sauvegarder un droit ou un
bien qu'en commettant une infraction. Il s’agit donc d’une situation dans laquelle une personne
est obligée de commettre une infraction pour éviter un danger actuel ou imminent. L'agent doit
choisir entre deux actes qui ont, en général, un degré de gravité différent. L’individu se trouve
dans une situation cornélienne. Il est placé dans une situation où il doit librement choisir entre
laisser un péril se réaliser et commettre une infraction. C’est l’exemple du médecin qui procède
à un avortement pour sauver la vie de la mère. C’est aussi, le cas d’une dame qui vole du pain
pour éviter de mourir de faim (affaire Ménard sus-citée : une mère de famille, ayant passé deux
jours sans manger, vole du pain devant une boulangerie pour assouvir sa faim) 3. En revanche,
la jurisprudence française a estimé que, ne constitue pas un cas d'état de nécessité, la situation
dans laquelle une personne conduit sans permis (de conduire) à la place du chauffeur au motif
que ce dernier a été victime de malaises. Dans ce cas, il existe d'autres solutions pour faire face
à la situation. Une telle situation ne peut donc justifier la conduite sans permis4. Egalement, une
Cour d’Appel française a estimé que voler de la viande (dans un supermarché), aux fins
d’améliorer le repas destiné aux enfants de l’auteur de l’acte incriminé, ne constitue en rien un
cas d’état de nécessité5.

202. La doctrine a tenté d'expliquer le fondement de l'état de nécessité. A ce titre, un auteur


trouve que le fondement de l'état de nécessité "est une considération de simple bon sens.
L'auteur d'un acte commis sous l'empire de la nécessité, loin de subvertir l'ordre, agit en
supplétif de l'intérêt général". D'autres trouvent qu'il s'agit d'un fait justificatif fondé sur
l'intérêt social6. Ils estiment que « La société…a une autre raison de ne pas punir. Ce délit
nécessaire n’est pas inspiré par un tempérament anti-social ; il ne révèle pas une perversité
criminelle chez son auteur » 7. L’état de nécessité est, en somme, fondé sur des considérations
d’ordre social. Ainsi, la société n’a aucun intérêt, par exemple, à punir une personne qui
sacrifie un bien pour sauver une vie. Il peut aussi avoir un conflit de valeurs des intérêts en
cause dans le cas où les deux intérêts sont de valeur égale (exemple : la vie de deux individus
en cause). C’est le cas du naufragé qui pour pouvoir sauvegarder sa vie a du précipiter du
navire le passager excédentaire. Il a donc choisi de sacrifier la vie de son compagnon pour
préserver la sienne au lieu d’opter pour l’héroïsme en sacrifiant sa propre vie.

1.
424. 1 V. R. MERLE & A. VITU, « Traité de droit criminel », tome 1, op. cit., n° 465.
425. 2 V. H. RENOUT, "Droit pénal général", Editions Paradigme-CPU (Centre de Publications
Universitaires), 2002, p. 229.
426. 3 V Cour d’appel d’Amiens 22 avril 1898, S., 1899, 2, 1. Cette décision confirme le jugement du 4 mars
1898 (affaire Ménard).
427. 4 V. Cass. crim. fr., 4 mars 1998, Gaz. Pal., 1998, Chr. Criminel, 125.
428. 5 CA Poitiers 11 avril 1997, JCP 1997, II, 22933, note A. Olive.
429. 6 V. LEGAL, "L’état de nécessité, un fait justificatif qui n’ose pas dire son nom", RSC, 1983, p. 597.
430. 7 V. G. STEFANI, G. LEVASSEUR & B. BOULOC, "Droit pénal Général", 18 ème édition, Dalloz,
2003, n°403.

184
Précis De Droit Pénal Général

§2 – LES CONDITIONS D’EXISTENCE DE L’ÉTAT DE NÉCESSITÉ

Certaines conditions sont liées au péril auquel est exposé l’agent (1) et d’autres sont en
rapport avec l’acte salvateur (2).

1 – Les conditions liées au péril

Deux principales conditions sous-tendent le danger que court l’individu : l'existence d'un
danger actuel ou imminent (a) et la proportionnalité entre les moyens employés et le degré de
gravité du danger (b).

a – L’existence d’un danger actuel ou imminent

203. L'agent doit être en face d'un danger menaçant une personne ou un bien tout comme en
matière de légitime défense. L’urgence doit caractériser la situation dans laquelle se trouve
l’individu. Le danger doit être certain, réel. Un danger probable ou des menaces latentes ne
sont pas suffisantes pour invoquer l’état de nécessité. La Cour de cassation française a
considéré que le danger est imminent lorsqu’un bijoutier viole les règles de stationnement pour
se rapprocher le plus près possible du lieu de livraison des bijoux transportés afin d’éviter une
probable agression1. Il ressort de cette décision que l’appréciation de l’imminence du danger
reste à la discrétion du juge. Pourtant dans cette affaire, le danger paraît plus probable
qu’imminent. En revanche, cette Cour a refusé de reconnaître l’existence d’un danger
imminent au profit d’un voisin qui a détruit des abeilles non agressives pour se prémunir contre
leurs éventuelles piqûres (alors même que ses ouvriers et lui même ont déjà été piqués par ces
abeilles)2.

Aussi, le danger actuel ou imminent peut-il menacer l’intégrité moral. C’est ainsi que la Cour
d’appel de Colmar a jugé qu’il n’y avait pas violation de domicile de la part d’un père, en
situation de procédure de divorce, qui s’était introduit dans le domicile de son épouse et avait
expulsé manu militari deux individus à cause de leurs assiduités. La réaction du père est due au
fait que leur enfant courrait un danger grave et imminent généré par les rencontres
"impudiques" (à domicile) organisées par la mère. La Cour a jugé « qu’on ne peut faire grief à
un père d’avoir fait passer le souci de l’intégrité morale de sa fille avant toute autre
considération ; que le préjudice causé à la société et à la dame Régina est moindre que les
suites fâcheuses qui pouvaient résulter d’agissements capables de pervertir sa fille »3.

b - Proportionnalité entre les moyens employés et la gravité de la menace ou du péril

204. Tout comme en matière de légitime défense, la question de proportionnalité entre les actes
intervient. L'intérêt sacrifié doit, en principe, être de valeur moindre ou équivalente à celui qui
a été sauvegardé. Le choix doit donc porter sur l'acte le moins grave en présence de deux
situations de valeurs différentes. Dans ce cas, l’intérêt sacrifié doit être inférieur à l’intérêt
1.
431. 1 V. Cass. crim. fr., 21 novembre 1974, JCP 1975, 18143, note CHAMBON.
432. 2 V. Cass. crim. fr., 27 décembre 1961, Bull. Crim. 1961, n° 563.
433. 3 V. J. PRADEL, A. VARINARD, "Les grands arrêts du droit pénal général", 5 ème édition, op. cit. n°24.

185
Précis De Droit Pénal Général

sauvegardé. On ne saurait tuer un chasseur pour sauver une espèce animale protégée. Mais,
l’automobiliste qui franchit une ligne continue pour éviter de blesser ou tuer un piéton peut
légitiment invoquer l’état de nécessité1. Toutefois, dans le cas où les intérêts en conflit sont de
valeurs égales ou équivalentes, la question de hiérarchisation de ces intérêts se pose. Il en est
ainsi, dans le cas d’un avortement thérapeutique. Le médecin est confronté à une situation
délicate car, il doit choisir entre deux intérêts de valeurs équivalentes : la vie du fœtus2 et celle
la mère. Cette question délicate s’est également posée dans l’affaire Lesage pour laquelle
l’automobiliste a choisi d’éviter un accident corporel en occasionnant un autre 3. Un des
arguments soulevés par la Cour était axé sur la question de classement des valeurs en présence.
Elle a jugé que l’automobiliste n’établit pas la preuve, «que le risque hypothétique des
blessures pour sa femme et son enfant était de nature à entraîner des conséquences plus
redoutables que le péril certain et très grave…auquel il a exposé les époux… ».

2 - La nécessité de l'acte salvateur (l’infraction)

205. La réalité et l’imminence ou l’actualité du danger ne suffit pas à justifier l’infraction


commise par l’agent. Ce dernier doit, en outre, être dans l'obligation de commettre l'infraction
pour sauvegarder un intérêt d’une valeur supérieure ou égale à celui qu’il a choisi de sacrifier.
C’est l’unique solution qui s’offre à lui pour éviter le danger. L’acte fautif commis par l’agent
doit en conséquence être utile ou indifférent d’un point de vue social. Le vol d’aliments, dans
un supermarché, par une mère dans le but d’améliorer la qualité du repas quotidien, n’est pas
nécessaire. Ce vol ne saurait être couvert par l’état de nécessité4. S’il s’agissait d’un vol pour
survivre, l’acte aurait pu être couvert par la nécessité de l’infraction.

206. Aussi, même si l’acte est nécessaire, l’agent doit-il avoir un passé comportemental
irréprochable, par rapport à la menace ou au péril. En d’autres termes, le péril auquel l’individu
a voulu échapper ne doit pas être le résultat d’une faute personnelle. Ce péril doit plutôt être en
rapport avec la fatalité. L’agent ne doit pas avoir commis, antérieurement au danger, une faute
génératrice du péril5.

En somme, l'agent doit se trouver dans une situation où il n' y a, autre solution, que celle
donnant lieu à la commission d'une infraction pour faire face au péril. L’infraction doit donc
être nécessaire à la neutralisation du péril.

Si l'état de nécessité emporte absence de toute responsabilité pénale, qu'en est-il du cas où
intervient le consentement de la victime.
1.
434. 1 V. Tribunal de police française d’Avesnes-Sur-Helpe, 12 décembre 1964, Gaz. Pal. , 1965, I, 91.
435. 2 V. Y. MAYAUD, "Du foetus à l’enfant né vivant : un bilan d’inégalités ! (Versailles 30 janvier 2003,
n°02-00.704)", RSC, 2004, chr., p. 83 & SS.
436. 3 V. Cass. crim. 28 juin 1958, D. 1958, 693.
437. 4 V. Cour d’appel de Poitiers, 11 avril 1997, JCP 1997, II, 2293 ; voir également, WAXIN et F.
DEBOVE, "La faim ne justifie pas les moyens ", Droit Pénal, 1998, chr. 4.
438. 5 V. affaire « Lesage », Cass. crim. 28 juin 1958, D. 1958, 693. Dans cette affaire, un automobiliste, à
l’origine d’un accident a invoqué l’état de nécessité pour justifier les blessures graves dont ont été
victimes les occupants d’une autre voiture concernée par l’accident. Il a prétendu que l’accident est
arrivé parce qu’il tentait, pendant qu’il conduisait d’une main, de retenir son enfant et son épouse de
l’autre main suite à l’ouverture d’une portière de sa voiture. Mais, la Cour a jugé que le péril est dû à
une faute commise par l’automobiliste : il n’a pas pris les précautions nécessaires pour éviter que les
portières s’ouvrent au cours de la circulation.

186
Précis De Droit Pénal Général

SECTION IV- LE CONSENTEMENT DE LA VICTIME

Il peut arriver que la victime de l’infraction ait été à l’origine de sa commission. L’on peut se
trouver dans une hypothèse où celle-ci ait, avant la commission de l’acte prohibé, accepté
d’être victime ou ait été à l’origine de son « statut de victime ». En principe, le consentement
de la victime1 reste indifférente à la constitution de l’infraction : il n’est pas un fait justificatif
(§1). Mais, il peut avoir des dérogations à ce principe (§2).

§1 - LE PRINCIPE

207. Les cas de justification d'actes commis avec l'assentiment de la victime ne sont pas
expressément prévus par la loi. La loi pénale étant d'ordre public, la victime ne peut ni gêner,
ni arrêter l'application de celle-ci, en invoquant des intérêts d'ordre privé ou sa propre volonté.
Le droit pénal est un moyen juridique de protection de l’intérêt général et de l’ordre social.
Partant, aucune justification n'est possible par rapport à certains actes légalement prohibés mais
consentis par la victime, quant à leur commission. Il s'agit notamment de quelques infractions
portant atteinte à la vie, à la santé et à l'intégrité physique de l'individu. Ce sont des valeurs
indisponibles. La victime ne peut pas disposer de ces droits. Le consentement de la victime ne
justifie pas l'acte dans ces conditions. Néanmoins, le juge peut en tenir compte pour la
détermination de la peine.

208. C’est ainsi que l'euthanasie2, qui consiste à donner volontairement la mort à un malade
afin de mettre fin à ses souffrances, est punissable3. Dans cette hypothèse, même si le malade a
supplié l’agent de lui donner la mort, l’infraction est constituée. Ni la souffrance excessive, ni
le sentiment de pitié suscité par l’état du malade ne peuvent justifier la commission de l’acte
illicite4. Le mobile, malgré son caractère louable, ne permet pas de neutraliser l’existence d’un
homicide volontaire. Aussi une stérilisation volontaire, effectuée avec le consentement de la
victime, dans un but non thérapeutique, a-t-elle été considérée comme un fait non justificatif5.
L’opération avait pour but de supprimer les fonctions de procréation de la victime. Le
proxénétisme peut également illustrer la non influence de l’autorisation de la victime sur la
constitution de l’infraction. En effet, la loi l’exprime en ces termes, « Est considéré comme
proxénète et puni…quiconque sciemment…embauche, entraîne ou entretient, même avec son
consentement, une personne, en vue de la prostitution ou la livre à la prostitution ou à la
débauche » (art. 424 du CP).

1.
439. 1 X. PIN, "La théorie du consentement de la victime en droit pénal allemand", RSC 2003, p. 259 & SS.
440. 2 V. J.F. SEUVIC, "Euthanasie", RSC 2005, chr. Législative, p. 881. ;
C. ANDRE, "Euthanasie et droit pénal : la loi peut-elle définir l’exception ?", RSC 2004, p. 43 ;
441. 3 Selon LEBRETON, "le droit à l’euthanasie est le droit de l’individu d’exiger que sa mort soit
provoquée par autrui afin d’abréger ses souffrances. Il s’analyse donc comme le pouvoir d’obtenir une
aide au suicide" (G. LEBRETON, "Libertés publiques & droits de l’homme", Edit. Armand Colin, 6ème
édition, 2003, p. 283).
442. 4 V.Y-M. DOUBLET, "La loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de la vie",
Petites Affiches, 23 juin 2005, n°124, p. 7 & ss. (il s’agit d’une loi française).
443. 5 V. Cass. crim. 1er juillet 1937, S. 1938, I, 193, note TORTAT..

187
Précis De Droit Pénal Général

§2 – LES DÉROGATIONS

209. Dans certains cas, l'infraction disparaît en présence du consentement de la victime. La


conséquence d’une telle situation est l’impunité. Ces cas concernent surtout les infractions
portant atteinte à un bien ou à un droit dont la victime a la possibilité de disposer. Celui qui
prend un bien avec le consentement de son propriétaire ne peut être poursuivi pour vol. Celui,
qui a des relations sexuelles avec une personne consentante, ne peut être accusé de viol ou
d'autres types de violences sexuelles. L’expérimentation sur le corps humain de la victime
demeure licite si elle a été faite sous le respect de la loi (en la matière) et avec l’accord du
cobaye. S’agissant de certaines atteintes à l’intégrité physique liées à des actes paramédicaux
ou médicaux (chirurgie esthétique, chirurgie destinée au changement de sexe ) non seulement
le consentement de la victime est nécessaire mais le respect des règles déontologiques et
l’observation des règles de l’art sont exigés1. Le consentement de la victime fait, en général,
disparaître un des éléments constitutifs de l’infraction dans ces hypothèses, l’existence de
l’infraction étant subordonnée au défaut de consentement.

Mais dans l'hypothèse où le consentement de la victime fait disparaître la responsabilité pénale,


il faut que quelques conditions soient au préalable remplies.
- Le consentement doit provenir d'une personne capable.
- Le consentement doit, en principe, être antérieur à l’infraction.
- Le consentement ne doit pas être vicié. Il doit être donné librement, sans contrainte
aucune. Ainsi, celui qui arrache un oui de la victime avec un couteau sous sa gorge, pour
consommer des relations sexuelles, ne peut nier l'existence d'un viol.

1.
444. 1 V. Cass. crim. fr.30 mai 1991, Bull. Crim. 1991, n° 232.

188
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE III – LES RÉGLES DE RESPONSABILITÉ


PÉNALE LIÉES Á LA CATÉGORIE DE LA PERSONNE

Le statut ou la qualité de certaines personnes ont amené le législateur à établir des règles de
responsabilité tenant compte de cet état. En effet, certaines règles de responsabilité intègrent
des aspects subjectifs. Il s’agit notamment des règles de responsabilité concernant les
personnes morales (Section I) et certaines catégories de personnes physiques (Section II).

SECTION I - LA PERSONNE MORALE

La personne morale qui est un sujet non humain peut avoir une aptitude à répondre pénalement
des faits fautifs dont elle est à l’origine. Il s’agit d’une « responsabilité collective ». Il en
ressort que la responsabilité des personnes morales peut être engagée comme elle peut être
dégagée ou atténuée. Dans tous les cas, la personne morale doit répondre à une définition
donnée (§1). Sa responsabilité pénale est engagée1 sous certaines conditions (§2).

§1 – LES PERSONNES MORALES PUNISSABLES

210. La loi pénale burkinabé punit les personnes morales, auteurs d'infraction. En effet, l'article
64, alinéa 2 du CP est ainsi libellé "Est aussi auteur ou coauteur toute personne morale à objet
civil, commercial, industriel ou financier au nom et dans l'intérêt de laquelle des faits
d'exécution ou d'abstention constitutifs d'une infraction ont été accomplis par la volonté
délibérée de ses organes". Ces dispositions ne donnent aucune définition de la personne morale
qui a, longtemps, été considérée par certains auteurs comme une fiction. Mais, il convient
d’admettre que c’est une création juridique nécessaire au fonctionnement de certaines
structures.

Toutefois, en matière civile, quelques indications conduisent, implicitement, à une définition


de la personne morale. C’est le cas des précisions contenues dans l’article 26 du Code des
personnes et de la Famille : « la loi reconnaît les groupements organisés traduisant l’existence
d’intérêts collectifs ou la possibilité d’une expression collective organisée de ces intérêts, de
même que les établissements ayant un but spécifique et une autonomie de gestion... ». L’article
27 du même code indique que non seulement la personne morale peut acquérir des droits mais
aussi assumer des obligations. Il va sans dire que ces droits et obligations concernent
également le domaine pénal. Enfin l’article 28, dudit code, précise les conditions dans
lesquelles la personne morale manifeste sa volonté : « la volonté d’une personne morale
s’exprime par ses organes ».

211. Pendant longtemps, certains ont considéré que la responsabilité pénale d'une personne
morale était inadmissible. Ceux-ci s’appuyaient sur le fait qu'il est impossible d'imputer une
faute à une personne dont l'existence est irréelle et encore moins de le faire vis-à-vis d’une
1.
445. 1 V. O. DUFOIUR, "La justice pénale sanctionne lourdement les personnes morales", Petites Affiches,
23 juin 2005, n°124, p. 5.

189
Précis De Droit Pénal Général

personne dépourvue de volonté. Ils soutiennent, également, que la peine est prévue pour une
personne physique et non morale. Ils estiment que, dans ces conditions, ce sont les personnes
physiques notamment, les dirigeants ou les représentants qui seront pénalement sanctionnés, à
la place de cette personne dont l’existence juridique est fondée sur la fiction alors que ces
personnes physiques ne sont pas les auteurs de l’infraction1. En revanche, la doctrine
contemporaine, favorable à l’engagement de la responsabilité pénale de la personne morale,
soutient que cette dernière est une réalité juridique et a une volonté collective propre, différente
de celle de ses membres (exemple du conseil d'administration). Elle peut être punie
pécuniairement. La dissolution demeure, aussi, une sanction pénale possible à son encontre.

212. La notion de personne morale renvoie, en général, à celle de la personnalité juridique qui
est l’aptitude à être sujet de droit. Pour LARROUMET, « Les personnes morales sont des
groupements de biens ou de personnes (physiques ou morales), c’est-à-dire des groupements
d’intérêts auxquels on reconnaît la personnalité juridique, en d’autres termes l’aptitude à
acquérir et à exercer des droits subjectifs »2. Le droit subjectif est une prérogative reconnue à
une personne et pour lequel, l’exercice est assuré par la puissance publique. Les associations et
les sociétés commerciales sont des exemples de personnes morales. C’est ainsi que la Cour de
cassation a jugé que « la personnalité civile n’est pas une création de la loi, elle appartient en
principe à tout groupement pourvu d’une possibilité d’expression collective pour la défense
d’intérêts licites, dignes par suite d’être juridiquement reconnus et protégés »3.

213. La consécration de la responsabilité de la personne morale, par l’article 64 du CP,


interpelle sur la question des personnes morales concernées. La loi n’est pas assez précise à ce
sujet, dans la mesure où il s’agit de « toute personne morale à objet civil, commercial,
industriel ou financier ». Toutes les catégories de personnes morales sont-elles concernées ?

Le libellé de l’article 64, alinéa 2 du CP permet a priori d’englober les personnes morales de
droit public et les personnes morales de droit privé. Cependant, malgré cette formulation, on
peut estimer que certaines personnes morales de droit public ne sont pas, en principe,
concernées. Il s’agit notamment de l’Etat et des collectivités territoriales (départements,
communes, régions ...). L’inaptitude de l’Etat à être puni pénalement peut s’expliquer par le
fait qu’il détient le monopole de la répression et à ce titre, il ne peut pas s’auto-réprimer. Quant
aux établissements publics à caractère industriel et commercial ou aux sociétés d’Etat,
logiquement, ils peuvent être concernés par la responsabilité pénale. Cependant, on peut se
demander si un établissement public de l’Etat à caractère scientifique, culturel et technique
(ESPCT), personne jouissant de la personnalité morale, est concerné par l’article 64, alinéa 24.
Il va sans dire que toutes les personnes morales de droit privé, à objet civil, commercial,
industriel ou financier sont concernées. Il s’ensuit que les personnes morales à but lucratif
(sociétés civiles, commerciales, les groupements d’intérêt économiques…) sont
particulièrement visées par la loi. Toutefois, cela n’exclut pas le fait que les personnes morales

1.
446. 1 V. J-H. ROBERT & Stamatios TZITZIS, "La personne juridique dans la philosophie du droit pénal ",
Editions Panthéon-Assas, 2003, p. 114.
447. 2 V. C. LARROUMET, "Droit civil", tome 1, Economica, 3ème édition, 1998, n°355.
448. 3 V. Cass. civ. 28 janvier 1954, D. 1954, p. 217, note LEVASSEUR.
449. 4 Article 2 de la loi n°32 -2000 AN du 8 décembre 2000 créant l’EPSCT, « Sont des établissements
publics de l’Etat à caractère scientifique, culturel et technique chargés de la culture, de l’enseignement
supérieur et/ou de la recherche scientifique, jouissant de la personnalité morale et de l’autonomie
scientifique, administration et financière », voir JOBF du 14 décembre 2000, p. 5080.

190
Précis De Droit Pénal Général

à but non lucratif (les syndicats professionnels, les fondations, les organisations non
gouvernementales…) soient aptes à répondre de leurs actes pénalement répréhensibles.

Les infractions telles que l'escroquerie, la publicité mensongère, la diffamation, les abus, le
blanchiment d'argent, les ententes irrégulières, l'inobservation des règles d'hygiène ou de
sécurité ou de travail sont, souvent commises, par les personnes morales.

§2 – LES CONDITIONS D’ENGAGEMENT DE LA RESPONSABILITÉ


DE LA PERSONNE MORALE

214. L’analyse du texte (art. 64 du CP) consacrant la responsabilité pénale de la personne


morale conduit à affirmer que, en principe, pour pouvoir engager cette responsabilité, la
personne doit être dotée de la personnalité juridique. Dans cette hypothèse, certaines sociétés
commerciales telles que la société en participation1 et la société de fait2 prévues par la loi ne
sont pas susceptibles d’être inquiétées quant à leur responsabilité pénale, en tant que personne
morale au sens large3. Il en est de même pour les sociétés en cours de formation (non encore
dotées de la personnalité juridique). Mais, celles qui sont en cours de liquidation ne sont pas
concernées, en raison du fait que la personnalité juridique demeure valable jusqu’à la fin de des
opérations de liquidation4.

215. En tout état de cause, les personnes morales n’ont pas la faculté d’agir directement. Elles
ne peuvent pas accomplir matériellement ou intellectuellement des actes. Ces personnes
agissent par le truchement de leurs organes ou représentants, notamment le conseil
d'administration, le directoire, le conseil de surveillance, le gérant, le directeur, le président,
l’administrateur provisoire, le liquidateur (ceux qui ont un pouvoir d'agir au nom et pour le
compte de la personne morale)5. L’organe vise les personnes habilitées légalement ou
statutairement à intervenir, à agir ou à prendre des engagements au nom de la personne morale.
Quant à la notion de représentant (au sens large), pratiquement synonyme d’organe, elle
renvoie notamment au représentant conventionnel, légal ou judiciaire. La personne morale est
responsable parce une ou plusieurs personnes de ses organes le sont. Certains auteurs résument
cette situation en ces termes : « la personne morale "s’incarne" dans une personne physique :
incarnation véritable puisque l’être collectif, qui n’a pas de chair et de membres, se loge pour
commettre une infraction dans le corps d’une personne physique »6. L’infraction ne peut donc
être commise matériellement et intellectuellement que par les organes ou représentants de la
personne morale. La participation effective du représentant physique de la personne morale à

1.
450. 1 Article 854 de l’Acte uniforme sur les sociétés & GIE (de l’OHADA : "La société en participation est
celle dans laquelle les associés conviennent qu’elle ne sera pas immatriculée au registre du commerce et
du crédit mobilier et qu’elle n’aura pas la personnalité morale. Elle n’est pas soumise à publicité ".
451. 2 Article 864 de l’Acte uniforme sur les sociétés & GIE (de l’OHADA : "Il y a société de fait lorsque
deux ou plusieurs personnes physiques ou morales se comportent comme des associés sans avoir
constitué entre elles l’une des sociétés reconnues par le présent Acte uniforme".
452. 3 V F. ANOUKAHA, A. CISSE, N. DIOUF, J. N. TOUKAM, P-G. POUGOUE & M. SAMB, "Sociétés
commerciales et G.I.E. ", Bruylant Bruxelles, 2002, p. 501 & SS.
453. 4 V. D. LEGEAIS, "Droit commercial et des affaires", Armand Colin, 15 édition, 2003, p. 497.
454. 5 Cass. crim. fr. 7 juillet 1998, Joly, 1999, p. 259, note BARBIERI ; Revue Sociale (Rev. Soc.), 199,
399, note B. BOULOC.
455. 6 V. R. MERLE & A. VITU, « Traité de droit criminel », tome 1, op. cit., n° 645.

191
Précis De Droit Pénal Général

la réalisation de l’infraction est par conséquent nécessaire. On ne peut donc imputer une
infraction à une personne morale en l’absence de la participation d’une personne physique (la
représentant) en tant qu’auteur ou complice. On peut comparer la personne morale à un pantin
qui ne bouge que si une personne physique l’actionne : elle ne peut être auteur ou complice que
si son organe ou son représentant lui insuffle cette qualité par la commission matérielle et
intellectuelle de l’infraction. La personne physique demeure donc le support exécutif des actes
constitutifs de l’infraction. C’est pourquoi, un auteur estime que, « en excluant que les
personnes morales puissent relever d’une sanction répressive par le simple fait de leurs
préposés, le législateur a considéré, …que s’il suffit que la personne morale soit "l’occasion"
du dommage en droit civil, elle doit en être la" cause" en droit pénal, par le truchement exclusif
de ses organes ou représentants. Le lien entre la personne morale et l’infraction est donc un
rapport d’imputabilité….le sort de la personne morale évoque celui de la personne
physique…»1.

216. L’imputabilité de l’infraction à la personne morale n’est donc rendue possible que par le
lien de représentation2. L’organe ou le représentant ne peut, en aucun cas, être le préposé. En
outre, la responsabilité n’est imputable à "l’être moral" que, si l’infraction a été réalisée
au nom et pour le compte de celui-ci, c’est-à-dire dans l’intérêt de la personne morale. L’être
collectif, c’est-à-dire la personne morale, ne répond pas des actes de ses associés ou de ses
salariés. Ainsi, si le représentant a commis l’infraction pour son propre compte ou dans
l’intérêt quelques membres de la personne morale, la responsabilité pénale de cette dernière
n’est pas, en principe, en cause. C’est l’exemple du dirigeant qui commet un abus de biens
sociaux3. Ainsi, le Tribunal correctionnel de Ouagadougou a estimé que le Directeur d’une
société d’assurance n’a pas agi pour le compte et au nom de la société mais dans l’intérêt de
quelques actionnaires dès lors qu’il a réglé des honoraires d’avocat au profit de quelques
actionnaires, sur les fonds de la société. Selon le Tribunal, «… les différents procès intentés ont
été faits soit par un actionnaire soit par un groupe d’actionnaires contre un autre groupe
d’actionnaires mais jamais pour le compte de l’UAB et au nom de l’UAB ; les actions ne
peuvent être qualifiées d’action sociale, ...chaque actionnaire ou groupe d’actionnaires …se
doit personnellement de répondre de tous les frais occasionnés »4. L’engagement de la
responsabilité de l’être collectif n’est pas un obstacle à celui de la personne physique
représentant la personne morale. En effet, sa responsabilité personnelle pourrait être engagée à
titre de complice ou de coauteur.

217. Les causes d'irresponsabilité ou d'atténuation de responsabilité profitant à la personne


physique (représentante) profitent aussi à la personne morale. Les causes d'irresponsabilité
telles que la démence, l'erreur, la contrainte et autres profitent indirectement à celle-ci. Si, par
exemple, le Président Directeur Général a commis une infraction pendant qu'il était dément,
l'irresponsabilité pénale de ce dernier entraîne celle de la personne morale. Il s'agit d'une
irresponsabilité pénale « par emprunt de criminalité » (elle est indirecte). Mais s'agissant des

1.
456. 1 V. Ph. CONTE, "La responsabilité des personnes morales au regard de la philosophie du droit pénal ",
in. J-H. ROBERT & Stamatios TZITZIS, "La personne juridique dans la philosophie du droit pénal ",
Editions Panthéon-Assas, 2003, p. 112 & SS.
457. 2 V. Cass. crim. 2 décembre 1997, JCP 1998, 10023.
458. 3 V. R. BLAZY, "La pertinence économique de l’incrimination de l’abus de biens sociaux", Petites
Affiches, 2005, n°99, p. 29 & SS.
459. 4 V. Tribunal correctionnel de Ouagadougou, 10 janvier 2000, Revue Burkinabè de Droit (RBD), 2002
n°42, p. 149.

192
Précis De Droit Pénal Général

infractions matérielles c'est-à-dire les infractions non intentionnelles, en règle générale, la


responsabilité pénale de la personne morale est difficilement écartée.

SECTION II – LES PERSONNES PHYSIQUES

Il est tenu compte de la situation particulière de certaines personnes physiques pour déterminer
leur responsabilité pénale. Il s'agit singulièrement du passé judiciaire du délinquant de droit
commun (§1), de l'âge (mineur) du délinquant (§2). Toutefois, la vieillesse et le sexe1 ne
constituent pas des causes d’irresponsabilité pénale même s’ils peuvent, suivant les
circonstances, être à la source d’un aménagement des conditions d’exécution de la peine.
L’homme et la femme ont le même traitement quand à l’engagement de leur responsabilité
pénale. Il est donc fait application du principe de l’égalité entre les hommes et les femmes et de
celui de l’égalité des citoyens devant la loi. La vieillesse peut être une cause indirecte
d’irresponsabilité pénale lorsqu’elle est à l’origine de certaines maladies affectant l’état mental
de l’individu, notamment la sénilité.

§1 - LE PASSÉ JUDICIAIRE DU DÉLINQUANT DE DROIT COMMUN :


LE RÉCIDIVISTE

218. En matière de responsabilité pénale, une distinction est faite entre le délinquant primaire
et le délinquant récidiviste. Le récidiviste peut être considéré comme celui qui, après avoir été
condamné définitivement pour une première infraction, en commet une ou plusieurs autres,
dans les conditions fixées par la loi. La décision de condamnation doit être devenue définitive,
c'est-à-dire qu'elle doit avoir acquis l'autorité de chose jugée. En conséquence, elle ne peut plus
faire l'objet d'une voie de recours (voies de recours ou délais de recours épuisés).

En droit pénal burkinabé, cet état (récidiviste) est ainsi défini: « En matière criminelle et
délictuelle, est récidiviste celui qui, après avoir été définitivement condamné pour une première
infraction par une juridiction nationale ou étrangère, sous réserve que l'infraction ayant motivé
la condamnation à l'étranger, soit également une infraction au regard de la loi nationale,
commet un second crime ou un second délit indépendant de la première infraction » (art. 83 du
CP).
Au titre de l'article 86 du CP, "En matière contraventionnelle, il y a récidive lorsqu'il a été
rendu contre le contrevenant dans les douze mois précédents, un premier jugement devenu
définitif".

219. Le délinquant primaire, quant à lui, est celui qui est condamné à une peine pour la
première fois. Ce dernier peut bénéficier d'une atténuation de sa responsabilité. En effet sa
situation est prise en compte quant à la peine et quant à son exécution (sursis). Par contre, le
délinquant récidiviste est, plutôt, soumis à la règle de circonstances aggravantes.

1.
460. 1 R. OTTENOF, "La criminalité des femmes, mythes et réalités", RSC 1985, p. 633.

193
Précis De Droit Pénal Général

§2 - L'AGE : LE DÉLINQUANT MINEUR

220. Le jeune âge, à la différence du grand âge (la vieillesse), peut constituer une cause
d’irresponsabilité pénale. La particularité de cette catégorie de personne a amené le législateur
à prévoir aussi bien un régime de sanction pénale qu’une procédure pénale adaptés à sa
situation de délinquant juvénile. On part du postulat que le jeune délinquant (mineur) n’a pas la
même capacité de discernement que le majeur. Il n’a pas non plus la même maturité
intellectuelle. En outre, étant dans une phase de développement physique, intellectuel et de
socialisation, le mineur nécessite un régime pénal particulier. Certains délinquants mineurs
sont présumés pénalement irresponsables. D’autres, compte tenu de la tranche d’âge à laquelle
ils appartiennent, bénéficient d’une atténuation de responsabilité. Cependant, les mineurs de
plus de seize (16) et de moins de dix-huit (18) ans sont pratiquement assimilés à des majeurs en
matière de peine (art. 21de la loi 19-61 du 9 mai 1961 relative à l’enfance délinquante).

221. En droit pénal burkinabé, l’âge permettant d’échapper à une peine est fixé à moins de
treize (13) ans à la date de commission de l'infraction. Toutefois, n'est pas passible d'une peine
(art.74 du CP), le mineur dont l'âge est compris dans l'intervalle de 13 à 18 ans, non capable
de discernement, qui commet une infraction. Il peut être soumis à des mesures (éducatives,
d’assistance, de protection, de surveillance…). Le discernement est l’aptitude à apprécier de
façon saine les actes accomplis. Il va sans dire que cette capacité dépend du développement de
ses facultés de raisonnement. C’est dans ce sens que le Tribunal de Grande instance de Bobo a
décidé, par rapport à un vol commis par un mineur, «…qu’à la date de l’infraction, le
délinquant avait l’âge de treize (13) ans accomplis ; qu’au regard de son très jeune âge, le
prévenu n’avait pas le discernement de ses faits pendant le vol ; qu’ayant perdu très tôt sa mère
il n’a pas non plus de bons rapports avec son père et les autres membres de sa famille
d’origine ; que son éducation ne s’est pas faite convenablement, ses père et mère n’ayant pu
vivre dans la concorde ; qu’à cet égard la situation de Monsieur Z.O. nécessite une
rééducation ;…qu’il ressort de l’enquête réalisée par le service de l’Action sociale de la Maison
d’Arrêt et de Correction de Bobo-Dioulasso que Monsieur Z.O. commet régulièrement des
faits de vol ; que sa situation nécessite qu’il soit placé sous encadrement spécialisé pour sa
rééducation ; que de ce qui précède, il y a lieu de remettre Monsieur Z.O. à la maison
d’enfance d’Orodara aux fins de rééducation pour cinq (05) ans »1.

Les mineurs de plus de treize (13) ans et de moins de seize (16) ans bénéficient d’une
excuse de minorité, ce qui entraîne une réduction de peine (art. 20 de la loi 19-61 du 9 mai
1961 relative à l’enfance délinquante). Néanmoins, tout comme en ce qui concerne le dément,
une action en responsabilité civile peut être engagée contre le délinquant mineur irresponsable
pénalement, suivant les règles prévues par le code civil (art. 75 du CP).

1.
461. 1 Tribunal de Grande Instance de Bobo Dioulasso, jugement n°563 du 15 décembre 2003 (RG N°
956/03), décision publiée in www.juriburkina.org.
462.

194
Précis De Droit Pénal Général

Partie II  LA SANCTION

195
Précis De Droit Pénal Général

222. La sanction, en matière pénale, a considérablement évolué quant à sa nature. La sanction


dans le passé (surtout au 18éme siècle), a essentiellement été "émaillée" de privation de liberté
(emprisonnement, bagne, déportation …), de privation de vie (la mort…), de châtiments
corporels (coups et blessures à l’aide d’un fouet par exemple…) à l’encontre du coupable de
l’acte illicite. L’article 36 du Code noir de mars 1685 en est un exemple patent : « Les vols de
moutons, chèvres, cochons, volailles, cannes à sucre, pois, mil, manioc ou autres légumes, faits
par les esclaves, seront punis selon la qualité du vol, par les juges qui pourront, s’il y échet, les
condamner d’être battus de verges par l’exécuteur de la haute justice et marqués d’une fleur de
lys »1. L’article 38 du même code est plus expressif: « L’esclave fugitif qui aura été… pendant
un mois, à compter du jour que son maître l’aura dénoncé en justice aura les oreilles coupées et
sera marqué d’une fleur de lys sur une épaule ; s’il récidive un autre mois pareillement du jour
de la dénonciation, il aura le jarret coupé, et il sera marqué d’une fleur de lys sur l’autre épaule,
et, la troisième fois, il sera punis de mort ».

La castration et la stérilisation ont figuré dans la liste des sanctions infligées dans le passé. Ces
deux sanctions étaient surtout infligées aux pervers sexuels (en Allemagne entre 1934 et 1935
près de mille (1000) personnes, auteurs, récidivistes, d’attentat aux mœurs ont été castrés) voire
appliquées aux malfaiteurs (à partir de 1907, les malfaiteurs étaient susceptibles d’être castrés
aux Etats-Unis). Ces types de sanctions étaient préconisés surtout par les médecins qui
trouvaient là une sanction efficace, pour certaines catégories de personnes (obsédés, pervers
sexuels)2. C’est ainsi, qu’en 1949, à Genève, les médecins ont estimé qu’un aide-jardinier
accusé et reconnu coupable de plus d’une dizaine d’attentats à la pudeur devait être soumis à la
stérilisation ou à la castration.

Aussi, certaines périodes (révolutionnaires) ont-elles connu l’usage de la guillotine (instrument


doté de couperet ou hachoir servant à décapiter le condamné à mort) pour l’exécution de la
peine de mort (« tout condamné à mort aura la tête tranchée »). Cette exécution se présentait
sous diverses formes. Ainsi à Rome, la technique de la fourche consistait à « insérer la tête du
condamné dont les bras et les jambes avaient été solidement ligotés dans une fourche…et à le
fouetter »3 jusqu’à ce qu’il meurt. Toujours dans le système romain, la mise en croix, la
décapitation par le glaive, l’exposition aux bêtes du cirque (on les faisait déchiqueter sur scène
par les ours pendant qu’il joue le rôle d’Orphée), la crémation constituent des méthodes
d’exécution de la peine de mort. L’auteur d’un parricide était frappé et ensuite cousu dans un
sac contenant un coq, un chien, un singe et une vipère. Le sac et tout son contenu était destiné à
être jeté dans la mer. Pour certains philosophes, le droit de punir est juste et indispensable : le
crime doit être rétribué. La peine apaise la douleur infligée à l’agressé (la société) ou rétablit
l’ordre social rompu. Pour ceux-ci, celui qui agresse autrui doit attendre un choc en réplique (le
mal appelle le mal)4.

1.
463. 1 V. Code noir de mars 1685 relatif aux esclaves, op. cit.
464. 2 Selon Jean MARQUISET, un médecin anthropologiste de la prison de Forest - Bruxelles, estimait que
"lorsque la psychothérapie avec ses différents traitements, suggestion, psychanalyse, hormonothérapie a
échoué, il n’y a qu’un remède aux anomalies sexuelles graves, c’est la castration", J. MARQUISET,
"Les droits naturels", PUF, 1961, « QUE SAIS-JE » n°920, p. 67.
465. 3 V. J. MARQUISET, "Les droits naturels", op. cit., p. 72.
466. 4 V. ADAM, "La rétribution selon Malebranche", Archives de Philosophie du Droit, t. 28, 1983.

196
Précis De Droit Pénal Général

223. Mais, à partir du dix-neuvième siècle les sanctions ont connu une amélioration, en faveur
de l’individu. Les droits de l’homme sont, de plus en plus, pris en compte (humanisation des
peines, suppression par certains systèmes de la peine de mort…) et il est parfois fait appel aux
peines de substitution (travail d’intérêt général, médiation pénale…). Aussi, les interrogations
de la doctrine1 sur le but de la punition et sur la manière de punir ont-elles contribué à
l’évolution des sanctions. C’est de cette doctrine qu’ont été développées notamment les thèses
utilitaristes (la peine doit être juste, utile), positivistes (les sanctions doivent tenir compte de la
personnalité de l’individu, elles ne doivent pas être uniquement répressives : elles doivent aussi
être préventives voire « ressocialisantes »).

La sanction peut être considérée comme une arme protectrice des interdits sociaux. C'est une
réaction par rapport à ceux qui ont violé la loi. C'est une force de frappe de l'Etat vis-à-vis de
ceux qui agissent contre la loi. C'est aussi un moyen de réinsertion sociale de l’individu. Il
s’agit, en d’autres termes, de compenser le trouble social crée par le responsable d’une
infraction et de tenter de l’extirper du champ de la déviance.

La sanction est donc liée à la punition de l’agent coupable. Cette punition est perçue au sens
large et se rapporte à l’ensemble des traitements légaux destinés à l’individu qui s’est mal
comporté, en s’écartant des règles établies par la société et, plus précisément, des règles
légales. Les sanctions, en droit pénal, revêtent plusieurs formes et peuvent être classées en
plusieurs groupes (Titre I). Aussi, l'application d'une sanction nécessite-t-elle sa détermination
(Titre II).

1.
467. 1 Il s’agit, notamment de BECCARIA, BENTHAM, GUISOT, HOBBES, KANT, LOMBROSO,
MONTESQUIEU, ORTOLAN, PLATON, ROSSI, Thomas d’AQUIN…

197
Précis De Droit Pénal Général

TITRE I – LA SANCTION EN GÉNÉRAL

198
Précis De Droit Pénal Général

La règle nulla poena sine lega s’applique aux sanctions pénales. Cette règle suppose donc que
les sanctions pénales sont abstraitement prévues par la loi. Le texte d’incrimination du
comportement prohibé précise la sanction ou renvoie à un autre texte la déterminant (cas d’une
pénalité par référence). Il ressort de cette détermination légale que la sanction pénale se
présente sous diverses formes (chapitre I) permettant de procéder à une classification
(chapitre II). Au principe de la légalité des sanctions pénales, il convient d’ajouter celui de
l’égalité formelle des sanctions pénales qui signifie qu’il n’est pas tenu compte de la condition
sociale de l’individu pour fixer la peine contrairement à ce qui se fait en matière civile
concernant la pension alimentaire. Ce principe est un corollaire de celui de l’égalité des
individus devant la loi. Ainsi, il ne saurait être tenu compte de la richesse d’un individu pour
aggraver sa peine suite à une escroquerie. Néanmoins, ce principe n’est pas en contradiction
avec la prise en compte, quant au prononcé de la peine, des circonstances de commission de
l’infraction. Ces limites au principe d’égalité s’expliquent par le fait qu’il est tenu compte des
devoirs particuliers (liés à la fonction) de certains individus, de leurs liens (filiation : parricide)
avec la victime ou de leur âge.

199
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE I - LES FORMES DE LA SANCTION

Deux principales formes de sanction pénale peuvent être distinguées : la peine (section I) et la
mesure de sûreté (section II). Ces deux catégories de sanction peuvent simultanément être
prononcées à l’encontre du délinquant. Ce dernier peut aussi faire l’objet de l’une de ces
catégories de sanction uniquement.

SECTION I – LES PEINES

La peine1 peut être considérée comme une réaction punitive contre celui qui enfreint la loi
pénale. A ce titre, elle revêt plusieurs fonctions (§1) et est caractérisée par certains éléments
(§2). A côté des peines, il existe des sanctions extra pénales qui ne seront pas traitées. Ces
sanctions sont, en général, prononcées par l’autorité administrative qui est investie du pouvoir
de réprimer un certain nombre de comportements. C’est l’exemple de l’administration des
douanes et de celle des impôts.

§1- LES FONCTIONS DE LA PEINE

La peine, en tant que châtiment, recouvre essentiellement des fonctions d'intimidation ou de


prévention (1), d'expiation ou de rétribution (2) et d'amendement ou de réadaptation (3).

1 - L'intimidation ou la prévention

224. La peine vise à amener l'individu à ne plus répéter les actes contraires à la loi et à cesser
de troubler l'ordre social2. Les peines subies doivent être proportionnelles à la gravité du
trouble afin que le condamné appréhende l’importance de la perturbation sociale causée et en
soit «dégoûté». La peine peut lui ôter toute tentative ou tout désir de renouvellement ou de
récidive (prévention spéciale) et cela en particulier quand elle est sévère. Elle est, par
conséquent, utile. Certains auteurs estiment, à ce sujet, que la peine a pour seule fonction la
prévention, la fonction d’expiation étant négligeable voire inexistante. C’est pourquoi les uns
ont pu affirmer que, « l’objet des peines n’est pas l’expiation du crime dont il faut laisser la
détermination à l’Être suprême, mais de prévenir les délits de la même espèce…"la prévention
des crimes est la seule fin du châtiment". On ne punit donc pas pour effacer un crime mais pour
transformer un coupable (actuel ou virtuel) »3. Cette position des réformateurs doit être
nuancée car la peine a une fonction expiatoire même si celle-ci est dérisoire.

Cette fonction préventive ou intimidante n’est pas qu’individuelle. Elle est également
collective. La peine infligée à l’individu peut, en effet, avoir une répercussion sur le
comportement des autres citoyens (prévention générale). Elle peut intimider ou dissuader ces
derniers de mener des activités délinquantes. C’est ainsi qu’il a longtemps été soutenu que
1.
468. 1 M. FOUCAULT, "Surveiller et punir", Edition Gallimard, 2004, p. 299 & SS.
469. 2 V. PINATEL, "La prévention générale d’ordre pénal", RSC 1955, p. 554.
470. 3 M. FOUCAULT, "Surveiller et punir", op. cit. p. 150.

200
Précis De Droit Pénal Général

l'exécution de la peine et la souffrance endurée à cette occasion par l'individu sont des facteurs
de découragement pour les éventuels adeptes des actes illégaux (exemplarité de la peine).
Toutefois, les réalités ont montré que la fonction d'intimidation ou de prévention n'est pas
pleinement atteinte. Ainsi, il arrive que des individus commettent des infractions pendant
qu’on est en train d’exécuter un condamné à mort.

2 - L'expiation ou la rétribution

225. L'école néo-classique a longtemps soutenu que la peine a surtout un but de rétribution. En
effet, la peine répond à la nécessité d’une juste sanction proportionnelle au comportement de
l’individu. L'individu a causé un tort à la société et il lui est infligé une peine, une souffrance
en compensation. Il paie pour ses actes contraires à la loi. MERLE et VITU considèrent que la
peine est "une nécessité rigoureuse de l'hygiène sociale"1. La fonction de rétribution de la peine
est fondée sur le passé. La peine a, dans ce cas, un caractère moral puisqu’elle vise l’expiation
du délinquant.

3 - L'amendement ou la réadaptation

226. Le châtiment ou la punition ne constitue pas le seul objet de la peine. Elle doit permettre
une certaine réadaptation du condamné ou sa réintégration (dans la vie normale) en société.
Des actes et des actions sont de plus en plus entrepris au profit de la réadaptation ou de la
réinsertion sociale du condamné (la resocialisation). Il est tenu compte des droits humains.
Celui qui est, par exemple, emprisonné à une longue peine en sort souvent avili. C’est
pourquoi, la plupart des systèmes pénaux entreprennent une politique criminelle dans ce sens.
Les peines sont individualisées : il est tenu compte de la bonne conduite du condamné pendant
sa détention.

Dans quelques systèmes de droit, certaines peines trop rigides et inhumaines ont été
supprimées, notamment la déportation et la peine de mort2. Des activités de réinsertion sociale
sont parfois créées au profit de ceux qui exécutent une peine d'emprisonnement. La fonction
d’amendement ou de réadaptation de la peine est fondée sur l’avenir. La peine dans ces
conditions est comparable à une mesure de sûreté. Elle vise la resocialisation de l’individu. La
rétribution ne suffit pas à amener le délinquant à se détourner du chemin du trouble de l’ordre
social.
Outre les buts qui sont assignés à la peine, celle-ci est dotée de caractères fondamentaux.

§2 – LES PRINCIPAUX CARACTÉRES DE LA PEINE

Une peine revêt, en général, les caractères suivants : afflictif (1), infamant (2), déterminé (3) et
définitif (4).

1.
471. 1 V. MERLE & VITU, "Traité de droit Criminel", t.1, op. cit. n°608.
472. 2 La peine de mort a été supprimée en France en 1981 mais ce n’est pas encore le cas en droit burkinabé.

201
Précis De Droit Pénal Général

1 - Le caractère afflictif

227. Ce caractère signifie que la peine est un châtiment, une souffrance. Elle est
douloureusement ressentie par celui qui la subit. La peine atteint l'individu à plusieurs titres. Il
est atteint dans sa "chair", son image, ses biens ou ses droits. La souffrance est physique et
morale. Même si les châtiments corporels tendent à disparaître dans la plupart des systèmes de
droit, ces châtiments subsistent sous d’autres formes (menotter le condamné, lui enchaîner les
pieds, lui raser les cheveux, par exemple). Certaines pratiques sont, parfois, en contradiction
avec les droits de l’homme. En effet, dans cette hypothèse, la liberté, la réputation et d'autres
droits revenant à l’individu sont touchés, ce qui entraîne une souffrance morale.

Le caractère afflictif découle de la fonction de rétribution de la peine. Certaines législations


énumèrent expressément les peines afflictives et les peines dites infamantes. C'est le cas du
législateur burkinabé qui considère que la peine de mort, l'emprisonnement à vie,
l'emprisonnement à temps sont des peines afflictives et infamantes. (v. art. 8 et 9 du CP)1.

2 - Le caractère infamant

228. La peine est infamante en ce qu’elle désigne le condamné à la réprobation publique. Elle
est, en d'autres termes, déshonorante. Il est d'une certaine façon rejetée par la société. A sa
sortie de la prison par exemple, l'individu ne retrouve plus la même considération que celle qui
lui était réservée avant la condamnation. Certains membres de la société le méprise et sa
nouvelle vie en milieu ouvert porte les séquelles de la condamnation. Ainsi, pour
SALEILLES2, «Ce qui fait le déshonneur, c’est la corruption révélée par le crime et qui fait du
criminel un être hors cadre. La condamnation le déshonore en ce qu’elle révèle officiellement
et judiciairement sa criminalité psychologique, et qu’elle fixe son attitude, et comme sa
position par rapport au groupe social…C’est une sorte d’excommunication sociale… Mais la
peine qui la suit, pourquoi et en quoi déshonorerait-elle ? Le déshonneur est acquis ; et c’est le
contraire qu’il s’agit maintenant de reconquérir… ». C’est pourquoi, la réadaptation est,
parfois, nécessaire pour une bonne réinsertion sociale : l’individu doit pouvoir recouvrer son
honneur perdu. La dégradation civique est la seule peine, de caractère infamant, en droit
burkinabé (art. 10 du CP : « La peine infamante est la dégradation civique »).

3 - Le caractère déterminé

229. Les limites de la peine sont légalement déterminées, ce qui permet de préserver l’individu
de l’arbitraire. Ainsi, la Cour Suprême a cassé et annulé un jugement dépassant la fourchette
légale de peine3. La cour a, implicitement, rappelé certains principes: « …les personnes
reconnues coupables de détournement seront punis d’un emprisonnement de deux mois au

1.
473. 1 Article 8 du CPB : "Les peines en matière criminelle sont afflictives et infamantes ou seulement
infamantes." ; art. 9 : "Les peines afflictives et infamantes sont :
la mort ;
l’emprisonnement à vie ;
l’emprisonnement à temps."
474. 2 Cité par J. LEROY, in "Droit pénal général ", LGDJ, 2003, n°537.
475. 3 Cour Suprême, Chambre judiciaire, formation pénale, 25 août 1967, arrêt n°2/PE/67, Bulletin de la
Cour Suprême de Haute Volta 1er semestre 178, p. 42.

202
Précis De Droit Pénal Général

moins, de deux ans au plus et d’une amende…le tribunal correctionnel de Koudougou en


condamnant DIALLO à trois ans d’emprisonnement du chef de détournement dépassa
d’une année le maximum de la peine qu’il pouvait légalement prononcer, qu’il viola ce
faisant les dispositions des articles 406 et 408 du Code pénal ». Cet arrêt rappelle non
seulement le principe de la légalité de la peine mais aussi, le principe de l’interprétation stricte
de la loi pénale. Implicitement, il est également rappelé au juge le principe de la séparation des
pouvoirs : il n’a pas le pouvoir de créer en matière pénale. Cette décision est une preuve que, si
l’individu n’était pas protégé légalement (grâce à ces différents principes) il serait
effectivement exposé à l’arbitraire.

A la fin du procès, l’individu doit être situé sur les mesures punitives auxquelles il sera soumis
(quantum, nature de la peine, …). Le « prix à payer » pour le tort créé à la société est plus ou
moins proportionné par rapport à l'acte commis par l'individu. Le juge s'appuie sur la peine
prédéterminée légalement pour doser et prononcer la sanction suivant les circonstances. Il
précise la durée ou l'évalue. Toutefois, le caractère déterminé ne constitue pas un obstacle à
l’allègement de la peine (grâce, libération conditionnelle…).

4 - Le caractère définitif

230. Une fois la peine prononcée à l'issue d'une décision juridictionnelle, elle devient définitive
et acquiert l'autorité de la chose jugée quand les voies de recours ne sont plus ouvertes (ou si la
décision est devenue irrévocable). C’est l’application de la règle non bis in idem, selon laquelle
nul ne peut être poursuivi à nouveau pour des faits délictueux identiques qui ont déjà donné
lieu à une condamnation ou à un acquittement. Dans ce cas, il est difficile de la modifier sur le
plan judiciaire dans la mesure où cette autorité interdit la remise en cause du jugement définitif.
Le pourvoi en révision n'est possible qu'en cas d'erreur et sous des conditions très strictes (art.
614 & ss. du CPP).

SECTION II – LES MESURES DE SÛRETÉ

231. La mesure de sûreté1, à l’origine, préconisée par les positivistes est une mesure corrective
individuelle ou une mesure de protection sociale qui ne vise pas la punition du délinquant mais
la prévention des infractions que l'état dangereux de celui-ci rend probable2. Initialement, les
positivistes ont considéré la mesure de sûreté comme un moyen de défense sociale permettant
de neutraliser les individus troublant l’ordre social. Cette neutralisation est obtenue soit par
leur extermination soit par leur soumission à un régime de ségrégation. Cette conception de la
mesure de sûreté a, par la suite, été améliorée, ce qui a donné lieu à sa conception actuelle
(positive pour l’individu).

232. L’état dangereux peut être défini comme, « la très grande probabilité qu’un individu
commette un délit»3. Certains auteurs définissent la mesure de sûreté comme « de simples
précautions de protection sociale destinées à prévenir la récidive d’un délinquant ou à

1.
476. 1 V. PATIN, "La place des mesures de sûreté dans le droit pénal positif moderne", RSC, 1948, p. 415.
477. 2 B. BOULOC, "Pénologie", Dalloz, 1998, n°55.
478. 3 V. R. GASSIN, "Criminologie", Dalloz, 5éme édition, 2003, n°788.

203
Précis De Droit Pénal Général

neutraliser l’état dangereux »1. C'est un remède apporté à son état dangereux. Elle n'a pas une
coloration morale et n'est pas forcément destinée à l'individu qui a déjà commis une infraction.

233. Elle a donc un but (§1) qui diffère sensiblement de celui de la peine. Il en est de même
concernant ses caractères (§2). Mais, les deux sont soumis aux mêmes règles de garantie.

§1 – LE BUT DE LA MESURE DE SÛRETÉ

234. La loi burkinabé (art. 56 du CP) définit et précise le but de la mesure de sûreté en ces
termes : « Les mesures de sûreté sont des mesures individuelles cœrcitives imposées à des
individus dangereux pour l’ordre social afin de prévenir les infractions que leur état rend
probables ».
« Sont des mesures de sûreté :
- l’internement des aliénés ;
- le traitement des personnes adonnées aux stupéfiants ;
- le traitement des alcooliques dangereux ;
- les mesures concernant les vagabonds ;
- la liberté surveillée des mineurs. »

235. Cette mesure vise un but de prévention ou de sécurité. Elle est surtout orientée vers
l’empêchement de nuire2. Sa fonction n’est pas la répression. A la différence de la peine, il ne
s’agit pas d’un châtiment mais d’une mesure de réadaptation, de traitement. Ce sont des
mesures de protection sociale susceptibles de prévenir la récidive ou d’anéantir l’état
dangereux de l’individu. Elle est notamment destinée à lutter contre son état dangereux. En
outre, le recours à la mesure de sûreté ne suppose pas forcément une situation d’infraction
consommée ou tentée. La mesure de sûreté peut intervenir ante delictum (avant la
consommation de l’infraction). La mesure de sûreté dépasse parfois le cadre personnel ou
individuel en tant que sanction car, elle peut atteindre un groupe de personnes. C’est le cas de
la fermeture d’un établissement commercial : l’ensemble du personnel est touché par la
mesure. Elle s’intéresse plus à la dangerosité de l’individu qu’à sa culpabilité. Cette prévention
peut se faire essentiellement de deux façons : la prévention par le traitement et la réadaptation
(1) et la prévention par l'élimination (neutralisation) et la surveillance (2).

1 - La prévention par le traitement et la réadaptation

236. La mesure de sûreté est comparable à un vaccin (dans le domaine de la médecine) dont le
but poursuivi est essentiellement la prévention. Elle vise à empêcher l’installation (à nouveau)
ou "l’incrustation" des «germes du crime » dans le corps de l’individu. A la différence de la

1.
479. 1 V. MERLE & VITU, "Traité de droit Criminel", T.1, op. cit. n°656.
480. 2 V Cass. crim. fr., 21 décembre 1987, Bull. crim. 1987, n°473. Cette décision concerne la suspension
ou le retrait d’un permis de conduire. La Cour a estimé que la mesure de sûreté a pour finalité la défense
de la société pour l’avenir. A ce titre, la mesure de sûreté ne pourrait être remise en cause suite à
l’intervention d’une loi d’amnistie, étant donné que l’individu reste dangereux.

204
Précis De Droit Pénal Général

peine, elle ne vise pas l’expiation ou la rétribution mais la diminution de la criminalité ou la


cessation des activités criminelles. La souffrance, l’humiliation de l’individu sont donc
incompatibles avec son objectif. La mesure de sûreté peut permettre de protéger la société
contre l'individu qui ne peut être atteint par la répression classique. C'est l'exemple des
personnes parfaitement ou partiellement irresponsables, notamment certains mineurs. Des
mesures de protection ou d’assistance peuvent, par exemple, être décidées par le juge
spécialisé. La mesure de sûreté agit surtout sur le comportement dangereux de l’individu. Le
fondement de la mesure de sûreté n’est pas donc pas la culpabilité de l’agent mais son état de
dangerosité.

237. La prévention se fait par l'application au délinquant de mesures adéquates pouvant


permettre de corriger efficacement le délinquant et lui assurer une meilleure réadaptation
sociale. Par le traitement préventif, plusieurs causes d'inadaptation, notamment physiques,
psychologiques, sociales peuvent être écartées. Le traitement médical des alcooliques
chroniques et celui des toxicomanes (la désintoxication) sont non seulement des exemples de
mesures permettant la réadaptation mais aussi des exemples de mesures pouvant conduire la
neutralisation de l'état dangereux. L’exemple de l’assistance tutélaire peut aussi être cité.

2 - La prévention par l'élimination (neutralisation) et la surveillance

238. La neutralisation consiste à amener l’individu à ne plus commettre d’infraction en


agissant sur sa liberté ou sur ses droits (privation de liberté, restriction de liberté). Ici,
l’emprisonnement est le moyen particulièrement visé. Les positivistes préconisaient cette
méthode de prévention dans l'objectif d'empêcher l'individu de nuire. Ils considèrent les
mesures de sûreté comme des mesures de défense sociale.

La neutralisation de l'état dangereux apparaît comme une mesure d'éradication de l'état


dangereux. Eliminer la souche du mal en est un remède efficace. Il faut anéantir les risques de
répétition des actes criminels. L'internement, la lobotomie1 (section de fibres nerveuses à
l'intérieur d'un lobe du cerveau), la castration (pour les délinquants sexuels), l'exclusion de
certaines professions, la fermeture d'entreprise, l'expulsion, l'interdiction de séjour constituent
des exemples de mesures d'élimination et de surveillance. Dans le cas des auteurs de
mutilations sexuelles féminines, la formation des auteurs à un métier (tissage de tissus
traditionnels, jardinage, conservation ou séchage des fruits et légumes) peut être un remède
(mesure) efficace. En effet, certains commettent ces infractions et récidivent pour des raisons
économiques ou financières. Il en est de même pour certains mineurs tels que ceux qui
commettent des « petits vols » dans les lieux publics (marchés, espace ludique) pour survivre.
Une formation et un travail peuvent ramener ces enfants sur le bon chemin.

1.
481. 1 La lobotomie est "incision chirurgicale d’un lobe (d’une portion) d’un viscère…Le plus souvent, le
terme lobotomie s’applique à l’opération chirurgicale consistant, à sectionner, dans l’encéphale, une
partie des fibres nerveuses reliant le lobe préfrontal (siège de l’idéation – formation et enchaînement des
idées) au reste du cerveau. Cette intervention se pratique sur des sujets atteints d’anxiété paroxystique
chronique, d’obsessions graves ou sur les malades en état de douleur morale permanente ayant tenté
plusieurs fois de se suicider… Pour ses défenseurs, son but est autant la suppression d’un symptôme
gênant, rebelle à tout autre traitement, que la reconstruction ultérieure de la personnalité du sujet à
l’aide d’une psychothérapie". Cette définition est tirée du dictionnaire LAROUSSE médical, édition
2000°.

205
Précis De Droit Pénal Général

239. En somme, il est fait recours notamment à des moyens éducatifs (rééducation de
l’individu), curatifs (traitement médical des aliénés…), à des mesures disjonctives (l’individu
est, par exemple, éloigné de la "zone criminogène" : interdiction de séjour) et à des mesures de
surveillance (cas de l’obligation d’informer le juge de tout déplacement).

§2 - LES CARACTÉRES DE LA MESURE DE SÛRETÉ

« L’univers de la mesure de sûreté n’est… pas un univers pénitentiaire. C’est un univers


prophylactique où les châtiments n’ont pas leur place »1. La mesure de sûreté est sans
coloration morale (1). Sa durée est indéterminée (2) et on peut la réviser (3). Ces caractères ne
constituent pas toutefois un obstacle à l'existence de liens entre la mesure de sûreté et la peine.

1 - Absence de coloration morale

240. La mesure de sûreté n'est pas appliquée au délinquant dans le but de lui infliger une
souffrance au sens strict. Elle n’a pas une finalité répressive. L'état dangereux de l'individu
demeure la préoccupation essentielle. La réprobation de l'opinion publique ou le blâme social
lui est évité autant que possible.

241. Certes, il est difficile d'éviter une certaine souffrance à l'individu mais, l'accent est mis sur
le régime de la mesure de telle sorte qu'elle lui soit utile et profitable. L’individu, soumis à un
traitement médical, souffre des désagréments occasionnés par les soins. Cette souffrance
inhérente à la thérapeutique reste nettement différente de la souffrance liée à l’enferment
pénitentiaire ou au travail pénal (corvée…). La mesure doit atténuer le plus possible, les
situations de gêne ou de punition. C’est pourquoi le recours notamment à l’éducation
(rééducation…), au traitement curatif (désintoxication, soins…), à des mesures de surveillance
(assistance, liberté surveillée chez les mineurs) et à la formation professionnelle s’avère
intéressant.

2 - Durée indéterminée

242. A la différence de la peine, il est mal aisé de prédéterminer le temps nécessaire à


l'efficacité de la mesure. La peine est, en principe, fixée une fois pour toutes alors que la
mesure de sûreté ne l’est pas. La durée est, en principe, adaptée à l’état de l’individu. Elle
dépend de son état dangereux, de l'évolution de cet état au cours de l'exécution de la mesure. Il
est, par exemple, difficile de déterminer la durée d'une cure de désintoxication ou d'un
internement. La durée d’exécution de la mesure de sûreté est, en général, fixée par le juge. En
cas de nécessité, il peut prolonger cette durée.

243. Toutefois, la loi peut prédéterminer un plafond ou une fourchette de temps. C'est
l'exemple, de certaines mesures éducatives pour lesquelles la loi interdit son application au delà
de l'âge de la majorité du mineur. C’est ainsi qu’aux termes de l’article 14 de la loi 19-61 du 9
mai 1961 relative à l’enfance délinquante2, « si la prévention de crime ou de délit est établie à
l’encontre d’un mineur de moins de treize ans, le tribunal prononcera une des mesures
1.
482. 1 R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel", t.1, op. cit., n°656.
483. 2 V. JO RHV du 27 mai 1961, p. 495.

206
Précis De Droit Pénal Général

suivantes : …placement, soit chez une personne digne de confiance, soit dans une institution
charitable pendant une période qui ne pourra excéder l’époque où le mineur atteindra ses vingt
ans ». Il s’agit, dans ce cas, d’un plafonnement de la durée des mesures. Lorsqu’il s’agit de
mesures de sûreté considérées comme des peines accessoires ou complémentaires (interdiction
de séjour, interdiction d’exercer une profession…) la durée est légalement déterminée.

3 – Possibilité de Révision

244. La mesure de sûreté est révisable, à tout moment en fonction de l'évolution de l'état
dangereux de l'individu (disparition de l’état dangereux, effet concluant du traitement prescrit).
La mesure initiale peut être substituée par une nouvelle mesure. Le juge peut, en fonction des
progrès réalisés par le bénéficiaire des mesures, mettre fin à l’exécution de celles-ci ou
apporter des changements aux mesures prescrites (tout en prolongeant la durée de son
exécution).

245. En somme, la juridiction, auteur de la mesure, surveille son exécution et peut intervenir à
tout moment pour procéder à une modification de la mesure ou la relever. Ainsi, l’article 17 de
la loi 19-61 du 9 mai 1961 relative à l’enfance délinquante prévoit que, « …en cas de mauvaise
conduite ou de péril d’un mineur en liberté surveillée, le président, toutes les fois qu’il le juge
nécessaire, peut soit d’office, soit à la requête du ministère public, ordonner de citer le mineur
et les personnes chargées de sa garde à une prochaine audience pour qu’il soit statué à
nouveau.»

SECTION III - LES RAPPORTS ENTRE LA MESURE DE SURETÉ ET


LA PEINE

On peut rencontrer dans quelques systèmes de droit une option moniste ou unitaire par rapport
au type de sanction applicable : soit c’est la peine qui a été retenue comme type de sanction,
soit c’est la mesure de sûreté (mais pas les deux à la fois). Ainsi, l’ex-URSS n’appliquait que la
mesure de sûreté jusqu’en 1958. La plupart des systèmes pénaux (Burkina Faso, France, Côte-
d’Ivoire, Togo, Sénégal, France, Allemagne, Suisse, Belgique, Italie…) utilisent les deux types
(technique de la "voie double"). Cette option consiste à faire parallèlement usage des peines et
des mesures de sûreté (§1), lesquelles présentent des garanties communes (§2).

§1 - L’APPLICATION DES DEUX CATÉGORIES DE SANCTION

246. Cette voie permet de prononcer cumulativement les deux catégories de sanction à
l’encontre d’un même coupable. C’est ainsi qu’une peine d’emprisonnement et le retrait du
permis de conduire peuvent être prononcés à l’encontre d’un individu coupable d’un homicide
involontaire. Ce système permet également la coexistence des deux types de sanction qui
conduit à un dualisme. Ainsi, cette dualité engendre plusieurs possibilités dans l'application des
sanctions. En effet, quelques rares systèmes de droit tendent à supprimer les peines et à prévoir
un seul type de sanction, en l'occurrence la mesure de sûreté. Certains s'attachent plutôt à la
fusion des deux tandis que d'autres préfèrent faire usage des deux types de sanction.

207
Précis De Droit Pénal Général

Deux principales thèses s'affrontent à propos de ces différentes possibilités : la thèse unitaire et
la thèse dualiste

a - La thèse unitaire (thèse de l’ unification des peines et des mesures de sûreté)

247. La sanction unitaire1 consiste à fusionner la peine et la mesure de sûreté, ce qui permet
d’avoir une seule qualification concernant la sanction2. Les partisans de cette doctrine la
soutiennent en arguant du fait que l'application cumulative pose des difficultés d'ordre pratique.
Parfois, il est impossible d'exécuter une peine et une mesure de sûreté simultanément. Ils
soulèvent également le problème d'organisation du régime de privation de liberté qui diffère du
régime des mesures de sûreté.

Des partisans de cette thèse pensent que certaines fonctions de la peine ne sont pas, forcement,
inhérentes à la peine. Prenant l’exemple de la fonction d’intimidation, ils estiment que
l’internement forcé, dans un établissement de soins, a un caractère légèrement intimidant voire
afflictif (afflictif à cause de la privation de la liberté d’aller et venir). Ils estiment aussi que la
privation de liberté, dans le cas de l’internement, entraîne une certaine humiliation de l’interné.
Cette doctrine estime qu'il faut enlever à la peine son caractère d'intimidation ou de rétribution.
Pour elle, l'unicité de la sanction permet d'éviter les problèmes de qualification (peine, mesures
de sûreté).

b - La thèse dualiste (thèse de la "double voie")

248. Les partisans de cette thèse (dite thèse de la "double voie") pensent que la peine et la
mesure de sûreté ont des buts et des fondements différents. Chaque type de sanction a son
utilité. Ils préconisent l’usage parallèle des deux. Ce double usage a l’avantage d’assurer une
meilleure politique criminelle.

L'option du système Burkinabé se rapproche de la thèse dualiste. En tout état de cause, les deux
formes de sanction ont des garanties communes3.

§2 – LES GARANTIES COMMUNES Á LA MESURE DE SÛRETÉ ET Á


LA PEINE

Les deux formes de sanction sont soumises au principe de légalité des peines (1). Leur
application doit tenir compte de la dignité humaine (2) et l'intervention de l'autorité judiciaire
est nécessaire (3).

1.
484. 1 JIMENEZ DE ASUA, "La meure de sûreté, sa nature et ses rapports avec la peine, RSC 1954, p. 21."
485. 2 V. Actes du VIème Congrès International de droit pénal, Rome, 1953, Edit. Giuffré, 1957, p.309 (cité
par MERLE & VITU).
486. 3 V. VERIN, "Les rapports entre la peine et la mesure de sûreté", RSC 1963, p. 529.

208
Précis De Droit Pénal Général

1 - Respect de La légalité

249. La peine et la mesure de sûreté doivent être prévues par la loi. Le juge ne peut appliquer
que les sanctions pénales prévues légalement par rapport à l'infraction commise. Mais,
concernant la mesure de sûreté, une certaine souplesse est admise quant à la durée. Les
sanctions pénales sont prononcées en se référant aux prescriptions légales prévues et non aux
circonstances de l’affaire. Ce recours permet d’éviter des sanctions arbitraires ou d’écarter le
laxisme du juge. Certes, la mesure de sûreté peut être prononcée sans qu’il y ait consommation
d’une infraction (cas d’une cure de désintoxication avant toute commission), mais le prononcé
des deux mesures nécessite souvent l’existence préalable d’une infraction.

2 - Respect de La dignité humaine

250. Un certain nombre de conventions internationales et communautaires, notamment la


Déclaration universelle des droits de l'homme, la Charte des Nations Unies, la charte Africaine
des droits de l’homme et des peuples, prévoient le respect de la valeur, de la personnalité et de
la dignité humaine même en matière répressive. Les sanctions doivent être appliquées tout en
respectant l’inviolabilité de la personne humaine et la dignité humaine. Certaines conventions
interdisent les tortures, les traitements cruels, inhumains ou dégradants lors de l'exécution d'une
sanction pénale. La convention de New York du 10 décembre 1984 peut être citée à ce titre.

3 - Nécessité d'intervention de l'autorité judiciaire

251. L'intervention du juge à tous les stades de l'exécution des sanctions constitue une garantie
de la liberté individuelle. Dans tous les cas, les sanctions pénales sont décidées par le juge. Le
juge, après avoir reconnu la culpabilité de l’individu détermine, en effet, le type de sanction à
lui infliger (entend-t-il le condamner à la peine d’emprisonnement, d’amende… ?). En général,
toutes les décisions importantes y afférentes reviennent au juge surtout en matière de peine.
Par ailleurs, les sanctions pénales peuvent faire l'objet de classifications.

209
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE- II- LES CLASSIFICATIONS DES SANCTIONS


PÉNALES

Les classifications des sanctions pénales varient suivant les situations prises en compte. C'est
ainsi que les peines1 (section I) et les mesures de sûreté (section II) peuvent être classées
suivant divers critères.

SECTION I – LES PEINES

La classification des peines peut se faire en se fondant sur leur statut (§1) ou sur la nature de la
privation (§2).

§1– CLASSIFICATION FONDÉE SUR LE STATUT DES PEINES

Deux séries de sanctions peuvent être retenues suivant ce critère : les peines criminelles,
correctionnelles, contraventionnelles (1) et les peines principales, accessoires, complémentaires
(2). Ces peines de droit commun sont, en principe, applicables aux condamnés de statut
militaire en plus des peines militaires qui peuvent leur être appliquées. Cette précision est faite
par l’article 154 du Code de justice militaire : « Sans préjudice de la répression pénale des faits
qui constituent des crimes ou délits de droit commun et, notamment de ceux qui sont contraires
aux lois et coutumes de la guerre et aux conventions internationales, sont punies conformément
aux dispositions du présent livre les infractions militaires ci-après ».

1 – Les peines criminelles, correctionnelles et contraventionnelles

Ces trois grandes catégories font appellent à un classement suivant la gravité. On peut les
hiérarchiser en partant du plus grave au moins grave : les peines criminelles (a), les peines
correctionnelles (b), les peines de simple police (c). C’est l’échelle des peines.

a – Les peines criminelles

252. Elles constituent les peines les plus graves (v. art. 15 à 34). Il s’agit de peines privatives
de liberté. Le législateur burkinabé prévoit trois types de peines criminelles de droit commun
(art. 9 du CP) : la mort (qui s'exécute par voie de fusillade), l'emprisonnement à vie et enfin
l'emprisonnement à temps dont la durée doit être de cinq (5) ans au moins et de vingt (20) ans
au plus (art. 22 du CP). Ces trois catégories de peines ont un caractère afflictif et infamant et
sont privatives de liberté. Elles peuvent être assorties d’une amende. Ces peines sont de
caractère principal et n’excluent pas l’adjonction d’autres peines, notamment des peines
complémentaires (v. art 39 & SS du CP). En outre, la peine accessoire s’impose dans certains
cas. C’est l’exemple de l’article 25, al. 1 du CP qui prescrit : « la condamnation à une peine

1.
487. 1 M. ANCEL, "La peine dans le droit classique et selon les doctrines de la défense sociale", RSC 1973,
p. 190.

210
Précis De Droit Pénal Général

criminelle emportera la dégradation civique»1. Toutes ces peines criminelles s’appliquent à une
personne physique.

Les condamnations à la peine de mort et à la réclusion criminelle ne sont pas envisageables


comme sanctions pénales à l’encontre d’une personne morale (même si elle est déclarée
coupable) qui peut, dans ces conditions, être perçue comme une « fiction juridique». La peine
d’amende reste la seule sanction principale qui peut lui être appliquée.

253. La législation pénale burkinabé ne prévoit pas la dissolution comme peine. Mais, il sied de
s’interroger sur la possibilité pour le juge pénal de l’envisager à l’encontre de la personne
morale à titre de peine criminelle principale. La dissolution est connue du droit civil et du
droit commercial2. Sanction pénale prévue en droit français, la dissolution se présente comme
une peine de mort propre à la personne morale. Elle est encourue, en matière pénale (en droit
français) lorsque la personne morale a été instituée pour commettre l’infraction en cause ou
quand elle a été détournée de son objet à cette fin (voir art. 131-39 du CPF).

Il convient de rappeler qu’en matière criminelle, la loi (burkinabé) prévoit de façon rare les
peines d’amende. A ce niveau, il y a des insuffisances législatives car le législateur n’offre pas
suffisamment de moyens juridiques nécessaires à la sanction de la personne morale. Il s’est
contenté de prescrire qu’une personne morale peut être auteur ou coauteur d’une infraction. Les
règles de responsabilité pénale (prévues dans le code pénal) relatives à cette catégorie de
personne restent laconiques. Seul l’alinéa 2 de l’article 63 du CP fait expressément allusion à la
personne morale en ces termes : « Est aussi auteur ou coauteur toute personne morale à
objet civil, commercial, industriel ou financier au nom et dans l’intérêt de laquelle des faits
d’exécution ou d’abstention constitutifs d’une infraction ont été accomplis par la volonté
délibérée de ses organes ». On en déduit que la mission du législateur est restée inachevée en
ce qui concerne la responsabilité pénale de la personne morale. Or, vu la particularité de ce
type de « délinquant », il est impératif de mettre en place des sanctions spécifiques et à la

1.
488. 1 La définition de la dégradation est définie à l’article 26 du CPB aux termes duquel, "La dégradation
civique consiste :
1) dans la destitution et l’exclusion des condamnés de toutes fonctions, emplois ou offices publics ;
2) dans la privation du droit de vote, d’élection, d’éligibilité, et en général de tous les droits civiques et
politiques, et du droit de ne porter aucune décoration ;
3) dans l’incapacité d’être juré expert, d’être employé comme témoin dans les actes, et de déposer en
justice autrement que pour y donner de simples renseignements ;
4) dans l’incapacité de faire partie d’aucun conseil de famille, et d’être tuteur, curateur, subrogé tuteur
ou conseil judiciaire, si ce n’est de ses propres enfants, et sur l’avis conforme de la famille ;
5) dans la privation du droit de port d’armes, de servir dans les armées nationales, de tenir école, ou
enseigner et d’être employé dans aucun établissement d’instruction, à titre de professeur, maître ou de
surveillant".
489. 2 L’article 201 de l’Acte uniforme de l’OHADA relatif aux sociétés commerciales et au groupement
d’intérêt économique énonce les causes de dissolution d’une société : "La société prend fin :
1°) par l’expiration du temps pour lequel elle a été constituée ;
2°) par la réalisation ou l’extinction de son objet ;
3°) par l’annulation du contrat de société ;
4°) par décision des associés aux conditions prévues pour modifier les statuts ;
5°) par la dissolution anticipée prononcée par la juridiction compétente, à la demande d’un associé pour
justes motifs, notamment en cas d’inexécution de ses obligations par un associé ou la mésentente entre
associés empêchant le fonctionnement normal de la société ;
6°) par l’effet d’un jugement ordonnant la liquidation des biens de la société ;
7°) pour toute autre cause prévue par les statuts".

211
Précis De Droit Pénal Général

mesure de la gravité des actes qu’il est susceptible de perpétrer. La personne morale,
lorsqu’elle a la qualité de délinquant demeure aussi dangereuse qu’une association de
malfaiteurs. Elle constitue d’une manière générale une « solide coquille » à l’intérieur de
laquelle germent et se développent en toute quiétude les actes illicites les plus graves en
matière économique. Partant du fait que le délinquant, personne morale, a la capacité de « tuer
l’économie nationale », le législateur devrait continuer son œuvre afin de prévoir des sanctions
adéquates et spécifiques aux personnes morales. Mais dans l’attente, d’un éventuel
complément législatif, le juge burkinabé peut par combinaison de la législation pénale et de la
législation commerciale voire civile ordonner la liquidation de la société (ce qui constitue
implicitement une dissolution). Cette sanction est possible dans le cas de l’exploitation d’une
activité illicite et dans le cas de la constitution frauduleuse d’une société (objet illicite : trafic
de stupéfiant, institution d’une "société écran" pour exploiter la prostitution d’autrui…).

Les peines criminelles sont, par rapport au droit français, respectivement équivalentes à la
peine capitale supprimée, à la réclusion criminelle à perpétuité et à la réclusion criminelle à
temps. Lorsqu’il s’agit de peines criminelles politiques, en droit français, c’est l’expression
"détention criminelle" qui est consacrée à la place de l’expression "réclusion criminelles"(droit
commun).

b – Les peines correctionnelles

254. Elles sont destinées à la correction du délinquant (v. art. 35 à 38 du CP). Trois palettes de
peines sous-tendent essentiellement cette catégorie en droit burkinabé (art. 11 du CP):
l'emprisonnement à temps dont la durée se situe entre onze (11) jours d'emprisonnement au
moins et cinq (5) ans au maximum (art. 35 du CP); l'interdiction à temps de certains droits
civiques, civils ou de famille et l'amende.

Enfin la troisième catégorie de sanction, le travail d’intérêt général (TIG), a une existence
récente par rapport aux trois autres1. Ainsi, aux termes de l’article 35, al.4, « Le travail d’intérêt
général est une peine que la juridiction correctionnelle peut prononcer à titre principal
lorsqu’un délit est puni d’une peine d’emprisonnement2. Il consiste à faire exécuter par le
condamné consentant, pour une durée prévue par la loi, un travail d’intérêt général non
rémunéré au profit d’une personne morale de droit public ou d’une association sans but lucratif
reconnue d’utilité publique ». La peine de travail d’intérêt général apparaît donc comme une
peine alternative ou de remplacement qui peut être prononcée en lieu et place d’une peine
d’emprisonnement. Elle peut être qualifiée de « peine négociée » ou consentie dans la mesure
où elle n’est prononcée par le juge que si le délinquant consent à la subir3. La nécessité du
consentement peut s’expliquer par les exigences imposées par des conventions internationales
relatives aux droits de l’homme et l’abolition du travail forcé. Ce travail compense ou répare le
tort créé à la société et tend à rétablir l’équilibre rompu. Son application se fait sous le respect
de la réglementation du travail (travail des femmes enceintes, emploi des mineurs, travail de

1.
490. 1 Cette peine a été instituée par la loi 7-2004 AN du 6 avril 2004 relative au TIG, promulguée par le
décret 2004-201 du 17 mai 2004, JOBF du 3 juin 2004, p. 736, ; voir aussi les articles 11 et 35 du CP
modifiés par cette loi.
491. 2 V. Cass. crim. français, 15 décembre 1992, Bull. Crim. 1992, n°417.
492. 3 V. M. DANTI-JUAN, "Le consentement et la sanction", in Mélanges P. COUVRAT, PUF, 2001,
p.367 & SS. ; Ph. SALVAGE, " Le consentement en droit pénal", RSC, 1991, p. 699.

212
Précis De Droit Pénal Général

nuit, sécurité, hygiène…)1. Cette peine n’est pas applicable au mineur de moins de 16 ans. En
principe, elle n’est pas non plus applicable à la personne morale.

255. En dehors des peines principales, d’autres sanctions pénales peuvent être prononcées sous
certaines conditions. Ces sanctions concernent notamment l’interdiction partielle ou totale
d’exercer des droits civiques, civils ou de famille (art. 37 du CP). Ces interdictions peuvent
porter sur les droits de vote, d’élection, d’exercice d’une fonction publique, de port d’arme,
d’être curateur ou tuteur. Il s’agit en général de peines restrictives de droits. Mais leur
application, en matière correctionnelle, est subordonnée à l’existence d’une loi le permettant ou
l’autorisant (art. 38 du CP).

256. En outre, quelques sanctions peuvent être encourues indifféremment en cas de délit ou de
crime (art.39 à 55). Elles sont communes aux situations infractionnelles (délit et crime).
L’interdiction de séjour, de territoire, l’interdiction d’exercer une fonction publique ou une
activité professionnelle ou sociale, l’interdiction de participer aux marchés publics, la
confiscation, l’affichage de la décision (de justice) constituent les principales sanctions
communes. Une dérogation est prévue pour l’interdiction d’exercer une fonction publique ou
une activité professionnelle ou sociale. En effet, en cas d’exercice de mandat électif ou de
responsabilité syndicale ou encore en cas de délit de presse cette interdiction n’est pas
applicable (art. 39, al.2 du CP).

c – Les peines contraventionnelles

257. En matière contraventionnelle, la peine principale est d’ordre pécuniaire. En effet aux
termes de l’article 12 du CP, « La peine en matière contraventionnelle est l’amende ». Il en
ressort qu’il n’existe pas de peine d’emprisonnement.

Il ressort du décret du 28 février 1997 relative à la définition et à la sanction des


contraventions2 que celles-ci sont regroupées en quatre classes (art.2 du décret). Cette
classification se fonde sur la gravité de l’infraction (plus elle est grave, plus l’amende est
élevée) :
- les contraventions punies d’une amende de 1000 à 5000 FCFA appartiennent à la première
classe ;
- celles qui sont punies d’une amende de 5001 à 10 000 FCFA appartiennent à la deuxième
classe ;
- celles qui sont punies d’une amende de 10 001 à 15001 FCFA relèvent de la troisième
classe ;
- celles qui sont punies d’une amende de 15001 à 50 000 FCFA appartiennent à la quatrième
classe.
L’amende peut être assortie d’une autre sanction telle que la confiscation (sanction privative
de droit).

1.
493. 1 V. arrêté 5254-IGTLS-AOF du 19 juillet 1954 relatif au travail des femmes, J.O. AOF. du 31 juillet
1954, p. 1337 ; arrêté 539 ITLS.HV du 29 juillet 1954 relatif au travail des enfants, JOHV du 19 août
1954, p. 349 .
494. 2 V décret 97-94 du 28 février 1997, JOBF du 27 mars 1997, p. 721.

213
Précis De Droit Pénal Général

2 - Les peines principales, alternatives, accessoires et complémentaires

Un individu peut se voir appliquer plusieurs variantes de peines en cas de condamnation : la


peine principale (a), la peine alternative (b), la peine accessoire (c) et la peine complémentaire
(d). Cette classification est fondée sur les rapports existants entre les trois variantes. Les deux
dernières sont qualifiées de peines secondaires1. Elles s’ajoutent aux peines principales.

a – Les peines principales

258. Les peines principales constituent la sanction essentielle, c'est l'instrument fondamental de
la répression. Elle sert de référence pour qualifier l’infraction (actes contraventionnel, délictuel,
criminel). Elle permet, également, de classer les infractions suivant leur gravité de
(contravention, délit, crime). Elles doivent être expressément prononcées par le juge et peuvent
être prononcées seules (sans adjonction d’une peine complémentaire par exemple).

259. La peine de mort, l’emprisonnement à vie, et l’emprisonnement à temps constituent


les peines principales en matière criminelle (art. 8 & 9 du CP). Certes, le code pénal ne
prévoit pas expressément l’amende mais il convient de l’ajouter dans la mesure où d’autres lois
pénales la prévoit. Il s’agit notamment du code des drogues. C’est l’exemple de l’article 49 de
ce code qui prescrit que, « Sont punis d’un emprisonnement de 10 à 20 ans et d’une amende de
10 000 000 à 50000 000 de francs ou de l’une de ces deux peines seulement, ceux qui de
quelque façon que ce soit et par tous procédés, font consommer des drogues à haut risque à une
personne à son insu ». Ces peines concernent les personnes physiques. L’amende demeure la
peine principale pour les personnes morales.

260. En matière correctionnelle, les peines principales sont constituées de l’emprisonnement,


de l’amende et du travail d’intérêt général (TIG) pour les personnes physiques. En rappel, la
peine de travail d’intérêt général apparaît à la fois comme une peine principale et une peine
alternative car elle peut être prononcée à titre principal et peut remplacer une peine principale.
La privation des droits peut constituer une peine principale. L’article 108 du Code électoral en
constitue une illustration : « Nonobstant les dispositions du code pénal en matière de
diffamation et d’injure, quiconque aura contrevenu aux dispositions de l’article 71 du présent
code sera passible de deux ou de l’ensemble des peines ci-après :
- un emprisonnement de un mois à un an ;
- une amende de trois cent mille (300 000) à un million (1 000 000 ) ;
- une privation des droits civiques pendant deux ans au moins et cinq ans au plus
La personne morale s’expose à l’amende à titre de peine principale. Toutefois, la fermeture
temporaire ou définitive d’un établissement peut, dans certains cas, être considérée comme
une peine principale »2.

1.
495. 1 J-H. ROBERT, "l’instabilité des qualifications jurisprudentielles et doctrinales des peines
secondaires", in Mélanges en l’honneur d’André VITU, Edit. Cujas, 1989, p. 241.
496. 2 Article 71 du Code électoral : Il est formellement interdit à tout candidat ou militant des partis ou
formations politiques d’user de diffamation, d’injures ou de tout acte de provocation pouvant entacher
la moralité et la sérénité de la campagne électorale".

214
Précis De Droit Pénal Général

En matière contraventionnelle, l’amende est la peine principale aussi bien pour les personnes
physiques que pour les personnes morales.

b – Les peines alternatives

261. Elles désignent les peines qui peuvent remplacer les peines principales. Le juge peut donc
prononcer une peine alternative en lieu et place d’une ou de plusieurs peines principales. Elles
ne sont pas, en général, énumérées par la loi. La peine alternative acquiert la qualité de « peine
principale », une fois qu’elle est prononcée en lieu et place de la peine principale initiale qui est
souvent l’emprisonnement1. Elle est également qualifiée de peine de « substitution ». Ces
peines interviennent surtout en matière correctionnelle. Ainsi, le TIG peut être prononcé à la
place de la peine d’emprisonnement : « Le travail d’intérêt général est une peine que la
juridiction correctionnelle peut prononcer à titre principal lorsqu’un délit est puni d’une peine
d’emprisonnement… » (art.35, al. 3 du CP). La loi ne permet pas son cumul avec d’autres
peines principales. En effet, l’article 35, alinéa 5 du CP est explicite à ce sujet : «Il ne peut être
prononcé cumulativement avec une des peines prévues à l’article 11 »2. Ces dispositions sous-
entendent que le TIG peut faire office de sanction de remplacement3.

c– Les peines accessoires

262. Elles appartiennent au groupe des peines dites secondaires tout comme les peines
complémentaires4. Ce sont des peines qui résultent d’une condamnation. Elles sont encourues
de plein droit. Les peines accessoires sont des déchéances ou des incapacités attachées à la
peine principale. Il en résulte que, si la peine principale à laquelle la peine accessoire est
rattachée n’est pas prononcée, elle ne peut pas s’appliquer à la personne condamnée (à cause de
la dépendance). La peine accessoire est, donc, étroitement liée à la condamnation et s’applique
automatiquement dès que celle-ci est prononcée. L’interdiction d'exercice d'une activité
professionnelle (commerciale) en est une illustration. Ce type de peine permet d'éloigner
l'individu de certaines situations ou activités susceptibles de le conduire à la commission d'une
infraction. La dégradation civique, en cas de commission d’infraction criminelle, est également
un exemple de peine accessoire (art. 25 du CP). L’interdiction d’accomplir des opérations
bancaires peut également être citée.

263. La peine accessoire renforce le régime de la peine principale. Elle s'attache à une peine
principale si bien que lorsque cette dernière est prononcée, elle s'applique, en principe,

1.
497. 1 V. J. PRADEL, " Les nouvelles alternatives à l’emprisonnement créées par la loi n°83-466 du 10 juin
1984", D. 1984, Chr., p. 37 & SS.
498. 2 Article 11 du CP : "Les peines en matière correctionnelle sont :
l’emprisonnement à temps ;
l’interdiction à temps de certains droits civiques, civils ou de famille ;
l’amende ;
le travail d’intérêt général. "
499. 3 V. P. COUVRAT, " Les trois visages du travail d’intérêt général", RSC ; 1989, p. 158 & SS.
500. 4 V. Jacques-Henri ROBERT, "L’instabilité des qualifications jurisprudentielles et doctrinales des
peines secondaires", in Mélanges en l’honneur du Professeur Jean LARGUIER, Presses Universitaires
de Grenoble (PUG), 1993, p. 241

215
Précis De Droit Pénal Général

automatiquement (le juge n'a pas besoin de la prononcer expressément)1. Ainsi l'exemple d'un
individu condamné à une peine d'emprisonnement à vie est à ce sujet illustratif. En effet, toute
personne condamnée à une peine afflictive perpétuelle est automatiquement frappée
d'incapacité de donner et de recevoir, notamment des biens (art. 31 du CP).
En revanche, concernant les peines complémentaires, il en est autrement.

d – Les peines complémentaires

264. Les peines complémentaires sont des peines qui ne frappent le condamné que dans la
mesure où elles ont été expressément visées dans la condamnation. Le juge peut recourir à
ces peines dans certains cas, soit à titre de complément de la peine principale, soit en lieu et
place de celle-ci. Il doit dans cette hypothèse les énoncer expressément. Il importe de noter que
la peine complémentaire peut être facultative ou obligatoire suivant ce que prévoit la loi.
L’application de la peine complémentaire facultative dépend du juge (il peut choisir d’écarter
cette peine). Mais, quand elle est de caractère obligatoire, il a le devoir de la prononcer à
l’encontre du condamné. Ainsi, en cas de fabrication et d’usage de fausse monnaie (art. 250 &
SS. du CP), la peine complémentaire qui est la confiscation est obligatoire. Le juge est tenu
d’infliger cette peine. Dans l’exemple de la fausse monnaie, les dispositions de l’article 260 du
CP sont éloquents quant au caractère obligatoire : « Sont confisqués et remis à la banque
centrale, sur sa demande sous réserve de nécessité de l’administration de la justice, quelle que
soit la qualification de l’infraction, les objets visés aux articles 250 à 258, ainsi que les métaux,
papiers et autres matières trouvés en possession des coupables et destinés à la commission
d’infractions semblables. Sont également confisqués les instruments ayant servi à commettre
l’infraction, sauf lorsqu’ils ont été utilisés à l’insu de leur propriétaire». L’article 273 du CD
prévoit également une confiscation obligatoire notamment des marchandises visées, des
moyens de transport concernés en cas de contrebande.
Il arrive que les mêmes peines secondaires soient prévues à titre de peines accessoires et à titre
de peines complémentaires. C'est l'exemple de l'interdiction d'exercer une activité
professionnelle.

Dans tous les cas, la confiscation, l'interdiction de séjour, l'interdiction de territoire, le retrait
du permis de conduire (art. 70 du code des drogues), l'interdiction d'émettre un chèque,
l'interdiction des droits civiques, civils ou de famille (droit de vote, d'éligibilité, le droit
d'exercer une fonction juridictionnelle….), la démolition d’un bâtiment construit
irrégulièrement constituent des peines complémentaires (voir art. 37 & SS. du CP).
Les peines peuvent aussi être classées suivant la nature de la privation frappant l'individu.

§2 - CLASSIFICATION FONDÉE SUR LES LIBERTÉS ET DROITS


ATTEINTS

La peine atteint la personne, les biens et les droits. Elle a un effet afflictif qui peut atteindre
l’intégrité ou la vie du condamné (1), sa liberté (2) et ses droits (3).
1.
501. 1 V. Cass. crim., 6 juillet 1993, D. 1994, jurisp., p. 33 , note P. COUVRAT et M. MASSE , Cour
Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), 23 septembre, 1998, Malige contre Etat français, D. 1999,
comm., p. 154, observations B de LAMY.

216
Précis De Droit Pénal Général

1 - Les peines privatives de vie ou touchant à l'intégrité corporelle

265. La peine de mort, qui consiste à ôter la vie à la personne condamnée, a été supprimée
dans certains systèmes1 mais persiste dans d'autres2. C'est le cas du Burkina Faso qui prévoit la
peine de mort aux articles 9 et 15 du CP. Les crimes contre l’humanité, par exemple, sont en
principe punis de mort (art. 313 à 315 du CP). Aux termes de l’article 15 du CP, « La peine de
mort s’exécute par fusillade.... ». Il en ressort que l’individu condamné à cette peine est privée
de sa vie et est atteint physiquement (coups et blessures) compte tenu du mode d’exécution qui
est la fusillade. Cependant, les juges burkinabé prononcent rarement la peine de mort. En outre,
lorsqu’elle est prononcée, elle n’est pratiquement pas exécutée.

266. Dans d'autres systèmes, on peut noter l'existence de peine portant atteinte à l'intégrité telle
que l'amputation d'un ou de plusieurs membres, la lapidation, les coups de fouets. Ces peines
d'ordre corporel sont souvent prévues dans les systèmes de droit musulman. Ce qui est
confirmé par Ahmed SIMOZRAG en ces termes, « Dans un but dissuasif, le droit musulman
inflige des sanctions sévères aux auteurs de certaines infractions. Ainsi, il ordonne de couper la
main du voleur et de lapider l’homme ou la femme mariée coupable d’adultère. La fornication
est punie de cent coups de fouet ». Cet auteur poursuit en précisant que, « en pratique, ces
sanctions sont soumises à des conditions difficiles à réaliser de sorte que leur application
demeure purement hypothétique et incertaine »3.

2 - Les peines privatives et restrictives de liberté

267. La peine d'emprisonnement est une peine privative de la liberté d'aller et venir. C’est une
peine privative de liberté qui s'exécute en général dans un établissement pénitentiaire et qui
consiste dans un confinement de l'individu qui ne peut pas organiser sa vie. L’individu y
séjourne durant un temps déterminé ou illimité. Pour FOUCAULT, « … l’emprisonnement,
dès le début du XIXéme siècle a couvert à la fois la privation de liberté et la transformation
technique des individus »4. La privation de la liberté de mouvement est un mode de sanction
utilisé en matière délictuelle et criminelle. Elle permet de heurter une des libertés
fondamentales de l’individu. Son usage reste impossible en matière contraventionnelle.

268. A côté des peines privatives de liberté, il y a celles qui restreignent la liberté5. En effet,
certaines peines permettent à l'individu d'avoir une vie familiale et professionnelle normale tout
en engendrant la restriction de sa liberté. Elles limitent la liberté d’aller et venir sans la
supprimer complètement. L’individu jouit donc d’une portion de sa liberté d’aller et venir.
Cette peine consiste, en général, à interdire à l’individu de se rendre à certains endroits. C’est
donc l’espace géographique d’exercice de sa liberté de se déplacer d’un point à un autre qui est

1.
502. 1 En droit français, relativement aux infractions politiques, la peine de mort avait été supprimée en 1848
(art. de la Constitution de 1848) et rétablie par la suite. En 1984 (loi du 9 octobre 1981), la peine de
mort a été abolie en toute matière.
503. 2 V. SUSINI, "La police et la peine de mort", RSC, 1960, 512 & SS.
504. 3 V. Maître Ahmed SIMOZRAG, "Droit et doctrines islamiques", Centre Africain de Diffusion
Islamique et Scientifique, édition, 2004, p. 61, 1ère
505. 4 V. M. FOUCAULT, "Surveiller et punir ", Gallimard, 1975, p.269 & 270.
506. 5 Le bannissement qui existait dans l’ancien droit français constituait une peine restrictive de liberté car
elle consistait à défendre au condamné de résider en France.

217
Précis De Droit Pénal Général

balisé. C'est le cas de l'interdiction de séjour, l’interdiction du territoire et celle de quitter le


territoire.

L’interdiction de séjour consiste à défendre à l’individu de fréquenter ou de franchir des


lieux ou des localités déterminées (pays, ville, village, quartier, zone géographique
déterminée). Le législateur en donne la définition suivante (art. 42 du CP) : « l’interdiction de
séjour consiste dans la défense faite à un condamné de paraître dans certains lieux ». Ainsi, il
peut être interdit à un individu de se rendre dans la localité où il a commis l’infraction ou au
lieu où réside la victime. Il s’agit d’une peine de nature complémentaire dont l’exécution est
"contrôlée"et "facilitée" grâce à des mesures de surveillance et d’assistance (obligation de
répondre aux convocations, d’informer le juge de certains déplacements…). La durée de son
exécution est limitée dans le temps et est modifiable. En effet, sa durée est comprise entre
deux (2) et cinq (5) ans en cas d’infraction délictuelle et entre cinq (5) et vingt (20) ans en
matière criminelle (art.42, al.3 du CP). La détermination ou la fixation des lieux interdits et
des mesures de surveillance et d’assistance relèvent de la compétence conjointe du Ministre
chargé de l’administration du territoire et du Ministre chargé de la justice (art. 45 du CP). La
liste des lieux et mesures est consignée dans un arrêté individuel.

269. Quant à l’interdiction du territoire (art. 44 du CP), elle consiste à défendre au


condamné étranger de séjourner ou de résider sur le territoire burkinabé. Sa durée varie :
elle peut être définitive, décennale ou plus. Cette peine restrictive de liberté entraîne
automatiquement la reconduite à la frontière de l’individu. S’il est incarcéré, la reconduite se
fait à la fin de l’exécution de sa peine privative de liberté. C’est une peine qui peut être
appliquée en cas de violation de la réglementation d’entrée et de séjour dans un pays. Elle peut,
par exemple, être prononcée en matière de trafic d’enfants1.

Il existe une peine contraire à l’interdiction du territoire. Il s’agit de l’interdiction de quitter


le territoire qui est une peine complémentaire restrictive de liberté consistant à interdire
l’individu de quitter le territoire burkinabé pour une durée déterminée par la loi. C’est
l’exemple de l’article 70-3 du Code des Drogues (CD) qui prescrit la possibilité de cette
interdiction pour une durée de six (6) mois à trois (3) ans, en cas de trafic ou de production
illicite de stupéfiant.

4 - Les peines privatives ou restrictives de droits

270. Dans l’ancien droit, la peine privative de droit était, dans certains cas, très sévère. Le
condamné à perpétuité perdait en même temps les droits qui lui permettaient d’avoir des liens
juridiques avec la société. En effet, le code pénal de 1810 (en droit français) prévoyait la mort
civile de l’individu. « Placé physiquement au ban de la société, le condamné à une peine
perpétuelle était également privé de liens juridiques avec la société…les condamnés à des
peines perpétuelles étaient réputés juridiquement morts ; leur succession était ouverte, leur
mariage était dissout et ils ne pouvaient …se remarier ; ils ne pouvaient disposer entre vifs ou
par testament des produits de leur travail »2. Heureusement les peines privatives ou restrictives
de droits ont connu une évolution positive au profit du condamné. Elles ont été assouplies et

1.
507. 1 L’article 7 de la loi 38-2003 AN du 27 mai 2003 relative au trafic d’enfant prévoit cette peine (in
Codes et loi du Burkina Faso, tome VI, édition février 2005, p. 479).
508. 2 V. R. MERLE & A. VITU , « Traité de droit criminel »,7ème édition, tome 1, op. cit., n°800

218
Précis De Droit Pénal Général

plus humanisées. Cette évolution tient compte d’une politique criminelle contemporaine qui
privilégie de plus en plus le reclassement du condamné. Parmi ces peines on peut citer
l'amende (a), la confiscation (b) et d'autres formes de privation(c). L'amende et la confiscation
touchent au patrimoine.

a - L'amende

271. L’amende pénale (qui peut être de caractère contraventionnel, correctionnel voire
criminel) consiste à payer une somme d’argent déterminée à l’Etat. Il s’agit d’une
obligation de payer une somme. Elle diffère des dommages et intérêts destinés à réparer le
préjudice subi par la victime qui peut être l’Etat ou un particulier. L’amende a plutôt un but
répressif et nécessite une culpabilité. Si les dommages-intérêts peuvent être prononcés par
une juridiction civile ou répressive, la condamnation à l’amende ne peut être faite que par une
juridiction pénale. L’amende pénale, hormis le cas de l’amende forfaitaire, n’est pas,
susceptible de transaction dans la mesure où elle ne vise pas des intérêts particuliers (privés).
Le sursis, la grâce et l’amnistie ne sont pas applicables aux situations d’intérêts civils
(dommages-intérêts).

272. Elle se distingue, également, de l’amende fiscale qui sanctionne essentiellement des
infractions préjudiciables au fisc (infractions fiscales telles que les fraudes fiscales).
Néanmoins, l’amende fiscale, prononcée par le juge répressif, est, en principe, soumise aux
règles de prescription et à celles relatives à la grâce et l’amnistie (mais pas le sursis). Elle est
cependant susceptible de transaction (possible avec l’administration). Elle englobe l’amende
pénale (sanction de la violation d’une obligation légale) et les dommages et intérêts
(indemnisation du fisc pour les droits "perdus" ou le manque à gagner dû à la commission de
l’infraction fiscale).

273. Elle n’est pas non plus à confondre avec l’amende civile qui sanctionne la non
observation de certaines formalités de nature civile ou procédurale. Elle est prévue par des lois
civiles pour sanctionner des violations d’obligations. C’est ainsi que le non respect de la forme
d’un acte notarié (art. 59 de l’ord. portant statut des notaires) ou la non tenue de répertoire des
actes (art. 72 de l’ord. portant statut des notaires) peuvent donner lieu à la condamnation au
paiement d’une amende civile (par le notaire) par les juridictions civiles. Aux termes de
l’article 74 de l’ordonnance 92-52 du 21 octobre 1992 relative au statut des notaires1, « …Les
infractions aux prescriptions des articles 59…72 peuvent donner lieu au prononcé d’une
amende civile de 100 000 francs. Dans tous les cas, le notaire contrevenant peut être condamné
à des dommages-intérêts envers la partie lésée, nonobstant toute sanction disciplinaire ». Une
condamnation à l’amende civile peut aussi intervenir dans le domaine du travail. C’est le cas de
l’article 386 du Code du travail qui prévoit la condamnation à cette catégorie d’amende des
assesseurs du tribunal du travail qui ne répondent pas aux convocations2. L’amende civile n’est
pas soumise aux règles d’ordre pénal.

1.
509. 1 Cette ordonnance a été ratifiée par la loi 6-92 du 14 décembre 1992, JOBF n°8 (spécial), p. 2.
510. 2 Article 386 du code du travail : "Est puni d’une amende civile de cinq mille (5000) francs CFA tout
assesseur du tribunal de travail qui ne sera pas rendu à son poste sur la citation qui lui aura été notifié.
En cas de récidiveau cours de la durée du mandat de l’assesseur, l’amende est portée au double".

219
Précis De Droit Pénal Général

274. Enfin, l’amende pénale est différente de l’amende administrative en ce qu’elle est
prononcée par des autorités administratives indépendantes ou par l’Administration
(notamment les Postes et Télécommunications, la SONABEL pour le Service de l’électricité,
l’ONEA pour le Service de l’eau)1. Cette catégorie d’amende sanctionne les contrevenants à
certaines réglementations et est prévue par des textes spéciaux. Elle peut sanctionner des
manquements à une obligation. L’amende administrative vise, généralement, la "répression"
des manquements liés à des activités d’ordre économique (Concurrence, distribution d’eau ou
d’électricité…)

L’amende peut permettre, dans certains cas, d'éviter l'emprisonnement. Elle est facilement
corrigible en cas d’erreur judiciaire. L’amende reste une peine qui profite « gracieusement » à
l’Etat. En outre, cette peine peut atteindre des proches du condamné et remettre, dans ce cas, en
cause le principe de la personnalité des peines. En effet, elle peut priver la famille du
condamné d’une partie de ses ressources. Le montant de l’amende est, en matière criminelle,
déterminé par le juge. Il est parfois fixé par le texte d’incrimination en matière délictuelle. Une
fourchette de montant est déterminée par classe, en matière contraventionnelle. Mais, certaines
infractions donnent lieu à une amende qui est déterminée en fonction de la situation (recel, …).

L'application de cette peine pécuniaire est particulièrement fréquente dans le domaine des
douanes, de la circulation routière, des transports, de la réglementation du travail, de
l’urbanisme, de l’environnement. Affectant le patrimoine de l’individu, la peine d'amende
constitue, la seule peine principale, en matière de contravention au Burkina Faso. Il est fait
recours à cette peine d’ordre pécuniaire surtout en matière contraventionnelle et
correctionnelle. Dans le dernier cas (en cas de délit), il peut arriver qu’elle soit prévue à titre
principal. L’article 486 du CP relative aux chèques illustre cette hypothèse : « Est puni d’une
amende de 100 000 à 3 000 000 de francs : le tiré qui, de mauvaise foi, indique une provision
inférieure à la provision existante et disponible… ». Son application est peu fréquente, en
matière criminelle. La loi prévoit, dans certains cas, le cumul entre la peine d’amende et celle
d’emprisonnement.

275. En droit français, il existe une peine qui s’apparente à la peine d’amende. Il s’agit du
jour-amende qui consiste au paiement d’un montant fixé par le juge. L’amende est exigible au
bout d’un nombre de jours déterminé (exemple : 90 jours) et est calculée sur la base d’une
somme donnée par jour (exemple : 1000 francs par jour). Le montant de l’amende-jour qui est
exigé à l’expiration du nombre de jours fixé par le juge, tient compte des charges et des
ressources du condamné à la différence de l’amende ordinaire. L’amende-jour n’est applicable
qu’aux personnes majeures condamnées à une peine d’emprisonnement.

b - La confiscation

276. La confiscation consiste en une dépossession, par l’Etat et à son propre profit voire à
celui d’un particulier, de l’ensemble des biens ou d’un ou plusieurs biens, propriété en principe
du condamné (personne physique ou morale). Elle constitue une peine complémentaire qui
peut être obligatoire ou facultative. Elle est obligatoire notamment « pour les objets dangereux
et nuisibles » (art. 55 du CP). A ce titre, en matière d’infraction commise par voie de presse,
1.
511. 1 V. M. DELMAS-MARTY & G. GIUDICELLI-DELAGE, "Droit pénal des affaires ", 4ème édition, op.
cit., p. 172 & SS.

220
Précis De Droit Pénal Général

l’article 136 du code de l’information prescrit : « S’il y a condamnation, l’arrêt pourra dans les
cas prévus… prononcer la confiscation des écrits ou imprimés, placards, affiches ou supports
audiovisuels saisis et la suppression ou la destruction de tous les exemplaires… ». La
confiscation peut être générale ou spéciale. Elle est générale lorsque qu'elle porte sur tout ou
partie du patrimoine du condamné. Ainsi, en cas de condamnation pour atteinte à la sûreté
extérieure de l'Etat, la confiscation des biens du condamné au profit de l'état est générale et
obligatoire. (art. 32 du CP). Elle est spéciale lorsque la dépossession porte sur un ou plusieurs
objets déterminés appartenant au condamné (objet ou corps de l’infraction, produit de
l’infraction, marchandises prohibées, armes, véhicules, somme d'argent, gibier…). L’article
209 du CP constitue un exemple de confiscation spéciale : « Est punie d’une amende de
500 000 à 1000 000 de francs et de la confiscation des marchandises, toute violation de la
réglementation relative aux produits destinés à l’exportation et qui a pour objet de garantir leur
bonne qualité, leur nature, et leurs dimensions ». Il en est de même pour l’article 68 du code
des drogues qui prévoit que « dans tous les cas prévus…, les tribunaux ordonnent la
confiscation des installations, matériels, équipements et autres biens mobiliers ou immobiliers
utilisés ou destinés à être utilisés pour la commission de l’infraction… ». Il en résulte que la
confiscation est une peine qui peut être aussi bien privative de droits que restrictive de droits.

Certains auteurs distinguent trois catégories de régime de confiscation1. Lorsque la confiscation


porte sur des biens ou des objets dont la possession est licite, elle constitue une simple peine
(cas de la confiscation des objets ayant servi à la commission de l’acte prohibé) 2. Dans cette
hypothèse, elle ne concerne en principe que la personne condamnée. Quand la loi prévoit la
confiscation des biens pour éviter les dangers (santé, sécurité,…) que leur circulation ou usage
pourrait engendrer, celle-ci constitue une mesure de sûreté. Il en est de même quand la
dépossession du bien a été faite parce que sa possession est illicite. La confiscation en tant que
mesure de sûreté permet, souvent, de confisquer le bien quel que soit son statut (propriété d’un
tiers par exemple)3. Elle peut enfin être une mesure de réparation. Dans cette dernière
hypothèse, le bénéficiaire peut être l’Etat ou un particulier (en matière de contrefaçon, les
objets confisqués peuvent être remis à la victime)4.

c - Autres formes

277. L’individu peut faire l’objet de privation de droits professionnels ou sociaux (qui
s’apparentent d’une manière générale à des mesures de sûreté). Ces sanctions affectent les
activités professionnelles. Cette catégorie englobe plusieurs catégories de sanctions dont
certaines ont le caractère de peine complémentaire.

Ainsi, la commission de certaines infractions dans le domaine économique peut donner lieu à
des interdictions ou à des restrictions professionnelles (fermeture de fonds de commerce,
interdiction d’exercer des fonctions publiques par exemple)5. Aussi, l’article 275 du code des
douanes (CD) constitue-t-il une peine privative de droits : « …ceux qui sont jugés coupables
d’avoir participé comme intéressés …à un délit de contrebande…sont déclarés incapables
1.
512. 1 M. DELMAS-MARTY & G. GIUDICELLI-DELAGE, "Droit pénal des affaires ", 4ème édit., 2000.
PUF, 221 & SS.
2
V. Cass. crim. fr., 13 février 1996, Bull. Crim. 1996, n° 75.
513. 3 V. Cass. crim. fr., 5 mars 1987, Bull. Crim. 1997, n° 109.
514. 4 V. Cass. crim. fr., 22 juin 1994, Bull. Crim. 1994, n° 249.
515. 5 V. J.Y. LASSALLE, "Les interdictions professionnelles du droit des affaires", RSC 1989, p. 41.

221
Précis De Droit Pénal Général

d’être électeurs ou élus aux chambres de commerce et tribunaux de commerce, tant et aussi
longtemps qu’ils n’auront pas été relevés de cette incapacité ». Cette privation de droit apparaît
sévère car sa limitation dans le temps n’est pas stricte dans la mesure où il faut une décision de
relèvement pour mettre fin à cette sanction pénale secondaire. La restriction ou la privation des
droits peut, aussi, consister en l'interdiction d'assurer certaines fonctions : notamment, les
fonctions de juré, d'expert ou l’interdiction de témoigner en justice. Ces sanctions concernent la
vie publique.

278. La fermeture d’établissement, sanction privative de droits professionnels, entraîne


l’interdiction d’exploiter une entreprise. Elle entraîne inévitablement l’interdiction d’exercer
dans l’établissement fermé l’activité qui a été l’origine de l’infraction (art. 41 du CP). C’est
une mesure prise, généralement à l’encontre d’une entreprise ou d’un établissement (débit de
boissons, hôtel, dancing…) qui a servi de cadre à la commission de l’infraction 1. Le non
respect d’une réglementation liée à la sécurité ou à l’hygiène (par l’entreprise) peut être à
l’origine de cette fermeture. Cette dernière est soit temporaire soit définitive. En principe, la
fermeture d’un établissement suite au non respect d’une réglementation (art. 221 du code du
travail) ne dispense pas du paiement des salaires des employés travaillant dans l’établissement
ou l’entreprise fermée. L’exploitant doit logiquement continuer de payer les salaires lorsqu’il
s’agit d’une fermeture temporaire. Dans l’hypothèse où la fermeture est définitive, entraînant le
licenciement des travailleurs, l’exploitant doit payer les droits liés à cette rupture "forcée" ou
involontaire".

L’exclusion des marchés publics2 est également une peine qui touche des intérêts
professionnels. Cette sanction est prévue par la loi pénale. Il s’agit de l’article 40 du CP qui
mentionne que, « la peine d’exclusion des marchés publics emporte l’interdiction de participer,
directement ou indirectement, à tout marché conclu par l’Etat et ses établissements publics… »
L’interdit, dans cette situation, est privé de son droit de participer à un marché conclu
notamment par l’Etat ou les collectivités territoriales. A ce titre, l’article 61 du décret n° 2003-
269/PRES/PM/MFB du 27 mai 2003 portant réglementation générale des achats publics
prescrit:
« Ne peuvent être attributaires d'un contrat de commande publique :
- les entreprises en état de liquidation des biens ou de redressement judiciaire et les personnes
physiques dont la faillite personnelle a été prononcée ;
- toute personne physique ou morale condamnée pour infraction à une disposition du Code
pénal ou du Code des impôts prévoyant l'interdiction d'obtenir de telles commandes »3.
Dans l’affaire « Issaka Korgo »4 pour laquelle, une poursuite a été engagée contre cette
personne, pour faux et usage de faux, devant le tribunal correctionnel (audience du 28
septembre 2006), il a fait l’objet d’une exclusion (temporaire) des marchés publics. Cette
radiation temporaire de la liste des soumissionnaires des marchés publics concernait aussi bien
1.
516. 1 V. Cass. crim. fr., 9 mars 1971, Bull. Crim. 1971, n° 79.
517. 2 Relativement aux conditions de participation et d’exécution des marchés publics, voir arrêts (arrêt
n°11/96 & 12/96) de la Cour Suprême, Chambre administrative, 9 avril 1996, RBD, 2002, n°41, 1 er
semestre, p. 75 & SS.
518. 3 Le décret a été publié dans le JOBF spécial n° 1 du 10 juin 2003 p. 3.
519. 4 V. "Coup de théâtre au palais de justice. Issaka Korgo déféré à la MACO", in le journal Le Pays,
n°3787, 15 janvier 2007, p. 4. Suite à sa relaxe, Issaka Korgo a été condamné par la juridiction d’appel
(audience tenue le 22 décembre 2006) à une peine d’emprisonnement de six mois fermes le 12 janvier
2007 mais sur le fondement d’une autre infraction (l’infraction d’origine relative au faux a été
requalifiée : tentative de se délivrer un document officiel).

222
Précis De Droit Pénal Général

celui-ci que sa société dénommée SOKOCOM. Toutefois, cette sanction qui aurait pu être
prononcée par le tribunal correctionnel de Ouagadougou, s’il n’avait pas bénéficié d’une relaxe
pour infraction non constituée (le 5 octobre 2006), l’a été par le Conseil des Ministre ( le 6
septembre 2006) Certes, il ne s’agit pas d’une exclusion des marchés publics en tant que peine
(c’est en tant que sanction administrative), mais compte tenu du fait que l’infraction reprochée
a un lien étroit avec les marchés publics, cette exclusion est susceptible d’être prononcée à titre
de peine en cas de constitution de ladite infraction.

Les personnes morales peuvent faire l’objet d’interdiction d’appel public à l’épargne.
L’interdiction d’émettre des chèques peut également être décidée à l’encontre du condamné.
Cette interdiction est prévue à l’article 483 du CP en ces termes «…la juridiction peut interdire
au condamné pour une durée de un à cinq ans d’émettre des chèques autres que ceux qui
permettent exclusivement le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré… L’interdiction
d’émettre des chèques entraîne pour le condamné injonction d’avoir à restituer au banquier qui
les avait délivrés les carnets en sa possession » 1. Il résulte de ces dispositions que l’interdiction
d’émettre des chèques est doublée d’une "autre peine" (conséquence de cette interdiction) : le
condamné doit être dépossédé des carnets de chèques détenus. Il a l’obligation de remettre tous
les carnets de chèques qu’il possède.

Il peut aussi s’agir de privation du droit de faire usage du permis de conduire (suspension
ou retrait du permis)2. Le retrait du permis de conduire ou l’immobilisation d’un engin de
transport empêche en principe le condamné de faire usage du véhicule, d’où une atteinte à son
droit d’usage3. L’individu peut aussi être « interdit d’obtenir le permis ». En effet, l’article 4 de
l’ordonnance 71-10 du 23 janvier 1971 prescrit : « L’annulation ou la suspension sont
remplacées, à l’égard du conducteur, non titulaire du permis exigé et faisant l’objet d’une
condamnation susceptible de les motiver conformément aux deux articles précédents, par
l’interdiction d’obtenir, pendant trois ans au plus, la délivrance d’un permis de conduire ».
Certes, cette dernière sanction est privative de droit mais elle appelle quelques observations.
On peut s’interroger sur l’étendue de la sanction. Faut-il interpréter l’article 4 comme
autorisant l’individu à passer les épreuves destinées à l’obtention du permis, tout en ne lui
permettant pas de rentrer en possession de « son titre de permission » (le permis) en cas de
succès (par la suspension de sa délivrance, pendant trois ans au maximum) ? Faut-il plutôt
l’interpréter comme privant l’individu du droit de passer l’examen en vue d’obtenir le titre ?
La privation peut aussi viser le permis de port ou de détention d’arme ou encore le permis
de chasse. Ce permis peut aussi faire l’objet d’un retrait. L’interdiction frappant l’usage d’un
permis réduit les « "autorisations ou permissions administratives" auxquelles le condamné peut
prétendre.

Les mesures de publicité peuvent affecter ou réduire également certains droits. La mesure de
publicité consiste en la publication d’une décision de justice, soit par voie d’affichage (la
durée et le lieu d’affichage est précisée dans la décision), soit par voie de diffusion (presse
1.
520. 1 Concernant les infractions relatives à l’émission de chèque sans provision, voir C.A. de Ouagadougou,
24 août 1991, RBD, n° 25 janvier 1994, p. 134, note C. OUEDRAOGO.
521. 2 Article 3 de l’ordonnance 71-10 du 23 janvier 1971 (voir JOBF du 1 1 février 1971, p. 110) réprimant
certaines infractions en matière de circulation routière : "Les juridictions de l’ordre judiciaire pourront
également prononcer la suspension ou le retrait du permis de conduire pendant trois au plus contre le
conducteur coupable de l’une des infractions par…"
522. 3 V. H. MABILLE de la PAUMELIERE, "Le permis de conduire et ses sanctions", D. 1977, Chr., p.
173.

223
Précis De Droit Pénal Général

écrite…) ou par d’autres moyens de communication audiovisuelle1. L’article 49 du CP précise :


« dans les cas spécialement prévus par la loi, les juridictions saisies pourront ordonner que leur
décision sera affichée en caractères très apparents, dans les lieux qu’ils indiquent…Sauf
disposition contraire de la loi, cet affichage sera prononcé pour une durée qui ne pourra
excéder deux mois en matière de crimes ou de délits… ».

Aussi, la peine de publication de la décision de condamnation prive-t-elle plus ou moins


l’individu de son droit à l’honneur et restreint son patrimoine. L’affichage ou la diffusion se
fait aux frais du condamné (la publicité atteint donc son patrimoine). C’est ainsi en matière de
banqueroute, les frais de publication sont supportés par le condamné : « Les arrêts et les
jugements de condamnation rendus en vertu de la présente section, sont aux frais du condamné,
publiés dans un journal habilité à recevoir les annonces légales et/ ou affichés dans les lieux
qu’ils indiquent » (art. 505 du CP). La mesure de publicité porte atteinte à sa réputation car des
proches, des parents, des collaborateurs, des employés, des partenaires, ou des clients sont
susceptibles de prendre connaissance de la condamnation par ce biais. Cette information peut
donc engendrer le manque de confiance, le discrédit, le manque de respect vis-à-vis du
condamné.

279. La dégradation et la destitution, peines spécifiques au domaine militaire est une autre
forme de peine privative de droit qui peut être prononcée par la juridiction militaire en cas
d’infraction purement militaire. La dégradation est une peine qui consiste à retirer l'emploi ou
la fonction. L’individu perd donc son emploi ou sa fonction. Quant à la destitution, elle est une
peine qui a pour effet de priver le condamné de son grade ou de son rang voire de certains
droits. Ainsi, « Les juridictions des Forces armées peuvent également prononcer les peines
militaires de la destitution et de la perte du grade. La destitution entraîne la perte du grade et du
droit d’en porter les insignes et l’uniforme. Elle a, en ce qui concerne le droit à l’obtention et à
la jouissance d’une pension, les effets prévus par la législation des pensions. Elle est applicable
aux officiers, aux sous-officiers de carrière des Forces armées, dans tous les cas où elle est
prévue pour les officiers » (art. 156 du Code de justice militaire). Ces deux catégories de peines
sont draconiennes car elles entraînent la privation de plusieurs droits en même temps2. En
outre, l’individu n’est pas à l’abri d’une condamnation à une peine de droit commun comme
l’atteste l’alinéa 2 de l’article 155 du Code justice militaire (CJM) : « Toute peine criminelle,
prononcée contre un militaire entraînera notamment l’exclusion de l’armée ainsi que la
privation du grade et du droit de porter les insignes et l’uniforme ». L’article 157 du CJM
précise, également, qu’en plus de la peine criminelle de droit commun, l’individu peut faire
l’objet d’une peine complémentaire, en l’occurrence la destitution3.

Par ailleurs, un autre type de peine, inconnu pour l’instant de la législation burkinabé, mérite
d’être prise en compte par celle-ci. Il s’agit du stage de citoyenneté, en droit français (art.
135-5-1 du CPF), institué par une loi du 9 mars 2004. C’est une peine correctionnelle pouvant
être infligée à l’encontre d’une personne physique. Cette peine vise à rappeler au condamné
les valeurs républicaines de tolérance (notamment s’accepter les uns les autres) et le respect

1.
523. 1 V. Cass. crim. fr., 5 décembre 1995, Bull. Crim. 1995, n° 366.
524. 2 Article 158 du CJM : "La peine de la perte du grade entraîne les mêmes effets que la destitution, mais
sans modifier les droits à pension et à récompense pour services antérieurs."
525. 3 Article 157 du CJM : "Si l’infraction est passible d’une peine criminelle, la destitution pourra être
prononcée à titre complémentaire même si, par suite de l’admission des circonstances atténuantes, la
peine principale est l’emprisonnement".

224
Précis De Droit Pénal Général

de la dignité humaine au sein de la société dans laquelle il vit. Les frais générés par le stage
peuvent être à la charge du condamné.

SECTION II – LES MESURES DE SÛRETÉ

Les mesures de sûreté ne connaissent pas une classification légale. C'est la doctrine qui s'est
attribuée cette tâche. Ainsi, certains ont regroupé les mesures officiellement : reconnues et
appliquées comme telles (§1). Ils ont aussi procédé à d'autres classifications : celles se référant
aux atteintes aux facultés de la liberté (§2), celles fonctionnant sous un régime administratif
(§3).

§1 – LES MESURES DE SURETÉ OFFICIELLEMENT RECONNUES


ET APPLIQUÉES COMME TELLES

Plusieurs mesures font partie de ce groupe. Il s’agit notamment des mesures prises au profit du
mineur (1) et celles relatives aux majeurs (2).

1 - Les mesures de sûreté applicables aux mineurs

280. Ces mesures sont prévues pour les auteurs d'infraction ayant le statut de mineur. Elles
peuvent être des mesures de protection, de surveillance, d'assistance ou d'éducation. C’est ainsi
qu’aux termes de l’article 57 du CP « Les mesures éducatives sont des mesures individuelles
qui tendent à l’éducation, à la rééducation, à une tutelle ou à une assistance en faveur du
condamné. Les mesures éducatives sont applicables au mineur de moins de 18 ans reconnu
coupable de crimes ou de délits ».

Ce sont des mesures prises, en général, après une enquête sociale afin de les adapter à la
personnalité du mineur. Elles peuvent intervenir avant la décision de condamnation du mineur
notamment au cours de la procédure d’enquête ou d’instruction. Outre les mesures qui
consistent en l’admonestation, en la remise de l’enfant à un parent, un tuteur, un gardien ou
un tiers digne de confiance, il y a celles qui conduisent à la privation de liberté du mineur en
l’occurrence le placement (a) ou à la restriction de liberté de celui-ci, en l’occurrence la liberté
surveillée (b).

a – Le placement

Les articles 14 et 15 de la loi 19-61 AN du 9 mai 1961 relative à l’enfance délinquante 1


prévoient, le placement du mineur de moins de dix-huit (18) ans dans une institution charitable
ou dans un établissement spécialisé (jusqu’à l’âge de 20 ans au plus) en cas de crime ou de
délit. Concernant le mineur de plus de treize ans, il est possible de le faire admettre dans une
prison de droit commun à défaut d’un établissement spécialisé (éducation, formation

1.
526. 1 V. JO RHV du 27 mai 1961, p. 495.

225
Précis De Droit Pénal Général

professionnelle…). L’établissement de placement peut être de type médical ou médico-


pédagogique.

b – La liberté surveillée

281. La liberté surveillée est une mesure qui consiste à laisser le mineur libre mais sous la
surveillance de personnes désignées à cet effet : les délégués à la liberté surveillée (art.16
et 17 de la loi 19-61 AN du 9 mai 1961). Ces délégués sont chargés de surveiller, de prodiguer
des conseils au mineur qui est sous garde d’une personne ou d’une institution. Ils doivent aussi
établir des rapports à l’intention du Président de la juridiction de jugement qui a ordonné la
mesure. La liberté surveillée s’ajoute à une autre mesure ou une peine de droit commun.

2- Les mesures de sûreté applicables aux majeurs

Il s’agit essentiellement de celles relatives aux alcooliques dangereux et aux personnes faisant
usage de stupéfiants (a) et de celles qui se rapportent aux vagabonds (b). Ces mesures peuvent,
suivant les circonstances, être appliquées aux mineurs.

a – Le traitement des toxicomanes

282. L’usage ou la consommation de stupéfiants constitue une infraction pour laquelle le juge
peut ordonner des mesures notamment des traitements. En effet, aux termes de l’article 72 du
Code des drogues, « Lorsqu’un toxicomane fait l’objet d’une condamnation pour l’une des
infractions prévues…, le tribunal peut, en remplacement ou complément de la peine, ordonner
des mesures de traitement ou de soins appropriées à son état… » Ces mesures permettent de
surveiller ou de soumettre la personne, auteur de l’infraction, à des traitements ou soins
médicaux notamment la cure de désintoxication dans un établissement spécialisé. Cette mesure
peut être ordonnée à un mineur délinquant. Les mesures de traitement ou de surveillance
médicale peuvent avoir le caractère d’une peine complémentaire.

b - Mesures concernant les vagabonds

283. Le vagabondage et la mendicité constituent des infractions en droit burkinabé. Ainsi,


« est coupable de vagabondage et puni d’un emprisonnement de deux à six mois, quiconque
trouvé, dans un lieu public, ne peut justifier d’un domicile certain, ni de moyens de substances
et n’exerce ni métier ni profession » (art.246 du CP). Bien que l’incrimination du vagabondage
soit absurde, il peut donner lieu à des mesures de réinsertion. Certes, la loi ne prévoit pas
expressément des mesures à ce sujet. Mais dans la pratique et dans certains cas, ces personnes
peuvent bénéficier d’une prise en charge partielle ou totale grâce à des aides des services
sociaux ou d'autres structures. C’est l’exemple de certains burkinabé ayant fui « les conflits
ivoiriens » et se retrouvant en situation de vagabondage au Burkina Faso. Ces mesures sont
implicitement applicables aux mineurs mendiant ou vagabondant dans les rues et sur les
grandes voies urbaines.

226
Précis De Droit Pénal Général

§2 – LES MESURES DE SÛRETÉ PORTANT ATTEINTE A LA


LIBERTÉ

Certaines mesures de sûreté peuvent concerner la liberté individuelle notamment l'intégrité


physique, la liberté d'aller et venir (1), le patrimoine, l'activité professionnelle (2).

1 – Les mesures de sûreté portant atteinte à l’intégrité physique et la liberté d'aller et


venir

284. Les mesures curatives comme la désintoxication, la surveillance médicale, l'internement


d'un aliéné sont de nature à porter atteinte à l'intégrité corporelle.

Les mesures privatives de liberté telles que le placement dans un établissement spécialisé
d'un mineur, d'un aliéné, d'un alcoolique ou d'une personne consommant illicitement des
stupéfiants ne permettent pas de jouir pleinement de la liberté d'aller et venir. Il en est de même
en cas d'assignation à résidence, de régime de liberté surveillée, d'interdiction de séjour,
d'interdiction du territoire (en tant que mesures de sûreté).

2 – Les mesures de sûreté affectant le patrimoine et les activités professionnelles

285. Certaines peines secondaires peuvent avoir le caractère de mesures de sûreté. La


confiscation, la fermeture d’établissement (interdiction d’exploiter) ordonnées en tant que
mesures de sûreté sont des exemples restreignant les facultés de la liberté individuelle.
Aussi, l'interdiction d'exercer une fonction, un art ou une profession à titre de mesure est-elle
restrictive de liberté.

§3 – LES MESURES DE SURETÉ FONCTIONNANT SOUS UN


RÉGIME ADMINISTRATIF

286. Des sanctions administratives appartenant, en général, à la catégorie des mesures de


sûretés peuvent intervenir soit dans le cadre de l’exécution des décisions de justice, en matière
pénale, soit dans le cadre de "l’exercice" d’une compétence (de l’Administration) prévue par la
loi. L'autorité administrative prend parfois des mesures pour éviter des infractions futures ou
un danger (pour l’ordre public) soit d'office, soit sur interpellation de l'autorité judiciaire. C'est
le cas de l'internement d'un aliéné ou du traitement médical de certaines personnes qui relève
de la compétence de l'autorité administrative (arrêté préfectoral d'internement dans certains
systèmes : cas du droit français). En outre, même dans le cas où l’autorité judiciaire est à
l’initiative de l’internement, elle perd la maîtrise et le contrôle des conditions de traitement de
l’aliéné et la durée de séjour dans l’établissement de soins.

227
Précis De Droit Pénal Général

L’exemple de la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles et le sida constitue


également un exemple de mesures de sûreté de type administratif, destinées à éviter un danger.
Effectivement aux termes de l’article 73 du code de santé, « Toute personne se livrant aux
pratiques de la prostitution doit être soumise aux mesures de surveillance médicale ». « Des
arrêtés du ministre chargé de la santé détermineront les modalités de surveillance, de contrôle,
de sensibilisation et de prise en charge des malades infectés par le ou les virus de
l’immunodéficience acquise » (art. 74 du code la santé).

L'assignation à résidence (par arrêté du ministre de l'intérieur)1, la fermeture d'un débit de


boisson ou d’un restaurant (arrêté préfectoral ou municipal) peuvent également relever de cette
classe de mesures de sûreté. La mise en fourrière qui relève de la compétence de l’autorité
administrative en constitue également une illustration. En effet, aux termes de l’article 227 de
l’ordonnance du 23 janvier 1971 relative à la répression d’infraction relative à la circulation
routière, « La mise en fourrière est le transfert d’un véhicule en un lieu désigné par l’autorité
administrative en vue d’y être retenu jusqu’à décision de celle-ci »2.

L’expulsion peut également être citée comme mesure fonctionnant sous un régime
administratif. C’est ainsi que pour des raisons sécuritaires, un individu peut faire l’objet de
cette mesure. L’Arrêté 2003-0006/SECU/CAB du 21 janvier2003 en constitue un exemple
«Pour des raisons de sécurité et d’ordre public, monsieur J. H., de nationalité française,
précédemment directeur du projet Al Fateh Complex pour le compte de la Société Nord France
International à Ouagadougou, est expulsé du territoire du Burkina Faso. A compter de la date
de notification du présent arrêté, monsieur J. H. dispose de soixante douze (72) heures pour
quitter le territoire national » (art.1 & 2 dudit arrêté).

Par ailleurs, dans le cadre de l’exécution de certaines décisions judiciaires, l’autorité


administrative est amenée à prendre des mesures. Ainsi, en cas de condamnation à une peine
d’interdiction de séjour, c’est au ministre chargé de l’Administration du territoire et de celui
chargé de la justice que revient la compétence de fixer la liste des lieux interdits par voie
d’arrêté (art. 45 du CP). Ce qui suppose que le juge n’intervient pas à ce niveau. Des mesures
de surveillance et d’assistance doivent être également prises pour accompagner la peine
d’interdiction de séjour (art. 42, al.2 du CP). Ces mesures sont, aussi, déterminées par les
mêmes autorités dans l’arrêté conjoint (art.45, al.2 du CP). Les conditions d’application de ces
mesures sont également fixées par un arrêté conjoint de ces deux autorités. La modification de
la liste des lieux et des mesures d’accompagnement échappe également à la compétence du
juge et revient au ministre chargé de l’Administration du territoire. Toutefois, cette
modification ne doit pas se faire dans le sens de l’aggravation des dites mesures (art. 45 ali.3
du CP).

L’exécution de la peine d’interdiction du territoire qui est, en général, prononcée contre un


étranger (consiste à condamner l’individu étranger à l’exil ou à l’expulser), nécessite également
l’intervention de l’administration. Elle se traduit par la reconduite à la frontière qui
logiquement relève de la compétence des autorités administratives malgré le silence du
législateur. Il faut probablement un arrêté de reconduite. L’interdiction du territoire est souvent
prononcée en matière de trafic d’enfant et de trafic de stupéfiant.
1.
527. 1 Un étranger faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion et étant dans l’impossibilité de quitter le territoire
ou étant malade peut être astreint à résider dans un lieu déterminé par arrêté ministériel.
528. 2 Voir ordonnance 71-10 du 23 janvier 1971, JOHV du 11 février 1971, p. 110.

228
Précis De Droit Pénal Général

Aussi, dans le cadre de la répression des infractions à la réglementation relative à la publicité,


à la vente et à l’emballage des boissons alcooliques et du tabac (art. 80, 81 & 82 du code de la
santé) des mesures de sûreté fonctionnant sur le régime administratif sont-elles prévues. C’est
à ce titre que suivant les prescriptions de l’article 82 du code de la santé, « Toute infraction
aux dispositions des articles 80 & 81 sera punie d’une amende de cent (100 000) mille à un
million (1000 000) FCFA ….. En outre, les objets seront confisqués ». « En cas de récidive
l’emprisonnement est obligatoire et l’autorisation de la vente du tabac ou de l’alcool pourra
être retirée par le ministre compétent sur proposition du ministre chargé de la santé ».

En tout état de cause, la sanction, pour être appliquée, doit être déterminée.

229
Précis De Droit Pénal Général

TITRE II – LA SANCTION INDIVIDUELLE

230
Précis De Droit Pénal Général

Selon la logique du principe de légalité des sanctions, celles-ci doivent être déterminées par la
loi. En effet, la loi prévoit une sanction pour chaque infraction qu'elle détermine. Il revient
ensuite à la juridiction de prononcer la sanction appropriée en tenant compte de certaines
circonstances dont les principes sont fixés par la loi. Le choix de la sanction par le juge se fait
donc tout en respectant le principe de la légalité des infractions et des sanctions.

Il existe diverses sortes de sanctions notamment corporelles, privatives de liberté, restrictives


de liberté ou de droit, patrimoniales comme nous l'avons constaté. Mais, quelle que soit leur
nature, elles doivent être déterminées d’où la mesure de la sanction (chapitre I). La mesure
permettra l’exécution de la sanction par la personne condamnée (chapitre II). Cependant,
plusieurs circonstances peuvent conduire à l’inexécution de la peine et à leur extinction. Ainsi ,
en cas d’abrogation d’une loi d’incrimination juste après le prononcé de la peine (jugement),
les infractions ayant fait l’objet de la condamnation et compte tenu du fait que la loi soit plus
douce, l’exécution de la peine n’est plus possible. Aussi, en cas de décès du condamné,
l’exécution de la peine privative de liberté ou sa poursuite reste-t-elle impossible en raison du
principe de la personnalité des peines. La peine peut donc disparaître et dans ce cas, il s'agit de
son extinction qui peut intervenir de plusieurs façons (chapitre III).

231
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE I – LA MESURE DE LA SANCTION

Il revient au juge de définir la mesure de la sanction pénale qui doit être concrètement subie par
le condamné, celle-ci étant abstraitement prédéterminée par la loi. Pour accomplir sa mission,
le juge doit prendre en compte un certain nombre de circonstances. Il s’agit notamment des cas
d'unicité d'infraction (Section I) et des cas de pluralité d'infractions (Section II).

SECTION I - LA DÉTERMINATION DE LA SANCTION EN CAS


D'UNITÉ D'INFRACTION

Le juge pour pouvoir prononcer la sanction doit d'abord s'assurer que le comportement en
cause est prohibé par la loi. Ainsi, il pourra prononcer la sanction en ne négligeant pas les
limites prévues par la loi et la personnalité du délinquant. Il doit particulièrement prendre en
compte les cas d'exemption de sanction (§1), les cas d'atténuation de celle-ci (§2) et les cas de
son aggravation (§3). Ces cas s'appliquent particulièrement pour les sanctions de type peine.

§1 – LES CAUSES D'EXEMPTION DE LA SANCTION

Pour des raisons diverses, le juge peut s'abstenir de prononcer une peine à l'encontre d'une
personne ou encore l'en dispenser tout en déclarant sa culpabilité. L'exemption peut être légale
(1) comme elle peut avoir d’autres caractéristiques (2). Elle peut aussi être commandée par une
immunité (3) ou par une situation d’âge, en l’occurrence la minorité pénale (4).

1- Exemption légale de peine

287. On est dans un cas d’exemption légale lorsque les circonstances sont telles que le juge
est obligé de s’abstenir d’appliquer à l’individu la peine prévue, malgré le fait que sa
culpabilité soit établie. Il s’agit des excuses absolutoires. Ces excuses ou exemption de peine
diffèrent de la dispense de peine1 qui est une mesure consistant à déclarer la culpabilité de
l’individu (auteur de l’infraction) sans indication (prononciation) de peine (la peine n’est pas
infligée à l’individu qui est pourtant déclaré pénalement responsable). La loi prévoit des
excuses absolutoires par rapport à certaines infractions. Les personnes bénéficiaires sont
souvent celles qui, coupables de tentatives, font preuve de repentir. L'exemption s'impose au
juge quand la preuve de l'excuse est faite. Toutefois, il n'est pas exempté de la responsabilité
civile. L’article 79, alinéa 1 du CP exprime clairement cette situation d’impunité du coupable:
« Les excuses absolutoires assurent l’impunité à l’auteur de l’infraction ; cependant des
mesures de sûreté ou d’éducation peuvent lui être appliquées ».

288. Les infractions telles que l'association de malfaiteurs et l'assistance aux criminels (art.224
du CP), la rébellion (233), les crimes et délits contre la sûreté de l'Etat (art 95 et 119 du CP), la
contrefaçon des sceaux de l'Etat, des effets publics (art. 274 du CP), les fausses déclarations

1.
529. 1 La dispense de peine telle que définie est appliquée en droit français.

232
Précis De Droit Pénal Général

(art. 282 du CP) peuvent donner lieu à une exemption de peine. Dans le cas de faux et usage de
faux (art. 250 & SS. du CP), l’exemption de peine et la dispense de peine sont prévues par la
loi. Ainsi, aux termes de l’article 261 du CP, « Est exempt de peine, celui qui, coupable des
infractions prévues aux articles 250, 251, 252, 253 et 258 en donne connaissance et révèle aux
autorités avant toute poursuite ». « Peut être dispensé de peine totalement ou partiellement
celui qui, coupable des mêmes infractions, facilite, après les poursuites commencées,
l’arrestation des autres coupables ». Toutefois, le législateur ne prévoit pas expressément la
dispense de peine dans les règles générales. Il l’intègre directement dans la partie (du CP)
définissant et sanctionnant les actes prohibés. C’est le cas de l’article 261.

2 – Autres types d’exemption

289. Dans certains systèmes, il existe le pardon judiciaire ou la récompense judiciaire qui
dispense le coupable de l'application d'une peine. C'est le juge qui décide sous certaines
conditions de la dispense de peine. L'exemption judiciaire existe par exemple en droit français
et en droit togolais. Ainsi, aux termes de l'article 29 du Code Pénal Togolais (CPT), « Lorsque
le prévenu aura, avant le jugement, assuré la réparation du préjudice causé par le délit, le juge,
en considérant les gages d'amendement présentés, pourra même, tout en déclarant sa
culpabilité, le dispenser de toute peine ».

290. D'autres types d'exemption sont connus de la législation française. C'est le cas de
l'ajournement du prononcé de la peine qui consiste à différer le jugement sur la peine
pendant un délai qu'il détermine. Mais l’ajournement suppose que certaines conditions sont en
voie d’être acquises (l’individu est en voie de reclassement ; le dommage causé va être réparé
ou le trouble va bientôt cesser). On dénombre trois 3 variantes d’ajournement du prononcé de
la peine :
- l'ajournement simple pour lequel le juge fixe dans sa décision la date à laquelle, il statuera
sur la peine ;
- l'ajournement avec mise à l'épreuve (applicable uniquement aux personnes physiques) qui
consiste à prescrire des obligations (prescriptions faites par le juge) telles que s'acquitter de la
pension alimentaire, dédommager la victime ;
- l'ajournement avec injonction qui consiste à enjoindre au coupable de se conformer à une
ou plusieurs prescriptions (exemple : débroussailler un terrain).

Quelle que soit la nature de l’ajournement du prononcé, l’issue est liée au comportement du
coupable. La peine encourue peut être prononcée, en cas de non observation des prescriptions
du juge. Le délinquant peut bénéficier d’une dispense de peine s’il s’acquitte des obligations
prescrites.
3 - Les immunités

291. L’immunité est un privilège qui permet à un justiciable d’échapper à un jugement. Pour
Jacques-Henri ROBERT, « l’immunité est une institution de la procédure qui empêche qu’un
juge répressif connaisse du fond d’une affaire déterminée. Cela correspond à ce que la
procédure civile dénomme, "fin de non recevoir" »1. Les immunités peuvent être considérées
comme des causes d'exemption de peine. Ce sont des privilèges qui peuvent être liées à une
1.
530. 1 V. Jacques-Henri ROBERT, "Droit pénal général", 6é édit., op. cit., p. 281.

233
Précis De Droit Pénal Général

situation sociale, familiale ou juridique et qui permettent la protection des personnes se


trouvant dans les dites situations. Il existe plusieurs types d'immunité dont l'immunité
parlementaire, l'immunité diplomatique, l'immunité judiciaire et l'immunité familiale.

292. L'immunité parlementaire permet aux parlementaires (députés) d'être affranchis de


toute poursuite pénale pendant et après leur mandat pour les infractions résultant des discours
tenus au sein du parlement ou rapports parlementaires. Elle est destinée à sauvegarder la liberté
d’opinion, d’expression et de vote parlementaire. Elle a l’avantage de favoriser les débats
démocratiques. A ce titre, la Constitution (art. 95) prescrit que : « Aucun député ne peut être
poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé en raison des opinions ou votes émis par lui dans
l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ». Elle vise, en général, les infractions
de diffamation et d’injures qui, dans ces conditions, ne peuvent pas être constituées. En outre,
en matière de procédure, un parlementaire ne peut être arrêté, poursuivi sans l’autorisation de
l’Assemblée (Nationale) à laquelle il appartient, sauf en de flagrant délit (art. 96 de la
Constitution). Il en est de même pour certaines mesures privatives de liberté notamment la
garde à vue par exemple.

293. L'immunité diplomatique est destinée à protéger au sein du pays d'accueil les
représentants d'un Etat étranger1. C’est une immunité liée aux fonctions. Elle vise la protection
des ambassadeurs et des personnels diplomatiques accrédités et leur famille. Elle est fondée sur
la courtoisie internationale. Cette immunité permet aux agents et représentants diplomatiques
d'exercer leurs fonctions sans s'inquiéter d'une quelconque poursuite pénale pour les infractions
qu'ils commettent. Elle permet donc à l’agent d’assurer ses fonctions en toute indépendance au
sein du pays d’accueil. Il s’agit précisément de l’immunité de juridiction2 qui suppose
l’inaptitude des juridictions du pays d’accueil à juger ces personnes3. Toutefois, ce dernier peut
retirer à l’agent diplomatique son accréditation et le déclarer persona non grata (personne
indésirable). Certaines conventions internationales (convention de Vienne 18 avril 1961, art.31,
§1 pour les agents diplomatiques et celle du 24 avril 1963 pour les relations consulaires)
prévoient que les ministres plénipotentiaires (rang immédiatement inférieur à celui
d’ambassadeur.), les attachés d’ambassade ne peuvent être, en principe, ni poursuivis, ni
condamnés pour des infractions commises dans le pays d’accueil. L’immunité s’oppose au
déclenchement de l’action publique. En outre, les bagages et l’hôtel de l’ambassade sont
inviolables sauf si le chef de mission diplomatique autorise l’accès ou renonce au droit
d’immunité. Une seule "sanction" peut, dans ces conditions (non renonciation au droit
d’immunité), être encourue par le diplomate : le pays d’accueil peut le déclarer "persona non
grata" (ce qui signifie que le représentant diplomatique cesse d’être agréé par le pays
d’accueil). Il perd, dans ce cas, son droit de résidence dans ce pays et doit rentrer dans son

1.
531. 1 V Cass crim. fr. 2 avril 2005, Bull. crim. 2005, n° 126 ; voir aussi RSC, 2005, p. 875. Cette affaire
concerne un diplomate burundais contre lequel des poursuites pénales ont été engagées car accusé
d’avoir soumis les cinq nièces de son épouse à des conditions de travail et d’hébergement ne respectant
pas la dignité humaine. Les juridictions françaises ont engagé les poursuites suivant les règles de droit
commun, laquelle procédure est contestée par le diplomate qui estime qu’il est toujours couvert par son
immunité.
532. 2 V. LOMBOIS, "Immunité, exterritorialité et droit d’asile en droit pénal international", Revue
International de Droit Pénal (RIP) 1978, 1, 497 ; H. ASCENSIO, "Retour sur l’immunité internationale
des chefs d’Etat étrangers, Revue Pénitentiaire, 2004, p. 123.
533. 3 V. Cass. crim française 8 février 183, Bull. crim. 1930, n°51 (concerne les agents diplomatiques);
Cass. Crim française 25 septembre 1919, Bull. crim. 1919 n°218 (concerne les agents consulaires) ;
Cass. crim française 13 mars 2001, Bull. crim. 2001, n°64 (pour la protection des chefs d’Etat
étrangers).

234
Précis De Droit Pénal Général

pays d’origine. Une telle sanction peut être assimilée à une mesure de sûreté. En somme
l’immunité diplomatique prévue par la convention internationale de 1961 ne constitue pas une
cause d’irresponsabilité pénale mais plutôt une cause d’inviolabilité. Ce qui signifie que le
diplomate peut être sanctionné (notamment par son pays d’origine) dans la mesure où
l’infraction est quand même consommée. L’immunité obstrue en fait la procédure
(impossibilité d’exercer l’action publique au sein du pays d’accueil)1.

L’immunité diplomatique ne s’applique pas aux consuls et au personnel consulaire. Le


consul bénéficie d’une protection de moindre importance.

Il existe une autre immunité qui n’est pas formellement consacrée par les conventions
internationales. Il s’agit de celle des chefs d’Etat (en exercice) notamment en séjour dans un
pays étranger. Il est de coutume que ceux-ci échappent aux poursuites par les juridictions du
pays d’accueil.

294. L'immunité judiciaire est une protection destinée, en général, aux magistrats, aux juges
aux avocats, aux conseils ou représentants légaux par rapport aux discours, débats et écrits
nécessaires à la défense des parties, aux débats devant les juridictions. Cette immunité permet
l’exercice des droits de la défense. Elle concerne principalement les infractions de diffamation,
d’outrage, ou d’injures. Les dispositions de l’article 8 alinéa 1 de l’Acte additionnel instituant
la Cour de l’Union Economique et Monétaire (UEMOA) peuvent illustrer cette catégorie
d’immunité2. En effet, « les membres de la Cour jouissent de l’immunité de juridiction. Ils
continuent à bénéficier de cette immunité, même après la cessation de leurs fonctions, pour les
actes accomplis et les paroles prononcées par eux dans l’exercice de leurs fonctions ». Cette
immunité est doublée de l’immunité juridictionnelle car ledit Acte prescrit (art.8) : « la Cour
siégeant en assemblée plénière peut lever l’immunité d’un de ses membres. Au cas où
l’immunité a été levée, et une action pénale engagée contre le mis en cause, celui-ci n’est
justiciable dans chacun des Etats membres de l’UEMOA, que de la juridiction compétente pour
juger les magistrats appartenant à la plus haute fonction juridictionnelle nationale ».

295. L'immunité familiale (solidarité familiale) permet de préserver les rapports familiaux et
d’éviter les conflits entre l’amour familial et le devoir (dilemme cornélien). Elle peut être
d'ordre patrimonial ou d'ordre moral et n'admet pas la poursuite pénale pour vol, escroquerie,
abus de confiance entre époux ou entre ascendants et descendants (art. 515 & 516 du CP). Elle
n'admet pas non plus l'application de l'obligation de dénoncer aux conjoints, parents ou alliés
de l'auteur d'une infraction (art 65 al dernier). Ainsi aux termes de l’article 515 du CP, « Ne
sont pas punissables et ne peuvent donner lieu qu’à des réparations civiles, le vol,
l’escroquerie, l’abus de confiance et le recel commis entre époux ou par des ascendants au
préjudice de leurs enfants ou autres descendants. L’article 516 du CP précise que, « Les vols,
escroqueries, abus de confiance et recels commis par des ascendants ou entre collatéraux ou
alliés jusqu’au 4ème degré inclusivement, ne peuvent être poursuivis que sur plainte de la
personne lésée ». « Le retrait de la plainte met fin aux poursuites ». Les personnes non visées
par les deux articles soupçonnées de complicité ou de coaction ne bénéficient pas de ces
immunités (art. 517 du CP).
1.
534. 1 G. GIUDICELLI-DELAGE, "Justice pénale et décisions politiques : réflexions à partir des immunités
et privilèges de juridiction", RSC 2003, P. 247 & SS.
535. 2 V. Acte additionnel 10/96 du 10 mai 1996 portant statut de la Cour de justice de l’UEMOA, Bulletin
officiel de l’UEMOA, édition spéciale, juin 1996 , p. 15.

235
Précis De Droit Pénal Général

4 - La minorité pénale

296. L'âge du mineur peut être une cause d'exemption de peine. L’extrême jeunesse du
délinquant est une cause d’exemption de peine. Ainsi, en droit burkinabé, les mineurs de moins
de 13 et ceux de 13 à 18 ans dépourvus de discernement sont dispensés de peine. L’article 74
du CP prévoit cette exemption en ces termes : « Il n’y a ni crime, ni délit, ni contravention
lorsque l’auteur de l’infraction était âgé de moins de treize ans, à la date de la commission des
faits. Le mineur de moins de 13 ans, ainsi que celui de 13 à 18 ans qui agi sans discernement,
ne peut faire l’objet que de mesures éducatives et de sûretés ». Ces deux catégories de
personnes sont considérées comme des personnes ne jouissant pas de la volonté et de
l’intelligence nécessaires à l’appréciation du caractère bon ou mauvais d’un acte. Elles n’ont
pas la capacité de discernement qu’a le délinquant majeur. Toutefois, leur responsabilité civile
peut être engagée (art 75 du CP).
Un certain nombre de causes permet l'atténuation de la sanction.

§ 2 – LES CAUSES D'ATTÉNUATION DE LA SANCTION

La loi prévoit d’une manière générale des circonstances atténuantes (1). En outre, elle classe
les excuses atténuantes (2) parmi les causes d'atténuation de la peine.

1 - Les circonstances atténuantes en général

297. Il s'agit des causes (judiciaires) d'atténuation des sanctions. Il y a une certaine indulgence
du juge. L'appréciation est laissée au juge. C’est ainsi qu’aux termes de l’article 81,« Sauf
dispositions contraires de la loi, si la juridiction saisie reconnaît par décision motivée au
coupable des circonstances qui, sans être des excuses, sont cependant de nature à atténuer sa
responsabilité criminelle ou délictuelle, les peines sont modifiées comme suit :
- l’emprisonnement à vie, si la peine encourue est de mort ;
- l’emprisonnement de dix à vingt ans, si la peine encourue est l’emprisonnement à vie ;
- l’emprisonnement de cinq à dix ans, si la peine encourue est l’emprisonnement de dix à
vingt ans ;
- l’emprisonnement de deux mois à cinq ans, si la peine encourue est l’emprisonnement de
cinq à dix ans »
« En matière correctionnelle, la juridiction qui reconnaît des circonstances atténuantes est
autorisé à réduire l’emprisonnement et l’amende même au dessus des peines de simple
police… »

Le juge peut donc retenir le caractère vulnérable de l’individu (la faiblesse de caractère),
l'enfance malheureuse, l’état de santé (le handicap physique par exemple)1, la situation
professionnelle, la situation personnelle ou sociale de l’individu (foyer fragilisé par exemple)
comme circonstances atténuantes.

1.
536. 1 Paris, 9 mai 1951, Gaz. Pal. 1951, II, 55.

236
Précis De Droit Pénal Général

Par ailleurs, la loi (art. 87 du CP°) fait prévaloir les circonstances atténuantes en cas de
concours de circonstances, dans les conditions suivantes :
- « en cas de concours de circonstances aggravantes et de circonstances atténuantes, les
règles des circonstances atténuantes sont appliquées à la peine résultant des circonstances
aggravantes.
- « en cas de concours de circonstances atténuantes et d’une excuse légale, les règles des
circonstances atténuantes sont appliquées à la peine résultant de l’admission de l’excuse ».
- « Si des circonstances atténuantes sont admises pour un récidiviste, il y a lieu de fixer
d’abord la peine résultant de la récidive, de la réduire en raison des circonstances
atténuantes ».

298. La minorité en tant que cause de circonstance atténuante s'applique à une tranche d'âge
déterminée par la loi. Cette cause d’atténuation de peine est énoncée par l’article 20 de la loi
19-61 AN du 9 mai 1961 relative à l’enfance délinquante ou en danger1 : « S’il est décidé
qu’un mineur de plus de treize ans et de moins de seize ans, reconnu coupable d’un crime ou
d’un délit, a agi avec discernement, les peines sont prononcées ainsi qu’il suit :
- s’il a encouru la peine de mort,…il est condamné à une peine de dix à vingt ans
d’emprisonnement dans un établissement pénitentiaire spécialisé, ou, à défaut, dans une prison,
- s’il a encouru la peine …de la réclusion, il est condamné à une peine de cinq à dix ans
d’emprisonnement dans un établissement pénitentiaire spécialisé, ou, à défaut, dans une prison,
- s’il a encouru la peine de dégradation civique,…il est condamné à une peine de un à trois ans
d’emprisonnement dans un établissement pénitentiaire spécialisé, ou, à défaut, dans une prison,
- s’il a encouru la peine d’emprisonnement correctionnel, la peine qui est prononcée contre lui
ne peut s’élever au dessus de la moitié de celle à laquelle il aura été condamné s’il avait eu plus
de seize ans ; l’emprisonnement est subi dans un établissement pénitentiaire spécialisé, ou, à
défaut, dans une prison.
Le condamné ne pourra être détenu au-delà de l’âge de 25 ans dans un établissement
spécialisé »

Il résulte des dispositions de l’article 21 de cette loi que le mineur de seize à dix-huit ayant agi
avec discernement ne bénéficie pas de cette réduction de peine. Il est soumis aux mêmes
peines que celles prévues pour les majeurs.

2 - Les excuses atténuantes

299. Ce sont des circonstances expressément prévues par la loi, obligeant le juge à abaisser ou
à réduire le taux de la peine (v. art 79 al.2 du CP). On peut citer, à ce titre, l'excuse de
provocation.

L'excuse de provocation est par exemple admise en cas de crime de castration en réaction à un
attentat à la pudeur avec violence ou à un viol. Ainsi, « le crime de castration est excusable s’il
a été immédiatement provoqué par un attentat à la pudeur commis avec violences ou par un
viol » (art. 343 du CP). Il en est de même en cas de meurtre ou de coups et blessures
1.
537. 1 Cette loi a été promulguée par le décret 194 du 23 mai 1961, JORHV du 27 mai 1961, p. 495.

237
Précis De Droit Pénal Général

volontaires intervenus suite à des coups ou violences envers des personnes (art. 340 du CP). Le
meurtre ou les coups portés à l'autre conjoint et à son complice, en raison du fait qu'il a été
surpris en flagrant délit d'adultère au domicile conjugal constitue également des excuses
atténuantes (art. 342 du CP). Aussi, « le meurtre, les blessures et les coups sont excusables s’ils
ont été commis en repoussant pendant le jour l’escalade ou l’effraction des clôtures, murs ou
entrée d’une maison ou d’un appartement habité ou de leurs dépendances » (art.341). Toutes
ces situations sont considérées par la loi comme des circonstances atténuantes (art. 345 du CP).

Dans le cas d’excuses atténuantes, une diminution des peines est prévue par l’article 80 du
CP : « Lorsque le fait d’excuse est prouvé, les peines applicables sont les suivantes :
- un emprisonnement de cinq à dix ans, si la peine encourue est de mort ;
- un emprisonnement de un à cinq ans, si la peine encourue est l’emprisonnement à vie ;
- un emprisonnement de six mois à deux ans si la peine encourue est un emprisonnement de
vingt ans ou de cinq à dix ans
- un emprisonnement de six jours à six mois, si la peine encourue est l’emprisonnement de deux
mois à cinq ans ».
Autant la sanction peut être atténuée, autant elle peut être aggravée pour des causes données.

§3 – LES CAUSES D’AGGRAVATION DE LA SANCTION : LA


THÉORIE DES CIRCONSTANCES AGGRAVANTES

300. Les circonstances aggravantes générales et les circonstances aggravantes d'ordre


particulier sont des causes d'aggravation de la sanction. L’aggravation se manifeste surtout au
niveau du quantum de la peine. Les circonstances aggravantes sont des circonstances de fait
prévues par la loi et qui s'ajoutent au fait principal et entraînent le renforcement du
degré de la sanction. En effet, l’article 82 du CP prescrit que, « dans les cas limitativement
énumérés par la loi, les crimes et délits peuvent être aggravés ». En cas de circonstances
aggravantes, le juge peut dépasser le maximum normal de la sanction et le substituer par une
autre sanction plus sévère prévue par la loi. Les circonstances aggravantes se distinguent des
éléments ou des faits constitutifs de l’infraction. Les faits constitutifs sont nécessaires pour
répondre à la question de culpabilité pour le jugement d’un crime. En outre, devant la chambre
criminelle, une seule question est posée pour l’ensemble des éléments constitutifs de
l’infraction alors qu’une question distincte est posée pour chaque circonstance aggravante 1. Les
circonstances aggravantes constituent des moyens légaux d’augmentation du quantum des
sanctions pénales encourues. L’absence d’un élément constitutif de l’infraction rend celle-ci
inexistante alors que l’absence d’une constance aggravante n’est pas un obstacle à l’existence
de l’infraction. Les circonstances aggravantes ne sont pas non plus à confondre avec des
circonstances qualifiées de "judiciaires" qui amènent le juge à aggraver la peine suivant les cas,
tout en restant dans la fourchette légale du quantum des sanctions encourues.

1.
538. 1 article 95 de la loi 51-93 ADP du 16 décembre 1993 relative à la procédure applicable devant la
Chambre criminelle (JOBF du 13 janvier 1994, p33), "…Une question est posée sur chaque fait spécifié
dans le dispositif de l’arrêt de renvoi. Chaque circonstance aggravante fait l’objet d’une question
distincte" ; article 96 : " S’il résulte des débats une ou plusieurs circonstances aggravantes, non
mentionnées dans l’arrêt de renvoi, le président pose une ou plusieurs questions spéciales "

238
Précis De Droit Pénal Général

301. Les circonstances aggravantes peuvent être d’ordre général. Il s’agit de celles qui sont
communes à toutes les infractions. La récidive qui relève des règles applicables en cas de
pluralité d'infractions est un exemple de circonstances aggravantes générales.

Elles peuvent avoir un caractère spécial et dans ce cas, il s’agit de celles qui sont attachées à
certaines infractions. C'est le cas du vol commis de nuit, avec effraction, en réunion, en bande
organisée (art. 452 du CP). Les infractions commises pour des raisons xénophobes, racistes,
sexistes ou religieuses (art 314 du CP) peuvent aussi donner lieu à des circonstances
aggravantes (spéciales).

302. Les circonstances aggravantes se présentent sous plusieurs formes. Elles peuvent être de
caractère psychologique. Il s’agit de la préméditation qui « consiste dans le dessein formé
avant l’action d’attenter à la personne d’un individu déterminé ou même de celui qui sera
trouvé ou rencontré, quand bien même ce dessein serait dépendant de quelque circonstance ou
de quelque condition » (art. 319 du CP). Les circonstances aggravantes peuvent être liées à la
personne de la victime1. C’est le cas notamment d’un crime commis sur la personne d’un
ascendant ou sur une personne vulnérable : parricide (art. 321 & 346 du CP), l’infanticide (art.
322 du CP). Certaines circonstances peuvent être objectives. C’est l’exemple d’une infraction
commise en bande organisée ou en réunion. D’autres sont plutôt de caractère subjectif: cas de
la récidive.

SECTION II - LA DĖTERMINATION DE LA PEINE EN CAS DE


PLURALITÉ D'INFRACTIONS

En présence de plusieurs infractions, les règles de détermination de la sanction sont différentes.


Ainsi, la récidive qui fait référence au passé pénal de l’individu (§1) et le concours
d'infractions (§2) répondent à des règles de sanctions particulières.

§1 – LA RÉCIDIVE

303. Aux termes de l’article 83 du CP, « En matière criminelle et délictuelle, est récidiviste
celui qui, après avoir été définitivement condamné pour une première infraction par une
1.
539. 1 C’est ainsi qu’aux termes des articles 338 et 339 du CP des circonstances aggravantes tenant aux liens
existant entre la victime et l’auteur de l’infraction sont prévues : "est puni d’un emprisonnement de
deux mois à trois ans et d’une amende de 50000 à 900 000 francs, quiconque cause à autrui une maladie
ou incapacité de travail personnel en lui administrant, de quelque manière que ce soit, sciemment mais
sans intention de donner la mort, des substances nuisibles à la santé … ", "Lorsque les faits spécifiés à
l’article précédent sont commis par un ascendant, descendant, conjoint ou successible de la victime ou
une personne ayant autorité sur celle-ci ou en ayant la garde, la peine est
dans le cas prévu à l’alinéa 1er, une emprisonnement de deux à cinq ans ;
dans le cas prévu à l’alinéa 2, un emprisonnement de cinq à dix ans ;
dans le prévu à l’alinéa 3, un emprisonnement de dix à vingt ans ;
dans le cas prévu à l’alinéa 4, l’emprisonnement à vie".

239
Précis De Droit Pénal Général

juridiction nationale ou étrangère, sous réserve que l’infraction ayant motivé la condamnation à
l’étranger, soit également une infraction au regard de la loi nationale, commet un second crime
ou un second délit indépendant de la première infraction ». Il résulte de cette définition légale
qu’un certain nombre d’éléments permet de caractériser la récidive (1) et lorsque celle-ci est
caractérisée, elle influe sur la sanction (2) dans le sens d’une aggravation.

1 – La constitution de la récidive

304. Il s’agit d’une situation qui dénote l’inefficacité d’une première condamnation (sanction)
dans la mesure où celle-ci n’a pas pu prévenir une rechute du délinquant. L’individu n’est pas
parvenu à s’adapter socialement après la première condamnation. La récidive suppose
l'existence d'une première infraction ayant donné lieu à une première condamnation et
l'existence d'une seconde infraction1. La récidive n’est pas à confondre avec un concours réel
d’infractions (cas où une seconde infraction a été commise avant qu’une condamnation
définitive n’intervienne pour la première infraction), ni avec un concours de qualifications ou
concours idéal d’infraction (situation pour laquelle, un seul fait commis peut donner lieu à
plusieurs infractions). Elle se distingue également de la réitération d’infractions (cas où une
première infraction commise a fait l’objet d’une condamnation et une seconde a été commise
sans pour autant que les conditions d’une récidive soient réunies), ni avec une infraction
d’habitude (situation pour laquelle les premiers actes ne sont pas constitutifs de l’infraction, il
faut répéter ces faits une seconde fois pour qu’elle soit constituée). Deux termes interviennent
donc en cas de récidive.

305. Le premier terme2 doit avoir donné lieu à une première condamnation d’ordre pénal.
Cette première phase suppose une première condamnation définitive. La contumace ne saurait
répondre à ce caractère définitif (donc inexistence d’un premier terme)3. Il en est de même pour
une condamnation amnistiée4. Toutefois, la non exécution de la décision (grâce, prescription…)
n’a pas d’incidence sur le calcul du terme

306. Le second terme suppose la commission d’une nouvelle infraction non dépendante de la
première. Ainsi, en cas d’évasion, par exemple, il ne s’agit pas d’une seconde infraction car,
elle est dépendante de celle qui a donné lieu à la condamnation pour laquelle l’individu tente
d’échapper à son exécution. Il n’est cependant pas nécessaire que les infractions (celles du
premier et du second terme) soient de même nature (crime et crime, délit et délit…). Dans
certains cas (situation de récidive perpétuelle), l’écart de temps existant entre le premier terme
et le second ne joue pas sur la constitution de la récidive.
2 Répression en cas de récidive

307. Les articles 84 et 86 du CP prévoient les conditions de sanction du récidiviste. La peine


(pour la seconde infraction) peut être portée au double de celle prévue dans l'un des cas
suivants :
1.
540. 1 M-H RENAUT, "Une technique juridique appliquée à un problème de société, la récidive RSC 2000,
p. 317 &SS.
541. 2 "On appelle « premier terme » de la récidive la peine qui fût encourue pour la première condamnation
prononcée contre le récidiviste et devenue définitive ; on appelle « deuxième terme » de la récidive la
peine principale encourue à l’occasion de la nouvelle infraction".
542. 3 V. Cass. crim. 10 mai 1861, D., 1861, I, 239.
543. 4 V. Cass. crim. française, 20 février 1989, Bull. Crim. 1989, n°81.

240
Précis De Droit Pénal Général

- la personne a fait l’objet d’une première condamnation pour crime et en a commis un


autre (il s’agit ici d’une récidive générale et perpétuelle);
- l’individu a déjà fait l’objet d’une condamnation pour crime et a commis, dans un
délai de 5 ans à compter de l'expiration ou de la prescription de la peine, un délit
intentionnel (il s’agit d’une récidive générale et temporaire);
- celui qui a déjà été condamné pour délit intentionnel et commet un crime dans un délai
de 5 ans à compter de l'expiration ou de la prescription de la peine (il s’agit d’une
récidive générale et temporaire);
- l’individu a déjà été condamné pour délit et a commis un délit identique ou assimilé
(voir article 85 du CP) dans les mêmes conditions de délai que le cas précédent; (il s’agit
d’une récidive spéciale et temporaire);
- l’individu a déjà fait l'objet d’un premier jugement devenu définitif pour contravention
et qui commet une seconde contravention dans un délai d'une année (12 mois) à compter
de ce jugement (il s’agit d’une récidive spéciale et temporaire).

308. La récidive est caractérisée de perpétuelle lorsque l’aggravation de la sanction est


possible quel que soit le délai qui sépare les deux infractions. Elle est temporaire quand
l’aggravation de la peine ne peut intervenir que si la seconde infraction a été commise dans un
délai déterminé par la loi. Aussi, est-elle qualifiée de générale lorsqu’elle existe quelles que
soient les infractions commises. En revanche, elle est spéciale quand l’existence de la récidive
est subordonnée à une identité entre la première infraction et la seconde.

En cas de récidive les infractions de vol, escroquerie, abus de confiance, abus de blanc-seing,
recel de choses, détournement de deniers publics ou d’objets saisis, extorsion de fonds,
concussion, filouterie, corruption, les infractions en rapport avec les chèques et celles reliées
aux sociétés sont considérées comme une mêmes infraction (art. 85 du CP). Il s’agit d’un
exemple de récidive spéciale et temporaire.

309. La loi burkinabé prend en compte l’infraction commise à l’étranger pour constater
l’existence d’une récidive. Mais, cette prise en compte doit remplir les conditions préalables
édictées par l’article 83 du CP. Selon les termes de l’article 83 du CP : « En matière criminelle
et délictuelle, est récidiviste celui qui, après avoir été définitivement condamné pour une
première infraction par une juridiction nationale ou étrangère, sous réserve que l’infraction
ayant motivé la condamnation à l’étranger, soit également une infraction au regard de la loi
nationale, commet un second crime ou un second délit indépendant de la première infraction ».

310. En présence d’une infraction militaire la récidive n’est pas prise en compte dans la
situation suivante : « les condamnations prononcées pour une infraction militaire ne peuvent
constituer le condamné en état de récidive lorsque celui-ci est poursuivi pour une infraction de
droit commun ». On en déduit que dans l’hypothèse où il s’agit d’une condamnation prononcée
pour une infraction de droit commun (situation inverse) l’appréciation de l’état de récidive ne
peut pas se faire sur la base de poursuites pour une infraction militaire.

La preuve de la récidive est rapportée grâce au passé judiciaire de l’individu concrétisé par un
casier judiciaire contenant des informations précises sur les « antécédents pénaux » de
l’individu. Mais dans la pratique, on peut déplorer la non informatisation ou l’absence d’un
fichier central de gestion des condamnations pénales sur l’ensemble du territoire burkinabé.

241
Précis De Droit Pénal Général

Ces insuffisances (dysfonctionnement de l’administration) sont de nature à « couvrir » des


récidivistes car il arrive que leurs condamnations pénales antérieures soient ignorées de la
juridiction qui prononce la nouvelle condamnation. Cette situation est particulièrement
favorisée quand les situations géographiques du déroulement du premier terme (à Bobo par
exemple) et de celui du second terme (Ouagadougou par exemple) diffèrent.

§2 – LES CONCOURS D'INFRACTIONS

Le juge peut être confronté à une situation ou plusieurs infractions ont été commises1. On
distingue deux types de concours d'infractions (1) dont l'un répond à des règles de sanction qui
n'admettent pas le principe de cumul (2).

1 - Concours réel et Concours idéal d'infractions

311. Il y a concours ou cumul réel (matériel) d'infractions lorsqu'une même personne (le
même délinquant) commet une infraction et en commet une nouvelle sans qu'il y ait eu une
condamnation définitive « entre les deux infractions ». Cette catégorie de concours renvoie à
une situation pour laquelle plusieurs infractions ont été commises dans un laps de temps sans
qu’il ait eu une décision judiciaire. Il y a plusieurs actes matériels à l’origine. C’est l'hypothèse
de la personne qui commet plusieurs infractions dans un même laps de temps (vol et abus de
confiance). C’est l’exemple également de celui qui ne respecte pas la signalisation (un panneau
stop par exemple) et tue un piéton2. Il a commis une infraction aux règles de la circulation
routière et il a commis un homicide involontaire. C'est aussi, le cas de celui qui, après un
jugement suite à une première infraction commise, en commet une seconde alors que les voies
de recours lui sont encore ouvertes. Le concours réel d’infractions se distingue de la récidive en
ce que cette dernière suppose l’existence d’une condamnation pénale séparant les deux
moments de commission de l’infraction. Aucune condamnation définitive ne s’interpose entre
les infractions commises, en présence d’un concours réel d’infractions.

312. En revanche, on parle de cumul idéal ou concours idéal d'infraction lorsqu'un seul
acte a conduit à la réalisation de plusieurs infractions. Dans cette hypothèse, le même fait
ou un ensemble de faits permet une pluralité simultanée de qualification (d'infraction). Les
fautes pénales ne sont pas distinctes : il n’y a qu’une seule faute pénale à l’origine. En d’autres
termes un seul fait aboutit à plusieurs incriminations différentes. On part d’un fait matériel
unique et on aboutit à une situation où plusieurs textes d’incriminations s’appliquent au même
fait. La production d'un document falsifié peut constituer à la fois un usage de faux et une
escroquerie. Aussi, des relations sexuelles consommées par contrainte (de la part d’une
personne) en un lieu public conduisent-elles à deux qualifications possibles : un viol (art. 417
du CP : « Le viol est un acte de pénétration sexuelle de quelque nature qu’il soit commis sur la
personne d’autrui par violence, contrainte ou surprise ») et un outrage public à la pudeur (art.
410). Aux termes de l’article 410 du CP « …Constitue un outrage public à la pudeur tout acte
intentionnel contraire aux bonnes mœurs accompli publiquement ou dans un lieu privé
accessible aux regards du public, susceptible d’offenser la pudeur et le sentiment moral des
personnes qui en sont les témoins involontaires ». Le viol est classé dans la catégorie des
1.
544. 1 V. V. LESCLOUS, "Le cumul réel d’infractions", RSC 1991, p. 717.
545. 2 V. Cass. crim. fr., 20 septembre 1993, Gaz. Pal. 1993, II, Sommaire, 573.

242
Précis De Droit Pénal Général

crimes et l’outrage public à la pudeur dans celle des délits. Un arrêt de la Cour de cassation
française illustre également cette pluralité de qualification obtenue à partir d’un fait ou d’une
faute unique. En effet, suite au détournement d’un hélicoptère, la Cour a estimé que ce fait
constituait à la fois une atteinte à la liberté de circulation aérienne (art. 224-6 du CPF) et une
prise d’otage du pilote (art.224-4 du CPF)1.

2 Répression en cas de concours d'infraction

313. En principe, le cumul de peine n'est pas admis par la législation burkinabé en cas de
conviction de l'existence de plusieurs délits ou de plusieurs crimes. Bien que l’individu soit
auteurs de plusieurs infractions, la loi prescrit l’application d’une seule peine. C'est la plus
forte peine qui s'applique dans ce cas : «En cas de conviction de plusieurs crimes ou délits, la
peine la plus forte est seule prononcée » (art. 6, al. 1 du CP). Ce qui sous-entend que c’est la
plus draconienne (par la nature ou la durée ou le degré) des sanctions prévues pour les
infractions en concours qui est prononcée (le maximum légal encouru).

314. Le cas d’un individu qui commet deux infractions peut illustrer le non
cumul. Il a commis, une première infraction, en l’occurrence un vol simple (art. 450 du CP) : il
encourt, en principe, une peine d’emprisonnement de un à cinq ans et/ou une peine d’amende.
Quelques mois plus tard, il commet encore un vol en brisant des scellés (vol commis avec des
circonstances aggravantes): dans ce cas, la peine encourue est un emprisonnement de cinq à dix
ans (art. 198 du CP). La loi prescrit, dans cet exemple, l’application de la dernière peine dans la
mesure où elle est la plus élevée (soit dix ans). On peut également illustrer le non cumul par un
second exemple. L’individu a commis deux infractions dont la première est punie de 4 ans
d’emprisonnement et de 100 000 CFA d’amende ; la seconde est punie de 12 ans
d’emprisonnement et de 50 000FCFA d’amende, le juge prononcera, pour la peine privative de
liberté, la plus élevée des peines encourues : 12 ans d’emprisonnement (au lieu de 12 + 4 =
16). Le même raisonnement s’applique à la peine d’amende : 100 000 FCFA seront retenus au
titre de l’amende (et non 100 000+50 000 =150000). Il s’ensuit qu’il sera prononcé contre lui,
une peine d’emprisonnement de 12 ans et une peine d’amende de 100 000 FCFA au lieu de 16
ans d’emprisonnement et 150 000 FCFA d’amende.

315. Cependant, il y a une dérogation lorsque l’infraction de simple police (contravention),


le délit ou le crime est en situation de concours avec une contravention. Le cumul est, en effet,
admis en cas de concours réel entre contraventions, entre délits et contraventions non connexes
ou entre crimes et contraventions non connexes (art.6, al.2 du CP : « Il y a cumul des peines en
cas de concours réel entre contraventions, entre délits et contraventions non connexes ou entre
crimes et contraventions non connexes »). Il s’ensuit que le cumul est exclu lorsqu’il existe un
lien de connexité entre le crime et la contravention ou entre le délit et la contravention.
Concrètement, si l’agent commet trois contreventions, par exemple, le juge applique, à chacune
de ces trois, la peine (l’amende) correspondante prévue par la loi2. C’est un cumul illimité : le
délinquant peut être condamné à autant de peines d’amende que de contraventions commises.
Dans l’hypothèse ou le concours concerne un délit et une contravention non connexes, la peine
prévue pour le délit et celle relative à la contravention sont prononcées. La même règle
s’applique lorsque le concours réunit un crime et une contravention non connexes. Selon la

1.
546. 1 V. Cass. crim. fr., 22 novembre 1983, Bull. crim., 1983, n°308.
547. 2 V. Cass. crim. (Chambre réunie), 7 juin 1842, S. 1842, I, 496.

243
Précis De Droit Pénal Général

Cour, il y a une « …violation cumulative d’intérêts collectifs ou individuels distinctement


protégés ».

316. D’autres exceptions à la règle de non cumul des peines concernent quelques
infractions précises. La loi impose le cumul en cas d’évasion. Ainsi, « la peine prononcée
pour évasion se cumule avec toute peine privative de liberté infligée pour l’infraction ayant
motivé l’arrestation ou la détention » (art. 236 du CP). Aussi, pour les infractions en matière
douanière le cumul reste-t-il possible : « Tout fait tombant sous le coup de dispositions
répressives distinctes édictées par le présent code doit être envisagée sous la plus haute
acceptation pénale dont il est susceptible. En cas de pluralité de contraventions ou de délits
douaniers, les condamnations pécuniaires sont prononcées pour chacune des infractions
dûment établies » (art. 282 du Code des Douanes)1. La possibilité de cumul, dans le domaine
douanier, peut s’expliquer par le fait que les amendes et pénalités ont, généralement, un
caractère mixte : elles sont répressives et indemnitaires2. Il en est de même en matière fiscal.
Ce cumul existe également en matière sociale : « Lorsqu’une amende est prononcée, en vertu
du présent titre, elle est encourue autant de fois qu’il y a eu d’infractions, sans que, toutefois, le
montant total des amendes infligées puisse excéder cinquante fois les taux minima prévus ci-
dessus » (art. 392 du code du travail).

317. En outre, plusieurs mesures de sûreté peuvent être subies par le condamné. A priori, il
est possible de faire subir au condamné plusieurs peines complémentaires. En principe, le
cumul n’est pas, non plus, exclu en présence de sanctions pénales, administratives et
disciplinaires compte tenu de la différence de nature de ces sanctions. En outre, les dispositions
de l’article 6, alinéa 2 du CP édictant le non cumul ne concernent que les infractions de type
criminel et celles de type délictuel. En principe, les sanctions administratives et disciplinaires
ne relèvent pas du domaine pénal et ne peuvent, en conséquence, être fixées par la loi pénale.
Toutefois, en droit français, le juge constitutionnel a apporté des limites à ce cumul. En effet, le
Conseil Constitutionnel français a, dans une décision du 30 décembre 1997, affirmé que
« lorsqu’une sanction administrative est susceptible de se cumuler avec une sanction pénale, le
principe de proportionnalité implique que le montant global des sanctions éventuellement
prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues…qu’il
appartient aux autorités administratives et judiciaires compétentes de veiller au respect de cette
exigence.

318. Par ailleurs, la loi prévoit la confusion de peine dans l’hypothèse suivante : « Lorsqu’un
individu fait l’objet de plusieurs condamnations pour crimes ou délits résultant de poursuites
diverses devant toute juridiction, la confusion des peines doit être prononcée » ; « Lorsqu’une
peine principale fait l’objet d’une remise gracieuse, il y a lieu de tenir compte, pour
l’application de la confusion des peines, de la peine résultant de la commutation et non de la
peine initialement prononcée (art 7 du CP). Ces dispositions concernent les cas de pluralité de
poursuites (procédures séparées). Cette pluralité peut s’expliquer par le fait que l’existence de
la commission des autres actes prohibés n’était pas connue au moment où la juridiction statuait

1.
548. 1 V. Loi 3-92 ADP du 3 décembre 1992 portant révision du Code des Douanes (CD) et promulguée par
le décret 92-369 du 31 décembre 1992. Elle a été modifiée par la loi 55-95 ADP du 21 novembre 1995
qui a été promulguée par le décret 95-537 du 8 décembre 1995. Aucune des deux lois n’a été publiée au
JOBF.
549. 2 V. Cass. crim. fr., 29 juillet 1970, Bull. Crim. 1970, n° 251 ; Cass. crim. fr., 6 novembre 1997, JCP
1998, II, 10087, note CLIQUENNOIS.

244
Précis De Droit Pénal Général

sur l’une des infractions (en concours) commises. Aussi, peut-il avoir pluralité de poursuites
parce que les infractions en concours relèvent de la compétence de juridictions différentes
(différents ressorts). La pluralité de poursuites entraîne une pluralité de condamnations. C’est
pourquoi la loi prévoit la confusion des peines dans ces conditions.

319. La confusion de peines renvoie à la condamnation d’un individu coupable de plusieurs


crimes ou de plusieurs délits à la peine la plus élevée prévue pour sanctionner les infractions
commises (au maximum). Ainsi, une personne condamnée successivement à cinq, trois et deux
ans d’emprisonnement sera condamnée à cinq ans en application de la règle de confusion et
non dix ans d’emprisonnement (cumul des trois). Elle conduit à une situation où on est en
présence d’une peine absorbée (la moins élevée en principe) et une peine absorbante comme
dans le cas d’une fusion de société commerciale. La peine la plus élevée qui est celle retenue
absorbe l’autre ou les autres peines de même nature (peine d’emprisonnement par exemple). En
réalité, la peine absorbée n’est pas exécutée même si on considère que les deux peines sont
fondues en une seule (peine absorbante). Légalement, la peine absorbée est réputée exécutée à
travers l’exécution de la peine absorbante. La confusion renvoie donc à l’exécution
(simultanée) des peines dans la limite du maximum de la peine la plus draconienne (non la
somme des peines encourues). Mais, l’article 7 du CP ne prévoit pas de limite, ce qui suppose
que le juge est libre à sujet. Ce silence pourrait aussi être interprété comme un renvoi, en ce qui
concerne le plafond à ne pas dépasser, à l’article 6 du CP qui précise la peine à prononcer : la
plus forte peine prévue pour les infractions en concours. Ce plafond de la peine pourrait servir
de limite à ne pas dépasser pour la confusion des peines. Il n’en demeure pas moins que
l’insuffisance du texte prévoyant la confusion (art. 7 du CP) peut entraîner des abus de la part
du juge.

En principe, dans un cas de confusion, la peine absorbée garde son autonomie dans la mesure
où il en est tenu compte pour le passé judiciaire (casier judiciaire, récidive, octroi du sursis).
Les différentes peines confondues conservent donc leur existence propre. A ce titre, la
jurisprudence estime que la confusion doit être appréhendée comme « une mesure d’exécution
qui n’a pas pour effet d’enlever aux peines confondues leur existence propre et leurs
conséquences légales, mais de déterminer que l’exécution en aura lieu simultanément avec
celle de la peine la plus forte »1.

1.
550. 1 Cass. crim., 19 juillet 1930, S. 1932, I, 114.

245
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE II – SUSPENSION ET EXÉCUTION DE LA


SANCTION PÉNALE

320. L’exécution d’une sanction1 suppose l’existence d’un titre d’exécution, qui peut contenir
certaines dispositions de suspension (en cas de sursis). Le principe de la légalité pénale
n’échappe donc pas à l’exécution des sanctions : une sanction ne peut faire l’objet d’une
exécution que si elle tire son existence d’une décision (définitive) rendue par une juridiction
compétente. C’est ainsi qu’aux termes de l’article 8 du kiti VI 103 du 1er décembre 1988 relatif
aux établissements et aux régimes pénitentiaires2, « nul ne peut être incarcéré dans un
établissement pénitentiaire s’il n’a fait l’objet : …de condamnation à l’emprisonnement
devenue définitive ; d’une réquisition d’incarcération délivrée en vue de l’exécution de la
contrainte par corps… ».

En tout état de cause, l’exécution d’une décision judiciaire en matière pénale fait intervenir le
ministère public (fait exécuter les condamnations prononcées), le juge chargé de l’application
des peines et l’administration pénitentiaire (garde de sécurité pénitentiaire…). Cela vaut aussi
pour l’exécution de la peine de mort qui reste néanmoins assez particulière. L’utilité de cette
peine est assez controversée.

Par ailleurs, une sanction pénale peut faire l'objet d'une suspension (Section I) comme elle
peut faire l'objet d'une exécution (Section II). Il en ressort que la peine prononcée ne coïncide
pas avec celle qui est prévue dans le texte d’incrimination car le juge tient compte de la
personnalité du délinquant et des circonstances dans lesquelles l’infraction a été commise.

SECTION I – LA SUSPENSION DE L'EXECUTION DE LA SANCTION

Une fois la sanction prononcée, surtout quand il s'agit d'une peine, son exécution peut être
suspendue. Le sursis (§1) et la libération conditionnelle (§2) constituent des formes de
suspension. Il en existe d'autres (§3).

§1 – LE SURSIS

321. Le sursis consiste à suspendre l'exécution de la sanction, plus précisément l'exécution de


la peine. C'est une faveur accordée à certains délinquants qui peuvent en profiter pour se
reclasser dans la société. Ainsi, aux termes de l’article 694 du CPP, « En cas de condamnation
à l’emprisonnement ou à l’amende, si le condamné n’a pas fait l’objet de condamnation
antérieure à l’emprisonnement pour crime ou délit de droit commun, les cours et tribunaux
peuvent ordonner, par le même jugement et par décision motivée, qu’il sera sursis à l’exécution
de la peine principale ».

1.
551. 1 V. Anne D’HAUTEVILLE, "Réflexions sur la remise en en cause de la sanction pénale", RSC, 2002,
p. 401 & SS.
552. 2 Kirti An VI 103 du décembre 1988 relatif à l’organisation, au régime et à la réglementation des
établissements pénitentiaires, JOBF 1er décembre 1988, p. 2069. Le Kiti est un décret.

246
Précis De Droit Pénal Général

Le sursis qui peut être total ou partiel (amende ou emprisonnement en partie ou en totalité)
ne s'applique pas aux mesures de sûreté. C'est au juge qui prononce la sanction que revient la
compétence de décider de l'opportunité d'accorder cette faveur au délinquant. Cette suspension
lorsqu'elle est acquise peut se transformer en dispense de peine. Dans ce cas, le délinquant
n'aura plus à exécuter la peine. C'est une condamnation à exécution conditionnelle. Mais le
sursis ne peut s'obtenir que sous certaines conditions. Le délinquant ne doit pas avoir fait l'objet
d'une condamnation antérieure. La Cour Suprême a d’ailleurs rappelé cette condition dans sa
décision du 26 novembre 1971 : « sur le moyen de cassation unique pris,…de la violation des
dispositions de l’article 694 du code de procédure pénale : en ce que le jugement frappé de
pourvoi accorda le bénéfice du sursis à un condamné ne possédant pas la qualité de
délinquant primaire…qu’il résulte du B2 …que … T. avait été condamné à un mois
d’emprisonnement pour outrage… »1.

322. Le sursis s'applique, en principe, aux peines d'amende, d'emprisonnement et concerne les
peines criminelles, correctionnelles et contraventionnelles. Toutefois, les condamnations
militaires ne sont pas, en principe, prises en compte pour les condamnations antérieures dans la
mesure où ces infractions ne constituent pas des infractions de droit commun. A ce titre,
l’article 150 du Code de justice militaire prescrit: « En cas de condamnation à la peine
d’emprisonnement où à l’amende, la juridiction militaire peut décider qu’il sera sursis à
l’exécution dans les conditions prévues par le code de procédure pénale sous les réserves
suivantes :
1)- la condamnation pour une infraction militaire
- ne fait pas perdre au condamné le bénéfice du sursis antérieurement accordé pour
une infraction non militaire ;
- ne fait pas obstacle à l’octroi ultérieur du sursis pour une infraction de droit commun;
2) le sursis précédemment accordé pour une infraction militaire n’est pas révoqué par une
condamnation pour une infraction de droit commun».

323. Le sursis ne tient que si le délinquant ne commet pas un crime ou un délit de droit
commun donnant lieu à une nouvelle condamnation à une peine d’emprisonnement ou à une
peine plus grave, pendant un délai qui est fixé à cinq ans à compter de la décision ayant donné
lieu au sursis (art. 695 du CPP). En cas de succès à l'épreuve de non commission d'infraction
pendant les cinq années prévues, la condamnation est considérée comme non avenue. En
revanche, l’intervention d’une nouvelle infraction avant l’expiration de ce délai fait perdre au
condamné cette faveur et constitue un obstacle à l’obtention de celle-ci au compte de la
nouvelle condamnation. La Cour Suprême a confirmé cette règle, en estimant que la Cour
d’Appel a violé la loi en accordant un sursis, dans ces conditions2. Elle a exprimé cet obstacle
en ces termes : « Attendu que S. K. et S. O. avaient été condamnés le 24 février 1970 par le
tribunal correctionnel de Laure, chacun à un mois d’emprisonnement avec sursis du Chef de
vol de récoltes non détachées du sol…que la même juridiction les condamna à nouveau le 23
novembre 1971 à trois mois d’emprisonnement chacun pour destruction de plants …assortit
de sursis…les condamnations prononcées ; attendu que ces nouvelles condamnations à
l’emprisonnement pour des délits de droit commun, succèdent moins de 5 années plus

1.
553. 1 Cour Suprême (Cour de cassation), Chambre Judiciaire, Formation pénale, 26 novembre 1971, arrêt
n°2/PE/71, Bulletin de la Cour Suprême de Haute-Volta, 1er semestre 1978, p. 40.
554. 2 Cour Suprême (Cour de cassation), Chambre Judiciaire, Formation pénale, 10 janvier 1975, arrêt
n°21PE/75, Bulletin de la Cour Suprême de Haute-Volta, 2ème semestre 1978, p. 43.

247
Précis De Droit Pénal Général

tard à une autre non effacées, interdisant l’octroi du sursis et que les juges d’appel violèrent
les prescriptions de l’article 694 du Code de procédure pénale en passant outre ».

Aussi, l’échec aux épreuves du sursis entraîne-t-il sa révocation. Dans cette hypothèse, le
condamné devra exécuter la peine ayant donné lieu au sursis et celle prononcée pour la
nouvelle condamnation, sans aucune confusion possible (art. 695 du CP). Les règles de
récidive sont applicables dans ce cas. Le président de la juridiction qui a prononcé la
condamnation assortie du sursis a l’obligation d’informer le condamné, après ce prononcé, des
conséquences de la rechute (échec).

Le sursis réussi n'est pas une entrave au paiement des dommages et intérêts. Il ne dispense pas
non plus de l'application des peines accessoires, des incapacités, des interdictions et
déchéances résultant de la condamnation durant le délai d'épreuve. Mais, celles-ci cessent
d'être appliquées (art. 696 du CPP) à partir du jour où la condamnation est réputée non avenue
(conséquence du succès du sursis). Par ailleurs, malgré sa qualité de délinquant primaire,
l’individu auteur de certaines infractions, ne peut bénéficier d’un sursis. La manipulation, le
transit, l’importation, l’achat, la vente, le transport, le dépôt et le stockage de déchets
dangereux, en violation des règles de l’environnement en constituent une illustration. L’article
87 de la loi 41-ADP du 8 novembre 1996 modifiée par une loi de 1998, réglementant l’usage
des pesticides1 prescrit : « Est puni d’une peine d’emprisonnement de dix à vingt ans et d’une
amende de un milliard à cinq milliard (1 000 000 000 à 5 000 000 000) quiconque se livre à la
manipulation des déchets dangereux…Les dispositions relatives au sursis ne sont pas
applicables aux infractions prévues par le présent article ».

En droit français, il existe d'autres types de sursis en plus du sursis simple. Il s’agit
essentiellement du sursis avec mise à l'épreuve ou sursis probatoire (art. 132-40 & SS. du
CPF) et du sursis assorti d'une obligation (132-52 & SS. du CPF) d'accomplir un travail
d'intérêt général (TIG). Le premier consiste à suspendre l’exécution d’une peine
d’emprisonnement dont la durée maximum ne dépasse pas dix ans et à soumettre une épreuve
au condamné. Le second est une variante du sursis avec mise à l’épreuve. Mais cette forme se
caractérise par le fait que l’épreuve, en l’occurrence le TIG, est soumise au consentement du
condamné.

La libération conditionnelle constitue une autre forme de suspension de l'exécution dont le


régime est différent de celui du sursis.

§2 – LA LIBERATION CONDITIONNELLE

324. L’article 689 du CPP, prescrit que « les condamnés ayant à subir une ou plusieurs peines
privatives de liberté peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle s’ils ont donné des
preuves suffisantes de bonne conduite et présentent des gages sérieux de réadaptation
sociale... ». Il en ressort que la libération conditionnelle constitue une mesure qui permet de
libérer une personne condamnée à une peine privative de liberté avant la fin de l’exécution de

1.
555. 1 V. loi 41-96 ADP du 8 novembre 1998 relative au contrôle des pesticides, modifiée par la loi 6-98 AN
du 26 mars 1998 promulguée par le décret 98-156 du 11 mai 1998, JOBF du 21 mai 1998, p. 4856.

248
Précis De Droit Pénal Général

la peine prononcée contre elle1. Elle permet donc d'exécuter partiellement la sanction et d'en
être libéré pour le restant. L’individu recouvre, par conséquent, la liberté plus tôt (de façon
anticipée), par rapport à la durée prévue dans la décision de condamnation. Toutefois, en droit
militaire, le bénéficiaire ayant conservé sa qualité de militaire recouvre sa liberté par rapport à
la détention dans l’établissement pénitentiaire mais doit être remis à l’autorité militaire pour
assumer ses obligations militaires. Sa liberté est en réalité limitée dans ces conditions. Cette
mesure est prescrite par l’article 147 du Code de justice militaire : « Le condamné militaire qui
conserve sa qualité peut bénéficier de la libération conditionnelle conformément à la procédure
de droit commun par arrêté du ministre chargé de la défense investi des pouvoirs judiciaires.
L’intéressé est dans ce cas mis à la disposition effective de l’autorité militaire pour l’exécution
de ses obligations militaires. Il reste sous surveillance exclusive de cette autorité ».

325. La libération conditionnelle s'applique donc aux condamnations privatives de liberté et


cela quelle que soit leur durée. Le bénéfice de cette mesure nécessite que le condamné ait déjà
exécuté une partie de la peine. Le quantum de la partie à exécuter dépend de la durée de la
peine initialement prononcée.
- Ainsi, pour une peine inférieure à six (6) mois, le condamné doit en avoir subi trois mois ;
- L'exécution de la moitié de la peine est requise si la peine d’emprisonnement est
supérieure à six (6) mois ;
- Si le condamné est en état de récidive le temps d’épreuve est porté à six mois pour une
condamnation inférieure à neuf (9) mois d’emprisonnement ;
- Les deux tiers (2/3) de la peine sont à subir effectivement, si la peine prononcée est
supérieure à neuf (9) mois (v. art. 689 CPP).

D'autres délais sont prévus (art.689 al. 3 et 4 du CPP) mais ceux-ci ne correspondent pas aux
types de peines prévus aux articles 8 à 12 du CP2. L’article 689 alinéas 3 et 4 prévoit les délais
pour des peines qui n’existent plus. En effet, selon les prescriptions de cet article, « Pour les
condamnés aux travaux forcés à perpétuité, le temps d’épreuve est de quinze années. Pour
les condamnés à une peine temporaire assortie de la relégation, il est de quatre ans plus long
que celui correspondant à la peine principale si cette peine est correctionnelle, de six ans plus
long si cette peine est criminelle ». Les travaux forcés et la relégation ont été implicitement
abrogés par la loi instituant le code pénal.

Pour prétendre au bénéfice de cette mesure, d'autres conditions viennent s'ajouter aux
précédentes. Ainsi, le condamné doit avoir une bonne conduite donnant des gages sûrs de
réadaptation sociale. D'autres conditions et mesures peuvent grever la mesure de libération
conditionnelle (art. 691 & 692 du CPP). A ce titre, des mesures d’assistance peuvent être prises
pour favoriser et accompagner la réinsertion de l’individu. Aussi, des mesures de contrôle
(convocation,…) doivent être mises en œuvre pour suivre l’individu libéré.

1.
556. 1 V. H. ABERKANE, "La libération conditionnelle comme mode de réadaptation sociale des détenus",
RSC, 1957, p. 36 & SS.
557. 2 Il s’agit de délais relatifs aux travaux forcés et à la relégation qui ont été supprimés implicitement par
la loi 43-96 du 13 novembre 1996 instituant le code pénal. Le code de procédure pénale contient
quelques dispositions qui sont en contradiction avec certaines règles pénales parce qu’elle date de 1968
et n’a pratiquement pas encore été modifié.

249
Précis De Droit Pénal Général

326. Le Ministère de la justice est compétent pour ordonner la libération conditionnelle (art.
690 du CPP)1. Mais, le dossier doit recueillir l'avis du chef d'établissement dans lequel est
détenu le condamné et ceux du président, du représentant du ministère public de la juridiction
qui a prononcé la peine, du sous-préfet de l'arrondissement où le condamné entend résidé et
enfin celui du Ministre de l'administration territoriale (art. 690 du CPP).

La libération conditionnelle est révocable notamment en cas d'inconduite notoire, de nouvelle


condamnation. Il en est de même en cas d'inobservation des mesures édictées et des conditions
d'exécution contenues dans l'arrêté de libération (art 693 du CPP) qui est d’ailleurs modifiable
(art. 692, dernier alinéa)2. Dans le cas où le condamné est réincarcéré, la durée de cette
détention ne coïncide pas forcément avec le temps restant à subir lors de la mise en liberté
conditionnelle. Il peut en subir seulement une partie (art 693, al. 3 du CPP). Il peut également
subir une peine de durée supérieure à la peine restante à exécuter lors de la libération
conditionnelle, surtout dans le cas où il a fait l’objet d’une nouvelle condamnation.

Dans l’hypothèse où aucune révocation n'est intervenue au cours des délais fixés (en principe
le temps restant de la peine à subir), la libération est acquise et l'individu est réputée avoir
complètement exécuté la peine prononcée contre lui initialement. Le bénéfice de la libération
conditionnelle n’entraîne pas la disparition de la condamnation. La condamnation, est, par
conséquent, mentionnée dans le casier judiciaire.

Sur le plan militaire, le bénéficiaire d’une libération conditionnelle, en situation de service


militaire a droit à une prise en compte du temps passé à ce service. Ce droit est prescrit par
l’article 149 du Code de justice militaire « Lorsque le condamné a atteint la date de libération
de son service militaire dans l’armée active sans révocation de sa libération conditionnelle, le
temps passé au service compte dans la durée de la peine encourue ».

1.
558. 1 Article 691 du CPP " Le bénéfice de la libération conditionnelle peut être assorti de conditions
particulières ainsi que de mesures d’assistance et de contrôle destinées à faciliter et à vérifier le
reclassement du libéré".
559. 2 Article 692 du CPP: "L’arrêté de libération conditionnelle fixe les modalités d’exécution et les
conditions auxquelles l’octroi ou le maintien de la liberté peut être subordonné, ainsi que la nature et la
durée des mesures d’assistance et de contrôle.
Cette durée ne peut être inférieure à la durée de la partie de la peine non subie au moment de la
libération s’il s’agit d’une peine temporaire ; elle peut la dépasser pour une période maximum d’un an.
Toutefois, lorsque la peine en cours d’exécution est une peine perpétuelle…la durée des mesures
d’assistance et de contrôle est fixée pour une période qui ne peut être inférieure à cinq années, ni
supérieure à dix années.
Pendant toute la durée de la liberté conditionnelle, les dispositions de l’arrêté de libération peuvent être
modifiées par arrêté du ministre de la Justice."
Article 693 du CPP : "En cas de nouvelle condamnation, d’inconduite notoire, d’infraction aux
conditions ou d’inobservation des mesures énoncées dans la décision de mise en liberté conditionnelle,
le ministre de la justice peut prononcer la révocation de cette décision, sur avis du magistrat du
ministère public.
Après révocation, le condamné doit subir, selon les dispositions de l’arrêté de révocation, tout ou partie
de la durée de la peine qu’il lui restait à subir au moment de sa mise en liberté conditionnelle,
cumulativement, s’il y a lieu, avec toute nouvelle peine qu’il aurait encourue ; le temps pendant lequel il
a été placé en état d’arrestation provisoire compte toutefois pour l’exécution de sa peine.
Si la révocation n’est pas intervenue avant l’expiration du délai prévu à l’article précédent, la libération
est définitive. Dans ce cas, la peine est réputée terminée depuis le jour de la libération conditionnelle.

250
Précis De Droit Pénal Général

§ 3 – AUTRES FORMES DE SUSPENSION D'EXÉCUTION DE LA


PEINE

327. La semi-liberté (1), le placement à l'extérieur (2), la suspension pour état de démence du
condamné (3) peuvent figurer sur la liste de ces autres formes. L’article 26 du Kiti an VI 103
du 1er décembre 1988 prescrit que, « seuls les détenus en division d’amendement peuvent
bénéficier des mesures1 ci-après :
- placement à l’extérieur ;
- régime de semi-liberté ;
- corvée extérieure ;
- placement soit dans un centre de production agricole ou industrielle, soit dans un centre de
formation professionnelle ».

328. Au sens de la loi (art. 29 Kiti an VI 103 du 1er décembre 1988), « la corvée extérieure
consiste en un travail ponctuel d’utilité publique effectué par des condamnés à l’extérieur de
l’établissement pénitentiaire sous la surveillance des agents de l’administration pénitentiaire ou
de l’utilisateur. Ils réintègrent l’établissement après la corvée… » Il s’ensuit que la corvée,
travail pénal, constitue une suspension de l’exécution de la peine en milieu fermé mais d’une
courte durée ne dépassant pas, en principe, une journée. Les agents de l’administration ou
l’utilisateur est chargé de la surveillance des travailleurs pénaux pendant l’exécution. Mais,
dans la pratique, il est préférable de confier cette responsabilité aux agents de l’administration
pénitentiaire qui sont non seulement des spécialistes en la matière, mais aussi plus proches des
détenus. Ils connaissent mieux leur « cursus carcéral ». Pire, en cas d’incident (notamment en
cas de tentative de fuite des détenus, en cas de violence) l’utilisateur ne dispose pas de moyens
nécessaires pour réagir urgemment et il peut être victime des mauvais comportements des
détenus.

La loi prévoit la possibilité de passer la nuit hors de l’établissement lors de l’exécution de cette
corvée. Cette dérogation n’est possible que dans l’hypothèse où il s’agit d’un groupe de
détenus, ce qui signifie qu’un seul détenu ne peut pas bénéficier de cette faveur (art. 29, al. 3
du kiti 1er décembre 1988). En outre, les prévenus, bien qu’ils ne soient pas astreints à la
corvée extérieure, peuvent demander à y participer mais sous les mêmes conditions
d’exécution de la corvée (art. 29, al. 4 et art.16 du kiti 1er décembre 1988). L’autorisation est
accordée soit par le juge d’instruction soit par le procureur de la république et doit être
motivée.

Le placement dans un centre de production agricole, industrielle ou dans un centre


professionnel se rapproche du placement à l’extérieur. Mais, le législateur ne les confond pas
probablement parce que ce placement vise des centres spécialisés.

1.
560. 1 La commission de l’application des peines est compétente pour décider de ces mesures.

251
Précis De Droit Pénal Général

1– La semi-liberté

329. La semi-liberté, connue aussi sous l’appellation « semi-detention », est un régime


d'exécution de peine privative de liberté, qui permet au condamné de se déplacer hors de
l'établissement de détention, sans surveillance continue. C’est un régime qui adoucit la
privation de la liberté d’aller et venir décidée contre l’individu. Le condamné se voit octroyer
des parcelles de liberté de mouvements hors de l’établissement pénitentiaire dans lequel, il
exécute sa peine. En général, ceux qui en bénéficient se déplacent pour suivre une formation
professionnelle, un stage, un traitement médical ou pour exercer une activité professionnelle ou
encore pour suivre des enseignements. Elle permet de suspendre l'exécution de la peine
pendant la sortie temporaire hors de l'établissement.

En droit burkinabé, celui qui en bénéficie doit, en principe, réintégrer l'établissement chaque
soir. Il ne peut pas effectuer de déplacement les jours chômés et fériés1. Toutefois, la
périodicité des sorties peut être autrement décidée par la Commission de l’application des
peines (art. 28, al. 2 du kiti 1er décembre 198)2. Le bénéficiaire de la mesure jouit
exceptionnellement de quelques droits. Il est notamment autorisé à détenir de l’argent pour
régler les frais de transport occasionnés par ses sorties hors de l’établissement pénitentiaire et
les repas consommés à cette occasion.

La semi-liberté est révocable à tout moment surtout en cas de mauvaise conduite ou de non
respect des règles sous-tendant le bénéfice de cette mesure.

2– Le placement à l'extérieur

330. C'est une mesure qui permet au condamné d'exercer une activité à l'extérieur de
l'établissement d'incarcération, tout en résidant également à l'extérieur (soit chez le bénéficiaire
du service, soit chez un tiers garant). Le placement à l’extérieur permet également de suspendre
l'exécution de la peine d'emprisonnement. Cette mesure, « …consiste dans l’emploi permanent
d’un condamné à des travaux hors de l’enceinte de l’établissement pénitentiaire qui implique la
résidence du placé chez lui-même, chez l’utilisateur de ses services ou chez un tiers garant. Il
donne lieu à un rapport périodique établi par un éducateur ou une personne désignée par la
commission de l’application des peines » (art. 27 du Kiti an VI 103 du 1er décembre 1988).

3 – La suspension en cas de survenance de démence

331. Lorsqu'en cours d'exécution d'une peine privative de liberté en particulier une peine
d’emprisonnement, survient une démence, l'exécution de la peine de la personne atteinte est
suspendue. La personne est, en général, internée dans un établissement psychiatrique. Ainsi,
aux termes de l’article 164 du Kiti an VI 103 du 1er décembre 1988, « Les détenus en état
d’aliénation mentale ne peuvent être maintenus dans un établissement pénitentiaire. Le parquet
1.
561. 1 Voir art. 26 et 28 du Kiti an VI 103 du 1er décembre 1988 portant organisation, régime et
réglementation des établissements pénitentiaires au BF, JO 1er déc. 1988, P. 2069).
562. 2 Une commission de l’application des peines est instituée dans chaque établissement pénitentiaire. Elle
est présidée par le juge de l’application des peines et composée du chef de l’établissement, du
surveillant chef, d’un éducateur spécialisé, d’un assistant social, du médecin et d’un représentant des
visiteurs agrées de l’établissement (26 du Kiti an VI 103 du 1er décembre 1988).

252
Précis De Droit Pénal Général

ou la direction de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion sociale fait engager la


procédure d’internement dans un établissement spécialisé »

SECTION II– L'EXÉCUTION DE LA PEINE

L’exécution de la peine d’amende (§1) et celle de la peine privative de liberté (§2) diffèrent.
L'exécution de la sanction, de façon générale, répond à des régimes précis. Les peines
privatives de liberté ont un régime assez particulier dans la mesure où elles touchent à la liberté
d'aller et venir et s'exécutent en général dans des établissements pénitentiaires (§3) suivant un
régime déterminé (§4).

§1 – L’EXÉCUCTION DE LA PEINE D’AMENDE

Cette exécution peut être volontaire (1) comme elle peut être obtenue par contrainte (2).

1 - L’exécution volontaire de la peine d’amende

332. L’exécution de l’amende est matérialisée par le paiement de celle-ci. Mais, elle pose la
question de la solvabilité du condamné. Lorsqu’il est solvable, le paiement est, souvent,
effectué volontairement. Le recouvrement de l’amende est, souvent, assuré par un agent de
l’administration (percepteur,…). Le recouvrement est fait au nom du Procureur par le Trésor
(art. 678 du CPP).

En cas de pluralité de condamnés (coauteurs, complices), le juge peut condamner toutes les
personnes ayant concouru à la commission de l’infraction, solidairement : c’est la solidarité
pénale entre condamnés1. Le principe est énoncé par le législateur : « Tous les individus
condamnés pour un même crime ou pour un même délit seront tenus solidairement des
amendes, des restitutions, des dommages et intérêts et des frais » (art. 54 du CP). Les
coauteurs, les complices peuvent donc être tenus, solidairement, au payement de l’amende2.

Cette solidarité est, par exemple, prévue dans le domaine douanier. Aux termes de l’article 253
du Code des Douanes (CD), « Les condamnations contre plusieurs personnes pour un même
fait de fraude sont solidaires, tant pour les pénalités pécuniaires tenant lieu de confiscation que
pour l’amende… ». Il est également prescrit à l’article 254 du CD que, « les propriétaires des
marchandises de fraude, ceux qui se sont chargés de les importer ou de les exporter, les
intéressés à la fraude, les complices et adhérents, sont tous solidaires et contraignables par
corps pour le paiement des amendes … ». Dans cette hypothèse (de la solidarité), on peut se
demander s’il est possible d’exiger le payement de la totalité de l’amende à un condamné
solvable quitte à se retourner contre les autres (insolvables) co-condamnés pour réclamer le
remboursement des sommes mises à leur charge. Partant du fait que le calcul de la durée de la
contrainte par corps se fait sur la base du montant total de l’amende prononcée (art. 699 & 700
du CPP), on peut en déduire que la totalité de cette somme peut être réclamée à un seul

1.
563. 1 V. H. PERRET, "Le rôle de la solidarité pénale entre les condamnés à une peine d’amende", RSC
1941, p. 7.
564. 2 V. Cass. crim. fr. 12 octobre 1961, Bull. Crim. 1961, n° 399.

253
Précis De Droit Pénal Général

condamné voire aux condamnés solvables1, même si une telle possibilité est, a priori, en
contradiction avec le principe d’individualisation de la peine2.

2 - L’exécution par voie de contrainte

333. Le recours à la contrainte par corps (devenue la contrainte judiciaire en droit français)
contre le débiteur d’une amende est prévu, pour son recouvrement 3. Cette contrainte n’est
possible, en principe, qu’en cas de condamnation pénale. Mais, elle s’étend aux condamnations
civiles (prononcées par les juridictions civiles) lorsque ces condamnations interviennent dans le
cadre de la réparation d’une infraction dont la constitution a été établie par une juridiction
pénale (art. 712 du CPP). La contrainte ne s’applique pas, en principe, aux infractions
politiques et aux peines à caractère perpétuel (article 699 du CPP). La contrainte par
corps est un moyen de recouvrement forcé de l’amende pénale : c’est une voie
d’exécution4. Le débiteur de l’amende est emprisonné pour une durée déterminée dans le but de
l’obliger à s’acquitter de sa dette. Cette durée dépend du montant dû. C’est ce que prévoit
l’article 52 du CP : « l’exécution des condamnations à l’amende, aux restitutions, aux
dommages-intérêts et aux frais pourra être poursuivie par la voie de la contrainte par corps ».
La contrainte par corps ne peut être exécutée qu’après l’écoulement d’un délai de trois (3) mois
courant à partir de la réception du commandement de payer par le condamné (art. 712, al.2 du
CPP). Il n’en demeure pas moins que l’exécution anticipée de la contrainte par corps est
possible en cas de contrebande en attestent les dispositions de l’article 237 du CD : « tout
individu condamné pour contrebande est, nonobstant appel ou pourvoi en cassation, maintenu
en détention jusqu’à ce qu’il ait acquitté le montant des condamnations pécuniaires prononcées
contre lui ; cependant la durée de la détention ne peut excéder celle fixée par la législation
relative à la contrainte par corps ». L’article 714 du CPP précise que : « la contrainte par corps
est subie dans une prison ». La durée de cette privation de liberté varie suivant le montant de
l’amende dû. Ainsi, elle est fixée comme suit (v. art. 700 du CPP) :
- « de cinq à dix jours lorsque l’amende et les condamnations pécuniaires n’excédent pas
5000 francs ;
- de dix à vingt jours lorsque, supérieures à 5000 francs, elles n’excédent pas 25 000 francs;
- de vingt à quarante jours lorsque, supérieures à 25 000, elles n’excédent pas 50 000 francs;
- de quarante à soixante jours lorsque, supérieures à 50 000, elles n’excédent pas 100 000
francs
- de deux à quatre mois lorsque, supérieures à 100 000, elles n’excédent pas 200 000 francs ;
- de quatre à huit mois lorsque, supérieures à 200 000, elles n’excédent pas 400 000 francs
- de huit à un an lorsque, supérieures à 400 000, elles n’excédent pas 800 000 francs
- d’un an à deux ans lorsqu’elles n’excédent pas 800 000 francs… »
S’il s’agit d’une contravention, la durée ne doit pas excéder dix jours.
1.
565. 1 V. Cass. crim. 3 juin 1937, Bull. Crim. 1937, n° 118.
566. 2 V. Cass. crim. fr., 22 octobre 1997, Bull. Crim. 19971, n° 45.
567. 3 Article 699 du CPP : «Lorsqu’une condamnation à l’amende ou au frais à tout payement au profit du
Trésor public ou à tous dommages-intérêts au profit de toute partie civile est prononcée pour une
infraction n’ayant pas un caractère politique et n’emportant pas peine perpétuelle, par une juridiction
répressive, celle-ci fixe, pour les cas où la condamnation demeurerait inexécutée, la durée de la
contrainte par corps dans les limites …prévues.
Lorsque la contrainte par corps garantit le recouvrement de plusieurs créances, sa durée est fixée
d’après le total des condamnations.
568. 4 V. Cass. crim. fr, 26 juin 1989, JCP 1989, IV, 350.

254
Précis De Droit Pénal Général

Certaines catégories de personnes sont exonérées de cette contrainte même en cas de non
acquittement de l’amende pénale. Les mineurs âgés de moins de 18 ans lors de la commission
de l’infraction et les personnes âgées de plus 59 ans au moment de la condamnation bénéficient
de cette exemption (art. 701 du CPP). En présence d’un couple marié, la contrainte par corps
ne peut être ordonnée contre les deux simultanément, même si les condamnations sont
différentes (art. 703 du CPP). Ce qui laisse penser que, même si à l’origine les litiges qui ont
donné lieu à ces condamnations n’étaient pas liés, l’application simultanée n’est pas possible.
En outre, les condamnés insolvables peuvent obtenir la réduction de moitié de la durée de la
contrainte par corps sous certaines conditions (art. 702 du CPP) : il faut produire un certificat
de non imposition et un autre certificat délivré par le maire de la commune ou par le
commissaire de police de la circonscription administrative du domicile. Le dernier certificat
constitue probablement un document prouvant que l’individu a son domicile dans la commune
émettrice du document. Aussi, l’exécution de la contrainte peut être arrêtée si le condamné
fournit une caution solidaire ou une sûreté réelle (art. 715 du CPP). La sûreté réelle est une
garantie (gage, hypothèque…) de l’exécution d’une obligation tandis que la caution est une
personne qui apporte un appui à un débiteur par rapport à la dette contractée. La caution
garantit donc la dette d’autrui et quand il s’agit d’une caution solidaire, cette dernière est tenue
par l’obligation comme le débiteur principal (il se retrouve dans la situation d’un codébiteur)1.

En somme, l’exécution de la peine d’amende un moyen de garantie de recouvrement de


l’amende n’est pas considérée comme une peine (d’emprisonnement). Mais son exécution
conduit au même résultat : l’incarcération de l’individu qui prive l’individu de sa liberté d’aller
et venir. Il existe des moyens de garantie de recouvrement de la créance, non privatifs de
liberté. Il s’agit notamment de la saisie des biens du débiteur, de l’amende et le cas échéant
cette saisie peut aboutir à une vente aux enchères. Mais, cette situation suppose que le
condamné est, en quelque manière, solvable. L’incarcération du débiteur de l’amende n’efface
pas la peine d’amende, elle reste due et celui-ci devra s’en acquitter. La contrainte par corps ne
constitue pas une sanction pénale ni une peine de remplacement de l’amende impayée2. Elle ne
peut pas donner lieu à une réduction de peine ou à une confusion de peine. On peut toutefois,
relever que la Cour Européenne des droits de l’Homme s’oppose à l’interprétation selon
laquelle la contrainte par corps ne constitue pas une peine. Elle assimile plutôt celle-ci à une
peine3.

Dans des pays comme le Burkina Faso où une bonne proportion de la population souffre de
pauvreté, on peut s’interroger sur l’utilité ou l’efficacité de la contrainte par corps. Ceux qui
sont amenés à subir cette contrainte sont souvent des personnes insolvables ou sans ressource.
Un voleur à la tire (vagabond) qui se trouve dans cette situation ne pourra pratiquement jamais
se libérer de sa dette. Or, on remarque que la population carcérale est à dominance pauvre, sans
emploi, sans domicile fixe. Dans ces conditions, l’emprisonnement de l’individu ne fait
qu’aggraver son insolvabilité. D’autres moyens telle que la substitution de la contrainte par
corps par la liberté sous contrôle judiciaire en faveur des insolvables paraissent plus efficaces.
Cette substitution permet à l’individu de trouver un emploi ou de mener des activités
génératrices de ressources ou de revenu pouvant lui permettre de s’acquitter de sa dette. Cette
solution a l’avantage d’éviter l’allongement du temps d’incarcération (le temps de détention

1.
569. 1 V. P. VOIRIN & G. GOUBEAUX, "Droit civil ", tome 1, 29ème édition, 2003, LGDJ, p. 610 & SS.
570. 2 V. Cass. crim. fr., 25 juillet 1991, Bull. Crim. 1991 n° 307.
571. 3 CEDH, affaire Jamil/France, 8 juin 1995, JCP 1996, II, 22477.

255
Précis De Droit Pénal Général

prévu pour l’emprisonnement auquel vient s’ajouter celui de la contrainte) de l’individu contre
qui il a été prononcée une peine d’emprisonnement.

§ 2 – L’EXÉCUTION DE LA PEINE PRIVATIVE DE VIE ET DE


LIBERTÉ

La peine privative de la vie (1) peut être considérée comme une peine privative de liberté (2).

1 - L’exécution de la peine privative de la vie

334. La peine de mort n’est pas encore abolie dans le système burkinabé, même si elle
contredit le principe de l’inviolabilité de la vie humaine et rime peu avec l’Etat de droit1. On
peut, à ce sujet, noter que les partisans de cette peine ne soutiennent pas cette contradiction. Ils
considèrent plutôt qu’elle est utile dans la mesure où elle est intimidante et exemplaire. Pour
ces défenseurs, l’exécution de la peine, compte tenu de son caractère terrible (affreux,
insupportable…), décourage ou arrête les futurs criminels où ceux qui sont sur le point de
passer à l’acte. Peu importe le type d’exécution car, toute exécution de la peine de mort reste
horrible voire terrifiante2.

Mais à cela, les abolitionnistes ont démontré, à juste titre, que la peine de mort même
lorsqu’elle est exécutée publiquement ne produit pas forcement le résultat décrit par ses
partisans3. C’est ainsi que certains auteurs se réfèrent à l’étude menée par Arthur KOESTLER
qui, « "dans ses réflexions sur la potence ", fait grand état d’une statistique, établie en
Angleterre au début de ce siècle, aux termes de laquelle, sur 250 pendus, 170 avaient
auparavant assisté à une ou deux exécutions capitales. Il raconte également qu’à l’époque où
les voleurs à la tire étaient punis de mort en Grande-Bretagne, d’autres voleurs exerçaient leurs
talents dans la foule qui entourait l’échafaud »4. En somme, la peine de mort a une efficacité
limitée, elle sert de moins en moins d’exemple ou de leçon dans les sociétés contemporaines.
Le condamné lui-même n’en tire aucune leçon dans la mesure où il n’est plus en vie. En outre,
dans les systèmes où elle est effectivement appliquée ou exécutée se pose la question des
erreurs judiciaires qui peuvent amener à faire exécuter une personne innocente (situation
irréparable ou «d’impossible retour »).

335. Plusieurs techniques permettent l’exécution de la peine capitale. Ainsi, la guillotine


création du Docteur GUILLOTIN, instrument de torture muni d'un couperet sert à décapiter le
condamné à mort (usage en France à partir de 1792). Ce mode d’exécution, fort heureusement,
n’est plus d’actualité. La pendaison, qui consiste à donner la mort au condamné en le
suspendant par le cou avec une corde, constitue une autre technique d’exécution. La pendaison

1.
572. 1 V. G. TARDE, "La philosophie pénale ", 4éme édition, Edit. Cujas, p. 534.
573. 2 F. MASSIAS, "Les affaires ukrainiennes : les conditions de l’isolement dans le couloir de la mort",
RSC, 2004, Chr., p. 446 & SS.
574. 3 M. ANCEL, "Les doctrines de défense sociale devant la peine de mort ", RSC 1963, p. 404 & SS. ;
SELLIN, "Les débats concernant l’abolition de la peine de mort : une rétrospective ", Déviance &
Société, 1981, vol. V, n°2, p. 97.
575. 4 R. MERLE & A. VITU, "Traité de droit criminel,"tome 1, 7ème édition, op. cit., n° 713.

256
Précis De Droit Pénal Général

s’exécute, généralement, grâce à un dispositif comprenant une barre horizontale de suspension


reliée à un support vertical : il s’agit de la potence. La pendaison de l’ancien président d’Irak
(SADAM HUSSEN°) s’est faite, en fin décembre 2006, au moyen de ce dispositif. Quant à la
strangulation ou l’étranglement, une troisième technique d’exécution de la peine capitale,
elle consiste en la compression de la gorge du condamné pour provoquer son étouffement. On
peut également citer une quatrième technique. Il s’agit de l’électrocution qui consiste à
appliquer au condamné une violente décharge électrique. Une cinquième technique
d’élimination du condamné consiste à perturber grâce au gaz, sa respiration de sorte à entraîner
l'intoxication du sang (par manque d’oxygène). Il s’agit de l’asphyxie par le gaz. Les
chambres à gaz qui étaient d’usage aux Etats-Unis ont été remplacées dans plusieurs Etats par
le système d’injection intra veineuse d’un produit à effet mortel.

336. Enfin, la fusillade qui consiste à ôter la vie du condamné, en le passant par les armes est
la méthode d’exécution retenue par le système burkinabé. Mais, avant la fusillade, le
condamné à mort subit accessoirement une peine privative de liberté. Il n’est pas en effet,
conduit directement devant le bourreau ou le lieu d’exécution qui est désigné par le Ministre
chargé de la justice. Lorsque la peine de mort est prononcée et la condamnation devenue
définitive, le ministère public en informe le Ministère de la Justice (art. 684 du CPP).

Le condamné à mort est au préalable emprisonné sous un régime différent de celui de


l’emprisonnement en tant que peine (art. 33 du kiti an VI 103 du 1er décembre 1988 relatif au
régime pénitentiaire)1. Cette attente, sous haute surveillance, dans "le couloir de la mort", fait
inévitablement subir à l’individu une double peine. La première est la peine d’emprisonnement
préalable à l’exécution (doublée d’ailleurs d’une peine morale liée à l’attente longue et
angoissante de la mort) et la peine de mort elle-même.

337. Dans l’hypothèse où le condamné est une femme en état de grossesse, elle est détenue en
prison jusqu’à sa délivrance : l’exécution ne peut avoir lieu antérieurement. Cependant, le
silence est observé quant à la prise en charge de la condamnée (compte tenu de son état) avant
l’exécution et à celle du bébé après le décès (surtout s’il s’agit d’un bébé de père inconnu). Il
en ressort que, lorsqu’il s’agit d’une condamnée en état de grossesse, son exécution effective
ne peut avoir lieu qu’à deux conditions principales. Elle doit "être délivrée" de sa grossesse et
la grâce doit lui avoir été refusée. Aucune exécution ne peut non plus avoir lieu les jours de
fête légale et les dimanches (voir art. 17 à 19 du CP).

L exécution ne peut avoir lieu tant qu’il n’ pas été statué sur le recours en grâce. La mise à
exécution ne peut intervenir que dans l’hypothèse où la grâce a été refusée (article 684 du
CPP). Le recours en grâce interpelle sur son caractère : est-il obligatoire ou non ? Est-il d’ordre
public ? Les articles 17 du CP et 684 alinéa 2 du CPP, les seules dispositions2 concernant le
1.
576. 1 Article 33 du kiti an VI 103 du 1er décembre 1988 relatif au régime pénitentiaire : "Les condamnés à
mort sont soumis à l’emprisonnement individuel à moins que le nombre de détenus de cette catégorie
dans l’établissement oblige à les réunir. Les cellules où ils sont placés doivent être aménagées de
manière à permettre une surveillance constante sans ouverture des portes. Ils font l’objet d’une
surveillance de jour et de nuit destinée à empêcher toute tentative d’évasion ou de suicide. Dès qu’une
condamnation à mort intervient, le chef d’établissement doit rendre compte à la Direction de
l’administration pénitentiaire et de la réinsertion sociale des conditions de sécurité de la détention du
condamné. S’il juge que celles-ci sont insuffisantes, le Ministre de la Justice ordonne le transfèrement
du condamné dans un établissement offrant plus de garantie. Les condamnés à mort peuvent être
astreints au port de menottes ou d’entraves lorsqu’ils sont conduits en dehors de leur cellule".
577. 2 Article 17 du CP : "Il ne peut être procédé à l’exécution avant qu’il n’ait été statué sur le recours en
grâce selon les dispositions du code de procédure pénale".

257
Précis De Droit Pénal Général

recours en grâce, en cas de condamnation à la peine capitale, ne règlent que la conduite à tenir
quand ce recours a été introduit. Aucune disposition n’informe sur le caractère facultatif ou
obligatoire du recours en grâce. Les juges sont-ils autorisés à ordonner la fusillade de
l’individu au cas où il refuse de faire usage de ce droit ? Le recours en grâce peut-il être
introduit d’office par les autorités compétentes ? Des interrogations qui conduisent à penser
que compte tenu du caractère mortel de cette peine, la loi doit être interprétée en faveur du
condamné. Ce qui sous-entend que, dans tous les cas, le juge chargé de l’exécution de cette
peine ne doit pas faire procéder à la fusillade tant qu’un recours en grâce n’a pas été introduit et
traité. Autrement dit, ce recours doit dans cette hypothèse, être interprétée comme un recours
de caractère obligatoire voire d’ordre public : il est, ici, incontournable.

En droit militaire, il y a plus de précisions concernant la grâce. En effet, il est précisé non
seulement que l’exécution ne peut avoir lieu avant le traitement du recours en grâce mais aussi
que ce recours est de droit (art. 144 du CJM)1.

Toutefois, pour l’exécution d’un de certains étrangers, la convention générale de coopération


en matière de justice2 est plus claire relativement au recours en grâce. L’article 64 de ladite
convention édicte clairement que, « lorsque la peine capitale est prononcée par une juridiction
d’un Etat contre un national d’un autre Etat, un recours en grâce sera toujours instruit
d’office et la représentation diplomatique de cet Etat sera immédiatement avisé ». Cette
convention rend implicitement obligatoire le recours en grâce.

338. Certains comportements des proches du supplicié après son exécution peuvent
donner lieu à un autre type de sanction. Les proches (la famille) qui ont récupéré le
condamné exécuté ne doivent pas procéder à une quelconque cérémonie avant de l’inhumer
sinon, ils encourent une peine d’amende variant entre 150 000 et 500000 francs CFA (art. 20
du CP). Ne faut-il pas interpréter la sanction de la famille, comme une sorte de reconnaissance
implicite de complicité (de celle-ci)? Certes, il s’agit d’une autre infraction mais dans une
société burkinabé encore fortement attachée aux traditions, est-il opportun d’interdire une
cérémonie en « l’honneur »3 d’une personne décédée quelle que soit la raison de son décès ?
Dans tous les cas, il n’est plus en vie pour tirer des leçons de son acte criminel, ce qui pose
aussi la question de l’utilité de la peine de mort N’importe quel mort n’a-t-il pas droit au
respect, lequel droit est protégé par le même législateur ? Si la cérémonie constitue une
expression de ce respect de la part de la famille, on peut estimer que le législateur se contredit.
Cette interdiction pose d’ailleurs un problème d’insuffisance car le législateur ne définit pas le
terme "cérémonie". Il revient donc au juge, en cas d’infraction, de circonscrire le domaine

3.
Article 684 du CPP : "Lorsque la peine prononcée est la mort, le ministère public, dès que la
condamnation est devenue définitive la porte à la connaissance du ministère de la justice. La
condamnation ne peut être mise à exécution que lorsque la grâce a été refusée. Si le condamné veut une
déclaration, elle est reçue par un des juges du lieu de l’exécution assisté du greffier".
578. 1 Voir annexes
579. 2 Convention signée à Tananarive le 12 septembre 1961 ratifiée par le Burkina Faso par décret 67-10 du
14 janvier 1967, JOHV du 19 janvier 1967, p. 36.
580. 3 Certes le criminel ne mérite pas d’honneur car, son acte est rebutant et condamnable mais il s’agit ici
d’honneur ou de respect dû aux morts. Souvent, dans les sociétés africaines notamment burkinabé,
certaines cérémonies sont nécessaires lorsqu’il s’agit d’un décès non naturel. Dans le cas du "décès-
sanction", une cérémonie tendant à demander le pardon divin ou ancestral au profit du mort peut
s’avérer nécessaire (afin qu’il puisse reposer en paix spirituellement). Ce type de cérémonie ne peut être
appréhendé comme une cérémonie réjouissante ou ironique vis-à-vis des victimes de l’infraction.
Revoir ces dispositions pénales concernant la cérémonie serait exprimer la souveraineté de l’Etat
burkinabè et l’attachement de la société burkinabé à certaines valeurs africaines instructives.

258
Précis De Droit Pénal Général

d’application de la cérémonie. Doit-il y inclure les rites traditionnels, la messe et les prières
musulmanes préalables à l’enterrement ? En ce qui concerne les cérémonies religieuses, on est
tenté de les exclure du champ d’application compte tenu du fait que la loi pénale permet à tout
condamné qui le demande de communiquer avec un ministre de culte avant l’exécution (art. 16
du CP). En tout état de cause, cette infraction liée à l’exécution du condamné semble cacher
une certaine volonté du législateur d’impliquer la famille quant à la rétribution du
comportement illicite de leur proche. Le législateur lui fait supporter lourdement et injustement
les conséquences de son comportement anti-social. Or, la loi semble prescrire que la sanction
pénale est en principe personnelle. Aux termes de l’article 5 de la Constitution, « la peine est
personnelle et individuelle ».

En somme, la peine de mort, quel que soit son mode d’exécution n’est plus et n’a
pratiquement jamais été une peine riche d’enseignements (ni pour le destinataire de la peine,
ni pour les « spectateurs de l’exécution », ni pour ceux qui envisagent commettre les mêmes
forfaits). Mais, elle est sûrement en contradiction avec les droits de l’homme.

2 - L’exécution de la peine privative de liberté

339. Les peines privatives de liberté, lorsqu’elles ont été régulièrement prononcées (par une
juridiction habilitée, procès régulier) et ont fait l’objet de l’établissement d’un titre irrévocable
d’exécution (décision judiciaire définitive), sont d’exécution immédiate. Ces peines privatives
de liberté ont un régime assez particulier dans la mesure où elles touchent à la liberté d'aller et
venir et s'exécutent en général dans des établissements pénitentiaires. Ces établissements sont
administrés par un chef d’établissement, un surveillant-chef, des surveillants et un intendant.
Toutefois, lorsque l’établissement a une capacité qui permet de contenir plus de cent détenus, il
faut adjoindre à ce personnel, un greffier, un greffier économe assisté d’un(e) aide-comptable
et d’un ou d’une secrétaire dactylographe. Dans cette seconde hypothèse, le poste d’intendant
n’est pas prévu. Il est, apparemment, remplacé par le greffier économe (art. 38 du kiti an VI
103). A ce personnel de l’administration pénitentiaire s’ajoute le personnel auxiliaire de celle-
ci (service sanitaire, social, religieux…) Il s’agit notamment des personnes attachées de façon
permanente à l’établissement, notamment les médecins, les infirmiers (art. 157 & ss du kiti an
VI 103), les travailleurs sociaux et particulièrement les assistants-sociaux (art.119 du kiti an
VI 103).

§ 3 – LES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

340. Les maisons d’arrêt, celles de correction, les centres pénitentiaires agricoles, les centres de
rééducation et de formation professionnelle constituent les principales catégories
d’établissements pénitentiaires existant au Burkina Faso (v. art. 3 du Kiti du 1er décembre
1988). Ces établissements ne sont pas nombreux, il en existe plus d’une dizaine. Il s’agit
notamment du Centre Pénitentiaire de Baporo, des Maisons d’Arrêt et de Correction de
Banfora, de Bobo-Dioulasso, de Dedougou, de Dori, de Fada N’Gourma, de Gaoua, de
Koudougou, Ouagadougou, de Tenkodogo, de Kaya. Ces types d'établissement sont des lieux
d'exécution de peine privative de liberté. Les condamnés y exécutent leur peine suivant une
répartition établie sur la base de quelques critères. Les personnes devant subir un régime de
détention y sont orientées, en général, suivant la nature de la mesure ou les sanctions qu’ils

259
Précis De Droit Pénal Général

sont contraints d’exécuter voire suivant leur sexe. Les affectations dans les différents
établissements, suivant le cas, relèvent soit de la compétence du juge d’instruction soit de celle
du juge de jugement, soit de celle du juge de l’application des peines (art. 4 du Kiti du 1 er
décembre 1988). L’administration centrale des services pénitentiaires jouit, dans certains cas,
de cette compétence. Ces établissements, qui peuvent être des maisons d’arrêt ou de correction,
des centres de réinsertion sociale et de formation revêtent, en général, le caractère d’une prison
(maisons d’arrêt et de correction en particulier).

341. La prison qui est un établissement destiné à la détention des condamnés peut être
considérée comme une « institution disciplinaire » qui permet à l’individu d’obtenir un « billet
retour » vers la société. La société constitue l’étalon du comportement normal par opposition
au comportement déviant. C’est ainsi que Michel FOUCAULT estime que « la prison doit être
un appareil disciplinaire exhaustif. En plusieurs sens : elle doit prendre en charge tous les
aspects de l’individu, son dressage physique, son aptitude au travail, sa conduite quotidienne,
son attitude morale, ses dispositions ; la prison beaucoup plus que l’école, l’atelier ou l’armée,
qui impliquent toujours une certaine spécialisation, est "omnidisciplinaire". En prison, le
gouvernement peut disposer de la liberté de la personne et du temps du détenu…»1.

Les maisons d’arrêt sont destinées à recevoir les personnes ayant la qualité de prévenus.
En conséquence, la mesure de détention provisoire y est exécutée. Toutefois, il n’est pas exclu
que des condamnés y soient reçus pour faire face à des problèmes d’insuffisance de locaux ou
pour d’autres types de contraintes.

Quant aux maisons de correction, elles reçoivent les individus ayant la qualité de
condamné (v. art. 2 à 4 et 20 du Kiti an VI 103 du 1er/01/1988). Il s’agit d’un établissement
pour peines. La maison d’arrêt et celle de correction peuvent relever d’un même établissement
pénitentiaire (art 4 du kiti an VI 103 du 1er/01/1988). C’est le cas de la Maison d’Arrêt et de
Correction de Ouagadougou (MACO) qui regroupe ces deux catégories au sein d’un même
établissement (l’ensemble des maisons d’arrêt et de correction du Burkina Faso fonctionne
d’ailleurs sur ce régime)2.

Les centres agricoles sont prévus pour des condamnés remplissant un certain nombre de
conditions. Il s’agit des condamnés bénéficiant d’un régime de semi-liberté. La réinsertion
sociale par le travail dans le domaine agricole est un des objectifs à atteindre à travers
l’institution de cette catégorie d’établissement. Le Burkina Faso étant un pays où les activités
agricoles sont dominantes, ces centres sont adaptés aux réalités burkinabé et l’augmentation de
leur nombre reste souhaitable. Le centre pénitentiaire agricole de Baporo en est une illustration.

Enfin, les centres de rééducation et de formation professionnelle accueillent les jeunes


condamnés (exemple du centre de Laye situé à environ 42 km de Ouagadougou sur l’axe
routier Ouagadougou-Ouahigouya). Ces centres sont spécialisés dans la rééducation et

1.
581. 1 V. M. FOUCAULT, « Surveiller et punir », op. cit. p. 273.
582. 2 La MACO qui, à l’origine, devait accueillir 570 détenus environ, en reçoit 1000 en moyenne (voir le
journal « Le Pays », n°3443 du 22 août 2005, p. 20. Cette croissance pose la question de surpopulation
carcérale à laquelle est confrontée la plupart des pays africains. .

260
Précis De Droit Pénal Général

l’apprentissage au profit des mineurs délinquants (exemple du Centre d’Education Spécialisée


et de formation (CESP) de Gampela)1.

§4 – LE RÉGIME PÉNITENTIAIRE EN MILIEU FERMÉ

342. En milieu fermé, il existe plusieurs systèmes d’incarcération (1)2. Pour mieux humaniser
la vie carcérale (2), des efforts d'individualisation du régime pénitentiaire ont été accomplis (3).
Le milieu fermé renvoie souvent à la prison que Michel FOUCAULT considère comme une
entreprise : « … la prison n’a pas été d’abord une privation de liberté à laquelle on aurait donné
par la suite une fonction technique de correction ; elle a été dès le départ une "détention légale"
chargée d’un supplément correctif, ou encore une entreprise de modification des individus que
la privation de liberté permet de faire fonctionner dans le système légal »3. Mais,
l’aboutissement des objectifs que se fixe chaque Etat lorsqu’il construit des prisons nécessitent
la mobilisation d’un ensemble de moyens qui font souvent défaut à certains pays africains
notamment le Burkina Faso. Ce qui explique, en partie, l’inadéquation entre les textes
burkinabé, dans l’ensemble, respectueux des droits du détenu et les pratiques dans les
établissements pénitentiaires. Dans tous les cas, la peine privative de liberté tend à réinsérer
socialement l’individu.

1 – Les principaux régimes d’incarcération

343. Parmi les divers régimes d’exécution des sanctions pénales au sein des établissements
pénitentiaires, on peut citer l'emprisonnement en commun qui consiste à "parquer" les
détenus dans les mêmes locaux. Ces détenus cohabitent avec la possibilité de séparer les
hommes, les femmes et les mineurs. Le jour, la vie est commune. Ce régime demeure le plus
fréquent dans les pays d’Afrique Noire voire dans ceux du tiers monde. Les condamnés sont,
en général entassés dans les cellules, dans des conditions de surpopulation compte tenu des
différents problèmes de moyens liés au sous-développement de ces Etats. En effet, le régime
pénitentiaire en milieu fermé, dans le système burkinabé, est influencé dans la pratique par des
questions d’ordre économique.

En outre, l’emprisonnement en commun, même s’il a l’avantage d’être moins coûteux et de


permettre aux individus de s’amender, est source de fragilisation du processus de
resocialisation du condamné (au sein de la prison) et peut produire des récidivistes. Partant, il
compromet, dans une certaine mesure, le reclassement social de l’individu.

Un autre régime, en l’occurrence celui de l’emprisonnement cellulaire, consiste à séparer les


détenus de jour et de nuit et à loger chacun dans une cellule individuelle. Ce système est
l'opposé du précédent. La vie est individuelle : l’individu ne peut pas communiquer avec les

1.
583. 1 V. Rapport du Séminaire International organisé par l’Association Pénitentiaire Africaine (APA), sur le
thème, "Analyse et critique des procédures pénales d’enquête, d’instruction, de jugement et d’exécution
des peines, applicables aux mineurs en Afrique", Ouagadougou 2000, document édité Carmine Lanni,
p. 3 & SS.
584. 2 V. P. PONCELA, "L’isolement carcéral sous le contrôle des juridictions administratives et de la Cour
Européenne des droits de l’homme", RSC 2005, p. 390.
585. 3 V. M. FOUCAULT, "Surveiller et punir ", op. cit., p. 269.

261
Précis De Droit Pénal Général

autres personnes détenues. C'est le régime de l'emprisonnement de jour et nuit ou système


pennsylvanien1. Ce système exclut donc la vie en groupe, quel que soit le moment (jour, nuit)
et reste coûteux mais évite les problèmes engendrés par la promiscuité (entente pour une
nouvelle vie délinquante à la sortie, soumission à l’influence négative du milieu...). Ce système
demeure peu éducatif. L’accomplissement des activités carcérales, la restauration en commun,
le logement dans les dortoirs forgent le caractère éducatif du système.

Un troisième régime qualifié de mixte consiste à faire travailler en commun les détenus dans la
journée et à les emprisonner individuellement dans des cellules (isolement cellulaire) durant la
nuit. C'est le régime dit auburnien (auburn) pratiqué aux Etats-Unis, surtout à New York2. Le
travail en commun peut présenter les mêmes inconvénients que le système d’emprisonnement
de jour et de nuit compte tenu de la vie en communauté (repas, travail,..)le jour.

Un quatrième régime dit régime progressif ou régime irlandais consiste à emprisonner le


condamné et à assouplir progressivement le régime d'incarcération pour parvenir, à la
fin, à sa libération3. Des étapes doivent par conséquent être franchies par le condamné au
cours de l’exécution de sa peine. Au début de son incarcération, le condamné est placé en
observation : il est isolé (de jour et de nuit) par rapport aux autres. Il est ensuite placé dans un
groupe le jour. S’il se comporte correctement dans le groupe, il peut être autorisé à sortir de
l’établissement carcéral et à travailler hors de celui-ci et, progressivement, s’acheminer vers la
libération. En somme, ce régime a fait l’objet d’une application en droit français en 1959 4 mais
a été abandonné en 1975.

En droit burkinabé, le régime en vigueur se rapproche du régime classique d'emprisonnement


en commun et a été essentiellement calqué sur le système français. Il s'agit de
l'emprisonnement collectif (art 9 et 10 du kiti an VI 103 du 1 er/12/1988). Les détenus vivent
ensemble (jour et nuit). En effet, aux termes de l’article 9 kiti an VI 103, « L’emprisonnement
dans tous les établissements pénitentiaires est collectif sous réserve des dispositions
particulières… ». Ces exceptions concernent les condamnés à mort, les individus punis de
cellule disciplinaire (cellule de punition), les individus isolés sur ordre de l’autorité judiciaire et
pour les besoins d’une procédure pénale et enfin les personnes isolées pour une cause
médicale.

Les condamnés à mort sont, en principe, emprisonnés de façon individuelle. Cependant, si leur
nombre est tel qu’on ne peut pas isoler chacun dans une cellule, on peut exceptionnellement les
réunir (art. 33 kiti an VI 103). S’agissant des personnes incarcérées en division disciplinaire,
trois catégories de personnes sont concernées. Les individus présentant une personnalité
dangereuse, les individus ayant fait l’objet d’une condamnation antérieure pour crime ou délit
notamment certains récidivistes, les individus auteurs d’une évasion et ceux s’étant illustrés par

1.
586. 1 Régime appliqué au moyen âge dans les prisons ecclésiastiques, il avait pour but de permettre au
détenu de réfléchir, de se racheter (ce qui est favorisé par la solitude). C’est à la fin du XIIème siècle
que ce régime a été appliqué au sein d’une prison de Philadelphie (dans l’Etat de Pennsylvanie).
587. 2 Le système auburnien date de 1916 et a été appliqué pour la première fois dans la prison d’Auburn,
aux Etats-Unis d’où la dénomination régime auburnien.
588. 3 C’est vers l’année 1840 que le régime progressif a connu ses premières applications, d’abord, dans
l’île de Norfolk en Australie. Il a été, ensuite, appliqué en Irlande.
589. 4 J. PRADEL, "Droit pénal général", op. cit., n° 713.

262
Précis De Droit Pénal Général

leur inconduite (au cours de leur détention) composent les catégories de personnes pouvant être
affectées en division disciplinaire (art. 23 du kiti an VI 103 du 1er décembre 1988)1.

344. La répartition des détenus est faite en termes de division (voir art.20 et ss du kiti an VI
103 du 1er/12/1988). Des locaux différents sont affectés aux femmes, aux mineurs et parfois à
certaines catégories de détenus comme les fonctionnaires et les détenus politiques (v. art. 37 du
kiti an VI 103 du 1er/12/1988, concernant les mineurs)2. Mais ces répartitions se remarquent
plus dans les prisons des grandes villes telles que celles de Ouagadougou et de Bobo. Les
moyens faisant défaut à une bonne organisation et gestion des prisons, l’application stricte du
régime de répartition catégorielle des détenus reste difficile3. Il va sans dire que la promiscuité,
les risques de rechute due à la cohabitation avec les délinquants pour lesquels la resocialisation
reste inespérée voire impossible constituent quelques unes des conséquences générées par les
difficultés économiques.

En tout état de cause, la loi (art. 10 du kiti an VI 103) impose la séparation de quelques
catégories de personnes : les hommes et les femmes, les mineurs de moins 18 ans et les
majeurs, les prévenus et les condamnés. Les condamnés et les prévenus doivent également
être séparés. Il en est de même pour les détenus soumis à un régime ordinaire et ceux
bénéficiant d’un régime tenant compte de la fragilité de leur état psychologique (art. 148 du
kiti an VI 103).

2 – La vie carcérale

1.
590. 1 Articles 23 du kiti an VI 103 du 1er/12/1988: « Peuvent être placés en division disciplinaire :
- les individus dont une enquête aura révélé en eux une personnalité dangereuse ;
les individus connus comme ayant déjà fait l’objet d’une condamnation antérieure pour crime ou délit ;
- les individus qui se sont déjà évadés, que leur évasion ait été ou non punissable aux termes de
l’ordonnance ;
- les individus ayant fait preuve d’une mauvaise conduite au cours de leur détention".
591. 2 Article 37 du kiti an VI 103 du 1er/12/1988 : "Les mineurs condamnés à une peine d’emprisonnement
purgent leur peine dans les conditions suivantes :
1) L’emprisonnement collectif dans les conditions prévues aux articles 9 & 10 du présent kiti ;
2) ils bénéficient quant au couchage, à la nourriture et à l’habillement d’un régime spécial dont les
modalités sont fixées …par le ministère de la justice ;
3) ils sont soumis à un régime particulier qui fait une large place à l’éducation et les préserve de
l’oisiveté. A cette fin ils sont soumis aux activités scolaires ou de formation professionnelle. Des temps
de repos seront consacrés au sport ou à des loisirs dirigés ;
4) ils peuvent être placés dans les centres de rééducation et de formation professionnelle ;
5) ils peuvent se promener en plein air aussi longtemps que les nécessités du service le permettent ;
6) lorsqu’ils sont punis de cellule disciplinaire les peines sont réduites de moitié".
592. 3 Il ressort d’un rapport d’audit du système pénitentiaire, élaboré en 2001, qu’en 1996, sur l’ensemble
du territoire, 5032 détenus ont été accueillis dans les établissements pénitentiaires et en 2000, ce chiffre
est passé à 5476. Le même rapport indique qu’en 2000, 138 femmes ont été accueillies dans les
établissements pénitentiaires burkinabé et 297 mineurs. Il mentionne aussi le chiffre de 55 relativement
au nombre de décès enregistré au sein de ces établissements en 1998, celui de 21 en 1999 et 15 en 2000
(voir les pages 112 à 115 du rapport. La régression du nombre de décès peut-elle être interprété comme
un signe d’amélioration des conditions de vie du détenu ? Un autre rapport (celui du Mouvement
burkinabé des droits de l’homme) pour 1996-2002 mentionne le chiffre 5476 en 2000 relativement aux
personnes entrants (dans l’ensemble des établissements pénitentiaires) et celui 7565 en 2001.

263
Précis De Droit Pénal Général

A l’intérieur des prisons, la vie est organisée de sorte à permettre l’observation d’une certaine
discipline favorisant la réinsertion sociale des condamnés et garantissant la sécurité.
L’existence d’une police intérieure, celle de règles concourant à la sécurité (a) et les exigences
disciplinaires (b) ne sont pas incompatibles avec l’existence de quelques droits au profit de
l’individu incarcéré (c). Ainsi, un ensemble de règles permet de maintenir l’ordre au sein de la
prison.

a - La police et la sécurité dans les prisons

345. Le système burkinabé prévoit une police intérieure (art. 70 à 84 du kiti an VI 103). C’est
ainsi que la loi fait obligation aux agents assurant la surveillance des détenus de surveiller
constamment ceux-ci et d’effectuer des rondes. Le maintien de l’ordre se traduit également par
la fouille des détenus, l’appel qui est fait deux (2) fois par jour (aux heures de lever et de
coucher des détenus) et l’interdiction qui leur est faite de détenir certains objets (argent, bijoux
sauf la bague d’alliance, instrument dangereux, stupéfiants…). Les locaux (les dortoirs
notamment) et les cours doivent êtes visités. Les serrures et les dispositifs d’obturation des
ouvertures doivent faire l’objet de vérification. Ces visites et vérifications doivent être
régulières bien que les dispositions les prévoyant ne le précisent pas (art. 78 & ss. du kiti an VI
103)1. Les dispositions des articles 85 à 91 du kiti an VI 103 du 1er décembre 1988 concernent
la sécurité dans les établissements pénitentiaires. Elle doit être assurée de façon à éviter
notamment les évasions, les violences à l’intérieur de la prison, les suicides, l’usage illégal ou
non autorisé d’armes à feu (cet usage concerne particulièrement le personnel surveillant).

b- La discipline au sein de l’établissement pénitentiaire

346. Les détenus eux-mêmes sont soumis aux règles de discipline générale et à celles qui sont
spécifiques à l’établissement. Toute infraction à ces règles ou au règlement intérieur est
susceptible d’aboutir à une sanction disciplinaire voire pénale (en cas d’évasion par exemple).
Les condamnés doivent respecter les ordres et les instructions donnés par le personnel
surveillant ou encadreur, dans le cadre de l’exécution du travail carcéral qui est destiné à
favoriser leur réinsertion sociale (art. 102 du kiti an VI 103). Le travail à l’intérieur de
l’établissement vise le ménage ou l’entretien des bâtiments. Il vise également celui qui peut
être effectué dans les services de fonctionnement de l’établissement et dans les ateliers
techniques et agricoles.

Des sanctions disciplinaires peuvent être infligées aux détenus par le chef d’établissement. Les
privations (de tabac, de vivres ou de colis provenant de l’extérieur notamment ceux venant de
parents, amis, alliés, …) pouvant couvrir deux mois de durée maximale, l’interdiction de
correspondance (privation d’un mois au maximum), la réprimande, le retrait de récompense 2 et

1.
593. 1 Article 78 kiti an VI 103 du 1er/12/1988 : "Il ne sera laissé aux détenus de toutes catégories ni argent,
ni bijoux, ni valeur quelconque, sauf la bague d’alliance. Ceux dont ils seront détenteurs devront être
déposés entre les mains du chef d’établissement.
La conservation et la gestion des biens du détenu sont assurées conformément aux dispositions du titre
7".
594. 2 Des récompenses peuvent être accordées aux détenus qui ont fait preuve d’une bonne conduite (dans le
travail, dans l’enseignement…). Ces récompenses peuvent se traduire par un changement de régime
(passage d’un régime plus sévère à un régime plus souple ou plus doux), par un transfèrement (conduite

264
Précis De Droit Pénal Général

la mise en cellule d’une durée de dix jours au maximum constituent les différentes sanctions
disciplinaires relevant de la compétence du chef d’établissement (art. 92 du kiti an VI 103).
Concernant l’interdiction de correspondance, elle n’inclut pas les correspondances destinées
aux autorités administratives et judiciaires, ni celles destinées aux conseils.

La commission de l’application des peines a la possibilité de confirmer ou d’infirmer les


sanctions décidées par le chef d’établissement. Elle est également compétente pour infliger des
sanctions additives. Il lui est aussi reconnu le pouvoir de substituer les sanctions relevant de la
compétence du chef d’établissement (sanctions prononcées ou non) à ses propres sanctions.
Ces dernières sanctions sont plus sévères que celles que peuvent prononcer le chef
d’établissement. Ainsi, le détenu est susceptible de faire l’objet de sanctions plus sévères
lorsqu’elles émanent de la commission : il s’agit de la mise en cellule dont la durée peut
atteindre quarante cinq (45) jours au plus, de la rétrogradation à un stade inférieur du régime
progressif et de la suspension ou la suppression du traitement en milieu ouvert (art. 95 du kiti
an VI 103 du 1er décembre 1988).

c- Les principaux droits du détenu

347. Les textes, notamment le kiti an VI 103 du 1er décembre 1988, prévoient quelques droits
au profit du détenu. En rappel, le respect de la dignité humaine s’impose quel que soit l’endroit
ou l’on se trouve et quelle que soit la qualité à laquelle l’on répond (tout détenu, tout condamné
ou non, tout honnête citoyen…). Ce traitement est d’ailleurs exigé par plusieurs conventions
internationales auxquelles le Burkina Faso a souscrit. Il reste un citoyen même étant en état de
détention. Le détenu doit pouvoir jouir de sa liberté de religion dans l’établissement
pénitentiaire. Sa vie en prison doit se passer dans des conditions d’hygiène normales (dortoirs
propres et aérés, matériels de couchage, nattes, couvertures sanitaires propres et régulièrement
bien entretenus). Des règles sont prévues pour assurer une hygiène répondant aux normes
légales. Ces règles impliquent aussi bien l’administration pénitentiaire que les détenus (art. 150
à 155 du kiti an VI 103).

348. Mais, il convient de rappeler que l’insuffisance de moyens engendre un écart important
entre la théorie et la pratique et maintient quelques fois ces droits dans leur état virtuel. Le
détenu a droit à des soins médicaux (droit à la santé), en cas de nécessité (art. 156 à 167 du
kiti an VI 103). Aussi, les détenues ayant accouché lors de leur détention ont la possibilité de
garder leur bébé auprès d’elles (en prison) jusqu’à ce qu’il ait l’âge de deux ans. Mais à ce
niveau se pose le problème d’éducation ou de socialisation de l’enfant dans un tel milieu.
Certes, la limite d’âge de garde est, peut-être, étudiée de sorte à éviter que la socialisation ne
soit pas affectée par l’environnement carcéral, mais des craintes subsistent. En effet, entre l’âge
de un à deux ans, un enfant peut être doté d’une telle intelligence qu’on peut craindre le
déclenchement précoce du processus d’habitus1. Une solution possible serait d’éloigner le bébé
de la structure carcérale dès sa naissance et d’aménager un emploi de temps permettant une

3.
du détenu vers un autre établissement pénitentiaire accordant plus de liberté par exemple : cas du centre
agricole de Burkina-Faso), par une mesure de grâce (voir art 99 à 101 du kiti du 1er décembre 1988.
595. 1 L’habitus, concept dont Pierre BOURDIEU est le père, désigne un ensemble de comportements
intériorisés. Il s’agit d’un " ensemble de dispositions intériorisés par les individus qui orientent les
pratiques sociales" (voir M. GIACOBBI & J.P. ROUX, " Initiation à la sociologie", Edit. Hatier, 1990,
p.288.

265
Précis De Droit Pénal Général

mobilité (quotidienne) de la mère (établissement carcéral – structure d’accueil ou de garde du


bébé).

Il lui est reconnu le droit de recevoir la visite de sa famille ou de ses parents (père, mère,
frères, sœurs…) ou tuteurs et, exceptionnellement, d’autres personnes (art. 122 du kiti an VI
103). Ce droit vise essentiellement le maintien des liens familiaux. Aussi, un droit qui apparaît
insignifiant mais en réalité important est-il reconnu au détenu. Il s’agit du droit de garder sa
bague d’alliance qui demeure psychologiquement important (équilibre moral) et peut constituer
un facteur (moral) de resocialisation de l’individu. Néanmoins, un autre droit d’importance
majeure fait défaut dans plusieurs systèmes de droit. C’est, en l’occurrence, le droit à
l’intimité, surtout dans le cas où le condamné a le statut de marié. Certes, la non consécration
de ce droit fait implicitement partie des éléments de la sanction pénale, mais l’évolution et les
efforts d’humanisation de la vie carcérale peuvent justifier l’entérinement du droit à l’intimité.
Cela nécessite la création de nouvelles structures au sein des établissements pénitentiaires,
notamment des locaux que l’on pourrait dénommer « maison de séjour familial ». Il va sans
dire que l’institution de telles commodités exige la mise en place d’une réglementation quant à
la possibilité ou aux conditions de bénéfice de ce droit, compte tenu de la dangerosité de
certains condamnés.

La grève de la faim, qui se définit comme un refus de s’alimenter dans l’objectif de protester
ou de revendiquer (quelque chose), est implicitement reconnue comme un droit. Cependant,
lorsque l’exercice de ce droit présente des risques de mise en danger (mort) du détenu, il peut
être mis fin à la jouissance de ce droit, en procédant à son alimentation forcée1.

Parmi les droits reconnus aux détenus figure celui de communiquer par courrier
(correspondances). Il lui est également accordé le droit de recevoir des colis, une fois par
semaine (art. 129 du kiti an VI 103). Cependant, le colis ne peut contenir que ce qui a été
énuméré par la loi : vivres, livres, journaux ou menus objets non interdits (bol et gobelet en
matières plastique par exemple). Toutefois, la sanction qui consiste à mettre le détenu en
cellule a des répercussions sur certains de ses droits. En effet, elle entraîne automatiquement la
suppression du droit de consommer du tabac, la possibilité de recevoir des colis ou des
correspondances, celui de bénéficier de visites (extérieures). Ces sanctions ne concernent pas
les communications ou les correspondances intervenant entre le détenu et son conseiller ou
avec l’Administration. Le droit à la correspondance est par ailleurs limité dans la mesure où il
exclut le secret de la correspondance. En effet, en vue de leur contrôle, les courriers « privés »
sont lus par le chef d’établissement (art. 127 du kiti an VI 103).

La possibilité de suivre un enseignement scolaire ou professionnel est également offerte aux


détenus (art. 173 à 175 du kiti an VI 103), en particulier les jeunes détenus (mineur). Ainsi, il
peut être dispensé, à l’intérieur de l’établissement, des cours d’alphabétisation fonctionnelle.
Cet enseignement est nécessaire car la population carcérale au Burkina Faso est fortement
composée de personnes illettrées. D’une manière générale, le taux d’alphabétisation est faible
au Burkina et des efforts considérables sont en train d’être faits dans ce sens pour renverser
cette situation. L’alphabétisation peut être d’un apport considérable pour la réinsertion sociale
et éviter la récidive.
1.
596. 1 Article 165 du kiti an VI 103 du 1er décembre 1988,"Si un détenu se livre à une grève de la faim
prolongée, il peut être procédé à son alimentation forcée, mais seulement sur décision et sous
surveillance médicale et lorsque ses jours risquent d’être mis en danger".

266
Précis De Droit Pénal Général

Les condamnés à mort jouissent de quelques droits liés à leur statut. Ainsi, ils sont exemptés de
tout travail et ils peuvent lire, fumer et écrire indéfiniment (art.35 du kiti an VI 103). L’on peut
s’interroger sur l’utilité de telles faveurs légales quand le détenu attend de façon impuissante
son exécution.

3 - individualisation du régime pénitentiaire

349. L’exécution de la peine privative de liberté tient compte de la nécessité de resocialisation


du condamné. C’est notamment pour cela qu’au cours de l’exécution de la peine des
modulations (des conditions d’exécution), favorables au condamné, interviennent suivant sa
conduite. Ces aménagements qui, souvent, permettent aux condamnés de quitter
temporairement voire définitivement le lieu d’exécution (la prison) entrent dans le cadre
d’individualisation de la peine.

350. L'individualisation du régime se traduit d'abord par l'affectation à un établissement


pénitentiaire. C'est l'exemple de l'affectation dans un centre agricole pénitentiaire ou dans un
établissement au sein duquel la sécurité est renforcée. Elle se traduit ensuite par le traitement
individuel à l'intérieur de l'établissement. Des mesures d'exécution de la peine sont établies en
fonction de la personnalité de l'individu, de son passé judiciaire, de sa conduite, de ses
capacités de réadaptation sociale. Certains individus peuvent, par exemple, bénéficier de
mesures souples. Ainsi, aux termes de l'article 26 du kiti an VI 103 du 1er/12/1988, les détenus
en division d'amendement peuvent bénéficier notamment d'un placement à l'extérieur, d'une
semi-liberté. Les autorisations et les permissions de sortie, les fractionnements de peine sont
aussi des exemples de faveur tenant compte de la conduite ou des efforts individuels accomplis
par le condamné.

Dans tous les cas, un dossier individuel est ouvert pour chaque détenu. Ce dossier contient une
fiche signalétique (empreintes, photo), le ou les extraits de décision de condamnation
(jugement, arrêt) ou autre titre de détention, une fiche médicale, la copie des décisions relatives
aux punitions ou aux récompenses, une notice individuelle1, un document mentionnant la
division à laquelle appartient le condamné et toute autre mesure progressive dont il bénéficie
(art. 52 du kiti an VI 103 du 1er/12/1988).

§ 3 – LE RÉGIME PÉNITENTIAIRE EN MILIEU OUVERT

351. Certaines mesures d'exécution de la peine permettent au condamné d'être en contact avec
le monde extérieur au milieu carcéral et de mieux préparer sa réintégration sociale. Cependant,
dans certains cas, le condamné ne peut prétendre à ces mesures de faveur durant un délai
déterminé, c'est la période de sûreté (1) qui s'oppose au régime en milieu ouvert (2). En outre,
dans certaines conditions, l’individu condamné en tant qu’auteur de quelques infractions

1.
597. 1 Article 54 du kiti an VI 103 du 1er/12/1988 : "La notice individuelle contient les renseignements
concernant l’état civil du condamné, sa profession, sa situation de famille, ses moyens d’existence, son
degré d’instruction, sa conduite habituelle, sa moralité et ses antécédents…"

267
Précis De Droit Pénal Général

précisées par la loi, ne peut pas bénéficier de l’exécution de la peine en milieu ouvert. C’est le
cas lorsque, auteur d’une infraction relative à la réglementation des drogues à haut risque, ’il
fait l’objet d’une condamnation à une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale
à un an (art. 89 du Code des Drogues). Dans ces conditions, le placement à l’extérieur, la
corvée extérieure, la suspension ou le fractionnement de la peine, la semi-liberté, la libération
anticipée ne peuvent lui être accordés.

1- La période de sûreté

352. C'est une mesure qui permet d'interdire temporairement à un condamné à une peine
privative de liberté de bénéficier des mesures donnant lieu à un régime de milieu ouvert. Une
peine peut donc être assortie d'une période de sûreté. Elle l'est particulièrement pour les
infractions d'une certaine gravité (crime crapuleux par exemple. Il s’agit d’une période pendant
laquelle les autorités judiciaires ou administratives s’abstiennent d’assouplir la peine
d’emprisonnement. Cela signifie que ces autorités ne peuvent pas au cours de la durée de
l’enferment (temps couvrant la sûreté), suspendre ou fractionner la peine. Ils ne peuvent pas
non plus décider d’un placement à l’extérieur, d’une libération conditionnelle ou d’une semi-
liberté en faveur du condamné. Les permissions de sortie sont également exclues. C’est, en
somme, une période pendant laquelle l’enferment ne doit pas être rompu par une mesure
permettant au condamné de jouir temporairement ou définitivement de sa liberté d’aller et
venir à l’extérieur de la prison. Il est refusé, pendant cette période, au condamné toute mesure
de clémence dans ce sens.

A ce titre, l’article 89 du Code des drogues prescrit : « En cas de condamnation à une peine
d’emprisonnement prononcée en application des articles 44 à 581 et d’une durée égale ou
supérieure à un an, le condamné ne pourra en aucun cas bénéficier d’une suspension ou d’un
fractionnement de la peine, d’un placement à l’extérieur ou d’une corvée extérieure, de la
semi-liberté, d’une libération anticipée ou conditionnelle avant l’exécution des 2/3 de la
peine ».

2 - Les régimes en milieu ouvert

Les mesures de semi-liberté, de placement à l'extérieur, de libération conditionnelle et les


permissions de sortie constituent des mesures qui s’exécutent en milieu ouvert. Ces mesures
permettent au détenu, non seulement d’intégrer effectivement le processus de réadaptation
sociale mais aussi de retourner temporairement ou définitivement à la liberté.

1.
598. 1 Les articles 44 à 58 du code des drogues concernent les incriminations relatives aux drogues à haut
risque. Ainsi l’article 44 prescrit : "Sont punis d’un emprisonnement de 10 à 20 ans et d’une amende de
…ceux qui contreviennent aux dispositions législatives et réglementaires concernant la culture, la
production, la culture, la production, la fabrication l’extraction, la préparation ou la transformation des
drogues à haut risque". Aux termes de l’article 45 : sont punis d’un emprisonnement de 10 à 20 ans et
d’une amende de …ceux qui contreviennent aux dispositions législatives et réglementaires concernant
l’importation, l’exportation et le transport international des drogues à haut risques". L’article 57 est
ainsi libellé : "La tentative d’une des infractions prévues aux articles 44 à 54, est puni comme
l’infraction consommée. Il en est de l’entente ou de l’association formée en vue de commettre l’une de
ces infractions". L’article 58 prescrit : "Les opérations financières accomplies relativement à l’une des
infractions prévus 44 à 54 sont punies comme l’infraction elle-même"

268
Précis De Droit Pénal Général

353. Une permission de sortir peut être accordée à un détenu (art. 30 du kiti an VI 103). Elle
lui permet de s’absenter de l’établissement carcéral temporairement. Cette sortie à l’extérieur
de la prison n’interrompt pas le cours de l’exécution de la peine qui se continue. Elle est d’une
durée maximale de quatre (4) jours. Accordée par le juge de l’application des peines, la
permission est autorisée soit pour des raisons familiales ou soit pour des obligations qui
nécessitent sa présence. Ces motifs d’obtention, au nombre de trois (3), sont précisés par les
dispositions de l’article 30 du kiti : « …Les permissions de sorties sont accordées…dans les
cas suivants : décès ou maladie grave d’un ascendant, d’un descendant ou du conjoint ; mariage
régulièrement autorisé d’un détenu ; présentation aux épreuves d’un examen ou concours… ».
Les frais occasionnés par la sortie sont supportés par le "détenu sortant". Le bénéficiaire lors de
la sortie peut être ou non accompagné d’un surveillant. C’est le juge qui le précise dans la
décision autorisant la sortie. La permission de sortie s’inscrit dans le cadre de la politique de
réinsertion sociale de l’individu.

En droit français, une distinction est faite entre permission de sortir et autorisation de sortie
sous escorte. A la différence du droit burkinabé qui accorde (selon les trois cas ci-dessus
énumérés) une permission de sortie. Les demandes de sortie pour certaines causes notamment
pour des funérailles de parents proches peuvent aboutir à une autorisation de sortie sous
escorte. Cette dernière, à la différence de la permission est accordée de façon exceptionnelle.

La permission de sortir peut permettre aux conjoints dont l’un a le statut de condamné
d’accomplir certaines obligations conjugales comme les relations sexuelles dont il est
impossible d’assurer dans l’enceinte de l’établissement carcéral au Burkina Faso.

269
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE III – L’EXTINCTION DE LA SANCTION PÉNALE

354. Hormis le mode normal (exécution de la peine), d’autres modes d'extinction existent.
Ceux-ci sont divers et constituent des causes d’extinction de la peine. Ces causes d’extinction
ne permettent pas, toutes, la réinsertion sociale du délinquant. Ainsi, comme l’affirment
MERLE et VITU1, « Les causes d’extinction sont pour la plupart fondées sur la notion de
pardon…Ni l’amnistie, ni la grâce, ni la prescription ne peuvent supprimer l’état dangereux du
délinquant. Seul le décès de l’individu ou la réhabilitation, qui suppose la resocialisation
remplissent cet office ». En effet, l’exécution d’une condamnation devenue définitive cesse dès
le décès de l’individu, en ce qui concerne en principe les peines privatives ou restrictives de
liberté ou de droits.
En outre, l’extinction de la sanction n’entraîne pas forcément la disparition de la condamnation
(section II). Celle-ci peut subsister malgré l’extinction de la sanction (section I).

SECTION I – L'EXTINCTION AFFECTÉE D’UNE SUBSISTANCE DE LA


CONDAMNATION

L'extinction peut intervenir par une prescription (§1) ou par une grâce. L’extinction par l’une
de ces voies ne donne pas lieu à la disparition de la condamnation. La prescription de la peine
n’est pas à confondre avec son exécution qui s’étend sur un délai d’expiration déterminé dans
la décision de condamnation. Elle diffère également de la grâce (§2).

§1 - LA PRESCRIPTION

La prescription est souvent justifiée par le fait qu’au terme d’une certaine durée liée à la
gravité de l’infraction, l’acte "anti-social" commis est oublié par la société et la paix sociale se
rétablit. La mémoire collective oublie pratiquement "l’incident social" ou le trouble crée par
le condamné et classe ce fait dans le catalogue de l’histoire. La prescription de la peine qui
par sa définition (1) se distingue d’autres types de prescription et est enfermée dans des délais
(2) qui varient. Les condamnations civiles prononcées suite à une décision d’ordre pénal se
prescrivent conformément aux règles du code civil (art. 723 du CPP).

1 – définition

355. Une peine est prescrite lorsque que la sanction est éteinte pour cause de non exécution,
après l’expiration d’un délai prévu par la loi. Ce délai varie suivant la classe à laquelle
appartient l’infraction (crime, délit, contravention) et court à compter du jour où la
condamnation est devenue définitive. Cette prescription diffère de la prescription de l’action
publique qui court à compter du jour de la consommation de l’infraction et qui exclut toute
possibilité de condamnation. La prescription de l’action publique intervient en début de
procédure (pénale) alors que la prescription de la peine intervient à la fin de celle-ci. Or,

1.
599. 1 V. Roger MERLE & André VITU, " Traité de droit criminel », T1, 7éme édition, op. cit, n°665.

270
Précis De Droit Pénal Général

concernant cette dernière catégorie de prescription, après l'écoulement d'un délai déterminé par
la loi, la peine est prescrite et son exécution devient impossible.

2 - Les délais de prescription

Ces délais interpellent sur sa durée (a), son point de départ (b) et les interruptions ou des
suspensions pouvant intervenir au cours de leur écoulement (c). La prescription n’est pas sans
effet (d).

a- La durée de la prescription

356. La prescription concerne toutes les catégories de peines. La plupart des infractions
peuvent se prescrire. Les délais sont fonction de la nature de l’infraction et sont en général
plus long que ceux prévus pour l’action publique. Aux termes de l'article 719 du CPP, les
peines de type criminel sont prescrites au bout de vingt ans révolus à compter du jour où la
décision est devenue définitive. Toutefois, le législateur prévoit des exceptions : il exclut
l’application de la règle de prescription à certaines infractions. Il s’agit notamment des crimes
contre l’humanité (art. 316 & SS. du CP)1. Ces crimes englobent la déportation, la réduction en
esclavage, la pratique massive et systématique d’exécution sommaire, d’enlèvements de
personnes suivis de leur disparition, de la torture ou d’actes inhumains accomplis sous
certaines conditions établies par la loi et le génocide. La participation à un groupement en vue
de commettre ces crimes constitue un crime contre l’humanité2. L’imprescriptibilité de cette
catégorie d’infraction s’applique aussi bien à l’action publique qu’à la peine. Les dispositions
de l’article 317 du CP l’énonce clairement : « L’action publique relative aux crimes [contre
l’humanité]…ainsi que les peines prononcées ne se prescrivent pas ». Les cas d’insoumission
et de désertion, infractions purement militaires3, dérogent également aux règles de la
prescription. Il ressort, en effet, des dispositions de l’article 75 du code de justice militaire
(CJM) que, « La prescription pour l’insoumis ou le déserteur commence à courir à partir du
jour où ils sont dégagés de leurs obligations militaires. Lorsque le déserteur ou l’insoumis s’est
réfugié ou est resté à l’étranger en temps de guerre pour se soustraire à des obligations
militaires, l’action publique ne se prescrit pas ». Cette prescription se rapporte à l’action
publique mais le silence du législateur concernant la peine peut conduire à plusieurs
interprétations. Ce qui permet d’estimer que logiquement la dérogation s’étend à la prescription
de la peine.

Aussi, relativement à la peine de nature criminelle, la loi prescrit, dans certains cas,
l’application de la peine d’interdiction de séjour jusqu’à la mort du condamné. Les dispositions
de l’article 719 du CP attestent cette dérogation : « Les peines portées par un arrêt rendu en
matière criminelle se prescrivent par vingt ans révolus…Néanmoins, le condamné sera soumis
de plein droit et sa vie durant à l’interdiction de séjour dans l’arrondissement où demeuraient
soit celui sur lequel ou contre la propriété duquel le crime aurait été commis, soit ses héritiers
1.
600. 1 La Cour de Cassation française, dans l’affaire Barbie (cass. crim. 6 octobre 1983) a rappelé cette
imprescriptibilité en ces termes : "en vertu des principes de droit reconnus par l’ensemble des nations,
les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles, et le droit à l’acquisition de leur prescription ne
saurait dès lors constituer un droit de l’homme ou une liberté fondamentale".
601. 2 V. M. VERON, « Droit pénal spécial », 9ème édition, Dalloz, 2002, p. 14 & SS.
602. 3 L’article 165 du CJM traite de l’insoumission et les articles 166 à 184 concernent l’infraction de
désertion.

271
Précis De Droit Pénal Général

directs ». Il en ressort que cette peine, réductrice de liberté, qui se rapproche d’une mesure de
sûreté est imprescriptible1. Cependant, elles peuvent être réputées exécutées par la voie de la
réhabilitation.

Quant aux peines correctionnelles elles se prescrivent par cinq (5) ans révolus à compter du
jour où la décision est devenue définitive (art. 720 du CPP). Les peines prononcées à l’issue
d’une décision relative à contravention connexe à un délit se prescrivent dans les mêmes
conditions qu’une peine délictuelle.

En matière contraventionnelle, la prescription est acquise au bout de deux ans révolus (art.
721 du CPP). Toutefois, il est fait entorse à cette règle quand il s’agit des peines prononcées
pour une contravention de simple police connexe à un délit. Ainsi, la loi prescrit que, « …les
peines prononcées pour une contravention de simple police connexe à un délit se prescrivent
selon les dispositions de l’article 720 ». Ce qui signifie que, dans cette hypothèse, la peine
contraventionnelle prononcée suit le sort de la peine délictuelle quant à la prescription. La
peine contraventionnelle prononcée dans ces conditions se prescrit donc au bout de cinq (5) ans
révolus.

Dans le domaine fiscal, certaines peines d’amende de type contraventionnel dérogent au droit
commun et se prescrivent par trois ans révolus (art. 239 du Code de l’Enregistrement du
timbre)2. La violation de certaines règles relatives aux drogues ou aux stupéfiants peut donner
lieu également à des dérogations. En matière de trafic de stupéfiants ou de substances
psychotropes, en effet, la prescription de l’action publique est de dix (10) ans et celle de la
peine fixée à vingt (20) ans, à compter du jour où la peine prononcée acquiert un caractère
définitif dans certaines hypothèses. En effet, l’article 90 du Code des drogues prescrit :
« Nonobstant les dispositions du code de procédure pénale, l’action publique relative aux
infractions visées aux articles 44 à 58 se prescrit par 10 ans à compter de la découverte des
faits. Les peines prononcées pour la répression des infractions susvisées se prescrivent par
20 ans à compter du jour où elle deviennent définitives ». Il s’agit d’une dérogation car ces
prescriptions s’appliquent, indifféremment, aux crimes et aux délits. C’est l’exemple des
articles 47, 50 et 523 du Code des drogues qui concernent des délits et auxquels ces
prescriptions s’appliquent. Ces trois articles prévoyant des sanctions variant entre un et cinq
ans d’emprisonnement, on en déduit qu’il s’agit d’infraction appartenant à la classe des délits
et pourtant, elles sont concernées par le délai de prescription (de la peine) de 20 ans.

1.
603. 1 V. Cass. crim. française, 23 novembre 1994, Bull. Crim. 1994, n°375.
604. 2 V. loi 26-63 AN du 24 juillet 1963 portant codification de l’enregistrement du timbre et de l’impôt sur
les valeurs mobilières, JOHV n°35 du 17 août 1963, p. 72 & JOHV n° 40 du 14 septembre 1963, p. 77
& SS.
605. 3 Article 47 du Code des drogues : "Sont punis d’un emprisonnement de 2 à 5 ans et d’une amende de
1000000 à 5000000 ou de l’une de ces deux peines seulement, ceux qui contreviennent aux dispositions
législatives et réglementaires concernant l’emploi ou la détention des drogues à haut risque à des fins de
consommation personnelle".
Article 50 du Code des drogues : "Sont punis d’un emprisonnement de 2 à 5 ans et d’une amende de 500000
à 2000000 ou de l’une de ces deux peines seulement, ceux qui cèdent ou offrent des drogues à haut risque à
une personne en vue de sa consommation personnelle".
Article 52 du Code des drogues : "Sont punis d’un emprisonnement de 2 à 5 ans et d’une amende de 500000
à 2000000 ou de l’une de ces deux peines seulement :
1) ceux qui facilitent à autrui, l’usage illicite des drogues à risque, à titre onéreux gratuit soit en procurant
dans ce but un local, soit par tout autre moyen…"

272
Précis De Droit Pénal Général

b - Le déclenchement du délai de prescription

357. Selon la loi, le délai de prescription de la peine court, «à compter de la date où cet arrêt ou
jugement est devenu définitif ». Pour le calcul du temps écoulé, la référence à la décision est
donc nécessaire. Cette décision doit avoir le caractère définitif et l’écoulement du délai
commence le jour où ce caractère a été acquis. Lorsque la décision contenant la peine est
susceptible d’appel, le délai court à l’expiration du délai d’appel. On considère à ce moment
que la condamnation contradictoire est devenue irrévocable. S’agissant d’une décision rendue
en dernier ressort, il court à l’expiration du délai de cassation. Le délai de prescription pour une
décision rendue par défaut se déclenche à partir de l’expiration du délai d’appel, à la condition
que la décision ait été signifiée. Dès lors que la peine est prescrite, le condamné ne peut plus
purger le défaut (art. 722 du CPP). Relativement aux peines prononcées à l’issue d’une
décision par contumace, le délai est débité logiquement à partir du jour de l’accomplissement
des formalités de publicité de la décision.

Dans l’hypothèse d’une évasion, la prescription de la peine non exécutée court à partir du jour
de l’évasion. S’il s’agit d’un cas de sursis, en cas de révocation du sursis le délai court le jour
où la condamnation entraînant cette révocation acquiert le caractère définitif.

c - L’interruption et la prescription du délai de prescription

358. Le législateur règle ces situations en ce qui concerne la prescription de l’action publique
mais il observe le silence s’agissant de la prescription de la peine. Néanmoins, des actes
d’exécution légaux peuvent interrompre le délai de prescription1. C’est le cas, quand intervient
une saisie ou un commandement ou une contrainte par corps pour le recouvrement d’une
amende. C’est aussi l’exemple d’une arrestation pour l’exécution d’une peine
d’emprisonnement. L’interruption a pour effet de faire disparaître le délai de prescription
démarré ou en cours et de le faire courir à nouveau. Dans le cas de l’évasion, le délai
recommence à courir (à nouveau) le jour où le condamné s’évade.

Quant à la suspension, elle arrête temporairement le cours du délai de prescription et constitue


un obstacle à l’exécution. La prescription reprend dès que l’obstacle, c’est-à-dire l’événement
qui l’a suspendue disparaît. Le temps écoulé avant la suspension est, en principe, pris en
compte. Le sursis, la détention de l’individu hors du territoire, le pourvoi en cassation, la
guerre, les catastrophes naturelles illustrent des cas d’événements obstacles (circonstances de
droit ou de fait). Ce sont, donc, des causes suspensives du cours des délais de prescription.

e - Les effets de la prescription

1.
606. 1 V. Cass. crim., 24 juillet 1957, Bull. Crim. n°573.

273
Précis De Droit Pénal Général

359. La prescription qui est d’ordre public n’efface pas la condamnation encore moins la
déclaration de culpabilité. Le juge ne peut plus exiger l’exécution de la peine et le condamné
ne peut pas renoncer à la prescription. Dés lors qu’une peine est prescrite, elle est réputée
exécutée. En conséquence, la condamnation est inscrite dans le casier judiciaire et est prise en
compte pour établir une situation de récidive. Il en est également tenu compte pour exclure
l’octroi d’un sursis à l’individu. Les sanctions de nature civile issues de la condamnation se
prescrivent conformément aux règles du code civil (art. 723 du CPP).

§2 - LA GRACE ET QUELQUES MESURES VOISINES

A côté de la grâce (1), il existe quelques mesures proches de celle-ci notamment la réduction et
le relèvement de peine (2).

1 – La grâce

360. C'est un acte de clémence ou une faveur qui permet au condamné définitif d'obtenir une
remise totale ou partielle de peine. C’est aussi un moyen pour le pouvoir exécutif de modifier
la durée ou la nature de la peine prononcée par une juridiction. Il s’agit d’une faveur accordée à
un individu qui a été reconnu coupable suite à une décision judicaire d’ordre pénal. La grâce
peut également se traduire par le remplacement d’une peine plus rigoureuse par une autre peine
plus douce. Elle est parfois interprétée comme une correction de la sévérité de la sanction
infligée par le juge ou prévue par la loi. En général, la grâce individuelle tient compte soit de la
bonne conduite du condamné, soit de son état de santé défectueux, soit de son âge.

Il est reconnu au président un pouvoir de gracier des personnes faisant l’objet d’une
condamnation pénale : « Le président …a le droit, conformément à l’article 54 de la
constitution, de gracier toute personne condamnée définitivement par un tribunal burkinabé
quelle que soit la peine prononcée » (art. 1er du décret 160 du 18 avril 1961)1. Il s’agit de la
grâce présidentielle (c’est une prérogative présidentielle) dont l’opportunité est laissée à
l’appréciation du Président de la République2. Il jouit, à ce titre, d’un pouvoir discrétionnaire.
Cette grâce est décidée par décret et peut être individuelle ou collective (faite à l'occasion par
exemple d'une fête nationale). Le décret n°2005-666 du 30 décembre 2005 portant remise de
peine à l’occasion du nouvel an est l’illustration d’une grâce présidentielle collective. Ainsi,
aux termes de l’article 1 dudit décret, « Il est fait remise du reliquat de leurs peines privatives
de liberté aux condamnés ci-après désignés, soit pour des raisons de santé, soit pour leur ardeur
au travail pénitentiaire, soit pour leur bon comportement ou en raison de leur minorité »3.
Des conditions (a) sous-tendent l’octroi d’une mesure de grâce qui, une fois effective, produit
des effets (b) non négligeables à l’endroit du bénéficiaire.

1.
607. 1 Article 54 de la Constitution : "Le Président du Faso dispose du droit de grâce. Il propose les lois
d’amnistie."
608. 2 B. AVIELLE & C. LECOINTRE, "De grâce, Monsieur le Président…", Gaz Pal., 1997, 2, doctrine, p.
1422.
609. 3 Décret n°2005-666/PRES/PM/MJ du 30 décembre 2005, JOBF n°8 du 23 février 2006, p. 239.

274
Précis De Droit Pénal Général

a- Les conditions d’obtention de la grâce

361. C’est la peine principale qui est, en principe, visée par la grâce. Mais, sous certaines
conditions prévues par le texte l’instituant, elle peut s'appliquer à toutes les autres peines
(accessoires, complémentaires)1 prononcées par toutes les catégories de juridiction (de droit
commun ou d’exception)2. En revanche, la grâce ne saurait s’étendre aux sanctions qui ne sont
pas strictement pénales notamment les sanctions disciplinaires, administratives, les amendes
fiscales, les indemnités civiles, les frais de justice. En principe, les mesures de sûreté
proprement dites sont hors du champ d’application de la grâce.

Toutes les catégories de délinquants (condamnés primaires ou récidivistes, majeurs ou


mineurs, personne morale ….) peuvent en bénéficier.

La grâce ne concerne que les condamnations ayant acquis un caractère définitif (non
susceptible de voies de recours)3. La condamnation doit donc être irrévocable et exécutoire.
Les condamnations affectées d’un sursis, les décisions susceptibles de recours (appel, pourvoi
en cassation, opposition), les condamnations exécutées ou prescrites ne répondent donc pas à
ces critères.

362. La grâce individuelle peut être accordée d'office ou par un recours en grâce à l’initiative
du condamné. Le condamné ou son défenseur doit introduire un recours en grâce (simple
demande écrite) adressé au Président de la République qui statue par voie de décret (art. 3 du
décret du 18 avril 1961 réglementant le droit de grâce). Aucune forme particulière n’est exigée
quant à la rédaction de la requête. L’instruction de la requête revient au ministère chargé de la
justice. Le représentant du Ministère public de la juridiction ayant rendu la décision de
condamnation est saisi par le Garde des sceaux qui le charge de prendre les dispositions
nécessaires pour la mise en état du dossier. En cas de nécessité, une enquête peut être
diligentée en vue d’obtenir des informations sur la situation sociale du condamné, sa moralité
et son comportement. Relativement au recours, des avis, notamment ceux du Garde des sceaux
sont sollicités.

A titre d’exemple, on peut citer la demande en grâce du 11 janvier 2005 formulée par les
conseils du demandeur, laquelle demande a fait l’objet d’une décision favorable (décision par
décret présidentiel) datant du le 22 mars 2005. Il s’agit du décret n°2005-167/PRES/PM/MJ du
22 mars 2005 portant grâce présidentielle dont l’article 1 précise : « Il est fait remise du
reliquat de sa peine privative de liberté à Monsieur … condamné par le tribunal correctionnel
de Ouagadougou le 20 août 2004 pour homicide involontaire, délit de fuite et défaut de

1.
610. 1 Article 5 du décret 160 du 18 avril 1961 relatif au droit de grâce: "La grâce est en principe limitée à
l’exécution de la peine principale. Elle s’applique toutefois aux peines accessoires et complémentaires
qu’énumère limitativement le décret présidentiel.
Si la grâce est totale, elle arrête l’accomplissement de la peine principale et celle des peines accessoires
et complémentaires que le décret précise.
Si la grâce est partielle, elle commue la peine en une peine inférieure."
611. 2 V. RENAULT, "Le droit de grâce doit-il disparaître ?", RSC 1996, p. 575.
612. 3 V. Cass. crim. 10 janvier 1947, RSC 1948, p. 85.

275
Précis De Droit Pénal Général

maîtrise à une peine d’emprisonnement de dix huit (18) mois fermes pour des raisons de
santé »1.

Le recours en grâce est renouvelable deux (2) fois. Dans l’hypothèse où le troisième recours
n’aboutit pas (rejet), la décision relative à celui-ci acquiert un caractère définitif.

La grâce collective est accordée sans aucune demande émanant des condamnés bénéficiaires.
Elle est accordée de façon unilatérale, à l’occasion de certaines circonstances exceptionnelles
ou d’un évènement d’envergure nationale (anniversaire de l’accession du Burkina Faso à
l’indépendance par exemple)2. La décision, qui intervient par la voie d’un décret unique signé
par le Président de la République et contresigné par le Premier et le Ministre chargé de la
justice, précise les bénéficiaires. C’est le cas du décret n°2005-666 du 30 décembre 2005
portant remise de peine.

b - Les effets de la grâce

363. Elle abrège la durée d’exécution de la peine. La grâce entraîne une dispense partielle ou
totale d'exécution de la peine. Une grâce totale arrête complètement l’exécution de la peine et
celle de caractère partiel entraîne le remplacement de la peine en cours d’exécution par une
peine plus douce (une peine d’emprisonnement de 5 ans en une peine de 3 ans ou commuer la
peine d’emprisonnement en une amende). La grâce totale éteint l'exécution de la peine. Elle
met immédiatement fin à l'exécution de la peine en cours. La grâce visant la peine principale,
même totale, n’emporte pas anéantissement de l’exécution des peines accessoires et
complémentaires tant que le décret ne contient pas expressément cette mention. Il est tenu
compte de la peine commuée par la voie de la grâce pour la confusion des peines.

Cependant, la grâce n'efface pas la condamnation (elle subsiste). C'est donc la condamnation
prononcée initialement qui est mentionnée dans le casier (avec mention de l’octroi de la grâce).
C'est également elle qui sert de base pour la détermination les cas de la récidive. Elle empêche
l’octroi du sursis. Elle n’entache pas les droits de réparation de la victime. L’individu
condamné à une peine perpétuelle (à vie) bénéficiaire d’une commutation n’est pas dispensé de
l’exécution de l’interdiction de séjour sauf si le décret de grâce en dispose autrement (art. 43 du
CP). Aucun recours n'est possible contre la décision de grâce (le décret de grâce).

2 – Le relèvement et les réductions de peine

Aussi bien le relèvement (a) que les réductions de peine (b) se rapprochent de la grâce.

1.
613. 1 Décret n°2005-167/PRES/PM/MJ du 22 mars 2005 portant grâce présidentielle, JOBF, n°14 du 7 avril
2005.
614. 2 B. LAVIELLE, "Décrets de grâces collectives : plus ça va, moins ça va", Gaz. Pal. 200, 1, doctrine, p.
574.

276
Précis De Droit Pénal Général

a - le relèvement

364. Le relèvement est une dispense (judiciaire) d’exécution de peines secondaires


(complémentaires ou accessoires). L’exemption vise les interdictions, les déchéances ou les
incapacités prononcées à titre de peine complémentaire ou accessoire. Toute personne frappée
de telles catégories de peine peut en demander son relèvement à la juridiction qui l'a décidée.
Cette mesure n’est pas expressément prévue par le droit pénal burkinabé tandis qu’elle l’est en
droit français (art. 55-1, 132-21 du code pénal français [CPF] et 702-1, 703, 777 du code de
procédure pénale française [CPPF])1.

Certes, l’existence du relèvement n’est pas expressément exprimée par le législateur burkinabé
mais il est implicitement prévu. Quelques textes spéciaux contiennent des dispositions relatives
au relèvement. Ainsi, les individus (auteurs, complices) ayant participé à la tentative de
commission ou à la commission de certaines infractions relatives aux stupéfiants et aux
substances psychotropes et ayant contribué à éviter leur réalisation effective ou à identifier, à
arrêter les autres participants peuvent bénéficier d’une réduction de la moitié de la peine
prévue. Ils peuvent également bénéficier de l’exemption des mesures accessoires et peines
complémentaires facultatives (art. 66 du code des drogues)2. Aussi, la loi du 9 mai 1961
réglementant l’amnistie prévoit-elle le relèvement comme conséquence de l’amnistie :
« L’amnistie de l’infraction entraîne,…la remise de toutes les peines principales…Elle relève
l’amnistié de toutes déchéances et incapacités découlant de la condamnation sous les trois
réserves ci-après… » (art. 4 de ladite loi).

b - La réduction de peine

365. La réduction consiste à dispenser le condamné de l’exécution d’une portion de la peine


privative de liberté. La conséquence en est le raccourcissement du temps d’exécution de la
peine. Cette réduction peut être interprétée comme une récompense au bénéfice du condamné
en bonne voie de resocialisation ou de réadaptation. L’effacement de moitié de la peine prévue
à l’article 66 du code des drogues en faveur de ceux (repentis notamment) qui révèlent des
actes de criminalité (organisée) en cours de commission ou déjà commis constitue un cas de
réduction de peine. On a pu constater que la grâce présidentielle accordée par le Président du
Faso (République) peut consister en une réduction de peine et dans ce cas, il s’agit d’une
dispense partielle d’exécution de peine. C’est le cas pour quelques bénéficiaires de la grâce
intervenue le 31 décembre 2002 à l’occasion du nouvel an. Ainsi, l’article 1 dudit décret du
prescrit que, « la peine d’emprisonnement à vie prononcée le 10 janvier 1998 contre [O. O. A.]
pour assassinat par la chambre criminelle de la Cour d’Appel de Ouagadougou est commuée à
une peine d’emprisonnement de vingt (20) ans »3.

1.
615. 1 Le relèvement a été institué en droit français à partir d’une loi du 29 décembre 1972 complétée par une
autre datant du 11 juillet 1975.
616. 2 Article 66 du code des drogues : "Hormis les cas prévus à l’article précédent, toute personne auteur ou
complice de l’une des infractions énumérées dans cet article qui, avant toute poursuite permet ou facilite
l’identification des autres coupables ou après l’engagement des poursuites permet ou facilite
l’arrestation de ceux-ci, sera punie de la moitié des peines prévues aux articles 444 à 54.
Toutefois, ladite personne est également exemptée de l’amende et le cas échéant des mesures et peines
complémentaires facultatives."
617. 3 V. décret n°2002-606/PRES/PM/MJ du 31 décembre 2002 portant remise de peine à l’occasion du
nouvel an, JOBF n°03, 2003 (WWW.legiburkina.bf/jo/jo2003

277
Précis De Droit Pénal Général

Le condamné peut saisir le juge de l’application des peines1 en vue d’obtenir une réduction du
temps d'exécution de la peine ou une remise de peine (art. 99 à 101 du kiti an VI 103 du
1er/12/1988).

SECTION II – L'EXTINCTION RESULTANT DE LA NEUTRALISATION


DE LA CONDAMNATION

L’amnistie2 qui intervient dans des circonstances diverses se présente notamment comme une
mesure tendant à une réconciliation sociale (après un conflit social, après des élections…).
Cette intervention qui se fait après la commission de l’infraction permet, quelquefois, de
remédier au problème de surpopulation en milieu carcéral. L’amnistie (§1) et la réhabilitation
(§2) sont des causes d’extinction de la condamnation.

§1 - L'AMNISTIE

L’amnistie vise un domaine d’application précis (1) et son octroi suppose un certain nombre
d’effets (2).

1 – Définition et domaine de l’amnistie

366. L’amnistie, acte de souveraineté, est une mesure législative "d’oubli" qui efface la
condamnation prononcée et fait disparaître l'infraction3. Elle neutralise donc le caractère
infractionnel de l’acte. Elle est, en principe, de la compétence du pouvoir législatif.
L’amnistie4, forme de pardon peut, dans certains cas, être appréhendée comme une gratification
des mérites du condamné quant aux efforts fournis pour sa réadaptation. L’amnistie favorise le
reclassement social de l’individu et permet de rétablir la paix sociale. Elle ne peut intervenir
que par le biais d'une loi qui mentionne les infractions concernées (loi 15-61 AN du 9 mai 1961
réglementant l'amnistie au BF). C’est la loi d’amnistie qui détermine donc son domaine
d’application (conditions d’application, date d’effet, nature de la peine, quantum de la peine) 5.
Elle concerne notamment les sanctions de droit commun, celles de caractère politique, les
sanctions disciplinaires ou professionnelles et les déchéances6. Relativement à la détermination
de son champ d’application la loi peut viser notamment la nature des infractions concernées

1.
618. 1 Il existe une commission de l'application des peines (art 25 du kiti an VI-103 du 1er/12/1988).
619. 2 G. LORHO, "Pour en finir avec l’amnistie", Droit pénal 1994, chr., pp.44
620. 3 Y. CHARTIER, "Le contentieux des lois d’amnistie", Ann. Fac. Droit de Clermont-Ferrand, Fasc. 11,
1974.
621. 4 DESBACH, "L’amnistie en matière disciplinaire", D. 1963, Chr., 259.
622. 5 V. loi 15-61 AN du 9 mai 1961 portant réglementation de l’amnistie au Burkina Faso, JORHV du 27
mai 1961, p. 490. Aux termes de l’article 1 er de cette loi, "Toute amnistie doit faire l’objet d’une loi.
623. La loi d’amnistie précise les catégories d’inculpés et de condamnés qui en bénéficient. Elle précise les
catégories des crimes, délits ou contravention qui forment son objet.
624. La loi d’amnistie peut également viser les sanctions disciplinaires encourues par les fonctionnaires,
employés ou agents des administrations ou établissements publics, soit en raison uniquement d’une
fautes de service, soit comme conséquence d’une condamnation pénale que la loi d’amnistie efface".
625. 6 V. B. MERCADAL, "Les interdictions professionnelles et l’amnistie", D., 1993, chronique (chron.), p.
44.

278
Précis De Droit Pénal Général

(délits, contravention..), les circonstances de leur commission et la nécessité d’existence d’un


certain nombre de conditions après leur commission (paiement d’indemnité de réparation...).

Outre l’amnistie pure et simple1, il existe une autre variante d'amnistie : la grâce amnistiante.
Si l’amnistie simple vise des infractions données sans d’autres exigences, la seconde catégorie
est subordonnée notamment à l’exécution d’une partie de la peine ou celle d’une obligation.
C’est ainsi qu’un décret subordonne le bénéfice effectif d’une grâce amnistiante à l’exécution
d’une peine d’amende : « Les effets de la présente mesure de grâce amnistiante sont ceux
définis par la loi…portant conditions d’octroi de la grâce amnistiante. Toutefois la grâce
amnistiante prévue par le présent décret ne sera acquise qu’après paiement par le bénéficiaire,
de l’amende à laquelle il aurait été personnellement ou solidairement condamné » (art. 2 du
décret n°98-65/PRES du 24 février 1998 octroyant une grâce amnistiante).

367. La grâce amnistiante est une amnistie accordée à titre de mesure individuelle (amnistie
par mesure individuelle). En droit burkinabé, elle peut notamment être accordée par décret du
président du Faso. (art.10 de la loi 15-AN du 9 mai 1961)2. Elle est amnistiante par ses effets
qui sont les mêmes que ceux d'une amnistie (art. 11 de la loi 15-AN du 9 mai 1961). Le
condamné, pour l'obtenir, doit en faire la demande.

Ainsi, à la demande de son avocat, un individu a obtenu une grâce amnistiante suivant décret
n°98-65/PRES du 24 février 1998. C’est à ce titre qu’il est prescrit à l’article 1er de ce décret :
« Il est accordé à Monsieur … la grâce amnistiante pour la sanction disciplinaire de
révocation et la peine d’emprisonnement de six (6) mois prononcée à son encontre par le
Tribunal Correctionnel de Ouagadougou pour les délits de diffamation et d’offense commis le
3 Août 1995 ». Dans cet exemple, les conditions d’octroi de cette grâce amnistiante ont été
fixées par la loi n°17/97/II du 29 juillet 1997 qui prescrit que « La grâce amnistiante peut être
accordée à titre individuel à toute personne ayant fait l’objet soit d’une condamnation pénale
devenue définitive, soit d’une sanction disciplinaire et qui en fait la demande dans un délai de
douze (12) mois à compter de la date de promulgation de la présente loi » (art.2). Il ressort de
la combinaison de l’article 3 de cette loi et de l’article 10 de la loi réglementant l’amnistie que
les conditions d’octroi peuvent varier d’une période à une autre. En effet, les conditions
d’octroi fixées par la loi de 1997 ne valent que pour les auteurs des faits commis entre le 1 er
janvier 1995 et le 30 juin 1997. Les infractions visées concernent précisément les délits de
diffamation, d’injure ou d’outrage3.

1.
626. 1 En droit français, la loi d’amnistie du 17 juin 1966 concernant les infractions commises au cours des
conflits d’Algérie entre 1954 et 1962 illustre une amnistie simple.
627. 2 Article 10 de la loi 15-AN du 9 mai 1961 sur l’amnistie: "Les lois d’amnistie pourront fixer les
conditions dans lesquelles l’amnistie pourra être accordée à titre individuel par arrêté du Garde des
sceaux, ministre de la justice, par décret du Président du Faso, sur proposition du ministre de la justice.
La grâce amnistiante devra faire l’objet d’une demande adressée par l’intéressé au Garde des sceaux. La
décision sera prise après consultation du dossier de l’affaire pénale et lecture du rapport que devra
établir le représentant du ministère public près le tribunal qui a statué ou est appelé à statuer. Ce rapport
pourra être complété par un dossier d’enquête sur la personnalité, la moralité et la situation sociale du
demandeur ainsi que, le cas échéant, sur son comportement en détention.
Le décret portant grâce amnistiante devra être notifié à l’intéressé."
628. 3 Article 3 de la n°17/97/II du 29 juillet 1997 fixant les conditions d’octroi de la grâce amnistiante : "La
grâce amnistiante concerne les auteurs des faits commis entre le 1er janvier 1995 et le 30 juin 1997 et
ayant donné lieu à une condamnation pénale devenue définitive ou à une sanction disciplinaire se
rapportant aux délits de diffamation, d’injure ou d’outrage :

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Précis De Droit Pénal Général

Certaines catégories de délinquant sont, en principe, exclues du bénéfice de l’amnistie. Il s’agit


notamment des récidivistes : « Sauf dispositions contraires de la loi d’amnistie, les récidivistes,
notamment les relégués ou reléguables, ne pourront en bénéficier » (art. 2 de la loi du 9 mai
1961 réglementant l’amnistie). Toutefois, il convient de noter que la relégation a été supprimée
en droit burkinabé. Cela sous-entend que le cas du récidiviste relégué n’existe pas.

2 – Les effets de l’amnistie

368. L'amnistie efface la condamnation et ôte aux faits son caractère d'infraction ou
délictueux. Elle est d’ordre public et couvre toutes les peines principales, accessoires ou
complémentaires1. En principe, si la loi d'amnistie entre en vigueur avant l'engagement des
poursuites pénales, l'action publique est éteinte quant aux infractions visées par la loi
amnistiante. Si elle intervient après l'engagement mais avant la condamnation, les poursuites
doivent être abandonnées. Dans le cas d’une information en cours (si l’affaire est visée par
l’amnistie) le juge instructeur rend une décision de non lieu (art 3 de la loi du 9 mai 1961).
Enfin, si elle est accordée après la condamnation, celle-ci est considérée comme non avenue.
Ce qui signifie qu’elle fait obstacle à l’exécution de la peine ou arrête définitivement son
cours2. Une fois l’amnistie acquise, il est interdit au juge de faire état des condamnations
couvertes par celle-ci (au cours d’un autre litige ou dans une autre affaire). Elle n’engendre
cependant pas la restitution (des amendes déjà payées par exemple).

Mais l’amnistie, visant une pluralité d’infractions, ne peut jouer que sous certaines conditions
légales. En effet, la condamnation relative à plusieurs infractions ne peut être couverte par
l’amnistie que si la peine unique prononcée est supérieure au maximum de l’ensemble des
peines non amnistiées. La peine est, dans ces conditions, ramenée à ce maximum. Lorsque le
quantum de la peine unique est inférieur ou égal à ce maximum, l’amnistie n’emporte pas la
condamnation. Toujours en cas de pluralité d’infractions et si l’affaire est en instance de
jugement, l’amnistie fait disparaître l’infraction amnistiée. Dans cette dernière hypothèse
l’action publique est réputée éteinte (art. 6 de la loi du 9 mai 1961).

L'amnistie n'a, en principe, pas d'effet à l'égard des mesures de rééducation et des mesures de
sûreté notamment la confiscation. Elle est également sans incident sur les mesures de
placement, de garde et de surveillance décidées à l’endroit du mineur (art. 4 da la loi du 9 mai
1961)3. En outre, elle ne saurait engendrer (automatiquement) la réintégration d’un agent de

3.
1°au chef de l’Etat, aux membres du Gouvernement, aux Présidents d’institutions ou aux Corps
Constitués ;
2°aux Chefs d’Etats, aux membres des gouvernements ainsi qu’aux diplomates étrangers "
629. 1 M. CONAN, "Amnistie présidentielle et tradition ", Revue de Droit Publique, 2001, p. 1305.
630. 2 v. Cass. crim. fr. 11 février, 1985, Bull. Crim. 1985, n°66.
631. 3 Article 4 da la loi du 9 mai 1961 : "L’amnistie de l’infraction entraîne, sans qu’elle puisse jamais
donné lieu à restitution ; la remise de toutes les peines principales, accessoires ou complémentaires. Elle
relève l’amnistié de toutes les déchéances et incapacités découlant de la condamnation sous les réserves
ci-après :"
1° l’amnistie n’entraîne pas la réintégration dans les fonctions ou dans les emplois publics, offices
publics ou ministériels ;
2° les mesures de placement, de garde et de surveillance prononcées contre les mineurs amnistiables
seront maintenues ;

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Précis De Droit Pénal Général

l’Etat dans ses fonctions. Elle peut, en revanche, être invoquée pour soutenir une demande de
réintégration. Elle ne porte pas non plus atteinte au droit d’exercer un pourvoi en révision (art.
8 de la loi du 9 mai 1961), surtout, quand cette action tend à établir l’innocence de la personne.
Ce qui apparaît normal, dans la mesure où l’individu peut être reconnu coupable et avoir la
qualité de condamné (délinquant) avant le bénéfice de l’amnistie. Or, une révision de la
décision peut conduire à la remise en cause de sa culpabilité (non coupable ou non responsable
pénalement après correction d’une erreur judiciaire par exemple) de l’individu. Il va sans dire
que dans ce cas la décision de révision reconnaissant sa non culpabilité reste plus importante :
l’individu passe de la qualité de délinquant à celle d’innocent. La révision est évidemment
possible quand la condamnation a déjà été prononcée (avant l’intervention de la loi d’amnistie).
L’amnistie ne constitue pas, en principe, un obstacle à la réhabilitation.

L'amnistie entraîne le retrait de la condamnation du casier judiciaire (art. 725, al.2 du CPP)
mais est conservée dans les minutes des jugements, arrêts et décisions1. Aucune référence à
cette condamnation ne doit être faite notamment pour l’octroi d’un sursis ou pour constater un
cas de récidive ou pour instruire une nouvelle affaire. L'amnistie ne préjudicie pas les droits
des tiers. Ceux -ci conservent leurs droits de poursuite civile ou d'indemnisation. Elle ne
constitue pas non plus un obstacle au recouvrement des frais de justice (droits du Trésor
Public). La loi d'amnistie est d'interprétation stricte. L’amnistie ne fait pas disparaître les
vestiges des faits (illicites) pour lesquels l’individu a été condamné car les procès verbaux au
niveau de la police judiciaire, les dossiers d’instruction ne sont pas détruits : ils restent dans les
archives.

Certes, l'amnistie est une cause d'extinction de la sanction mais en est-il de même pour la
réhabilitation?

§2 - LA RÉHABILITATION

369. La réhabilitation2 intervient dans le cas où un individu a été condamné et a purgé sa peine
(ou elle est prescrite) mais reste frappé d’incapacités (interdiction d’exercer certaines
professions, déchéances de droits de famille…). « La réhabilitation est l’effacement pour
l’avenir d’une condamnation … »3. C’est une mesure qui engendre le rétablissement d’une
situation légale perdue par un individu suite à l'effet d'une condamnation (art. 738 à 755 du

3.
3°les mesures de sûretés notamment les confiscations subsisteront.
L’amnistie permet toutefois aux bénéficiaires de demander leur réintégration dans les fonctions ou
emplois qu’ils occupaient dans l’administration ou les établissements publics, la réintégration est une
mesure gracieuse et facultative ordonnée par décret. La réintégration consécutive à l’amnistie ne peut
jamais donner lieu à reconstitution de carrière ni à indemnité.

1
Dans l’exemple du décret n°98-65/PRES du 24 février 1998 octroyant la grâce amnistiante, il est précisé
à l’article 3: "Il est interdit à toute personne ayant eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions de
rappeler sous quelque forme que ce soit, ou de laisser susciter dans tout document quelconque, les
condamnations pénales, les sanctions disciplinaires ou les déchéances effacées par la grâce amnistiante.
Seules les minutes des jugements et arrêts des juridictions échappent à cette interdiction"

632. 2 V. MARCHAUD, "Sursis non avenu et réhabilitation", Gaz. Pal., 1974, II, p. 924 (doctrine).
633. 3 V. J. PRADEL, "Droit pénal général", 14ème édition, 2002, op. cit. n°778.

281
Précis De Droit Pénal Général

CP)1. N’est-ce pas dans ce sens qu’un auteur estime que, « légale ou judiciaire, elle procède
d’effets identiques : il s’agit de replacer le condamné dans les droits qu’il a perdus, et de lui
rendre le statut d’un citoyen ordinaire, comme s’il n’avait jamais été frappé par la justice »2. On
peut considérer cela comme le rétablissement du condamné dans son honneur et dans ses
droits. En principe, elle n’est pas destinée à éteindre la peine principale qui est supposée éteinte
ou avoir été exécutée. Elle permet, surtout, de faire cesser notamment les interdictions, les
déchéances, les incapacités. En d'autres termes, elle a, principalement, pour objet l'extinction
d’autres peines (n’ayant pas le caractère de peine principale : les peines secondaires en
particulier) qui peuvent continuer de produire leurs effets (subsistance) alors que l'individu a
purgé la peine principale.

Cette faveur est, en général, accordée aux coupables qui ont fait une preuve certaine
d'amendement. Il existe deux types de réhabilitation : légale et judiciaire. En effet, aux termes
de l’article 739 du CPP, « La réhabilitation est soit acquise de plein droit soit accordée par la
chambre d’accusation». La réhabilitation est légale lorsqu'elle est de plein droit. Elle est
judiciaire lorsqu'elle intervient par voie judiciaire. Quelle que soit la catégorie de
réhabilitation, son obtention suppose que certaines conditions (1) ont été remplies et qu’elle
produit des effets (2).

1 – Les conditions de la réhabilitation

Toute catégorie de réhabilitation concerne aussi bien les personnes physiques que les personnes
morales. La réhabilitation ne peut être demandée ou acquise que si la peine a été exécutée ou
réputée telle (ou a fait l'objet d'une grâce). L'exécution doit avoir été effectuée depuis un
certain temps. Les conditions d’une réhabilitation légale (celle-ci vise le reclassement de
l’individu) (a) diffèrent de celles d’une réhabilitation judiciaire (b), même si quelques points
leur restent communs.

a - La réhabilitation légale

370. La réhabilitation légale intervient par l'effet du temps s'il n’y a pas eu de condamnation
nouvelle. Elle ne nécessite donc pas le déclenchement d’une procédure de réhabilitation mais
une bonne conduite du condamné. Les délais varient suivant le type de condamnation (amende,
emprisonnement inférieur ou égale à six mois). La loi (art. 740 du CPP) dispose, en effet, que :
« Elle est acquise de plein droit au condamné qui n’a, dans les délais ci-après déterminés, subi
aucune condamnation nouvelle à l’emprisonnement ou à une peine plus grave pour crime ou
délit :
1° pour la condamnation à l’amende, après un délai de cinq ans, à compter du jour du paiement
de l’amende ou de l’expiration de la contrainte par corps ou de la prescription accomplie ;
2° pour la condamnation unique à une peine d’emprisonnement ne dépassant pas six mois,
après un délai de dix ans, à compter de l’expiration de la peine subie, soit de la prescription
accomplie ;

1.
634. 1 Article 738 du CPP : " Toute personne condamnée par une juridiction à une peine criminelle ou
correctionnelle peut être réhabilitée".
635. 2 V. Y. MAYAUD, "Droit pénal général", édition 2004, PUF, n°540.

282
Précis De Droit Pénal Général

3° pour la condamnation unique à une peine d’emprisonnement ne dépassant pas deux ans ou
pour les condamnations multiples dont l’ensemble ne dépasse pas un an, après un délai de
quinze ans, compté comme il est dit au paragraphe précédent ;
4° pour la condamnation unique supérieure à deux ans d’emprisonnement ou pour les
condamnations multiples dont l’ensemble ne dépasse pas deux ans, après un délai de vingt ans,
compté de la même manière.
Sont, pour l’application des dispositions qui précèdent, considérées comme constituant une
condamnation unique, les condamnations dont la confusion a été accordée. La remise totale ou
partielle d’une peine par voie de grâce équivaut à son exécution totale ou partielle ».

Il ressort de ces conditions que la réhabilitation de plein droit n’est pas applicable au cas où
l’ensemble des condamnations multiples à l’emprisonnement dépasse deux ans. En outre, elle
n’affecte pas toutes les condamnations car elle concerne des condamnations à des peines
principales. Les délais prévus par la loi ne doivent pas être ponctués de nouvelles
condamnations de type délictuel ou criminel (d’où la nécessité d’une bonne conduite de la part
du condamné). Aussi, la loi (art. 738 du CPP)1 laisse-t-elle apparaître que la réhabilitation ne
concerne que les peines à caractère criminel ou délictuel. A priori, les peines
contraventionnelles sont exclues.

Il convient de relever que malgré le silence du législateur, la réhabilitation légale concerne


aussi la personne morale. L’interprétation de l’article 740 du CPP permet de conclure que la
réhabilitation légale peut être acquise par une personne morale. La référence à l’article 740-1°
du CPP, permet de déduire que cette catégorie de personne acquiert la réhabilitation légale si
les conditions requises sont remplies. En effet, la personne morale pouvant être condamnée à
une peine d’amende pour crime ou délit, elle peut, en principe, obtenir la réhabilitation si dans
un délai de cinq ans à partir du paiement de l’amende ou de la prescription de la peine ou
encore de l’expiration de la contrainte par corps, elle ne fait l’objet d’aucune nouvelle
condamnation.

Toutefois, on peut s’interroger sur l’appréciation de la gravité de la peine dans la mesure où au


niveau des premières dispositions de l’article 740 du CPP, il est fait mention de
"…condamnation nouvelle à l’emprisonnement ou à une peine plus grave pour crime ou
délit". Faut-il, dans le cas de la personne morale, considérer la peine d’amende comme étant
plus grave que la peine d’emprisonnement ou estimer que, quel que soit le montant d’une
amende, elle reste moins grave qu’une peine d’emprisonnement ? La dernière interprétation
prive la personne morale du droit à la réhabilitation légale. Il convient de partir du postulat que
l’amende est la peine de caractère principal, généralement, infligée à la personne morale. Il en
ressort que, même si la condamnation est d’un franc CFA symbolique, la personne morale doit
pouvoir bénéficier de cette "faveur légale » dès lors que les conditions requises sont remplies.

b- La réhabilitation judiciaire

371. Une requête demeure nécessaire pour l’obtention d’une réhabilitation judiciaire (arrêt de
la chambre d'accusation au BF). Au titre de cette demande, c’est le Procureur de la République
1.
636. 1 Article 738 du CPP : "Toute personne condamnée par une juridiction du Burkina Faso à une peine
criminelle ou correctionnelle peut être réhabilitée" ; art. 739 : "La réhabilitation est soit acquise de plein
droit soit accordée par arrêt de la chambre d’accusation".

283
Précis De Droit Pénal Général

du lieu de résidence du demandeur qui doit être saisi1. La demande doit être faite
personnellement par l’intéressé (de son vivant) sauf s’il a la qualité d’interdit (par son
représentant légal dans ce cas). En cas de décès, après l’engagement de la procédure, le
conjoint ou les ascendants ou encore les descendants peuvent poursuivre la procédure. Si le
décès a eu lieu avant tout déclenchement de la procédure, ceux-ci peuvent former la demande
mais dans un délai d’une année après le décès2. L’introduction d’une telle demande suppose
que l’individu a exécuté la ou les peines principales. La demande doit viser toutes les
condamnations n’ayant pas fait l’objet d’un effacement par réhabilitation ou par amnistie.

La procédure ne peut être engagée qu’après l’écoulement d’un temps déterminé (légalement)
qui varie suivant la nature de la condamnation. Le temps à observer pour former la demande
est de cinq (5) ans pour les condamnés à une peine criminelle et de trois ans pour une
condamnation à une peine correctionnelle (art. 742 du CPP). S’agissant de l’amende le délai
court à compter du jour où la condamnation est devenue irrévocable. Dans l’hypothèse d’une
peine privative de liberté, le décompte commence le jour de la libération définitive du
condamné ou le jour de sa libération conditionnelle quand elle n’a pas été révoquée. Le
condamné doit aussi apporter la preuve du paiement de l’amende, des frais de justice et de la
réparation civile des dommages (art. 744 du CPP).3 S’il s’agit d’un condamné pour
banqueroute, il a l’obligation de justifier le paiement du passif de la faillite en capital, intérêts
et frais ou de la remise dont il a bénéficié.

Les délais sont plus longs lorsqu’il s’agit d’un récidiviste, d’un condamné au profit duquel la
peine s’est éteinte par prescription ou d’un condamné déjà réhabilité. Ces délais varient de six à
dix ans et courent à compter du jour de libération ou de prescription (art. 743 du CPP)4. En
1.
637. 1 Pour plus de détails concernant les conditions de forme, voir les articles 746 à 754 du CPP.
638. 2 Article : 741 du CPP, "la réhabilitation ne peut être demandée en justice, du vivant du condamné, que
par celui-ci ou, s’il est interdit, par son représentant légal ; en cas de décès et si les conditions légales
sont remplies, la demande peut être suivie par son conjoint ou par ses ascendants ou descendants et
même formée par eux, mais dans le délai d’une année seulement après le décès.
La demande doit porter sur l’ensemble des condamnations prononcées qui n’ont été effacées ni par une
réhabilitation antérieure, ni par l’amnistie".
639. 3 Article 744 du CPP : "Le condamné doit, sauf, le cas de prescription, justifier du paiement des frais de
justice, de l’amende et des dommages-intérêts ou la remise qui lui en est faite.
A défaut de cette justification, il doit établir qu’il a subi le temps de contrainte par corps déterminé par
la loi.
S’il est condamné pour banqueroute frauduleuse, il doit justifier du paiement du passif de la faillite en
capital, intérêts et frais ou de la remise qui lui en est faite.
Néanmoins, si le condamné justifie qu’il est hors d’état de se libérer des frais de justice, il peut être
réhabilité même dans le cas où ces frais n’auraient pas été payés ou ne l’auraient été qu’en partie.
En cas de condamnation solidaire, la Cour fixe la part des frais de justice, des dommages-intérêts ou du
passif qui doit être payée par le demandeur.
Si la partie lésée ne peut être retrouvée ou si elle refuse de recevoir la somme due, celle-ci est versée à
la caisse des dépôts et consignations comme en matière d’offres de paiement et de consignation. Si la
partie ne se présente pas dans un délai de cinq ans pour se faire attribuer la somme consignée, cette
somme est restituée au déposant sur sa simple demande."
640. 4 Article 743 du CPP : "Les condamnés qui sont en état de récidive légale, ceux qui après avoir obtenu
la réhabilitation, ont encouru une nouvelle condamnation, ceux qui, condamnés contradictoirement ou
par défaut à une peine criminelle, ont prescrit contre l’exécution de la peine, ne sont admis à demander
leur réhabilitation qu’après un délai de dix années écoulées depuis leur libération ou depuis la
prescription.
Néanmoins, les récidivistes qui n’ont subi aucune peine et les réhabilités qui n’ont encouru qu’une
peine correctionnelle sont admis à demander la réhabilitation après un délai de six années écoulées
depuis leur libération.

284
Précis De Droit Pénal Général

outre, le condamné « bénéficiaire » d’une prescription de peine doit prouver que, pendant le
délai de prescription, il a eu une bonne conduite et n’a fait l’objet d’aucune condamnation
sanctionnant un délit ou un crime (art. 744 du CPP).

Aussi, suppose-t-on que les conditions sont identiques aussi bien pour le condamné, personne
physique que pour le demandeur, personne morale (son représentant), dans la limite des
conditions qui sont applicables à une personne morale (il reste par exemple impossible
d’appliquer la condition relative à la peine privative de liberté à cette catégorie de personne).
Le législateur burkinabé n’a pas prévu de conditions spécifiques au cas d’un condamné,
personne morale, à la différence de son homologue français. Dans tous les cas, les conditions
d'exécution de peine et de délais ne s'appliquent pas au demandeur qui a rendu d'imminents
services à l'Etat (art. 745 du CPP)1. Dans cette hypothèse, il n’est pas nécessaire que l’amende
et les dommages-intérêts aient été acquittés.

2 – Les effets de la réhabilitation

372. Les deux catégories de réhabilitation conduisent aux mêmes effets. La réhabilitation
efface la condamnation à l’instar de l’amnistie. Mais, en cas d’amnistie, il n’est pas nécessaire
que la peine soit exécutée. L’amnistie s’applique à des peines exécutées ou non et à des
situations n’ayant pas encore donné lieu à une condamnation.

La réhabilitation fait cesser pour l'avenir toutes les incapacités qui en résultent (art. 755 du
CPP). Elle entraîne le retrait de la condamnation du bulletin n°2 et 3 du casier judiciaire (art.
754 du CPP). Le bulletin n°1 est un relevé intégral du passé judiciaire de l’individu (s’il en
existe) et est destiné aux autorités judiciaires (art. 730 du CPP). Quant au bulletin n°2, il
constitue un relevé partiel qui exclut certaines mentions notamment les condamnations
assorties de sursis, les condamnations effacées par une réhabilitation, les décisions prononcées
suite à l’application d’un texte relatif à l’enfance délinquante (art. 731 du CPP). Le bulletin n°2
peut être délivré aux autorités judiciaires, administratives et à certaines personnes morales (art.
732 du CPP). Le bulletin n°3 ne peut être délivré qu’à la personne concernée (art. 733 du CPP).
Il constitue un relevé des condamnations à des peines privatives de liberté (sans sursis).

En droit militaire, certaines sanctions (déchéances, perte de droits) subsistent malgré


l’obtention de la réhabilitation. Ces sanctions sont énumérées par l’article 152 du Code de
justice militaire : « En cas de réhabilitation, la perte de grade, des décorations burkinabé et
des droits à pension pour services antérieurs qui résultaient de la condamnation, subsistent

3.
Sont également admis à demander la réhabilitation, après un délai de six années écoulées depuis la
prescription, les condamnés contradictoirement ou par défaut à une peine correctionnelle qui ont
prescrit contre l’exécution de la peine.
Les condamnés contradictoirement ou par défaut qui ont prescrit contre l’exécution de la peine sont
tenus, outre les conditions qui vont, être énoncées, de justifier qu’ils n’ont encourus, pendant les délais
de la prescription, aucune condamnation pour faits qualifiés crimes ou délits et qu’ils ont eu une
conduite irréprochable."
641. 1 Article 745 du CPP : "Si depuis l’infraction le condamné a rendu des services éminent au pays, la
demande de réhabilitation n’est soumise à aucune condition de temps ni d’exécution de peine. En ce
cas, la Cour peui accorder la réhabilitation même si les frais, l’amende et les dommages-intérêts n’ont
pas été payés"

285
Précis De Droit Pénal Général

pour les militaires. Toutefois en cas de réintégration dans les Forces armées, ceux-ci peuvent
acquérir de nouveaux grades, décorations et droits à pension ».

En droit français, le retrait de la condamnation est étendu au bulletin n°1 également. Cette
différence est logique dans la mesure où cette extension date de l’année 1994 alors que le texte
régissant la réhabilitation en droit burkinabé n’a pas encore été révisé depuis son entrée en
vigueur en 1968. Ce texte ne tient donc pas compte des différentes évolutions.

286
Précis De Droit Pénal Général

ANNEXES

287
Précis De Droit Pénal Général

DISPOSITIONS PRELIMINAIRES, LIVRE PREMIER


ET LIVRE DEUXIEME DU CODE PENAL

Loi 43-96 ADP du 13 novembre 1996 portant code pénal (promulguée par le décret 96-451
du 18 décembre 1996) ; modifiée par la loi 6-2004 AN du 6 avril 2004 (promulguée par
décret 2004-200 du 17 mai 2004, J.O.BF. du 3 juin 2004, p. 735).

DISPOSITIONS PRELIMINAIRES

Art. 1er. Nulle infraction ne peut être punie et nulle peine prononcée si elles ne sont légalement
prévues.

Art. 2. Sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été
commis.
La loi qui efface la nature punissable d'un fait ou qui allège une peine a un effet rétroactif. Elle
arrête toute poursuite en cours ainsi que l’exécution de la peine prononcée.
La loi qui allège une peine s’applique aux infractions commises avant son entrée en vigueur et
qui n’ont pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée.
La loi qui rend un fait punissable ou qui aggrave une peine n'a point d'effet rétroactif.

Art. 3. Nul ne peut être déclaré pénalement responsable et encourir de ce fait une sanction s'il ne
s'est rendu coupable d'une infraction.
Nul ne peut être reconnu coupable d'une infraction, ni condamné à une peine autrement que par
décision d'une juridiction compétente.

Art. 4. La loi pénale s'applique à toute infraction commise sur le territoire national quelle que
soit la nationalité de son auteur.
La loi pénale s’applique également aux infractions commises par un national ou contre un
national hors du territoire national lorsque les faits sont punis par la législation du pays où ils ont
été commis. La poursuite dans ce cas doit être précédée par une plainte de la victime ou une
dénonciation officielle de l’autorité du pays où les faits ont été commis.
La poursuite cesse dans le cas où la personne justifie avoir été jugée définitivement à l’étranger
pour les mêmes faits, et en cas de condamnation, que la peine a été subie ou prescrite.

Art. 5. Les traités, accords ou conventions dûment ratifiés et publiés s'imposent aux dispositions
pénales internes.

Art. 6. En cas de conviction de plusieurs crimes ou délits, la peine la plus forte est seule
prononcée.
Il y a cumul des peines en cas de concours réel entre contraventions, entre délits et
contraventions non connexes ou entre crimes et contraventions non connexes.

288
Précis De Droit Pénal Général

Art. 7. Lorsqu'un individu fait l'objet de plusieurs condamnations pour crimes ou délits résultant
de poursuites diverses devant toute juridiction, la confusion des peines doit être prononcée.
Lorsqu'une peine principale fait l'objet d'une remise gracieuse, il y a lieu de tenir compte, pour
l'application de la confusion des peines, de la peine résultant de la commutation et non de la
peine initialement prononcée.

LIVRE PREMIER
DES PEINES, DES MESURES DE SURETE ET DES MESURES EDUCATIVES

TITRE I DES PEINES

CHAPITRE I DISPOSITIONS GENERALES

Art. 8. Les peines en matière criminelle sont ou afflictives et infamantes ou seulement


infamantes.

Art. 9. Les peines afflictives et infamantes sont :


- la mort ;
- l'emprisonnement à vie ;
- l'emprisonnement à temps.

Art. 10. La peine infamante est la dégradation civique.

Art. 11. [Loi 6-2004 AN du 6 avril 2004 – Art. 1er. Les peines en matière correctionnelle sont :
- l'emprisonnement à temps ;
- l’interdiction à temps de certains droits civiques, civils ou de famille ;
- l'amende ;
- le travail d’intérêt général]

Art. 12. La peine en matière contraventionnelle est l’amende.

Art. 13. La condamnation aux peines établies par la loi est toujours prononcée sans préjudice des
restitutions et dommages-intérêts qui peuvent être dus aux parties.

Art. 14. L’interdiction de séjour, l’amende et la confiscation spéciale, soit du corps du délit,
quand la propriété en appartient au condamné, soit des choses produites par le délit, soit de celles
qui ont servi ou qui ont été destinées à le commettre, sont des peines communes aux matières
criminelles et correctionnelles.

373. CHAPITRE I DES PEINES EN MATIERE CRIMINELLE

Art. 15. La peine de mort s'exécute par fusillade en un lieu désigné par décision du ministre
chargé de la Justice.

Art. 16. L'exécution a lieu en présence du président de la juridiction qui a prononcé la


condamnation ou à défaut par un magistrat désigné par le président de la Cour d'appel, du
magistrat du ministère public ayant requis dans l'affaire ou à défaut d'un magistrat désigné par le
procureur général près la cour d'appel, du ou des défenseurs du condamné, d'un greffier, du chef

289
Précis De Droit Pénal Général

de l'établissement de détention, du commissaire de police ou du commandant de brigade


territoriale du lieu d'exécution, d'un médecin requis pour le constat de décès et d'un ministre de
culte à la demande du condamné.

Art. 17. Il ne peut être procédé à l'exécution avant qu'il n’ait été statué sur le recours en grâce
selon les dispositions du code de procédure pénale.

Art. 18. Aucune exécution ne peut avoir lieu les jours de fête légale, ni le dimanche.1

Art. 19. L'exécution d'une femme condamnée à mort est subordonnée à la délivrance d'un
certificat de non grossesse.
Si son état de grossesse est médicalement constaté, la femme condamnée à mort ne subira sa
peine qu'après sa délivrance.

Art. 20. Les corps des suppliciés peuvent être remis à leurs familles si elles les réclament, à
charge par elles de les faire inhumer sans cérémonial sous peine d'une amende de 150.000 à
500.000 francs.

Art. 21. Un procès-verbal d'exécution est établi sur le champ par le greffier sous peine d'une
amende de 2.000 à 10.000 francs.
Il est signé par le ministère public et le greffier.
Il est transcrit au pied de la minute de la décision de condamnation par le greffier.
Ce procès-verbal et éventuellement un communiqué officiel peuvent seuls être publiés dans la
presse.

Art. 22. La condamnation à la peine de l’emprisonnement à temps sera prononcée pour cinq ans
au moins, et vingt ans au plus.

Art. 23. La durée de toute peine privative de liberté compte du jour où le condamné est détenu en
vertu de la condamnation, devenue irrévocable, qui prononce la peine.

Art. 24. En cas de condamnation à une peine d'emprisonnement à temps, la détention provisoire
s'impute jour pour jour de la durée de la peine prononcée par le jugement ou l’arrêt de
condamnation.

Art. 25. La condamnation à une peine criminelle emportera la dégradation civique.


La dégradation civique sera encourue du jour où la condamnation sera devenue irrévocable.

Art. 26. La dégradation civique consiste :


1) dans la destitution et l’exclusion des condamnés de toutes fonctions, emplois ou offices
publics ;
2) dans la privation du droit de vote, d’élection, d’éligibilité, et en général de tous les droits
civiques et politiques, et du droit de porter aucune décoration ;
3) dans l’incapacité d’être juré expert, d’être employé comme témoin dans les actes, et de
déposer en justice autrement que pour y donner de simples renseignements ;

1.
1
V. la loi 19-2000 AN du 27 juin 2000 portant institution de fêtes légales au Burkina Faso (promulguée par
décret 2000-3334 du 21 juillet 2000, J.O.BF. du 27 juillet 2000, p. 4330), modifiée par la loi 11-2001 AN du 28
juin 2001 (promulguée par le décret 2001-359 du 18 juillet 2001, J.O.BF. du 2 août 2001, p. 1353).

290
Précis De Droit Pénal Général

4) dans l’incapacité de faire partie d’aucun conseil de famille, et d’être tuteur, curateur, subrogé
tuteur ou conseil judiciaire, si ce n’est de ses propres enfants, et sur l’avis conforme de la
famille ;
5) dans la privation du droit de port d’armes, de servir dans les armées nationales, de tenir école,
ou enseigner et d’être employé dans aucun établissement d’instruction, à titre de professeur,
maître ou surveillant.

Art. 27. Toutes les fois que la dégradation civique sera prononcée comme peine principale, elle
pourra être accompagnée d’un emprisonnement dont la durée, fixée par l’arrêt de condamnation,
n’excédera pas cinq ans.
Si le coupable est un étranger, ou un national ayant perdu la qualité de citoyen, la peine de
l’emprisonnement devra toujours être prononcée.

Art. 28. Quiconque aura été condamné à une peine afflictive et infamante sera, de plus pendant
la durée de sa peine, en état d’interdiction légale ; il lui sera nommé un tuteur et un subrogé
tuteur pour gérer et administrer ses biens, dans les formes prescrites pour les nominations des
tuteurs et subrogés tuteurs aux interdits.
L’interdiction légale ne produira pas effet pendant la durée de la libération conditionnelle.

Art. 29. Les biens du condamné lui seront remis après qu’il aura subi sa peine, et le tuteur lui
rendra compte de son administration.

Art. 30. Pendant la durée de la peine, il ne pourra lui être remis aucune somme, aucune
provision, aucune portion de ses revenus.

Art. 31. Le condamné à une peine afflictive perpétuelle ne peut disposer de ses biens, en tout ou
partie, soit par donation entre vifs, soit par testament, ni en recevoir à ce titre, si ce n’est pour
cause d’aliments. Tout testament par lui fait antérieurement à sa condamnation contradictoire,
devenue définitive, est nul. Les dispositions ci-dessus ne sont pas applicables au condamné par
contumace.
Le condamné à une peine afflictive perpétuelle peut être relevé de tout ou partie des incapacités
contenues dans l’alinéa précédent. Il peut lui être accordé l’exercice, dans le lieu d’exécution de
la peine, des droits civils ou de quelques-uns de ces droits, dont il a été privé par son état
d’interdiction légale. Les actes faits par le condamné dans le lieu d’exécution de la peine ne
peuvent engager les biens qu’il possédait au jour de sa condamnation, ou qui lui sont échus à titre
gratuit depuis cette époque.

Art. 32. Dans tous les cas où une condamnation sera prononcée pour un crime contre la sûreté
extérieure de l’Etat, commis en temps de guerre, les juridictions compétentes prononceront la
confiscation, au profit de la nation, de tous les biens présents du condamné, de quelque nature
qu’ils soient, meubles, immeubles, divis ou indivis, suivant les modalités prévues aux articles 33
et 34 ci-dessous.

Art. 33. Si le condamné est marié, la confiscation ne portera que sur la part du condamné dans le
partage de la communauté, ou des biens indivis entre son conjoint et lui.
S’il a des descendants ou des ascendants, la confiscation ne portera que sur la quotité disponible.
Il sera s’il y a lieu, procédé au partage ou à la licitation suivant les règles applicables en matière
de successions.

291
Précis De Droit Pénal Général

Art. 34. L’aliénation des biens confisqués sera poursuivie par l’administration des domaines
dans les formes prescrites pour la vente des biens de l’Etat.
Les biens dévolus à l’Etat par l’effet de la confiscation demeureront grevés, jusqu’à concurrence
de leur valeur, des dettes légitimes antérieures à la condamnation.

CHAPITRE III DES PEINES EN MATIERE CORRECTIONNELLE

Art. 35. [Loi 6-2004 AN du 6 avril 2004 – Art. 1er. La durée de la peine d’emprisonnement sera
au moins de onze jours et de cinq années au plus, sauf les cas où la loi aura déterminé d’autres
limites.
Dans la peine d’emprisonnement, chaque jour compte pour vingt quatre heures et chaque mois
pour trente jours.
Les peines d’emprisonnement s’exécutent dans les établissements pénitentiaires prévus à cet
effet.
Le travail d’intérêt général est une peine que la juridiction correctionnelle peut prononcer à
titre principal lorsqu’un délit est puni d’une peine d’emprisonnement. Il consiste à faire
exécuter par le condamné consentant, pour une durée prévue par la loi, un travail d’intérêt
général non rémunéré au profit d’une personne morale de droit public ou d’une association
sans but lucratif reconnue d’utilité publique.
Il ne peut être prononcé cumulativement avec une des peines prévues à l’article 11.]

Art. 36. Les produits du travail de chaque détenu pour délit correctionnel seront appliqués partie
aux dépenses communes de la maison, partie à lui procurer quelques adoucissements, s’il les
mérite, partie à former pour lui, au temps de sa sortie un fonds de réserve, le tout ainsi qu’il sera
ordonné par des règlements d’administration publique.

Art. 37. Les tribunaux jugeant correctionnellement pourront, dans certains cas, interdire, en tout
ou partie, l’exercice des droits civiques, civils et de famille suivants :
1) de vote et d’élection ;
2) d’éligibilité ;
3) d’être appelé ou nommé aux fonctions de juré ou autres fonctions publiques ou aux emplois de
l’administration, ou d’exercer ces fonctions ou emplois ;
4) du port d’armes ;
5) de vote et de suffrage dans les délibérations de famille ;
6) d’être tuteur, curateur, si ce n’est de ses enfants et sur l’avis seulement de la famille ;
7) d’être expert ou employé comme témoin dans les actes ;
8) de témoignage en justice, autrement que pour y faire de simples déclarations.

Art. 38. Les tribunaux ne prononceront l’interdiction mentionnée dans l’article précédent que
lorsqu’elle aura été autorisée ou ordonnée par une disposition particulière de la loi.

CHAPITRE IV DES AUTRES PEINES ENCOURUES POUR CRIMES OU DELITS

Art. 39. L’interdiction d’exercer une fonction publique ou une activité professionnelle ou sociale
est soit définitive soit temporaire ; dans ce dernier cas elle ne peut excéder cinq ans.
374. Cette interdiction n’est pas applicable à l’exercice d’un mandat électif ou de responsabilité
syndicale ; elle n’est pas non plus applicable en matière de délit de presse.

Art. 40. La peine d’exclusion des marchés publics emporte l’interdiction de participer,
directement ou indirectement, à tout marché conclu par l’Etat et ses établissements publics, les

292
Précis De Droit Pénal Général

collectivités locales, leurs groupements et leurs établissements publics, ainsi que par les
entreprises concédées ou contrôlées par l’Etat ou par les collectivités locales ou leurs
groupements.

Art. 41. La peine de fermeture d’établissement emporte l’interdiction d’exercer dans celui-ci
l’activité à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise.

Art. 42. L’interdiction de séjour consiste dans la défense faite à un condamné de paraître dans
certains lieux.
Elle comporte, en outre, des mesures de surveillance et d’assistance.
Sa durée est de deux à cinq ans en matière correctionnelle, de cinq à vingt ans en matière
criminelle.
Elle peut être prononcée :
1) contre tout condamné à l’emprisonnement pour crime ;
2) contre tout condamné pour crime ou délit contre la sûreté intérieure ou extérieure de l’Etat ;
3) contre quiconque, ayant été condamné à une peine supérieure à une année d’emprisonnement,
aura, dans un délai de cinq années après l’expiration de cette peine ou sa prescription, été
condamné à une peine égale ou supérieure à une année d’emprisonnement.

Art. 43. Tout condamné à une peine d’emprisonnement à vie qui obtient commutation ou remise
de sa peine est, s’il n’en est autrement disposé par la décision gracieuse, soumis de plein droit à
l’interdiction de séjour pendant cinq ans.
Il en est de même pour tout condamné à une peine d’emprisonnement à vie qui a prescrit sa
peine.

Art. 44. L’interdiction du territoire peut être prononcée à titre définitif ou pour 10 ans ou plus
contre tout étranger coupable de crime ou de délit. Le condamné est reconduit d’office à la
frontière, dès l’expiration de sa peine d’emprisonnement, le cas échéant.

Art. 45. La liste des lieux interdits est fixée par le ministre chargé de l’Administration du
territoire, par voie d’arrêté individuel pris conjointement avec le ministre chargé de la Justice.
Le même arrêté détermine les mesures de surveillance et d’assistance dont le condamné pourra
être l’objet.
A tout moment de la durée de l’interdiction de séjour, le ministre chargé de l’Administration du
territoire peut, dans les mêmes formes, modifier la liste des lieux interdits et les mesures de
surveillance et d’assistance applicables au condamné qui en aucun cas ne peuvent être aggravées.

Art. 46. L’arrêté d’interdiction est notifié au condamné qui reçoit, outre un carnet
anthropométrique, la carte d’identité légale. Les décisions ou arrêtés pris en application de
l’article précédent lui sont également notifiés.
Si la notification de l’arrêté d’interdiction a été faite au condamné avant sa libération définitive
ou conditionnelle, l’interdiction part de la date de cette libération. Toutefois, en cas de révocation
de la libération conditionnelle, l’interdiction est suspendue pendant le temps de la nouvelle
incarcération. Il en est de même dans le cas de détention pour toute autre cause.
Si l’arrêté d’interdiction n’a pu lui être notifié avant sa libération, le condamné doit, à ce
moment, faire connaître au directeur ou au surveillant chef de l’établissement pénitentiaire où il
était détenu le lieu où il a l’intention de fixer sa résidence. Il est tenu, en outre, pendant les trois
mois suivant sa libération, de l’aviser du changement de cette résidence, et de se rendre à la
convocation qui lui sera adressée par l’autorité administrative en vue de la notification de l’arrêté
d’interdiction.

293
Précis De Droit Pénal Général

S’il satisfait à ces obligations, l’interdiction part de la date de la libération ; dans le cas contraire,
elle n’a effet que du jour où la notification de l’arrêté d’interdiction aura pu lui être faite.
S’il n’a pas été prononcé de peine privative de liberté sans sursis ou si cette peine est expirée, la
notification de l’arrêté d’interdiction est faite au condamné dès que le jugement ou l’arrêt portant
condamnation à l’interdiction de séjour est devenu définitif ; l’interdiction part du jour où le
jugement ou l’arrêt a acquis ce caractère.
Dans le cas prévu à l’article 43, alinéa 2, l’interdiction de séjour produit son effet du jour où la
prescription est accomplie.

Art. 47. Peut être puni d’un emprisonnement de trois mois à trois ans et d’une amende de 36.000
à 1.500.000 francs ou de l’une de ces deux peines seulement, tout interdit de séjour qui, en
violation de l’arrêté qui lui a été notifié, paraît dans un lieu qui lui est interdit.
Peut être puni des mêmes peines celui qui se soustrait aux mesures de surveillance prescrites par
l’arrêté qui lui a été notifié, ou qui ne défère pas à la convocation qui lui est adressée par
l’autorité administrative en vue de la notification de l’arrêté d’interdiction dans le cas prévu à
l’article 46, alinéa 3.

Art. 48. Des arrêtés conjoints pris par les ministres chargés de la Justice et de l’Administration
du territoire détermineront les conditions d’application des articles 42, 45, et 46.
Ils fixeront, notamment :
- les mesures de surveillance et d’assistance qui peuvent être prescrites en application des articles
42 et 45 ;
- les conditions d’établissement et de délivrance et les modalités des pièces prévues à l’article 46,
alinéa 1er ;
- les mentions et les visas à porter sur le carnet anthropométrique, la forme des notifications des
arrêtés prévus aux articles 45 et 46 et de la convocation prévue à l’article 46, alinéa 3 ;
- les conditions dans lesquelles peuvent être délivrées les autorisations provisoires accordées en
vertu de l’article 45.

Art. 49. Dans les cas spécialement prévus par la loi, les juridictions saisies pourront ordonner
que leur décision sera affichée en caractères très apparents, dans les lieux qu’ils indiquent, aux
frais du condamné.
Sauf disposition contraire de la loi, cet affichage sera prononcé pour une durée qui ne pourra
excéder deux mois en matière de crimes ou de délits.
La suppression, la dissimulation et la lacération totales ou partielles des affiches apposées
conformément au présent article, opérées volontairement, par le condamné, à son instigation ou
sur ses ordres, seront punies d’une amende de 50.000 à 500.000 francs et d’un emprisonnement
d’un mois à six mois ou de l’une de ces deux peines seulement ; il sera procédé de nouveau à
l’exécution intégrale de l’affichage aux frais du condamné.
Les juridictions saisies pourront ordonner la diffusion de l’intégralité ou d’une partie de leur
décision et déterminer le ou les journaux ou le service de communication audiovisuelle chargés
de cette diffusion.
L’affichage ou la diffusion ne peut comporter le nom de la victime qu’avec son accord ou celui
de son représentant légal.

Art. 50. Quand il y aura lieu à restitution, le coupable pourra être condamné, en outre, envers la
partie lésée, si celle-ci le requiert, à des indemnités dont la détermination sera laissée à
l’appréciation de la juridiction saisie.

294
Précis De Droit Pénal Général

Art. 51. Le juge, pour des motifs graves d'ordre médical, familial, professionnel ou social, peut
décider le fractionnement de l'amende.
Pour les mêmes motifs et dans le cas où le jugement ne l'aurait pas prévu, la même juridiction
peut, sur requête du condamné, ordonner le fractionnement de l'amende.
En cas d'insuffisance de biens, les restitutions et les indemnités dues à la partie lésée sont
préférées à l'amende.
Art. 52. L’exécution des condamnations à l’amende, aux restitutions, aux dommages-intérêts et
aux frais pourra être poursuivie par la voie de la contrainte par corps.

Art. 53. Lorsque des amendes et des frais seront prononcés au profit de l’Etat, si, après
l’expiration de la peine afflictive ou infamante, l’emprisonnement du condamné, pour l’acquit de
ces condamnations pécuniaires, a duré une année complète, il pourra, sur la preuve acquise par
les voies de droit, de son absolue insolvabilité, obtenir sa liberté provisoire.
La durée de l’emprisonnement sera réduite à six mois s’il s’agit d’un délit ; sauf, dans tous les
cas, à reprendre la contrainte par corps s’il survient au condamné quelque moyen de solvabilité.

Art. 54. Tous les individus condamnés pour un même crime ou pour un même délit seront tenus
solidairement des amendes, des restitutions, des dommages-intérêts et des frais.

Art. 55. La peine de confiscation est obligatoire pour les objets dangereux ou nuisibles.
La confiscation porte sur la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction, sur la
chose qui en est le produit à l’exception des objets susceptibles de restitution.
La chose confisquée est, sauf disposition particulière prévoyant sa destruction ou son attribution,
dévolue à l’Etat mais elle demeure grevée, à concurrence de sa valeur, des droits réels licitement
constitués au profit des tiers.

TITRE II DES MESURES DE SURETE ET


DES MESURES EDUCATIVES

CHAPITRE I DES MESURES DE SURETE

Art. 56. Les mesures de sûreté sont des mesures individuelles coercitives imposées à des
individus dangereux pour l'ordre social afin de prévenir les infractions que leur état rend
probables.
Sont des mesures de sûreté :
- l’internement des aliénés ;
- le traitement des personnes adonnées aux stupéfiants ;
- le traitement des alcooliques dangereux ;
- les mesures concernant les vagabonds ;
- la liberté surveillée des mineurs.

CHAPITRE II DES MESURES EDUCATIVES

Art. 57. Les mesures éducatives sont des mesures individuelles qui tendent à l'éducation, la
rééducation, à une tutelle ou à une assistance en faveur du condamné.
Les mesures éducatives sont applicables au mineur de moins de 18 ans reconnu coupable de
crimes ou de délits.
Il s’agit de :
- la remise du mineur à sa famille ;
- le placement du mineur chez un parent ou une personne digne de confiance ;

295
Précis De Droit Pénal Général

- le placement du mineur dans une institution charitable, religieuse ou privée ;


- le placement du mineur dans un établissement public spécialisé.

LIVRE DEUXIEME
DE L’INFRACTION, DE LA TENTATIVE DES PERSONNES PUNISSABLES,
EXCUSABLES ET RESPONSABLES

TITRE I DE L'INFRACTION ET DE LA TENTATIVE

CHAPITRE I DE LA CLASSIFICATION DES INFRACTIONS

Art. 58. Sont qualifiées crimes, les infractions punies de mort ou d’un emprisonnement de cinq
ans au moins.
Sont qualifiées délits, les infractions punies d’un emprisonnement de onze jours au moins et
n’excédant pas cinq ans et d’une amende supérieure à 50.000 francs ou de l’une de ces deux
peines seulement.
Sont qualifiées contraventions, les infractions punies d’une amende qui ne peut être supérieure à
50.000 francs.

CHAPITRE II DE LA TENTATIVE

Art. 59. La tentative consiste dans l’entreprise de commettre un crime ou un délit, manifestée par
des actes non équivoques tendant à son exécution, si ceux-ci n’ont été suspendus ou n’ont
manqué leur effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de leur auteur.
La tentative est punissable alors même que le but recherché ne pouvait être atteint en raison de
circonstances ignorées de l'auteur.
Art. 60. La tentative de crime est toujours punissable.
La tentative de délit n'est punissable que dans les cas prévus par la loi.
La tentative de contravention n'est pas punissable.

Art. 61. L'acte préparatoire ne constitue pas une infraction sauf dispositions légales contraires.

Art. 62. La peine applicable à la tentative est celle de l'infraction elle-même.

TITRE II DES PERSONNES PUNISSABLES, EXCUSABLES ET RESPONSABLES

CHAPITRE I DE LA PARTICIPATION A L’INFRACTION

Art. 63. L'âge de la majorité pénale est fixé à dix huit ans.
Il s'apprécie au jour de la commission des faits.

Art. 64. Est auteur, ou coauteur toute personne physique qui, personnellement et de façon
principale, accomplit les éléments constitutifs d'une infraction par commission ou omission ou
qui est à l'origine de tels faits.
Est aussi auteur ou coauteur toute personne morale à objet civil, commercial, industriel ou
financier au nom et dans l’intérêt de laquelle des faits d’exécution ou d’abstention constitutifs
d’une infraction ont été accomplis par la volonté délibérée de ses organes.

Art. 65. Sont complices d’une action qualifiée crime ou délit :

296
Précis De Droit Pénal Général

- ceux qui auront procuré des armes, des instruments ou tous autres moyens qui auront servi à
l’action sachant qu’ils devaient y servir ;
- ceux qui auront avec connaissance, aidé ou assisté l’auteur ou les auteurs de l’action dans les
faits, qui l’auront préparée, facilitée ou consommée ;
- ceux qui, connaissant la conduite criminelle de malfaiteurs exerçant les actes de brigandage ou
des violences contre la sûreté de l’Etat, la paix publique, les personnes ou les propriétés, leur
fournissent habituellement logement, lieu de retraite ou de réunion ;
- ceux qui, en dehors des cas prévus ci-dessus, auront sciemment recelé une personne qu’ils
savaient avoir commis un crime ou un délit et qu’ils savaient de ce fait recherchée par la justice,
ou qui auront soustrait ou tenté de soustraire cette personne aux recherches ou à l’arrestation, ou
l’auront aidée à se cacher ou à prendre la fuite ;
- ceux qui, ayant connaissance d’un crime ou d’un délit déjà tenté ou consommé n’auront pas,
alors qu’il était encore possible d’en prévenir ou limiter les effets ou qu’on pouvait penser que les
coupables ou l’un d’eux commettraient de nouveaux crimes qu’une dénonciation pourrait
prévenir, averti aussitôt les autorités administratives ou judiciaires.
Sont exclus de ces deux derniers cas le conjoint, les parents ou alliés du criminel ou de l’auteur
du délit jusqu’au quatrième degré inclus.

Art. 66. Les complices d'un crime ou d'un délit sont punis comme les auteurs mêmes de ce crime
ou de ce délit sauf si la loi en dispose autrement.

Art. 67. Les auteurs, coauteurs et les complices d'un crime ou d'un délit ou d'une tentative de
crime ou de délit sont également responsables de toute autre infraction dont la commission ou la
tentative est une conséquence prévisible de l'infraction.

Art. 68. Celui qui détermine une personne non punissable à commettre une infraction est
passible des peines de l'infraction commise.

Art. 69. Celui qui incite à la commission d'un crime ou d'un délit est puni des peines prévues
pour l'infraction quand bien même celle-ci n'aurait pas été commise en raison de l'abstention
volontaire de celui qui devait la commettre.

CHAPITRE II DES CAUSES D’IRRESPONSABILITE PENALE

Section 1 Des faits justificatifs

Art. 70. N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé
par des dispositions législatives ou réglementaires.
N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte commandé par l’autorité
légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal.

Art. 71. Il n’y a ni crime, ni délit, ni contravention lorsque l’homicide, les blessures, violences et
voies de fait, étaient commandés par la nécessité actuelle de la défense légitime de soi-même ou
d’autrui, à condition que cette défense soit proportionnée à la gravité de l’attaque.
Sont notamment commandés par la nécessité immédiate de la légitime défense les actes commis
en repoussant de nuit l’escalade ou l’effraction d’une maison ou d’un appartement habité ou de
leurs dépendances ou en se défendant contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés avec
violences.

297
Précis De Droit Pénal Général

Art. 72. N’est pas pénalement responsable la personne qui se trouve dans la nécessité de
commettre une infraction en vue d’éviter un péril plus grave et imminent pour elle-même ou pour
autrui, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace.

Section 2 Des causes de non imputabilité

Art. 73. Il n’y a ni crime, ni délit, ni contravention lorsque l’auteur était en état de démence au
temps de l’action ou lorsqu’il a été contraint par une force à laquelle il n’a pu résister. Lorsque la
juridiction considère que l’état mental du dément pourrait compromettre l’ordre public ou la
sécurité des personnes, elle peut ordonner son internement et ses soins dans un centre spécialisé.
Les frais de soins sont supportés par la personne concernée ou sa famille.

Art. 74. Il n’y a ni crime, ni délit, ni contravention lorsque l’auteur de l’infraction était âgé de
moins de treize ans, à la date de la commission des faits.
Le mineur de moins de 13 ans, ainsi que celui de 13 à 18 ans qui a agi sans discernement, ne peut
faire l’objet que de mesures éducatives et de sûreté.

Art. 75. Dans les cas de non imputabilité, les juridictions saisies peuvent ordonner toutes
restitutions et prononcer toutes réparations conformément aux dispositions du code civil.

CHAPITRE III DES EXCUSES, DES CIRCONSTANCES ATTENUANTES


ET DES CIRCONSTANCES AGGRAVANTES

Art. 76. Les circonstances personnelles d’où résultent exonération de responsabilité, exemption,
atténuation ou aggravation de peine n’ont d’effet qu’à l’égard de la personne en qui elles se
rencontrent.

Art. 77. Les circonstances objectives inhérentes à l’infraction qui aggravent ou qui diminuent les
peines n’ont d’effet à l’égard du coauteur ou du complice que s’il pouvait les prévoir.

Art. 78. Nul crime ou délit ne peut être excusé, ni la peine mitigée, que dans les cas et dans les
circonstances où la loi déclare le fait excusable ou permet de lui appliquer une peine moins
rigoureuse.

Art. 79. Les excuses absolutoires assurent l’impunité à l’auteur de l’infraction ; cependant des
mesures de sûreté ou d’éducation peuvent lui être appliquées.
Les excuses atténuantes assurent au coupable une modération de la peine.

Art. 80. Lorsque le fait d’excuse est prouvé, les peines applicables sont les suivantes :
- un emprisonnement de cinq à dix ans, si la peine encourue est la mort ;
- un emprisonnement de un à cinq ans, si la peine encourue est l’emprisonnement à vie ;
- un emprisonnement de six mois à deux ans, si la peine encourue est un emprisonnement de dix
à vingt ans ou de cinq à dix ans ;
- un emprisonnement de six jours à six mois, si la peine encourue est un emprisonnement de deux
mois à cinq ans.

Art. 81. Sauf dispositions contraires de la loi, si la juridiction saisie reconnaît par décision
motivée au coupable des circonstances qui, sans être des excuses, sont cependant de nature à
atténuer sa responsabilité criminelle ou délictuelle, les peines sont modifiées comme suit :
- l’emprisonnement à vie, si la peine encourue est la mort ;

298
Précis De Droit Pénal Général

- l’emprisonnement de dix à vingt ans, si la peine encourue est l’emprisonnement à vie ;


- l’emprisonnement de cinq à dix ans, si la peine encourue est l’emprisonnement de dix à vingt
ans ;
- l’emprisonnement de deux mois à cinq ans, si la peine encourue est l’emprisonnement de cinq à
dix ans ;
En matière correctionnelle, la juridiction qui reconnaît des circonstances atténuantes est autorisée
à réduire l’emprisonnement et l’amende même au dessous des peines de simple police.
Si la loi prévoit l’application cumulative d’un emprisonnement et d’une amende, la juridiction
peut prononcer les deux peines en les réduisant ou en réduisant l’une d’elles seulement ; si la loi
prévoit une peine d’emprisonnement seule, la juridiction peut substituer une peine d’amende à
celle-ci ; l’amende de substitution est de 500.000 à 1.500.000 francs.

Art. 82. Dans les cas limitativement énumérés par la loi, les crimes et les délits peuvent être
aggravés.

Art. 83. En matière criminelle et délictuelle, est récidiviste celui qui, après avoir été
définitivement condamné pour une première infraction par une juridiction nationale ou étrangère,
sous réserve que l’infraction ayant motivé la condamnation à l’étranger, soit également une
infraction au regard de la loi nationale, commet un second crime ou un second délit indépendant
de la première infraction.

Art. 84. Peut être condamné au double des peines prévues pour la seconde infraction quiconque :
- ayant déjà été condamné pour crime, commet un nouveau crime ;
- ayant déjà été condamné pour crime, commet dans un délai de cinq années après expiration ou
prescription de la peine, un délit intentionnel ;
- ayant déjà été condamné pour un délit intentionnel, commet dans un délai de cinq années après
expiration ou prescription de la peine, un crime ;
- ayant déjà été condamné pour délit, commet dans un délai de cinq années après expiration ou
prescription de la peine, un délit identique ou assimilé.

Art. 85. Les délits de vol, escroquerie, abus de confiance, abus de blanc-seing, recel de choses,
détournement de deniers publics ou d’objets saisis, extorsion de fonds, filouteries, corruption,
concussion, délits relatifs au chèque et infractions en matière de société sont considérés comme
un même délit au point de vue de la récidive.

Art. 86. En matière contraventionnelle il y a récidive lorsqu’il a été rendu contre le contrevenant,
dans les douze mois précédents, un premier jugement devenu définitif.

Art. 87 En cas de concours de circonstances aggravantes et de circonstances atténuantes les


règles des circonstances atténuantes sont appliquées à la peine résultant des circonstances
aggravantes.
En cas de concours de circonstances atténuantes et d’une excuse légale, les règles des
circonstances atténuantes sont appliquées à la peine résultant de l’admission de l’excuse.
Si les circonstances atténuantes sont admises pour un récidiviste, il y a lieu de fixer d’abord la
peine résultant de la récidive, de la réduire en raison des circonstances atténuantes.

DISPOSITIONS FINALES

Art. 549. Les matières non réglées par le présent code pénal font l’objet de lois spéciales.

299
Précis De Droit Pénal Général

Art. 550. La présente loi abroge toutes dispositions antérieures contraires et sera exécutée
comme loi de l’Etat.

300
Précis De Droit Pénal Général

II – EXTRAITS D’ARTICLES DU CODE DE JUSTICE MILITAIRE

Loi 24-94 ADP du 24 mai 1994 portant code de justice militaire (promulguée par décret
94-221 du 13 juin 1994).

LIVRE I DE L’ORGANISATION ET DE LA COMPETENCE


DES JURIDICTIONS DES FORCES ARMEES - DISPOSITIONS GENERALES

TITRE PRELIMINAIRE DISPOSITIONS PRELIMINAIRES

Art. 1er. La justice militaire est rendue sous le contrôle de la [Cour de cassation] par les
tribunaux des Forces armées conformément aux dispositions du présent code.

TITRE II DE LA COMPETENCE DES JURIDICTIONS DES FORCES ARMEES

DISPOSITIONS GENERALES

Art. 33. Le tribunal militaire statue tant sur l'action publique que sur l'action civile
conformément aux dispositions du code de procédure pénale.
Sous réserve de lois spéciales, sa compétence est celle déterminée par le présent code.

CHAPITRE I COMPETENCE EN TEMPS DE PAIX

Art. 34. Les juridictions militaires sont compétentes pour instruire et juger les infractions de
droit commun commises par les militaires ou assimilés dans le service ou dans les
établissements militaires ou chez l'hôte ainsi que les infractions militaires prévues par le
présent code conformément aux règles de procédure applicables devant elles.
En outre, l'autorité investie des pouvoirs judiciaires militaires peut déférer à la juridiction
militaire sous réserve de l'accord du parquet normalement compétent, toute infraction commise
par un militaire et constituant un manquement à la probité, aux bonnes moeurs, à l'honneur ou
à la discipline et pouvant nuire au bon renom des Forces armées ou susceptible de troubler
l'ordre public.
.

Art. 36. Sont considérés comme militaires au sens du code de justice militaire, ceux qui se
trouvent en activité de service dans les Forces armées, soit en situation de présence, de
disponibilité, d'absence régulière, soit en absence irrégulière ou ceux qui, sans être employés,
restent à la disposition du Gouvernement et perçoivent une solde.

Art. 37. Sont également militaires au sens de l'article précédent, les réformés et les réservistes,
même assimilés, appelés ou rappelés au service, depuis leur réunion en détachement pour
rejoindre, ou, s'ils rejoignent isolément, depuis leur arrivée à destination, jusqu'au jour inclus
où ils sont renvoyés dans leurs foyers ; il en est de même quand, avant d'être incorporés, ils
sont placés à titre militaire dans un hôpital, un établissement pénitentiaire ou sous la garde de
la Force publique, ou sont mis en subsistance dans une unité.

Art. 38. Sont également justiciables des tribunaux militaires :

301
Précis De Droit Pénal Général

- ceux qui, sans être liés légalement ou contractuellement aux Forces armées, sont portés sur
les contrôles et accomplissement du service ;
- les personnels civils employés dans les services et établissements militaires ;
- les exclus des Forces armées se trouvant dans des situations visées pour les militaires aux
articles 36 et 37 ci-dessus.

Art. 39. La qualité de militaire s'apprécie au moment des faits, objet de la poursuite.

Art. 40. Sont dits établissements militaires, tous locaux et installations temporaires ou
définitifs, utilisés par les Forces armées, les aéronefs et les navires militaires en quelque lieu
qu'ils se trouvent.

Art. 41. Par dérogation aux dispositions de l’article 34 les militaires de la gendarmerie ne sont
pas justiciables des juridictions militaires pour les infractions de droit commun commises dans
l'exercice de leurs fonctions relatives à la police judiciaire civile ou à la police administrative.

Art. 42. Les juridictions militaires sont compétentes pour connaître des crimes et des délits
contre la sûreté intérieure et extérieure de l’Etat, commis par les militaires tels que définis par
le code pénal.

CHAPITRE II COMPETENCE EN TEMPS DE GUERRE

Art. 45. En temps de guerre, la compétence des juridictions militaires s'étend en outre :
- aux infractions commises par les prisonniers de guerre ;
- aux infractions à la législation sur les armes et munitions ;
- à toute infraction dans laquelle se trouve impliqué un militaire ou assimilé ;
- aux infractions connexes telles que définies par le code pénal.

Art. 46. En période d'état d'urgence ou d'état de siège décrété dans tout ou partie du territoire,
les juridictions militaires sont également compétentes pour connaître des infractions visées à
l’article précédent ainsi que des infractions fixées par la loi organique sur l'état d'urgence1 ou
des infractions énumérées par la législation sur l'état de siège.

CHAPITRE III DISPOSITIONS COMMUNES

Art. 47. Lorsqu'un justiciable est poursuivi en même temps pour un crime ou un délit de la
compétence des juridictions militaires et pour un autre crime ou délit de la compétence des
juridictions de droit commun, il est traduit d'abord devant la juridiction à laquelle appartient la
connaissance de l'infraction la plus grave. Si les deux infractions sont d'une même gravité, le
tribunal militaire statue le premier.
En cas de double condamnation, la peine la plus forte est seule subie.

Art. 48. Lorsque les militaires, poursuivis pour des infractions de la compétence des
juridictions militaires ont comme co-auteurs ou complices des individus non justiciables de ces
tribunaux, tous les prévenus ou accusés sont traduits devant les juridictions militaires.

1.
642. 1
V. la loi organique 14-59 AL du 31 août 1959 sur l’état d’urgence, in Codes et lois du Burkina Faso :
T. VI. Code pénal - Février 2005, V° Sûreté de l’Etat.

302
Précis De Droit Pénal Général

Art. 49. Les juridictions militaires se prononcent en premier lieu sur l'action publique et
ensuite sur l'action civile. Elles peuvent ordonner, à tout moment, la restitution, au profit des
propriétaires, des objets saisis et des pièces à conviction lorsqu'il n'y a pas lieu d'en prononcer
la confiscation.

LIVRE II DE LA PROCEDURE PENALE MILITAIRE

TITRE I DE LA POLICE JUDICIAIRE MILITAIRE DU DROIT D'ARRESTATION


ET DE LA GARDE DE LA MISE A DISPOSITION ET DE LA GARDE A VUE
DE LA PERQUISITION, DE L'ACTION PUBLIQUE
ET DES POURSUITES

DISPOSITIONS GENERALES

Art. 50. Le code de procédure pénale est applicable aux juridictions militaires et dans tout ce
qui n'est pas contraire aux dispositions du présent code.

CHAPITRE III DU JUGEMENT

Art. 123. La procédure de jugement est celle applicable devant les tribunaux de droit
commun.
Toutefois, toutes les décisions sont prises par vote à la majorité relative au scrutin secret.
Le jugement constate cette majorité sans mention des voix exprimées, le tout à peine de nullité.

Art. 124. Lorsque la peine a été déterminée, le tribunal peut décider qu'il sera sursis à
l'exécution dans les conditions prévues aux articles 694 à 697 du code de procédure pénale
sous réserve de ce qui suit :
Lorsqu'une condamnation prononcée pour un crime ou un délit de droit commun aura fait
l'objet d'un sursis la condamnation encourue dans le délai de cinq ans pour un crime ou un délit
militaire ne fait perdre au condamné le bénéfice du sursis que si le crime ou le délit est
punissable par les lois pénales de droit commun.
La condamnation antérieure prononcée par un tribunal militaire pour un crime ou un délit non
punissable par les lois pénales de droit commun, ne fait pas obstacle à l'obtention du sursis
devant les tribunaux de droit commun.
Dans ce cas, si la première condamnation a été elle-même assortie du sursis son bénéfice reste
acquis au condamné.
Les crimes et délits prévus par le code de justice militaire ne constituent pour l’accusé ou le
prévenu un état de récidive que s’ils sont punis par les lois pénales de droit commun.

Art. 125. En cas de conviction de plusieurs crimes ou délits la peine la plus forte est seule
prononcée.
Lorsqu'une peine principale fait l’objet d'une remise gracieuse, il y a lieu de tenir compte, pour
l'application de la confusion des peines, de la peine résultant de la commutation et non de la
peine initialement prononcée.
Le tribunal de droit commun ou le tribunal militaire doit ordonner la confusion des peines à
l'égard d'un prévenu déjà condamné par l'une de ces juridictions.

Art. 126. Le jugement qui prononce une peine contre l'accusé ou le prévenu le condamne aux
frais envers l'Etat. Il ordonne en outre, dans les cas prévus par la loi, la confiscation des objets

303
Précis De Droit Pénal Général

saisis et la restitution s'il y a lieu, soit au profit de l'Etat, soit au profit des propriétaires de tous
objets saisis produits au procès comme pièces à conviction.

CHAPITRE III DE LA RECONNAISSANCE D'IDENTITE D'UN CONDAMNE


EVADE

Art. 141. La reconnaissance d’identité, au cas où elle est contestée, d'un individu condamné
par une juridiction militaire, est faite par le tribunal militaire de la circonscription territoriale
où est stationné le corps dont fait partie le condamné.
Si le condamné n’appartient à aucun corps, la reconnaissance est faite par le tribunal militaire
qui a prononcé la condamnation et, si cette juridiction a cessé ses fonctions, par le tribunal
militaire de la circonscription territoriale sur le territoire de laquelle le condamné a été repris.
Le tribunal militaire statue sur la reconnaissance, en audience publique, en présence de
l'individu repris, après avoir entendu les témoins appelés tant par le ministère public que par
l’individu repris, le tout à peine de nullité.
Le ministère public et l’individu repris ont la faculté de se pourvoir devant la chambre
[criminelle] de la Cour [de cassation] contre le jugement qui statue sur la reconnaissance de
l’identité.

CHAPITRE IV DU CASIER JUDICIAIRE

Art. 142. Les dispositions du code de procédure pénale relatives au casier judiciaire sont
applicables aux condamnations prononcées par les juridictions militaires.
Toutefois, les condamnations prononcées par application des dispositions des articles 225
alinéa 1er et 227 alinéa 1er et 229 alinéa 1 et 2 du présent code ne sont pas inscrites au bulletin
n° 3 du casier judiciaire.

375. CHAPITRE V DE L'EXECUTION DES JUGEMENTS

Art. 143. Tout jugement n’ayant pas fait l'objet de pourvoi en cassation devient exécutoire dés
l'expiration du délai de recours.
Si le pourvoi en cassation est rejeté, le jugement de condamnation devient exécutoire dès
notification de l’arrêt de rejet.
La condamnation à mort échappe aux disposions du présent article.

Art. 144. Dans tous les cas, le commissaire du Gouvernement informe le commandant de
région militaire, soit de l’arrêt de rejet, soit du jugement du tribunal militaire.
Il requiert l'exécution du jugement dans les délais fixés à l’article 143.
Lorsque la condamnation est la peine de mort il ne peut être procédé à l'exécution du
condamné qu’après qu'il ait été statué sur le recours en grâce lequel sera de droit.

Art. 145. Les jugements des tribunaux militaires sont exécutés sur ordre du ministre chargé de
la défense et à la diligence du commissaire du Gouvernement en présence du greffier qui
dresse procès-verbal.
La minute du procès-verbal est annexée à la minute du jugement en marge de laquelle il est fait
mention de l’exécution.
Dans les trois jours de l’exécution, le commissaire du Gouvernement est tenu d'adresser une
expédition du jugement au chef de corps du condamné.
Toute expédition de jugement de condamnation fait mention de l'exécution.

304
Précis De Droit Pénal Général

Art. 146. Le recouvrement des condamnations pécuniaires au profit de l’Etat est fait par les
agents du Trésor sur extrait du jugement adressé par le commissaire au Gouvernement près la
juridiction militaire.

CHAPITRE VI DE LA LIBERATION CONDITIONNELLE

Art. 147. Le condamné militaire qui conserve sa qualité peut bénéficier de la libération
conditionnelle conformément à la procédure de droit commun par arrêté du ministre chargé de
la Défense investi des pouvoirs judiciaires.
L'intéressé est dans ce cas mis à la disposition effective de l'autorité militaire pour l’exécution
de ses obligations militaires. Il reste sous surveillance exclusive de cette autorité.

Art. 148. La révocation de la libération conditionnelle des condamnés visés à l'article 147 est
prononcée par le ministre charge de la défense conformément aux dispositions de l'article 693
du code de procédure pénale.

Art. 149. Lorsque le condamné a atteint la date de libération de son service militaire dans
l’armée active sans révocation de sa libération conditionnelle, le temps passé au service compte
dans la durée de la peine encourue.

CHAPITRE VII DU SURSIS SIMPLE ET DE LA RECIDIVE

Art. 150. En cas de condamnation à la peine d’emprisonnement ou à l’amende, la juridiction


militaire peut décider qu’il sera sursis à l’exécution dans les conditions prévues par le code de
procédure pénale sous les réserves suivantes :
1) la condamnation pour une infraction militaire
- ne fait pas perdre au condamné le bénéfice du sursis antérieurement accordé pour une
infraction non militaire ;
- ne forme pas d’obstacle a l'octroi ultérieur du sursis pour une infraction de droit commun ;
2) le sursis précédemment accordé pour une infraction militaire n'est pas révoqué par une
condamnation pour infraction de droit commun.

Art. 151. Les condamnations prononcées pour infraction militaire ne peuvent constituer le
condamné en état de récidive lorsque celui-ci est poursuivi pour une infraction de droit
commun.

CHAPITRE VIII DE LA REHABILITATION

Art. 152. En cas de réhabilitation, la perte de grade, des décorations burkinabè et des droits à
pension pour services antérieurs qui résultaient de la condamnation, subsistent pour les
militaires. Toutefois, en cas de réintégration dans les Forces armées, ceux-ci peuvent acquérir
de nouveaux grades, décorations et droits à pension.

CHAPITRE IX DES FRAIS DE JUSTICE ET DE LA CONTRAINTE PAR CORPS

Art. 153. Au cas de condamnation ou d’absolution, la juridiction militaire de jugement


condamne le prévenu aux frais envers l’Etat, sauf s’il a été fait application des dispositions de
l’article 141, et se prononce sur la contrainte par corps.

305
Précis De Droit Pénal Général

Les frais de justice devant les juridictions militaires sont déterminés par décret Celui-ci règle
notamment les tarifs, les modalités de paiement et de recouvrement ainsi que les voies de
recours.

LIVRE III DES PEINES APPLICABLES PAR LES JURIDICTIONS


DES FORCES ARMEES ET DES INFRACTIONS MILITAIRES

TITRE I DES PEINES APPLICABLES PAR LES JURIDICITIONS DES FORCES


ARMEES

Art. 154. Sans préjudice de la répression pénale des faits qui constituent des crimes ou délits
de droit commun et, notamment de ceux qui sont contraires aux lois et coutumes de la guerre et
aux conventions internationales, sont punies conformément aux dispositions du présent livre
les infractions militaires ci-après.

Art. 155. Sous réserve des dispositions du présent code ou des lois spéciales, les juridictions
des Forces armées prononcent les mêmes peines que les juridictions de droit commun.
Ces peines sont appliquées selon les principes généraux et les règles de droit commun.
Toute peine criminelle, prononcée contre un militaire entraînera notamment l’exclusion de
l’armée ainsi que la privation du grade et du droit d'en porter les insignes et l’uniforme.

Art. 156. Les juridictions des Forces armées peuvent également prononcer les peines militaires
de la destitution et de la perte du grade.
La destitution entraîne la perte du grade et du droit d'en porter les insignes et l’uniforme.
Elle a, en ce qui concerne le droit à l’obtention et à la jouissance d'une pension, les effets
prévus par la législation des pensions.
Elle est applicable aux officiers, aux sous-officiers de carrière des Forces armées, dans tous les
cas où elle est prévue pour les officiers.

Art. 157. Si l'infraction est passible d'une peine criminelle, la destitution pourra être prononcée
à titre complémentaire même si, par suite de l'admission des circonstances atténuantes, la peine
principale est l'emprisonnement.

Art. 158. La peine de la perte du grade entraîne les mêmes effets que la destitution, mais sans
modifier les droits à pension et à récompense pour services antérieurs.
Elle est applicable aux officiers et, dans tous les cas où elle est prévue pour ceux-ci, aux sous-
officiers de carrière, aux sous-officiers servant sous contrat.

Art. 159. Toute condamnation prononcée par quelque juridiction que ce soit contre un officier,
un sous-officier de carrière ou un sous-officier servant sous contrat, même si elle n'a pas
entraîné la perte des droits civiques, civils et de famille ou la destitution, emporte de plein droit
la perte du grade, si elle est prononcée pour crime.
Il en est de même pour toute condamnation à une peine égale ou supérieure à trois mois
d'emprisonnement ferme ou une peine égale ou supérieure à dix huit mois d'emprisonnement
avec sursis prononcée pour l'un des faits suivants :
1) corruption de fonctionnaire et trafic d'influence ;
2) délits de vol, d'escroquerie, d’abus de confiance et de recel ;
3) infraction prévue par le code de l’information.
Il en est de même si la peine prononcée, même inférieure à trois mois d'emprisonnement,
s'accompagne, soit d'une interdiction de séjour, soit d'une interdiction de tout ou partie des

306
Précis De Droit Pénal Général

droits civiques, civils et de famille, ou si le jugement déclare que le condamné est incapable
d’exercer une fonction publique.

Art. 160. Toute condamnation de même nature ou degré prononcée dans les conditions
spécifiées à l'article 159 entraîne de plein droit la perte du grade pour tous les militaires autres
que ceux désignés audit article, et la révocation s'ils sont commissionnés.

Art. 161. Quand la peine prévue est la destitution, et si les circonstances atténuantes ont été
déclarées, le tribunal applique la peine de la perte du grade.

Art. 162. Pour les prisonniers de guerre et les personnes étrangères aux armées, la destitution
et la perte du grade, prévues à titre principal, sont remplacées par un emprisonnement d’un à
cinq ans.

Art. 163. Les fautes disciplinaires sont soumises aux dispositions statutaires et réglementaires
des textes régissant l'armée.
Dans tous les cas, lorsque les sanctions encourues sont privatives de liberté, elles ne peuvent
excéder 60 jours.

Art. 164. Les lois, décrets ou règlements émanant de l’autorité ennemie, les ordres ou
autorisations donnés par cette autorité ou par les autorités qui en dépendent ou en ont dépendu,
ne peuvent être invoqués comme faits justificatifs mais seulement, s'il y a lieu, comme
circonstances atténuantes ou comme excuses absolutoires

TITRE II DES INFRAGTIONS MILITAIRES

CHAPITRE I DES INFRACTIONS TENDANT A SOUSTRAIRE


LEUR AUTEUR A SES OBLIGATIONS MILITAIRES

Section 1 De l’insoumission

Art. 165. Tout individu coupable d’insoumission aux termes des lois sur le recrutement des
armées de terre et de l’air, est puni, en temps de paix, d'un emprisonnement de deux mois à un
an.
En temps de guerre, la peine est de deux ans à dix ans d'emprisonnement. Le coupable peut, en
outre, être frappé, pour cinq ans au moins et pour vingt ans au plus, de l'interdiction totale ou
partielle de l’exercice des droits civiques, civils et de famille.
En temps de guerre, si le coupable est officier la destitution peut, en outre, être prononcée.
Le tout sans préjudice des dispositions édictées par les lois sur les recrutements dans les
armées.

Section 2 De la désertion

Paragraphe 1 De la désertion à l’intérieur

Art. 166. Est considéré comme déserteur à l’intérieur en temps de paix :


1) six jours après celui de l'absence constatée, tout militaire qui s'absente sans autorisation de
son corps ou détachement, de sa base ou formation, d'un hôpital militaire ou civil, où il était en
traitement ou qui s'évade d'un établissement pénitentiaire où il était détenu préventivement ;

307
Précis De Droit Pénal Général

2) tout militaire voyageant isolément, dont la mission, le congé ou la permission est expiré et
qui dans les quinze jours suivant celui fixé pour son arrivée ou son retour, ne s'est pas présenté
à son corps ou détachement, à sa base ou formation;
3) tout militaire qui, sur le territoire national, se trouve absent sans permission au moment du
départ pour une destination hors de ce territoire, de l’aéronef ou du navire militaire auquel il
appartient ou à bord duquel il est embarqué, encore qu'il se soit présenté à l'autorité avant
l'expiration des délais ci-dessus fixés.
Toutefois, dans les cas prévus aux alinéas 1 et 2 le militaire qui n'a pas trois mois de service ne
peut être considéré comme déserteur qu’après un mois d'absence.
En temps de guerre, tous les délais impartis par le présent article sont réduits des deux tiers.

Art. 167. Tout militaire coupable de désertion à l'intérieur en temps de paix est puni de six
mois à trois ans d'emprisonnement.
Si le coupable est officier, la destitution peut, en outre, être prononcée.
Si la désertion a eu lieu en temps de guerre ou dès la proclamation de l'état de siège ou de l'état
d'urgence, la peine peut être portée à dix ans d'emprisonnement.

Art. 168. Est réputée désertion avec complot, toute désertion effectuée de concert par plus de
deux individus.
La désertion avec complot à l'intérieur est punie :
a) en temps de paix, d'un emprisonnement de un à cinq ans.
Si le coupable est officier, la destitution peut, en outre, être prononcée ;
b) en temps de guerre, d'un emprisonnement de 5 à 10 ans.

Paragraphe 2 De la désertion à l’étranger

Art. 169. Est déclaré déserteur à l'étranger en temps de paix, trois jours après celui de l'absence
constatée, tout militaire qui franchit sans autorisation les limites du territoire national ou qui,
hors de ce territoire, abandonne le corps ou détachement, la base ou formation à laquelle il
appartient, de l'aéronef ou au navire à bord duquel il est embarqué.

Art. 170. Est déclaré déserteur à l'étranger en temps de paix tout militaire qui, hors du territoire
national à l'expiration du délai de six jours après celui fixé pour son retour de permission, de
congé, de mission ou de déplacement, ne se présente pas au corps ou détachement, à la base ou
formation à laquelle il appartient, de l'aéronef ou du navire à bord duquel il est embarqué.

Art. 171. Est déclaré déserteur à l’étranger, tout militaire qui hors du territoire national, se
trouve absent sans permission au moment du départ de l’aéronef ou du navire militaire à bord
duquel il est embarqué encore qu'il se soit présenté à l’autorité avant l'expiration du délai fixé à
l'article 169.

Art. 172. En temps de paix, dans les cas visés aux articles 169 et 170, le militaire qui n'a pas
trois mois de service ne peut être considéré comme déserteur qu'après quinze jours d’absence.
En temps de guerre, les délais prévus aux articles 169 et 170 ainsi qu'à l’alinéa précédent sont
réduits respectivement à un jour, deux jours et cinq jours.

Art. 173. Tout militaire coupable de désertion à l’étranger en temps de paix est puni de deux à
cinq ans d'emprisonnement.
Si le coupable est officier, il est puni de l’emprisonnement de cinq à dix ans.

308
Précis De Droit Pénal Général

Art. 174. La peine d'emprisonnement encourue peut être portée à dix ans contre tout militaire
qui a déserté à l'étranger dans l'une des circonstances suivantes :
1) si le coupable a emporté une arme ou du matériel de l'Etat ;
2) s'il a déserté étant de service ;
3) s'il a déserté avec complot.
Si le coupable est officier, il est puni de 10 à 20 ans d’emprisonnement.

Art. 175. Si la désertion à l’étranger a lieu en temps de guerre ou en temps d’état de siège ou
d’état d'urgence, la peine est celle de l'emprisonnement de 5 à 10 ans.
La peine est celle de 10 à 20 ans d’emprisonnement si la désertion à l’étranger a lieu avec
complot en temps de guerre.
Dans les cas prévus aux alinéas 1 et 2 ci-dessus, si le coupable est officier, le maximum de la
peine est prononcé.

Paragraphe 3 De la désertion à bande armée

Art. 176. Est puni de 10 à 20 ans d’emprisonnement, tout militaire qui déserte à bande armée.
Si le coupable est officier, il est puni du maximum de cette peine.
Si la désertion a été commise avec complot, les coupables sont punis de l'emprisonnement à
vie.
Les coupables sont punis de la peine de mort s'ils ont emporté une arme ou des munitions.

Paragraphe 4 De la désertion à l’ennemi ou en présence de l’ennemi

Art. 177. Est puni de mort, tout militaire ou individu non militaire faisant partie de l'équipage
d'un aéronef ou d'un navire militaire, coupable de désertion à l’ennemi.

Art. 178. Est puni d’un emprisonnement de 10 à 20 ans, tout déserteur en présence de
l'ennemi.
S'il est officier, la peine encourue est l'emprisonnement à vie.
Si la désertion en présence de l'ennemi a lieu avec complot, la peine est la mort.

Art. 179. Doit être considéré comme se trouvant en présence de l’ennemi tout militaire ou tout
individu non militaire faisant partie d’une unité ou d'une formation, de l'équipage d'un aéronef
ou navire militaire pouvant être rapidement aux prises avec l'ennemi ou déjà engagé avec lui ou
soumis à ses attaques.

Art. 180. Les personnes qui, sans être liées légalement ou contractuellement aux Forces
armées, sont portées sur les contrôles et accomplissements du service peuvent être poursuivies
pour désertion, lorsqu'elles se trouvent dans l’un des cas prévus aux articles 177, 178 et 179.

Paragraphe 5 Dispositions communes aux diverses désertions

Art. 181. En temps de guerre, toute personne condamnée à une peine d'emprisonnement pour
désertion peut être frappée pour 5 ans au moins et pour 20 ans au plus de l'interdiction totale ou
partielle de l’exercice des droits civiques, civils et de famille.

309
Précis De Droit Pénal Général

Section 3 De la provocation à la désertion et du recel de déserteur

Paragraphe 1 De la provocation à la désertion

Art. 182. Tout individu qui, par quelque moyen que ce soit, qu’il ait été ou non suivi d'effet,
provoque ou favorise la désertion, est puni par la juridiction militaire compétente en temps de
paix : de 6 mois à 3 ans d'emprisonnement et en temps de guerre : de 5 à 10 ans
d'emprisonnement.
A l'égard des individus non militaires ou non assimilés aux militaires, une peine d'amende de
vingt mille francs à un million de francs peut, en outre être prononcée.

Paragraphe 2 Du recel de déserteur

Art. 183. Tout individu convaincu d’avoir sciemment, soit recelé un déserteur, soit soustrait ou
tenté de soustraire d'une manière quelconque un déserteur aux poursuites ordonnées par la loi,
est puni par la juridiction militaire compétente d'un emprisonnement de 2 mois à 2 ans et peut,
en outre, s’il n’est ni militaire ni assimilé, être puni d’une amende de vingt mille à cinq cent
mille francs CFA.
Sont exemptés des dispositions de l’alinéa précédent, les parents et alliés jusqu'au quatrième
degré inclusivement.

Paragraphe 3 Disposition commune

Art. 184. Les peines édictées par les articles 182 et 183 sont applicables lorsque le déserteur
appartient à une armée alliée.

Section 4 De la mutilation volontaire

Art. 185. Tout militaire convaincu de s'être rendu volontairement impropre au service, soit
d'une manière temporaire, soit d'une manière permanente, dans le but de se soustraire à ses
obligations militaires, est puni :
1) en temps de paix, d'un emprisonnement de 1 à 5 ans et de l'interdiction pour une durée de 5 à
10 ans de l'exercice des droits civiques, civils et de famille. Si le coupable est officier, il pourra
être puni en outre de la destitution ;
2) en temps de guerre, d'un emprisonnement de 5 à 10 ans ;
3) d'un emprisonnement de 5 à 10 ans en temps d'état de siège ou d’état d'urgence ou en
présence de bande armée ;
4) de la peine de mort s’il était en présence de l'ennemi.
La tentative est punie comme l'infraction elle-même.

Art. 186. Si les complices sont des médecins ou des pharmaciens, les peines d'emprisonnement
pour ceux-ci peuvent être portées au double, indépendamment d'une amende de cinquante mille
à un million de francs pour les délinquants non militaires ou non assimilés aux militaires.

310
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE II DES INFRACTIONS CONTRE L'HONNEUR OU LE DEVOIR

Section 1 De la capitulation

Art. 187. Est puni de mort, tout commandant de formation, d’une force aérienne, d'un aéronef
ou d'un navire militaire, qui, mis en jugement après enquête, est reconnu coupable d'avoir
capitulé devant l'ennemi, ou ordonné de cesser le combat sans avoir épuisé tous les moyens de
défense dont il disposerait et sans avoir fait ce que lui prescrivaient le devoir et l’honneur.

Art. 188. Est puni de la destitution, tout commandant d'une formation, d'un aéronef ou d'un
navire militaire qui, pouvant attaquer et combattre un ennemi égal ou inférieur en force,
secourir une troupe, un aéronef ou un navire burkinabè ou allié poursuivi par l’ennemi ou
engagé dans un combat, ne l’a pas fait lorsqu'il n’aura pas été empêché par des instructions
générales ou des motifs graves.

Section 2 De la trahison et du complot militaire

Art. 189. Est puni de mort tout militaire, tout individu embarqué sur un aéronef ou un navire
militaire :
qui provoque à la fuite ou empêche le ralliement en présence de l'ennemi ou de bande armée ;
- qui sans ordre du commandant, provoque la cessation du combat ;
- qui volontairement, occasionne la prise par l'ennemi de la formation ou de l'aéronef ou d'un
navire placé sous ses ordres ou à bord duquel il se trouve.

Art. 190. Tout individu coupable de complot ayant pour but de porter atteinte à l’autorité du
commandant d'une formation militaire, d’un aéronef, d'un navire militaire, ou à la discipline ou
à la sécurité de la formation ou de l’aéronef, est puni d'un emprisonnement à perpétuité.
Il y a complot dés que la résolution d’agir est concertée et arrêtée entre deux ou plusieurs
individus.
Le maximum de la peine est appliqué aux militaires les plus élevés en grade et aux instigateurs
dudit complot.
Si le complot a lieu en temps de guerre, ou en temps d'état de siège ou d'urgence, ou dans
toutes circonstances pouvant mettre en péril la sécurité de la formation, de l'aéronef, du navire,
ou a pour but de peser sur la décision du chef responsable, le coupable est puni de mort.

Art. 191. Est puni d'un emprisonnement à vie, tout militaire ou tout individu embarqué qui
prend un commandement sans ordre ou motif légitime ou qui le retient contre l'ordre de ses
chefs.

Art. 192. Est puni d'une peine de 3 à 5 ans d'emprisonnement tout militaire burkinabè ou au
service du Burkina Faso qui, tombé au pouvoir de l’ennemi, s'est engagé personnellement, pour
obtenir sa liberté sous condition, à ne plus porter les armes contre celui ci.

Section 3 Des pillages

Art. 193. Sont punis de l'emprisonnement à perpétuité tous pillages ou dégâts de denrées,
marchandises ou effets commis en bande par des militaires ou par des individus embarqués,
soit avec des armes ou à force ouverte, soit avec bris de portes et clôtures extérieures, soit avec
violences envers les personnes.

311
Précis De Droit Pénal Général

Le pillage et les dégâts commis en bande sont punis de l'emprisonnement de 10 à 20 ans dans
tous les autres cas.
Toutefois, si dans les cas prévus par l’alinéa 1 du présent article il existe parmi les coupables
un ou plusieurs instigateurs, un ou plusieurs militaires pourvus de grades, la peine à perpétuité
n'est infligée qu'aux instigateurs militaires les plus élevés en grade. Les autres coupables sont
punis de l'emprisonnement de 10 à 20 ans.

Art. 194. Tout individu, militaire ou non, qui dans la zone d'opérations d'une force ou
formation :
1) dépouille un blessé, malade, naufragé ou mort, est puni de l'emprisonnement de 10 à 20 ans ;
2) en vue de le dépouiller, exerce sur un blessé, malade ou naufragé des violences aggravant
son état est puni de mort.

Section 4 Des destructions

Art. 195. Est puni de 6 mois à 3 ans d'emprisonnement tout militaire, tout pilote ou
commandant d'un aéronef ou d'un navire militaire ou tout individu embarqué coupable d'avoir,
par négligence, occasionné la destruction, la perte ou la mise hors de service définitive ou
temporaire d'un édifice, d'un ouvrage, d'un aéronef, d’approvisionnement, d'armement, de
matériel ou d'une installation quelconque à l'usage des Forces armées ou concernant la défense
nationale. Si le coupable est officier des Forces armées il est puni du maximum de cette peine.
Est puni d'un emprisonnement de 1 à 5 ans ou, de la destitution s'il est officier, tout
commandant d'un aéronef ou d'un navire militaire, coupable d'avoir par négligence occasionné
la destruction, la perte ou la mise hors de service d’un aéronef ou d'un navire militaire.

Art. 196. Est puni d’un emprisonnement de 6 mois à 5 ans tout militaire ou tout individu
embarqué coupable d'avoir volontairement occasionné la destruction, la perte ou la mise hors
de service d'une arme ou de tout autre objet affecté au service des armées, même s'il est la
propriété de l'auteur, que cet objet ait été en sa possession pour le service ou aux mêmes fins à
l'usage d'autres militaires.
La peine est celle d’un emprisonnement de 10 à 20 ans, si l'objet rendu impropre au service
intéresse la mise en oeuvre d'un aéronef ou d'un navire militaire si le fait a lieu soit en temps de
guerre, soit dans un incendie, échouage, abordage ou manœuvre intéressant la sûreté de
l'aéronef ou du navire.

Art. 197. Est puni d'un emprisonnement de 10 à 20 ans, tout militaire, tout individu embarqué,
tout pilote d'un aéronef ou commandant d'un navire militaire coupable d'avoir volontairement
occasionné la destruction, la perte ou la mise hors de service d'un édifice, d'un ouvrage, d'un
aéronef, d'approvisionnements, d'armement, de matériel ou d’une installation quelconque à
l’usage des Forces armées ou concourant à la défense nationale.
Si la destruction est de nature à entraîner mort d'homme ou à nuire à la défense nationale, la
peine est celle de l'emprisonnement à vie.
S'il y a eu mort d'homme ou si, par son étendue ou ses effets, la destruction a nui gravement à
la défense nationale, la peine encourue est la peine de mort.

Art. 198. Est puni de la peine de mort, tout commandant de force aérienne, tout commandant
ou suppléant, tout chef de quart, tout membre de l'équipage d’un aéronef ou d'un navire
militaire, tout pilote ou commandant qui, volontairement, a occasionné la perte d'un aéronef ou
d'un navire placé sous ses ordres ou sur lequel il est embarqué.

312
Précis De Droit Pénal Général

Si les faits ont été commis en temps de guerre ou au cours d'opérations de guerre par le
commandant d'un aéronef ou d'un navire convoyé, la peine de mort est également encourue.

Art. 199. Est puni d’un emprisonnement de 5 à 10 ans tout militaire qui, volontairement,
détruit, lacère des registres, minutes ou actes originaux de l’autorité militaire.

Section 5 Du faux, de la falsification, des détournements

Art. 200. Tout militaire chargé de la tenue d'une comptabilité deniers ou matières qui a
commis un faux dans ses comptes ou qui a fait usage des actes faux est puni d'un
emprisonnement de 5 à 10 ans.

Art. 201. Est puni d'un emprisonnement de 1 à 5 ans :


1) tout militaire qui a falsifié ou fait falsifier des substances, matières, denrées ou liquides
confiés à sa garde ou placés sous sa surveillance, ou qui, sciemment, a distribué ou fait
distribuer lesdites substances, matières, denrées ou liquides falsifiés ;
2) tout militaire qui a distribué, ou fait distribuer des viandes provenant d’animaux atteints de
maladies contagieuses, ou les matières, substances, denrées ou liquides corrompus ou avariés.
S'il en est résulté pour l'auteur des faits qualifiés ci-dessus des gains ou profits, le tribunal
prononce en outre leur confiscation.

Pour la constatation de ces infractions, la procédure suivie est celle qui est prévue dans chaque
cas par la législation sur les fraudes

Art. 202. Est puni d'un emprisonnement de 1 à 5 ans, tout militaire, tout individu embarqué qui
dissipe ou détourne les armes, munitions, véhicules, deniers, effets et autres objets à lui remis
pour le service ou à l'occasion du service.

Art. 203. Est puni d'un emprisonnement de 5 à 10 ans, tout militaire, ou assimilé, coupable, en
temps de paix ou de guerre, de vol au préjudice de l'habitant chez lequel il est logé ou
cantonné.

Section 6 De l’usurpation d’uniformes, de décorations, de signes distinctifs et emblèmes

Art. 204. Est puni d’un emprisonnement de 6 mois à 2 ans, et d’une amende de vingt cinq
mille à cinq cent mille francs tout militaire, tout individu embarqué qui porte publiquement des
décorations, médailles, insignes, uniformes ou costumes nationaux sans en avoir le droit.
La même peine est prononcée contre tout militaire ou individu embarqué qui porte des
décorations, médailles ou insignes étrangers sans y avoir été préalablement autorisé.

Art. 205. Est puni d'un emprisonnement de 1 à 5 ans, tout individu, militaire ou non, qui en
temps de guerre, dans la zone d'opérations d'une force ou formation, en violation des lois et
coutumes de guerre, emploie indûment les insignes distinctifs et emblèmes définis par les
conventions internationales pour assurer le respect des personnes, des biens ainsi que des lieux
protégés par ces conventions.

Section 7 De l’outrage au drapeau ou à l’armée

Art. 206. Est puni d'un emprisonnement de 6 mois à 5 ans, tout militaire, ou tout individu
embarqué qui commet un outrage au drapeau ou à l’armée.

313
Précis De Droit Pénal Général

Si le coupable est officier, il est puni, en outre, de la destitution ou de la perte du grade.

Section 8 De l’incitation à commettre des actes contraires au devoir ou à la discipline

Art. 207. Est puni, en temps de paix, d'un emprisonnement de 6 mois à 2 ans, tout militaire, ou
tout individu embarqué qui, par quelque moyen que ce soit, incite un ou plusieurs militaires à
commettre des actes contraires au devoir ou à la discipline.
Si le coupable est d'un grade supérieur à celui des militaires qui ont été incités à commettre
lesdits actes, il est puni d'un emprisonnement de 1 à 5 ans.
Lorsque les faits sont commis en temps de guerre ou en temps d'état de siège ou d'urgence, la
peine est de 1 à 5 ans d’emprisonnement dans les cas prévus à l’alinéa 1 du présent article et
d’un emprisonnement de 5 à 10 ans dans celui prévu à l’alinéa 2.

CHAPITRE III DES INFRACTIONS CONTRE LA DISCIPLINE

Section 1 De l’insubordination

Paragraphe 1 De la révolte

Art. 208. Sont en état de révolte :


1) les militaires sous les armes, les individus embarqués qui, réunis au nombre de quatre au
moins, agissant de concert, refusent à la première sommation d'obéir aux ordres de leurs chefs ;
2) les militaires, les individus embarqués qui, au nombre de quatre au moins et dans les mêmes
conditions, prennent les armes sans autorisation et agissent contre les ordres de leurs chefs ;
3) les militaires, les individus embarqués qui, réunis au nombre de six au moins et dans les
mêmes conditions, se livrent à des violences en faisant usage d'armes, et refusent, à la voix de
l’autorité qualifiée, de se disperser et de rentrer dans l'ordre.

Art. 209. La révolte est punie :


1) dans les circonstances prévues au point 1 de l’article 208, de 3 à 5 ans d'emprisonnement ;
2) dans les circonstances prévues au point 2 du même article, de 5 à 10 ans d’emprisonnement ;
3) dans les circonstances prévues au point 3 dudit article, de 10 à 20 ans d'emprisonnement.
L'emprisonnement à vie peut être appliqué aux coupables les plus élevés en grade et aux
instigateurs de la révolte.

Art. 210. Si la révolte a lieu en temps de guerre ou en temps d'état de siège ou d'urgence ou à
bord d'un aéronef ou d'un navire militaire, l'emprisonnement à vie peut être prononcé.
Les instigateurs sont punis de la peine de mort.
Dans les cas prévus au point 3 de l'article 208, la peine encourue est la peine de mort si la
révolte a lieu en présence de l'ennemi ou de bande armée.

Paragraphe 2 De la rébellion

Art. 211. Toute attaque, toute résistance avec violences et voies de fait commise par un
militaire, ou un individu embarqué envers la force armée ou les agents de l’autorité est punie
de 2 mois à 1 an d'emprisonnement ; si la rébellion a lieu avec armes, elle est punie de 1 an à 3
ans d'emprisonnement.

314
Précis De Droit Pénal Général

Art. 212. Toute rébellion commise par des militaires, ou par des individus désignés à l'article
211, armés et agissant au nombre de six au moins, est punie d'un emprisonnement de 5 à 10
ans.
La même peine est applicable quel que soit le nombre des auteurs de la rébellion si deux au
moins de ceux-ci portent ostensiblement des armes.
Sont punis d'un emprisonnement à vie les instigateurs ou chefs de rébellion et le militaire le
plus élevé en grade.

Paragraphe 3 Du refus d’obéissance

Art. 213. Est puni d'un emprisonnement de 1 à 2 ans, tout militaire ou tout individu embarqué
qui refuse d’obéir ou qui, hors le cas de force majeure, n'exécute pas les ordres reçus.
L'emprisonnement peut être porté à 5 ans si le fait a lieu en temps de guerre ou en temps d’état
de siège ou d'urgence, ou à bord d’un aéronef ou d'un navire militaire.

Art. 214. Est puni de la peine de mort, tout militaire ou tout individu embarqué qui refuse
d'obéir lorsqu'il est commandé pour marcher contre l'ennemi, ou pour tout autre service
ordonné par son chef en présence de l'ennemi ou d'une bande armée.

Art. 215. Tout individu au service des Forces armées autre que ceux visés ci-dessus, employé
dans un établissement des Forces armées qui refuse d'obéir lorsqu'il est commandé pour un
service, soit en présence de l’ennemi ou d’une bande armée, soit dans un incendie ou d'un
danger menaçant la sûreté de l'établissement, est puni d'un emprisonnement de 2 mois à 5 ans.

Paragraphe 4 Des voies de fait et outrages envers des supérieurs

Art. 216. Les voies de fait envers un supérieur ou une autorité qualifiée exercées par un
militaire, ou un individu, embarqué pendant le service ou à l'occasion du service, même hors
du bord, sont punies de l'emprisonnement de 5 à 10 ans.
Si le coupable est un officier ou si les voies de fait ont été commises par un militaire sous les
armes en service la peine peut être portée au maximum.
Les voies de fait exercées à bord envers un supérieur par un militaire, ou un individu embarqué
sont considérées comme étant commises pendant le service.

Art. 217. Si les voies de fait n'ont pas été exercées pendant le service ou à l'occasion du
service, elles sont punies d'un emprisonnement de 2 mois à 3 ans.
Si le coupable est officier, il est puni d'un emprisonnement de 1 à 5 ans. Il peut en outre être
puni de la perte du grade.

Art. 218. Si, par les circonstances dans lesquelles elles ont été commises ou par leurs
conséquences, les violences prévues aux articles 216 et 208 constituent une infraction plus
sévèrement réprimée par le code pénal, elles sont punies des peines prévues par ce code.

Art. 219. Tout militaire, ou tout individu embarqué qui, pendant le service ou à l'occasion du
service, outrage son supérieur par paroles, écrits, gestes ou menaces, est puni d'un
emprisonnement de 6 mois à 5 ans.
Si le coupable est officier, il est puni d'un emprisonnement de 1 à 5 ans et de la destitution, ou
de l'une de ces deux peines seulement.

315
Précis De Droit Pénal Général

Les outrages commis à bord par un militaire, ou un individu embarqué sont considérés comme
étant commis pendant le service.
Dans les autres cas, la peine est de 2 mois à 2 ans d’emprisonnement.

Art. 220. Si, dans les cas prévus aux articles 216 à 219, il résulte des débats que des voies de
fait ou outrages ont été commis sans que le subordonné connût la qualité de son supérieur les
pénalités applicables sont celles du code pénal et le droit commun.

Art. 221. Sous réserve des dispositions prévues à l’article 223, l'injure entre militaires, entre
militaires et assimilés, s’ils sont tous du même grade, n'est réprimée pénalement que s’il existe
entre eux un lien de subordination résultant de la fonction ou de l'emploi.

Paragraphe 5 Des violences ou insultes à sentinelle ou vedette

Art. 222. Tout militaire, ou tout individu embarqué, coupable de violences à main armée
contre une sentinelle ou une vedette, est puni d'un emprisonnement de 5 à 10 ans.
Si les violences n'ont pas été commises à main armée, mais simplement par un militaire, ou un
individu embarqué accompagné d’une ou plusieurs autres personnes, le coupable est puni d’un
emprisonnement de 1 an à 5 ans.
Si les violences ont été commises par un militaire, ou un individu seul et sans arme, la peine est
de 6 mois à 3 ans d’emprisonnement.
Si les violences ont été commises en présence de l’ennemi, d’une bande armée ou en temps de
guerre, ou en temps d’état de siège ou d’urgence, à l'intérieur ou aux abords d'un arsenal, d’une
forteresse, d’une poudrière ou d’une base, la peine peut être portée à l'emprisonnement de 10 à
20 ans dans le cas prévu à l’alinéa 1er du présent article, et portée au double dans les cas prévus
aux alinéas 2 et 3.

Art. 223. Tout militaire, ou tout individu embarqué qui insulte une sentinelle ou une vedette
par paroles, gestes ou menaces, est puni d’un emprisonnement de 2 à 6 mois.

Paragraphe 6 Du refus d'un service légalement dû


Art. 224. Tout commandant de force de sécurité intérieure, régulièrement saisi d'une
réquisition légale de l'autorité civile, qui a refusé ou s'est abstenu de faire agir les forces sous
ses ordres, est puni de la destitution et d'un emprisonnement de 6 mois à 2 ans, ou de l'une de
ces deux peines seulement.

Art. 225. Tout militaire qui refuse ou qui, sans excuse légitime, omet de se rendre aux
audiences des juridictions des Forces armées où il est appelé à siéger est puni d'un
emprisonnement de 2 à 6 mois.
En cas de refus, si le coupable est officier il peut, en outre, être puni de la destitution ou de la
perte du grade.

Section 2 Des abus d’autorité

Paragraphe 1 Des voies de fait et outrages à subordonné

Art. 226. Est puni d’un emprisonnement de 6 mois à 5 ans, tout militaire, qui, hors le cas de
légitime défense de soi-même ou d’autrui, exerce des violences sur un subordonné. Toutefois,
il n’y a ni crime ni délit si les violences ont été commises à l’effet de rallier des fuyards en

316
Précis De Droit Pénal Général

présence de l'ennemi ou de bande armée ou d'arrêter soit le pillage ou la dévastation, soit le


désordre grave de nature à compromettre la sécurité d'un aéronef ou d'un navire militaire.
Si les circonstances dans lesquelles elles ont été commises ou par leurs conséquences, les
violences constituent une infraction plus sévèrement réprimée par le code pénal, elles sont
punies des peines prévues par ce code.

Art. 227. Tout militaire, qui, pendant le service ou à l'occasion du service, par paroles, gestes,
menaces ou écrits, outrage un subordonné gravement et sans y avoir été provoqué est puni de 2
mois à 1 an d'emprisonnement.
Les outrages commis par un militaire à bord d'un aéronef ou d'un navire militaire sont
considérés comme étant commis pendant le service.
Si le délit n'a pas été commis pendant le service ou à l’occasion du service, la peine est de 2 à 6
mois d'emprisonnement.

Art. 228. Si les faits visés aux articles 226 et 227 ont eu lieu en dehors du service et sans que le
supérieur connût la qualité subalterne de la victime, les pénalités applicables sont celles du
code pénal et du droit commun.

Paragraphe 2 Des abus du droit de réquisition

Art. 229. Tout militaire qui abuse des pouvoirs qui lui sont conférés en matière de réquisitions
militaires, ou qui refuse de donner reçu des quantités fournies, est puni de 2 mois à 2 ans
d’emprisonnement.
Tout militaire qui exerce une réquisition sans avoir qualité pour le faire est puni, si cette
réquisition est faite sans violence, d’un emprisonnement de 1 an à 5 ans.
Si cette réquisition est exercée avec violence, il est puni de 5 à 10 ans d'emprisonnement.
Ces peines sont prononcées sans préjudice des restitutions auxquelles le coupable peut être
condamné.
L'officier coupable, peut, en outre, être condamné à la destitution ou à la perte du grade.

Paragraphe 3 De la constitution illégale d'une juridiction répressive

Art. 230. Tout militaire qui, hors, les cas prévus par la loi, établit ou maintient une juridiction
répressive est puni d'un emprisonnement de 10 à 20 ans, sans préjudice des peines plus fortes
pouvant être encourues du fait de l’exécution des sentences prononcées.

CHAPITRE IV DES INFRACTIONS AUX CONSIGNES

Art. 231. Tout militaire qui viole une consigne générale donnée à la troupe ou une consigne
qu’il a personnellement reçue mission de faire exécuter ou qui force une consigne donnée à un
autre militaire est puni d'un emprisonnement de 2 mois à 2 ans.
La peine d’emprisonnement peut être portée à 5 ans, si le fait a été commis en temps de guerre
ou en temps d’état de siège ou d’urgence, ou lorsque la sécurité d'un établissement militaire
d'une formation militaire ou d’un aéronef, ou d’un navire militaire est menacée.
La peine d’emprisonnement peut également être portée à 5 ans, lorsque le fait a été commis en
présence de bande armée.

Art. 232. En temps de guerre, est puni de mort tout commandant d’une formation ou d'un
aéronef ou d'un navire militaire, tout militaire, ou tout individu embarqué qui, volontairement,

317
Précis De Droit Pénal Général

n’a pas rempli la mission dont il était chargé, si cette mission était relative à des opérations de
guerre.

Art. 233. Si la mission a échoué par négligence, ou si le coupable s’est laissé surprendre par
l’ennemi, ou du fait de sa négligence, s'est séparé de son chef en présence de l’ennemi ou a été
la cause de la prise par l'ennemi de l'aéronef ou du navire militaire placé sous ses ordres ou à
bord duquel il se trouvait, il est puni d'un emprisonnement de 6 mois à 3 ans, ou, s'il est officier
de la destitution.

Art. 234. Tout militaire qui abandonne son poste en temps de paix est puni 2 à 6 mois
d’emprisonnement.
Par poste, il faut entendre l’endroit où le militaire doit se trouver à un moment donné pour
l’accomplissement de la mission reçue de ses chefs.
La peine est de 2 à 5 ans d'emprisonnement si l'auteur de l’infraction était dans l'une des
situations prévues à l’article 231, alinéa 2.
Les peines peuvent être doublées si le coupable est commandant d'une formation ou chef de
bord d'un aéronef ou d'un navire militaire.

Art. 235. Tout militaire, qui, étant en faction, en vedette, de veille ou de quart, en temps de
paix, abandonne son poste ou ne remplit pas sa consigne est puni d'un emprisonnement de 2
mois à 1 an.
Si le militaire, bien qu'à son poste, est trouvé endormi, il est puni de 2 à 6 mois
d'emprisonnement.
La peine est dans tous les cas de 5 à 10 ans d'emprisonnement si l'auteur de 1'infraction était
dans l'une des situations prévues à l’article 231 alinéa 2.

Art. 236. Tout individu embarqué qui, lorsque l’aéronef ou le navire militaire est en danger,
l'abandonne sans ordre et en violation des consignes reçues, est puni d'un emprisonnement de 2
mois à 2 ans.
S'il est membre de l'équipage de l’aéronef ou du navire, la peine est de 2 à 5 ans
d'emprisonnement. L'officier est puni de l'emprisonnement et de la destitution ou de l'une de
ces deux peines seulement.

Art. 237. Est puni de la peine de mort, tout commandant d'un navire ou tout pilote d’un
aéronef militaire en vol qui, volontairement et en violation des consignes reçues, en cas de
perte de son aéronef ou de son navire ne l’abandonne pas le dernier.
Est puni de la même peine le commandant non pilote d'un aéronef ou d'un navire militaire qui,
dans les mêmes conditions, abandonne son aéronef avant l’évacuation des autres personnes
embarquées, hormis le pilote.

Art. 238. Tout militaire qui abandonne son poste en présence de l'ennemi ou de bande armée
est puni de la peine de mort.
Est également considéré comme ayant abandonné son poste en présence de l'ennemi ou de
bande armée, tout commandant d'une formation ou d'un aéronef ou d'un navire militaire, qui
volontairement, en temps de guerre ou au cours d'opérations de guerre, ne maintient pas au
combat sa formation, son aéronef ou son navire ou se sépare volontairement de son chef, en
présence de l'ennemi ou de bande armée.
Est puni de la même peine tout militaire, ou tout individu embarqué qui, volontairement, a
provoqué l'un des manquements prévus à l'alinéa précédent.

318
Précis De Droit Pénal Général

Art. 239. Tout pilote d'un aéronef ou d'un navire convoyé ou réquisitionné et qui, en temps de
guerre ou au cours d'opérations de guerre, abandonne volontairement le convoi dont il fait
partie ou désobéit aux ordres est puni d'un emprisonnement de 2 mois à 3 ans.

Art. 240. Est puni d'un emprisonnement de 2 ans, tout pilote d'un aéronef ou d'un navire
militaire, qui, sans motifs légitimes, refuse de porter assistance à un autre aéronef ou navire en
détresse.

TITRE III DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Art. 255. Les fonctions de commissaire de Gouvernement et de juge d’instruction militaire


prévues à l'article 20 seront exercées à titre transitoire par les magistrats de l'ordre judiciaire.

DISPOSITIONS FINALES

376. Art. 256. Le présent code qui abroge toutes dispositions antérieures contraires est
applicable pour compter de sa date de promulgation sur l'ensemble du territoire national et hors
du même territoire dans les cas et situations qu’il prévoit, et sera exécuté comme loi de l'Etat.

319
III – EXTRAIT D’ARTICLES DU CODE DES DROGUES

Loi 17-99 AN du 22 avril 1999 portant code des drogues (promulguée par le décret
99 -213 du 23 juin 1999).

TITRE I DISPOSITIONS GENERALES

Art. 1er. Les dispositions de la présente loi s'appliquent aux aspects licites et illicites des
drogues.

Art. 2. Aux termes de la présente loi, l'expression "drogue" désigne toute substance
d'origine naturelle ou obtenue par synthèse qui, lorsqu'elle est absorbée par un être
vivant, modifie une ou plusieurs de ses fonctions.

Art. 3. Les plantes et substances visées par la présente loi sont énoncées dans quatre
tableaux dénommés tableau I, tableau II, tableau III et tableau IV suivant les mesures de
contrôle auxquelles elles sont soumises.

Art. 4. Pour l'application des dispositions de la présente loi, il est fait une distinction
entre :
les "drogues à haut risque" désignant l'ensemble des plantes et substances figurant aux
tableaux I et II ;
- les "drogues à risque" désignant l'ensemble des plantes et substances figurant au tableau
III ;
- les "précurseurs" désignant les substances figurant au tableau IV.

Art. 5. Au sens de la présente loi, les expressions et termes suivants sont définis comme
suit :
- "abus de drogue" et "usage illicite" désignent l'usage des drogues interdites et l'usage
hors prescriptions médicales des autres drogues placées sous contrôle sur le territoire
national ;
- "toxicomane" désigne la personne se trouvant dans un état de dépendance physique ou
psychique à l'égard d'une drogue ;
- "stupéfiant" désigne toute substance des tableaux I et II, qu'elle soit naturelle ou
synthétique ;
- "tableau I, tableau II, tableau III et tableau IV" désignent les listes de stupéfiants, de
substances, de précurseurs ou de préparations annexées aux conventions internationales
des Nations unies ;
- "précurseur" désigne les substances et produits chimiques utilisés dans la fabrication
des stupéfiants et des substances psychotropes ;
Précis De Droit Pénal Général

- " importation, exportation" désignent l'introduction ou l'expédition de stupéfiants ou de


substances psychotropes sur le territoire national ou à partir du territoire national ;
- "substance psychotrope" désigne toute substance, qu'elle soit d'origine naturelle ou de
synthèse, ou tout produit naturel des tableaux I, II, III, IV de la convention des Nations
unies sur les substances psychotropes de 1971 ;
- "trafic illicite" désigne le trafic de stupéfiants ou de substances psychotropes effectué
contrairement aux dispositions des conventions internationales et de la présente loi ;
- "confiscation" désigne la dépossession définitive de biens sur décision de justice ;
- "bien" désigne tous les types d'avoirs corporels ou incorporels, meubles ou immeubles,
tangibles ou intangibles, ainsi que les actes juridiques ou documents attestant la propriété
de ces avoirs ou des droits y relatifs ;
- "produit" désigne tout bien provenant directement ou indirectement de la commission
d'une infraction, ou obtenu directement ou indirectement en la commettant ;
- "fabrication" désigne toutes les opérations, autres que la production, permettant
d'obtenir des stupéfiants et comprend aussi la purification, de même que la
transformation de stupéfiants en d'autres stupéfiants ou substances psychotropes ;
- "production" désigne l'opération qui consiste à recueillir l'opium, la feuille de coca, le
cannabis, la résine de cannabis et toute autre drogue des plantes qui les fournissent ;
- "blanchiment d'argent" désigne les opérations qui consistent au transfert ou à la
conversion de biens provenant d'une des infractions établies conformément à la présente
loi, dans le but de dissimuler ou de déguiser l'origine illicite desdits biens ou d'aider toute
personne impliquée dans la commission de l'une de ces infractions à échapper aux
conséquences judiciaires de ses actes.

TITRE II CLASSIFICATION ET REGLEMENTATION DE LA CULTURE,


DE LA PRODUCTION, DE LA FABRICATION ET DU COMMERCE LICITE
DES STUPEFIANTS, SUBSTANCES PSYCHOTROPES ET PRECURSEURS

CHAPITRE I CLASSIFICATION DES STUPEFIANTS,


DES SUBSTANCES PSYCHOTROPES ET DES PRECURSEURS

Art. 6. Toutes les plantes et substances classées comme stupéfiants ou substances


psychotropes par les conventions internationales ou en application de ces conventions,
leurs préparations et toutes autres plantes et substances dangereuses pour la santé en
raison des effets nocifs que leur abus est susceptible de produire, sont inscrites à l'un des
tableaux suivants :
- tableau I : plantes et substances à haut risque dépourvues d'intérêt pour la médecine ;
- tableau II : plantes et substances à haut risque présentant un intérêt pour la médecine,
- tableau III : plantes et substances à risque présentant un intérêt pour la médecine ;
- tableau IV : substances et produits chimiques utilisés dans la fabrication de stupéfiants
et de substances psychotropes et appelés "précurseurs".

Art. 7. Les plantes et les substances sont inscrites sous leur dénomination commune
internationale ou à défaut, sous leur dénomination scientifique.

321
Précis De Droit Pénal Général

Art. 8. Sont considérés comme préparations et soumis au même régime que les
substances qu'ils renferment, les mélanges solides ou liquides contenant une ou plusieurs
substances placées sous contrôle et les substances psychotropes divisées en unités de
prise.
Les préparations contenant deux substances ou plus, assujetties à des régimes différents
sont soumises au régime de la substance la plus strictement contrôlée.

Art. 9. Les tableaux sont établis et modifiés par arrêté du ministre chargé de la Santé,
soit par une inscription nouvelle, soit par radiation ou transfert d'un tableau à un autre ou
d'un groupe à un autre.

Art. 10. Les préparations contenant une substance inscrite aux tableaux II, III et IV qui
sont composées de telle manière qu'elles ne présentent qu'un risque d'abus nul ou
négligeable et dont la substance ne peut pas être récupérée en quantité pouvant donner
lieu à des abus par des moyens facilement applicables, peuvent être exemptées de
certaines mesures de contrôle énoncées par la loi par arrêté du ministre chargé de la
Santé.

CHAPITRE II LA CULTURE, LA PRODUCTION, LA FABRICATION


ET LE COMMERCE DES DROGUES

Art. 11. La culture des plantes classées comme stupéfiants par les conventions
internationales est interdite sur le territoire national.
Le propriétaire, l'exploitant ou l'occupant à quelque titre que ce soit d'un terrain quel qu'il
soit, est tenu de détruire les plantes susvisées qui viendraient à y pousser.

Art. 12. La production, la fabrication, le commerce, la distribution de gros et de détail, le


transport, la détention, l'offre, la cession à titre onéreux ou gratuit, l'acquisition, l'emploi,
l'importation, l'exportation, le transit sur le territoire national des plantes, substances et
préparations inscrites au tableau I sont interdits.

Art. 13. Sous réserve des dispositions légales, la culture, la production, la fabrication, le
commerce et la distribution de gros et de détail, le commerce international, l'emploi des
plantes, substances et préparations des tableaux II et III sont interdits à toute personne
qui n'est pas titulaire d'une licence expresse, ainsi que dans tout établissement et tout
local qui n'est pas muni d'une licence expresse.

Art. 14. La licence visée à l'article 13 est délivrée par le ministre chargé de la Santé. Elle
ne peut être délivrée que si l'utilisation des substances en cause est limitée à des fins
médicales.
Art. 15. Le ministre chargé de la Santé fixe pour chaque année les quantités maximales
des différentes substances et préparations que toute personne physique ou morale titulaire

322
Précis De Droit Pénal Général

d'une licence peut détenir compte tenu des besoins de ses activités et de la situation du
marché.

Art. 16. Seules les entreprises privées et les entreprises d'Etat titulaires d'une licence
peuvent se livrer au commerce international des plantes, substances et préparations des
tableaux II et III.

Art. 17. Chaque importation ou exportation est subordonnée à l'obtention d'une


autorisation distincte délivrée par le ministre chargé de la Santé.

CHAPITRE III LA DETENTION, LE COMMERCE


ET LA DISTRIBUTION DE DETAIL DES STUPEFIANTS

Art. 34. Les achats en vue d'un approvisionnement professionnel de plantes, substances
et préparations des tableaux II et III ne peuvent être effectués qu'auprès d'une entreprise
titulaire de la licence prévue aux articles 14 et suivants de la présente loi.

Art. 35. Seules les personnes physiques ou morales suivantes peuvent, si elles sont
titulaires de licences, acquérir et détenir des plantes, substances et préparations des
tableaux II et III, dans la mesure de leurs besoins professionnels :
1) les pharmaciens d'officines ouvertes au public ;
2) les pharmaciens des établissements hospitaliers ou de soins publics ou privés ;
3) les dépôts publics ou privés placés sous la responsabilité d'un pharmacien et agréés par
le ministre chargé de la Santé ;
4) les établissements hospitaliers ou de soins sans pharmacien gérant pour les cas
d'urgence et à la condition qu'un médecin attaché à l'établissement ait accepté la
responsabilité de ce dépôt ;
5) les médecins et vétérinaires autorisés à exercer la propharmacie en ce qui concerne les
préparations inscrites sur une liste établie par le ministre chargé de la Santé ;
6) les médecins et vétérinaires dans la limite d'une provision pour soins urgents,
déterminée qualitativement et quantitativement par le ministre chargé de la Santé ;
7) les chirurgiens dentistes pour leur usage professionnel ;
8) toute autre personne agréée par le ministre chargé de la Santé.

Art. 36. Les plantes, substances et préparations des tableaux II et III ne peuvent être
prescrites et délivrées aux particuliers que sous forme compatible avec leur usage
thérapeutique et seulement sur ordonnance :
1) d'un médecin ;
2) d'un chirurgien dentiste pour les prescriptions nécessaires à l'exercice de l'art dentaire ;
3) d'un docteur vétérinaire pour l'usage vétérinaire ;
4) de toute autre personne agréée par le ministre chargé de la Santé.
377.
Art. 37. Les médicaments des tableaux II et III ne peuvent être délivrés que par :

323
Précis De Droit Pénal Général

1) les pharmaciens d'officines ouvertes au public ;


2) les pharmaciens des établissements hospitaliers ou de soins publics ou privés ;
3) les dépôts publics ou privés placés sous la responsabilité d'un pharmacien et agréés par
le ministre chargé de la Santé.

Art. 38. Toute ordonnance comportant prescription des médicaments des tableaux II et
III doit porter obligatoirement :
1) les nom, prénom(s), qualité et adresse du praticien prescripteur ;
2) la dénomination du médicament, sa posologie et son mode d'emploi ;
3) la quantité prescrite et la durée du traitement et éventuellement le nombre des
renouvellements ;
4) les nom, prénom (s), sexe, age et adresse du malade ou s'il s'agit d'un vétérinaire, du
détenteur de l'animal ;
5) la date à laquelle elle a été rédigée et la signature du prescripteur.

Art. 39. Il est interdit d'exécuter une ordonnance non conforme aux conditions visées à
l'article précédent.

TITRE III REPRESSION DE LA PRODUCTION ET DU TRAFIC ILLICITE


DES STUPEFIANTS ET MESURES CONTRE L'ABUS
DES STUPEFIANTS ET DES SUBSTANCES PSYCHOTROPES

CHAPITRE I INCRIMINATION ET PEINES PRINCIPALES

Section 1 Drogues à haut risque

Art. 44. Sont punis d'un emprisonnement de 10 à 20 ans et d'une amende de 5.000.000 à
25.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui contreviennent
aux dispositions législatives et réglementaires concernant la culture, la production, la
fabrication, l'extraction, la préparation ou la transformation des drogues à haut risque.

Art. 45. Sont punis d'un emprisonnement de 10 à 20 ans et d'une amende de 10.000.000
à 50.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement ceux qui contreviennent
aux dispositions législatives et réglementaires concernant l'importation, l'exportation et le
transport international des drogues à haut risque.

Art. 46. Sont punis d'un emprisonnement de 10 à 20 ans et d'une amende de 5.000.000 à
25.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui contreviennent
aux dispositions législatives et réglementaires concernant l'offre, la mise en vente, la
distribution, le courtage, la vente, la livraison à quelque titre que ce soit, l'envoi,
l'expédition, le transport, l'achat et la détention des drogues à haut risque.

324
Précis De Droit Pénal Général

Art. 47. Sont punis d'un emprisonnement de 2 à 5 ans et d'une amende de 1.000.000 à
5.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui contreviennent
aux dispositions législatives et réglementaires concernant l'emploi ou la détention des
drogues à haut risque à des fins de consommation personnelle.

Art. 48. Sont punis d'un emprisonnement de 5 à 10 ans et d'une amende de 5.000.000 à
10.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement :
1) ceux qui facilitent à autrui l'usage illicite de drogue à haut risque, à titre onéreux ou
gratuit, soit en procurant dans ce but un local, soit par tout autre moyen. Il en est ainsi
notamment des propriétaires, gérants, directeurs, exploitants à quelque titre que ce soit
d'un hôtel, d'une maison meublée, d'une pension, d'un débit de boisson, d'un restaurant,
d'un club, cercle, dancing, lieu de spectacle quelconque ouvert au public ou utilisé par le
public ou tout autre lieu, qui tolèrent l'usage de drogues à haut risque dans lesdits
établissements ou leurs annexes ou dans lesdits lieux.
L'intention frauduleuse est présumée en cas de contrôle positif par un service de police ;
2) ceux qui établissent des prescriptions de complaisance de drogues à haut risque ;
3) ceux qui, connaissant le caractère fictif ou de complaisance des ordonnances, délivrent
des drogues à haut risque ;
4) ceux qui, au moyen d'ordonnances fictives ou de complaisance, se font délivrer ou
tentent de se faire délivrer des drogues à haut risque.

Art. 49. Sont punis d'un emprisonnement de 10 à 20 ans et d'une amende de 10.000.000
à 50.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui de quelque
façon que ce soit et par tous procédés, font consommer des drogues à haut risque à une
personne à son insu.

Art. 50. Sont punis d'un emprisonnement de 2 à 5 ans et d'une amende de 500.000 à
2.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement ceux qui cèdent ou offrent
des drogues à haut risque à une personne en vue de sa consommation personnelle.

Section 2 Drogues à risque

Art. 51. Sont punis d'un emprisonnement de 5 à 10 ans et d'une amende de 5.000.000 à
10.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui contreviennent
aux dispositions législatives et réglementaires concernant la culture, la production, la
transformation, l'importation, l'exportation, l'offre, la mise en vente, la distribution, le
courtage, la vente, la livraison à quelque titre que ce soit, l'envoi, l'expédition, le
transport, l'achat et la détention des drogues à risque.
En cas d'ordre ou de cession à une personne en vue de sa consommation personnelle, ou
en cas d'emploi ou de détention à des fins de consommation personnelle,
l'emprisonnement est de 2 à 5 ans et l'amende de 500.000 à 2.000.000 de francs.

Art. 52. Sont punis d'un emprisonnement de 2 à 5 ans et d'une amende de 500.000 à
2.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement :

325
Précis De Droit Pénal Général

1) ceux qui facilitent à autrui, l'usage illicite des drogues à risque, à titre onéreux ou
gratuit soit en procurant dans ce but un local, soit par tout autre moyen. Il en est ainsi
notamment des propriétaires, gérants, directeurs, exploitants à quelque titre que ce soit,
d'un hôtel, d'une maison meublée, d'une pension, d'un club, cercle, dancing, lieu de
spectacle quelconque ouvert au public ou utilisé par le public ou tout autre lieu, qui
tolèrent l'usage des drogues à risque dans lesdits établissements ou leurs annexes ou dans
lesdits lieux.
L'intention frauduleuse est présumée en cas de contrôle positif par un service de police ;
2) ceux qui établissent des prescriptions de complaisance des drogues à risque ;
3) ceux qui, connaissant le caractère fictif ou de complaisance des ordonnances, délivrent
des drogues à risque ;
4) ceux qui, au moyen d'ordonnances fictives ou de complaisance, se font délivrer ou
tentent de se faire délivrer des drogues à risque.

Art. 53. Sont punis d'un emprisonnement de 5 à 10 ans et d'une amende de 5.000.000 à
25.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui, de quelque
façon que ce soit et par tous procédés font consommer des drogues à risque à une
personne à son insu.

Section 3 Précurseurs

Art. 54. Sont punis d'un emprisonnement de 5 à 10 ans et d'une amende de 5.000.000 à
10.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui produisent,
fabriquent, importent, exportent, transportent, offrent, vendent, distribuent, livrent à
quelque titre que ce soit, expédient, achètent, envoient ou détiennent des précurseurs,
équipements et matériels, soit dans le but de les utiliser dans ou pour la culture, la
production ou la fabrication illicite des drogues, soit sachant que ces précurseurs,
équipements ou matériels doivent être utilisés à de telles fins.

Section 4 Dispositions communes à toutes les drogues

Art. 55. Sont punis d'un emprisonnement de 10 à 20 ans et d'une amende de 50.000.000
à 100.000.000 de francs ceux qui :
- facilitent par tout moyen frauduleux, la justification mensongère de l'origine des
ressources ou des biens de l'auteur des infractions prévues par la présente loi ;
- apportent sciemment leur concours à toute opération de placement, de conversion ou de
dissimulation du produit ou reconvertissent dans l'économie nationale les ressources
acquises par la commission de ces infractions ;
- ceux qui acquièrent, détiennent ou utilisent des gains et ressources, sachant qu'ils
proviennent d'une des infractions énumérées aux alinéas précédents.

Art. 56. Ceux qui par un moyen quelconque incitent à commettre l'une des infractions
prévues aux articles 44 à 54, alors même que cette incitation n'a pas été suivie d'effets,
sont punis des peines prévues pour l'infraction.

326
Précis De Droit Pénal Général

Art. 57. La tentative d'une des infractions prévues aux articles 44 à 54, est punie comme
l'infraction consommée.
Il en est de même de l'entente ou de l'association formée en vue de commettre l'une de
ces infractions.

Art. 58. Les opérations financières accomplies relativement à l'une des infractions
prévues aux articles 44 à 54 sont punies comme l'infraction elle-même.

Art. 59. Les peines prévues aux articles 44 à 54 peuvent être prononcées alors même que
les divers actes constitutifs des éléments de l'infraction ont été accomplis dans des pays
différents.

Section 5 Dispositions relatives à l'abus des stupéfiants et des substances


psychotropes

Art. 60. L'usage hors prescriptions médicales des drogues sous contrôle est interdit sur le
territoire national. Toute drogue trouvée en la possession d'une personne qui en fait usage
de manière illicite est saisie et confisquée par décision de justice, même si ladite
personne ne fait pas l'objet de poursuites.

Art. 61. Nonobstant les dispositions des articles 44 à 54, ceux qui, de manière illicite,
achètent, détiennent ou cultivent des plantes ou substances classées comme stupéfiants
ou substances psychotropes, dont la faible quantité permet de considérer qu'elles sont
destinées à leur consommation personnelle sont punis :
- s'il s'agit d'une plante ou d'une substance classée comme drogue à haut risque y compris
l'huile de cannabis, d'un emprisonnement de 2 mois à 1 an et d'une amende de 100.000 à
500.000 francs ou de l'une de ces deux peines seulement ;
- s'il s'agit d'un dérivé de la plante de cannabis autre que l'huile de cannabis, d'un
emprisonnement de 1 à 6 mois et d'une amende de 50.000 à 250.000 francs ou de l'une de
ces deux peines seulement ;
- s'il s'agit d'une plante ou d'une substance classée comme drogue à risque, d'un
emprisonnement de 15 jours à 3 mois et d'une amende de 50.000 à 250.000 francs ou de
l'une de ces deux peines seulement.
L'intéressé peut être dispensé de peine ou de l'exécution de celle-ci :
- s'il n'a pas atteint l'âge de la majorité pénale ;
- s'il n'est pas en état de récidive ;
- si par déclaration solennelle faite à l'audience, il s'engage à ne pas recommencer.

Art. 62. Toute personne qui conduit un véhicule à moteur terrestre, fluvial, ou aérien
sous l'emprise d'une drogue, même en l'absence de tout signe extérieur de cette drogue
consommée illicitement, est punie d'un emprisonnement de 1 à 3 ans et d'une amende de
500.000 à 5.000.000 de francs, ou de l'une de ces deux peines seulement.

327
Précis De Droit Pénal Général

Toute personne qui refuse de se soumettre aux épreuves de dépistage et aux vérifications
est punie des peines prévues à l'alinéa précédent.
Lorsqu'il y a lieu d'appliquer les dispositions relatives à l'homicide et aux blessures
involontaires, les peines prévues à l'alinéa premier sont portées au double.
Un acte conjoint des ministres chargés de la Santé et de la Sécurité détermine les
modalités de dépistage et de vérification applicables aux conducteurs des véhicules.

Section 6 Fourniture à des mineurs d'inhalants chimiques toxiques

Art. 63. Sont punis d'un emprisonnement de 2 à 5 ans et d'une amende de 500.000 à
5.000.000 de francs ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui, sciemment,
fournissent à un mineur l'un des inhalants chimiques toxiques figurant sur la liste établie
par le ministre chargé de la Santé.

CHAPITRE II CAUSES D'AGGRAVATION DES PEINES

Art. 64. Le maximum des peines prévues aux articles 44 à 58 est porté au double
lorsque :
1) l'auteur de 1'infraction appartient à une bande organisée ou à une association de
malfaiteurs ;
2)1'auteur de 1'infraction a participé à d'autres activités illégales facilitées par la
commission de l'infraction ;
3)1'auteur de 1'infraction a fait usage de violences ou d'armes ;
4) l'auteur de 1'infraction exerce une fonction publique et que 1'infraction est commise
dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ;
5) 1'infraction est commise par un professionnel de la santé ou par une personne chargée
de lutter contre l'abus ou le trafic illicite des drogues ;
6) la drogue est livrée ou proposée, ou que son usage est facilité à un mineur, ou un
handicapé mental ou à une personne en cure de désintoxication ;
7) un mineur ou un handicapé mental a participé à 1'infraction ;
8) les drogues livrées provoquent la mort ou compromettent gravement la santé d'une ou
plusieurs personnes ;
9) l'infraction est commise dans un établissement pénitentiaire, un établissement
militaire, un établissement d'enseignement ou d'éducation, un établissement hospitalier
ou de soins, un centre des services sociaux ou dans d'autres lieux où des écoliers ou des
étudiants se livrent à des activités éducatives, sportives ou sociales, ou dans le voisinage
immédiat de ces établissements et de ces lieux, ainsi que dans les lieux de culte ;
10) l'auteur de l'infraction a ajouté aux drogues des substances qui aggravent les
dangers ;
11) l'auteur de l'infraction est en état de récidive.
Les condamnations prononcées à l'étranger sont prises en considération pour
l'établissement de la récidive.

328
Précis De Droit Pénal Général

CHAPITRE III CAUSES D'EXEMPTION ET D'ATTENUATION DES PEINES

Art. 65. Toute personne coupable de participation à une association ou à une entente en
vue de commettre l'une des infractions prévues aux articles 44 à 54 est exemptée de
peines si, ayant révélé l'existence de cette association ou entente à l'autorité judiciaire,
elle permet ainsi d'éviter la réalisation de l'infraction et/ou l'identification des autres
personnes en cause

Art. 66. Hormis les cas prévus à l'article précédent, toute personne auteur ou complice de
l'une des infractions énumérées dans cet article qui, avant toute poursuite permet ou
facilite l'identification des autres coupables ou après l'engagement des poursuites permet
ou facilite l'arrestation de ceux-ci, sera punie de la moitié des peines prévues aux articles
44 à 54.
Toutefois, ladite personne est également exemptée de l'amende et le cas échéant, des
mesures accessoires et peines complémentaires facultatives.

CHAPITRE IV PEINES ET MESURES ACCESSOIRES OU


COMPLEMENTAIRES

Art. 67. Dans tous les cas prévus aux articles 44 à 54, les tribunaux ordonnent la
confiscation des plantes et substances saisies, qui sont détruites ou remises à un
organisme habilité en vue de leur utilisation licite.

Art. 68. Dans tous les cas prévus aux articles 44 à 54, les tribunaux ordonnent la
confiscation des installations, matériels, équipements et autres biens mobiliers utilisés ou
destinés à être utilisés pour la commission de l'infraction à quelque personne qu'ils
appartiennent, à moins que les propriétaires n'établissent qu'ils en ignoraient l'utilisation
frauduleuse.

Art. 69. Dans tous les cas prévus aux articles 44 à 54, les tribunaux ordonnent la
confiscation des produits tirés de l'infraction, les biens mobiliers ou immobiliers dans
lesquels les produits sont transformés ou convertis et à concurrence de leur valeur, des
biens acquis légitimement auxquels lesdits produits sont mêlés, ainsi que des revenus et
autres avantages tirés de ces produits, des biens en lesquels ils sont transformés ou
investis ou des biens auxquels ils sont mêlés à quelque personne que ces produits et ces
biens appartiennent, à moins que les propriétaires n'établissent qu'ils ignoraient leur
origine frauduleuse.

Art. 70. Dans les cas prévus aux articles 44 à 58, les tribunaux peuvent prononcer :
1) l'interdiction définitive du territoire ou de séjour sur le territoire pour une durée de 10
ans ou plus contre tout étranger condamné ;
2)1'interdiction de séjour pour une durée de 2 à 5 ans si l'infraction est un délit et de 5 à
20 ans si l'infraction est un crime ;
3) l'interdiction de quitter le territoire national pour une durée de 6 mois à 3 ans ;

329
Précis De Droit Pénal Général

4)1'interdiction des droits civils, civiques et de famille pour une durée de 6 mois à 3 ans ;
5)1'interdiction de conduire des véhicules à moteur terrestre, fluvial et aérien et le retrait
des permis ou licence pour une durée de 6 mois à 3 ans,
6)1'interdiction définitive ou pour une durée de 6 mois à 3 ans d'exercer la profession à
l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ;
7) la confiscation de tout ou partie des biens d'origine licite du condamné quelle qu'en
soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.
Dans les cas prévus à l'alinéa premier de l'article 48, les tribunaux peuvent prononcer la
confiscation des ustensiles, matériels et meubles dont les lieux étaient garnis ou décorés.
Dans les cas prévus aux articles 44 à 53 et 56, les tribunaux peuvent prononcer la
fermeture pour une durée de 6 mois à 3 ans des hôtels, maisons meublées, pensions,
débits de boissons, restaurants, clubs, cercles, dancings, lieux de spectacles ou leurs
annexes, ou lieux quelconques ouverts au public ou utilisés par le public ou tout autre
lieu où ont été commises ces infractions par l'exploitant ou avec sa complicité.

Art. 71. Sans préjudice des dispositions prévoyant des peines plus sévères, quiconque
contrevient à l'une des interdictions énumérées à l'article 70 ou à la fermeture de
l'établissement prévue à l'alinéa 3 du même article est puni d'un emprisonnement de 6
mois à 3 ans et d'une amende de 1.000.000 à 3.000.000 de francs ou de l'une de ces deux
peines seulement.

Art. 72. Lorsqu'un toxicomane fait l'objet d'une condamnation pour l'une des inactions
prévues aux articles 44, 58, 60 à 62, le tribunal peut, en remplacement ou complément de
la peine, ordonner des mesures de traitement ou de soins appropriées à son état. Un texte
réglementaire fixe les modalités d'exécution de ces mesures.

CHAPITRE V DISPOSITIONS SPECIALES DE PROCEDURE

Section 2 Compétence des juridictions nationales


Art. 76. Les juridictions nationales sont compétentes pour connaître des infractions
prévues au titre III de la présente loi lorsque :
- l'infraction a été commise au Burkina Faso, ou que l'un des actes constitutifs de
l'infraction est accompli au Burkina Faso ;
- l'infraction a été commise par un burkinabè ou par une personne résidant habituellement
au Burkina Faso ;
- l'auteur de l'infraction se trouve au Burkina Faso et qu'il n'est pas extradé ;
- l'infraction a été commise à bord d'un aéronef immatriculé au Burkina Faso, ou d'un
navire battant pavillon burkinabè ;
- l'infraction a été commise à bord d'un navire que l'Etat du pavillon autorise à
arraisonner, à visiter et en cas de découverte de preuve de participation à un trafic illicite,
à prendre des mesures appropriées à l'égard du navire et des personnes se trouvant à bord,
sous réserve des accords et arrangements bilatéraux ou multilatéraux.

Art. 77. Dans les cas ci -dessous énumérés, les juridictions suivantes sont compétentes :

330
Précis De Droit Pénal Général

- la juridiction du lieu d'atterrissage de l'aéronef ou de l'accostage du navire, lorsque


l'infraction a été commise à bord d'un aéronef immatriculé au Burkina Faso, ou d'un
navire battant pavillon burkinabè ;
- la juridiction du lieu de débarquement de l'auteur présumé sur le territoire national
lorsque l'Etat du pavillon a autorisé le Burkina Faso à arraisonner un de ses navires
suspects de participation à un trafic de drogues
A défaut de toute autre juridiction compétente, celle de Ouagadougou sera déclarée
compétente.

Art. 78. Dans les cas des infractions visées aux articles 44 à 55, les drogues et
précurseurs sont immédiatement saisis. Il en est de même des installations, matériels,
équipements et autres biens mobiliers susceptibles d'être destinés à commettre
l'infraction, les sommes et valeurs mobilières susceptibles de provenir directement ou
indirectement de l'infraction, et sans que le secret bancaire puisse être invoqué, de tout
document de nature à faciliter la preuve de l'infraction et de la culpabilité de ses auteurs.

Section 4 Dispositions relatives à l'exécution des peines

Art. 87. L'interdiction de séjour prononcée à l'encontre d'un étranger en application de


l'article 70, entraîne de plein droit son expulsion du territoire national à l'expiration de sa
peine d'emprisonnement.

Art. 88. La contrainte par corps pour l'exécution des peines pécuniaires prononcées en
application des dispositions de la présente loi, est exercée conformément aux dispositions
du code de procédure pénale.

Art. 89. En cas de condamnation à une peine d'emprisonnement prononcée en


application des articles 44 à 58 et d'une durée égale ou supérieure à un an, le condamné
ne pourra en aucun cas bénéficier d'une suspension ou d'un fractionnement de la peine,
d'un placement à l'extérieur ou d'une corvée extérieure, de la semi-liberté, d'une
libération anticipée ou conditionnelle avant l'exécution des 2/3 de la peine.

Art. 90. Nonobstant les dispositions du code de procédure pénale, l'action publique
relative aux infractions visées aux articles 44 à 58 se prescrit par 10 ans à compter de la
découverte des faits.
Les peines prononcées pour la répression des infractions susvisées se prescrivent par 20
ans à compter du jour où elles deviennent définitives.

TITRE IV DISPOSITIONS FINALES

Art. 98. Des structures de lutte et/ou de coordination de lutte contre la drogue seront
créées par voie réglementaire.

331
Précis De Droit Pénal Général

Art. 99. La présente loi qui abroge toutes dispositions antérieures contraires sera
exécutée comme loi de l'Etat.

332
Précis De Droit Pénal Général

IV- EXTRAITS D’ARTICLES DU CODE CIMA

Code des assurances des Etats membres de la Conférence interafricaine des


marchés d’assurances (CIMA) (J.O.BF. spécial n° 1 du 27 juin 1995, p. 2), ensemble
ses modifications

LIVRE I LE CONTRAT

TITRE I REGLES COMMUNES AUX ASSURANCES DE DOMMAGES NON


MARITIMES
ET AUX ASSURANCES DE PERSONNES

CHAPITRE I DISPOSITIONS GENERALES

Art. 1er. Domaine d'application. Les titres I, II et III du présent livre ne concernent
que les assurances terrestres. Ils ne sont applicables ni aux assurances maritimes, ni aux
assurances fluviales, ni aux réassurances conclues entre assureurs et réassureurs. Les
opérations d'assurance crédit ne sont pas régies par les titres mentionnés au premier
alinéa.

Art. 2. Dispositions impératives. Ne peuvent être modifiées par convention les


prescriptions des titres I, II et III du présent livre, sauf celles qui donnent aux parties
une simple faculté et qui sont limitativement énumérées dans les articles 4 alinéa 2, 5, 9,
10, 35 à 38, 42, 45, 46, 50, 51, 53, 58 et 72.

Art. 3. Souscription de contrats non libellés en francs CFA - Interdiction. Il est


interdit aux personnes physiques résidant sur le territoire d'un Etat membre de la CIMA
et aux personnes morales pour leurs établissements situés sur le territoire d'un Etat
membre de la CIMA de souscrire des contrats d'assurance directe ou de rente viagère
non libellés en F.CFA, sauf autorisation du ministre en charge des Assurances de l'Etat
membre.
Sont nuls de plein droit les contrats souscrits à dater de l'application du présent code
en infraction aux dispositions du présent article.
Les sociétés d'assurance qui bénéficient d'une dérogation pour libeller des contrats en
devises sont assimilées à des détenteurs agréés de devises et doivent effectuer auprès
des banques centrales une déclaration de leurs engagements et avoirs en devises.

CHAPITRE IV SANCTIONS

Art. 333. Infractions à l'article 329. Les infractions aux dispositions de l'article 329
seront punies d'un emprisonnement de six mois à deux ans et d'une amende de 300.000 à
3.000.000 FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement.

Art. 333-1. Sanctions. Sont passibles d'un emprisonnement de huit à quinze jours et
d'une amende de 18.000 à 360.000 FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement les

333
Précis De Droit Pénal Général

dirigeants d'entreprise qui méconnaissent les obligations ou interdictions résultant des


articles 310 alinéa 3, 303, 304, 306, 329-2, 329-5,330-35 alinéa 1, 334-1, 335, 401, 404.
En cas de récidive la peine d'emprisonnement pourra être portée à un mois et celle
d'amende de 360.000 à 720.000 F.CFA.

Art. 333-2. Dirigeant d'entreprise, notion. Pour l'application des pénalités énumérées
au présent chapitre, sont considérés comme dirigeants d'entreprise le président directeur
général, le président, les administrateurs, les directeurs généraux adjoints, les directeurs,
les membres du Conseil de surveillance et du directoire, les gérants et tout dirigeant de
fait d'une entreprise d'un Etat membre, et, dans le cas d'une entreprise étrangère, le
mandataire général.

Art. 333-3. Infractions à l'article 308. (Modifié par décision du Conseil des ministres
du 04/04/2000). Toute infraction aux dispositions de l'article 308 sera punie d'une
amende de 50 % du montant des primes émises à l'extérieur ou cédée en réassurance à
l’étranger au-dessus du plafond fixé à l’article 308.
En cas de récidive l’amende sera portée à 100 % de ce même montant. Le jugement sera
publié aux frais des condamnés ou des entreprises civilement responsables.

Art. 333-4. Banqueroute. Si la situation financière de l'entreprise dissoute par retrait


total de l'agrément est telle que celle-ci n'offre plus de garanties suffisantes pour
l'exécution de ses engagements, seront punis des peines de la banqueroute simple le
président, les administrateurs, directeurs généraux, membres du directoire, directeurs,
gérants ou liquidateurs de l'entreprise quelle qu'en soit la forme et, d'une manière
générale, toute personne ayant directement ou par personne interposée administré, géré
ou liquidé l'entreprise, sous couvert ou aux lieu et place de ses représentants légaux, qui
ont, en cette qualité, et de mauvaise foi :
1° soit consommé des sommes élevées appartenant à l'entreprise en faisant des
opérations de pur hasard ou fictives ;
2° soit, dans l'intention de retarder le retrait d'agrément de l'entreprise, employé des
moyens ruineux pour se procurer des fonds ;
3° soit, après le retrait d'agrément de l'entreprise, payé ou fait payer irrégulièrement un
créancier ;
4° soit fait contracter par l'entreprise, pour le compte d'autrui, sans qu'elle ne reçoive
de valeurs en échange, des engagements jugés trop importants eu égard à sa situation
lorsqu'elle les a contractés ;
5° soit tenu ou fait tenir, ou laissé tenir irrégulièrement la comptabilité d'entreprise ;
6° soit, en vue de soustraire tout ou partie de leur patrimoine aux poursuites de
l'entreprise en liquidation ou à celles des associés ou créanciers sociaux, détourné ou
dissimulé, tenté de détourner ou de dissimuler une partie de leurs biens ou qui se sont
frauduleusement reconnus débiteurs des sommes qu'ils ne devaient pas.
Seront punies des peines de la banqueroute frauduleuse les personnes mentionnées qui
ont frauduleusement :
1° ou soustrait des livres de l'entreprise ;

334
Précis De Droit Pénal Général

2° ou détourné ou dissimulé une partie de son actif ;


3° ou reconnu l'entreprise débitrice de sommes qu'elle ne devait pas, soit dans les
écritures, soit par des actes publics ou des engagements sous signature privée, soit dans
le bilan.

Art. 333-5. Liquidateur, interdictions. Il est interdit au liquidateur et à tous ceux qui
ont participé à l'administration de la liquidation d'acquérir personnellement, soit
directement, soit indirectement, à l'amiable ou par vente de justice, tout ou partie de
l'actif mobilier ou immobilier de l'entreprise en liquidation.
Sera puni des peines sanctionnant l'abus de confiance tout liquidateur ou toute personne
ayant participé à l'administration de la liquidation qui, en violation des dispositions de
l'alinéa précédent, se sera rendu acquéreur pour son compte, directement ou
indirectement, des biens de l'entreprise.
Sera puni des mêmes peines tout liquidateur qui se sera rendu coupable de malversation
dans sa gestion.

Art. 333-6. Condamnations, publications. Tous arrêts et jugements de condamnation


rendus en vertu des articles 333-4 et 333-5 deuxième alinéa, seront, aux frais des
condamnés, affichés et publiés dans un journal habilité à recevoir les annonces légales.
S'il y a condamnation, le Trésor Public ne pourra exercer son recours contre le débiteur
qu'après la clôture de la liquidation.

Art. 333-7. Frais de poursuite, charge. Les frais de la poursuite intentée par un
créancier seront supportés, s'il y a condamnation, par le Trésor Public, sauf recours
contre le débiteur dans les conditions prévues à l'article 333-6 et, s'il y a relaxe, par le
créancier poursuivant.

Art. 333-8. Sanctions en cas de liquidation des succursales des entreprises


étrangères. Les dispositions des articles 333-4 à 337-7 sont applicables lors de la
liquidation de l'actif et du passif du bilan spécial des opérations d'une entreprise étrangère
dont le siège social n'est pas sur le territoire d'un Etat membre.

Art. 333-9. Sanctions des règles relatives à la constitution, et aux souscriptions.


Seront punis d'un emprisonnement de un à cinq ans et d'une amende de 360.000 à
7.200.000 F.CFA ou de l'une de ces deux peines seulement ceux qui sciemment :
1° dans la déclaration prévue pour la validité de la constitution de l'entreprise, auront
fait état de souscriptions de contrats qu'ils savaient fictives, ou auront déclaré des
versements de fonds qui n'ont pas été mis définitivement à la disposition de l'entreprise ;
2° par simulation de souscriptions de contrats ou par publication ou allégation de
souscriptions qui n'existent pas ou de tous autres faits faux, auront obtenu ou tenté
d'obtenir des souscriptions de contrats ;
3° pour provoquer des souscriptions de contrats, auront publié les noms de personnes
désignées contrairement à la vérité comme étant ou devant être attachées à l'entreprise à
un titre quelconque ;

335
Précis De Droit Pénal Général

4° auront procédé à toutes autres déclarations ou dissimulations frauduleuses dans tous


documents produits à la Commission de contrôle des assurances, à la direction nationale
des assurances ou portés à la connaissance du public.

Art. 333-10. Sanctions des règles de fonctionnement. Seront punis d'un


emprisonnement de un à cinq ans et d'une amende de 360.000 à 7.200.000 F.CFA, ou de
l'une de ces deux peines seulement, le président, les administrateurs, les gérants ou les
directeurs généraux des entreprises non commerciales mentionnées à l'article 300 qui :
1° sciemment, auront publié ou présenté à l'assemblée générale un bilan inexact en vue
de dissimuler la véritable situation de l'entreprise ;
2° de mauvaise foi, auront fait, des biens ou du crédit de l'entreprise, un usage qu'ils
savaient contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une
autre entreprise dans laquelle ils étaient intéressés directement ou indirectement ;
3° de mauvaise foi, auront fait des pouvoirs qu'ils possédaient ou des voix dont ils
disposaient en cette qualité un usage qu'ils savaient contraire aux intérêts de l'entreprise,
à des fins personnelles ou pour favoriser une autre entreprise dans laquelle ils étaient
intéressés directement ou indirectement.
Les dispositions du présent article seront applicables à toute personne qui, directement ou
par personne interposée, aura, en fait, exercé la direction, l'administration ou la gestion
desdites entreprises sous le couvert ou aux lieu et place de leurs représentants légaux.

Art. 333-11. Sanction des règles relatives à la liquidation. (Modifié par décision du
Conseil des ministres du 04/04/2000). En cas de liquidation effectuée dans les conditions
prévues à l'article 325-1, les dispositions suivantes sont applicables :
1° Si la situation financière de l'entreprise dissoute à la suite du retrait total de
l'agrément fait apparaître une insuffisance d'actif par rapport au passif qui doit être réglé
au cours de la liquidation, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à
cette insuffisance d'actif, décider à la demande du liquidateur ou même d'office que les
dettes de l'entreprise seront supportées en tout ou partie, avec ou sans solidarité, par tous
les dirigeants de droit ou de fait, rémunérés ou non, ou par certains d'entre eux.
L'action se prescrit par trois ans à compter du dépôt au greffe du huitième rapport
trimestriel du liquidateur ;
2° Les dirigeants qui se seront rendus coupables des agissements mentionnés à l'article
333-4 pourront faire l'objet des sanctions prévues en cas de faillite personnelle.

Art. 333-12. Sanction des règles relatives aux clauses types et à la contribution et à
la non production de documents aux autorités de contrôle. Toute infraction aux
dispositions des articles 302 et 307 sera punie d'une amende de 180.000 à
360.000 F.CFA. En ce qui concerne les infractions aux dispositions de l'article 302,
l'amende sera prononcée pour chacune des infractions constatées sans que le total des
amendes encourues puisse excéder 3.000.000 F.CFA.
Les mêmes sanctions sont applicables en cas de non production de documents à la
Commission de contrôle et aux Directions nationales d'assurance.

336
Précis De Droit Pénal Général

Art. 333-13. Infractions aux règles relatives à la forme des entreprises, à la


publicité, à l'agrément, et aux procédures de sauvegarde. Toute infraction aux
dispositions des articles 301, 304 alinéa 3, 326 et 322 est punie d'une peine
d'emprisonnement de un mois à cinq ans et d'une amende de 360.000 à 3.600.000 F.CFA
ou de l'une de ces deux peines seulement.

Art. 333-14. Délit d'entrave – sanctions. Tout obstacle mis à l'exercice des missions de
la Commission de contrôle des assurances ou des commissaires contrôleurs des
assurances est passible d'un emprisonnement de un mois à six mois et d'une amende de
360.000 à 1.000.000 F.CFA ou de l'une de ces deux peines seulement.

LIVRE V
AGENTS GENERAUX, COURTIERS ET AUTRES INTERMEDIAIRES
D'ASSURANCE ET DE CAPITALISATION

TITRE I REGLES COMMUNES AUX INTERMEDIAIRES D'ASSURANCE

CHAPITRE I PRINCIPES GENERAUX

Art. 500. Est considérée comme présentation d'une opération pratiquée par les
entreprises mentionnées à l'article 300 le fait, pour toute personne physique ou morale,
de solliciter ou de recueillir la souscription d'un contrat d'assurance ou l'adhésion à un
tel contrat ou d'exposer oralement ou par écrit à un souscripteur ou adhérent éventuel,
en vue de cette souscription ou adhésion, les conditions de garantie d'un tel contrat.

Art. 501. Personnes habilitées pour la présentation. Les opérations pratiquées par
les entreprises mentionnées à l'article 300 ne peuvent être présentées que par les
personnes suivantes :
1° les personnes physiques et sociétés immatriculées au registre du commerce pour le
courtage d'assurance agrées par le ministre en charge du secteur des Assurances et,
dans ces sociétés, les associés et les tiers qui ont le pouvoir de gérer ou
d'administrer ;
2° les personnes physiques ou morales titulaires d'un mandat d'agent général
d'assurance ou chargées à titre provisoire, pour une période de deux ans au plus non
renouvelable, des fonctions d'agent général d'assurance ;
3° les personnes physiques salariées commises à cet effet :
a) soit par une entreprise d'assurance ;
b) soit par une personne ou société mentionnée au 1° ci-dessus.
4° les personnes physiques non salariées, mandatées et rémunérées à la commission
exclusivement par les sociétés d’assurances réalisant des opérations dans les
branches 20 à 23 de l’article 328.

Art. 502. Personnel d'une entreprise d'assurance : présentation. Les opérations


pratiquées par une entreprise mentionnée à l'article 300 peuvent être présentées par les
membres du personnel salarié de cette entreprise ou d'une personne physique ou morale
mentionnée au 1° ou au 2° de l'article 501 :
1° au siège de cette entreprise ou personne ;

337
Précis De Droit Pénal Général

2° dans tout bureau de production de ladite entreprise ou personne dont le responsable


remplit les conditions de capacité professionnelle exigées des courtiers ou des
agents généraux d'assurances.

Art. 503. Assurances individuelles – Dérogations. Les opérations ci-après définies


peuvent être présentées, sous la forme aussi bien de souscriptions d'assurances
individuelles, que d'adhésions à des assurances collectives, par les personnes
respectivement énoncées dans chaque cas :
1° assurances contre les risques de décès, d'invalidité, de perte de l'emploi ou de
l'activité professionnelle souscrites expressément et exclusivement en vue de servir
de garantie au remboursement d'un prêt : le prêteur ou les personnes concourant à
l'octroi de ce prêt ;
2° assurances de transport de marchandises ou facultés par voie fluviale : les courtiers
de fret ;
3° assurances couvrant à titre principal les frais des interventions d'assistance liées au
déplacement et effectuées par des tiers : les dirigeants, le personnel des agences de
voyages, des banques et établissements financiers et leurs préposés ;
4° les banques et établissements financiers peuvent présenter des opérations
d'assurance vie et de capitalisation dès lors que la personne habilitée à présenter ces
opérations est titulaire de la carte professionnelle visée à l'article 510.

Art. 504. Assurances collectives – Dérogations. Les adhésions à des assurances de


groupe définies à l'article 95 du livre I du présent code peuvent être présentées par le
souscripteur, ses préposés ou mandataires ainsi que les personnes physiques ou morales
désignées expressément à cet effet dans le contrat d'assurance de groupe.

Art. 505. Responsabilité de l'assureur du fait de ses mandataires. Lorsque la


présentation d'une opération d'assurance est effectuée par une personne habilitée selon
les modalités prévues à l'article 501, l'employeur ou mandant est civilement responsable
du dommage causé par la faute, l'imprudence ou la négligence de ses employés ou
mandataires agissant en cette qualité, lesquels sont considérés, pour l'application du
présent article, comme des préposés, nonobstant toute convention contraire.

CHAPITRE II CONDITIONS D'HONORABILITE

Art. 506. Conditions d'honorabilité. Ne peuvent exercer la profession d'agent


général ou de courtier d'assurances :
1° les personnes ayant fait l'objet d'une condamnation pour crime ou délit ;
2° les personnes ayant fait l'objet d'une mesure de faillite personnelle ou autre mesure
d'interdiction relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises ;
3° les personnes ayant fait l'objet d'une mesure de destitution de fonction d'officier
ministériel en vertu d'une décision de justice.
Les condamnations et mesures visées au précédent alinéa entraînent pour les
mandataires et employés des entreprises, les agents généraux, les courtiers et entreprises
de courtage, l'interdiction de présenter des opérations d'assurance.
Ces interdictions peuvent également être prononcées par les tribunaux à l'encontre de
toute personne condamnée pour infraction à la législation ou à la réglementation des
assurances.

338
Précis De Droit Pénal Général

Art. 507. Caractère limitatif - Conditions d'honorabilité. Les opérations pratiquées


par les entreprises mentionnées à l'article 300 ne peuvent être présentées par des
personnes étrangères aux catégories définies aux 1° à 4° de l'article 501 que dans les cas
et conditions fixées par les articles 502 à 504 sous réserve que ces personnes ne soient
frappées d'aucune des incapacités prévues à l'article 506.

CHAPITRE III CONDITIONS DE CAPACITE

Art. 508. Conditions de capacité. Toute personne physique mentionnée à l'article 501
doit, sous réserve des dérogations prévues aux articles 503 et 504 :
1° avoir la majorité légale dans l'Etat de présentation de l'opération ;
2° être ressortissante d'un Etat membre de la CIMA;
3° remplir les conditions de capacité professionnelle prévues, pour chaque catégorie
et fixées par la Commission de contrôle après avis des instances professionnelles
représentatives des entreprises d'assurance ;
4° ne pas être frappée d'une des incapacités prévues à l'article 506.
Pour exercer l'une des professions ou activités énumérées au 1° de l'article 501, toute
personne mentionnée au premier alinéa du présent article doit pouvoir, à tout moment,
justifier qu'elle remplit les conditions exigées par ledit alinéa.
Les contrats d'assurance ou de capitalisation souscrits en infraction aux dispositions de
l'article 501 et du présent article ainsi que les adhésions à de tels contrats obtenues en
infraction à ces dispositions peuvent, pendant une durée de deux ans à compter de cette
souscription ou adhésion, être résiliés à toute époque par le souscripteur ou adhérent,
moyennant préavis d'un mois au moins. Dans ce cas, l'assureur n'a droit qu'à la partie de
la prime correspondant à la couverture du risque jusqu'à la résiliation et il doit restituer
le surplus éventuellement perçu.

Art. 509. Contrôle des conditions de capacité du personnel. Toute personne qui,
dans une entreprise mentionnée à l'article 300 du présent code ou une entreprise de
courtage ou une agence générale, a sous son autorité des personnes chargées de
présenter des opérations d'assurance ou de capitalisation, est tenue de veiller à ce que
celles-ci remplissent les conditions prévues aux articles 501 et 508.
Toute personne qui, dans les entreprises d'assurance, remet à un agent général
d'assurance ou à une personne chargée des fonctions d'agent général d'assurance un
mandat doit préalablement avoir fait au ministre en charge du secteur des Assurances la
déclaration prescrite à l'article 517 relative à l'intéressé et avoir vérifié qu'il ressort des
pièces qui lui sont communiquées que celui-ci remplit les conditions d'âge, de
nationalité et de capacité professionnelle requises par le premier alinéa de l'article 508.

Art. 510. Documents justificatifs. Toute personne physique mentionnée aux 2° et 4°


de l'article 501 ainsi que les personnes visées au 4° de l'article 503 doivent produire une
carte professionnelle délivrée par le ministre en charge du secteur des Assurances. La
validité de cette carte est limitée à deux ans renouvelables. Elle est conforme à un
modèle défini par la Commission de contrôle.

339
Précis De Droit Pénal Général

Art. 511. Carte professionnelle – Retrait. Le ministre qui a délivré la carte peut la
retirer pour non respect des dispositions prévues aux articles 501, 503 et 508. La
décision est immédiatement exécutoire et peut faire l'objet, par tout intéressé, d'un
recours devant le tribunal compétent.
Toute modification aux conditions de capacité prévues à l'article 508 ainsi que tout
retrait de mandat doivent être notifiés au ministre en charge du secteur des Assurances.
Lorsque, soit de sa propre initiative, soit sur l'injonction du ministre en charge du
secteur des Assurances, la personne qui a délivré le mandat veut le retirer, elle le notifie
à son titulaire par lettre recommandée. Cette mesure prend effet à la date de l'envoi de
ladite lettre.

Art. 512. Documents. La capacité professionnelle prévue par l'article 508 se justifie
par la présentation du diplôme requis, du livret de stage ou de l'attestation de fonctions
défini à l'article 513.

Art. 513. Livret de stage - Attestation de fonctions. Le livret de stage doit être est
conforme à un modèle fixé par la Commission de contrôle.
Les signatures apposées sur le livret par les personnes ou chefs des entreprises auprès
de qui un stage a été effectué valent certification des indications du livret concernant ce
stage.
Le livret doit être remis dans le plus bref délai à son titulaire. L'attestation de fonctions
doit être établie, conformément à un modèle fixé par la Commission, par la personne ou
l'entreprise auprès de laquelle ont été exercées les fonctions requises.

Art. 514. Courtiers et agents généraux d'assurances. Les courtiers d'assurances, les
associés ou tiers qui gèrent ou administrent une société de courtage d'assurances et les
agents généraux d'assurances doivent justifier préalablement à leur entrée en fonction :
a) soit de la possession d'un diplôme mentionné sur une liste fixée par la Commission
de contrôle après avis des instances professionnelles représentatives des compagnies
d'assurance, ainsi que de l'accomplisse- ment d'un stage professionnel ;
b) soit de l'exercice à temps complet, pendant deux ans au moins, dans les services
intérieurs ou extérieurs d'une entreprise d'assurance, d'un courtier ou d'une société de
courtage d'assurance de
fonctions relatives à la production ou à l'application de contrats d'assurance, ainsi que
de l'accomplissement d'un stage professionnel, soit de l'exercice à temps complet
pendant un an au moins d'une activité en qualité de cadre ou de dirigeant dans ces
mêmes entreprises ;
c) soit de l'exercice, pendant deux ans au moins, en qualité de cadre ou de chef
d'entreprise, de fonctions de responsabilité dans une entreprise industrielle ou
commerciale, ainsi que de l'accomplissement d'un stage professionnel ;
d) soit de l'exercice pendant deux ans de fonctions de responsabilités en tant que cadre
dans une administration de contrôle des assurances.

Art. 515. Mandataires salariés ou non salariés. Les intermédiaires mentionnés au 3°


et 4° de l'article 501, à l'exception des personnes physiques salariées qui
exercent les fonctions de responsable de bureau de production ou ont la charge d'animer
un réseau de production, doivent justifier, préalablement à leur entrée en fonction :

340
Précis De Droit Pénal Général

a) soit de la possession d'un diplôme mentionné sur une liste fixée par la Commission
de contrôle après avis des instances professionnelles représentatives des entreprises
d'assurance ainsi que de l'accomplissement d'un stage professionnel ;
b) soit de l'exercice à temps complet pendant six mois au moins de fonctions relatives
à la production ou à l'application de contrats d'assurances, dans les services intérieurs ou
extérieurs d'une entreprise d'assurance, d'un courtier ou d'une société de courtage
d'assurance, d'un agent général d'assurance, ainsi que de l'accomplissement d'un stage
professionnel.

Art. 516. Stages professionnels. Les stages professionnels mentionnés aux articles
514 et 515 doivent être effectués en une seule période. Ils comportent une période
d'enseignement théorique et une période de formation pratique dans un institut africain
ou de la zone franc dispensant un enseignement spécifique en matière d'assurance.
L'enseignement théorique doit être dispensé par des professionnels qualifiés,
préalablement à la formation pratique dont la durée ne peut excéder la moitié de la
durée totale du stage professionnel.
La formation pratique est effectuée sous le contrôle permanent et direct de personnes
habilitées à présenter des opérations d'assurances ou de capitalisation.
Les stages professionnels peuvent être effectués
auprès d'une entreprise d'assurance, d'un courtier ou d'une société de courtage
d'assurances, d'un agent général d'assurances ou d'un centre de formation choisi par les
organisations représentatives de la profession.
Les stages professionnels doivent avoir une durée raisonnable et suffisante sans
pouvoir être inférieure à cinq cents heures.

Art. 517. Déclaration au ministre en charge du secteur des Assurances. En vue de


permettre de vérifier les conditions d'honorabilité telles qu'elles résultent des
dispositions de l'article 506, une déclaration doit être faite au ministre en charge du
secteur des Assurances de l'Etat de présentation de l'opération d'assurance dans les
conditions prévues aux articles 518 et 520 concernant toute personne physique entrant
dans une des catégories définies aux 1° à 3° de l'article 501 avant que cette personne ne
présente des opérations d'assurances telles que définies à l'article 500.

Art. 518. Déclaration au ministre en charge du secteur des Assurances –


Déclarant. L'obligation de souscrire la déclaration au ministre en charge du secteur des
Assurances incombe :
1° en ce qui concerne les courtiers d'assurances, les associés ou tiers ayant pouvoir de
gérer administrer une société de courtage d'assurances, aux intéressés eux-mêmes ;
2° en ce qui concerne les agents généraux d'assurances, aux entreprises qui se
proposent de les mandater en cette qualité ;
3° en ce qui concerne les intermédiaires mentionnés au 3° et 4° de l’article 501 à
l'entreprise ayant la qualité d'employeur ou mandant.

Art. 519. Déclaration – Formulaire. La déclaration est formulée à partir d'une fiche
établie selon un modèle fixé par la Commission de contrôle.

Art. 520. Déclaration modificative. Toute modification des indications incluses dans
la déclaration prévue à l'article 518, toute cessation de fonctions d'une personne ayant

341
Précis De Droit Pénal Général

fait l'objet d'une déclaration, tout retrait du mandat doivent être déclarés au ministre en
charge du secteur des Assurances désigné à l'article 517 par la personne ou entreprise à
qui incombe l'obligation d'effectuer la déclaration prévue à l'article 518.

Art. 521. Contrôle du ministre en charge du secteur des Assurances. Il incombe au


ministre qui a reçu une déclaration prévue à l'article 518 de s'assurer que la personne qui
a fait l'objet de cette déclaration n'est pas frappée ou ne vient pas à être frappée d'une
des incapacités prévues à l'article 508 et, lorsqu'il constate une telle incapacité, de le
notifier dans le plus bref délai :
1° si elle concerne un courtier ou un associé ou un tiers ayant, dans une société de
courtage d'assurance, le pouvoir de gérer ou administrer, au greffier compétent pour
recevoir l'immatriculation au registre du commerce pour le courtage d'assurance ;
2° si elle concerne un agent général d'assurances, à l'entreprise déclarante ;
3° si elle concerne un intermédiaire mentionné au 3° et 4° de l'article 501 au déclarant.
Le ministre en charge du secteur des Assurances peut procéder au retrait de la carte
professionnelle.

Art. 522. Intermédiaire - Mention nominative. Le nom de toute personne ou société


mentionnée à l'article 501 par l'entremise de laquelle a été souscrit un contrat
d'assurance ou une adhésion à un tel contrat doit figurer sur l'exemplaire de ce contrat
ou de tout document équivalent, remis au souscripteur ou adhérent.

Art. 523. Documents commerciaux – Mentions. Toute correspondance ou publicité


émanant d'une personne ou société mentionnée au 1° de l'article 501, agissant en cette
qualité, doit comporter, dans son en-tête, le nom de cette personne ou la raison sociale
de cette société, suivi des mots "courtier d'assurances" ou "société de courtage
d'assurances". Toute publicité, quelle qu'en soit la forme, émanant d'une telle personne
ou société et concernant la souscription d'un contrat auprès d'une entreprise d'assurance
ou l'adhésion à un tel contrat ou exposant, en vue de cette souscription ou adhésion, les
conditions de garantie de ce contrat doit indiquer le nom de ladite entreprise.
Toute correspondance ou publicité émanant de personnes autres que celles
mentionnées au 1° de l'article 501 et tendant à proposer la souscription d'un contrat
auprès d'une entreprise d'assurance déterminée ou l'adhésion à un tel contrat ou à
exposer, en vue de cette souscription ou adhésion, les conditions de garantie de ce
contrat doit indiquer le nom et la qualité de la personne qui fait cette proposition ainsi
que le nom ou la raison sociale de ladite entreprise.

TITRE II GARANTIE FINANCIERE

CHAPITRE UNIQUE

Art. 524. Garantie financière. (Modifié par décision du Conseil des ministres du
20/04/1995). Tout agent général, courtier ou société de courtage est tenu à tout moment
de justifier d'une garantie financière.
Cette garantie ne peut résulter que d'un engagement de caution pris par un
établissement de crédit habilité à cet effet ou une entreprise d'assurance agréée.

342
Précis De Droit Pénal Général

Art. 525. Montant. Le montant de la garantie financière prévue à l'article 524 doit
être au moins égal à la somme de 10.000.000 FCFA et ne peut être inférieur au double
du montant moyen mensuel des fonds perçus par l'agent général, le courtier ou la société
de courtage d'assurances, calculé sur la base des fonds perçus au cours des douze
derniers mois précédant le mois de la date de souscription ou de reconduction de
l'engagement de caution.
Le calcul du montant défini à l'alinéa précédent tient compte du total des fonds confiés
à l'agent général, au courtier ou à la société de courtage d'assurances, par les assurés, en
vue d'être versés à des entreprises d'assurance ou par toute personne physique ou
morale, en vue d'être versés aux assurés.

Art. 526. Engagement de caution - Durée - Exigences du garant – Attestation.


L'engagement de caution est pris pour la durée de chaque année civile ; il est reconduit
tacitement au 1er janvier.
Le montant de la garantie est révisé à la fin de chaque période annuelle.
Le garant peut exiger la communication de tous registres et documents comptables
qu'il estime nécessaire à la détermination du montant de la garantie.
Le garant délivre à la personne garantie une attestation de garantie financière. Cette
attestation est renouvelée annuellement lors de la reconduction de l'engagement de
caution.

Art. 527. Mise en oeuvre – Paiement. La garantie financière est mise en oeuvre sur la
seule justification que l'agent, le courtier ou la société de courtage d'assurances garanti
est défaillant sans que le garant puisse opposer au créancier le bénéfice de discussion.
La défaillance de la personne garantie est acquise un mois après la date de réception
par celle-ci d'une lettre recommandée exigeant le paiement des sommes dues ou d'une
sommation de payer, demeurée sans effet. Elle est également acquise par un jugement
prononçant la liquidation judiciaire.
Le paiement est effectué par le garant à l'expiration d'un délai de trois mois à compter
de la présentation de la première demande écrite.
Si d'autres demandes sont reçues pendant ce délai, une répartition a lieu au marc le
franc dans le cas où le montant total des demandes excéderait le montant de la garantie.

Art. 528. Cessation. La garantie cesse en raison de la dénonciation du contrat à son


échéance.
Elle cesse également par le décès ou la cessation d'activité de la personne garantie ou,
s'il s'agit d'une personne morale, par la dissolution de la société.
En aucun cas la garantie ne peut cesser avant l'expiration d'un délai de trois jours
francs suivant la publication à la diligence du garant d'un avis dans deux journaux
habilités à recevoir des annonces légales, dont un quotidien, paraissant ou à défaut,
distribués dans le pays où est établi l'agent, le courtier ou la société de courtage
d'assurances.
Toutefois le garant n'accomplit pas les formalités de publicité prescrites au présent
article si la personne garantie apporte la preuve de l'existence d'une nouvelle garantie
financière prenant la suite de la précédente sans interruption.
Dans tous les cas prévus aux alinéas précédents, la cessation de garantie n'est pas
opposable au créancier, pour les créances nées pendant la période de validité de
l'engagement de caution.

343
Précis De Droit Pénal Général

TITRE III REGLES SPECIFIQUES RELATIVES


AUX AGENTS GENERAUX ET AUX COURTIERS

CHAPITRE I AGENTS GENERAUX

Art. 529. Mandat – Cessation. Le contrat passé entre les entreprises d'assurance et
leurs agents généraux, sans détermination de durée, peut toujours cesser par la volonté
d'une des parties contractantes.
Néanmoins, la résiliation du contrat par la volonté d'un seul des contractants peut
donner lieu à des dommages-intérêts.
Les parties ne peuvent renoncer à l'avance au droit éventuel de demander des
dommages-intérêts en vertu des dispositions ci-dessus.

CHAPITRE II COURTIERS D'ASSURANCE


ET SOCIETES DE COURTAGE D'ASSURANCE

Art. 530. Autorisation – Liste. (Modifié par décision du Conseil des ministres du
20/04/1995). L'exercice de la profession de courtier est soumis à l'agrément du ministre
en charge du secteur des Assurances de l'Etat dans lequel l'autorisation est demandée.
Le ministre établit et met à jour une liste des courtiers et la transmet à la Commission de
contrôle et aux compagnies agréées sur le territoire de l'Etat.
Il est interdit aux entreprises d'assurance de souscrire des contrats d'assurance par
l'intermédiaire de courtiers non autorisés sous peine des sanctions prévues à l'article
312.

Art. 531. Statut. Les courtiers d'assurances sont des commerçants sans qu'il y ait lieu
de distinguer, suivant que les actes qu'ils accomplissent sont civils ou commerciaux.
Ils sont soumis comme tels à toutes les obligations imposées aux commerçants.

Art. 532. Incompatibilités. Indépendamment des dispositions légales ou


réglementaires régissant l'exercice de certaines professions ou portant statut de la
fonction publique, sont incompatibles avec l'exercice de la profession du courtier, les
activités exercées par :
1° les administrateurs, dirigeants, inspecteurs et employés des sociétés d'assurances ;
2° les constructeurs d'automobiles et leurs filiales, les garagistes concessionnaires,
agents de vente ou réparateurs de véhicules automobiles, les entreprises et agents
d'entreprises de crédit automobile ;
3° les entrepreneurs de travaux publics et de bâtiment, les architectes ;
4° les représentants de sociétés industrielles et commerciales ;
5° les experts comptables, les conseillers juridiques et fiscaux et les experts
d'assurances ;
6° les agents immobiliers, les administrateurs de biens, les mandataires en vente ou
location de fonds de commerce, les administrateurs et agents de sociétés de
construction ou de promotions immobilières ;

344
Précis De Droit Pénal Général

7° les personnes physiques ou morales appartenant à une entreprise quelconque pour


la négociation ou la souscription des contrats d'assurances de cette entreprise ou de
ses filiales.
Il est interdit aux agents généraux de gérer et d'administrer, directement ou par
personne interposée, un cabinet de courtage et plus généralement un intérêt quelconque
dans un tel cabinet.
La même interdiction s'applique par réciprocité aux courtiers et sociétés de courtage
d'assurance.
Il est interdit aux agents généraux et courtiers d'assurance d'exercer toute autre activité
industrielle et commerciale, sauf autorisation du ministre en charge du secteur des
Assurances.

Art. 533. Autorisation – Documents. La demande d'autorisation est instruite par les
Services du ministre en charge du secteur des Assurances après dépôt par l'intéressé de
l'original ou de la copie certifiée conforme de tous les documents et pièces ci-après :
a) pour les personnes physiques :
1° acte de naissance ou jugement supplétif tenant lieu datant de moins de six mois ;
2° extrait de casier judiciaire datant de moins de trois mois ;
3° diplômes et attestations professionnelles mentionnées au titre I ci-dessus ;
4° récépissé d'inscription au registre du commerce ;
5° fiche de déclaration, visée par le Procureur de la République près le Tribunal de
Première Instance, des personnes qui seront habilitées à présenter des opérations
d'assurance au public ;
6° certificat de nationalité ;
7° pour les étrangers ressortissants d'un Etat membre de la CIMA: une carte de
résident, en plus des pièces ci-dessus. Les ressortissants des Etats tiers dont les pays
d'origine accordent en la matière la réciprocité aux Etats de la CIMA, doivent
fournir les documents et pièces sus-mentionnés ;
8° tout autre document jugé nécessaire.

b) pour les personnes morales :


1° statuts de la société ;
2° certificat notarié ou du commissaire aux comptes indiquant le montant du capital
social libéré ;
3° tous documents et pièces figurant aux 4°, 5° du paragraphe a) ci-dessus ;
4° liste des actionnaires ou porteurs de parts avec indication de leur nationalité et
montant de leur participation ;
5° liste, selon la forme de la société, des administrateurs, directeurs généraux et
gérants avec indication de leur nationalité ;
6° pour les présidents, directeurs généraux, gérants ou représentants légaux de la
société : pièces figurant aux 1°, 2°, 3° et 6° du paragraphe a) ci-dessus ;
7° comptes prévisionnels détaillés pour les 3 premiers exercices ;
8° tout autre document jugé nécessaire.
Les personnes physiques et morales doivent justifier d'un établissement permanent sur
le territoire d'exercice de l'activité.

345
Précis De Droit Pénal Général

Art. 534. Autorisation – Forme. (Modifié par décision du conseil des ministres du 22
avril 1999). L'autorisation ainsi que le retrait d'autorisation font l'objet d'un arrêté du
ministre en charge du secteur des Assurances.
Les arrêtés d'autorisation sont publiés au Journal officiel.
Ces arrêtés sont publiés au journal officiel ou dans un journal habilité à recevoir les
annonces légales.

Art. 535. Autorisation – Caducité. L'autorisation est réputée caduque dans les cas
suivants :
1° pour les personnes physiques :
- décès du courtier ;
- non exercice effectif de la profession de courtier pendant une période continue de
six mois ;
- faillite du courtier.
2° pour les personnes morales :
- décès ou démission des associés, administrateurs ou préposés ayant la qualité de
gérant, de président directeur général, de directeur général ;
- faillite ou liquidation de la société de courtage ;
- dissolution de la société de courtage ;
- changement de raison sociale.
Le ministre en charge du secteur des Assurances constatent la caducité de
l'autorisation accordée et engage la procédure de retrait d'autorisation. Le courtier ou la
société de courtage, dont la caducité de l'autorisation a été constatée, ne peut plus
exercer la profession de courtier d'assurance. Pour des opérations en cours, le ministre
en charge du secteur des Assurances, compte tenu des intérêts en cause, édicte les
mesures destinées à assurer leur bonne fin.

Art. 536. Autorisation – Décès - Démission. En cas de décès ou de démission du


représentant légal ou du gérant d'une société de courtage, celle-ci doit dans un délai de
trois mois, à compter du décès ou de la démission, soumettre à l'approbation du ministre
en charge du secteur des Assurances la candidature d'un nouveau représentant légal ou
d'un nouveau gérant.

CHAPITRE III RESPONSABILITE PROFESSIONNELLE

Art. 537. Assurance de responsabilité professionnelle. Tout courtier ou société de


courtage d'assurance doit être en mesure de justifier à tout moment de l'existence d'un
contrat d'assurance le couvrant contre les conséquences pécuniaires de sa responsabilité
civile professionnelle.

Art. 538. Contrat d'assurance responsabilité civile professionnelle. Le contrat


d'assurances de responsabilité civile professionnelle prévu à l'article 537 comporte pour
les entreprises d'assurances des obligations qui ne peuvent pas être inférieures à celles
définies ci-dessous.
Le contrat prévoit une garantie de 10 millions de FCFA par sinistres et par année pour
un même courtier ou société de courtage d'assurances assuré.
Il peut fixer une franchise par sinistre qui ne doit pas excéder 20 % du montant des
indemnités dues. Cette franchise n'est pas opposable aux victimes.

346
Précis De Droit Pénal Général

Il garantit la personne assurée de toutes réclamations présentées entre la date d'effet et


la date d'expiration du contrat quelle que soit la date du fait dommageable ayant
entraîné sa responsabilité dès lors que l'assuré n'en a pas eu connaissance au moment de
la souscription.
Il garantit la réparation de tout sinistre connu de l'assuré dans un délai maximum de
douze mois à compter de l'expiration du contrat, à condition que le fait générateur de ce
sinistre se soit produit pendant la période de validité du contrat.

Art. 539. Durée – Attestation. Le contrat mentionné à l'article 538 est reconduit
tacitement au 1er janvier de chaque année.
L'assureur délivre à la personne garantie une attestation d'assurance de responsabilité
civile professionnelle. Cette attestation est renouvelée annuellement lors de la
reconduction du contrat.

Art. 540. Mentions obligatoires. Tout document à usage professionnel émanant d'un
courtier doit comporter la mention : "garantie financière et assurance de responsabilité
civile professionnelle conformes aux articles 524 et 538 du Code des assurances".

CHAPITRE IV ENCAISSEMENT DES PRIMES

Art. 541. Mandat. Il est interdit aux courtiers et aux sociétés de courtage, sauf mandat
express de l'entreprise d'assurance d'encaisser des primes ou des fractions de prime.
Il est interdit aux courtiers et sociétés de courtage, sauf accord express de l'entreprise
d'assurance, de retenir le montant de leurs commissions sur la prime encaissée.

Art. 542. Délai. Les primes ou fractions de prime encaissées par les courtiers et
sociétés de courtage doivent être reversées aux sociétés d'assurances dans un délai
maximum de trente jours suivant leur encaissement.

Art. 543. Note de couverture. Il est interdit aux courtiers et aux sociétés de courtage
de délivrer une note de couverture sans un mandat express de l'entreprise d'assurance.

Art. 544. Commissions. Les commissions dues aux courtiers doivent être versées
dans les trente jours qui suivent la remise des primes à l'entreprise d'assurance.
Le ministre en charge des Assurances fixe les taux minima et maxima des
rémunérations des courtiers et sociétés de courtage.

TITRE IV SANCTIONS PENALITES

CHAPITRE UNIQUE

Art. 545. Sanctions. Toute personne qui présente des opérations définies à l'article
500 en méconnaissance des règles prévues aux articles 501 à 508 est passible d'une
amende de 500.000 FCFA à 1.500.000 FCFA.
Est également passible des sanctions prévues au premier alinéa du présent article la
personne visée à l'article 509 qui a fait appel, ou par suite d'un défaut de surveillance, a
laissé faire appel, par une personne placée sous son autorité, à des personnes ne
remplissant pas les conditions définies aux articles 501 à 508.

347
Précis De Droit Pénal Général

Toute personne qui présentera en vue de leur souscription ou fera souscrire des
contrats pour le compte d'une entreprise non agréée pour la branche dans laquelle
entrent ces contrats, sera punie d'une amende de 500.000 FCFA à 2.500.000 FCFA et en
cas de récidive d'une amende de 1.000.000 F.CFA à 5.000.000 F.CFA et d'un
emprisonnement de 6 mois à 3 ans ou de l'une de ces deux peines seulement.
Est également passible des sanctions prévues au troisième alinéa du présent article tout
courtier ou toute société de courtage qui ne se sera pas conformé aux dispositions de
l'article 530.
L'amende prévue au présent article sera prononcée pour chacun des contrats proposés
ou souscrits, sans que le total des amendes encourues puisse excéder 500.000 FCFA et,
en cas de récidive 5.000.000 FCFA.
Toute infraction aux prescriptions des articles 510 et 511, 518, 520, 522 à 524, 532 à
537 et 541 à 544 sera punie par une amende de 500.000 à 1.500.000 FCFA.

TITRE V DISPOSITIONS TRANSITOIRES

CHAPITRE UNIQUE

Art. 546. Mise en conformité – Autorisation. Les courtiers et les sociétés de


courtage, qui exercent dans les Etats membres de la CIMA devront déposer auprès du
ministre en charge du secteur des Assurances de chaque pays membre, dans les trois
mois qui suivent l'entrée en vigueur du présent code, une demande de régularisation
d'autorisation conformément aux dispositions de l'article 533.

348
Précis De Droit Pénal Général

IV- EXTRAITS D’ARTICLES DE L’ACTE UNIFORME OHADA


RELATIF AUX SOCIETES COMMERCIALES ET G.I.E.

Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt


économique, fait à Cotonou le 17 avril 1997 (J.O.BF. spécial n° 5 du 4 novembre 1997)

PARTIE III DISPOSITIONS PENALES

TITRE I INFRACTIONS RELATIVES A LA CONSTITUTION DES SOCIETES

Art. 886. Est constitutif d'une infraction pénale, le fait, pour les fondateurs, le président
directeur général, le directeur général, l'administrateur général ou l'administrateur général
adjoint d'une société anonyme d'émettre des actions avant l'immatriculation ou à
n'importe quelle époque lorsque l'immatriculation est obtenue par fraude ou que la
société est irrégulièrement constituée.

Art. 887. Encourent une sanction pénale :


1) ceux qui, sciemment, par l'établissement de la déclaration notariée de souscription et
de versement ou du certificat du dépositaire, auront affirmé sincères et véritables des
souscriptions qu'ils savaient fictives ou auront déclaré que les fonds qui n'ont pas été mis
définitivement à la disposition de la société ont été effectivement versés ;
2) ceux qui auront remis au notaire ou au dépositaire, une liste des actionnaires ou des
bulletins de souscription et de versement mentionnant des souscriptions fictives ou des
versements de fonds qui n'ont pas été mis définitivement à la disposition de la société ;
3) ceux qui sciemment, par simulation de souscription ou de versement ou par
publication de souscription ou de versement qui n'existent pas ou de tous autres faits
faux, auront obtenu ou tenté d'obtenir des souscriptions ou des versements ;
4) ceux qui, sciemment, pour provoquer des souscriptions ou des versements auront
publié les noms de personnes désignées contrairement à la vérité comme étant ou devant
être attachées à la société à un titre quelconque ; ceux qui, frauduleusement, auront fait
attribuer à un apport en nature, une évaluation supérieure à sa valeur réelle.

Art. 888. Encourent une sanction pénale, ceux qui auront sciemment négocié :
1) des actions nominatives qui ne sont pas demeurées sous la forme nominative jusqu'à
leur entière libération ;
2) des actions d'apport avant l’expiration du délai pendant lequel elles ne sont pas
négociables ;
3) des actions de numéraire pour lesquelles le versement du quart du nominal n'a pas été
effectué.

349
Précis De Droit Pénal Général

TITRE II INFRACTIONS RELATIVES A LA GERANCE, A


L'ADMINISTRATION ET A LA DIRECTION DES SOCIETES

Art. 889. Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui, en l'absence
d'inventaire ou au moyen d'inventaire frauduleux, auront, sciemment, opéré entre les
actionnaires ou les associés la répartition de dividendes fictifs.

Art. 890. Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui auront sciemment,
même en l'absence de toute distribution de dividendes, publié ou présenté aux
actionnaires ou associés, en vue de dissimuler la véritable situation de la société, des états
financiers de synthèse ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidèle des
opérations de l'exercice, de la situation financière et de celle du patrimoine de la société,
à l'expiration de cette période.

Art. 891. Encourent une sanction pénale le gérant de la société à responsabilité limitée,
les administrateurs, le président directeur général, le directeur général, l'administrateur
général ou l'administrateur général adjoint qui, de mauvaise foi, font des biens ou du
crédit de la société, un usage qu'ils savaient contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins
personnelles, matérielles ou morales, ou pour favoriser une autre personne morale dans
laquelle ils étaient intéressés, directement ou indirectement.

TITRE III INFRACTIONS RELATIVES AUX ASSEMBLEES GENERALES

Art. 892. Encourent une sanction pénale, ceux qui, sciemment, auront empêché un
actionnaire ou un associé de participer à une assemblée générale.

TITRE IV INFRACTIONS RELATIVES AUX MODIFICATIONS


DU CAPITAL DES SOCIETES ANONYMES

CHAPITRE I AUGMENTATION DE CAPITAL

Art. 893. Encourent une sanction pénale, les administrateurs, le président du conseil
d'administration, le président directeur général, le directeur général, l'administrateur
général ou l'administrateur général adjoint d'une société anonyme qui, lors d'une
augmentation de capital, auront émis des actions ou des coupures d'actions :
1) avant que le certificat du dépositaire ait été établi ;
2) sans que les formalités préalables à l'augmentation de capital aient été régulièrement
accomplies ;
3) sans que le capital antérieurement souscrit de la société ait été intégralement libéré ;
4) sans que les nouvelles actions d'apport aient été intégralement libérées avant
l'inscription modificative au registre du commerce et du crédit mobilier ;
5) sans que les actions nouvelles aient été libérées d'un quart au moins de leur valeur
nominale au moment de la souscription ;

350
Précis De Droit Pénal Général

6) le cas échéant, sans que l'intégralité de la prime d'émission ait été libérée au moment
de la souscription.
Des sanctions pénales sont également applicables aux personnes visées au présent article
qui n'auront pas maintenu les actions de numéraire sous forme nominative jusqu'à leur
entière libération.

Art. 894. Encourent des sanctions pénales, les dirigeants sociaux qui, lors d'une
augmentation de capital :
1) n'auront pas fait bénéficier les actionnaires, proportionnellement au montant de leurs
actions, d'un droit préférentiel de souscription des actions de numéraire lorsque ce droit
n'a pas été supprimé par l'assemblée générale et que les actionnaires n'y ont pas renoncé ;
2) n'auront pas fait réserver aux actionnaires un délai de vingt jours au moins, à dater de
l'ouverture de la souscription, sauf lorsque ce délai a été clos par anticipation ;
3) n'auront pas attribué les actions rendues disponibles, faute d'un nombre suffisant de
souscription à titre irréductible, aux actionnaires qui ont souscrit à titre réductible un
nombre d'actions supérieur à celui qu'ils pouvaient souscrire à titre irréductible,
proportionnellement aux droits dont ils disposent ;
4) n'auront pas réservé les droits des titulaires de bons de souscription.

Art. 895. Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui, sciemment, auront
donné ou confirmé des indications inexactes dans les rapports présentés à l'assemblée
générale appelée à décider de la suppression du droit préférentiel de souscription.

CHAPITRE II REDUCTION DE CAPITAL

Art. 896. Encourent une sanction pénale, les administrateurs, le président directeur
général, le directeur général, l'administrateur général ou l'administrateur général adjoint
qui, sciemment, auront procédé à une réduction de capital :
1) sans respecter l'égalité des actionnaires ;
2) sans avoir communiqué le projet de réduction de capital aux commissaires aux
comptes quarante-cinq jours avant la tenue de l'assemblée générale appelée à statuer sur
la réduction de capital.

TITRE V INFRACTIONS RELATIVES AU CONTROLE DES SOCIETES

Art. 897. Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui n'auront pas
provoqué la désignation des commissaires aux comptes de la société ou ne les auront pas
convoqués aux assemblées générales.

Art. 898. Encourt une sanction pénale, toute personne qui, soit en son nom personnel,
soit à titre d'associé d'une société de commissaires aux comptes, aura sciemment accepté,
exercé ou conservé des fonctions de commissaires aux comptes, nonobstant les
incompatibilités légales.

351
Précis De Droit Pénal Général

Art. 899. Encourt une sanction pénale, tout commissaire aux comptes qui, soit en son
nom personnel, soit à titre d'associé d'une société de commissaires aux comptes, aura
sciemment donné ou confirmé des informations mensongères sur la situation de la société
ou qui n'aura pas révélé au ministère public les faits délictueux dont il aura eu
connaissance.
Art. 900. Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux ou toute personne au
service de la société qui, sciemment, auront mis obstacle aux vérifications ou au contrôle
des commissaires aux comptes ou qui auront refusé la communication, sur place, de
toutes les pièces utiles à l'exercice de leur mission et notamment de tous contrats, livres,
documents comptables et registres de procès-verbaux.

TITRE VI INFRACTIONS RELATIVES A LA DISSOLUTION DES SOCIETES

Art. 901. Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui, sciemment, lorsque
les capitaux propres de la société deviennent inférieurs à la moitié du capital social du
fait des pertes constatées dans les états financiers de synthèse :
1) n'auront pas fait convoquer, dans les quatre mois qui suivent l'approbation des états
financiers de synthèse ayant fait apparaître ces pertes, l'assemblée générale extraordinaire
à l'effet de décider, s'il y a lieu, la dissolution anticipée de la société ;
2) n'auront pas déposé au greffe du tribunal chargé des affaires commerciales, inscrit au
registre du commerce et du crédit mobilier et publié dans un journal habilité à recevoir
les annonces légales, la dissolution anticipée de la société.

TITRE VII INFRACTIONS RELATIVES A LA LIQUIDATION DES SOCIETES

Art. 902. Encourt une sanction pénale, le liquidateur d'une société qui, sciemment :
1) n'aura pas, dans le délai d'un mois à compter de sa nomination, publié dans un journal
habilité à recevoir les annonces légales du lieu du siège social, l'acte le nommant
liquidateur et déposé au registre du commerce et du crédit mobilier les décisions
prononçant la dissolution ;
2) n'aura pas convoqué les associés, en fin de liquidation, pour statuer sur le compte
définitif de la liquidation, sur le quitus de sa gestion et la décharge de son mandat et pour
constater la clôture de la liquidation ;
3) n'aura pas, dans le cas prévus à l'article 219 du présent acte uniforme, déposé ses
comptes définitifs au greffe du tribunal chargé des affaires commerciales du lieu du siège
social, ni demandé en justice l'approbation de ceux-ci.

Art. 903. Lorsque la liquidation intervient sur décision judiciaire, encourt une sanction
pénale, le liquidateur qui, sciemment :
1) n'aura pas, dans les six mois de sa nomination, présenté un rapport sur la situation
active et passive de la société en liquidation et sur la poursuite des opérations de
liquidation, ni sollicité les autorisations nécessaires pour les terminer ;

352
Précis De Droit Pénal Général

2) n'aura pas, dans les trois mois de la clôture de chaque exercice, établi les états
financiers de synthèse au vu de l'inventaire et un rapport écrit dans lequel il rend compte
des opérations de la liquidation au cours de l'exercice écoulé ;
3) n'aura pas permis aux associés d'exercer, en période de liquidation, leur droit de
communication des documents sociaux dans les mêmes conditions qu'antérieurement ;
4) n'aura pas convoqué les associés, au moins une fois par an, pour leur rendre compte
des états financiers de synthèse en cas de continuation de l'exploitation sociale ;
5) n'aura pas déposé à un compte ouvert dans une banque au nom de la société en
liquidation, dans le délai de quinze jours à compter de la décision de répartition, les
sommes affectées aux répartitions entre les associés et les créanciers ;
6) n'aura pas déposé, sur un compte de consignation ouvert dans les écritures du Trésor,
dans le délai d'un an à compter de la clôture de la liquidation, les sommes attribuées à des
créanciers ou à des associés et non réclamées par eux.

Art. 904. Encourt une sanction pénale, le liquidateur qui, de mauvaise foi :
1) aura fait des biens ou du crédit de la société en liquidation, un usage qu'il savait
contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre
personne morale dans laquelle il était intéressé, directement ou indirectement ;
2) aura cédé tout ou partie de l'actif de la société en liquidation à une personne ayant eu
dans la société la qualité d'associé en nom, de commandité, de gérant, de membre du
conseil d'administration, d'administrateur général ou de commissaire aux comptes, sans
avoir obtenu le consentement unanime des associés ou, à défaut, l'autorisation de la
juridiction compétente.

TITRE VIII INFRACTIONS EN CAS D'APPEL PUBLIC A L'EPARGNE

Art. 905. Encourent une sanction pénale, les présidents, les administrateurs ou les
directeurs généraux de société qui auront émis des valeurs mobilières offertes au public :
1) sans qu'une notice soit insérée dans un journal habilité à recevoir les annonces légales,
préalablement à toute mesure de publicité ;
2) sans que les prospectus et circulaires reproduisent les énonciations de la notice prévue
au paragraphe 1) du présent article, et contiennent la mention de l'insertion de cette
notice au journal habilité à recevoir les annonces légales avec référence au numéro dans
lequel elle a été publiée ;
3) sans que les affiches et les annonces dans les journaux reproduisent les mêmes
énonciations, ou tout au moins un extrait de ces énonciations avec référence à ladite
notice, et indications du numéro du journal habilité à recevoir les annonces légales dans
lequel elle a été publiée ;
4) sans que les affiches, les prospectus et les circulaires mentionnent la signature de la
personne ou du représentant de la société dont l'offre émane et précisent si les valeurs
offertes sont cotées ou non et, dans l'affirmative, à quelle bourse.
La même sanction pénale sera applicable aux personnes qui auront servi d'intermédiaires
à l'occasion de la cession de valeurs mobilières sans qu'aient été respectées les
prescriptions du présent article.

353
Précis De Droit Pénal Général

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE
I - OUVRAGES GÉNÉRAUX

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- M-L.RASSAT " Manuel de procédure pénale", PUF, 1ére édition, Paris, 2002.
- OPPETIT (B.), "Philosophie du droit", Dalloz, 1999.
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- TERRE, Ph. SIMLER & LEQUETTE (Y.), "Droit civil – Les obligations", 8ème
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Politiques.
- VOIRIN (P). & GOUBEAUX (G.), "Droit civil", tome 1, 29ème édition, LGDJ., 2003.

II - OUVRAGES SPÉCIALISÉS

- CANIN (P.) "Droit pénal général", Hachette, 2000.


- CONTE (Ph.) & MAISTRE Du CHAMBON (P), "Droit pénal général", 6ème édit.,
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- MAYAUD (Y.), "Droit pénal général", PUF, 2004
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- PRADEL (J.) & VARINARD (A.) "Les grands arrêts du droit pénal général",
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IV - LEGISLATION

♦ LOIS & REGLEMENTS


- Loi 15-AN du 9 mai 1961 sur l’amnistie
- Loi 15-61 AN du 9 mai 1961 portant réglementation de l’amnistie au Burkina Faso,
JORHV du 27 mai 1961, p. 490.
- Loi 26-63 AN du 24 juillet 1963 portant codification de l’enregistrement du timbre et
de l’impôt sur les valeurs mobilières, JOHV n°35 du 17 août 1963, p. 72 & JOHV n° 40
du 14 septembre 1963, p. 77 & SS
- Ordonnance 68-7 du 21 février 1968 portant instituant un code de procédure pénale
- Ordonnance 71-10 du 23 janvier 1971 (voir JOBF du 11 février 1971, p. 110) réprimant
certaines infractions en matière de circulation routière
- Ordonnance 71-10 du 23 janvier 1971, JOHV du 11 février 1971, p. 110

359
Précis De Droit Pénal Général

- Ordonnance 75-23 du 6 mai 1975 relatives à l’application des lois et des textes
réglementaires
- Kiti an VI 103 du 1er décembre 1988 portant organisation, régime et réglementation des
établissements pénitentiaires au BF, JO 1er déc. 1988, P. 2069
- Loi 3-92 ADP du 3 décembre 1992 portant révision du Code des Douanes (CD) et
promulguée par le décret 92-369 du 31 décembre 1992. Elle a été modifiée par la loi 55-
95 ADP du 21 novembre 1995 qui a été promulguée par le décret 95-537 du 8 décembre
1995. Aucune des deux lois n’a été publiée au JOBF
- loi 51-93 ADP du 16 décembre 1993 relative à la procédure applicable devant la
Chambre criminelle (JOBF du 13 janvier 1994, p33).
- loi 5-97 du 30 janvier 1997 portant code de l’environnement au Burkina Faso,
promulguée par le décret 97-110 du 17 mars 1997, JOBF n° 4 spécial du 25 avril 1997, p.
2.
- Décret 97-94 du 28 février 1997, JOBF du 27 mars 1997, p. 721
- Décret n°98-65/PRES du 24 février 1998 octroyant la grâce amnistiante, il est précisé à
l’article 3
- Loi 41-96 ADP du 8 novembre 1998 relative au contrôle des pesticides, modifiée par la
loi 6-98 AN du 26 mars 1998 promulguée par le décret 98-156 du 11 mai 1998, JOBF du
21 mai 1998, p. 4856
- Loi n°32 -2000 AN du 8 décembre 2000 créant l’EPSCT, JOBF du 14 décembre 2000,
p. 5080.
- Décret n°2002-606/PRES/PM/MJ du 31 décembre 2002 portant remise de peine à
l’occasion du nouvel an, JOBF n°03, 2003 (WWW.legiburkina.bf/jo/jo2003
- Loi 38-2003 AN du 27 mai 2003 relative au trafic d’enfant
- Loi 7-2004 AN du 6 avril 2004 relative au TIG, promulguée par le décret 2004-201 du
17 mai 2004, JOBF du 3 juin 2004, p. 736,
- Décret 2004-418 du 12 août 2004 définissant et réprimant les contraventions en matière
de circulation routière, JOBF du 11 mars 2004, p. 376
- Décret 2004-418 du 12 août 2004 relatif à la répression de contravention en matière de
circulation routière in JOBF du 11 mars 2004, p. 376
- Lois n°10/93/ADP et n°28 –2004/AN du 8 septembre 2004 relatives à l’organisation
judiciaire au Burkina Fas
- Décret n°2005-167/PRES/PM/MJ du 22 mars 2005 portant grâce présidentielle, JOBF,
n°14 du 7 avril 2005

♦ CONVENTIONS
- Charte Africaine des droits de l’Homme et des peuples adoptée en juin 1981 Nairobi,
ratifiée par le Burkina Faso par le décret 84-253 du juillet 1984,

360
Précis De Droit Pénal Général

- Convention de New York du 20 juin 1956 relative au recouvrement des aliments à


l’étranger et ratifiée par le Burkina Faso par le décret 62-290 du 17 juillet 1962 (JOHV
du 21 juillet 1962, p. 678)
- Convention signée à Tananarive le 12 septembre 1961 ratifiée par le Burkina Faso par
décret 67-10 du 14 janvier 1967, JOHV du 19 janvier 1967, p. 36.
- Convention du 14 septembre 1963 portant sur les infractions et sur certains actes
survenant à bord des aéronefs, ratifiée par le Burkina Faso par le décret 63-644 du 16
décembre 1963 in Journal Officiel de Haute Volta (JOHV) du 21 décembre 1963, p. 808
- Convention de Yaoundé du 10 juillet 1992 (Conférence Inter-Africaine des Marchés
d’Assurances) , ratifiée par le Burkina Faso, par décret 95-66 du 15/02/1995, JOBF n°1
spécial du 27 juin.
- traité OHADA, signé à Port Louis le 17 octobre 1993 et entré en vigueur en 1995
- Acte additionnel 10/96 du 10 mai 1996 portant statut de la Cour de justice de
l’UEMOA Bulletin officiel de l’UEMOA, édition spéciale, juin 1996, p. 15

♦ CODES & AUTRES


- Code CIMA
- Code de Justice Militaire
- Code de l’information
- Code de la santé
- Code de procédure pénale
- Code des douanes
- Code des drogues
- Code du travail
- Code noir de mars 1685 relatif aux esclaves
-Code Pénal

V - JURISPRUDENCE

♦ JURISPRUDENCE BUKINABE
- Cour Suprême, Chambre judiciaire, formation pénale, 25 août 1967, arrêt n°2/PE/67,
Bulletin de la Cour Suprême de Haute Volta 1er semestre 178, p. 42.
-Cour Suprême (Cour de cassation), Chambre Judiciaire, Formation pénale, 10 janvier
1975, arrêt n°21PE/75, Bulletin de la Cour Suprême de Haute-Volta, 2ème semestre 1978,
p. 43
- Cour Suprême, 26 décembre 1969, arrêt n°8/PE/69, Bulletin de la Cour Suprême de
Haute-Volta, p. 51.

361
Précis De Droit Pénal Général

- Cour d’Appel (C.A.) de Ouagadougou 21 mai 1988, RBD, n°36, 2ème semestre, p. 269 ;
C.A. Ouagadougou 9 septembre 1988, RBD, n° 16, juillet 1989, p. 271, note H.
DELEZENNE-NUYTINCK
- C.A. Ouagadougou 25 juillet 1997, RBD, n° 35, 1er semestre, p.107, note K.
NIKIEMA.
- Cour Suprême (actuelle Cour de cassation), Chambre administrative, arrêt n°040/1999-
2000 du 30 juin 2000. Cette décision a été publiée sur le site web JURIBURKINA
- Cour Suprême, Chambre Judiciaire, Formation pénale, 26 novembre 1971, arrêt
n°2/PE/71, Bulletin de la Cour Suprême de Haute-Volta, 1er semestre 1978, p. 40.
- TGI Ouagadougou, 13 juin 2001, RBD, 2002, n°41, 1er semestre, p. 61 & SS.

- C.A. de Ouagadougou, 24 août 1991, RBD, n° 25 janvier 1994, p. 134, note C.


OUEDRAOGO.
- Cour Suprême, Chambre administrative, 9 avril 1996, RBD, 2002, n°41, 1er semestre, p.
75 & SS
- Tribunal de Grande Instance de Bobo Dioulasso, jugement n°563 du 15 décembre 2003
(RG N° 956/03), décision publiée in www.juriburkina.org.
- Tribunal correctionnel de Ouagadougou, 10 janvier 2000, RBD, 2002 n°42, p. 149
- Tribunal Militaire de Ouagadougou, 17 avril 2004, Revue Burkinabè de Droit (RBD),
2004, n°45, p.133 & SS.
- CA Ouagadougou, 25 mars 1994, in Revue Burkinabè de Droit (RBD), 1er semestre
1996, p. 140
- Cour Suprême 13 juin 2000, RBD, 2004, n°45, 1er semestre, p. 100.
- Cour Suprême de Haute Volta (Burkina Faso), Chambre Administrative, SAWADOGO
Christophe contre République de Haute Volta, arrêt n° 29 du 27 décembre 1968, Bulletin
de la Cour Suprême de Haute-Volta, 1976, p. 45 (arrêt n° 26).
- TGI de Kaya, 25 janvier 2001, RBD, n° 42, 2002, 2éme semestre, p. 147 & SS.
- Cour Suprême, 13 février 1970, arrêt n°2/COUT/70, Bulletin de la Cour Suprême de
Haute Volta, 1er semestre 1978, p. 28.
- Cour Suprême, 22 novembre 1974, arrêt n°213/COUT/74, Bulletin de la Cour Suprême
de Haute Volta, 2eème semestre 1978, p. 21
- Cour Suprême, 11 février 1974, arrêt n°1/COUT/73, Bulletin de la Cour Suprême de
Haute Volta, 1er semestre 1978, p. 31.
- Cour Suprême, 11 février 1972, arrêt n°9/COUT/72, Bulletin de la Cour Suprême de
Haute Volta, 1er semestre 1978, p. 35
- Cour Suprême, Formation pénale, 25 août 1967, arrêt n°2/PE/72, p. 43.

♦ JURISPRUDENCE ETRANGĒRE
- Cass. crim. 20 avril 1934, S. 1935, 1, 138.

362
Précis De Droit Pénal Général

- Cass. crim française 8 février 183, Bull. crim. 1930, n°51 (concerne les agents
diplomatiques);
- Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), 23 septembre, 1998, Malige contre
Etat français, D. 1999, comm., p. 154,
- Cass. crim. (Chambre réunie), 7 juin 1842, S. 1842, I, 496
- Cass. crim. 10 mai 1861, D., 1861, I, 239.
- Cour d’appel d’Amiens 22 avril 1898, S., 1899, 2, 1. Cette décision confirme le
jugement du 4 mars 1898 (affaire Ménard).
- Cass. Crim française 25 septembre 1919, Bull. crim. 1919 n°218 (concerne les agents
consulaires) ; Cass. crim française 13 mars 2001, Bull. crim. 2001, n°64 (pour la
protection des chefs d’Etat étrangers).
- Cass. crim., 19 juillet 1930, S. 1932, I, 114
- Cass. crim. 3 juin 1937, Bull. Crim. 1937, n° 118
- Cass. crim. 1er juillet 1937, S. 1938, I, 193, note TORTAT
- Cass. crim. 10 janvier 1947, RSC 1948, p. 85
- Cass. civ. 28 janvier 1954, D. 1954, p. 217, note LEVASSEUR.
- Cass. crim., 24 juillet 1957, Bull. Crim. n°573.
-. Cass. crim. 28 juin 1958, D. 1958, 693.
- Cass. crim. 28 juin 1958, D. 1958, 693.
- Cass. crim. fr. 12 octobre 1961, Bull. Crim. 1961, n° 399.
-
Cass. crim. fr., 21 novembre 1961, in J. PRADEL & A. VARINARD, "Les grands arrêts
du droit pénal général", op. cit. , n°22.
- . Cass. crim. fr., 27 décembre 1961, Bull. Crim. 1961, n° 563.
- Conseil d’Etat français (C. E. fr), 18 novembre 1966, Revue Administrative 1967, p.140.
- Cass. crim. fr., 16 février 1967, JCP 1967, II, 15034, note Combaldieu.
- Cass. crim. fr., 29 juillet 1970, Bull. Crim. 1970, n° 251 ; Cass. crim. fr., 6 novembre
1997, JCP 1998, II, 10087, note CLIQUENNOIS.
- Cass. crim. fr., 9 mars 1971, Bull. Crim. 1971, n° 79
-
CE fr. 25 janvier 1974, JCP 1974, 17713
- Cass. crim. fr., 21 novembre 1974, JCP 1975, 18143, note CHAMBON.
- Cass. crim. fr., 22 novembre 1983, Bull. crim., 1983, n°308.
- Cass. crim. fr., 5 mars 1987, Bull. Crim. 1997, n° 109.
- Cass. crim. fr., 21 décembre 1987, Bull. crim. 1987, n°473.
- Cass. crim. française, 20 février 1989, Bull. Crim. 1989, n°81.
- Cass. crim. fr, 26 juin 1989, JCP 1989, IV, 350
Cass. crim. fr.30 mai 1991, Bull. Crim. 1991, n° 232.

363
Précis De Droit Pénal Général

- Cass. crim. fr., 25 juillet 1991, Bull. Crim. 1991 n° 307


- Cass. crim. français, 15 décembre 1992, Bull. Crim. 1992, n°417
- Cass. crim., 6 juillet 1993, D. 1994, jurisp.,
- Cass. crim. fr., 20 septembre 1993, Gaz. Pal. 1993, II, Sommaire, 573.
- Cass. crim. fr., 12 octobre 1993, Droit Pénal, Commentaire, n°35.
- Cass. crim. fr., 22 juin 1994, Bull. Crim. 1994, n° 249.
- CEDH, affaire Jamil/France, 8 juin 1995, JCP 1996, II, 22477
- Cass. crim. fr., 5 décembre 1995, Bull. Crim. 1995, n° 366
- Cass. crim. fr., 13 février 1996, Bull. Crim. 1996, n° 75.
- Cour d’appel de Poitiers, 11 avril 1997, JCP 1997, II, 2293.
- Cass. crim. fr., 22 octobre 1997, Bull. Crim. 19971, n° 45.
- Cass. crim. 2 décembre 1997, JCP 1998, 10023.
- Cass. crim. fr., 4 mars 1998, Gaz. Pal., 1998, Chr. Criminel, 125
- Cass. crim. fr. 7 juillet 1998, Joly, 1999, p. 259, note BARBIERI ; Revue Sociale (Rev.
Soc.), 199, 399, note B. BOULOC.
-Cour d’Appel Cotonou, 27 janvier 2000, arrêt n°21/2000, in "OHADA Jurisprudences
Nationales", n°1, décembre 2004, p. 6.
- Cass crim. fr. 2 avril 2005, Bull. crim. 2005, n° 126 ; RSC, 2005, p. 875.

364
Précis De Droit Pénal Général

INDEX ALPHABÉTIQUE
(Les chiffres renvoient aux numéros des paragraphes en marge du texte)

Dol simple · 153


Dol spécial · 152
A Droit colonial · 32
Droit français · 275
Ajournement · 290 Droit international pénal · 15
Amende · 332 Droit pénal · 7,8
Amende administrative · 272 Droit pénal des affaires · 11
Amende civile · 271 Droit pénal du travail · 12
Amende fiscale · 270 Droit pénal français · 22
Amende pénale · 269 Droit pénal général · 9
Amnistie · 365, 366 Droit pénal international · 15
Anthropologie criminelle · 19 Droit pénal spécial · 10
Auteur · 130

E
C
Ecole positiviste · 28
CEDEAO · 15, 36, 44 Elément matériel · 111
CIMA · 15, 38 Emprunt de criminalité · 128
Commencement d'exécution · 116 Erreur de droit · 179
Common law, · 16 Erreur de fait · 178
Complicité · 32,131, 132, 134, 142 Erreur invincible ·180
Concours idéal d'infraction · 304 Etablissement pénitentiaire · 340
Confiscation · 276 Ethique · 51
Confusion de peine · 318, 319 Euthanasie · 208
Confusion de peines · 200 Exclusion des marchés publics · 278
Contrainte · 177 Excuse de provocation · 299
Contrainte morale · 173,175 Excuses absolutoires · 287
Contrainte par corps · 333
Contrainte physique · 172
Conventions internationales · 42 F
Corvée · 328
Crime · 2, 74 Faits justificatifs · 183
Crime conventionnel · 3 Faute contraventionnelle · 160
Criminel aliéné · 27 Faute pénale · 158
Criminel d'habitude · 27 Fermeture d’établissement · 278
Criminel-né · 27 Fusillade · 336
Criminologie · 19
Culpabilité · 161
Cumul de peine · 313
Cumul réel d'infractions · 311
G
Grâce · 337, 361
Grâce amnistiante · 367
D Grâce individuelle · 362
Guillotine · 365
Danger actuel · 203
Délinquant primaire · 321
Délit civil · 48
Délit disciplinaire · 49
I
Délit manqué · 124
Démence · 164, 165 Ignorance de la loi · 179
Désintoxication · 282 Immunité · 291
désistement volontaire · 121 Immunité diplomatique · 293
Dol déterminé · 155 Immunité familiale · 295
Dol éventuel · 157 Immunité judiciaire · 294
Dol général · 151 Immunité parlementaire · 292
Dol indéterminé · 155 Imputabilité · 162

365
Précis De Droit Pénal Général

Incapacité de discernement · 170 Peine capitale · (voir de peine de mort)


Indépendance africaine · 35 Peine contraventionnelle 257
Individualisation de la peine ·350 Peine criminelle · 252
Infraction · 46 Peine d’amende (exécution) · 332
Infraction complexe · 103 Peine de mort · 334
Infraction continue 93, 98 Peine privative de droit · 270
Infraction continuée · 95 Peine privative de liberté · 267, 339
Infraction d'action · 89 Peines correctionnelle · 254
Infraction de droit commun · 77, 310 Peines principales · 258
Infraction d'habitude · 101 Pendaison · 335
Infraction d'omission · 90 Pénologie · 14
Infraction formelle · 87 Période de sûreté · 352
Infraction impossible · 125 Permission de la loi · 184
Infraction instantanée · 98 Permission de sortir ·353
Infraction matérielle · 85 Personne morale · 212
Infraction militaire · 80 Positivistes · (voir école positiviste)
Infraction obstacle · 86 Prescription · 356, 357, 360
Infraction permanente · 94 Prison · 341
Infraction praeter-intentionnelle · 156 Procédure pénale · 13
Infraction simple · 100
Infractions non intentionnelles · 158
Infractions politiques · 78, 79, 333 R
Interdiction de séjour · 268
Interdiction du territoire · 269
Récidive · 101, 218, 222, 232
Interprétation ·53
Récompense judiciaire · 289
Interprétation analogique ·54
Recours en grâce · 237
Interprétation téléologique · 55
Règlements ·41
Réhabilitation · 369, 372
Réhabilitation judiciaire ·371
L Réhabilitation légale · 370
Résolution · 114
Légalité · 39, 195
Légitime défense · 193
Libération conditionnelle · 324, 325, 326 S
Loi · 40
Loi pénale de fond ·59
Sanction · 223
Sciences criminalistiques · 18
Sciences médicales ·20
M Semi-liberté · 329
Sexe · 5
Mendicité · 283 Sociologie criminelle · 21
Mesure de sûreté ·231, 234 Strangulation · 335
Mineurs · 220, 283, 296, 321, 343, 344 Sursis ·219, 271, 321
Minorité · 298
Morale ·50
T
N Tentative · 113
Territorialité · 68
Neutralisation · 1238 Théorie de l’association différentielle · 5
Non rétroactivité ·58, 60

U
O
UEMOA · 37, 294
Occupation coloniale · 31
OHADA · 15, 44, 38
V
P Vagabondage · 283
Vengeance · 23, 153
Pardon judiciaire · 289

366
TABLE DES MATIÈRES
SOMMAIRE ........................................................................................................................................ 2
PRÉFACE ........................................................................................................................................... 4
ABRÉVIATIONS ................................................................................................................................. 6
PRÉLIMINAIRES ................................................................................................................................... 10
§1 – L’objet du droit penal ........................................................................................................... 11
§2 – La structure du DROIT PÉNAL ........................................................................................... 21
§3 - L’ÉVOLUTION DU DROIT PÉNAL .................................................................................. 41
PARTIE I – L'INFRACTION ............................................................................................................... 72
ET LA RESPONSABILITÉ PÉNALE ................................................................................................... 72
Titre I– Les principes du droit pénal ................................................................................................ 75
Chapitre I – La légalité pénale ......................................................................................................... 77
Section I – Les sources du droit pÉnal ......................................................................................... 78
§1- Les lois (formelles) ........................................................................................................... 81
§2 – Les actes du pouvoir exÉcutif ......................................................................................... 84
§3 - Les traitÉs et accords internationaux ............................................................................... 86
§4 – La jurisprudence : source de droit pÉnal ou non ?........................................................... 89
Section II – Les implications du principe de la lÉgalitÉ ............................................................... 90
§1 - La notion d'INFRACTION .............................................................................................. 90
§2 - Les consÉquences du principe de la lÉgalitÉ ................................................................... 93
Section III - Le domaine d'APPLICATION de la loi pÉnale ........................................................ 96
§1 - l'APPLICATION de la loi pÉnale dans le temps ............................................................. 96
1– L’APPLICATION DES LOIS PENALES DE FOND DANS LE TEMPS ............................................................. 96
2– L’APPLICATION DES LOIS PENALES DE FORME DANS LE TEMPS........................................................ 100
§2 - L'APPLICATION de la loi pÉnale dans l'ESPACE ....................................................... 101
1– LES INFRACTIONS COMMISES A L'INTERIEUR DU TERRITOIRE NATIONAL .......................................... 101
2– LES INFRACTIONS COMMISES HORS DU TERRITOIRE NATIONAL ........................................................ 104
Chapitre II - Les classifications des infractions.............................................................................. 106
Section I – La Classification lÉgale des infractions.................................................................... 106
§ 1 – La classification fondÉe sur la gravitÉ des actes .......................................................... 106
1- LES CATEGORIES D’INCRIMINATION DEGAGEES DU CRITERE DE GRAVITE ........................................ 106
2 - L’EVALUATION DE LA GRAVITE DE L’INFRACTION ........................................................................... 107
§2 – la portÉe de la classification lÉgale des infractions....................................................... 107
1- L’INTERET DE LA DISTINCTION QUANT AUX REGLES DE FOND .......................................................... 107
2- L’INTERET DE LA DISTINCTION QUANT AUX REGLES PROCEDURALES ............................................... 108
Section II – Autres Classifications ............................................................................................. 108
§1 - Classification FONDÉE sur la nature de l’INFRACTION ............................................ 109
1 - LES INFRACTIONS POLITIQUES ET LES INFRACTIONS DE DROIT COMMUN ......................................... 109
2 - LES INFRACTIONS MILITAIRES ET LES INFRACTIONS DE DROIT COMMUN.......................................... 111
§2 - La classification fondÉe sur les ÉlÉments constitutifs de l’infraction ........................... 114
1 – LES DISTINCTIONS ISSUES DE LA MATERIALITE DE L'INFRACTION ................................................... 114
2 – LA DISTINCTION ISSUE DE L’ELEMENT MORAL DE L'INFRACTION .................................................... 121
Titre II– Les COMPOSANTS de l’infraction .................................................................................. 123
Chapitre I – L'ÈLÉMENT matériel ................................................................................................. 125
Section I - La nÉcessité d'un acte d’exécution............................................................................ 125
§ 1- L’acte de commission (infraction d’action) et l'ACTe d’omission ................................. 125
§ 2- L'acte inachevé ............................................................................................................... 126
1 - LA TENTATIVE ................................................................................................................................. 126
2 - L'INFRACTION IMPOSSIBLE .............................................................................................................. 132
Section II – L’élément matériel de l'infraction en cas de pluralitÉ de participants ..................... 135
§1 - La complicité ................................................................................................................. 135
Précis De Droit Pénal Général

1 - LA NOTION DE COMPLICITE.............................................................................................................. 135


2 – LES CONDITIONS DE LA COMPLICITE PUNISSABLE ........................................................................... 137
2 – LA SANCTION DE LA COMPLICITE .................................................................................................... 142
§2 - La responsabilitÉ pÉnale "du fait d'autrui" .................................................................... 143
1 – NOTION ET DOMAINE DE LA RESPONSABILITE PENALE DU FAIT D’AUTRUI ...................................... 144
2 – LES CONDITIONS D’ENGAGEMENT DE LA RESPONSABILITE PENALE DU FAIT D’AUTRUI ................... 146
Chapitre II – L'ÉlÉment psychologique ou moral .......................................................................... 150
Section I – L'intention criminelLE ou dol criminel .................................................................... 150
§1 – L'Intention et le mobile ................................................................................................. 150
§2 – L'intention ..................................................................................................................... 152
1 - LE DOL GENERAL ET LE DOL SPECIAL .............................................................................................. 152
2 - LE DOL SIMPLE ET LE DOL AGGRAVE ............................................................................................... 153
3 - LE DOL DETERMINE ET LE DOL INDETERMINE .................................................................................. 154
4 - L'INFRACTION PRAETER-INTENTIONNELLE ET LE DOL EVENTUEL .................................................... 154
Section II – La faute pÉnale ....................................................................................................... 155
§1 – La faute dans les infractions non intentionnelles ................................................................................................ 155
§2 – L'ÉlÉment moral dans les contraventions...................................................................... 159
Titre III – la responsabilité pÉnale ................................................................................................. 161
Chapitre - I -Les causes de non imputabilitÉ ou de non responsabilitÉ ......................................... 163
Section I– Le trouble psychique et neuropsychique (L’absence du libre arbitre) ....................... 164
§1 – L’État Mental ................................................................................................................ 164
1 - LA DEMENCE (CAUSE SUBJECTIVE DE NON IMPUTABILITE) .............................................................. 164
2 – L’ABSENCE DE MATURITE ............................................................................................................... 167
Section II - La contrainte (absence de libertÉ) ........................................................................... 168
§1- LES FORMES DE CONTRAINTE .............................................................................................. 168
§2 - La cAractÉristique de la contrainte, cause d'irresponsabilitÉ totale ou partielle ............ 170
1 - LE CARACTERE IRRESISTIBLE DE LA CONTRAINTE ........................................................................... 171
2 - LE CARACTERE IMPREVISIBLE DE LA CONTRAINTE .......................................................................... 171
Section III - L'ERREUR (l’absence de connaissance) ................................................................ 171
§1- L'erreur de fait ................................................................................................................. 172
§2 - L'erreur de droit ............................................................................................................. 172
1 - L'IGNORANCE DE LA LOI .................................................................................................................. 172
2 - L'ERREUR INVINCIBLE ..................................................................................................................... 174
Chapitre II – Les faits justificatifs................................................................................................... 176
Section I – Le commandement de l'autoritÉ légitime ou la permission de la loi ........................ 176
§1 – L'autorisation ou la prescription de la loi ...................................................................... 176
§2- Le commandement de l'autoritÉ lÉgitime ....................................................................... 177
1- LE COMMANDEMENT JUSTIFICATIF ................................................................................................... 178
2 – LE CARACTERE LEGAL DE L’ORDRE REÇU ....................................................................................... 178
Section II - La lÉgitime dÉfense ................................................................................................ 179
§1 – La notion et le fondement de la lÉgitime dÉfense ......................................................... 180
§2 – Les conditions d’existence de la lÉgitime dÉfense........................................................ 180
1 - LES CARACTERES DE L’AGRESSION JUSTIFICATIVE .......................................................................... 180
2- LES CARACTERES DE LA DEFENSE JUSTIFICATIVE ............................................................................. 182
Section III - L'État de nécessitÉ ................................................................................................. 183
§1 – La notion et le fondement de l’État de nÉcessitÉ .......................................................... 183
§2 – Les conditions d’existence de l’État de nÉcessitÉ ......................................................... 185
1 – LES CONDITIONS LIEES AU PERIL ..................................................................................................... 185
2 - LA NECESSITE DE L'ACTE SALVATEUR (L’INFRACTION) ................................................................... 186
Section IV- Le consentement de la victime ................................................................................ 187
§1 - Le principe ..................................................................................................................... 187
§2 – Les dÉrogations ............................................................................................................. 188
Chapitre III – Les rÉgles de responsabilitÉ pÉnale liÉes Á la catÉgorie de la personne .............. 189
Section I - la personne Morale ................................................................................................... 189
§1 – Les personnes morales punissables ............................................................................... 189
§2 – Les conditions d’engagement de la responsabilitÉ de la personne morale .................... 191
Section II – Les personnes physiques ......................................................................................... 193
§1 - Le passÉ judiciaire du dÉlinquant de droit commun : le rÉcidiviste .............................. 193
§2 - L'âge : Le dÉlinquant mineur ......................................................................................... 194
PARTIE II  LA SANCTION ............................................................................................................. 195

368
Précis De Droit Pénal Général

Titre I – LA SANCTION EN GÉNÉRAL ......................................................................................... 198


Chapitre I - Les formes de LA sanction .......................................................................................... 200
Section I – Les peines ................................................................................................................. 200
§1- Les fonctions de la peine ................................................................................................. 200
1 - L'INTIMIDATION OU LA PREVENTION ............................................................................................... 200
2 - L'EXPIATION OU LA RETRIBUTION ............................................................................................. 201
3 - L'AMENDEMENT OU LA READAPTATION ........................................................................................... 201
§2 – Les principaux caractÉres de la peine ........................................................................... 201
1 - LE CARACTERE AFFLICTIF................................................................................................................ 202
2 - LE CARACTERE INFAMANT............................................................................................................... 202
3 - LE CARACTERE DETERMINE ............................................................................................................. 202
4 - LE CARACTERE DEFINITIF ................................................................................................................ 203
Section II – Les mesures de sÛretÉ ............................................................................................ 203
§1 – Le but de la mesure de sÛretÉ ....................................................................................... 204
1 - LA PREVENTION PAR LE TRAITEMENT ET LA READAPTATION ........................................................... 204
2 - LA PREVENTION PAR L'ELIMINATION (NEUTRALISATION) ET LA SURVEILLANCE .............................. 205
§2 - Les caractÉres de la mesure de sÛretÉ .......................................................................... 206
1 - ABSENCE DE COLORATION MORALE ................................................................................................ 206
2 - DUREE INDETERMINEE..................................................................................................................... 206
3 – POSSIBILITE DE REVISION ............................................................................................................... 207
Section III - Les rapports entre la mesure de sûretÉ et la peine .................................................. 207
§1 - L’application des deux catÉgories de sanction .............................................................. 207
§2 – Les garanties communes Á la mesure de sÛrEtÉ et Á la peine ..................................... 208
1 - RESPECT DE LA LEGALITE ............................................................................................................... 209
2 - RESPECT DE LA DIGNITE HUMAINE .................................................................................................. 209
3 - NECESSITE D'INTERVENTION DE L'AUTORITE JUDICIAIRE ................................................................. 209
Chapitre- II- Les Classifications des sanctions pÉnales ................................................................. 210
Section I – Les peines ................................................................................................................. 210
§1– Classification fondÉe sur le statut des peines ................................................................. 210
1 – LES PEINES CRIMINELLES, CORRECTIONNELLES ET CONTRAVENTIONNELLES .................................. 210
2 - LES PEINES PRINCIPALES, ALTERNATIVES, ACCESSOIRES ET COMPLEMENTAIRES ............................ 214
§2 - Classification fondÉe sur les libertÉs et droits atteints .................................................. 216
1 - LES PEINES PRIVATIVES DE VIE OU TOUCHANT A L'INTEGRITE CORPORELLE .................................... 217
2 - LES PEINES PRIVATIVES ET RESTRICTIVES DE LIBERTE ..................................................................... 217
4 - LES PEINES PRIVATIVES OU RESTRICTIVES DE DROITS ...................................................................... 218
Section II – Les mesures de sÛretÉ ............................................................................................ 225
§1 – Les mesures de sûretÉ officiellement reconnues et appliquÉes comme telles ............... 225
1 - LES MESURES DE SURETE APPLICABLES AUX MINEURS .................................................................... 225
2- LES MESURES DE SURETE APPLICABLES AUX MAJEURS ..................................................................... 226
§2 – Les mesures de sÛretÉ portant atteinte a la libertÉ ....................................................... 227
1 – LES MESURES DE SURETE PORTANT ATTEINTE A L’INTEGRITE PHYSIQUE ET LA LIBERTE D'ALLER ET
VENIR ................................................................................................................................................... 227
2 – LES MESURES DE SURETE AFFECTANT LE PATRIMOINE ET LES ACTIVITES PROFESSIONNELLES ........ 227
§3 – Les mesures de sûretÉ fonctionnant sous un rÉgime administratif ............................... 227
TITRE II – LA sanction individuelle ............................................................................................... 230
Chapitre I – La mesure de la sanction ............................................................................................ 232
Section I - La dÉtermination de la sanction en cas d'unitÉ d'infraction ...................................... 232
§1 – Les causes d'Exemption de la sanction .......................................................................... 232
1- EXEMPTION LEGALE DE PEINE ..................................................................................................... 232
2 – AUTRES TYPES D’EXEMPTION ......................................................................................................... 233
3 - LES IMMUNITES ............................................................................................................................... 233
4 - LA MINORITE PENALE ...................................................................................................................... 236
§ 2 – Les causes d'AttÉnuation de la sanction ....................................................................... 236
1 - LES CIRCONSTANCES ATTENUANTES EN GENERAL ........................................................................... 236
2 - LES EXCUSES ATTENUANTES ........................................................................................................... 237
§3 – Les causes d’AGGRAVATION de la sanction : la thÉorie des circonstances aggravantes
.............................................................................................................................................. 238
Section II - La dĖtermination de la peine en cas de pluralitÉ d'Infractions ................................ 239
§1 – La rÉcidive .................................................................................................................... 239
1 – LA CONSTITUTION DE LA RECIDIVE ................................................................................................. 240

369
Précis De Droit Pénal Général

2 REPRESSION EN CAS DE RECIDIVE ............................................................................................... 240


§2 – Les concours d'infractions ............................................................................................. 242
1 - CONCOURS REEL ET CONCOURS IDEAL D'INFRACTIONS ................................................................... 242
2 REPRESSION EN CAS DE CONCOURS D'INFRACTION ...................................................................... 243
CHAPITRE II – SUSPENSION et EXÉCUTION DE LA SANCTION PÉNALE ............................. 246
Section I – La suspension de l'exécution de la sanction ............................................................. 246
§1 – Le sursis ........................................................................................................................ 246
§2 – La libération conditionnelle........................................................................................... 248
§ 3 – Autres formes de suspension d'exÉcution de la peine .................................................. 251
1– LA SEMI-LIBERTE ............................................................................................................................. 252
2– LE PLACEMENT A L'EXTERIEUR ........................................................................................................ 252
3 – LA SUSPENSION EN CAS DE SURVENANCE DE DEMENCE .................................................................. 252
Section II– L'exÉcution de la peine ............................................................................................ 253
§1 – L’exÉcuction de la peine d’amende .............................................................................. 253
1 - L’EXECUTION VOLONTAIRE DE LA PEINE D’AMENDE ....................................................................... 253
2 - L’EXECUTION PAR VOIE DE CONTRAINTE ......................................................................................... 254
§ 2 – L’exÉcution de la peine privative de vie et de libertÉ .................................................. 256
1 - L’EXECUTION DE LA PEINE PRIVATIVE DE LA VIE ............................................................................. 256
2 - L’EXECUTION DE LA PEINE PRIVATIVE DE LIBERTE .......................................................................... 259
§ 3 – Les Établissements pÉnitentiaires ................................................................................ 259
§4 – Le rÉgime pÉnitentiaire en milieu fermÉ ...................................................................... 261
1 – LES PRINCIPAUX REGIMES D’INCARCERATION ................................................................................ 261
2 – LA VIE CARCERALE ......................................................................................................................... 263
3 - INDIVIDUALISATION DU REGIME PENITENTIAIRE .............................................................................. 267
§ 3 – Le rÉgime pÉnitentiaire en milieu ouvert .................................................................... 267
1-LA PERIODE DE SURETE ..................................................................................................................... 268
2 - LES REGIMES EN MILIEU OUVERT..................................................................................................... 268
CHAPITRE III – L’EXTINCTION de la sanction pÉnale ............................................................... 270
Section I – L'extinction affectÉe d’une subsistance de la condamnation .................................... 270
§1 - La prescription ............................................................................................................... 270
1 – DEFINITION ..................................................................................................................................... 270
2 - LES DELAIS DE PRESCRIPTION .......................................................................................................... 271
§2 - La grâce et quelques mesures voisines ........................................................................... 274
1 – LA GRACE ....................................................................................................................................... 274
2 – LE RELEVEMENT ET LES REDUCTIONS DE PEINE .............................................................................. 276
Section II – L'extinction résultant de la neutralisation de la condamnation ............................... 278
§1 - L'amnistie ....................................................................................................................... 278
1 – DEFINITION ET DOMAINE DE L’AMNISTIE ........................................................................................ 278
2 – LES EFFETS DE L’AMNISTIE ............................................................................................................. 280
§2 - La rÉhabilitation.................................................................................................................. 281
1 – LES CONDITIONS DE LA REHABILITATION ........................................................................................ 282
2 – LES EFFETS DE LA REHABILITATION ................................................................................................ 285
ANNEXES ............................................................................................................................................... 287
DISPOSITIONS PRELIMINAIRES, LIVRE PREMIER .............................................................. 288
Et LIVRE DEUXIEME DU CODE PENAL .................................................................................. 288
II – Extraits d’articles DU CODE DE JUSTICE MILITAIRE ...................................................... 301
III – EXTRait d’articles DU CODE Des drogues ........................................................................... 320
iv- Extraits d’articles DU CODE CIMA ........................................................................................ 333
iv- Extraits d’articles de l’Acte uniforme OHADA relatif aux societés commerciales et G.I.E. ... 349
CHAPITRE II REDUCTION DE CAPITAL ............................................................................... 351
bibliographie SOMMAIRE ............................................................................................................. 354
INDEX ALPHABÉTIQUE ............................................................................................................. 365
tABLE DES MATIÈRES ............................................................................................................... 367

370

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