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Action du vent
Équateur
Dans la troposphère (à basse altitude) il existe, en partant de l’équateur, les cellules de Hadley,
de Ferrel et polaire (fig. 22 et 23).
La cellule de Hadley est caractérisée par la forte ascendance de l’air équatorial chaud et humide
et la descente d’air sec aux environs des tropiques. L’ascendance détermine une zone de basses
pressions à l’équateur (« manque » d’air au niveau du sol ou de la mer), alors que la descente
d’air sec engendre les hautes pressions tropicales (« excès » d’air). Au niveau du sol, un courant
atmosphérique de retour, constitué d’air sec, relie les hautes pressions tropicales aux hautes
pressions équatoriales. Ce sont les alizés.
La cellule de Ferrel n’est pas à proprement parler une cellule. Une partie de l’air d’origine
tropicale poursuit sa route à basse altitude jusqu’aux environs de 50 – 60° de latitude nord ou
sud où il rencontre un courant de retour d’air polaire froid. C’est la zone dite du front polaire
(zone de basse pression). La cellule de Ferrel est caractérisée par des vents en provenance de
l’ouest. Ce sont les westerlies dont la direction est SW-NE à W-E dans l’hémisphère nord et
NW-SE à W-E dans l’hémisphère sud.
La cellule polaire est caractérisée par le courant ascendant, d’origine tropicale, qui redescend
aux pôles où il détermine une zone de hautes pressions. Au sol, un flux d’air froid relie ces
hautes pressions polaires aux basses pressions du front polaire. Ce sont les easterlies qui
soufflent du NE vers le SW, voire vers l’ouest dans l’hémisphère nord et du SE vers le NW,
voire vers l’ouest dans l’hémisphère sud.
Altitude (km)
F 60° polaires
H alizés ou
trade winds
Équateur Pot-au-noir
ou doldrums
Fig. 23 : Cartographie de la circulation atmosphérique dans l’hémisphère nord. Les vents sont déviés
vers leur droite par la force de Coriolis
Au niveau de la tropopause (haute altitude) l’air chaud monte dans la zone équatoriale et son
refroidissement l’amène à s’abaisser progressivement au cours de son cheminement vers les
pôles. A cause de la force de Coriolis, ce flux d’air équatorial méridien engendre deux flux qui
acquièrent rapidement une direction W-E dans l’hémisphère nord : ce sont les jet-streams
tropical et polaire.
2 – Cyclones et anticyclones
Ils résultent de l’enroulement des vents autour des centres de basse et de haute pression, sous
l’influence de la force de Coriolis (fig. 24). Ce sont donc des objets troposphériques qui seraient
engendrés par les oscillations des jet-streams dans la tropopause.
Cyclone ou dépression Anticyclone
dépression
Les cyclones tropicaux (ou typhons et hurricanes) naissent de l’interaction entre l’atmosphère
et un océan chaud (27°C ou plus). Ils sont beaucoup plus énergiques, associés à d’abondantes
précipitations et à des vents violents (200 km/h ou plus ; voir échelle Saffir-Simpson).
Alimentés en vapeur d’eau par l’océan, ils dépérissent et meurent lorsqu’ils envahissent les
continents. Les cyclones tropicaux ne se développent qu’en domaine océanique intertropical,
au sein de la cellule de Hadley. Ce sont des colonnes ascendantes d’air humides dont le sens de
rotation est commandé par la force de Coriolis. Le diamètre du tourbillon d’air humide est de
l’ordre de 400 à 500 km (petit pour un cyclone), avec un œil central de 20 km de diamètre,
dépourvu de nuages. Durant sa montée, l’air est refroidi et asséché ; sa masse volumique
diminuant, il redescend par la colonne verticale (œil du cyclone), contribuant à entretenir le
mécanisme et entrainant l’aspiration et l’élévation du niveau de l’océan.
La violence des vents et le haut niveau marin accentué par les marrées expliquent le caractère
destructeur des cyclones tropicaux. Leurs vitesses de déplacement varient de 20 km/h (cyclone
jeune) à 50 ou 60 km/h pour un cyclone adulte en bout de course. Leur durée de vie est de
quelques semaines, durant lesquelles ils peuvent parcourir jusqu’à 10.000 km. Leur trajet
grossièrement rectiligne est légèrement dévié par la force de Coriolis vers la droite dans
l’hémisphère nord et vers la gauche dans l’hémisphère sud.
L’action géologique du vent se manifeste surtout dans les régions dénudées où l’absence du
liant naturel des sédiments, l’eau liquide, rend les dépôts meubles facilement mobilisables :
déserts chauds, déserts froids, rivages de mers à marée etc. Le climat devient désertique lorsque
les précipitations sont inférieures à 25 cm/an.
Le vent est à la fois agent d’érosion et de sédimentation.
Le vent agit par son énergie cinématique (action de balayage ou déflation) aux effets
dramatiques lorsque la vitesse dépasse 100 Km/h, pouvant atteindre 300 Km/h dans le
tourbillon ou vortex des tornades les plus violentes. Il agit aussi par l’intermédiaire des
particules qu’il transporte (corrasion).
a) – La déflation
En fonction de leur dimension et de la vitesse du vent, les particules (poussières, sables …) sont
transportées en suspension, déplacées par saltation ou, si elles restent au contact avec leur
support, par reptation.
En balayant la surface meuble des plateaux des roches dures, le vent ne laisse apparaître qu’une
dalle rocheuse comme les hamadas sahariennes.
Lorsque le sol comporte des matériaux hétérométriques (ex. : sols alluviaux), la déflation
élimine, par vannage, les particules fines laissant sur place un désert de cailloux appelé reg (fig.
25) occupant les 3/4 de la surface du Sahara.
Fig. 25 : Reg à cailloux de phtanite (Mauritanie) (phtanite = roche sédimentaire siliceuse et argileuse)
b) – La corrasion
Les particules transportées par le vent, en particulier les grains de quartz, agissent comme des
micro-burins façonnant une surface luisante, d’aspect gras (poli désertique). Ainsi les grains
façonnés par le vent sont généralement piquetés et mats, subsphériques (ronds-mats), avec une
exoscopie à croissants et des V de chocs.
Sur les cailloux de taille appréciable, les projections de grains réduisent les aspérités et réalisent
des facettes planes réunies par des angles émoussés (ventifacts). Les cailloux tétraédriques à 3
faces exposées au vent (fig. 28.III) sont plus courants que les dreikanters (à une base et 2 faces
oblongues séparées par une arrête médiane).
Sur les roches à lits de dureté inégale alternant, la corrasion provoque une érosion différentielle
à l’origine des alvéoles (fig. 26), des trous ou cannelures ou des roches en champignons (table
du diable). Les roches tendres (sols argileux) sont entaillées de longues rigoles donnant des
yardangs (ou jardangs).
Fig. 26 : Alvéoles de bioturbations et stratifications obliques dégagées par corrasion dans un sable
2 – Sédimentation éolienne
Lorsque l’énergie du vent faiblit, les particules transportées se déposent. Les principaux dépôts
éoliens sont : les sables, les poussières ou lœss et les cendres volcaniques.
Les dunes sont des édifices éoliens hauts de quelques mètres à plus de 100 mètres. Le sable qui
les constitue est généralement siliceux, formé de grains de quartz, plus rarement du gypse et
assez fréquemment un sable calcaire (c’est un sable fin et sec). A l’origine d’une dune se trouve
un obstacle (relief, végétation) qui ralentit la vitesse du vent provoquant à l’aval (sous le vent)
le dépôt de grains de sable. La forme élémentaire qui en résulte est une barkhane (fig. 27 et 28)
dont la convexité est tournée vers le vent (au vent).
Les barkhanes, très fréquentes dans les déserts chauds (Sahara), progressent de plusieurs mètres
par an, à condition que la direction du vent demeure constante. Plusieurs barkhanes donnent les
dunes transversales (fig. 27).
A l’échelle décimétrique c’est l’image des rides (ripple-marks) qui orne la surface des dunes
avec la même dissymétrie qui constitue un bon critère de polarité des paléovents après
fossilisation.
Des vents de direction variable édifient les dunes en étoile. Les ergs sont des assemblages
complexes de dunes sur plusieurs kilomètres.
Il faut distinguer :
- des dunes stationnaires des régions où le vent change de direction d’une saison à l’autre
(déserts),
- des dunes mobiles (ex. barkhanes, fig. 28) qui s’édifient dans des régions où un même
vent est dominant pendant toute l’année (désert et littoral).
Le vent mobilise chaque année au Sahara 10 à 20 millions de tonnes de sable et est susceptible
d’exporter 60 à 200 millions de tonnes de poussières. Ces poussières restent en suspension
plusieurs semaines à plusieurs mois dans l’air sous forme de nuages ou lithométéores. Certaines
se déposent très loin de leur patrie (en Europe, dans l’Atlantique, en Amérique) sous forme de
« pluies rouges » ou de « neiges colorées ».
Fig. 27 : Divers types de dunes (vues en plan). 1 = barkhanes, 2 = crêtes barhanoïdes, 3 = dunes
transversales, 4 = dunes longitudinales, 5 = dunes en étoile, 6 = dunes paraboliques
Fig. 28 : Les barkhanes vues en plan (I) et leur progression (II), cailloux à facettes (III), structure en
stratifications entrecroisées des sables dunaires (IV)
Au bilan, l’exportation moyenne annuelle de poussières de l’Afrique est d’environ 260 millions
de tonnes (fig. 29). Les vents d’Ouest en rapportent 60 millions de tonnes sur le continent. Au
cours du trajet trans-océanique, la quantité de poussière en suspension dans l’atmosphère
diminue par chute des particules lourdes sur l’océan ; ce qui entraîne une sédimentation sous-
marine. La moitié du tonnage exporté tombe dans les premiers 1000 Km, là où leur très forte
densité dans l’atmosphère obscurcit le ciel, d’où l’expression « Dunkelmeer » (mer sombre) du
nom d’un navigateur allemand.
c) – Le lœss
Les chutes de poussières participent à la formation des croûtes et des sols. A l’échelle de
plusieurs dizaines de millénaires, ces dépôts cumulés représentent plusieurs mètres d’épaisseur
de poudre jaunâtre : le lœss.
Ces dépôts se font à la limite des grands glaciers ou au voisinage des déserts (Egypte,
Afghanistan). Ils renferment à la fois de l’argile, du sable et du calcaire. Les régions recouvertes
sont fertiles. Le calcaire dissout dans le lœss par les eaux d’infiltration concrétionne dans les
horizons illuviaux sous forme de « poupées ». Le lœss superficiel décalcifié et plus sombre est
appelé lehm (excellente terre à briques).
Le vent transporte aussi des cendres (en réalité poussières) volcaniques à la suite d’éruptions
explosives. En 1982, l’éruption du volcan mexicain El Chichon rejeta 500 millions de tonnes
de poussières, 17 millions de tonnes de soufre, plusieurs millions de tonnes d’azote ce qui rendit
l’hiver suivant plus rigoureux sur le continent américain. La triple explosion du Krakatoa
(Indonésie), en 1883, éparpilla dans l’atmosphère plus de 18 milliards de m3 de cendre qui se
répandirent sur une surface de 750.000 Km2. Des phénomènes semblables eurent lieu très
souvent au cours des temps géologiques.
L’augmentation de la radioactivité des glaces et des sédiments est liée aux explosions atomiques
après dispersion des nuages radioactifs par le vent sur toute la surface de la Terre. On peut citer
la dispersion d’éléments radioactifs libérés par l’explosion de la première bombe expérimentale
(16/07/45, au Nouveau-Mexique, USA) et le nuage radioactif qui recouvrit une bonne partie de
l’Europe après l’explosion de la centrale de Tchernobyl (Ukraine, 26/04/86). Cette dernière
explosion a entraîné l’élévation du taux de 137Cs de plus 500.000 fois à Paris au 2/05/1986.
Le rôle géologique du vent, longtemps envisagé comme mineur et vu à travers « les vents de
sables », doit être reconsidéré. Ce sont, en effet, des centaines de millions de tonnes de
poussières qui sont transportés chaque année par le vent, mobilisation qui joue un rôle
climatique, sédimentologique et pédologique non négligeable.