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Lettre n°20

LE MODERNISME
Saint Pie X
« PASCENDI »
DEFINITION à la destruction de la foi pour n’en garder
que l’expression d’un vague sentiment reli-
« Si quelqu’un se mettait à la gieux ; le modernisme conduit ainsi à
tâche de rassembler toutes les erreurs l’athéisme et à la destruction de toute reli-
contre la foi pour en concentrer la sève gion.
et la substance, il ne pourrait mieux Cette hérésie attaque l’Église Ca-
faire que les modernistes : le moder- tholique de l’intérieur : « Les partisans du
nisme est l’égout collecteur de toutes les modernisme ne doivent pas être recherchés
hérésies » (Pape Saint Pie X, « Pascendi parmi les ennemis déclarés de l’Église,
Dominici Gregis », 1907). mais dans son sein même, ennemis
d’autant plus redoutables qu’ils le sont
Le Pape Pie IX, en 1864, donne une moins ouvertement : on trouve parmi eux
variante de cette définition dans son ency- un grand nombre de Catholiques laïques,
clique « le Syllabus » : « Le modernisme et, ce qui est encore plus à déplorer, de
est l’hérésie selon laquelle l’Église Ca- Prêtres ».
tholique devrait se réconcilier avec le « C’est du dedans que les moder-
progrès, le libéralisme et la civilisation nistes trament la ruine de l’Église : le
moderne ». danger est aujourd’hui presque en ses
entrailles mêmes et en ses veines, et leurs
Si l’Église Catholique a pour mis- coups sont d’autant plus sûrs qu’ils
sion de convertir le monde moderne aux savent mieux où la frapper ».
enseignements de Notre Seigneur Jésus-
Christ, le modernisme rêve de convertir LES CONDAMNATIONS
l’Église à l’esprit du monde, union adul- DE L’EGLISE
tère entre la Croix de Notre Seigneur (pau-
vreté – chasteté – obéissance) et l’esprit de Les racines du modernisme ne sont
la révolution (liberté – égalité – fraternité). rien d’autres que les grandes idées maçon-
Le modernisme est une maladie de niques, démocratiques et libérales déjà
l’intelligence, qui transpose naturellement condamnées de nombreuses fois par les
tous les dogmes Catholiques, en une sorte Papes des XVIII et XIX siècles.
de suicide moral et intellectuel qui aboutit
-2-

Mais le modernisme en tant que tel La vérité, objet de notre intelli-


fut expressément condamné par le Pape gence, existe en dehors de nous même ;
Saint Pie X, d’abord dans son Décret du 3 l’intelligence et la volonté doivent donc se
juillet 1907 « Lamentabili Sane », puis soumettre à cet objet qui est premier. Ain-
par son encyclique du 8 septembre 1907 si, cette doctrine philosophique de la
« Pascendi Dominici Gregis », laquelle connaissance, doctrine traditionnelle de
relève du Magistère infaillible. l’Église Catholique, porte le nom d’Objec-
tivisme.
LES RACINES Cet objet étant unique quelque
soit le nombre de personnes qui l'exa-
DU MODERNISME mine, la vérité existe donc par elle
même, objectivement, indépendamment
« Enfin, et ceci paraît ôter aux mo- de la conception qu’on puisse en avoir.
dernistes tout espoir de remède, leurs doc-
trines leur ont tellement perverti l’âme Pour le moderniste au contraire, le
qu’ils en sont devenus contempteurs de sujet est premier. L’objet (le vrai) doit se
toute autorité, impatients de tout frein : soumettre au sujet (l’âme douée d'intelli-
prenant assiette sur une conscience faus- gence et de volonté), sujet qui va donc de-
sée, ils font tout pour qu’on attribue au venir premier dans l’ordre de la connais-
pur zèle de la vérité ce qui est œuvre sance. Cette fausse doctrine, sortie du cer-
uniquement d’opiniâtreté et d’orgueil ». veau brumeux d’Emmanuel Kant (1724-
1804), qui prêche le primat du sujet sur
« La cause première et immédiate l’objet, aura pour nom Subjectivisme.
du modernisme est une perversion de Selon cette fausse doctrine, cha-
l’esprit : c’est d’une alliance de la fausse cun aurait sa vision propre et person-
philosophie avec la foi qu’est né, pétri nelle de la vérité, chacun pourrait créer
d’erreurs, leur système. Les causes éloi- sa propre vérité, de façon indépendante
gnées peuvent être réduites à trois : la et subjective. La notion de vérité objec-
curiosité (l’amour des nouveautés), tive disparaîtrait ainsi totalement. Si la
l’orgueil et l’ignorance ». L’orgueil vérité ne vient pas de Dieu, mais est une
conduira à l’étroitesse d’esprit, à l’opiniâ- création de notre intelligence, la vérité
treté, à la désobéissance, à la curiosité, et n’existe pas : plus besoin de surnaturel,
enfin à l’aveuglement spirituel. de révélation, de lois, de Dieu !
Le modernisme est d’abord causé Le subjectivisme philosophique va
par une maladie de l’intelligence (le sub- conduire à trois faisceaux principaux
jectivisme), dommage cérébral pratique- d’hérésies, à savoir l’agnosticisme, l'im-
ment irréversible : le moderniste n’est manentisme et l’évolutionnisme.
plus capable d’utiliser correctement son
cerveau, et devient donc l’esclave de ses 1 : L’AGNOSTICISME
sens, de ses sensations et impressions.
Si la vérité n’existe pas, ou si elle
Quelques mots d’explication, selon n’existe dans chaque intelligence que de
la doctrine de Saint Thomas d’Aquin. façon purement subjective, indépendam-
L’âme est une substance spirituelle, douée ment de tout élément objectif, nous ne
d’intelligence (dont l’objet formel est le pourrons alors être sûr de rien puisque
vrai) et de volonté (dont l’objet formel est notre intelligence devient incapable
le bien). Dieu nous a donc donné l’intelli- d’appréhender la vérité.
gence pour connaître la vérité, et la volonté
pour choisir le chemin qui y mène !
-3-

C’est l’agnosticisme : la vérité ob- vrait être mis au même rang que la Ré-
jective n’existe pas, personne ne peut être vélation ».
certain de l’existence de Dieu ; d’ailleurs, « Le sentiment religieux qui jaillit
Il n’existe sans doute pas réellement, mais ainsi, par immanence vitale, des profon-
serait seulement le fruit du travail de notre deurs de la subconscience, est le germe de
esprit, comme une image purement artifi- toutes les religions, qui ne seraient, d’après
cielle. « Selon l’agnosticisme, la raison les modernistes, que des efflorescences de
humaine n’est pas capable de s’élever ce sentiment. La religion Catholique ne fut
jusqu’à Dieu et ne peut reconnaître Son engendrée que par le processus d'imma-
existence ; Dieu n’est point objet direct de nence vitale dans la conscience du Christ »
science ni un personnage historique. La (cf. les mouvements charismatiques).
science doit être athée, pareillement l’his-
toire ; nulle place dans le champ de l’une, 3 : L’EVOLUTIONISME
comme de l’autre, sinon pour les phéno-
mènes ». La vérité change et évolue selon
les circonstances. L’évolutionniste refuse
« Mais le Concile Vatican 1er a dé- tout principe éternel. « Les formules que
claré ce qui suit : les Catholiques appellent dogmes sont su-
- ‘Si quelqu’un dit que la lumière natu- jets aux vicissitudes du temps, et doivent
relle de l’humaine raison est incapable donc pouvoir changer et s’adapter. Elles
de faire connaître avec certitude, par le doivent être vivantes, de la vie même du
moyen des choses crées, le seul et vrai sentiment religieux. Le jour où cette adap-
Dieu, notre Créateur et Maître : qu’il tation viendrait à cesser, ces formules se
soit anathème !’ videraient du même coup de leur contenu
- ‘Si quelqu’un dit qu’il ne se peut faire, primitif : il n’y aurait d’autre parti à
ou qu’il n’est pas souhaitable que prendre que de les changer ».
l’homme soit instruit par Révélation Si Dieu et Sa vérité évoluent avec
Divine du culte à rendre à Dieu : qu’il le temps, ce qui était vrai hier ne l’est plus
soit anathème !’ aujourd’hui, et la vérité d’aujourd’hui ne
- ‘Si quelqu’un dit que la Révélation Di- sera pas celle de demain. Dieu n’existe
vine ne peut être rendue croyable par donc pas !
des signes extérieurs, et que ce n’est
donc que par l’expérience individuelle L’ESPRIT MODERNISTE
ou par l’inspiration privée que les
hommes sont mus poussés vers la foi : « La grande angoisse des moder-
qu’il soit anathème ! » nistes est de trouver un moyen de concilier
l’autorité de l’Église avec la liberté des
2 : L’IMMANENTISME croyants. Pour eux, l’autorité, tout comme
l’Église, ont leur origine dans la
Si la vérité objective n’existe pas, conscience religieuse, et lui sont donc sou-
l’homme peut fabriquer sa propre vérité mis. L’autorité ecclésiastique devrait donc
dans son esprit : c’est la doctrine de adopter une forme démocratique pour évi-
l’immanentisme, du latin « in » et « mane- ter un conflit de devoir dans la conscience
re » : « demeurer à l’intérieur ». de l’humanité. Dans le camp moderniste,
chacun est libre de croire ou de rejeter ce
« Selon cette immanence vitale, la qu’il aime ou n’aime pas ».
foi, principe et fondement de toute la re- Le moderniste peut être reconnu par
ligion, réside dans un certain sentiment un certain nombre de signes :
intime engendré lui-même par le besoin 1- Un grand orgueil, accompagné du
du Divin, et ce sentiment religieux de- mépris de toute forme d’autorité Di-
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vine ou ecclésiastique : « L’orgueil est actives sont plus importantes que les vertus
comme chez lui dans la doctrine des passives.
modernistes. »
« Orgueil, cette confiance en eux REMEDES CONTRE LE
qui les fait s’ériger en règle universelle,
cette vaine gloire qui les représente à MODERNISME
leurs propres yeux comme les seuls dé-
tenteurs de la sagesse, cet esprit On ne devient pas malade en
d’insoumission qui appelle une conci- quelques minutes. De même, notre esprit
liation de l’autorité avec la liberté, cette ne devient pas subjectiviste en un instant.
prétention de réformer les autres dans Dieu veille sur nous, nous protège en face
l’oubli d’eux-mêmes, ce manque abso- des dangers qui menacent nos âmes, au mi-
lu de respect à l’égard de toute autorité. lieu de ce débordement d’erreurs. Mais,
Il n’y a nulle route qui ne conduise comme le dit le dicton : « Aide-toi, et le
plus droit ni plus vite au modernisme Ciel t’aidera ! » Voyons donc comment
que l’orgueil ! » nous protéger du modernisme.

2- Une curiosité incontrôlée pour les 1- Gardons une forte vie spirituelle : re-
nouveautés, une passion pour la li- cours fréquent à la sainte Messe tradi-
berté et l’esprit démocratique. tionnelle, aux Sacrements de Pénitence
et de la Sainte Eucharistie, au Rosaire,
3- Le mépris pour la philosophie et la à la méditation, aux Exercices de Saint
théologie de Saint Thomas d’Aquin : Ignace au moins une fois tous les deux
« L’amour des nouveautés va toujours ans. Rejetez la télévision et freiner
de pair avec la haine de la méthode l’usage de l’Internet.
scolastique ».
2- Apprenons à penser droit en formant
4- Un mépris souverain pour toutes les notre intelligence pour la préserver
traditions, surtout dans l'interpréta- du modernisme : étudions une heure
tion des Saintes Écritures. par semaine : le Catéchisme du Concile
5- Le mépris des Exercices Spirituels de de Trente, les Actes du Magistère
Saint Ignace de Loyola. (d’avant 1958), les livres de Monsei-
gneur Lefebvre, les grands auteurs anti-
Le moderniste est aussi passé libéraux (de Ségur, Gaume, Barbier,
maître dans la contradiction : « Dans leurs Delassus …) publiés aux ESR.
livres, vous pourriez trouver des choses qui 3- Pratiquons les vertus d’humilité, de
pourraient être approuvées par un Catho- docilité et d’obéissance : laissons-
lique ; mais en tournant la page, vous trou- nous guider et aider par un bon Prêtre
verez des enseignements qui pourraient traditionnel.
avoir été dictés par un rationaliste ! »
Ainsi, le moderniste va distinguer 4- Vivons selon nos convictions Catho-
le « Christ historique » (qui est mort le liques, surtout dans les loisirs et la
Vendredi saint) du Christ de la foi (Qui vit façon de s’habiller : si nous ne vivons
dans nos âmes par la Grâce Sanctifiante) ; pas comme nous pensons, un jour nous
il considérera l’Église Catholique comme en viendrons à penser comme nous vi-
un produit de la conscience collective, et vons !
les Sacrements comme des purs symboles.
Il prêche la séparation entre l’Église Tout dévoué en Notre Seigneur Jé-
et l’État, fait du laïcisme un facteur de pro- sus-Christ et Sa Très Sainte Mère.
grès dans l’Église, et, en ce qui regarde la
morale, adopte le principe que les vertus Abbé Jean-Luc Lafitte

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