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RÉSUMÉ
L’Afrique, en général, et l’Afrique de l’Ouest, en particulier, se trouve dans une crise
politique. Cette crise rend l’avenir du continent incertain. Le pouvoir politique, depuis
l’avènement de la philosophie du contrat social, est comme une entité qui se joue
entre les égaux, c’est-à-dire entre les individus ayant les mêmes droits ontologiques et
imprescriptibles. Or, la politique doit être perçue comme une activité pacificatrice des
rapports sociaux. Cependant, en Afrique, l’un des problèmes qui fragilise la stabilité
sociale, c’est la politique. Ainsi, le recours à J. Locke peut être un facteur palliatif
pour donner un nouvel élan, un nouvel espoir à l’Afrique. Le recours à Locke n’est
pas fortuit, car les conditions qui ont inspiré la publication de son ouvrage Les deux
traités du gouvernement civil nous servent de modèle de référence.
Mots-clés : Droit naturel; Libéralisme politique; Pouvoir politique; État de droit;
Droits de l’homme
ABSTRACT
Africa in general, in particular West Africa are facing political instability. This political
turmoil which gives impression a future without any hope. The political power since
the birth of social contract of philosophy is seen as where the place where the power
is a rule between the same categories o people. Moreover the power must be acquired
in trustworthy conditions, by suggesting this : debats of ideas by substituting severe
violence in the assurance that the truth neither belong to me nor the others. It is a
mysterious field through eloquent debates with citizens. In this ways politics must be
a peaceful activity of social relationship.
Face to all these civils that weakeen the peace. The appeal to John Locke though can
be a factor of developpment for african countries. An auspious and new hope for africans
and africa. Appeal to John Locke is worhy as the matter of condition of publishing of
book about The Two of Civil Government represents a reference book.
Keywords : Natural Right; Political Liberalism; Political Power; State of Humain
20 Revue Ivoirienne de Philosophie, LE KORE 2021; N° 59 : pp. 19-30.
INTRODUCTION
« l’État, selon mes idées, est une société d’hommes instituée dans la
seule vue de l’établissement, de la conservation et de l’avancement de
leurs INTÉRÊTS CIVILS ». L’État est une formalisation institutionnelle
par les hommes en vue de mener une vie pacifique et harmonieuse. Il
est de la compétence de l’État de garantir les propriétés respectives
des hommes.
Venir à l’état social n’est pas à appréhender comme une configuration
bourgeoise, mais sous un angle éthico-politique, c’est-à-dire l’État est
considéré comme une personne morale incarnant la confiance des citoyens,
ayant pour but de non seulement préserver les individus de tout comportement
attentatoire, mais aussi et surtout, de favoriser l’accumulation des biens.
En effet, la société civile est instituée afin de statuer sur tous les différends
susceptibles de s’élever parmi les hommes. Car,
Elle a pour fin de parer et de remédier aux inconvénients de l’état de
nature, qui deviennent inévitables dès lors que chacun est à la fois
juge et partie, en établissant une autorité, que tout un chacun puisse
saisir quand il a été lésé, ou quand un litige s’élève, et à laquelle tout
membre de la société doit obéir (J. Locke, 1977, p. 123-124).
Ce système juridique et judiciaire a pour compétence de trancher les
problèmes qui s’élèveront entre les hommes et punir les contrevenants. La
punition repose sur la détermination des lois permanentes dont la violation
entraine l’application d’un châtiment proportionné.
Les hommes ne peuvent abandonner leur première société (l’état de nature)
pour amplifier leur souffrance, mais au contraire, ils le font pour améliorer
leur condition existentielle. Comme J. J. Rousseau (1973, p.78) nous édifie
dans Du Contrat Social : « Ce que l’homme perd par le contrat social, c’est
sa liberté naturelle et un droit illimité à tout ce qui le tente et qu’il peut
atteindre ; ce qu’il gagne, c’est la liberté civile et la propriété de tout ce qu’il
possède ». Ce qui veut dire que par le contrat social, l’homme a une liberté
totale conforme aux lois civiles, car sa propriété qui se trouvait menacée à
l’état prépolitique, aura toute son effectivité dans la société politique. Après
cette description de rôle de l’État chez John Locke, nous analyserons dans
les lignes qui suivent l’idée du « Droit de résistance ».
d’accorder sa confiance à qui que ce soit. Donc si le peuple africain veut que
le pouvoir public réalise ses promesses, il faudrait, de prime abord, qu’il fasse
une véritable analyse, c’est-à-dire une analyse minutieuse et méticuleuse
sur non seulement les projets des discours politiques, mais aussi sur la
moralité de ceux qui tiennent ses discours ; d’où la nécessité pour le peuple
de s’instruire. Pour mesurer les degrés de leur moralité, il suffit de jeter un
regard rétrospectif sur leurs passés pour s’en rassurer. Il s’agit de déceler si
toutefois les discours de l’heure concordent avec leur passé. C’est dans cette
optique que Jürgen Habermas (2004, p. 125) écrit :
Le peuple n’est pas considéré comme une donnée prépolitique, mais
comme le produit du contrat social. Dans la mesure où les intéressés décident
d’un commun accord de faire usage de leur droit originel de « vivre dans les
conditions de lois publiques de la liberté », ils forment une association de
sujets de droit libres et égaux. Se décider à vivre dans des conditions de
liberté politique revient à prendre l’initiative d’une pratique constituante.
Le peuple de Locke est un artisan de sa propre histoire. Il n’est pas
un peuple spectateur passif suivant la réalisation de sa destinée
hypothéquée. Il prend acte de son devenir historique pour employer
un mot marxiste. Mieux, on comprend qu’un peuple qui acceptent
que ses dirigeants agissent comme bon leur semble, cautionne qu’on
lui exerce un pouvoir arbitraire, c’est-à-dire un pouvoir sans droit ni
devoir. Son peuple est un « individu porteur en lui à la fois d’éléments
de particularité et d’une dimension d’universalité, va rester juge, bout
en bout, de la conformité des lois du législateur à leur mission » (L.
Jaume, 2009, p. 153).
Mais la résistance, dans sa forme ou du moins dans le contexte africain, est
appréhendée comme une incitation à la violence, puisque les droits humains
en tant que droits consubstantiels à l’humanité, sont presque, en Afrique,
piétinés. Or, fouler aux pieds les droits imprescriptibles de l’homme, c’est le
réduire à l’arbitraire, à l’esclavage. C’est enlever en lui toute sa dimension
d’homme, sa dignité en tant qu’un être humain.
En effet, les forces de l’ordre, dont leur mission est de veiller sur les droits
de l’homme, se trouvent manipulées par les dirigeants. Une telle attitude de
la part des dirigeants a pour dessein de pérenniser leur pouvoir. C’est dans
cette perspective que J. Locke (1977, p.191) s’indigne en écrivant contre une
telle dérive du pouvoir :
Un individu qui se sert du pouvoir qu’il détient, non pour le bien de ceux
sur qu’il l’exerce, mais pour son avantage personnel et particulier (…)
ses commandements et ses actions ne tendent pas à la préservation
de ce qui appartient au peuple, mais à l’assouvissement de son
ambition personnelle, de ses vengeances, de son avidité, ou de toute
autre passion irrégulière.
Dans ce passage, pour Locke, le dirigeant qui ne se soucie que de lui-
Ibrahim A. DIALLO (2021), Le libéralisme politique de John Locke : un rempart 27
même ou qui dirige le pouvoir comme son patrimoine culturel, ne mérite pas
d’être appelé dirigeant. Car celui qui détient la destinée de tout un peuple, en
suivant Locke, c’est celui-là même qui est doté d’une grande moralité, qui peut
prendre le dessus sur toute conception clanique, tribale et ethnocentrique.
C’est ainsi qu’il n’y a pas de loi légitime émanant d’un gouvernement civil,
affirmait Locke, sans le « consentement » de chaque citoyen.
Au regard de ces tableaux sombres, il est du devoir du peuple africain de
prendre son destin en main afin de résister aux pouvoirs qui réprimandent
les droits naturels et civils, même au péril de sa vie. C’est aussi une forme de
reconquérir sa liberté qui semblerait être perdue. Mais le peuple africain, par
crainte des forces répressives, s’enferme dans la passivité et la résignation.
Or, une telle attitude conforte certains dirigeants à persister dans la dictature.
C’est en ce sens que La Boétie (2005, p. 94), un des apôtres de la cause du
peuple, un avocat des voix sans voix, affirme : « c’est la servilité du peuple
qui cause leur servitude ; que c’est leur lâcheté qui fait la force des mauvais
souverains ; que, pour être, il leur suffirait de ne pas les soutenir ». Pour
La Boétie, un peuple, malgré sa situation désagréable, s’il continue à se
complaire dans ce système, est responsable de son sort. Le peuple se doit
d’être conséquent, c’est-à-dire qu’il ne doit pas suivre un gouvernement qui
l’opprime.
Ainsi, il est invité à faire de sa destinée une chose à inventer, à signifier,
car, en assistant à la réalisation cruelle de sa propre destinée, on se réduit
aux rangs des êtres dépourvus de discernement. C’est pourquoi A. Camus
(1951, p. 28) écrit : « se taire, c’est laisser croire qu’on ne juge et ne désire
rien ». En ce sens, tout comportement silencieux est une souscription à son
propre malheur, c’est aussi montrer sa disponibilité à l’autre de le transformer
en une chose. Pour la reconquête de sa liberté, Camus évoque le concept de
«Révolte» ce que Locke nomme «Résistance».
L’homme d’État, aux yeux de Locke, est celui qui se plie aux exigences
des ressorts juridiques, qui applique les lois avec impartialité, qui écoute ses
gouvernés avec beaucoup d’attention afin de s’enquérir des maux dont ils
souffrent. L’homme d’État, pour Locke, c’est celui qui va à la rencontre de son
peuple, qui se réveille nuitamment lorsque son peuple dort. Qui laisse toute
autonomie effective à son peuple de s’extérioriser en face de lui, qui fait de
la liberté d’expression, de la liberté de conscience et de culte, des principes
juridiques inébranlables.
L’État de droit est le fait que l’État en tant qu’organe régulateur est soumis
à des évaluations juridiques. En ce sens, les gouvernants, dans l’adoption
des nouvelles lois sont obligés de consulter le peuple. Construire un véritable
État de droit en Afrique est une exigence. Cette exigence est à la fois morale
et éthique, car elle y va du respect de la dignité humaine. L’État de droit a
28 Revue Ivoirienne de Philosophie, LE KORE 2021; N° 59 : pp. 19-30.
CONCLUSION