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Prologue
Fabien HEIN vient définir le Do It Yourself comme un trait culturel majeur dans la culture punk,
indissociable de celle-ci. « C’est un critère d’authenticité » p.9 dira-t-il. Être punk relèverait d’un mode de
vie reflétant engagement et action. L’autodétermination serait la clé vers une émancipation par laquelle la
culture punk s’élance. Fabien Hein aborde la vision négative du punk. Bruyant, extravagant et avant tout
engagé, le punk vient choquer. Mais l’auteur nous rappelle aussi les bienfaits de la pratique punk. Le DIY
rentrant en jeu pour organiser, créer, et coopérer, rendant chaque personne joignant le mouvement un
membre actif. Le mouvement punk incite, invite.
La vulgate punk
Fabien Hein retrace l’importance des Sex Pistols dans cette émergence. Leur arrogance les rendant
désirables autant que détestables, qu’on les aime ou les déteste dans tous les cas ils ne rendent pas
indifférents. Ils ne sont qu’un maillon entre des précurseurs et celleux qui leur succèderont, musiciens, fans
de punk rock ou bien juste en récupérer l’esthétique, le punk se propage à vitesse grand V. Que chacun
puisse se dire qu’il peut monter sur scène et faire tout comme leurs idoles est un élément clé dans ce
mouvement. Ce n’est pas la qualité qui est valorisée mais l’investissement personnelle et l’amour du punk.
Arrivent ainsi les fanzines. Les magazines officiels ne laissant pas la place à la scène punk, les fans se
mettent à créer leurs propres supports, nourrissant d’autant plus le DIY dans cette sous-culture naissante. Il
parlera d’une illustration du fanzine britannique Sideburns représentant trois accords avec les mentions
« Voici un accord, en voici un autre, en voilà un troisième, maintenant monte ton propre groupe ».
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HEIN, Fabien. Do it Yourself! Autodétermination et culture punk. Le Passager clandestin., 2012.
Cela ne se limitant pas à la création artistique mais à l’ensemble de la chaîne de production culturelle.
Rendant obsolètes les labels majeurs.
L’effet punk
Le punk est bien plus qu’un moment entre copain se saisissant d’instruments, c’est une contestation. Une
jeunesse qui se lève face à une société capitaliste poussant à la consommation. Une solidarité. Tout le
monde peut faire, et est même encouragé à le faire. Une lutte contre les critères discriminants et la
méritocratie. C’est une porte grande ouverte pour faire entrer une dimension féministe dans le punk.
Femme comme homme a sa place et peut faire entendre sa voix (littéralement). Le punk comme un appel à
l’action rentrant dans son contexte social, culturel, économique, idéologique et politique.
Une force inouïe est conférée au mouvement de par la recherche continue de moyens de contourner le
système, les normes, des moyens alternatifs, des modes de vie autonomes. Beaucoup de confrontations
avec les gouvernements trouvent place au sein de l’Europe durant ces périodes dans des vagues de violence
politique. Les USA ne sont pas épargnés non plus. Le contexte est propice à l’émergence du punk rock et
du mouvement punk dans cette humeur générale libertaire.
Eloge de l’action
« Place à l’action ». Sur le modèle des Ramones, l’élan est donné pour agir. Peu importe les compétences,
les techniques, s’y essayer c’est réussir dans ce mouvement. N’importe qui peut jouer du punk rock. Une
recherche permanente de liberté.
« Quoi qu’il en soit, dans cette configuration, la vulgate punk produit de façon locale
et temporaire de nouvelles perceptions, de nouveaux jugements, de nouvelles valeurs
et de nouvelles normes qui déterminent une nouvelle cohérence de l’action
individuelle et collective » p.36
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HEIN, Fabien. Do it Yourself! Autodétermination et culture punk. Le Passager clandestin., 2012.
« Compte tenu de cette pluralité de traditions, la vulgate punk ne fait que confirmer le
passage d’une culture de la consommation à une culture de la participation » p.39
Il fera le lien entre cette dynamique et le récent « journalisme citoyen ». Il argumente en citant l’ancien
chanteur des Dead Kennedys qui invite à devenir les médias au lieu de les haïr.
« En ce sens, dans la seconde moitié des années 197, la vulgate punk et la vulgate
journalistique tirent parti de la démocratisation des moyens de production, puis au
cours de la seconde moitié des années 1990, de l’accès aux nouveaux outils de
communication numériques. » p.40
L’auteur fera également le lien entre cette dynamique et le pogo dans la régulation de la scène punk rock,
la participation comme valeur fondamentale indissociable d’une éthique de responsabilité.
« De tels succès finissent par convaincre une partie de cette génération que le
déterminisme social n’est pas une fatalité. » p.43
Il citera Edgar Morin pour donner l’origine de cette dynamique nietzschéenne dans le processus de
transformation sociale des Trente Glorieuses de par l’amélioration des conditions matérielles d’existence,
des conquêtes sociales, de nouveaux besoins et loisirs rendant exigeant sur le désir de vivre sa vie.
Edgar Morin, Les stars, Paris, Seuil, coll. “Essais”, 1972, p.24.
Il cite ensuite David Riesman, sociologue.
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HEIN, Fabien. Do it Yourself! Autodétermination et culture punk. Le Passager clandestin., 2012.
Do it yourself!
Fabien Hein définit le DIY comme « une disposition humaine tendue vers la résolution de problèmes
pratiques » p.47.mais fait la distinction entre coproduction et autoproduction, le punk tendant ainsi vers le
premier. Il montrera la valorisation du DIY.
Il dira que le mouvement punk est formateur et la scène punk son terrain d’apprentissage pour acquérir les
moyens de renforcer sa capacité d’action et d’émancipation.
« En cela, être punk c’est en premier lieu avoir conscience de sa capacité à agir
(sinon de devoir agir). » p.53
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HEIN, Fabien. Do it Yourself! Autodétermination et culture punk. Le Passager clandestin., 2012.
La France aurait été gagnée en 1983. Ces labels seraient majoritairement administrés par des personnes
dénuées de formation en la matière. Cet entreprenariat mènerait ainsi à l’autoformation.
« Les savoir-faire qui en découlent suscitent, quant à eux, l’émergence d’un marché,
c’est-à-dire une forme sociale largement ordonnée par l’échange et la concurrence
mais organisée par l’échange et la concurrence mais organisée autour de capitaux
symboliques, qui subvertissent les règles de fonctionnement du marché dominant,
pour le dire dans les termes de Pierre Bourdieu. » p.65
Hein distinguera les traits caractéristiques d’une contre-culture, à savoir le produit de l’effort des
autodidactes produisant un marché alternatif et capable de contester l’institution scolaire comme la seule
légitime à fournir et juger des compétences propres à un marché. Il citera Jack Lang dans le lien entre
économie et culture dans les luttes. L’entreprise est donc pour lui devenu un modèle de conduite
remplaçant son rôle d’instrument de domination des classes populaires en reprenant les termes de Alain
Ehrenberg.
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HEIN, Fabien. Do it Yourself! Autodétermination et culture punk. Le Passager clandestin., 2012.
Hein pointera ainsi cette « communauté de moyens et de fins » comme en mesure de se lier, de s’unir et
sont conscient de ce qui les distinguent des autres groupes sociaux. Cela ne va pas sans rappeler la
conscience de classe de Marx.
Punk et antisexisme
Hein distinguera un changement sur la scène punk rock, celle-ci passant d’asexuée vers une tendance
masculinisée. Cela n’enlevant rien au fait que la scène punk rock a ouvert ses portes d’emblée aux femmes,
permettant l’émergence de figures féminines influentes. Elles restaient néanmoins sous-représentées selon
l’auteur, et étaient déplorées le manque d’action du mouvement punk en faveur des causes féministes, mais
leur inclusion donnant confiance aux femmes dans leur élan. Le machisme n’épargne pas, malgré tout, la
scène punk, menant à l’émergence d’une parole féministe. Une série de groupes et de fanzines
exclusivement féminins donnent au punk une inflexion radicalement féministe (Riot Grrrl). Une lutte
contre le sexisme et les violences faites au femmes et pour le droit des femmes s’engage dans le début des
années 90. Les femmes participent à leur propre émancipation au sein du mouvement punk. Imposant des
concerts en non-mixité, une forme d’autonomisation radicale.
Soutenue par une partie des hommes de la scène punk, elles subiront les foudres d’une autre partie de
celle-ci. La scène punk n’est pas à l’abri du sexisme, renforçant la détermination des militantes féministes
punks. Elles s’affranchiront de toute caution masculine et en partageront l’exemple auprès des autres
femmes.
« Queer as punk »
Hein évoque les revendications aux causes lesbiennes, leurs objectifs différents de ceux des hommes gays,
et de ce fait, ne trouvaient pas satisfaction auprès des organisations communes. Le mouvement punk suit
les émeutes de Stonewall de près, les revendications liées au genre dans l’orientation et l’identité étant très
présentes. Hein utilisera des termes psychiatrisant comme « transsexuel » et mégenrera une figure
transgenre. La question queer émerge dans ce contexte. Hein définit le terme queer de l’époque comme
terme péjoratif pour les membres de la communauté LGBTQIA+. Au début des années 90 émerge une
petite industrie culturelle queer punk. Les acteurices se dirigent vers une activité d’information et
d’éducation, investi·es d’une fonction sociale.
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HEIN, Fabien. Do it Yourself! Autodétermination et culture punk. Le Passager clandestin., 2012.
sociales et politiques. L’auteur souligne que le punk n’était pas dans une démarche politique, sans
revendications ciblées et sans propositions derrière. C’est à l’aube des années 80 qu’apparaissent sur le
devant de la scène les « punks de gauche », affrontant les « punks de droite ».
« La grande affaire de la scène punk rock, c’est la mise en œuvre d’un processus
visant à produire des mutations de conscience, à infléchir des dispositions et, en
suscitant la coopération, en mettant en commun les ressources et en plaçant
l’indépendance au principe de l’action, à créer des expériences collectives inédites
qui se présentent comme autant d’espaces où peuvent se déployer des pratiques
artistiques e des modes de vie partiellement affranchis des tutelles extérieures. » p.93
Le degré d’engagement serait plus important dans l’existence de la scène punk rock que le nombre de
membres, et son développement intensifierait le travail.
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HEIN, Fabien. Do it Yourself! Autodétermination et culture punk. Le Passager clandestin., 2012.
mouvement punk, bien que controversé. Les deux registres s’opposent mais restent indissociables d’une
intense dynamique entrepreneuriale et économique.
Contre-culture ou contre-marché ?
Volonté d’organiser le travail de manière horizontale, pas de contrat, et circuit indépendant, ce modèle
d’intégrité reste couteux. Des entreprises comme Dischord se montrent indépendantes par choix, non pas
par défaut, ce qui vaut en retour une forte estime dans la communauté punk.
Indépendance et autogestion plutôt qu’une acceptation de tutelle, coopération plutôt que concurrence, libre
partage de savoir-faire et démarche participative plutôt que quête personnelle du succès…
Autodéterminations punks
La scène DIY renverrait à trois grands types d’autodétermination.
1. Artistes punks échappant aux milieux indépendants pour rejoindre les majors (dénoncés comme
acte de trahison)
2. Réaction à cette forme d’absorption via une intransigeance anticapitaliste sans contre-proposition
constructive et réaliste bridant ainsi les possibilités de toute rémunération de travail et
amortissement des coûts.
3. Démarche sociale et solidaire ; l’homme avant le capital, buts non lucratifs, mise au service de
l’intérêt général, pratique de la délibération collective et démocratique.
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HEIN, Fabien. Do it Yourself! Autodétermination et culture punk. Le Passager clandestin., 2012.
Deux grandes dynamiques dans les principaux modèles économiques de l’indépendance : Une dynamique
libérale – centrée sur le rendement. Une dynamique « libertaire » - centrée sur l’indépendance structurelle.
Bien que ces dynamiques semblent incompatibles, Fugazi et Dischord seraient l’exemple du contraire mais
restent des cas rares.
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HEIN, Fabien. Do it Yourself! Autodétermination et culture punk. Le Passager clandestin., 2012.
résultats de majors risque de glisser dans la contemplation de soi. Hein utilisera l’individualisation de
Tocqueville.
Hein remarque que cela concerne essentiellement le punk du monde occidental prenant ainsi l’exemple de
punks arrêtés en Indonésie en relevant des fonds pour des orphelins. La rébellion serait question de
contexte politique. Le détournement laissant place à la récupération. Il souligne que la conjoncture actuelle
serait propice à l’expérimentation de trajectoires artistiques et culturelles partiellement débarrassées des
rapports de subordination de l’industrie capitaliste.
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