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Naissance et évolution d’un

genre littéraire : le récit policier

Naissance du roman policier


Le roman policier est né au XIXe siècle. Il exprime des peurs nouvelles, liées à
l’extension d’une pauvreté urbaine figurée sous la plume d’auteurs comme
Charles Dickens (Oliver Twist, 1837-1838), Honoré Balzac (Une Ténébreuse
Affaire, 1841), Victor Hugo (Les Misérables, 1862). Son développement va de
paire avec celui d’une presse à grand tirage qui met en scène les faits divers, et
propose des feuilletons suscitant l’enthousiasme du public. Le genre policier
émerge grâce aux avancées technologiques de la société industrielle.

Edgar Allan Poe (1809-1849) invente quelques caractéristiques essentielles du


genre. Tout d’abord, le détective cérébral et excentrique, Auguste Dupin.
Obsédé par la logique, il est l’ancêtre de Sherlock Holmes de sir Arthur Conan
Doyle ou d’Hercule Poirot d’Agatha Christie. Poe crée aussi le personnage du
narrateur confident, observateur privilégié des performances intellectuelles du
détective. Le confident a une fonction essentielle : sa naïveté en fait une sorte
d’incarnation du lecteur au sein du texte. Il est à la fois impliqué dans l’action et
extérieur à des évènements dont le sens n’est accessible qu’au héros détective.
Poe place enfin ses histoires dans une atmosphère caractéristique, qui souligne
l’horreur du crime : objets souillés, corps mutilés.

Premiers romans policiers

Source : https://www.espacefrancais.com/le-roman-policier/
Les premiers romans policiers sont nés bien avant que le genre ne se constitue
comme tel et ne reçoive cette appellation: l’expression «roman policier»
apparait en France dans le courant des années 1890 – son équivalent anglo-
saxon, le detective story, ne se rencontrera pas avant 1897 –, alors que les
premières œuvres du genre datent du milieu du XIXe siècle.
Ce n’est pas un hasard si le roman policier est né au XIXe siècle, une époque
où les grandes villes, par leur expansion, devenaient de plus en plus
dangereuses, où les valeurs traditionnelles étaient remises en cause et où des
polices organisées se développaient en Europe (création du Detective
Departement de Scotland Yard) : il reflète en effet les peurs de son temps. En
France, le chef de sureté de Paris, François Eugène Vidocq, peut passer pour
un précurseur du genre avec ses Mémoires (1828).

Mes pérégrinations pédagogiques 1.


Les premiers romanciers à traiter de thèmes policiers furent E.T.A. Hoffman et
Feuerbach, mais c’est Edgard Allan Poe qui crée le roman policier en 1841, en
donnant vie au premier détective de fiction : C. Auguste Dupin, dans une
nouvelle, « Double Assassinat dans la rue Morgue », publiée par le Graham’s
Magazine. Dans cette nouvelle, devenue un classique de Poe, Dupin, par ses
habitudes excentriques et ses méthodes de déduction, fournit un modèle de
personnage qui sera repris par la plupart des auteurs de romans policiers. Poe
réutilise le personnage de Dupin pour résoudre l’énigme du « Mystère de Marie
Roget » (1842-1843) et celle de « La Lettre volée » (1845) ; Dupin sera le héros
d’autres nouvelles encore.

« Double Assassinat dans la rue Morgue » n’est pourtant pas qualifié en son
temps de « roman policier » (il ne le sera qu’en 1904), pas plus que les œuvres
des romanciers qui exploitent le genre créé par Poe [...]

En Angleterre, Wilkie Collins, avec La Dame en blanc (1860) et La Pierre de lune


(1868), crée le détective Sergeant Cuff ; il est aussi le premier à prouver que les
œuvres du genre pouvaient dépasser la taille d’une nouvelle. Sur son exemple
et à sa demande, son ami Charles Dickens s’essaie sur le tard à la fiction
policière avec Le Mystère d’Edwin Drood (1870), mais il meurt avant de l’avoir
terminé et l’identité du meurtrier demeure inconnue.

CONAN DOYLE ET L’INVENTION DE SHERLOCK HOLMES


Demeuré jusque là un avatar du roman noir et du récit fantastique, et
pratiquement cantonné aux dimensions de la nouvelle, le roman policier ne
devient véritablement populaire que lorsque le Beeton’s Christmas Annual
publie, en 1887, « Une étude en rouge » de sir Arthur Conan Doyle (où l’auteur
fait d’ailleurs référence à Edgard Poe comme fondateur du genre) : le
détective le plus célèbre de tous les temps, Sherlock Holmes, est né. Le père de
Holmes, très influencé par Poe, dote son personnage des traits intellectuels de
Dupin et d’habitudes tout aussi excentriques que les siennes, quoique
différentes, car Sherlock Holmes, fils de son siècle, est marqué par la science et
le positivisme. À l’instar de Poe, Conan Doyle raconte les exploits de son
détective du point de vue de son plus proche compagnon, en l’occurrence le
docteur Watson, incurable naïf.

Malgré le succès de Holmes, Conan Doyle, plus intéressé par d’autres genres
romanesques, se lasse peu à peu de son personnage et tente de le faire mourir
dans Le Dernier Problème (1893), mais l’énorme popularité de Holmes l’en
empêche, et le personnage survit à son créateur, puisqu’il est repris par d’autres

Mes pérégrinations pédagogiques 2.


auteurs. Ce phénomène de transfert d’un personnage d’un auteur vers un autre
est d’ailleurs tout à fait typique du fonctionnement de la littérature dite
«populaire », où la volonté du public intervient comme force contraignante
dans le processus de production des œuvres. Le « canon », c’est-à-dire
l’ensemble des énigmes originales de Sherlock Holmes, comprend quatre
romans et cinquante-six nouvelles, écrits entres 1887 et 1927.

Elaboration d’un type de détective


Le succès de Sherlock Holmes rend populaire le roman policier et lui donne les
bases sur lesquelles il se développera. À partir de l’époque de Conan Doyle, en
effet, les écrivains cherchent à créer des détectives capables de rivaliser avec
son personnage. L’écrivain anglais G.K. Chesterton, dans les premières années
du XXe siècle, donne vie au personnage du père Brown, un prêtre détective,
et, en 1920, à l’aube de l’âge d’or du roman policier, la britannique Agatha
Christie fait naitre miss Marple et surtout Hercule Poirot, fringant détective
belge qui emploie activement ses « petites cellules grises » à la résolution
d’affaires criminelles. Aux États-Unis commencent les séries d’Ellery Queen
tandis que S.S. Van Dine (pseudonyme de Willard Hutington Wright, 1888-1939)
conte les aventures du détective dilettante Philo Vance ( La Mystérieuse
Affaire Benson, 1926). À la même époque, un autre Américain, Earl Derr
Biggers, invente un fameux détective chinois, Charlie Chan. Parmi les autres
écrivains des années 1930, citons l’Américain Rex Stout et son détective
gourmet, Nero Wolfe, et l’Anglaise Dorothy Sayers, qui imagine un détective
aristocrate, lord Peter Wimsey.

Elaboration d’une intrigue


L’exemple de Conan Doyle influence la mentalité et les aspirations littéraires
des auteurs de romans policiers, qui ont à cœur de distinguer leurs récits des
autres œuvres de crime et de mystère en insistant sur l’énigme plutôt que sur le
crime. Durant les années 1930, les auteurs s’ingénient ainsi à fabriquer des
énigmes de plus en plus élaborées et déconcertantes (comme le mystère des
pièces verrouillées de l’intérieur de l’Américain John Dickson Carr). Dans
certains cas, la complexité du récit est telle que le meurtrier peut être le moins
suspect de tous les personnages. Agatha Christie excelle particulièrement
dans ce procédé ; l’exemple le plus remarquables et le plus extrême qu’elle en
donne est Le meurtre de Roger Ackroyd (1926), où elle opère une curieuse
inversion de rôles par rapport aux habitudes du genre, puisque le meurtrier se
révèle finalement être... [lisez-le pour le savoir !]. Cette veine de policiers
classiques ne s’épuise

Mes pérégrinations pédagogiques 3.


pas avec les années 1930: Agatha Christie, Margery Allingham, Michael Innes,
Nicholas Blake (pseudonyme de Cecil Day Lewis et Ngaio March poursuivent
tous leur œuvre après la guerre.

En France nait en 1907, sous la plume de Gaston Leroux, le personnages de


Rouletabille, reporter attaché au « bon bout de la raison ». Dans Le Mystère de
la chambre jaune (1907), où il met en scène Rouletabille, l’auteur reprend avec
habileté le principe du crime en lieu clos. Mais le plus célèbre policier français
reste Maigret apparu en 1931 dans Pietr-le-Letton : le héros du romancier belge
Georges Simenon aborde ses enquêtes d’un point de vue psychologique et
social. Avec Maigret, le roman policier se fait également roman d’ambiance, et
son intérêt dépasse la seule résolution de l’énigme.

Le succès du genre en France est attesté par la création de collections


entièrement consacrées à la littérature policière, comme « Le Masque » ou «
L’Empreinte ».

Mes pérégrinations pédagogiques 4.

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