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Notes de lecture
par Philippe PASQUET, SAMTECH France
Les méthodes numériques ont pour objet de fournir aux ingénieurs une panoplie d'outils
permettant de résoudre les équations qui représentent les problèmes qu'ils se posent. On a bien
souvent insisté, dans cette rubrique ou lors des journées Φ²AS, sur l'importance des phénomènes
physiques et de leur interprétation en affirmant que les méthodes numériques sont en général
bien maîtrisées dans les codes de calcul. Néanmoins, il est sain de s'arrêter un moment sur ce
principe pour se poser quelques questions :
• Si l'ingénieur se concentre sur la réalité physique, quel est le champ d'application de l'équation
qu'il "choisit" pour représenter le comportement, l'évolution, … ?
• Si les méthodes sont bien maîtrisées, elles ont quand même un domaine de validité qu'il vaut
mieux connaître puisque les concepteurs de codes nous laissent un certain libre arbitre, ce que
d'aucuns appellent les boutons de réglage. Comment entreprend-on ou réévalue-t-on cette
connaissance ?
Certains de ces aspects dit "de base" ne souffrent aucune contestation en ce sens qu'ils sont
unanimement utilisés et que l'on ne recherche aucune alternative. Il en est ainsi des méthodes
décrites dans les deux premiers chapitres qui, en 60 pages, nous font revoir les principaux
ingrédients numériques d'un code de calcul tels que interpolation, méthodes de résolution, calcul
des valeurs propres, … Quant aux méthodes d'intégration temporelle, elles feront l'objet de
larges développements dans la suite de l'ouvrage. A chaque fois que cela s'avère nécessaire, les
auteurs n'hésitent pas à renvoyer à des ouvrages plus complets. Par ailleurs, le langage utilisé est
tout à fait adapté au lectorat potentiel : pas trop mathématique mais suffisamment rigoureux.
Les 80 pages suivantes, soit quatre chapitres, sont consacrées à la résolution de ces équations
aux dérivées partielles et, en particulier, à la modélisation de leurs composantes spatiales. Les
trois méthodes les plus classiques sont rapidement présentées : les différences finies, où l'on
résout l'équilibre des forces en chaque point, alors que l'on s'intéresse à la minimisation de
l'énergie pour les éléments finis et à la loi de conservation pour les volumes finis. L'exemple du
problème de Dirichlet en dimension un (appellation mathématique pour parler de la barre
encastrée sous chargement axial) permet de mettre en évidence les avantages et inconvénients
de chacune d'entre elles et, peut-être, de se convaincre que les éléments finis sont un bon
compromis si l'on considère la facilité de prise en compte des conditions de Dirichlet ou de
Neumann, puisque cet exemple est trop simple pour mettre en valeur la puissance de la
méthode.
Seule la méthode des éléments finis sera détaillée en dimension deux. Un petit effort est
demandé au lecteur pour introduire les coefficients qui l'intéressent (élasticité, conduction) car
les matrices sont écrites sans leurs contributions physiques qui réapparaissent dans le chapitre
suivant sur l'élasticité linéaire bidimensionnelle en état plan de contraintes.
Les problèmes d'évolution font l'objet des trois chapitres suivants. En premier lieu, l'équation de
la chaleur instationnaire (parabolique) est analysée mathématiquement puis différents schémas
d'intégration (aux différences finies) sont proposés : Euler explicite, Euler implicite, Crank
Nicolson. Pour chacun, les auteurs nous indiquent les conditions de stabilité : la condition est
qualifiée de "très sévère", ce qui nous paraît abusif, dans le cas de l'équation de la chaleur
puisqu'elle est inversement proportionnelle à la diffusivité, quantité généralement petite. De
même, on pourrait ajouter que les schémas implicites demandent une attention particulière.
Avec l'équation des ondes, nous revenons à la mécanique (hyperbolique du second ordre).
L'analyse des conditions de stabilité conduit naturellement au CFL dans lequel apparaissent les
caractéristiques mécaniques via la vitesse de propagation des ondes, quantité cette fois
généralement grande.
Mais le champ d'application des méthodes numériques est lui-même beaucoup plus vaste que
ces quelques exemples classiques, comme le démontre la suite de l'ouvrage. Ces chapitres
portent sur des points où la théorie mathématique apparaît plus mûre que leur diffusion auprès
des utilisateurs de codes de calcul.
Les couplages multi-physiques sont un cas exemplaire. Alors que nous peinons, et le mot est
faible, pour traiter de la thermo-mécanique autrement que par une alternance d'un pas de
thermique et d'un pas de mécanique, il est ici question de couplage fort fluide-structure ou
champ électrique diffusion. D'où vient donc ce décalage entre le couplage élégant des équations
et la pratique courante ? La structure informatique un peu vieillotte des codes n'est pas un atout
favorable, les spécialisations que demande la compréhension de phénomènes physiques si
différents, guère plus. Et, en complément, il subsiste quelques écueils pratiques (gestion des pas
de temps, remaillage) bien que, les auteurs le prouvent, l'arsenal théorique existe.
Les deux derniers chapitres, beaucoup plus courts, mettent l'accent sur deux points dont on parle
de plus en plus : les méthodes multi-échelles et le calcul parallèle. Dans les deux cas, l'objectif,
"donner une vue générale plutôt que des détails techniques", est parfaitement atteint.
Quel que soit l'état d'esprit avec lequel on l'aborde, ce retour aux fondamentaux est tout à fait
bénéfique car il permet de s'assurer de la pertinence des choix que l'on fait, souvent par habitude
et, encore mieux, de redécouvrir des horizons oubliés. Ce livre sera donc très utile aux
ingénieurs. Plus accessible, bien que moins complet que d'autres excellents traités, il leur
donnera le goût d'y retourner, d'autant que les rappels et les renvois vers des ouvrages que nous
avons souvent recommandés sont nombreux.