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I.

La maturation des fruits et légumes


La maturation est une étape programmée du développement d’un fruit ou d’un légume et se
trouve sous la dépendance du génome. Cette maturation correspond à une séquence de
changements biochimiques et physiologiques conduisant à l’état de maturité et conférant au
fruit ou légume ses caractéristiques organoleptiques telles que le goût, les arômes, la couleur,
la texture, qui rendent le fruit commercialisable et comestible.

L’éthylène (C2H4)
L’éthylène est un composé organique volatil, faisant partie des hormones végétales, qui entre
en jeu dans de nombreux processus de maturation des fruits et légumes. Ce gaz, incolore et
inodore, est produit par la plupart des organes végétaux, et plus particulièrement par les fruits
et les légumes climactériques, qui présentent, à un moment donné de leur maturation, une forte
augmentation de leur respiration et de leur production d’éthylène. Sa biosynthèse (figure 1)
s’effectue à partir de l’acide aminé méthionine et sous l’action de deux enzymes l’ACC
synthétase (ACS) et l’ACC oxydase (ACO). L’éthylène régule la croissance, le développement
et la sénescence des plantes supérieures même lorsqu’il est présent à l’état de trace.

III. LE MECANISME DE LA MATURATION DES FRUITS ET LEGUMES


Elle débute au niveau de quelque cellule du fruit/légume par la production d’éthylène. Elle se
propage ensuite de cellule en cellule jusqu'à s’étendre au fruit/légume entier. Parmi les

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changements biochimiques subis par les fruits et légumes, certains sont visibles à l’œil nu telle
que la dégradation des chlorophylles qui se résorbent et laissent apparaitre progressivement
d’autres pigments. En d’autres termes, les chloroplastes évoluent en chromoplastes. La tomate
par exemple, synthétise des composés terpéniques comme le β-carotène, les xanthophylles,
responsables de la coloration jaune, puis accumule du lycopène (pigment rouge). Il se produit
en plus une accumulation de sucres dans les fruits dû à la dégradation de l’amidon sous l’action
de l’amylase. L’oxydation des acides contenus dans les fruits verts comme le citrate des
agrumes, entraîne une diminution de l’acidité de ces fruits.Ces acides sont utilisés dans les
combustions cellulaires ou transformés en sucres par décarboxylation ou encore comme
précurseurs pour les protéines. La synthèse d’aromes dans les fruits est due à une activité
croissante d’enzymes telles que les estérases capables de former comme dans le cas de la
banane,des esters de l’alcool isoamylique. Certaines enzymes entrainent la dégradation des
parois cellulaires qui conduit à un ramollissement de la texture de ces fruits dû à la solubilisation
des composés pectiques. L’hydrolyse de la pectine au cours de la maturation correspond à un
processus d’évolution physiologique du fruit. Ce dernier se caractérise par l’arrêt progressif de
l’accumulation des réserves dans les cellules du fruit ainsi que la modification du lien
intercellulaire par transformation des protopectines en pectines solubles. Ceci conduit à une
dégradation de la chair entrainant le ramollissement. D’autres changements sont perceptibles
au niveau cellulaire. Il s’agit en particulier de la modification des membranes qui abouti a une
augmentation de la perméabilité de ces membranes aux ions et aux molécules organiques. Cela
induit une fuite accrue de solutés et la décompartimentation cellulaire. Selon leur type de
maturation, on peut diviser les fruits et les légumes en deux groupes : les fruits /légumes
climactériques et les non climactériques.
les fruits et légumes climactériques, caractérisés par un pic de respiration et de production
d’éthylène, et ceux non climactériques ne montrent pas un changement de
production d’éthylène durant la maturation.

A. Les fruits/légumes non climactériques, comme l’ananas, les raisins, ou encore les fraises,
ne peuvent pas être cueillis avant qu’ils soient mûrs. En effet, comme ces fruits ne présentent
aucune autonomie de maturation après récolte, les critères de leur récolte sont analogues aux
critères de qualité gustative reposant sur une estimation de leur niveau de développement et de
leur stade de maturité. Deux principaux types de critères sont utilisés : les critères visuels tels
la forme, le calibre, la couleur ; et les critères analytiques tels la fermeté, la teneur en sucre et
l’acidité.

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B. Les fruits/légumes climacteriques
Ils sont capables de mûrir même après leur cueillette. Leur maturations’accompagne d’une
augmentation de la respiration : c’est la crise climactérique.Elle est associée à une synthèse
autocatalitique d’éthylène (l’éthylène émis par le végétal, stimule sa propre production). Son
pic est responsable de l’activation des voies de signalisation qui aboutissent à la synthèse
d’enzymes à l’origine des modifications subies par le fruit. Cette capacité de synthèse
autocatalytique de l’éthylène s’acquiert sur la plante. Les fruits/légumes climactériques récoltés
trop tôt ne mûrissent pas. Ils n’ont pas encore acquis la compétence à mûrir qui ne s’obtient
qu’à partir d’un certain stade durant le développement du végétal. En outre, le traitement des
fruits/légumes climactériques par l’éthylène, sous réserve qu’ils aient atteint un degré de
développement suffisant, provoque une accélération de la croissance du fruit et des événements
caractéristiques de la maturation. Inversement, le traitement par de faibles concentrations d’ions
Ag+, l’inhibition de la synthèse de l’éthylène, ou de fortes doses de CO2, ont pour effet de
retarder la maturation. Ceci est à l’ origine de pratiques commerciales permettant de différer la
maturation jusqu'à la vente.Quelques exemples de fruits climactériques : la banane, la tomate,
la mangue.
En parallèle, l’amidon (C 6 H 12 O 5 ) n , se présentant sous forme de granules semicristallins
et présent en quantités importantes dans le fruit immature, est hydrolysé progressivement en
glucides solubles : saccharose, glucose et maltose impliqués dans la saveur du fruit. La
progression du processus de maturation entraîne une augmentation des niveaux de sucres tels
que le glucose C 6 H 12 O 6 . Les grandes chaînes d’amidon (0,1 à 200 µm) sont hydrolysées
en de petites molécules, de l’ordre de quelques nm. Après récolte, le fruit se ramollit et
l’adhésion entre les cellules devient faible.

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Figure 5. Évolution (en unités arbitraires) de paramètres physiologiques et biochimiques en
fonction de la maturation des fruits climactériques. Au cours de sa vie sur l’arbre, le fruit subit
une phase de croissance, puis de maturation. Durant sa période de croissance, le végétal
accumule plus ou moins de substances de réserve telles que l’amidon ou les acides organiques.
Ces réserves servent à assurer la continuité du métabolisme après récolte quand elles seront
dégradées plus ou moins rapidement en fonction des conditions de stockage. Les différentes
étapes de la vie d’un fruit précédant sa récolte jouent un rôle fondamental dans le maintien de
sa qualité organoleptique durant la période de conservation ultérieure. Cette période a pour but
de conserver le plus longtemps possible la qualité initiale en empêchant les dégradations du
fruit. Dans cette phase, au-delà de l’état de maturité, le fruit entre en période de sénescence
conduisant à sa désorganisation cellulaire et à sa mort. La maturation et la sénescence sont des
étapes programmées du développement, mais peuvent être modulées par des facteurs
d’environnement.

Schéma du principe de l’action de l’éthylène sur fruits ou légumes climactériques


Les fruits et légumes sensibles à l’éthylène possèdent à la surface de leur épiderme, des cellules
qui comportent des récepteurs spécifiques. En cas de présence d’éthylène dans l’air, il agit après
fixation sur des récepteurs protéiques des cellules végétales. Cette fixation est réversible et est
favorisée par la présence d’oxygène, ou au contraire inhibée par différents facteurs extrieurs
(aumgentation du taux de CO2, température supérieure à 35°C ; présence de molécules
antagonistes, comme le 1-méthylcyclopropène, autorisé sur certaines espèces en traitement
post-récolte). La formation du complexe éthylène-récepteur déclenche alors des réactions en
cascade au niveau cellulaire, jusque-là inhibées par le récepteur seul. La transduction du signal,
liée à la fixation de l’éthylène sur son récepteur, conduit à l’expression de plusieurs familles de
gènes, qui codent pour la synthèse de nombreuses enzymes utiles aux processus de maturation
(figure suivante). Une fois le processus enclenché, l’éthylène produit stimule sa propre synthèse
(processus auto-catalytique).

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Effet de l’éthylène sur les fruits et légumes sensibles
Chaque espèce végétale possède des niveaux de sensibilité à l’éthylène qui lui sont propres.
L’éthylène produit agit non seulement sur le fruit ou légume émetteur lui-même (on parle alors
d’effet autocatalytique), mais également sur les autres végétaux à proximité directe. Selon
l’espèce végétale et l’état de maturité, l’éthylène peut avoir une action positive ou négative.
Pour chaque espèce, les phénomènes observés dépendent de très nombreux facteurs
(concentration en éthylène, durée d’exposition, niveau de maturité du végétal, température,
présence éventuelle de substances stimulantes ou antagonistes (O2, CO2, …), ventilation de la
zone…).
Effets négatifs
L’éthylène peut avoir aussi une action négative lorsque les symptômes provoqués sur le produit
sont des dégradations entraînant une réduction de sa durée de vie. Sa présence, même à des
doses très faibles (dès 0,1 ppm) peut entraîner différentes modifications d’aspect ou de goût, se
manifestant dans un délai de quelques heures (pour les fleurs) à plusieurs jours.

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Les signes de la maturité des fruits
 La couleur
La couleur est une composante essentielle de ce que l’aliment offre à la vue et, par conséquent,
elle va déterminer la première impression positive ou négative du consommateur.
Elle est aussi un critère de qualité qui permet de segmenter les produits alimentaires en plusieurs
catégories auxquelles les consommateurs peuvent facilement se raccrocher pour effectuer leur
choix.
On distingue par ailleurs deux catégories de pigments : Les caroténoïdes, ils s’accumulent lors
de la maturation du fruit et passe ainsi du vert au rouge, et les anthocyanes qui sont à l’origine
du rouge des fraises.
 La fermeté
La perte de fermeté du fruit résulte de la synthèse chimique ou de l'activation, pendant la phase
de maturation, de protéines impliquées dans le relâchement de la paroi. Les pectines font parties
de ces protéines, elles se présentent sous forme de chaînes : plus elles sont longues, plus le fruit
est dur.
La fermeté est un critère de qualité contrôlé à réception des fruits. Pour cela, on peut utiliser un
pénétromètre : il va mesurer la force nécessaire pour faire pénétrer un petit cylindre métallique
dans la partie charnue du fruit.
Les mesures sont en général faites en Newton ou kg que l’on ramène ensuite à la surface du
pénétrateur pour une question d’homogénéité. On obtient souvent un résultat en kg/cm².
 L’odeur
Lors de la maturation des fruits, des composés volatils spécifiques se produisent. Ils sont à
l’origine de l’odeur des fruits. C’est pourquoi de nombreux fruits dégagent une odeur
caractéristique à leur maturité.
Les arômes des fruits sont difficiles à mesurer car ils dépendent d'un grand nombre de facteurs.
Ils constituent malgré tout un bon indice de maturité du fruit.
 La saveur
La saveur d’un fruit dépend en particulier de sa teneur en sucre. Au cours de la maturation, cette
teneur en sucre va augmenter suite à la dégradation de l’amidon du fruit. En effet, l’amidon,
par un effet d’hydrolyse, va alors se transformer en glucose, fructose, saccharose dits "sucres
simples".
L’amidon étant principalement présent dans l’extrémité de la tige, le fruit ne doit pas être cueilli
trop tôt afin qu’il accumule assez d’amidon et donc assez de sucres. (Exception faite des fruits
climactériques).

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La teneur en sucre d’un fruit peut facilement se mesurer à l’aide d’un réfractomètre.
Il utilise le fait qu'un faisceau de lumière est dévié différemment suivant la nature du milieu
dans lequel il se propage. Ainsi, suivant la teneur en sucre du jus, la déviation de la lumière du
jour par l'échantillon varie et indique le Brix de celui-ci.
Unité de mesure = % (pourcentage de sucres dans le jus).

II. Maturation de la viande et poissons


II.1. Maturation de la viande
L’acidification permet l’activation d’enzymesqui progressivement fragmentent les protéines
du muscle et permettent ainsi son attendrissement naturel. C’est la phase de maturation
proprement dite : elle correspond à la transformation du muscle en viande, au cours de laquelle
se forment également les précurseurs des arômes et de la saveur de la viande.

En fonction de l’espèce de l’animal, une à deux semaines, dans de bonnes conditions de


conservation en réfrigération, sont nécessaires pour que la maturation permette l’expression des
qualités organoleptiques recherchées par le consommateur, comme par exemple la flaveur ou
la tendreté.

La maturation n’a pas d’effet sur le collagène, protéine du tissu conjonctif qui assure le
soutien et la structure du muscle et lui confère sa dureté de base. Les effets bénéfiques de la
maturation sur la tendreté seront toujours plus perceptibles pour un muscle pauvre en collagène.
Pour un muscle riche en collagène, le choix d’un mode de cuisson approprié permettra d’obtenir
les qualités organoleptiques recherchées.

LE PRINCIPE DE LA MATURATION
Après l’abattage le muscle contient des réserves d’énergie notamment sous forme de glycogène,
glucide complexe polymère du glucose. Le muscle, par la suite, dégrade le glycogène en
produisant de l’acide lactique. On observe, à l’occasion de cette réaction, une variation du pH
importante qui passe de 7,2 à 5,5 environ.
Cette acidification permet l’activation d’enzymes qui ont la propriété de fragmenter la
structure des protéines. Ces enzymes, appelées protéases, agissent comme des petits ciseaux au
sein des fibres musculaires et sont responsables de l’attendrissement de la viande.
Pendant le même processus, d’autres enzymes, appelées lipases, transforment les lipides du
muscle et sont à l’origine d’aôme et de la saveur typique de la viande correctement mûrie.

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Par la suite, le pH n’évolue que très peu. Le muscle devient alors de la viande consommable et
s’attendrit de façon spectaculaire.
Le temps de maturation varie suivant la race et l’âge de la vache.

Remarque :
DES SOINS VIGILANTS À CHAQUE ÉTAPE
Pendant le transport de la ferme à l’abattoir, il est crucial de veiller au bien-être des vaches.
Tout stress provoquerait une consommation de leurs réserves d’énergie. Or, si les réserves
d’énergie dans le muscle sont trop faibles, la production d’acide lactique qui en découle est
moins importante et le pH n’est pas suffisamment abaissé pour activer toutes les enzymes (le
pH doit être inférieur à 6). On obtient alors une viande sombre, dure et sans flaveur. C’est
la viande classée DFD (Dark, Firm, Dry – foncé, ferme et sèche).
A l’inverse, une chute trop rapide et/ou trop importante du pH (inférieur à 5,5), produit une
viande claire, molle et gorgée d’eau. Il s’agit de la viande PSE (Pale, Soft, Exsudative – pâle,
molle, exsudative).
Ainsi il est necessaire d’apporter un soin particulier dans le contrôle du PH des carcasses.
Ce contrôle est lié à la vitesse de refroidissement de la carcasse : il est ainsi possible d’ajuster
le pH final et donc de garantir une qualité irréprochable à la viande. Ce refroidissement est
appelé le ressuage et il est tout aussi important pour la qualité de la viande que la durée de
maturation.

II.2. Maturation des poissons (maturation ou protéolyse ?)


Si, pour la viande, le terme de maturation est utilsé, on parlera de protéolyse dans le cas du
poisson pour caractériser la même étape. Cette différence s’explique aisément : pour la viande,
la maturation est qualifiante –elle améliore la tendreté myofibrillaire et le gôut- tandis que pour
le poisson, il s’agit d’une dégradation de son état. En dehors de la rigidité cadavérique, il n’y a
pas de dureté intrinsèque dans le poisson. En revanche, toutes les évolutions des muscles après
la mort auront lieu, comme pour la viande, mais plus rapidement et conduiront à la libération
d’acides aminés à odeur d’ammoniaque. Dans le poisson, on ne parle plus de muscles mais de
myotomes, ces derniers étant séparés par des myocomes. C’est là, dans le tissu conjonctif, que
s’accumule le gras, l’équivalent du persillage de la viande. Ces gras clairs sont d’ailleurs
visibles à l’œil nu, notamment pour le saumon.

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III. Maturation des fromages (maturation enzymatique : lipolyse et la protéolyse)
Au cours de l’affinage, deux composants majeurs de la pâte du fromage sont modifiés par
l’action des systèmes enzymatiques des microflores d’affinage, du lait et de la présure. Il s’agit
des proteines et des matières grasses. La protéolyse et la lipolyse sont donc des phénomènes
dominants de l’affinage. Les sucres sont aussi dégradés en cours d’affinage (glycolyse). Dans
certaines conditions de pH, de température, d’aw et si leurs quantités suffisent, les enzymes
réalisent des protéolyses primaires et secondaires, des lipolyses et des fermentations de
composants du lait. Ces modifications se traduisent par de profondes modifications de la
composition physico-chimique du substrat et donc, de son aspect, de ses qualités
organoleptiques, de sa digestibilité et de sa valeur nutritive.

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