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La Méditerranée est un espace qui connaît des échanges intenses au Moyen Age, en

particulier du XIème au XIIIème siècles. Parmi les nombreux acteurs de ces échanges
commerciaux comme Gênes, Naples, la République vénitienne, riche de ses 100 mille
habitants, qui dispose d’une flotte puissante et d’un vaste réseau commercial, s’affirme
comme étant la plus dynamique d’entre eux. Les relations qu’elle entretient avec
Constantinople, capitale de l’empire byzantin,qui s'étend des Balkans au Proche Orient et à
la Mer du Nord; héritière de l’empire romain, elle est au cœur de la Méditerranée sont
intenses et parfois conflictuelles.

De quelles façons Venise conforte-t-elle sa domination de la Méditerranée ?

Pour nous aider à répondre à cette question nous disposons de quatre documents. Le
premier document représente le plan de la ville de Constantinople, capitale de l’empire
byzantin, le document montre comment Venise s’impose commercialement dans la ville. Le
second document mis à notre disposition est un extrait d’une chrysobulle, c’est-à-dire une
bulle impériale promulguée en 1082 par l'empereur byzantin Alexis Comnène. Une bulle
impériale c’est une décision prise par l’empereur. La bulle précise les privilèges
commerciaux accordés aux vénitiens par les byzantins en remerciement de leur aide
militaire, ainsi que les raisons pour lesquelles ces privilèges leur sont accordés. Le troisième
document fourni est une carte qui représente Venise et ses possessions au XIIIème siècle.
Le document montre comment la cité est véritablement un empire maritime dans toute la
Méditerranée. Enfin, le quatrième dont nous disposons, est une miniature du XVème siècle
qui représente la prise de Constantinople par les Vénitiens lorsqu’ils détournent la quatrième
Croisade en 1204. Elle est extraite du Tome 2 du livre ‘Croniques abregies commençans au
temps de Herode Antipas, persécuteur de la chrétienté, et finissant l’an de grâce mil IIc et
LXXVI’ écrit par David Aubert. Ce document illustre le moment où les croisés acceptent
d'attaquer Constantinople en échange de leur transport par la flotte vénitienne.

Pour assoir sa domination, la république marchande de Venise utilise des moyens tantôt
diplomatiques ou économiques mais parfois recourt à la guerre. Parmi les leviers
diplomatiques de nombreux accords sont passés avec l’empereur byzantin. Ils sont
officialisés dans la bulle impériale de 1082. Celle-ci a été rédigée dans un contexte difficile
pour l’empire byzantin: la flotte normande les attaque et les bat lors de la bataille de
Dyrrachium en 1081 et ce malgré l’aide apportée par la flotte vénitienne. Le basileus accord
des privilèges commerciaux “[leur donner] les boutiques qui sont dans le quartier de Pérama”
(lignes 7-8 document 2) c’est-à-dire qu’il offre dans le quartier situé sur la corne d’or, un des
lieux les plus protégés des invasions par une chaîne comme le montre le plan du document
1, des boutiques aux marchands vénitiens. Ensuite la bulle accorde aux vénitiens “trois
échelles maritimes qui sont délimitées audite endroit” (ligne 11-12, document 2) cela signifie
que les marchands vénitiens possèdent des ports et des comptoirs commerciaux à
Constantinople. Les vénitiens ont également la liberté de commercer dans tout l'empire
byzantin et dans la capitale comme l’indique la ligne 13-15 du document 2 “Elle leur a aussi
accordé de commercer avec toutes les marchandises dans toutes les régions de la Romanie
et dans la Grande-Ville elle-même”. De plus, la bulle accorde une exemption fiscale aux
marchands vénitiens “sans avoir à fournir toutes les taxes que doivent les commerçants”
c'est-à-dire qu'ils sont dispensés de payer l'impôt commercial. Alexis Comnène fait référence
dans le document 4 à l’aide vénitienne lors de la bataille de Dyrrachium menée par les
normands avec à leur tête Robert Guiscard. Contrairement à ce qui est écrit, les normands
sont sortis vainqueurs de la bataille et l'empereur se place ici sous la protection de Venise.
Les privilèges qu'elle obtient de l’empereur byzantin lui permettent de s'imposer dans les
échanges. Cela aboutit à une présence massive des vénitiens dans toute la Méditerranée.

Venise installe des comptoirs commerciaux à Constantinople comme le montre le document


1, mais également dans des ports musulmans comme à Tunis et dans les Etats latins
d’Orient de Tripolie, d’Antioche et d’Acre. Les marchands vénitiens y achètent des produits
de luxe comme représenté dans la carte du document 3, surtout des épices, de la soie et
des pierres précieuses, venues d’Asie qu’ils rapportent en Italie. Les navires vénitiens se
déplacent sur les mude (routes des navires) en convoi pour se protéger des pirates. Ils
revendent leur marchandises dans les villes portuaires. La Méditerranée devient un carrefour
commercial qui relie l’Europe, l’Asie et l’Afrique.
Venise battit un véritable empire commercial mais dans certaines situations, elle recourt à la
guerre directe et parfois même ont détourné les croisades de leur objet initial.

Venise dispose d’une flotte militaire très puissante. L’arsenal, vaste chantier naval, permet à
de nombreux artisans de travailler pour l'essor maritime de la ville. Les navires sont souvent
loués aux marchands, misent au service de l’empire byzantin et parfois pour les croisés. En
effet, lors des Croisades, Venise transporte les troupes ce qui lui permet d’obtenir
d’importants comptoirs dans les Etats latins. Mais lorsqu'elle détourne la quatrième croisade
pour piller Constantinople, les relations se détériorent profondément, ce qui n'empêche pas
Venise de prendre possession d’une part importante de l'empire byzantin.

Ces différents moyens font de Venise une cité-état prospère et dominante jusqu’à la
découverte de l’Amérique.
La puissance commerciale de Venise est visible dans la ville, embellie grâce aux revenus du
commerce (palais des Doges, « palais-entrepôts » ...). La cité montre ainsi sa puissance.
L’enrichissement profite à une grande part de la population, qui investissent dans des
associations commerciales. Au XVème siècle, la cité compte 100 000 habitants, et est plus
riche que le royaume de France.
La puissance commerciale de Venise s’explique par sa position de carrefour , par le grand
nombre de comptoirs qu’elle fonde autour de la Méditerranée. L’Etat vénitien centralise le
commerce, construit les navires de commerce. Venise utilise des outils financiers modernes
(lettre de change, etc.). La puissance de Venise ne va commencer à décliner que lorsque la
Méditerranée ne sera plus considérée comme le cœur des échanges, laissant place à un
nouveau regard des européens, vers le nouveau monde et l’ouverture à l’Atlantique. Mais
également avec la prise de Constantinople par les turcs en 1453 qui met fin aux privilèges
commerciaux de la cité.

Venise apparaît depuis le XIIIème siècle comme un intermédiaire incontestable entre les
différentes civilisations méditerranéennes. Possédant des techniques commerciales,
financières et maritimes, la ville bénéficie de privilèges avec l’empire byzantin. Elle parvient à
s'étendre en dehors de ses frontières, elle est à la tête d’un empire commercial. Ses navires
sillonnent la mer chargés de produits venus d’Orient. La Sérénissime suscite la jalousie et
l’agressivité de ses partenaires. Venise entretient des contacts paradoxaux en Méditerranée
avec une volonté de puissance militaire et commerciale.

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