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NEU RO FY

Mourad BELEKSIR Anna HEL


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Qu’est-ce que j’observe, que les autres n’observent pas, et pourquoi en suis-je
convaincu? Ce qui m’apparaît comme intolérable, est-ce que ce sont ce que les
autres ne voient pas ? Et si chacun pouvait avoir la certitude de regarder le même
monde, comment partager ce regard ? La distance, l’espace qui nous sépare et
nous fait peur, sont ils simplement une question de temps et de l’e ort de chaque
instant « d’être » pour nous-mêmes. Comment alors être pour l’autre
autrement que dans l’impression ou la croyance

Les avancées des neurosciences interrogent le statut de la réalité et de sa


perception. Ces résultats peuvent suggérer que le monde que nous percevons reste
à l'état de possibles, jusqu'au moment où notre activité perceptive mène à l'action
et ge ces possibles en un seul.Le possible qui se réalise à ce moment devient alors
notre réalité, mais cette intention qui est notre pensée en train de se réaliser
arrive toujours trop tard pour que nous puissions constater le fait. C’est ce même
mouvement qu’e ectue aussi toutes les autres consciences qui maintient l’e et de
réalité pour nous.Et c'est ainsi que pour chacun naît un monde propre. Ce monde
qui se manifeste dans un espace et une durée pour chaque individu remet en cause
l'idée d'une même réalité intangible pour tous, bien que chacun puisse vivre cette
expérience comme une évidence commune
IL existe une hypothèse en physique des particules selon laquelle ,il n’y a pas de
réalité en dehors de la mesure, « le possible devient l’actuel, le réel, seulement au
moment où la mesure est enregistrée ». Et pour répondre à la question de quand
cela se produit, cette hypothèse s’appuie sur le postulat de la communication ; «la
réduction de la fonction d’onde» a lieu lorsqu’un acte irréversible d’ampli cation
met n au processus, cette acte c’est la communication et l’échange.C’est « le
monde », l’humanité, l’esprit dans l’interdépendance de ses éléments, qui produit
chacun de ses éléments : la réalité est un résultat, et ce résultat est un résultat de
la pensée
Ainsi avant que l'émotion et le récit ne surgissent, le monde (notre pensée), c'est-
à-dire l'espace et le temps que nous habitons, est peuplé par les « autres ». Cet
espace et ce temps contiennent la conscience comme activité qui prend « corps »
et se manifeste comme notre « corps », mais ce monde contient aussi toutes les
autres consciences et tous les autres « corps » qui prennent forme comme un
projet à réaliser : le genre humain
Néanmoins, ces consciences et cette conscience particulière sont isolées, chacune
existe en tant que séparée et cette opposition cherche à se résoudre, à s'unir dans
la réalisation de l'humanité. Cette séparation fait naître, avant tout autre besoin
nécessaire à la survie (celui de se nourrir, se reproduire etc.), le premier besoin,
celui irrépressible d'échanger, de communiquer avec l'autre pour créer un espace,
commun qui résolve la tension entre notre solitude et l'indétermination du
monde
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Le phénomène (ce qui apparaît pour moi) n’est rien d’autre que la manifestation
de cette séparation entre nous et les autres, entre les individus et le genre
(comme genre humain)
Notre relation avec l'existence (l'étant) est profondément in uencée par notre
préoccupation constante à son égard. En d'autres termes, la manière dont nous
nous rapportons à ce qui existe est déterminée par notre souci ou notre
préoccupation envers cela.Cette préoccupation crée une disposition particulière
dans notre expérience spatiale du monde. La manière dont nous nous soucions des
choses a ecte la manière dont nous les percevons dans l'espace qui nous entoure.
Et c'est uniquement parce que mon rapport à l'étant est constamment
surdéterminé par ce rapport de concernement, que celui-ci se présente comme
disposé dans l'espace et dans le temps
Cette tension qui est à la fois activité de la conscience et conscience de l’activité
est celle du rapport entre notre « espace intérieur » que nous considérons
comme notre espace propre, et « l’espace extérieur » que nous percevons
comme étranger. Nous faisons exister l’espace du monde extérieur de la même
manière que nous faisons exister notre espace intime, ces deux espaces sont dans
un rapport d’opposition permanent qui tient le réel dans sa séparation. Ce réel se
traduit par le sujet regardant l'objet. Ainsi toutes les autres consciences
deviennent aussi des objets, mais des objets bien particuliers parce qu’ils ont
conscience d'être et d'être regardées
Et quand nous fermons les yeux, nous pouvons avoir l’impression de voir derrière
nos paupières un espace intérieur qui nous est propre, comme isolé du monde
extérieur qui apparaît quand nous ouvrons les yeux. Pourtant, nous ne projetons
pas plus notre regard sur les objets extérieurs que nous rétro projetons notre
regard vers l’intérieur, il n’y a pas de distinction entre observateur et observé.
Cette distinction ne s'applique que lorsque des entités discrètes sont séparées par
une distance, même in me
Il est di cilement acceptable de penser qu’en « réalité », c’est un seul et même
espace que notre cerveau reconstruit. Et qu'il n’y a pas de sujet comme il n’y pas
d'objet. L’espace que nous percevons intérieurement, n'est pas un espace
physique, comme nous en avons l'illusion, mais le volume psychologique du corps
que nous construisons. C’est une représentation d’un espace biologique interprété
d’une manière morphologique (une con guration spatiale) par l'activité d’un
organe qui s’appelle le cerveau. L’espace que nous percevons intérieurement est
aussi la reconstruction vectorielle, la reconstruction (Vectoriel/topologique) non
spatiale par notre cerveau d’un espace topologique perçu et de dimensions
inconnues
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La distance perçue est assimilée à l'intuition d'une durée incarnée dans le monde,
c'est pourquoi l'instantanéité et l’abolition de la distance des réseaux dans
lesquelles chacun vie est aussi perçue comme une abolition du temps. Mais cette
abolition « virtuelle » ne renvoie qu'à une dépossession encore plus grande de
l’espace que nous habitons
Le monde intérieur n’est donc pas la reproduction d’un espace extérieur qui serait
séparé par la frontière de nos paupières, mais un continuum. Alors si nous faisons
advenir le monde en nous et en dehors de nous, ce qui nous relie à nous-mêmes,
notre identité, nos émotions, nos sensations, nos pensées, et ce qui nous lie aux
autres, est de même nature. Et c’est sur la découverte et l’exploration de cette
nature particulière que portera notre pratique de Neurofy.
Si le corps est l’activité de la conscience, cette activité manifeste une unité entre
le corps, et les autres corps, entre ma conscience et les autres consciences. Mon
corps et les autres corps, ma conscience et les autres consciences ont en commun
cette activité, cette manière de se manifester. Le monde est le fruit de l’activité
général des autres consciences et de ma conscience, et cette activité construit
l’espace suivant ses propres nécessités et les nécessités des autres
consciences.Cette espace est donc borné par ces di érentes nécessités, mais il
existe en dehors de ces constructions une autre géométrie faite d’autres
contraintes

Si la conscience est une activité, alors, la conscience est dynamique et elle ne peut
être réduite à une machine ou à un algorithme, mais fonctionne plutôt comme
un ux continu de perceptions, il n'y a pas d'états xes de conscience et ce n'est
pas un processus discontinu. La conscience est plutôt similaire à la lumière : à la
fois onde et particule, une harmonie synchronique plutôt qu'un processus
diachronique. Cette vision s’oppose à l'idée que le cerveau fonctionne de manière
computationnelle. La conscience est donc uctuante, continue et globale.
Dans la pratique proposée, nous posons l’hypothèse qu'il n'y a pas d'états de
conscience, mais plutôt un ux continu. Les « états »de conscience (modi és,
hallucinatoires, méditatifs…) ne sont que des moments d’un mouvement général
de la conscience prise dans une activité qui est l’échange
Une des séquences de Neurofy : xer sa main et la regarder bouger les yeux
ouverts, ensuite en fermant les yeux et continuer de la regarder bouger… Cet
espace que nous sentons, cette sensation du volume de notre bras et de son
déplacement, sont les mêmes quand nous avons les yeux ouverts. Cette sensation
étrange de « se sentir voir et de se voir sentir», c’est un exercice qui explicité
dans une série d’exercices , interroge sur ce que nous «voyons» vraiment
Le simple mal-être dont nous avons conscience ainsi que les troubles plus graves
sont décrits sous formes de symptomatologie complexe à partir des phénomènes
observés (DSM, psychopathologie) de l’activité de la conscience. Ces phénomènes
interrogent le rapport au réel, au monde et le partage de l’espace avec les autres,
c’est-à-dire la communication, l’échange.
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Du point vu clinique on décrit au niveau de l’activité de la conscience, une
distorsion du réel, une désorganisation voire une altération de la cognition et des
capacités communicationnelles. Il y aurait une dissociation au niveau des
sensations empêchant de se relier aux autres comme à soi
Du simple inconfort personnel aux interaction malaisées avec le monde partagé, la
question de l’action vers/sur l’autre se pose comme con guration de la modulation
de l’état de conscience et de son architecture.
Nous faisons l’hypothèse que « dérangements » causé par certaines maladies, ne
proviennent pas uniquement d’un problème de « dissociation » ou d’une
perception particulière du « corps » et de ses limites, mais plutôt d’une
conscience modulable (jusqu'à l’insupportable) d’un continuum qui semble
impossible à maitriser, et qui s’oppose l’ubiquité virtuelle des réseaux de notre vie
moderne
C’est ce changement de paradigme que paraissent pointer les nouvelles avancées
dans les traitements utilisant des psychédéliques. Ces pratiques commencent à
être expérimentés en psychiatrie parallèlement aussi à certaines expériences de
pleine conscience. A la di érence de la médecine psychédélique et des
expériences de pleine conscience ou de méditation, qui manifestent plutôt ce
moment particulier de perte ou de retour sur elle-même de la conscience qui
permet d’accéder à ce continuum, c’est plutôt par le travail de stimulation
sensoriel d’une géométrie di érente de l’espace, que Neurofy essaiera d’o rir à
la conscience l’accès à une spatialité étrangère à notre perception
Cette expérience sera celle d’une pratique de la conscience comme une activité de
notre corps lui donnant les moyens d’avoir accès à d’autres informations de la
réalité. Une tentative de rétablir le « corps » qui est à la fois notre pensée et sa
manifestation, en tant que puissance d’échange entre nous et le monde. C’est
un processus de reconstruction de notre expérience spatiale du monde et donc de
la façon dont cette expérience a ecte le « souci » et la disposition de notre être
dans celui-ci.En expérimentant l’unité de ces espaces, notre pensée ne sera plus
isolée comme une fragile conscience solitaire, mais rendue à l’échange général et
au sentiment d’être au monde
Aperçu d’ un programme : Activité perceptive – regard. Alternance de la
perception visuelle /rupture et continuité. De l’intention : la dépense du corps
dans di érents espaces.L’autre et les autres comme machine miroir. Aller-
retour : schéma corporel/représentation spatiale… 2D/3D

Novembre 2023
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