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LICENCE DE PHYSIQUE - 3ème année


Pierre-Emmanuel BERCHE - pierre.berche@univ-rouen.fr

Milieux magnétiques

On présente dans cette seconde partie du cours les principales propriétés des matériaux
magnétiques : paramagnétisme, diamagnétisme, ferromagnétisme. L’approche sera tout
d’abord macroscopique avant d’aborder les phénomènes liés au magnétisme sous l’angle
microscopique.

1. Le dipôle magnétique

1.1. Dipôle magnétique élémentaire


Les atomes ou les ions peuvent posséder un moment magnétique propre susceptible
de s’orienter dans un champ magnétique extérieur. Cela donne lieu aux phénomènes
de paramagnétisme et ferromagnétisme selon que l’on considère ou non des milieux
linéaires. De plus, à cause des phénomènes d’induction, l’application d’un champ B ~
entraı̂ne la création d’un moment magnétique opposé au champ. C’est l’origine du
diamagnétisme.
L’ensemble des phénomènes physiques liés au magnétisme repose sur la notion de
dipôle magnétique (en lien avec le fait qu’il n’existe pas de monopôle magnétique. En
effet, si l’on coupe un aimant en 2, on obtient 2 aimants et ainsi de suite : il n’est pas
possible d’isoler un pôle Nord ou Sud magnétique à la différence de la charge électrique
élémentaire que constitue l’électron ou le proton).
On considère la configuration suivante où l’on a des sources de courants dans une
distribution finie et on détermine leur influence en un point quelconque de l’espace (2).
Le champ d’induction magnétique est caractérisé par rot ~ B~ = µ0~j en régime stationnaire
(théorème d’Ampère) avec B ~ = rot ~ si l’on introduit le potentiel vecteur A
~ A ~ (puisque
divB ~ = 0 et que div rot~
~ a = 0 ∀ ~a). On a alors une équation différentielle locale, analogue
à l’équation de Poisson en électrostatique :

~ rot
rot ~ A ~ divA
~ = µ0~j = grad ~−∆
~ A.
~
2

~ = 0), on a
Si l’on fait le choix de la jauge de Coulomb en régime statique (divA
alors :
∆~A~ = −µ0~j soit ∆Ax = −µ0 jx , ∆Ay = −µ0 jy , ∆Az = −µ0 jz .
Cette expression permet de généraliser l’expression intégrale du potentiel scalaire créé
par une distribution finie de charges‡ à une forme analogue pour le potentiel vecteur
créé par une distribution finie de courants :

~ µ0 ZZZ ~j(1)dτ
A(2) =
4π Ω r12
remarque : L’analogie entre les 2 expressions est frappante ce qui justifie l’introduction
du 4-vecteur (quadrivecteur) en relativité restreinte.
Dans le cas d’une distribution filiforme, on a :

~
µ0 I I dl(1) ZZ
~
A(2) = puisque I = ~j.dS.~
4π C r12 S
On va considérer par exemple une spire de courant dans le plan (Oxy).

‡ ZZZ
1 ρ(1)dτ
V (2) =
4π0 Ω r12
puisque ∆V = −ρ/0 .
3

Az (2) = 0 puisque la spire est dans le plan (Oxy).


µ0 I 1 1
 
Ax (2) = l1 − .
4π rB rA
Soit f (r) = 1 ~
; df = gradf. ~ par définition donc
dl
r

1 1 Z B
1 ~ ∂1 1 y
   
− = ~
grad .dl = l2 = −l2 3
1
rB rA A r ∂y r r
Donc :
µ0 Il1 ~ 1 ~ = − µ0 Il1 l2 y12 ,
 
Ax (2) = ∇1 .AB 3
4π r12 4π r12
µ0 Il1 l2 x12
Ay (2) = 3
.
4π r12
On introduit le moment magnétique dipolaire équivalent à la boucle de courant µ
~ = IS~n
avec S = l1 l2 . On peut finalement écrire :
! !
µ0 µ y12 µ0 µ x12
Ax (2) = − 3 , Ay (2) = 3
, Az (2) = 0,
4π r12 4π r12
µ0 r~12 µ0 ~1 1 .
 
~
A(2) = ~∧ 3 =
µ ~ ∧∇
µ
4π r12 4π r12

1.2. Démonstration générale


On considère une spire de forme quelconque, on calcule la projection dans une direction
~u:
~u, A.~
~ I ~ !
~ µ0 I I dl dl I
~u ~ ZZ
~ ~
u ~
A.~u = .~u .~u = .dl = rot .dS
4π C r C r C r S(C) r
(en utilisant le thórème de Stockes),
!
~ ~u ~ 1 .~u = ∇
~ ∧ 1 .~u = ∇
~ 1 ∧ ~u + 1 rot~
     
rot = rot ~ u
r r r r r
~ u = ~0 donc :
~u étant un vecteur de direction fixée, rot~
µ0 I ZZ 1 µ0 I ZZ 1
      
~
A.~u = ~
∇ ~
∧ ~u dS = − ~
~u ∧ ∇ ~
dS.
4π S(C) r 4π S(C) r
Or (~a ∧ ~b).~c = ~a.(~b ∧ ~c) = −~a.(~c ∧ ~b) (produit mixte), donc :
µ0 I ZZ ~ 1 .
 
~
A.~u = ~u. ~ ∧∇
dS
4π S(C) r
Dans le cas d’une petite spire, on peut faire l’approximation :
µ0 I ZZ ~ 1 µ0 1
     
~
A= ~
dS ∧ ∇ = ~
~ ∧∇
µ
4π S r 4π r
avec ZZ
µ
~ =I ~ = IS~n.
dS
S
4

1.3. Calcul du champ magnétique


On utilise les composantes du rotationnel en coordonnées cartésiennes :
! ! !
~ = rot
~ A~= ∂Az ∂Ay ~ ∂Az ∂Ax ~ ∂Ay ∂Ax ~
B − i− − j+ − k
∂y ∂z ∂x ∂z ∂x ∂y
!
~ = − ∂Ay~i + ∂Ax ~j + ∂Ay − ∂Ax ~k.
B
∂z ∂z ∂x ∂y

∂ (1)
!
∂Ay (2) µ0 µ 1
Bx (2) = − =− x12 3
,
∂z 4π ∂z r12
−3 2 −3/2
avec r12 2
= (x212 + y12 + z12 ) .
Soit :
µ0 µ 3x12 z12
Bx (2) = 5
4π r12
µ0 µ 3y12 z12
By (2) = 5
4π r12
2
!
µ0 µ 3z12 1
Bz (2) = 5
− 3
4π r12 r12
(1)
Finalement : !
~ µ0 3(~µ.r~12 ).r~12 µ
~
B(2) = 5
− 3 .
4π r12 r12
Cette forme du champ est valide loin des sources et constitue le terme dominant dans
le développement multipolaire magnétique.
On reconnaı̂t la forme analogue à celle du dipôle électrostatique (CHAP.3 de la première
partie - Electrostatique dans les milieux diélectriques) :
!
~ 1 3(~p.r~12 ).r~12 p~
E(2) = 5
− 3
4π0 r12 r12

1.4. Dipôle magnétique dans un champ extérieur


Lorsqu’on place une spire de courant (ou un dipôle magnétique) dans un champ
magnétique extérieur de module constant et de symétrie radiale, un mouvement de
rotation de la spire peut être décrit par un couple de force ~Γ.
5

La force de Laplace s’exerçant sur la spire s’exprime :

F~ = I~l ∧ B
~

sur chaque côté de la spire. F~1 + F~2 = ~0 mais les deux forces n’ont pas la même droite
d’action d’où une rotation de la spire caractérisée par le couple :
~Γ = IS~n ∧ B
~ =µ ~
~ ∧ B.

Ce couple est associé à une énergie d’interaction avec le champ extérieur qui s’exprime
par U = −~µ.B~ puisque le champ magnétique tend à aligner le moment magnétique sur
sa direction (de la même façon que pour une aiguille de boussole soumise au champ
magnétique terrestre).

Dans le cas d’un champ magnétique non uniforme, il apparaı̂t de plus une résultante
non nulle des forces :
F~ = −∇U
~ = ∇(~~ µ.B).
~

On peut illustrer cet effet avec une expérience fameuse du point de vue historique dans le
cadre de la mécanique quantique. Il s’agit de l’expérience de Stern et Gerlach (1926) qui
a permis de mettre en évidence la quantification de la projection selon un axe arbitraire
des moments magnétiques atomiques. Dans cette expérience, on soumet des atomes
d’Ag (neutres) porteurs d’un moment magnétique orienté aléatoirement à un champ
magnétique inhomogène. Pour cela, on créé un gradient de champ magnétique selon la
direction z (arbitraire) en utilisant un électro-aimant avec des pièces polaires de forme
non régulière.

Les moments magnétiques sont donc soumis à une force selon l’axe z :
∂ ∂Bz
Fz = (µz Bz ) = µz
∂z ∂z
qui va produire une déviation des atomes selon cet axe. Les atomes sont récupérés sur un
détecteur. On s’attend classiquement à observer des impacts répartis symétriquement
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et continûment autour de la direction initiale du mouvement des atomes puisque la


force subie par les atomes dans l’entrefer de l’électro-aimant doit être proportionnelle
à la projection µz du moment magnétique selon l’axe z qui devrait pouvoir prendre
n’importe quelle valeur entre −|~µ| et +|~µ|. En réalité, on observe 2 taches symétriques
par rapport à la direction initiale car les moments magnétiques sont quantifiés, leur
projection également ±µz , avec une probabilité ±1/2.

1.5. Potentiel scalaire magnétique


On constate que l’expression du champ B ~ créé par un moment magnétique est analogue
~ du dipôle électrostatique. L’analogie repose sur le fait que dans les
à celle du champ E
2 cas, lorsque l’on est loin du dipôle ou du moment magnétique, on a :

~ B
rot ~ = ~0, rot
~ E~ = ~0,

~ = 0, divE
divB ~ = 0.

On peut donc définir des ”masses magnétiques” et un potentiel scalaire magnétique


~ B
Φm pour compléter cette analogie (qui ne serait pas valable si rot ~ 6= ~0 c’est-à-dire à
proximité du moment magnétique).

~ B
rot ~ = ~0, B
~ = −∇
~ 2 Φm

par analogie avec

~ E
rot ~ = ~0, E
~ = −∇
~ 2 V.

Le potentiel scalaire φm peut alors s’exprimer :


µ0 ~ 1
 
Φm (2) = − µ ~ . ∇2 .
4π r12
 
~2
En effet, on peut vérifier que ∇ 1
a pour composantes en coordonnées
r12
3 3 ~ par
cartésiennes −x/r selon x, −y/r selon y et −z/r3 selon z. Le calcul de B
~ = −∇
B ~ 2 φm redonne :
!
~ µ0 3(~µ.r~12 ).r~12 µ
~
B(2) = 5
− 3 .
4π r12 r12

Attention. La définition du potentiel scalaire magnétique φm n’est opérante qu’en


tout point où la densité de courant ~j est nulle, puisque la condition rot
~ B~ = ~0 permet
~ = −∇
de définir B ~ 2 φm . Si un courant I traverse le contour sur lequel on applique le
théorème d’Ampère, alors φm est une fonction multiforme. Par exemple, si on considère
le cas du fil infini parcouru par un courant I, on sait que :
!
~ = µ0 I u~φ = − ∂Φm u~r + 1 ∂Φm u~φ + ∂Φm u~z
B
2πr ∂r r ∂φ ∂z
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∂Φm µ0 I µ0 Iφ
=− =⇒ Φm = − +C
∂φ 2π 2π
Soit finalement Φm (0) = 0 si la constante C est choisie nulle, Φm (2π) = −µ0 I alors qu’il
s’agit du même point.

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