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Lutte contre la corrosion.

0 Dégradation des matériaux.

1. Généralités.
La dégradation des matériaux utilisés en équipement technique peut être la cause de sinistres dont le coût
financier peut être très élevé : en novembre 1990 le CEFRACOR (Centre Français de l'Anti-CORrosion)
estimait à 280 MF le coût de la remise en état des installations d'eau chaude sanitaire.

On peut estimer à l'heure actuelle (98') un coût de la corrosion (toutes corrosions confondues : réseaux et
structures métalliques) à 3 à 4% du PNB, soit pour la France de l'ordre de 6000 F par habitant...
Le terme de corrosion est plus spécifiquement réservé à la dégradation des métaux.
 La corrosion peut avoir les conséquences suivantes (se reporter au synoptique : Dégradation des
matériaux) :amincissement des parois mettant en péril la résistance mécanique des équipements :
elle peut conduit à des fuites et donc une dégradation de l'environnement des circuits,
 apports de produits de la corrosion dans les eaux véhiculées : ces apports créent au minimum une
pollution de l'eau pouvant être gênante du point de vue sanitaire ou dans un process industriel
(coloration de l'eau, goût, odeur).
Ces apports d'oxydes, hydroxydes, ... peuvent amener un embouage des réseaux qui peut finir par
une obturation (c'est aussi le cas des bactéries et des concrétions qu'elles produisent).
De plus ces formations de boues peuvent engendrer d'autres types de corrosion que la corrosion initiale ou
déporter les points de corrosion.
Elles peuvent de plus être le siège de développements bactériens qui peuvent être pathogènes (cas de
Legionella) ou générateurs de corrosions bactériennes...
 La corrosion des métaux peut avoir diverses causes, on peut néanmoins les classer en deux
catégories : corrosion physique : par érosion, cavitation, frottement, ...
 corrosion chimique : par réaction d'oxydoréduction.
On parle alors de corrosion électrochimique.Il serait illusoire de vouloir lutter contre la corrosion
électrochimique si, par ailleurs, la corrosion due à des phénomènes physiques était négligée.
Il ne faut pas oublier que la lutte contre la corrosion commence par l'application de règles simples de
conception, de réalisation et de maintenance des circuits.En particulier la réalisation des réseaux doit être
soignée : une bavure, une rayure, une soudure qui déborde, un chauffage excessif sur l'acier galvanisé ou le
cuivre, ... formeront des zones d'accrochage préférentielles de dépôts, d'augmentation locale de vitesse,
modifieront la nature du métal,...
L'aspect extérieur est important, l'aspect intérieur est primordial.

La lutte contre la corrosion est l'affaire de tous :


- le concepteur de l'architecture, du dimensionnement des réseaux, du choix du matériau,... ;
- le réalisateur qui doit appliquer des précautions simples de mise en œuvre tant dans le stockage de la
matière première (tubes, équipements, robinetterie,...) que de son assemblage ;
- le maître de l'ouvrage qui doit maintenir ses réseaux en bon état et surveiller attentivement les signes d'une
dégradation et surtout les anticiper.

2. "Corrosion" physique.
On rencontrera essentiellement deux modes de corrosion dues à des effets physiques :
 corrosion par érosion,
 corrosion par cavitation.
La corrosion par érosion se produit lors du passage à grande vitesse d'eau chargée de sédiments1. Il faut
donc avoir une eau véhiculée qui contienne le minimum de sédiments, et des vitesses de circulation pas trop
élevées.
La limitation de vitesse permet aussi de limiter la corrosion par cavitation. Elle se produit lors de
modifications locales de la pression (due à des variations de la vitesse de l'eau2), qui entraîne une
vaporisation de l'eau. Les bulles de vapeur ainsi produites, créent une onde de choc arrachant le métal à
proximité lorsqu'elles se recondensent.
Elle peut se produire en particulier dans les pompes3 et amener une destruction rapide des aubes, ou lors de
modification trop brusques de section d'écoulement.

1
Particules solides telles que des sables.
2
Cette liaison entre la vitesse et la pression est formalisée par le théorème de Bernoulli : une variation de
vitesse dans une canalisation conduit à altitude constante à une variation de pression.
3
Le signe acoustique d'une cavitation est un bruit de "gadins dans une bétonnière".

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Lutte contre la corrosion.

Une vitesse de 2 m.s-1 ne devrait jamais être dépassée dans un circuit d'eau.
Pour le cuivre le Centre Technique du Cuivre préconise de ne pas dépasser une vitesse de 1,5 m.s-1 ; le
Guide Technique nº1 bis propose de limiter cette vitesse à 1,2 m.s-1.
Le DTU 60.11 propose de limiter la vitesse (pour des raisons acoustiques) à 1 m.s-1 dans les distributions
privées si le débit est supérieur à 0,5 L.s-1.
D'autres recommandations de vitesses maximales pour le cuivre et alliages (utilisés dans les circuits de
pompes à chaleur)4 :
Eaux chlorurées
Eaux douces
Eau non sableuse Eau sableuse
Cuivre 1,8 1 0,8
Cu Zn 30
2,4 1,5 1,2
Laitons Cu Zn 29 Sn 1
Cu Zn 22 Al 2 2,7 2 1,5
Cu Ni 10 3 2,7 2,7
Cupro-nickels
Cu Ni 30 4,5 et >0,3 3,5 3,5
Remarques :
Même filtrée5 l'eau contient toujours des matières en suspension susceptibles de se déposer dans les zones
à faible vitesse de circulation. Cette décantation naturelle pourrait être gênante (corrosion sous dépôts : voir
plus loin). Il est donc conseillé de maintenir les vitesses de circulation à un minimum de l'ordre de 0,2 m.s-1
afin d'éviter ce type de problème. On peut au contraire désirer ce phénomène de décantation naturelle afin
de déposer les sédiments afin d'épurer l'eau : c'est le cas dans les "bouteilles de mélange" et "bouteilles
casse-pression" utilisées dans les circuits de chauffage, les "pots à boues" ou de décantation ; ce sera aussi
le cas dans tout réservoir de stockage.
Les vitesses ci-dessus sont bien sûr des vitesses moyennes en section courante de canalisation. On peut
avoir des vitesses locales beaucoup plus élevées en particulier dans les robinets entre le clapet et le siège.
En dehors des problèmes acoustiques, on aboutit très rapidement à une destruction du clapet par ravinage :
il ne peut plus jouer son rôle d'organe obturateur.

Ces dégradations peuvent aussi avoir lieu dans des réseaux de distribution de vapeur saturée : une vitesse
excessive de la vapeur ou une vapeur de titre6 en eau non nul peuvent être des facteurs de dégradation des
matériaux rencontrés du fait de l'énergie cinétique élevée des gouttelettes d'eau et ce en particulier à chaque
changement de direction.

1 Corrosion électrochimique des métaux.


Préambule ou si l'on ne devait retenir que deux idées sur la corrosion électrochimique.
La corrosion électrochimique est naturelle : la thermodynamique7 traduit ce que l'on peut constater : l'état le
plus stable d'un métal est son état... oxydé. Pour le tirer de son état d'oxyde et l'utiliser l'Homme a dû
dépenser une énergie non négligeable8.
De même pour le conserver en l'état d'assurer sa fonction il y aura lieu de lutter contre cette tendance
"naturelle" à vouloir retourner à des niveaux plus stables : ses oxydes.
Cela demandera donc un minimum de dépense énergétique - et intellectuelle dans un tout premier temps qui
est parfois d'ailleurs suffisante !

De plus pour pouvoir retourner à son état "naturel" le métal devra céder des électrons (c'est la définition
même d'une oxydation) : tout phénomène physique ou chimique qui conduit à un déséquilibre électronique
peut favoriser, alimenter la corrosion.
De façon plus général tout déséquilibre - toute hétérogénéité - conduit tôt ou tard à une corrosion.

4
D'après la Revue Générale du Froid.
5
Une filtration à un seuil de 50 à 100 m est le garant d'une protection efficace pour les circuits "courants".
6
Le titre mesure la proportion d'eau liquide mélangée à la vapeur.
7
Se référer aux notions de potentiels chimiques.
8
Même l'or qui est l'un des métaux les plus stables et donc peut se trouver à l'état "natif" (paillettes, pépites)
nécessite la plupart du temps un minimum d'efforts...

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1. Métaux et alliages.
Les principaux métaux utilisés dans le transport des fluides sont :
 le fer et ses alliages,
 le cuivre et ses alliages,
 le zinc en tant que protection de l'acier : acier galvanisé,
 l'aluminium et ses alliages.

Les métaux et alliages utilisés peuvent être décrits comme étant globalement de structure homogène.
Néanmoins on peut avoir ponctuellement :
 des irrégularités provenant de l'alliage : c'est le cas des aciers qui sont par nature composés de
cémentite (carbure de fer), des diverses formes de cristallisation du fer (fer alpha, gamma,...), ...
 des irrégularités dans la structure provenant d'un écrouissage9 du métal, d'un chauffage10 (lié aux
opérations de soudage), d'inclusions liées à des impuretés,
 des dépôts liés au mode de fabrication : calamine pour les tubes aciers11, carbone originaire des huiles
utilisées dans la fabrication des tubes cuivre12.
Ces différences de structure locales pourront être à l'origine de phénomènes de corrosion.

2. Potentiel d'électrode.
Tout métal se dissout en présence d'une solution aqueuse. Quantitativement cette dissolution dépend du
métal et de la solution.
Lorsqu'un métal passe en solution il cède à la solution des cations (donc chargés positivement), et se charge

M ¿
négativement : ¬¿ M n+ +n . e− où M représente un métal et Mn+ le cation en solution.

Au fur et à mesure de la dissolution du métal il s'établit une différence de potentiel électrique entre le métal
et la
solution
qui à

tendance à contrecarrer la dissolution.


Début de dissolution :
État d'équilibre :
Des charges s'accumulent dans le métal ;
État initial La différence de potentiel
les cations entrepassent
métalliques le métalenetsolution.
la solution (créée par les charges accumulées et les cations métalliques passés en solution) est suffisamment forte pour em

9
L'écrouissage est une opération métallurgique qui consiste à déformer, écraser le métal afin de "resserrer
ses grains" : ceci conduit à un métal moins malléable. Toute déformation, liée à un cintrage par exemple,
conduira à avoir des zones écrouies qui n'auront donc pas la même qualité que les zones non déformées.
10
Le chauffage va conduire à la formation d'oxydes et à la concentration des impuretés dissoutes dans le
métal aux "joints de grain".
11
C'est cette calamine qui donne la couleur noire aux aciers utilisés en chauffage. Cette couche est fort peu
adhérente et commencera à se détacher dès la première montée en température du réseau : voir plus loin
les bonnes pratiques.
12
Ces dépôts de carbone sont maintenant limités en France : l'utilisation de tubes non normalisés peut
conduire à des "désagréments" en particulier si la commande des tubes et leur réception ne sont pas
correctement réalisées (rien n'interdit en effet de vendre du tube non normalisé...).

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Lutte contre la corrosion.

On aboutit à un état d'équilibre entre le métal et la solution. Cet état d'équilibre peut être décrit par les lois de
la thermodynamique. Elles aboutissent à la définition d'un potentiel électrique fonction du métal, de la
température et de la concentration de la solution en ions qui proviennent du métal : voir en oxydoréduction la
loi de Nernst.
Une échelle dite des potentiels standards d'équilibre, classe ceux-ci en fonction de leur propension à passer
en solution : certains métaux sont dits "nobles" et se dissolvent donc difficilement : Or, Platine, Cuivre...
Au contraire d'autres : Magnésium, Aluminium, Zinc, Fer,... se dissolvent plus facilement et auront un
potentiel standard inférieur à ceux des métaux "nobles".
Ces potentiels sont déterminés par un point origine arbitraire : 0V = potentiel de l'électrode à hydrogène (voir
Notion de pH); et par une valeur du potentiel fixée par mise en contact du métal avec une solution normale13
d'un de ces sels.
Cette dernière condition est rarement rencontrée dans la pratique mais permet néanmoins de classer
globalement les métaux entre eux. Cette échelle est identique à celles qui classent les oxydoréducteurs : un
métal M1 de potentiel supérieur à un métal M2 sera considéré comme un oxydant vis à vis de M2.
Inversement M2 sera un réducteur vis à vis de M1.
Pour les métaux on parlera plutôt de métaux cathodiques (métal à potentiel élevé : le cuivre par exemple) et
de métaux anodiques (le magnésium par exemple).
Remarque : Dans certains cas on peut même observer des inversions dans cette classification en fonction
de la solution utilisée.
Ex : E0(Zn)=-0,76 V ; E0(Al)=-1,66 V.
Dans une solution de NaCl à 3 % (proche donc de la composition de l'eau de mer : 3% est équivalent à 30
g.L-1) : E(Zn)=-1,06 V ; E(Al)=-0,74 V (potentiels mesurés par rapport à une électrode au calomel saturé qui
est une autre électrode de référence plus courante que l'électrode à hydrogène : voir Notion de pH).
En solution saline (à 3 %), l'aluminium résistera mieux à la dissolution que le zinc.
Potentiels de dissolution mesurés dans l'eau de mer naturelle en mouvement

H2SO4 0,1 N
NaCl 3% KCl 0,1N Na2CO3 Potentiels du fer
dans diverses
solutions.
-0,6 à -0,7 0,34 +0,3
-0,45

Mg Al Zn Fe Cu & alliages ; acier inox 18-8 Au


Potentiels normaux
(en solutions normales : N)
-2,34 -1,66 -0,76 -0,44 0,35 1,45

Mg Zn Al Fe H2 Au Pt
Electrode au
calomel 0,3 Potentiels dans une solution
-1,63 -1,06 -0,74 -0,65 0,22
de NaCl 3%

Electrode
H2

En mV mesuré par rapport à l'électrode au calomel saturé.


Bronze ; laiton et cuivre -360
Plomb -510
Acier ordinaire ; Fonte -610
Cadmium -700
Aluminium -750
Zinc -1130
Magnésium -1600

Graphite 90
Acier inoxydable -100
Titane -150

13
Qui contient un équivalent-gramme de sel : un nombre de mole égal à 1 divisé par la valence du cation.

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Inconel -170
Cupronickel 70-30 -250
Cupronickel 90-10 -280

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3. Mécanisme de la corrosion électrochimique.


Une corrosion électrochimique débute à partir du moment où l'état d'équilibre vu précédemment est rompu.
En particulier si les électrons provenant de l'ionisation du métal sont captés.
Trois cas sont envisageables :
 les électrons sont captés en présence d'oxygène : on parlera de corrosion par l'oxygène,
 les électrons sont captés par les cations H+ : on parlera de corrosion acide,
 les électrons sont captés par un métal plus "noble" : on parlera de corrosion galvanique.
La zone de métal corrodée sera appelée anode, celle où s'établira le captage des électrons : cathode. Il est
ainsi créé ce que l'on appellera une pile de corrosion.
On peut avoir sur une même pièce métallique des zones cathodiques et des zones anodiques du fait de
l'hétérogénéité de la structure du métal.

4. Cinétique de corrosion.
Le mécanisme de corrosion comporte trois phases :
 dissolution du métal à l'anode,
 transfert des électrons libérés vers la cathode,
 réaction de cathode.
Cela a pour conséquence de pouvoir inhiber une corrosion en ne s'intéressant qu'aux réactions de cathode
ou qu'à celles d'anode.
D'autre part la vitesse de corrosion est déterminée par la vitesse de réaction de la phase la plus lente : celle
d'anode, ou celle de cathode.
En corrosion par l'oxygène par exemple, la réaction de cathode dépend de la possibilité d'approvisionner la
surface du métal en oxygène. Cette diffusion de l'oxygène vers le métal est fonction de la viscosité de l'eau
(donc de la température), et du mouvement de l'eau à l'interface (donc de la vitesse et des turbulences) : la
corrosion par l'oxygène sera accélérée par des températures, des vitesses, et des turbulences importantes.

5. Corrosion généralisée et corrosion ponctuelle.


La corrosion électrochimique fait appel à la notion de pile électrique et donc à des échanges de charges
électriques et de matière. Ces quantités de charges échangées permettent de définir une densité de courant
(quantités de charges rapportées à la surface). Cette densité de courant sera d'autant plus importante que
les zones cathodiques seront de grandes surfaces.
Si les surfaces anodiques sont de grandes dimensions la corrosion sera généralisée : répartie sur une
grande surface. l'épaisseur de métal dissoute sera faible, la corrosion restera superficielle.
En revanche si le nombre de sites anodiques est faible, la corrosion, pour une même surface cathodique se
fera en enlevant les mêmes quantités de matière.
La dissolution du métal se faisant alors sur une surface réduite on aboutira rapidement à une corrosion
perforante.
La corrosion dite généralisée, sera au contraire moins dangereuse.

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