Vous êtes sur la page 1sur 5

Nombres complexes

Avoir une intuition des nombres complexes n'est pas chose facile, puisqu'ils n'apparaissent pas de
manière évidente dans la nature. Ils ne sont cependant pas pour autant inutiles et, quoique les énoncés
de problèmes d'olympiades ne contiendront probablement jamais de nombres complexes, leur bonne
connaissance permet de résoudre certains problèmes de manière beaucoup plus directe. Les nombres
complexes peuvent également être utilisés en géométrie.

Ce chapitre a été écrit par N. Radu et mis en ligne le 8 décembre 2014.

Définitions
Introduction
Bien que cette vision des choses soit fortement romancée, on peut comprendre l'intérêt des nombres
complexes en observant la suite d'équations suivante :

L'équation x − 17 = 0 a une solution dans l'ensemble des nombres naturels N.


L'équation x + 17 = 0 n'a pas de solution dans N. On a donc inventé les nombres entiers négatifs
et l'ensemble Z .
L'équation 2x + 17 = 0 n'a pas de solution dans Z . On a donc inventé les nombres rationnels et
l'ensemble Q.
L'équation 2x2 − 17 = 0 n'a pas de solution dans Q. On a donc inventé les nombres réels et
l'ensemble R.
L'équation 2x2 + 17 = 0 n'a pas de solution dans R. C'est pourquoi on invente les nombres
complexes et l'ensemble C.

Et nous serons en quelque sorte arrivés au bout de ce processus car, comme nous le verrons plus tard
avec le théorème fondamental de l'algèbre, tous les polynômes auront une solution dans C (et nous
n'inventerons donc plus de nouvel ensemble strictement plus grand que C, du moins pas dans ce
contexte).

Définitions
Il existe de nombreuses manières d'introduire les nombres complexes. Nous donnons ici la façon la plus
simple, qui n'est par conséquent pas totalement rigoureuse.
Pour définir les nombres complexes, on commence par introduire un nouveau nombre (c'est-à-dire non
réel), appelé unité imaginaire, et noté i. On lui donne par ailleurs la propriété fondamentale suivante,
qu'aucun réel ne vérifie :

i2 = −1.
L'ensemble C des nombres complexes peut alors être défini par
C := {a + ib ∣ a, b ∈ R}.

Les nombres 3 + 5i, √2 − i, 3i , 18 , sont donc tous des nombres complexes. En particulier, tous les
nombres réels sont des nombres complexes (en prenant b = 0 ).

Lorsque z = a + ib, on dit que a est la partie réelle de z et on la note Re(z). D'autre part b est la
partie imaginaire de z et on la note Im(z). Un nombre complexe est donc réel si et seulement si sa
partie imaginaire est nulle. Par contre, quand un nombre complexe a une partie réelle nulle, on dit qu'il
est imaginaire pur (puisqu'il n'a aucune partie réelle).

Il est très simple de manipuler les nombres complexes. On peut utiliser tout ce que l'on connaît pour les
nombres réels, et il faut juste garder à l'esprit que l'on a une nouvelle règle : i2 = −1.

Addition
On peut facilement additionner deux nombres complexes :

(a + ib) + (c + id) = (a + c) + i(b + d).

Multiplication
On peut aussi les multiplier entre eux :

(a + ib) ⋅ (c + id) = ac + ibc + iad + i2 bd = (ac − bd) + i(bc + ad).


Division
Il est également possible de diviser un nombre complexe par un autre, tant que ce dernier est non-nul.
Cela paraît plus compliqué, mais on peut en fait utiliser la même astuce que celle généralement
enseignée pour faire disparaître une racine du dénominateur : multiplier par le binôme conjugué. En

3 + √2
effet, lorsqu'on est en présence d'une fraction du type – , on conseille généralement de multiplier
2 − √2

le numérateur et le dénominateur par (2 + √2 ) de sorte que la formule (a − b)(a + b) = a2 − b2
s'applique et que la racine carrée disparaisse du dénominateur. On peut utiliser la même méthode pour
les nombres complexes : si (a + ib) apparaît au dénominateur, alors on multiplie numérateur et
dénominateur par (a − ib) pour faire disparaître l'unité imaginaire du dénominateur :

c + id (c + id)(a − ib) (ac + bd) + i(ad − bc) ac + bd ad − bc


= = = 2 +i 2
a + ib (a + ib)(a − ib) 2
a − (ib) 2 a +b 2 a + b2

Inverse
En particulier, alors que cela n'était pas évident au moment de la définition des nombres complexes, tout
nombre complexe non nul possède un inverse. En effet, l'inverse de z = a + ib est donné par la formule
précédente par

a b
z −1 = − i .
a2 + b2 a2 + b2

Remarque : Il n'est pas nécessaire de retenir toutes ces formules ! En effet, celles-ci peuvent facilement
être retrouvées au moment voulu en utilisant simplement i2 = −1. La dernière formule pour trouver
l'inverse d'un nombre complexe permet cependant de se simplifier les calculs.

Remarque
Cette définition n'est pas réellement rigoureuse, car il n'est pas tout à fait clair que toutes les opérations
usuelles sont bien définies. Pour avoir une définition plus rigoureuse, on peut par exemple introduire les
2
nombres complexes en disant qu'il s'agit simplement des couples de réels (a, b) ∈ R . Il faut alors
définir l'addition et la multiplication des complexes en disant que

(a, b) + (c, d) = (a + c, b + d),


(a, b) ⋅ (c, d) = (ac − bd, ad + bc).
La définition de la multiplication des complexes peut dans ce contexte sembler un peu effrayante, et
c'est pourquoi nous n'avons pas choisi cette approche ici, mais elle est bien sûr équivalente. Il reste alors
à dire qu'au lieu de noter (a, b), on préfère écrire a + ib, et on voit par la définition de multiplication que

i2 = i ⋅ i = (0, 1) ⋅ (0, 1) = (−1, 0) = −1.

Conjugué et module
Étant donné un nombre complexe z, on peut définir son conjugué z̄ et son module |z|. Ces deux notions
interviennent fréquemment dans les différents calculs sur les complexes et connaître les propriétés
associées à ces concepts est toujours utile.

Conjugué
Si z = a + ib avec a, b ∈ R, alors le conjugué de z est le nombre complexe z̄ = a − ib. Nous avons
déjà utilisé cette notion sans la nommer au moment d'expliquer la division de deux nombres complexes.
Les propriétés suivantes sont fondamentales et se vérifient aisément à partir de la définition :
¯¯
¯
Conjuguer un complexe deux fois de suite revient à ne rien faire : z̄ = z.
Un nombre est égal à son conjugué si et seulement s'il est réel : z̄ = z ⇔ z ∈ R.
Un nombre est égal à l'opposé de son conjugué si et seulement s'il est imaginaire pur :
z̄ = −z ⇔ z ∈ iR.
Le conjugué d'une somme est égal à la somme des conjugués : z ± z = z̄ ± z¯′ .
¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯′

Le conjugué d'un produit est égal au produit des conjugués : z ⋅ z = z̄ ⋅ z¯′ .


¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯′

¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯
=
¯¯¯¯¯¯z¯¯¯¯¯¯ z̄
Le conjugué d'un quotient est égal au quotient des conjugués : ( )= .
z′ z¯′
Les deux derniers points sont un peu moins évidents mais il suffit d'écrire z = a + ib et z ′ = a′ + ib′ et
d'effectuer les calculs pour vérifier les égalités.

La notion de conjugué permet notamment de parler de la partie réelle et de la partie imaginaire de z


sans avoir recours à son écriture sous la forme z = a + ib. En effet, on a les formules

z + z̄ z − z̄
Re(z) = et Im(z) = ,
2 2i
puisque

a + ib + a − ib a + ib − (a − ib)
=a et = b.
2 2i

Module
−−−−−−
Si z = a + ib avec a, b ∈ R, alors le module de z est le nombre réel positif |z| = √a2 + b2 . La
notation rappelle fortement celle de valeur absolue, et ce n'est pas un hasard. En effet, si z = a ∈ R,
−−
alors |z| = √a2 = |a| (au sens de la valeur absolue), ce qui montre que la notion de module sur les
complexes est en fait une généralisation de celle de valeurs absolue sur les réels. Là aussi, on a quelques
propriétés élémentaires :

Le seul nombre dont le module est nul est le nombre nul lui-même : |z| = 0 ⇔ z = 0.
Le module du conjugué d'un complexe est égal au module du complexe : |z̄ | = |z|.
Le module d'un produit est égal au produit des modules : |z ⋅ z ′ | = |z| ⋅ |z ′ |.
∣ z ∣ = | z| .
Le module d'un quotient est égal au quotient des modules :
∣ z′ ∣ |z ′ |
Le module d'une somme est inférieur ou égal à la somme des modules : |z + z ′ | ≤ |z| + |z ′ |.

On a aussi la propriété intéressante suivante :

z ⋅ z̄ = |z|2
En effet, si z = a + ib alors
z ⋅ z̄ = (a + ib) ⋅ (a − ib) = a2 − (ib)2 = a2 + b2 = |z|2 .
Si z ≠ 0, alors on peut notamment en déduire que
1 z̄
= ,
z | z| 2
ce qui donne une formule plus pratique pour l'inverse d'un nombre complexe. On remarque en
remplaçant z par a + ib qu'on retrouve exactement la même formule que celle donnée précédemment.

Récapitulatif
Notations
Puisque plusieurs nouvelles notions et notations ont été introduites, nous les rappelons ici.

Définitions

Si z = a + ib avec a, b ∈ R, alors

La partie réelle de z est Re(z) = a.


La partie imaginaire de z est Im(z) = b .
Le conjugué de z est z̄ = a − ib.

−−−−−−
z =√
−−−−−−
Le module de z est |z| = √a2 + b2 .

Entraînez-vous !
Savoir manipuler les nombres complexes n'est qu'une question d'entrainement. Pour s'exercer, voici
quelques calculs basiques (les solutions sont écrites en blanc et peuvent être découvertes en les
surlignant) :

1. La partie réelle de 2i − 5 est −5


2. La partie imaginaire de 2i − 5 est 2
3. (3 + 4i) − (5 − i) = −2 + 5i
4. (2 − i) + (i − 2) = 0
5. (3 − 2i) ⋅ (−i) = −2 − 3i
6. (1 + 3i) ⋅ (2 − 2i) ⋅ (1 − i) = 12 − 4i
2−i 4 7
7. = −i
3 + 2i 13 13
1−i
8. = −i
1+i
5 2
9. L'inverse de 5 − 2i est +i
29 29
10. L'inverse de i est −i
11. Le conjugué de −2 + 2i est −2 − 2i
12. Le conjugué de 4 est 4
13. Le module de 3 − 4i est 5

14. Le module de 2 − i est √5

Racines carrées
Racines carrées d'un réel
Par définition, une racine carrée d'un nombre réel r est un nombre dont le carré vaut r. Si on s'intéresse
aux racines carrées réelles d'un nombre réel, alors il y a plusieurs cas à discuter :

1. Un nombre r > 0 possède exactement deux racines carrées : √r et −√r.


2. Le nombre r = 0 ne possède qu'une seule racine carrée : lui-même.
3. Un nombre r < 0 ne possède aucune racine carrée réelle.

Si maintenant, on s'autorise à avoir des racines carrées complexes, alors les nombres négatifs ont (tout
comme les nombres positifs) exactement deux racines carrées ! Pour s'en convaincre, il suffit de
−−

résoudre l'équation x2 = r avec r < 0. Celle-ci se réécrit en fait (√−r désigne la racine carrée positive
usuelle de −r, qui est un nombre positif) :

x2 − r = 0
⇔ x2 − (i√− −
−)2 = 0
−r
⇔ (x − i√− −
−) ⋅ (x + i −
−r −

√−r) = 0
⇔ x = i√− −− ou x = −i −
−r −−
√−r.
−−− −−

Les deux racines carrées de r < 0 sont donc i√−r et −i√−r. Par exemple, les racines carrées de −3
– –
sont i√3 et −i√3.
La situation est en fait presque plus claire dans les complexes que dans les réels : tous les nombres non
nuls (positifs ou négatifs) possèdent exactement deux racines carrées opposées l'une de l'autre.

Racines carrées d'un complexe


Intéressons-nous à présent aux racines carrées des complexes non-réels. On considère c = a + ib avec
b ≠ 0 et on cherche ses racines carrées. Cela revient à chercher z ∈ C tel que z 2 = c. Si on note
z = x + iy, alors on a z 2 = x2 − y 2 + 2ixy et l'égalité z 2 = c a lieu si et seulement si
x2 − y 2 = a (1)
{
2xy = b (2)
En fait, on sait aussi que x et y satisfont toujours aussi
−−−−−−
x2 + y 2 = |z|2 = |z 2 | = |c| = √a2 + b2 (3)
En combinant (1) et (3), on trouve x2 et y2 et par suite

⎧ x = ±√ √a2 +b2 +a
−−−−−−−

⎨ 2
⎩ y = ±√ √a +b −a

−−−2−−2−−
2

Cependant, les 4 choix de signes ne sont pas possibles, car x et y sont également liés par (2). Si b > 0,
il faut choisir le même signe pour x et y alors que si b < 0 , il faut choisir des signes différents. Si la
notation sgn(b) vaut +1 ou −1 selon que b est positif ou négatif, on a finalement la formule finale
−−−−−−−−−2−−−− −−−
−−−−−−−2−−−−⎞
⎛ √− 2−− − √a− − −
z=± √ + sgn(b) ⋅ i√
a + b +a 2 + b −a
⎝ ⎠
.
2 2

On a donc là aussi, quelles que soient les valeurs de a et b (c'est-à-dire quelque soit c), exactement deux
racines carrées opposées l'une de l'autre.

Remarques :

1. Il ne faut pas retenir la formule précédente donnant les deux racines carrées d'un nombre complexe
! Il est en effet bien plus facile de refaire le raisonnement à chaque fois, en remplaçant directement
a et b par leurs valeurs numériques (ce qui simplifie les expressions).
2. La notation √r, lorsque r est réel, désigne la racine carrée positive de r. Dans le cas complexe, il
n'y a plus de notion de positif ou négatif (on ne peut pas dire que le nombre 5 − 3i est positif ou
négatif...). Pour cette raison, lorsque c ∈ C, la notation √c n'a pas de sens, puisqu'on ne sait
laquelle des deux racines cette notation désigne ! On peut éventuellement l'utiliser lorsqu'on la
−−

précède du signe ±, pour désigner les deux racines à la fois. La formule √−1 = i trop souvent
−−

écrite est donc à proscrire ! En effet, pourquoi n'aurait-on pas plutôt √−1 = −i ?

Vous aimerez peut-être aussi