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Nombre Complexes

Le deuxième chapitre de ce cours s’intéresse aux nombres complexes et à quelques-unes de leurs applications
en géométrie, en théorie des équations et en trigonométrie. Il n’est pas directement lié au chapitre précédent (à
part pour quelques applications) et il pourra donc être étudié de façon indépendante. Nous utiliserons cependant
ce chapitre et le précédent dans le troisième et dernier chapitre de ce cours. Les nombres complexes sont apparus
au XVI e siècle par nécessité pour trouver les zéros (réels) d’équations du type : x3 = 15 x + 4. Ils n’ont ensuite été
étudié plus en profondeur qu’au XIX e siècle pour leurs applications en géométrie et ils ne cessent d’être utilisés
dans de nombreux domaines des mathématiques depuis.

Nous présentons tout d’abord les propriétés de base des nombres complexes et nous observons que l’exponen-
tielle complexe permet de créer un lien fort entre nombres complexes et fonctions trigonométriques. On revient et
on insiste sur ce lien à la fin de ce chapitre avec la linéarisation des puissances de fonctions trigonométriques et
les formules d’angle multiple qui permettent de calculer le cosinus ou le sinus du multiple d’un angle en fonction
du cosinus ou du sinus de l’angle.

Le reste du chapitre présente des applications des nombres complexes en géométrie et, ce qui est le cœur de
ce chapitre, en théorie des équations. Les équations polynomiales du second degré à coefficients réels ont déjà
été étudiées au lycée. Les nombres complexes nous permettent de résoudre toutes les équations polynomiales du
second degré (à coefficients complexes) de façon uniforme. Nous analysons aussi quelques équations polynomiales
de degré supérieur à 2 avec l’aide des racines n-ièmes.

Nous vous encourageons à compléter la lecture des différents cours de ce chapitre avec les références suivantes
disponibles à la Bibliothèque Universitaire : [LTT16, AB13, AAA07, ML13, RW13].

1
2

Cours Magistral n°10

Pré-requis : Objectifs :
– calcul algébrique, valeur absolue dans R – savoir calculer le module d’un nombre complexe
– écriture algébrique d’un nombre complexe – interpréter géométriquement un nombre complexe
– trigonométrie – effectuer les calculs algébriques avec des nombres
– application, bijection complexes

1. Forme algébrique, module, interprétation géométrique


Nous introduisons dans ce cours les nombres complexes ainsi que leurs premières propriétés. Ces nombres forment
une extension des nombres réels et ils vont en particulier nous permettre de résoudre toutes les équations du
second degré (indépendamment de la valeur du discriminant) dans le cours magistral n°13.

1.1. Histoire
Voir sur Wikipedia (par exemple) :
– les principaux héros : Niccolo Fontana dit Tartaglia, Jérôme Cardan, Ludovico Ferrari, Raphael Bombelli
– le lieu : Italie
– contexte historique : découverte de l’Amérique 1492, XVI-ème siècle, contemporains de Rabelais, Montaigne,
Shakespeare, Léonard de Vinci, Michel-Ange, assassinat Henri IV 1610.
– un fait : solution d’une équation du troisième degré à coefficients réels, formules de Cardan.

1.2. Définition d’un nombre complexe


Les nombres complexes sont les nombres de la forme z = a + i b, où a, b ∈ R, où i ∉ R vérifie i2 = −1. Le nombre i
est appelé unité imaginaire. Le réel a est appelé partie réelle de z, noté a = R e( z), le réel b est appelé partie
imaginaire de z, noté b = I m( z).

Remarque

Attention, la partie imaginaire d’un nombre complexe est un nombre réel !

On convient que dans ce cours les lettres a, b, a0 , b0 désignent toujours des nombres réels quelconques.

Deux nombres complexes z = a + ib et z = a0 + ib0 sont égaux si et seulement s’ils ont mêmes parties réelles et
mêmes parties imaginaires :
( (
0 R e( z) = R e( z0 ) a = a0
z=z ⇔ ⇔
I m( z ) = I m( z 0 ) b = b0 .
On note C l’ensemble des nombres complexes. (
R2 → C
La remarque précédente signifie que l’application : est une bijection de R2 dans C.
(a, b) 7 → z = a + ib

Exercice 1

Déterminer la bijection réciproque de l’application précédente.

1.3. Opérations
Les opérations d’addition (notée z + z0 ) et de multiplication (notée zz0 ou bien z × z0 , ou encore z · z0 ) sont définies
de manière naturelle, compte tenu de la relation i2 = −1 .
Ceci veut dire que : (a + i b) + (a0 + i b0 ) = (a + a0 ) + i( b + b0 ) et que (a + i b)(a0 + i b0 ) = (aa0 − bb0 ) + i(ab0 + ba0 ).
3

Exercice 2

Déterminer les parties réelles et imaginaires des complexes i(1 + i), (1 + i)2 , i z où z = a + i b.

On vérifie immédiatement que ces opérations (on dit aussi des lois de composition) ont, comme pour les nombres
réels, les propriétés suivantes :
1. Elles sont associatives : pour tout triplet de complexes ( z, z0 , z00 ), on a ( z + z0 ) + z00 = z + ( z0 + z00 ) et ( zz0 ) z00 =
z( z0 z00 ).
2. Elles sont commutatives : pour tout couple de complexes ( z, z0 ), on a z + z0 = z0 + z et zz0 = z0 z.
3. La multiplication est distributive par rapport à l’addition : pour tout triplet de complexes ( z, z0 , z00 ), on a
z( z0 + z00 ) = zz0 + zz00 .
4. Le nombre complexe 0 := 0 + i0 est élément neutre pour l’addition : pour tout z ∈ C, on a z + 0 = z. De plus si
z = a + i b est un nombre complexe, alors le nombre complexe − z := −a + i(− b) = −a − i b est son opposé, c’est
à dire z + (− z) = 0.
5. Le nombre complexe 1 := 1 + i0 est l’élément neutre pour la multiplication, i.e. ∀ z ∈ C, 1.z = z.1 = z.
6. Tout élément z = a + i b ∈ C, z 6= 0 a un “élément symétrique” pour la multiplication (c’est-à-dire qu’il existe
1
z0 ∈ C tel que zz0 = z0 z = 1), que l’on appelle inverse de z et qui est noté z−1 ou bien .
z

Démonstration

Remarque

Lorsqu’un ensemble E est muni d’une loi de composition interne ~ qui est associative, qui possède un élément
neutre et dont chaque élément de l’ensemble possède un élément symétrique, on dit que (E, ~) est un groupe.
Ici, les ensembles (C, +) et (C∗ , ×) sont des groupes. Ils sont de plus commutatifs.
(
R→C
Il existe alors une injection naturelle de R dans C par φ : qui est compatible avec la multiplication
a 7→ a + i0
et l’addition définies sur C. On convient de noter a + i0 = a et d’identifier φ(R) à R. On considère donc désormais
R comme un sous-ensemble des nombres complexes : R ⊂ C. Soit z ∈ C, z est un réel si et seulement si sa partie
imaginaire est nulle. L’addition et la multiplication qui existent sur R se prolongent à C comme défini plus haut.
La valeur absolue sur R se prolonge également à C (cf. paragraphe 1.6). Par contre la relation É ne se prolonge
pas sur C.

1.4. Conjugaison
Soient z = a + i b un nombre complexe, le conjugué de z est le complexe z = a − i b.

Démonstration
Proposition 1. Propriétés de la conjugaison

Soit z = a + i b et z0 des nombres complexes. Alors :


1 1
µ ¶
• z = z, • si z est non nul, = ,
z z
• z + z0 = z + z0 , z+z z−z
• a = R e( z) = et b = I m( z) = ,
• zz0 = zz0 , 2 2i
• z ∈ R ⇔ z = z.

Exercice 3

1 + i 1 + i 11
µ ¶
Déterminer les parties réelles et imaginaires des complexes , .
1−i 1−i
4

1.5. Correspondance avec le plan complexe : le plan d’Argand-Cauchy


Pour définir un nombre complexe, nous avons vu qu’il suffit de se donner ses parties réelle et imaginaire a et b, de
telle façon que z = a + i b. On peut donc le représenter par un point de R2 , c’est-à-dire un point du plan, ou encore
un vecteur. Si on se donne un plan P et un repère (O, → −
u,→ −v ), on peut associer à ce nombre complexe le point de
coordonnées (a, b). Par exemple, 0 sera le point de coordonnées (0, 0), c’est à dire l’origine du repère O , 1 sera le
point de coordonnées (1, 0), et i le point de coordonnées (0, 1).
Réciproquement, à un point M du plan de coordonnées (a, b), on lui fait correspondre le nombre complexe a + i b,
−−→
que l’on appelle l’affixe de M (ou encore affixe de OM ), et que l’on note z M ou z− −→ . On établit ainsi une bijection
OM
entre C et le plan P . Si on veut faire la distinction entre le nombre complexe z et le point M qui lui correspond,
on appellera [ z] le point M dont l’affixe est z.
Un plan P , muni d’un repère orthonormé direct 1 , en bijection avec les nombres complexes, s’appelle un plan
d’Argand–Cauchy.

La conjugaison s’interprète comme une symétrie par rap-


port à l’axe (Ox).
R
R
[ z] = [a + i b] [ z] = [a + i b]
b b

~
v ~
v
z = a + ib
O ~
u a R
O ~
u a R

−b
[ z̄]

Exercice 4

1. Placez dans un plan d’Argand–Cauchy les points d’affixes


1+ i [ z]
1 + 3 i , −2 + 3 i , −1 − i et .
1− i
2. On donne ci-contre le plan d’Argand–Cauchy où sont repré- [ z0 ]
~
v
sentés les points d’affixes z et z0 . Placez précisément les
points d’affixes − z, z, z + z0 , z − z0 .
O ~
u R

Proposition 2

Si A et B ont pour affixes z A et zB . Alors :


−−→
• le vecteur AB a pour affixe zB − z A ,
z A + zB
• le milieu I de [ AB] a pour affixe z I = ,
2
~ et w
• soit w ~ les vecteurs d’affixes z et z et λ ∈ R. Alors :
0 0

~ +w
a) w ~ 0 a pour affixe z + z0 ,
~ a pour affixe λ z.
b) λw

Ainsi l’addition complexe correspond à l’addition vectorielle, la multiplication par un nombre réel d’un nombre
complexe correspond donc à la multiplication d’un vecteur par un scalaire, le milieu à la moyenne... bref les choses
se passent plutôt bien.
1. Un repère (O, →

u,→
−v ) est direct si la mesure principale de l’angle (→

u,→
−v ) est positive.
5

Exercice 5

Soit A = [−1 − i], B = 2 − 12 i , C = 52 + i et D = 21 (−1 + i) quatre points. Démontrez d’au moins deux façons
£ ¤ £ ¤ £ ¤

différentes que ABCD est un parallélogramme.

1.6. Module
Soit z = a + i b un nombre complexe. Le nombre zz = a2 + b2 est un nombre réel positif, qui est nul si et seulement
si a = 0 = b, c’est-à-dire si et seulement si z = 0. On définit le module de z par
p p
| z| := zz = a2 + b2 (c’est un nombre réel positif).

Exemple 1

On a |3 + 4i| = 5.

Remarque 1
−−→ p
Le théorème de Pythagore nous dit que la longueur du vecteur OM de coordonnées (a, b) est a2 + b2 : on
voit donc que le module | z| de z = a + i b n’est rien d’autre que la longueur du vecteur d’affixe z.

R
M z = [ z]
OM = | z|
~
v b

O ~
u a R

En particulier si A et B sont deux points du plan d’affixes z A et zB respectivement, la distance entre les
points A et B est AB = | zB − z A |.

Démonstration
Proposition 3

Soient z et z0 deux nombres complexes. On a les propriétés suivantes :


• | z|2 = zz,
• | zz0 | = | z|| z0 |,
• | z | = | z |,
• z = 0 ⇔ | z| = 0,¯ ¯
¯1¯ 1 1 z
• si z 6= 0 alors ¯¯ ¯¯ = et = 2 ,
z | z| z | z|
• |R e( z)| É | z| et |I m( z)| É | z|.

Proposition 4. Inégalité triangulaire - admise

Pour tous complexes z, z0 , on a les inégalités suivantes :

|| z| − | z0 || É | z + z0 | É | z| + | z0 |.

Remarque
¯ ³ ´¯
Il y a égalité dans l’inégalité triangulaire lorsque : R e( zz0 ) = ¯R e zz0 ¯ c’est-à-dire R e( zz0 ) ∈ R+ ; posons
¯ ¯
³ ´
R e( zz0 ) = λ ∈ R+ alors, si z0 6= 0, on a z = | zλ0 |2 z0 . Les complexes z et z0 sont positivement proportionnels.
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Cours Magistral n°11

Pré-requis : Objectifs :
– calcul algébrique, module dans C – savoir calculer le module et l’argument d’un nombre
– trigonométrie complexe
– application, bijection – savoir manipuler l’exponentielle complexe
– exponentielle réelle – formules d’Euler et de Moivre
– effectuer des calculs avec la forme exponentielle

2. Exponentielle complexe, formules d’Euler et de Moivre, ar-


gument d’un nombre complexe
Nous continuons l’étude des nombres complexes en décrivant les liens fondamentaux entre nombres complexes
et fonctions trigonométriques. Ces liens apparaissent à travers la définition d’une exponentielle complexe. Pour
θ ∈ R, nous aurons la définition suivante
eiθ := cos θ + i sin θ .

Cette écriture amène à différents résultats comme les formules d’Euler et de Moivre, en lien avec les fonctions
trigonométriques. Pour finir, nous présentons la notion d’argument qui correspond à un choix particulier de θ
permettant de décrire un point du cercle unité.

2.1. Ensemble U des nombres complexes de module 1


L’ensemble des nombres complexes de module 1 est noté U = { z ∈ C, | z| = 1} . Géométriquement, on peut représenter
cet ensemble comme le cercle de centre O et de rayon 1. L’ensemble U est stable par produit et par quotient.
1
En particulier l’inverse de z ∈ U , complexe de module 1, est = z qui est aussi un complexe de module 1. Le couple
z
(U , ×) est un groupe commutatif.

Représentation de U dans le plan d’Argand–Cauchy Le plan d’Argand–Cauchy, présenté dans le cours


précédent, est un plan P muni d’un repère orthonormé, par exemple R2 muni de son repère canonique, en bijection
avec l’ensemble des nombres complexes. Dans ce plan, l’ensemble U se représente de la façon suivante :

R z = x + i y, x ∈ R, y ∈ R À la place d’un plan d’Argand–Cauchy, nous pou-


vons aussi utiliser le plan complexe. Nous obtenons
~
v un dessin similaire.
[ z]
y iR z = x + i y, x ∈ R, y ∈ R
y i
θ [ z]
iy
y
x θ
O ~
u R
0 x 1 R

x 2 + y2 = 1
x2 + y2 = 1
Le cercle du plan d’Argand–Cauchy ci-dessus est paramétré par les points de coordonnées (cos θ , sin θ ), pour
θ ∈ [0, 2π[. Il en est de même pour le cercle U , qui est paramétré par la fonction z(θ ) := cos θ + i sin θ , pour θ ∈ [0, 2π[.

Nous allons utiliser les points de U pour décrire les nombre complexe. Pour cette raison, pour tout θ ∈ R, nous
définissons
eiθ := cos θ + i sin θ .

Cette écriture permet d’obtenir des formules qui s’écrivent de façon plus concise et nous allons voir qu’elle est
compatible avec les propriétés classiques de l’exponentielle réelle.
7

Remarque

Pour tout θ ∈ R, on a z(θ ) = z(θ + 2π), donc en particulier e2iπ = e0 = 1. De même z(θ + π) = − z(θ ) donc eiπ = −1.

Proposition 5

Pour tout θ ∈ R, nous avons l’égalité


eiθ = e−iθ .

Exercice 6
π π π π π π
Positionner sur le cercle trigonométrique les points d’affixes, −i, eiπ , e−i 3 , e−i 6 , i e−i 3 , e5i 4 , e−3i 2 , e0 , e2i 3 .

2.2. Formules d’Euler


L’écriture eiθ = cos θ + i sin θ permet d’obtenir des égalités qui sont particulièrement utiles lorsque l’on cherche à
linéariser une expression trigonométrique du type : cos3 ( x). Le cours magistral n°15 traite en particulier de la
linéarisation des expressions trigonométriques.

Proposition 6. Formules d’Euler Démonstration

Pour tout θ ∈ R, on a les égalités suivantes


eiθ + e−iθ
• cos(θ ) = ,
2
iθ −iθ
e −e
• sin(θ ) = .
2i

2.3. Produit d’exponentielles complexes


L’écriture de la fonction θ 7→ cos θ + i sin θ sous une forme exponentielle vient du fait qu’elle vérifie des identités
analogues à celles satisfaites par la fonction exponentielle.

Proposition 7. Rappel - À savoir par cœur - ♥♥♥

Pour tout a, b ∈ R, on a les égalités


• cos(a + b) = cos(a) cos( b) − sin(a) sin( b),
• cos(a − b) = cos(a) cos( b) + sin(a) sin( b),
• sin(a + b) = sin(a) cos( b) + sin( b) cos(a),
• sin(a − b) = sin(a) cos( b) − sin( b) cos(a).

D

Démonstration
•C
b Prouvons la deuxième égalité, les autres
a B s’en déduiront : on a DC = BE donc....

O a−b

•E

Proposition 8. Démonstration

L’exponentielle complexe vérifie la propriété suivante


0 0
∀θ , θ 0 ∈ R, eiθ × eiθ = ei(θ+θ ) .
On déduit de la proposition que pour tout θ réel, eiθ × e−iθ = ei(θ−θ) = 1. La proposition suivante donne ainsi l’inverse
de eiθ .
8

Proposition 9. Inverse d’un complexe de module 1


¡ ¢−1
Soit θ ∈ R. On a eiθ = e−iθ .

2.4. Formule de Moivre


Nous utilisons dans cette section les propriétés vues sur l’exponentielle complexe pour démontrer la formule de
Moivre. Nous verrons une interprétation géométrique de cette formule dans le cours suivant.

Démonstration
Proposition 10. Formule de Moivre
³ ´n Utiliser la formule du produit d’exponen-
Soient n ∈ N∗ et θ ∈ R. On a einθ = eiθ . tielle avec θ 0 = θ et une récurrence.
Autrement dit : cos( nθ ) + i sin( nθ ) = (cos(θ ) + i sin(θ ))n .

On en déduit :
• cos( nθ ) = R e((cos(θ ) + i sin(θ ))n ),
• sin( nθ ) = I m((cos(θ ) + i sin(θ ))n ).
Nous développerons dans le cours magistral n°15 des applications de la formule de Moivre, en plus de celles de la
formule d’Euler.
Exercice 7

À l’aide des formules d’Euler et de Moivre, ou des formules d’addition des cosinus et sinus, démontrer les
formules suivantes de trigonométrie classique, que vous devez connaître par cœur.

Proposition 11
Pour tout a, b ∈ R, on a
• cos(2a) = cos2 (a) − sin2 (a) = 2 cos2 (a) − 1 = 1 − 2 sin2 (a),
• sin(2a) = 2 sin(a) cos(a),
• 2 cos(a) cos( b) = cos(a − b) + cos(a + b),
• 2 sin(a) sin( b) = cos(a − b) − cos(a + b),
• 2 sin(a) cos( b) = sin(a − b) + sin(a + b)).

2.5. Argument
z
Si z 6= 0 alors ∈ U donc est de la forme eiθ , θ ∈ R. Le
| z| iR
nombre réel θ est appelé un argument de z. Il existe un [ z]
unique θ ∈ [0, 2π[ qui réalise cette égalité. C’est l’argu-
ment principal de z, que l’on note Arg(z). | z| p
b | z| = a2 + b 2
i
θ
O 1 a R

z
Ainsi = eiθ et z = | z| eiθ est la forme exponentielle du
| z|
nombre complexe z.
9

Proposition 12. Unicité de l’écriture (modulo 2π)

Soit z un complexe non nul. Il existe un unique r > 0 et un unique θ ∈ [0, 2π[ tels que z = r eiθ . Le réel r est
le module de z et θ est son argument.
Soient r, r 0 > 0 deux réels strictement positifs et α, β ∈ R. Si r eiα = r 0 eiβ , alors r = r 0 et α = β + 2 kπ, pour un
certain entier k ∈ Z.

Démonstration

Conséquences :

Proposition 13

Si z, z0 6= 0, on a
• Arg(µzz¶0 ) = Arg( z) + Arg( z0 ) + 2 kπ, pour un certain entier k ∈ Z,
1
• Arg = −Arg( z) + 2 kπ, pour un certain entier k ∈ Z,
³ zz ´
• Arg 0 = Arg( z) − Arg( z0 ) + 2 kπ, pour un certain entier k ∈ Z.
z

Nous pouvons donner la généralisation suivante de la formule de Moivre :

Proposition 14

Soient r > 0, θ ∈ [0, 2π[, n ∈ N. On a ³ ´n


re iθ = r n e inθ

Remarque 2

L’égalité a = b + 2 kπ, pour un certain entier k ∈ Z s’écrit aussi a = b [2π]. On dit que a est congru à b modulo
2π.

Exercice 8

− eiθ
Déterminez le module et l’argument des complexes −2i, 1 + i, (1 + i)51 , − eiθ , .
1+i

2.6. Exponentielle complexe


On peut prolonger l’exponentielle réelle à l’ensemble des nombres complexes, en définissant, pour z = a + i b,

exp( z) := ea eib

(rappelons que a, b sont réels et e a désigne l’exponentielle réelle). Ce qui a été vu précédemment nous assure que
cette exponentielle complexe vérifie, pour tout z, z0 ∈ C, l’égalité :

exp( z) exp( z0 ) = exp( z + z0 ).

On écrit aussi e z à la place de exp( z).


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Cours Magistral n°12

Pré-requis : Objectifs :
• maîtriser la forme algébrique • savoir reconnaître ou définir une translation
• maîtriser la forme exponentielle • savoir reconnaître ou définir une rotation
• connaître les propriétés de l’argument

3. Transformations du plan
Une application bijective du plan dans lui-même est appelée transformation. L’objet de ce qui suit n’est pas
d’identifier toutes les transformations du plan mais seulement d’en étudier deux types : les translations et les
rotations. Nous présentons leur description dans le plan en terme de vecteurs et d’angle. Puis nous explicitons
leur description équivalente dans le plan complexe en terme de somme, de produit, d’exponentielle complexe et
d’argument. Avant de s’attaquer aux transformations, nous étudions les notions de cercle et d’angle dans les deux
mondes.

3.1. Vocabulaire équivalent dans le plan et dans le plan complexe


Nous définissons les notions de cercle et d’angle avec un vocabulaire géométrique puis nous décrivons les notions
qui y correspondent dans le vocabulaire algébrique des nombres complexes.

Définition 1

Dans un plan P , le cercle C (Ω, r ) de centre Ω et de rayon r > 0 est l’ensemble des points M de P à distance
r de Ω, c’est-à-dire
−−→
C (Ω, r ) := { M ∈ P tel que ||Ω M || = r }.

Exercice 9

Soit Ω le point de coordonnées (1, 0). Dessiner le cercle C (Ω, 1).

Nous souhaitons maintenant donner une définition équivalente dans le langage des nombres complexes.

Exercice 10
−−→ −−→
Donner les définitions de AB et de || AB|| en fonction des coordonnées de A et B ? Donner les définitions
équivalentes en utilisant les affixes z A et zB des points A et B.

Proposition 15.

Soit Ω un point d’affixe zΩ et r > 0. Un point M d’affixe z appartient au cercle C (Ω, r ) si et seulement si

| z − zΩ | = r.

Cette équation s’écrit aussi z z̄ − zΩ z − z̄zΩ + γ = 0, avec γ := | zΩ |2 − r 2 .

Démonstration

On s’intéresse maintenant à la notion d’angle orienté entre deux vecteurs ~ u et ~


v. On note D~u , respectivement D~v
les demi-droites passant par l’origine et dirigées par ~
u, respectivement ~
v.
11

D~v
Définition 2
~
v D~u
Soient ~u et ~
v deux vecteurs et D~u , D~v les demi-droites définies ci-dessus.
B ~
u
On note A et B les points d’intersection respectifs des demi-droites D~u •
et D~v avec le cercle trigonométrique (c’est-à-dire le cercle unité). L’angle •A
orienté (~u, ~
v) (en radians) est la longueur de l’arc de cercle délimité par A
O
et B parcouru dans le sens direct.

Exercice 11

Calculer l’angle orienté entre le vecteur ~ v d’affixe eiθ .


u d’affixe 1 et le vecteur ~

La notion d’angle se décrit simplement dans le vocabulaire des nombres complexes.

Proposition 16

Soit O l’origine d’un plan et A et B deux points du plan, distincts de O . On note z A et zB les affixes respectives
−−→ −−→ zB
des points A et B. L’angle orienté (O A, OB) est donné par l’argument du nombre complexe .
zA
Plus généralement soient A, B, C et D quatre points du plan d’affixes respectives z A zB zC et Z D .

− −−→ z D − zC
Si z A 6= zB et zC 6= zD , l’angle orienté ( ( AB), CD ) est l’argument du nombre complexe .
zB − z A

Remarque 3

Les angles qui apparaissent dans ce cours sont toujours orientés. Nous nous contentons donc de parler d’angle
dans la suite.

3.2. Translation
La translation est une transformation du plan qui correspond intuitivement au glissement d’un objet, sans rotation,
retournement ou déformation de l’objet.

Définition 3 iR

La translation de vecteur ~ u est l’application du plan qui associe à tout M


−−−→
point M du plan le point M 0 tel que MM 0 = ~u.
i
M0

Exercice 12 0 1 R

Construisez a , l’image du point A par la translation de vecteur ~


u sur la A
figure ci-contre. ~
u
a. donc de façon très précise

Théorème 1

Soit a ∈ C. L’application du plan complexe qui à tout nombre complexe z associe le nombre complexe d’affixe
z + a est la translation de vecteur ~
u d’affixe a. Elle s’écrit donc :

t : C → C
z 7→ z+a

Réciproquement, toute translation du plan de vecteur ~


u d’affixe a peut s’écrire z 7→ z + a.
12

Démonstration

3.3. Rotation
La rotation est une transformation du plan qui correspond intuitivement au mouvement circulaire d’un objet
autour d’un point. Nous présentons dans cette section les rotations d’un point de vue géométrique puis d’un point
de vue algébrique (à l’aide des nombres complexes).

Définition 4

La rotation de centre³ Ω et d’angle


´ α est l’application du plan qui associe à tout point M du plan le point M
0
−−→ −
− −

tel que Ω M = Ω M 0 et Ω M ; Ω M 0 = α.

Exercice 13. Complexes et transformations du plan

1. Étude d’un cas particulier :


On définit r comme l’application du plan qui à tout point M d’affixe z associe le point M 0 d’affixe
π
z0 = ei 4 ( z − 3) + 3.
(a) Placez les points A (3 i ), B(3) et C (3 + 3i).
(b) Placez les points A 0 = r ( A ), B0 = r (B) et C 0 = r (C ) après avoir calculé leurs affixes.
(c) Que semble faire la transformation r ?
2. Étude du cas général :
On définit à présent r comme la transformation du plan qui à tout point M d’affixe z associe le point
M 0 d’affixe z0 = eiθ ( z − ω) + ω.
(a) Démontrez que M et M 0 sont sur un cercle de centre Ω(ω).
³−−→ −−−→´
(b) Calculez Ω M ; Ω M 0
(c) Que peut-on conclure ?
3. Applications
(a) Démontrez que la transformation qui à tout point M ( z) du plan associe le point M 0 d’affixe
z0 = i z − 2 − 4i est une rotation dont on précisera le centre et l’angle.
(b) De façon générale, démontrez que toute transformation du plan de la forme z 7→ az + b avec |a| = 1
et a 6= 1 est une rotation dont on précisera l’angle et le centre.

On vient donc de démontrer le théorème suivant :

Théorème 2. Écriture complexe d’une rotation

• L’écriture complexe d’une rotation de centre Ω d’affixe ω et d’angle θ radians est z 7→ e iθ ( z − ω) + ω.


• Réciproquement, toute transformation s’écrivant z 7→ az + b avec |a| = 1 et a 6= 1 est une rotation dont
le centre Ω(ω) vérifie ω = aω + b et l’angle est l’argument de a.

Remarque 4

La formule de Moivre s’interprête géométriquement de la façon suivante : faire une rotation d’angle nθ (et
de centre O ) est la même chose que faire n rotations d’angle θ (et de centre O ).
13

Cours Magistral n°13

Pré-requis : Objectifs :
• maîtriser la forme algébrique • calculer les racines d’un nombre complexe
• maîtriser la forme exponentielle • résoudre une équation de degré 2 à coefficients com-
• savoir résoudre un système linéaire de deux équa- plexes
tions à deux inconnues

4. Racines carrées d’un nombre complexe


Nous nous intéressons maintenant à une caractéristique fondamentale des nombres complexes. Ils possèdent
toujours deux racines carrées (sauf le nombre complexe 0 qui ne possède que 0 comme racine mais on dit parfois
que c’est une racine double). Grâce à cette propriété, nous pouvons résoudre toutes les équations du second degré
à coefficients complexes.

4.1. Racines carrées


Les racines carrées d’un nombre réel x sont les nombres réels y tels que y2 = x. Il n’en existe que si x Ê 0. Si x = 0,
p
alors il n’y en a qu’une, c’est y = 0. Si x > 0, il y a deux racines 2 , l’une positive, qu’on note x, et l’autre qui est son
p
opposée − x.
p
Lorsque x < 0, alors il n’y a pas de racine réelle, mais il y en a deux complexes. Ces deux racines sont ±i − x. Dans
ce cas, comme il n’y a pas d’ordre « naturel » sur les nombres complexes, on ne peut pas distinguer ces deux racines.
En fait, cette remarque est vraie pour tous les nombres complexes.

Définition 5

On appelle racine carrée d’un nombre complexe z tout nombre complexe δ tel que δ2 = z.
De la même manière, pour tout entier naturel n, on appellera racine nième d’un nombre complexe z tout
nombre complexe δ tel que δn = z (nous étudierons plus en profondeur les racines nième dans le cours
suivant).

Démonstration
Théorème 3

Pour tout nombre complexe z 6= 0, il existe exactement deux racines carrées


distinctes de z. Elles sont opposées l’une de l’autre : si δ est une racine
carrée de z, alors −δ en est aussi une.

Remarque 5

Bien sûr, lorsque z = 0, il n’y a qu’une seule racine carrée qui est 0 lui-même.

Attention : contrairement au cas réel, la fonction racine carrée n’est pas définie sur les nombres complexes. En
effet, contrairement au cas réel positif, on ne peut pas privilégier une des deux racines en général. Souvenez-vous
p
bien que la notation x n’a donc un sens que pour x ∈ R+ .

Exemple 2
p
Regardons comment calculer les racines de z = 3 − 3 3i. Nous pouvons utiliser une des deux méthodes
suivantes.
p
Méthode 1 : Il faut écrire z sous forme exponentielle. Le module de z est | z| = 9 + 27 = 6. Ainsi, | zz| =
p π π
1
2 − 23 i = e−i 3 , et par conséquent z s’écrit z = 6 e−i 3 . Une fois que z est écrit sous forme exponentielle les
p π p π
racines se trouvent facilement : 6 e−i 6 et − 6 e−i 6 (remarquons que la deuxième n’est pas mise sous forme
exponentielle).
p
Méthode 2 : Nous cherchons δ = a + i b tel que δ2 = 3 − 3 3i. Nous avons δ2 = a2 − b2 + 2iab. Nous devons
2. On se permettra l’abus de langage consistant à utiliser simplement le terme racine pour désigner une racine carrée.
14

résoudre le système :  p
| δ| 2 = |3 − 3 3i|
p p


2
δ = 3 − 3 3i ⇔ Re(δ2 ) = Re(3 − 3 3i)
p
Im(δ2 )

= Im(3 − 3 3i).

p p
Calculons |3 − 3 3i| = 9 + 27 = 6, d’où :

± p3

a =
 
2 2 2
 a +b = 6 (1)  2a = 9 (1) + (2) q2
  


2 2
a −b = 3 (2) ⇔ 2 b2 = 3 (1) – (2) ⇔ b = ± 32
 p  p  p
2ab = −3 3 2ab = −3 3 −323.
  
ab =

Le produit ab est négatif donc a et b doivent être de signe contraire. Ainsi on obtient :

p3 − p3
( (
p a = a =
2 2 q 2
δ = 3 − 3 3i ⇔ q
3
ou 3
b = − 2 b = 2.

Exercice 14
p
Calculez les racines carrées de z1 = 1 − i, de z2 = 3 + 2i, de z3 = 5 3 + 5i et de z4 = 1 − 7i.

4.2. Equations du second degré


La résolution d’une équation du second degré est la recherche des solutions z ∈ C de l’équation

az2 + bz + c = 0,

où a, b, c sont des nombres complexes (et bien sûr le cas des paramètres réels n’en est qu’un cas particulier). Les
solutions s’expriment exactement comme dans le cas réel. Nous supposerons toujours que a 6= 0, car sinon nous
avons affaire à une simple équation du premier degré.

Proposition 17.

déf
Appelons ∆ = b2 − 4ac le discriminant de l’équation, et δ et −δ les deux racines carrées de ∆.
Alors,
b
1. Si ∆ = 0, il n’y a qu’une seule solution z0 = − . On dira alors (pour une raison qui sera expliquée dans
2a
le chapitre « polynômes ») qu’il s’agit d’une racine double.
2. Si ∆ 6= 0, il y a deux racines distinctes qui sont

−b + δ −b − δ
z1 = , z2 = .
2a 2a

On voit donc que l’expression est exactement la même que pour les équations à coefficients réels.

Exemple 3

Voyons comment résoudre l’équation du second degré : z2 + (1 + 2i) z + 3 + 3i = 0.


Le discriminant de cette équation est ∆ = (1 + 2i)2 − 4(3 + 3i) = −15 − 8i. On cherche donc une racine de ∆. On
a vu en 4.1 comment calculer une racine carrée d’un nombre complexe. On résout donc

2 2
 x +y
 = | − 15 − 8i|
2 2 2 2
z = −15 − 8i ⇔ ( x + i y) = −15 − 8 i ⇔ x −y = −15

2 x y = −8

15

p
Ainsi on calcule | − 15 − 8i| = 152 + 82 = 17 d’où :
 
2 2 2
 x +y = 17  x = 1
  ( (
2 2 2 x = 1 x = −1
x −y = −15 ⇔ y = 16 ⇔ ou
  y = −4 y = 4
2 x y = −8 2x y = −8
 

Ainsi δ = 1 − 4i est une racine de ∆.

Les solutions de l’équation z2 + (1 + 2i) z + 3 + 3i = 0 sont donc

−(1 + 2 i ) − δ −(1 + 2 i ) + δ
z1 = et z2 = soit z1 = −1 + i et z2 = −3i.
2 2

Exercice 15

Déterminez les racines a des polynômes suivants

P 1 ( X ) = X 2 − X + 1 − i, P2 ( X ) = 4 X 2 − 4 X + 9 − 6i, P3 ( X ) = X 2 + (i − 1) X − i.
a. Une racine d’un polynôme P est une valeur z pour laquelle P ( z) = 0.
16

Cours Magistral n°14

Pré-requis : Objectifs :
• savoir déterminer et utiliser l’écriture trigonomé- • savoir calculer les racines n-ièmes d’un nombre com-
trique des complexes plexe
• connaître la formule de Moivre • savoir représenter les racines n-ièmes d’un nombre
• savoir calculer les racines carrées d’un nombre com- dans le plan complexe
plexe • savoir utiliser le calcul des racines n-ièmes d’un
nombre complexe pour la factorisation de certains
polynômes ou pour des applications géométriques

5. Racines n-ièmes d’un nombre complexe


Les racines n-ièmes d’unité (le nombre 1) ou d’un nombre complexe quelconque sont une généralisation des racines
carrées. Elles sont utilisées en particulier pour étudier les polygones réguliers ou certains polynômes comme nous
le verrons dans ce cours mais elles servent aussi en arithmétique ou en théorie des groupes.

5.1. Rappels
Nous rappelons ici deux résultats élémentaires, mais très utiles pour la suite.

Proposition 18

L’égalité
0
ρ e iθ = ρ 0 e iθ , avec ρ , ρ 0 ∈ R∗+ et θ , θ 0 ∈ R,

est équivalente à
ρ = ρ0 et θ = θ 0 + 2 kπ avec k ∈ Z.

Question. L’égalité e ikπ = −1 est-elle vraie pour certaines valeurs de k ?

Proposition 19

Pour tous n ∈ N∗ , ρ ∈ R∗+ et θ ∈ R, nous avons


³ ´n
ρ e i θ = ρ n e i nθ .

5.2. Racines n-ièmes d’un nombre complexe non nul


Nous définissons les racines n-ièmes de la même façon que les racines carrées. À nouveau, comme pour les racines
p
carrées, il n’est pas possible pour un nombre complexe donné de privilégier l’une de ses racines. La notation n x
n’a donc un sens que lorsque x ∈ R+ .

Définition 6

Soit z0 un nombre complexe non nul et soit n ∈ N∗ , n > 1. On appelle racines n-ièmes de z0 tout nombre
complexe z tel que
z n = z0 .

On appelle racines n-ièmes de l’unité les racines n-ièmes de z0 = 1.


17

Exemple 4

Montrer que l’ensemble


{ i k | k ∈ N∗ }

est de la forme {a 1 , a 2 , a 3 , a 4 }. Calculer a41 , a42 , a43 , a44 . En déduire des racines 4-ièmes de l’unité.

Recherche des racines n-ièmes de l’unité. Les racines n-ièmes de l’unité sont les nombres z = ρ e iθ , avec
ρ ∈ R∗+ et θ ∈ R, vérifiant
z n = ρ n e i nθ = 1.

D’après la proposition 18, cette égalité est équivalente à

ρn = 1 et n θ = 2 kπ avec k ∈ Z.

L’ensemble Un des racines n-ièmes de l’unité est donc


n 2 kπ o
Un = e i n | k ∈ Z .

Remarquons que si k = k0 + n`, avec k, k0 , ` ∈ Z, alors


2 kπ 2( k0 + n`)π 2 k0 π 2 k0 π
ei n = ei n = ei n e i 2`π = e i n .

On en déduit le résultat suivant.

Proposition 20

L’ensemble Un des racines n-ièmes de l’unité est


n 2 kπ o
Un = e i n | k ∈ {0, 1, · · · , n − 1} .

Exemple 5

Représenter dans le plan complexe


1. Les racines cubiques de l’unité.
2. Les racines 4-ièmes de l’unité.
3. Les racines 5-ièmes de l’unité.
4. Les racines 8-ièmes de l’unité.

Recherche des racines n-ièmes d’un nombre complexe non nul. Soit z0 = ρ 0 e iθ0 , avec ρ 0 > 0 et θ0 ∈ R. Les
racines n-ièmes de z0 sont les nombres z = ρ e iθ vérifiant

z n = ρ n e i n θ = ρ 0 e i θ0 .

D’après la proposition 18, cette égalité est équivalente à

ρ n = ρ0 et n θ = θ0 + 2 k π avec k ∈ Z.

On en déduit le résultat suivant.

Proposition 21

L’ensemble R n ( z0 ) des racines n-ièmes de z0 est


n 1 θ0 +2kπ o
R n ( z0 ) = ρ 0n e i n | k ∈ {0, 1, · · · , n − 1} .
18

Exemple 6

Représenter dans le plan complexe


1. Les racines cubiques de 27.
2. Les racines 4-ièmes de −81.
3. Les racines 4-ièmes de −25 i .
4. Les racines cubiques de −2 + 2 i .

5.3. Application à la résolution d’équations polynômiales


Les racines n-ièmes de l’unité sont les racines du polynôme P ( X ) = X n − 1. Elles sont donc naturellement liées à
certaines équations polynomiales.

Exercice 16

Résoudre l’équation polynômiale z8 + z4 + 1 = 0, d’inconnue z ∈ C, consiste à déterminer tous


les nombres complexes ζ tel que ζ8 + ζ4 + 1 = 0. On peut résoudre cette équation en résolvant
le système d’inconnues z, v ∈ C suivant
(
z4 = v,
v2 + v + 1 = 0.

Il est facile de déterminer tout d’abord les solutions de l’équation v2 + v + 1 = 0, puis d’en
déduire ensuite les solutions de l’équation z4 = v.
Résoudre ce système.

Exercice 17

Vérifier que
( z − 1)( z n + z n−1 + · · · + z + 1) = z n+1 − 1.

En déduire les solutions z ∈ C de l’équation

z n + z n−1 + · · · + z + 1 = 0.

5.4. Application à la factorisation de certains polynômes


Si P ( z) = z3 + z2 + z + 1, on appelle racine du polynôme P tout nombre complexe ζ tel que P (ζ) = 0. Nous verrons
(dans le chapitre sur les polynômes) que si P (ζ1 ) = 0, P (ζ2 ) = 0, et P (ζ3 ) = 0, et si ζ1 , ζ2 et ζ3 sont tous distincts
alors
P ( z) = ( z − ζ1 )( z − ζ2 )( z − ζ3 ).

Vérifier que i est racine de P . En déduire que − i est aussi racine de P . Vérifier que −1 est aussi racine de P . En
déduire une factorisation de P .

Exercice 18

Factoriser les polynômes suivants :


1. P1 ( z) = z3 − 1.
2. P2 ( z) = z6 − 1.
3. P3 ( z) = z6 + 1.
4. P4 ( z) = z4 + z2 + 1.

5.5. Applications géométriques


Pour finir, nous donnons quelques résultats géométriques reliés aux racines n-ièmes de l’unité.
19

Exercice 19

Soient A d’affixe a, B d’affixe b, et C d’affixe c, trois points distincts du plan complexe.


Montrer que le triangle ABC est équilatéral si et seulement si (a + jb + j 2 c)(a + jc +

j 2 b) = 0, où j = ei 3 . Trouver d’autres caractérisations équivalentes à « le triangle
( A, B, C ) est équilatéral ».

Exercice 20

Soient A d’affixe a, B d’affixe b, C d’affixe c, et D d’affixe d , quatre points distincts du


plan complexe. À quelle condition le quadrilatère ABCD est-il un carré ?
20

Cours Magistral n°15

Pré-requis : Objectifs :
• maîtriser la forme algébrique • savoir utiliser la formule du binôme
• maîtriser la forme exponentielle • exprimer cos( nx) ou sin( nx) à l’aide de polynômes
• connaître les formules de Moivre et d’Euler trigonométriques
• linéariser un polynôme trigonométrique

6. Formules d’angle multiple et linéarisation


Ce dernier cours du chapitre sur les nombres complexes se concentre sur deux applications des nombres complexes
à la trigonométrie.
D’une part, vous connaissez les valeurs de cos x et sin x pour certains x comme π3 , π2 , π6 . . . Les formules d’angle
multiple obtenues à l’aide des formules du binôme et de Moivre vous permettront d’en déduire la valeur de cos( nx)
et sin( nx) pour ces x et n’importe quel n ∈ N.
D’autre part, s’il est par exemple difficile de donner une primitive de x 7→ cos3 ( x), il est beaucoup plus facile de
1 3
déterminer une primitive de x 7→ cos(3 x) + cos( x). L’objectif de la troisième partie de ce cours est de savoir
4 4
réécrire aisément des expressions faisant apparaître des produits ou puissances de cos( x) et sin( x) à l’aide de
cos( nx) et sin( nx).

6.1. Préliminaire technique : la formule du binôme


Pour appliquer la formule de Moivre, on aura souvent besoin de la formule du binôme (valable pour n ∈ N) :
à !
n n
n
a k b n− k .
X
(a + b) =
k=0 k

Avec la loi binomiale, il a été vu au lycée les coefficients binomiaux. Ces coefficients étaient obtenus au lycée à
l’aide de la calculatrice. Voici leur formule :
Définition 7
¡ n¢
Soient n et k deux entiers naturels. Le nombre k , qui se lit “ k parmi n”, est défini par
à !
n déf n! n( n − 1) · · · ( n − k + 1)
= = ,
k k!( n − k)! k!

où les factorielles sont elles-mêmes définies par :

déf
n! = 1 × 2 × · · · × n, avec la convention 0! = 1.

Par exemple, 1! = 1, 2! = 2, 3! = 6, 4! = 24, etc. On a toujours


à ! à !
n n
= = 1,
0 n
à ! à !
n n
= = n si n Ê 1,
1 n−1
à ! à !
n n n( n − 1)
= = si n Ê 2,
2 n−2 2
etc.

La formule du binôme se prouve par récurrence sur n en utilisant les relations de Pascal :
à ! à ! à !
n+1 n n
= + .
k+1 k k+1
21

Cette formule permet aussi de calculer effectivement les coefficients du binôme grâce au triangle de Pascal

1 1
1 2 1
1 3 3 1
1 4 6 4 1
1 5 10 10 5 1
1 6 15 20 15 6 1
1 7 21 35 35 21 7 1

On trouve dans la n-ième ligne les coefficients du développement du binôme pour l’exposant n. On passe d’une
ligne à la suivante en sommant les nombres de la ligne précédente sur la même colonne et la colonne précédente.
Ainsi, en lisant ce tableau pour la deuxième ligne, on trouve

(a + b)2 = a2 + 2ab + b2 ,

et pour la troisième ligne, on trouve


(a + b)3 = a3 + 3a2 b + 3ab2 + b3 .

Exercice 21

En utilisant la formule du binôme, développez (a + b)8 .

6.2. Formule d’angle multiple : expression explicite pour cos(nx) et sin(nx)


On rappelle la formule de Moivre :
(cos x + i sin x)n = cos( nx) + i sin( nx).

De cette formule, nous écrivons que cos( nx) et sin( nx) sont respectivement la partie réelle et la partie imaginaire
de (cos x + i sin x)n . Nous développons ensuite (cos x + i sin x)n avec la formule du binôme et nous trouvons ainsi une
formule explicite pour cos( nx) et sin( nx) en fonction de cos x et sin x. Si nous connaissons les valeurs de cos x et de
sin x, nous pouvons donc en déduire les valeurs de cos( nx) et sin( nx) pour tout n ∈ N.

Exemple 7

Regardons ce que ça donne par exemple pour cos(5 x) :

cos(5 x) = Re( e5 ix )
= Re((cos( x) + i sin( x))5 )
= Re cos5 ( x) + 5i cos4 ( x) sin( x) − 10 cos3 ( x) sin2 ( x) − 10i cos2 ( x) sin3 ( x) + 5 cos( x) sin4 ( x) + i sin5 ( x)
¡ ¢

= Re cos5 ( x) − 10 cos3 ( x) sin2 ( x) + 5 cos( x) sin4 ( x) + i 5 cos4 ( x) sin( x) − 10 cos2 ( x) sin3 ( x) + sin5 ( x)
¡ ¡ ¢¢

= cos5 ( x) − 10 cos3 ( x) sin2 ( x) + 5 cos( x) sin4 ( x).

Remarque 6

Pour ceux qui ont une excellente mémoire, il existe une formule générale qu’on ne vous encourage pas à
essayer de retenir :
à !
n/2c
bX
n
cos( nx) = (−1)` (cos x)n−2` (sin x)2` ,
`=0 2 `
à !
b( n−1)/2c
n
(−1)` (cos x)n−2`−1 (sin x)2`+1 .
X
sin( nx) =
`=0 2 ` + 1

On a noté bac la partie entière de a. Si l’on remplace partout sin2 x par 1 − cos2 x, on constate que cos( nx)
s’exprime comme un polynôme en cos x seul, et que sin( nx) s’exprime comme le produit de sin x par un
polynôme en cos x seul. Il existe des formules très générales, mais il est aussi simple de savoir les retrouver
au coup par coup.
22

Exercice 22

1. Donnez explicitement cos(3 x) et sin(3 x) en fonction de cos x et sin x, leur produit ou leur puissance.
2. Donnez explicitement cos(4 x) et sin(4 x) en fonction de cos x et sin x, leur produit ou leur puissance.

6.3. Linéarisation d’une expression trigonométrique


Nous atteignons maintenant le deuxième objectif de ce cours. Des formules d’Euler,

ei x + e−i x ei x − e−i x
cos x = et sin x = ,
2 2i
on déduit que les puissances de cosinus et de sinus et leurs produits peuvent s’exprimer comme des combinaisons
linéaires d’exponentielles.

Exemple 8

Commençons par quelques exemples simples


¶2
ei x + e−i x 1 2i x 1 1
µ
cos2 ( x) = = ( e + 2 ei0 + e−2i x ) = (2 cos(2 x) + 2) = (cos(2 x) + 1),
2 4 4 2
¶2
ei x − e−i x 1 1
µ
2
sin ( x) = = − ( e2i x − 2 ei0 + e−2i x ) = − (cos(2 x) − 1).
2i 4 2

Remarque 7

Voici un exemple de formule générale :


¶n à ! à !
ei x + e−i x n n ³ n n
µ ´k ³ ´ n− k
n −n ix −i x −n
ei(2k−n) x .
X X
cos x = =2 e e =2
2 k=0 k k=0 k

Comme on sait d’avance que le résultat est réel, on peut remplacer chaque terme du membre de droite par sa
partie réelle : Ã ! Ã !
n n ³ ´ n n
n −n i(2 k− n) x −n
X X
cos x = 2 Re e =2 cos ((2 k − n) x) .
k=0 k k=0 k

Exercice 23

1. Écrivez de la même façon cos3 ( x) en fonction de cos( x), sin( x), cos(2 x), sin(2 x), cos(3 x), sin(3 x). C’est ce
que l’on appelle linéariser.
2. Linéarisez cos3 ( x) sin2 ( x) puis cos2 ( x) sin3 ( x). Que remarquez-vous ?
3. Calculez une primitive de cos3 ( x) sin2 ( x).

Exercice 24

• Déterminez une primitive de (cos( x) sin( x))2 .


• Déterminez une primitive de cos4 ( x).
Bibliographie
[AAA07] Elie Azoulet, Jean Avignant, and Guy Auliac. Les mathématiques en licence. EdiScience, 2007. Tome 1.
[AB13] Pierre Abbrugiati and Nicolas Basbois. Algèbre. De boeck, 2013.
[LTT16] Véronique Lods, Emmanuelle Tosel, and Nicolas Tosel. Mathématiques Du lycée au Supérieur. Epistemon
Rue des Ecoles, 2016.
[ML13] Jean-Pierre Marco and Laurent Lazarini. Mathématiques L1. Pearson, 2013.
[RW13] Jean-Pierre Ramis and André Warusfel. Mathématiques, Tout-en-un pour la licence. Dunod, 2013.
Niveau 1.

23

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