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Anima Eterna
Jos van Immerseel, cond.
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Genèse du projet
Brahms fut un grand admirateur de Strauss. Il y a peu de temps encore, j’avais du mal à comprendre cela
car, comme de nombreux musiciens, je trouvais la musique de Strauss un peu trop facile. Ce n’était pas
encore le cas lorsque, à l’âge de dix ans, je déchiffrais les valses au piano sous l’œil attentif de mon premier
professeur particulier. J’aimais cette musique mais le plaisir fut de courte durée. À l’école de musique où
je fus ensuite élève, il était en effet interdit de jouer Strauss (et de prendre plaisir à quelque chose) ; Bach
et Czerny prirent place sur le pupitre. Le préjugé de l’indignité de la musique de Strauss les côtoya et je
pus difficilement apprécier cette dernière même dans ses versions orchestrales. Cette sempiternelle petite
mélodie, ces constants rubati, ce mélodrame, je n’accrochais pas.
Le Dr. Ulrich Etscheit des éditions Alkor et Bärenreiter modifia le tableau. Ulrich avait déjà rendu service
à Anima Eterna en lui procurant des sources musicales fiables (Schubert et Beethoven) et suivait de près
l’évolution de l’orchestre. En 1997, il me présenta une nouvelle édition critique du Dr. Michael Rot : l’Édi-
tion Strauss (Vienne), distribuée par les éditions Bärenreiter (Kassel). Il semblait évident à Ulrich qu’Ani-
ma Eterna devait tenter de se lancer dans un projet Strauss.
Je restais sceptique. Mais il m’envoya des piles de partitions et à chacune d’elles mon intérêt alla croissant.
Je découvrais peu à peu de la bonne musique, de la grande musique, des orchestrations géniales… Assez
vite, ma résistance céda ; j’étais convaincu. Restait alors à présenter le projet à l’orchestre. Là régnait le même
scepticisme, mais il céda rapidement à l’ardeur lorsqu’on commença à jouer la musique. L’enthousiasme
grandissait à chaque exécution. Après la première série de concerts, les musiciens reconnurent que cette
musique de Strauss était pour eux une découverte. Curieux, ils aspiraient à une poursuite du projet…
Mais avant de parler de concerts, le travail préparatoire doit être fait. Et avant tout, il fallait choisir un pro-
gramme. J’ai lu des centaines de partitions. Mon problème était celui de l’abondance : il me fallait choisir
le programme d’un disque compact parmi tant de si belles pièces… Ce programme réunit finalement des
pièces connues, des trouvailles, diverses formes et genres, tout en donnant un aperçu chrono-
logique de l’œuvre du compositeur (de 1858 à 1893). Il correspond au caractère bien particulier
d’Anima Eterna, laissant ici et là libre cours à des préférences personnelles…
L’Édition Strauss de Michael Rot
Plus de 600 compositions de Johann Strauss fils furent conservées jusqu’à nos jours. La plupart d’entre
elles devinrent populaires dès leur première exécution publique et furent jouées dans le monde entier. La
rapidité avec laquelle le génie Johann Strauss créait (secondé de plus en cela par l’« entreprise Strauss »)
était telle que les éditeurs ne purent le suivre. Souvent, ses œuvres ne furent éditées que sous forme de
« réductions pour piano » destinées à un usage personnel, et devaient donc être réorchestrées par chaque
ensemble. Des milliers d’arrangements virent ainsi le jour. Au vingtième siècle, on commença à faire de
sérieuses recherches sur Strauss, mais nul n’avait une vision globale de l’œuvre du compositeur et les nou-
velles éditions se basèrent souvent sur des sources erronées ou incomplètes. La musique de Strauss com-
mença à en souffrir : sa dynamique, son phrasé et son articulation s’appauvrissaient. L’Édition Strauss,
sous la houlette de l’Orchestre Philharmonique de Vienne, commença une lourde tâche. Michael Rot diri-
geait les travaux d’édition, se basant sur plus de 3000 sources. Ce nombre augmenta de façon spectaculaire
lorsque l’on put avoir accès aux sources des pays de l’Est. Les premiers volumes de la nouvelle édition cri-
tique parurent en 1997. L’édition complète comprendra, une fois achevée, 70 volumes. Chaque partition
est accompagnée d’un long commentaire critique faisant l’inventaire des divergences, des interprétations
fautives et des problèmes posés par le texte musical. Une œuvre aussi souvent jouée que An der schönen
blauen Donau nécessita par exemple pas moins de seize pages de commentaires, ce qui donne une idée du
travail de titan effectué par les éditeurs.
Michael Rot écrivit en 1997 : « La nouvelle Édition Strauss peut ainsi servir de point de départ et de source
d’inspiration pour une nouvelle interprétation des œuvres de Strauss. Elle sera peut-être même à la base
d’une nouvelle interprétation de la musique de danse du dix-neuvième siècle. »
Anima Eterna n’en était pas à son premier essai (l’intégrale des concerti pour clavier de Mozart et
celle des symphonies de Schubert et de Beethoven avaient déjà été mises à l’épreuve dans l’« ate-
lier de restauration » de cette formation et l’on avait pu assister à leur renaissance), toutefois le pas
qui devait être fait pour accéder à la musique de Strauss paraissait assez important. Conformément à la
philosophie de l’orchestre, nous avons choisi d’exécuter cette musique sur des instruments historiques, au
besoin sur des instruments de la deuxième moitié du dix-neuvième siècle de facture viennoise.
Les membres de l’orchestre ont cherché, essayé, emprunté, investi et rassemblé un ensemble d’instruments
dont le caractère devint particulièrement intéressant et attrayant. Écoutez la sonorité pleine (et pourtant
transparente) des cors, la noblesse des trompettes et des trombones (puissants sans pour autant jamais
écraser les autres instruments), la douceur des flûtes et des clarinettes, les timbres pénétrants des hautbois
et des bassons, la fantaisie des percussions, la musicalité des timbales. Écoutez l’orchestre à cordes et le son
envoûtant de ses cordes en boyaux. Nous avons choisi sciemment de peu charger l’effectif de l’orchestre à
cordes afin de ne pas étouffer les vents et de pouvoir faire fonctionner les cordes comme des partenaires de
musique de chambre. Pendant la première répétition de ce programme, nous nous sommes rendu compte
qu’après avoir joué Mozart et Schubert, la musique de Strauss semblait finalement assez proche. Les me-
nuets, les Ländler, les finales de style polka nous avaient préparés à cet œuvre. Et comme dans le cadre
des projets précédents nous avions travaillé la précision rythmique, cet aspect de la musique de Strauss ne
nous a pas non plus posé de problème.
Nous avons interrogé la partition de façon rigoureuse. Nous avons en effet toujours essayé de voir ce que
donnait une lecture correcte du texte avant de lui apporter des modifications (manie de musiciens), sa-
chant qu’il était toujours possible de le modifier ensuite. Rapidement, nous avons compris que toute adap-
tation s’avérerait inutile. Les partitions de Strauss, comme celles de Mozart, Beethoven et Schubert, sont
de parfaits scénarios. Ces compositeurs avaient une grande pratique de l’orchestre et en connaissaient tous
les secrets. Notre respect grandissait sans cesse. Dans le cadre de nos recherches sur la relation authen-
tique entre ce type de pièces et la danse, nous avons invité Édith Lalonger et Patrick Nollio. Merci, David
Sinclair, c’était ton idée. Ils ont dansé sur nos interprétations et ont très précisément cerné les problèmes
posés par notre manière de jouer. Nous avons discuté de tempi, ce qui fut particulièrement édifiant (que
l’on se reporte à ce sujet à l’article d’Édith Lalonger et Patrick Nollio) !
La tradition : comment se situer vis-à-vis d’elle ?
Lorsqu’on aborde ce thème (l’interprétation de la musique de Strauss), une question vient rapidement à
l’esprit : que doit-on faire de la tradition (viennoise) ? Dans le langage parlé, on ose parfois considérer le
mot « tradition » comme le synonyme de « parvenu inchangé jusqu’à nos jours ». En réalité, la tradition a
plutôt comme dessein de transmettre (du latin tradere) un capital intellectuel, culturel ou autre de géné-
ration en génération. Sans que personne ne choisisse de nouvelles idées, tout en évitant de brusques rup-
tures, de petites modifications interviennent à tout moment qui échappent à la vigilance du traditiona-
liste. C’est ainsi que les instruments pour lesquels Strauss composa ses pièces disparurent complètement,
que les tempi suivirent leur propre cours, que certaines habitudes s’installèrent lentement mais sûrement.
Par exemple :
En 1929 : Clemens Krauss dirige l’Orchestre Philharmonique de Vienne. Au programme, les Morgenblätter
de Johann Strauss. L’ensemble est transparent et aérien, la basse propulse le tout. L’intonation de l’orchestre
à cordes est celle d’un ensemble de musique de chambre. Il joue presque sans vibrato. Le dix-neuvième
siècle est-il ici encore présent ? La mesure d’introduction est à peine plus lente que la valse elle-même, ce
qui donne une sensation d’accélération. Parfois, très peu souvent, le deuxième temps est légèrement ral-
longé pendant quelques mesures. Est-ce cela Strauss ? Est-ce cela Vienne ? Peut-être.
En 1980 : Lorin Maazel dirige les Morgenblätter à la tête du même Orchestre Philharmonique de Vienne.
Mais s’il s’agissait vraiment 51 ans plus tard du même orchestre, les plus jeunes musiciens auraient environ
75 ans et les plus âgés peut-être 115… La notion de temps reflète une autre époque. Le rallongement du
deuxième temps est devenu un principe ; la valse est lancée avec lenteur. Est-ce cela Strauss ? Est-ce cela
Vienne ? Peut-être.
En 1999 : Anima Eterna veut à présent « restaurer » Strauss. Anima Eterna joue donc les instruments qui
étaient chers à Strauss dans un style qui se situe entre Schubert et Brahms : le deuxième temps ne demande
plus d’attention car l’impulsion vient du premier temps. Est-ce cela Strauss ? Est-ce cela Vienne ? Peut-être.
Jusqu’au XIXème siècle, la musique et la danse étaient très liées : le musicien connaissait la danse tout comme
le danseur connaissait la musique. Au XXème siècle, période de spécialisation, ces deux arts ont pris peu à
peu leurs distances. Mais l’intérêt actuel pour la reconstitution des danses et l’interprétation des musiques
du XIXème siècle impose de retrouver le lien étroit qui les unissait.
En effet, l’analyse des informations recueillies dans les traités du XIXème siècle permet de comprendre les
particularités et les caractères de chacune des danses par rapport à la musique, tels que tempos, phrasés,
instrumentations… Elle fournit un outil supplémentaire aux musiciens. Aussi, à travers la pratique des
danses dans le mouvement et l’espace, les danseurs permettent aux musiciens de visualiser un style de
danse trop peu démontré aujourd’hui, et de leur faire réaliser l’importance de certains effets musicaux
nécessaires à la danse. Les sauts, les tours, les pas glissés ou marchés demandent de la part des musiciens
et des danseurs une énergie et une accentuation qui diffèrent selon les danses. Ces effets sont difficiles à
décrire par les mots. L’art d’interprétation, que ce soit pour la danse ou la musique, est un art qui se vit !
La rencontre avec les musiciens d’Anima Eterna, sous la direction de Jos van Immerseel, va dans ce sens.
Cet échange s’est réalisé dans l’ordre qui suit :
- histoire et description des danses ;
- démonstration de différents pas et éléments chorégraphiques concernant la valse, la polka, le galop, la
marche ;
- discussion sur les liens entre la musique et la danse et les rapports entre les musiciens et les danseurs.
La question des tempos s’avère la plus courante dans l’échange entre danseurs et musiciens. Dans la suite
de cet article se trouvent quelques indications recueillies dans divers traités du XIXème siècle.
Le rythme de la valse joué irrégulièrement (anticipation du deuxième temps) par les musiciens
autrichiens fait aussi l’objet de discussions : depuis quand jouait-on de cette façon ? Les danseurs
exécutaient-ils aussi un rythme irrégulier ?
Les traités du XIXème siècle ne font aucune allusion à une irrégularité des pas ou du rythme de l’interpréta-
tion musicale. Par contre, avec l’anticipation du deuxième temps, les danseurs peuvent effectivement sen-
tir un élan favorisant ainsi les tours (les danseurs commencent à tourner entre le premier et le deuxième
temps)…
L’évolution de la polka en galop, cette dernière étant pourtant une danse plus ancienne, a occupé une
grande place lors de notre échange.
La valse
(Danse sur une musique à trois temps dans laquelle le couple tourne sur lui-même.)
Son origine est-elle autrichienne ? Certains croient à une évolution de la volte française dont les premières
descriptions remontent au XVIème siècle, notamment dans l’Orchesographie de Thoinot Arbeau (1588). Il
est vrai que cette danse tourbillonne. Mais que dire des sauts qui l’accompagnent…
La valse est-elle alors plutôt issue des Deutsche Tänze ou des Ländler ? La régularité des pas de ces danses
et leurs nombreux mouvements des bras, bien présents dans A Description of the correct Method of Walt-
zing de Thomas Wilson (1816), le laisse croire. De plus, à l’origine, le mot français est souvent écrit Walse.
C’est de toute façon cette dernière forme qui a prédominé. Vienne l’adopte à la fin du XVIIIème siècle et la
propage dans toute l’Europe napoléonienne. La valse reçoit alors peu à peu le qualificatif « viennois » es-
sentiellement dû aux merveilleuses mélodies des musiciens de l’époque, originaires de cette ville ou de ses
alentours, et particulièrement des Johann Strauss, le père et le fils, qui lui ont donné ses lettres de noblesse.
La façon de valser évolue lentement au cours du XIXème siècle. L’Anglais Thomas Wilson décrit deux
formes de valse, la française et l’allemande, qui se résument principalement, en termes classiques,
en un détourné et un pas de bourrée. Les maîtres français Brunet (1832), Cellarius (1847)… remplacent le
pas de bourrée par un deuxième détourné : la valse pivotée est née, appelée alors valse à 3 temps (Métro-
nome Maelzel pour la blanche pointée : 66 selon Cellarius en 1847 et Klemm en 1876, 54 à 72 selon Engel-
hardt en 1926). Au même moment, les danseurs tournent sur une valse plus rapide (Métronome Maelzel
pour la blanche pointée : 88 selon Cellarius en 1847) avec des pas chassés ou sautés. Ils la nomment alors
valse à 2 temps (il faut comprendre valse à 2 pas). Elle nous vient de Russie d’après Gabriel Desrat qui re-
late, dans son dictionnaire de la danse, qu’en 1839 le baron de Nieuken, attaché à la délégation russe, la
montra à son père, maître de danse.
Une évolution parallèle en Amérique modifie le détourné initial par un pas de bourrée. Cette nouvelle
valse parvient en Europe sous le nom de « Boston américain », peut-être pour rappeler que Boston était
alors la capitale intellectuelle et artistique des États-Unis. Elle se danse sur un tempo plus lent.
Les figures de base sont le tour à droite et le tour à gauche, effectués sur le pourtour de la salle dans le sens
inverse des aiguilles d’une montre. Ainsi, le couple qui tourne peut être comparé à la terre qui tourne sur
elle-même ainsi qu’autour du soleil, symbole connu dès le XIIIème siècle.
La dame exécute les mêmes pas que le cavalier avec un décalage d’une mesure. Le premier temps de chaque
mesure est bien marqué et donne l’impulsion au danseur pour commencer le tour qui sera terminé à la fin
de la mesure. Ceci est vrai jusqu’aux dernières mesures de l’œuvre musicale. Le tempo est régulier tout au
long de la danse. Des nuances peuvent être introduites (ralentie, envolée) mais elles doivent être claires et
pressenties par le cavalier pour qu’il s’y prépare et les fasse partager à la dame qu’il guide. Ainsi, il pourra
en profiter pour introduire une variété au tournoiement (un saut, un glissé, un balancé…). Dans le même
esprit, la dernière mesure de l’introduction doit donner l’impulsion, la respiration nécessaire au couple
pour s’élancer dans la valse.
La valse est l’une des premières danses de couple où la complicité du corps des deux partenaires
est importante. Bien que le cavalier guide la dame, celle-ci l’aide également à tourner. Il en ressort
une sensation de corps à corps, de n’être qu’un à deux… ce qui distingue cette danse des autres
danses de l’époque et explique l’engouement qu’elle a suscité et qu’elle suscite encore !
La valse introduit, avec le galop, la position fermée : les deux danseurs sont face à face et se tiennent à
proximité et non plus du bout des doigts. Le cavalier enlace sa dame avec son bras droit et la paume de
sa main gauche épouse la main droite de la danseuse. La main gauche de la dame se pose sur l’avant-bras
droit du cavalier. Le tournoiement peut entraîner un certain abandon de soi, mais bien sûr toujours dans
les règles du bon ton et du maintien de l’époque : les maîtres à danser y veillent.
La polka
(Danse sur une musique à deux temps d’un rythme vif et enlevé, dans laquelle le couple se place comme
pour la valse.)
Elle nous vient de Bohème. Introduite en France en 1844, elle déclenche un vent de folie : on lui consacre
des livres, des feuilletons, des poèmes, des pièces de théâtre… Tout devient polka.
Le rythme d’origine est vif et enlevé ; il se ralentit avec les années qui passent (Métronome Maelzel pour
la noire : 104 selon Cellarius en 1847, 88 selon Klemm en 1876). L’œuvre musicale prend alors le nom de
« Polka française ». Cependant, la forme rapide (Métronome Maelzel pour la noire : 92 selon Klemm en
1876, 92 à 100 selon Engelhardt en 1926) reste et prend le nom d’« Esmeralda » où se côtoient des pas
chassés et des pas de polka.
La polka se danse avec un changement d’appui sur chaque croche de la mesure sauf la dernière sur laquelle
le danseur sautait en 1844 puis attendait à la fin du siècle.
Le galop
(La plus enlevée et la plus endiablée des danses à deux temps, dans laquelle le couple est ouvert vers l’avant.)
Au début du XIXème siècle, il est la dernière figure d’une suite de danses appelée quadrille français et dé-
crite pour la première fois en 1804. Il devient par la suite une danse spécifique surtout dansée dans les bals
publics en plusieurs cercles concentriques.
Le rythme rapide (Métronome Maelzel pour la noire : 126 selon Klemm en 1876 et Engelhardt en 1926)
ne permet pas de variation chorégraphique : c’est une suite de pas chassés d’un même pied (8, 16, 32…)
que l’on termine par un demi-tour ou un changement de direction afin d’alterner le pied qui marque le
temps et ainsi le reposer. Le galop s’est imprégné de la polka dans la deuxième moitié du XIXème siècle et
l’on trouve le terme de galop dans les traités pour désigner la Schnell-Polka. En effet, le tournoiement est
plus grisant que la ligne droite et demande aussi une plus grande technique. La polka piquée effectuée sur
place permet de reprendre son souffle.
La marche
(Promenade en cortège, dans laquelle le couple se tient par la main.)
Par son aspect militaire, elle n’égaie pas les salons. C’est peut-être pour cela qu’on ne la mentionne dans
aucun traité de danse. Tout au plus, elle sert lors de la procession d’ouverture d’un bal. Mais, à cet usage,
on lui préfère la polonaise sur un rythme à trois temps.
La csárdas
(Danse hongroise populaire à deux mouvements, le premier lent, le second rapide.)
Bien vivante en Hongrie, cette danse ne s’est pas propagée dans les salons étrangers. Elle est simplement
apparue sur scène en tant que danse de théâtre, peut-être parce que le Hongrois en a fait sa danse natio-
nale qui représente son âme dans toute sa fierté et sa vivacité.
An der schönen blauen Donau (Le beau Danube bleu)), Walzer, RV 314
En juillet 1866, l’armée autrichienne ayant été défaite à Sadowa par les troupes du roi de Prusse, la mo-
narchie danubienne cessa d’écrire l’histoire de l’Europe. Profondément affecté par le cours des
choses, Johann Strauss esquissa à l’automne 1866 une valse qu’il projetait de dédier à Vienne, la
ville impériale sur le Danube – lequel est, en été, effectivement beau et bleu. Mais comme il s’était
engagé à écrire une valse pour les chanteurs du Männergesangverein (chœur d’hommes) de Vienne, il
leur offrit celle-ci pour leur concert de carnaval du 15 février 1867. La version pour chœur ne comporte
pas de coda. Dans sa forme définitive, avec introduction et coda, Le beau Danube bleu fut créé le 10 mars
1867 au Volksgarten de la Ringstrasse. Un an plus tard déjà, cette valse était l’emblème musical de la ville
de Vienne ; elle l’est restée jusqu’à nos jours.
Brahms was a great admirer of Strauss. Not so long ago, I had a hard time understanding that; like many
musicians I found Strauss’ music a bit cheap. This wasn’t the case when I began studying music as a ten
year-old and sight-read Strauss Waltzes under the watchful eye of my first private teacher. I liked the mu-
sic, but the pleasure was short-lived. In the music school where I next studied, it was forbidden to play
music by Strauss (or to enjoy anything); Bach and Czerny replaced Strauss on the music desk. The preju-
dice against Strauss’ ‘unworthy’ music made it impossible for me to appreciate even his orchestral scores.
That never-ending little tune, that continuous stretching of the rhythm, that melodramatic way of doing
things… it just didn’t appeal to me.
Dr. Ulrich Etscheit from Alkor and Bärenreiter Publishers changed the picture. Ulrich had already helped
Anima Eterna by providing reliable sources for the music of Schubert and Beethoven, and had followed
the orchestra’s progress. In 1997, he gave me Dr. Michael Rot’s new critical edition: the Strauss edition (Vi-
enna), distributed by Bärenreiter Publishers in Kassel. Ulrich thought it self-evident that Anima Eterna
should undertake a Strauss project. I reacted sceptically. But Ulrich sent me piles of scores, and as I looked
through them my interest began to grow. I discovered more and more good music, great music, brilliant
orchestration. In a short time my resistance had disappeared, and I no longer needed convincing. The
next step was to present the project to the orchestra. The musicians were as sceptical as I had been, but this
quickly dissipated when they began to play the music. After the first series of concerts, they admitted that
Strauss’ music was a great discovery, and wanted to continue. But preparatory work had to be done before
performing the music. And above all, a programme had to be chosen. I read through hundreds of scores,
and the real problem was one of abundance: choosing music for one CD from among so many wonderful
pieces. The programme on this record includes well-known works, finds, and various forms and genres,
and also presents a chronological overview (from 1858 to 1893) of Strauss’ work. It is wholly in keeping
with the character of Anima Eterna projects, and also includes a few personal choices here and there.
Michael Rot’s Strauss Edition
More than six hundred compositions by Johann Strauss have been preserved. Most of the pieces became
popular as soon as they were premiered, and have been played around the world ever since. The brilliant
Strauss produced new works so quickly that publishers could not keep up with him (the “Strauss business”
also helped to accentuate this trend). Many pieces were published only as piano reductions to be played in
the home, and had to be re-orchestrated by each ensemble that performed them; dozens of arrangements
were made. Serious research on Strauss began in the twentieth century, but no one had an overall view of
the composer, and new editions were often based on faulty or incomplete source material. Strauss’ music
began to suffer: dynamics, phrasing and articulation became impoverished. The Strauss Edition, under
the patronage of the Vienna Philharmonic, undertook a difficult task. Michael Rot headed the editorial
work, which was based on more than three thousand sources. This number increased spectacularly when
access to Eastern European sources became possible. The first volumes of the new critical edition appeared
in 1997; the complete edition will include seventy volumes. Copious critical commentary that takes into
account both divergent and faulty readings and problems in the musical text accompany each score. The
often-performed work An der schönen blauen Donau required no less than sixteen pages of commentary;
this example shows the Herculean task the editors have taken on.
Michael Rot wrote in 1997: “The new Johann Strauss edition can serve as a point of departure and an in-
spiration for new interpretations of the composer’s works; these in turn will perhaps allow new insights
into the dance music of the nineteenth century.”
Although Anima Eterna was hardly at its first experience with music of the past (our “restoration work-
shops” resulted in performances of the complete Mozart piano concerti and the complete sympho-
nies of Beethoven and Schubert that can be qualified as rebirths of those works), tackling Strauss’
music required a big step forward. In accordance with the orchestra’s philosophy, the musicians
chose to play historic Viennese instruments from the second half of the nineteenth century. They searched
for instruments, tried them out, borrowed them, invested in them… the instrumentarium they assembled
made an attractive, characteristic sound. Listen to the full but transparent sound of the horns, the nobility
of the trumpets and trombones (though powerful, they never drown the other instruments), the sweet-
ness of the flutes and clarinets, the profundity of the oboes and bassoons, the varied sounds of the percus-
sion instruments and the musicality of the timpani. Listen to the stringed instruments and the enchanting
sound of their gut strings. We decided upon small string sections to avoid smothering the wind instru-
ments and to allow the strings to participate like partners in chamber music. During the first rehearsal of
the programme, we realised that Strauss’ music was only a small step away from Mozart and Schubert. The
menuets, Ländler and polka finales we had already played had prepared us for the new project. And as we
had previously worked on rhythmic precision, this aspect of Strauss’ music presented no difficulties. The
orchestra studied the scores meticulously. We have always attempted to see what a correct reading of the
text would be like before making changes to it (unlike the way musicians usually proceed), knowing that
modifications could be made later. We quickly realised that none was necessary. Strauss’ scores, like those
of Mozart, Beethoven and Schubert, were perfect scripts. These composers were completely immersed in
orchestral writing and knew all its secrets. Our respect continued to grow. We invited the dancers Édith
Lalonger and Patrick Nollio to join us in our research on the relationship between this type of music and
dance. Thanks to David Sinclair for suggesting this idea. Édith Lalonger and Patrick Nollio danced to our
playing and pinpointed the problems that our interpretation raised. Our discussions on tempi were par-
ticularly edifying (see Édith Lalonger’s and Patrick Nollio’s article).
When we consider how Strauss’ music should be played, a question rapidly comes to mind: What about
(Viennese) tradition? In spoken language, people sometimes use “tradition” as a synonym for “unchanged
up to the present time”. The goal of tradition is in fact to transmit (as in the Latin tradere) ideas from one
generation to another. And though no one chooses new ideas or sudden divergences, small changes
that escape the vigilance of the traditionalist constantly occur. The instruments for which Strauss
composed his music were gradually forgotten in just this way… choices of tempi also evolved in-
dependently and slowly but surely certain habits took old. Consider the following:
In 1929 Clemens Krauss conducted the Vienna Philharmonic; Morgenblätter was on the programme. The
orchestra as a whole sounds transparent and light as a feather, and the bass line propels the music along.
The string sections play almost without vibrato, like a chamber music ensemble. Is this a nineteenth cen-
tury sound? The introductory bar is only slightly slower than the waltz itself, which gives a sensation of
acceleration. Sometimes, but very rarely, the second beat is stretched and lengthened for a few bars. Is this
Strauss? Is this Vienna? Perhaps.
In 1980 Lorin Maazel conducted Morgenblätter with the same Vienna Philharmonic. But if this is really
the same orchestra fifty-one years later, the youngest musicians would be about 75 years old, and the oldest
around 115… The style is now the reflection of another time. The notion of lengthening the second beat
has now become a principle, and the waltz begins more slowly. Is this Strauss? Is this Vienna? Perhaps.
In 1999 Anima Eterna decided to “restore” Strauss. It goes without saying that the musicians play instru-
ments Strauss favoured in a style that links Schubert with Brahms. The second beat no longer needs spe-
cial attention, as the impulse now comes from the first beat. Is this Strauss? Is this Vienna? Perhaps.
Music and dance were closely connected until the end of the nineteenth century. Musicians were familiar
with dances just as dancers were familiar with music. Music and dance moved away from each other in
the twentieth century as the arts became more specialized, but new interest in the interpretation of nine-
teenth century music makes it essential to study the bonds between the two arts today. Analysis of infor-
mation found in nineteenth century treatises helps to understand the characteristics of each dance (tempo,
phrasing, instrumentation, etc.) and its relation to the music, and supplements the musicians’ knowledge.
Encounters with dancers also enable musicians to see the dances performed and to discover how they
make use of space and which movements are involved; this in turn allows them to visualize dances that
are rarely seen today, and demonstrates the musical effects the dances call for. The leaps, turns, glissés and
marchés of the various dances demand different uses of energy and accentuation from both musicians
and dancers. These effects are difficult to describe in words. The art of interpretation, whether it concerns
music or dance, is a living art!
The encounter with the musicians of Anima Eterna was a step in this direction. The exchange between
dancers and musicians included:
- a history and description of the dances;
- demonstrations of the different steps and choreographic elements of the waltz, the polka, the galop and
the march;
- a discussion of the links between music and dance, and of the rapport between musicians and dancers.
The most frequently broached topic in the encounter was tempo.
One discussion concerned the unevenness of the waltz rhythm (the second beat is played early) as played
by Austrian musicians, and raised the following questions:
- how long has the rhythm been played this way?
- do the dancers follow the same uneven rhythm?
Nineteenth century treatises do not mention uneven dance steps or uneven musical interpretation. But the
fact that the second beat is played early could be helpful to the dancers: it communicates the momentum
they need to make their turn. (The dancers begin to turn between the first and second beats.) The polka’s
transformation into the galop (although the galop is actually an older dance) was also the object of much
discussion.
The waltz
(The waltz is danced to triple time music; the dancers turn about the floor.)
Was the waltz originally Austrian? Some authorities believe it evolved from the French volte, which was
first described in the sixteenth century in Thoinot Arbeau’s Orchesographie (1588). It is true that the danc-
ers whirl in the volte, but what became of its leaps…?
Could the waltz derive from the Deutsche Tänze or the Ländler? The regular steps and numerous arm
movements in these two dances, as related by Thomas Wilson in A Description of the Correct Method of
Waltzing (1816), give this impression. Moreover, the word was often written Walse in French. In any case,
the most widespread form of the waltz was the French one. Vienna adopted it at the end of the eighteenth
century, and from there it spread throughout Napoleonic Europe. The waltz gradually came to be called
“Viennese”; this was mainly due to the wonderful melodies written by musicians from Vienna and neigh-
bouring areas. Johann Strauss father and son wrote the music that ensured widespread popularity for the
waltz.
Waltzing technique evolved slowly in the nineteenth century. Thomas Wilson, an Englishman, described
two styles of waltzing, the French and the German. These can be respectively summarized with the classi-
cal terms détourné and pas de bourrée. The French dancing masters Brunet (1832) and Cellarius (1847) re-
placed the pas de bourrée with a second détourné. This change gave rise to the valse pivotée (also known as
the “waltz in three”). Cellarius (1847) and Klemm (1876) both indicated that its speed was 66 (for
a dotted quarter note and according to the Maelzel metronome); Engelhardt (1926) gave a tempo
between 54 and 72. Another waltz of the same period was the more rapid “waltz in two” (a two-
step waltz), which consisted of chassés and sautés. A speed of 88 for a dotted quarter note (Maelzel metro-
nome) was suggested by Cellarius in 1847. According to Gabriel Desrat’s dance dictionary, these dances
originated in Russia. The Baron Nieuken, an attaché to the Russian delegation, is said to have taught them
to his father, a dance master.
The détourné was also replaced by the pas de bourrée in North America, and the new dance crossed the
Atlantic under the name of the “Boston”, perhaps in reference to Boston, the intellectual and artistic cap-
ital of the United States at the time. It was a slower dance whose basic figures were a turning to the right
and a turning to the left. These were executed around the circumference of the room in a counterclockwise
motion. The turning couple may have symbolized the earth, which turns both on its own axis and around
the sun, a fact which had been well known since the thirteenth century. In this dance, the lady executes
the same steps as the man, but one bar later. The first beat of each bar is heavily accented and gives an im-
petus to the dancer to start the turn that will end when the bar does; this rhythm continues until the last
bars of the music. The basic tempo of the dance does not change; if nuances (slowing down or speeding
up) are introduced, these must be carried out precisely. The man must anticipate them and indicate them
clearly to his partner. He can in this way initiate variations in the turns (leaps, a glissé, a balancé…). The
last bar of the musical introduction communicates energy to the dancers who are about to begin the waltz
in similar way.
The waltz was one of the first dances for a couple in which the rapport between the bodies of the partners
was important. The man guided his partner, but she also helped him to turn. A feeling of intimacy and
complicity was the result… this fact differentiated the waltz from other dances of the same period, and
explains why it has remained popular up to the present day.
The waltz, along with the galop, introduced a “closed” position in which the partners are face to face and
dance very near one other; no longer do they hold each other at arm’s length. The man embraces the lady
with his right arm, while the palm of his left hand clasps his partner’s right hand. The lady’s left hand rests
on the man’s forearm. The waltz could lead to sensations of abandon, but the dancers would always
have maintained good taste in order not to offend the tenets of the period; dance masters ensured
that no breaches of decorum occurred.
The polka
The polka, of Bohemian origin, was danced to lively and spirited music in duple time. The couple was po-
sitioned as for the waltz. Introduced in France in 1844, it immediately became wildly popular, inspiring
a craze of polka books, serials, poems and plays. Though it was a quick dance at first, the polka gradually
slowed down. In 1847 Cellarius indicated a speed of 104 (for a quarter note, Maelzel metronome); Klemm’s
speed in 1876 was 88. This slower dance was called the “French Polka”. The more rapid polka continued to
be danced, however. It became known as the “Esmeralda”, and combined polka steps and chassés. Speeds
varied from 92 (Klemm in 1876), to 92 – 100 (Engelhardt in 1926) for a quarter note (Maelzel metro-
nome). The polka is danced with a change of position on every eighth note of the bar except the last one.
In 1844 the dancers jumped on the last eighth note, but by the end of the century they waited.
The galop
In the galop, the most boisterous of the dances in duple time, the couple is side by side, facing the front.
At the beginning of the nineteenth century the galop was danced last in a series of four dances known as
the quadrille français, first described in 1804. It later became independent, and was often danced in con-
centric circles at local dances. The rapid rhythm of the galop does not allow for choreographic variations:
it is a series of pas chassés executed with the same foot (8, 16 or 32 steps). The series ends with a change of
direction in order to switch feet and rest briefly. The galop absorbed elements of the polka in the second
half of the nineteenth century, and the term ‘galop’ was used in treatises to indicate the Schnell-Polka. It
is certainly true that a whirling movement is more exhilarating than dancing in a straight line; it also de-
mands a more advanced technique. The polka piquée, danced in place, allowed the dancers to catch their
breaths.
The marche
The marche is a procession in which the couples, who hold hands, follow the leading couple in a column.
Its military aspect did little to enliven salons, and it is perhaps for this reason that it is not mentioned in
any dance treatise. At the very most, it served as an opening dance at balls; the triple time polonaise was
often chosen for this purpose instead.
The czárdas
The czárdas is a Hungarian folk dance with two movements. The first is slow, the second fast. Although it
was very popular in Hungary, this dance did not spread to other countries. It was simply danced on stage
in the theatre. The czárdas came to represent the fiery soul of the Hungarian people, and became Hunga-
ry’s national dance.
Translations
Dutch to French: Clémence Comte
French to Anglish: Marcia Hadjimarkos