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Chapitre 4 :

Quelles sont les mutations du travail et de l’emploi ?

OBJECTIFS : ............................................................................................................................................................... 1

I. QUELLES SONT LES MUTATIONS DE L’EMPLOI ? .......................................................................................... 3

A. TRAVAIL, ACTIVITE, EMPLOI, CHOMAGE : DES NOTIONS A DISTINGUER ........................................................................... 3


B. UNE DIVERSITE DE STATUTS D'EMPLOIS AUX FRONTIERES PLUS FLOUES .......................................................................... 6
C. CONDITIONS DE TRAVAIL ET QUALITE DE L’EMPLOI .................................................................................................... 9

II. QUELLES SONT LES DIFFERENTES FORMES D’ORGANISATION DU TRAVAIL ET QUELS SONT LEURS EFFETS
SUR LES CONDITIONS DE TRAVAIL ? .................................................................................................................. 14

III. QUELS SONT LES EFFETS DU NUMERIQUE SUR LE TRAVAIL ET LES CARACTERISTIQUES DES EMPLOIS ? .... 20

A. LE BROUILLAGE DES FRONTIERES DU TRAVAIL ......................................................................................................... 20


B. LA RISQUE DE POLARISATION DES EMPLOIS ............................................................................................................ 23
C. LE NUMERIQUE TRANSFORME LES RELATIONS D’EMPLOI ........................................................................................... 24

IV. LE TRAVAIL EST-IL ENCORE SOURCE D’INTEGRATION SOCIALE ? ........................................................... 25

A. LE TRAVAIL : UNE INSTANCE D’INTEGRATION FONDAMENTALE ................................................................................... 26


B. L’AFFAIBLISSEMENT DU POUVOIR INTEGRATEUR DU TRAVAIL ..................................................................................... 28
EPREUVE COMPOSEE ................................................................................................................................................. 33
DISSERTATION .......................................................................................................................................................... 33

Objectifs :
Ce que dit le programme :
 Savoir distinguer les notions de travail, activité, statut d’emploi (salarié, non-salarié), chômage ;
comprendre que les évolutions des formes d’emploi rendent plus incertaines les frontières entre
emploi, chômage et inactivité.
 Connaître les principaux descripteurs de la qualité des emplois (conditions de travail, niveau de
salaire, sécurité économique, horizon de carrière, potentiel de formation, variété des tâches).
 Comprendre les principales caractéristiques des modèles d’organisation taylorien (division du
travail horizontale et verticale, relation hiérarchique stricte) et post-taylorien (flexibilité,
recomposition des tâches, management participatif) ; comprendre les effets positifs et négatifs
de l’évolution des formes de l’organisation du travail sur les conditions de travail.
 Comprendre comment le numérique brouille les frontières du travail (télétravail, travail / hors
travail), transforme les relations d’emploi et accroît les risques de polarisation des emplois.
 Comprendre que le travail est source d’intégration sociale et que certaines évolutions de l’emploi
(précarisation, taux persistant de chômage élevé, polarisation de la qualité des emplois)
peuvent affaiblir ce pouvoir intégrateur.

A la fin du chapitre, je dois être capable :


1/ de définir et maîtriser le sens des notions suivantes: travail, emploi, statut de l’emploi, population
active, population inactive, taux de chômage, qualité des emplois, organisation du travail,
division horizontale de travail, division verticale, taylorisme, fordisme, modèles taylorien
d’organisation du travail, modèles post-tayloriens d’organisation du travail, flexibilité du travail,
recomposition des tâches, sous-traitance, management participatif, télétravail, relation
d’emploi, polarisation des emplois, précarisation de l’emploi.

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2/ d’expliquer en quoi l’apparition de formes particulières d’emploi (emplois atypiques) a contribué à
rendre plus floues et incertaines les frontières entre emploi, chômage et activité.
3/ de présenter et d’expliquer les six principaux descripteurs de la qualité des emplois.
4/ de présenter et de distinguer les modèles d’organisation taylorien du travail des modèles post-
taylorien du travail.
5/ d’expliquer les effets sur les conditions de travail de la généralisation de ces deux types de modèle
au cours du temps.
6/ d’expliquer les effets complexes du numérique du travail en insistant sur trois types de
conséquences (le brouillage des frontières travail et hors-travail, la transformation des relations
d’emploi et le risque de polarisation des emplois).
7/ d’énumérer et d’expliquer les principaux arguments sociologiques justifiant du rôle fondamental
du travail en tant qu’instance d’intégration sociale.
8/ d’expliquer en quoi les évolutions de l’emploi (chômage élevé, précarisation et polarisation de la
qualité des emplois) ont conduit un affaiblissement du rôle intégrateur du travail.

Les entreprises qui se robotisent sont plus performantes que celles qui ne se robotisent pas…
avant même d’acquérir des robots ! Analyse contre-intuitive d’une expérience espagnole.
Un robot est une machine programmée pour réaliser plusieurs tâches sans être dirigée par un être
humain. Les personnes qui exécutaient ces tâches auparavant sont ainsi évincées du processus de
production. Les robots détruisent donc des emplois, c’est même leur vocation ! D’ailleurs, ces
destructions s’annoncent massives dans les années qui viennent puisque selon l’OCDE (Organisation de
coopération et de développement économiques) la robotisation pourrait faire disparaitre environ 16 %
des emplois en France d’ici 20 ans. Un tel chiffre fait frémir, mais est-ce la fin de l’histoire ? La
robotisation ne favorise-t-elle pas aussi l’éclosion de nouveaux emplois ?
Une étude récente1 a tenté d’établir le bilan des mouvements de destructions et de créations d’emplois
dus à la robotisation en utilisant cette méthode.

Les auteurs ont comparé sur une longue période les performances des entreprises qui se robotisent – elles
forment le groupe test –, à celles qui ne se robotisent pas – elles forment le groupe de contrôle. Plus
précisément, disposant de données très détaillées sur le secteur industriel espagnol entre 1990 et 2016,
cette étude compare les trajectoires des firmes qui ont intégré des robots relativement tôt dans la période
(précisément avant 1998) à celles qui n’ont jamais utilisé de robots au cours de cette période.
Le graphique fait ressortir les trajectoires diamétralement différentes de ces deux types d’entreprises. Les
entreprises « robotisées » augmentent en moyenne leur niveau d’emploi de plus de 50 % entre 1998 et
2016, tandis que les entreprises « non robotisées » réduisent leur niveau d’emploi de plus de 20 % sur la
même période. À l’évidence, les robots ne sont pas les ennemis de l’emploi. Comment expliquer un tel
résultat alors que les robots se substituent à de nombreux salariés ?

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Le graphique livre un autre enseignement qui peut surprendre : les entreprises qui se robotisent sont plus
performantes que celles qui ne se robotisent pas… avant même d’acquérir des robots ! On voit ainsi
qu’avant 1998, les premières ont déjà tendance à augmenter leurs effectifs tandis que l’emploi dans les
secondes diminue. Cela laisse penser que les firmes qui s’apprêtent à se robotiser ont vraisemblablement
des caractéristiques qui les distinguent d’emblée des entreprises qui ne vont pas se robotiser. Les auteurs
de l’étude mettent en évidence qu’effectivement, les firmes qui se robotisent sont, au départ, plus grandes
et ont une productivité supérieure à celles qui ne se robotisent pas. Elles sont plus aptes que les autres à
innover.
L’arrivée des robots, comme toutes les innovations, déclenche un processus de « destruction créatrice »
décrit par l’économiste autrichien Joseph Schumpeter il y a plus de 70 ans. Ce processus oppose l’effet de
substitution à l’effet de productivité. Le grand intérêt de cette étude sur la robotisation du secteur
industriel espagnol est de mettre en évidence que l’effet de productivité se traduit par un effet d’échelle de
grande ampleur. Les créations d’emplois excèdent très largement les destructions. D’autres études aussi
précises devront confirmer cette conclusion, mais pour l’heure, rien ne permet d’affirmer que les robots
annoncent la fin du travail. Bien au contraire.
Les innovations techniques poussent les entreprises à mettre en œuvre de nouvelles méthodes de
production. Les entreprises qui adoptent rapidement ces innovations, des robots par exemple, et qui
parviennent à les rentabiliser, accroissent leurs parts de marché tandis que leurs concurrentes en perdent
ou disparaissent. Les innovations déclenchent des mouvements de réallocation de la main-d’œuvre : des
emplois sont détruits dans les entreprises qui n’intègrent pas les innovations et des emplois, plus
productifs, sont créés dans les entreprises qui les adoptent. Cette réallocation de la main-d’œuvre accélère
la croissance de la productivité globale : sans les robots, la productivité de l’industrie espagnole aurait
vraisemblablement été multipliée par deux entre 1990 et 2016. Avec l’intégration des robots, elle a triplé.
André Zylberberg, le 26 décembre 2019 ? Pourleco.com

1. « Robots and firms », Michael Koch, Ilya Manuylov et Marcel Smolka, VOX CEPR Policy Portal, juillet 2019.

I. Quelles sont les mutations de l’emploi ?


A. Travail, activité, emploi, chômage : des notions à distinguer
Doc. 1 : L'emploi est devenu une norme au cours du XXe siècle
Au début du XXe siècle, le concept moderne d'emploi n'existait pas […]. À cette époque, les employés
bénéficiaient de contrats à durée déterminée de longue durée. Le travail de l'ouvrier était, lui, lié aux aléas
de la production. […]
Apporter des garanties sur la poursuite du contrat de travail répondra par la suite, certes, à une exigence
de protection du salarié engagé dans une relation de subordination inégalitaire, mais aussi au souci des
employeurs d'assurer la stabilisation de la main-d'œuvre dans l'entreprise, au-delà de l'accomplissement de
tâches concrètement définies, pour répondre aux nécessités de la production telle qu'elle est organisée
dans l'entreprise moderne. Du point de vue économique, la notion d'emploi est donc liée à l'inscription
dans la durée de l'action de l'entreprise, organisée autour de la définition des postes de travail, de
fonctions abstraitement définies tout en tenant compte des variations possibles de cette activité. Ces
garanties ne rendent pas impossible la rupture du contrat de travail, mais donnent consistance à l'objectif
de stabilité de l'emploi. […] C'est ainsi que peu à peu le CDI, contrat à durée indéterminée, à temps plein,
va se constituer, entre 1945 et 1975, comme la forme de référence des situations d'emploi typiques. On
comprend mieux, dès lors, pourquoi l'attente principale est aujourd'hui d'avoir un emploi, c'est-à-dire non
seulement d'exercer un travail mais surtout d'avoir accès à une place, dans le système de production et
dans la société, qui permet l'obtention d'un revenu mais aussi de droits sans lesquels il est quasiment
impossible de vivre normalement aujourd'hui. C'est aussi ce qui explique que l'on puisse détester son
travail et aimer son emploi : « L'emploi désigne la place et les droits que l'on obtient en travaillant : très
souvent les salariés acceptent donc les contraintes du travail, même très dures, parce qu'ils tiennent au
statut social que celui-ci leur confère dans la société globale […]. »
Dominique Méda, Le Travail, PUF, 2018.
Questions :
1) Différenciez les notions de travail et d’emploi.

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Le travail est une dépense de temps et d'énergie pour produire un bien ou service marchand ou non
marchand alors que l'emploi est le statut à l'intérieur duquel s'effectue le travail. Un emploi donne
droit à une rémunération. Il s'inscrit dans une relation contractuelle (et asymétrique) entre un
employeur et un employé s'il s'agit d'emploi salarié. L'emploi offre un statut social, des devoirs et des
droits.
2) Caractérisez l’emploi au début du XXème siècle. Quelles différences avec l’emploi d’aujourd’hui ?
Au début du XIXe siècle, les relations entre les salariés et le patronat sont asymétriques puisque les
patrons ont un pouvoir absolu dans l’entreprise et que les salariés ne sont pas protégés et n’ont pas le
droit de se défendre (en France, la loi Chapelier de 1791 interdit les syndicats et le droit de grève). La
condition ouvrière est marquée par la précarité du travail et l’insécurité sociale :
 L’entrée au travail se fait de façon précoce : le travail des enfants dans les familles ouvrières est
généralisé. Dès l’âge de 8 ou 9 ans, les enfants sont employés à des travaux qu’aucune machine ne
peut exécuter à cette époque. Les patrons encouragent le travail des enfants. Leur habilité et leur
petite taille sont bien utiles pour certaines tâches. Et surtout, un adulte effectuant un travail
similaire doit être payé trois à quatre fois plus.
 La durée du travail est très longue (12 à 16 heures par jour) et flexible. Elle dépend de la lumière
du jour et des variations de la demande. Dans les pays industrialisés, elle est à cette époque en
moyenne de 12 heures par jour et de 80 heures par semaine
3) Pour quelles raisons cette norme d'emploi s'est-elle instaurée durant cette période ?
La généralisation du CDI comme norme d’emploi au cours des 30 Glorieuses correspond à plusieurs
exigences :
- Protéger le salarié, qui est dans une situation de subordination vis-à-vis de son employeur
- Assurer la stabilisation de la main d’œuvre de l’entreprise pour répondre aux nécessités de la
production.
La satisfaction de ces deux exigences a entraîné une stabilisation importante de l’emploi. Aujourd’hui,
le CDI permet :
- D’exercer un travail
- D’obtenir un revenu
- D’avoir une place dans la société / un statut social
- D’obtenir des droits sans lesquels il est très difficile de vivre aujourd’hui.
4) Quelle relation entre les salariés et les entreprises établit cette norme d'emploi ?
Une relation de subordination
5) Définissez les termes suivants : population active, population inactive, actifs occupés, chômeurs,
travailleur salarié, travailleur non salarié.
 La population active est l’ensemble des individus qui exercent ou cherchent un emploi.
 La population active occupée regroupe l'ensemble des personnes qui ont un emploi mais sa
mesure diffère selon l'observation statistique qui en est faite.
 Un chômeur (ou actif inoccupé) est une personne qui n'a pas d'emploi et qui en recherche un. La
définition des chômeurs est extrêmement sensible aux critères retenus. La définition la plus
couramment utilisée est celle « au sens du BIT ». Elle permet d'effectuer des comparaisons
internationales.
 Le salarié se définit comme une personne physique liée à un employeur par la conclusion d’un
contrat de travail et par une relation de subordination permanente. Le salarié dispose légalement
ou conventionnellement d’un certain nombre de droits attachés à son statut : information,
expression, paiement d’un salaire minimum en fonction de l’emploi occupé, limitation de la durée
du travail, etc. Les devoirs qu’il a en contrepartie vis-à-vis de son employeur, et qui consistent
essentiellement dans la fourniture d’un travail selon les instructions qui lui sont données, sont
fixés par la réglementation, par le contrat de travail et par l’employeur lui-même.
 Le travailleur indépendant n'est pas lié par un contrat de travail avec l'entreprise ou la personne
pour laquelle il exécute sa mission. Il travaille pour son propre compte. Il est autonome dans la
gestion de son organisation, dans le choix de ses clients et dans la tarification de ses prestations.
6) Distinguez taux d’emploi, taux d’activité et taux de chômage.
 l’activité, correspondant aux actifs sans emploi, mesuré par le taux d’activité :
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nombre de personnes actives X 100
population en âge de travailler

 l’emploi, correspondant aux actifs occupés, et mesuré par le taux d’emploi :
nombre de personnes en emploi X 100
population en âge de travailler

 le chômage, correspondant aux actifs sans emploi, et mesuré par le taux de chômage :
nombre d’actifs sans emploi X 100
population active
7) Différenciez emploi et travail à partir de la phrase soulignée.
Le travail est une activité humaine de création de richesse. Il peut être rémunéré ou non. L’emploi est
un statut professionnel dans lequel une personne exerce une activité rémunérée. Ainsi nettoyer son
logement est un travail (domestique), mais être un personnel d’entretien est un emploi.

Doc. 2 : Population de 15 ans ou plus selon la situation sur le marché du travail


en France en 2020 (en milliers)

1. A partir du schéma, énoncez une définition de population active.


2. En 2020, en France, le taux de chômage était de 8%. Retrouvez comment il a été calculé à partir
des données du schéma.
3. A quelle catégorie ces personnes appartiennent-elles ? Complétez le tableau ci-dessous.

Doc. 3 : Types de contrat des salariés en France (en % des emplois salariés

4. Faites une phrase comparant et exprimant la signification des deux données des cellules grisées.

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Doc. 4 : Emplois à temps partiel en France (en % de l’emploi total)

5. Faites une phrase comparant et exprimant la signification des deux données en gras.

B. Une diversité de statuts d'emplois aux frontières plus floues


Doc. 5

1) Recensez les formes d’emploi qui se sont développées depuis les années 80. En quoi peut-on
parler de formes d’emploi « atypiques » ?
On parle de diversification des formes d’emploi pour désigner le développement progressif, à partir
des années 1980, de « formes particulières d’emploi », notamment :
 Des emplois temporaires caractérisés par un contrat de travail à durée déterminée : CDD, emplois
d’intérim, contrats d’apprentissage, contrats aidés proposés par des organismes publics.
 Des emplois caractérisés par un temps de travail réduit (emplois à temps partiel) ou flexible
(contrats de travail établissant des horaires variables ou décalés)
On parle de formes d’emploi « atypiques » car ces emplois se distinguent de la norme de l’emploi
type qu’est le CDI (contrat à durée indéterminée) à temps plein. En ce sens, ces emplois sont en
rupture avec l’idéal de stabilité et de sécurité de l’emploi qui est au cœur du processus de
développement des sociétés salariales.
2) Justifiez l’expression de « précarisation de l’emploi » utilisée dans le document.
Ce processus de diversification des formes d’emploi s’inscrit dans une logique de précarisation de
l’emploi.

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Cette expression est d’abord justifiée par le fait que les individus qui occupent ces formes particulières
d’emploi se trouvent souvent dans des situations caractérisées par de l’insécurité économique, un
statut attaché à l’emploi fragilisé et une incertitude accrue quant à la possibilité de se projeter dans
l’avenir à travers son activité professionnelle.
Cette logique de précarisation affecte également une partie des salariés occupant des emplois à temps
plein et à durée indéterminée, notamment ceux qui, travaillant dans des entreprises impactées par des
opérations de restructuration et de rationalisation des coûts de production, sont confrontés à un
risque accru de perdre leur emploi à court ou moyen terme.
3) Montrez que ces transformations traduisent une dégradation de la qualité moyenne des emplois.
Les évolutions de l’emploi observées depuis les années 1980 traduisent aussi une dégradation de la
qualité moyenne des emplois.
 Sur le plan économique, elles impliquent qu’une part croissante des salariés est confrontée à un
risque d’exposition au chômage plus élevé (cas des salariés occupant des emplois temporaires ou
des CDI « fragilisés » par un risque de licenciement accru), à des difficultés à vivre dignement de
leur travail (cas des salariés en temps partiel subi qui souhaiteraient travailler davantage).
 Sur le plan social, elles impliquent également qu’un nombre croissant de salariés éprouvent des
difficultés à s’intégrer dans leur entreprise (salariés à temps partiel), à organiser de façon stable
l’articulation entre temps de travail et temps hors-travail (salariés occupant des emplois à horaires
flexibles ou décalés), ou encore à connaître des perspectives de carrière en capitalisant sur leurs
expériences accumulées (cas des salariés qui alternent des emplois temporaires et des périodes de
chômage)
La précarisation de l’emploi conduit donc à fragiliser le modèle de la société salariale qui s’était
construit autour de la norme de l’emploi stable. La dégradation de la qualité des emplois qui
accompagne ce processus « fait renaître des incertitudes et des vulnérabilités là où la société salariale
avait apporté sécurité et stabilité ».

Doc. 6

Champ : France hors Mayotte, population des ménages, personnes en emploi salarié.
Source : Insee, Enquêtes Emploi, 2019.
Source : Conseil économique, social et environnemental, Les nouvelles formes du travail indépendant,
novembre 2017.

Questions :
1. Présentez les évolutions de l'emploi salarié entre 1982 et 2018. Quelle est la part des emplois
précaires en 2018 ? De l'emploi typique ?
2. Quelle est la différence entre le statut de salarié et d'indépendant ? Donnez un exemple de métier
pour chaque type d'emploi indépendant présent dans le schéma.
3. Expliquer. Pourquoi le statut d'indépendant a-t-il connu un nouvel essor après 2009 ?
4. Comprendre. Pourquoi les travailleurs de plateformes sont-ils dans une « zone grise » en termes
de statut professionnel ?

Doc. 7 Halo du chômage


La réalité de la situation des personnes est […] plus complexe que ne le suggère la séparation nette entre «
chômeur », « actif occupé » et « inactif ». Dès les années 1980, la notion du « halo » du chômage est apparue

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pour désigner les situations des personnes qui n'étaient pas comptabilisées comme chômeur au sens des
critères du BIT alors que, de fait, leur situation s'apparentait à celle du chômage. […] Le « halo » du
chômage au sens large résulte […] de la multiplication des statuts à la frontière du chômage officiellement
recensé.

Jérôme Gautié, Le chômage, La Découverte, 2015.


Pour qu’un individu soit défini comme chômeur, quel que soit l’indicateur utilisé, il existe deux
éléments à conjuguer : ne pas avoir d’emploi (ou exercer un emploi à temps partiel et en chercher un
autre) et chercher activement un emploi.
Ce deuxième critère est nécessairement très subjectif ; qu’est-ce que chercher activement un emploi ?
Cela signifie-t-il qu’un individu soit dans l’obligation de chercher tout type d’emploi ? Doit-il accepter
tous les emplois pour sortir du chômage, y compris des postes éloignés géographiquement, des postes
pour lesquels il est surqualifié ou sans aucune expérience ?
On comprend donc que certains individus peuvent se situer dans une zone grise entre chômage et
emploi car leur situation ne correspond pas exactement à la définition de cet indicateur.
1) D’après vous, comment le halo du chômage évolue-t-il depuis une quarantaine d’années ?
Le halo autour du chômage est composé de personnes sans emploi qui ne sont pas considérées
comme chômeurs au sens du BIT, mais dont la situation s’en rapproche. Ces personnes déclarent
souhaiter travailler ou rechercher un emploi, mais elles :
 ne sont pas disponibles dans les quinze jours pour occuper un emploi (par exemple elles suivent
une formation, ont des problèmes de santé ou doivent s’occuper de leurs enfants) ;
 et/ou n’ont pas fait de démarche active de recherche d’emploi au cours des quatre dernières
semaines.

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Le sous-emploi comprend des personnes qui ont un emploi et qui travaillent involontairement moins
que ce qu’elles souhaitent, principalement, il s’agit de personnes travaillant à « temps partiel subi » :
elles ont un emploi à temps partiel mais souhaitent travailler davantage et sont disponibles pour le
faire, qu’elles recherchent ou non un emploi.
Finalement, la mesure officielle de l’emploi pose cependant un problème méthodologique
important. En effet, les frontières entre l’activité, l’emploi et le chômage sont poreuses, et des
situations ambivalentes peuvent survenir.
L’emploi est surestimé : il y a des personnes en emploi à temps partiel qui souhaiteraient
travailler davantage et pourraient donc être considérées comme chômeuses, c’est le sous-emploi,
L’activité est sous-estimée : il y a des inactifs qui ne sont pas inscrits au chômage mais qui
souhaiteraient travailler = le halo du chômage
De manière générale, la progression des formes particulières d’emploi amène beaucoup d’individu à
intégrer ce halo du chômage dont l’ampleur a très nettement augmenté depuis les années 1980.
2) A quelle catégorie appartiennent les individus ci-dessous ?
a- Un étudiant à la fac de Sciences Économiques. Inactivité
b- Un jeune qui vient de terminer ses études et s'inscrit à Pôle Emploi Chômage
c- Un ouvrier travaillant à 80% pour s'occuper de ses deux enfants Temps réduit volontaire.
d- Une caissière avec un contrat de 28h cherchant un emploi complémentaire Temps réduit
involontaire.
e- Un chômeur effectuant quelques heures de travail non déclarées Travail clandestin
f- Une mère au foyer Inactivité
g- Une personne sans emploi voulant travailler mais sans effectuer de recherche active. Chômeur
découragé

C. Conditions de travail et qualité de l’emploi


Doc. 8 : La prise en compte de la qualité de l'emploi
La question de la qualité de l'emploi et de sa mesure est relativement récente en sciences sociales. […]
Dans la théorie économique standard, le salaire constitue l'unique critère de qualité d'un emploi : il
résume la productivité et compense la désutilité du travail pour le salarié. […] Dans la théorie
économique récente, et en particulier dans le cadre du courant de l'économie du bonheur, […] la
satisfaction au travail constitue un indicateur à l'aune duquel il est possible de mesurer l'importance des
multiples facettes du travail : salaire, mais aussi conditions de travail, sécurité de l'emploi, accès à la
formation, possibilités de conciliation avec la vie personnelle et familiale… […] Concernant le salaire, ces
travaux révèlent deux phénomènes : le salaire à un moment donné importe moins que les perspectives
d'évolution salariale […] ; le niveau relatif du salaire par rapport aux collègues, à la catégorie
socioprofessionnelle ou aux proches, influe également sur la satisfaction (phénomène de comparaison).
[…] Ainsi, pour refléter davantage les priorités et préférences des travailleurs, une batterie d'indicateurs
semble nécessaire […] : les salaires et la sécurité de l'emploi, les conditions de travail (y compris le
dialogue social), […]. Dans cette perspective théorique, la qualité de l'emploi peut être directement
influencée par les institutions et les politiques nationales. Elle est donc susceptible de varier fortement
entre les pays.
Christine Erhel, Mathilde Guergoat-Larivière, « La qualité de l'emploi », Idées économiques et sociales, 2016
1. Quel est le critère de mesure de la qualité de l'emploi dans l'analyse néoclassique ? Pourquoi ?
L’analyse néoclassique part du principe que les agents économiques se livrent à un calcul coûts-
avantages effectué de manière rationnelle et évalué à partir du critère économique exclusivement.
D’après cette analyse, les agents économiques font des choix en fonction de l’utilité et de la désutilité
qu’ils attachent à une action (l’utilité en sens économique renvoie à la notion de satisfaction d’un
besoin).
Ainsi, si les salaires sont faibles, les agents économiques vont considérer que l’utilité du travail est
faible, ils vont donc préférer le loisir.
Si les salaires sont élevés, les agents économiques vont considérer que chaque heure travaillée
leur apporte de l’utilité car elle augmente fortement leur pouvoir d’achat. Ils vont donc travailler
davantage car l’utilité du travail sera plus forte que celle du loisir.

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Si les salaires sont très élevés, les agents économiques vont à nouveau privilégier le loisir car le
pouvoir d’achat est suffisamment important avec une petite quantité de travail pour répondre aux
besoins
On voit donc que dans l’analyse néoclassique, le salaire est l’indicateur par excellence de la qualité
d’un emploi. Cependant, on constate que ces critères sont insuffisants pour déterminer la qualité d’un
emploi, c’est-à-dire la façon dont un emploi contribue au bien-être d’un individu.
2. Quels sont les autres critères de mesure de la qualité de l'emploi ?
D’autres critères sont à prendre en compte :
 Les conditions de travail sont d'une manière générale l'environnement dans lequel les employés
vivent sur leur lieu de travail. Elles comprennent la pénibilité et les risques du travail effectué ainsi
que les horaires ou l'environnement de travail (bruit, chaleur, exposition à des substances
toxiques, les délais de production ou de ventes d'un produit, etc.). C'est l'ensemble des facteurs
sociaux, psychologiques, environnementaux, organisationnels et physiques qui caractérise un
environnement de travail pour le salarié.
 Le niveau de salaire est une composante de la qualité de l’emploi. Dans l’analyse économique
standard, il est même le fondement de l’utilité de l’emploi, susceptible de contrecarrer la désutilité
du travail par sa contrepartie, l’accès à une consommation élevée et variée. S’il ne saurait à lui seul
subsumer tout ce qui fait la qualité d’un emploi, il reste que le niveau de salaire conditionne bien
le niveau de vie des ménages et leur donne plus ou moins de liberté dans la détermination de leur
mode de vie. Au surplus, ce n’est pas seulement le niveau de salaire qui contribue à la satisfaction
des individus bien que le bien-être augmente avec le niveau de revenu. Les personnes riches se
déclarent sans surprise plus heureuses que les pauvres. Mais, il faut également considérer le
paradoxe d’Easterlin (1973) : la proportion de personnes se déclarant heureuses dans les pays
développés reste stable malgré la hausse du PIB par habitant au cours du temps. Autrement dit,
deux autres mécanismes interviennent, d’abord, la hausse du niveau de salaire va de pair avec une
élévation des aspirations, ensuite autant ou plus que le niveau absolu de salaire, c’est le salaire
relatif qui compte puisque la satisfaction est le résultat des comparaisons entre individus. D’où
l’importance du descripteur relatif à l’horizon de carrière.
 La sécurité économique c’est-à-dire la capacité d'une personne, d'un ménage ou d'une
communauté à pourvoir durablement et dignement à ses besoins essentiels. On associe cette
notion à celle de sécurité de l’emploi, c’est-à-dire au fait d’être en capacité de conserver
durablement un emploi et donc de se projeter dans l’avenir.
 La variété des tâches c’est-à-dire la diversité des activités réalisées, la possibilité d’engranger des
atouts qui favorisent son employabilité, l’influence du cœur de métier, le sens au travail…
 L’horizon de carrière désigne les perspectives d’évolution professionnelle offertes au travailleur à
moyen et long termes (changement total ou partiel de contenu du métier, changement de poste,
amélioration des qualifications et de la rémunération…).
 Le potentiel de formation, c’est-à-dire la possibilité de développer de nouvelles compétences et
de nouvelles aptitudes par le biais de son emploi.
3. Comment les institutions peuvent-elles agir sur la qualité de l'emploi ?
Financement des formations, contrôle de la santé des travailleurs et de l’hygiène du travail,

L’innovation et la qualité de l’emploi

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Doc. 9

Eurostat, 2019.
À savoir
La qualité de l'emploi est détaillée par l'indicateur dit de Laeken en 2001 autour de dix dimensions :
 Qualité intrinsèque de l'emploi
 Qualifications, éducation, formation tout au long de la vie et progression de carrière
 Égalité entre les hommes et les femmes
 Santé et sécurité au travail
 Flexibilité et sécurité
 Insertion et accès au marché du travail
 Organisation du travail et équilibre entre vie professionnelle et vie privée
 Dialogue social et participation des travailleurs
 Diversité et non-discrimination
 Performance économique générale et productivité
1) Présentez les critères favorisant la protection économique du travailleur, ses perspectives de
carrière, son bien-être et sa santé.
 protection économique du travailleur (2 & 4)
 ses perspectives de carrière (6)
 son bien-être et sa santé (3 & 5)
2) Quels critères ne respecte pas un emploi intérimaire ?
 Qualifications, éducation, formation tout au long de la vie et progression de carrière
 Flexibilité et sécurité
 Dialogue social et participation des travailleurs
Le potentiel de formation et l’acquisition de nouvelles compétences sont nécessaires car c’est par
cette acquisition que les travailleurs peuvent se prémunir contre le caractère répétitif de leur travail,
d’avoir des perspectives de carrière, d’avoir des augmentations de salaires etc.
Le niveau de qualification obtenu par la formation est donc déterminant pouvoir accéder à des
postes de qualité
3) Pourquoi le critère de dialogue social est-il important pour un travailleur ? À quoi renvoient les
critères éthiques ?
Climat de confiance au sein de l’entreprise, sentiment d’appartenance. Possibilité de faire des
revendications et de défendre ses droits. Les conditions éthiques renvoient au respect des libertés
individuelles et collectives et à la protection des droits fondamentaux des salariés sur le lieu de travail
(sécurité, respects des lois, des normes professionnelles, etc.)

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Exercice n°1 : Les frontières incertaines entre emploi, chômage et inactivité

Situations Zones
Marc, sans emploi depuis un an, suit une C Inactif à la frontière du chômage donc
formation en informatique dans l’espoir de halo du chômage (non disponible).
trouver plus facilement un emploi
Patrick, qui souhaite un emploi à temps ASituation intermédiaire entre emploi et
complet, a accepté un emploi de caissier de chômage (temps partiel subi) donc sous-
20h par semaine emploi.
Sabrina a pris un emploi à mi-temps pour BSituation intermédiaire entre emploi et
s’occuper de ses jumeaux âgés de 3 ans inactivité (temps partiel choisi).
Valdo, 58 ans, sans emploi depuis son CInactif à la frontière du chômage donc
licenciement, n’en recherche plus car il est halo du chômage (personne sans emploi
convaincu qu’il n’en trouvera pas compte tenu découragéepas de recherche d’emploi).
son âge
Stan souhaite retrouver un emploi de CInactif à la frontière du chômage donc
comptable mais ne le peut pas pour l’instant halo du chômage (indisponible, pas de
car il s’occupe de sa mère dépendante recherche).
Cécile, salariée en CDI dans une salle de A Situation intermédiaire entre emploi et
cinéma, a été mise en chômage partiel à cause chômage à cause d’une mise en chômage
d’un confinement de la population partiel donc sous-emploi.
Karim a cessé son activité professionnelle pour CInactif à la frontière du chômage donc
garder son fils âgé de 3 mois mais souhaite halo du chômage (indisponible, pas de
retravailler dès qu’il aura plus d’un an. recherche).

Exercice n°2 : La qualité des emplois

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Complétez le schéma ci-dessous avec les termes suivants : population inactive ; chômage ; recherche
d’emploi ; halo du chômage ; pas de recherche d’emploi ; inactivité hors halo ; population active.

Complétez le texte ci-dessous avec les expressions ou termes suivants : formes particulières d’emploi ;
non salarié ; emplois à temps partiel ; halo du chômage ; domestique ; travail (x3) ; emplois à durée
limitée ; sous-emploi ; sécurité économique ; statut social ; qualité de l’emploi ; salarié ; bénévole ;
emploi typique ; potentiel de formation.

Le ………………………………………………. désigne toute participation humaine à une activité productive de


biens ou de services. Au sens large, il comprend des activités rémunérées, la plupart du temps grâce à
un emploi, mais aussi des activités non rémunérées comme le travail ………………………………………………. ,
le travail ………………………………………………. (pour une association par exemple), ou le travail qu’un
individu fournit parfois en tant que consommateur ou usager (quand ce dernier range par exemple un
plateau-repas ou publie des contenus sur un réseau social). Ainsi, le concept de
………………………………………………. est à distinguer du concept d’emploi en tant que ce dernier
correspond à la partie du ………………………………………………. rémunéré et déclaré, qui permet d’acquérir
un ………………………………………………. c’est-à-dire une position dans l’espace social en raison notamment
du revenu et des droits qui en découlent. Le statut juridique de l’emploi peut être
………………………………………………. quand un contrat spécifie une relation de subordination à un
employeur ou ………………………………………………. quand le travailleur est indépendant.
Six principaux descripteurs de la ……………………………………………. peuvent être retenus : 1/ conditions de
travail, 2/ niveau de salaire, 3/ ……………………………………………. , 4/ horizon de carrière, 5/
……………………………………………. , 6/ variété des tâches.
Ils réunissent à la fois les aspects relevant de la qualité du travail et ceux concernant la qualité de la
situation d’emploi.
Depuis la fin des Trente Glorieuses, on assiste en France au développement de
………………………………………………. correspondant à des emplois qui ne relèvent pas des CDI à temps
plein, ce que l’on qualifie d’………………………………………………. car il s’agit encore de la forme de
référence des situations d’emploi. L’apparition et l’augmentation des emplois atypiques dans l’emploi
total a rendu plus poreuses les frontières entre emploi et chômage et entre inactivité et chômage.
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D’une part, avec le développement des ………………………………………………. , les individus passent plus
fréquemment d’une situation où ils ont un emploi à une situation où ils n’en ont pas ce qui est
susceptible d’accroître des situations intermédiaires entre chômage et inactivité. En effet, certaines
personnes sans emploi sont dans une situation proche de celle d’un chômeur au sens de du BIT mais
ne sont pas comptabilisées comme chômeurs par l’INSEE car elles ne remplissent pas tous les critères
pour être considérées comme chômeurs au sens du BIT. Ces personnes inactives à la frontière du
chômage sont regroupées dans le ………………………………………………. au sens de l’INSEE. D’autre part, le
développement des ………………………………………………. favorise l’apparition et la multiplication de
situations intermédiaires entre emploi et inactivité pour les personnes en temps partiel choisi ; et
entre emploi et chômage faisant apparaître un ………………………………………………. de ceux qui
souhaiteraient travailler plus.

II. Quelles sont les différentes formes d’organisation du


travail et quels sont leurs effets sur les conditions de
travail ?
Doc. 10 : Une rationalisation du travail : Taylor et l'organisation scientifique du travail
Pour comprendre la révolution introduite par Frederick Winslow Taylor, il faut imaginer ce qu'était une
usine américaine au milieu du XIXe siècle. Les dirigeants s'occupaient peu de la production. L'atelier était
le royaume des contremaîtres, qui organisaient le travail, fixaient les salaires, embauchaient et licenciaient
le personnel. Ils régnaient sur deux catégories de salariés : les manœuvres, dont on n'utilisait que la force
physique, et les ouvriers qualifiés.
Ces derniers possédaient un métier et avaient hérité de leurs ancêtres artisans la maîtrise de leur poste de
travail, autonomie, […] qu'ils défendaient farouchement. […] Dès ses premiers mois d'atelier, Taylor est
choqué par le faible rendement des ouvriers, qui s'organisent entre eux pour limiter leurs efforts et ne
travailler le plus souvent qu'au tiers de leur capacité. Leur raisonnement est logique : s'ils sont payés à la
journée, ils ne gagnent rien à en faire plus. […]
Taylor se lance dans l'étude des temps de travail. Ce n'est pas une nouveauté : le chronométrage des
opérations de production était déjà pratiqué. Mais Taylor va au-delà. Il effectue de véritables analyses des
tâches et met au point la méthode qui le rendra célèbre : il choisit de bons ouvriers, leur demande
d'exécuter la même opération, décompose chacun de leurs mouvements, compare leur efficacité et
reconstruit la meilleure façon d'opérer – the one best way – en enchaînant les gestes permettant d'abattre
le plus de besogne rapidement et avec le moins de fatigue possible.
C'est la base de la révolution taylorienne : le bureau des méthodes prend le contrôle du poste de travail et
ne laisse à l'ouvrier que le soin d'exécuter ce qui a été conçu par les ingénieurs. Les tours de main,
l'expérience de l'homme de métier perdent beaucoup de leur importance, et la voie est ouverte aux
ouvriers dits « spécialisés », c'est-à-dire n'effectuant qu'une série limitée d'opérations parfaitement
définies. On les retrouvera sur les chaînes des usines de montage d'automobiles. C'est en s'appuyant sur
les travaux de Taylor qu'Henry Ford développera, dès 1903, cette forme efficace mais particulièrement
déshumanisante d'organisation, magnifiquement illustrée par Chaplin dans Les Temps modernes.
Marc Mousli, « Taylor et l'organisation scientifique du travail », Alternatives Économiques, 2006.
1) Présentez l'organisation des usines avant la mise en place de l'OST.
L’organisation du travail désigne la manière dont les postes de travail et les relations entre les
travailleurs sont conçus dans une entreprise ou une administration afin de réaliser une production.
 Smith est le premier théoricien de la division du travail. Elle permet la croissance économique via
la hausse de la productivité. La division du travail augmente la « puissance productive du travail ».
Elle consiste en la division de la réalisation d’une tâche complexe en de multiples tâches réalisées
par des travailleurs spécialisés dans une tâche simple et unique.
La division du travail provient d’une propension naturelle à échanger, qui est pour lui un penchant
universel, guidée par l’intérêt et non par l’altruisme. Pour satisfaire ses besoins, chacun doit s’adresser
aux autres pour obtenir d’eux ce qu’il veut. Il cherche un moyen d’être plus productif afin de
maximiser son propre intérêt dans l’échange : ce moyen réside dans la division du travail.

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Smith illustre sa démonstration par l’exemple d’une manufacture d’épingles dans laquelle la
réalisation d’une épingle nécessite dix-huit étapes successives. Il identifie trois principales
conséquences d’une spécialisation qui sont :
 une habileté plus grande du travailleur qui se spécialise dans l’exécution d’une tâche
 la disparition des temps morts entre les différentes tâches
 la possibilité de mécaniser certaines tâches.
2) Pourquoi peut-on dire que Taylor innove dans ce domaine ? Quel objectif poursuit-il ? Quelles sont
les caractéristiques du « one best way » ?
Le taylorisme est une méthode d’organisation du travail industriel dont les caractéristiques principales
sont la division horizontale et verticale du travail ainsi que le salaire au rendement. Le taylorisme doit
son nom à l’ingénieur américain F. W. Taylor (1856-1915) qui a mis au point une méthode
d’organisation du travail dite scientifique. Taylor en présente les principes dans un ouvrage paru en
1911 intitulé « La Direction scientifique des entreprises ».
Il y fait la critique de l’organisation traditionnelle du travail qui repose sur les métiers, plus
précisément sur le savoir-faire d’ouvriers qualifiés, autonomes, responsables de leur temps et de la
conduite de leur activité. Il propose de lui substituer une nouvelle organisation fondée sur une division
technique du travail, c’est-à-dire organisée par postes.
L’objectif de l’organisation scientifique du travail (OST) est d’améliorer la productivité à travers un
meilleur contrôle de l’activité des ouvriers. Taylor souhaite lutter contre la "flânerie" dans les ateliers
et trouver la meilleure façon de produire (the one best way).
La standardisation du travail des ouvriers (outils, machines, gestes, délais, etc.) s’accompagne
également d’une surveillance (chronométrage) qui permet d’instaurer un salaire directement lié au
rendement (salaire aux pièces).
3) Que permet la double division du travail ?

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Questions :
1) Expliquez la différence entre division verticale et horizontale du travail.
Après un travail d’observation et d’analyse du travail ouvrier (gestes, rythmes, cadences, etc.), Taylor
préconise d’adopter deux principes :
une division horizontale du travail, c’est-à-dire une parcellisation maximale des tâches entre les
différents postes de travail, où chaque ouvrier effectue quelques gestes élémentaires délimités et
répétitifs ;
une division verticale du travail, c’est-à-dire une séparation stricte entre le travail de conception
et le travail d’exécution. Un bureau des méthodes dirigé par des experts en organisation est chargé de
la préparation scientifique du travail.
2) Qu’entraîne la double division du travail sur l’autonomie et les compétences des ouvriers ?
Les principes du taylorisme vont être adoptés progressivement au cours du XXe siècle, aux États-Unis
et en Europe. La rationalisation du mode de production proposée par le taylorisme permet une
augmentation de la productivité des entreprises.
Les contraintes d’un travail parcellisé, déqualifié, ainsi que les cadences de production élevées
rendent toutefois le travail des ouvriers particulièrement difficile. Si le volume de production
augmente, l’objectif de qualité n’est pas automatiquement atteint.
3) Quel est l'intérêt de cette organisation « scientifique » du travail ?
L’objectif de l’organisation scientifique du travail (OST) est d’améliorer la productivité à travers un
meilleur contrôle de l’activité des ouvriers. Taylor souhaite lutter contre la "flânerie" dans les ateliers
et trouver la meilleure façon de produire (the one best way).

Doc 11 : VIDEO ECO PLUS – Les apports de FORD au modèle taylorien


Ford fait la critique de l’organisation traditionnelle du travail qui repose sur les métiers, plus
précisément sur le savoir-faire d’ouvriers qualifiés, autonomes, responsables de leur temps et de la
conduite de leur activité. Il propose de lui substituer une nouvelle organisation fondée sur une division
technique du travail, c’est-à-dire organisée par postes.
1) Quels avantages présente l’introduction de la chaîne de montage dans les usines de fabrication de
voitures d’Henry Ford ?
En ajoutant la chaîne de montage, à savoir un système mécanisé qui transporte les pièces à travailler
d’un poste de travail à un autre. Ce ne sont plus les ouvriers qui se déplacent mais les pièces elles-
mêmes ce qui permet d’éliminer les temps morts. Par ailleurs, la chaîne permet d’augmenter la
cadence car c’est elle qui impose aux ouvriers le rythme de travail. « L’homme […] ne doit pas avoir
une seconde de moins qu’il ne lui faut, ni une seconde de plus. ».
2) Quelle est la particularité des voitures vendues par Henry FORD au début du XXe siècle ? Pourquoi
ce choix ?
En standardisant les produits c’est-à-dire en produisant des voitures strictement identiques (sans
variantes de formes et de couleurs) à l’instar de la fameuse Ford T noire. « Mes clients sont libres de
choisir la couleur de leur voiture à condition qu’ils la veuillent noire ». Cette standardisation des
produits passe par une standardisation des pièces. La limitation du nombre de pièces différents
permet de simplifier le processus de production et de produire en grande série.
3) Quelles raisons ont poussé Henry FORD à augmenter les salaires des ouvriers ?
Chez Taylor, le salaire était individualisé et lié à la productivité de chacun des travailleurs. Il constituait
donc un moyen de contrôle. Ford utilise le salaire d’une autre façon : augmenter le salaire des ouvriers
(cinq dollars par jour, contre deux ou trois pour des journées plus longues auparavant) permet de
stimuler la demande et donc d’augmenter la consommation. Cette augmentation a pour but d’éviter
les démissions des ouvriers qui ont accrues avec l’apparition du travail à la chaîne, réputée très dure.
Ford était persuadé qu’il fallait une production de masse destinée à une consommation de masse.
Ainsi, le salaire de cinq dollars pour une journée de huit heures permit à la fois d’assurer un
compromis avec la discipline requise pour travailler sur la ligne d’assemblage, mais aussi de fournir aux
travailleurs un revenu et un temps libre suffisant pour qu’ils consomment les produits qu’ils ont eux
même fabriqué.
4) Quels ont été les effets de la mise en place de cette organisation du travail dans les usines Ford ?
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 Hausse de la productivité du travail (12h pour fabriquer une Ford T avant l’introduction de la
chaîne, 1h30 après) donc hausse de la production (200 voitures par jour avant l’introduction de la
chaîne, 2500 voitures/jour après)
 Baisse des coûts de production et donc des prix (la Ford T coûte 900$ en 1909 et 290$ en 1924)
 Création de nouveaux débouchés pour l’entreprise grâce au gain de pouvoir d’achat lié à la baisse
des prix et à la hausse des salaires.

Complétez le schéma ci-dessous avec les termes suivants : chaîne de montage ; taylorisme ; hausse des
salaires ; fordisme ; division verticale du travail ; gains de productivité ; division horizontale du travail.

Doc. 12 : Les effets négatifs des modèles tayloriens d’organisation du travail


Pour mesurer toute la portée du basculement qui est en train de se produire dans l’organisation du travail, il
faut revenir en arrière, aux sources de ce qui a causé la crise de l’organisation du travail voulue par le
fordisme. Celui-ci croyait pouvoir construire un monde productif basé sur l’idée d’un homme puisse
totalement s’oublier dans la tâche qui lui est assignée. Mais même d’un strict point de vue économique,
l’abêtissement programmé de l’homme devant la machine a un coût considérable : le travailleur s’ennuie,
souffre, devient distrait face aux tâches qu’on lui demande d’accomplir. L’absentéisme, le turn-over
deviennent rapidement les plaies de « l’organisation scientifique du travail ». La conception même du travail
à la chaîne rend l’ensemble du système extrêmement vulnérable à la défection de l’une des parties qui la
forment. Les taux de défaut du travail à la chaîne sont de fait spectaculaires. Le sabotage discret ou
simplement la distraction des ouvriers se paient d’un coût considérable. […] Pour conjurer la souffrance
solitaire de l’homme devant la machine, Henry FORD comprend pourtant qu’il doit faire beaucoup plus.
Quoi ? Doubler leur salaire. En 1914, il introduit l’épisode sans doute le plus célèbre des relations sociales :
il offre aux ouvriers le fameux « five dollar a day », la journée payée cinq dollars, alors que leur salaire oscillait
auparavant entre deux et trois dollars. Le lendemain de cette offre, plus de dix mille travailleurs se
pressaient aux grilles des usines Ford pour trouver un job. […] L’attachement des travailleurs à la firme,
leur motivation, leur productivité se sont accrus. […] L’absentéisme a été réduit de moitié, la « docilité » des
travailleurs augmentant considérablement…. […]
Son répit sera toutefois de courte durée. Très vite il comprend en effet qu’il ne suffit pas de doubler
les salaires pour accroître, une fois pour toute, la productivité de ses ouvriers. Ce qui compte en effet,
c’est que les ouvriers soient deux fois plus payés qu’ailleurs. Or, le reste de l’économie, […] s’aligne sur
les standards fordistes et FORD découvre son chagrin : l’effet produit par des augmentations de
salaires sur la motivation des travailleurs ne peut être que de courte durée. La grande machine fordiste,
réputée pour la mécanique de gains de productivité qu’elle permet d’engendrer, est inexorablement
condamnée à s’essouffler.
Daniel COHEN, Nos temps modernes, Flammarion, 2002.

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Complétez le schéma ci-dessous avec les termes et expressions suivants : perte de motivation ; gains
de productivité ; abêtissant ; perte de motivation ; cadences infernales ; déqualification des travailleurs
; turn-over ; produits défectueux ; dénué de sens.

Double division du travail et travail à la chaîne

Aliénation des travailleurs …………………………………….. Intensification du travail


(travail………………………, …………………………………….. (……………………………………
avilissant, ………………… (privation d’autonomie, ………………………………………
…………………………………) travailleurs ………., souffrance)
interchangeables)

Absentéisme Distraction des travailleurs

Essoufflement des …………………………………………………………………………………………………………………..


et augmentation du nombre de ………………………………………………………………………………………….

Doc. 13 : Les modèles post-tayloriens d’organisation du travail


A l’obsession de tout standardiser qui avait galvanisé les énergies, se substitue aujourd’hui le cours
aussi obsessionnel de tout dé-standardiser : les tâches, les produits. On attend des travailleurs qu’ils
soient polyvalents, on attend des séries de production qu’elles soient courtes, faites « juste à temps » et
quasiment sur mesure. […] A l’obsession de spécialiser encore et toujours les tâches qui fixait l’ancien
modèle productif, le nouveau régime cherche désormais à réaliser des économies en compressant le
plus grand nombre possible de tâches sur la même personne. […]
La grande transformation introduite par ce qu’on a appelé depuis le « toyotisme » a été d’offrir
beaucoup plus de souplesse aux tâches d’exécution. On permet ainsi à un ouvrier constatant une
défectuosité de faire appel à ses collègues immédiats et non pas à ses supérieurs hiérarchiques pour
corriger les pannes au plus vite. On lui demande également de « reprogrammer » tout seul la chaîne de
montage pour changer, […], la couleur des voitures. Dans le système Toyota, la remontée de
l’information se fait par un système d’affiches (les célèbres « Kan-Ban » qui sont emblématiques du
système) placées dans des boîtes dans lesquelles les ouvriers indiquent les pièces dont ils ont besoin
pour répondre en temps réel, « juste-à- temps », aux ordres des clients. On est loin de l’échange que
permet aujourd’hui l’informatique mais le principe est déjà là : l’échelon le plus bas dans la filière
productive fait remonter les informations aux niveaux supérieurs et devient un acteur engagé et non
plus spectateur de la production. L’économiste nippo-américain AOKI résume ainsi l’apport de
l’entreprise japonaise : « La principale différence entre l’entreprise américaine et la japonaise est que l’américaine
privilégie l’efficacité, réaliser par une spécialisation très fine et une démarcation tranchée des tâches, tandis que la
japonaise insiste sur la capacité du groupe de travailleurs à faire face aux urgences locales de manière autonome, en
apprenant à agir et à partager les connaissances dans l’atelier même ». […] Les « cercles de qualité », la capacité
désormais donnée à chaque ouvrier constatant une panne d’y remédier en prenant appui sur les autres
a tout à la fois permis « d’enrichir » le contenu du travail et d’améliorer considérablement la « qualité
finale » du produit. S’il fallait en effet résumer d’une statistique la différence entre le travail à la chaîne

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fordiste et celui qui est organisé par Toyota, c’est bien à l’aune de l’indicateur du « taux de défaut »
qu’il serait le mieux défini : il est réduit de deux tiers dans les usines Toyota. […] Le toyotisme a voulu
résoudre le problème rencontré par le fordisme, obtenir l’assentiment du travailleur, en l’impliquant
dans l’organisation du travail. Le bilan psychique en est parfaitement résumé par le rapport de
l’ANACT, l’Agence nationale pour les conditions de travail […] : « Les pratiques de management par
l’excellence (cercle de qualité, groupe d’expression) présentent l’entreprise comme un lieu d’action épanouissant pour le
salarié. Les formes de polyvalence observées, qui valorisent l’excellence et la performance individuelle et multiplient les
rotations sur les postes les plus exigeants ont des effets dévastateurs. Frustrations, isolement, concurrence, compétition,
prédominent ». Désormais les atteintes à la santé mentale seraient devenues l’une des causes majeures de
l’absentéisme. Tout se passe en effet comme si le monde moderne avait engendré un formidable
renversement de la charge de la preuve. Ce n’est plus à l’entreprise de surveiller les ouvriers. Ce sont
aux ouvriers de démontrer à l’entreprise qu’ils ont bien fait leur tâche. […] Le stress devient le mode
de régulation de la société post-fordiste. Le travail vivant devient le travail à vif. Et le risque d’être
brûlé, « burn-out », est la limite nouvelle de l’organisation du travail. […] Comme le disent Danièle et
Robert LINHART il ne fait aucun doute que les nouveaux termes : « autonomie, esprit d’initiative,
coopération aient comme contrepartie souffrance, désarroi, malaise, impuissance, stress, peur ». Dans le monde
d’aujourd’hui, ce ne sont plus les machines qui tombent en panne, ce sont les hommes eux-mêmes.
Daniel COHEN, Nos temps modernes, Flammarion, 2002
1/ Complétez le tableau ci-après avec les expressions et termes suivants : forte ; travailleurs se
contentent d’appliquer le « one best way » défini par les ingénieurs ; en juste-à-temps ;
standardisés ; polyvalence des travailleurs qui sont amenés à réaliser des tâches distinctes grâce à
la rotation des postes ; faible ; spécialisation des travailleurs qui exécutent toujours la même tâche
; de masse ; valorisation de l’expertise et de l’initiatives individuelles dans des équipes de travail
autonomes ; différenciés.
2/ Par quels moyens les modèles post-tayloriens d’organisation du travail parviennent-ils à réduire les
coûts de production ?
En réduisant les stocks (grâce à la production en juste-à-temps), en limitant le nombre de bien
défectueux (grâce à l’autonomie accordée aux travailleurs dans le contrôle de la qualité), en ne laissant
aucun travailleur inoccupé (grâce à la polyvalence des travailleurs qui passent d’une tâche à l’autre), …,
les modèles post-tayloriens d’organisation du travail permettent de réduire les coûts de production.
3/ Quels sont les éléments des modèles post-tayloriens d’organisation du travail qui permettent
d’améliorer les conditions de travail des salariés ?
Les modèles post-tayloriens d’organisation du travail dérivés du toyotisme ont permis d’améliorer les
conditions de travail grâce à l’enrichissement et à l’élargissement des tâches. En effet, le
développement du travail en équipes autonomes et la rotation des postes peuvent rendre le travail
plus diversifié, moins monotone et plus intéressant, ce qui augmente la motivation des salariés et
favorise leur épanouissement.
4/ Quels sont les éléments des modèles post-tayloriens d’organisation du travail qui ont des effets
négatifs sur les conditions de travail des salariés ?
Si les modèles post-tayloriens d’organisation du travail donnent davantage d’autonomie aux salariés, il
n’en demeure pas moins qu’elles comportent leurs lots de contraintes.
 En effet, alors que le contrôle externe par la hiérarchie (caractéristique des organisations
tayloriennes du travail) s’est atténué, la nouvelle importance donnée à l’autonomie a renforcé
l’autocontrôle des salariés, devenus seuls responsables de l’organisation des tâches donc seuls
responsables des dysfonctionnements éventuels.
 Par ailleurs, la recherche d’une plus grande flexibilité pour s’adapter de façon très réactive à la
demande s’accompagne d’une intensification du travail.
 Qui plus est, la valorisation de l’expertise et de l’initiative individuelles oblige les salariés à
anticiper et à apporter des réponses aux incidents de production ce qui augmente leur charge
mentale.
 L’instauration du travail en équipe favorise la surveillance mutuelle et la mise en concurrence des
travailleurs ce qui n’est pas favorable à la cohésion du groupe.

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 En définitive, les modèles post-tayloriens d’organisation du travail génèrent une nouvelle forme
d’aliénation dont les salariés sont le principal moteur (injonction au dépassement de soi qui
conduit à l’épuisement des salariés).

Taylorisme-Fordisme (modèles Toyotisme et ses dérivés


tayloriens) (modèles post-tayloriens)
Production

Produits

Division verticale du travail

Division horizontale du travail

Autonomie des travailleurs

III. Quels sont les effets du numérique sur le travail et les


caractéristiques des emplois ?
A. Le brouillage des frontières du travail
Doc. 14 : L’ubérisation du travail
Les entreprises ont multipliés ces vingt dernières années l’externalisation de pans sentiers de leurs activités.
On a assisté parallèlement à une augmentation de la fausse sous-traitance et des faux indépendants,
caractérisé par le fait qu’ils ne dépendent que d’un donneur d’ordre et se trouve de facto sous la
dépendance complète de celui-ci. Le recours à la « fausse » sous-traitance ou faux indépendant permet de
contourner les règles du salariat et de passer d’un contrat de travail, avec toutes les protections, qu’il
suppose, à un simple contrat commercial entre deux entités échangeant une prestation de service, avec le
risque d’un retour au tâcheronnage, qui préexistait au salariat. […]
Certains auteurs considèrent que l’Ubérisation de la société […] est un prolongement du processus de
fragmentation et d’externalisation du travail à l’œuvre depuis plusieurs années qui […] conduit à une forme
de « tâcheronnisation ». Même si quantitativement l’économie des plateformes restent très minoritaire, et si
des procès de plus en plus nombreux sont intentés à ce sociétés notamment parce qu’elles refusent de
considérer les usagers des applications comme des salariés, les menaces qu’elles font peser sur les
régulations classiques du travail doivent être prises au sérieux.
Dominique Méda, Le Travail, coll. « Que sais-je ? », PUF,2018

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Doc. 15 : Proportion de salariés utilisant l’informatique dans leur activité professionnelle (en %)

Exercice n°3 : S’entraîner à la lecture de pourcentages de répartition


Les usages du numérique par les travailleurs avant la crise sanitaire

Complétez le texte ci-dessous à partir des données du document 15.


En constante augmentation depuis la fin des années 1990, l’usage du numérique continue de se
développer dans la sphère professionnelle. Ainsi, en France métropolitaine, en 2019,
………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
Toutefois, le taux d’utilisation de l’informatique dans la sphère professionnelle varie beaucoup
d’une CSP à l’autre. En effet, en France métropolitaine, en 2019,
………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
Il n’en demeure pas moins que son usage a fortement progressé depuis la fin des années 1990
parmi les employés de commerce et de services et parmi les ouvriers. En effet, en France
métropolitaine, en 2019, ………………………………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

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Doc. 16 : Proportion de salariés pratiquant le télétravail en 2019 (en %)

1) Qu’est-ce que le télétravail ?


Le télétravail est une forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui pourrait être executé
dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux, en utilisant les outils
informatique et de communication.
2) Quelle était la proportion de salariés pratiquant le télétravail en 2019 en France métropolitaine ?
Faites une phrase exprimant la signification de cette donnée.
D’après la DARES, en France métropolitaine, en 2019, 9% des salariés pratiquaient le télétravail dont
4% au moins un jour par semaine.
3) La pratique du télétravail est-elle la même pour les différentes catégories de salariés ? Justifiez
votre réponse en intégrant des lectures de données significatives.
Toutefois, la diffusion du télétravail est très variable selon la CSP des salariés.
 En effet, ce sont surtout les cadres qui télétravaillent. Ainsi, en France métropolitaine, en 2019,
28% des cadres pratiquaient le télétravail donc 14% au moins un jour par semaine.
 A l’inverse, du fait de la nature de leur activité, les ouvriers comme les employés ne pratiquent
quasiment pas le télétravail (et ce malgré la diffusion de l’informatique dans leurs activités
professionnelles → cf. document précédent). Par exemple, en France métropolitaine, en 2019,
seulement 1% des employés de commerce et de services pratiquaient du télétravail.
4) Quels sont les avantages du télétravail pour les salariés ?
Pour le télétravailleur, ce mode de fonctionnement présente plusieurs avantages :
 Une réduction et même une suppression des temps de transports, avec une diminution du stress
occasionné.
 Des horaires de travail plus souples qui laissent plus de temps au télétravailleur dans sa journée et
dans sa semaine (pour se concentrer davantage sur sa vie de famille, ses passions, ses loisirs...).
 Un gain en autonomie et en responsabilité, car le télétravailleur organise lui-même son emploi du
temps.
 La limitation des nuisances sonores, car de plus en plus d’entreprises généralisent l'open space, ce
qui implique plus de bruit dans l'environnement de l'employé.
 Un accroissement de l’efficacité (à condition que le télétravailleur soit quelqu'un d'organisé).
 Une diversifications des tâches, car le télétravailleur peut facilement alterner son travail
professionnel et ses diverses tâches quotidiennes (travail dans la maison, travail bénévole, tâches
parentales … ).
Pour l’employeur les avantages sont notamment :
 Une augmentation de la flexibilité des ressources humaines.
 Une réduction de l'absentéisme et des retards surtout dans les grandes villes en cas de bouchons,
grèves…

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 Une meilleure intégration des salariés handicapés dans les entreprises et des salariés ayant des
contraintes familiales importantes. De plus si l’entreprise ne possède pas de locaux aménagés aux
personnes handicapées, elle peut tout de même en recruter grâce au télétravail.
 Une meilleure gestion des déménagements et des transferts d'activité (si l’entreprise change de
lieu d’activité, il est possible d’éviter les licenciements liés au changement de zone géographique).
 Une réduction des frais généraux et des dépenses (pas de frais de transport pour l’employeur,
moins de frais pour l'aménagement de locaux…)
 Une augmentation de la motivation.
 Une augmentation de la compétitivité.
5) Montrez que le télétravail peut être à l’origine d’effets négatifs pour le travailleur.
L’une des limites du télétravail pour le salarié est de se sentir isolé dans son travail. C’est
particulièrement le cas pour les personnes qui pratiquent le télétravail à 100 % qui voient leur lien
social avec les autres collaborateurs s’étioler. Même si elles ont des contacts réguliers par téléphone,
par e-mail, via messagerie instantanée ou visioconférences, les échanges du quotidien restent virtuels.
Le contact peut alors devenir de plus en plus distant, voire complètement absent, entraînant la
personne dans une situation de solitude au quotidien. L’installation d’un bureau à domicile respecte
généralement peu les normes de santé et de sécurité par rapport à celles qui sont appliquées en
entreprise. Un aménagement inadapté peut entraîner pour le salarié des troubles
musculosquelettiques et/ou des troubles visuels.

B. La risque de polarisation des emplois


Doc. 17 : Les analyses classiques des effets de la technologie sur l'emploi
Toute évolution technique majeure conduit à des changements dans les modes de production de
l'économie en permettant d'économiser du travail : c'est […] le « progrès technique biaisé », […] le fait
que la demande de main-d'œuvre qualifiée augmente fortement, au détriment des personnes non
qualifiées. Le fait nouveau est que les emplois non qualifiés ne vont pas tous disparaître avec la
digitalisation de l'économie. En effet, […] les nouvelles technologies économisent les routines et font
disparaître les emplois intermédiaires. C'est ce qu'on appelle […] la polarisation des emplois : dans les
pays industrialisés, les travaux routiniers – manuels ou non – sont en recul alors que les emplois aux deux
extrémités – ceux créatifs, très qualifiés, et ceux peu qualifiés et non routiniers, comme les emplois de
service ou du care – progressent […].
S'il y a accord sur le fait que les emplois routiniers (par exemple les opérations comptables) peuvent être
remplacés par des ordinateurs ou des robots, l'ampleur des transformations à venir ne fait pas consensus.
[…] Si les travaux cités supposent que seules les tâches routinières peuvent être automatisées, les progrès
actuels dans la technologie permettant aux ordinateurs de gérer des tâches complexes et imprévues (par
exemple les voitures Google) pourraient encore étendre les possibilités de remplacement de l'humain par
la machine.
Par ailleurs, la disparition actuelle des emplois routiniers moyennement qualifiés ne résulte pas
uniquement de l'évolution technologique. […] Les emplois routiniers qui disparaissent des États-Unis
n'ont donc pas tous été remplacés par des robots sur place, mais une partie a été relocalisée dans des pays
avec des coûts de main-d'œuvre réduits.
Bernard Gazier, « Le monde du travail : rationalisation et conflits », in Dominique Foray, Croissance, emploi
et développement. Les grandes questions économiques et sociales, La Découverte, 2019.
Questions :
1. Qu'est-ce que le progrès technique biaisé ? La polarisation de l'emploi ?
Le terme de polarisation désigne une recomposition de l’emploi – une déformation de sa structure –
marquée par la tendance à se concentrer dans le bas et le haut de l’échelle des qualifications et/ou des
rémunérations. On distingue parfois la polarisation de la dualisation qui concerne la répartition entre
emplois stables et instables.
Si l’on a depuis longtemps identifié un progrès technique biaisé en faveur du travail qualifié, dans le
cas des technologies numériques, un second biais semble intervenir : elles permettent de substituer
des dispositifs automatisés non plus seulement aux tâches peu ou non qualifiées, mais également aux
tâches routinières correspondant à des niveaux de qualification intermédiaires. En outre, ces tâches
peuvent être plus aisément externalisées et délocalisées
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2. Pourquoi l'automatisation va-t-elle polariser les emplois ?
La polarisation des emplois correspond au mouvement d’accroissement parallèle d’emplois qualifiés et
de qualité, et d’emplois non qualifiés et précaires causé par le progrès technique.
Ainsi, les cadres et professions intellectuelles supérieures, disposant d’un capital humain important
leur permettant de tirer parti des nouvelles technologies et de s’impliquer dans le management
participatif ont vu leurs conditions de travail s’améliorer nettement, gagnant en responsabilités et en
autonomie, et voyant des algorithmes effectuer les tâches rébarbatives.
A l’opposé, les salariés les moins qualifiés, quand ils n’ont pas vu leurs emplois supprimés, restent
dans un cadre taylorien assez strict, renforcé par le numérique qui est utilisé comme moyen de
contrôler davantage la cadence et la qualité de leur travail : l’ouvrier doit par exemple suivre une
cadence imposée par un automate ou un ordinateur, remplaçant la vieille chaîne de production.
Dans les pays de l’Union, l’élévation de la part des plus qualifiés est très nette mais celle des moins
qualifiés croît faiblement, voire se réduit dans certains pays, à l’instar de la France. La baisse relative
des effectifs situés au milieu de l’échelle des qualifications est restée limitée dans nombre de pays
européens avant 2008. Elle s’est néanmoins considérablement accentuée depuis la crise, du fait des
destructions d’emploi dans l’industrie et la construction.
Plusieurs facteurs explicatifs rendent compte de ce phénomène et des différences d’évolution de part
et d’autre de l’Atlantique :
 Changement technologique favorable aux tâches cognitives et non routinières,
 Concurrence internationale pesant sur l’emploi industriel,
 Régulation du marché du travail encourageant le maintien des effectifs de qualification moyenne
ou au contraire favorisant les bas salaires,
 Mutations sociodémographiques et modifications structurelles de l’offre et de la demande se
conjuguent pour favoriser à la fois les emplois qualifiés et peu qualifiés.
3. Pourquoi les effets de l'automatisation sur l'emploi ne sont-ils pas évidents à mesurer ou prévoir ?
L’avenir de ces évolutions reste sujet à caution : d’aucuns anticipent avec le « second machine âge » la
disparition accélérée de tâches routinières, qui toucheraient l’ensemble des qualifications y compris
faibles ou élevées ; d’autres voient dans la révolution des services numériques une occasion pour les
qualifications moyennes d’associer une plus grande technicité et une relation client qui nécessite une
adaptation impossible à réaliser par les machines.

C. Le numérique transforme les relations d’emploi


Doc. 18 : Les effets du numérique sur les relations d’emploi
Dans son dernier ouvrage, La Révolution de la servitude (Demopolis, 2018), Karim AMELLAL,
enseignant à Sciences Po, dénonce les excès de l’économie numérique et ses incidences sur l’emploi.
(…) Uber, Deliveroo… les plates-formes numériques qui s’installent dans nos villes
n’échappent pas aux controverses : on leur reproche de générer de la précarité, d’exploiter les
failles réglementaires. En quoi heurtent-elles notre modèle social ?
Karim AMELLAL : Ce phénomène communément appelé l’« ubérisation » consiste en la mise en
relation, par des plates-formes numériques, de clients avec des travailleurs qui nourrissent ces plates-
formes de leur force de travail : chauffeurs privés, livreurs de repas à vélo, chargeurs de trottinettes
électriques, etc. Cette « économie de plates-formes » a souvent recours à des autoentrepreneurs : des
travailleurs qui ne sont pas salariés et n’ont donc pas de contrat de travail. Cela signifie qu’ils n’ont pas
d’assurance-chômage, pas de congés payés, pas de congés maladie, pas de salaire minimum, pas de
syndicats. Ils cotisent pour une retraite au rabais et n’ont aucune sécurité de l’emploi.
Les risques qu’endossent ces travailleurs « ubérisés » sont loin d’être compensés par leur rémunération,
qui reste faible. Prenons l’exemple d’un chauffeur Uber qui travaille quarante heures par semaine. Il
perçoit un chiffre d’affaires de 3 680 euros par mois, duquel il faut déduire les charges : la commission
prélevée par Uber (la cotisation au régime social des indépendants, le coût de la voiture, etc.), lui reste
un salaire net de 560 euros. S’il passe à soixante heures, il gagnera 1 320 euros net par mois – soit un
salaire horaire de 5,50 euros, en deçà du taux horaire du smic (7,72 euros).
Dans « La Révolution de la servitude », vous affirmez que l’ubérisation est « l’ennemie du
progrès social ».
Derrière le discours de ces plates-formes – c’est « le monde de demain », tout le monde est gagnant (le
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« win-win ») –, la réalité s’apparente bien souvent à une régression sociale, un retour au monde d’avant.
Le capitalisme technologique fait voler en éclats tous les acquis sociaux obtenus depuis la fin du XIXe
siècle. On se retrouve avec des conditions de travail dignes des canuts du XIXe siècle ou des ouvriers
de Germinal. Les travailleurs ubérisés sont en quelque sorte les prolétaires du XXIe siècle.
Pour certains, mieux vaut être livreur à vélo que chômeur. En effet. Mais alors pourquoi pas aussi
cireur de chaussures dans la rue ou travailleur à la tâche ? Il y a, en France, quelque chose qui s’appelle
le progrès social et qui, au prix de deux siècles de luttes, garantit à chacun un minimum de protections.
La loi travail de 2016 a apporté des avancées pour davantage protéger les travailleurs indépendants, en
permettant qu’ils s’organisent collectivement ou en introduisant une responsabilité sociale des plates-
formes en cas d’accident du travail. Actuellement, un débat est en cours au Parlement visant à
proposer aux plates-formes une charte sociale couvrant leurs travailleurs. Mais c’est loin d’être
suffisant.
Ces nouveaux « métiers » ne répondent-ils pas aussi à un désir d’indépendance ?
Beaucoup de travailleurs ubérisés se disent effectivement satisfaits de leur sort, du moins au début. Ils
sont lucides quant aux difficultés de leur tâche, mais ils travaillent quand ils veulent, n’ont pas de
patron… « Libre » est le mot qui revient presque à chaque fois. Le problème, c’est : à quel prix ? Un
certain nombre finissent aussi par changer d’avis, lorsqu’ils voient le tarif des courses diminuer, leur
rémunération se détériorer, leurs horaires gonfler… La plupart des plates-formes ont un
fonctionnement « top-down » très classique, où les règles sont entièrement décidées au sommet de la
pyramide. Quand Deliveroo décide de supprimer le bonus « pluie » des coursiers, quand Uber
augmente sa commission, ces décisions sont prises sans discussion.
Aurélie COLLAS, « Les travailleurs uberisés sont les prolétaires du XXIe siècle »,
Le Monde, 7 avril 2019.
1/ Quel est le statut de ceux qui travaillent pour le compte des plateformes numériques de services ?
Avec la diffusion des TIC, se sont développées des plateformes numériques de services comme Uber
ou Deliveroo par exemple, qui ont recours à des auto-entrepreneurs c’est-à-dire à des entrepreneurs
individuels qui relèvent du régime fiscal de la micro-entreprise. Autrement dit, ces plateformes ont
recours à des travailleurs indépendants (des non-salariés).
Toutefois, les auto-entrepreneurs travaillant pour le compte de ces plateformes numériques de service
sont de « faux indépendants ». En effet, il existe un lien de subordination entre ces plateformes et les
auto entrepreneurs puisque l’activité de ces derniers et leur accès aux clients sont contrôlés par elles.
De plus elles ont la possibilité de modifier de façon intempestive leur niveau de rémunération. Or, le
lien de subordination est ce qui caractérise la relation entre un employeur et son salarié. Ainsi, avec
ces plateformes numériques de services, le lien de subordination déborde hors du salariat ce qui crée
une relation d’emploi atypique, entre salariat et indépendance. L’auto-entreprenariat peut être
interprété comme une nouvelle forme particulière d’emploi.
2/ Pourquoi ce statut est-il avantageux pour ces plateformes numériques de services ?
Cet auto-entreprenariat « faussement indépendant » auquel ont recours ces plateformes numériques
est très avantageux pour elles puisque les travailleurs ne bénéficient pas des droits et des garanties
des salariés en matière de protection sociale. En revanche, il fragilise la situation de ces travailleurs qui
ne sont pas ou protégés face aux différents risques sociaux (maladie, chômage, accident, etc.)
3/ Que peut-on dire des rémunérations de ceux qui travaillent pour ces plateformes numériques de
services ?
De plus, les auto-entrepreneurs travaillant pour ces plateformes numériques de services sont en
moyenne faiblement rémunérés et leurs rémunérations sont instables puisqu’ils sont payés à la tâche.

IV. Le travail est-il encore source d’intégration sociale ?


Selon le sociologue Emile Durkheim, les sociétés modernes se caractérisent par une forte division du
travail, les fonctions ayant été spécialisées suite à la révolution industrielle dans les entreprises et les
sociétés. Si ce processus a affaibli l’intégration traditionnellement assurée par la famille ou la religion, il
a mis en avant le rôle intégrateur du travail, moyen pour l’individu d’acquérir une fonction
complémentaire de celles assurées par les autres membres de la société. C’est par son travail que
l’individu acquiert une utilité sociale reconnue par les autres.
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Le travail est devenu dans nos sociétés industrielles le facteur principal du lien social du fait du passage
à la solidarité organique qui relie les individus par des liens de complémentarité issus de la division
sociale du travail.

A. Le travail : une instance d’intégration fondamentale


Participer à l’activité productive ne suffit pas à assurer l’intégration des individus. Il faut que la
participation à l’activité sociale de production soit constitutive d’un statut social reconnu. Le statut
salarial que les sociétés occidentales ont, avec quelques variantes nationales, construit au cours de la
deuxième moitié du XXème siècle fait figure de modèle. Robert Castel a montré comment « cette
promotion du salariat bouscule l’opposition séculaire du travail et du patrimoine. Revenus
confortables, positions de pouvoir et de prestige, leadership en matière de modes de vie et de modes
culturelles, sécurité contre les aléas de l’existence ne sont plus nécessairement liés à la possession
d’un gros patrimoine ».

Doc. 19 : Le rôle du travail dans l’intégration sociale

1/ Pourquoi est-il nécessaire de s’interroger sur le rôle du travail dans l’intégration sociale ?
2/ Précisez les différentes raisons pour lesquelles le travail participe à l’intégration sociale des
individus
 Le travailleur dispose d’un statut qui lui confère des droits sociaux contribuant à sa dignité et à son
autonomie. Sa subordination dans l’entreprise est étroitement réglementée et ne se confond pas
avec une dépendance. Il dispose de moyens d’action – individuels et collectifs –, et de recours
juridiques destinés à assurer sa protection. Ainsi conçu, le statut de salarié (sur lequel va tendre à
s’aligner celui d’indépendant en termes de droits sociaux) offre à chaque travailleur un statut
social en osmose avec son statut de citoyen. Détenteur d’une parcelle de la souveraineté politique,
le citoyen travailleur ne saurait l’exercer et la rendre effective s’il ne disposait pas également des
moyens matériels le lui permettant.
 Le travail place l’individu au sein de groupes sociaux de tailles différentes, l’atelier ou le bureau,
l’établissement, l’entreprise ou l’administration, le secteur ou la branche, le comité d’entreprise ou
le syndicat. Diverses socialisations s’exercent : professionnelle, syndicale, amicale. L’individu
développe des relations sociales variées, lie des amitiés, partage des expériences, cultive une
sociabilité. Ces activités sociales participent à la construction de son identité sociale. La famille, les
pairs, le travail ou la nation forment des supports identitaires, si l’un ou plusieurs d’entre eux
viennent à manquer, c’est l’identité qui est amputée.
 Le travail fournit également une rémunération dont le montant peut, grâce aux droits que
détiennent les individus, être déterminé juridiquement et par les politiques économiques –
comme dans le cas du salaire minimum –, ou négocié et discuté. De cette façon, le niveau du
salaire est en mesure d’assurer une participation sociale acceptable et un mode de vie permettant
de satisfaire une large palette de besoins. La participation à la société marchande relève de
l’intégration culturelle, car à travers la consommation et l’accès aux loisirs, c’est un style de vie et
une dimension de notre identité que l’on exhibe.
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Bref, le travail permet une intégration à la fois économique, culturelle et politique.

Doc. 20 : La porosité entre temps professionnel et temps personnel


Le surinvestissement dans le travail est de plus en plus fréquent. Il est lié au souci d'être évalué
positivement, de progresser professionnellement, mais aussi à la crainte d'être perçu comme un maillon
faible, peu performant, peu impliqué dans son travail. Le travail autonome n'est plus vraiment contrôlé sur
base du temps de travail mais sur les réalisations et plus exactement sur la capacité à atteindre les objectifs
ou les ratios fixés selon les nouveaux préceptes du management par objectif. Ceci pose le problème de la
mesure de la charge de travail et plus globalement de la définition et du rôle du « temps professionnel ». Le
temps de travail est en effet de plus en plus éclaté et de plus en plus difficile à mesurer. Il inclut non
seulement des temps de présence sur les lieux de travail, mais aussi des périodes de disponibilité plus larges,
des déplacements plus fréquents, des tâches à effectuer chez les clients ou à domicile, des rythmes plus
flexibles. Pour les cadres et autres responsables, il faut aussi compter avec une pléthore de séminaires
d'entreprise, de stages de réflexion, de congrès et de réunions loin du domicile. Le problème de la charge
de travail et de la mesure du temps professionnel n'est pas qu'une affaire de cadres, tous les niveaux de
qualification sont potentiellement concernés. Le temps de travail, de plus en plus dense, envahit ainsi le
temps hors travail. Les technologies de communication établissent un lien direct, et éventuellement
permanent entre le salarié et son entreprise.
[…] Quant au contrôle, s'il a pris d'autres formes que celle de la hiérarchie, il n'a pas disparu. À
l'autocontrôle s'ajoute le contrôle par les objectifs, par les indices de satisfaction des clients, et par les
batteries d'indicateurs quantitatifs et qualitatifs fournis par les technologies de l'information. Les salariés
contrôlés et évalués sont mis en concurrence, entre équipes ou individuellement, et les moins performants
sont éliminés. […] Dans un environnement de plus en plus compétitif, tous les salariés deviennent
extrêmement sensibles à la reconnaissance de leur travail et de leurs compétences par leurs collègues et par
leur hiérarchie. Il en va de leur statut dans l'entreprise et plus généralement dans le monde du travail.
Dominique Méda, Patricia Vendramin, Réinventer le travail, PUF, 2013.
Questions :
1) Quels changements dans l'emploi des cadres sont décrits dans le document ?
2) Montrez que ces changements ont des conséquences sur la possibilité de s'intégrer par le travail.
Le travail des cadres a connu des changements radicaux avec le développement des nouvelles
technologies et l’individualisation de la relation salariale :
 La qualité du travail n’est plus liée au temps passé mais à la capacité à atteindre des objectifs sans
cesse évalués à la hausse. Cela engendre évidemment une problèmatique liée à la surcharge de
travail et au débordement sur le temps personnel. De plus, du fait de la fixation d’objectifs
individuels lors des entretiens réalisés chaque année, les salariés se trouvent dans une situation
impossible : ne pas atteindre l’objectif entraîne le risque de ne pas conserver son emploi, ou dans
de moins bonnes condition, l’atteindre entraîne le risque de se voir fixer des objectifs encore plus
ambitieux pour l’année suivante.
 Les formes de contrôle varie : contrôle par la hiérarchie, par les pairs, autocontrôle : les salariés
sont mis en concurrence les uns avec les autres, ce qui pose de nombreux problèmes dans la mise
en place de relations de solidarités entre eux : la reconnaissance de la compétence au travail
devient un enjeu crucial pour l’estime de soi car c’est l’individu qui est jugé et non son emploi.
3) Qu’est-ce que le droit à la déconnexion ? Définissez le burn-out et montrez que le droit à la
déconnexion est un moyen de s’en prémunir.
Droit à la déconnexion : En dehors de ses heures de travail, tout salarié n'est pas tenu d'être en
permanence joignable par son employeur pour des motifs liés à l'exécution de son travail. Dans le
cadre du télétravail, mis en place de façon exceptionnelle ou non, le droit à la déconnexion s'applique
également. Le droit à la déconnexion vise à :
 assurer le respect des temps de repos et de congés ;
 garantir l'équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle et familiale ;
 protéger la santé des salariés.
Aucune sanction n'est prévue pour l'employeur qui n'a pas mis en œuvre des dispositions légales sur le
droit à la déconnexion. Cependant, il peut être sanctionné s'il n'a pas respecté son obligation de
négocier sur la qualité de vie au travail ou bien encore s'il ne respecte pas la durée du repos du salarié.

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Le syndrome d’épuisement professionnel, équivalent en français du terme anglais burnout, se traduit
par un « épuisement physique, émotionnel et mental qui résulte d’un investissement prolongé dans
des situations de travail exigeantes sur le plan émotionnel ».
Littéralement, «burn-out» se traduit par «se consumer», comme une bougie qui brûle petit à petit
jusqu’à s’éteindre. Lors d’un burn-out, le salarié pense sans arrêt à son travail et cela devient une
préoccupation si importante, qu’il se rend malade. L’accès aux nouvelles technologies donne la
possibilité de travailler depuis n’importe où et accroît cette pression.
Le droit à la déconnexion est un véritable enjeu pour les cadres et de manière générale, les salariés
travaillant dans le secteur tertiaire. En effet, rien de plus facile que de ramener du travail chez soi, bien
après avoir quitté son entreprise. Sur son ordinateur personnel, son smartphone les informations
continuent d’affluer.
A ce moment là, l’épuisement professionnel peut être causé par deux facteurs, l’hyper sollicitation
des salariés et la « fear of missing out », littéralement « peur de manquer quelque chose. »

B. L’affaiblissement du pouvoir intégrateur du travail


Doc. 21 : Les quatre formes d’intégration professionnelle selon Serge Paugam
Dans les sociétés modernes, l’intégration professionnelle assure aux individus la reconnaissance de leur
travail, au sens de leur contribution à l’œuvre productive, mais aussi, en même temps, la reconnaissance des
droits sociaux qui en dérivent. […]
En ce sens, l’expression « avoir un travail » signifie, pour les salariés, non seulement à la fois la possibilité
de l’épanouissement dans une activité productive, mais en même temps la possession de garanties face à
l’avenir. On peut donc définir le type idéal de l’intégration professionnelle comme la double assurance de la
reconnaissance matérielle et symbolique du travail et de la protection sociale qui découle de l’emploi. On
peut estimer que la première condition est remplie lorsque les salariés disent qu’ils éprouvent des
satisfactions au travail. […]
Ce type idéal qui conjugue satisfaction dans le travail et stabilité de l’emploi peut être qualifié d’intégration
assurée. Dans ce cas, les salariés peuvent élaborer des projets de carrière et s’investir dans le travail pour les
réaliser. Les satisfactions qu’ils en retirent sont l’expression d’une intégration réussie dans l’entreprise, en
particulier dans les relations avec les collègues et les supérieurs hiérarchiques. C’est à partir de ce type idéal
de l’intégration professionnelle qu’il est possible maintenant d’étudier ses déviations, lesquelles
constitueront autant de sources possibles d’insatisfaction pour les salariés. […]
L’intégration incertaine correspond à une forme d’intégration professionnelle plus limitée, où l’instabilité
de l’emploi ne s’accompagne pas d’une insatisfaction dans le travail. Il s’agit notamment des situations
vécues par les salariés qui, tout en travaillant dans de bonnes conditions, en ayant de bonnes relations avec
leurs collègues et leurs supérieurs, savent néanmoins qu’ils ont de fortes chances de perdre leur emploi. Il
peut s’agir aussi bien de salariés dont le contrat à durée déterminée ne sera pas renouvelé ou de salariés
employés dans des entreprises dont l’avenir est incertain. Ce premier type de déviation par rapport à
l’intégration assurée peut sembler marginal. Les attentes des salariés à l’égard de l’emploi stable sont si
fortes que l’on peut faire l’hypothèse qu’ils ne cherchent pas outre mesure à s’impliquer dans un emploi
temporaire ou dans un emploi stable qu’ils risquent de perdre, ce qui peut limiter leurs possibilités
d’épanouissement au travail. […]
L’intégration laborieuse est une forme d’intégration professionnelle assez classique qui correspond aux
salariés globalement insatisfaits dans leur travail, mais dont l’emploi n’est pas menacé. L’activité
professionnelle ne correspond donc pas pour ces salariés à un plaisir, puisqu’elle implique des souffrances
physiques – lorsque les conditions de travail sont pénibles – ou morales, quand l’ambiance dans l’entreprise
est tendue, les relations avec les collègues et supérieurs mauvaises. Ce qui garantit l’intégration
professionnelle, ce n’est donc pas le travail en lui-même, mais l’emploi qui reste stable. […]
Enfin, l’intégration disqualifiante traduit une crise d’intégration professionnelle, puisqu’elle conjugue
insatisfaction dans le travail et instabilité de l’emploi. Elle peut se traduire par des problèmes relationnels à
l’intérieur de l’entreprise. Les salariés qui en font l’expérience éprouvent le sentiment d’appartenir à un
groupe au sein duquel leur identité est menacée, soit parce que leur statut est nettement inférieur à celui des
autres, soit parce que le groupe lui-même est condamné à disparaître. La souffrance dans le travail n’est
pas, dans ce cas, compensée par l’espoir d’une amélioration. Le statut social de ces salariés est donc plus ou
moins remis en question. Leur situation peut être comparée en cela à celle des chômeurs qui ont perdu leur
emploi et qui doutent fortement de leur possibilité d’en trouver un autre. C’est pourquoi, j’utilise le terme «
disqualifiante ». Je fais référence ici au processus de disqualification sociale qui touche aujourd’hui des

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franges nombreuses et diverses de la population en menaçant leur identité sous des formes variées.
L’intégration est disqualifiante car elle est le début d’un processus qui peut conduire à un cumul de
handicaps.
D’aucuns souligneront que ce type ainsi défini est éloigné de l’idée d’intégration professionnelle. Il s’agit, en
effet, de la déviation la plus importante par rapport à l’intégration assurée. Elle est malgré tout une
intégration professionnelle, puisque les salariés ont un poste de travail, un contrat de travail et une
rémunération. Ces éléments n’offrent en réalité au salarié que le cadre élémentaire de son intégration et le
privent en même temps de tout ce qui peut lui donner un sens – à savoir, la reconnaissance, la dignité, le
moyen d’expression et, enfin, la stabilité. Ce type d’intégration est donc paradoxal.
Serge PAUGAM ; « La condition ouvrière : de l'intégration laborieuse à l'intégration disqualifiante »,
dans Cités 2008/3 (n° 35).
Questions :
1) Quelles sont les deux conditions que doit réunir le travail pour être pleinement intégrateur selon
Serge Paugam ?
Selon Serge PAUGAM, pour être pleinement intégrateur, le travail doit apporter protection et
reconnaissance à l’individu. Autrement dit, il doit prendre la forme d’un emploi stable (le CDI offrant
un niveau élevé de protection sociale) et produire de la satisfaction au travail c’est-à-dire être source
d’épanouissement pour l’individu.
2) Comment Serge Paugam qualifie-t-il l’intégration professionnelle permise par ce type d’emploi ?
Un emploi qui réunit ces deux conditions permet une intégration assurée.
3) Quelles évolutions de l’emploi étudiées précédemment dans ce chapitre ont pu fragiliser le rôle
intégrateur du travail ?
Mais depuis le début des années 1980, certaines mutations de l’emploi ont multiplié les situations où
l’emploi ne permet plus une intégration assurée.
En effet, la précarisation du salariat sous l’effet du développement des emplois à durée limitée, à
laquelle s’ajoute depuis peu la montée de certaines formes d’emplois non-salariés (auto-
entreprenariat auquel ont massivement recours les plateformes numériques notamment) sont à
l’origine d’une plus grande instabilité de l’emploi et/ou d’une moindre capacité de celui-ci à produire
de la satisfaction au travail.
4) Montrez que ces précarités affaiblissent l’intégration sociale par le travail.
La précarisation du travail a de nombreuses conséquences.
Tout d'abord, les salariés en situation de précarité ne peuvent que difficilement intégrer un collectif
de travail : présents dans l'entreprise de manière temporaire, ils ne peuvent pas vraiment solliciter les
structures syndicales pour défendre leurs intérêts car cela reviendrait à ne pas voir son contrat se
renouveler. Les salariés en situation de précarité du fait de contrat atypique peuvent donc être isolés
au sein de l'entreprise.
De plus, la précarité conduit les travailleurs à une forme de stagnation professionnelle : contraints
d'enchaîner des contrats court, ils ont de très faibles perspectives de progression dans l'échelle sociale
(surtout que les non qualifiés sont les premières victimes de l'emploi précaire), ce qui renforce le
sentiment d'inutilité sociale et fragilise l'intégration.
D'autre part, le travail permet d'avoir accès à des droits sociaux et de bénéficier de la solidarité
nationale en cas d'accident du travail, de maladie, de vieillesse etc. La précarisation de l'emploi peut
amener les individus à intérioriser une identité d'assisté car ils doivent régulièrement solliciter l'aide de
l'assurance chômage. De plus, les faibles revenus doivent parfois être complétés par des minimas
sociaux (RSA socle ou aujourd'hui prime d'activité) : on constate que le travail ne suffit pas toujours à
assurer un niveau de vie décent. Pour certains travailleurs précaires, l'emploi n'est pas suffisant pour
bénéficier de droits sociaux, or ce sont ces droits sociaux qui permettent la mise en œuvre de la
solidarité organique. Ces individus peuvent donc être exclus de ces liens de solidarité.
Enfin, la précarité de l'emploi conduit à l'émergence d'une nouvelle catégorie sociale : les travailleurs
pauvres, c'est-à-dire des personnes dont l'activité professionnelle ne permet pas l'accès au seuil de
consommation minimum pour mener une vie décente. Le travail ne garantit plus d'éviter la pauvreté.
Être exclu de la consommation, dans une société entièrement tournée vers la consommation peut
donc être un facteur d'exclusion et d'isolement car l'identité des individus est aujourd'hui fortement
liée à l'acte de consommation.
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A l'extrême, les individus au chômage perdent une partie de leur identité sociale : un individu privé
d’emploi se sent « coupé du monde », non reconnu, car exclu de la société productive (le travail est
une activité socialement reconnue et se trouve donc au cœur de l’identité des individus ; il définit leur
statut social).
5) Complétez le tableau ci-dessous en vous aidant du vocabulaire utilisé dans le texte.

Synthèse
Complétez le texte ci-dessous avec les expressions ou termes suivants : sous-traitance ; intégration
disqualifiante (x2) ; intégration assurée (x2) ; dimension relationnelle du travail ; intégration laborieuse
(x2) ; chômage (x2) ; statut social ; désaffiliation sociale (x2) ; sociabilité ; risques sociaux ; polarisation ;
polyvalence ; intégration incertaine (x2) ; précarisation.
Comme le montre le sociologue Serge PAUGAM, le lien qui attache l’individu au monde du travail,
depuis la révolution industrielle, est une composante essentielle des liens qui attachent l’individu à la
société. En effet, parce qu’il donne un ………………………………………………. à l’individu, parce qu’il est un
support essentiel de ………………………………………………., parce qu’il donne accès à une série de
protections contre certains ………………………………………………. et parce qu’il assure un revenu d’activité,
le travail constitue un vecteur essentiel d’intégration sociale. Mais ce lien de participation organique
est aujourd’hui fragilisé et cette fragilisation est notamment induite par le maintien du
………………………………………………. à un niveau élevé depuis des décennies en France. A cet égard, le
sociologue Robert CASTEL montre à partir de sa modélisation de la ……………………………………………….
comment l’absence prolongée d’emploi fragilise les individus. En particulier, si la perte des
protections liées à l’emploi se cumule à une fragilisation d’autres liens sociaux et donc à une
disparition notamment des protections apportées par la famille, les amis ou le voisinage, la
………………………………………………. se produit. Il reste que l’affaiblissement de la capacité à intégrer du
travail n’est pas seulement imputable au phénomène de ………………………………………………. élevé. En
effet, comme le souligne Serge PAUGAM, elle existe au sein même de la population de salariés en
activité qui peuvent souffrir d’une insatisfaction au travail et/ou d’une instabilité de l’emploi. Ainsi,
alors que l’………………………………………………. sa caractérise par la stabilité de l’emploi et la satisfaction
au travail, l’………………………………………………. se caractérise par l’impossibilité pour les salariés de
stabiliser leur situation professionnelle, l’………………………………………………. concerne des salariés
souffrant d’une faible considération pour ce qu’ils sont et ce qu’ils apportent à l’entreprise et enfin,
l’………………………………………………. touche des salariés cumulant insatisfaction au travail et situation
professionnelle instable.
A cela s’ajoute, pour ces actifs occupés occupant des postes caractéristiques des modèles post-
tayloriens du travail, une réduction de la ………………………………………………. . Le développement de la
flexibilité externe (……………………………………………….) et interne (……………………………………………….)
conduit les salariés à ne plus être regroupés au sein d’équipes pérennes ou même d’unités de
production où ils pouvaient se côtoyer de façon régulière. Ces mutations de l’emploi caractérisées par
un processus de ………………………………………………. participent à un phénomène de
………………………………………………. progressive de la qualité des emplois. On retrouve d’un côté, les actifs
occupant un emploi typique et donc stable qui continuent de bénéficier pleinement des vertus
intégratrices du travail. Ces individus se situent ainsi dans une situation
d’………………………………………………. ou, à tout le moins, d’………………………………………………. au sens de
PAUGAM. Ils demeurent la part majoritaire de la population active occupée aujourd’hui. Mais, la «
déstabilisation des stables » à l’oeuvre depuis 1980 concourt à la constitution d’un second pôle
d’actifs alternant des périodes d’emplois atypiques et des sessions de chômage. Pour ces individus, le
travail perd de sa force intégratrice en ce sens qu’il ne peut offrir qu’une
………………………………………………. ou ………………………………………………. au sens de PAUGAM.
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VOCABULAIRE
 Travail : Activité humaine conduisant à l’élaboration ou à l’entretien de biens et de services.

 Emploi : Fraction du travail qui perçoit une rémunération et qui s’inscrit dans un cadre social et
juridique, que ce soit un emploi salarié impliquant un lien de subordination ou un emploi non
salarié (indépendant).

 Statut de l’emploi : Condition juridique dans laquelle s’exerce l’activité professionnelle (emploi
salarié ou emploi non salarié).

 Qualité des emplois : Capacité des emplois à assurer le bien-être des individus. Elle dépend des
conditions de travail, du niveau de salaire, du degré de sécurité économique que l’emploi apporte,
des perspectives de formation et carrière ainsi que de la variété des tâches.

 Organisation du travail : Façon de répartir et de coordonner les tâches entre les différents
participants au processus de production dans le but d’améliorer l'efficacité de la production dans
les organisations productives.

 Division horizontale du travail : Décomposition du processus de production en une succession de


tâches élémentaires et répétitives.

 Division verticale du travail : Séparation radicale entre le travail manuel d’exécution et le travail
intellectuel de conception créant ainsi une relation hiérarchique très stricte.

 Taylorisme : Mode d’organisation du travail dans lequel le processus de production est


décomposé en une succession de tâches élémentaires et répétitives (division horizontale du
travail) que les travailleurs doivent exécuter en suivant les prescriptions des ingénieurs chargés de
définir la meilleure façon de produire (division verticale du travail).

 Fordisme : Mode d’organisation du travail reprenant le principe de la double division du travail du


taylorisme et le complétant avec le travail à la chaîne, la standardisation des produits et une
rémunération du travail d’exécution relativement plus élevée que celle en vigueur sur le marché
du travail.

 Modèles tayloriens d’organisation du travail : Modes d’organisation du travail s’inspirant des


principes du taylorisme donc incluant le fordisme.

 Modèles post-tayloriens d’organisation du travail : Modes d’organisation du travail cherchant à


associer davantage les travailleurs à la prise de certaines décisions, à donner plus de flexibilité au
travail grâce à la polyvalence des travailleurs et au recours à la sous-traitance afin de faciliter la
recomposition des tâches et la production en juste-à-temps.

 Flexibilité du travail : Situation dans laquelle la quantité de travail, son organisation et sa


rémunération s’ajustent en permanence à la conjoncture économique.

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 Recomposition des tâches : Réunion de tâches d’exécution effectuées initialement par des
travailleurs différents et/ou enrichissement des tâches confiées aux travailleurs de façon à les
rendre plus intéressantes à réaliser.

 Sous-traitance : Opération par laquelle une entreprise (le donneur d’ordre) confie à une autre (le
preneur d’ordre), l’exécution pour son compte de tâches qui ressortent de son activité normale.

 Management participatif : Type de management visant à associer les travailleurs à la prise de


certaines décisions et à la résolution de certains problèmes rencontrées par l’entreprise. Le
management participatif alors par l’apparition de cercles de qualité, de groupes semi-autonomes,
mais aussi le fonctionnement par projet ou mission.

 Numérique : Ensemble des technologies liées à l’informatique, aux télécommunications et à


Internet.

 Télétravail : Forme d’organisation du travail ayant recours à des technologies de l’information et


de la communication (TIC) pour effectuer, hors des locaux de l’employeur, de façon régulière, le
travail qui aurait pu être réalisé sur le poste de travail habituel.

 Relation d’emploi : Lien légal entre les employeurs et les salariés. Elle existe quand une personne
exerce une activité ou fournit des services sous certaines conditions et en échange d’une
rémunération.

 Polarisation de l’emploi : Phénomène de diminution des emplois associés à des niveaux de


qualifications intermédiaires allant de pair avec une augmentation du poids des emplois à haut et
à bas niveaux de qualification dans l’emploi total.

 Précarisation de l’emploi : Processus de transformation de l’emploi produisant des situations de


vulnérabilité et d’incertitude face à l’avenir pour les individus.

 Polarisation de la qualité des emplois : Processus de segmentation des emplois dans leur capacité
à assurer le bien-être des individus qui les occupent.

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Préparer son BAC SES : Sujets types
Epreuve composée
Mobilisation de connaissances :
- A l’aide de deux exemples, montrez que la frontière entre emploi, chômage et inactivité est
incertaine.
- Présentez deux critères déterminant la qualité des emplois.
- Montrez comment les modèles tayloriens d’organisation du travail permettent d’augmenter la
productivité du travail.
- Présentez les effets négatifs des modèles tayloriens d’organisation du travail sur les conditions de
travail
- Présentez deux caractéristiques des modèles post-tayloriens d’organisation du travail.
- Montrez que les modèles post-tayloriens d’organisation du travail ont des effets positifs et négatifs
sur les conditions de travail.
- Montrez à l’aide d’un exemple que le numérique brouille les frontières du travail.
- Montrez à l’aide d’un exemple que le numérique transforme les relations d’emploi.
- Montrez que le numérique peut accroître la polarisation des emplois.
- Présentez trois arguments montrant que le travail est un facteur essentiel d’intégration sociale.
- Montrez comment la précarisation de l’emploi fragilise l’intégration sociale par le travail.
- Expliquez pourquoi les évolutions de l’organisation du travail ont fragilisé l’intégration sociale par le
travail.
- Présentez une mutation du travail qui fragilise l’intégration par le travail.

Raisonnement s’appuyant sur un dossier documentaire :


- A l’aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous montrez que le numérique
transforme l’emploi.
- A l’aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous montrez que le numérique a des
effets complexes sur le travail et l’emploi.
- A l’aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous montrez que l’intégration par le
travail est affaiblie par certaines mutations du travail.
- A l’aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous montrez que certaines évolutions de
l’emploi peuvent affaiblir l’intégration par le travail.
- A l’aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous montrerez que l’évolution des formes
de l’organisation du travail a des effets contrastés sur les conditions de travail.

Dissertation
- Comment les mutations du travail rendent-elles plus floues les frontières du travail et de l’emploi ?
- Dans quelle mesure le travail est-il facteur d’intégration sociale ?
- L’évolution des formes de l’organisation du travail a-t-elle toujours des effets positifs sur les
conditions de travail ?

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