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SCIENCES ÉCONOMIQUES

CHAPITRE 2

Comment se forment les prix sur un marché ?

Introduction
Un marché est un lieu de rencontre de vendeurs – qui constituent l’offre – et d’acheteurs – qui
constituent la demande – dans le but de réaliser un échange. Les premiers ont pour objectif de
maximiser leurs profits et les seconds de maximiser leur utilité, c’est-à-dire la satisfaction de leurs
besoins (il y a besoin dès qu’il y a désir). Les intérêts des offreurs et ceux des demandeurs seraient donc
opposés. Nous abordons, dans ce chapitre, la pensée économique libérale qui considère que le marché
constitue un mécanisme régulant les échanges par l’intermédiaire des prix de façon optimale.
Une multitude de marchés

       

Marché
Ensemble des transactions d’achat (demande) et de vente (offre) sur un même produit, qui
contribuent à déterminer son prix

Sur chaque marché représenté par une image ci-dessus, respectivement le marché du travail (un rendez-
vous à pôle emploi), le marché du pétrole (extraction offshore de pétrole brut) et un marché de quartier,
identifiez les vendeurs (offreurs) et les acheteurs (demandeurs).

1. Qu’est-ce que la demande ?

A. Comment représenter la demande sur un marché ?


La demande correspond à la quantité que les agents économiques ont l’intention d’acheter à un
prix donné, et la courbe de demande (une droite par simplification théorique) est une représentation
graphique des variations de la demande (quantité demandée) en fonction des variations du prix.

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Document 1. La demande de cacao des industriels du chocolat
La quantité de cacao que les industriels du chocolat sont prêts à acheter dépend du prix. A différents
niveaux de prix correspondent des quantités différentes de cacao qu’ils sont prêts à acquérir. On peut
rassembler les données dans un tableau et les représenter graphiquement comme ci-dessous.

Prix en dollars Quantité de cacao


(par tonne) demandée (en tonnes)
3000 1500
2500 2000
2000 2500
1500 3000
1000 3500
500 4000

Prix
4500
4000
3500
3000
2500 Courbe de
2000 demande
1500
1000
500
0 Quanté

Activité 1a
Quel est l’impact de la variation du prix sur la demande ?
Prenez connaissance du document 1 ci-dessus qui réunit un texte, un tableau statistique et une
représentation graphique des données de ce tableau, et répondez à la question formulée par le titre de
cette activité en établissant le rapport qui existe entre le prix et la quantité demandée. Puis expliquez
cette relation en mobilisant vos connaissances du chapitre précédent.
Activité 1b
Comment représenter graphiquement la demande sur un marché ?
A partir de ce que vous avez constaté à l’activité précédente – à savoir qu’à un niveau de prix plus élevé
correspond une quantité demandée plus faible – répondez aux questions suivantes :
1. Si l’on représente graphiquement une courbe de demande d’un produit quelconque avec un prix P1 et
un prix P2 supérieur au prix P1 sur l’axe des ordonnées, prix auxquels correspondent respectivement
les quantités Q1 et Q2 sur l’axe des abscisses : la quantité Q2 sera-t-elle supérieure ou inférieure à la
quantité Q1 ?
2. Représentez graphiquement cette courbe de demande.
3. La courbe de demande d’un produit quelconque est-elle croissante ou décroissante en fonction des prix ?
4. En serait-il de même si ce n’était pas une entreprise qui achète des consommations intermédiaires,
mais des ménages qui consomment dans le but de maximiser leur utilité (cf. Introduction) ?

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B. D’autres facteurs font varier la demande
Document 2. Pourquoi la demande varie ?

L’expérience et l’analyse montrent que de nombreux facteurs interviennent dans les variations de la
demande.
Les principaux facteurs déterminants sont :
• L
 e revenu : si le prix de la place augmente de 10%, vous pourrez aller plus souvent au cinéma
seulement si votre argent de poche augmente de plus de 10%.
• L
 e prix des biens substituables : si le prix de l’eau gazeuse augmente, la demande d’eau plate va
augmenter.
• L
 e prix des biens complémentaires : si le prix des carburants augmente, la demande de voitures de
grosse cylindrée va diminuer.
• L
 ’évolution des préférences du consommateur : si les vacances vertes deviennent à la mode, la
demande de gîtes ruraux va augmenter.
• L
 es comportements de demande sont fréquemment affectés par les prévisions que font les agents.
Par exemple, la crise développe la crainte du chômage, les agents redoutent une diminution de leur
revenu et réduisent leur consommation à prix inchangés.
• L
 es facteurs naturels sont aussi très importants, notamment le climat, car de nombreux produits en
dépendent : vêtements, boissons, loisirs et tourisme, etc.
Magnard, 2010

A savoir

Biens substituables : biens pouvant être remplacés par d’autres biens pour satisfaire le même besoin
Biens complémentaires ; biens dont l’usage de l’un exige aussi l’usage de l’autre.

Activité 2
Les autres facteurs que le prix de la variation de la demande
1. Pour chacun des facteurs donnés, trouvez d’autres exemples en précisant comment est affectée la
demande.
2. On annonce la sortie d’un nouveau modèle de smart phone pour la fin de l’année. Le site du construc-
teur a été très visité par les consommateurs qui avaient un projet d’achat. Comment la demande de
téléphone sera-t-elle affectée dans les mois qui viennent ?
3. Montrez comment les prévisions météo peuvent affecter le tourisme.

Retenez
La demande est la quantité d’un produit que les agents économiques sont prêts à acheter à un prix
donné.
Le prix joue en effet un rôle central : la quantité demandée augmente lorsque le prix diminue (la quantité
demandée est négativement reliée au prix). La courbe de demande, qui est une représentation graphique
des variations de la demande (quantités demandées) en fonction des variations du prix, est décroissante.
D’autres facteurs font varier la demande : le revenu du consommateur, ses préférences, ses prévisions, le
prix des biens substituables et celui des biens complémentaires ainsi que les facteurs naturels comme le
climat.

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2. Qu’est-ce que l’offre ?

A. Comment représenter l’offre sur un marché ?


L’offre correspond à la quantité que les producteurs ont l’intention de vendre à un prix donné. La courbe
d’offre est une représentation graphique des variations de l’offre en fonction des variations du prix sur un
marché.
Document 3. L’offre des producteurs de cacao
La quantité de cacao que les producteurs sont disposés à produire et à vendre dépend du prix. A
différents niveaux de prix correspondent des quantités différentes de cacao offertes par les producteurs.
On peut les rassembler dans un tableau et les représenter graphiquement comme ci-dessous.

Prix en dollars Quantité de cacao


par tonne Offerte (en tonnes)
3000 4500
2500 4000
2000 3500
1500 3000
1000 2500
500 2000

Prix
3500
3000
2500
2000 Courbe
1500 d'offre

1000
500
0 Quanté de cacao
2000 2500 3000 3500 4000 4500

Dans l’examen des forces qui déterminent la courbe d’offre, le point fondamental qu’il convient de
saisir est que les producteurs offrent des marchandises pour faire un profit et non pour s’amuser
ou par charité. Par exemple, un fabricant de céréales offrira plus de flocons d’avoine à un prix plus
élevé parce qu’il sera rentable de le faire. Inversement, quand le prix des flocons d’avoine tombe en
dessous du coût de production, les fabricants de céréales passeront à d’autres activités. L’élément
essentiel sous-jacent à la courbe d’offre est le coût de production.
Paul Samuelson, William Nordhaus, Economie, Economica, 2015.

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Activité 3a
Quel est l’impact de la variation du prix sur l’offre ?
Prenez connaissance du document 3a ci-dessus qui réunit un texte, un tableau statistique et une
représentation graphique des données de ce tableau, et répondez à la question formulée par le titre de cette
activité en établissant le rapport qui existe entre le prix et la quantité offerte. Puis expliquez cette relation.
Activité 3b
Comment représenter graphiquement l’offre sur un marché ?
A partir de ce que vous avez constaté à l’activité précédente – à savoir qu’à un niveau de prix plus élevé
correspond une quantité offerte plus importante – répondez aux questions suivantes :
1. Si l’on représente graphiquement une courbe d’offre d’un produit quelconque avec un prix P1 et un prix
P2 supérieur au prix P1 sur l’axe des ordonnées auxquels correspondent respectivement les quantités
Q1 et Q2 sur l’axe des abscisses : la quantité Q2 sera-t-elle supérieure ou inférieure à la quantité Q1 ?
2. Représentez graphiquement cette courbe d’offre.
3. La courbe d’offre d’un produit quelconque est-elle croissante ou décroissante en fonction des prix ?

B. Les facteurs qui font varier l’offre


Document 4. Pourquoi l’offre varie ?

Les coûts de production sont principalement déterminés par les prix des moyens de production et les
progrès technologiques.
Les prix des moyens de production tels que la main d’œuvre, l’énergie ou les machines exercent de
toute évidence une influence très importante sur le coût associé à un niveau de production donné. […].
Avec la baisse du prix des ordinateurs au cours des trente dernières années, les entreprises ont de
plus en plus remplacé des technologies manuelles par des technologies informatiques, comme pour
la paye ou les opérations comptables.
Un déterminant non moins important des coûts de production est constitué par les progrès
technologiques diminuant la quantité de moyens de production nécessaire pour produire la même
quantité de produit.
Paul Samuelson, William Nordhaus, Economie, Economica, 2015.

Rappel

Les coûts de productions : pour produire, il faut mobiliser des facteurs de production que sont le
travail et le capital. Le coût total comprend les coûts fixes qui correspondent au capital fixe et les coûts
variables, c’est-à-dire qui dépendent de la quantité produite : le travail et le capital circulant (que l’on
appelle aussi consommations intermédiaires).
Le profit (ou bénéfice) : chiffre d’affaire (CA) – coûts de production

Activité 4
Les facteurs de variation de l’offre
1. L’offre va-t-elle augmenter ou diminuer si :
— Le prix des facteurs de production baisse
— Le progrès technique se développe
2. Qu’est-ce qui fait varier l’offre ?

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Les entreprises doivent aussi tenir compte de la demande et des comportements des entreprises
concurrentes, notamment des prix qu’elles pratiquent ; ces éléments sont développés dans la partie
suivante qui réunit la demande et l’offre sur un marché.
Retenir
L’offre est la quantité d’un produit que les producteurs sont prêts à produire à un prix donné.
Le prix joue un rôle central : la quantité offerte augmente lorsque le prix augmente (la quantité offerte
est positivement reliée au prix). La courbe d’offre, qui est une représentation graphique des variations de
l’offre (quantités offertes) en fonction des variations du prix, est croissante.

C. Comment schématiser le marché : représentation de l’offre


et de la demande sur un marché

1. Les offreurs ne peuvent imposer n’importe quel prix


Document 5. Une rencontre entre l’offre et la demande
Lorsque l’entreprise se retrouve d’une part face
à la concurrence d’autres entreprises, et d’autre Prix
part à une demande limitée des acheteurs, elle ne
P1
peut pas fixer ses prix librement : si son prix est
trop élevé, les clients se tournent vers d’autres
vendeurs ou refusent d’acheter. Se définit alors Offre
« un prix de marché », qui est à peu près le même (vendeurs)
partout.
Il est possible de représenter cette situation
P2
sur un graphique. Comme nous l’avons vu, il y
a d’autant plus de demande que le prix est bas. Demande
La courbe de demande est donc décroissante. (acheteurs)
Nous supposons que la courbe d’offre est
verticale : les entreprises, ayant produit, vendent Q1 Q2 Quantités
leur production, quel que soit le prix. Comme le
montre le graphique, elles ne peuvent pas écouler
toute leur production au prix P1 : elles ne vendent que Q1. Pour trouver des clients et vendre la quantité
Q2, il leur faut baisser leur prix jusqu’au niveau P2, qui s’impose à tous les vendeurs.

Activité 5
Les entreprises ne peuvent imposer n’importe quel prix : trois éléments à prendre en compte
Lisez et analysez le document 5 (texte et représentation graphique) ci-dessus afin d’identifier les
éléments que les entreprises doivent prendre en compte pour « fixer » le prix de leur produit.
Rédigez votre propre réponse en répondant aux questions suivantes :
1. Pourquoi le prix P1, d’abord décidé par le vendeur, n’est-il pas tenable ?
2. Quel est l’intérêt, pour le vendeur, de réduire son prix de vente ?
3. Pourquoi est-il inutile de réduire le prix au-dessous du prix P2 ?
4. Quels sont les éléments que les entreprises doivent prendre en compte pour « fixer » leur prix ?

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2. La loi de l’offre et de la demande : l’équilibre sur un marché
Document 6. offre, demande et prix Prix
Offre
Des économistes utilisent une représentation (vendeurs)
graphique très simplifiée d’un marché, dans
laquelle les courbes représentant l’offre et la
demande qui s’exprimeraient pour différents
niveaux de prix se coupent en un point appelé
« équilibre ». P E

Cette représentation repose sur trois hypothèses : Aux


deux hypothèses que nous avons vues - il existe une
courbe de demande, généralement décroissante et
une courbe d’offre généralement croissante - s’ajoute Demande
la troisième hypothèse qu’il existe un prix unique sur (acheteurs)
le marché correspondant à l’intersection des deux
courbes.
Q Quantités
Activité 6
La rencontre de l’offre et de la demande sur un marché
Lisez et analysez le document 6 (texte et représentation graphique) ci-dessus afin d’identifier
graphiquement le point d’équilibre et de comprendre ce qu’est le prix d’équilibre sur un marché.
Rédigez votre propre réponse en répondant aux questions suivantes :
1. Que représente le point E ?
2. Pourquoi est-il difficile de vendre plus cher ? Et non pertinent de vendre moins cher ?

Exercice n°1 Le marché du cacao


1. Reprenez l’activité 1a et l’activité 3a et représentez graphiquement le marché du cacao, c’est-à-dire
la courbe de demande et la courbe d’offre sur un même graphique avec toujours les quantités en
abscisse et les prix en ordonnée.
2. Déterminez la quantité d’équilibre et le prix d’équilibre et sur ce marché.
3. Pourquoi, à qualité donnée, y a-t-il un prix unique sur un marché puisqu’il existe des acheteurs et des
vendeurs prêts à payer ou à vendre plus ou moins cher ?

3. Comment évoluent les prix sur un marché ?


A partir des connaissances acquises dans les parties précédentes, complétez le schéma suivant avec les
mots augmente ou diminue

L’offre------------
Demande Prix--------- Demande =
> Offre Offre
La demande----------

Demande < L’offre ----------


Offre Prix--------- Demande =
Offre
La demande ----------

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Document 7. Comment évoluent les prix sur le marché ?
L’offre ou la demande d’un produit sont affectées par divers événements : diminution ou augmentation
des revenus, accidents climatiques, création/suppression d’une taxe en faveur des acheteurs ou des
vendeurs, subvention versée par l’Etat etc.
Ces modifications de l’offre et de la demande se répercutent sur le prix du produit. Pour analyser ces
modifications, trois questions sont à poser :
— Quelle courbe est affectée par l’événement : l’offre ou la demande ?
— Dans quel sens : diminution ou augmentation ?
— Comment l’équilibre est-il modifié : le prix / la quantité augmente / diminue ?

Schéma 1 Schéma 2
P P

B2
A2 A
B1

A1

Q Q

Activité 7
Le processus d’ajustement vers un nouveau prix d’équilibre
Lisez et analysez le document 7 (texte et représentation graphique) ci-dessus afin d’identifier le
processus d’ajustement vers un nouveau prix d’équilibre sur un marché.
Rédigez votre propre réponse en répondant aux questions suivantes :
1. Appliquez aux cas suivants les trois questions à se poser :
— é
 vénement n°1 : une tempête tropicale détruit une partie des plantations de bananiers en Amérique
centrale. Quelle conséquence pour le marché de la banane ?
— é
 vénement n°2 : les jeunes filles sont de plus en plus intéressées par le football. Quelle conséquence
pour le marché des abonnements au stade ?
2. Associez chaque graphique (schéma1 et schéma 2) à l’événement correspondant.

Exercice n°2
Le marché du pétrole
Imaginons que contrairement aux prévisions, l’hiver soit particulièrement froid dans l’hémisphère nord,
où est concentrée la majorité de la population mondiale. De ce fait, les besoins de chauffage augmentent.
Les choses ne s’arrêtent pas là : en réponse à la hausse du prix, par exemple, la prospection pétrolière
peut être relancée (l’exploitation dans des régions difficiles donc plus coûteuse, comme les grands fonds
marins ou les pôles, ou encore l’exploitation du pétrole extra lourd (plus lourd que l’eau) par exemple de
la vallée de l’Orénoque du Venezuela, deviennent rentables) de sorte que l’offre finira par augmenter (si
les réserves pétrolières ne sont pas épuisées), ce qui ferait baisser les prix.

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http://www.capital.fr, 03/10/2017

Questions
1. Réalisez la représentation graphique correspondant à la situation, avec le point d’équilibre E1(P1,Q1)
et le nouveau point d’équilibre E2(P2,Q2) suite à l’événement décrit (hiver particulièrement froid), pour
vous aider à répondre à la question suivante : quelles sont les conséquences de cet événement sur le
marché pétrolier (posez-vous les trois questions du document 7)?
2. Que ce serait-il passé si la courbe d’offre avait été verticale ? Quelle en serait la signification ?
3. Que ce serait-il passé si la courbe d’offre avait été horizontale ? Quelle en serait la signification ?
4. Relevez un événement qui a modifié le prix d’équilibre sur le marché du pétrole et posez-vous les trois
questions du document 7 (série chronologique représentée graphiquement par une courbe ; cf. si
besoin la fiche méthode Lecture des représentations graphiques les plus courantes).
5. Quelles réserves de pétrole sont rentables pour un prix du baril de 25 dollars ? (diagramme en
bâtons ; cf. si besoin la fiche méthode Lecture des représentations graphiques les plus courantes).
6. Si la hausse de la demande fait monter le prix du pétrole, comment l’offre va-t-elle évoluer ?
Exercice n°3
La taxe carbone
Lisez attentivement les documents a et b ci-dessous, le premier vous permettant de savoir ce qu’est la
taxe carbone et le second vous présentant une partie des critiques à l’encontre de cette taxe (l’intégralité
de l’article est disponible dans la rubrique « Pour aller plus loin » de votre dispositif de formation).
Maintenant que vous savez « de quoi on parle », rendez-vous sur le site de France culture et écoutez en
« podcast » les émissions radiophoniques identifiées ci-dessous. Relisez les documents si besoin pour
éclairer ce que vous n’auriez pas bien compris de ces chroniques synthétiques de 3 et 4 minutes. Enfin,
réécoutez les émissions en prenant des notes qui vous permettront de produire une fiche « taxe carbone,
fonctionnement et enjeux ».
La diffusion en direct du 13/11/2018 de l’émission Les nouvelles de l’éco par Arjuna Andrade dont le titre
est le suivant : Injuste, forcément injuste taxe carbone ?
La diffusion en direct du 16/03/2019 de l’émission La bulle économique par Anne-laure Chouin dont le
titre est le suivant : Taxe carbone : les raisons d’un échec.

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Document a. La taxe carbone, de quoi parle-t-on ?

Face au mouvement des « gilets jaunes », le gouvernement a annoncé, mercredi 5 décembre, une
annulation de la hausse de la taxe carbone, qui aurait dû passer de 44,60 à 55 euros la tonne au
1er janvier.
Cette « composante carbone », qui renchérit le coût du carburant et du gaz, a été instaurée en 2014,
et devait augmenter tous les ans. Mais cette taxe, qui a peiné à se mettre en place, est impopulaire et
critiquée même parmi les défenseurs de l’environnement.
D’où vient cette idée de taxe carbone ?
L’idée de « donner un prix au carbone » pour limiter les émissions de gaz responsables du
changement climatique a été évoquée lors du protocole de Kyoto en 1997. La « taxe carbone » sur les
énergies fossiles, comme le gaz, le pétrole et leurs dérivés, qui émettent beaucoup de CO2, faisait
partie du pacte écologique que Nicolas Hulot avait fait signer aux candidats à la présidentielle en 2007.
Il s’agissait de créer une contribution d’un montant d’abord symbolique, qui augmenterait
progressivement et régulièrement pour inciter les particuliers et entreprises le temps de s’adapter
(par exemple en changeant de voiture, en isolant les bâtiments, en s’équipant de machines moins
consommatrices…).
Depuis quand existe-t-elle en France ?
La taxe actuelle a vu le jour en 2014, après deux tentatives ratées […]
Comment fonctionne cette taxe ?
La composante carbone s’intègre aux taxes sur l’énergie, en fonction de la quantité de gaz à effet de
serre émise par un produit. Exprimée en euros par tonne de CO2, elle est payée par les particuliers
et les entreprises, et intégrée au prix final de l’essence, du gazole, du fioul ou du gaz naturel. Elle est
aussi soumise à la taxe sur la valeur ajoutée.
Le niveau de cette composante carbone augmente régulièrement pour donner un signal prix, incitant à
réduire l’usage des énergies fossiles. Elle est déjà passée de 7 euros en 2014 à 44,60 euros en 2018, et,
selon la loi de finances votée pour 2018, elle devait encore doubler d’ici à la fin du mandat d’Emmanuel
Macron, pour atteindre 100 euros en 2022.
Pourquoi le gouvernement change-t-il d’avis maintenant ?
Jusqu’en 2017, la taxe, qui a pourtant quadruplé, était passée relativement inaperçue, puisqu’elle avait
été compensée par une forte baisse des cours mondiaux du pétrole. Mais la remontée conjointe des
prix du baril et de la composante carbone (décidée par le gouvernement) ont rendu plus visible fin 2018
cette taxe auparavant assez indolore. L’augmentation annuelle de la taxe carbone se cumule avec des
rattrapages de fiscalité décidés pour faire converger l’essence et le diesel (+ 2,6 centimes par an), et
aboutit à une augmentation nette et rapide des taxes intérieures sur l’énergie.
L’ensemble de ces hausses a alimenté la colère des « gilets jaunes ». C’est pour apaiser le climat
social que le premier ministre a d’abord annoncé une suspension pour six mois de la hausse, puis une
annulation pour l’ensemble de l’année 2019. Cela ne signifie pas que la taxe carbone a été abandonnée
: elle restera simplement à son niveau de 2018, sans que l’on sache ce qu’il adviendra par la suite
(décalage d’un an, rattrapage en 2020…).

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A quoi sert l’argent ?
Au fil des augmentations, la composante carbone finit par générer des recettes fiscales d’un montant
élevé, passant de 0,3 milliard d’euros la première année à 3,8 milliards en 2016 et plus de 9 milliards
prévus en 2018. Selon la loi pour la transition énergétique, la hausse de la taxe carbone doit être
compensée « par un allégement de la fiscalité pesant sur d’autres produits, travaux ou revenus » :
en 2016, elle a ainsi financé le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) à hauteur de
3 milliards d’euros. Mais, dans les faits, les sommes perçues sont incluses dans la TICPE et les
autres taxes sur la consommation d’énergie, dont seulement une partie (environ 20 % en 2017) est
directement fléchée vers le compte d’affectation spécial « transition énergétique ».
Qui paie la taxe carbone ?
Le principe est de toucher l’ensemble des consommateurs d’énergie fossile, particuliers et
entreprises, pour les inciter à changer leurs pratiques. Mais dans les faits, il existe de nombreuses
exonérations ou remboursement de taxe carbone, comme le rappelle un récent rapport du think tank
Institute for Climate economics (I4CE).
Certains usages sont exonérés en vertu d’accords internationaux ou de directives européennes : le
transport aérien et maritime international, la fabrication de ciment ou de verre, les doubles usages
(combustible et carburant)… D’autres secteurs bénéficient d’exonérations ou de réductions décidées
au niveau français : les transports aériens et fluviaux nationaux, les taxis, le transport routier de
marchandises, les transports en commun, les usages agricoles, le gazole non routier dans le BTP… En
revanche, la taxe carbone ne s’applique pas aux industries les plus polluantes, qui sont soumises à un
autre mécanisme : le système européen de quotas d’émission ou « marché carbone ».
Quelle différence entre la taxe carbone et le marché carbone ?
Contrairement à la taxe carbone, qui est un dispositif fiscal, le système européen de droits d’émission,
mis en place depuis 2005, est incitatif et soumis aux lois du marché. Il concerne 11 000 installations
industrielles (centrales électriques, réseaux de chaleur, acier, ciment, raffinage, verre, papier, chimie…)
représentant 45 % des émissions de l’UE.
Elles reçoivent un quota d’émissions de CO2 correspondant en quelque sorte à un « droit à polluer » et
peuvent ensuite s’échanger ces quotas dans le cadre d’un marché carbone. Jusqu’en 2012, la quasi-
totalité était allouée gratuitement, puis une partie a été mise aux enchères.
Mais en raison de ces nombreux quotas gratuits, le coût du CO2 sur le marché carbone européen est
longtemps resté très bas, descendant même sous les 5 euros la tonne en 2017, avant de remonter
à près de 20 euros fin 2018. L’association Attac France, opposée au marché carbone, a récemment
dénoncé dans un communiqué l’« injustice » de ce double système où les ménages doivent payer
44,60 euros par tonne de CO2 émise alors que les entreprises polluantes bénéficient d’exonérations et
d’un cours du CO2 bien plus avantageux.
Et dans les autres pays, comment ça se passe ?
La France n’est pas la seule à donner un prix au carbone pour limiter les émissions polluantes. Selon
un rapport de l’I4CE, 46 pays – dont l’ensemble des Etats membres de l’UE – et 26 provinces – Québec,
Ontario, Alberta, Californie… – représentant 60 % du PIB mondial, ont mis en place une taxe carbone
ou un système d’échange de quotas d’émissions. Ces instruments de tarification du carbone ont
généré 26 milliards d’euros de revenus en 2017. Mais comme en France, l’usage n’est pas toujours
lié directement à l’écologie. Selon le décompte de l’I4CE, seuls 46 % des revenus sont affectés à des
projets « bas carbone », alors que 44 % sont reversés au budget général des Etats.
www.lemonde.fr, Comprendre la taxe carbone en huit questions, 11/04/2019.

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Document b. Du côté des ménages : la fiscalité carbone est inefficace et profondément inégalitaire
Remarque : la partie en italique du point 1 est très technique et l’outil « élasticité-prix » n’est pas au
programme de seconde: vous pouvez l’ignorer !

1. La taxe carbone est inefficace à court terme


Pris pour acquis dans le débat public, l’argument selon lequel l’augmentation des prix des carburants
permet de modifier le comportement des consommateurs, notamment à court-terme, et de faire
baisser la quantité de carburants consommée, est en réalité très discutable. Les études montrent en
effet que l’élasticité-prix* des ménages aux carburants à court terme est comprise entre -0,1 et -0,35.
Obtenir une baisse de consommation d’au moins 10 % – et potentiellement 35% – et ainsi avoir un effet
non nul en matière de lutte contre le réchauffement climatique nécessite donc un doublement des prix
des carburants à court terme. A ce stade, il est prévu de relever la taxe intérieure de consommation
sur les produits énergétiques (TICPE) de 0,23 €/L pour le gazole d’ici à 2022, et de 0,115€/L pour
le sans-plomb. Soit une hausse des prix comprise entre 7 et 15 % par rapport aux prix actuels : la
baisse prévisible de la consommation de carburants devrait donc se limiter à quelques pour cents. On
notera qu’entre 2007 et 2013, qui correspondent au maximum et au minimum de consommation de
carburants de ces dernières années, les prix des carburants ont augmenté d’environ 30% (avec une
forte baisse en 2009). Leur consommation n’a baissé, malgré la crise économique et la reprise atone
constatée, que de 7%, soit peu. A court-terme, le niveau de consommation des carburants est donc
peu sensible à l’évolution des prix. La consommation est très largement contrainte.
2. La taxe carbone est sans effet sur le mode de vie des plus riches
Bien que limité, l’impact de l’augmentation des prix sur la consommation est fortement différencié
en fonction des ménages : alors que les 10% des ménages les plus riches font trois fois plus de
kilomètres que les 10% les plus pauvres, on calcule qu’ils réduisent bien moins leur consommation,
en cas d’augmentation des prix, que les ménages pauvres. Le signal-prix fonctionne très mal pour les
ménages qui peuvent faire face à l’envolée des prix et leurs comportements sont très peu modifiés.
Puisque les plus riches réduisent bien moins leur consommation en cas de hausse des prix, leur mode
de vie extrêmement polluant est donc largement épargné par la fiscalité carbone.
3. La taxe carbone est injuste et inégalitaire
Les ménages pauvres motorisés, dotés en moyenne de véhicules plus anciens et moins efficaces,
sont les plus touchés par la taxe carbone : les 20% des ménages les plus pauvres consacrent plus de
7,5% de leur budget aux carburants, contre moins de 4% pour les 10 % les plus riches. C’est la double
peine pour les ménages les plus pauvres, plus exposés à l’augmentation des prix des carburants et
disposant de moins de moyens pour la supporter et/ou la possibilité de changer de véhicule ou de
chaudière.
4. Les primes à la conversion permettent-elles de résorber les inégalités ? De réduire les besoins en
carburants ?
Une prime à la conversion d’un maximum de 2000 euros pour tous les consommateurs existe déjà – et
une surprime jusqu’à 4000 euros a été annoncée pour 2019 pour les 20% les plus pauvres. Un million
de primes de conversion sont envisagées, soit à peine 11,5% des 8,7 millions de véhicules polluants
présents sur le territoire. Par ailleurs, les 250 000 primes de conversion déjà versées à ce jour ont
servi à acheter 93% de véhicules thermiques (dont 47 % de diesel) et 7% de véhicules hybrides ou
électriques. Soit autant de ménages qui restent fortement dépendants des carburants fossiles et de
leurs prix. Enfin, la surprime de 4000 euros concerne des personnes dont le niveau de vie est inférieur
à 12 550 euros par an, ayant donc une faible capacité à acheter des voitures hybrides ou électriques
dont le prix d’achat neuf peut atteindre deux fois leur revenu annuel.
[…]
* L’élasticité désigne la force de la relation entre deux variables économiques. En calculant une élasticité, on répond en fait à la question :
si une des deux variables observées évolue (hausse ou baisse), comment va évoluer la deuxième variable ?

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A retenir
L’élasticité-prix est un
Les entreprises doivent tenir compte de leurs coûts de production, mais outil économique qui
aussi de la demande exprimée par les acheteurs et des prix pratiqués par les permet de mesurer si la
entreprises concurrentes. demande ou l’offre d’un
La concurrence est présentée, dans ce modèle théorique néolibéral (ou bien est sensible aux
variations de son prix.
classique), comme une contrainte qui pousse les entreprises à réduire leurs
On répond ici à la ques-
prix au même niveau que leurs concurrentes pour maintenir leurs parts de tion : comment évoluent
marché ou pour accroître leurs ventes. l’offre ou la demande
Le marché constitue un mécanisme régulant les échanges par l’intermédiaire d’un produit lorsque son
des prix de façon optimale : Quand la quantité demandée est supérieure à la prix varie ? Si elles évo-
luent en sens inverse, le
quantité offerte le prix du produit augmente, ce qui fait baisser la demande
résultat est négatif. C’est
et augmenter l’offre jusqu’au nouveau prix d’équilibre auquel correspond
la cas de l’élasticité-prix
une même quantité demandée et offerte ; Inversement quand la quantité de la demande qui se
demandée est inférieure à la quantité offerte le prix diminue, ce qui fait rapproche de 0 lorsqu’il
augmenter la demande et diminuer l’offre jusqu’au nouveau prix d’équilibre s’agit de dépenses diffi-
auquel correspond une même quantité demandée et offerte. ciles à contourner comme
l’essence (quantité
demandée peu sensible à
l’augmentation des prix).
Maxime Combes, Dominique
Plihon, Aurélie Trouvé, Basculer
la fiscalité carbone sur les
entreprises les plus polluantes
et jusqu’ici largement exoné-
rées, France.attac.org,
novembre 2018.

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