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Histoire Épistémologie Langage

Singularité(s) de la sociolinguistique du domaine catalan. Un


repérage épistémologique
Henri Boyer

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Boyer Henri. Singularité(s) de la sociolinguistique du domaine catalan. Un repérage épistémologique. In: Histoire
Épistémologie Langage, tome 34, fascicule 2, 2012. La linguistique hispanique aujourd’hui. pp. 29-41;

doi : https://doi.org/10.3406/hel.2012.3249

https://www.persee.fr/doc/hel_0750-8069_2012_num_34_2_3249

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Résumé
La sociolinguistique élaborée en domaine catalan (Espagne) dans les années soixante du XXe
siècle, tout en s’inspirant des modélisations nord-américaines en matière de situation de bi/
plurilinguisme, a eu une place à part dans le champ disciplinaire en voie de constitution, non
seulement en contexte espagnol mais également en Europe. Outre certaines adaptations et même
créations conceptuelles, cette sociolinguistique s’est constituée en prise directe avec la réalité
socio-politique vécue par les fondateurs, chercheurs impliqués, au sein d’une configuration
linguistique conflictuelle. La normalisation officielle des usages du catalan, langue minorée jusqu’à
la fin de la dictature franquiste par l’hégémonie imposée du castillan n’aurait pas eu le succès
salué aujourd’hui par les spécialistes sans l’impact de cette sociolinguistique. Cependant celle-ci
fait face aujourd’hui à une nouvelle situation linguistique qui requiert sûrement une révision
épistémologique.

Abstract
The sociolinguistics developed in Catalan in the 1960’ s played a definite role in the emerging
disciplinary field, not only in Spain but also in Europe. In addition to a number of adaptations of
North-American trends in the analysis of the bi/ plurilingual environments, and the establishment of
several new concepts, what is particular to this brand of sociolinguistics is that it took shape from
the direct experience of its founders, researchers actively involved in the socio-political reality of
the period, characterized by a contentious linguistic configuration. The official standardization of
Catalan, which until the end of the Francoist dictatorship had been largely undervalued as a
consequence of the imposed hegemony of Castilian, would not have known the success it has
nowadays had it not been for the impact of this particular sociolinguistic school. Nonetheless, the
latter is now facing a new linguistic context that unquestionably requires an epistemological
revision.
Singularité(s) de la sociolinguistique du domaine catalan.
Un repérage épistémologique

Henri Boyer
Université Montpellier 3- Laboratoire DIPRALANG – EA 739

Résumé Abstract
La sociolinguistique élaborée en domaine The sociolinguistics developed in Catalan in the
catalan (Espagne) dans les années soixante du 1960’s played a definite role in the emerging
XXe siècle, tout en s’inspirant des modélisations disciplinary field, not only in Spain but also in
nord-américaines en matière de situation de bi/ Europe. In addition to a number of adaptations of
plurilinguisme, a eu une place à part dans le North-American trends in the analysis of the bi/
champ disciplinaire en voie de constitution, non plurilingual environments, and the establishment
seulement en contexte espagnol mais également of several new concepts, what is particular to this
en Europe. Outre certaines adaptations et même brand of sociolinguistics is that it took shape from
créations conceptuelles, cette sociolinguistique the direct experience of its founders, researchers
s’est constituée en prise directe avec la réalité actively involved in the socio-political reality of
socio-politique vécue par les fondateurs, chercheurs the period, characterized by a contentious linguistic
impliqués, au sein d’une configuration linguistique configuration. The official standardization of
conflictuelle. La normalisation officielle des Catalan, which until the end of the Francoist
usages du catalan, langue minorée jusqu’à la dictatorship had been largely undervalued as a
fin de la dictature franquiste par l’hégémonie consequence of the imposed hegemony of Castilian,
imposée du castillan n’aurait pas eu le succès salué would not have known the success it has nowadays
aujourd’hui par les spécialistes sans l’impact de had it not been for the impact of this particular
cette sociolinguistique. Cependant celle-ci fait face sociolinguistic school. Nonetheless, the latter is now
aujourd’hui à une nouvelle situation linguistique facing a new linguistic context that unquestionably
qui requiert sûrement une révision épistémologique. requires an epistemological revision.

Mots clefs Keywords


Sociolinguistique, catalan, diglossie, conflit Sociolinguistics, Catalan, diglossia, linguistic
linguistique, normalisation linguistique, politique conflict, linguistic normalization, linguistic policy,
linguistique, représentation representation

C’est peu dire que la sociolinguistique en Espagne a été et reste fascinée par la seule
(ou presque) littérature anglo-saxonne (nord-américaine pour être plus précis) des
divers sous-champs qui composent ce vaste champ (trans)disciplinaire (Boyer 2001)
de création somme toute récente. Et bien entendu, l’une des singularités de la
sociolinguistique du domaine catalan (désormais SDC) (essentiellement la Catalogne
proprement dite : le Principat et le Pays valencien), qui elle aussi a eu ses références
nord-américaines, le plus souvent critiques il est vrai, c’est d’être très largement

Histoire Épistémologie Langage 34/II (2012) p. 29-41 © SHESL


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ignorée de la sociolinguistique espagnole. Les synthèses produites en Espagne à


l’intention d’un public hispanophone en témoignent parfois spectaculairement (voir
par ex. Hernandez Campoy & Almeida 2005) ou plus discrètement, en citant de
manière cursive et sans réelle prise en compte deux ou trois auteurs catalans (voir par
ex. Serrano 2011)1. À cela on peut trouver bien des explications mais l’une des plus
convaincantes pourrait être de type culturel : la SDC a produit, très majoritairement
en catalan pour une communauté de langue catalane.
Cette sociolinguistique, mieux connue et appréciée ailleurs que dans l’État
espagnol présente d’autres singularités dont il va être question ici.
Cependant la première singularité est à n’en pas douter la personnalité
de ses pères fondateurs. L’Histoire en a semble-t-il retenu quatre (Leprêtre &
Bañeres 2002), dont deux Valenciens (Lluís V. Aracil et Rafael Ll. Ninyoles) et deux
Barcelonais (Antoni Badia i Margarit et Francesc Vallverdú) qui sont à l’origine
(avec d’autres moins célébrés) de la fondation d’un Collectif : le Grup Català de
Sociolingüística (1973) dont la première manifestation scientifique d’importance
a sûrement été la participation officielle au VIIIe Congrès Mondial de Sociologie
tenu à Toronto en 1974 (une session y était consacrée à la « Sociolinguistique
catalane » (Vallverdú 2011). Le Groupe (très élargi au fil des ans) prend en 2005
le nom d’Associació de Sociolingüistes de Llengua Catalana puis en 2008, en
passant dans le giron de l’Institut d’Estudis Catalans: Societat Catalana de
Sociolingüística (SOCS).
C’est dire si l’auto-perception d’être sinon une école mais à tout le moins
un collectif parfaitement identifiable, ayant pignon sur rue (la revue Treballs de
Sociolingüística Catalana en est devenue l’émanation) et se posant en interlocuteur
incontournable du mouvement associatif et des pouvoirs publics en matière de
gestion des langues en domaine catalan a été dès les débuts une préoccupation.
Si bien qu’on peut dire que l’essentiel de la tradition sociolinguistique catalane
coïncide avec l’histoire de ce collectif (Pradilla Cardona 2011). Il convient
d’observer que même si l’apport (strictement théorique) des fondateurs d’origine
valencienne a été, à n’en pas douter décisif, c’est au Principat et spécialement à
Barcelone que la notoriété du Collectif a prospéré et que son impact socio-politique
a été le plus évident.
Pour revenir sur l’identité des pères fondateurs de cette sociolinguistique
« périphérique », il faut reconnaître qu’elle n’est pas (du point de vue de leur
formation) orthodoxe : à l’exception du professeur Antoni Badia i Margarit, linguiste
et romaniste, deux autres (Lluís V. Aracil et Rafeal Ll. Ninyoles) sont à l’origine
juristes (avocats) et sociologues, le dernier (Francesc Vallverdú) étant lui aussi à
l’origine juriste (avocat) mais également éditeur (il a joué un rôle important au sein des
Edicions 62 en faveur de la publication de travaux de sociolinguistique et en catalan)
(Vallverdú 1980b, Leprêtre et Bañeres 2002). Certes par la suite les sociolinguistes
du domaine catalan auront de plus en plus des profils conformes aux modèles
étrangers, la sociolinguistique devenant du reste en Catalogne et en particulier au
sein des Universités barcelonaises une spécialité reconnue et recherchée.
Une autre singularité de cette SDC tient précisément à l’ancrage des fondateurs
dans la société civile, à leur implication dans le mouvement social et au fait que pour

1 Une remarquable exception cependant : García Marcos 1999.


Singularité(s) de la sociolinguistique du domaine catalan 31

eux la sociolinguistique est une arme au service de la défense et de la promotion


d’une identité collective menacée, et pour tout dire, d’une nation menacée.
Badia insistait précisément au VIIIe Congrès Mondial de Sociologie à Toronto
sur « l’inévitable tâche », sur la « tâche fondamentale » de la sociolinguistique
catalane imposée par le « contact [du catalan] avec l’ “autre langue” » (Badia 1977,
p. 26).2 Le même Badia citait ainsi Aracil : « Sans doute, le sens et la force de la
sociolinguistique catalane […] s’expliquent par le fait que notre travail scientifique
s’intègre dans un mouvement historique très vaste. » (Badia 1979, p. 20).
Dans les lignes qui suivent je reviendrai sur les singularités évoquées en
proposant un repérage, forcément éclectique, au sein de l’histoire de ce collectif,
de ses fondements et de son articulation avec le processus de transformation de la
société catalane dans l’Espagne post-franquiste et spécialement de la configuration
linguistique héritée de la dictature en indiquant quelques éléments de la dynamique
en cours de la production sociolinguistique du domaine catalan, essentiellement
pour ce qui concerne le Principat.

Fondements
Le cadre théorique et méthodologique catalan de traitement des situations de diglossie
construit par la SDC constitue une rupture, en même temps qu’une sorte de retour aux
sources.3 En effet, les pères fondateurs : Lluís V. Aracil, Rafeal L. Ninyoles, Antoni
M.ª Badia i Margarit, Francesc Vallverdú, proposent une analyse approfondie de la
configuration sociolinguistique que vit leur propre communauté, une analyse faisant
toute sa place aux idéologies, aux représentations, aux attitudes, aux préjugés (par
exemple Ninyoles 1971 et 1976, Aracil 1982 [1966]) qui sont partie prenante d’une
configuration linguistique donnée. La SDC considère que s’il y a contact inégalitaire
de langues dans un même espace sociétal, il y a forcément compétition, concurrence et
immanquablement conflit. Cette modélisation naît de l’analyse de situations concrètes
vécues en territoires catalanophones (singulièrement en pays valencien).
Ainsi la SDC dès son émergence se présente comme une sociolinguistique
critique (Boyer 1991) qui reçoit la modélisation sociolinguistique nord-américaine
(concernant en particulier la « diglossie » (Vallverdú 1980b) en la mettant en débat.
Par ailleurs pour cette sociolinguistique la situation vécue par les catalanophones
en Espagne est une situation de dominance (aux manifestations variables selon la
partie du domaine géolinguistique envisagée). Ainsi la diglossie analysée n’est ni
équilibrée ni stable : son moteur en est le conflit, conflit entre une langue dominante
et une langue dominée. La politique de l'État espagnol en Pays valencien et en
Catalogne proprement dite a conduit à une minoration, à une marginalisation du
catalan. Les sociolinguistes catalano-valenciens dénoncent la gestion franquiste des
langues d’Espagne, discriminante au profit du seul castillan, et entrent en résistance
contre l’entreprise de substitution linguistique : ils se veulent les instigateurs d’une

2 C’est moi qui traduis : il en est de même, pour l’ensemble de l’article, des extraits cités de
textes originellement écrits en catalan.
3 Concernant l’aventure épistémologique du concept de « diglossie » dont l’helléniste
Jean Psichari est le vrai promoteur, voir par exemple Kremnitz 1981, Jardel 1982, Boyer 1986.
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reconquête sociolinguistique collective, l’implication du sociolinguiste est le crédo


de la SDC naissante (Badia i Margarit 1977).
Vallverdú, citant son collègue Badia i Margarit, pour qui « la sociolinguistique
catalane se sent engagée avec le peuple, et de son côté, le peuple catalan soutient
la sociolinguistique » (Badia i Margarit 1976, cité par Vallverdú 1980a, p. 639),
considère qu’il s’agit ni plus ni moins de la « vieille question de la neutralité
scientifique » (je traduis). Et il n’hésite pas à convoquer la sociolinguistique nord-
américaine pour en observer les « conditionnements » : l’intérêt des chercheurs
en sociolinguistique pour les problèmes des Noirs et autres minorités n’est pas
neutre. Ce n’est pas un hasard si certaines des recherches en question ont été
financées institutionnellement. Et ce n’est donc pas surprenant si « les objectifs de
la sociolinguistique s’adaptent de manière aussi diverse aux intérêts des différents
pays » (Vallverdú 1980a, p. 640). Vallverdú souligne cependant cette singularité
de la sociolinguistique catalane : il s’agit d’une sociolinguistique qui « dès ses
origines est marquée par [le] caractère contre-institutionnel. Cette position, disons
protestataire, « engagée avec le peuple » selon les termes de Badia, conditionne
évidemment la recherche de nos sociolinguistes » (Vallverdú 1980a, p. 641 ; je
traduis). C’est dire que pour cet observateur-acteur de premier plan l’implication
de la SDC va de pair avec son caractère contre-institutionnel4.
Pour Aracil, en particulier, les discours autorisés en faveur du bilinguisme
sociétal sont trompeurs car ils occultent la situation de conflit : habité par la
dominance d’une langue sur une autre, le bilinguisme est inévitablement inégalitaire
et il a toutes les chances d’être l’antichambre d’un monolinguisme en faveur de la
seule langue dominante. Ainsi, s’il y a polarisation diglossique il y a nécessairement
conflit (Aracil 1982 [1965], Ninyoles 1969) et s’il y a conflit il y a dilemme : ou bien
la langue dominante poursuit sa domination et dans ce cas elle se substituera plus
ou moins lentement mais sûrement à la langue dominée ou bien la communauté
ayant en usage la langue dominée va résister à la dynamique de subordination et de
substitution et lutter (par l’action collective des usagers mais grâce éventuellement à
une intervention institutionnelle) pour un développement normal des usages sociaux
de la langue dominée. Il s’agit de promouvoir la normalisation, concept-clé de
l’édifice théorique en voie de construction (Aracil 1982 [1965]) : on peut dire qu’il
s’agit là d’un apport essentiel dans le champ de la sociolinguistique appliquée : le
domaine de la gestion des langues. Pour Aracil la normalisation :
« […] consiste surtout dans l’élaboration et la mise en vigueur de systèmes de
normes d’usage linguistique. Et cela suppose nécessairement que la normalisation
est toujours consciente. En réalité, du moment qu’elle est prospective par
définition, elle est aussi prévoyante. Elle implique, en effet, non seulement une
attitude favorable envers la langue qu’il s’agit de normaliser, mais aussi [...] un
espoir et une confiance dans l’efficacité de l’action sociale [...] Une véritable
normalisation ne saurait se borner aux aspects « purement » linguistiques. Elle
doit envisager en même temps beaucoup de facteurs clairement « sociaux »,
voire essentiellement politiques. » (Aracil, 1982 [1965], p. 32-33)

4 Mais Vallverdú subodorait avec raison déjà en ces années de début de reconquête
l’« institutionnalisation » à venir de la sociolinguistique que la politique linguistique de la
Généralité (Gouvernement autonome) restaurée a sûrement tendu à opérer dès le milieu des
années quatre-vingts.
Singularité(s) de la sociolinguistique du domaine catalan 33

Cependant pour que la langue dominée soit normalisée, pour qu’elle soit une
langue de plein exercice, il faut au préalable qu’elle ait été normativisée, c’est-à-
dire que les membres de la communauté aient accepté le choix d’un standard, une
codification, qui permettent à cette langue d’être écrite, enseignée et d´être utilisée
dans tous les compartiments de la vie publique (l’administration, les médias…).
Sans normativisation il n’y a pas de normalisation possible.)
Et l’un des apports majeurs de cette modélisation, c’est d’avoir insisté sur
l’importance des mythes, préjugés, idéologies…, c’est-à-dire du paradigme
représentationnel (cher à la psychologie sociale ainsi qu’à une certaine sociologie)
constitutif de ce qu’on peut appeler l’imaginaire communautaire (Boyer 2003).
Ainsi, elle fait toute sa place à une attitude comme l’« auto-odi » (littéralement la
haine de soi, qu’on peut préférer désigner par auto-dénigrement), déclenché par
une idéologie diglossique et donc des représentations stigmatisantes de la langue
dominée qui consistent à faire accepter par les dominés l’idée que leur langue est
inférieure, qu’elle n’a aucune utilité sociale, qu’il faut l’abandonner : pour ne plus
être un citoyen de seconde zone, il faut parler la langue dominante. Par ailleurs
Aracil dénonce on l’a vu le « mythe bilinguiste » car le bilinguisme inégalitaire
d’aujourd’hui annonce sûrement le monolinguisme de demain.

Question de territoire
Au-delà de la diversité des positionnements identitaires-nationalistes et des projets
quant à l’évolution souhaitable de l’État espagnol, se pose depuis longtemps en
domaine catalan la question de l’espace géolinguistique identifié comme national.
Et à l’instar de ce qui a pu être observé pour d’autres nationalismes linguistiques,
(Boyer 2008) on doit parler de pan-catalanisme à propos de la prétention d’une
tendance importante du nationalisme linguistique catalan, d’étendre, sous
la dénomination de « Pays Catalans » (Països Catalans) la nation catalane à
l’ensemble des pays historiquement de langue catalane, où du reste l’usage social
du catalan est aujourd’hui d’importance variable (outre la Catalogne proprement
dite (le « Principat »), les Iles Baléares, le Pays Valencien, le Roussillon, l’Andorre,
la Frange orientale de l’Aragon et la ville sarde d’Alghero).5
Et il convient d’observer que les (socio)linguistes (qui pour la plupart
ont joué et continuent de jouer un rôle de premier plan dans la construction et
la consolidation du nationalisme catalan) identifient en général (avec d’autres

5 Cet expansionnisme ne fait évidemment pas l’unanimité, tout particulièrement dans certains
des territoires concernés. Des phénomènes de rejet peuvent ainsi être observés, en particulier
sous la forme de conflits glossonymiques, comme dans la Communauté Valencienne où
« valencien » (« valencià ») s’oppose à « catalan » (« català »). Bien qu’il s’agisse, d’un
strict point de vue linguistique, de la même langue, c’est le nom de « valencien « qui a été
retenu pour désigner officiellement la langue propre de la Communauté (voir Martin dans
Boyer et Lagarde 2002, p. 123-126). Dans la Communauté des Îles Baléares on a même
pu observer l’apparition d’un micro-nationalisme linguistique (très minoritaire), refusant
la dénomination, officielle dans cette Communauté, de « catalan » au profit de « langue
baléare » (« sa llengo balear ») (voir Sintas 2000).
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militants nationalistes) la nation catalane avec les « Països Catalans.6 » (Voir par
exemple Pradilla Cardona éd. 1999). Il en est ainsi, par exemple, pour Modest Prats,
universitaire, spécialiste de l’histoire de la langue, qui déclarait aux Deuxièmes
Journées consacrées au nationalisme catalan à la fin du XXe siècle :
« Nous, nous savons que la connexion langue catalane et nation catalane (il est
clair que je pense aux Pays Catalans) est un élément indispensable de notre
projet [nationaliste]. » (Prats 1989, p. 89 ; c’est moi qui souligne).

Lors des mêmes Journées, on pouvait retrouver chez Aina Moll (linguiste
également et qui a occupé par ailleurs une position centrale en matière de politique
linguistique en faveur du catalan, d’abord comme Directrice Générale de Politique
Linguistique au sein du gouvernement de la Catalogne, ensuite comme Directrice de
la Campagne de Normalisation Linguistique aux Îles Baléares), un positionnement
semblable : après avoir rappelé que « le principal trait distinctif de la nation catalane
c’est la langue » (pour elle l’un des éléments majeurs du consensus au sein du
nationalisme catalan) (Moll 1989, p. 99), elle considère l’Espagne comme « un
État plurinational, dans lequel la nation catalane est constituée de Communautés
Autonomes qui doivent établir entre elles les liens nécessaires pour sauvegarder
le patrimoine culturel qui leur est commun » (Moll 1989, p. 101), tout en refusant
clairement (ce qui atténue considérablement il est vrai la portée politique d’une
telle position pan-catalaniste) l’option indépendantiste.

Un impact socio-politique flagrant


La Catalogne (Principat), plus que tout autre territoire de langue catalane,
offre un exemple particulièrement intéressant d’articulation entre une théorie
sociolinguistique élaborée en relation avec une résistance collective et la réalisation
officielle d’une politique linguistique (Boyer 1987). Cette Communauté Autonome
n’est pas seulement, depuis le début des années quatre-vingts, la locomotive des
reconquêtes sociolinguistiques pour les langues d’Espagne autres que le castillan
(basque, galicien) : elle est devenue un modèle en matière glottopolitique au plan
international. Dans sa confrontation de trois des entreprises contemporaines
d’inversion d’une substitution linguistique, Joshua A. Fishman (1993), tout en
considérant que l’objectif d’une pleine normalisation sera plus long à atteindre que
pour l’hébreu en Israël ou le français au Québec, salue la restauration en Catalogne
du catalan comme langue de communication de plein exercice d’une société
moderne, tant sur le plan fonctionnel que sur le plan symbolique, une restauration
par ailleurs consensuelle (Fishman 1993). Cette reconnaissance est partagée par
la communauté scientifique des sociolinguistes qui prennent toute la mesure du
chemin parcouru au Principat en deux décennies de normalisation linguistique
officielle.

6 Il suffit pour s’en convaincre de prendre connaissance des communications présentées au Deuxième
Congrès International de la Langue Catalane (qui s’est déroulé en plusieurs lieux en 1986) qui
embrassait l’ensemble des Pays Catalans (voir par exemple : Second Congrés Internacional de la
llengua catalana III, Area 2, Sociologia de la llengua, Diputació de Girona, Girona, 1991)
Singularité(s) de la sociolinguistique du domaine catalan 35

Car en vingt ans, la Catalogne et sa capitale, Barcelone, ont vécu une


authentique métamorphose linguistique particulièrement remarquable dans
le paysage urbain. Malgré les détracteurs de tous poils (catalanistes radicaux
tenants d’un monolinguisme rigide, nostalgiques de l’hégémonie du castillan…),
la politique linguistique de la Communauté Autonome de Catalogne a servi de
référence institutionnelle aussi bien pour la Galice que pour le Pays Basque (même
si les mises en œuvre et les résultats sont très différents) et de moteur, selon des
modalités différentes, pour les autres aires catalanophones d’Espagne (Boyer
&Lagarde dir. 2002).
Et il est important de souligner que la normalisation linguistique au Principat s’est
développée selon les deux axes solidaires de tout « marché linguistique » : celui des
usages et celui des représentations et en mettant tout en œuvre institutionnellement
(de la part du Gouvernement Autonome (la Generalitat) pour que le dispositif (les
structures appropriées) et les dispositions (législatives, réglementaires) soient à la
hauteur du défi à relever, compte tenu de la situation héritée, largement défavorable à
la langue catalane. On peut observer à cet égard que le dispositif de base (Direction
Générale de Politique Linguistique puis Secrétariat de Politique Linguistique) a été
renforcé par la mise en place d’autres institutions et d’autres services susceptibles de
toujours mieux articuler les objectifs glottopolitiques du Gouvernement autonome et
les réalités du terrain (de la commune, du quartier, de l’entreprise, du syndicat…).
Ainsi la notion de normalisation, issue, on l’a vu, de la modélisation théorique
édifiée in situ par la SDC, a été reprise très officiellement par la Generalitat comme
objectif politique. Certes les institutions spécifiques créées pour mettre en œuvre la
politique linguistique pas plus que la « Loi de normalisation » votée par le Parlement
catalan en 1983 ne garantissent l’avenir de la « langue propre de la Catalogne ».
Cependant on peut considérer que la déstabilisation de la polarité diglossique héritée
du franquisme est bien engagée : l’inversion de légitimité sur le marché linguistique
a du reste produit tout au long d’un processus commencé au début des années quatre-
vingts des réactions d’hostilité variées mais cependant toujours minoritaires.

Un interdiscours épilinguistique sous tension


Du reste, la vie politique catalane est régulièrement saisie de la question
linguistique (les médias en témoignent largement) : il est question de « bataille de
la langue « (Pujades 1988) ou, comme l’écrit le journaliste Eduard Voltas, de «
guerre de la langue « (Voltas 1996), dans un ouvrage qui présente un réquisitoire
documenté contre les résistances et prises de position hostiles à telle ou telle
phase de la normalisation linguistique en faveur du catalan conduite par le
gouvernement autonome, singulièrement entre 1993 et 1996, à propos de la mise
en oeuvre généralisée de l’immersion linguistique dans les écoles de Catalogne7
(Voltas 1996). Les polémiques concernant la/les langues en usage en Catalogne
(catalan, castillan), qui à vrai dire ne concernent qu’une minorité d’acteurs mais dont

7 On sait que l’immersion linguistique est une stratégie d’apprentissage d’une langue non-
maternelle qui consiste à faire de cette langue la langue de l’enseignement (et non plus
simplement une langue enseignée).
36 Henri Boyer

l’impact, par médias interposés, sur l’état de l’imaginaire collectif est loin d’être
négligeable, sont un ferment décisif dans le processus régulier de proclamation
d’identité nationale autour de la seule « langue propre », le catalan, avec comme
fer de lance la SDC (Boyer 1991a, p. 233-237 ; Boyer & Lagarde dir. 2002).
Ainsi, concernant l’essentiel de la période post-franquiste écoulée, on peut
souscrire au point de vue de M.ª Teresa Cabré et Coloma Lleal, qui, après avoir
rappelé que « la langue est en Catalogne un élément fondamental du nationalisme,
[...] sans doute l’élément d’identification le plus important », observent, à travers
une lecture des premières polémiques à teneur épilinguistique dont il a été
question, que « la défense de la langue catalane, lorsqu’elle est attaquée par des
groupes anti-catalans, homogénéise la diversité idéologique des partis politiques
catalans « car » il y a, à ce moment-là, un seul ennemi. » (Cabré & Lleal 1986,
p. 141-142).8
Et dans une configuration de sortie de diglossie, où la normalisation linguistique
a été/est conduite avec fermeté, détermination et continuité, la société et la
communication sociale sont traversées en permanence par un interdiscours prolixe
et immanquablement polémique. C’est encore le cas en Catalogne autonome et ce le
sera encore pour longtemps. Cet interdiscours épilinguistique trouve dans la presse
et l’édition catalanes (en catalan comme en castillan) et jusqu’à la télévision (TV3,
la Chaîne de télévision de la Communauté en langue catalane singulièrement) un
accueil bienveillant. Y prennent toute leur part plusieurs types d’acteurs sociaux
(responsables et élus politiques, artistes, universitaires, membres de professions
libérales, journalistes bien sûr, syndicalistes… sans oublier les (socio)linguistes
et autres militants de la langue catalane). Car le vœu exprimé par l’un des pères
fondateurs de la SDC, Badia i Margarit, que chaque Catalan soit d’une certaine
façon une sociolinguistique, a bien quelque réalité.9 Il s’agit essentiellement d’un
discours clivé dont les stimuli (glottopolitiques) ne sont pas toujours d’origine
interne à la Catalogne, mais viennent aussi du Centre (de l’État).
On trouve ainsi dans cet interdiscours une insistance sur les séquelles du conflit
passé et sur le maintien d’une dominance dans le présent, mettant en évidence les
résistances à la normalisation officielle, parfois pour stimuler cette normalisation,
parfois même pour en dénoncer la tiédeur. À cet égard les études (enquêtes en
particulier) aussi bien que les ouvrages à teneur polémique ont fleuri au cours de
ces dernières années, sans interruption, certains pour étendre les considérations
(critiques) aux « Països Catalans » (voir par ex. Querol 2007, Joan 2007), mais pour
beaucoup d’autres circonscrits à la situation du Principat, pour dénoncer le fait que
malgré des raisons d’être satisfaits des résultats de la normalisation, la « langue
propre » n’a pas totalement neutralisé à son avantage la dynamique de substitution
héritée du franquisme. Parmi les observations particulièrement glosées par de
nombreux sociolinguistes et/ou militants de la langue catalane, il y a au tout premier
plan une réalité langagière qui semble quelque peu contrarier l’objectif d’une
priorité donnée au catalan en Catalogne y compris dans les échanges ordinaires

8 À la réserve près qu’il peut être excessif de parler de groupes « anti-catalans » car certains
(et non des moindres) de ces opposants à la politique linguistique de la Generalitat se
considéraient parfaitement Catalans, mais de langue espagnole ou bilingues.
9 Communication personnelle (1980).
Singularité(s) de la sociolinguistique du domaine catalan 37

et qui concerne les jeunes générations : un certain refus du monolinguisme et une


pratique aléatoire de l’alternance de langues, qui font semble-t-il les beaux jours
d’un bilinguisme assumé et déclaré, en progression importante. Tout sociolinguiste
un tant soit peu conséquent ne peut que se réjouir d’une telle évolution, souhaitée
du reste par certains promoteurs de la Politique Linguistique de la Generalitat à ses
débuts, comme Aina Moll (Boyer 1982), qui cependant ne manque pas de rappeler
aux bons souvenirs du même sociolinguiste le fameux mythe bilinguiste stigmatisé
par l’un des pères fondateurs (Aracil 1982 [1966] ; voir également Berrio 2008).
Et il n’est pas faux de considérer que sans la vigueur exemplaire de la politique
linguistique institutionnelle conduite ces trente dernières années, le bilinguisme ne
serait sûrement pas à l’ordre du jour en Catalogne : par contre le monolinguisme
en faveur du castillan y aurait sûrement progressé. Qu’adviendrait-il de ce
bilinguisme réjouissant si une telle politique linguistique venait à être abandonnée
ou même amputée d’une partie plus ou moins importante de son dispositif et de ses
dispositions réglementaires? La SDC aurait-elle le même impact qu’elle a eu durant
les trente années qui ont suivi la fin du franquisme?
Et du reste la SDC (tout particulièrement celle du Principat) a su accompagner
la dynamique de la normalisation de la situation de catalan en se transformant
et en se diversifiant, si bien qu’il est difficile aujourd’hui de parler d’une
sociolinguistique catalane.
D’une part on doit constater que le processus de normalisation
sociolinguistique, incontestablement favorable à l’extension des usages du catalan,
a eu pour conséquence d’institutionaliser, de « bureaucratiser » en quelque
sorte la sociolinguistique en Catalogne. De nombreux étudiants formés par des
spécialistes dans les universités catalanes ont trouvé des débouchés dans les divers
dispositifs mis en place dès le début des années quatre-vingts. L’action militante
des sociolinguistes a pu s’émousser avec l’apparition d’une « sociolinguistique
fonctionnarisée », « laissant […] à l’écart la sociolinguistique critique » (Leprêtre
& Bañeres 2002, p. 121). De fait la dimension démolinguistique a, me semble-t-il,
tendu à prendre le dessus sur la dimension théorique et méthodologique, au sein
de la production éditoriale de nature sociolinguistique (voir par ex. Querol 2007 ;
pour une synthèse voir Torres i Pla 2011)10.
À cet égard, un travail comme celui d’Emili Boix (Boix Fuster 1993) est
exemplaire. En mettant en évidence (avec d’autres), comme il a été indiqué plus
haut, un certain refus du monolinguisme et une pratique aléatoire de l’alternance de
langues parmi les jeunes scolarisés dans les deux langues officielles de Catalogne
(castillan et catalan) et en analysant la motivation de cette pratique, de même
que ce qu’elle peut signifier pour l’avenir de la configuration sociolinguistique
barcelonaise, cet universitaire de la « deuxième génération » de la SDC a ainsi
ouvert la voie à une nouveau cycle scientifique. Le titre de son ouvrage est du
reste implicitement une prise de position épistémologique : Triar no és trair
(« Choisir n’est pas trahir ») : le temps de l’affirmation communautaire au travers
d’un comportement conversationnel est sûrement révolu, la jeune génération ayant
connu d’autres circonstances ethnosociolinguistiques que ses aînés qui avaient

10 Il ne faut cependant pas minorer toute une production sociolinguistique catalane


variationniste. (Voir Padilla Cardona 2011)
38 Henri Boyer

subi le franquisme et vécu la revendication sociolinguistique. Est-ce à dire que les


« schèmes identitaires [sont] dépassés »? À tout le moins on peut soutenir qu’il
n’est « guère raisonnable […] de persister dans l’idée d’une identité catalanophone
imperméable. » (Nicolas i Amoros 2000, p. 181).
De même si l’implication du sociolinguiste reste une singularité revendiquée
par les sociolinguistes du domaine catalan, de nouvelles exigences s’expriment,
qui prennent acte des évolutions sociétales et scientifiques durant les dernières
décennies, en Catalogne et en Espagne en particulier. Plutôt que pour une « science
connotée » (affectivement) revendiquée par Badia i Margarit dans les années
soixante-dix (Badia i Margarit 1976) et parfaitement légitime à cette époque, la
sociolinguistique en Catalogne peut opter aujourd’hui pour un positionnement plus
sobre et rigoureux, tel que l’exprime Emili Boix dans l’étude citée précédemment :
Dans notre pays la sociolinguistique est apparue engagée, ennemie de
neutralismes face au conflit linguistique dans les Pays Catalans, avec le désir
d’intervenir dans les projets de récupération nationale et sociale. L’étude que
je présente ici veut poursuivre dans cette tradition d’intérêts pour les affaires
collectives, mais je veux l’associer avec des exigences de rigueur. Je crois
que les émotions et les passions sont nécessaires pour mettre et maintenir les
moteurs en marche, mais que, ensuite, il faut savoir où sont les problèmes et
avoir des données pour pouvoir se prononcer en essayant de ne pas confondre
nos descriptions avec nos espoirs. (Boix 1993, p. 13 ; c’est moi qui souligne)11.

L’avenir de cette sociolinguistique, à l’origine si singulière, est donc aujourd’hui


très ouvert.

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11 D’aucuns pourront voir ici l’expression d’une certaine réserve par rapport aux positions
qu’exprimait Badia i Margarit (1976).
Singularité(s) de la sociolinguistique du domaine catalan 39

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